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Uretère, rétropéritoine Le dépistage anténatal des ectasies pyéliques, souvent dues à un reflux vésico-urétéral dépisté après la naissance. Analyse d’une série de 159 dépistages en 4 ans dans une unité mère–enfant A follow up study of prenatally detected vesico-ureteric reflux T. Merrot a, *, H. Zerhouni a , K. Chaumoître b , C. D’Ercole c , C. Gire d , P. Alessandrini a a Service de chirurgie infantile, pavillon mère–enfant, université de la Méditerranée, CHU Nord, chemin des Bourrelly, 13015 Marseille, France b Service de radiologie, pavillon mère–enfant, université de la Méditerranée, CHU Nord, chemin des Bourrelly, 13015 Marseille, France c Service de gynécologie–obstétrique, pavillon mère–enfant, université de la Méditerranée, CHU Nord, chemin des Bourrelly, 13015 Marseille, France d Service de néonatologie, pavillon mère–enfant, université de la Méditerranée, CHU Nord, chemin des Bourrelly, 13015 Marseille, France Reçu le 7 juin 2002 ; accepté le 26 août 2002 Résumé Les auteurs rapportent leur expérience sur la prise en charge périnatale du reflux vésico-urétéral et son devenir au sein d’une unité mère–enfants. Patients et méthodes. – Trente–cinq nouveau-nés porteurs d’un reflux vésico-urétéral parmi une cohorte de 159 des enfants nés vivants entre janvier 1997 et décembre 2001, ayant eu un dépistage anténatal ont été analysés. Tous ces nouveau-nés ont eu une échographie de l’appareil urinaire au 5 e jour de vie, une cystographie rétrograde au 15 e jour si le bassinet mesurait au moins 10 mm de diamètre. Résultats. – Le sex-ratio était de 2,5 garçon pour une fille. Le reflux vésico-urétéral était bilatéral chez 11 patients soient 46 unités rénales refluantes, primitif chez 13 patients. Soixante-douze pour cent des reflux sont de grade supérieur ou égal à III et tous les reflux de grade V sont observés exclusivement chez des garçons. On note une disparition spontanée du reflux vésico-urétéral chez huit patients (18 %) après une prise en charge médicale de 12 à 36 mois. Il s’agissait des trois reflux de grade I, deux de grade II, deux de grade III et un de grade IV. Dix-sept réimplantations ont été réalisées dont sept avant l’âge d’un an en raison d’infections urinaires sévères malgré un traitement médical bien conduit. Quatre néphrectomies totales ont été pratiquées. À noter, deux néphrectomies partielles pour des pyélons refluants non fonctionnels sur duplicité. Dix unités refluantes chez sept patients sont encore sous surveillance pour un reflux modéré de grade II et III. Conclusion.– Cette étude confirme la prédominance chez le garçon du reflux vésico-urétéral dépisté avant la naissance ainsi que sa résolution spontanée ou son amélioration pendant les trois premières années de la vie, même pour des reflux vésico-urétéraux sévères (grade III–V). © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract To describe the pre- and post-natal management of vesico-ureteric reflux in a propective study of babies presenting with vesico-ureteric reflux suspected from pre-natal ultrasonography in a tertiary paediatric center. Patients and methods. – Between 1997 and 2001, 35 children (25 boys and 10 girls) with were vesico-ureteric reflux followed for 12 to 36 months after the pre-natal detection of urinary tract anomalies. Ultrasound examination was realized at the 5th of life, retrograde cystography at the 15th if the renal pelvic dilatation measured at least 10 mm of diameter. In 11 the reflux was bilateral and 46 refluxing units were reviewed. Results. – According to the international classification of, 7% vesico-ureteric reflux were grade I, 20.5% were grade II, 32% were grade III, 18% were grade IV, 22.5% were grade V. Fourteen patients (17 refluxing units) underwent ureteric-reimplantation. Four total and two partial * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (T. Merrot). Annales d’urologie 37 (2003) 21–26 www.elsevier.com/locate/anndur © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. DOI: 1 0 . 1 0 1 6 / S 0 0 0 3 - 4 4 0 1 ( 0 2 ) 0 0 0 1 1 - 6

Le dépistage anténatal des ectasies pyéliques, souvent dues à un reflux vésico-urétéral dépisté après la naissance. Analyse d'une série de 159 dépistages en 4 ans dans

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Uretère, rétropéritoine

Le dépistage anténatal des ectasies pyéliques,souvent dues à un reflux vésico-urétéral dépisté après la naissance.

Analyse d’une série de 159 dépistages en 4 ansdans une unité mère–enfant

A follow up study of prenatally detected vesico-ureteric reflux

T. Merrota,*, H. Zerhounia, K. Chaumoîtreb, C. D’Ercolec, C. Gired, P. Alessandrinia

a Service de chirurgie infantile, pavillon mère–enfant,université de la Méditerranée, CHU Nord, chemin des Bourrelly, 13015 Marseille, France

b Service de radiologie, pavillon mère–enfant, université de la Méditerranée, CHU Nord, chemin des Bourrelly, 13015 Marseille, Francec Service de gynécologie–obstétrique, pavillon mère–enfant, université de la Méditerranée, CHU Nord, chemin des Bourrelly, 13015 Marseille, France

d Service de néonatologie, pavillon mère–enfant, université de la Méditerranée, CHU Nord, chemin des Bourrelly, 13015 Marseille, France

Reçu le 7 juin 2002 ; accepté le 26 août 2002

Résumé

Les auteurs rapportent leur expérience sur la prise en charge périnatale du reflux vésico-urétéral et son devenir au sein d’une unitémère–enfants.

Patients et méthodes. – Trente–cinq nouveau-nés porteurs d’un reflux vésico-urétéral parmi une cohorte de 159 des enfants nés vivantsentre janvier 1997 et décembre 2001, ayant eu un dépistage anténatal ont été analysés. Tous ces nouveau-nés ont eu une échographie del’appareil urinaire au 5e jour de vie, une cystographie rétrograde au 15e jour si le bassinet mesurait au moins 10 mm de diamètre.

Résultats. – Le sex-ratio était de 2,5 garçon pour une fille. Le reflux vésico-urétéral était bilatéral chez 11 patients soient 46 unités rénalesrefluantes, primitif chez 13 patients. Soixante-douze pour cent des reflux sont de grade supérieur ou égal à III et tous les reflux de grade V sontobservés exclusivement chez des garçons. On note une disparition spontanée du reflux vésico-urétéral chez huit patients (18 %) après une priseen charge médicale de 12 à 36 mois. Il s’agissait des trois reflux de grade I, deux de grade II, deux de grade III et un de grade IV. Dix-septréimplantations ont été réalisées dont sept avant l’âge d’un an en raison d’infections urinaires sévères malgré un traitement médical bienconduit. Quatre néphrectomies totales ont été pratiquées. À noter, deux néphrectomies partielles pour des pyélons refluants non fonctionnelssur duplicité. Dix unités refluantes chez sept patients sont encore sous surveillance pour un reflux modéré de grade II et III.

Conclusion.– Cette étude confirme la prédominance chez le garçon du reflux vésico-urétéral dépisté avant la naissance ainsi que sarésolution spontanée ou son amélioration pendant les trois premières années de la vie, même pour des reflux vésico-urétéraux sévères (gradeIII–V).

© 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Abstract

To describe the pre- and post-natal management of vesico-ureteric reflux in a propective study of babies presenting with vesico-uretericreflux suspected from pre-natal ultrasonography in a tertiary paediatric center.

Patients and methods. – Between 1997 and 2001, 35 children (25 boys and 10 girls) with were vesico-ureteric reflux followed for 12 to 36months after the pre-natal detection of urinary tract anomalies. Ultrasound examination was realized at the 5th of life, retrograde cystographyat the 15th if the renal pelvic dilatation measured at least 10 mm of diameter. In 11 the reflux was bilateral and 46 refluxing units were reviewed.

Results. – According to the international classification of, 7% vesico-ureteric reflux were grade I, 20.5% were grade II, 32% were grade III,18% were grade IV, 22.5% were grade V. Fourteen patients (17 refluxing units) underwent ureteric-reimplantation. Four total and two partial

* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (T. Merrot).

Annales d’urologie 37 (2003) 21–26

www.elsevier.com/locate/anndur

© 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.DOI: 1 0 . 1 0 1 6 / S 0 0 0 3 - 4 4 0 1 ( 0 2 ) 0 0 0 1 1 - 6

nephrectomies were carried out in patients < 2 years old; in 8 patients the VUR resolved spontaneously. Of the latter, 7 patients (ten refluxinggrade III–IV units) are still being followed and awaiting a decision on treatment.

Conclusion. – This study confirms the predominance of boys in those with antenatally suspected vesico-ureteric reflux. The spontaneousresolution or improvement during the first 3 years of life was apparent in most cases, even in those with severe reflux (grade III–V).

© 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. All rights reserved.

Mots clés : Diagnostic anténatal ; Uropathies malformatives ; Reflux vésico-urétéral

Keywords: Urinary tract; Prenatal diagnosis; Abnormalities; Ureteral diseases-newborn

1. Introduction

Le reflux vésico-urétéral (RVU) est l’uropathie la plusfréquente de l’enfant méconnue, elle peut altérer le dévelop-pement rénal. En effet, le lien entre reflux–infection–néphro-pathie est bien connu [1] puisque l’on retrouve un RVU chez40 % des enfants présentant une insuffisance rénale terminalesecondaire à une pyélonéphrite [2]. Ce diagnostic postnatalest fait le plus souvent lors du bilan d’un épisode infectieuxde l’appareil urinaire, de troubles mictionnels, de douleursabdominales à répétition ou d’une autre uropathie.

La généralisation de l’échographie obstétricale a permisde détecter de nombreuses anomalies de l’appareil urinaire,dont le RVU, confirmé en période néonatale. La préoccupa-tion de l’obstétricien, du pédiatre, de l’urologue–pédiatre estde dépister ces reflux avant toute infection urinaire pouréviter une dégradation supplémentaire du parenchyme rénal.

À partir d’une étude prospective, nous nous proposonsd’évaluer l’ importance de la prise en charge périnatale desreflux vésico-urétéraux.

2. Matériel et méthodes

Une cohorte de 159 enfants nés vivants entre janvier 1997et décembre 2001 et ayant eu un dépistage anténatal d’uneanomalie de l’appareil urinaire, sont actuellement suivis.Trente-cinq sont porteurs d’un RVU.

Le dépistage des dilatations a été réalisé lors des échogra-phies obstétricales systématiques du deuxième et troisièmetrimestre de grossesse et définies par un diamètre antéropos-térieur du bassinet supérieur ou égal à 5 mm à 22 semainesd’aménorrhée (SA) ou à 8 mm à 32 SA (Fig. 1).

Tous ces nouveau-nés ont eu un bilan urologique compre-nant une échographie de l’appareil urinaire au 5e jour de vieavant la sortie de la maternité. Une cystographie rétrograde aété réalisée au 15e jour chez les nouveau-nés (Fig. 2) dont lebassinet mesurait au moins 10 mm de diamètre ou lorsqu’unedilatation urétérale ou vésicale étaient retrouvées, sous cou-vert d’une antibiothérapie. Ces reflux vésico-urétéraux ontété classés en cinq grades selon la classification internatio-nale.

Une scintigraphie rénale isotopique à l’acide dimercapto-succinique (DMSA) a étéréalisée àpartir du 30e jour pour lesreflux de grade 3, 4 ou 5.

3. Résultats

Trente-cinq nouveau-nés porteurs d’un RVU dépistéavantla naissance ont bénéficiés d’un suivi clinique, échographi-que, cystographique et parfois scintigraphique avec un reculde 12 à 36 mois.

Tous ces nourrissons sont nés àterme. Le sex-ratio était de2,5 garçons pour une fille. Le RVU était bilatéral chez 11patients (31,5 %), ce qui correspond à 46 unités rénalesrefluantes.

Le reflux était primitif et isolé chez 13 patients (10 gar-çons et 3 filles). Le RVU était secondaire ou associé àune ouplusieurs anomalies urogénitales chez 22 enfants (15 garçonset 7 filles) (Tableau 1).

Les 3/4 des reflux dépistés à partir de l’échographie anté-natale sont de grade supérieur ou égal à III (72 % des cas) ettous les reflux de grade V sont observés exclusivement chezdes garçons (Tableau 2).

Tous les enfants ont bénéficié d’une antibioprophylaxie,sauf un garçon porteur d’un RVU stade I unilatéral.

Parmi les 35 enfants pris en charge, 6 ont étéperdus de vue(dont 3 après le bilan initial et 3 autres après l’âge d’un an).

On note une disparition spontanée du RVU chez 8 patients(18 %) après une prise en charge médicale de 36 mois. Ils’agissait des trois reflux de grade I, deux de grade II, deux degrade III et un de grade IV.

Fig. 1. Échographie fœtale réalisée à 32 SA montrant une dilatation pyéli-que droite mesurée à 9 mm.

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Quatorze enfants ont dû être opérés. Dix-sept réimplanta-tions ont été réalisées, selon la technique de Cohen sansmodelage urétéral, dont sept avant l’âge d’un an en raison

d’ infections urinaires sévères malgré un traitement médicalbien conduit. Dans les autres cas, la réimplantation a étépratiquée après l’acquisition de la propreté devant l’appari-tion d’une altération de la fonction rénale. Quatre néphrecto-mies totales ont été pratiquées dont trois pour des hypopla-sies rénales sévères (fonction inférieure à 10 % enscintigraphie au DMSA) et une pour un rein détruit secon-daire à une valve de l’urètre postérieur. À noter, deuxnéphrectomies partielles pour des pyélons refluants nonfonctionnels sur duplicité.

Dix unités refluantes chez sept patients sont encore soussurveillance pour un reflux modéréde grade II et III mais quipersiste chez des enfants n’ayant pas encore acquis leurcontrôle mictionnel.

4. Discussion

Durant ces 20 dernières années, la généralisation del’échographie anténatale a permis de détecter un nombrecroissant d’uropathies fœtales ainsi que la découverte pré-coce de 20 à 38 % de RVU en période néonatale [3,4]. Dansnotre étude, l’ incidence de ce RVU est de 22 % sur un total de159 enfants ayant bénéficiéd’un dépistage anténatal de dila-tation des voies urinaires (Tableau 3).

Ce pourcentage varie selon l’appréciation de la limiteinférieure du diamètre antéropostérieur (Dap) du bassinetconsidérécomme pathologique. La pratique ou non systéma-tique d’une cystographie après dépistage anténatal d’unedilatation modifie aussi l’ incidence du RVU selon que l’oninclut des RVU secondaires, sur obstacle associé àune autreuropathie.

4.1. Aspect anténatal

En effet, s’ il existe un consensus sur la valeur à mesurer(Dap du bassinet) pour apprécier une dilatation du hautappareil urinaire, le seuil àpartir duquel on parle de dilatationvarie selon les équipes et selon le terme de la grossesse[11–15]. La plupart des auteurs retiennent comme valeurdiscriminante un Dap du bassinet de 10 mm ; d’autres secontentent d’un diamètre moins important et prennent encompte le terme de la grossesse. Anderson [15] propose uneformule pratique selon laquelle, à partir de 24 semaines de

Fig. 2. Cystographie rétrograde et mictionnelle réalisée au 15e jour après lanaissance retrouvant un RVU bilatéral stade 3 chez le même patient.

Tableau 1Anomalies associées au RVU

Malformations associées au RVU EffectifDuplicité (bilatéral : 2) 11Dysplasie rénale multikystique 4Syndrome Jonction pyélo-urétérale 3Valve urétrale postérieure 2Agénésie rénale 1Méga-uretère 1Total 22

Tableau 2Répartition des RVU en fonction de leur grade

Grade EffectifI 3 cas (7 %)

27,5 %II 9 cas (20,5 %)

III 14 cas (32 %)72,5 %IV 8 cas (18 %)

V 10 cas (22,5 %)

Tableau 3Incidence du RVU dépisté avant la naissance

Références Nbre dilatation anténataledes voies urinaires

Nbre de RVU (%)

Najmaldin [5] 107 30 (31 %)Burge [6] 222 39 (18 %)Zérin [7] 130 49 (38 %)Ring [8] 117 25 (22 %)Stocks [9] 27 6 (22 %)Devaussuzenet [10] 89 27 (30 %)Notre série 159 35 (22 %)

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gestation, le DAP du bassinet ne doit pas dépasser de plus de1 mm le mois de grossesse dans lequel est faite la mesure.

Ce problème de seuil est important, car plus on le réduit,plus on augmente la sensibilité du test, mais on diminue defait sa spécificité. Ainsi Anderson [15] n’aurait dépisté quetrois des 33 reflux s’ il n’avait exploré que les pyélectasiesfœtales mesurant 10 mm de DAP du bassinet au lieu des4 mm préalablement fixés. De même pour Stocks [9] quiretient comme valeur anormale, un Dap supérieur à 4 mmavant 33 semaines et supérieur à 7 mm après 33 semaines.Cet auteur constate que seuls 15 % des RVU mis en évidencedans sa série auraient été décelés si le seuil avait été fixé à10 mm.

La date de réalisation de l’échographie est un paramètreégalement très important à prendre en compte. Selon lesdifférentes séries, une échographie réalisée avant 28 SA nedétecte aucune anomalie de l’écoulement des urines et ildevient donc indispensable d’en réaliser une autre ultérieure-ment [16,17]. Pour d’autres auteurs, la limite se situe à24 SA[15].

Dans notre série, nous avons retenu et considéré commeanormales les dilatations définies par un Dap du bassinetsupérieur ou égal à 5 mm à 22 SA ou à 8 mm à 32 SA.

4.2. Aspect postnatal

La découverte d’une dilatation des voies urinaires fœtalesmême minime (pyélectasie) impose un contrôle échographi-que postnatal qui ne doit pas être réaliséavant le 3e jour de viepour éviter de minimiser une dilatation due à l’oligurie phy-siologique du nouveau-né [18–19]. Cet examen permet unepremière approche diagnostique. Cependant, se fier à cetteéchographie pour poser l’ indication d’une cystographie à larecherche d’un RVU n’est qu’ illusoire lorsqu’on sait que lamajorité des enfants qui ont un RVU ont une échographierénale normale [20]. Ainsi, l’ indication d’une cystographierétrograde (CRG) en présence d’une pyélectasie n’est pasunanimement admise mais reste obligatoire pour certains[4,7,9–10,14]. D’autre part, la cystographie permet un dia-gnostic de reflux, mais celui-ci est-il pathogène et modifie-t-il l’attitude thérapeutique ?

Ainsi, certains auteurs ne prescrivent de CGR qu’en pré-sence d’une anomalie sur l’échographie néonatale : persis-tance d’une dilatation pyélique mais aussi d’un rein de petitetaille ou d’une anomalie parenchymateuse faisant suspecterune dysplasie rénale [3,8,15]. Dans ce cas de figure, ilschoisissent d’une part de négliger certains reflux, en mettanten balance l’histoire naturelle de nombreux reflux néonatauxqui disparaissent sans jamais avoir entraînéd’épisodes infec-tieux. D’autre part, le risque infectieux, minime mais nonnul, que comporte la réalisation d’une CGR en période néo-natale ne doit pas être négligé.

Pour notre part, nous fixons à 10 mm la taille du Dap dubassinet àpartir de laquelle nous programmons une cystogra-phie après la naissance. On accepte alors le risque de mécon-naître les reflux de bas grade et sans doute quelques reflux dehaut grade. Cela implique de rappeler aux parents que devant

toute fièvre inexpliquée du nourrisson, la pratique d’unebandelette urinaire permet de rattacher cette fièvre à uneéventuelle infection urinaire et que toute infection urinairefébrile est une indication à effectuer une cystographie rétro-grade à la recherche d’un RVU, quel que soit l’aspect desreins à l’échographie.

En ce qui concerne le bilan fonctionnel, la scintigraphietend à remplacer l’UIV en raison de son caractère facilementreproductible et surtout de son irradiation moindre. De plusen plus d’auteurs préconisent l’utilisation de l’uro-IRM, pourl’évaluation de l’appareil urinaire, qui représente une pers-pective technologique d’avenir [21]. La fréquence et la na-ture des examens à réaliser dans le cadre du suivi de cesenfants sont nettement moins standardisés que pour le bilannéonatal. Il semblerait qu’ il faille adapter le rythme de sur-veillance au cas par cas et ce d’autant que plusieurs uropa-thies différentes coexistent souvent chez le même enfant.Pour les RVU isolés, Avni [22] propose un suivi pendantdeux ans par échographie tous les deux ou trois mois, scinti-graphie tous les six mois et cystographie une fois par an. Tam[23] propose une simple cystographie à l’âge de deux ans.Toutefois tous les auteurs sont d’accord pour instaurer uneantibioprophylaxie jusqu’à la disparition du RVU.

4.3. Caractéristiques du RVU néonatal

4.3.1. Le sex-ratio

La prépondérance masculine est nette et représente 75 à80 % des cas [4,24]. Cette prédominance masculine estd’autant plus marquée que la limite inférieure retenue pour leDap du bassinet, en anténatal, est plus élevée [15]. En effet,pour un Dap supérieur à10 mm, le ratio est de quatre garçonspour une fille, alors que le ratio tombe à 1/1 pour un Dapsupérieur ou égal à 4 mm. Cela s’explique par la netteprédominance des reflux de grade élevé chez le garçon.

4.3.2. Le grade

Le RVU primitif lorsqu’ il est dépisté en anténatal surl’existence d’une dilatation pyélique, correspond dans 75 à80 % des cas à un stade évolué supérieur ou égal à III : 50 à60 % sont des grades IV et V. Dans notre série, 72 % desunités refluantes étaient de grade supérieur ou égal à III. Lesreflux de bas grade sont découverts fortuitement du cotécontrolatéral àune dilatation due àun reflux de haut grade ouassociés à une uropathie obstructive. Le sex-ratio passe de1,8 pour l’ensemble des grades I, II et III à4,1 pour les gradesIV et à 25,5 pour les grades V, qui représente, comme dansnotre série, une quasi-exclusivité masculine [4].

4.3.3. Le reflux intraparenchymateux

Il est très fréquent à cette période de la vie, il est classi-quement considéré comme un facteur de gravité justifiantune intervention chirurgicale correctrice d’emblée. Cette no-tion est actuellement discutée et à l’étude.

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Le reflux de diagnostic anténatal est bilatéral dans un peuplus de la moitié des cas : 52 % pour Bouachrine [25] etYeung [4] contre 31,5 % dans notre série.

4.3.4. Les lésions rénales

La pratique systématique de scintigraphie DMSA avanttoute infection pour des reflux dépistés sur l’échographieprénatale montre une atteinte de la fonction rénale dans présd’un tiers des cas, essentiellement des garçons avec desreflux de grade IV et V [3,4,25]. Cela montre bien, que dansles reflux les plus sévères, des lésions importantes sont pré-sentes dés la naissance, conditionnant de façon déterminantele mauvais pronostic rénal, quelle que soit la précocité dudiagnostic. L’étude des reflux de diagnostic anténatal a doncpermis de prouver l’existence de lésions primitives congéni-tales, hypo- ou dysplasiques, à distinguer des séquelles ulté-rieures infectieuses. Dans la plus part des cas opérés, laréimplantation urétérale pratiquée secondairement n’a pourbut que de pouvoir supprimer la nécessité de l’antibiopro-phylaxie ; les lésions rénales primitives de néphropathie dereflux sont ainsi stabilisées, mais les « cicatrices » ultérieuressont imprévisibles.

Dans notre série, une reimplantation urétérale a éténéces-saire pour 17 unités refluantes, Six néphrectomies (4 totaleset 2 partielles) ont été pratiquées pour des reins détruits,généralement dès la naissance.

Il apparaît à travers cette étude et l’analyse de la littératureque l’ intérêt du diagnostic anténatal est de permettre uneprise en charge précoce de ces enfants, d’ instaurer une anti-bioprophylaxie à visée urinaire et d’attendre une résolutionspontanée de ces reflux, rapportée de 35 à 75 % selon lesséries. En cas d’échec, ce traitement aura permis de différerl’ intervention et d’éviter des séquelles ultérieures supplé-mentaires.

5. Conclusion

Le RVU représente 10 à30 % des uropathies de diagnosticéchographique anténatal selon les séries.

Il doit être suspectédevant toute dilatation unie ou bilaté-rale des voies urinaires, quel que soit son niveau, de l’urété-rohydronéphrose à la pyélectasie mineure.

Deux types de reflux sont décrits en période néonatale :• reflux de faible grade (I et II) intéressant des reins

normaux, en général chez la fille ;• reflux sévère combinéavec une atteinte rénale, vraisem-

blablement dysplasique et touchant presque exclusive-ment le garçon.

Les reflux de bas grade sont les plus susceptibles derégresser spontanément dans les trois premières années de lavie.

Chaque fois qu’un RVU est suspecté, une antibioprophy-laxie doit être instaurée jusqu’à ce que le diagnostic soitinfirmé ou que le reflux ait disparu.

Le traitement chirurgical est indiqué en cas :• d’ infections non contrôlées médicalement ;• de persistance au-delà de l’acquisition de la propreté ;• de détérioration fonctionnelle objective.C’est dire l’ importance de l’évaluation initiale, avant tout

phénomène infectieux, pour déterminer au mieux le degrédedysplasie rénale et les conséquences sur le parenchyme.

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