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Particularités des troubles vésico-sphinctériens de la Sclérose en Plaques Dr Marianne de Sèze Cabinet de Neuro-Urologie et Urodynamique Médecine Physique et Réadaptation Clinique Saint Augustin, Bordeaux XXVèmes Entretiens annuels de la Fondation Garches Nanterre, Novembre 2012

Particularités des troubles vésico-sphinctériens de la

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Page 1: Particularités des troubles vésico-sphinctériens de la

Particularités des troubles vésico-sphinctériens

de la Sclérose en Plaques

Dr Marianne de SèzeCabinet de Neuro-Urologie et Urodynamique

Médecine Physique et Réadaptation

Clinique Saint Augustin, Bordeaux

XXVèmes Entretiens annuels de la Fondation GarchesNanterre, Novembre 2012

Page 2: Particularités des troubles vésico-sphinctériens de la

Troubles vésico-sphinctériens et SEP

• Extrêmement fréquents dans la SEP: – Précoces

• Délai moyen d’apparition 6 ans, mais inauguraux dans 10%– Evolutifs sur une longue période de vie– Prévalence médiane 80%

• Retentissement fonctionnel considérable (incontinence, rétention chronique)• Limitation des activités sociales, professionnelles, affectives,

sexuelles ⇒ Principal facteur d’altération de la qualité de vie

• Retentissement organique préoccupant• Sur le haut appareil urinaire (hautes pressions vésicales)• Sur le capital cutané (incontinence) et l’état général (rétention,

infections)Plus d’un patient sur 10 est susceptible d’avoir une complication uro-

néphrologique dans les 18 premières années d’évolution de la SEP

• Importance +++ de leur dépistage, suivi et prise en charge adaptée

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Suivi des neuro-vessies de la SEP

• Intérêt +++ approche multidisciplinaire: Concertation neurologue et spécialiste de Neuro-Urologie (MPR-Urologue,) en concertation avec médecin traitant ,équipe paramédicale et proches pour définir meilleurs options thérapeutiques adaptées au patient et à son environnement

• Recommandations HAS en faveur labellisation centre de référence neuro-urologique

• Référentiels de recommandations pour le suivi des neurovessies labélisés par sociétés savantes : GENULF, AFU, SOFMER, ICS, NICE

Chartier-Kastler E, Ruffion A. Prise en charge urologique des vessies neurogènes. Prog Urol 2007; tome 17, vol 3.

Ruffion A, de sèze M, Denys P, Perrouin-Verbe B, Chartier Kastler et les membres du Genulf. Suivi des vessies neurologiques du blesse médullaire et du patient porteur d’une myeloméningocèle : revue de la littérature et recommandations pratiques de suivi. Pelv Perineol 2006; 1: 304-323.

de Sèze M, Ruffion A, Denys P, Joseph PA, Chartier-kasteler E, Perrouin-Verbe B, from the GENULF. The neurogenic bladder in multiple sclerosis: Review of the literature and proposal of management guidelines. Multiple Sclerosis 2007;915-928.

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Clinique: – Dominée par troubles irritatifs,

• Symptômes irritatifs: 17 à 82%• Incontinence: 19 à 80%• Symptômes obstructifs et/ou rétention: 2 à 73%

– Mais polymorphisme et association +++– Peu spécifique ni sensible (notamment pour résidu post-mictionnel) – Modification du statut clinique au fil du temps+++– Pas de corrélation de la clinique avec urodynamique et pronostic.

Urodynamique: Hyperactivité du détrusor: médiane ≈ 65%Hypoactivité du détrusor: médiane ≈ 25%Dyssynergie vésico-sphinctérienne:médiane ≈ 35%Activité vésicale normale: 1 à 34%

Association fréquente de troubles

Evolution au cours du temps même si clinique stableNécessité d’évaluations urodynamiques répétées même si clinique stable

Troubles vésico-sphinctériens et SEP

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Complications des neurovessies dans la SEP

• Morbi-mortalité uro-néphrologique – réputée moindre dans la SEP que blessés médullaires…mais, surtout moins évaluée

• Méta-analyse de la littérature:– Complications bas appareil: 30%

• Infections urinaires basses: 13 à 80%, médiane 30%

– Complications haut appareil urinaire: ≅ 12 %• Infections urinaires hautes: 8%• Reflux vésico-urétéral: 5%• Dilatation haut appareil: 8%• Lithiase urinaire: 2 à 11%• Insuffisance rénale: 0 à 10%

Plus d’un patient sur 10 est susceptible d’avoir une complication uro-néphrologique dans les 18 premières années d’évolution de la SEP

⇒ Suivi et prévention nécessaires

Page 6: Particularités des troubles vésico-sphinctériens de la

Complications des neurovessies dans la SEP

Identification de facteurs de risque:Evolution de la maladie> à 15 ansHautes pressions vésicales en cystomanométriePort d’une sonde à demeure

+/- Age >50 ans, Sexe masculin, dyssynergie vésico-sphinctérienne

Recommandations pour la prise en charge thérapeutique et le suivi adaptées à ces sous-types de situations à risques disponibles (GENULF)

de Sèze M, Ruffion A, et al. Multiple Sclerosis 2007;915-928.

PelviPérinéologie 2007;2:193-197.

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Suivi des neurovessies de la SEPGuidelines internationaux

– Neurovessies: • European Association of Urology

– Storher et al1999, 2008 • Association Française d’Urologie

– Ruffion, Chartier Kastler et al 2006

– Sclérose en Plaques: • Groupe d’Etude Neuro-urologique de Langue Française

– de Sèze et al 2007

• NICE/UK – National Institut for Health and Clinical Excellence)– Fowler et al 2009

…des points communs, des divergences…

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Points communs

Compétence et spécificité du référent de Neuro-Urologie

Interrogatoire dirigéCalendrier mictionnel

Dépistage du résidu post mictionnel systématique et régulier

Régularité du suivi

Divergences

Bilan urodynamique systématique“Thus the use of urodynamics is appropriate only in certain situations where surgical or intravesical treatments are being planned. “

Echographie haut appareil urinaire

Synthèse

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Suivi des troubles vésico-sphinctériens de la SEP

Trois éléments fondamentaux du suivi:

Interrogatoire dirigé et calendrier mictionnel, mesure systématique des résidus, bilan urodynamique

Permettent expertise des troubles et des facteurs de risque

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• Interrogatoire dirigé sur les symptômes périnéaux

• - Miction: fréquence, nombre, volume estimé, facilité, impression de caractère complet

• - Continence: fréquence et volume estimé des fuites, nécessité de garnitures

• - Symptômes d’infection urinaire• - Symptômes ano-rectaux

• Gêne génito-sexuelle

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Calendrier mictionnel de 72 heures

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ImpériositéGarniture Fuite urinaireRésidu post-mictMiction/sondageHeure

• Colliger l ’ensemble des informations sur un calendrier mictionnel +++ Horaire, nombre, modes des événements sur 72 heures

Élément clef de l’appréhension et du suivi neuro-urologique

Mesure objective des troubles vésico-sphinctériens,souvent mal évalués par seul interrogatoire (subjectivité, troubles cognitifs).

Recommandations unanimes sociétés savantes

Suivi des troubles vésico-sphinctériens de la SEP

Page 12: Particularités des troubles vésico-sphinctériens de la

Bilan systématique des neurovessies

Dépistage d’un résidu post-mictionnel

Systématique +++ face à tout trouble mictionnel (incontinence, dysurie, rétention, douleur, infection)

Résidu post-mictionnel mal évaluée par interrogatoire

Aspécificité des signes cliniques: asymptomatique, douleur,dysurie, incontinence, infection urinaire, impériosité, spasticité, fatigue…

Moyens:

Sondage évacuateur post-mictionnel

Bladder-scan+++: ambulatoire, atraumatique

Echographie vésicale pré et post-mictionnelle

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Examen cytobactériologique des urines

Pas de dépistage systématique chez le patient neurologique, quel que soit le mode mictionnel (HAS 2002)

- car bactériurie fréquente (60 à 80%), non corrélée à prévalence ni récurrence des infections urinaires

Mais recommandé

-face à toute modification du statut mictionnel ou neurologiqueAspécificité des signes cliniques: Symptômes cliniques présent sen l’absence d’infection, Stigmates d’infection différents (spasticité, fatigue, majoration déficiences/

incapacités)- avant geste invasif urinaire (bilan urodynamique, cystoscopie, cystographie)- ou sujets à risques (immunosuppression, grossesse…)

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Bilan urodynamique

Cystomanométrie1. Tonus, activité, contractilité, compliance: régime de pressions du détrusor2. Possibilité de miction volontaire?2. Caractère harmonieux, coordonné et complet de la miction?3. Facteur de risque sur l’arbre urinaire via pressions détrusor?

Profilométrie urétrale Résistances urétrales exagérées ⇒mictions à risquePossibilité de retenue volontaire des urines?

Débimétrie (si elle est possible)Possibilité de miction volontaire complète?Nécessité de poussée abdominale, dysurie?

Surveillance +++ des pressions du détrusor

Seul examen permettant l’expertise du mécanisme des troubles et le bilan du facteur de risque représenté par les hautes pressions du détrusor+++

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Explorations complémentaires des neurovessies

Echographie vésico-rénaleEpaisseur de la vessie, corps étrangers dans la vessie

Dilatation des uretères et des reins

Cystographie rétrograde et mictionnelleMorphologie de la vessie et de l’urètre: Diverticules, épaisseur, souplesse, ptose vessieSténose de l’urètreCaractère complet et harmonieux de la mictionRecherche de reflux vésico-urétéral +++

Cystoscopie: si hématurie, douleur, trouble de compliance, difficulté sondage

Exploration morphologique ou fonctionnelle complémentaires après avis spécialisée et concertation pluridisciplinaire (UIV, uro-scanner , scintigraphie rénale, clairance

créatinine…).

Si facteurs de risques spécifiques dépistés au bilan principal (cal mict, BUD, résidu)Pour évaluation retentissement uronéphrologique, guide diagnostique et thérapeutique

Prescription guidée par avis neuro-urologique préalable

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Principes de prise en charge des troubles vésico-sphinctériens de la SEPObjectif thérapeutique double:

– Limiter le retentissement sur les activités de vie quotidienne– Préserver l’avenir uronéphrologique (gestion des pressions du détrusor)

Personnalisée et régulièrement adaptée– patient et son environnement (évolution déficiences, ressources humaines)– aux facteurs de risques uro-néphrologiques– au mieux, multidisciplinaire

Prise en charge des troubles périnéaux associés (ano-rectaux, génito-sexuels)

Point clef:

Le préalable indispensable à tout traitement complémentaire est d’adopter un mode mictionnel adéquat+++:

Miction complète, à basse pression, sans poussée abdominale

Déterminé par calendrier mictionnel avec mesure systématique des résidus, et bilan urodynamique

Page 17: Particularités des troubles vésico-sphinctériens de la

Algorithme thérapeutique de l’hyperactivité du détrusor

1. Pour tout patient, dépistage et éviction des faveurs favorisants:

(infection, escarre, lithiase, fécalome…)

2. Puis prise en charge adaptée au mode mictionnel et aux facteurs de risque

• Si patient en miction volontaire, sans résidu post-mictionnel,

ni retentissement sur arbre urinaire:

⇒ objectif: supprimer les troubles irritatifs en préservant les mictions volontaires

⇒ traitement diminuant l’activité vésicale sans abolir sa contractilité

- 1. Oraux: anticholinergiques, desmopressine, gabapentine

- 2. Ttt fonctionnel: stimulation tibiale, neuromodulation sacrée

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• Si patient avec résidu et/ou risque de retentissement sur arbre urinaire

(basse compliance vésicale, pressions vésicales élevées):

• Objectif: garantir la continence et protéger l’arbre urinaire

⇒ ↓ ↓ +++ pression vésicale

Algorithme thérapeutique de l’hyperactivité du détrusor

traitement ‘paralysant la vessie’ (toxine botulique, chirurgie )

+ sondages intermittents++

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Toxine botulique et hyperactivité neurogène du détrusor

• Révolution thérapeutique en neuro-urologie: – 70% d’efficacité, clinique + CVF, compliance, PD – 6 à 8 mois, – répétition sans échappement thérapeutique – Potentialisation possible par anticholinergique

• Tolérance satisfaisante: rares faiblesses généralisées (forte dose)

Déprime la contractilité vésicale: sondages systématiques⇒ Patient doit être capable et d’accord pour réaliser

sondage intermittent

AMM dans la SEP

Page 20: Particularités des troubles vésico-sphinctériens de la

Chirurgie de l ’hyperactivité du détrusor

Agrandissement du réservoir vésical: marginal dans la SEPPatient susceptible de s’autosonder après échec TBA

Dérivation incontinente BrickerDérivation continente Mitrofanoff, Monti

Dérivations urinairesContinente, si possibilité sondages intermittents, conservatriceIncontinente, définitive, sans sondage urinaire

3ème intention, après échec Toxine botulique et ttt conservateur

Page 21: Particularités des troubles vésico-sphinctériens de la

Prise en charge de la rétention urinaire chronique

Eviter facteurs aggravants (traitement, dépendance, habitudes mictionnelles

Comprendre le mécanisme: ↑ résistance urétrale ou hypocontractilité détrusor

Si résistance urétrales élevés:

- Première intention: Alpha-bloquants ; Pas d’intérêt des myorelaxants oraux

- Deuxième intention: Toxine botulique sphinctérienne si DVS, Endoprothèse urétrale, sphinctérotomie (mais préjudice éjaculation)

- Troisième intention: Drainage artificiel des urines: Autosondages +++

Si contractilité vésicale diminuée: - Pas de traitement pharmacologique ni fonctionnel efficace

-Apprentissage des modes de drainage vésical: auto-sondages intermittents

Page 22: Particularités des troubles vésico-sphinctériens de la

Limites et contraintes des auto-sondages dans la SEP

• Troubles cognitifs?– Pas de corrélations entre taux de réussite de l’apprentissage et déclin

cognitif global ou sub test– Troubles de la mémoire visuospatiale allongent la durée d’apprentissage

• Evolutivité de la Maladie– Taux de réussite corrélé avec EDSS mais pas avec durée d’évolution et type de SEP– Nombre de séances pour réussir corrélé avec EDSS

• Facteurs psychologiques et émotionnels (Mc Conville 2002)

• Nombre de séances– Corrélations ++ avec taux de réussite (moyenne 3.4 séances pour homme,

4.7 séances pour femme, extrèmes 2-11)

• Amélioration de la qualité de vie (Castel Lacanal 2009)

Rôle primordial du temps accordé à l’apprentissage et au suivi à court, moyen et long terme

Vahter, Mult Scler 2009

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Alternatives aux auto-sondages intermittents

• Hétérosondages– Sondage réalisé par un proche (famille, soignant)– A domicile, plus infectant et moins autonome que l’auto-sondage – A l ’hôpital, préféré à sonde à demeure, moins infectant et moins de

complications locales

• Cathéter sus-pubien– Drain vésical percutané par l’abdomen– Pas moins infectant que SAD, risque de lithiase– Permet l’autonomie et la reprogrammation mictionnelle

• Sonde à demeure– A éviter tant que possible– Complications haut et bas appareil– Reste une ultime alternative à la chirurgie

Sondages urinaires et vessie neurologique

Page 24: Particularités des troubles vésico-sphinctériens de la

Troubles vésico-sphincétriens de la Sclérose en PlaquesConclusion

• Troubles vésico-sphinctériens extrêmement fréquents dans la population SEP.

• Demeurent grandement sous estimés et sous-exprimés

• Facteur considérable d’altération de la qualité de vie, impact organique préoccupant

• Arsenal thérapeutique riche et efficace (fonctionnel, pharmacologique, chirurgical)

∀ ⇒ Sensibiliser +++ soignants médicaux et paramédicaux au dépistage des troubles vésico-sphinctériens

• Nécessité d’un suivi spécifique à long terme, personnalisé en fonction des facteurs de risques neurologiques et uronéphrologiques de chaque patient.

• Intérêt +++ d’une approche multidisciplinaire: patient et son envirronement, médecin traitant, neurologue, médecin de rééducation urologue

Page 25: Particularités des troubles vésico-sphinctériens de la

Vers une approche consensuelle de la prise en charge aux stades précoces de la SEP…Groupe d’Experts FLUE-MS

www.FLUE-MS.jimdo.comFLUE-MS G Amarenco et al, 2011