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J Fr. Ophtalmol., 2005; 28, Hors série 2, 2S31-2S34© Masson, Paris, 2005.
ARTICLE
INTRODUCTION
Le glaucome du sujet jeune esttrès mal défini, souvent associé auglaucome juvénile alors que cen’est pas celui rencontré le plusfréquemment en Europe. Entre lesglaucomes « congénital », « infan-tile », ou « juvénile », les défini-tions et barrières, variables selonles auteurs, sont finalement assezartificielles. L’important est d’enfaire le diagnostic.
UNE DIFFICILE CLASSIFICATION
En cas de glaucome présent dès lanaissance, ou déclaré avant l’âge de 1an, il s’agit d’un glaucome « congéni-tal » (80 % des glaucomes congéni-taux s’expriment dès la naissance,20 % plus tard). Entre 1 et 3 ans,le glaucome est le plus souvent dit« infantile », sauf Ritch qui l’assimileau glaucome congénital [1]. Au-delà, et jusqu’à l’âge de 15 ans,l’appellation reconnue est celle deglaucome « juvénile », avec diffé-rentes déclinaisons pouvant êtrerencontrées (tableau I) [1, 2]. Qu’ellequ’en soit la classification, si difficileà établir, l’enjeu chez le sujet jeuneest d’être vigilant : si le glaucomeavant un an est rapidement diagnos-tiqué et pris en charge, en revanchecelui de survenue ultérieure risquede passer inaperçu, alors même quele globe oculaire n’est plus extensi-ble, avec toutes ses conséquencesdélétères.
Glaucoma in the young patient. Clinical particularities
A.-M. Bron
J. Fr. Ophtalmol., 2005; 28, Hors série 2, 2S31-2S34
Difficult to classify, glaucoma in young subjects – with a clinical presentation neverthelesscomparable to the adult's – is underestimated, difficult to identify and treat, and is veryheterogeneous. Few reliable screening tools are available and nothing has yet replaced the clini-cal experience of the physician. Vigilance is therefore required so as not to miss this diagnosis.
Key-words: Glaucoma, young, classification, diagnosis.
Le glaucome du sujet jeune. Particularités cliniques
De classification difficile, les glaucomes du sujet jeune- dont la présentation clinique est pour-tant comparable à celle de l’adulte- sont sous-estimés, difficiles à identifier et traiter, et trèshétérogènes. Peu d’outils de dépistage fiables sont disponibles, et rien n’a encore remplacél’expertise clinique du médecin. La vigilance s’impose donc, pour ne pas passer à côté dudiagnostic.
Mots-clés : Glaucome, jeune, classification, diagnostic.
Le glaucome du sujet jeune Particularités cliniques
A.-M. Bron
Service d’ophtalmologie, CHU Hôpital Général 3, rue du Faubourg-Raines, BP 1519, 21033 Dijon Cedex.
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A.-M. Bron J. Fr. Ophtalmol.
DÉPISTAGE ET DIAGNOSTIC
Quoiqu’il en soit, quel que soit leur nom, ces glaucomesdu sujet jeune ont en commun d’être sous-estimés, le plussouvent dépendant de la pression, difficiles à identifier ettraiter, et sont surtout très hétérogènes.
Sous-estimés
Même si la prévalence du glaucome augmente nettementavec l’âge, cette affection n’épargne pas les sujets jeunes
[3]. Néanmoins, qu’elles que soient les grandes étudesépidémiologiques menées - la CIGTS (CollaborativeInitial Glaucoma Treatment Study), l’OHTS (OcularHypertension Treatment Study), l’AGIS (AdvancedGlaucoma Intervention Study), etc... - le glaucome sembledébuter à l’âge de 40 ans, parce que les patients inclusont le plus souvent dépassé cet âge. Il a pourtant main-tenant été démontré que la prévalence de l’hypertonieoculaire est loin d’être négligeable chez les patients demoins de 40 ans [4].
Difficiles à identifier
Excepté le glaucome congénital, facilement repéré, oudans le cas d’un patient portant des lunettes et correc-tement suivi par son ophtalmologiste, il n’y a aucunmoyen de dépister les emmétropes âgés de moins de40 ans.
Chez le sujet jeune en effet, la structure cellulaire estaltérée avant la fonction (fig. 1). Le champ visuel blanc-blanc, assez peu sensible, l’est encore moins chez lesujet jeune, en raison des problèmes de redondance ;il s’avère un pâle reflet des altérations du nerf optique,même chez le patient âgé d’ailleurs (fig. 2). Seuls lestests qui analysent la structure vont permettre de dépis-ter un glaucome. Néanmoins, même si l’analyse de lastructure de la papille peut certes se baser sur desmachines sophistiquées telles le système HRT-2(Heidelberg Retina Tomograph), rien ne remplacera lemédecin derrière la lampe à fente, et son expertise pourinterpréter les résultats.
ClassificationGlaucome congénital (0-1 an)
Glaucome infantile (1-3 ans)Synonyme de glaucome congénital [1]
Glaucome juvénile (3-15 ans)- Later childhood or teenage years [1]- Glaucome congénital à révélation tardive [2]- Juvenile open angle glaucoma (OAG) - Limite entre infantile et juvénile 3 ans [2]- Glaucome primitif à angle ouvert (GPAO) entre
10 et 35 ans [1]
Glaucome adulte (> 15 ans)
Tableau I
Figure 1 : Les glaucomes du sujet jeune sont difficiles à identifier, la structure étant altérée avant la fonction.
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Vol. 28, Hors série 2, 2005 Le glaucome du sujet jeune. Particularités cliniques
Difficiles à traiter
D’une part, la prise de conscience de cette maladiemuette chez un jeune est difficile ; d’autre part, il y a unediscordance entre l’espérance de vie du jeune patient et dumédecin, qui risque de ne pas lui survivre et de conduire àune interruption du suivi. Enfin, les traitements sont limitéspar le faible nombre de médicaments disponibles, et sur-tout la cicatrisation est exacerbée, pouvant évoluer versune bulle encapsulée (fig. 3).
Hétérogènes
Au-delà des glaucomes juvéniles, les glaucomes du sujetjeune regroupent les glaucomes primitifs à angle ouvertclassiques (GPAO) dont le début se situe bien avant 40 ans,les glaucomes par fermeture de l’angle nettement sousestimés (la gonioscopie est insuffisamment pratiquée),et enfin les glaucomes secondaires, très mal pris encharge.
Les glaucomes primitifs à angle ouvert se déclinent en3 entités, chez un sujet jeune considéré entre 20 et 40ans : le GPAO, le glaucome juvénile et le glaucome à
Figure 2 : Le champ visuel blanc-blanc n’est pas un outil de dépistage assez sensible pour diagnostiquer un glaucome du sujet jeune.
Figure 3 : Cicatrisation exacerbée : bulle encapsulée.
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A.-M. Bron J. Fr. Ophtalmol.
pression normale. Quant aux glaucomes par fermeturede l’angle, ils sont répartis, selon la classification deFoster en fonction du pourcentage de degrés où le tra-béculum pigmenté peut-être vu [5], en patients àrisque, patients avec fermeture de l’angle ou avec unauthentique glaucome (atteinte de la papille et/ou duchamp visuel) (fig. 4).
Tous les glaucomes secondaires sont retrouvés chez lesujet jeune, sauf peut être le glaucome pseudo-exfoliatif(PEX), l’exfoliation capsulaire étant inhabituelle avant 40ans (fig. 4).
CONCLUSION
Finalement, le glaucome chez le sujet jeune diffèreassez peu dans sa présentation clinique du glaucomede l’adulte. Il est en revanche de diagnostic et de priseen charge beaucoup plus difficiles. En l’absence d’unoutil de dépistage « magique », il faut se repérer sur la
gonioscopie, l’examen du nerf optique et des fibresoptiques, et le relevé des champs visuels. Des machinesplus sophistiquées peuvent aider ceux qui en disposent,mais il ne faut pas complexer en leur absence, les compé-tences du médecin prennent ici toute leur valeur.
RÉFÉRENCES
1. Shields B, Ritch R, Krupin T. Classification of the glaucomas. In TheGlaucomas, Mosby, Saint Louis, 1996, 717-25.
2. Shields BM. Congenital glaucomas. In textbook of glaucoma. EditWilliams and Wilkins, Baltimore 1998, 195-206.
3. Quigley HA. Number of people with glaucoma worldwide. Br JOphthalmol, 1996; 80: 339-93.
4. Treal C, Loriot J, Arnaud B, Fraysse P, Romeo A, Baret-CervantesMH. Dépistage de l’hypertonie intraoculaire en médecine du travailpar tonomètrie à flux d’air. A propos d’une étude sur 1276 salariés.Arch Mal Prof, 1998; 1: 17-23.
5. Foster PJ, Buhrmann R, Quigley HA, Johnson GJ. The definition andclassification of glaucoma in prevalence surveys. Br J Ophthalmol,2002; 86: 238-42.
Figure 4 : Glaucomespar fermeture de l’angle.