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www.lemonde.fr 64 e Année - N˚19845 - 1,30 ¤ - France métropolitaine --- Vendredi 14 novembre 2008 Fondateur : Hubert Beuve-Méry - Directeur : Eric Fottorino Algérie 80 DA, Allemagne 2,00 ¤, Antilles-Guyane 1,90 ¤, Autriche 2,00 ¤, Belgique 1,40 ¤, Cameroun 1 400 F CFA, Canada 3,95 $, Côte d’Ivoire 1 400 F CFA, Croatie 18,50 Kn, Danemark 24 KRD, Espagne 2,00 ¤, Finlande 2,50 ¤, Gabon 1 400 F CFA, Grande-Bretagne 1,40 £, Grèce 2,20 ¤, Hongrie 650 HUF, Irlande 2,00 ¤, Italie 2,00 ¤, Luxembourg 1,40 ¤, Malte 2,50 ¤, Maroc 10 DH, Norvège 24 KRN, Pays-Bas 2,00 ¤, Portugal cont. 2,00 ¤, Réunion 1,90 ¤, Sénégal 1 400 F CFA, Slovénie 2,20 ¤, Suède 28 KRS, Suisse 2,90 FS, Tunisie 1,9 DT, Turquie 2,20 ¤, USA 3,95 $, Afrique CFA autres 1 400 F CFA, Un dimanche sur les Champs- Elysées. Ouvrir ou ne pas ouvrir le septième jour ? La célèbre avenue parisienne est devenue le symbole d’un débat et d’un dilemme multiformes. On y trou- ve en effet à la fois des commer- ces qui respectent le tradition- nel repos dominical et d’autres qui n’en tiennent plus compte. Politique, économie, droit social, sociologie, religion : tout s’entremêle dans cette querelle française récurrente. Interdit désuet déjà écorné par les exceptions de plus en plus nom- breuses à la règle ? Passéisme aveugle à l’évolution des mœurs et des comportements ? Tabou usé, ancré dans des prescrip- tions religieuses et des prati- ques sociales en pleine muta- tion ? Chacun a sa réponse et les raisons de sa réponse. Le chef de l’Etat brûle de « libérer tout ceci ». Les élus de la majori- té sont divisés, même si l’UMP propose d’accepter, sous condi- tion, cette évolution. Ceux de l’opposition et les syndicats sont franchement hostiles. Lire page 11 a UE. Le chômage est au plus haut depuis onze ans en Grande-Bretagne. Le plan Merkel est critiqué par des experts en Allemagne. Page 10 a Etats-Unis. Le revirement d’Henry Paulson à propos de la gestion de la crise bancaire. Barack Obama, signe d’une espérance collective de changement de la société américaine, dans tous les domaines. Pages 4 et 15 a Paillettes ternies. La croissance du luxe ralentit. Le secteur sera-t-il en récession en 2009 ? Page 16 a OCDE. Pessimisme : des difficultés jusqu’au second semestre 2010. Page 16 a Sherpa ad hoc. François Pérol, secrétaire général adjoint de l’Elysée, chargé des questions économiques. Page 19 a Débats. Pervenche Berès ; Christian de Boissieu et Hervé Lorenzi. Page 20 I nstitution d’un royaume qui veut être un modèle de tolérance, les célèbres coffee shops néerlandais sont mena- cés. Il y en a 800 dans le pays. Caractéristi- que : on peut y acheter du cannabis, pour- vu qu’on soit majeur et simple consomma- teur. Idée de départ : la légalisation empê- che le développement des réseaux crimi- nels. Mais voilà, le crime organisé s’y inté- resse, et notamment une bande d’origine marocaine. Les incidents se sont multi- pliés ces derniers temps : pressions, menaces, racket. Les élus se plaignent. Le gouvernement conservateur plaide pour la fin des coffee shops, l’opposition socia- liste aussi. Les maires, eux, hésitent. a Lire page 10 J ane Birkin, grand-mère heureu- se de 61 ans, sort un nouvel album. Sans Serge Gainsbourg, évidemment, ni ces paroliers célè- bres (Souchon, Hardy, MC Solaar) qui la servirent après la mort de son compagnon. Pour la première fois, la chanteuse britannique a mis ses propres mots sur l’intégra- lité des douze chansons. Au Monde, qu’elle a reçu dans son appartement, capharnaüm chic et sincère, elle explique s’être appuyée sur la famille pour faire émerger les textes. Sur ses trois filles, nées de pères différents. Sur ses parents. « Je voulais retrouver l’adolescence, l’enfance, le seul pays qui vaille la peine d’être revisité. » a Lire page 24 Commerces Ouvrir ou ne pas ouvrir le dimanche, telle est la question La famille Birkin au cœur du nouvel album de Jane S artre, Nietzsche et Barthes furent aus- si des pianistes amateurs et passion- nés. Dans cet amour, qui fait écho à celui de la mère et à l’absence du père, apparaît une part de secret, discrète mais fabuleuse. En évoquant la manière dont la musique dessine un espace neuf chez les philosophes, François Noudelmann a écrit un livre magnifique (Gallimard). Où l’on découvre comment la pratique musi- cale renvoie à ce que le désir humain a de plus incontrôlable. « La musique se tait tou- jours. Elle ne s’encombre d’aucun dis- cours », disait Roland Barthes. a Lire notre supplément « Le Monde des livres » L e sauvetage des banques américai- nes tourne au casse-tête. Début octo- bre, le Congrès adoptait un plan de 700 milliards de dollars consistant à ache- ter les actifs « pourris » des banques. Mercredi 12 novembre, ce plan a été aban- donné par Henry Paulson, le secrétaire au Trésor, au profit d’une recapitalisa- tion des banques assortie d’autres mesu- res d’aide au système financier. L’objectif est de favoriser la relance du crédit, notamment pour aider l’automobile. Ce revirement n’a pas rassuré. Dans le sillage de Wall Street, la plupart des Bour- ses asiatiques ont chuté, jeudi 13. Alors que les signes de récession se multiplient, notamment en Europe, les dirigeants du G 20, qui se réunissent samedi près de Washington, auront fort à faire pour rétablir la confiance. a Aux Pays-Bas, les coffee shops bientôt fermés ? PAGE TROIS A l’école, une égalité de façade La Suède a constaté que, dès la maternelle, les garçons et les filles n’étaient pas traités de la même façon. Une discrimination à laquelle chercheurs et enseignants tentent de mettre fin. Biodiversité Les experts s’organisent Sous l’égide de l’ONU, les spécialistes de la protection des écosystèmes – la biodiversité au sens large – devraient bientôt s’organiser en un groupe d’experts, comme il en existe pour l’étude des évolutions climatiques (le GIEC). La France défend le projet et hébergerait volontiers le secrétariat dudit groupe. Page 4 Russie Qui commande ? Comme un seul homme, les députés s’apprêtent à allonger de deux ans le mandat présidentiel. Pas celui que remplit aujourd’hui Dmitri Medvedev : la mesure ne s’appliquera que pour le prochain président. Qui pourrait bien être un dénommé Vladimir Poutine. Page 6 Enquête Un avocat de choc L’affaire d’Outreau a assuré la notoriété d’Eric Dupond-Moretti. Depuis, on s’arrache les services de cet avocat devenu champion de l’acquittement. Il parcourt la France, de cour d’assises en cour d’assises, pour « faire le job ». Page 22 Quand Sartre, Nietzsche ou Barthes étaient au clavier KATE BARRY LIONEL CHARRIER/MYOP UK price £ 1,40 Crise bancaire : les Etats-Unis changent de stratégie avant le G 20 Economie Washington et les Européens peinent à restaurer un minimum de confiance Atiq Rahimi Syngué sabour Pierre de patience PRIX GONCOURT Photo :© Hélène Bamberger/P.O.L Modeste Mignon Albert Savarus Balzac En plus du « Monde » Uniquement en France métropolitaine La Comédie humaine Tome 10 L’ apocalypse selon Ballard Le Monde des livres Dede

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Page 1: Le Monde 14 11

www.lemonde.fr

64e Année - N˚19845 - 1,30 ¤ - France métropolitaine --- Vendredi 14 novembre 2008 Fondateur : Hubert Beuve-Méry - Directeur : Eric Fottorino

Algérie 80 DA, Allemagne 2,00 ¤, Antilles-Guyane 1,90 ¤, Autriche 2,00 ¤, Belgique 1,40 ¤, Cameroun 1 400 F CFA, Canada 3,95 $, Côte d’Ivoire 1 400 F CFA, Croatie 18,50 Kn, Danemark 24 KRD, Espagne 2,00 ¤, Finlande 2,50 ¤, Gabon 1 400 F CFA, Grande-Bretagne 1,40 £, Grèce 2,20 ¤, Hongrie 650 HUF, Irlande 2,00 ¤, Italie 2,00 ¤, Luxembourg 1,40 ¤, Malte 2,50 ¤,Maroc 10 DH, Norvège 24 KRN, Pays-Bas 2,00 ¤, Portugal cont. 2,00 ¤, Réunion 1,90 ¤, Sénégal 1 400 F CFA, Slovénie 2,20 ¤, Suède 28 KRS, Suisse 2,90 FS, Tunisie 1,9 DT, Turquie 2,20 ¤, USA 3,95 $, Afrique CFA autres 1 400 F CFA,

Un dimanche sur les Champs-Elysées. Ouvrir ou ne pas ouvrirle septième jour ? La célèbreavenue parisienne est devenuele symbole d’un débat et d’undilemme multiformes. On y trou-ve en effet à la fois des commer-ces qui respectent le tradition-nel repos dominical et d’autresqui n’en tiennent plus compte.Politique, économie, droitsocial, sociologie, religion : touts’entremêle dans cette querellefrançaise récurrente. Interditdésuet déjà écorné par lesexceptions de plus en plus nom-breuses à la règle ? Passéismeaveugle à l’évolution des mœurset des comportements ? Tabouusé, ancré dans des prescrip-tions religieuses et des prati-ques sociales en pleine muta-tion ? Chacun a sa réponse etles raisons de sa réponse. Lechef de l’Etat brûle de « libérertout ceci ». Les élus de la majori-té sont divisés, même si l’UMPpropose d’accepter, sous condi-tion, cette évolution. Ceux del’opposition et les syndicatssont franchement hostiles.Lire page 11

a UE. Le chômage est au plus hautdepuis onze ans en Grande-Bretagne.Le plan Merkel est critiqué pardes experts en Allemagne. Page 10a Etats-Unis. Le revirementd’Henry Paulson à propos de la gestionde la crise bancaire. Barack Obama,signe d’une espérance collectivede changement de la société américaine,dans tous les domaines. Pages 4 et 15

a Paillettes ternies. La croissancedu luxe ralentit. Le secteur sera-t-ilen récession en 2009 ? Page 16a OCDE. Pessimisme : des difficultésjusqu’au second semestre 2010. Page 16a Sherpa ad hoc. François Pérol,secrétaire général adjoint de l’Elysée,chargédesquestionséconomiques.Page 19a Débats. Pervenche Berès ; Christiande Boissieu et Hervé Lorenzi. Page 20

I nstitution d’un royaume qui veut êtreun modèle de tolérance, les célèbrescoffee shops néerlandais sont mena-

cés. Il y en a 800 dans le pays. Caractéristi-que : on peut y acheter du cannabis, pour-vuqu’onsoitmajeur etsimpleconsomma-teur. Idée dedépart : la légalisation empê-che le développement des réseaux crimi-nels.Mais voilà, le crime organisé s’y inté-resse, et notamment une bande d’originemarocaine. Les incidents se sont multi-pliés ces derniers temps : pressions,menaces, racket. Les élus se plaignent. Legouvernement conservateur plaide pourla fin des coffee shops, l’opposition socia-liste aussi. Les maires, eux, hésitent. a

Lire page 10

J aneBirkin,grand-mèreheureu-se de 61 ans, sort un nouvelalbum.SansSergeGainsbourg,

évidemment, ni ces paroliers célè-bres (Souchon, Hardy, MC Solaar)qui la servirent après la mort deson compagnon. Pour la premièrefois, la chanteuse britannique amis ses propres mots sur l’intégra-lité des douze chansons.

Au Monde, qu’elle a reçu dansson appartement, capharnaümchic et sincère, elle explique s’êtreappuyée sur la famille pour faireémerger les textes. Sur ses troisfilles, nées de pères différents. Surses parents. « Je voulais retrouverl’adolescence, l’enfance, le seul paysqui vaille la peine d’être revisité. » a

Lire page 24

Commerces Ouvrir ou ne pas ouvrir le dimanche, telle est la question

La famille Birkin au cœurdu nouvel album de Jane

S artre,NietzscheetBarthes furentaus-si des pianistes amateurs et passion-nés. Dans cet amour, qui fait écho à

celui de la mère et à l’absence du père,apparaît une part de secret, discrète maisfabuleuse. En évoquant la manière dont lamusique dessine un espace neuf chez lesphilosophes, François Noudelmann aécrit un livre magnifique (Gallimard). Oùl’on découvre comment la pratique musi-cale renvoie à ce que le désir humain a deplusincontrôlable.« Lamusiquese tait tou-jours. Elle ne s’encombre d’aucun dis-cours », disait Roland Barthes. a

Lire notre supplément« Le Monde des livres »

L e sauvetage des banques américai-nes tourneau casse-tête. Débutocto-bre, le Congrès adoptait un plan de

700milliards de dollars consistant à ache-ter les actifs « pourris » des banques.Mercredi 12 novembre, ce plana étéaban-donné par Henry Paulson, le secrétaireau Trésor, au profit d’une recapitalisa-tion des banques assortie d’autres mesu-res d’aide au système financier. L’objectif

est de favoriser la relance du crédit,notamment pour aider l’automobile.

Ce revirement n’a pas rassuré. Dans lesillagede Wall Street, la plupart des Bour-ses asiatiques ont chuté, jeudi 13.

Alors que les signes de récession semultiplient, notamment en Europe, lesdirigeants du G 20, qui se réunissentsamedi près de Washington, auront fort àfaire pour rétablir la confiance. a

Aux Pays-Bas,les coffee shopsbientôt fermés ?

PAGE TROIS

A l’école, uneégalité de façadeLa Suède a constatéque, dès la maternelle,les garçons et les fillesn’étaient pas traitésde la même façon. Unediscrimination à laquellechercheurs et enseignantstentent de mettre fin.

BiodiversitéLes expertss’organisentSous l’égide de l’ONU,les spécialistes dela protectiondes écosystèmes– la biodiversité au senslarge – devraient bientôts’organiser en un grouped’experts, commeil en existe pour l’étudedes évolutions climatiques(le GIEC). La Francedéfend le projet ethébergerait volontiersle secrétariat dudit groupe.Page 4

RussieQui commande ?Comme un seul homme, les députéss’apprêtent à allonger de deux ansle mandat présidentiel. Pas celui queremplit aujourd’hui Dmitri Medvedev :la mesure ne s’appliquera que pour leprochain président. Qui pourrait bien êtreun dénommé Vladimir Poutine. Page 6

EnquêteUn avocat de chocL’affaire d’Outreau a assuré la notoriétéd’Eric Dupond-Moretti. Depuis,on s’arrache les services de cet avocatdevenu champion de l’acquittement.Il parcourt la France, de cour d’assisesen cour d’assises, pour « faire le job ».Page 22

Quand Sartre,Nietzsche ouBarthes étaientau clavier

KATE BARRY

LIONEL CHARRIER/MYOP

UK

pric

1,40

Crise bancaire : les Etats-Unischangent de stratégie avant le G 20Economie Washington et les Européens peinent à restaurer un minimum de confiance

Atiq Rahimi

Syngué sabourPierre de patience

PRIX GONCOURTPhoto : © Hélène Bamberger/P.O.L

Modeste MignonAlbert Savarus

Balzac

En plus du « Monde »Uniquement en France métropolitaine

La Comédie humaine Tome 10

L’ apocalypseselon BallardLe Monde des livres

Dede

Page 2: Le Monde 14 11

Editorial

Société éditrice du « Monde » SAPrésident du directoire, directeur de la publication : Eric Fottorino

Vice-président, directeur général : David GuiraudSecrétaire général du directoire : Pierre-Yves Romain

Directeur du « Monde » : Eric FottorinoDirecteur adjoint : Laurent Greilsamer

Editeur : Michel SfeirDirecteur de la rédaction : Alain Frachon

Directeur adjoint de la rédaction : Jacques BuobDirecteur éditorial : Gérard Courtois

Rédacteurs en chef : Patrick Jarreau, Michel Kajman,Franck Nouchi (« Le Monde 2 ») et Isabelle Talès

Chef d’édition : Françoise TovoDirecteur artistique : Quintin Leeds ; Veille de l’information : Eric Azan ;

Secrétaire général : Jean-Pierre GiovencoMédiatrice : Véronique Maurus

Directeur des relations internationales : Daniel Vernet

Conseil de surveillance : Louis Schweitzer, présidentJean-Pierre Tuquoi, vice-président

Anciens directeurs : Hubert Beuve-Méry (1944-1969), Jacques Fauvet(1969-1982), André Laurens (1982-1985), André Fontaine (1985-1991),

Jacques Lesourne (1991-1994), Jean-Marie Colombani (1994-2007)Le Monde est édité par la Société éditrice du Monde SA

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Rédaction : 80, boulevard Auguste-Blanqui,75707 Paris Cedex 13Tél. : 01-57-28-20-00 ; télex : 202806F ; télécopieur : 01-57-28-21-21

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Bis repetita. A peine la motion de Ségolè-ne Royal avait-elle dépassé celle de sesconcurrents, le 6 novembre, à l’issue duvote des adhérents socialistes, qu’ontresurgi les mêmes réflexes qu’au prin-

temps 2006, lorsque la présidente de la région Poi-tou-Charentes s’était mise à grimper dans les son-dages et à bouleverser l’ordre des choses. Au seinduPartisocialiste, lepremierréflexedesescamara-des a été de contester sa capacité à rassembler :« Son score [29,5 %] ne lui permet pas d’être majori-taire », a d’abord déclaré le premier secrétaire sor-tant,FrançoisHollande, sonex-compagnon,avantde rectifier le tir un jour plus tard. D’autres commeHarlem Désir, Pierre Moscovici, Jean-MarcAyrault, signataires de la motion Delanoë, ont misen avant une logique de « fragmentation ». MichelRocard a menacé de quitter le PS. Jean-Luc Mélen-chonamis lamenaceàexécution. Quandlesportesclaquent au PS, c’est le signe que quelque chose defondamental est en jeu.

Symptomatiques aussi les réactions hors PS,dans les dîners en ville ou au zinc des cafés. D’uncôté, les pro-Royal exultant du nouveau tour quecette guerrière de 55 ans a joué aux « éléphants ».De l’autre, les anti-Royal, aussi violents que lespremiers sont enthousiastes. A les entendre, sapercée signifierait ni plus ni moins la mort du PS,l’enterrement d’Epinay, l’abandon de la « vraiegauche » pour le pâle ersatz démocrate – compre-nez centriste. Certains vont même jusqu’à mettreen doute ses capacités intellectuelles, désarçon-nésparsesoscillationsidéologiqueset l’impossibi-lité qu’ils ont de la rattacher à une quelconquefamille de pensée.

Dix-huit mois après son échec à l’élection prési-dentielle, Mme Royal crée toujours des clivages.Elle réussit même à faire sortir de leurs gonds leschefs d’entreprise qui, d’ordinaire, fuient les jou-tes politiques. « Je trouve que nous pourrions avoird’autres débats plus constructifs sur ce que Totalapporte à la société française », a déclaré Christo-phedeMargerie, ledirecteurgénéralde l’entrepri-se, dans un entretien à La Tribune du 8 novembre,

réagissant à la proposition de Mme Royal de taxerles « super profits » pétroliers pour sauver lesentreprises en difficulté.

Dansson camp comme ailleurs, l’ex-candidate àlaprésidentiellenelaissepersonneindifférent.Elleest aimée ou détestée, admirée ou rejetée commeun corps étranger. Jeanne d’Arc ou Savonarole.C’estselon.Carilyaussisoncôtéchristiquequigal-vanise les foules, mais hérisse ceux qui, nourris aulait de la République laïque, vivent comme unetransgression absolue les « aimez-vous les uns lesautres » qu’elle lance dans ses réunions publiques.Toutcelaest passionnel.Trop. Il faut de lasérénité,voire de la froideur, pour évaluer le phénomènepolitiquequisedéroulesousnosyeuxetqui touchebien au-delà de l’épiderme.

Retouraux faits : SégolèneRoyal n’apas déclen-ché de raz de marée dans la campagne du congrès

de Reims : cela montre de facto que le fossé quis’était installéentreelleetsonpartipendantlacam-pagne présidentielle n’est pas résorbé. En revan-che, sa motion a nettement distancé celle de sescamarades qui pouvaient prétendre au poste depremier secrétaire. C’est le signe que ses concur-rents peinent à contrer la rupture qu’elle incarne.

Le cas le plus intéressant est celui de BertrandDelanoë. Le maire de Paris partait grand favori dela compétition. Il n’a pas échoué par amateurisme,préparantau contraire avecsoin sa campagne. Dèsl’été, ilavaitmodernisésondiscoursenpubliantunlivre De l’audace ! (Robert Laffont, 290 p.,20 euros),dans lequel ilvantaitsagestionpragma-tique de la capitale et s’employait à réconciliersocialisme et libéralisme politique. D’où son slo-gan« Je suis libéral et socialiste », qui lui sera ensui-tereproché.M.Delanoëavaitaussiprissoinderas-sembler derrière lui les figures historiques du parti– Michel Rocard, Lionel Jospin, sans oublier Fran-çois Hollande, le premier secrétaire sortant –, enpensantqu’ences tempstroublés lesadhérents ontbesoin de savoir d’où ils viennent.

La conception du vieux partiCe « j’assume tout » lui est revenu comme un

boomerang : face à la rupture prônée parMme Royal, le changement dans la continuité qu’ilincarnait s’est révélé insuffisamment mobilisa-teur. Derrière cet échec, c’est toute la conceptiondu vieux parti qui se trouve bousculée : M. Dela-noë défend un parti de militants là où SégolèneRoyal est soupçonnée de prôner un rassemble-ment de supporteurs. C’est aussi toute une façonde faire de la politique qui se trouve questionnée.Le maire de Paris faisait le pari qu’en période decrise économique et financière, un discours sage,sérieux, axé sur l’« efficacité de gauche » séduiraitles militants. Il s’est trompé.

Martine Aubry, l’autre prétendante, avait d’em-blée choisi un discours plus radical, celui de « latransformation sociale ». Mais c’est sur le choix deses alliés que la maire de Lille a commis uneerreur : en acceptant de rassembler sur une mêmemotion des strausskahniens et les fabiusiens quis’étaient déchirés trois ans plus tôt sur l’Europe,elle a donné le sentiment de valider les pratiquesdu vieux PS. Celui qui, à coups de fâcheries et deréconciliationssuccessives,afinipardonner l’ima-ge d’une formation politique opportuniste.

C’est sur ces deux erreurs qu’a surfé Mme Royal,sans pour autant parvenir à rassurer. Car, commedurant la présidentielle, son projet reste inabouti.Ilestendevenir. Il fait fidesvieillesfamillesdepen-sée, à commencer par la social-démocratie quali-fiée « d’idée périmée », mais n’en finalise pas denouvelle. Il emprunte à la droite – la sécurité,« l’agilité », qu’il faut donner aux entreprises –,mais chasse aussi sur les terres de la gauche extrê-me, lorsqu’ilproposeparexempledeplacer lesban-ques sous la surveillance des salariés et des usa-gers.Il senourritdenouveauxthèmes–ledévelop-pement durable – et de nouvelles pratiques – ladémocratie participative –, qu’il tente de marieraux anciens. Il repose sur l’idée que le socialismenouveausera forcément unesynthèseet nonlavic-toire d’un courant contre un autre.

Entre 2002 et 2007, Nicolas Sarkozy n’avait pasprocédé autrement à droite, refusant de choisirentre les libéraux et les étatistes de l’UMP, maisentraînant les uns et les autres dans une nouvellesynthèsefondéesurdesvaleurs identitaires fortes:la sécurité, le travail. Ce même type de travail sem-ble engagé à gauche. En ce sens, le phénomèneRoyal n’est pas qu’épidermique. a

Courriel : [email protected]

Incorrigible par Pessin

« Cumul de fautes »

L’élection de Barack Obama a étéaccueillie en Europe par une exception-nelle vague d’allégresse. Les hommespolitiquesdetousbordsontsaluél’avène-ment d’une nouvelle ère dans les rela-

tions transatlantiques. Les médias se sont réjouisde la victoire d’un candidat dont les convictions,l’histoire, la vision du monde leur apparaissaientplus proches de leurs propres valeurs que celles deson rival.

Les citoyens ordinaires, interrogés au lende-main du scrutin, ont exprimé leur chaleureusesympathie à l’égard du nouveau président améri-cain, devenu l’incarnation de leurs espoirs et deleurs aspirations. Bref tout s’est passé comme siles électeurs d’outre-Atlantique avaient porté à laMaison Blanche le favori des Européens dans unesoudaine communion d’esprit entre les peuplesdes deux continents.

Etrange ferveur collective à l’égard d’un hom-me dont toute la vie s’est construite hors de touteréférence à l’Europe. Un antieuropéen ? Non sansdoute.Maisàcoupsûrunnon-Européen.Aladiffé-rence d’une grande partie du personnel politiqueaméricain, de John F. Kennedy à John Kerry, enpassantparBillClinton,BarackObaman’astricte-mentaucunlienavecl’Europe–mêmesiungénéa-logiste belge lui attribue, dans le quotidien bruxel-lois Le Soir, 36 % de sang anglais, 5 % de sang alle-

mand,1 %desangfrançaisetmêmequelquesgout-tes de sang belge. Le successeur de GeorgeW. Bush, américain né à Hawaï d’un père kényanetélevéen partieenIndonésie, apeut-êtreune vas-te connaissance du monde, mais le Vieux Conti-nent n’appartient pas à son champ d’expérience.

Dans sa belle et émouvante autobiographieLes Rêves de mon père (Presses de la Cité, 454 p.,21 euros), Barack Obama raconte les trois semai-nes qu’il a passées en Europe avant de se rendrepour la première fois au Kenya. Il visite Londres,Paris, Madrid, Rome, comme tout bon Améri-

cain, mais ne s’y sent pas à l’aise. Pendant toutson séjour, dit-il, il est « nerveux, sur la défensive,défiant ». Ce n’est pas que l’Europe ne soit pasbelleà ses yeux. Au contraire, tout est exactementcomme il l’avait imaginé. Mais il y demeure exté-rieur. « Simplement ce n’était pas à moi », écrit-il.Il se demande si son séjour européen n’a pas étéun moyen de retarder sa rencontre avec le paysde son père.

On ne saurait déduire de cet épisode personnel

que Barack Obama n’aime pas l’Europe. Il resteque celle-ci semble étrangère à son univers. DanssondiscoursdeBerlin, le26juillet, moment fortdesa tournée européenne, il a appelé à un « partena-riat » entre les deux continents, mais c’est encitoyen « fier d’être américain » et en « citoyen dumonde » qu’il s’est adressé aux Européens. Cen’est pas parce qu’il entend rompre avec les orien-tations de son prédécesseur, si critiquées en Euro-pe, que celle-ci doit se laisser gagner par la bonneconscience en considérant que le résultat du scru-tin lui donne raison. Le succès de Barack Obamalui impose surtout des devoirs.

L’accessiond’unNoirà laprésidence desEtats-Unis est sans aucun doute un événement histori-que. Les Européens n’ont pas tort de s’en féliciter.Mais, en insistant sur la longue histoire du racis-me et de la ségrégation aux Etats-Unis, ils sem-blent oublier qu’il leur reste à eux-mêmes beau-coup à faire. Les vingt-sept chefs d’Etat et de gou-vernementde l’UE,commelesvingt-septcommis-saires européens, sont tous blancs. « Quel payseuropéen sera le premier à briser le tabou et à faireconfiance à un dirigeant de couleur ? », demande leprésident du groupe libéral du Parlement euro-péen, Graham Watson. C’est la leçon à tirer del’« obamania » européenne. a

Courriel : [email protected]

Leçon de l’« obamania » européenne

La nouvelle synthèse de Ségolène Royal

Isabelle de Silva n’a pas mâché ses mots :quand l’administration pénitentiaire com-met un « cumul de fautes », elle doit êtrecondamnée. Chargée de dire le droit devantle Conseil d’Etat, mercredi 12 novembre, sur

un recours concernant la mort d’un jeune de19 ans en détention, la commissaire du gouverne-ment – qui ne parle pas au nom des pouvoirspublics – a rappelé une évidence, juridique et mora-le, malheureusement oubliée dans nos prisons sur-peuplées : l’Etat « a une mission de service publicdans le fonctionnement pénitentiaire ».

Le 23 juillet 1996, Jawad Zaouiya, depuis quinzejours en détention provisoire à la maison d’arrêt deBois-d’Arcy (Yvelines), pour avoir été mêlé à desincidents avec la police dans la cité du Val-Fourré àMantes-la-Jolie, meurt asphyxié. Dans cette cellulede 9 m2, un de ses deux codétenus avait déclenchéun incendie en mettant le feu à son matelas. A lasuite de cette tragédie, les parents de Jawad se tour-nent vers la justice. Le 2 février 2006 – près de dixans après les faits ! –, la cour administrative d’ap-pel de Versailles condamne l’Etat à verser uneindemnité de 15 000 euros… Le garde des sceauxde l’époque, Pascal Clément, demande l’annula-tion de cette condamnation.

Mme de Silva a recommandé au Conseil d’Etat –qui rendra sa décision dans une quinzaine de jours– de confirmer le jugement de Versailles et de réé-valuer le montant de l’indemnité, jugé « très fai-ble » pour la perte d’une vie. Car, dans cette affaire,l’Etat n’a pas satisfait à son obligation de « respec-ter la légalité ». Tout d’abord, et conformément aurèglement pénitentiaire, Jawad, comme tout jeunede moins de 21 ans, aurait dû être seul dans sa cel-lule. Ensuite, les prisons ne satisfont pas aux condi-tions élémentaires de sécurité. Ainsi, il n’y a pas dedispositifs d’aération dans les cellules, au prétexteque les prisons ne sont pas ouvertes au public !L’Etat est triplement condamnable dans cette affai-re : cruel, irresponsable et, sa faute avérée, incapa-ble d’un peu de noblesse et de magnanimité.

Cet enchaînement de fautes confirme une tristeréalité : nos prisons sont trop souvent des lieuxde non-droit. Leurs usagers, détenus pour êtrepunis et s’amender, ont des devoirs et aussi desdroits. Ne pas les respecter, c’est faire honte à laRépublique. a

Chronique

AnalyseFrançoise FressozChef du service Europe-France

Europe Thomas Ferenczi

0123 est édité par la Société Editrice du Monde (SA). La reproduction de tout article est interdite sans l’accord de l’administration. Commission paritaire des publications et agences de presse n° 0712 C 81975 ISSN 0395-2037

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01232 Vendredi 14 novembre 2008

Page 3: Le Monde 14 11

STOCKHOLMENVOYÉE SPÉCIALE

Elles glissent en riant surles toboggans, grimpentavec énergie sur lesbancs, s’emparent desvoitures à roulettes que

lesanimatricesontmisesà leurdis-position. Emma, Ida et Alice, quiviennent de fêter leurs 3 ans, profi-tentd’undestempsnonmixtes ins-taurés en 2005 par l’école de Jär-fälla, dans la banlieue de Stock-holm : une fois par semaine, lesfillettes de cette école pilote enmatière d’égalité des sexes sontinvitées,pendant lamatinée,à fairede la gymnastique « entre elles ».

Cette – légère – entorse au prin-cipe de mixité a été introduite aunom de l’égalité entre filles et gar-çons. « Lorsque les enfants faisaientde la gymnastique ensemble, les gar-çons prenaient toute la place, racon-te Ingrid Stenman, l’une des res-ponsables de l’école. Ils accapa-raient les jeux, ils occupaient l’espa-ce, et les filles finissaient par s’effa-cer : elles se retrouvaient dans lescoins. Depuis que les filles sont entreelles, elles reprennentconfiance.Ellesjouent librement et elles découvrentquefairedutoboggan, sauteroucou-rir, c’est vraiment amusant ! »

Leçons de vie domestiqueDepuis 2005, les 24 éducateurs

de cette école suédoise quiaccueille une centaine d’enfantsâgés de 1 à 5 ans ont aussi tenté demodifier leur comportement.« Nous n’en avions pas conscience,mais avant, nous encouragions lesgarçonsà prendre des risques, à sau-ter, à s’amuser, alors que nousdisions sans cesse aux filles de faireattention, poursuit Ingrid Sten-man. Nous restions autour d’elles, àles retenir comme si elles allaienttomber ou à les aider comme si ellesn’allaient pas y arriver. Sans lesavoir, nous les empêchions de profi-ter des jeux ! »

Il y a encore quelques années,Ingrid Stenman aurait pourtantsouri à l’idée que, dans son école,les filles et les garçons n’étaientpas traités de la même manière.

Mais,en2004,unechercheusespé-cialisée dans les questions de« genre »estvenuetravailleràJär-fälla dans le cadre d’un program-me gouvernemental sur l’égalitédes sexes. Pendant plusieurs mois,elle a filmé les activités, observél’accueildesenfants lematin,assis-té aux repas de midi. Et ses conclu-sions ont stupéfié les éducateurs :sans en avoir conscience, ils réser-vaient aux filles et aux garçons untraitement bien différent.

Les adultes laissaient ainsibeaucoup plus de place aux gar-çons, qui utilisaient en moyenneles deux tiers du temps de parole.Lors des échanges avec lesenfants, les éducateurs accep-

taient sans difficulté que les gar-çons interrompent les filles alorsqu’ils demandaient aux filles d’at-tendre patiemment leur tour.Enfin, ils avaient deux registres dediscours : des phrases courtes etdirectives pour les garçons, desdiscours plus longs et plusdétaillés pour les filles.

Lors des repas, ces différencestournaientà lacaricature : les filmstournésen2004montrentdespeti-tesfillesde3ou4ansservantdocile-mentdesverresdelaitoudesassiet-tes de pommes de terre à des petitsgarçons impatients. Une réparti-tion des rôles encouragée, bieninvolontairement, par les éduca-teurs.« Sans nous en rendre compte,

nous demandions aux filles de nousaider à porter les plats et à participerau service, sourit Barbro Hagström,l’une des éducatrices. Nous ne solli-citions jamais les garçons. »

Dans un pays où l’on ne plaisan-te pas avec l’égalité des sexes, l’étu-de a consterné les éducateurs.« Nous avons découvert que nousavions des préjugés sur la manièredontdoiventsecomporter lesenfants,constateMme Hagström.Nousatten-dions des filles qu’elles soient calmes,polies et serviables, alors que nousacceptions sans difficulté que les gar-çons fassent du bruit et réclamenthaut et fort ce qu’ils voulaient. Cela asuscité beaucoup de discussions àl’école, mais aussi dans ma famille,

qui compte trois garçons ! » En2004, le gouvernement suédois,qui a consacré près de500 000 euros à des projets scolai-res sur l’égalité des sexes, a alloué7 525eurosàl’écoledeJärfälla.Pen-dant un an, Ingrid Stenman a suivià mi-temps un cursus universitairesur le « genre », qui lui a permis dedécouvrirqueleséducateursdeJär-fällaagissaientenfaitcommelaplu-part des adultes. « Dans les écoles,comme dans les familles, les stéréoty-pes restent très présents, même si lesparents ou les enseignants n’en sontpas conscients », résume Lars Jal-mert, professeur à l’université deStockholm.

Au terme de ce travail, l’équipe

éducative de Järfälla a décidéd’instaurer deux temps non mix-tes d’une heure trente par semai-ne. Selon les éducateurs, cesmoments permettent aux enfantsde profiter tranquillement desjeux associés à « l’autre sexe ».

Les filles peuvent ainsi condui-re des voitures ou sauter sur lesbancs sans que les garçons lesdérangent. Réunis dans une autresalle de jeux, les garçons, eux,s’amusent avec des dînettes, despeluches et des poupées sans queles filles viennent s’approprier leslieux et leur donner des leçons devie domestique.

La mixité est aussi suspendue,de temps à autre, pendant lesrepas : pour éviter que les fillesjouent les auxiliaires de service,certains déjeuners se déroulentautour de tables séparées.

Mais l’étude de 2004 a surtoutconduit les éducateurs à prêterune attention nouvelle à leurs ges-tes de tous les jours. « Ce travailnous a ouvert les yeux, résumeIngrid Stenman. Aujourd’hui,nous tentons de faire bouger lesfrontières : un garçon qui veutjouer à des jeux “de fille” ne doit passe sentir faible ou ridicule, une fillequi s’affirme et prend la parole nedoit pas sentir de réprobation. C’estun jeu “gagnant-gagnant” quiouvre de nouveaux espaces auxfilles comme aux garçons : s’ils lesouhaitent, ils peuvent sortir desschémas traditionnels. »

Le programme sur l’égalité dessexes lancé en 2004 par le gouver-nement a touché 28 écolesaccueillant des enfants de 1 à 5 ans.« Les désordres scolaires sont liés,pour beaucoup, aux inégalités entreles sexes et au manque de respectpour les autres êtres humains, affir-me Nyamko Sabuni, la ministre del’intégration et de la parité du gou-vernement de centre droit. Le com-bat pour l’égalité des sexes doit com-mencerleplustôtpossible. »Unbud-get de près de 11 millions d’eurosdoit permettre d’étendre ce pro-gramme aux écoles élémentairesdans les années à venir. a

Anne chemin

Une chercheuse suédoise a constaté que, dès l’âge de 1 an, filles et garçons n’étaient pas traités dela même façon. Le gouvernement a lancé un programme-pilote dans 28 écoles pour y remédier

L’égalité des sexes à bonne école

Page trois Suède

EN FRANCE, les programmes sué-dois pour l’égalité des sexes fontvolontiers sourire : ils passent, aumieux, pour une manifestation desravages du politiquement correct,au pire, pour le signe d’une obses-sion égalitaire qui prend parfois lesallures d’un contrôle social. Pour-tant, les études françaises aboutis-sent à la même conclusion que lestravaux suédois : à l’école, les filleset les garçons ne sont pas traités dela même façon.

Les travaux montrent ainsi que,à copie égale, les filles et les gar-çons n’obtiennent pas les mêmesnotes : en physique, les garçonssont évalués plus généreusementque les filles lorsque les copies sontbonnes, plus sévèrement qu’elles,lorsqu’elles sont mauvaises, com-me si les enseignants s’attendaientà de meilleurs résultats de la partdes garçons. « Du coup, les ensei-gnants les encouragent plus vive-ment lorsqu’ils réussissent et les sanc-tionnent plus durement lorsqu’ils lesdéçoivent », explique Marie Duru-Bellat, sociologue à Sciences Po.

Liste de scénariosCe « double standard » joue

aussi en matière de comporte-ment : les garçons sont interrogésplus souvent, et leurs interventionsspontanées mieux tolérées. « Lesenseignants, sans en avoir conscien-ce, interagissent avec les garçonsdans une proportion des deux tiers,note Nicole Mosconi, professeurémérite à Paris-Ouest. Et leur indis-

cipline est tolérée comme un compor-tement fâcheux, mais inévitable,alors qu’elle est stigmatisée chez lesfilles. »

Malgré ces travaux, la prise deconscience de ces différences detraitement reste embryonnaire.« En France, nous préférons mettrel’accent – légitimement d’ailleurs –sur les inégalités sociales ou les discri-minations ethniques, note MarieDuru-Bellat. Paris n’est certes pasKaboul, mais l’accumulation de cespetites différences qui paraissent àpremière vue dérisoires finit parpeser : le fait que les enseignants s’in-téressent moins aux filles, notam-ment dans les matières scientifiques,semble nourrir une moindre affirma-tion de soi que l’on retrouve chez lesfemmes dans le monde du travail. »

Comme en témoigne un collo-que sur l’égalité professionnelleorganisé à Paris les 13 et 14 novem-bre dans le cadre de la présidencede l’Union européenne, la Francecommence à se préoccuper de cesinégalités. En 2000, un bulletin del’éducation nationale proposaitaux enseignants une liste de scéna-rios avec des recommandations :comment faire, par exemple, lors-que des garçons coupent la paroleà une fille en maths ? Et le 8 mars,la rectrice de Besançon, Marie-Jeanne Philippe, a été nommée à latête du comité de pilotage de laconvention pour l’égalité entre lesfilles et les garçons à l’école(2006-2011). a

A. Ch.

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À quoi servent les religions et pourquoi

accompagnent-ellesl’aventure humaine

depuis l’aube des temps ?

La mixité est suspendue, de temps à autre, pendant les repas. Afin d’éviter que les filles ne jouent les auxiliaires de service, certains déjeunersse déroulent autour de tables séparées, comme en ce jour de début novembre. CASPAR HEDBERG/KONTINENT POUR « LE MONDE »

La France peu sensibleà l’inégalité filles-garçons

0123Vendredi 14 novembre 2008 3

Page 4: Le Monde 14 11

ENTRETIEN AVEC JARED DIAMOND, PROFESSEUR DE GÉOGRAPHIE À L’UNIVERSITÉ DE CALIFORNIE À LOS ANGELES

« Avec Barack Obama, l’horizon des négociations sur le climat se dégage »Jared Diamond était de passage àParis,mercredi12novembre,àl’oc-casion d’un colloque organisé parl’Agence française de développe-ment (AFD) et le Réseau européenderecherche sur le développement(EUDN) sur le thème « popula-

tion et ressources naturelles ». CetAméricain de 71 ans a acquis unenotoriétéplanétairegrâceàses tra-vaux sur le destin des sociétés.

A la fin des années 1980, il adécidé de se consacrer, « modeste-ment »dit-il, « à l’histoire deshom-mes, sur tous les continents, aucours des 13 000 dernièresannées ». En 1998, son essai Del’inégalité des sociétés a été couron-né par le prix Pulitzer. Son dernierouvrage, Effondrement. Commentles sociétés décident de leur dispari-tion ou de leur survie (Gallimard,2005), constitue une des sommesles plus riches sur le sujet. Nossociétés, confrontées à une criseécologique de grande ampleur,feront-ellespreuve dumêmeaveu-glement que certaines civilisa-tions disparues ? Devant cettequestion, Jared Diamond revendi-que un « optimisme prudent ».La victoire de Barack Obama àl’élection présidentielle auxEtats-Unis modifie-t-elle votreperception de la société améri-caine, de sa capacité à évoluer ?

Oui. Cette victoire montre que lanécessitéduchangementestdésor-mais partagée par une majoritéd’Américains. Cette évolution estclaire à propos du réchauffementclimatique. Il y a deux ans, beau-coupdoutaient encorede sa réalité.Ce n’est plus le cas. De nombreusesinitiatives locales sont en cours.Une majorité d’Etats ont commen-cé à agir. Avec Barack Obama, l’ho-

rizon des négociations internatio-nales[sur le climat] sedégage.C’estun politicien avisé. Il ira aussi loinque la population et le Congrèspourront le suivre. Un accord d’iciau sommet de Copenhague [surl’après-protocole de Kyoto], endécembre 2009, me paraît moinshors de portée.Vous jugez crucial que l’Améri-que revisite ses valeurs fondatri-ces. Pourquoi ?

L’Amérique doit s’interrogersur « le mode de vie américain ».Plusieurs des valeurs sur lesquel-les les Etats-Unis ont bâti leursuprématie ne sont plus opéra-tionnelles au XXIe siècle. Parmielles, il y a le consumérisme. Iln’est plus compatible avec unepopulation de plus de 300 mil-lions d’habitants dans un mondede ressources finies. Cela crée destensions à l’intérieur de la sociétéaméricaineet avec le restedumon-de. Notre niveau de consomma-tion par habitant est en moyenne32 fois supérieur à celui d’un paysen développement.

Le salut de la société américainepasse-t-il donc par une remiseen cause des standards deconsommation ?

Le salut des Etats-Unis et celuidu reste du monde, si nous vou-lons être en mesure de gérer lapénurieannoncéedematières pre-mières. Au rythme actuel, noussavons que les ressources essen-tielles seront épuisées d’ici à tren-te ou quarante ans. Les Améri-cainset les pays industrialisés doi-vent accepter de moins consom-mer. Ils doivent montrer l’exem-ple pour briser la course folle quiconduit le monde en développe-ment – Chine, Inde et Brésil entête – à vouloir rattraper les stan-dards de vie occidentaux. L’idéeque le développement serait syno-nymedetoujoursplus decroissan-ce,de toujours plusde consomma-tion, est une idée suicidaire.La crise financière nous montrequ’il est souvent trop tard quandles gouvernements passent àl’action.

Oui, c’est un danger réel. Lessociétés gaspillent du temps com-me nous, individus, attendons ledernier moment pour agir. Maisje reste optimiste, car l’Histoirenous enseigne que, la plupart dutemps, des solutions existent si lesbonnes décisions sont prises.

La disparition des Vikings oudes Mayas, consécutive à la surex-ploitation des écosystèmes dansuncontexte de changementclima-

tique, n’était pas une fatalité. Elleaurait pu être évitée si ces sociétésavaient accepté de remettre encause leur mode de vie et leursvaleurs.Vous faites le pari que la connais-sance des disparitions passéespermettra de ne pas répéter lesmêmes erreurs.

Lamondialisationpermetà l’in-formation et à la connaissance decirculer comme jamais aupara-vant. Non seulement nous savonsce qui est advenu aux sociétés quin’ont pas pris au sérieux la dégra-dation de leur environnement,mais nous avons accumulé, surnotre propre situation, une som-me de données et de diagnosticssans équivoque.

Nous sommes conscients de cequi est en train de se passer, et jeveux croire que nous saurons agiren conséquence. Il est encoretemps. Nous pouvons contenir àdes niveaux supportables l’éléva-tion des températures, nous pou-vons encore choisir de gérer demanière durable nos stockshalieutiques,nosressources fores-tières… Hier, des sociétés entièrespouvaient mourir à l’insu du restedu monde. Ce n’est plus possibleaujourd’hui. Mais cette situationa un revers. Si nous ne prenonspas les bonnes décisions, dansquelques décennies, l’effondre-ment risque d’être global. a

Propos recueillispar Laurence Caramel

CATASTROPHESAu Bangladesh, plusd’un million de sans-abrisun an après le cyclone SidrUn an après le passage du cyclo-ne Sidr, qui a fait plus de 4 000morts et disparus dans le sud duBangladesh, le 15 novembre2007, plus d’un million de person-nes vivent toujours sans abris etn’ont pas reçu d’aide pour recons-truire leurs maisons, a affirmél’organisation humanitaire bri-tannique Oxfam, mercredi12 novembre. D’après l’ONG, mal-gré les propositions faites à78 000 familles bangladaises envue de la reconstruction d’habita-tions résistant aux tempêtes,« seul un quart de ces logementsont été bâtis ». – (AFP.)

CLIMATLe Japon a émis une quantitérecord de CO2 en 2007Le Japon a émis la quantitérecord de 1,37 milliard de tonnesde CO2 pour l’année fiscale 2007,a annoncé, mercredi 12 novem-bre, le ministère japonais de l’en-vironnement. Un chiffre en haus-se de 2,3 % par rapport à 2006.« L’utilisation croissante d’énergieproduite en centrales thermiques,due à une baisse de la productionnucléaire, a largement contribué àcette hausse », a expliqué le minis-tère. Par rapport à 1990, annéede référence du protocole deKyoto, la hausse est de 8,7 %, mal-gré l’objectif assigné à l’archipelde réduire de 6 % ses émissionsde gaz à effet de serre pour lapériode 2008-2012. – (AFP.)

KUALA LUMPUR

ENVOYÉE SPÉCIALE

Ce n’estpasencoreunacte denaissan-ce, mais le principe est validé etmême inscrit dans l’agenda inter-

national : la rencontre internationalequi s’est achevée mercredi 12 novembreà Kuala Lumpur, en Malaisie, a permisd’avancer dans le processus de créationd’un groupe intergouvernemental d’ex-perts sur la biodiversité, qui devrait por-ter le nom d’Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Eco-system Services (IPBES).

La conférence, organisée par le Pro-gramme des Nations unies pour l’envi-ronnement (PNUE), a réuni les représen-tants de 96 pays et de nombreux experts.La France, dont la ministre de l’enseigne-ment supérieur et de la recherche, Valé-rie Pécresse, est intervenue à l’ouverturedes débats, voit « une petite victoire »dans le fait « que le principe soit accepté auniveau intergouvernemental et que les paysdonnent mandat [aux Nations unies]pour poursuivre les discussions ».

« Temps de l’action »Désireuse de montrer que l’engage-

ment de la France dans ce processus –très fort depuis 2005 – reste intact, Valé-rie Pécresse a insisté sur la nécessité « depasser du temps des prises de conscience »à celui de « l’action ». La ministre s’estdite favorable à un « mécanisme qui béné-ficie de toutes les garanties d’indépendan-ce et de transparence de fonctionnement ».Elle a ainsi souhaité que le secrétariat del’IPBES « soit placé sous les doubles auspi-ces des Nations unies et de l’Unesco ».

Mme Pécresse a également proposéque ce secrétariat soit installé à Paris,

dans les locaux du Musée de l’hommedont les travaux de restauration vien-nent d’être engagés et dont la réouvertu-re est prévue en 2012.

Si une très grande majorité des 96pays présents se sont montrés favora-bles à l’émergence d’un organe ayant le

pouvoir d’imposer des mesures, quel-ques-uns et non des moindres, comme leBrésil et la Chine, ont exprimé leurs réti-cences. Le Brésil, notamment, a rappelésa préférence pour la Convention pour ladiversité biologique, dont les règles sontpeu contraignantes. Les Etats-Unis, tra-

ditionnellement peu enclins à ce type dedispositifs, ont émis des réserves. Cepen-dant, de l’avis des experts, la délégationaméricaine semblait surtout dans l’atten-te d’un positionnement de l’administra-tion Obama.

L’idée d’un organisme bâti sur le

modèle du Groupe d’experts intergou-vernemental sur l’évolution du climat, leGIEC, couronné par le prix Nobel de lapaix, en 2007, près de vingt ans après sacréation, et doté de la même ambitionque lui, avait été prise en 2005 par Jac-ques Chirac.

L’ancien président français avaitalors exprimé « ses doutes sur l’efficacitédes décisions de la communauté internatio-nale » pour freiner de manière décisivel’érosion de la biodiversité. Dans la fou-lée, était né l’Imoseb (InternationalMechanism of Scientific Expertise onBiodiversity), processus consultatifdevant mener à la création d’un mécanis-me de type GIEC.

Ecosystèmes dégradésL’urgence à agir est à peu près aussi

grande que le défi lui-même. L’état deslieux de la planète, établi par l’Evalua-tion des écosystèmes pour le millénaire,dont les données ont été publiées en2005, impose d’agir de façon coordon-née. Entre 2000 et 2005, des étenduesde forêt aussi grandes que la Grèce ontdisparu, et l’épuisement des ressourcesmaritimes menace.

Comme l’a rappelé, à Kuala Lumpur,Achim Steiner, directeur exécutif duPNUE, alors que « le PIB mondial a plusque doublé au cours des vingt-cinq derniè-res années, 60 % des écosystèmes ont étédégradés ou exploités de manière irration-nelle ». C’est à Nairobi, siège du PNUE,où aura lieu le forum des ministres del’environnement, que se sont donné ren-dez-vous, en février 2009, les représen-tants des gouvernements présents enMalaisie. a

Brigitte Perucca

Planète

EXTRAIT DES MINUTES DU GREFFE DELA COUR D’APPEL DE VERSAILLES

Par arrêt du 17/04/2008, la cour d’ap-pel de Versailles a condamné Nasser-Eddine ASSAL, né le 23/04/1960 àCasablanca (Maroc) demeurant 1 rueAndré Messager - 78690 LESESSARTS LE ROI, aux peines de 18mois d’emprisonnement avec sursis etmise à l’épreuve pour une durée de 3ans avec obligation spéciale de s’ac-quitter des sommes dues à la partiecivile, l’Etat français au titre de l’es-croquerie à la TVA, à une amende de50.000 euros, à l’affichage par extraitdu présent arrêt, pendant 3 mois à lamairie de son domicile et à la publica-tion par extrait, à ses frais au JORF etLe Monde pour notamment escroque-rie à la TVA commise de 1997 à 2000et pour fraude fiscale par soustractionfrauduleuse à l’établissement et aupaiement total de la TVA au titre de lapériode du 01/01 au 31/12/1998 parminorations des déclarations mensuel-les et pour passations d’écritures ficti-ves, faits prévus et réprimés par lesarticles 313-1 et suivants du codepénal et 1741, 1743 et 1745 du CGI.

Vu au Parquet. P/ le Procureur Général.

Pour extrait certifié conforme. P/ le Greffier en Chef.

KUALA LUMPUR

ENVOYÉE SPÉCIALELa Malaisie, un modèle en matière de pro-tection de la biodiversité ? L’idée peut fai-re sourire, s’agissant d’un pays qui aconnu une telle déforestation. Il semblepourtant s’être acheté une conduite, affi-chant une politique qui en fait une sorte delaboratoire où l’on tente de maintenir untaux de croissance élevé (6,3 % en 2007)sans sacrifier la forêt tropicale, qui couvreencore 60 % de son territoire.

D’où, sans doute, l’empressement desautorités malaisiennes à accueillir la confé-rence internationale en vue de la créationd’un groupe intergouvernemental d’ex-perts de la biodiversité qui s’est tenue dans

la ville nouvelle de Putrajaya, près de Kua-la Lumpur.

Avec ses grands arbres, qui constituent« un arboretum unique », et son exception-nelle diversité (20 % des espèces sont pré-sentes sur le sol malaisien), le pays réalise« de gros efforts » pour protéger son patri-moine, assure Jean-Marc Roda, chercheurdétaché depuis deux ans au ForestResearch Institute Malaysia (FRIM).Selon lui, la Malaisie fait partie des paysémergents qui « consacrent le plus demoyens à la protection de leur environne-ment, juste derrière le Costa Rica ».

Parallèlement, le pays veut se position-ner sur le secteur des biotechnologies. Unchoix qui s’explique par une certaine répar-

tition des rôles au niveau régional. « LaMalaisie peut d’autant plus se permettre cet-te politique que du bois d’Indonésie passe illé-galement dans le pays. Deux Etats vertueux,ça ne marcherait pas », note Jean-Guy Ber-tault, du Centre de coopération internatio-nale en recherche agronomique pour ledéveloppement (Cirad).

Même si nombre d’organisations écolo-gistes les estiment insuffisants au regarddes urgences, les efforts du pays n’en repo-sent pas moins sur un réel engagement. Etce pour plusieurs raisons. D’abord, laMalaisie dispose d’un service forestier dequalité, qui se montre « impitoyable sur lesinfractions » commises en matière de défo-restation illégale. Par ailleurs, son système

de certification garantit un respect des nor-mes en matière d’exploitation forestière.

Enfin, le mode de fonctionnement quiprévaut dans le pays le protégerait descommerces illégaux excessifs. Dans les pro-vinces orientales du Sarawak et du Sabah,là où la forêt occupe une grande partie duterritoire, les affaires sont aux mains degroupes familiaux chinois dont la capacitéd’influence est très forte auprès du gouver-nement. Ces six ou sept familles garantis-sent en quelque sorte l’application de nor-mes strictes mieux que ne le feraient lesautorités elles-mêmes.

« La forêt est leur ressource depuis des lus-tres. Elles ne veulent pas la surexploiter. Enplus, elles ont diversifié leurs business », com-

mente Jean-Marc Roda. Ce qui expliqueque ces entreprises se montrent prêtes à« évoluer vers des marchés de niches de quali-té », abandonnant à la concurrence chinoi-se et vietnamienne les marchés bas degamme qui font l’essentiel de la demande.

La question est de savoir si la crise nerisque pas de balayer ces options. La pres-sion de la concurrence met cette politiquede développement durable de l’industriedu bois à l’épreuve. La qualité et la variétédes bois issus de ces forêts expliquent lestarifs en vigueur : 120 euros le m3, sachantqu’un arbre donne en moyenne environ8 m3. De quoi attiser les convoitises et, sur-tout, nourrir des milliers de familles. a

Br. P.

La Malaisie tente de concilier gestion durable de sa forêt et impératifs économiques

Scène de pêche près du port de Puerto Princesa dans l’île de Palawan. Le « triangle du Corail », qui s’étend des Philippines aux îlesSalomon en passant par l’Indonésie et la Malaisie, rassemble la plus importante biodiversité marine du monde. ROMEO GACAD/AFP

Jared Diamond. KLAAS KOPPE /AFP

Environnement Les Etats majoritairement favorables à la création d’un organe intergouvernemental

Consensus sur un forum mondial de la biodiversité

4 0123Vendredi 14 novembre 2008

Page 5: Le Monde 14 11

CHARLES LEWINSKY

Melnitz

“Impressionnant. Un roman-fleuve.”André Clavel, L'Express

“Un tour de force.”Samuel Blumenfeld, Le Monde des livres

“Formidable et bouleversant.”Guy Duplat, La libre Belgique

“Une extraordinaire fresque. Un tourbillon romanesque.”

Clémentine Goldszal, Elle

“Un grand roman classique.”Astrid Eliard, Le Figaro littéraire

“Une puissante fresque.”Minh Tran Huy, Le Magazine littéraire

“Un choc salutaire.”Isabelle Falconnier, L'Hebdo

“Vertigineux.”Alexis Lacroix, Marianne

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“Bouleversant. Impossible à quitter.”Mona Ozouf, Le Nouvel Observateur

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Prix duMEILLEUR LIVRE

ÉTRANGERHyatt Madeleine

L’activité humaine dégrade les écosystè-mes plus rapidement que ceux-ci ne peu-vent se reconstituer, avertit le WWF

(Fonds mondial pour la nature) dans sonrapport annuel intitulé « Planète vivan-te ». L’organisation utilise l’empreinte éco-logique pour tenter de chiffrer ce phéno-mène. Cet indice a été élaboré par deuxscientifiques, Mathis Wackernagel etWilliam Rees, au début des années 1990. Iltente d’évaluer le rapport entre les ressour-

ces consommées par un pays et la capacitéde ses écosystèmes à les reconstituer.

Précisément, l’empreinte écologiquemesure les surfaces biologiquement pro-ductives de terre et d’eau nécessaires pourproduire les ressources qu’un paysconsomme et pour absorber les déchetsqu’il génère. Ces surfaces sont exprimées

en hectares globaux, c’est-à-dire en hecta-res ayant une productivité égale à la pro-ductivité biologique mondiale moyenne.

La situation s’est fortement dégradéedepuis 1960 : selon le WWF, l’empreinteécologique mondiale dépasse aujourd’huila capacité de régénération de la planèted’environ 30 %.. En 2005, elle était de

2,7 hectares globaux par Terrien, alors quela planète ne met que 2,1 hectares globauxà la disposition de chacun de ses habitants.Les Emirats arabes unis et les Etats-Unissont les deux pays ayant l’empreinte éco-logique la plus élevée, l’Afghanistan et leMalawi ceux qui ont la plus faible. a

H. K.

Planète

Google plus fort que le célè-bre Centre de contrôle desmaladies (CDC) d’Atlanta,

en charge de la veille sanitaire auxEtats-Unis ? La firme fondée parLarry Page et Sergey Brin se tar-gue de pouvoir détecter les épidé-mies de grippe une semaine à dixjours plus tôt que le réseau améri-cain officiel de surveillance. Celagrâce à Google Flu Trends (tradui-re par Tendances de la grippe Goo-gle), un dispositif mis en œuvrepar Google.org, sa branche phi-lanthropique.

Il s’agit d’une application deGoogle Trends, l’outil servant àindiquer la popularité des mots-clés soumis au moteur de recher-che. Grâce à l’adresse IP, identi-fiant individuellement chaqueordinateur connecté à Internet,Google peut déterminer l’originegéographique des recherches.

L’entreprise de la Silicon Valleya défini un panier de mots-clés enrapport avec la grippe, allant de« thermomètre » à « symptômesde la grippe », en passant par« douleurs musculaires ». En croi-sant les données géographiquesagrégées – de manière à respecterla vie privée des internautes – et lenombre de recherches utilisantces mots-clés, il a été possible detracer la courbe de fréquence desinterrogations au fil du temps.

La comparaison de cette courbeet de celle de la surveillancemenée par le CDC, de 2003 à nosjours, montre une bonne corréla-tion entre les deux indicateurs. Aumois de février, les premières poin-tes dans les recherches en ligneont précédé de deux semaines ladétection par le CDC de l’épidé-mie de grippe. Cet avantage, en

termes de rapidité, s’explique parla tendance des personnes concer-nées à d’abord chercher des infor-mations sur Internet avant d’allerconsulter un médecin. Or, le systè-me de surveillance du CDC s’ap-puie, comme en France, sur lesinformations transmises par lesprofessionnels de santé.

Alerte rapideLe gain de temps pourrait se

révéler appréciable face à une épi-démie qui s’annoncerait particu-lièrement pernicieuse. « Plus tôtl’alerte est déclenchée, plus tôt desmesures de prévention et de contrô-le peuvent être mises en œuvre, etcela permettrait d’éviter des cas degrippe », indique, dans l’éditiondu New York Times du mercredi12 novembre, le docteur LynFinelli, qui dirige la surveillanceau département grippe du CDC.Aux Etats-Unis, 5 % à 20 % de lapopulation contractent la grippechaque année, avec à la clé36 000 décès en moyenne.

Pour l’instant, Google FluTrends ne fonctionne qu’auxEtats-Unis et indique l’intensitédes recherches dans chaque Etat.Comme son concurrent Yahoo!,qui poursuit un projet similaire,Google souhaite étendre l’idée àd’autres pays et d’autres maladies.

Au CDC comme chez Google,on reconnaît la nécessité de pour-suivre l’étude des données four-nies par le nouveau système, afinde s’assurer de la corrélationobservée. Les deux dispositifsdevraient de toute manièrecoexister à l’avenir, sans oublierl’arrivée prochaine de ceuxd’autres entreprises. a

Paul Benkimoun

Pays dont la consommation de ressources dépasse la capacité de reconstitution des écosystèmes

Pays dont la capacité de reconstitution des écosystèmes dépasse la consommation de ressources

1961 (frontières de 2005) 2005

Données insuffisantes

De 100 à 150 %Plus de 150 % De 50 à 100 % De 0 à 50 %

De 100 à 150 % Plus de 150 % De 50 à 100 %De 0 à 50 %

Source : WWF

La pression de l’homme sur la biosphère a doublé en 40 ans

L’humanitévit à crédit

BIOTECHNOLOGIESLa reproduction de sourisfemelles nourries au maïstransgénique perturbéeDes souris femelles nourries aumaïs transgénique peuvent êtreaffectées par des problèmes dereproduction, selon une étudemenée par des chercheurs autri-chiens, qui soulignent qu’il s’agitlà de « résultats provisoires », nepouvant, « en aucun cas, êtreaujourd’hui reportés sur l’êtrehumain », et que « d’autres étu-des devront déterminer si d’autresespèces animales que les souris sontégalement concernées ».Cette étude à long terme a été réa-lisée pour le ministère autrichiende la santé et l’Agence autrichien-ne pour la santé et la sécurité ali-mentaire par des chercheurs del’université de médecine vétéri-

naire de Vienne. Plusieurs géné-rations de souris ont été nourriespendant vingt semaines avec dumaïs transgénique produit par lefabriquant américain Monsanto,la variante NK603xMon810. Desorganisations écologiques, enparticulier Greenpeace et Glo-bal-2000, ont aussitôt demandé« l’interdiction immédiate et tota-le dans le monde entier » non seu-lement du maïs transgéniqueMon810, mais de tous les orga-nismes génétiquement modifiés.Cette étude a entraîné une réac-tion de la commissaire européen-ne à la santé, Androula Vassi-liou, qui a demandé aux autori-tés autrichiennes de la lui trans-mettre afin de la faire évaluerpar l’Autorité européenne desécurité des aliments (EFSA). –(AFP.)

Google, meilleur détecteurde la grippe aux Etats-Unis

0123Vendredi 14 novembre 2008 5

Page 6: Le Monde 14 11

MOSCOU

CORRESPONDANTE

A ttendu à Nice pour le sommetUE-Russie du vendredi 14 novem-bre à Nice, puis à Washington pour

le sommet du G20 le lendemain, DmitriMedvedev n’est-il qu’un président en sur-sis ? Les interrogations fusent à Moscoualors que le Parlement russe est sur lepoint de modifier la Constitution. Lesdéputéss’apprêtentàvoteraupasdecour-se – trois lectures en une séance– le projet de loi allongeant ladurée dumandat de quatreà sixans, a indiqué, mercredi, le chefde la commission constitution-nelle du Parlement, VladimirPliguine.

La plus grande précipitationest de mise depuis que le prési-dent russe a proposé l’allonge-ment non rétroactif du mandatle 5 novembre, à l’occasion deson premier discours à la nation. Aussitôtdit, le texte de loi a été envoyé à la Douma.Le Conseil de la Fédération (Sénat) a déjàpromisdel’examinerauplusvite.Sonadop-tion n’est plus qu’une question de jours.

Pour la plupart des observateurs, cechangementvaamorcer le retourdeVladi-

mir Poutine au Kremlin. « Le projet étaitdans l’airdepuis longtemps. Il viseàremettreen selle le leader national, car il faut unemain forte au cas où des troubles viendraientàsurgiràcausede lacrise », expliquelepoli-tologue Vladimir Pribylovski.

Le principal intéressé s’est bien gardédedémentir. Mercredi, Vladimir Poutine asalué la proposition de son protégé, indi-quant qu’il était « trop tôt » pour savoirqui en bénéficierait. Dépourvues de

« dimension personnelle », cespropositions vont contribuer« au développement du processusdémocratique », a-t-il précisé.

Pour séduire, la propositiond’allonger lemandataétéassor-tie d’une série de mesures cos-métiques. Le mandat des dépu-tés passe de quatre à cinq ans.La loi électorale va être assou-pliepourpermettre l’électionauParlement de représentants des

partis politiques concurrents à Russieunie, la formation pro-Kremlin, dont ladomination écrasante et le fonctionne-ment offrent une ressemblance frappanteavec l’ancien PCUS, le Parti communistede l’URSS.

En 2007, alors qu’il était encore au

Kremlin, le plus populaire des présidentsrusses n’avait pas caché son souhait devoir le mandat présidentiel allongé à« cinq, six ou sept ans ». Après huit annéesau pouvoir (2000-2008), M. Poutine avaittoutefois refusé de modifier la Constitu-tion dans le sens d’un troisième mandat,malgré les sollicitations de son entourage,craignant de rivaliser avec les chefs d’Etatd’Asie centrale dont les mandats neconnaissentplus de limites. Tout lemondeest d’accord, Vladimir Poutine revient.Maisquand ? En2012, une foisque Dmitri

Medvedev aura achevé son mandat, ouavant ?LequotidienéconomiqueVedomos-ti en est sûr : « La campagne électorale deVladimir Poutine a déjà commencé. »D’ailleurs, l’actuel premier ministre nevient-il pas de créer son propre site Inter-net ?

De plus, il prépare un discours impor-tant qui sera délivré le 20 novembre à l’oc-casion du congrès du parti Russie unie,dont ila pris latête l’annéedernière.Va-t-ilse muer en « secrétaire général » de Rus-sie unie, ou bien en « leader national » ?

Dans la foulée, il auraunerencontre télévi-séeavecles« simplescitoyens »delaFédé-ration, invités à lui poser des questions,comme c’était l’usage quand il était prési-dent. L’exercice lui plaît tant qu’il a décidéde le poursuivre. Dmitri Medvedev ne serapas de la fête. Pour l’heure, tout indiqueque le changement de la Constitution doitintervenir avant le grand raout du20 novembre. Pour l’ancien championd’échecs et figure de l’opposition GarryKasparov,« le pouvoir, confronté à laréalitéde la crise, renforce son contrôle ». Le tempspresse, car lacrise financièrea gagné l’éco-nomieréelle. Dansce contexte, le maintiende Vladimir Poutine au poste de premierministre est peu avantageux. Il n’y a quedes coups à prendre.

Des licenciements sont dans l’air (plusde 3 000 dans la région de Nijni Novgo-rod), la fuitedecapitauxs’accélère(50mil-liardsde dollars en octobre), le rouble perdchaquejourdesavaleurfaceaudollar.Sur-tout, le baril de pétrole est tombé au plusbas : 53 dollars pour le pétrole russe Urals,mercredi.Or lebudget2009aétéétabli surla base d’un baril à 70 dollars. Mercredi,Alexeï Koudrine, ministre des finances, aprévenu qu’il puiserait dans le Fonds de laRéserve (130 milliards de dollars), mis decôté pour les mauvais jours.

Mais au fond, Vladimir Poutine a-t-iljamais vraiment quitté le pouvoir ? « Lesfonctionnaires ont beau avoir accroché deuxportraitsdans leursbureaux[ceuxdePouti-neetMedvedev], tout lemondesaitquePou-tineest seul maîtreà bord », expliqueViktorCheïnis, du parti libéral Iabloko. Mais « siça tourne mal, il sera tout demême tenupourresponsable, indépendammentde la fonctionqu’il occupe ». a

Marie Jégo

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www.isth.fr

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BACHELIERS2008

PRÉPAREZSCIENCES PoEN 1 SEMESTRE(JANVIER - MAI)

ET INTÉGREZLES IEP

RUSSIEL’accident du sous-marin« Nerpa » serait dûà une erreur humaineMOSCOU. Le Comité d’enquêtechargé de déterminer les causesde l’accident du sous-marin rus-se Nerpa, qui a causé la mort devingt personnes, a indiqué, jeudi13 novembre, qu’un membred’équipage a fait fonctionner parerreur le système anti-incendiedu bord, libérant ainsi le gazFréon mortel. « Ce matelot a déjàavoué sa faute », a-t-il été précisé.

Mercredi, des techniciens tra-vaillant sur le bâtiment avaientexpliqué que l’accident était pro-bablement dû à « une défaillancedu système informatique ».Des responsables militaires rus-ses avaient ajouté que le Ner-pa serait mis en service, commeprévu, dans la marine russe. Enréalité, ce sous-marin était desti-né à la marine indienne : il por-tait déjà son nouveau nom, leChakra, et 200 marins indiensétaient arrivés récemment enRussie à cette intention.

International

ALGER

CORRESPONDANCECinq cents oui, vingt et un non ethuit abstentions. C’est par un sco-re de parti unique que la révisionconstitutionnelle permettant auprésident algérien, AbdelazizBouteflika, 71 ans, de briguer unnouveau mandat a été adoptée,mercredi 12 novembre, par lesdeux chambres réunies du Parle-ment algérien, sans débat préala-ble et à main levée. Une formalitéexpédiée en deux heures. Le chef

du gouvernement, Ahmed Ouya-hia, a présenté les amendementsen les justifiant par le droit de l’Al-gérie « de renforcer sa stabilité ».

Lestroispartisdel’allianceprési-dentielle – Front de libérationnationale (FLN), Rassemblementnational démocratique (RND) etMouvement de la société pour lapaix (MSP, islamique) –, ainsi quedes petits partis, dont le Parti destravailleurs (PT, trotskiste, 26députés), ont voté les amende-ments.SeulslesélusduRassemble-mentpour lacultureet ladémocra-tie (RCD) ont dérogé à cet unani-misme et voté contre, avant dequitter la salle. Un peu plus tôt, ledocteur Saïd Saadi avait dénoncéce qu’il a appelé un « nouveau coupd’Etat ».

Ces rares opposants au Parle-ment n’ont donc pas entendu lemessage du président Bouteflika,lu immédiatement après le vote,saluant un « jour mémorable » etfaisant l’éloge de la « clairvoyan-ce » et du « sens de la responsabilitédes représentants du peuple ». Lechef de l’Etat a défendu un droit àune application spécifique de la

démocratie en Algérie. Tout en fai-sant part de sa foi « immuable » enla démocratie, Abdelaziz Boutefli-ka considère qu’elle ne saurait« constituerunmodèleuniverseluni-quepourtoutes lesnations,unmodè-leàobserveretàappliquersystémati-quement en tout lieu et en touttemps ».

« Vie politique illusoire »Si le pouvoir algérien rejette

l’idée d’un modèle universel, iln’en rejoint pas moins, selon sesdétracteurs, un modèle arabe degouvernance. La limitation dunombre de mandats présidentielsfixée par l’article 74 de la Constitu-tion est désormais levée et elleouvre la voie à la présidence à vie.

M. Bouteflika, qui termine sonsecond mandat, sera donc candi-dat à l’élection présidentielle auprintemps 2009. Plusieurs autresamendementsrenforcent son pou-voir, déjà exorbitant aux yeux desopposants,etaffaiblissentautoma-tiquement ceux de l’Assembléenationale. La fonction de chef dugouvernement responsabledevant l’Assemblée disparaît au

profit d’un premier ministre.C’était déjà le cas dans les faits. Leprésident Bouteflika n’a jamaisaccepté que la Constitution algé-rienne puisse, comme en France,ouvrir la possibilité, même théori-que, qu’un chef de gouvernementissu d’une majorité parlementairepuisseappliquerunautreprogram-me que le sien. Le nouveau pre-mier ministre pourrait être assistéd’un ou de plusieurs vice-premiersministres.

Les autres amendements –emblème national, hymne, écritu-re de l’Histoire et promotion desdroits politiques de la femme – nepeuvent masquer l’objet principalde la révision accomplie en cettejournée « mémorable » : la recon-duction de M. Bouteflika à la têtede l’Etat. La révision consacre le« césarisme présidentiel » et rend« illusoireuneviepolitiquealgérien-ne bâtie sur de vrais contre-pou-voirs », constate le journal ElWatan, tandisque lequotidienara-bophoneElKhabar, leplusforttira-ge du pays, ironise amèrement :« Ces députés, quel courage ! » a

Amir Akef

Dans une interview accordée au quoti-dien Le Figaro et publiée jeudi 13 novem-bre, le président russe Dmitri Medvedevjustifie l’allongement du mandat présiden-tiel de quatre à six ans. « La durée du man-dat des députés ou du président doit ser-vir les intérêts de la nation. Voyez en Fran-ce, lorsque la Constitution du général deGaulle a été adoptée, on a reconnu qu’unseptennat était nécessaire, et cette duréea permis à l’époque de résoudre de grandsproblèmes posés à la République françai-se. Ultérieurement, la société française ajugé qu’elle n’avait plus besoin d’unedurée aussi longue, et on a raccourci lemandat présidentiel. Qui vivra verra. » Ilreste flou sur l’échéance. Seule certitude,« ces nouveaux mandats seront seule-ment appliqués au candidat qui se présen-tera au scrutin présidentiel après l’entréeen vigueur de ces amendements ». Lamesure bénéficiera à son successeur.Son mandat à lui, « est défini par la Consti-tution en vigueur, c’est-à-dire qu’il est dequatre ans ».

Russie L’allongement du mandat présidentiel relance les interrogations sur les intentions de Vladimir Poutine

Présidentialisationaccrue du pouvoirrusse sur fondde crise économique

MOSCOU

CORRESPONDANTEIl ne faut pas se fier aux paroles désobli-geantes que le président russe DmitriMedvedev a employées à l’égard desEtats-Unis, lors de son allocution du5 novembre, les accusant d’être à l’origi-ne de la guerre en Géorgie, d’avoir« contaminé » la planète avec la crisefinancière. Son discours était à usageinterne. Retenons plutôt que M. Medve-dev a eu un bon contact au téléphoneavec le futur président américain BarackObama, lorsqu’il l’a félicité pour sa victoi-re, un peu tardivement, le 8 novembre.

Les deux hommes ne se verront pas lorsdu séjour du président russe à Washingtonsamedi 15 novembre à l’occasion du som-met du G20, mais les attentes sont fortes.La relation russo-américaine est au plusbas. Moscou ne veut plus traiter avec l’ad-ministration américaine sortante dont les

propositions de consultations sur le sujetdu bouclier antimissile ont été rejetées. LeKremlin espère que M. Obama y renonce-ra. Pour le convaincre, Moscou assure êtreprêt à renoncer au déploiement de missilesbalistiques à Kaliningrad, aux portes del’Europe.

Tout en espérant que l’arrivée d’un nou-veau président ouvrira une ère meilleure,la Russie ne cesse de fustiger l’ennemiaméricain comme aux plus belles heuresde la guerre froide. La politologue LiliaChevtsova juge qu’en période de crise éco-nomique, ce discours est « nécessaire à l’éli-te, car il garantit sa survie ». Pour cette ana-lyste de la fondation Carnegie à Moscou,le pouvoir, « incapable de fonctionner dansune situation de concurrence et de libertérevient à la vieille matrice d’autrefois, l’auto-cratie, symbolisée par le tandem PoutineMedvedev, et la mobilisation de la sociétécontre l’occident ».

La désignation permanente de l’ennemia du succès. Dans de nombreux blogs etcommentaires, l’élection du « métis » Oba-ma est interprétée comme un signe de plusdu déclin des Etats-Unis. « L’Amérique estau bord du gouffre, a expliqué Maxime Che-vtchenko, commentateur politique à laradio Echo de Moscou. Le charme d’Oba-ma n’a rien fait, sinon de ramener les élec-teurs noirs en masse aux urnes. » A toutbout de champ, le président élu est décritcomme « un musulman ». La palmerevient au député ultra-nationaliste Ser-gueï Abeltsev. « Obama a gagné parce qu’ilavait beaucoup d’argent, l’argent des musul-mans et de Ben Laden dont il est l’agent d’in-fluence », a-t-il dit à la télévision le9 novembre. D’autres pays seront bientôttouchés, a renchéri le vice-président de laDouma, Vladimir Jirinovski : « En France,ils auront bientôt un Sarkozy arabe. » a

M. Je.

Les modèles anglo-saxon et européen à l’épreuve de la crise.

Freudien

Entreprises, Affaires publiques, Economie sociale

Le journal des pouvoirs d’aujourd’huiwww.lenouveleconomiste.fr

ALGÉRIE LE PARLEMENT SUPPRIME LA LIMITATION DU NOMBRE DE MANDATS PRÉSIDENTIELS

Le président Bouteflika récuse un « modèle unique » de démocratie

Vladimir Poutineprépare undiscoursimportant quisera délivréle 20 novembreà l’occasiondu congrèsde Russie unie

Dmitri Medvedev : « Monmandat est de quatre ans »

Le président russe Dmitri Medvedev à la veille de son premier discours à la nation, le 5 novembre, peu avant la cérémonie qui marquele jour de l’Unité du peuple, sur la place Rouge, à Moscou. ZAVRAZHIN KONSTANTIN/GAMMA

Les ultra-nationalistes russes voient un signe du déclinaméricain dans l’élection du « musulman » Obama

6 0123Vendredi 14 novembre 2008

Page 7: Le Monde 14 11

Après avoir soutenula « révolution des roses »en Géorgie et la « révolutionorange » en Ukraine, la Pologneassure vouloir « faire émerger »son voisin occidental

SYDNEY

CORRESPONDANCEJohn Key, le nouveau premierministre néo-zélandais qui a misfin, le 8 novembre, à neuf ans degouvernement travailliste, devraitannoncer la composition de soncabinet à la fin de la semaine. Lechef du Parti national de centre-droit – qui a remporté 59 des122 sièges de l’Assemblée lors desélections législatives –, va formerune coalition avec le parti de droi-te Act et le parti Avenir uni. Pours’assurer une majorité plus large,il a également engagé des discus-sions avec les députés maoris, tra-ditionnellement favorablesauPar-ti travailliste.

L’homme qui va succéder àHelenClark, premier ministre tra-vailliste depuis 1999, est presqueun nouveau venu dans le mondepolitique. Membre du Parlementdepuis six ans, John Key n’a pris latête du Parti national que depuis2006. « Cela fait de lui le moinsexpérimenté des premiers ministresdepuis des générations. Il a été criti-qué pour son manque d’expérience,mais il a insisté sur le fait qu’il avaitfait carrière dans le “monde réel”, etque c’était bien plus important »,commenteEugeneBingham, jour-naliste au New Zealand Herald.

Car, avant de percer en politi-que, John Key s’est illustré dans lemonde des affaires. A 47 ans, il estle modèle du self-made man. Nédans une famille modeste, il a étéélevé par une mère autrichienneémigrée,sonpèreétantdécédélors-qu’il était enfant. Après des étudesde commerce, il devient banquierd’affaires. Avec succès : aujour-d’hui, sa fortune personnelle estestimée à 50 millions de dollars NZ(23millionsd’euros).Mais le jeunehomme, qui s’était promis d’être

millionnaire, veut également deve-nir premier ministre. En 2001,M. Key abandonnesa carrière chezMerrill Lynch à Londres pour s’at-taquerà lapolitique. Il luiaurafalluseulement quelques années pouratteindresonrêve.« J’aidéjàracon-té comment, lorsque j’étais enfant,vivant dans un logement social, jepassais à vélo devant la maison desenfants plus riches. Ce qui m’inspi-rait alors, et encore aujourd’hui, estlacroyancequenousavonslapossibi-lité de rendre nos vies meilleures »,a-t-il dit au soir de sa victoire.

Durant sa campagne, le leaderdu Parti national s’est présentécomme étant au centre, promet-tant un avenir plus radieux, aux4,3 millions de Néo-Zélandais.Réforme de l’éducation, baissesdes impôts et lutte contre la crimi-nalité ont été ses chevaux debataille.

« L’assassin souriant »« Key présente un visage sou-

riant. C’est un bon représentant, trèspragmatique. Il a un sens aigu del’opinion publique, mais il est plusdur que son image ne laisse paraî-tre », commenteJoeAtkinson,pro-fesseur en sciences politiques àl’université d’Auckland. John Keyavait d’ailleurs été surnommé« l’assassin souriant » par ses col-lègues banquiers, pour avoir ren-voyé des dizaines de salariés sansse départir de son caractèreenjoué.

Cepèrededeuxenfantss’estpré-sentécomme l’homme de la ruptu-re. Pourtant, beaucoup doutent desa capacité à mener une politiquetrès différente du précédent gou-vernement. La Nouvelle-Zélandemultiplie actuellement les mau-vais signaux économiques ; lepays est entré en récession pour lapremière fois depuis dix ans, et leschiffres du chômage ont grimpé.« L’objectif de notre futur gouverne-ment sera de faire tout ce qui est ennotre pouvoir pour protéger le plusd’emplois possible, et ramener laNouvelle-Zélandesur le cheminde lacroissance », a affirmé M. Key.

Il pouvait difficilement choisirmoment plus ardu pour faire sespreuves. a

Marie-Morgane Le Moël

Varsovie forme les élites biélorussespour contrer l’influence russe à Minsk

International

NOUVELLE-ZÉLANDE POLITIQUE

John Key, un banquier devenupremier ministre néo-zélandais

VARSOVIE

ENVOYÉ SPÉCIAL

Noël n’était plus qu’une questiond’heures lorsqueAlexeï Troubkine aété arrêté, le 23 décembre 2006, à la

frontière entre la Pologne et la Biélorussie.Etudiant à Bialystok, le jeune homme ren-trait chez lui pour les fêtes. Bien rensei-gnés, les douaniers biélorusses ont retenuleur compatriote jusqu’à 4 heures dumatin et décidé de saisir son ordinateur.

Six mois plus tard, ce jeune membre duFront populaire biélorusse (BNF, opposi-tion) a découvert à la télévision publiqueun reportage de propagande à l’anciennesur la formation en Pologne d’étudiantsbiélorusses à l’action armée et aux opéra-tions-suicides. La preuve avancée : desfichiers informatiques saisis sur un porta-ble.Lesien !« Jen’ai jamais pu le récupérer,dit-il. En septembre, j’ai reçu une lettre du

conseil de sécurité m’accusant de porteratteinte aux intérêts de l’Etat. »

Alexeï Troubkine fait partie des centai-nes d’étudiants accueillis par des facultéspolonaises depuis 2006, dans le cadre duprogramme gouvernemental Kalinowski,écrivain défenseur au XIXe siècle de la cau-se biélorusse. Ce programme a été conçulors de la répression de mars 2006 contrel’opposition à Minsk, après la réélectiond’Alexandre Loukachenko à la présidence.

La Pologne rêvait de s’imposer en puis-sance régionale et d’inoculer l’antidotedémocratique à ses voisins de l’ex-URSS.Le pays avait été à l’avant-poste du soutienaux partisans de la « révolution desroses »enGéorgie, fin 2003,puis àceuxdela « révolution orange » en Ukraine, un anplus tard. La Biélorussie, où vivent près de400 000 Polonais, devait être le nouveauchamp d’intervention. « Pour le gouverne-ment du PIS [le parti Droit et Justice desjumeaux Kaczynski], c’était une approcherévolutionnaire au sens le plus noble du ter-me », explique Jan Malicki, de l’universitéde Varsovie, directeur du programme.

Le programme Kalinowski vise à accor-der des bourses aux étudiants répondant àplusieurs « critères politiques », selon ledirecteur. « A l’origine, on devait accueillir

les étudiants expulsés des facs en mars 2006,puisona élargiàceuxquinepouvaientpour-suivre leurs études pour des raisons politi-ques. » Selon ses estimations, 10 % à 15 %des étudiants ne peuvent plus rentrer enBiélorussie sous peine de poursuites. Surles 244 personnes accueillies la premièreannée dans les universités polonaises,30 % « sont tombées en route, selonM. Malicki, parce qu’elles n’arrivaient pas àsuivre, ou parce qu’elles voulaient seulementprofiter des bourses pour boire des bières ».

MétamorphoseGianisDjouba,22ans,estuncasd’adap-

tation réussie. Arrêté sur la place d’Octo-bre, en mars 2006 à Minsk, il a vite com-prisque la faculté voulait se débarrasser delui.Exilé, il estendeuxièmeannéed’histoi-re à Varsovie. « Au départ, je ne comprenaisrien en cours », dit-il dans un très bon polo-nais. On le flatte sur ce point. Il sourit. « Jen’avais pas le choix, comme un soldat envoyéau front. » Le jeune homme a pris goût à lavie occidentale : « Je vois la Biélorussie del’extérieur, maintenant. Comme tantd’autres, je change de comportement, je medépolitise, je pense à moi. »

Peu après son arrivée, Gianis Djouba aassistéà lamétamorphosed’undesescolo-

cataires, Wladyslaw Mikhaïlkov. « Il étaitterrorisé par les services biélorusses. Il nous aréveillés une nuit en nous disant qu’il y avaitdes caméras partout, il avait l’air gentimentdérangé.Puis il estparti. On adécouvert qu’ilétait allé chez le consul biélorusse, qui l’avaitrenvoyé au pays. » A la télévision publique,quelque temps plus tard, le jeune hommeaprétendu que les étudiants biélorusses enPologne étaient forcés de participer à desmanifestations anti-Loukachenko.

Si cette télévision continue son traite-mentparanoïaqueduprogrammeuniversi-taire, le contexte politique a changé depuisdeux ans. En Pologne d’abord, entrée encohabitationaprès lesélections législativesde 2007. Le premier ministre, DonaldTusk, a une approche moins radicale quelesjumeauxKaczynskidelaquestionbiélo-russe. « Notre intérêt n’est pas d’isoler cepays mais de le tirer, de le faire émerger »,explique Slawomir Nowak, chef du conseilpolitique de M. Tusk.

« L’objectif de la Pologne est de garderLoukachenko en position de grand écart,explique Wojciech Borodzicz, analyste auCentre des relations internationales. Il estlegarantde l’intégrité territoriale etde la sta-bilité du pays. La priorité est que la Biélorus-sienedeviennepasunedépendancede laRus-sie. L’Union européenne n’a compris celaqu’après la guerre en Géorgie. » Le 13 octo-bre, l’Union européenne a levé pour sixmoisles interdictionsdedéplacementfrap-pant certains dirigeants biélorusses. Cegeste s’explique par une volonté de dialo-gue.LeprésidentautoritairedelaBiélorus-sie a donné des indices déroutants ces der-niersmois :aucunopposantn’aétéélu lorsdes législatives fin septembre ; parailleurs, le régime garde ses distancesvis-à-vis de Moscou, refusant, par exem-ple,de reconnaître l’indépendance de l’Os-sétie du Sud et de l’Abkhazie, les deuxrégions séparatistes de la Géorgie. a

Piotr Smolar

John Key. AFP

ALLEMAGNEB I É LO R U S S I E

U K R A I N EP O LO G N E

R . TC H .

S LOVAQ U I E

L I T UA N I E

L E T TO N I E

DANEMARK

RUSSIER U S S I E

200 km

Varsovie

MinskBialystok

EUROPE

PAKISTANUn travailleur humanitaireaméricain tué dansune embuscadePESHAWAR. Un Américain tra-vaillant pour une organisationhumanitaire des Etats-Unis ainsique son chauffeur ont été tués,

mercredi 12 novembre, dans uneembuscade au passage de leurvoiture à Peshawar, dans le nord-ouest du Pakistan, a annoncél’ambassade américaine. Dans lamême ville, un diplomate iraniena été enlevé par des inconnus etson garde du corps tué. – (AFP.)

0123Vendredi 14 novembre 2008 7

Page 8: Le Monde 14 11

ÉTATS-UNIS

Des universitairesdemandent à M. Obamade créer une commissionsur GuantanamoOmniprésente dans les médias,

l’ex-colistière de John McCain nes’interdit aucun scénario pourson avenir politique. Divisés,les républicains commencentà tirer les leçons de leur défaite

LA DIFFERENCEC’EST

LA VIGILANCEIsabelle Giordano

Service Public 10hfranceinter.com

DES UNIVERSITAIRES américainsauteurs d’une étude sur les conséquencesde la détention à Guantanamo ont appe-lé, mercredi 12 novembre, Barack Obamaà installer une commission indépendantesur cette prison pour faire la lumière surles responsabilités de l’administrationBush. Révélée mercredi, cette étude, qui aamené ses auteurs à interroger62 anciens détenus du camp américain àCuba,montre que, mêmelibérés, ces hom-mes portent les « stigmates » des condi-tions de leur détention.

Elle décrit pêle-mêle des détenus bat-tus, attachés des heures durant dans despositions inconfortables, enfermés dansde toutes petites cellules à l’isolementpuis incapables de reconstruire leur vieaprès avoir été libérés.

Le président élu, le démocrate BarackObama, qui prendra ses fonctions le20 janvier2009, a promis de fermer lapri-son,dans laquellese trouventencorequel-que 250 prisonniers, sans donner de pré-cision sur la méthode qu’il entendaitemployer.

« Nous ne pouvons pas glisser ce chapitresombre de notre histoire sous le tapis, en fer-mant simplement le camp de Guantanamo,a estimé Eric Stoler, chercheur à l’univer-sité de Berkeley, en Californie, et coau-teur de l’étude, lors d’une conférence depresse. La nouvelle administration doitenquêter sur ce qui a dérapé et sur qui doiten être tenu responsable. »

« Le cauchemar des détenus ne s’arrêtepas avec leur libération (…) ; ces hommesqui n’ont jamais été inculpés d’aucun crimesouffrent d’un stigmate Guantanamo dura-ble et ne parviennent pas à retrouver du tra-vail », a précisé Laurel Fletcher, coauteuret également chercheuse à Berkeley.

Les deux universitaires, soutenus par leCentre pour les droits constitutionnels,quidéfendde nombreux détenus,ont sou-haitéquecette commissionsoit« indépen-dante et neutre, pour lever le voile du secretsur Guantanamo et sur les autres lieux dedétention ». a – (AFP.)

WASHINGTON

CORRESPONDANTE

Fraîche comme une rose, Sarah Palinest repartie en campagne. Pour quoiau juste, nul ne le sait. Mais, dix

joursaprès la fin de la courseà la présiden-ce, l’ancienne colistière de John McCainsur le « ticket » républicain n’a toujourspas disparu des écrans. De Barack Oba-ma, le vainqueur, on n’aperçoitqu’une sil-houette qui conduit ses enfants à l’écoleavant de s’enfermer pour réfléchir à soncabinet. John McCain, le perdant, n’arefait surface – dans une émission comi-que– que le 11 novembre, après avoir dor-mi « comme un bébé ».

Sarah Palin est retournée brièvementen Alaska, suivie par une caravane dereporters. Elle a réintégré son bureau degouverneur, sous les applaudissementsde son équipe. Elle a reçu les principaleschaînes de télé à Wasilla, le bébé surl’épaule, et cuisiné en même temps qu’el-le répondait aux questions : chili d’élanpour Fox News ; saumon pour NBC.

Mme Palin a beaucoup à dire. Il est vraique l’état-major républicain l’a empêchéedefaireundiscours lesoirde ladéfaite.Paspar misogynie, mais parce que le discoursde « concession » est généralement réser-vé au candidat à la présidence. « D’accord,ça ne se fait pas, a-t-elle plaidé. Mais pour-quoi ne pas penser un peu en dehors des sen-tiers battus ? » Elle entend aussi se défen-drecontre lesconseillers républicains,qui,sous couvert d’anonymat, lui font porter lechapeau de la défaite de M. McCain : « Ceserait faire trop de crédit à Sarah Palin. »

L’ex-candidate n’exclut rien. Ni de fai-re de la télévision, comme animatrice, nide se présenter à la Maison Blanche en2012, ni de devenir sénateur de l’Alaska àla place du baron républicain Ted Ste-

vens, englué dans une affaire de corrup-tion – étant gouverneur, elle pourraitmême se désigner elle-même à sa place,mais elle a promis qu’elle n’en viendraitpas là. « Ce que je me dis, c’est : Dieu, s’il y aune porte ouverte pour moi quelque part, neme laisse pas la manquer. C’est pour celaque je prie toujours », a-t-elle expliqué.

Leçons d’une défaiteSarah Palin, qui jouit d’un taux de

popularitéde49 % (86 % chez les républi-cains), est la vedette de la réunion des21 gouverneurs républicains qui s’estouverte le 12 novembre à Miami. A cetteoccasion, lescadresdu mouvemententen-dent tirer les leçons d’une défaite qui a vuleur parti être rayé de la carte dans des

régions entières, comme la Nouvelle-Angleterre.

L’impopularité de George Bush et ladéfaire de John McCain ont créé un vide deleadership. Tim Pawlenty, du Minnesota,Charlie Crist, de Floride, Bobby Jindal, deLouisiane, ont commencé à prendre posi-tion(M. Jindalestdéjàattendudansl’Iowale 22 novembre, tout comme Mike Hucka-bee, l’un des candidats des primaires qui,depuis sa défaite, anime un talk-show).Autre prétendant possible, hors du cercledes gouverneurs : Newt Gingrich, l’ancienchefdel’oppositionquiavaitmenélarecon-quêteaudébutdelaprésidencedeBillClin-ton. « Il faut que nous soyons honnêtes sur leniveau d’échec des huit dernières années »,a-t-il dit au New York Times.

Le parti est fortement divisé. Les « tra-ditionalistes », selon la nomenclature deDavid Brooks, du New York Times, pen-sent qu’il faut retourner aux valeurs fon-damentales. Ils se félicitent du recul dumariage gay en Californie, qui leur ouvredes perspectives électorales. Les modérésestiment que le parti doit suivre l’évolu-tion de la société. Les républicains doi-vent aussi décider du degré de résistancequ’ils vont opposer à Barack Obama.

Sarah Palin, qui avait mis en doute lepatriotisme de son adversaire démocratependant la campagne, a appelé à tra-vailler avec lui. Elle s’est même proposéepour l’aider, s’il a besoin de conseils sur lacrise de l’énergie. a

Corine Lesnes

Sarah Palin se positionne déjà pour l’électionprésidentielle américaine de 2012

International

C’est la victoire de la raisond’Etat sur la cause desdéfenseurs des espèces

menacées, un K.-O. infligé parl’US Navy aux avocats des balei-nes. La Cour suprême des Etats-Unis a décidé, mercredi12 novembre, par 5 voix contre 4,d’invalider le jugement de plu-sieurs tribunaux fédéraux. Ceux-ci avaient donné raison aux asso-ciations de défense de l’environ-nement hostiles à l’utilisation desonars par les navires de guerreaméricains, à proximité des balei-nes et dauphins.

L’arrêt d’une cour de LosAngeles, en août 2007, stipulaitque la marine devait réduire leniveau de ses sonars, et les étein-dre lorsque l’un de ses naviresdétectait un mammifère marindans un rayon de 2 kilomètres.Des experts avaient confirméque ces sonars à moyenne fré-quence pouvaient potentielle-ment provoquer la « surdité tem-poraire » de 8 000 baleines etsurtout les inciter à s’échouer –et à mourir – sur le rivage.

Le très conservateur JohnRoberts, président de la Coursuprême, leur a opposé la défen-se de la « sécurité nationale » : lesnavires américains croisant aularge de la Californie ont pour

tâche de s’opposer à « la menacepotentielle qu’un sous-marin nord-coréen parvienne sans être détecté àproximité de Pearl Harbor », a-t-ilexpliqué.

Les défenseurs des baleinescroyaient avoir le vent en poupe :début octobre, l’exécutif avaitimposé aux navires de commercede réduire leur vitesse à moins de10 nœuds dans certaines zonescôtières, afin de protéger les balei-nes franches, dont il resteraitmoins de 400 individus. Puis, le18 octobre, les autorités fédéralesavaient infligé une sévère défaiteà la gouverneure de l’Alaska,Sarah Palin, en plaçant les balei-nes blanches béluga, qui croisentdans le golfe de Cook, sur la listedes espèces menacées. L’ancien-ne candidate à la vice-présidencedes Etats-Unis essuyait ainsi unsecond revers (hors élection prési-dentielle), après avoir vainementplaidé en faveur de la poursuitede la chasse à l’ours polaire.

Mais dans l’affaire « baleinesvs US Navy », le président Bush ausé de toute son influence : il asigné un « ordre d’exemption »,qui lui permet, dans une « situa-tion d’urgence », de passer outreune décision judiciaire en matiè-re d’environnement. a

Laurent Zecchini

EN URUGUAY, le vote duCongrès, mardi 11 novembre,légalisant l’avortement, risquede semer la zizanie au sein de lacoalition gouvernementale degauche, le Frente Amplio (leFront élargi). Rejetée par les par-tis de l’opposition, la loi a étéapprouvée par les sénateurs et lesdéputés du Frente Amplio alorsque le présidenturuguayen, Taba-ré Vazquez, est personnellementopposé à l’interruption volontairede grossesse (IVG).

Socialiste et médecin de profes-sion, M. Vazquez a répété à plu-sieurs reprises qu’il mettrait sonveto à la légalisation de l’avorte-ment. La loi dite de santé repro-ductive et sexuelle a été approu-

vée au Sénat par 17 voix sur 30,après avoir été adoptée à la Cham-bre des députés. Elle autorise lesfemmesà avorter pendant les dou-ze premièressemaines de grosses-se. En Uruguay, qui compte3,3 millions d’habitants, quelque33 000 femmes avortent clandes-tinement chaque année.

Letexte doitêtresoumisaupou-voir exécutif en vue de sa promul-gation. M. Vazquez dispose de dixjourspourse prononcer.S’il impo-se son veto, les deux chambres duCongrès devront se réunir à nou-veau et se prononcer à une majori-té des trois-cinquièmes en faveurdu texte pour contrecarrer l’oppo-sition de l’exécutif.

« Que le pouvoir législatif vote

une loi de cette nature marque unegrande avancée, estime MonicaXavier, sénatrice socialiste etmédecin comme le chef de l’Etat.Cette loi offre l’occasion de commen-cer à solder une dette à l’égard desfemmes uruguayennes en matièrede droits sexuels. » Marina Aris-mendi, ministre communiste dudéveloppement social, s’est dite« euphorique », ajoutant qu’elleespérait que le président Vazquezchangerait d’opinion.

Autorisée à Cuba et Porto RicoL’Eglise catholique avait mena-

cé d’excommunier les parlemen-taires qui voteraient en faveur del’avortement. Le principal quoti-dien uruguayen, El Pais, s’estpour sa part réjoui de la loi, rappe-lant qu’elle intervenait « cent ansaprès la première législation sur le

divorce en Uruguay », qui avait été« une décision révolutionnaire àl’époque en Amérique latine ».

Dans presque tous les paysd’Amérique latine, l’IVG reste unequestion taboue, passible du codepénal. L’avortement est autoriséparfoispour des raisons thérapeu-tiques ou en cas de viol de la mère.

Avant le vote du Congrès uru-guayen, les seules exceptionsà cet-te règle étaient Cuba, où l’IVG aété autorisée en 1965, et PortoRico, où s’applique la jurispru-dence de la Cour suprême desEtats-Unis des années 1970.

L’assemblée législative de lavil-le de Mexico,administrée par l’op-position de gauche, a égalementdépénalisé l’avortement, enavril 2007, mais cette dispositions’applique uniquement dans leslimites de la capitale.

Au Chili et au Brésil, gouvernéspar une coalition de centre gau-che, il n’y a pas de consensus favo-rable à l’IVG au sein de la majoritéprésidentielle. Pas plus qu’auVenezuela ou en Bolivie, où gou-verne la gauche radicale. Au Nica-ragua, la gauche sandiniste a voté,fin2006, l’interdiction de l’avorte-ment thérapeutique, pour favori-ser le retour du président DanielOrtega au pouvoir. a

Christine Legrand (à BuenosAires) et Paulo A. Paranagua

L’ancienne candidate à la vice-présidence, interrogée par une télévision locale en Alaska. BILL ROTH/« ANCHORAGE DAILY NEWS »/ABACAPRESS

Le président Bush obtient gainde cause contre... les baleines

NICARAGUALes résultats de l’électionà Managua seront réexaminésMANAGUA. Les résultats des élec-tions municipales du 9 novembredans la capitale du Nicaragua,Managua, qui donnent une netteavance au candidat du présidentDaniel Ortega, vont être réexami-nés avec l’opposition, a annoncé,mercredi 12 novembre, le Conseilélectoral suprême (CSE). « Nous

allons revoir les résultats desbureaux de vote un par un, avec lesbordereaux de l’opposition, dansles 2 107 bureaux » de la capitale,a annoncé le président du CSE,Roberto Rivas. Le dernier pointa-ge publié mardi par le CSE, sur86 % des bulletins de vote, attri-buait 91 municipalités sur 146 auFront sandiniste de libérationnationale (FSLN, gauche), le par-ti présidentiel. – (AFP.)

ÉTATS-UNISWashington presse Téhérande cesser de développerdes missilesWASHINGTON. L’administrationBush a réclamé, mercredi12 novembre, à l’Iran qu’il cesse« immédiatement » de dévelop-per des missiles balistiques,après un nouveau test revendi-qué, mercredi, par la Républiqueislamique, qui dit avoir lancé un

missile sol-sol de « nouvelle géné-ration ». « Je ne peux pas confir-mer le lancement, a dit le porte-parole du Pentagone, Bryan Whit-man, mais il [serait] cohérent avecla poursuite du programme balisti-que iranien. Nous savons quel’Iran développe une version pluslongue du Shahab-3 qui pourraitfrapper nos alliés et nos amis auProche-Orient et dans le sud-est del’Europe. » – (AFP.)

URUGUAY L’AVORTEMENT RESTE TABOU EN AMÉRIQUE LATINE

Le Parlement uruguayen vote pour la légalisation de l’IVG

OCÉANATLANTIQUE

Rio dela Plata

MontevideoBuenos Aires

BRÉSIL

ARGENTINE

URUGUAY

200 km

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TAÏWAN JUSTICE

L’ex-président taïwanais incarcérépour corruption et blanchimentPÉKIN

CORRESPONDANTL’ancien président taïwanais Chen Shui-bian, naguère chantre du camp « indé-pendantiste » de l’île, couchedepuis mar-di 11 novembre en prison. Il a été inculpépour corruption et blanchiment d’argent.L’ancien chef de l’Etat, à la tête de Taïwande 2000 au printemps 2008, est apparumenotté en sortant du bureau du juged’instruction après que ce dernier eutordonné sa détention. Il risque de vingt àtrente ans de prison. Face aux caméras,l’ex-chef de l’Etat a levé haut les bras pourmontrer ses poignets menottés avant des’écrier : « Vive l’indépendance taïwanai-se ! » et « Répression politique ! »

C’est la première fois qu’un hommepolitique taïwanais de cette envergure estainsi poursuivi. L’événement était cepen-dant prévisible : le 20 mai, quelques heu-res à peine après avoir quitté son bureaude chefde l’Etat et passé la main à son suc-cesseur, Ma Ying-jeou, Chen Shui-bianavait reçu l’ordre de se tenir à la disposi-tion de la justice.

Il est accusé de détournement defonds, d’abus de pouvoir, tandis que plu-sieurs membres de sa famille sont égale-ment soupçonnés de graves actes de cor-ruption : sa femme, sa fille, son fils et sabelle-fille, ainsi que plusieurs de ses pro-ches conseillers, figurent parmi les coac-cusés.

L’ancien président et chef du Partidémocratique progressiste (DPP) auraitdétourné plus de 3 millions d’euros descaisses de fonds secrets attribués à la

diplomatie taïwanaise, touché des pots-de-vin donnés par des hommes d’affaireslocaux et blanchi près de vingt millionsd’euros à l’étranger.

En guise de défense, Chen Shui-bian aaussitôt adopté la position de martyr. Lenouveau président, Ma Ying-jeou, estfavorable à un rapprochement avec laChine, tandis que son prédécesseuremprisonné était le chef de file du mouve-ment d’affirmation de l’identité taïwanai-se, et soutenait le principe d’une indépen-dance formelle de Taïwan par rapport à laChine continentale.

Chen Shui-bian soutient ainsi que sonarrestation est le fruit d’une décision poli-tique de M. Ma, qui s’efforce de complaireau grand voisin pour lequel l’ex-présidentétait la bête noire par excellence. Sonemprisonnement a par ailleurs été décidéquelques jours après un incident embar-rassant pour le nouveau chef de l’Etat :lors de la visite « historique » d’un hautresponsable chinois à Taïpeh, ce derniers’est retrouvé piégé dans son hôtel pen-dantplusdehuitheures, tandisqu’à l’exté-rieur se déchaînaient en imprécations desmilliers de partisans de Chen Shui-bian.

A Pékin, la presse se délecte à décrireles mésaventures du trublion taïwanais,allant jusqu’à détailler le menu de sesrepas en prison. Une porte-parole dubureau des affaires taïwanaises a pour sapart qualifié, mercredi, de « rumeurs »les accusations de Chen Shui-bian affir-mant qu’il a été « sacrifié » sur l’autel durapprochement sino-taïwanais. a

Bruno Philip

Cette militante des droitsde l’homme nous détailleson combat et dénonceles exactions commisespar les Tigres tamoulset l’armée gouvernementale

Patrick F. 36 ans,professeur des écoles,envisage sa mutationavec sérénité.

Enseignantsdes 1er et 2d degrés,

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vos démarches de mutation :

Tout sur ma mutation en un coup de fil

La ligne est ouverte de 9 h à 21h 7 j/7 du 6 novembre au 8 décembre 2008.

La Sri-Lankaise Sunila Abeysekerarécompensée par Human Rights Watch

International

Le conflit oublié du Sri Lanka, vieuxde trente ans, où s’affrontent lesrebelles indépendantistes tamouls

et le gouvernement de Colombo, capita-le d’un pays à majorité cinghalaise, seraévoqué l’espace d’une remise de prix àParis, jeudi 13 novembre. L’organisa-tion Human Rights Watch devait, cejour, attribuer, pour 2008, sa plus hauterécompense, le Prix des défenseurs desdroits de l’homme, à Sunila Abeysekera,fondatrice de l’ONG sri-lankaise Informpour son travail de dénonciation desexactions commises par chaque camp.

Menacée de mort dans son pays pourson action, elle a quitté le Sri Lanka au

moisd’avrilpour lesPays-Bas. Elle retour-ne épisodiquement à Colombo pour sou-tenirson organisation toujoursopération-nelle. « Je ne veux pas être une héroïne, jecrois à mon jugement, j’ai senti que c’étaitune anomalie que je sois encore en vie alorsque beaucoup de mes proches sont mortspour notre combat, alors j’utilise ma libertéde parole et mon exil forcé pour expliquer cequi se passe chez nous », dit-elle au Monde.

Ancienne critique de théâtre passée,depuis vingt ans, au combat pour ladéfense des droits de l’homme, elle estaussi mère de six enfants dontla plupart vivent au Sri Lanka.« Depuis que j’ai quitté ma mai-son qui se trouve dans la campa-gne de Colombo, à près d’uneheure de route de la capitale, mafamille est plus tranquille et sesent moins menacée », assureSunila Abeysekera.

Son ONG rassemble desinformations sur les atteintesaux droits de l’homme et attire l’atten-tion sur les drames humains et sanitairesqui en découlent. « Plus de 600 000 per-sonnes ont déjà dû fuir à cause du conflit,aujourd’hui, précise-t-elle, depuis l’offen-sive du gouvernement au mois de janvier,300 000 autres sont prises au piège dansla province de Wanni, au nord, entre les

rebelles et l’armée gouvernementale. »Les Tigres tamouls les gardent comme

bouclier humain et les forces de sécuritéde Colombo les considèrent comme descomplices de la rébellion. « Depuis octo-bre, le gouvernement a mis en place desconvois humanitaires mais ne ravitaille quepour une seule semaine, histoire de conser-ver un levier de pression. »

Pourtant, regrette-t-elle, la commu-nauté internationale se désintéresse decette situation. « Face au drame des popu-lations déplacées, l’ONU et les grands paysse mobilisent au Congo, alors qu’ici ellessont livrées à elles-mêmes et connaissent lecholéra et la typhoïde. Pire, le gouverne-ment a attaqué un convoi de l’ONU sansque celle-ci ne réagisse, le gouvernement entire une grande impunité. » De plus,note-t-elle, depuis l’assassinat, en 2006,de 17 employés d’Action contre la faim, lasituation « s’est aggravée pour les ONG »,qui ont perdu 60 de leurs membres.

Les dirigeants sri-lankais, pour leurpart, délaissent l’alliance avec l’Europe etles Etats-Unis et se sont rapprochés del’Iran, la Chine et le Venezuela. « Ils veu-

lent renouer avec l’héritage dumouvementdes paysnon alignés,explique Mme Abeysekera, ladémocratie n’est pas une prioritépour ces nations ; je sais que monprix me vaudra d’être accuséd’être un agent de l’Occident. »

Les arrestations arbitraires,les assassinats et les enlève-ments, qui sont devenus « uneindustrie très lucrative » grâce

aux rançons, s’ajoutent à l’insécurité quirègne dans le pays. Ces pratiques sont lefait des deux camps. « Les Tamouls impo-sent eux aussi la terreur et se financent grâ-ce à une véritable mafia qui extorque leurdiaspora éparpillée dans le monde entier, ycompris en France. » a

Jacques Follorou

AFGHANISTANDes ONG françaises rapatrientleur personnelKABOUL. Face à l’insécurité en Afghanis-tan et aux attaques les visant directe-ment, quatre ONG françaises vont rapa-

trier leur personnel expatrié. Aide médi-cale internationale, Amitiés franco-afghanes, dont l’un des employés a étéenlevé le 3 novembre, Médecins du mon-de et Sport sans frontières conserverontnéanmoins leur personnel afghan.

« Je ne veux pasêtre une héroïne.J’utilise maliberté de paroleet mon exil forcépour expliquerce qui se passechez nous »

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Page 10: Le Monde 14 11

BERLIN

CORRESPONDANCE

L’Allemagne est entrée en réces-sionautroisièmetrimestre : lepro-duit intérieur brut (PIB) s’estcontracté de 0,5 % entre juillet etseptembre, selon desdonnéespro-visoires publiées jeudi 13 novem-brepar l’Office fédéral des statisti-ques. Au deuxième trimestre, lacroissance avait déjà été négative,à – 0,4 %.

L’économie allemande n’avaitpas enregistré deux reculs consé-cutifsduPIB–ladéfinition techni-

que de la récession –depuis le pre-mier semestre 2003. Ces chiffresvont dans le sens des prévisionspessimistes du rapport annueldes « cinq sages », le groupe d’ex-perts chargé de conseiller le gou-vernement. Publié mercredi, cerapport table sur une stagnationduPIBpour 2009(Berlina annon-cé une croissance de 0,2 %). Selonleurs critères, il s’agit d’une« récession », tant le recul est bru-tal par rapport à la croissance de2008 (1,7 % selon leurs prévi-sions).

Les « sages » prônent unimportant plan de relance, aubesoin financé par l’endettement,des recommandations inhabituel-les de la part de ce comité d’ex-perts. Mais les risques qui pèsentsur la conjoncture justifient, àleurs yeux, quelques entorses à larigueur budgétaire.

Insatisfaits des mesuresde sou-tien adoptées le 5 novembre à Ber-lin, ils épinglent dans leur rapport« un bric-à-brac de projets isolés ».Fidèles à leur liberté de ton, leséconomistes reprochent à la gran-de coalition d’Angela Merkel « unactivisme en partie motivé par despressions des milieux industriels ».

Critiquant les incitations fisca-les destinées à encourager l’achatde voitures neuves, ils dénoncentainsi un gaspillage d’argentvisant à favoriser un seul secteurindustriel. Ils plaident pour unerelance de l’investissement, enparticulier via des grands projetsd’infrastructures routières et fer-roviaires. Selon leurs calculs, lespouvoirs publics devraient consa-crer entre 0,5 % et 1 % du produitintérieur brut (PIB) à ce program-me conjoncturel, soit jusqu’à25 milliards d’euros par an. a

Marie de Vergès

ROOSENDAAL (Pays-Bas)

ENVOYÉ SPÉCIAL

Une enseigne aux couleurs de laJamaïque et, sur la vitrine, le dessind’un fumeur de gros « pétards ».

Fin de matinée paisible au Liberty II, l’undes coffee shops de Roosendaal, au suddes Pays-Bas. Ambiance saloon, café sanssaveur et odeur de « shit » : un jour banalpour les consommateurs néerlandais etles étrangers (Français, Belges, Alle-mands) qui viennent s’approvisionnerdans ces endroits symbolisant la réputée« tolérance » hollandaise.

Pour la plupart, les consommateurs duLiberty II ignorent qu’un débat politiquefait rage dans le pays, où le principal partidu gouvernement, le CDA (Appel chré-tien-démocrate) du premier ministre JanPeter Balkenende, plaide pour la fin descoffee shops, et dénonce une politiquequi, selon lui, a échoué. Des magistrats,des policiers et des criminologues sont dumême avis. Le Parti travailliste, lui aussiau pouvoir, et des maires défendent plu-tôt une autre forme de « régulation ».

Officiellement, les règles imposées auxcoffeeshops sont claires, et le vieux Maro-

cain du Liberty II qui, derrière une vitre,pèse et distribue ses sachets, les récite :5 grammes au maximum par client, pasde vente à des mineurs, pas de droguedure. Ne cherchez pas à savoir d’où vientl’herbe qui est vendue. « On s’arrange »,répond invariablement l’employé.

La loi autorise lavente et la consomma-tion des drogues douces mais interdit laproduction et la distribution. Cette aber-ration a entraîné l’apparition de groupescriminels, souvent étrangers, qui tententdemettre lamain, avec pressionset mena-ces, sur l’approvisionnement des 800 cof-feeshopsdu pays.L’époquedes petitspro-ducteurs qui faisaient pousser du chan-vre dans leur jardin a vécu, et une mafiamarocaine s’est spécialisée dans le voldesrécoltes clandestines. A la clé, un mar-ché annuel de 2 milliards d’euros.

Gardes à l’entréeL’un des objectifs des autorités qui ont

légalisé les drogues douces il y a une tren-taine d’années était d’éviter le développe-ment de la criminalité. Echec ? La policedes provinces du sud du pays affirme, entout cas, qu’au cours des cinq dernièresannées, elle a dénombré au moins vingt-cinq meurtres en rapport avec la vente destupéfiants. On a vu apparaître des gar-des à l’entrée des coffee shops, comme auLiberty II, où un jeune adepte du body-building, chauve et tout de noir vêtu,contrôle sacs et cartes d’identité.

Les élus sont assaillis de plaintes. Cel-

les des pays voisins qui critiquent le cava-lier seul des Néerlandais. Celles des rive-rains des coffee shops, qui se plaignentdes nuisances liées au flot incessant deconsommateurs. Les chiffres font, il estvrai, tourner la tête : 13 500 acheteurs parsemaine à Roosendaal, 4 000 par jour àMaastricht, 1 million par an à Terneuzen,deux villes proches.

On évoque la vente quotidienne de 3 à4 kg dans les principaux établissementsdu pays, avec des bénéfices atteignant400 000 euros mensuellement. On souli-gne la multiplication des saisies de dro-

gues dures, acheminées par des réseauxqui profitent de la présence de centainesde milliers de clients potentiels. Quantaux smart shops, petits commerces deproximité, ils organisent désormais leurpropre réseau clandestin de revente.

Depuis quelques mois, inquiètes del’évolution de la criminalité, des munici-palités ont ordonné les premières ferme-tures de coffee shops. A Roosendaal, àBergen-op-Zoom, à Maastricht, elles ontdurci la réglementation, multiplié lescontrôles ou fiché les clients. La plupartdes exploitants soulignent le danger d’un

renvoi des consommateurs vers des mar-chés clandestins. Gerd Leers, maire chré-tien-démocrate de Maastricht, dit redou-ter l’influence de mafias qui initieront lesacheteurs aux drogues dures, et dénonce« l’hypocrisie » des pays voisins qui inter-disent la drogue chez eux mais tolèrentque leurs consommateurs s’approvision-nent aux Pays-Bas.

Johan de Wijkerslooth, juriste à l’uni-versité de Leyde, propose de fermer lescoffee shopsen échange d’une réelle léga-lisation du « shit » à usage personnel. a

Jean-Pierre Stroobants

Des groupes criminelstentent de contrôlerl’approvisionnement des800 établissements du pays.Les élus sont assaillis de plaintes

CRISE BRITISH TELECOM SUPPRIMERA 10 000 EMPLOIS DANS LES SIX MOIS

Le chômage est au plus hautdepuis onze ans en Grande-BretagneLONDRES

CORRESPONDANTE

En Grande-Bretagne, le nombrede chômeurs est revenu au niveaude la fin 1997. La crise financièreet la récession qui s’ensuit ontramené la Royaume-Uni onze ansen arrière, juste après l’arrivée aupouvoir des travaillistes.

Selon des chiffres publiés, mer-credi 12 novembre, par l’Officenational des statistiques,1,825 million de Britanniquesétaient sans emploi au troisièmetrimestre, soit 140 000 de plusqu’au deuxième trimestre et182 000 de plus qu’un an aupara-vant. Le taux de chômage au sensdu Bureau international du tra-vail est à son niveau le plus élevédepuis 2000, 5,8 % contre 5,4 %entre avril et juin.

Quotidiennement,desentrepri-ses licencient, quel que soit le sec-teur d’activité. Jeudi 13 novem-bre, British Telecom a annoncé lasuppression de 10 000 emploisd’ici à fin mars. Mardi, plus de4 500 suppressions de postes ontété annoncées : 2 200 par VirginMedia, 300 par l’éditeur desPages jaunes, 620 par le labora-toire GlaxoSmithKline qui va fer-mer son usine de Dartford (Kent)

d’ici à 2013, 1 000 par le construc-teur Taylor Wimpey… Selon Bren-dan Barber, secrétaire général duTrade Union Congress, « la queuede ceux qui pointent au chômagegrossit de 1 000 personnes chaquejour ». En octobre, 36 500person-nes supplémentaires ont deman-dé à bénéficierde l’allocation-chô-mage, soit un total de 981 000.

La hausse du chômage au troi-sième trimestre a d’abord concer-né les jeunes : les 18-24 ans sansemploi étaient 579 000, soit53 000 de plus qu’entre avril etjuin. Elle s’est aussi accompagnéed’une baisse des emplois à pleintemps et d’une hausse des tempspartiels. Tout le monde s’accordeà penser que le pire est à venir. Labarre des 2 millions de chômeursdevrait être bientôt franchie, d’icià la fin de l’année, pensent les pluspessimistes, au premier semestre2009, jugent les autres.

Pour Trevor Phillips, présidentde la commission pour l’égalitéraciale et les droits de l’homme, laGrande-Bretagne va « exporterson chômage » dans la mesure oùil prévoit que près d’un milliond’immigrés quitteront le Royau-me dans les mois à venir. Au fur età mesure que la récession devien-

dra plus concrète, que le travail seraréfiera et que la livre sterlingbaissera, ils rentreront chez eux.Les Polonais ont déjà commencéà le faire.Selon le ministère de l’in-térieur, ils seraient au moins100 000 à avoir rejoint leur paysdans les douze derniers mois.

Sans ces départs, estimeM. Phillips, lepayscompteraitrapi-dement 3 millions de chômeurs.La chaîne de supermarchés Tescoa abondé dans son sens, ces der-niers jours, en déclarant que ledépartdesEuropéensde l’Estavaitmasqué, cette année, l’ampleur duralentissement économique.

La Banque d’Angleterre a revuses prévisions, mercredi, et tabledésormais sur une récession quise poursuivra en 2009. Consé-quence, l’inflation, qui atteignait5,2 % fin septembre, devrait des-cendre aux alentours de 1 % d’ici àla mi-2009. Cela ouvre la porte àde nouvelles baisses de taux, alorsque la Banque centrale vient deles réduire de 1,5 point à 3 %. Lalivre sterling s’estencore affaiblie,mercredi, dans la foulée de cesdéclarations, pour valoir moinsde 1,5 dollar, une première depuissix ans. a

Virginie Malingre

Les coffee shopsnéerlandaismenacés de fermeture

Europe

appel d’offres - avis d’enquête56, bd Mission Marchand 92411 Courbevoie cedexTél. 01 49 04 01 81 – Fax. 01 49 04 01 80www.osp.fr

« Par arrêté en date du 6 Novembre 2008, le Maire de Montgenèvre porte à la connais-sance du public qu’il sera procédé à une enquête publique relative à la quatrièmemodification du Plan Local d’Urbanisme de la Commune de Montgenèvre.

Le dossier d’enquête sera à la disposition du public du lundi 24 Novembre 2008 aulundi 29 Décembre 2008 inclus afin que chacun puisse en prendre connaissance, de 13h 30 à 16 h 30, – 15 h 30 le 24 Décembre 2008 – (sauf les samedis, dimanches et joursfériés), et faire enregistrer ses observations éventuelles.

Monsieur Yves LARNAUDIE, technicien territorial chef en retraite, domicilié en Mairiede Montgenèvre, Boîte Postale n° 13, 05100 MONTGENEVRE, désigné en qualité deCommissaire Enquêteur, se tiendra à la disposition du public à la Mairie le lundi 24Novembre 2008, le mercredi 10 Décembre 2008 et les lundis 22 et 29 Décembre 2008,de 13 h 30 à 16 h 30. Les observations formulées par écrit peuvent lui être adresséespar la poste à la Mairie. »

ENQUETE PUBLIQUECOMMUNE DE MONTGENEVRE (HAUTES ALPES)

Quatrième Modification du Plan Local d’Urbanisme

OSP

ALLEMAGNE CRITIQUES DES « SAGES » AU PLAN DE RELANCE D’ANGELA MERKEL

Le recul du PIB au troisième trimestrefait entrer l’économie allemande en récession

Le Liberty II, l’un des coffee shops de Roosendaal, au sud des Pays-Bas. WIM DANEELS/WDK

Le sénateur-maire Alain Gournac et le député-maire Pierre Bourguignon félicitent lesreprésentants de Nancy, Marseille, Paris et Issy-les-Moulineaux.

Prix TERRITORIA 2008Depuis 1986, le Prix TERRITORIA récompense le dynamisme et l’efficacité de lagestion des collectivités territoriales, jugés au regard de trois critères :innovation, aptitude à être repris par d’autres collectivités et bonneutilisation des deniers publics. Monsieur Alain Marleix, secrétaire d'Etat à l’intérieur et aux collectivités territo-riales a présidé le Jury qui a sélectionné les lauréats, primés par domaine. Les trophées du Prix TERRITORIA 2008 ont été remis aux lauréats le 5 novembredans les salons de Boffrand de la Présidence du Sénat.

LES LAURÉATS• Prix TERRITORIA Europe : Chemnitz, Allemagne • Parrainage européen : Mulhouse • Aménagement Espace Public : Bordeaux • Civisme/Citoyenneté : Paris• Communication : le Finistère • Concertation : Yzeure• Culture : Marseille • Développement local : le Cantal • Environnement : le Syndicat de production d’eau du Bassin rennais • Valorisation du patrimoine : Bordeaux • Evaluation Politiques Publiques : Issy-les-Moulineaux • Management : les Vosges• Prévention : Nancy • Ressources Humaines : Rennes • Santé : Béziers • Services à la population : Paris • Club du e-public TIC : le Cantal • Développement durable : l’Orne sensibilise les communes à l’entretien

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Le dispositif de la ville de Paris « Louez solidaire et sans risque » a obtenule Grand Prix TERRITORIA Presse.

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ALLEMAGNEAccord salarialdans la métallurgie allemandeLe syndicat et le patronat de lamétallurgie se sont entendus,mercredi 12 novembre, pour aug-menter de 4,2 % les revenus des3,6 millions de salariés du sec-teur. L’accord est valable jus-qu’en avril 2010. Signé après desgrèves d’avertissement qui ontmobilisé jusqu’à 550 000 sala-riés, il évite une grève plus dure.A l’origine, le syndicat IG Metallréclamait une hausse de 8 %.

ETADeux activistes interpellésen FranceDeux hommes armés soupçon-nés d’appartenir à l’organisationséparatiste basque ETA ont étéinterpellés par les gendarmesmercredi 12 novembre, àTarascon-sur-Ariège (Ariège). Ils

ont été placés en garde à vue.Selon le ministère espagnol del’intérieur, ils font « partie de l’ap-pareil militaire de l’ETA ».

UNION EUROPÉENNEIncident entre l’Irlandeet la République tchèqueUn incident diplomatique a mar-qué la visite d’Etat en Irlande duprésident tchèque Vaclav Klaus,dont le pays assurera la présiden-ce de l’Union européenne le 1er jan-vier 2009. Mercredi 12 novembre,le ministre irlandais des affairesétrangères, Michael Martin, a qua-lifié de « déplacés » des propostenus par M. Klaus lors d’une ren-contre avec Declan Ganley, l’undes artisans de la victoire du« non » au référendum irlandaissur le traité européen. « Si quel-qu’un ne me plaît pas, lui a répon-du M. Klaus, je le lui dirai en faceet non derrière son dos. »

10 0123Vendredi 14 novembre 2008

Page 11: Le Monde 14 11

Allemagne. Fermeture obligatoire,sauf pour les boulangeries, pharmacies,boutiques de gares et d’aéroports. Sontautorisées quatre ouvertures par an pourles fêtes, foires…

Belgique. La loi n’impose pas la fer-meture mais prévoit un repos de 24 heu-res. L’ouverture des commerces de détailest autorisée jusqu’à12 heures. 40 diman-ches par an, les magasins d’ameublementet de jardinage sont autorisés à ouvrir.

Espagne. La législation est fixée parles régions autonomes.Avec une ouvertu-re autorisée d’au moins douze dimanches

ou jours fériés par an. La règle ne s’appli-que pas aux magasins de moins de500 m2.

Grande-Bretagne. Aucune restric-tion prévue, mais seuls les magasinsd’une surface inférieure à 280 m2 peuventouvrir librement.

Italie. Fermeture obligatoire sous pei-ne d’amende, mais exceptions pour cer-tains types de magasins (alimentation,tourisme). Autorisations pour huitdimanchesdans l’année etceuxde décem-bre.

Suède. Aucune restriction.

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POITIERS« Notre gros souci, c’est le travail le diman-che. » Un peu rougissante, Brigitte s’estlancée la première. Exprimant ainsi laprincipale préoccupation de la vingtainede salariés du commerce, militants etélus Force ouvrière (FO), venusaccueillir, ce vendredi 7 novembre, leursecrétaire général, Jean-Claude Mailly,au Géant Casino de Poitiers.

« Pas question de laisser faire, on vadémarrer une campagne auprès des dépu-tés, d’autant qu’ils ne sont pas tous d’ac-cord à l’UMP », répond ce dernier. « C’eststupide comme réponse à la crise, et derrièrecette proposition gouvernementale, il s’agitde banaliser cette journée, pas seulementdans le commerce mais aussi dans les servi-ces, et de payer le dimanche comme lesautres jours », affirme M. Mailly, quisillonne le pays à l’occasion de la campa-gne pour les élections prud’homales mer-credi 3 décembre.

Dans ce département de la Vienne, laréforme envisagée par le gouvernementfait d’autant plus parler qu’employeurset syndicats s’étaient mis d’accord pourlimiter à deux par an les dimanches tra-vaillés. « On a un allié de poids avec lachambre de commerce et d’industrie », seréjouit Alain Barreau, le représentantlocal de FO. Invité avec les salariés à lacafétéria, le directeur du Géant Casino,Philippe Vila, confirme : « Nous n’avonspas besoin d’ouvrir le dimanche, il n’y apas de demande. »

« Mort du petit commerce »Une heure plus tard, Jean-Claude

Mailly a rendez-vous avec le présidentde la CCI, Jean-Bernard Lasalle. Ce res-ponsable patronal raconte comment ilveille lui-même à la stricte application del’accord en n’hésitant pas à décrocherson téléphone pour rappeler à l’ordre lesgérants de magasin. « J’ai négocié en2003 un accord sur le travail le dimanche

et, quand il y a un problème, j’appelle etj’arrive à faire fermer les magasins en lesconvainquant que le porte-monnaie desconsommateurs n’est pas extensible »,explique M. Lasalle. Adhérent du Medef,il est pourtant en désaccord avec sa prési-dente, Laurence Parisot, favorable au tra-vail le dimanche. « Je ferai tout le nécessai-re pour me battre, parce que, dans quelquetemps, ce sera la mort du petit commer-ce », explique-t-il. Jean-Claude Maillyn’en demandait pas tant.

Après un déjeuner pris avec les mili-tants, le numéro un de FO développe l’ar-gumentaire devant quelque 150 person-nes. Dans la salle des fêtes de Buxerolles,M. Mailly enfonce le clou sur le travail ledimanche et le « travailler plus » prônépar le chef de l’Etat. « Il est anormal quequand des enseignes ne respectent pas laloi, lance-t-il, le gouvernement, au lieu deles sanctionner, décide qu’il faut, en chan-geant la loi, rendre légal ce qui était illé-gal. » Le responsable syndical brocarde

l’incohérence du gouvernement, deXavier Bertrand, rebaptisé le « ministredu travail-le-dimanche », et de XavierDarcos, surnommé le « ministre Pam-pers » – depuis que celui-ci a déclaré queles enseignants en maternelle chan-geaient les couches. « On supprime l’éco-le le samedi matin pour que les enfantspuissent rester avec leurs parents, et onenvoie les salariés travailler le dimanche,où est la logique ? », s’interroge Jean-Claude Mailly.

Prud’homales obligent, le secrétairegénéral de FO attaque violemment l’ac-cord sur la représentativité soutenu parla CGT, la CFDT, le Medef et la CGPME.« Nous, globalement, on n’a pas peur.Même si on souffrira dans certaines entre-prises comme tous les autres syndicats »,déclare-t-il. A 17 heures, M. Mailly, avantle « dernier verre » avec les militants,s’engouffre dans la grosse berline qui leramène à Paris. a

Rémi Barroux

LES DIMANCHES EN EUROPE

France

Dans la Vienne, syndicats et patrons font front communL’UMP propose de libéraliser le travail ledimanche sur la base unique du volonta-riat, avec une majoration de salaire de100 %. Cette mesure figure parmi les tren-te « pistes de réflexion » retenues par leparti majoritaire à l’issue des « ateliers duchangement » organisés autour d’expertspour réfléchir à la refonte du capitalisme.L’UMP estime que « la liberté de travaillerle dimanche est synonyme de dynamismeéconomique, notamment dans les zonestouristiques ou d’attractivité commercialeet donc d’emploi et de pouvoir d’achat ».Elle souligne que deux Français sur troissont favorables au travail dominical.Robert Rochefort, directeur du Credoc(Centre de recherche pour l’étude et l’ob-servation des conditions de vie), qui parti-cipait à ces ateliers, considère que la majo-ration du salaire dominical à 100 % empê-cherait la « banalisation » du travail ledimanche. Joseph Thouvenel, de la CFTC,a pour sa part précisé qu’il restait défavo-rable à cette proposition.

Pour beaucoup d’élus de la majorité, l’ouverture le dimanche n’est pas une priorité. Ici, au Conforama de Vitry-sur-Seine. V. DEBANNE POUR « LE MONDE »

L’OBSTINATION des députés apayé : un amendement parlemen-taire au projet de loi de finances,présenté par l’UMP Gilles Carrez,va instituer un plafonnement glo-baldesnichesfiscales.Adoptémer-credi 12 novembre en commissiondes finances par la droite, ce textedu rapporteur général du budgetlimite à 25 000 euros plus 10 % durevenu le bénéfice global desniches. Soutenu par le gouverne-ment, il doit être examiné, lundi 17,en séance.

Six mois après les travaux de lamission d’information transparti-sane, qui avait réclamé, au nom del’équité, le plafonnement globaldes dépenses fiscales (déductions,réductions, allégements fiscaux…)dontbénéficientcertainscontribua-bles, les parlementaires ont obtenu– partiellement – satisfaction. Lessocialistes se sont toutefois abste-

nus. « L’amendement Carrez est unprogrès,mais ledispositifchoisiconti-nuerad’êtreinopérantpourlescontri-buables les plus aisés », a fait valoirle président PS de la commissiondes finances. Didier Migaud rejettel’idée d’un seuil exprimé en pour-centage du revenu, qui joue contrela progressivité de l’impôt sur lerevenu (IR). Selon ses calculs, uncélibataire déclarant 100 000euros de revenu imposable pour-rait encore voir son impôt annuléavec le nouveau dispositif, alorsqu’à ce niveau l’impôt peut attein-dre 28 000 euros au maximum.

« Choisies » ou « subies »Le plafonnement global s’appli-

quera aux niches « choisies » par lecontribuable (emplois à domicile,investissements outre-mer…) paropposition aux niches « subies »(quotient familial…). Il inclura le

créditd’impôtsur les intérêtsd’em-prunt immobilier voté enaoût 2007. M. Carrez a en outreconvaincu le gouvernement derevoir le plafonnement de nichesquinel’étaientpasencore.Laréduc-tion d’impôt sur les investisse-ments outre-mer sera plafonnée à40 000 euros net de rétrocessionou 15 % du revenu brut imposable.Pour le dispositif Malraux, le tauxde réduction sera de 35 % dans lessecteurs sauvegardés et de 25 %dans les zones protégées, dans lalimite de 100 000 euros de travaux.

Un nouveau dispositif est prévupour les loueurs en meublé profes-sionnels. Ils bénéficieront d’uneréductiond’impôtde5 %quandlesbiens loués remplissent un serviced’intérêt général (résidences étu-diantes, maisons de retraite…)

La transformation de mesuresd’assiette en réductions d’impôt

rendplussimplelecalculduplafon-nement global. Les députés espè-rent ainsi échapper à la rééditiondes critiques formulées en 2005par le Conseil constitutionnel surl’illisibilitéduplafonnementenvisa-gé à l’époque. Il permet en outre,selonM.Carrez,derésoudre lepro-blème de justice soulevé parM.Migaud.Celui-ciavait fait valoirque le bouclier fiscal appliqué à unrevenu de référence minoré par lerecours aux niches, entraînait undouble avantage fiscal pour lescontribuables les plus riches.

Le président de la commissiondes finances du Sénat, le centristeJeanArthuis,aparailleursannoncélacréationd’unemissiond’informa-tion sur le bouclier fiscal. Commel’UMP Philippe Marini, il souhaitesupprimer ce bouclier ainsi quel’ISF. a

Claire Guélaud

Le sujet pourrait être proposé auxépreuves de philosophie : « le tra-vail du dimanche, un leurre ou une

liberté ? » Nicolas Sarkozy y a répondu àl’oral de Rethel (Ardennes), le 28 octo-bre. « Pourquoi continuer d’empêcher celuiqui le veut de travailler le dimanche ?, s’estdemandé le président de la République,sous la forme rhétorique interrogativequ’il affectionne dans ce cas. C’est un jourde croissance en plus, c’est du pouvoird’achat en plus. Il faut quand même penseraux familles qui ont le droit, les jours oùelles ne travaillent pas, d’aller faire leurscourses dans des magasins qui sont ouvertset pas systématiquement fermés. » Et lechef de l’Etat, partisan de « libérer toutceci », a invité les parlementaires à « sesaisir sans tabou » de la proposition de loidéposée à cet effet au début du moisd’août par le député (UMP) des Bouches-du-Rhône Richard Mallié.

Dès le 4 novembre, le sujet était doncabordé lors de la réunion du groupe UMPde l’Assemblée nationale. Et suscitait devives réserves. Pour de nombreux élus dela majorité, l’ouverture des commerces ledimanche n’apparaît pas comme la plusurgente des priorités. Certains, à l’instarde Christian Jacob (UMP, Seine-et-Mar-ne), ont exprimé leur hostilité à une exten-sion des dérogations qui préfigurerait unegénéralisation du travail dominical.

La proposition de loi rédigée parM. Mallié, prévoyant une « expérimenta-tion sur cinq ans », leur semblait, à cetégard, rendre le processus quasiment iné-luctable. « Le problème de l’expérimenta-tion, admet le vice-président du groupe,Jean Leonetti (UMP, Alpes-Maritimes),c’est qu’à l’issue du délai soit on arrête, soiton généralise. »

Ni la majorité ni le chef du gouverne-ment ne semblent partager l’engouementdu chef de l’Etat. Le « patron » des dépu-tés, Jean-François Copé, tente de gagnerdu temps. A l’issue de la réunion du4 novembre, estimant que « personne n’estvraiment auclair » et qu’« il y a des avis trèsdifférents », il indiquaitque le groupe allait

devoir « travailler pour trouver une solu-tion ». Interrogé dimanche sur Radio J, ilsedisait« pascertainqu’ilyaitencore lapla-ce » pour voter une proposition de loiavant la fin de l’année. François Fillon, desoncôté, interrogépardeslecteursduPari-sien,avoueque« c’estunsujet trèscontrover-sé, y compris au sein de ma famille politi-que ».

Gain loin d’être assuréM. Sarkozyn’aguèregoûtécestergiver-

sations. Sans attendre la réunion du grou-pe de travail des députés UMP dontM. Copé avait annoncé la constitution,M. Mallié a redéposé le 12 novembre unenouvelle proposition de loi visant à « défi-nir les dérogations au repos dominical ».

Luc Chatel, le secrétaire d’Etat chargéde la consommation, membre du « G7 »des ministres régulièrement réunis autourdu président de la République, s’en félici-tait par anticipation dans Libération du10 novembre : « Un compromis a été trou-vé, c’est un pas important et Nicolas Sarkozyy tient », indiquait M. Chatel. Enfin, lesecrétaire d’Etat chargé des relations avecle Parlement, Roger Karoutchi, laissaitentendre, mercredi, que le texte pourraitêtre examiné « courant décembre » à l’As-semblée, tout en reconnaissant qu’il nepourrait pas être définitivement adoptéavant la fin de l’année.

Si le chef de l’Etat semble déterminé àpasser outre les résistances de sa majorité,sesargumentssont loinde faire l’unanimi-té. « Un jour de croissance en plus » ? Pourla plupart des experts économiques,l’ouverture des commerces le dimanchen’entraîneraitqu’undéplacementde l’acti-vité commerciale. Les achats effectués cejour-là ne le seraient plus en semaine et lesgrandes chaînes ou les magasins de gran-de taille pouvant rester ouverts sept jourssur sept en seraient les seuls bénéficiaires,audétrimentdescommercesdeproximité.

« Plus de pouvoir d’achat » ? Le gainpour les consommateurs est loin d’êtreassuré. Quant aux salariés, l’extension dutravail dominical risque de se traduire par

de nouvelles contraintes, rendant illusoirela liberté de choix. Pour le directeur duCentre de recherche pour l’étude et l’ob-servation des conditions de vie (Credoc),Robert Rochefort, « aucun économiste nepeut dire qu’on a besoin d’ouvrir partout ledimanche ».

Il admet cependant que le doublementde la rémunération, dans ce cas, serait« une façon de ne pas banaliser le travaildominical ». Laquestion nesepose cepen-dantpas qu’en termes de pouvoir d’achat.C’est aussi celui du choix de vie, de la pos-sibilité de consacrer son temps libre àautre chose que la consommation. a

Patrick Roger

L’UMP propose un double-ment du salaire le dimanche

Social De fortes réticences sont perceptibles, y compris dans les rangs de la majorité

M. Sarkozy veut développer le travail du dimanche

FISCALITÉ L’UMP VOTE L’AMENDEMENT EN COMMISSION DES FINANCES, LE PS S’ABSTIENT

Les modalités du plafonnement des niches fiscales font débat

0123Vendredi 14 novembre 2008 11

Page 12: Le Monde 14 11

La présidente de la régionPoitou-Charentestend encore la mainà ses rivaux maisprévient : les militantsauront le dernier mot

CINQ JOURS après avoir démis-sionné du PS, Jean-Luc Mélen-chon a officiellement lancé, mer-credi 12 novembre, son « Parti degauche ». Il prend pour modèle leparti allemand d’Oskar Lafontai-ne, Die Linke, qui est parvenu àconcurrencer le parti social démo-crate, le SPD.

Le nom de sa nouvelle forma-tion est censé afficher la couleur.« Quand on dit “de gauche”, on ditl’essentiel », assure le sénateur del’Essonne. Il entend ainsi attirertous les « sans-parti », « ceux quiont quitté leur formation », à com-mencerpar lesdéçusduPSaprès levote des adhérents qui ont porté lamotion de Ségolène Royal en tête.

C’est tout particulièrement auxmilitants de la gauche du parti queM. Mélenchon adresse un appelpressant : « N’allez pas vous discré-diterdans des fronts sans principeoùvous abandonneriez les vôtres. » Ases yeux, Mme Royal a déjà gagné lecongrès et « les dés sont jetés ». « Iln’y a plus rien à attendre d’un partide centre gauche », insiste-t-il.

« Bouffée d’oxygène »Jean-Luc Mélenchon et Marc

Dolez, député du Nord (désormaisinscritaugroupeGauchedémocra-te et républicaine), ont renouveléleur appel en direction du PCF, duNouveau Parti anticapitaliste(NPA)et des Verts opposés autrai-té de Lisbonne, pour constituer un« front de gauche » en vue des élec-tions européennes de juin 2009.

Le PCF s’est empressé de se« réjouir » de l’initiative, souli-gnant qu’il avait fait, le premier, lamême proposition de listes com-munes, assortie d’un rendez-vous

le 18 novembre. « L’offre de Mélen-chonestuneboufféed’oxygèneàgau-che. Il faut constituer le front le pluslarge possible. Mais ce n’est pas pourfaire un parti ensemble », a préciséOlivier Dartigolles, porte-paroledu PCF. A un mois du congrès duPCF, la proposition de M. Mélen-chon a en effet relancé, en interne,le débat sur le devenir du parti etson engagement ou non dans« une nouvelle force politique ».

M. Mélenchon et ses nouveauxamis–dontEricCoquerel,duMou-vement pour une alternative répu-blicaine et sociale, et ClaudeDebons, ancien coordinateur descollectifs anti-libéraux – veulentd’abord marquer leur terrain. Lecongrès fondateur duParti de gau-che est prévu début février 2009,justeaprès celuiduPCFetduNPA.

Il s’agit deconstituer une identi-té « républicaine, sans concessionavec ladroite, etquiavocationàgou-verner ». Dans sa présentation, lesénateur a encore précisé : « Nousne voulons pas faire un PS-bis maisun parti qui se réclame de l’interna-tionalisme et de l’écologie. » « Cen’est un supplément d’âme », a-t-ilassuré. Comme pour conjurer lesort d’un parti au profil trop exclu-sivement républicain qui finiraitcommeceluideJean-PierreChevè-nement.

Le sénateur de l’Essonne espèreélargir son projet à la mouvance dunon de gauche à la Constitutioneuropéenne,qu’il s’agissedesVertsde gauche et ou des communistes.Pour l’heure, il s’agit de s’affirmer.Un meeting de lancement se tien-dra le 29 novembre, avec OskarLafontaine en invité d’honneur. a

Sylvia Zappi

A la veille du congrès, Ségolène Royalest prête à assumer l’épreuve de force

France

GAUCHE ÉLECTIONS EUROPÉENNES

M. Mélenchon prépare un« front de gauche » avec le PCF

Ségolène Royal ne dissimuleplus « l’envie » que lui inspi-re l’idée de diriger le parti

socialiste. Pour autant, l’anciennecandidateà l’élection présidentiel-le s’est s’exprimée mercredi12 novembre sur TF1 moins pourmettre en exergue sa « légitimi-té » que pour signifier sa détermi-nation à mener bataille. Face à desadversaires qui campent sur leurspositions, Mme Royal n’exclut pasd’enappeler directement aux mili-tants pour amener ses adversairesà composer avec sa motion, arri-vée en tête du vote des militantsavec 29,5 % des voix.

Convaincue qu’il « n’y aura pasde clash » Ségolène Royal considè-re que « l’absence de majorité arith-métiqueàReimsneseraitpasundra-me ».En casde blocage du congrès– qui prendra fin dimanche16 novembre – elle compte surl’élection du premier secrétaire parles militants, prévue le 20 novem-bre, pour trancher. Ce scrutin,auquel Mme Royal compte bien êtrecandidate, « redonnera un souffle »au PS. Celui ou celle qui l’emporte-ra pourrait alors « reconstruire unemajorité »àl’occasiondelapremiè-re réunion du conseil national, le22 novembre a-t-elle assuré lorsd’une rencontre avec la presse.

En évoquant un tel scénario,Ségolène Royal – qui ne croit pas à

une opération « Tout sauf Ségolè-ne » au profit de Martine Aubry ouBenoit Hamon – signifie néan-moins qu’elle est prête à aller jus-qu’à l’épreuve de force. Une façonde resserrer les rangs de ses trou-pes (Jean-Noël Guérini, hommefort de la fédération des Bouches-du-Rhône, désapprouve sa déci-siondepartirà l’assautde laRuedeSolférino). Et de placer ses adver-saires au pied du mur.

La présidente de la région Poi-tou-Charentes a également rendupubliques trois lettres adressées àBertrand Delanoë, Martine Aubryet Benoît Hamon. Ces missives

sontnotammentdestinéesà« leverune nouvelle fois toute ambiguïté »sur sa stratégie d’alliances du PS.« Il faut arrêter de faire un procèsd’intention à propos du MoDem »,a-t-elle prévenu

Pas inactifsDe leur côté, les représentants

des autres motions ne restent pasinactifs. Mercredi, Michel Sapin,proche du premier secrétaire etallié à M. Delanoë, a jugé qu’unecandidature de Mme Royal serait« une candidature d’affronte-ment ». Selon M. Sapin, un rallie-ment des « hollandais » n’est envi-

sageable que si l’ex-candidate sedésiste en faveur de VincentPeillon, l’un de ses proches.Mme Aubry a vu M. Hamon – tou-jours candidat au poste de premiersecrétaire – pour une rencontre« plutôt positive » puis M. Delanoëpour un échange moins fructueux.Ayantvirtuellement renoncé à diri-ger le PS, le mairedeParisneparaîtguèredisposéà semettreauservicede la maire de Lille. Certains de sesproches sont allés jusqu’à évoquer,sans trop y croire, une candidaturede Harlem Désir, son bras droit, auposte de premier secrétaire. a

Jean-Michel Normand

L’inconstance des dirigeants du PS,symptôme d’un parti sans boussole

IL EN A PARCOURU du chemin,Pierre Moscovici. Depuis le prin-temps, cet ancien disciple de Lio-nel Jospin devenu strauss-kah-nien s’est rangé parmi les« reconstructeurs » proches deMartine Aubry, puis auprès des« grands barons » de la Ligneclaire avant d’opter, finalement,pour Bertrand Delanoë.

Au PS, ce genre d’itinérairesinueux n’a rien d’exceptionnel.Que le socialiste qui n’a jamaischangé de courant ou d’alliancejette la première pierre… Leschangements de pied d’ArnaudMontebourg, aujourd’hui allié deMme Aubry, donnent le tournis.Julien Dray n’a cessé d’oscillerentre Ségolène Royal et FrançoisHollande, tandis que BenoîtHamon, qui fut rocardien puisproche de Mme Aubry, était, il n’ya pas si longtemps, l’un desmeilleurs alliés de l’actuel pre-mier secrétaire.

Cette instabilité qui alimentele procès en inconstance, voire enopportunisme, intenté aux diri-geants du PS, est symptomatiqued’un parti privé de boussole. Cesdernières semaines, l’aggrava-tion de la crise économique a faitbrutalement glisser le centre degravité du PS de la recherched’un modernisme réformiste àun discours axé sur la nécessitéde « changer le système ». « Le PS

n’est pas sûr de lui-même et de cequ’il pense. Il est trop soumis àl’air du temps », regrette M. Hol-lande. Privé de l’ancrage histori-que des grands partis sociaux-démocrates européens issus dumouvement syndical, le Partisocialiste a souvent compensé cemanque par la radicalisation deson discours.

DéphasageA l’écart des débats qui traver-

sent la gauche européenne, ceparti qui semble parfois « horssol », malgré son exceptionnelréseau d’élus, n’est pas parvenu àse mettre durablement en phaseavec l’évolution de la société. Aucours des dernières années, le PSn’a pas senti monter l’aspirationà réhabiliter la « valeur travail ».Il a confondu montée de l’indivi-dualisme et reconnaissance del’individu, sous-estimé l’impactde la mondialisation et négligél’importance du rapport à lanation. Un déphasage que l’onpeut aussi imputer à la perte decontact avec les corps intermé-diaires – syndicats, mouvementsassociatifs – et les intellectuels.

Ayant préféré le confort dessynthèses à la confrontation desidées, le PS a vu se déliter lesgrands courants – réduits, le plussouvent, à des écuries présiden-tielles – qui structuraient jus-qu’alors ses débats internes.Depuis l’éclatement du NouveauParti socialiste (NPS) au congrèsdu Mans, en 2005, l’aile gauche

du parti n’a cessé de se fragmen-ter, et n’est pas parvenue à offrirun débouché politique fédérateuraux partisans du « non » au réfé-rendum de 2005 sur le projet deConstitution européenne.

Les familles issues du mit-terrandisme végètent – c’est lecas des fabiusiens – ou déclinent,à l’image des jospinistes, éprou-vés par l’échec de M. Delanoë. Lecourant strauss-kahnien, boîte àidées du PS des années 2000, aéclaté dès la nomination de« DSK » à la tête du FMI.

A la veille du congrès de Reims,les trois principales motions enlice – toutes issues de l’anciennemajorité – ressemblent à des édifi-ces plus ou moins stables compo-sés de multiples sensibilitéscimentées par la présence de gros-ses fédérations. Ces dernièresreprésentent aujourd’hui les prin-cipaux points d’ancrage à l’inté-rieur d’un parti qui peine à faireémerger de réels clivages, commele suggère la lecture des motionssoumises au vote des militants.

L’un des enjeux du congrès deReims sera de contribuer à lancerles débats – sur le fonctionne-ment du parti, la réforme de l’Etat-providence, la fiscalité, les choixénergétiques, la définanciarisa-tion de l’économie, l’immigrationou le rééquilibrage du partage dela valeur ajoutée – que le PS atrop longtemps retardés. C’estsans doute le meilleur moyen deretrouver une boussole. a

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Congrès de Reims14, 15, 16 novembre

Ségolène Royal, mercredi 12 novembre sur TF1. CHRISTOPHE ENA/AFP

RÉMUNÉRATIONSLa garantie de pouvoir d’achatpour 130 000 fonctionnairesUn peu plus de 130 000 fonction-naires de l’Etat, sur 2,5 millions,devraient bénéficier en 2008 de lagarantie individuelle de pouvoird’achat prévue par les textes. Toutcomme 46 000 personnels deshôpitaux et près de 20 000 sala-riés sous statut de La Poste et deFrance Télécom. Ce mécanismeprévoit une prime de rattrapage

lorsque les augmentations indi-ciaires sont inférieures à l’infla-tion durant la période 2003-2007.Ces primes se montent à un peuplus de 1 000 euros en moyennepour la catégorie A (cadres) et de588 euros pour la B.

COLLECTIVITÉS LOCALESVers un renforcement de la loisur le cumul des mandatsAlain Marleix, le secrétaired’Etat à l’intérieur et aux collecti-

vités territoriales, a proposé, jeu-di 13 novembre sur RMC, quel’interdiction du cumul de deuxmandats soit étendue à la prési-dence des communautés de com-munes totalisant plus de50 000 habitants. Cette proposi-tion devrait figurer dans le projetde loi sur la modernisation descollectivités locales qui, aprèsavis de la commission Balladur,devrait être présenté au premiersemestre 2009.

12 0123Vendredi 14 novembre 2008

Page 13: Le Monde 14 11

Le maire (div. d.) de Neuilly,Jean-Christophe Fromantin,s’oppose au chantierpharaonique envisagé parNicolas Sarkozy et défendupar le fils cadet du président

L’ADMINISTRATION pénitenti-aire a fauté et elle doit êtrecondamnée. C’est ce qu’a estimé,mercredi12 novembre, la commis-saire du gouvernement, Isabellede Silva, chargée de dire le droitdevant le Conseil d’Etat, dans undossier portant sur la mort d’unjeune homme en prison.

Le 2 février 2006, la cour admi-nistrative d’appel de Versaillesavait condamné l’Etat à verser uneindemnité de 15 000 euros auxparentsdeJawadZaouiya,enrépa-ration du préjudice subi pour ledécès de leur fils. Mais le garde dessceaux, Pascal Clément, avaitdemandé l’annulation de cettecondamnation. Mme de Silva arecommandé au Conseil d'Etat dela confirmer.

Selon elle, un « cumul de fau-tes » a empêché de sauver JawadZaouiya, mort asphyxié à l’âge de19 ans, le 23 juillet 1996, dans l’in-cendie de la cellule qu’il occupaitavec deux autres détenus à la mai-son d’arrêt de Bois-d’Arcy (Yveli-nes). Sans ces fautes, JawadZaouiya aurait eu des chances desurvivre : « L’argumentation duministre de la justice ne nous a pasconvaincus », a conclu la commis-saire du gouvernement.

JawadZaouiyaavait étéplacéen

détentionprovisoireà lasuited’in-cidents avec la police dans la citédu Val-Fourré à Mantes-la-Jolie le8 juillet 1996. En pleine nuit, l’unde ses codétenus, qui réclamaitson transfert dans une autre cellu-le,avaitmis le feuà sonmatelas.Lematériel de lutte contre l’incendieétant enfermé à clé dans un local,le surveillant de service ne dispo-sait d’aucun moyen d’interventionrapide.

Le règlement prévoit que seulsles gradés peuvent ouvrir les por-tesdes cellules lanuit. Iln’avait fal-luquequelquesminutes pour join-drelechef,prendre lematérielanti-incendie et accéder à la cellule.Mais il était trop tard. JawadZaouiya et l’auteur de l’incendieétaient déjà morts, intoxiqués parles fumées dégagées par les hous-ses du matelas.

Enchaînement de fautesDepuis douze ans, les parents de

Jawad Zaouiya mènent unebataillepourétablir lesresponsabi-lités de l’administration pénitenti-aire. Les jeunes de moins de 21 ansdoivent être placés seuls en cellule.LaprisondeBois-d’Arcyavaitdéro-gé – avec l’accord de l’intéressé, sedéfend-elle – à cette obligation.Les trois garçons partageaient ain-si 9 m2 « alors que Jawad Zaouiyan’aurait pas dû se trouver dans cettecellule », a souligné lacommissairedu gouvernement.

Un enchaînement de fautes,chacune « démultipliant les effetsdes autres », est en cause, a-t-elleindiqué.L’embrasementdesmate-las aurait pu avoir des conséquen-cesmoins désastreuses si lescellu-les étaient équipées de dispositifsd’aération. Les prisons n’étant pasdes « établissements ouverts aupublic », rien ne contraint l’admi-nistration à adopter une tellemesure. Celle-ci autorise pourtantl’utilisation de réchauds à l’inté-rieur des cellules. Selon Mme de Sil-va, l’Etat « a une mission de servicepublic dans le fonctionnement péni-tentiaire ».

« La cour européenne de Stras-bourgdevientdeplusenplusexigean-te vis-à-vis de la responsabilité desEtats dans l’organisation de la viepénitentiaire », a souligné Mme deSilva. Enfin, la commissaire dugouvernement a jugé « très fai-ble » le montant de l’indemnitéallouée aux parents Zaouiya.« Pour laperted’unevie, celadevraitêtremieuxévalué », a-t-elledéclaré.Le Conseil d’Etat rendra sa déci-sion dans une quinzaine dejours. a

Yves Bordenave

L’enfouissement de la RN 13 à Neuilly-sur-Seinedivise les « héritiers » de Nicolas Sarkozy

France

PRISON JAWAD ZAOUIYA, 19 ANS, MORT EN 1996

Le « service public » pénitentiaireen cause devant le Conseil d’Etat

Ce n’est plus seulement une querellede clochers pour les élus de Neuilly-sur-Seine ; c’estdésormais uneaffai-

re d’Etat. Jeudi 13 novembre, le préfetd’Ile-de-France, DanielCanepa, a présen-té plusieurs scénarios d’« enfouisse-ment » de l’avenue Charles-de-Gaulle quirelie la Porte Maillot au quartier d’affai-res de La Défense. Un chantier que Nico-las Sarkozy – maire de Neuilly de 1983 à2002 – n’a cessé de vouloir entreprendre.Le préfet a installé un comité de pilotagequi devra proposer, mi-2009, un schémapouvantservir de base à l’éventuel démar-rage des travaux.

Longue d’1,4 km, la RN 13 est emprun-tée chaque jour par 170 000 véhicules(soit presque autant que le périphéri-que) qui traversent Neuilly en provo-quant des nuisances pour les riverains.Considérée comme un chantier pharao-

nique, l’idée de percer un tunnel de deuxfois trois voies sous la RN 13 divise les« héritiers » du chef de l’Etat. Son filscadet, Jean Sarkozy, élu en mars 2008conseiller général du canton sud deNeuilly, milite activement pour cetteoption.

Le nouveau maire (div. d.) de Neuilly,Jean-Christophe Fromantin, rejettel’idée d’enfouir totalement cette autorou-te urbaine. Ainsi que la construction detours à Neuilly, perspective privilégiéepar le chef de l’Etat et défendue par sonfils pour financer l’opération, via la ventede terrains à des promoteurs.

« Regardez Manhattan ! »« C’est très beau les tours ! Regardez

Manhattan ! », s’était emporté le prési-dent de la République, en juillet, lorsd’une réunion au théâtre de Neuilly enprésence de son fils et de M. Fromantin.« Ce soir-là, je m’en suis pris plein la figu-re », se souvient le maire de Neuilly. Cedernier propose désormais une solutionmixte : un petit tunnel, avec maintiend’un trafic en surface. Selon le maire, degrandes entreprises pourraient accepterde s’y installer et de financer le projet.Dans l’esprit de M. Fromantin, la RN 13

pourrait ainsi devenir les Champs-Ely-sées de Neuilly.

Le comité de pilotage, auquel partici-paient notamment Jean Sarkozy etM. Fromantin, n’a pas tranché, jeudi,entre les différents scénarios. Selon laDirection régionale de l’équipement(DRE), enfouir complètement la circula-tion dans un immense tunnel coûterait950 millions d’euros. Creuser un souter-rain moins large et maintenir une partiede la circulation sur l’avenue est évalué à700 millions. Mais nul ne sait si cettesolution moins coûteuse réglerait vrai-ment les nuisances de la circulation dansla ville. En attendant de nouvelles étudesde la DRE, la RN13 restera un terrain d’af-frontement entre MM. Fromantin etSarkozy.

Il n’est pas le seul. En dépit du soutienque lui a apporté l’UMP aux électionsmunicipales après le retrait de son candi-dat officiel, David Martinon, M. Froman-tin a toujours refusé de faire allégeanceau parti présidentiel. « Je ne regrette pasd’avoir refusé de prendre Jean Sarkozy surma liste, confie-t-il, bien que son père mel’ait demandé en échange de son soutien. »

Du coup, M. Fromantin est devenu lacible des sarkozystes. « Il a construit son

royaume sur des cendres et se montre inca-pable de réconcilier les Neuilléens entreeux », assène Arnaud Teullé, élu en marssur une liste UMP dissidente. « Noussommes beaucoup à rêver que sa victoire nesoit qu’une parenthèse dans l’histoire decette ville », poursuit M. Teullé, dont JeanSarkozy a demandé récemment la réinté-gration au sein de l’UMP. Délégué UMPde la circonscription Neuilly-Puteaux,Jean Sarkozy se montre très présent dansla ville depuis qu’il a lancé son propremouvement en octobre, baptisé « Géné-ration Neuilly ».

« Que ça vous plaise ou non, c’est moi lemaire ! », a lancé M. Fromantin au jeuneconseiller général qu’il découvrait aumilieu d’une réunion avec des commer-çants, le 10 octobre. « Jean Sarkozy éner-ve un peu. Les gens qui le voient dans lesrues ou les cafés se demandent quand il tra-vaille », assure Lili Gion, conseillèremunicipale et auteur d’un récit à la gloiredu maire publié en octobre (L’étonnantevictoire de Fromantin à Neuilly, éditionsScali). M. Fromantin, qui a créé sa pro-pre association (« Ma vie, Ma ville ») ledédicace activement, ces temps-ci, dansles plus grosses librairies de Neuilly.a

Béatrice Jérôme

JUSTICEChristian Vanneste blanchipour ses propos homophobesDans un arrêt rendu mercredi 12 novem-bre, la Cour de cassation a annulé lacondamnation pour injures homophobesdu député (UMP) du Nord, Christian Van-neste. Si ses propos « ont pu heurter la sen-sibilité de certaines personnes homosexuel-les, leur contenu ne dépasse pas les limitesde la liberté d’expression », estime-t-elle.En 2005, M. Vanneste avait déclaré quel’homosexualité était « inférieure à l’hété-rosexualité » et que les comportementsdes homosexuels étaient « inférieursmoralement ». Caroline Mécary, l’avocatede SOS-Homophobie, a estimé que ladécision de la Cour « semblait relever d’unautre âge. Les homosexuels (les) apparais-sent une fois de plus comme une catégoriede « sous-hommes » que l’on pourrait inju-rier à loisir. » M. Vanneste a dit mercredi« regretter le mot “inférieur” ».

BUDGETLe Sénat veut supprimerl’amendement « Tapie »La commission des finances du Sénat asupprimé mercredi 12 novembre l’amen-dement « Tapie », voté par les députés,qui prévoyait de soumettre à l’impôt lesindemnités de plus de 200 000 eurospour préjudice moral. En juillet, un tribu-nal arbitral a attribué 285 millions d’eurosà Bernard Tapie dans le contentieux entrel’ex-homme d’affaires et le CDR, structurede cantonnement des actifs douteux duCrédit Lyonnais. – (AFP.)

RÉFÉRENCES

Jurisprudence. Au cours destrente dernières années, leConseil d’Etat a plusieurs foisreconnu la faute de l’Etat dans lamort de détenus. Dans la mêmepériode, sous l’influence de laCour européenne des droits del’homme, la mise en cause decette responsabilité a été ren-due plus facile. La jurisprudencea remplacé la « faute d’uneexceptionnelle gravité » par la« faute lourde », puis par la « fau-te simple » : l’administrationpeut être condamnée pour unesérie de négligences.26 mai 1978. Arrêt Wachter. Lafaute lourde de l’Etat est recon-nue pour un décès dans unincendie de cellule à la maisond’arrêt de Metz.23 mai 2003. Arrêt Chabbah.Responsabilité de l’Etat pourune succession de fautes dansle suicide d’un détenu, à qui sonmandat de dépôt n’avait pas éténotifié, à la prison de Nanterre.9 juillet 2007. Arrêt Delorme.Suicide d’un mineur placé en cel-lule individuelle sans accompa-gnement après sa condamna-tion, à Angoulême. Faute recon-nue pour défaut de vigilance.

0123Vendredi 14 novembre 2008 13

Page 14: Le Monde 14 11

Ces universités vont devoircompter sur les collectivitéslocales et se spécialiser.Valérie Pécresse a annoncé400 millions d’euros de pluspour 11 établissements

Les petites universités recalées du plan campusadoptent des stratégies de survie

ÉEDUCATION

Un appel d’offressuscite l’émoides professeurssur le Web

En direct du 123sur France Info

du lundi au vendredi à 22 h 47

la rédaction du Monde décrypte l'actualité

0123

LA FERME dite Le Goutailloux, àTarnac, en Corrèze, où se trou-vaient six des dix personnes inter-pellées dans le cadre de l’enquêtesur les actes de malveillance com-mis contre la SNCF, n’était pasinconnue de la police.

Située sur le plateau des Mille-vaches, cette ferme avait été enre-gistréeenSociétécivile immobiliè-re le 18 mars 2005, avec un capitalde 2 000 euros, par BenjaminRosoux. Né à Seraing, en Belgi-que, mais de nationalité françai-se, cet homme de 30 ans, fils d’unmédecin, aurait milité à la Fédéra-tion des jeunes écologistes euro-péens. Pour les enquêteurs, c’estaujourd’hui l’un des membresactifs du groupe Coupat – du nomdu chef de file de jeunes autono-

mes soupçonnés d’avoir sabotédes voies SNCF le 26 octobre et le8 novembre. La police s’intéresseaussi à un autre lieu-dit, dans lepetit village tout proche de Viam,où certains résidaient.

Dans cette « communauté »figurent quatre femmes, Yldu-ne L., présentée comme la compa-gne de Julien Coupat, Gabriel-le H., Elsa H. et Manon G., ainsique deux autres hommes,Mathieu B. et Bertrand D. La plu-part sont âgés d’une vingtained’années. Tous étaient surveillésdepuis plusieurs mois. Selon unpolicier, il s’agitd’unnoyauhomo-gène, quiavait adopté uneattitudede groupe clandestin, se méfiantde tout, préférant les cabines télé-phoniques plutôt que les porta-

bles. Quasiment une fois par mois,ils se seraient réunis avec des jeu-nes grecs, allemands, italiens etanglais, lors de rencontres « denature conspirative ». L’une d’en-tre elles se serait tenue cette annéesur le territoire français, à Metz.

Julien Coupat et sa compagneavaient été signalés à la policefrançaise par le FBI après qu’ils sesont soustraits à un contrôled’identité à la frontière canadien-neen2007,déclenchant l’ouvertu-re d’une enquête préliminaire. Ilsauraient participé à une manifes-tationcontre un centre de recrute-ment de l’armée à New York.

Voilà pour la partie renseigne-ment, antérieure aux interpella-tions. Mais la justice doit aujour-d’hui faire la démonstration de la

responsabilité individuelle decha-cun dans les actions contre laSNCF. Ce qui ne sera peut-êtrepas chose aisée. Pour l’heure, lesmembres du groupe se sont mon-trés peu diserts lors des auditions.Reste les perquisitions. Au Gou-tailloux, la police a saisi un arse-nal hétéroclite : gilets pare-balles,pinces de forge, fumigène SNCF,matériel d’escalade, horaires detrain, instructions pour cocktailsMolotovet tracts appelant à mani-fester à Vichy, lors de la réuniondes ministres européens de l’inté-gration, le 3novembre. Ils ontéga-lement trouvé des tubes métalli-ques de 2,2 mètres à Paris. Toutesles gardes à vue ont à nouveau étéprolongées jeudi 13 novembre. a

Isabelle Mandraud

UN APPEL d’offres pour une « veille del’opinion », lancé par les ministères del’éducation et de l’enseignement supé-rieur met en émoi le Web et les profes-seurs depuis plusieurs jours. A cran, lesplus soupçonneux y voient une tentativede surveillance ou de fichage, quand lesdeux ministères plaident la « transparen-ce » et la banalité d’un travail d’informa-tion au service de l’action publique.

Daté du 15 octobre et faisant l’objetd’une annonce dans le Bulletin officieldes annonces de marchés publics(Boamp) du 4 novembre, cet appel d’of-fres de la délégation à la communication– commune aux deux ministères – pré-voit de consacrer 100 000 euros en 2009à la « veille de l’opinion » pour le comp-te du ministère de l’éducation et120 000 euros pour celui de l’enseigne-ment supérieur.

Révélé le 7 novembre par le site Inter-net Fabula, le texte de l’appel d’offres a,depuis, circulé.Lecahier des charges énu-mère un certain nombre d’« objectifs » etparle de « repérer les leaders d’opinion »,les « lanceurs d’alerte », d’« analyser leurpotentiel d’influence et leur capacité à seconstituer en réseau », de « décrypter lessources des débats et leurs modes de propa-gation » et d’« anticiper et évaluer les ris-ques de contagion et de crise ».

« C’est comme une extension à Internetdes traditionnelles revues de presse », plai-de-t-on dans l’entourage du ministre del’éducation, Xavier Darcos. La délégationà la communication confirme que « cettedémarche préexistait au gouvernementactuel » et que le premier marché a étépassé en 2006. « Ce n’est pas une démar-che de censure et de contrôle mais unedémarche d’écoute et de compréhension del’opinion », assure la délégation.

Les syndicats d’enseignants n’ont pasdu tout apprécié cette initiative mais serefusent à la dramatiser. « Parler d’unevolonté de fichage des militants me paraîtêtre une surinterprétation », estimeGérard Aschieri, secrétaire général de laFSU.« Leministère veut simplement antici-per pour adapter sa propagande », ajou-te-t-il. Pour Luc Bérille, secrétaire géné-ral du SE-UNSA (syndicat des ensei-gnants), « que le ministère soit attentif àl’évolution de l’opinion est une chose, maisque l’objectif annoncé (…) soit de prévenirtoute remise en causeou critiquede sa politi-que en est une autre ». a

Luc Cédelle

E lles partagent la déception de ne pasfaire partie des élues de l’« opéra-tion campus », qui va créer dix pôles

d’excellence universitaires dotés d’unfinancement de 5 milliards d’euros. Acôtéde quelquesparisiennes, les universi-tés perdantes sont souvent des établisse-mentsplus modestesde province : ils crai-gnent de péricliter. Valérie Pécresse aannoncé, mercredi 12 novembre, dansLes Echos, que onze d’entre elles rece-vraient 400 millions d’euros sur trois ans.

Mais les « perdantes » ont adopté leurspropres stratégies de survie. Avec ses10 000étudiants, l’universitédePerpignanViaDominiaestunpetitPoucetdanslepay-sage universitaire. L’argent du plan cam-pusn’auraitpasétédetroppourrénoverunparc immobilier vétuste. « J’ai 3 500 m2 debâtiments préfabriqués construits dans lesannées 1960 à raser et à reconstruire, et7 000m2àrestructurer »,expliqueJeanBen-khelil, président de l’université.

Pour autant, Perpignan n’a pas postuléau plan campus. « Dès le départ, nous avonscompris que le projet ministériel s’adressaitaux grandes universités métropolitaines »,confie M. Benkhelil. Pour trouver les100millionsnécessairesàsaréhabilitation,le campus compte sur des financementsplusclassiques,provenantdescollectivités.

« L’Etat nous a fait comprendre que son aidenepouvaitarriverqu’encomplément »,ajou-te M. Benkhelil.

L’« opération campus » a provoqué unélectrochoc pour ces universités, qui vontdevoir revoir leur positionnement. « Nouspensons que nous avons notre place à côté desuniversités de Montpellier, à condition decultiver nos points forts », conclut le prési-dent de Perpignan. L’établissement veutrecentrer son offre de formation et sarecherche autour de spécialités commel’énergie solaire et l’environnement marin.Elle espère aussi profiter de son apparte-nance au réseau Vives, une association devingt établissements universitaires de laCatalogne, des îles Baléares, d’Andorre etdu sud de la France.

Coincée entre Lille et Paris, l’universitéde Picardie Jules-Verne, établissement detaille moyenne, est, elle aussi, en pleineréflexion.Poursonprésident,GeorgesFau-re,elleest« d’utilitépublique,carellepermetà des étudiants picards de condition modestede poursuivre des études supérieures ».

Outre le campus principal, situé àAmiens, l’université a ainsi des antennes à

Beauvais, Creil, Saint-Quentin, Soissons etLaon. Mais, pour tirer son épingle du jeu,elle fait des appels du pied à ses voisins,notamment l’université de Reims, et lesIUT de Compiègne ou de Troyes. « Nousavons des similitudes avec l’université deReims, et, déjà, des formations en commun.Notre survie passe par la complémentarité.Nousnepourronsplusnouspermettred’avoirdes formations à effectif faible, en double »,poursuit M. Faure.

Boucler le budgetEn lettres classiques, par exemple, une

trentaine d’étudiants seulement font dugrec à Amiens. A Reims, ils sont une cin-quantaine. L’université réfléchit à répartirles étudiants en licence dans une universi-té, et ceux en master dans l’autre.

Malgré tous leurs projets, ces pôles desecondrangsaventque leuravenirseradif-ficile. « Notre situation immobilière nousplombe, analyse le président de Perpignan.Surunbudgetde18millionsd’euroshorsper-sonnel, la moitiépart endépensesde fonction-nement. » Résultat : des aménagementssontenplanet, chaqueannée, l’universitéa

du mal à boucler son budget. « L’opérationcampusétait une occasion de restructurernosimplantations pour pouvoir bâtir un campusdes sciences en centre-ville, explique GeorgesFaure, à Amiens. Nous avions besoin de80 millions d’euros, il va falloir les trouverpar un autre moyen. Les collectivités localesnoussoutiennentdéjàbeaucoup, jenesaispassi elles pourront nous financer davantage. »

Arrivées onzièmes alors qu’il n’y avaitque dix places, les universités lilloises(Lille-1, Lille-2, Lille-3) ont elles aussi vules milliards du plan campus s’envoler.Leur dossier s’était vu toutefois attribuer lamention « campus prometteur », qui méri-taitselonMme Pécresse,unsoutiendel’Etat.

Depuis des semaines, les trois prési-dents et le représentant de la région Nord-Pas-de-Calais se mobilisaient pour fairevaloircette distinction. Des parlementairesde droite et de gauche ont été reçus par laministre. Ils ont présenté un nouveau pro-jet. La région Nord-Pas-de-Calais s’est diteprête à le financer à hauteur d’1 euro pour 1euro mis par l’Etat. A ces conditions, lamobilisation a payé. a

Catherine Rollot

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(édition hiver 2008)

SABOTAGES LES GARDES À VUE DES DIX INTERPELLÉS ONT ÉTÉ PROLONGÉES

Deux villages corréziens dans la mire des enquêteurs

Au Mans, des colocations enHLM pour attirer les étudiants

L’université du Maine et le principalbailleur social de la ville, Le Mans Habi-tat, proposent depuis septembre desappartements ouverts à la colocation étu-diante, dans le quartier des Sablons, reliéen une demi-heure de tramway au cam-pus. Située à 55 minutes de Paris en TGVet à moins d’1 h 30 de grandes villes uni-versitaires comme Nantes ou Rennes, lapetite université de 8 700 étudiants espè-re trouver des arguments pour ne paspéricliter et attirer au-delà de son vivierlocal. Le bailleur y voit le moyen de déve-lopper la mixité sociale dans son parc.L’opération démarre avec 4 apparte-ments d’environ 75 m2, accueillant cha-cun trois étudiants. Loyer (avec lesaides) : 130 euros par étudiant.

FAITS DIVERSUn jeune homme abattudans le 19e à ParisUn jeune homme connu des ser-vices de police a été la cible decoups de feu, mercredi 12 novem-bre, dans le 19e arrondissementde Paris. Il était au volant de savoiture au niveau du métro Cri-mée, vers 19 heures, lorsquedeux hommes circulant sur unscooter ont ouvert le feu sur lui.Les enquêteurs privilégient lapiste du règlement de comptes,dans un arrondissement qui aconnu de nombreux incidentsdepuis le début de l’été (Le Mon-de du 20 septembre).

Un étudiant poignardépar un déséquilibréà GrenobleUn étudiant âgé de 26 ans estmort, dans la soirée du mercredi12 novembre, quelques heuresaprès avoir été poignardé à Gre-noble par un homme qui s’étaitéchappé d’un hôpital psychiatri-que. Auteur de trois agressionsdu même type, l’homme, âgé de56 ans, a fugué alors qu’il effec-tuait une promenade dans lacour de l’hôpital de Saint-Égrè-ve (Isère). Il y avait été placéd’office et il y bénéficiait d’unaccès libre au parc de l’établisse-ment. – (AFP.)

14 0123Vendredi 14 novembre 2008

Page 15: Le Monde 14 11

Henry Paulson, le secrétaire améri-cain au Trésor, a donc modifié à180 degrés son angle d’attaque de

la crise financière. Pour restaurer la capa-cité des banques à alimenter l’économieen liquidités, il avait choisi de leur retirerles produits toxiques qui lesasphyxiaient. Il avait fait adopter par leCongrès un plan pouvant mobiliser jus-qu’à 700 milliards de dollars (560 mil-liards d’euros) à cette fin.

Le 12 novembre, il a choisi d’utilisercet argent pour entrer dans le capital desbanques en difficulté afin de leur redon-ner les moyens de prêter de l’argent auxentreprises et aux particuliers. Il s’estrendu aux arguments des démocrates etdes Prix Nobel Joseph Stiglitz et PaulKrugman qui l’en priaient. Il a suivi leBritannique Gordon Brown, le premier àavoir eu le culot de pratiquer à grandeéchelle cette nationalisation partielle de

fait. Car l’exemple de la Suède est là pourprouver qu’il s’agit de la parade la plusefficace et la plus juste. En 1992, le gouver-nement – de droite – de ce pays avait choi-si de garantir tous les crédits des banquesen difficulté et, en contrepartie, d’entrer

dans leur capital. Moyennant 65 milliardsde couronnes (10 milliards d’euros del’époque), soit 4 % du produit intérieurbrut de la Suède à l’époque, il s’est retrou-vé à la tête de la majorité du secteur ban-caire national qu’il a redressé en vendantà bon escient les créances douteuses. Endeux ans, la rentabilité du secteur bancai-re était restaurée. En dix ans, le crédit est

revenu à son niveau antérieur. Aujour-d’hui, l’Etat a été remboursé en totalité.

Si M. Paulson a tant tardé à adopterune thérapeutique qui peut sembler degauche et qui ménage plus l’argent descontribuables que le cantonnement desactifs toxiques (quasiment invendables)dans une structure ad hoc, la première rai-son en est idéologique : nationaliser,même provisoirement, est une hérésiepour l’ancien banquier qu’est le secrétaireau Trésor. La deuxième raison est électora-le : il ne fallait pas nuire au candidat répu-blicain à la présidentielle John McCainqui ne voulait pas de cette intrusion del’Etat honnie par son électorat.

La troisième est clanique : l’ancienpatron de Goldman Sachs qu’est M. Paul-son se voyait mal mettre à la porte deleurs banques ses anciens collègues. Laquatrième raison, c’est Pascal Lamy, ledirecteur général de l’Organisation mon-

diale du commerce, mais aussi anciendirecteur du Crédit lyonnais, qui l’a don-née au Monde. « Il est complexe pour desgouvernements de participer à la gestiondes banques, nous a-t-il déclaré, car il leurfaut nommer des personnes compétentespour en surveiller le redressement. Ces per-sonnes leur demandent des instructions,par exemple s’il faut privilégier le compted’exploitation ou le chiffre d’affaires, etc.Autrement dit, sauver les banques, c’est ungros travail qui requiert des gens compé-tents et du doigté, et ce travail est énormepour les Etats-Unis qui ont éradiqué cettepratique depuis longtemps. »

Compétences et doigté seront d’autantplus nécessaires qu’à partir du mois dejanvier, l’administration Obama pourraitavoir la tentation d’étendre le remèdeappliqué aux banques à d’autres entrepri-ses majeures en difficulté, par exempledans l’automobile. a

Presses de l’École des hautes étudesen santé publique

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AFPUD-SODISISBN 978-2-85952-974-1384 p., 30 €Disponible en librairie ou auprès des Presses de l’EHESP

Alain Faujas

Eclairage

APRÈS les banques, l’assuranceest prise à son tour dans la tour-mente financière. La publicationde ses résultats du troisième tri-mestre révèle une accélération dela dégradation des comptes avecl’annonce d’importantes pertes.

Les assureurs européens enre-gistrent une baisse des revenusdans leurs activités de gestiond’actifset d’assurance-vie,notam-ment aux Etats-Unis et pâtissentd’une dépréciation de leurs porte-feuilles d’actifs liée à la chute descours de Bourse. La fin de l’années’annonce incertaine.

Ainsi, le président de Swiss LifeBruno Pfister, a affirmé mercredi12 novembre, dans un communi-qué, que le groupe renonce à réac-tualiser ses prévisions « comme iln’est pas possible de faire des décla-rations fiables sur l’avenir, étantdonné les incertitudes actuelles surles marchés financiers ».

Le groupe qui tablait sur unbénéfice variant entre 1,8 et1,9 milliard de francs suisses(1,2 milliard à 1,3 milliardd’euros)pour2008anticipedésor-maisune perte sur l’exercice. L’as-sureura été« particulièrement tou-ché »dans ces placementsalterna-tifs (hedge funds), mais aussi danslesobligations« émisespardes éta-blissements financiers devenusinsolvables ». Le titre a été sanc-

tionné à la Bourse de Zurich plon-geant de 20,05 % mercredi.

La prudence est aussi de misechez l’allemand Allianz, l’un desleaders européens de l’assurance.« Sans une amélioration complètedesmarchésfinanciers,nousnepour-rons pas atteindre notre objectif derésultat opérationnel, hors marchébancaire, de 9 milliards d’euros cetteannée et aussi en 2009 », a prévenule directeur financier Helmut Per-let en commentant les 2 milliardsd’euros de pertes du troisième tri-mestre annoncés le 7 novembre. Siles marchés ne se reprennent pas,Allianz prévoit près d’un milliardd’euros de dépréciations d’actifsau quatrième trimestre. Néan-moins,pourrassurer lesactionnai-res, le groupe a annoncé avoir misde côté 1,6 milliard d’euros pourun éventuel dividende.

Grandes manœuvresMais c’est au Pays-Bas que la

situation est la plus tendue. Aprèsavoir aidé ING en injectantdix milliards d’euros dans soncapital, puis Aegon, avec trois mil-liards d’euros, l’Etat néerlandais aannoncé, jeudi 13 novembre, l’ap-port de 750 millions d’euros aubancassureurSNSReaal pourren-forcer sa solvabilité.

Ce contexte sera sans doutefavorable aux grandes manœu-

vres dans le secteur de l’assuran-ce. Jeudi, malgré l’annonce derésultats en baisse, Zurich Finan-cial Services (ZFS) s’est dit prêt à« saisir des opportunités ». a

Dominique Gallois

NEW YORK

CORRESPONDANT

Le secrétaire au Trésor américain,Henry Paulson, a pris, mercredi12 novembre, un tournant majeur

dans la manière dont le plan de sauvetagedu système financier américain, ditTARP, sera géré. Contrairement à sa logi-que originelle – rapatrier dans les caissesde l’Etat des titres « pourris » détenuspar les banques – les 700 milliards de dol-lars (560 milliardsd’euros) de ce plan ser-viront à leur injecter directement desliquidités (en acquérantdes actions préfé-rentielles), à l’exemplede ce qui a été déci-dé au Royaume-Uni.

Objectif : leur donner les moyens defaciliter l’accès au crédit, qui ne se desser-re toujours pas, accentuant la chute de laconsommation et de l’investissement.« En période de ralentissement, même lesbanques les plus saines tendent à devenirplus prudentes et à restreindre leurs prêts »,a conclu M. Paulson, avant d’admettreque sa méthode initiale « n’était pas laplus efficace ».

L’Etat américain se donne tous lesmoyens d’amener les banquiers à assu-mer ce que M. Paulson considère être leur« responsabilité économique ». Au-delàd’un effort accru pour limiter les saisiesd’appartements des emprunteurs immo-biliers aujourd’hui insolvables en négo-ciant un refinancement de leur prêt, leTrésor « évalue » la possibilité que leTARP soit aussi accessible à « des institu-tions financières nonbancaires » (les socié-tés de crédit à la consommation), pourque d’autres populations bénéficientd’un assouplissement du crédit : le minis-tre a cité les étudiants (qui empruntentpour financer les coûts d’inscription éle-vés à l’université) et les acheteurs de véhi-cules.

Le 9 octobre, cinq jours avant sonobtention du prix Nobel, l’économistePaul Krugman publiait dans le New YorkTimes un article intitulé « La bonne déci-sion ». Il y félicitait le premier ministrebritannique Gordon Brown, qui avait prisl’option de l’investissement public dans

les banques, « montrant la voie ». C’estprécisément ce dont M. Paulson ne vou-laitoriginellementpas.Mi-octobre, leTré-sor s’était déjà résolu à injecter 250 mil-liards de dollars dans le capital des ban-ques. Cette fois, le virage est complet.Vives critiques

M. Paulson est vivement critiqué pouravoir décidé avec retard ce que nombred’économistes, pas uniquement démocra-tes, l’appelaient à faire depuis des semai-nes. Surtout, il ne veut rien entendre d’unplan public répondant à l’urgence nouvel-le : l’emploi. Les économistes de GoldmanSachs et JP Morgan Chase estiment que lechômage devrait atteindre rapidement7,5 % (il se situe actuellement à 6,5 %, sontaux était de 4 % il y a dix-huit mois).

Ce mercredi, le même M. Krugmanconclut sa chronique sur la nécessité, enplus du programme de stabilisation finan-cière, d’un nouveau plan de relance gou-vernemental, après celui de 153 milliardsde dollars, adopté en mars par l’adminis-

tration Bush. Ce plan « devrait atteindreaumoins600 milliardsdedollars »,écrit-il.Telle n’est pas la vision de M. Paulson, qui,mercredi, a dit rester « confiant » dans lacapacité du seul TARP réaménagé à relan-cer l’économie. Ilaaussi récusétoute inter-vention publique pour renflouer lesconstructeursautomobiles.Leplus impor-tant, General Motors, est au bord de la ces-

sation de paiement. Leur situation « n’estpas la faute du président des Etats-Unis (…)Espéronsqu’ils trouveront lemoyende survi-vre », a expliqué la porte-parole de la Mai-son Blanche, Dana Perino.

Le président élu, Barack Obama, et lesresponsables démocrates sont restés trèsdiscretsaprès le tournantprisparM. Paul-son. Mardi, la présidente de la Chambre,

Nancy Pelosi, avait appelé la présidence àdébloquer une aide urgente pour cetteindustrie. Et M. Obama avait, vendredi,dessiné les contours d’un plan de relanceauquelM. Paulsonn’a faitaucune référen-ce. Même s’ils jugent sa volte-face sur leplan financier opportune, elle leur appa-raît insuffisante. a

Sylvain Cypel

Economie&Entreprises

LE RAPPORT de la Commissionbancaire, daté du 29 octobre, surl’affaire des 751 millions d’eurosperdus sur les marchés aux Caissesd’épargne, a été versé au dossierd’instruction. Boris Picano-Nacci,le trader à qui est attribuée la perte,a été mis en examen le 30 octobrepour « abus de confiance ».

Comme dans l’affaire Kerviel, lerapportdelaCommissionbancaireaccable la hiérarchie de la banque.L’autorité de tutelle bancaireécrit ainsi en conclusion : « Le dis-positif de contrôle interne destiné àsuivrecetteactivitéprésentedegraveslacunes (…) aucun calcul indépen-dantdurésultatquotidienn’est effec-tué.Ledispositifde limites est insuffi-sant et s’appuie sur des indicateursbiaisés (…) Ordre avait été donné à lafin juin de fermer l’activité et de gérerceportefeuilleenextinction,pourpré-server le résultat acquis. Le trader aclairementoutrepassécetordreàpar-tir de la mi-septembre. Un contrôleinterne adéquat aurait permis des’en rendre compte immédiatement,et donc d’éviter les pertes. »

Desoncôté,danssesprocès-ver-bauxd’auditiondontLeMondeaeuconnaissance, Boris Picano-Naccia insistésur la libertédemanœuvredont il jouissait. Et sur le fait queses opérations n’étaient pas dissi-mulées mais au contraire, aisé-ment contrôlables. « Je pense que la

CNCE [Caisse nationale des cais-ses d’épargne] est de mauvaise foi(…) », déclare-t-il aux policiers lorsde sa garde à vue, le 29 octobre,affirmantque son plan de gestion aété « validé par des opérationnels ».« Comme la CNCE a perdu de l’ar-gent, poursuit-il, c’est une manièrede dire au grand public que chez eux,toutvabien, que lespertes sontduesàun trader fou. »

« Je pense qu’il savait »Le trader n’était-il pas censé ne

pas prendre de risques, pour gérer« en extinction » des investisse-ments pour compte propre censéss’arrêter fin 2008 ? « Tout dépenddecequ’onentendpargestionextinc-tive, répond le jeune trader, pourmoic’étaitaccompagner lespositionsau fur et à mesure afin de les débou-cler en totalité au 31 décembre2008 ». Il poursuit : « Mes posi-tions supprimaientdurisquenormalpourrajouterdurisqueextrêmemaisces opérations ont été faites au vu etausudetousetnem’ontpasétérepro-chées à l’instant. On me les a repro-chées quand j’ai perdu de l’argent. »

Letradernedevait-il pasrespec-ter des limites de risques, commel’affirme la direction ? « Je n’aisigné aucune limite, à ma connais-sance il n’y en avait pas (…) seuleune limite calculée sur les risques. Sije faisais 20 ou 30 millions d’euros

de P & L [résultat] c’était déjà unebonne année (…) Je ne m’étais pasimposé de réelles restrictions, j’es-sayais de prendre des engagementsen adéquation avec mes objectifs deperformance. »

Ses supérieurs hiérarchiquesétaient-ils au courantdeses« nou-vellespositions »prisessur lesmar-chés ? « Je pense qu’il savait,décla-re Boris Picano-Nacci en parlantde son responsable direct, même sije ne le lui ai pas dit expressément etque je n’avais pas à le faire ».

Par ailleurs, le trader tente dejustifier ses choix d’investisse-ment. Il affirme qu’il pensait fairegagner de l’argent à sa banque, enpariant sur une atténuation de lacrise boursière : « Il s’agissait dedire (…) que la volatilitéallait conti-nuer à monter jusqu’à un certainpoint et les marchés allaient conti-nuer à baisser jusqu’à un certainpoint.C’estpourprévenir cesmouve-ments que de nouvelles positions ontété prises (…) Au moment où j’aipris la position mes engagements enterme de sensibilité étaient nor-maux mais ils ont explosé le 10 octo-bre. » S’il avait pu imaginer que lerisque extrême se réalise, assu-re-t-il,« je n’aurais paspris cesposi-tions ». En 2007 et 2008, le jeunetrader a perçu 68 000 euros debonus. a

Gérard Davet et Anne Michel

FINANCE UNE NOUVELLE OPÉRATION DE SOUTIEN PUBLIC AUX PAYS-BAS

Les assureurs européens pâtissentde la dépréciation de leurs portefeuilles d’actifs

Finance L’argent public sera utilisé pour injecter du capital et plus pour racheter les actifs toxiques

Pour sauverles banques,le Trésor américainfait volte-face

JUSTICE LA COMMISSION BANCAIRE POINTE DE GRAVES LACUNES DE CONTRÔLE

Le trader à l’origine d’une perte de 751 millionsd’euros évoque « la mauvaise foi » de l’Ecureuil

La nationalisation n’est pas tant de gauche que ça

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La croissance des ventesdans le mondedevrait pâtir de la criseinternationale et subirun fort ralentissement

Mêmele luxe,quirestait jusqu’àpré-sent un îlot insolent de prospéritéet que l’on pensait épargné par

les aléas économiques, va pâtir de la criseéconomique mondiale. Pour la premièrefois depuis six ans, ce secteur devraitentrer en récession en 2009, et sa crois-sance pourrait nettement ralentir en2008, selon la septième étude qui lui estconsacrée, publiée par le cabinet deconseil en stratégie Bain & Company.

Cette année, la croissance des ventesde produits de luxe dans le monde pour-rait ralentir sévèrement : + 3 %, à 175mil-liards d’euros. C’est une baisse sensibledu taux de croissance – il s’établissait à+ 9 % en 2007. Les ventes mondialesdevraient ainsi reculer de 2 % en 2009, etmême de 7 % à taux de change constants,a précisé cette étude, qui a analysé les220 plus grandes entreprises du secteur.

« L’impact de la crise financière plonge-ra certains secteurs en récession », expliquel’auteure, Claudia d’Arpizio, qui a dirigél’étude depuis Milan. « Son ampleur et sadurée dépendront de la façon dont les entre-prises réagiront. Les plus résistantes serontcelles qui possèdent des marques internatio-nales fortes et diversifiées », ajoute-t-elle.

L’étudenote « unfléchissement desmar-chés matures », qui constituent 80 % desventes mondiales des produits de luxe.Ainsi, le Japon, déjà en récession, devraitpasser de – 2 % en 2007 à – 7 % en 2008,en raison de la faiblesse du yen par rap-port à l’euro. Cette disgrâce du marché setraduit par un report sur des achats

moins chers (parfums, chaussures…).L’Europe, qui reste le principal marchédu luxe (elle compte pour 38 % du mar-ché mondial), devrait s’attendre à voir sacroissance divisée par deux en 2008 à 5 %(contre 10 % en 2007), tandis que lesEtats-Unis subiront leur première annéede stagnation (0 % en 2008 contre + 4 %en 2007), depuis la baisse des dépensesliées aux attentats du 11-Septembre.

Le ralentissement du marché ne serapas uniforme : les marques considéréescomme plus accessibles, comme Coachou Ralph Lauren, pâtiront davantage dela crise économique. Selon l’étude, lesmarques comme Gucci ou Louis Vuittonsont achetées pour les styles de vie qu’el-les représentent : leur croissance est res-tée élevée en 2007 (+ 9 %), mais devraitseulement être en ligne avec le marché en2008 (+ 3 %). Les seules qui devraienttirer leur épingle du jeu sont les marquesde « super haut de gamme », comme Her-mès ou Loro Piana, dont l’élitisme devraitattirer les acheteurs les plus fortunés(+ 10 % en 2007 et + 8 % en 2008).

Coup de froidQuelssecteursseront les plus touchés ?

L’étude prévoit une stagnation dans l’ha-billement, malgré une croissance deslignes complémentaires des marques ain-si qu’un coup de froid sur les bijoux devaleur, tant en Europe qu’aux Etats-Unis.Avec une exception pour les montres, quirestent un relais de croissance formidabledans les pays émergents. « C’est générale-ment le premier article de luxe acheté dansles économies émergentes », précise l’étude.Lesaccessoiresresteront les« rois et les rei-nes du marché », notamment les chaussu-res et la maroquinerie.

Les riches acheteurs sentiront-ilsmoins bon ? Probable, puisque l’étudeprévoit une division par deux de la crois-sance des parfums vendus en 2008(+ 2,6 %) par rapport à 2007 (+ 5,2 %).En revanche, les cosmétiques résisterontà la crise.

Bain & Company reste toutefois trèsconfiant dans l’avenir du secteur, quiconserve « des fondamentaux solides »,comme le flux touristique croissant ou laprogression attendue des dépenses despersonnes « riches » et « super riches » (àla tête d’un actif net supérieur au millionde dollars) de l’ordre de 20 % à 35 % dansles marchés émergents, comme le Brésil,la Russie, l’Inde et la Chine, dans les cinqprochaines années.

Le leader mondial du luxe, LVMH, seveut optimiste : il poursuit sa dynamiquede croissance (+ 10 % sur les neuf pre-miers mois) et confirme ses objectifs pourl’année. « Le groupe a deux atouts princi-paux : la multiplication de sa présencedans les différents métiers du luxe (alcool,parfum, montres, mode, maroquinerie,bijoux…) et sa grande diversité géographi-que. LVMH reste leader dans les pays émer-

gents », explique-t-on chez LVMH.D’ailleurs, Gucci Group (PPR) commeLVMHrestent tirés paruneforte croissan-ce en Chine. Même Hermès a connu unecroissance modérée en octobre (+ 6 %),et a révisé « par prudence » ses prévisionsen 2008 à la baisse (entre 9 % et 10 % toutde même). « Nous ne changeons rien » en

ces temps de crise, tempère Patrick Tho-mas, gérant d’Hermès. Il a beau jeu derappeler que « depuis son entrée en Bourseen 1993, le titre a été multiplié par 20, lesbénéfices par 10. »

Moins haut de gamme, Hugo Boss adéjà revu ses objectifs à la baisse. Defaçonplus spectaculaire, L’Oréal, le chou-

chou de la croissance à deux chiffresdepuis vingt-quatre ans, devra se conten-ter d’une hausse de ses ventes de 4 % en2008. Enfin, autre symbole du luxe fran-çais, le champagne a déjà vu ses exporta-tions chuter de 22 % aux Etats-Unis aupremier semestre 2008. a

Nicole Vulser

Le secteur du luxepourrait entreren récession en 2009

CONJONCTURE LES ÉTATS-UNIS SUBIRONT LA RÉCESSION LA PLUS PRONONCÉE (– 0,9 %) en 2009

Selon l’OCDE, la convalescence économique des paysindustrialisés durera jusqu’au deuxième semestre 2010LES PRÉVISIONS de l’Organisation decoopération et de développement écono-mique (OCDE) publiées jeudi 13 novem-bre sont sombres, car les économies despays membres « sont entrées en récessionet le chômage est en train d’y augmenter ».

Après une croissance médiocre de+ 1,4 % en 2008 dans l’ensemble del’OCDE, l’année 2009 confirmera unerécession de – 0,3 %. Les Etats-Unis et lazone euro connaîtront quatre trimestresde recul jusqu’en juillet 2009. Les pre-miers régresseront de – 0,9 % en 2009, etla seconde de – 0,5 %. Le Japon ne recule-ra, lui, que de – 0,1 %.

Les raisons de cette dépression sontconnues : la crise financière partie desEtats-Unis a gagné l’Europe et le Japon,mais aussi les pays émergents. La pertede confiance entre les banques a provo-qué une crise de liquidités qui a affectél’économie réelle.

« La panique financière sera courte,commente Jonathan Coppel, économisteà l’OCDE, et nous estimons qu’elle prendrafinen décembre 2008. Le retour à la norma-lité sera progressif tout au long de l’année

prochaine, et ce n’est qu’à partir de ladeuxième moitié de 2010 que les économiesretrouveront leur potentiel de croissance. »

Par exemple, ce n’est qu’au deuxièmetrimestre2010 que les Etats-Unis connaî-tront à nouveau une croissance de 2,1 %,et la zone euro une croissance de 1,7 %.

Dans ces conditions, il n’est pas éton-nant que l’OCDE prédise une nette pous-sée du taux de chômage. De 2008 à 2010,celui-cipasserade5,7 %à7,5 %delapopu-lation active aux Etats-Unis, de 4,1 % à4,4 % au Japon et de 7,4 % à 9 % en zoneeuro. Malheureusement, la reprise ne setraduirapas immédiatementparuneamé-lioration du marché du travail, notam-ment en zone euro, où le taux de chômagese maintiendra longtemps à 9 %.

Une inflation à moins de 2 %Le rapport de l’OCDE note que, face à

ce violent retournement économique,« un stimulus macroéconomique est néces-saire », parce que les politiques monétai-res ne fonctionnent plus, en raison detaux déjà extrêmement bas. Des baissesd’impôts lui semblent appropriées, à

condition qu’elles ne remettent pas encause la stabilité budgétaire à long terme.

Le rapport souligne la nécessité d’unecoopération internationale, afin que lesnombreuses aides qui seront distri-buées pour soutenir des secteurs ourelancer l’économie ne faussent pas laconcurrence.

La purge du secteur immobilier sepoursuivra dans tous les pays, avec unebaisse prononcée des prix. Il n’y a que surle front de l’inflation que les nouvellessont bonnes à courte échéance. La sur-chauffe (+ 4,4 % aux Etats-Unis au troi-sième trimestre 2008) est finie. Au coursdes six prochains mois, les prix vontretrouver une progression inférieure à2 % dans toutes leséconomies industriali-sées, sous l’effet d’une baisse impression-nante des prix des matières premières, aupremier rang desquelles le pétrole.

L’OCDE note que cet apaisementcontribuera à redonner aux ménages lecomplément de pouvoir d’achat dont ilsont besoin pour faire face à une récessiondont ils font déjà les frais. a

Alain Faujas

Economie&Entreprises

TOKYO

CORRESPONDANCEChanel, Gucci ou encore Louis Vuitton…,le scintillement des façades de l’opulentquartier de Ginza, à Tokyo, témoigne dela confiance du luxe mondial dans un mar-ché japonais fidèle à ses ambassadeursdepuis des décennies. Pourtant, elles pei-nent à masquer leur inquiétude, tant lescomportements des consommateurs nip-pons évoluent, et pas seulement en raisonde la crise financière.

LVMH, le géant mondial de la mode,des cosmétiques et des vins et spiritueux,a vu ses ventes baisser de 7 % entre janvieret septembre dans l’Archipel, un marchéqui représente 10 % de ses revenus (20 %pour sa seule activité mode et accessoiresde cuir). Dans le reste de l’Asie, elles ontcrû de 22 %. En Europe, de 9 %. Hermèset Bulgari ont vu leurs ventes au Japon pro-gresser modestement de 1,5 % et de 3,8 %au premier semestre, contre respective-ment 27,8 % et 7,5 % en Europe.

En cause, l’impact de la crise. L’institutde recherche JMR a constaté dans une étu-de réalisée en juillet que 93,4 % des per-sonnes sondées ressentaient la hausse desprix et que 40,3 % prévoyaient de réduireleurs dépenses. En août, l’inflation aatteint 2,1 % sur un an alors que le salairemoyen a reculé de 0,3 % à 283 473 yens

(2 326,7 euros). Or beaucoup de clientsdes marques de luxe sont des employés degrands groupes, souvent des « officeladies » dans la vingtaine, autrefois promp-tes à l’achat, aujourd’hui plus réservées.

L’effondrement des marchés financiersexplique aussi la retenue des acheteurs.Les femmes actives célibataires et les nou-veaux riches du secteur des technologiesde l’information avaient profité de la forteappréciation du Nikkei, monté à plus de18 200 points en juillet 2007, mais aujour-d’hui à moins de 8 500 points. Les sortiesdu dimanche à Ginza restent prisées. Maisleurs adeptes viennent plus pour regarderque pour acheter. La baisse du nombre detouristes (– 6,9 % en septembre, à641 500) et de leurs dépenses affecte aussiles ventes du luxe.

Se démarquer, le dernier criLa relative morosité des affaires incite

les entreprises du secteur à modifierleurs stratégies. La clientèle riche estcourtisée, au travers de programmes defidélisation et de services personnalisés.Louis Vuitton envoie des gâteaux d’anni-versaire aux plus fidèles ou leur donneaccès à des produits exclusifs.

La Chine et ses « super riches » susci-tent aussi de grands espoirs. Patrick Alba-ladejo, vice-président exécutif chez Her-

mès, attend sur ce marché « une croissan-ce solide dans les magasins existants ».

L’attrait pour ce pays en forte croissan-ce laisse entrevoir un possible déplace-ment du centre de gravité du luxe en Asie.L’avenir ne se décline par forcément auJapon, d’autant que les consommateurs,moins attachés aux marques, y recher-chent maintenant des produits qui les dis-tinguent des autres. Cette évolution a faitle succès de l’américain Coach, qui propo-se des produits de qualité, moins chersque ceux des prestigieuses enseignes fran-çaises ou italiennes.

Cette tendance explique aussi le succèsdes enseignes Zara, Uniqlo et plus récem-ment du suédois H&M. Ce groupe aouvert son premier point de vente à Ginzale 13 septembre. 5 000 personnes se pres-saient à l’ouverture et les files d’attenten’ont pas diminué depuis. Un autre maga-sin a été inauguré le 8 novembre, avec unsuccès identique, dans le quartier bran-ché d’Harajuku. Il présente une collectionde vêtements dessinés par Rei Kawakubo,styliste pour Comme des garçons. « Cescréations sont abordables pour ceux qui nepeuvent s’offrir des produits Comme des gar-çons », précisait le jour de l’ouverture Mar-gareta van den Bosch, conseillère à la créa-tion de H&M. a

Philippe Mesmer

C’est devenu une marque… de fabriquechez Louis Vuitton : le maroquinier deluxe français sera la première à s’implan-ter sur un marché qui pourrait s’avérerprometteur. Mi-2009, elle inaugurerason premier magasin à Oulan-Bator, lacapitale de la Mongolie. Pas très loin dudésert de Gobi et des monts du Khangaï,Vuitton espère séduire les plus fortunésdes 2,6 millions d’habitants de ce paysqui présente l’une des plus faibles densi-tés de population au monde. La sociétéavait déjà été la première marque fran-çaise de luxe à s’implanter, dès 1992, enChine – où elle compte aujourd’hui plusd’une vingtaine de boutiques –, en Indeau début des années 2000, puis plusrécemment au Vietnam. Avec une obses-sion : bénéficier d’une stratégie de pion-nier et acquérir une forte notoriétéavant ses concurrents.

Au Japon, les nouvelles tendances et la crisefreinent l’activité des enseignes prestigieuses

Louis Vuitton va jouerles pionniers à Oulan-Bator

Le fléchissement de l’activité ne sera pas uniforme. La maroquinerie, notamment, devrait être moins touchée. KIYOSHI OTA/REUTERS

CONCURRENCEAmende record pour Saint-Gobainet trois autres producteurs de verreLa Commission européenne a annoncé,mercredi 12 novembre, avoir infligé uneamende globale de 1,38 milliard d’euros,pour entente sur le marché du vitrageautomobile, à quatre sociétés : l’anglaisPilkington (370 millions d’euros), le japo-nais Asahi (113,5 millions d’euros), le bel-ge Soliver (4,4 millions d’euros) et sur-tout Saint-Gobain (896 millionsd’euros). Le groupe français, dont l’amen-de a été majorée de 60 % pour cause derécidive et qui n’avait provisionné que560 millions d’euros, a formé, contre cet-te décision, un recours, qui suspend lepaiement de l’amende, en échange d’unegarantie bancaire.

AGRICULTUREUne enveloppe de 250 millionsd’euros octroyée par Michel BarnierLe ministre de l’agriculture a annoncé, le12 novembre, la mise en place d’un pland’urgence de 250 millions d’euros pourles exploitations agricoles les plus en diffi-culté. Les éleveurs, particulièrement, tra-versent une crise, du fait de la hausse descoûts de l’énergie et de l’alimentation ani-male. Les agriculteurs vont bénéficierentre autres d’aides à la trésorerie et d’unremboursement partiel de la taxe intérieu-re sur les produits pétroliers (TIPP). A la

sortie de la réunion au ministère, lesreprésentants des agriculteurs pointaientle fait que le montant annoncé paraissaitinsuffisant et s’interrogeaient sur les critè-res d’éligibilité aux aides.

IMMOBILIERLes prix des logements anciensbaissent, selon la FnaimDans son observatoire mensuel, la Fédé-ration nationale de l’immobilier (Fnaim)constate que les prix des logementsanciens ont reculé de 1,2 % en octobrepar rapport à septembre, une baisse quiatteint 4,3 % sur trois mois. C’est la pre-mière fois, depuis 1996, que la Fnaimconstate une baisse, en évolution annuel-le, certes légère, de – 0,7 %.

TÉLÉCOMMUNICATIONSBT supprime 10 000 postesau Royaume-UniLe groupe de téléphonie britannique BT aannoncé, jeudi 13 novembre, la suppres-sion de 10 000 emplois sur 160 000 d’icià la fin mars, la plupart au Royaume-Uni,malgré une hausse de 18 % de son bénéfi-ce net au deuxième trimestre, à 400 mil-lions de livres (490 millions d’euros).« Les bénéfices de BT Global Services [labranche internationale] ne sont pas suffi-sants, et nous prenons une action décisivepour remettre les choses en place », a justi-fié le directeur général Ian Livington.

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VALEURS DU CAC40LES BOURSES DANS LE MONDE 13/11, 9h46

Pays Indice Dernier % var. Maxi Mini PER cours 2008 2008

ACCOR ............................◗ 28,08 27,82 0,95 -48,67 56,30 24,23 3,15 T FR0000120404AIR FRANCE-KLM .............◗ 10,68 10,64 0,33 -55,61 24,61 10,27 0,58 T FR0000031122AIR LIQUIDE ......................◗ 68,10 67,67 0,64 -26,40 95,64 55,77 2,25 T FR0000120073ALCATEL-LUCENT .............◗ 1,85 1,86 -0,59 -62,71 5,15 1,44 0,16 T FR0000130007ALSTOM.............................◗ 36,70 36,35 0,94 -50,07 84,12 28,59 1,60 T FR0010220475ARCELORMITTAL ................ 16,03 16,09 -0,40 -69,86 67,79 15,30 0,22 A LU0323134006AXA ....................................◗ 14,05 14,16 -0,81 -48,70 27,60 11,91 1,20 T FR0000120628BNP PARIBAS ....................◗ 44,81 45,77 -2,10 -39,63 75,41 43,64 3,35 T FR0000131104BOUYGUES........................◗ 28,73 28,24 1,74 -49,60 57,25 24,04 1,50 T FR0000120503CAP GEMINI ......................◗ 25,40 24,32 4,44 -40,93 45,14 21,25 1,00 T FR0000125338CARREFOUR ......................◗ 31,43 31,65 -0,70 -41,02 53,75 24,16 1,08 T FR0000120172CREDIT AGRICOLE ............◗ 9,81 9,75 0,62 -53,93 21,58 8,54 1,20 T FR0000045072DANONE............................◗ 43,16 43,24 -0,20 -29,71 64,00 38,60 1,10 T FR0000120644DEXIA .................................. 4,88 5,02 -2,71 -71,64 18,86 3,57 0,68 T BE0003796134EADS ..................................◗ 12,05 12,10 -0,41 -44,80 22,20 9,29 0,10 T NL0000235190EDF .....................................◗ 46,23 45,73 1,09 -43,26 83,90 35,20 0,70 S FR0010242511ESSILOR INTL.....................◗ 34,12 33,77 1,05 -21,83 44,39 26,87 0,62 T FR0000121667FRANCE TELECOM ............◗ 19,05 18,75 1,57 -22,62 26,14 16,40 0,60 A FR0000133308GDF SUEZ ..........................◗ 33,45 32,30 3,58 -16,38 44,77 22,00 1,26 T FR0010208488LAFARGE............................◗ 44,11 43,83 0,64 -64,57 125,45 41,52 4,00 T FR0000120537LAGARDERE ......................◗ 28,48 28,44 0,14 -44,47 54,68 23,56 1,30 T FR0000130213L'OREAL .............................◗ 60,58 59,92 1,09 -38,18 99,26 53,32 1,38 T FR0000120321LVMH MOET HEN. ............◗ 43,50 43,74 -0,55 -47,39 83,93 42,90 1,25 S FR0000121014MICHELIN ..........................◗ 37,96 36,99 2,62 -51,64 79,90 31,41 1,60 T FR0000121261PERNOD RICARD ..............◗ 45,73 46,02 -0,61 -42,14 79,97 38,60 0,69 S FR0000120693PEUGEOT ...........................◗ 16,24 15,60 4,10 -68,68 53,68 15,11 1,50 T FR0000121501PPR .....................................◗ 39,79 39,72 0,18 -63,83 112,76 36,00 3,45 T FR0000121485RENAULT ...........................◗ 19,23 18,89 1,80 -80,18 99,16 18,52 3,80 T FR0000131906SAINT-GOBAIN .................◗ 28,23 28,16 0,27 -56,22 65,26 23,05 2,05 T FR0000125007SANOFI-AVENTIS .............◗ 48,16 47,31 1,80 -23,52 66,90 36,05 2,07 T FR0000120578SCHNEIDER ELECTRIC.......◗ 45,58 45,50 0,18 -50,82 94,29 38,84 3,30 T FR0000121972SOCIETE GENERALE ..........◗ 40,04 40,68 -1,57 -56,76 93,52 28,52 0,90 T FR0000130809STMICROELECTRONICS ...◗ 6,01 6,16 -2,45 -38,67 9,89 5,71 0,05 A NL0000226223SUEZ ENV. .........................◗ 13,59 13,53 0,44 -2,93 19,95 12,17 n/d FR0010613471TOTAL ................................◗ 39,59 39,28 0,78 -30,34 59,50 31,52 1,07 S FR0000120271UNIBAIL-RODAMCO ........◗ 110,00 110,00 n/d -26,63 175,50 103,11 1,75 A FR0000124711VALLOUREC.......................◗ 78,00 76,64 1,77 -57,87 224,45 69,00 7,00 T FR0000120354VEOLIA ENVIRON. ............◗ 19,26 19,30 -0,18 -69,16 64,00 16,55 1,21 T FR0000124141VINCI..................................◗ 27,46 27,13 1,22 -45,78 51,15 21,70 1,05 S FR0000125486VIVENDI.............................◗ 19,48 19,34 0,78 -37,91 31,60 16,32 1,30 T FR0000127771

Jeudi 13 novembre 9h30Valeur Dernier Cours % var. % var. Plus Plus Divid. Code cours préc. /préc. 31/12 haut bas net ISIN

FRANCE CAC 40 3254,00 13/11 0,62 5665,94 2/1 2959,29 24/10 8,10

CAC Mid100 4573,76 13/11 -0,05 7736,69 2/1 4172,89 27/10

CAC Small 90 4250,59 13/11 -1,72 8124,81 2/1 4075,92 28/10

SBF 250 2271,84 13/11 -2,82 3953,69 2/1 2126,16 27/10 8,50

ALLEMAGNE DAX Index 4634,08 13/11 0,29 8100,64 2/1 4014,60 24/10 10,70

ROYAUME UNI FTSE 100 index 4161,81 13/11 -0,48 6534,70 4/1 3665,21 27/10 7,30

SUISSE Swiss market 5709,77 13/11 0,12 8421,00 3/1 5265,86 10/10 17,20

ETATS-UNIS Dow Jones ind. 8282,66 13/11 -4,73 13279,54 2/1 7882,51 10/10 11,10

Nasdaq composite 1499,21 13/11 -5,17 2661,50 2/1 1493,00 24/10 13,80

JAPON Nikkei 225 8238,64 13/11 -5,25 15156,66 4/1 6994,90 28/10 11,00

(Publicité)

Cours en euros.◗ : valeur pouvant bénéficier du service de règlement différé (SRD). # : valeur faisant l'objet d'un contrat d'anima-tion. Plus haut et plus bas : depuis le 1/1/2008. n/d : valeur non disponible. A : acompte, S : solde, T : totalité.

SÉLECTION publiée sous laresponsabilité de l'émetteur

Dernier cours connu le 13/11 à 9h

Valeur Cours date

en euro valeur

Fonds communs de placementsECUREUIL BENEFICESRESPONSABLES 30,19 28/10ECUREUIL ACTIONS EUROP. C 11,21 28/10ECUREUIL CAPIPREMIERE C 2744,36 11/11ECUREUIL CAPITAL C 56,64 11/11ECUREUIL DYNAMIQUE + D 28,73 11/11ECUREUIL ENERGIE D 34,89 11/11ECUREUIL EURIBOR 1233,70 11/11ECUREUIL EXPANSION C 18119,42 11/11ECUREUIL INVESTISSEMENT D 40,19 11/11ECUREUIL MONEPREMIERE C 2367,57 11/11

ECUREUIL SECURIPREMIERE C 2553,14 11/11ECUREUIL SENSIPREMIERE C 3356,29 11/11ECUREUIL TRESORERIE C 66,06 11/11ECUREUIL TRIMESTRIEL D 263,43 11/11

Multi-promoteursCM-CIC EUROPE 19,49 10/11Fonds communs de placementsCM-CIC EURO ACT C 14,58 28/10CM SELECTION PEA 6,38 10/11CM-CIC MID EUROPE 14,56 10/11CM-CIC TEMPERE 150,94 10/11CM-CIC DYN.EUROPE 27,99 10/11CM-CIC FRANCE 28,31 10/11CM-CIC EQUILIBRE 59,51 10/11

GMO ACTIONS 74,70 10/11LBPAM ACTIONS AMERIQUE C 17,61 10/11LBPAM ACTIONS DEVELDURABLE C 95,21 10/11LBPAM ACTIONS DEVELDURABLE D 87,56 10/11LBPAM ACTIONS DEVELDURABLE S 62,98 10/11

LBPAM ACTIONS EURO R 18,64 28/10LBPAM ACTIONS FRANCE C 75,69 10/11LBPAM ACTIONS FRANCE D 66,86 10/11LBPAM ACTIONS INDICE FRANCE 28,62 10/11LBPAM ACTIONS INDICE EURO 66,47 10/11LBPAM ACTIONS MIDCAP C 77,83 10/11LBPAM ACTIONS MIDCAP D 72,06 10/11LBPAM ACTIONS MONDE C 156,56 10/11LBPAM ACTIONS MONDE D 131,50 10/11LBPAM ACTIONS PACIFIQUE C 14,34 10/11LBPAM MONETAIRE C 125,61 11/11LBPAM MONETAIRE D 110,76 11/11LBPAM OBLI LONG TERME D 124,33 8/10LBPAM OBLI MOYEN TERME C 228,76 11/11LBPAM OBLI REVENUS 745,67 11/11LBPAM PROFIL 100 C 56,65 10/11LBPAM PROFIL 100 D 51,95 10/11LBPAM PROFIL 100 S 68,17 10/11LBPAM PROFIL 15 C 212,33 11/11LBPAM PROFIL 15 D 194,53 11/11LBPAM PROFIL 50 C 197,95 11/11LBPAM PROFIL 50 D 181,84 11/11LBPAM PROFIL 80 C 193,93 11/11LBPAM PROFIL 80 D 178,68 11/11LBPAM PROFIL 80 PEA C 73,30 11/11LBPAM PROFIL 80 PEA D 67,13 11/11LBPAM PROFIL 80 PEA S 75,29 11/11LBPAM TRESORERIE P 3151,47 11/11LBPAM TRESORERIE E 6861,57 11/11

VIVACCIO ACTIONS 75,02 10/11Fonds communs de placementsLBPAM ACTIONS TELECOM 37,99 10/11LBPAM ACTIONS EUROPE C 50,96 10/11LBPAM ACTIONS FINANCE 38,69 28/10LBPAM ACTIONS SANTE 81,55 10/11LBPAM OBLI EUROPE D 105,02 11/11

FCP Multi-gestionCM-CIC DYN.INTERN. 20,79 10/11CM-CIC OBLI C.T. 134,38 12/11CM-CIC OBLIGATIOND 25,02 12/11CM-CIC MID FRANCE 23,85 10/11CM-CIC USA 5,11 7/11CM- CIC JAPON 3,27 7/11CM-CIC PLAN BOURSE 16,10 10/11CM-CIC TEMPERE 150,94 10/11CM-CIC EURO ACT C 14,58 28/10CM-CIC FRANCE 28,31 10/11..........................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................................

Ecofrictions La poste autrichienneentre service public et compétitivité

COURS DE L'EURO

TAUX D'INTÉRÊT LE 13/11Taux Taux Taux Tauxj.le j. 3 mois 10 ans 30 ans

france 3,14 4,29 3,92 4,59

royaume-uni 3,04 4,31 4,18 4,81

italie 3,14 4,29 4,66 5,28

allemagne 3,14 4,29 3,63 4,25

japon 0,55 0,90 1,50 2,26

états-unis 0,38 2,13 3,65 4,50

suisse 1,00 2,18 2,61 3,23

Est-ce la menace de grèveou l’ampleur des protesta-tions politiques qui a faitreculer le conseil d’admi-

nistration de la poste autrichiennemercredi12 novembre ?Leplanderestructuration drastique, qui pré-voyait la fermeture de 1 000 des1 300 filiales et la suppression de9 000 postes sur 25 000, ne parleplus que d’ajustements annuelsdes effectifs.

Le conseil d’administration futhouleux mercredi. Au bout deneuf minutes, les représentantssyndicaux sont d’ailleurs sortis dela salle en claquant la porte. Laveille, le ministre des transports etprobable futur chancelier, Wer-ner Faymann, avait de toute façonvidé de sa substance l’ordre dujour. Par décret il avait assuré que« le réseau des postes ne [devait]pas être réduit entre le 1er janvier etle 30 juin 2009 ».

En 2011 tombera le dernier bas-tiondumonopoledelaposte, ladis-tribution du courrier. Die Postveut se préparer à cette libéralisa-tion complète du service postal. Le

marché des colis, de la publicité etdes envois express est déjà dominépar la concurrence. L’allemandHermesaraflé lecontratavecQuel-le, leader en Autriche de la ventepar correspondance. De nombreu-ses petites sociétés se partagent lemarché de la distribution publici-taire. Semi-privatisée en 2006 etcotée en Bourse depuis, Die Postreste contrôlée par l’Etat, quidétient 51 % des parts.

La direction, responsabledevant les actionnaires, a ladiffici-le mission de rendre l’entreprisecompétitive dans la perspectivede la libéralisation du marché. Lemanagement avait confié auconsultant américain McKinseylesoin d’élaborer un plan stratégi-que. Celui-ci prévoit des coupesclaires, risquant de remettre encause la mission publique de l’éta-blissement postal, afin d’amélio-rer la compétitivité. Mais ce projetn’a été que partiellement validémercredi.

Les syndicats autrichiens n’enanticipent pas moins une troisiè-me vague de fermetures de filia-les. L’annonce par le conseil d’ad-ministration d’un développementdu partenariat avec le privé pourla distribution des lettres etpaquets va dans ce sens. Dans540 localités, on peut déjà posterson courrier ou acheter des tim-bres dans une supérette, au tabacou à la station-service.

La direction de la poste faitvaloir que le coût de son réseau defiliales non rentables, et donc son

handicap par rapport aux futursconcurrents, se chiffre à plusieurscentaines de millions d’euros. Lesalaire des 25 000 postiers, régle-mentépar lesconventionscollecti-ves, constitue selon elle un autredésavantage de taille.

Du côté syndical, l’opportunitéd’une grève – procédé auquel onne recourt qu’en cas de dernièreextrémité en Autriche – n’est pasécartée. En attendant, une péti-tion nationale a été lancée enfaveur du maintien du réseau desfiliales.Syndicatsetdirection sem-blent d’accord sur un point : lanécessité d’une réglementationde la concurrence d’ici à 2011.

Le décret pris mardi par leministre des transports contraintla direction à ajourner la fermetu-re de filiales pour six mois, maisne suggère aucune alternative. Ilappartiendraau prochain gouver-nement d’établir d’ici là les règlesd’une concurrence loyale permet-tant le maintien de l’universalitéde la distribution. a

Laurence Monnot(Vienne, correspondance)

PER - Price Earning Ratio (ou cours/bénéfice) : cours de Bourse divisé par le bénéfice par action estimé pour l'exer-cice courant. PER : FactSet JCF Estimates ; données : la Cote Bleue.n/d : valeur non disponible.

Achat Vente

dollar us ................................1,2469...........1,2471

yen .......................................119,7300 ......119,7900

couronne tchèque .............25,3550.........25,3750

couronne danoise ...............7,4471...........7,4476

livre sterling.........................0,8370...........0,8373

forint hongrois...............268,5400 ......269,5400

zloty polonais ......................3,7390...........3,7490

couronne suédoise ............10,1297.........10,1397

couronne slovaque ..........30,3640.........30,4630

franc suisse ...........................1,4831...........1,4839

couronne norvég. ...............8,9191...........8,9231

rouble ...................................34,3890.........34,4890

livre turque...........................2,0544...........2,0644

dollar australien ................1,9441...........1,9451

dollar canadien ...................1,5412...........1,5423

yuan chinois..........................8,5142...........8,5242

won sud-coréen ............1733,7000 ....1734,7000

dollar néo-zéland...............2,2243...........2,2343

rand sud-africain .............12,9234.........12,9333

TAUX

OR

JEUDI 13 NOVEMBRE 9h46 Cours % var.

ONCE D'OR EN DOLLAR.................741,75.......-1,33

PÉTROLEJEUDI 13 NOVEMBRE 9h46 Cours % var.

LIGHT SWEET CRUDE.......................55,30.......-1,53

JaponLa production industrielle nip-ponne a augmenté de 1,1 % enseptembre par rapport à août,soit 0,1 point de moins que dansl’estimation préliminaire, aannoncé le ministère japonais del’économie, du commerce et del’industrie (Meti), jeudi13 novembre. Cette petite haussede la production suit une baissede 3,5 % en août, en glissementmensuel. Sur un an, la produc-tion de septembre s’affiche en

hausse de 0,2 %, moins que nel’avait indiqué initialement legouvernement (+ 0,4%).

Etats-UnisLes procédures de saisies delogements aux Etats-Unis sontreparties à la hausse en octo-bre, augmentant de 5,1 % parrapport au mois précédent, aindiqué le cabinet spécialiséRealtyTrac, jeudi 13 novembre.Sur un an, le nombre de ces pro-cédures a pris 24,6 %. En sep-

tembre, elles avaient reculé de12,5 % en glissement mensuel,ce qui avait ramené leur progres-sion sur un an à 21,0 %.

ChineLa production industriellechinoise a fortement décéléréen octobre, à un peu plus de8 %, nouveau signe du ralentisse-ment de l’économie du géant asia-tique sur fond de crise internatio-nale, selon les chiffres publiés,jeudi 13 novembre, par le Bureau

national des statistiques (BNS).Inférieure aux prévisions des ana-lystes, la progression de la valeurajoutée de la production indus-trielle s’est établie à + 8,2 % surun an, après + 11,4 % en septem-bre, en progression depuis ledébut de l’année de 14,4 % en glis-sement annuel. Elle atteignait+ 15,2 % sur les trois premiers tri-mestres et + 16,3 % au premiersemestre, selon les statistiquesofficielles précédemment four-nies par les autorités chinoises.

Pour faire faceà la libéralisation,Die Post veut fermerdes bureaux et réduireses effectifs. Viennea ajourné par décretla mise en œuvre de ceplan de restructuration

SICAV ET FCP

TABLEAU DE BORD

LA CRISE nous a habitués à deschiffres hors du commun. Dernieren date : 4 000 milliards de dollars(3 200 milliards d’euros). C’est,selonDealogic, lemontantdesobli-gations des entreprises non finan-cières qui arriveront à échéance aucours des deux prochaines années.Ces dettes sont soit remboursées,soit refinancées. D’ordinaire, lesemprunteursrenégocient l’échéan-ce avec les prêteurs, ou alors ilsémettent de nouvelles obligations.A l’heure où les établissements decrédit s’attaquent à l’assainisse-ment de leurs comptes, il sera plusdifficile, voire impossible, d’avoirrecours à ces solutions.

Lesdébiteursquiseserontadres-sés directement aux banques(85 % des cas en Europe, beau-coupmoinsauxEtats-Unis)consta-teront que le crédit est plus rare.Les banques doivent absolumentapurer leurs actifs, même si ellessontcontraintesd’inscriredesopé-rations hors bilan dans leurs livres.Le Fonds monétaire internationalestime que, à eux seuls, les établis-sements américains et européensferont disparaître 10 000 milliardsdedollarsd’actifsau coursdes cinqprochaines années.

En revanche, la sanction seradouloureuse pour tous ceux quiauront emprunté pour spéculer,

comme les hedge funds ou les oli-garques. Plusieurs exemples mon-trentcependant que leguichet res-teaussi fermé pourdes entreprisesordinaires modérément endet-tées, notamment celles qui sontconfrontées aux incertitudes de lagrande consommation, ou qui sesont imposé des termes tropcontraignants à une époque depleine prospérité.

Coût élevé du créditLe peu de crédit qui sera encore

disponible aura un coût très élevé.Vous pouvez toujours vous rabat-tre sur le marché des obligationsprivées. Mais elles ne sont pasaccessibles à n’importe qui.

Il faut s’attendre à ce que dessociétés fassent faillite. D’autresprendrontdesmesuresdrastiques:réductiond’effectif,suspensiondesdividendes, fermeture d’unités. Ence qui concerne les spéculateurs,l’assèchement du crédit a la vertud’assainirlemarché.Maisilsèmelemalheur lorsqu’il coupe les vivres àdes entreprises viables par ailleurs.Le problème prend là des propor-tions qui dépassent le seul cadredes affaires : le maintien du créditaux sociétés doit être inscrit à l’or-dre du jour du G20, le 15 novembreà Washington. a

John Foley

Economie&Finances

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La dette des entreprises,une bombe à retardement

Douce ou brutale, la dévaluationdu rouble est inévitableLE KREMLIN veut dévaluer lerouble, mais hésite sur la méthode.C’est ce qui explique la crise de cet-tesemaine,quiaconduitàlaferme-ture temporaire de la Bourse deMoscou. Les interrogations publi-ques de divers responsables surl’avenir de la monnaie ont ajouté àla confusion. Mais aucun des choixpossibles – glissement progressifdu rouble, ou dévaluation brutale– ne sera sans douleur.

Avec un pétrole à moins de60 dollars le baril, et alors que lescapitaux fuient le pays depuis l’été,la Russie devrait enregistrer, en2009, un déficit de sa balance cou-rante. La dévaluation du rouble estdonc inévitable– et elle a d’ailleursdéjàcommencé.Labanquecentra-lea laisséglisser lamonnaied’envi-ron 8 % depuis début août, dépen-sant dans le même temps 112 mil-liards de dollars (90 milliardsd’euros) de réserves de changepour amortir la chute.

Un début de panique a saisi lesmarchés, le 11 novembre, quand leprésident de la banque centrale areconnu que le rouble avait ten-dance à s’affaiblir. Une hausse destaux d’intérêt pourrait freiner lemouvement, mais aggraver la

situation économique, alors quela croissance ralentit déjà.

Une dévaluation claire et nette,de l’ordre de 25 %, suffirait à cal-mer le jeu, et permettrait au paysde ne pas épuiser ses réserves dechange – qui restent encore à unniveauconfortable–dans ladéfen-se de la monnaie. Le risque est icipolitique : la mémoire de la gran-de crise de 1998 hante les mémoi-res russes, et M. Poutine, aujour-d’hui premier ministre, a depuisdix ans bâti une bonne partie de sapopularité de président sur la soli-dité du rouble. Une dévaluationébranlerait la confiance, et aggra-verait l’inflation,quidevraitattein-dre 12 % cette année.

Il y a une troisième option, qui ala faveur des autorités : un roubleflottant, avec une banque centralequi se concentrerait sur la maîtri-se de l’inflation. Mais l’adoptionde ce système en période de crisepourrait accroître la panique. Nerestent donc que les options de ladévaluation douce ou brutale – etles risques y afférents. a

Pierre Briançon

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18 0123Vendredi 14 novembre 2008

Page 19: Le Monde 14 11

1963Naissance au Creusot(Saône-et-Loire).

1990Major de sa promotionà l’ENA.

1996Chef du bureaudes marchés financiersà la direction du Trésor.

2004Directeur adjoint du cabinetde Nicolas Sarkozyau ministère des finances.

2005Associé-gérantde la banque Rothschild.

2007Secrétaire général adjointde l’Elysée.

Ancien associé dela banque Rothschild,il est secrétairegénéral adjointde l’Elysée,chargé des questionséconomiques. Il apréparé pour NicolasSarkozy le G20consacré à l’avenirde la finance mondiale

DécryptagesPortrait

PARCOURS

Curieux, tout de même, cedélicat dessin de SégolèneRoyal, saisie de profil, quiorne un mur du bureau deFrançois Pérol, le secrétai-re général adjoint de l’Ely-sée et grand architecte duprogramme économique

de Nicolas Sarkozy. A 45 ans, la mècheblanche soigneusement rangée, cet hom-me a certes la réputation d’un éternelinclassable, féru d’art moderne, bonvivant, aussiprompt à rireaux bonnes bla-gues de Bernard Tapie qu’à se muer enhaut fonctionnaire grisâtre. Mais de là àafficher aussi clairement ses sympathiespour l’ancienne rivale de Nicolas Sarkozy,il y avait un sérieux pas à franchir. « Il y aeffectivement une troublante ressemblancedu modèle avec Mme Royal, comme on me l’afait remarquer à plusieurs reprises, concèdeFrançois Pérol, mais ça s’arrête là. »

Il n’a donc pas tourné casaque. Cela nelui ressemblerait guère, de toutefaçon. François Pérol est du genre fidèle,bien élevé. Et discret. Sur les photos degroupe, dans les cérémonies officielles, ilfaut bien une loupe pour le dénicher. Il nes’exhibe pas, peine à se raconter. Questionde tempérament. « Je me protège… »,lâche-t-il. Se protéger, mais de qui ? Pasundécideurfrançaisquinevantesesquali-tés. Il est aux premières loges, aujour-d’hui.« J’aipleindenouveaux amis,s’amu-se-t-il, ils ont le sens de leurs intérêts. Desennemis ? J’en ai sûrement. Mais ils sontdans l’ombre. » En tout cas, difficile de lesdébusquer.

A la veille du G20 qui doit réunir le15 novembre la gouvernance mondialecensée mettre sur pied un nouvel ordreéconomique, c’est lui qui, pour l’Elysée,fait figure de tête pensante. Il a troqué unposte confortable d’associé à la banqueRothschild pour rejoindre, en mai 2007,

l’équipe présidentielle. Il n’a pas hésitélongtemps, même s’il a fallu consentirquelques sacrifices financiers. « Mais çame regarde… », prévient-il.

Jamais le pouvoir politique n’a autantpesé sur les sphères économiques. Lespatrons du CAC 40 fréquentent assidû-ment l’étroit couloir qui donne accès à sonbureau lumineux, niché dans les soupen-tes de l’Elysée. « C’est une perle, estimeClaude Guéant, le secrétaire général del’Elysée. Il maîtrise son domaine à la perfec-tion, et en plus il ne déteste pas les innova-tions, il a un réel sens politique. » Lui joueles modestes : « Les gens se font des idéessur moi, autant en profiter. »

FrançoisPérol imagine lapolitiqueéco-nomique de la France de demain. Tout enessayantdetrouverdessolutionsà lasitua-tionactuelle.Passimple.« Ilyauraunecri-se économique, c’est inévitable, mais on a lesentiment d’avoir fait ce qu’il fallait, dit-il.Je suis prêt à répondre aux critiques, mais jene pense pas que cette affaire va nous coûterde l’argent. »

François Pérol n’était pas prédestiné àtomber en Sarkozie. Il n’est pas de la racedes courtisans. Il a eu sa vie, bien avant defréquenter le pouvoir. Il dit qu’il ne ferapas l’erreur de « se laisser griser ». Déjà,avec sa deuxième compagne, ils ont sixenfantsàgérer,çaoccupe.Etpuis,ceBour-guignon aurait dû faire médecine, commeson père ou ses frères et sœurs. La réalité,il connaît.Son parcoursuniversitaire ? Unmodèle, dans le genre : HEC, Sciences Po,puis l’ENA, forcément, dont il sort majorde sa promotion. Il intègre l’inspectiongénérale des finances, puis se retrouve aucabinetdeFrancisMer,ministredes finan-ces, en 2002, auquel succède NicolasSarkozy, deux ans plus tard.

Il découvre alors l’homme, puis la bêtepolitique : « Il est atypique, il a un vrai lea-dership, il assume ses responsabilités. Monboulot, en comparaison du sien, est simple :lui fournir des idées. » Comme son mentor,ilnemâchepassesmots.Lagestionaméri-caine de la crise ? « Ils se sont débrouillésavec les pieds, là-bas… », dit-il.

A l’Elysée, il forme un duo redoutableavec Henri Guaino, le bouillant conseillerspécial de Nicolas Sarkozy. Souvent, il yeut des heurts. « On est radicalement diffé-rents, mais complémentaires. C’est un typeattachant. Il n’est pas pervers, juste ron-chon… », explique M. Pérol. En cas deconflit, Claude Guéant joue les arbitres.« Henri Guaino a un caractère entier, dit-il, mais leurs oppositions sont devenuesrares, on s’est créé une approche collective,comme pour la rédaction du discours deToulon. »

De toute façon, François Pérol est unpragmatique. En témoigne l’affaire Exe-cutive Life, qui a coûté 700 millions dedollars à l’Etat français, engagé jusqu’en2005 dans un bras de fer avec les autoritésaméricaines. François Pérol fut l’un desnégociateurs.

Jean-François Hénin, l’ex-patron d’Al-tus Finance, filiale du Crédit lyonnais àl’origine du scandale, se souvient d’avoireu affaire à un François Pérol à l’écoute.« C’est la seule personne, au niveau de

l’Etat, qui m’ait posé les bonnes questions,se souvient M. Hénin. Malheureusement,il n’a pas pu remettre en cause les décisionsqui avaient déjà été prises. Lui, il voulait sebattre, se défendre contre les USA. » Fran-çois Pérol se souvient bien de l’épisode :« Nous avions hérité des dossiers pourris duCrédit lyonnais, qui n’était pas connu, àl’époque, pour sa rigueur. Je pensais qu’ilfallait transiger, on ne voulait pas plierdevant la justice américaine. »

Il y eut aussi l’affaire Tapie, et l’arbitra-ge favorable dont l’ex-homme d’affaires abénéficié, à l’initiative de l’Etat. Bernard

Tapie, qui doit recevoir 285 millionsd’euros des liquidateurs du Crédit lyon-nais, a-t-il bénéficié d’un coup de pouceélyséen dans ce dossier ? Le secrétairegénéral adjoint de l’Elysée admet appré-cierM. Tapie : « Je le vois tout le temps, dit-il, il me raconte sa vie, il n’a généralementrien à me dire, mais il me fait marrer. Je n’aijamais vu quelqu’un d’aussi accrocheur. Etdans ce cas précis, il fallait un arbitrage,c’est mon avis, il y avait une telle crispationautour de la personne de M. Tapie… » Pourautant, selon M. Pérol, il ne faudrait pasen déduire que Nicolas Sarkozy est inter-venu directement dans ce dossier. Ber-nard Tapie ne tarit pas d’éloges sur Fran-çois Pérol : « Il n’est pas convaincu qu’il ala science infuse, assure-t-il, et puis il assu-me ses positions. C’est quelqu’un de droit,avec qui tu ne perds pas ton temps. »

M. Pérol est nettement plus ennuyéparsa relation avecImad Lahoud, suspec-té d’avoir attribué un compte occulte àM. Sarkozy dans les listings Clearstream.Imad Lahoud jurera même que M. Pérollui avait ménagé un aparté avec M. Sarko-zy. « Il est complètement mythomane, s’in-surge lesecrétaire généraladjointde l’Ely-sée. Il n’a jamais rencontré M. Sarkozy. Jene suis pas très malin, mais jamais jen’aurais facilité une telle rencontre… »

Les deux hommes ne se voient plus.C’est plus simple. L’avenir ? M. Pérol nese voit pas rester à l’Elysée. « Je ne veuxrien, je ne demande rien à personne,lâche-t-il. Et puis je serais nul en politi-que. » En revanche, diriger une grandeentreprise… a

Gérard DavetPhoto Sébastien Filosa

pour « Le Monde »

François PérolAuxmanettes

Les gens se font des idéessur moi, autant en profiter

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Dedebele

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L’Europe dans un angle mortLa réponse de l’Union à la crise a été une juxtaposition de plans nationaux, sans aucune stratégie

Cette année aura été une incroya-ble année de rupture. Pas seule-ment à cause de l’exacerbationde la crise financière et de sa pro-pagation vers l’économie réelle,

mais aussi parce que trois événementsmajeurs la marqueront à jamais. En pre-mier lieu, ce fut l’échec du cycle de Doha.Au-delà des raisons invoquées, c’est unvéritable refus des règles du commerceinternational telles qu’elles ont été imagi-nées par le monde occidental.

Deux autres phénomènes boulever-sent le paysage : l’incroyable volatilitédes marchés énergétiques et des matièrespremières agricoles rend difficile unecroissance économique mondiale fortetout simplement parce que le monde nepeut fonctionner au jour le jour. Enfin, lafin de l’année 2007 et cette année ont vuapparaître le débat-clé des années àvenir, celui du contrôle des entreprises eten réalité celui de la liberté des capitaux, àtravers la discussion encore marginalesur les fonds souverains.

Cette année aura donc été celle de laremise en cause du fonctionnement destrois grands marchés : du commerce, descapitaux, des ressources rares. Et ces troismarchés sont complètement reliés entreeux. C’est la raison pour laquelle le nou-veau Bretton Woods, expression unique-ment destinée à souligner le caractère glo-bal et ambitieux de la négociation qui doits’instaurer, mettra sur la table de façon

articulée et cohérente les grandes compo-santes du nouvel accord mondial.

Bien entendu, en premier lieu, il fautposer les bases de la nouvelle architecturefinancière avec deux objectifs majeurs.Tout d’abord apporter des réponses clai-res et cohérentes entre elles aux princi-paux défis soulevés par la crise financièreen cours, qu’il s’agisse du fonctionnementdesagencesdenotation,desnormescomp-tables,duretourdans lechamp de la régle-mentation d’un certain nombre d’opéra-teurs qui y échappent, de l’améliorationdes règles prudentielles appliquées auxinstitutions financières et de leur supervi-sion,ducodedeconduiteà destinationdesfonds souverains, du système de rémuné-ration et d’incitation dans la finance.

Puis redéfinir le rôle du FMI, en le cen-trant sur la cogestion des crises bancai-res et financières de nature systémique,en coopération étroite avec les banques

centrales et les gouvernements. Cela sup-pose de lui conférer des moyens en pro-portion, sans doute des compétencesréglementaires propres tout en affirmantque l’essentiel des pouvoirs réglementai-res et de supervision vont, pour des argu-ments de proximité et de souveraineté,rester de la compétence nationale (et, enplus, communautaire pour les pays del’Union européenne).

On le voit déjà, ce nouveau BrettonWoods aura une dimension bancaire etfinancière,qui ledistinguedéjàduBrettonWoods originel de 1944-1945, très orientésur les questions monétaires. On peut tou-jours rêver à la transition inverse de celledemars1973etàrepasserdeschangesflot-tantsà deschanges plusstables. Mais iln’ya rien à attendre de ce côté-là pour aumoins les cinq ou dix prochaines années,alors qu’une meilleure gouvernance ban-caire et financière ne peut attendre.

Souci de croissanceIl s’agira aussi de négocier l’équilibre

énergétique mondial et, à travers cela,l’évolution du prix du brent et les margesde fluctuations acceptables pour unecroissance équilibrée. Il faudra égale-ment se concerter sur l’investissement enproduction agricole, et c’est peut-être lepoint le plus vital pour les toutes prochai-nes années, à réaliser à l’échelle mondialeet de la même manière s’efforcer d’avoirun système de prix rationnel et compati-

ble avec ce même souci de croissance.Sans oublierde définir les règlesde lapro-priété du capital, c’est-à-dire ce qui estjugé acceptable par les uns et par lesautres, comme prises de contrôle d’entre-prises par des non-résidents.

Enfin, la récession qui s’installe rendranécessaire des plans de soutien impor-tants, au moins pour la moitié de l’écono-mie mondiale. Encore faut-il que noussoyons d’accord pour que les politiquesmonétaires et budgétaires menées par lesunset lesautresn’entraînentpasdesévolu-tions incontrôlées des taux de change, cequi ne ferait que compliquer l’équation àrésoudre.LeG8élargivaprépareruneren-contremondialemettantàplattouscespro-blèmes liés entre eux avec un effet attenduet un objectif principal. L’effet serait que laseule annonce de cette conférence contri-bueraitvraisemblablement à unestabilisa-tion des marchés financiers enfin rassuréssur la gouvernance économique mondiale.

Unobjectif, celuidefairede 2009 lapre-mièreannéed’uncycledecroissanceréalis-te parce que fondé sur la reconnaissanced’unéquilibreinéditdûàlanouvellerépar-tition des richesses et des liens qui asso-cient de manière inextricable les différen-tes facettes des marchés. L’hôte de cetterencontre pourrait être le FMI, sachantqu’à la fin du processus, les organes derégulation économique et financière mon-diaux adaptés à la nouvelle donne seraientlargement refondés. a

La crise naît le 9 août 2007,lorsque la Banque centraleeuropéenne (BCE) injecte95 milliards d’euros de liqui-dités sur les marchés, alorsque BNP Paribas gèle troissicav en l’absence de valeur

des subprimes qu’elles contiennent. Cesinjections mettent le malade sous perfu-sion et la BCE gagne en crédibilité. Pour-tant,au-delàdelapolitiquemonétaire, elleaurait dû alerter les gouvernements pourqu’ils prennent les mesures nécessairesafin d’enrayer le mal et empêcher qu’unecrise de liquidités ne se transforme en unecrise de solvabilité. La BCE a ensuite tardéà baisser les taux d’intérêt.

Lorsqu’en mars le Parlement européenorganisait un débat pour préparer leConseil européen d’avril consacré à cesquestions, le commissaire responsable,l’ancien ministre des finances irlandais,Charlie McCreevy, préféra assister à descourses hippiques… Mais la conceptionqu’a Manuel Barroso de son rôle est aussien cause. Plutôt que d’être la sève commu-nautaire, il l’a théorisé comme une feuillemorte baladée au gré des désirs duConseil : la Commission ne doit proposerque ce que les Etats membres souhaitent.

L’organisation de la Commission pro-duit un angle mort pour appréhender cet-te crise, les questions macro-économi-ques et relatives aux marchés financiersdépendant de deux commissaires diffé-rents. Au Parlement européen, dès octo-bre 2006 nous invitions la Commission« à porter une attention plus grande à l’im-pact du comportement des marchés finan-ciers sur la situation macro-économique dela zone euro ».

Parce qu’il ne fallait pas casser le moraldes ménages, moteur de la croissance, etqu’il était plus facile de ne pas monter aufront, les gouvernements laissent la BCE

intervenir seule. Ils adoptent des feuillesde route sur les enseignements de la crisequi neportent passur la pollution des sub-primes, dont le traitement est laissé à desappels à la transparence des banques. Or,elle est contraire aux règles du marché carelle obligerait les acteurs individuelle-ment à prendre des risques de réputationet de projections auto-réalisatrices. Latransparence ne pouvait exister qu’avecdesvérificationssurpièce etsurplacedontaucune autorité n’avait les moyens.

Au printemps, le FMI publie des chif-fres en baisse sur la croissance en Europeau moment où les ventes de voitures chu-tentenAllemagne.Unesaintealliances’or-ganise alors entre l’exécutif européen et laBCE pour juger ces chiffres sous influenceaméricaine et trop pessimistes. On passed’une optimisation des anticipations à undéni de réalité.

A lasuited’unegraveerreurd’apprécia-tion de l’administration Bush, le mal aexplosé et l’œuf pourri des subprimes faittourner la mayonnaise de la finance mon-diale, entraînant avec cette explosion desconséquences économiques et socialesconsidérables. La décision de laisser tom-ber le 15 septembre Lehman Brothers aprovoqué une crise systémique quidevrait marquer l’acte de décès de l’èreReagan-Thatcher.

En Europe, dans cette nouvelle phasedelacrise, lepremierréflexeauraété lesau-ve-qui-peut de l’Irlande. Ce pays, qui sansl’euro serait aujourd’hui dans la situationde l’Islande, décide de garantir l’intégrali-té des dépôts de ses banques, provoquant

undéplacementmassifd’épargnededépo-sitaires britanniques. Angela Merkel, deson côté, commence par refuser tout plande soutien européen des banques, dans unréflexepavlovienqui consiste à penser quedès que l’on parle d’unecoopération,on vademander à l’Allemagne de payer.

Après avoir laissé Nicolas Sarkozy seulface au refus allemand au G4, GordonBrown a présenté son propre plan troisjours plus tard et l’a fait endosser parl’Eurogroupedeschefsd’Etatetdegouver-nement le 12 octobre. En tant qu’ancienministre des finances de la principale pla-ce financière d’Europe, il sait de quoi il

parle et peut marier l’impératif politiqued’agiret lamaîtrisedesmécanismesàl’œu-vre. Gordon Brown a aidé Nicolas Sarkozyparce qu’il en avait besoin pour donner àson plan de sauvetage de la City de Lon-dres une chance.

Nicolas Sarkozy, qui a installé Jean-Claude Trichet au rang de chef d’Etat et degouvernement, paraît tenté de jouer à unMonopoly d’Etat pour faire et défaire lecapitalisme français, après les industrieset les médias, au gré de ses humeurs et deses amitiés. C’est sans doute aussi pour

celaque lesbanquesontrefusé lapremièreversion de son plan et obligé l’Etat à leurproposant des prêts et non des prises departicipation. On a aujourd’hui un planmassif de soutien des banques voté à lahâte par le Parlement sans contrepartiesur la stratégie qu’elles mettront en œuvrepour l’investissement à long terme et ledéveloppement durable, le soutien auxPME, lesrémunérations, l’activité dans lesparadis fiscaux ou la distribution de divi-dendes. L’autre risque, c’est que la pres-sion pour la réforme s’évapore avec unerelativestabilisationdesmarchéset l’argu-ment que toute réforme d’ampleur risque-rait de casser des économies en berne.

Face à cette crise, Nicolas Sarkozy avaitrefuséd’écouterceuxqui luidisaientd’ins-crire ces questions parmi les priorités de laprésidence française. Héros de la luttecontre le capitalisme, il n’a pourtant pashésité au soir de son élection à faire la fêteau Fouquet’s avec ses amis du CAC 40avant de s’envoler pour Malte, paradis fis-cal bien identifié. Pour anticiper la gestionde la crise, il s’était jusque-là contenté deredorer le blason de Gordon Brown, dontle modèle est parmi les plus ébranlés, enacceptant de participer à un G4 à Londresenjanvierexcluanttoutegestioneuropéen-ne de la crise et donnant raison à Londressur les fonds spéculatifs.

Finalement, la réponse européenne àla crise bancaire aura été des plans natio-naux juxtaposés. Une Commission ambi-tieuse devrait piloter la mise en œuvre deces plans pour qu’ils soient utiles à unestratégieeuropéenne. L’Europe peutdon-ner le meilleur d’elle-même, la capacitéde définition des règles, ce soft power destemps modernes dont la mondialisationa besoin. Pour cela, la Commission doitreprendre des couleurs, c’est l’un desenjeux majeurs des prochaines échéan-ces européennes. a

Christiande BoissieuPrésident du Conseil d’analyse économique

Jean-Hervé LorenziPrésident du Cercle des économistes

Récit poignantd’une policière

Raconter ses souvenirs de flic estdevenu un genre très prisé. L’édi-teur Michel Lafon a, dans cedomaine, ouvert une sorte de col-

lection. Après Gardien de la paix, de Frédé-ric Péchenard, directeur général de la poli-ce nationale, voici, comme un secondtome, Flic, tout simplement, de MartineMonteil, ex-directrice centrale de la policejudiciaire. Même présentation, agrémen-

tée de trois citations d’illustres penseursen introduction, même dédicace – « auxfemmes et aux hommes de la police nationa-le… » –, même plume journaliste. Aprèstout, nègre de flic est une spécialité com-me une autre.

Mais Martine Monteil est une femme,et ça change tout. Toute sa carrière, la« patronne » de la PJ a défriché unmaquis longtemps réservé aux hommes.Un milieu pas « trop » sexiste, dit-elle,mais où « l’on pardonne moins aux femmesqu’aux hommes en cas de dérapage ». « Laseconde chance, souligne-t-elle, varie selonqu’on est en jupon ou en pantalon. » Dans lepremier cas, il n’y en a pas. Elle le constate-ra, non pas à ses dépens, mais à ceux d’unecollègue, qui eut le malheur de céder auxpots, trop nombreux au point d’avoir unaccident de la circulation. Résultat : elle aété mutée au tribunal de police, pendantplus de vingt ans. « Cela revient à dire qu’el-le a été cassée. Elle n’a jamais été rattrapée,elle n’a jamais pu rebondir (…). C’est ce quel’on aurait fait pour un homme. »

Sans doute, Martine Monteil, issued’une dynastie policière, possédait-elle unpetit avantage sur ses paires : petite-fille,fille et épouse de policiers, elle connaissaitla maison, ses us et ses coutumes. Son uni-vers lui était familier, même s’il ne préparepas à côtoyer la violence, les cadavres, lamisère humaine. Des tueurs en série aussi,et des people en délicatesse avec la loi.

Première commissaire femme à dirigerquelques-unes des brigades les plus presti-gieuses, les stups, la mondaine, la répres-sion du banditisme, la « crim’» surtout et,enfin, la PJ, Martine Monteil a tout vu. Aucommissariat du 7e arrondissement deParis, elle croise l’actrice Jean Seberg, quierre souvent dans les murs, en situation dedétresse, et prépare des chocolats chauds.Aux stups, elle fait la leçon à FrançoiseSagan, en garde à vue. A la mondaine, elledéjeune d’une pizza avec Fernande Gru-bet, plus connue sous le nom deMme Claude, et qui se présente comme unechef d’entreprise comme une autre. A labrigade de répression du banditisme, ellemet sous les verrous Michel Ardouin dit« le Porte-Avions », complice de JacquesMesrine. Et compare la fin des grandesfigures du milieu avec l’arrivée de la géné-ration des « nouveaux barbares », ces« braqueurs fous, déjantés, totalement dés-tructurés ». A la « crim’», enfin, elle arrêtele tueur en série Guy George. « Dans unsilence religieux, sans qu’aucune insulte nefuse à aucun moment, des dizaines de poli-ciers appuyés contre le mur ou la rampe leregardent gravir lentement les trois étages »du 36, quai des Orfèvres. Mais le témoigna-ge de cette femme flic, dont l’engagementpublic en faveur de Nicolas Sarkozy en2007 avait fait grincer des dents, n’est pasqu’un bottin de célébrités ; il est poignantquand elle parle des inconnus, toxicoma-nes ou victimes. Comme cette jeune Cana-dienne, morte dans l’explosion de Port-Royal en 1996, et dont elle n’a jamais puoublier le visage. a

Isabelle Mandraud

Débats

Congrès national du PS à Reims• Les différents enjeux du Parti socialiste• Un sondage exclusif (TNS Sofres/Logica) : « L’image du Parti socialiste à la veille du congrès de Reims »• Enquête : « Les intellectuels et le PS »

0123 DÈS DEMAIN 6 PAGES SPÉCIALES

Pervenche BerèsPrésidente de la Commission économiqueet monétaire du Parlement européen

Nicolas Sarkozy paraît tentéde jouer à un Monopolyd’Etat pour faire et défairele capitalisme français

Bretton Woods acte II : une gouvernance mondialeLe sommet de Washington ne doit pas se cantonner aux seuls dérèglements financiers

Flic, tout simplementMartine MonteilMichel Lafon, 300 pages, 18,95 ¤

Lelivredujour

20 0123Vendredi 14 novembre 2008

Page 21: Le Monde 14 11

La social-démocratie en crise d’identitéC’est sur le terrain social que les socialistes européens doivent proposer un New Deal aux classes moyennes et modestes

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ENJEUX_SECU_141x145_GSz 1 9/10/08 18:55:37

Dans une tribune intitulée« La social-démocratiesera européenne ou ne seraplus » (25 octobre), AlainBergounioux et GérardGrunberg estiment que lacrise financière fournit à la

social-démocratie une chance de redeve-nir une force politique « utile », à condi-tion que celle-ci « assume intellectuelle-ment et politiquement ses responsabilitésdanslacrise ».C’estunfait : lasocial-démo-cratie européenne traverse une crise exis-tentielle majeure.

En Europe, les formations qui en sontissues ont perdu treize des quinze derniersscrutins. Quand elles sont encore au pou-voir, leur politique est fortement impopu-laire (c’est le cas de la Grande-Bretagne etdel’Allemagne).Dansl’opposition,cespar-tis,pourtantconfrontésàdenouvellesdroi-tes dures, sont inaudibles, jugés peu crédi-bles par le public (France, Italie).

Dans un monde économique qui chan-

ge, MM. Bergounioux et Grunberg affir-ment inlassablement que le renouveausocial-démocrate passe par la fidélité au« cheminement idéologique » qui est la cau-se de son déclin ! Dans l’avant-congrès deReims, ils mettent en garde les socialistescontretoute« dériveanticapitalisteoualter-mondialiste ». Ils oublient de préciser quele socialisme est né comme antithèse ducapitalisme et que, depuis le congrès deToursen1920,safamilleréformisten’aces-séde vouloir le transformerdémocratique-

ment, pas à pas. Il est étrange que lesauteursnementionnentnullepart la« nou-velle » social-démocratie qui est apparueen catimini dans les années 1980.

A l’occasion d’expériences gouverne-mentales en France, en Espagne et en Grè-ce, cette gauche « moderne »a contribué àl’avènement du capitalisme financier endéréglementant les marchés financiers.Elle a privatisé le système bancaire et lesentreprisesstratégiquesets’estappropriée–sansjamaislereconnaître–leprêt-à-pen-ser néolibéral de ses adversaires de droite.Cette posture hypocrite a cessé avec l’arri-vée au pouvoir de Tony Blair en 1997. Cedernier a revendiqué un accompagnementdécomplexé de la mondialisation néolibé-rale : soutien à la dérégulation des mar-chés, baisses d’impôts sur les hauts reve-nus,flexibilitédumarchédutravail,privati-sations et démantèlement du Welfare State(Etat-providence).

La troisième voie blairiste a suscité l’ad-miration de la social-démocratie dans son

ensemble au point que le Parti des socialis-teseuropéensn’apuserésoudreàcondam-ner l’invasion de l’Irak ! Dans les années1997-2006, la social-démocratie a ânonnédans chaque langue nationale le mantrablairiste:« Iln’yapasdepolitiqueséconomi-ques de gauche ou de droite, il n’y a que despolitiques qui marchent et d’autres qui nemarchent pas. » C’est pour avoir vouluimplanter un tel « logiciel » que les candi-datssocialistes auxprésidentielles de 2002et 2007 furent sévèrement battus. Faut-ilvraiment persévérer dans une voie qui aconduit à ces échecs cuisants, à l’heure oùla nouvelle droite elle-même découvre lesvertus de l’interventionnisme public faceaux défaillances du marché ?

Selon Alain Bergounioux et GérardGrunberg, lesursautdelasocial-démocra-tiepassepar laréactivationdu« projetpoli-tique européen ». Mais comment unesocial-démocratie crispée sur une straté-gie dépassée pourrait-elle réussir demainlà où elle a lamentablement échoué hier ?En 2000, l’agenda de Lisbonne proposaitun ensemble de « réformes structurel-les » devant permettre à l’Europe de deve-nir une zone de forte croissance. En 2002,leConseileuropéendeBarceloneàmajori-té social-démocrate décidait de libéraliserle marché de l’énergie et l’ensemble desservices publics, de repousser l’âge de laretraite de cinq ans et apportait son sou-tien aux fonds de pension.

En2005, lastratégiedeLisbonnerenou-velée proposait d’institutionnaliser larigueurbudgétaire,d’accentuer laflexibili-sation du marché du travail, de prolongerla modération salariale. Avant même ledéclenchement de la crise financière, l’Eu-rope est devenue la zone où la croissanceest la plus faible du monde et où l’ouvertu-re à la concurrence s’est avérée incapablede stimuler l’investissement dans l’écono-mie de la connaissance. Contrairement àce que suggèrent les deux auteurs, ce n’estpas la crise de la construction européennequi a affaibli la social-démocratie. C’est lacrise idéologique et politique de la social-démocratie qui a précipité l’Europe dansune spirale récessive et antisociale dont sedéfient aujourd’hui les peuples.

Pour éteindre l’incendie financier, lamise en œuvre du plan Brown déroge àtous les canons de la pensée blairiste. Maisla social-démocratie ne doit pas se conten-terd’applaudir lasocialisationsanscontre-partie des dettes de jeu du capitalismefinancier, en réclamant la poursuite des« réformes structurelles ». Elle seraitd’autant plus inaudible que la droite saisitl’aubaine de la crise pour justifier l’achève-mentdesdites réformes et rendre irréversi-

ble le détricotage des instruments decontrôle public de la production et de larépartition des richesses.

C’est un véritable New Deal qu’il fautproposer pour sortir l’Europe de la réces-sion. Un programme de grands travauxdoit s’organiser autour de la modernisa-tion des infrastructures et des servicespublics(transports, communication,hôpi-taux, écoles, universités). Le chantier desénergies renouvelables doit enfin être réel-lement creusé. Les ressources financièreset industrielles, les compétences des cher-cheurs doivent être mobilisées à ces effets.En attendant les balbutiements du fédéra-lisme budgétaire, les Etats doivent accroî-tre leur participation avec droit de vote etde contrôle dans le secteur bancaire, maisaussi dans les entreprises stratégiques dessecteursconcernés,dontlavaleuractionna-riale est désormais attaquée en Bourse.

La social-démocratie européenne doitinitier des réformes fiscales améliorant laredistributivité de l’impôt de telle sorte que

l’effort ne soit pas supporté par les classesmoyennes et modestes. Elle doit enfin pro-poser aux partenaires sociaux de s’enten-dre sur une progression des salairesindexéesur les gains de productivitéet l’in-flation,pourenrayer une fois pour toutes labaisse du pouvoir d’achat de ceux quivivent de leur travail. N’oublions pasqu’auxEtats-Unis et parmi les clones euro-péensdumodèleaméricain,c’est lastagna-tion du salaire médian qui est à l’origine dela montée de l’endettement des ménages,tiré par le crédit hypothécaire.

Les futures échéances électorales ne segagneront pas « au centre ». Les électeursqui ont, par dépit, porté les nouvelles droi-tes européennes au pouvoir appartiennentaux classes populaires. La social-démocra-tiepartira à leurconquêteoudisparaîtra. a

Trafic par Nicolas Vial

Débats

Aucourrierdeslecteurs

N’oublions pasqu’aux Etats-Unisc’est la stagnation du salairemédian qui est à l’originede l’endettementdes ménages

Age, sexeet couleur de peau

A l’occasion de l’élection améri-caine certains ont parlé de victoi-re (s), d’autres de revanche (s)des minorités dans le processusde représentation politique d’unesociété occidentale.Il est singulier de constater quedes catégories habituellementpeu visibles politiquement ontbrigué la présidence des Etats-Unis : les seniors de plus de70 ans, les femmes, les Noirs (…).

Philippe FoucqueteauMarseille

360 milliards !

360 milliards d’euros empruntéspour sauver le système financierde la faillite, 360 milliards pourréparer les errements d’une mino-rité argentée. Les caisses étantvides, qui va payer ? Le contribua-ble bien évidemment ! Pas le plusfortuné de surcroît, puisque proté-gé par le fameux bouclier fiscal,mais, comme d’habitude, celuiqui, déjà, boucle difficilement sesfins de mois. Or, contrairementaux assertions gouvernementales,ce plan de sauvetage des banquesn’est nullement justifié en l’état. Ilne s’adresse pas, en effet, à lamajorité des Français dont lesfonds sont garantis en cas de failli-te à hauteur de 70 000 euros, som-

me que peu de gens ont sur leurscomptes bancaires ou d’épargne –ceux qui possèdent plus que cemontant ont d’ores et déjà pris laprécaution de répartir leur péculeentre différents établissementsfinanciers.En outre, si cette injection de liqui-dités renfloue les banques lessi-vées par le jeu boursier, elle nebénéficie pas à l’économie réelle,celle des entreprises, puisqu’ellene se traduit par aucun investisse-ment majeur, elle ne se concrétisepas par une politique volontaristede relance, une politique degrands travaux à l’instar du NewDeal américain des années 1930.Au final, cette aide massive del’Etat n’est donc destinée qu’à lasauvegarde des intérêts particu-liers d’une minorité de privilégiés.Pis, la crise va perdurer mais lesplus riches seront sauvés !

Laurent OpsomerHergnies (Nord)

Obama et Lincoln

La preuve semble définitivementapportée qu’une personne ayantdes racines africaines, certes intel-ligente mais aussi soutenue parsa famille, étudiant, travaillant,ayant de l’ambition, sans comple-xe mais sans arrogance, prenantsa place par ses compétences etson talent, pouvait accéder à laplus haute fonction sans discrimi-

nation positive. Il est permis d’es-pérer que dorénavant nous nelirons plus de textes compassion-nels expliquant, plusieurs sièclesaprès la traite des Noirs et cin-quante ans après l’indépendancepour les pays d’Afrique, que tousles problèmes des populationsafricaines seraient « les séquellesdu colonialisme ». Plutôt que deressasser Frantz Fanon et sescomplexes, les Africains pren-dront-ils exemple sur Barak Oba-ma ?Puisqu’il est de saison de prendreses références en Amérique, rap-pelons cette déclaration d’Abra-ham Lincoln : « Nous ne pouvonspas aider les hommes en permanen-ce en faisant pour eux ce qu’ilspourraient faire et devraient fairepar eux-mêmes. »

Raymond BodardTouvre (Charente)

La mort d’un SDF

Si Hibernatus revenait, par quoiserait-il bouleversé ? Par leréchauffement planétaire qui l’adécongelé ? Les dérives du foot-ball ? La télé « trash » ? La« pipolisation » des politiques ?Les krachs bancaires ? L’inver-sion des pôles politiques en Fran-ce ? Ou le décès par hypothermied’un SDF ?

Samy MekhloufiLyon

Nicolas Vial expose ses œuvres, du 18 novembre au 24 décembre, à la Galerie d’en face 7, rue Paul-Louis-Courier Paris 7e.

Liêm Hoang-NgocEconomiste, université de Paris-I

Philippe MarlièrePolitologue, University College London

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L’artistedes prétoires

Suspension d’audience.Dans les couloirs de lacour d’appel de Douai,EricDupond-Moretti allu-me une cigarette et, entredeux bouffées, la glissedans la manche de sa robed’avocat. Pas vu pas pris,la technique est rodée, qui

lui permet d’échapper à la vigilance desgardesdetous lespalaisde justicedeFran-ce. Mais ici, Me Dupond-Moretti bénéficied’une sorte d’immunité complice. Ungendarme de faction passe non loin ducontrevenant en fermant les yeux. L’huis-sier, qui s’approche pour lui signaler lareprise des débats, sourit : « Tiens, il y a dubrouillard… »L’avocatenprofitepours’en-quérir de l’état d’esprit des jurés aprèsquelques heures de débats :

« – Mes actions ne sont pas à la baisse ?– Non, cette fois encore, je crois que ça va

aller », répond l’huissier.Il défend ce jour-là un homme accusé

du viol de sa fille mineure, qui crie soninnocence.Unepremièrecour l’acondam-né à huit ans de réclusion. L’homme a faitappel, et il a demandé à Eric Dupond-Moretti de prendre son dossier. « Celui-là,je peux l’arracher », dit-il. Traduire : le fai-re acquitter. C’est devenu son job, sonchamp d’honneur professionnel. De sescombats et de ses victoires, il feint – mal –de ne pas tenir le compte.

Dans ce palais du Nord, Eric Dupond-Moretti est chez lui.L’huissier débonnaireou la greffière aux cheveux blancs quis’amusedesesrodomontadesontvugran-dir cet ogre du pénal, inscrit depuis 1984au barreau de Lille. Ils apprécient que,entre deux affaires retentissantes et unetournée d’assises aux quatre coins de laFrance, il revienne au pays. Leur rejoueses meilleurs numéros. Comme celui-ci,qui consiste à terroriser une experte psy-chologue.

Dans son compte rendu d’examen dela plaignante, elle a écrit : « Devant tantde larmes non feintes, je me refuserai à luifaire décrire les faits pour lesquels elle estsoumise à expertise et dont tout l’entretienmettra en évidence qu’ils ne relèvent pas dela fabulation. »

« Des questions, la défense ? », s’en-quiert la présidente. Un des juges asses-seurs s’en mord les lèvres de gourmandi-se. « Oh, juste quelques-unes… », répondl’« ogre ». Et c’est parti pour un morceaud’anthologie de terrorisme de défensepénale dont l’experte trop compassionnel-le ressort en miettes. « Il ne manquait plusque vous à Outreau, Madame ! », conclutl’avocat en regagnant son banc.

Outreau, référence obligée, usée jus-qu’à lacordeparceluiquiaassuré ladéfen-se à Saint-Omer puis à Paris de deux des

accusés qui seront acquittés. Outreau, quil’a fait accéderà tous les plateaux télévisés,aux honneurs parlementaires, au respectde ses confrères et à la plus précieuse desnotoriétés pour un pénaliste, celle de tou-tes les prisons de France. Ajoutons-y, pourcompléter le tableau, lacrainteoul’animo-sité, voire davantage, de bon nombre demagistrats.

Le tout méritait que l’on aille y voir deplus près, qu’on le suive du nord au sud,d’est en ouest. Qu’on l’écoute plaider etplusencore parler dece métier auquel, dit-il, il doit « tout ». Et d’abord une épouse.C’était audébut des années1990. Elle étaitjurée d’assises. Il venait de s’installer com-me avocat à Lille. « Je l’ai trouvée très belle,j’ai plaidé pour elle. » Il était reparti enemportant précieusement la liste desjurés. Avait cherché dans l’annuaire etétait tombé sur une homonyme « avec unaccent du Nord à tout casser ». « Je me suis

dit que ça ne pouvait pas être elle. Et aumême moment, j’ai reçu un très joli petitmot. Cette fois, c’était elle. Et voilà. »Depuis, ilsonteudeuxenfants.L’unsepré-nomme Clément – « Acquittement et Non-Lieu, ce n’était pas possible ».

Onle retrouveàParis. Il sortd’uneaudi-tionchez le juge d’instructionRenaud VanRuymbeke avec son client Jérôme Kerviel.L’ex-trader de la Société générale l’a eneffet sollicité cet été pour renforcer sadéfense.Çaneserefusepas.Pourtant,EricDupond-Morettinesuitplusguère lesdos-siers à l’instruction, et a « horreur des stra-tégies de défense de groupe ». Il n’est pasfamilierde laclientèleduCAC 40.Unjour,Jean-Claude Decaux avait demandé à lerencontrer. A la fin du dîner dans un trèschic restaurant parisien, Eric Dupond-Moretti lui avait dit que lesdomaines dans lesquelsl’homme d’affaires pouvaitavoir besoin de lui n’étaientpaslessiens.Mais ilavaitajou-té : « Si un jour vous tuez votrefemme, je serai là. »

Il concède toutefois qu’iln’a« pas beaucoup d’occasionsde refuser de tels clients, parcequ’[il est] rarement sollicité ».Son fonds de commerce,« c’est plutôt le Gitano qui aéventré une vieille femme pourlui piquer 40 euros ». « Je ne fais presqueplus que desassises. Je suisdésigné pour plai-der. »

Pourlereste, ilcomptesursescollabora-teurs. Une équipe de jeunes pénalistesmordus auxquels il a appris à dénicher cequ’il appelle « l’acquittement de coin decote » – le nom donné au classement deséléments d’instruction. Comme par exem-ple l’épluchage fastidieux des « fadettestéléphoniques », ces centaines de relevésde communications dont regorgent lesdossiers pénaux. « Il faut mettre son nez là

oùpersonnene veut aller, plonger au cœurdela bureaucratie judiciaire, avec un esprit dedéfiance systématique », dit-il. Après, c’està lui de jouer.

Longtemps, il a parcouru le pays auvolantdesavoiture. Il enaachetéunegros-seetclinquante.« J’avais calculéque jepas-sais deux mois entiers dedans par an. C’estpas pour me justifier, c’est pour expliquer »,ajoute-t-il en rejoignant sa Mercedes. Ilraconte les nuits au volant, après un ver-dict tardif, ces « heures sombres où voustournez la clé de contact, quand le type quevous avez défendu vient de prendre quinzeans et que vous refaites tout le procès, avecl’odeur de la sueur qui remonte, les lumièresblanchessur l’autoroute, la fatigueet le sand-wich au thon dans la station essence ».

Aujourd’hui, il prend plus souventl’avion. Avec une prédilection pour le sud.« Nice, Aix, Marseille, pour un pénaliste,c’est un gros pôle d’activité. » Il est passédes auberges pour voyageurs de commer-ce aux hôtels multiétoilés et aux restau-rants gourmands, mais il aime toujours le

café du petit matin dans lebistrot glauque en face dupalais, à côté des turfistes etdes joueurs de Rapido. Sur-tout, il a cessé de vomir dansles toilettes avant de plaider.« Ça a duré dix ans. Tout mepaniquait, une porte quis’ouvrait,untéléphonequison-nait. »Aujourd’hui, il seréga-le.« Cen’est pas que jemaîtri-semonart, c’estque j’aimaîtri-sé ma peur », dit-il.

Désormais,c’est luiquiter-rorise, observe-t-on. Il s’agace. « On ditque je terrorise les juges, c’est faux. Je terrori-se les cons. Mais c’est vrai que si je m’aperçoisque je fais peur, je vais jusqu’au bout, je nevois pas pourquoi je m’en priverais. » Sonbâtonnier reçoit des plaintes en rafale demagistrats « outragés ». Car souvent,l’« ogre » dérape. « Je me damnerais pourun mauvais jeu de mots », reconnaît-il. Ilpeste à nouveau : « On est tenu, en tantqu’avocat, à une obligation de délicatesse àl’égard des magistrats. C’est un archaïsmeinsupportable. Moi, j’aimerais qu’on le rem-

place par une obligation d’insolence. » Onleretrouvejustement àNice, entredeuxplai-doiries d’assises. Il rentre d’Ajaccio, passeà Draguignan après un crochet parMonaco, avant un détour par Montpellier,une montée vers Beauvais et une dernièrehalte à Laon. Au restaurant, il croise un desesanciens clients. « Ah ! monsauveur ! »,lui lance-t-il. On demande à Eric Dupond-Moretti de quoi il l’a sauvé. « De la jus-tice ! », s’esclaffe-t-il.

Draguignan, le lendemain.Unesalehis-toire de car-jacking qui tourne mal dansune station essence, un chauffeur de taxitué de neuf coups de couteau, deux accu-sés de vol et de meurtre dans le box, pasd’aveux et pas de preuves. Ils ont pris dix-huit et vingt ans en première instance,Jean-Louis Pelletier et Eric Dupond-Moretti en appel. Ils se battent et plaident.Lesdeuxaccusésserontacquittésdumeur-tre. Moitié moins d’années de prison.

De son clientde ce jour-là, il a àpeine retenu le prénom. Il ajuste fait le job. Le job, juste-ment, c’est quoi ? « Il fautque les jurés aient envie deprendre le Ricard avec vous,

pas le champagne. Devant une cour d’assi-ses, on parle toujours de la même chose : del’amour, de papa-maman, de sa femme, deses gosses. Avec les mots des pauvres gens,comme dit Ferré. Moi, j’adore les mots, maisje déteste la littérature. Ou alors seulementPagnol, parce qu’il aime le mot“manivelle”. » Il dit encore : « On est com-me les chanteurs, qui tournent avec lesmêmes trucs. » Les chanteurs, EricDupond-Moretti en raffole. Surtout dumusic-hall. « Pour la fin, les applaudisse-ments, le rappel. C’est un moment quim’émeut toujours. »

On en revient au métier, à l’art de plai-der.« Cequi est important,pourunpénalis-te, c’est lagreffièrequiaquaranteansde fau-teuil aux assises, et qui, lorsque vous allezvousrasseoir, baisse lespaupièrespour signi-fier : “Ça, c’est de la plaidoirie.” Mais lemieux, c’est encore les larmes de l’escorte devotre client. Ça vaut n’importe quelle flagor-nerie de confrère. »

Et puis vient le meilleur. Quand, latête baissée pour ne pas voir les visagesdes jurés, les ongles rongés à l’os, onentend le président annoncer : « La cour,après en avoir délibéré, a répondu négative-ment à l’ensemble des questions qui luiétaient posées. » « A ce moment-là, dit-il,on a le plaisir pour soi tout seul, car derriè-re, le client, lui, n’a pas encore compris queça signifie qu’on a gagné et qu’il a étéacquitté. »

Au fait, l’accusé du viol de sa fille, aprèsdeux heures de délibéré, est ressorti libredu box de la cour d’assises de Douai. a

Enquête

« Devant unecour d’assises,on parle toujoursde la mêmechose : del’amour, de papamamande sa femme,de ses gosses »

L’affaire d’Outreaua assuré la notoriétéd’Eric Dupond-Moretti.Depuis, on s’arracheles servicesde cet avocatdevenu champion del’acquittement. JérômeKerviel l’a désignépour sa défense

Au palais de justice de Douai, Me Eric Dupond-Moretti, 47 ans, est un peu chez lui. Il a l’habitude de s’éclipser, sous l’œil complice des gendarmes, pour fumer une cigarette. AIMÉE THIRION/FEDEPHOTO POUR « LE MONDE »

Pascale Robert-Diard

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AU CINÉMA LE 19 NOVEMBREUNE COMEDIE DE JEAN-MICHEL RIBESUNE COMEDIE DE JEAN-MICHEL RIBES

Le texte est publié aux éditions dans la collection

- Ça c'est sûr, qu’ils en avaient du talent les Impressionnistes !Déjà rien qu'arriver à peindre cette ville pourrie d'Argenteuil

et qu'elle se retrouve dans un musée, chapeau bas les Impressionnistes !

Musique Un festival est organisé dans plusieurs villes

Pourquoi les orchestres françaisrestent aux portes de l’élite mondiale

Culture&vousActualités

A écouter à Paris. Orchestre deParis, soirée Brahms, directionChristoph Eschenbach, les 19 et20 novembre. Tél. :01-42-56-13-13. Ensemble inter-contemporain, direction PierreBoulez, les 19 et 21 novembre.Orchestre de l’Opéra national deParis : prégénérale de Fidelio, deBeethoven, le 20 novembre. Tél. :0-892-89-90-90.A écouter en province. Orches-tre symphonique région CentreTours : Brahms, Dvorak, les 15 et16 novembre. Tél. :02-47-60-20-20. Orchestre despays de Savoie, Chostakovitch,Stravinsky, Mozart, le 14 novembreà Annecy. Tél. : 04-50-33-44-11.Orchestre national de Lille : Proko-fiev et Lille Piano Festival, le15 novembre. Tél. :03-20-12-82-40. Orchestre philhar-monique de Strasbourg : week-endOlivier Messiaen le 16 novembre.Tél. : 03-69-06-37-06.A écouter et à voir. Orchestrenational Bordeaux Aquitaine,direction Kwamé Ryan : concert

modulaire en pièces détachéesdans les locaux d’Ikea, le21 novembre. Tél. :05-56-00-85-95. Orchestre natio-nal de Lyon : Concerts Expressopour cadres pressés pendant lapause-déjeuner à partir de12 h 30, le 21 novembre. Tél. :04-78-95-95-95. Orchestre dechambre de Toulouse : « concert àla criée », où le public choisit lesœuvres, le 23 novembre.Pour les enfants. Orchestresymphonique Région CentreTours, le 17 novembre. Tél. :02-47-60-20-32. Orchestre phil-harmonique de Radio France : le20 novembre, atelier pédagogiqueen préparation du concert des« Clefs de l’orchestre de Jean-Fran-çois Zygel », diffusé par FranceTélévisions. Tél. : 01-56-40-34-92.A lire. L’Orchestre, des instru-ments à la musique, chez AlbinMichel dans la collection « LesPetits Débrouillards ».Téléphone du festival :01-42-80-26-27.www.orchestresenfete.com

Ici&ailleurs

La crise donne le signaldu retour à Noir Désir

T ous ces beaux jeux inventéspour passer devant lespremiers/Pour que chacun

soit écrasé s’il refuse encore deplier/Les dégâts, les excès, ils vontvous les faire payer »… Ainsi com-mence, chanté d’une voix intenseet éraflée, le premier couplet deGagnants/Perdants, premier titreenregistré par le groupe Noir Désirdepuis la libération en octo-bre 2007 de son chanteur, Ber-trand Cantat, un peu plus de qua-tre ans après sa condamnationpour le meurtre de sa compagne,l’actrice Marie Trintignant. Le der-nier album du groupe, Des visages,des figures, est paru en 2001.Cette ballade est l’un des deux nou-veaux morceaux que le quatuor amis en ligne par surprise et en télé-chargement gratuit, mercredi12 novembre, à l’occasion de laréouverture de son site (www.noir-dez.com). L’autre chanson est unereprise punk du Temps des cerisesde Jean-Baptiste Clément, titreemblématique de la Commune deParis, saisi dans l’urgence avec laparticipation d’Estelle et RomainHumeau du groupe Eiffel. Sontproposés aussi six morceaux enre-gistrés live, en 2002, dans leslocaux de Radio Popolare, à Milan.Dans une page d’introduction, legroupe explique que « la chansonGagnants/Perdants a été enregis-

trée (…) en réaction au contexteactuel, politique et humain (…)Impossible d’attendre pour la mettreà disposition. » Comme si la crisequi secoue le capitalisme avait don-né le signal du retour au groupedont l’immense popularité étaitaussi associée, dans les années1990, à son engagement.Rarement chanson de Noir Désiravait été aussi explicite : « Nous, onne veut pas être des gagnants/Maison n’acceptera jamais d’être desperdants/Pimprenelle etNicolas/Vous nous endormez com-me ça. »Depuis le printemps, il se disaitque Noir Désir avançait dans la pré-paration d’un nouvel album. Ber-trand Cantat, qui avait eu du mal àse remettre à l’écriture, auraitenfin réussi à produire plusieurstextes, sans qu’aucune date de sor-tie de disque soit prévue. « A partça, Noir Désir est au travail… »,conclut aujourd’hui le message dugroupe.Ce retour suscite déjà des polémi-ques, comme en témoignait, dèsmercredi, la ribambelle de réac-tions sur Internet. On pouvait, parexemple, y lire : « Un assassin quidonne des leçons, ça casse le mythe »,ou « Je viens d’écouter, j’en ai des fris-sons. Quel plaisir d’entendre Ber-trand ! » a

Stéphane Davet

Sefaireconnaître.Sortirdel’anonymat d’un paysagemusicalsurchargéenpar-tant à la rencontre dupublic. Du 14 au

23novembre, l’Associationfrançai-se des orchestres (AFO) lanceOrchestres en fête !, premièremanifestation du genre. Quatre-vingts concerts à travers la France,des répétitions publiques, ateliers,rencontresaveclesartistes…Philip-peFanjas,directeurde l’AFO,yvoit« une manière de mettre en lumièreune pratique culturelle moins visibleque l’opéra, mais qui recense chaquesaison, autour d’une trentaine d’or-chestres permanents (dont le budgetglobal de 220 millions d’euros estsupporté à 82 % par les financespubliques), près de 3 200 concerts etplus de 2,5 millions de spectateurs ».

Beaucoup d’activité, donc. Maispeuderayonnement,notammentàl’étranger. Pourquoi, par exemple,aucun orchestre français ne figuredans les dix meilleurs mondiaux,aux côtés des Philharmonies deVienne et de Berlin, du Concertge-bouwd’Amsterdam,de l’Orchestresymphonique de Londres et desgrandes formations américaines(Cleveland, Philadelphie, Boston,NewYork, Chicago, LosAngeles) ?

« Les Français adorent la musi-que, mais ils ne l’aiment pas. » Laboutade de Berlioz serait-elle tou-jours vraie aujourd’hui ? La raisonhistorique d’une France littéraire,privilégiant le théâtre et le cinéma,semble encore d’actualité. « Lesorchestres sont le reflet des institu-tions, affirme Philippe Fanjas. Ilnousfautprendreaussienconsidéra-tion la place déclinante des culturessavantes dans notre société, la confu-sion avec le divertissement. Sans par-ler du niveau des élites qui leur faitpréférer la culture populaire. »

S’yajoutentdescausesplusspé-cifiques, comme le manque devrais auditoriums en France. « Lamusique ne prend toute sa valeurque dans une salle adaptée. Ellen’est pas complètement à sa placedans le réseau des théâtres et des scè-nes nationales », poursuit PhilippeFanjas. Un constat que confirmeGraziellaContratto,quidirige l’Or-chestre des pays de Savoie depuissix ans : « Pour nous, orchestresnomades, c’estparfois difficilede fai-re des programmes ambitieux, carnous dépendons de directeurs de sal-le peu connaisseurs et souvent trèsconservateurs. »

Les dysfonctionnements vien-

nent aussi des orchestres eux-mêmes, et des relations entrete-nues avec leur chef. Ainsi MarcMinkowski, fondateur des Musi-ciens du Louvre et directeur musi-cal du Sinfonia Varsovia, constate :« En France, on est élevé dans unesprit de contestation permanent.Cela commence avec les profs à l’éco-le. » Il est ainsi de notoriété publi-que que les musiciens français nesontpastendresavecleurchef,pou-vant aller jusqu’à saboter unconcert en cas de conflit.

Production de solistesMais Fayçal Karoui, directeur

musicalde l’OrchestredePau-paysde Béarn, stigmatise aussi les chefsqui cumulent les postes. « Quedirait-on d’un maire qui ne serait làquequinzeàvingtsemainesparan ?,interroge-t-il. Sans parler du fosséentre le salaire moyen d’un musicien(de 3 500 à 4 000 euros) et celuid’un chef qui touche 30 000 eurospar concert ? »

Cette coupure entre musicienscommence tôt. Jusqu’auxannées 1980, l’enseignement desconservatoires français était trèstourné vers la production de solis-tes. Jouer dans l’orchestre n’appor-

taitquepeudecrédit.Difficilealorsde construire cette tradition quicaractérise par exemple les orches-tres germaniques.

A l’étranger, on se souvient del’aura de la mythique Société desconcertsduconservatoire,quirévé-la à Wagner la quintessence de laNeuvième Symphonie de Beetho-ven, ce que n’avait pas su faire l’Or-chestredeLeipzig. Mais lesensem-bles français d’aujourd’hui restentpeu connus. Pour le délégué à lamusiqueau ministèrede laculture,Pascal Dumay, la « politique disco-graphique des majors, qui a long-

tempsprivilégié lesorchestresd’Euro-pe du Nord et des Etats-Unis » tientsa part de responsabilité.

Les orchestres français ne man-quent pourtant pas d’atouts. Lechef de l’Orchestre national deLyon, Yun Märkl, vante « uneculture de la précision et des sonori-tés », Kwamé Ryan, baguette del’Orchestre national Bordeaux-Aquitaine, « une curiosité que n’ontpas les musiciens allemands, plusstricts et systématiques dans l’inter-prétation ».

De son côté, Jean-Claude Casa-desus, patron de l’Orchestre natio-nal de Lille, qui a dirigé l’Orchestrefrançais des jeunes pendant troisans, souligne l’évolution psycholo-gique des musiciens : « Les jeunessont plus professionnels que leursaînés.On est sortis ducultedusoliste,et le métier de musicien d’orchestre aacquis ses lettres de noblesse. »

Car s’il est une chose unanime-ment reconnue, c’est la valeur desmusiciens français, dont la qualitéest,pour lechefd’orchestreetcom-positeur Pierre Boulez, compara-ble à celle des grands musiciensétrangers. « L’Orchestre de Parispeut techniquement rivaliser avecceluideBerlin.Mais ilsouffre luiaus-si du manque général de cohésion etde cohérence. »

EtBoulezdedéplorer lemanqued’une direction artistique forte à latête des orchestres. « Aux Etats-Unis, un orchestre est symbolisé parsonchef.RegardezGeorgSoltiet l’Or-chestre de Chicago, celui de Cleve-landdutempsdeDohnanyi,sanspar-ler de George Szell. Là, c’était vrai-mentl’identificationtotale. »Ilespè-re que l’ouverture de la NouvellePhilharmonie de Paris, en 2012,une salle entièrement dédiée auxorchestres, « leur donnera uneimpulsion salutaire ». a

Marie-Aude Roux

LittératureLe Goncourt des lycéensà Catherine CussetLe 21e prix Goncourt des lycéensa été décerné mercredi à Catheri-ne Cusset pour Un brillant avenir(Gallimard). Le roman a été choi-si au premier tour de scrutin,devant Syngué Sabour (POL) duFranco-Afghan Atiq Rahimi, lau-réat, lundi, du Goncourt.

ThéâtreLe Français « précise »LaComédie-Françaisea indiqué,mercredi12novembre,dansuncom-muniqué,qu’ellerenonçaitàs’im-planteràBobigny« dansuncalen-drierresserré ».« Précisant » lespro-postenusdansLeMondeparsonadministratricegénérale,MurielMayette,elledit entrer« dans unedeuxième phase de travail ».

Le programme d’Orchestres en fête

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Musique

J ane Birkin, 61 ans, publieEnfants d’hiver. La photo decouverture, prise par « peut-être [sa] grand-mère » surune plage de l’île de Wight,

montre Jane, 12 ans, enfant filifor-me, garçonne en ballerines, leregard droit. Dans le livret, elle aplacé des portraits de famille – samère, l’actrice JudyCampbellmor-te en 2004, son frère Andrew, sasœur cadette Linda. « Andrew estmagnifique, il a la tête du metteuren scène qu’il sera, moi de l’actrice,

et Linda, qui déjà ne veut s’impli-quer dans rien de tout cela ! »

Enfants d’hiver a été conçu avecEdith Fambuena, compliced’Etienne Daho. Jane Birkin enest l’unique parolière. C’est unepremièrepour l’actriceet chanteu-se, prolixe, toujours à nu, utilisantpeu le fard intellectuel. Une mar-que à elle seule, omniprésente.« Je voulais retrouver l’adolescen-ce, l’enfance, le seul pays qui vaillela peine d’être revisité. » La vie deJane est une aventure sans ruptu-re – disques, films, théâtre, coupsde foudre et coups durs. Ses filles

sont « merveilleuses », et sa mère,dit-elle, a glissé lentement vers lamort dans un hôpital britanni-que, qui, libéralisme oblige, utili-sait des « cash nurses », des infir-mières indépendantes payées àl’heure.

Dans l’appartement qu’elleoccupe, près de la rue de Verneuiloù vivait Serge Gainsbourg, elle aépinglé des pêle-mêle, gardé desœuvres photographiques, un tira-ge noir et blanc magnifiquementflou de son frère Andrew, dont lefils Anno Birkin s’est tué à l’âge de20 ans dans un accident de voitu-re, en 2001. « Il y a unpays/Invérifiable/Inaccessible/Comme les morts/J’ai passé ma vie à lerechercher », écrit-elle (Enfantsd’hiver).

Chez Jane Birkin, enfant de laballe et fille du commandant de laRoyal Navy David Birkin, il y a destentures rouges, des tissus moi-rés, des canapés, une profusion deplantes vertes et de loupiotes enterrasse, des objets, des dessins,un capharnaüm cultivé, chic, sin-cère. Linda, la sœur, sculptrice,est si discrète, explique l’aînée,qu’elle refuse de montrer sesœuvres. « Elle les garde pour elle,par exemple ce pique-nique enbéton, tout est en béton, les bou-teilles de Coca, les verres, tout enbéton, c’est formidable ! Tous lesdétails ! »

Pierre, ciment, cailloux,ciseaux, feuilles, choux, genoux :les mots chez Birkin changentencore parfois de genre, d’ortho-grapheou de destination, quaran-te ans après Slogan, le film parlequel elle rencontra Serge Gains-bourg. Alors Jane Birkin décided’exorciser ses démons linguisti-ques en écrivant Enfants d’hiver(ou divers). « Là, il fallait que jesois précise, que je ne me trompe pasen français, mais je voulais restermoi. Alors, par exemple je dis “à lagrâce de toi”. Gainsbourg avaitbien écrit “l’amourde moi”, “à l’an-cienne”. »

Jane Birkin a enregistré sept

albums « made in Serge Gains-bourg », mort en 1991, dont l’ulti-me et inoubliable Amours des fein-tes en 1990. « Puis dans VersionsJane [1996], j’avais pillé des chan-sons écritespourd’autres. »Etpuis-qu’il n’était pas dit qu’elle seraittoute sa vie veuve de guerre, elletrahit en 1999 avec l’al-bum A la légère, écritpar Miossec, FrançoiseHardy, Alain Souchon,MC Solaar… Dans lamême veine, ce seraensuite Rendez-vous(des duos, en 2004) etFictions (2006, avecBeth Gibbons, NeilHannon de DivineComedy, etc.).

Jane Birkin vient de terminer letournage de 36 vues du pic Saint-Loup, le prochain film de JacquesRivette. Elle est en jean et portedes baskets kaki à lacets blancs,comme dans Boxes, le film qu’ellea réalisé en 2007 – des personna-ges du passé ressurgissaient decartons de déménagement, l’hé-roïne avait trois filles de pères dif-férents. Jane en a eu trois, Kate

Barry, fille du compositeur JohnBarry, Charlotte Gainsbourg etLou Doillon. Elle est grand-mère,ce qui n’a pas empêché Converse,le nec plus ultra de la chaussurepour ados, de la choisir pour sacampagne d’affichage française àl’occasion des cent ans de la mar-

que (Asia Argento enItalie, Nina Hagen enAllemagne, feuIan Cur-tis en Angleterre…).Des gens, préciseConverse, « choisispour leur vision optimis-te de la rébellion ».

La tournée Enfantsd’hiver commencera le2 février 2009 au Théâ-tre Rutebeuf de Clichy-

sous-Bois (Seine-Saint-Denis)avant le Palace, haut lieu du noc-tambulisme parisien des années1980. C’est tout Birkin, qui aimaitSerge « parce qu’il pouvait écouterGrieg l’après-midi et parler avecPatrick Sébastien à 20 h 30 ».

Lesdatessontsurson site Inter-net (www.janebirkin.net), dont lepremier onglet est intitulé « Mesengagements ». Deux pour l’heu-

re, l’un pour sauver l’opposantebirmane Aung San Suu Kyi,l’autre pour la Tchétchénie. Pources combats, elle a trouvé unearme de guerre : Arabesque, leschansonsdeGainsbourgréorches-trées à l’orientale par le violonisteDjamel Benyelles dont elle vientde donner « la der des der » à laCité de la musique de Paris, danslecadrede l’hommagerenduàSer-ge Gainsbourg par des concerts etune exposition.

« Arabesque a commencé auThéâtre de l’Odéon en 2002 et s’estterminé au Châtelet, après tant dedétours ! [200 dates, 30 pays, etdes prolongations.] Je l’ai donné àMoscou, et c’était très important carSerge était de famille russe. C’étaitavant l’assassinat de la journalisteAnna Politkovskaïa en 2006. J’aidédié ce spectacle aux Tchétchènes,mais c’était très délicat parce que lesmères de soldats russes sont venuesme voir dans ma chambre d’hôtelpour me raconter la guerre, les bizu-tages, etc. »A Sarajevo, il était faci-le de choisir son camp, conclutJane Birkin. « Pas à Moscou. » a

Véronique Mortaigne

« Il fallait que jesois précise, queje ne me trompepas en français,mais je voulaisrester moi. Alors,par exempleje dis “à la grâcede toi” »

Culture

O n imagine l’angoisse de l’an-cienne muse devant la pageblanche. Comment se ris-

quer comme auteur, quand on aété jusque-là servie par un des maî-tres de la chanson française– Gainsbourg –, puis par un florilè-ge de plumes de renom ? Plutôtque d’entrer en concurrence avecles pros du refrain, Jane Birkin achoisi de suivre son instinct, decreuser ses souvenirs, ses regrets,ses blessures, en restant nature,très souvent touchante, attachan-te, parfois crispante.

Une dizaine de compositeurslui ont confié des musiques, maisEnfants d’hiver donne surtout l’im-pression de naître dans le cocon tis-sé par Edith Fambuena, guitaristeproductrice, dont la sobre élégan-ce s’est déjà fait remarquer chezDaho, Bashung ou Jean Guidoni.L’humeur hivernale de l’Anglaises’épanouit ainsi dans la délicatechaleur de guitares acoustiques,d’un piano, d’une flûte, d’unecontrebasse, d’un violon ou d’unvioloncelle.

Ses mots oublient parfois que laprofondeur de l’émotion (A la grâ-

ce de toi), la valeur de la confidence(Le 14 février) ou de l’engagement(Aung San Suu Kyi, son manifestepour la Birmane Prix Nobel de lapaix), ne font pas la chanson. Sansétincelle mélodique, jeu verbal ourythmique, son chant fragiles’alourdit de mélancolie récitative.

On préfère Jane quand sonspleen, sa tendresse ou sa gouailles’appuient sur la dynamique d’unair séducteur. Alain Souchon etson fils, Pierre, guident ainsi Pério-de bleue au carrefour malicieux dublues et de la comptine, pour untitre qu’on jurerait tiré du répertoi-re de Souchon père. Prends cettemain, Il fait nuit, Enfants d’hiver(sur une jolie tournerie d’Hawks-ley Workman) ou le gainsbourienMadame brillent aussi de petitestouches enjôleuses, même dans lagravité de la nostalgie, de la solitu-de ou des outrages du temps.

Atypique et réjouissant, Oh com-ment ça va ? balance vertement desrancœurs à un ex sur fond de guita-res empruntées à la verve trash duVelvet Underground. Des soucisd’ancienne égérie ? a

Stéphane Davet

Concert exceptionnel au profit de La Chaîne de l’Espoir

Maria de Medeiros

Gilberto Gil, Caetano Veloso,Chico Buarque, Jorge Ben, Rita Lee, ...

INVITATION PRIVILÉGIÉE POUR LES LECTEURS DU JOURNAL

THÉÂTRE MARIGNYDIMANCHE16 NOVEMBRE 16H

Chante les grands thèmesdu Brésil et du Portugal

TARIF SPÉCIAL1 place = 15€, la 2ème = 5€

Réservation : 06 72 69 51 42www.coline-en-re.com

Jane met en motsla famille BirkinRencontre avec la chanteuse qui, pour la première fois,est l’unique parolière de son nouvel album

« Enfants d’hiver »,disque à l’instinct

Musique

Montivilliers (Seine-Maritime)Envoyée spéciale

L a troisième édition du festi-val Automne en Normandies’ouvrait le 23 octobre par un

anniversaire : les dix ans du Poèmeharmonique, ensemble de musi-quebaroquefondéen1998parVin-cent Dumestre (soutenu dès sesdébuts par la Haute-Normandie),présent dans la région jusqu’au24 novembre. Cet ensemble a sudonner aux partitions françaises etitaliennes du XVIIe siècle et dudébut du XVIIIe des lettres denoblesse,alliantàlamusiquelages-tuelle et la rhétorique du théâtre etde la danse baroques.

C’est ainsi que le Poème harmo-niqueafaitappelaumetteurenscè-ne Benjamin Lazar, complice dufameux Bourgeois gentilhomme à labougie de 2004, puis du Cadmus etHermione, de Lully, monté en jan-vier à l’Opéra-Comique, pour cepremier concert intitulé Venezia,delle Strade ai Palazzi (« Venise, desrues aux palais »). Un déroulé descénettes autour des musiquesvénitiennes savantes et populairesrecréant au gré des Monteverdi,

Marini,ManellietFerrariuncarna-val fantasque de commedia dell’ar-te, de fourberies en canzonettes, demascarades en lamenti, bergamas-ques et autres villanelles.

Il fait froid dans la petite égliseSaint-Sauveur de Montivilliers,mais le cœur est à la fête tant lessolistes du Poème harmoniquesemblent incarner cet esprit véni-tien vif-argent qui mêle dramesd’opéra et querelles de rue, noblesamours et idylles ancillaires.

Gnocchis et macaronisLe récit, ouvert sur l’ineffable

espoir du Retour d’Ulysse dans sapatrie, de Monteverdi, se termine-ra par l’espérance vaine d’unamour sans douleur fui et recher-ché (Jacara : Aria alla NapolitanaetCiaccona : Acceso mioCore,Fran-cesco Manelli). Entre-temps, lasoprano Claire Lefilliâtre aurachanté l’ardente plainte de la nym-phe abandonnée (Lamento dellaNinfa, deMonteverdi).Sitôtconju-rée par la bacchanale BarchettaPassaggiera, de Manelli, qui entas-sedans sa barqueLombard, Napo-litain, Génois et Allemand, viandeséchée, gnocchis et macaronis,gourdes de bon vin, sans oublier lafriponne recommandation faite

aux ripailleurs : « Jouez du gouver-nail ! » Rompus à la scène, habilesà jouer des autres comme d’eux-mêmes, les musiciens sont en pos-session d’une arme majeure : leplaisir d’être ensemble et le bon-heur de plaire. a

Marie-Aude Roux

Festival Automne en Normandie.Concert repris le 15 novembre auxAndelys (Eure), le 16 novembre à Pont-Audemer (Eure), le 23 novembre à Neuf-châtel-en-Bray (Seine-Maritime) et le24 novembre à Eu (Seine-Maritime).Tél. : 02-32-10-87-07. De 6 ¤ à 8 ¤.www.automne-en-normandie.com

Le Poème harmonique, serviteur vénitienL’ensemble de Vincent Dumestre interprète avec bonheur le répertoire baroque italien

Jane Birkin : « Je voulais retrouver l’adolescence, l’enfance, le seul pays qui vaille la peine d’êtrerevisité. » DENIS ROUVRE POUR « LE MONDE »

24 0123Vendredi 14 novembre 2008

Page 25: Le Monde 14 11

Théâtre

RennesEnvoyée spéciale

L’air frais vient souventde l’Ouest : depuisdouzeans, l’excellent festivalMettre en scène, pilotépar le Théâtre national

de Bretagne (TNB), à Rennes, faitsoufflerunsalutaireventdedécou-verte sur la création théâtrale etchorégraphique. L’édition 2008s’est ouverte, mardi 11 novembre,avec deux créations : La Vénus à lafourrure, deSacher-Masoch,adap-té au théâtre par ChristineLetailleur, et Edouard II, de Chris-topher Marlowe, mis en scène parCédric Gourmelon.

Les deux spectacles, que l’onpourra voir à Paris en jan-vier 2009, ont des points com-muns, mais une réussite inégale.Signés tous deux par des metteursen scène au tournant de la quaran-taine, ils s’attaquent, dans leconformisme ambiant, à des thè-mes plutôt dérangeants, et abor-dent le politique sous l’angle del’intime, en travaillant sur le désiret la transgression.

Christine Letailleur, qui avaitdéjàsigné,en2006,unebelleadap-tation théâtrale de La Philosophiedans le boudoir, de Sade, abordeavec la même justesse et la mêmefinesse La Vénus à la fourrure. Letexte le plus célèbre de l’Autri-chien Leopold von Sacher-Masoch, publié en 1869, estencombré de clichés. Son héroïne,Wanda,est leprototypede ladomi-natrice, son héros, Séverin, celuide l’esclave consentant, et le nomde l’auteur a forgé la définitiond’une perversion sexuelle qui liejouissance et souffrance.

Mais la metteuse en scène setient bien loin de cette imagerieconvenue, pour revenir à l’essen-tiel de ce texte génial, qu’il seraiturgent de redécouvrir, commetous les autres de ce libertin quijugeait les Mémoires de Casanovamoins nocives pour les jeunesfilles que la littérature catholique.Sur le plateau épuré comme uneboîte noire, elle installe un espace-temps poétique où la beauté de lalangue et des corps fonde les mys-tères du désir.

C’est avec un homme qui rêveque tout commence, et son rêve enrencontre un autre, celui de sonami Séverin et de son aventureavec Wanda, la Vénus à la fourru-re.Entreeuxs’estnouéeuneétran-ge relation amoureuse et érotique,établie sous la forme d’uncontrat : un esclavage librementconsenti par l’homme à la femme– cet homme qui dit : « Je veux êtremaltraité et trahi par la femme quej’aime. Plus elle sera cruelle, mieuxcela vaudra. »

L’espace des rêves et de l’imagi-naire – imaginaire comme ressort

du désir – se déploie d’autantmieux que Christine Letailleur,commedansLa Philosophie dans leboudoir, trouve toujours la justebalance entre ce qu’il convient demontrer et de cacher, de suggéreret de dévoiler.

Beauté dans la souffranceCe jeu de rôles et de masques,

éminemment théâtral, qui est aucœur de toute entreprise de séduc-tion entre un homme et une fem-me, est mené par deux acteursmagnifiques,ValérieLangetAndr-zej Deskur, un comédien polonaisinconnu en France, dont l’étrange-té, la beauté dans la souffrance,font merveille. Le jeu sur les codesvestimentaires, le loup noir de laVénus, ses fourrures, la présencede la musique, tout conduit au plus

intime, à l’indicible de la jouis-sance, et la cruauté prend ici unedouceur extrême.

Cédric Gourmelon ne connaîtpas la même réussite avecEdouard II,piècepourtantpassion-nanteécritepar lesulfureuxélisabé-thain Christopher Marlowe en1592.Pièceprofondémentsubversi-ve, qui voit le roi Edouard II oppo-ser à la raison d’Etat, aux lois de sacaste, la loi de son désir, et de sonamour pour ses favoris successifs.

La mise en scène assez simplis-te, non exempte de clichés, notam-ment ceux de l’homosexualité, nepermet pas vraiment de dégagerdes enjeux qui pourraient avoir desrésonancestoutàfaitcontemporai-nes. C’est dommage : le dialogueentre « Kit » Marlowe, lemécréant, le rebelle, annonciateur

desLumières,etSacher-Masoch, leprécurseurdelamodernitéviennoi-se, libertin féministe à sa manière,engagé contre l’antisémitisme ettoutes les formes de bêtise, auraitpu avoir un sacré piquant. a

Fabienne Darge

Festival Mettre en scène, jusqu’au22 novembre. Théâtre national de Breta-gne (TNB). Tél. : 02-99-31-55-33.La Vénus à la fourrure, d’après Leopoldvon Sacher-Masoch. Salle Didier-Geor-ges Gabily, à Rennes, à 21 heures, jus-qu’au 15 novembre. Le 19 novembre àQuimper et du 21 janvier au 15 février2009 au Théâtre de la Colline à Paris.Edouard II, de Christopher Marlowe(nouvelle traduction d’André Markowi-cz). TNB Rennes, à 20 heures, jusqu’au15 novembre, puis du 5 au 31 janvier2009 au Théâtre Paris-Villette.

Leschoixdu«Monde»DanseSonoritéset corps d’AfriquePANTIN. Pour fêter l’arrivée enrésidence pendant deux ans deschorégraphes burkinabés SaliaSanou et Seydou Boro, le Centrenational de la danse de Pantin(Seine-Saint-Denis) organisedeux journées spéciales autourde la danse africaine. Au pro-gramme, dans les différents espa-ces et studios du CND, des specta-cles signés, entre autres, parTaoufik Izeddiou du Maroc,Maria Helena Pinto du Mozambi-que, Opiyo Okach du Kenya,mais aussi des ateliers et desfilms. L’exposition du photogra-phe Antoine Tempé propose desportraits des grandes figures dela danse africaine.Centre national de la danse, 1, rueVictor-Hugo, Pantin (Seine-Saint-Denis). Le 15 et 16 novembre. De14 heures à 20 h 30. Tél. :01-41-83-98-98. De 10 ¤ à 18 ¤.

CinémaCinéNordicaPARIS. Ce panorama des nou-veaux cinémas suédois et norvé-gien regroupe inédits et avant-premières. A noter Le Roi du ping-pong de Jens Jonsson, primé cetteannée à Sundance (l’histoire dedeux garçons hostiles à la rela-tion sentimentale de leur mèreavec un routier), La Rébellion deKautokeino de Nils Gaup (célèbreépisode de l’histoire de la Scandi-navie, autour de la révolte d’unetribu élevant des rennes, en1852). Et Involuntary de RubenOstlund, sélectionné cette annéeà Cannes en section Un certainregard (puzzle de petits dérapa-ges sociaux, regards sur des gensqui perdent la face, sont soumisau groupe…), ou deux films deRoy Andersson. En sus, La Char-rette fantôme de Victor Sjöströmen ciné-concert, et une carte blan-che à Arnaud Desplechin, quirend hommage à Ingmar Berg-man.Jusqu’au 18 novembre au Cinémadu Panthéon, 13, rue Victor-Cou-sin, Paris-5e.www.cinenordica.com

ThéâtreLes EmbiernescommencentRHÔNE. Depuis trente ans, Emi-lie Valantin dépoussière lamarionnette avec sa compagnie,le Théâtre du Fust. En décem-bre 2007, elle s’est attaquée à Gui-gnol, avec Les Embiernes commen-cent, créé au Théâtre des Céles-tins à Lyon : un spectacle savou-reux, qui retrouve l’insolence ori-ginelle du petit personnage lyon-nais. Le spectacle est repris jus-qu’à fin novembre dans plusieurssalles du département du Rhône,et en décembre aux Célestins.Salle des fêtes de Sain-Bel, du 13au 16 novembre. Maison de l’Euro-pe, Lac des Sapins, du 20 au23 novembre. Salle des fêtes-LaHalle de Montrottier, du 27 au30 novembre. Théâtre des Célestinsdu 10 au 28 décembre. Théâtre desCélestins, 04-72-77-40-00.

Danse

L a photo dénudée qui circulesur la nouvelle pièce du cho-régraphe Abou Lagraa inti-

tulée D’eux sens induit partielle-ment en erreur. Il ne reste aucunescène nue dans ce duo interprétépar Abou Lagraa et sa femme,Nawal. Prise au début des répéti-tions, l’image glisse néanmoinsun indice sur son moteur intime :l’amour et la sexualité. Elle souli-gne aussi la gageure de l’entrepri-se : dire sans tabou la force dudésir.

Présenté aux Gémeaux deSceaux (Hauts-de-Seine), oùAbouLagraa est en résidence pen-dant trois ans jusqu’en 2011,D’eux sens se rhabille doncd’abord – en pantalons et chemi-

sesblanches souples–pour se bai-gner finalement dans un bassinrempli d’eau et éclabousser le pla-teau. Pudique ou plus que nu,Abou Lagraa connaît la chanson.

Dynamisme haletantLa sensualité du chorégraphe

dans D’Eux sens est électrique,d’undynamisme haletant. En ath-lètes, les deux danseurs foncent.Ils tournoient, chutent et rejaillis-sent, envoient valser bras et jam-bes dans toutes les directions. Lafaçon dont ils assument leur piècecrânement évacue l’idée même degratuité du geste. La complexitéde la partition chorégraphique,techniquement exigeante avec sescassures et sa fluidité paradoxale,empêche aussi que la danse viremécanique.

Si singularité orientale il y adans ce duo, elle n’est pas là où onl’attend le plus. La gestuelled’Abou Lagraa – d’origine algé-rienne –, passé par une formationclassique et contemporaine, nemanque pas de hanches, mais elles’enroule surtout dans une spiralesans fin. Le flux des corps neconnaît aucun répit, se chargeantetse déchargeantau filde la choré-graphie.

Les textes chantés dans D’euxsens, AbouLagraa lesa choisis par-mi les poèmes de l’auteur persanOmar Khayyam (v. 1047-v. 1123).Les thèmes de l’ivresse, de la jeu-nesse et de la vie ont touché le cho-régraphe, qui s’est entouré dedeux musiciens soufis pour inter-préter les poèmes.

Une séquence se détache : assis

chacun à un coin d’un tapis,Nawal et Abou Lagraa se défient àcoups d’acrobaties. L’un aprèsl’autre, ils s’élancent, se présen-tent en quelque sorte et passent lerelais. Conversation ou combat,une parade amoureuse à bras-le-corps. a

Rosita Boisseau

D’eux sens, d’Abou Lagraa. Le15 novembre, à L’Onde, Vélizy-Villacou-blay (Yvelines). Tél. : 01-34-58-03-35.Le 18 novembre, au Théâtre de Sartrou-ville (Yvelines). Tél. : 01-30-86-77-77.Les 20 et 22 novembre, Bonlieu, Scènenationale, Annecy (Haute-Savoie).Tél. : 04-50-33-44-11.Le 6 décembre, Théâtre de l’Olivier,Istres (Bouches-du-Rhône).Tél. : 04-42-55-24-77.www.aboulagraa.com

Le désir en duo d’Abou Lagraa et sa femmeLe chorégraphe et danseur est en tournée avec « D’eux sens », exigeant et sensuel

Deux créationscontemporaineséclipséespar Stravinsky

Culture

Irrésistibles transgressionsDeux jeunes metteurs en scène s’attaquent à Sacher-Masoch et à Christopher Marlowe

3EME FESTIVAL DU FILMJAPONAIS CONTEMPORAIN

18-25 novembre 2008

infoline : 06 31 98 46 85

(Ile de France, régions)

SAM. 22 NOV. 17H

Ashwini BhideI N D E D U N O R D

C H A N T K H Y A L

Une voix captivante,d'une puissance

étonnante.2 PL. DU CHÂTELET PARIS 4

01 42 74 22 77www.theatredelaville-paris.com

Musique

L orsqu’une pièce contempo-raine est intégrée à un pro-gramme classique, comme le

préconise l’association Musiquenouvelle en liberté dans son parte-nariat avec de nombreux interprè-tes, il lui arrive souvent de déton-ner par excès de nouveauté. C’esttoutefoisl’effet inversequis’estpro-duit, mercredi 12 novembre, à laMaison de Radio France, à Paris,avec les deux œuvres données encréation par l’Orchestre nationalde France dans le cadre de la sixiè-meédition des Paris de la musique,le festival organisé par Musiquenouvelle en liberté.

Imprudemment placées entredeux pages brillantes d’Igor Stra-vinsky, les œuvres de Régis Campo(né en 1968) et de Jérémie Rhorer(né en 1973) ont paru d’une rarefadeur, d’un goût vieillot et d’unesprit frileux.Composésurdespoè-mes d’Apollinaire, Le Bestiaireaurait pourtant dû flatter la fibremélodique qui caractérise RégisCampo depuis ses débuts. Hélas !ce cycle vocal pour soprano etorchestre souffre d’un tiraillementpermanent entre le traitementsophistiqué du fond instrumentalet ladramaturgiedethéâtredebou-levard affectée à la voix.

RacoleurSibienqu’avecunesoliste,Felici-

ty Lott, prompte au cabotinage, lerésultat devient des plus racoleurs.UneseuledesonzepiècesdeceBes-tiaire bancal laisse entrevoir le par-ti original que Régis Campo auraitpu tirer de sa situation en por-te-à-faux esthétique (dans une vei-nerétro remontantà Roussel, voireàDebussy):LeHibou,harmonique-ment troublant.

Si Campo a néanmoins dumétier, ce n’est pas le cas de Jéré-mie Rhorer, pourtant excellentissi-mechefd’orchestre.Curieusementinspiré par une visite de l’endroitoù est enterré Stravinsky, à Venise,Le Cimetière des enfants sonne aumieuxcommeunelancinantemusi-que d’atmosphère et au pire com-me la partition anonyme d’un filmnoir des années 1950.

La question de l’originalité ne seposaitpasà l’écouteduScherzofan-tastique (1907-1908) de Stravins-ky, finement interprétéen ouvertu-re de concert.Elle est encore moinsjustifiée à propos de la Suite duchant du rossignol, consciencieuse-ment dirigée par Alain Altinoglu.Dans un cas comme dans l’autre, ilestavéréque, chez les jeunesd’ave-nir, liberté rime avec identité. a

Pierre Gervasoni

Les Paris de la musique. Jeudi13 novembre à 20 h 30, Michaël Levi-nas : Accords tremblés (dériver-altérer)pour orgue seul, création ; Francis Pou-lenc : Concerto pour orgue ; ThierryEscaich : Concerto pour orgue n˚ 2 ;Gabriel Fauré : Pelléas et Mélisande. Egli-se Saint-Etienne-du-Mont, place Sainte-Geneviève, Paris-5e. M˚ Cardinal-Lemoi-ne.Vendredi 14 novembre à 20 heures, Ser-ge Prokofiev : Symphonie classique ; Pas-cal Zavaro : La Traversée, création ; Mau-rice Ravel : Le Tombeau de Couperin ;Harold Arlen : Over the Rainbow, Théâtredu Châtelet, 1, place du Châtelet,Paris-1er. M˚ Châtelet. Tél. :08-92-68-36-22. De 8 ¤ à 30 ¤.

Valérie Lang et Andrzej Deskur dans « La Vénus à la fourrure ». BRIGITTE ENGUERAND

0123Vendredi 14 novembre 2008 25

Page 26: Le Monde 14 11

Magasins.– Point WC : 26, ave-nue des Champs-Elysées, 75008Paris. www.pointwc.com– Le Trône,85, rue d’Assas,75006 Paris.– Atypyk, www.atypyk.com, ouEspace Pierre Cardin, 1, avenueGabriel, 75008 Paris.

A lire. – Le Grand Livre du petitcoin, de Sabine Bourgey et AlainSchneider, éd. Horay, 2007,420 p., 22 ¤.– Toilettes du monde, de MornaE. Gregory et Sian James,éd. Hoëbeke, 2007, 254 p.,19,90 ¤.

Alain Lompech

S ans doute celui qui l’avaitabandonnée là avait-il euun remords au moment de

la jeter aux ordures. Se ravisant,il l’avait posée par terre, sur letrottoir, près des poubelles, maiscontre le mur dans un dernier ges-te protecteur.

Merci à ce donateur anonyme :cette orchidée est maintenant à lamaison. Elle a été retirée de sonpot, ses racines sèches ont été cou-pées avec une paire deciseaux bien affûtés ; celles quiétaient abîmées, ou très longues,ont été raccourcies.

Par chance, ce phalaénopsisn’avait reçu aucun soin de la partde celui qui le possédait. Il avaitencore les tiges ayant porté lesfleurs, toutes sèches. Il n’avaitpas reçu une goutte d’eau depuisdes semaines. Il ne risquait doncpas de pourrir. Ses feuilles étaientmême un peu ridées à cause de ladéshydratation.

Une bonne immersion pen-dant 24 heures dans un saladierempli d’eau dégourdie – ni froideni chaude, à peine tiède –, a réhy-draté la plante. Après quoi, elle aété placée dans un grand pot deplastique d’un genre un peu spé-cial, mais qui convient admirable-ment à ces végétaux qui ont

besoin d’air autour de leurs raci-nes. On vous le donne, ce secret ?Allez oui ! C’est la faisselle d’unpot de fromage blanc d’un kilo !C’est du plastique translucide,solide, percé de trous. Glissé dansun cache-pot un peu grand, posésur un caillou, c’est impeccable.On ne fait pas mieux !

Feuilles mortesCette orchidée a donc été plan-

tée dans un terreau spécial. Aucunarrosage n’a suivi cette plantation.Une bonne pulvérisation lui a étépréférée. Dans deux semaines, lesapports d’eau reprendront. Enquantité limitée : mais ces pulvéri-sations seront abondantes, particu-lièrement quand le chauffage estallumé, qui dessèche les plantes.

Ce qu’il y a de bien avec lesorchidées du genre phalaénopsis :c’est qu’elles résistent à tout, saufau froid, et tout particulièrementau manque d’arrosage si l’airambiant est raisonnablementhumide.

A quoi elles ressemblent quandelles sont en fleur ? De longuesfeuilles coriaces émergent une oudeux tiges qui s’incurvent à mesu-re qu’elles s’élèvent pour porter, àl’horizontale, des grandes fleursblanches, roses ou violettes qui res-semblent à des papillons. Mise enpleine lumière, la floraison de cet-

te orchidée dure trois mois.Dehors au jardin, un coup de

gelée est venu hâter la chute desfeuilles. Il y en a encore sur lesarbres, mais assez par terre pourglisser sur la terrasse. Un coup debalais de chiendent les en décolle,tandis qu’un dernier passage detondeuse éliminera celles qui s’ac-cumulent sur la pelouse. Le toutrejoindra le tas de compost quifume le matin à la fraîche, preuveque la fermentation fait sonœuvre. Avec un peu de chance, enle remuant délicatement on trouve-ra une couleuvre ou un grouped’orvets installés là pour l’hiver.Surtout ne pas les déranger si onen découvre et attendre alors leprintemps pour tout remuer, maiscontinuer à entasser les feuilles,les débris de coupes.

Quoiqu’on puisse aussi procé-der autrement. Les feuilles mor-tes, les résidus de taille de haies,broyés, peuvent être directementépandus au pied même des arbus-tes et dans les massifs autour desplantes et sur les vivaces dont lapartie aérienne disparaît l’hiver.La pluie, la neige, s’il en tombe, legel, le dégel, le soleil transforme-ront peu à peu ce bois haché quis’incorporera à la terre sans que lejardinier ait besoin de travailler.Et même, il limitera la proliféra-tion des mauvaises herbes. a

Jardins&jardinières

La résurrection de l’orchidée

Lundi Mardi Mercredi Jeudi VendrediRoues libres Santé&forme A table A la maison En voyage&vous

Les toilettes seraient-ellesdevenues le dernierendroit à aménager dela maison ? Au confortet à l’hygiène de ce lieu,

certainsrêventmaintenantd’ajou-ter de la décoration.

Des magasins s’en font mêmeune spécialité. C’est le cas dePoint WC, qui ose carrément lesChamps-Elysées, à Paris ! Pour1,50 euro, le client peut y tester ledernier cri en matière de lieuxd’aisance. Des cabines aux airs deboudoir pour les « ladies ». Les« gentlemen », eux, peuventessayer l’urinoir à mouche incor-porée pour apprendre à ces mes-sieurs à viser juste.

Anabella, gardienne de ce lieun’enrevient paselle-mêmedusuc-cès : « Nous avons des rouleaux depapier de toutes les couleurs, maisles plus demandés sont ceux impri-més de dollars, d’euros et de grillesde sudoku. » Des fantaisies factu-rées entre 5 euros et 10 euros lerouleau. Un luxe que n’auraientpas imaginé nos ancêtres qui recy-claient ainsi et avant l’heure lesvieux journaux.

Les étagères de ce magasin peuordinaire débordent de gadgetsimprobables. Une lumière quel’on fixe sur le rabat et qui, une foiscelui-ci relevé, éclaire la lunette.« Pratique pour la nuit », prétendAnabella, ou encore ce dévidoir àpapier(Icarta) sur lequel il est pos-sible de brancher un iPod.

Les valets et porte-papiern’échappent pas à cette déferlan-

te : girafes, moutons, grenouilles,une véritable arche de Noé pourdérouler le papier hygiénique. Ontrouveaussi dessupportssophisti-qués pour accueillir balayettes oumagazines. Aux touristes, nom-breux à visiter les lieux, on ose

offrir un verre de la cuvée de vinbaptisée « La pissotière de l’impé-ratrice »…

Chez Atypyk, la touche artisti-que pour toilettes se veut aborda-ble : 15 euros pour le sticker intitu-lé « Fountain 2008 », qui rend

hommage au fameux urinoir deMarcel Duchamp.

Dans Toilettes du monde (édi-tion Hoëbeke) les deux auteursMorna E. Gregory et Sian James,écrivent : « Le sujet n’est enaucun cas aussi futile qu’il pour-rait le paraître. Les toilettes sontdes fenêtres permettant d’observerune population donnée. »

Fini le temps du blanc cliniquedans les lieux d’aisance. Les cuvet-tes se colorisent ou changent dematière avec ce modèle en acierinoxydable à la finition satinée(chez Loggere). Les lunettes n’enfinissent pas de se diversifier :dorée,argentée,enfausseporcelai-ne, en bois d’acajou ou drôles (filsde fer barbelés moulés dans duplastique transparent, ou fauxpoissons nageant dans une eautoujours bleue, etc.)

Depuis longtemps, les Japonaissont passés maîtres en matièred’innovation. Peu connue il y aencore trois ans, leur productiontrès sophistiquée se vend demieux en mieux, selon Jun et Jean-LouisLamarque,gérantsdumaga-sin Le Trône, rue d’Assas, à Parisdans le 6e arrondissement.

Avec ces toilettes, papier etbalayettedisparaissent.« Unedou-chette rince et nettoie délicatement à

distance, puis sèche les parties inti-mes », explique la brochure. Leprixvariede700 eurospour lesim-pleabattantà fixer sur des toilettestraditionnelles, à 7 300 eurospourlemodèle leplushautdegam-me et sans doute le plus écologi-que. Il utilise seulement 1,6 litred’eaucontre6 litrespourunechas-se d’eauordinaire. Chaque cuvettepeut faire office de bidet, les lunet-tes sont chauffantes et une télé-commande permet de choisir lapuissance et la température du jet.

Sur le palierLes toilettes sont même

gagnéespar lesexigencesenviron-nementales. Un prototype « solai-re et écocitoyen », destiné au mobi-lier urbain, autonome en eau et enélectricité, vient d’être mis aupoint par l’entreprise landaiseMPS SAS.

Il semble loin le temps où, enFrance, le sujet des toilettes étaittabou. C’était l’époque où il fal-lait aller sur le palier ou au fonddu jardin. Aujourd’hui, on soignel’espace : certains y mettent desphotos de famille ou des affiches,d’autres y installent une biblio-thèque ou les tables de multiplica-tion à l’intention des enfants.

Comme l’écrivent SabineBourgey et Alain Schneider dansLe Grand Livre du petit coin (édi-tions Horay), « nos waters endisent long sur nous, ils sont révéla-teurs de notre personnalité et denotre propreté ». a

Cécile Urbain

CE WEEK-END

+0123du design

l�anthologie du design en 20 volumes

*en plus du Monde et du Monde2

Les toilettes gagnées par la décorationDes magasins se spécialisent dans l’aménagement et les accessoires pour les lieux d’aisance

Pratique

Cabines « zen » et « hightech » de la boutique PointWC, sur les Champs-Elysées. DR

26 0123Vendredi 14 novembre 2008

Page 27: Le Monde 14 11

S i la course à la MaisonBlanche est finie, l’« Oba-mania » joue encore à

plein. Pour preuve ? Les hom-mes bosniaques vont pouvoirenfiler un costume Obama, dunom d’une nouvelle ligne devêtements créée par la plusancienne manufacture textiledu pays. « Nous avons choisi lenom Obama car il était certainqu’on allait attirer l’attention.Les gens à travers le monde ontobservé de très près l’élection prési-dentielle américaine », a expli-qué le 12 novembre à l’AFP unresponsable de l’entrepriseBorac. Les costumes Obama sevendent déjà bien en Bosnie eten Croatie. Borac espère donc

conquérir d’autres marchés. Cethiver, les citoyens de la planètepourront aussi porter les bas-kets Obama signées Nike, enattendant la petite robe Castel-bajac de l’été 2009, à l’effigie dufutur président américain. La« marque » Obama se vendbien. Sur le site Internet Sto-re.barackobama.com, certainsdes articles (tee-shirts, sacs, cha-peaux…) dessinés par MarcJacobs, Zac Posen, Diane vonFurstenberg ou même Beyoncépour soutenir le candidat sontépuisés. La collection est défini-tivement devenue collector, aumoment même où Obama a étéélu premier président noir del’histoire des Etats-Unis. a V. L.

&vous

CETTE SEMAINEVOUS OFFRE

Disponible chez votre marchand de journauxdu 13 au 26 novembre 2008

GRATUIT avec

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Wolfgang Amadeus Mozart, Ludwig van Beethoven, EdvardGrieg, Antonin Dvorak, Guiseppe Verdi, Domenico Cimarosa, Jacques Offenbach, Frédéric Chopin, Antonio Vivaldi, Franz Liszt, Johann Sebastian Bach, Camille Saint-Saëns, Erik Satie.

Les jeunes le trouvent moderne. Pierre Paulin est pourtant né en 1927 et ses premièrescréations remontent au tout début des années 1950. Mais voilà. Celui qui aménagea deuxfois l’Elysée – en 1971 pour Georges Pompidou et en 1984 pour François Mitterrand – estsurtout l’homme de meubles devenus cultes. Ses chaises, ses fauteuils et ses canapés auxformes rondes et fluides, revêtus de tissus extensibles colorés, font un malheur en France,autant ou plus encore que dans les années 1960-1970. La galerie Perimeter ne pouvait fai-re l’impasse sur ce maître de la modernité indémodable. Mieux qu’une rétrospective del’œuvre de Pierre Paulin, la galerie a préféré présenter quatre créations du designer quin’ont jamais été éditées. Parmi elles, deux sofas dessinés en 1967 et 1969 – le Face-à-faceet sa version opposée, le Dos-à-dos (photo) – qui seront pour la première fois commercia-

lisés à 100 exemplaires par Perimeter. Latable basse Cathédrale en aluminium ano-

disé recouverte d’une dalle de verre,ainsi que sa version haute, créées parPierre Paulin en 1982, seront aussi édi-

tées et présentées en 12 exemplairespar la galerie. a V. Ca. (PHOTO DR)

Pierre Paulin éditions 2008, du 14 novembreau 10 janvier 2009 à la Galerie Perimeter, 47, rue

Saint-André-des-Arts, 75006 Paris (perimeter-editions.com).

A la porte de Versailles, àParis, le Salon de la photo,qui se tient du jeudi

13 novembre au lundi 17 novem-bre, devrait accueillir 50 000 visi-teurs. Malgré la crise, les Françaiscontinuent à s’équiper en appa-reils photo numériques (APN).

Certes, sur les neuf premiersmois de l’année, les ventes ontdiminué de 2 %, mais il s’en estquand même écoulé, au cours decette période, quelque 3 millionsd’unités. Plus des deux tiers desFrançais possèdent un APN et15 % des foyers envisagent d’enacheter un dans les six prochainsmois, selon leBaromètrede lapho-to 2008, commandé à Ipsos parl’Association pour la promotionde l’image.

Jusqu’à récemment, il s’agis-sait de remplacer son appareilargentique. Ce n’est plus le cas.D’abord, parce qu’il reste des irré-ductibles fidèles à la pellicule.Pour la première fois depuis l’ap-parition de la photo numérique, lapart de ceux qui ne possèdentqu’un appareil photo argentiqueest demeurée stable, à 24 %.Ensuite, parce que près d’un tiersdes acheteurs renouvellent leurmatériel numérique pour desappareils plus sophistiqués.

Ce mouvement profite auxmodèles reflex, dont les ventesdevraient progresser de 20 % cet-

teannée.Cesappareils–parexem-ple le EOS 5D de Canon avec uncapteur de 21 mégapixels et lapos-sibilité de réaliser des vidéos enhaute définition – sont surtoutréservés aux professionnels, neserait-ce qu’en raison de leur prix(2 900 euros pour le dernier-né deCanon). Mais ils séduisent de plusen plus de jeunes couples sansenfants ou des retraités adeptes devoyages et qui veulentramener des clichésd’excellente qualité.

Il n’estplusnécessai-re d’être un expert poursavoirexploiter lescapa-cités des reflex. Ces boî-tiers intègrent désor-mais des préréglagesadaptés à différentes scènes.

« La prise de vue sur les reflex estquasiment instantanée, à la diffé-rence d’autres appareils numéri-ques.Parailleurs, ils offrentunepro-fondeur d’image et un respect descouleurs incomparables », assureMathieu Lanier, chef de produitphoto chez Sony. Sans compter labaisse des prix : l’Alpha 350 deSony est proposé, pour les fêtes,avec objectif, autour de 600 euros.

Une solution moins onéreuse(unpeu plus de 300 euros) consis-te à préférer les « bridges », cesmodèles hybrides entre le reflex etle compact. « Ces appareils trèspolyvalents permettent notamment

d’obtenirun champoptique très lar-ge sans avoir à changer d’objectif »,note M. Lannier.

Les compacts ne cessent de sesophistiquer pour un prix qui necesse de baisser. Les stabilisateursd’images se généralisent, mêmepour les modèles les moins chers.Les capteurs continuent d’être deplus en plus puissants : plus de10 mégapixels.

« Ce n’est pas inutile,car une majorité de pho-tos sont retouchées, cequi peut engendrer desproblèmes d’impressionsi l’image n’est pas assezdétaillée au départ »,souligne OlivierClaude, le directeur

général de Kodak France. Enfin,les compacts sont dotés de fonc-tions qui simplifient la prise desclichés,commeladétectiondesou-rire en mode portrait.

La course à la sophistication estd’autant plus intense que les com-pacts sont désormais concurren-cés par les téléphones. La part defoyersdétenantuntéléphone équi-pé d’un APN ne cesse de progres-ser, évoluant, en l’espace d’un an,de 51 % à 59 %.

Ces téléphones font d’excellen-tes photos avec des capteurs quiatteignent 8 mégapixels. Unniveau de technologie compara-ble à celui des appareils com-

pacts premiers prix vendus àNoël 2007.

Surtout, le « caméraphone »est très apprécié par les jeunes,près de 20 % l’utilisent tous lesjours. Ils s’en servent comme unoutil de prise de vue sur le vif. Unquart des étudiants mettent enligne leurs clichés sur des sitescommunautaires, comme Face-book, une fonction qui est inté-grée dans les nouveaux télépho-nes mais plus rarement dans lesAPN d’entrée de gamme. a

Joël Morio

Aujourd’hui

L’« Obamania » côté chiffonsDes appareils photo à la foisplus simples et plus sophistiquésA Paris, les boîtiers reflex sont les vedettes, jusqu’au 17 novembre, du Salon de la photo

Gastronomie : feuilles d’automneLes crus 2009 des Champérard, GaultMillau, Pudlo et Bottin sont parus

L es principaux guides gastro-nomiques 2009 autres que leMichelin – qui, lui, paraît au

printemps – donnent chaqueannée rendez-vous à leurs lecteursà l’automne. Lequel choisir, enfonction de quels critères et pourquel usage ?

Le Champérard recense restau-rateurs, artisans et producteurs. Ilseveutleguide« delagrandecuisi-ne pour tous », avec pour étendardDidier Elena (Les Crayères àReims) et trois autres promus,Nicolas Stamm (La Fourchette desducs, à Obernai), Yannick Alleno(Le Meurice, Paris 1er) et AlexandreBourdas (Sa.Qua.Na à Honfleur).Grand absent de ce guide, MarcVeyratbénéficie toujours en revan-che de la note de 20 sur 20 dansl’édition2009duGaultMillau.Unecuriositédevenue au fildes ans unebanalité, malgré les rodomontadesde Christian Millau, ancien patrondu guide.

LeGaultMillau, qui appartient àunindustrielégalementpropriétai-re de domaines viticoles, revendi-queuneéthiquefondéesurl’anony-matet l’indépendance de ses choix.Le « cuisinier de l’année » est

Mauro Colagreco, jeune Italien néen Argentine, installé depuis peuau Mirazur, à Menton. Sa cuisineest atypique, parfois inspiréequand le produitprend le passur latechnique. Sa meilleure sourced’inspiration,cesont lespetitslégu-mes de l’arrière-pays niçois lors-que Mauro se souvient des leçonsd’Alain Passard.

Actualité mouvanteDans le Pudlo-Paris 2009,

l’auteur, Gilles Pudlowski, se pro-mène avec nostalgie dans un Parisidéal et met en avant cette année lacuisine de femme avec Flora Miku-la (Les saveurs de Flora, Paris 8e) etles « bistros gastro », dont Stépha-ne Jégo (Chez l’ami Jean, Paris 7e)est le chef de file.

Le Bottin gourmand, héritier duKléber de Jean Didier, a réduit sonformat, tout en conservant de pré-cieuses notices sur le tourisme et lagastronomie locale, etmet enavantson site Internet (Bottingour-mand.com), en prise avec l’actuali-témouvantedelarestauration.Sonclassement thématique (auberge,bistro, restaurant de quartier, tablehistorique…)est judicieux.Ilautori-

se un certain éclectisme, et le voisi-nage, par exemple, de la cuisinequatre étoiles de Thierry Marx àCordeillan-BagesaveccelledeJean-PaulBarbierauLiond’or(uneétoi-le) à Arcins (tous deux dans leMédoc).

Les guides Champérard, Gault-Millau, Bottin gourmand et PudloParis ont par ailleurs eu quelquesdifficultés à éviter de vanter lesmérites de restaurants fermés aumoment de leur parution. Il n’estpas aisé de suivre les aléas destables à la mode pendant une oudeuxsaisons,quidisparaissentfau-te de clients, même lorsqu’ellesjouissent de patronages célèbres,commeleToustemd’HélèneDarro-ze (Paris 5e). La même mésaventu-re était arrivée au guide Michelinqui accordait en mars un « Bibgourmand » à L’Œnothèque(Paris 9e), fermé trois semainesauparavant. a

Jean-Claude Ribaut

Champérard 2009 (PUF, 29 ¤).GaultMillau France 2009 (29 ¤).Le Bottin gourmand 2009 (30 ¤).Pudlo Paris 2009 (MichelLafon,18,50 ¤).

Il n’est plusnécessaire d’êtreun expert poursavoir exploiterles capacitésdes reflex

Editions inédites de tableset sofas signés Pierre Paulin

0123Vendredi 14 novembre 2008 27

Page 28: Le Monde 14 11

Dominique Dhombres

C ’est de loin la série téléviséela plus difficile à suivre ence moment. Je veux parler

du feuilleton « Ségolène et lesautres ». On se demande où lesscénaristes vont chercher tout ça.Est-ce que vous avez compris untraître mot du dernier épisode,diffusé mercredi soir en primetime sur TF 1 ? « Je veux être ras-sembleuse pour tous, pour deux,pour trois, pour quatre. J’ai doncrencontré Bertrand, Martine,Benoît et les autres », disait Ségo-lène. Elle ne donnait pas lesnoms, seulement les prénoms,partant du principe que nous lesconnaissons tous parfaitement,intimement même. C’est vrai,quoi, nous passons notre vie lesyeux rivés au sort de Bertrand,Martine, Benoît et les autresenfermés dans leur loft de la ruede Solférino ! Vont-ils faire lapaix avec Ségolène ? Vont-ilsenfin se réconcilier avec elle ? Ilsn’ont plus beaucoup de tempspour jouer les familles heureuses.Et ils n’ont pas vraiment l’air, etmême pas l’air du tout, de vouloirle faire. Bertrand est partagé,Martine encore plus, et Benoîtcarrément hostile.Rassembleuse pour quatre ! Celaveut dire quoi, exactement, cetteformule ? Rassembleuse à leurplace, malgré eux, à leur corpsdéfendant ? Laurence Ferrari s’ef-forçait de comprendre. Ségolèneest-elle candidate, oui ou non, auposte de premier secrétaire duParti socialiste ? L’intéressée

était prête à répondre, elle étaitvenue pour cela, elle allait répon-dre « dans quelques secondes ».C’est le principe du feuilleton.Sans suspense, il n’y a plus deplaisir. Elle devait donc dired’abord, en priorité, en urgence,toutes affaires cessantes, avantde passer à la suite, tout le malqu’elle pensait des banques quis’acharnent sur les ménages enproie au surendettement. Ellesont perdu des milliards dans desspéculations douteuses et fontsubir les pires misères, pour quel-ques euros de découvert, aux« petits, aux pauvres et auxmoyens ». La tarification bancai-re en vigueur est « scandaleuse »et doit cesser sur le champ. Cetteaffaire la met particulièrement encolère. Certes ! Mais sa candida-ture ? C’est là que cela devientcompliqué. Elle en a envie, maiselle n’en fait pas un préalable,tout en la souhaitant vraiment,sans vouloir l’imposer pour lemoment. La balle est dans lecamp de Bertrand, Martine,Benoît et les autres. A eux de voir,comme on dit à la SNCF ! Lauren-ce insistait.Peine perdue ! Elle ne répondraitpas, un point c’est tout. Elle avaitmis sa candidature « au Frigidai-re » il y a deux mois. Cette fois-ci,elle disait qu’elle n’était pas« une femme d’appareil ». Etait-ce un signe ? C’est décidémenttrès dur à suivre. Il y a un risque.On le voit bien, sur TF 1 égale-ment, avec la descente aux enfersde la « Star Ac’ ». Si le téléspecta-teur se lasse, il zappe. a

LOTO Nº 97

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2 4Realise par Koalog (http://sudoku.koalog.com)

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DifficileCompletez toute lagrille avec des chiffresallant de 1 a 9.Chaque chiffre ne doitetre utilise qu’uneseule fois par ligne,par colonne et parcarre de neuf cases.

SUDOKU Nº 938 Solution du no 937

Résultats du tirage effectué mercredi 12 novembre 2008.23, 34, 35, 40, 45 ; numéro chance : 5.Rapports :5 bons numéros et numéro chance : 3 000 000,00 ¤ ;5 bons numéros : pas de gagnant ;4 bons numéros : 2 611,30 ¤ ;3 bons numéros : 15,00 ¤ ;2 bons numéros : 6,80 ¤ ;Numéro chance : grilles à 2 ¤ rembourséesJoker : 6 163 242

Vu&commenté

« Ségolèneet les autres »

Les soirées télé

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En France

Météorologue en direct au 0899 700 703

(1,34 € l’appel + 0,34 € la minute) 7 jours/7 de 6h30-18h

Région

Nord-Ouest

Ile-de-France

Nord-Est

Sud-Ouest

Sud-Est

www.meteonews.fr

Front chaud Front froid

DépressionAnticyclone

Occlusion Thalweg

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averses éparsesensoleilléensoleilléensoleillépluvieuxensoleilléensoleilléaverses éparsesbeau tempsensoleillééclairciesaverses modéréesbeau tempsbeau tempsfaible pluieorageux

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LilleGrisaille et humidité

ST-SIDOINE

COEFF. DE MARÉE: 100

En Europe

LEVER: COUCHER: COUCHER:

LEVER:

Le

12h TU

L'humidité restera bloquée près du sol par l'anticyclone et la grisaille sera très présente sur les trois-quarts du pays, notamment au nord de la Loire et sur les régions du sud-ouest où les éclaircies seront inexistantes. Quelques crachins se produiront localement, surtout du nord-ouest aux Ardennes. Les régions du sud-est et les reliefs passeront en revanche la journée sous le soleil. Les températures seront un peu au-dessus des moyennes saisonnières.

LeLotoLes résultats sont publiés dans cette page dans nos éditions datéesdimanche-lundi, mardi, mercredi et vendredi

LesjeuxTous les jours Mots croisés et SudokuSamedi daté dimanche-lundi Echecs

I

II

III

IV

V

VI

VII

VIII

IX

X

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Solution du n° 08 - 268HorizontalementI. Déhanchement. - II. Ecureuil.Née. - III. Toitures. Vil. - IV. Rut.Fa. Eloge. - V. Atre. Tin. Lev. -VI. Ceint. Bête. - VII. Tue. Avoué.Cs. - VIII. Errata. Rimai. - IX.Eléis. Nono. - X. Résurrection.

Verticalement1. Détracteur. - 2. Ecouteur. - 3.Huîtrières. - 4. Art. En. Alu. - 5.Neuf. Tâter. - 6. Curât. Vair. - 7.Hie. Ibo. Se. - 8. Elseneur. - 9.Teint. - 10. Envolé. Moi. - 11.Neige. Cano. - 12. Télévision.

MOTS CROISÉS PROBLÈME N° 08 - 269

I. Agréable sous la dent, à l’œilet à l’oreille. II. Sortie doulou-reuse. Corrompu par l’extérieur.III. Parfois partagée en fin derepas. IV. Affluent de l’Adour.Déformés à l’ouverture. V.Encore brut. Suprême sérénité.VI. Elèves et maître. Forme d’a-voir. VII. Tell Muqayyar aujour-d’hui. Assuras le maintien. Sesbulles sont légères. VIII.Enfants terribles du Ciel et dela Terre. Chaudement couvert.IX. Protège le chevalier.Maintien provisoire. Pris en vol.X. Opérations qui ne manquesûrement pas de charmes.

1. Prendre le dessus en tra-vaillant. 2. A lâché la plume etle papier pour le clavier et l’é-cran. 3. Pas du tout fréquenta-ble. Cuvette. 4. Sans fantaisie.Sur l’avant-bras. 5. Vaut sûre-ment le détour. Particule. 6.Prêtes à agresser à toutmoment. 7. Entendra commeavant. Règle sur table. 8. Grosporteur en mer et dans les airs.Courrier indésirable. 9. Fin defilm. Vue à revoir. Cacarde à labasse-cour. 10. Bien accueilli.11. Sans effets. Préposition.Point dans l’eau. 12. Ancêtres.

Philippe Dupuis

HORIZONTALEMENT VERTICALEMENT

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 1 1 12

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Vendredi 14 novembreTF 1

20.50 Star Academy.Présenté par Nikos Aliagas. Invités : Shaggy,Patricia Kaas, Natasha Saint-Pier, Katy Perry...23.20 Sans aucun doute.Présenté par Christophe Moulin (135 min).

FRANCE 2

20.50 Tous au théâtre !Divertissement présenté par Laurent Ruquier.23.05 Café littéraire. Magazine.Comment parler de religion en littérature ? ;La Correspondance, un genre en voie dedisparition.0.55 Journal, Météo (15 min) d.

FRANCE 3

20.55 Thalassa.Sur le sentier du littoral : d’Hendaye à ArcachonMagazine présenté par Georges Pernoud d.22.55 Météo, Soir 3.23.25 Comme un vendredi.Présenté par Samuel Etienne. Avec Rama Yade d.0.30 Toute la musique qu’ils aiment...Magazine. Invitée : Renée Fleming (65 min).

CANAL +

20.50 88 minutesFilm Jon Avnet. Avec Al Pacino (2007) 2 d.22.40 Spécial investigation.Les Coulisses de la libération d’Ingrid Betancourt.0.00 Les Films faits à la maison.0.30 Sans moiFilm Olivier Panchot. Avec Yaël Abecassis,Clémence Poésy (Fr., 2007, 90 min) 0 d.

ARTE

21.00 Château en Suède.Téléfilm. Josée Dayan. Avec Jeanne Moreau d.22.35 Tracks. Magazine.23.25 Le Mort-Vivant a a

Film Bob Clark. Avec John Marley, Richard Backus,Lynn Carlin, Henderson Forsythe (EU, 1974, v.o.).0.55 Mon trésor a

Film Keren Yedaya. Avec Ronit Elkabetz, DanaIvgy (Israël - France, 2004, 125 min, v.o.).

M 6

20.50 NCIS/Enquêtes spéciales.Etroite surveillance 0 Amis et amants 0 Mortà l’arrivée Série (S5, 12/19 ; S4, 15 et 16/24) d.23.15 Sex and the City.Abstinences. Avoir la foi Série (S1, 60 min) 0 d.

Jeudi 13 novembreTF 1

20.50 Julie Lescaut.Alerte enlèvement Série. Pierre Aknine. AvecVéronique Genest, Jennifer Lauret (Fr., 2008) d.22.30 La Méthode Cauet.Invités : François Berléand, Corinne Touzet,Natasha St-Pier, Franck Dubosc... (135 min).

FRANCE 2

20.50 A vous de juger.Crise financière, crise économique, à quoi faut-ils’attendre ? Magazine. Invités : Martine Aubry,Christine Lagarde, Philippe Dupont.23.20 Infrarouge.L’Amérique en guerre Documentaire (95 min) 0 d.

FRANCE 3

20.55 Le Malade imaginaire.Téléfilm. Christian de Chalonge. Avec ChristianClavier, Marie-Anne Chazel (France, 2008) d.22.55 Keno, Soir 3.23.25 Ce soir (ou jamais !).L'Impact de la crise financière et économique surles pays du Sud Présenté par Frédéric Taddeï.0.45 NYPD Blue.Affabulations Série (S11, 8/22, 45 min) d.

CANAL +

20.50 Dirty Sexy Money.Le Mariage. La Maison de campagne Série(S1, 7 et 8/10). Avec Peter Krause (2007).22.15 Cold Case.Famille 8108 Série (S5, 11/18, 2007) 0 d.23.00 Poker.World Poker Tour (90 min).

ARTE

21.00 Les Petites CouleursFilm Patricia Plattner. Avec Anouk Grinberg,Bernadette Lafont (Fr. - Sui., 2002) d.22.35 Grand format.Mon usine en Chine Documentaire (All., 2006).0.10 Paris-Berlin, le débat.Demain, tous métis ? Invités : Vincent Cespedes,Eric Zemmour, Rokhaya Diallo... (65 min).

M 6

20.50 Incroyable talent.La Finale Présenté par Alessandra Sublet.23.00 Le Monde a un incroyable talent.0.20 Hypnotic a

Film Nick Willing. Avec Goran Visnjic, PaddyConsidine (GB, 2002, 120 min) 2 d.

Météo&Jeux Ecrans

MOTS CROISÉS Nº 08 - 269

28 0123Vendredi 14 novembre 2008

Page 29: Le Monde 14 11

Carnet

Nos services-------------------------------------------------Lecteurs• AbonnementsTél. : 0-825-000-778(0,15 € TTC/min)www.lemonde.fr/abojournal

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Grand reportagePeut-on tout confierà Google ?

EnquêteOn n’est jamais seulsur World of Warcraft

ArchivesRobot : de la fictionà la science

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Faites partde vos événementspar e-mail : [email protected]

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Tarifs 2008 (prix à la ligne)

Naissances, Anniversaires de naissance, Mariages, Fiançailles… : 18 g TTC

Décès, remerciements, Avis de messe, Anniversaires de décès, Souvenirs : 24 g TTC

Thèses : 15 g TTC

Réduction abonnés

Un justificatif d’identité sera demandé.

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Le Carnet

AU CARNET DU «MONDE»

Naissances

L'aube était belle.

Clara,Zelda, Nausicaa BERJEAUT,

fille deJulie BIRMANT et Julien BERJEAUT,

est apparue le 24 octobre 2008, à Paris.

Christiane et Régis ALLEMANDCatherine et Jean-Claude DOSDAT

sont heureux d'annoncer la naissance deleur petite-fille,

Juliette,

le 17 octobre 2008, à Lyon

chez

Béatrice et Laurent.

Patricia et Vincent COULOMB

ont la joie d'annoncer l'arrivée de

Louise,

96, rue Guyot,92270 Bois-Colombes.

Anniversaires de naissance

14 novembre 1928-14 novembre 2008.

Bon anniversaire,

Papa, Pépé, Péwé,

pour tes quatre-vingts ans !

De la part deTa fille, ton gendreEt tes petits-enfantsEt « assimilés »

qui t'aiment.

DécèsDjouheur Behillil,

son épouse,Fatima Behillil,

notre aïeul,M'Hamed Behillil,

son fils aîné,Abdelwahab et Fatima Behillil,Abdelhafid et Sylvie Behillil,Bouziane et Emmanuelle Behillil,Hesmahane Behillil,

ses enfants,Sofia, Sihame, Sirine, Julie, Adam,

Mona, Elias, Linda, Marwan, Fanny,Melissa, Fjona, Yasmine, Dorian, Faris,ses petits-enfants,

Zohra, Mohamed, Aïcha, Nana,ses sœurs et frère,

Abdallah Behillil,son cousin et frère,

Ses amis nombreux d'ici et d'ailleurs,Tous ceux qu'ils l'ont aimés et l'aiment,

ont l'immense tristesse d'annoncer lerappel aux Anges de

Youcef BEHILLIL,le plus doux et le plus honnête

des hommes,bâtisseur d'un monde humaniste

et tolérant,

survenu le 11 novembre 2008, en pleinecommémoration, à l'âge de soixante-neufans.

Conformément à son vœu, lacérémonie religieuse et son inhumationauront lieu sur la terre de ses ancêtresarabo-andalous à Sidi M'Hamed(Mostaganem - Algérie), près de son pèreet de sa mère adorés.

« Il était notre étoile,son firmament était le nôtre,sa lumière et sa générosité,

sa joie nous resteront. »

Behillil,91, rue de Rennes,75006 Paris.

Francine,son épouse,

Geneviève,sa fille,

Henri,son fils,

Ses neveux et nièceset leurs enfants,

Ses amis,

ont le profond chagrin de faire part dudécès de

Robert CASANOVA,professeur de lettres, docteur ès-lettres,

ingénieur au CNRS,écrivain,

survenu le 8 novembre 2008, dans saquatre-vingt-cinquième année.

Les obsèques, suivies de la crémationse sont déroulées à Marseille, dans la plusstricte intimité.

Ses cendres seront déposées en Corsedans la Vallée de Cagnano qu'il a tantaimée.

Mme Casanova et ses enfantsexpriment leur gratitude au docteurJean-Pierre Arnaud, pour ses bons soinset son soutien sans faille.

Lucette,Ses enfantsSes petits-enfants,Ses arrière-petits-enfants,Odette,Tous les siens,Tous ses amis,

ont la profonde tristesse de faire part dudécès de

Pierre CHAMBARD.

La cérémonie religieuse sera célébréele lundi 17 novembre 2008, à 10 h 30,en l'église de Saint-Gratien.

Nous avons la tristesse de faire part dudécès de

M. Hama CISSE,pharmacien,

survenu le 7 novembre 2008, à l'âge desoixante ans, des suites d'une longuemaladie.

De la part deCatherine Cisse,

sa femme,Abdourahamane et Sekou,

ses filsEt de sa famille.

L'inhumation aura lieu à Bamako.

Cet avis tient lieu de faire-part.

Docteur Cisse et ses enfants,BP 1851,Bamako (Mali).

Les familles Thieblet, Damas, Bentz et Pigalle

ont la douleur de faire part du décès de

Anne-Marie DAMAS,

survenu le 9 novembre 2008, à Paris.

Une bénédiction aura lieu aufunérarium des Batignolles, 1, boulevard duGénéral Leclerc, à Clichy (Hauts-de-Seine),le samedi 15 novembre, à 9 h 30.

La cérémonie religieuse sera célébréeà 14 h 30, en l'église d'Illiers-Combray(Eure-et-Loire), suivie de l'inhumationdans le caveau de famille.

Fleurs naturelles.

S. Thieblet Damas,49, boulevard Jean Jaurès,28200 Châteaudun.

Claude, Monique DameryEt son épouse,Sa famille,

ont la douleur de faire part du décès de

Denis DAMERY,

le 29 octobre 2008, à l'âge de cinquante etun ans.

30, rue Mozart,92330 Sceaux.

Ciboure (Pyrénées-Atlantiques)

Françoise Olano,Alain Demoisson,Jean-Michel Demoisson

font part du décès de leur mère,

Mme Marcelle DEMOISSON,née CABESSA,

survenu le 6 novembre 2008, à l'âge de quatre-vingt-treize ans.

Grenoble. Paris.

Mme Suzanne Durand,sa mère,

M. et Mme Philippe Schweitzer,M. et Mme Claude Molines

et leurs enfants,Roger et Gabrielle Dameron,Catherine Juliette et Agathe,

ses nièceset leurs familles

Ainsi que parents et amis,

ont la grande peine de faire part du décèsde

Mme Marie-Geneviève DURAND,ingénieur de recherches à l'université

Joseph Fourrier de Grenoble,Insitut de géographie alpine,

Prix Olivier de Serresde l'Académie française d'agriculture,

ancien membredu Conseil économique et social

de la Région Rhône-Alpes,

survenu à l'âge de soixante-neuf ans.

Les obsèques auront lieu le samedi15 novembre, à 10 heures, en la sallede cérémonie du centre funéraireà La Tronche (Grenoble, Isère) et le mardi18 novembre, à 9 h 30, en l 'égliseSaint-Ambroise, à Paris 11e.

Uzès (Gard).

François Grémy,son époux,

Michel et Christine,Isabelle et Philippe,Béatrice,Geneviève et Pierre,

ses enfants,

Julie, Claire et Marine,ses petites-filles,

La famille Mazières,

ont la tristesse de faire part du décès de

Françoise GRÉMY,née MAZIÈRES,

chevalier de la Légion d'honneur,chevalier de l'ordre national du Mérite,

ancienne présidente nationalede la Fédération nationale

Sésame autisme,fondatrice et première présidentede l'association Sésame autisme

Languedoc-Roussillon,

survenu le 11 novembre 2008, à l'âge desoixante-dix-neuf ans.

La cérémonie religieuse aura lieu levendredi 14 novembre, à 14 h 30, en lacathédrale Saint-Théodorit d'Uzès (Gard).

Des dons peuvent être versés en faveurde l 'association Sésame autismeLanguedoc.

17, chemin de l'Escalette,30700 Uzès.

Le présidentEt les membres du

conseil d'administration de la Fédérationfrançaise sésame autisme (FFSA),

Le présidentEt les membres du

conseil d'administration de l'associationSésame autisme Languedoc,

Les résidents,Leurs famillesEt l 'ensemble du personnel des

établissements spécialisés qu'elle a créés,

ont la grande tristesse de faire part dudécès de

Mme Françoise GRÉMY,chevalier de la Légion d'honneur,

chevalier de l'ordre national du Mérite,ancienne présidente de la FFAPI

(à l'origine de la FFSA),fondatrice et 1re présidente

de Sésame autisme Languedoc,

survenu le 11 novembre 2008, dans saquatre-vingtième année.

Ils n'oublieront pas la constance etla fermeté de son engagement militantau service des personnes handicapéespar suite d'autisme depuis quarante ans,et s'associent à la douleur de son mari,de ses enfants et de ses petits-enfants.

La cérémonie religieuse aura lieule vendredi 14 novembre, à 14 h 30,en la cathédrale d'Uzès (Gard).

Sésame autisme Languedoc,Bâtiment administratif,Départementale 135,30600 Vauvert.

On nous prie d'annoncer le décès de

Marie-Suzanne MONNIER,née VERGNAUD,

survenu le 10 novembre 2008, à sondomicile, dans sa quatre-vingt-dix-huitième année.

De la part deDaniel, Bernard, Jean-François,

Patrick Monnier,ses filset leurs familles,

Un service religieux sera célébré autemple de Saint-Foy la Grande (Gironde),le 14 novembre, à 10 h 30.

« Mon âme bénis l'Éternelet n'oublie aucun de ses bienfaits »

Psaume 103, verset 2.

2, rue Théodore Toulouse,33220 [email protected]@[email protected]

Raphaël Raymond SULTAN,éducateur à l'Education surveillée

(ministère de la justice),de 1952 à 1962, en Algérie,de 1963 à 1976, en Essonne,

chef de serviceet directeur d'établissement,

de 1977 à 1987,à l'Administration centrale,

directeur des services extérieurs.Militant syndical, mutualiste, associatif,

passionné de cinéma, d'architectureet d'histoire contemporaine,

décédé le 3 novembre 2008,dans sa quatre-vingt-deuxième année.

Brigitte Vienne-Mauguière,son épouse,

Sabine Roger-Vienne, Sophie et Simon,Jacques et Laurence Vienne-Cuvelier,Charlotte, Matéo et Nicolas, Guillaume Vienne,

ses enfants et petits-enfants

ont la tristesse de faire-part du décès de

Daniel VIENNE,

survenu le dimanche 9 novembre 2008, à l'âge de soixante-treize ans.

Une messe d'adieu sera célébréele samedi 15 novembre, à 9 h 30,en l'église Notre-Dame-de-Beauregard,à la Celle-Saint-Cloud.

1, allée de la Charbonnière,78430 Louveciennes.

Sarah et Tristan Soler,Lou et RomanToute sa familleSes amis

ont la très grande tristesse de faire part de la disparition de

Martine WERTHMÜLLER,

survenue le 8 novembre 2008.

Nous nous rassemblerons auCrématorium du cimetière du Père-Lachaise, Paris 20e, lundi 17 novembre,à 13 heures. Suivra l'inhumation.

99, rue du Faubourg-du-Temple,75010 Paris. [email protected]

Claudine Dubost,son épouse,

Ses enfants,Ses petits-enfants,Ses arrière-petits-enfants,Et toute sa famille

ont la tristesse de faire part du décès du

professeur Claude DUBOST,chirurgien des Hôpitaux de Paris,

membre de l'Académie de chirurgie,

survenu le 10 novembre 2008.

La cérémonie religieuse aura lieu levendredi 14 novembre, à 15 heures, enl'église Saint-François-Xavier, Paris 7e.

8, rue Masseran,75007 Paris.

Anniversaires de décès

En ce vingtième anniversaire de laséparation,

que soit évoqué le souvenir de

Christiane GALLENCA,professeur des Universités.

Il y a dix ans, nous quittait

le docteur Désiré HAFNER.

Que ceux qui l'ont connu et aimé aientune pensée particulière pour lui.

Jean LIBERMAN,journaliste et écrivain

nous a quittés le 14 novembre 2006.

Sa femme,Sa famille,Ses amis,

s'unissent avec émotion pour gardervivace son souvenir.

In memoriam

Moulay MAZOUZ.

Yaoundé 30 juin 1973Bruxelles 14 novembre 1998.

Avis de messeEn souvenir de

Marcelle DEVAUD,

décédée le 4 septembre 2008,

une messe sera célébrée le jeudi20 novembre, à 18 heures, en l'église Sainte-Clotilde, 12, rue de Martignac, Paris 7e.

Colloques

Colloque européen« La frontière : écriture et transfert »,

organisé par Passage d'encresà l'hôtel de Massa (SGDL),

38, rue du Faubourg Saint-Jacques,Paris 14e, le samedi 29 novembre 2008,

de 12 heures à 18 heures.

Avec la participation deJean-Pierre Faye,

philosophe, écrivain (invité d'honneur),Véronique Breyer, écrivain,

Jacques Broda,écrivain, professeur de sociologie,

Pierre Drogi, traducteur, poète,directeur de programme au CIPH,

Piet Lincken,compositeur, poète (Belgique),

Clothilde Roullier, docteur en lettres,Bernard Schürch, poète (Suisse),Patrick Suter, écrivain (Suisse).

Ouverture :Christiane Tricoit (Passage d'encres).

Modérateur :Yves Boudier, poète, écrivain.

Inscriptions : 35 € / collation comprise.Tél. : 01 48 43 22 23.

[email protected]

Forums

Le COLLÈGE des ÉTUDES JUIVESde l'Alliance israélite universelle

organise un forum« Le “nom juif” de l'État d'Israël »

avec Tuvia Friling, Ilan Greilsammer,Charles Leben, Raphaël Lellouche,Anne Lifshitz-Krams, Éric Marty,

Dominique Schnapper, Shmuel Trigano,

le dimanche 16 novembre 2008,de 10 heures à 18 heures,

bibliothèque de l'AIU,45, rue La Bruyère, Paris 9e.

PAF. : 15 euros.Renseignements : 01 53 32 88 55

www.aiu.org

Concerts

Appel national pour la Tsédaka,lundi 24 novembre 2008, à 20 h 30.

Grand concert de la Solidarité imaginéet mis en scène par Stéphane Freiss,

parrain de la Tsédaka 2008,avec Gad Elmaleh, Florence Foresti,

Gaétane, Joana, Michel Jonasz, Larsène,Jean-Yves Lacombe (du quatuor),

André Manoukian, Le Cirque Phenix,Marie-Claude Pietragalla, Benjamin

Siksou, Tagh l'Explorateur, Rika Zaraï,Julie Zenatti...

PAF. : 50, 100 et 150 €.Réservations : 0820 820 808.

Communications diverses

ESPACE ANALYTIQUE

Comment s'écrit l'inconscient ?

15 et 16 novembre 2008

Maison des Cultures du Monde101, boulevard Raspail, Paris 6e

AvecAlain Abelhauser, Paul-Laurent Assoun,Martin Bakero Carrasco, Eric Bidaud,Claude Boukobza, Anne Carpentier,Gisèle Chaboudez, Magali Chetrit,

Frédéric de Rivoyre, Alain Didier-Weill,Olivier Douville, Marcel Drach,

Jean Richard Freymann, Brigitte Haie,Christian Hoffmann, Luis Izcovich,

Max Kohn, Philippe Kong,Brigitte Lalvée, Patrick Landman,Laurie Laufer, Monique Lauret,

Michel Leverrier, Martine Menès,Jean-Jacques Moscovitz,

Jean-Paul Mouras, Dominique Noël,Tatiana Pellion, Bernard Penot,

Hélène Petitpierre, Jean-Jacques Rassial,Ursula Renard, Sarah Stern,Dominique Tourres-Gobert,

Monique Tricot, Catherine Vanier.

Entrée : 70 eurosRenseignements : 01 47 05 23 [email protected]

0123Vendredi 14 novembre 2008 29

Page 30: Le Monde 14 11

IL Y A 50 ANS DANS « LE MONDE »

Complot argentin

On estime que le nombrede personnes âgées de plusde 100 ans pourrait êtresupérieur à 60 000en 2050 en France

SOMMAIRE

M O D . D G 4 0 3 5 5 0 2 / 1 3DOLCEGABBANA.IT

UN COUP de théâtre est venucompliquer mercredi la criseargentine. Le vice-président Ale-jandro Gomez est mêlé à unerévolution de palais qui lui auraitpermis de prendre le pouvoir.

Les événements semblent enco-re confus, mais un fait demeurecertain : M. Frondizi, souffrantde la grippe, qui restait cloîtrédans sa résidence de Los Olivos,en banlieue, est revenu dansl’après-midi en toute hâte prési-der un conseil restreint, auquelassistèrent les ministres militai-res. Celui-ci fut suivi à 21 heurespar un conseil des ministresconvoqué d’urgence. Au mêmemoment, les parlementaires radi-caux s’étaient réunis afin deconsidérer la situation personnel-le du vice-président, dont, mal-gré les dénégations, ils exigèrentla démission ou la mise en accusa-tion en Haute Cour.

Selon des informations de bon-

ne source, M. Gomez avait déjàdans le courant de la matinée demercredi formé un cabinet deremplacement. Néanmoins, lajournée fut favorable à tous lespoints de vue au gouvernementFrondizi. La découverte d’un com-plot autour de la personne duvice-président renforce l’unitédes militaires autour du docteurFrondizi.

De plus, sous le choc des révéla-tions officielles, le Parti radical,intransigeant, a entériné dans sadéclaration toute la politiquemenée par le président Frondizi.Enfin, la pression syndicale s’allè-ge, et une trêve a été décidée cettenuit, qui laisse entrevoir la repri-se du travail par les ouvriers pétro-liers. Tant du côté américainqu’argentin, on confirme aujour-d’hui que le plan pétrolier serapoursuivi sans changement. a

Jean Huteau(11 novembre 1958.)

Robert Solé

Big bisous

Billet

Le boom de l’âgeà trois chiffres

VOUS L’AVEZ certainement remarqué. Il flotte dans l’air, ce jeudi13 novembre, comme un parfum de printemps. Les gens vous sou-rient dans le métro, cèdent leur priorité aux carrefours, arriventau bureau les bras chargés de fleurs… Normal, c’est la Journéemondiale de la gentillesse (The World Kindness Day).

Des étudiants nantais n’ont pas pu s’empêcher de devancer lamusique. Mercredi, avec vingt-quatre heures d’avance, ils sontentrés dans le Guinness Book en battant le record mondial des bai-sers. Ce n’est plus de la gentillesse, mais de l’héroïsme. Toutesnos félicitations à Valentin Pasquier, qui a embrassé 94 fois sur labouche en une minute. Et une bise spéciale à Solène Doucet, qui asu tendre la joue 108 fois. La langue de Molière recule peut-êtredans le monde, mais le french kiss, lui, est au top.

Gentillesse, embrassades. Je vous vois venir… Non, vous ne meferez pas parler des socialistes. L’heure n’est pas à la polémique,mais au rassemblement. « Je veux être rassembleuse pour deux,pour trois, pour quatre », a dit Ségolène Royal. Attention quandmême : qui trop embrasse mal étreint. a

Premier discours de BarackObama le soir de son élec-tion. Il remercie, parmitous ceux qui ont voté pourlui, une femme de 106 ans.Elle a connu, en tant quenoire, la ségrégation. En

tant que femme, l’absence de droit devote. Cette fois, elle n’a pas fait la queueen vain. Aussitôt, les caméras se sont pré-cipitées chez Ann Nixon Cooper, quihabite Atlanta, dans l’Etat de Géorgie,depuis 1922. On a pu constater, sur laToile, qu’elle a toujours le regard espiè-gle et l’esprit de répartie. Pourtant cettedame, née à Shelbyville (Tennessee) le9 janvier 1902, n’a pas loin de 107 ans…

Précisons qu’elle n’est pas l’électriced’Obama la plus âgée. Amanda Jones, auTexas, la domine largement, du haut de

ses 109 ans. Cette dernière, en outre, estune authentique fille d’esclave : son pèreavait 12 ans en 1865, au moment de l’abo-lition de l’esclavage aux Etats-Unis, etgardait encore les moutons pour un maî-tre blanc. Et ce n’est pas tout : AmandaJones, née en 1899, peut se vanter d’en-jamber trois siècles en une seule exis-tence, et de voter démocrate depuis pres-que soixante-dix ans. Point faible : ellen’a pas fait la queue plusieurs heurespour voter, et semble avoir envoyé sonbulletin par correspondance. On ne dou-te pas, malgré tout, qu’elle ait des motifsvalables de rester chez elle.

Ces figures de grands centenaires aler-tes n’étaient pas imaginables il y a deuxou trois générations. Aujourd’hui, dansquelques pays développés, et singulière-ment en France, les âges à trois chiffres

se multiplient. A la fin de ce mois, le28 novembre, on va célébrer, par exem-ple, le 100e anniversaire du grand anthro-pologue Claude Lévi-Strauss, et leMusée du quai Branly résonnera toute lajournée, en son honneur, de lectures deses textes. On célébrera l’exploit de sonœuvre, plus que celui de sa longévité.Car passer le cap du siècle est presquedevenu commun. De plus de plus de per-sonnes, anonymes ou célèbres, attei-gnent ces âges hier encore rarissimes.

Sur ce point, les statistiques publiées ily a quelques mois sont formelles. En1900, on dénombrait quelques dizainesde centenaires en France. En 1960, ilsétaient déjà environ un millier. Et par unprompt renfort, les voilà… 20 115 arrivantà bon port le 1er janvier 2008 ! On estimeque le nombre de personnes âgées deplus de 100 ans pourrait être supérieur à60 000 en 2050 – et il ne s’agit que de laFrance. Les centenaires ne sont plus uneexception notable, ils deviennent unepopulation. Reste à comprendre pour-quoi. Que se passe-t-il au juste ?

Question embarrassante. Visible-ment, face à ce phénomène, les scientifi-ques sont perplexes, et loin d’être dumême avis. Certes, tout le monde s’accor-de pour constater que l’amélioration dessoins médicaux dans les pays richesaccroît le nombre de personnes attei-gnant un âge avancé. Or, plus il y a degens qui atteignent les 80 ou les 90 ans,plus on voit augmenter, mécanique-ment, le nombre de centenaires. Doit-onen conclure pour autant que la durée de

la vie humaine s’allonge effectivement ?Les experts sont divisés. Les uns soutien-nent qu’il existe une limite immuable àla durée de notre existence biologique,limite atteinte par plus ou moins d’êtreshumains suivant les époques et les condi-tions de vie. D’autres affirment aucontraire que ce maximum possible estlui-même en évolution, et que les limitessont aujourd’hui en train de reculer.

Le débat est loin d’être tranché. Maisquelques faits laissent penser qu’unallongement effectif de la vie de l’espècen’est pas à exclure. Toujours dans lespays riches, on voit l’espérance de vieau-delà de 100 ans augmenter régulière-ment. A tel point qu’un nouveau groupedémographique commence à émerger :les « super-centenaires », ceux qui ontfêté leur 110e anniversaire… En fait,mieux vaudrait dire « celles » qui ontfêté leurs 110 ans, car l’avantage des fem-mes, dans ce domaine, est écrasant.Après 100 ans, il ne reste qu’un hommepour sept femmes. Très vite, le déséquili-

bre ne fait que s’aggraver encore : à104 ans, en moyenne, il n’y a plus qu’unhomme pour dix femmes.

Comment vit-on, dans ces contrées-limites ? Avec quelle perception dutemps ? Parvient-on à une sorte de pré-sent immuable, comme un semblantd’éternité ? Comment considère-t-on sapropre vie, quand on regarde en arrière etparcourt les trajets de la mémoire ? Doit-on penser au contraire qu’il n’y a rien despécial à signaler, rien à voir de particu-lier ? Les super-centenaires sont-elles despersonnes comme les autres, que nousaurions tort d’imaginer en exploratricesde confins inconnus ? Autant de ques-tions que l’on ne saurait trancher.

Malgré tout, le plus grand âge resteune expérience énigmatique, où s’éprou-vent probablement, au moins pour cer-tains, des métamorphoses du temps, desétats de conscience transformés, desenchantements ou des abandons sanséquivalent. « Dieu m’a oublié » disait joli-ment Jeanne Calment, recordwomanabsolue, à 122 ans.

On rappellera qu’en Inde, le termeamrita, en sanskrit – formé du « a » pri-vatif et de la racine signifiant « mourir »– ne désigne pas simplement l’immortali-té conçue comme une survie éternelle.Le mot s’emploie au contraire, dans bonnombre de textes anciens, pour désignerla très longue vie humaine, celle où touts’est accompli, où l’on n’a plus rien àattendre.

Barack Obama aura 100 ans le4 août 2061. D’ici là… a

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