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LE CONTRÔLE DU LEVIER AGRÉGÉ Un nouveau défi pour les autorités de supervision Sonia Ondo-Ndong et Sandra Rigot Presses de Sciences Po | Revue économique 2010/3 - Vol. 61 pages 451 à 461 ISSN 0035-2764 Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-economique-2010-3-page-451.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Ondo-Ndong Sonia et Rigot Sandra, « Le contrôle du levier agrégé » Un nouveau défi pour les autorités de supervision, Revue économique, 2010/3 Vol. 61, p. 451-461. DOI : 10.3917/reco.613.0451 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Presses de Sciences Po. © Presses de Sciences Po. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. 1 / 1 Document téléchargé depuis www.cairn.info - National Chung Hsing University - - 140.120.135.222 - 10/04/2014 17h49. © Presses de Sciences Po Document téléchargé depuis www.cairn.info - National Chung Hsing University - - 140.120.135.222 - 10/04/2014 17h49. © Presses de Sciences Po

Le contrôle du levier agrégé

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LE CONTRÔLE DU LEVIER AGRÉGÉUn nouveau défi pour les autorités de supervisionSonia Ondo-Ndong et Sandra Rigot Presses de Sciences Po | Revue économique 2010/3 - Vol. 61pages 451 à 461

ISSN 0035-2764

Article disponible en ligne à l'adresse:

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-economique-2010-3-page-451.htm

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Pour citer cet article :

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Ondo-Ndong Sonia et Rigot Sandra, « Le contrôle du levier agrégé » Un nouveau défi pour les autorités de

supervision,

Revue économique, 2010/3 Vol. 61, p. 451-461. DOI : 10.3917/reco.613.0451

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Distribution électronique Cairn.info pour Presses de Sciences Po.

© Presses de Sciences Po. Tous droits réservés pour tous pays.

La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites desconditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votreétablissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière quece soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur enFrance. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.

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Un nouveau défi pour les autorités de supervision

1Sonia Ondo-Ndong* Sandra Rigot*

La crise de l’été 2007 a montré les limites du modèle « originate and distri-bute » qui a conduit à l’extension du nombre de participants au marché et révélé une utilisation excessive du levier par certaines institutions financières. Or, ces dernières sont en dehors du périmètre de supervision bancaire. L’objectif de cet article est de proposer un nouvel indicateur macro-prudentiel avancé simple qui permettra aux autorités de supervision de contrôler l’usage excessif du levier, source de risque systémique. À cet effet, nous faisons une série de régressions logit en nous appuyant sur la littérature des modèles de détection précoce des crises. Nous montrons que le levier est un meilleur indicateur de l’excès d’offre de crédit quand il prend en compte le plus grand nombre de types d’institutions financières possible. Nous pouvons aussi retenir que, malgré sa simplicité, cet indicateur prédit correctement l’occurrence de périodes de tension sur un horizon de un an ou deux ans.

CONTROLLING THE GLOBAL LEVERAGE: A NEW CHALLENGE FOR REGULATORY AUTHORITIES

The current crisis has underlined the failure of the credit economy based on the investment banking model which has promoted the extension of market partici-pants and, an increased use of leverage. The agents responsible for the excessive leverage are out of the scope of supervisors. The aim of this paper is to put forward a relevant indicator which will enable supervisors to control the excessive use of leverage which gives rise to systemic risk. We suggest the aggregated leverage ratio as a new simple macro-prudential tool for regulatory authorities. To achieve this goal, we perform logit regressions in line with Early Warning System models. An important result is that leverage is a better indicator when it takes into account the more financial institutions as possible. Our indicator seems to predict correctly stress periods over one year and two year horizons despite its simplicity.

Classification JEL : C 52, G21, G24, G28

* EconomiX, Université de Paris Ouest Nanterre la Défense, 200, avenue de la République, 92001 Nanterre Cedex. Courriels : [email protected] ; [email protected]

Les auteurs remercient Messaoud Zouikri pour son aide.

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INTRODUCTION

La crise de l’été 2007 a montré les limites de l’économie de crédit basée sur le modèle «originateanddistribute» des banques d’investissement. Elle a en effet révélé l’utilisation excessive du levier par certaines institutions financières comme les banques d’investissement, les SpecialInvestmentVehicles (sivs) et les hedgefunds.Le processus d’innovations financières continu depuis les années 1980 a mené à une vague de nouveaux produits structurés avec la titrisation de nombreux prêts et à l’extension du nombre de participants au marché avec l’émergence d’un système bancaire parallèle qui joue depuis ces dernières années un rôle croissant. Ce système bancaire parallèle se compose d’institutions financières à fort levier et faiblement régulées, sans basede dépôts, et dont le financement repose entière-ment sur les marchés de gros. Or, ces institutions à fort levier sont paradoxalement celles sur lesquelles les superviseurs ont le moins de contrôle (Hellwig [2008]).

Comme le levier peut être une source de risque systémique principalement en raison de son caractère procyclique, il semble essentiel, pour les autorités de supervision, de trouver un moyen de limiter l’usage excessif du levier. Parallè-lement, on constate que les agrégats monétaires ne permettent plus aux super-viseurs d’observer l’évolution réelle de l’endettement de l’économie. Pour ce faire, il convient d’ajouter le levier des banques d’investissement, des sivs et des hedge funds, à celui des banques commerciales. Ces institutions peuvent en effet bénéficier d’un énorme effet de levier et l’utiliser pour maximiser leur rendement, motivées par un optimisme sans faille.

Cet article a deux principaux objectifs. Le premier consiste à proposer un nouvel indicateur macro-prudentiel avancé pour détecter la formation de vulné-rabilités dans les systèmes financiers. L’idée est de mettre en place un indicateur simple qui permettra aux autorités de supervision de contrôler le niveau du levier des grandes institutions financières. Le deuxième objectif revient à démontrer qu’il faut étendre le périmètre de la supervision à toutes les institutions effectuant des activités financières potentiellement systémiques, comme c’est par exemple le cas pour les hedgefunds, les sivs ou encore les banques d’investissement.

Après un bref rappel des raisons qui font du levier un élément amplificateur du risque systémique qu’il est essentiel de contrôler, nous tirerons les leçons de la crise récente en ce qui concerne la supervision prudentielle avec un accent parti-culier porté à la nécessité de renforcer la supervision macro-prudentielle. Ensuite, nous proposerons un ratio de levier agrégé dont nous testerons la validité en nous appuyant sur la littérature sur les systèmes de détection précoce des crises. Pour cela, nous utilisons des régressions de type logit qui nous permettront, dans un premier temps, de mesurer la capacité de notre indicateur à détecter les périodes de prise de risque excessive puis, dans un second temps, de comparer sa capacité à expliquer l’occurrence de périodes de tension à celle des ratios de capital qui existent aujourd’hui en matière de supervision bancaire.

L’ESSOR DES MARCHÉS DE DÉRIVÉS DE CRÉDIT ET DE LA TITRISATION

Depuis les années 1980, on observe un essor des marchés de transfert de risques. Cette tendance s’est accélérée depuis le début des années 2000 jusqu’à l’éclatement de la crise actuelle. La croissance la plus importante parmi les

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produits structurés concerne les mbss (Mortgage-backedsecurities), les abss (Asset-backedsecurities), les cdos (Collateraliseddebtobligation) et les cdss (Creditdefaultswaps).

Pourquoi s’intéresser à l’essor de la titrisation ? Parce que l’essor de la titri-sation et la possibilité de transférer les risques ont changé le comportement des banques. Au-delà des conditions macroéconomiques favorables, de la faiblesse des taux d’intérêt et de l’abondance de la liquidité, cette croissance exponentielle peut s’expliquer, d’une part, par la marchéisation de l’économie et, d’autre part, par la modification du cadre réglementaire (Brunnermeier [2008]).

La mise en œuvre de Bâle I et l’abrogation du GlassSteagallAct constituent les deux principaux changements réglementaires. Bâle I a renforcé les exigences en capital. Étant donné qu’une hausse de capital peut s’avérer coûteuse, les insti-tutions financières préfèrent baisser leurs expositions aux risques pour satisfaire les nouvelles exigences. La titrisation permet ainsi aux banques de modifier leur profil de risque. L’abrogation du GlassSteagallAct, en 1999, a entraîné une transformation du business modèle des banques. Elles sont passées du modèle «originateandhold» à celui «originatetodistribute», ce dernier étant associé à de nouvelles pratiques bancaires. L’abrogation du GlassSteagallAct a également amélioré la technologie des services financiers, favorisant de nouvelles opportu-nités de placements. En conséquence, les produits dérivés et les titres complexes sont devenus très attrayants et ont donc vu leur demande augmenter.

Une des caractéristiques traditionnelles des banques consiste à emprunter à court terme et à prêter à long terme. L’innovation financière a créé des possi-bilités de placements alternatifs pour les déposants et pour les emprunteurs (Mishkin et Edwards [1995]). L’activité traditionnelle bancaire est devenue par conséquent moins profitable. Pour survivre et garantir leur niveau de profit, les banques se sont tournées vers des revenus sous forme de commissions. Jusqu’à la crise, les banques qui avaient utilisé les techniques de titrisation pensaient qu’elles pouvaient engranger des profits sans porter de risque en contrepartie. La crise a révélé que ces banques avaient sous-estimé l’augmentation des risques de contrepartie et de liquidité associés à ces produits complexes et opaques vendus sur des marchés de gré à gré. Ce modèle «originate todistribute» a été une incitation à une utilisation excessive du levier.

L’EXTENSION DU RÉSEAU DE CONTREPARTIE : UN FACTEUR D’AMPLIFICATION DU RISQUE SYSTÉMIQUE

Nous allons maintenant nous intéresser aux hedgefunds, aux banques d’inves-tissement et aux sivs en raison de leur rôle croissant dans le marché du crédit. Ces intermédiaires ont deux points communs : un levier excessif et une réglementa-tion allégée, voire inexistante. Ils appartiennent à ce qu’on appelle le système de banques parallèles. Malgré une structure similaire à celle des banques (actif illi-quide de long terme et passif liquide de court terme), ces institutions ne sont pas considérées comme des banques et, en conséquence, ne sont pas réglementées par les autorités de supervision bancaire.

Le levier des banques d’investissement vient de l’émission croissante des abcp (assetbackedcommercialpaper) pour acheter des titres de dette de long

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terme. Les sivs bénéficient d’un important levier grâce à leur structure de bilan. Leur levier provient de l’émission d’abss, de mbss et de cdos pour financer les abcp émis par les banques originatrices. Le levier des hedgefunds vient des dérivés de crédit et des tranches subordonnées de cdo. D’où un levier illimité (Blundell Wignall [2007b]).

Le caractère potentiellement systémique du levier s’explique essentiellement par le fait que ces institutions gèrent leur levier d’une manière active. Cette gestion active du levier le rend procyclique. Quand la taille du bilan change suite à une variation des prix de marché ou à la décision d’une institution individuelle de limiter ses prêts/emprunts, les banques dans leur ensemble vont ajuster leur levier. Le levier amplifie donc à la fois les gains et les pertes en fonction de la position dans le cycle financier. Ce processus est considéré comme une source de fragilité. La seconde caractéristique qui rend le levier potentiellement systé-mique est liée au fait que chacune de ces institutions à fort levier s’appuie sur des emprunts à court terme. Cette dépendance à l’emprunt à court terme rend ces institutions plus vulnérables à l’apparition de perturbations sur la liquidité de marché.

Au-delà de l’extension du réseau de contreparties, la croissance de la titrisa-tion et des marchés de dérivés de crédits permet aux banques d’investissement et à l’ensemble des banques parallèles de bénéficier d’un levier quasiment illimité. L’énorme levier auquel elles ont accès grâce à l’innovation financière alimente le processus cumulatif entre la hausse du crédit et l’accroissement des prix des actifs. Cette dynamique se traduit par une augmentation du risque systémique. L’instabilité financière est exacerbée par cette utilisation excessive du levier et par son caractère procyclique (Borio etal. [2001]). Le nouveau modèle de la finance a donc augmenté le risque de contagion et donc par conséquent le risque systémique.

Durant la phase haussière du cycle, les prix des actifs collatéralisés augmen-tent. Plus le prix de ces actifs augmente, plus les banques sont incitées à octroyer de nouveaux prêts et plus la demande de ces actifs augmente. Ce processus tend à augmenter la taille du bilan de ces institutions financières et à baisser méca-niquement leur levier (Adrian et Shin [2008]). Les institutions financières vont donc acheter une plus grande quantité d’actifs pour se rapprocher de leur levier cible. Cet ajustement va entraîner une nouvelle hausse des prix des actifs qui va se traduire par une nouvelle hausse de la taille de leur bilan (positivefeedback). Durant les périodes baissières, on observe une évolution inverse à celle précé-demment décrite. En effet, durant les périodes basses du cycle, le processus de réajustement du levier va générer une vague de ventes en détresse qui va alimen-ter la crise. De plus, la combinaison de la liquidité avec le levier est une formule explosive pouvant mener à d’énormes difficultés. Elle favorise une rapide exten-sion de la crise. On observe donc un processus de deleveraging généralisé qui va conduire au gel de la liquidité des marchés de financement. Dès lors, on observe une hausse du coût d’emprunt qui peut provoquer un ralentissement de la croissance économique (Brunnermeier [2008]).

En tant que principaux opérateurs sur les marchés de dérivés de crédits et de titrisation, les banques voient leur risque de contrepartie augmenter. La hausse de la titrisation a changé la nature du risque de contrepartie. L’explosion de la titrisation et des marchés de dérivés de crédits a créé des interactions entre les banques et les institutions financières à fort levier et a renforcé celles existantes. Les banques d’investissement subissent un risque de contrepartie d’une part via

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leurs relations avec les sivs et, d’autre part, via leurs relations avec les hedgefunds. Ces deux canaux de transmission révèlent le caractère systémique des sivs et des hedgefunds.

La crise affecte l’économie réelle quand les pertes des banques d’investis-sement se répercutent sur les banques commerciales (risque systémique). Ces dernières doivent alors reconstituer leur capital. Les banques deviennent réti-centes à distribuer de nouveaux prêts car ces derniers représentent de nouveaux risques. On assiste donc à une contraction généralisée de l’offre de crédits. Cette raréfaction du crédit entraîne un ralentissement économique et une hausse du chômage qui ont pour conséquence un effondrement de la consommation et des profits des entreprises.

VERS UN INDICATEUR DE LEVIER SIMPLE

Les supervisions microprudentielle et macroprudentielle sont liées à plusieurs niveaux. Le principal objectif de la supervision microprudentielle consiste à contrôler les institutions financières individuelles et à prévenir leurs défaillances pour protéger les consommateurs. Bâle 1 était, jusqu’en 2008, le cadre réglemen-taire des banques commerciales. Le principal instrument de supervision est le ratio de capital ajusté aux risques. Les banques commerciales américaines sont en plus de ce ratio soumises à un ratio de levier simple dans le cadre de la poli-tique d’actions correctives précoces. Les décideurs politiques et les superviseurs s’appuient sur une supervision indirecte pour les hedge funds via leurs primebrokers. En effet, la plupart des contreparties des hedge funds sont régulées. La régulation des hedgefundsrepose sur la promotion de guidelines de bonnes pratiques (via des divulgations d’informations volontaires). Aux États-Unis, les banques d’investissement sont soumises à des exigences de fonds propres et de divulgation moins contraignantes (auprès de la sec) que les banques commer-ciales. Quant aux sivs, il est difficile de trouver des informations sur leurs activi-tés, étant donné leur opacité. Ils ne sont soumis à aucune exigence de divulgations d’informations à une autorité de supervision. En conséquence, on observe que les institutions financières ayant le plus fort levier sont paradoxalement celles sur lesquelles les superviseurs ont le moins de contrôle.

Pendant la crise financière de 2007-2008, la réglementation microprudentielle a montré ses limites. La principale question n’est plus de savoir si la régulation est adaptée ou non mais plutôt de savoir quels sont les objectifs de la régulation et quel devrait être le périmètre de la régulation. Cet intérêt croissant pour le risque systémique suggère qu’il faut développer un nouveau volet dans la réglementa-tion prudentielle. Ce nouveau volet pourrait, par exemple, être la réglementation macroprudentielle qui, jusqu’à présent, est restée relativement marginale par rapport à la réglementation microprudentielle. Le fait que le système financier dans son ensemble puisse être exposé à des risques communs n’est pas toujours pris en compte. La supervision macroprudentielle dont l’objectif est d’assurer la stabilité du système financier dans son ensemble devrait permettre de mieux appréhender les effets de contagion. Il y a aujourd’hui un consensus international sur la nécessité de renforcer cette supervision (Rapport De Larosière [2009]). C’est dans cet esprit que se place notre article.

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La supervision macroprudentielle a été prise en compte dans la littérature empi-rique avec le développement des travaux sur les systèmes de détection précoce des crises bancaires et financières. Un des principaux résultats qui émane de ces travaux est que les variables macroéconomiques comme le taux de croissance du pib réel, le taux d’inflation, le taux d’intérêt réel, le surplus fiscal ou encore le ratio des réserves de la banque centrale sont clairement associées avec la réalisation de problèmes systémiques dans le secteur bancaire. Un autre résultat important est que les variables camels, qui sont des variables financières telles que les ratios de capital, les ratios de liquidité ou encore les prix de l’immobilier, sont également de bons indicateurs avancés de crises bancaires et financières. Dans la plupart de ces travaux, les auteurs utilisent un échantillon composé de plusieurs pays observés sur plusieurs années.

Dans ces différents travaux1, on peut distinguer deux approches : l’approche dite d’« extraction de signal » qui a été utilisée, par exemple, par Kaminsky et Rheinart, et l’approche des modèles à réponse qualitative. Dans notre étude, nous choisissons de faire des régressions logit dans la lignée de la deuxième approche parce qu’un certain nombre de travaux comme ceux de Berg et Patillo ou encore de Davis ont montré que l’approche des modèles à réponse qualita-tive domine celle de l’extraction de signal pour détecter les crises bancaires et monétaires. Dans ces modèles, on utilise des régressions logit ou probit pour estimer la relation entre les différents indicateurs potentiels et l’occurrence d’une crise bancaire ou financière et, la variable expliquée est une variable qualitative qui peut prendre la valeur 1 ou 0. Cette méthode a par exemple été utilisée par Demirgut-Kunt et Detragiach [1998, 1999, 2005] ou encore par Davis, Karim et Barell [2008].

Pour observer le niveau de l’endettement total dans l’économie, il nous semble nécessaire d’ajouter au montant du crédit bancaire le levier des banques commerciales ainsi que celui des institutions issues du système bancaire paral-lèle. C’est pourquoi nous construisons un indicateur de levier agrégé que nous appelons Ratio de Levier Agrégé (rla) et qui se compose du levier des banques commerciales et du levier des banques d’investissement. La formule que nous utilisons pour estimer le levier agrégé est le ratio du total des actifs sur le total des fonds propres. Cette formule s’appuie sur l’approche de la régulation pruden-tielle dans laquelle les fonds propres sont considérés comme une variable pivot (Adrian et Shin [2008]).

Bien qu’il soit nécessaire de bien prendre en compte toutes les institutions financières à fort levier pour avoir une vision réaliste de l’endettement, nous n’intégrerons pas les hedge funds et les sivs dans nos calculs pour plusieurs raisons. En ce qui concerne les hedge funds, nous ne les intégrons pas parce que leur levier se calcule par stratégie. Or, cette méthode de calcul du levier n’est pas directement comparable avec notre approche du levier qui est plutôt basée sur les bilans des institutions financières (Blundell-Wignall [2007a]). De plus, les données sur les fonds propres et les actifs des hedgefunds ne sont pas disponibles. En ce qui concerne les sivs, le manque de transparence inhérent à

1. Pour une revue de littérature, voir les articles de Bell, Pain, « Leading indicator models of banking crisis: a critical review », fsr, décembre 2000 ; Bhattacharyay, « Towards a macro- prudential leading indicators framework for monitoring financial vulnerability », cesifo WorkingPaper n° 1015, 2003, et imf International Monetary Fund, « Are Credit Booms in Emerging Markets a Concern? », WorldEconomicOutlook, 2004, p. 148-166.

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ces véhicules ne nous permet pas d’obtenir les informations nécessaires pour notre calcul.

Nous tirons les données que nous utilisons pour calculer le levier des banques commerciales des rapports trimestriels publiés par le fdic. En ce qui concerne les banques d’investissement, nous agrégeons les fonds propres, d’une part, et les actifs, d’autre part, de quatre des plus grandes banques d’investissement pour avoir le chiffre agrégé, à savoir Bear Stearns, Morgan Stanley, Merrill Lynch et Lehman Brothers. Il est en effet largement admis que cela nous permet d’avoir une vision assez réaliste de l’industrie des banques d’investissement, car ces dernières représentent environ 70 % de cette industrie. Pour les banques d’investissement, nous nous servons des données issues des rapports trimestriels que ces banques ont l’obligation de transmettre à la sec.

En observant l’évolution du levier des banques commerciales, des banques d’investissement et du levier agrégé de ces deux types d’institutions sur la période 2000-2008, nous observons que le levier des banques d’investisse-ment sur la période correspond au double du levier des banques commerciales. Cette différence dans le niveau du levier peut s’expliquer par le fait que les banques d’investissement jouissent de plus de liberté dans leur action du fait qu’elles sont soumises à une réglementation moins stricte que celle des banques commerciales. Ce résultat souligne l’importance d’intégrer les autres grandes institutions financières non régulées dans le périmètre d’action des autorités de supervision.

Ce premier constat nous laisse penser qu’un indicateur de levier agrégé simple dans l’esprit de celui que nous allons construire pourrait être un outil de supervi-sion utile. Nous allons maintenant essayer de confirmer cette observation grâce à l’analyse de régressions de type logit. Pour démontrer qu’un ratio de levier agrégé est un bon indicateur avancé pour détecter l’excès de crédit dans l’écono-mie, nous faisons cinq régressions logit sur la période 1994-2008. Les données que nous utilisons sont des données trimestrielles. Notre modèle est une exten-sion du modèle fait par Barell, Davis, Karim et Liadze dans un article de 2008. L’intérêt de leur modèle réside dans le fait qu’ils commencent à tirer les leçons de la crise récente en intégrant dans leurs variables un ratio de levier agrégé. Dans notre travail, nous testons tout comme eux un ratio de levier agrégé à la différence que le ratio de levier agrégé que nous considérons intègre à la fois le levier des banques commerciales et des banques d’investissement. De plus, nous concentrons notre étude sur le cas des États-Unis sur la période 1994-2008.

En ce qui concerne la variable expliquée, l’événement que nous considérons n’est pas l’occurrence d’une crise bancaire systémique comme c’est le cas dans la plupart des modèles de détection des crises bancaires mais, plutôt, l’apparition d’une période de tension sur les marchés financiers. Nous prenons ce parti non seulement parce que, durant la période étudiée (1994-2008), il n’y a pas eu de crise bancaire systémique aux États-Unis mais aussi parce que nous savons que, bien que les crises bancaires soient des phénomènes rares dans les pays dévelop-pés, cela n’empêche pas ces économies d’être soumises à des périodes de fortes perturbations financières. Pour définir les périodes de stress, nous construisons un indice qui se compose de deux variables qui caractérisent les périodes pré-crise : une variable représentant la hausse de la prise de risque par les banques et une variable représentant l’optimisme excessif de ces mêmes banques. La variable représentative du risque est le ratio des prêts non performants sur le

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total des prêts et la variable représentative de l’optimisme excessif est le ratio du crédit domestique sur le pib.

Nous calculons notre indice en nous appuyant sur la formulation classique suivante (Hanschel et Monnin [2008]) où k est le nombre de variables dans l’indice, Mi la moyenne de la variable Xi et vi son écart type.

I X M,, ,

t t i i ii k1

= v-f=

_ i/ .

Cela nous permet d’identifier quatre périodes de tension sur les marchés financiers américains sur la période étudiée qui correspondent bien aux périodes de tension reconnues dans la littérature. La première période identifiée est la période allant de T3 1994 à T4 1994. Elle correspond à une période de réces-sion économique aux États-Unis. La deuxième période identifiée est la période allant de T1 2000 à T4 2000. Elle correspond à l’éclatement de la bulle sur les nouvelles technologies. La troisième période identifiée est la période allant de T1 2002 à T4 2004. Cette période correspond aux conséquences sur la sphère réelle de la crise des nouvelles technologies. La dernière période identifiée est la période allant de T3 2006 à T1 2008 et qui correspond à la crise financière récente. Nous décidons de coter 1 quand on détecte une période de tension et 0 dans le cas contraire.

Comme dans la plupart des travaux sur les modèles de détection précoce des crises, nous considérons, d’une part, des variables macroéconomiques et, d’autre part, des variables financières. Les variables macroéconomiques que nous consi-dérons sont le taux d’intérêt réel (r), le taux d’inflation (i), le taux de croissance du pib réel (gdpg), le surplus fiscal (fs) et le ratio de M2 sur les réserves (M2R). En ce qui concerne les variables financières, nous considérons le ratio de liqui-dité des banques (lr), un indice des prix de l’immobilier (hpi) et notre ratio de levier agrégé des institutions bancaires (rla). Nous nous servirons également dans notre analyse de trois variables supplémentaires qui sont le taux de crois-sance réel du crédit (cg), le ratio des fonds propres ajustés aux risques (rbcr) et le ratio de levier agrégé des banques commerciales (cblr). Les données que nous utilisons pour ces variables sont issues des statistiques internationales du fmi à l’exception des données sur le ratio de liquidité et sur le ratio des fonds propres ajustés aux risques qui sont issues des données historiques trimestrielles publiées par le fdic.

Nous faisons donc cinq régressions logit que nous numérotons de 1 à 5. Nous commençons dans le modèle 1 par faire une régression qui ne comporte pas de variable représentative du niveau de l’endettement, c’est-à-dire de l’optimisme. Dans les régressions allant de 2 à 4, nous intégrons successivement et alternati-vement différentes variables susceptibles de représenter l’endettement, à savoir notre ratio rla, le ratio des fonds propres ajustés aux risques et le taux de crois-sance réel du crédit. L’objectif ici est de comparer l’impact des variables tradi-tionnellement utilisées dans la littérature pour représenter l’endettement, sur la probabilité d’occurrence de périodes de tension avec celui de l’indicateur que nous proposons à cet effet.

Dans un second temps, nous partons du postulat qu’un ratio de levier est un meilleur indicateur du niveau de l’endettement et nous comparons l’impact de ce ratio sur la probabilité d’occurrence de périodes de tension selon que l’on consi-dère uniquement les banques commerciales ou que l’on élargisse le périmètre des institutions financières considérées. L’objectif ici est de démontrer que plus on

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prend en compte des catégories différentes d’institutions financières, plus le ratio de levier agrégé est un bon signal d’excès de crédit. Nous finissons notre analyse économétrique en testant le pouvoir prédictif de l’indicateur de ratio agrégé que nous avons construit sur un horizon de un an puis de deux ans. L’objectif ici est de montrer que le ratio de levier agrégé que nous avons construit peut être un bon indicateur avancé de périodes de tension sur les marchés financiers et donc qu’il pourrait être utilisé comme un instrument de supervision macroprudentielle.

Résultats

À l’aide de nos résultats nous observons tout d’abord qu’il y a une relation positive et significative entre le rla et la probabilité d’occurrence de période de tension. Ce résultat est cohérent avec le caractère procyclique du levier.

Tableau. Estimations Logit, périodes de tensions financières (1994-2008)

Modèle (1) base

Modèle (2)rla

Modèle (3)cg

Modèle (4)rbcr

Modèle (5)cblr

gdpg (– 1) – 0.2639*** – 0.3494*** – 0.4836*** – 0.3082*** – 0.2866***

R 0.0794*** – 1.1032*** 0.2651*** 0.7519*** – 0.3709***

I – 0.4291*** – 0.04848*** – 0,3799*** – 0.2818*** – 2.7085***

fs – 64.9965*** – 52.5403*** 149.1197*** – 53.6182*** – 60.5526***

M2R – 0.5697*** – 0.5169*** – 1.5927*** – 1.2839*** 0.1172***

lr 0.6577*** 0.5021*** 0.8502*** 0.9879*** 0.8753***

hpi – 0.1206*** 0.092*** – 0.1629*** 0.1836*** 0.0021***

rla 9.3056***

cg – 0.609***

rbcr 4.4665***

cblr 6.789***

C – 7.3395*** 137.6641*** – 0.6379*** – 65.5577*** 109.7533***

Mc fadden R2 0,3275*** 0.5042*** 0.4947 0.3683 0.4702***

Crises correctement prédites (%)

80.95 76.19 71.43 70.67

Fausse alerte (%) 19,05 23.81 28.57 29.33

Mc fadden R2 (1Y) 0.208

Crises correctement prédites (%) (1Y)

60

Fausse alerte (%) (1Y) 40

Mc fadden R2 (2Y) 0.2648

Crises correctement prédites (%) (2Y)

60

Fausse alerte (%) (2Y) 40

Source : calculs des auteures.

Nous constatons également que le fait d’introduire une variable représentative du niveau d’endettement apporte une information supplémentaire car le R2 des modèles 2, 3 et 4 est à chaque fois supérieure à celui du modèle 1 (modèle de

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base). En comparant le rla avec le ratio de fonds propres ajustés aux risques et le taux de croissance réel du crédit, on voit que, selon le critère du R2, le rla semble être la meilleure expression de l’endettement. On a, en effet, un R2 de 0.504 dans le cas du rla contre 0.494 pour cg et 0.368 pour rbcr. Ce résultat est confirmé par le critère des fausses alertes. En effet, dans le modèle 2, 80 % des périodes de tension ont été correctement prédites contre 76,19 % pour le modèle 3 et 71,43 % pour le modèle 4.

En comparant le rla et le cblr, on voit que, selon le critère du R2, le rla domine le cblr (0.504 contre 0.47). Cela signifie que le levier est un meilleur indicateur du niveau de l’endettement quand il prend en compte le plus grand nombre de catégories d’institutions financières possible, c’est-à-dire ici les banques d’investissement en plus des banques commerciales. Ce résultat est confirmé par le critère des fausses alertes. En effet, on voit que, dans le modèle 2, 80 % des périodes de tension ont été correctement prédites contre 76,19 % pour le modèle 5. L’analyse du pouvoir prédictif du rla nous montre que, sur un horizon de un an comme sur un horizon de deux ans, le rla semble prédire correctement les périodes de tension. On voit, en effet, que 60 % des périodes de tension ont été correctement prédites sur un horizon de un an. Les résultats sont exactement les mêmes sur un horizon de deux ans. Cela nous permet de conclure que le rla peut être un bon indicateur avancé de la formation de vulnérabilités financières.

Ce résultat confirme donc bien notre intuition selon laquelle un ratio de levier agrégé simple peut être un indicateur complémentaire pour déclencher l’inter-vention des autorités de supervision. Cette simplicité peut même être considé-rée comme un avantage, car c’est une caractéristique préconisée pour les ratios utilisés dans le cadre de l’action corrective précoce américaine. En plus de sa simplicité, il est peu coûteux à construire et par conséquent facile à mettre en place (Estrella etal. [2000], Hildebrand [2008]).

CONCLUSION

En résumé, nous pouvons dire que la relation entre le levier des institutions financiers et la probabilité d’occurrence de périodes de tension est positive et significative et donc que nos résultats confirment le caractère procyclique du levier. Un autre résultat important est que le levier est un meilleur indicateur de l’excès d’offre de crédit quand il prend en compte le plus grand nombre d’ins-titutions financières possible. Cela confirme la nécessité d’élargir le périmètre de la supervision prudentielle à toutes les entités exerçant une activité financière de nature potentiellement systémique même si ces dernières n’ont pas de lien direct avec le grand public. Enfin, nous pouvons également retenir que, malgré sa simplicité, le rla prédit correctement l’occurrence de périodes de tension sur un horizon de un an et de deux ans ; ce qui nous permet de le proposer en tant qu’indicateur complémentaire servant à déclencher l’action des autorités de supervision. Ces résultats bien qu’intéressants sont tout de même à relativiser, notamment du fait de la faiblesse de notre échantillon.

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