Le PLF 2014 un budget de résignation

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    PLF 2014 : un budget de

    rsignation

    Ph il ippe LgHenri Sterdyniak

    Octobre 2013.

    www.atterres.org

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    Introduction1.Le Projet de loi de finances (PLF) 2014 est la traduction dun double choix qui

    tmoigne de lorientation politique du gouvernement. Ds les lections lgislatives

    passes, Franois Hollande renonait rengocier le Trait europen sur la stabilit,

    la coordination et la gouvernance (TSCG). Il sengageait faire revenir le solde public

    lquilibre en 2017, donc mettre en place pendant cinq ans des politiques

    daustrit. Fin aot 2012, pour la premire fois depuis sa cration, lUniversit dt

    du Medef souvrait par un discours du Premier ministre en exercice, Jean-Marc

    Ayrault. Dix membres du gouvernement faisaient le dplacement. A lautomne, le

    gouvernement promettait la cration dun crdit dimpt comptitivit emploi (CICE)

    en faveur des entreprises. Le 4 juillet 2013, au lendemain de son lection la tte du

    Medef, Pierre Gattaz tait reu par Franois Hollande lElyse. Cest l encore une

    pratique indite2. Le prsident du Medef fut reu le mme jour Bercy par le ministre

    des Finances, Pierre Moscovici, et par le ministre dlgu au Budget, Bernard

    Cazeneuve, ainsi qu Matignon par le chef du gouvernement. Dans son allocution du

    15 septembre 2013, Franois Hollande se prsentait comme le prsident des

    entreprises .

    Le projet de loi de finances 2014 transcrit ce double choix. Choyer la finance et le

    grand patronat tout en acceptant lobjectif dquilibre budgtaire a toutefois de

    lourdes contreparties : la taxation des mnages et la rduction des dpensespubliques et sociales. Si, en 2012, les hausses dimpts ont surtout frapp les plus

    riches et les grandes entreprises, elles touchent maintenant lensemble des

    mnages, ce qui va peser contre lactivit. Avec le PLF 2014, il apparat clairement

    que le gouvernement na pas de plan crdible pour sortir le pays de la crise. Pire, il

    durcit un peu plus sa politique dans un sens nolibral. Le budget 2014 marque en

    effet un autre tournant. Dornavant, ce seront par de fortes baisses de dpenses que

    le gouvernement va essayer de rduire le dficit public. Cela va renforcer les

    tendances rcessives.

    Le cadrage macroconomique.

    Le gouvernement retient une hypothse de croissance du PIB de 0,9 % pour 2014.

    Celle-ci est trs proche du consensus des conomistes et des organismes

    internationaux, ce qui ntait pas le cas les annes prcdentes. Le cadrage

    macroconomique pose toutefois deux problmes.

    1

    Les auteurs remercient Monique Allard et Christophe Ramaux pour la relecture de cette note.2 Comme le souligne lditorialiste Michel Noblecourt: C'est un fait indit que le dirigeant d'uneorganisation patronale ou syndicale soit reu aussi vite aprs son lection par le chef de l'Etat. Ceprivilge n'avait t accord ni Laurent Berger (CFDT) ni Thierry Lepaon (CGT) qui avaient dpatienter plusieurs semaines avant d'tre reus (Le Monde.fr 05/07/13).

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    Premirement, le gouvernement ne fournit pas dexplications sur les erreurs de

    prvision commises dans le cadrage macroconomique du prcdent budget. En

    2013, le PIB ne devrait augmenter que de 0,1% alors quil tait prvu une croissance

    de 0,8%. Do vient l erreur ? Le gouvernement devrait reconnatre que son

    action pour rduire le dficit public sest solde par une contraction de lactivit. Il

    devrait reconnatre que sa stratgie de rduction des dficits publics ne tient pas

    compte de leffet rcessif de leffort budgtaire. En tendant lanalyse aux deux

    dernires annes de rigueur (2012, 2013), le bilan est pourtant particulirement

    instructif: 3 points de PIB deffort nont diminu le dficit que de 1,2 point. De 2011

    2013, celui-ci est pass de 5,3% 4,1% du PIB. La croissance a t nulle en 2012

    comme en 2013, ce qui a cot 1,8 point de recettes fiscales. Le dernier projet de loi

    de finances tient partiellement compte de cet enseignement : en 2014, un effort

    budgtaire de 18 milliards deuros soit 0,9 point de PIB nest suppos rduire le

    dficit que de 0,5 point de PIB. Mais limpact rcessif de la politique budgtaire risque

    dtre plus important que ne lanticipe le gouvernement.

    Le trs faible dynamisme de la consommation des mnages (+0,3%) avait t

    correctement anticip. Mais la composante du PIB au sujet de laquelle le

    gouvernement sest le plus tromp est linvestissement des entreprises. En 2013,

    celui-ci devrait reculer de 2,2% alors que le gouvernement sattendait ce quil

    augmente de 1,5%. Cela peut clairer un des grands choix budgtaires du

    gouvernement pour 2014 : la baisse globale de la fiscalit sur les entreprises danslespoir dun accroissement de 1,5% de linvestissement en 2014. Mais ce choix

    politique est doublement problmatique. Le ministre des Finances soutient que la

    cl d'une reprise solide, c'est avant tout l'investissement3, maisil se trompe lorsquil

    estime que la faiblesse de linvestissement sexplique par une situation financire

    dgrade des entreprises ou une fiscalit trop lourde. Les entreprises ont dj

    bnfici de beaucoup dallgements fiscaux, mais elles rclament une rentabilit

    excessive ; ninvestissant gure, elles sont responsables de la lthargie de la

    croissance, qui elle-mme pse sur leur profit. Simultanment, on ne peut

    srieusement prtendre, comme la fait le rapporteur gnral du budget, que ce qui

    est bon pour les entreprises sera bon pour les mnages 4. Rduire les impts des

    entreprises pour augmenter ceux des mnages nest pas, jusqu prsent une

    stratgie gagnante : le choc ngatif supplmentaire sur la demande des mnages

    (dj freine par laustrit salariale) alimente justement le blocage de

    linvestissement et les entreprises nembauchent pas.

    3 Pierre Moscovici, cit parReuters, 13 octobre 2013.4 Christian Eckert, cit dans Les Echos, 26 septembre 2013.

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    Deuximement, le gouvernement estime que les alas autour de ce scnario sont

    quilibrs . Or, son estimation de la demande mondiale ne semble pas prendre en

    considration le rcent ralentissement des conomies mergentes. Le FMI vient

    dailleurs de revoir la baisse sa prvision de la croissance mondiale 3,6% pour

    2014. Il est peu probable que la demande adresse la France augmente de 4,8%

    comme le suppose le PLF5. Pour 2013, le PLF de lan pass prvoyait une

    croissance des exportations de 4,8% ; elle ne devrait tre que de 1,2%. Un rebond

    3,5% en 2014 est peu probable. Tous les pays, en particulier en Europe 6, continuent

    compter sur les exportations pour repartir, mais cest un jeu somme nulle

    lchelle mondiale ; somme ngative, en fait, car laustrit salariale et sociale pse

    sur la croissance.

    Solde structurel : le ver est dans le PLF.

    Lan dernier, les conomistes Atterrs avaient alert les citoyens au sujet de

    lobligation cre par larticle 3.1 du Trait sur la stabilit, la coordination et la

    gouvernance (TSCG), de rduire terme le dficit public structurel 0,5% du PIB 7.

    Le TSCG ayant t ratifi par la France en octobre 2012, cette obligation dtermine

    dsormais lensemble des possibles. La loi de finances devait sinscrire dans une

    orientation pluriannuelle (2012-2017) vote en dcembre 2012 et devant conduire

    un dficit structurel de 0,5% du PIB en 2017. Or, sur un plan dmocratique, il nest

    pas sain que les choix relatifs aux finances publiques soient tributaires dune notion

    aussi contestable que celle de solde structurel . La Dclaration des droits de

    lhomme et du citoyen de 1789 prvoit dans son article 14 que Tous les Citoyens

    ont le droit de constater, par euxmmes ou par leurs reprsentants, la ncessit de

    la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi, et d'en

    dterminer la quotit, l'assiette, le recouvrement et la dure . Lorsque les grandes

    orientations de la loi de finances et de la programmation pluriannuelle des finances

    publiques sont justifies par une notion aussi fragile que celle de solde structurel

    et par un objectif aussi arbitraire quune norme de 0,5% de dficit structurel, quen

    est-il du droit constater la ncessit de la contribution publique ? Quen est-il de

    la facult dterminer la fiscalit?

    Sur un plan conomique, le problme central est, comme nous lexpliquions en 2012,

    que pour valuerquel serait le dficit en labsence dune rcession ou dun boom, il

    5 FMI, Perspectives de lconomie mondiale, octobre 2013. Dans ce mme rapport, le FMI estime

    toutefois la croissance franaise 1% en 2014.6Le solde courant de lUnion europenne atteint aujourdhui 2 % de son PIB. Sa stratgie ne consiste,au fond, qu prendre des emplois au reste du monde.7 Les conomistes Atterrs, LEurope mal-traite : Refuser le Pacte budgtaire et ouvrir dautresperspectives, Les Liens qui Librent, 2012.

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    faut une thorie 8. Or, il nexiste pas de consensus ce sujet. Dans le dossier de

    presse du PLF 2014, le gouvernement reconnat dailleurs lui-mme le caractre flou

    de la distinction entre le solde structurel et le solde conjoncturel : lindicateur de

    solde structurel ne corrige quimparfaitement les effets de la conjoncture: la sur-

    raction des recettes fiscales, en priode de conjoncture dprime (cest--dire que

    les recettes progressent moins vite que lactivit conomique) tend dgrader le

    solde dit structurel9.

    Tableau 1. La LPFP 2012-2017 et le budget 2014

    2012 2013 2014

    LPFP 2012-17

    Solde public (% du

    PIB)

    -4,5 -3,0 -2,2

    Solde structurel (% du

    PIB)

    -3,6 -1,6 -1,1

    Croissance en % 0,3 0,8 2,0

    PLF 2014

    Solde public (% du

    PIB)

    -4,8 -4,1 -3,6

    Solde structurel (% du

    PIB)

    -3,9 -2,6 -1,7

    Croissance en % 0,0 0,1 0,9

    Croissance

    potentielle

    1,3 1,4 1,5

    Ecart de production -1,6 -2,9 -3,5

    Ce flou a t exploit par le Haut Conseil des Finances publiques (HCFP) qui juge

    optimiste la prvision de solde structurel pour 2014. Mettant en avant la rduction

    de loffre productive travers, par exemple, des faillites dentreprises et despertes en

    capital humain accompagnant la crise, le HCFP sinterroge sur lampleur de

    lcart de production qui, reposant sur ces prvisions de croissance potentielle, se

    creuserait jusqu 3,5 points de PIB dans le scnario propos 10 (p. 5). Son

    raisonnement tient en fait deux ides. Premirement, la chute de la demande

    entrane celle de loffre . La production potentielle ne peut donc tre trs loigne de

    8 Ibid., p. 36.9 Projet de Loi de Finances 2014, Dossier de presse, p. 15.10 Haut Conseil des Finances publiques,Avis nHCFP-2013-03, 20 septembre 2013, p. 5.

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    la production constate. Deuximement, la politique budgtaire doit se fonder sur le

    niveau doffre rsultant de lapurement des marchs.

    Chacune de ces deux assertions est critiquable. Les enqutes mensuelles de

    conjoncture de la Banque de France et de lINSEE font apparatre un taux dutilisation

    des capacits de production de lindustrie franaise trs en dessous de sa moyenne

    de longue priode. La mesure de ce taux est contestable mais pas plus que celle

    de lcart entre la production effective et la mystrieuse production potentielle. En

    outre, le raisonnement du HCFP - rejoint sur ce point par le Rdacteur en chef du

    magazine Alternatives Economiques11 - fait purement et simplement abstraction des

    10 points dactivit perdus pendant la crise.

    Notre propos nest pas de fournir une estimation de la production potentielle plus

    haute que celle du gouvernement - les conomistes Atterrs ne seraient dailleurs

    pas daccord entre eux mais de rappeler que cette notion discutable ne devrait pasprdterminer les engagements budgtaires. Elle est non seulement difficile

    valuer mais elle prsuppose et cest l sa principale fonction daccepter que

    laction publique prenne pour cadre conomique de rfrence celui que le capitalisme

    nolibral tente dimposer pour rsoudre sa crise.

    Il faut en outre souligner ce que trahit la rfrence aux pertes en capital humain ,

    expression idologique employe par le Haut Conseil pour dsigner en fait

    lensemble de travailleurs ayant t durablement privs demploi par la crise, dont

    bon nombre ne sont mme plus considrs comme chmeurs. Serait-il acceptable de

    btir le budget de la nation sur lhypothse selon laquelle une partie de la population

    est devenue inemployable ? Faut-il se rsigner un taux de chmage de 10,5 %

    quand celui-ci avait baiss 7 % en 2007 ? Ce raisonnement est dailleurs auto-

    ralisateur : si la production est proche de son niveau potentiel, il faut se rsigner

    une croissance mdiocre, qui fait augmenter le chmage et donc ralentir encore plus

    la production potentielle.

    Lestimation du gouvernement dun cart de production de 1,6 % seulement en 2012,

    alors que le taux de chmage est de 10% signifie quil est impossible de faire

    descendre le chmage en France au-dessous de 8,4 % ; et que sur les 8,5 %

    dactivit perdus du fait de la crise, 7 ne seront jamais retrouvs.

    11 Dans son numro doctobre 2013, Alternatives conomiques publie de trs intressantes analysesdes choix budgtaires du gouvernement. Guillaume Duval propose toutefois un raisonnementconomique similaire celui du HCFP lorsquil critique lui aussi lide selon laquelle le dficit structurelse rduit nettement : Mais cette faon de se rassurer ( et de sexcuser de ne rien faire pour soutenirlactivit) est trompeuse : lestimation du PIB potentiel est base sur les performances passes. Or,quand lconomie dun pays reste durablement larrt, comme cest le cas en France depuis cinq ans,

    son PIB potentiel rel se rduit progressivement. Les chmeurs de longue dure ne sont plus vraimentdes travailleurs potentiels, car il faut les former lourdement pour les former sur le march du travail ; lesentreprises qui ont fait faillite ne peuvent plus produire quand les affaires redmarrent, etc. Bref, levritable dficit structurel risque dtre plus proche du dficit conjoncturel que Bercy ne le pense . Cf.Alternatives Economiques, n238, p. 10, nous soulignons.

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    Enfin, les menaces peine voiles du Haut Conseil laissent peu de doute quant au

    caractre politique de son raisonnement : en cas de surestimation de la

    composante conjoncturelle, les efforts dajustement budgtaire ncessaires pour

    atteindre lobjectif de moyen terme soit lquilibre structurel sen trouveraient

    accrus . La crdibilit de cette menace repose sur une disposition essentielle du

    TSCG : en cas de dsaccord sur lestimation de la production potentielle, cest la

    Commission europenne qui a le dernier mot et qui peut d onc dcrter que lon se

    trouve dans le cas de surestimation de la composante conjoncturelle du dficit.

    Selon le gouvernement, il restait en 2012 3,4 points de PIB defforts (70 milliards)

    faire pour atteindre un dficit structurel de 0,5 point. Si, comme le suggre le HCFP,

    le dficit structurel est plus proche de 4,8%, leffort faire est de 4,3 points de PIB

    (85 milliards). Si lconomie franaise russit rcuprer 6 des 8,5 points dactivit

    perdus, le solde structurel ntait en 2012 dficitaire que de 1,8 point, si lobjectif estun dficit structurel de 2,4% correspondant la vraie rgle dor des finances

    publiques telle quelle fut nonce par lconomiste libral Paul Leroy-Beaulieu12 (soit

    un dficit gal au montant de linvestissement public), il est dj atteint.

    Le PLF 2014 scarte notablement de la LPFP 2012-2017 : en 2014, il manque 2,1

    points de PIB ; le dficit public est plus creus de 1,4 point de PIB (0,8 point en raison

    du dficit de croissance, 0,6 point en raison dune moindre amlioration du solde

    structurel). Le gouvernement avait oubli lan pass que les politiques daustrit

    avaient un impact ngatif sur la croissance ; il na pas fait assez defforts en 2013 (1

    point au lieu de 1,3 point). Aussi promet-il den faire davantage en 2014 (0,9 point au

    lieu de 0,5 point).

    Toutefois, cela ne suffit pas au HCFP qui crit : La ralisation des prvisions du

    gouvernement pour 2013 (1 point d'cart au solde structurel de la loi de

    programmation) conduira le Haut Conseil constater au printemps 2014 un

    cart important13 par rapport aux orientations pluriannuelles, dclenchant

    ainsi le mcanisme de correction . Sauf reporter la date de retour l'quilibre

    structurel au-del de 2016 et modifier cette fin la loi de programmation, le Haut

    Conseil note que la mise en uvre du mcanisme de correction ncessitera de

    raliser en 2015 et en 2016 des efforts plus importants que ceux prvus dans cette

    loi. Le gouvernement sera donc devant une alternative : soit renforcer la politique

    daustrit, soit faire voter une nouvelle loi de programmation, ce qui privera la

    contrainte introduite de son effectivit.

    12 Catherine Mathieu et Henri Sterdyniak, 2012, Faut-il des rgles de politique budgtaire ? ,Document de travail de lOFCE, n7, fvrier13

    Selon la loi organique lcartest dit important sil est suprieur 0,5 point. Il doit alors tre corriglanne suivante.

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    Selon la trajectoire pluriannuelle associe au budget, la France poursuivra une

    politique daustrit un peu attnue jusquen 2016 (tableau 2). Une impulsion

    budgtaire ngative de 1% par an rend peu probable la croissance de 2% prvue

    partir de 2015. De 2010 2013, le taux de prlvements obligatoires aura augment

    de 3 points (soit 60 milliards de hausse dimpts supplmentaire). La baisse des

    dpenses publiques (par rapport leur tendance) serait de 10% (soit 5 points de

    PIB), dont 2,5 % dj acquis. Comme le gouvernement ne veut plus augmenter les

    impts, il va devoir rduire les dpenses publiques de 7,5%, soit 75 mill iards dici

    2017.

    Tableau 2. Trajectoire des finances publiques 2013-2017

    2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017

    PIB* 2,0 0,0 0,1 0,9 2,0 2,0 2,0

    Solde public -5,3 -4,8 -4,1 -3,6 -2,8 -1,7 -1,2

    TPO 43,7 45,0 46,0 46,1 46,1 46,1 45,8

    Dpenses publiques 55,9 56,6 57,1 56,7 55,9 54,9 54

    Dpenses publiques * 0,7 1,2 1,0 0,3 0,4 0,3 0,3

    Solde structurel G -5,2 -3,9 -2,6 -1,7 -0,9 -0,2 -0,0

    Solde structurel HT -1,9 -0,5 1,0 2,0 2,7 3,7 4,1

    Impulsion budgtaire G -0,7 -1,3 -1,3 -0,9 -0,8 -0,7 -0,2

    Impulsion budgtaire

    HT

    -1,1 -1,4 -1,5 -1,0 -0,7 -1,0 -0,4

    En % du PIB sauf * taux de croissance en volume. G : gouvernement. HT ; trajectoire tendancielle.

    Les modalits de la hausse des recettes sont ingalitaires.

    De 2010 2013, le taux de prlvements obligatoires aura augment de 3 points.

    Cette stratgie lance par le prcdent gouvernement visait rduire rapidement le

    dficit public, creus en fait par la chute de la demande. La ponction ainsi effectue a

    aggrav encore la dficience de demande. Les mnages nont pas bnfici de

    contreparties la hausse des impts en termes de dpenses publiques. Ceci nourrit

    un sentiment de rvolte fiscale, que les partis de droite, les conomistes libraux etles medias cherchent attiser et instrumentaliser.

    En 2014, les prlvements augmenteraient de 3 milliards deuros. Mais cette faible

    augmentation globale masque des volutions trs contrastes. En effet, le crdit

    dimpt comptitivit emploi (CICE) va amputer les recettes fiscales de 10 milliards

    deuros, par le biais dune rduction de limpt sur les socits (IS). Au total, les

    mnages paieraient 12 milliards de plus et les entreprises 9 milliards de moins. Ce

    sont les mnages qui vont financer le cadeau fiscal aux entreprises.

    Le gouvernement a choisi de financerle CICE en augmentant la TVA, cest--dire de

    la pire manire qui soit. Au 1er janvier, le taux normal passera de 19,6% 20% et le

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    taux intermdiaire de 7% 10%, soit une hausse de 7 Milliards. En proportion de leur

    revenu, ce sont les mnages les moins aiss qui contribueront le plus. Cette mesure

    est dautant plus surprenante que le candidat Hollande avait fortement critiqu la

    TVA sociale du prsident Sarkozy au nom tant de la justice fiscale que de son

    effet sur la consommation.

    Supprime par Franois Fillon en 2011, lindexation du barme de lImpt sur le

    revenu sur les prix est enfin rtablie. La dcote est lgrement augmente (ce qui

    rduit limpt de 250 millions), mais la demi-part supplmentaire accorde aux

    veuves ayant lev des enfants est progressivement rduite (gain pour lEtat: 250

    millions en 2014). Leffet du rtablissement de limposition des heures

    supplmentaires joue maintenant en anne pleine (gain pour lEtat : 800 millions en

    2014 par rapport 2013)14.

    Le plafond du quotient familial est de nouveau abaiss de 2000 1500 euros (gain :1 milliard), sans que le produit de cet abaissement soit redistribu la politique

    familiale. De mme, la majoration de 10% des retraites verses aux parents ayant

    lev au moins trois enfants sera dsormais fiscalise (gain : 1,3 milliard), ce qui est

    justifi, mais cette majoration est paye par la CNAF et le produit de son imposition

    aurait d l aussi revenir aux familles nombreuses.

    Les pigeons ont obtenu que les plus-values mobilires bnficient dun

    abattement de 50% au bout de 2 ans de dtention, de 65 % au bout de 8 ans, qui

    passe 85% pour les dirigeants de PME cres depuis moins de 10 ans, pour les

    cessions familiales, pour les jeunes entreprises innovantes , pour les dirigeants

    partant la retraite (qui ont droit de plus un abattement de 500 000 euros). On voit

    mal ce qui justifie que labattement aille au-del des 40% de labattement des

    dividendes (qui compense la double imposition IS/IR). Le cot pour ltat serait de

    350 millions en 2014.

    La participation des employeurs aux contrats collectifs de complmentaires sant

    sera maintenant imposable (gain pour lEtat: 1 milliard). Ceci vite que lextension

    des complmentaires sant ninduise de trop fortes baisses de recettes fiscales. Mais

    la question de fond demeure: faut-il privilgier le dveloppement des

    complmentaires sant au dtriment de la Scurit sociale, sachant que leur

    financement est moins juste et que les retraits, les fonctionnaires et les tudiants ne

    bnficient pas de la participation de leur employeur ?

    Le projet de PLF prsent par le gouvernement prvoyait la rduction dimpt

    bnficiant aux parents denfants scolariss. Grce un amendement de la

    commission des Finances de l'Assemble nationale, elle sera finalement maintenue.

    14Lexonration des heures supplmentaires tait une subvention aux destructions demplois. Cf. Lesconomistes Atterrs, Changer dconomie, Les Liens qui Librent, 2012, p. 102-3.

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    Cette rduction tant forfaitaire (61 euros par enfant au collge, 153 euros au lyce,

    183 euros dans lenseignement suprieur), elle bnficie particulirement aux

    mnages les plus pauvres. En labsence de mesure compensatoire, sa suppression

    aurait donc conduit un accroissement des ingalits et une rduction de laccs

    des classes populaires aux tudes suprieures.

    Les salaris paieront 1 million de cotisation vieillesse supplmentaire. La hausse du

    taux de prlvements sociaux sur les produits de placement a subtilement t rendue

    rtroactive sur les PEA. Ce qui rapporte 600 millions.

    Les collectivits locales se sont vu donner le droit daugmenter la taxation des

    mutations pour compenser la baisse de la dota tion de ltat et la hausse de leurs

    dpenses sociales. Elles devraient en profiter pour 600 millions en 2014.

    Ces nouveaux prlvements risquent daffecter la consommation en 2014 alors

    mme que le pouvoir dachat des mnages devrait, selon le dernier point de

    conjoncture de lINSEE, dcliner de 0,1% au troisime trimestre 2013 puis de 0,2%

    au quatrime trimestre 2013.

    Si la rpartition des efforts prvue dans le projet de budget prsent par le

    gouvernement tait initialement trs dsquilibre, les choses se sont peu peu

    aggraves : la moindre protestation du Medef ou mme des pigeons , le

    gouvernement a lch du lest. Force est de constater que les entreprises ne seront

    pas concernes par leffort de rduction des dficits. Initialement, elles devaient

    seulement contribuer hauteur de 6 milliards deuros pour compenser la fin des

    mesures ponctuelles votes en 2012, qui ne concernaient que certains secteurs, pour

    compenser aussi la disparition de petits impts comme le C3S et lIFA. Mais dans le

    PLF prsent fin septembre subsistait seulement une taxe sur lexcdent brut

    dexploitation (EBE), pour 2,5 milliards d'euros. Finalement, celle-ci est abandonne,

    le gouvernement ayant prfr lui substituer un doublement temporaire du taux de la

    surtaxe sur limpt sur les socits cre par Franois Fillon.

    Lide de taxation de lEBE avait certes de quoi surprendre. En effet, dans la mesureo lEBE inclut les amortissements, cest--dire la consommation de capital fixe, ce

    projet risquait de pnaliser linvestissement productif et en particulier lindustrie. Mais

    il tait possible de remdier cet inconvnient en remplaant le projet dune taxe sur

    lEBE par celui dune taxe sur lexcdent net dexploitation (ENE). Il est regrettable

    que ce projet, un temps voqu, nait pas t retenu. LENE prsente en effet

    lavantage dtre indpendant de la gestion financire des entreprises. Et comme

    nous lavons dj indiqu, de nombreuses socits rduisent leur impt en gonflant

    fictivement leurs frais financiers 15

    . Un impt sur l'ENE et donc permis de

    15 Ibid., p. 105.

  • 7/27/2019 Le PLF 2014 un budget de rsignation

    11/16

    10

    sanctionner les entreprises qui surestiment leurs charges financires afin de rduire

    artificiellement leur bnfice imposable. De mme, cela aurait permis de lutter contre

    loptimisation fiscale par le transfert de profits ltranger, via des redevances

    fictives.

    Pourquoi cette piste na pas t retenue ? Quun membre du gouvernement ait pu

    affirmer que Geoffroy Roux de Bzieux, le numro 2 du Medef, a son lit de camp

    dans le bureau du ministre du Budget en dit long sur la situation16. Souponn par

    les dputs et les militants de son propre parti davoir cd au lobby patronal, Pierre

    Moscovici a rpondu : Nous avons estim au final qu'il ne fallait pas crer un nouvel

    impt sans avoir rflchi l'ensemble de la structure d'imposition des entreprises .

    Cette justification est pour le moins trange. Le gouvernement qui devait mettre en

    uvre la rvolution fiscale promise par Hollande na donc pas men de rflexion

    sur la structure dimposition des entreprises17

    ? Le gouvernement renvoie dsormaisla question de futures assises de la fiscalit des entreprises, ce qui revient

    refuser de crer le moindre rapport de force avec le grand patronat. Or, la seconde

    partie du quinquennat sera moins propice la ralisation dune grande rforme

    fiscale. Le Medef la dailleurs bien compris ; son vice-prsident souhaite dsormais

    que la surtaxe sappliquant limpt sur les socits soit supprime la faveur du

    projet de loi de Finances 2015 car une rforme pression fiscale quivalente est

    un jeu de bonneteau 18. La fiscalit globale des entreprises diminue pourtant de 9

    milliards, tandis que tous les efforts portent sur les mnages. Le Medef fait de lasurenchre en utilisant habilement la rhtorique du gouvernement au sujet de la

    mobilisation pour lemploi. Pierre Gattaz estime que la France a un moteur de

    F1 fonctionnant aujourdhui comme une 2 CV mais quil ne tient qu la

    mobilisation des patrons de le faire tourner plein rgime et de crer 1 million

    demplois. Pour quils se mobilisent, il faut bien sr de nouvelles conditions

    fiscales, sociales, rglementaires 19.

    Non seulement la majeure partie des hausses dimpts sur les entreprises votes lan

    dernier sont supprimes, non seulement le crdit dimpt comptitivit emploi

    reprsente un gigantesque cadeau fiscal, mais les avantages dont bnficient les

    plus grandes entreprises ne sont pas rduits. Treize dputs socialistes de diverses

    sensibilits ont dpos un amendement pour limiter le montant du Crdit d'impt

    recherche (CIR) dont bnficient les grandes entreprises. Ils proposaient dappliquer

    16 Arnaud Montebourg, le 6 octobre 2013, sur BFM-TV.17 Dans une tribune publie le 4 novembre 2009 par la Tribune, Franois Hollande promettait une rvolution fiscale pour 2012, une grande rforme et mme une nouvelle donne , terme

    emprunt Franklin Roosevelt. Cette promesse a t reprise dans le projet du PS et dans la premirepartie de la campagne du candidat Hollande. Mais depuis janvier 2012, ce dernier na cess de revoirses ambitions la baisse.18 Les chos, 10 octobre 2013.19 Pierre Gattaz sur RTL, 10 octobre 2013.

  • 7/27/2019 Le PLF 2014 un budget de rsignation

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    le plafond de 100 millions deuros non plus lentreprise mais au groupe dont elle fait

    partie. Cet amendement a t rejet par la commission des Finances de l'Assemble

    nationale. Cest pourtant la demande de cette mme commission que la Cour des

    comptes a publi en septembre un rapport mettant en vidence une sous-

    estimation rcurrente du CIR, dont le mcanisme est leplus gnreux de lOCDE

    si lon rapporte son montant au PIB (0,26%) 20. On peut donc tre effar du rejet

    dun amendement qui ne visait qu limiter trs lgrement une niche fiscale

    inefficace engendrant nombre dabus scandaleux.

    Les entreprises devaient payer 1 milliard de cotisations retraite supplmentaires.

    Elles ont obtenu que cela leur soit compens par une baisse des cotisations famille.

    Le budget comporte cependant des lments qui vont dans le bon sens. Ainsi, les

    entreprises qui versent des rmunrations suprieures 1 million deuros, devront

    payer une surtaxe de 50% sur la partie des rmunrations suprieures ce niveau.La mesure devrait rapporter 260 millions en 2014. Malheureusement, elle ne

    sappliquerait que sur 2 ans. Et il faudra que le gouvernement rsiste cette fois la

    fronde de certains footballeurs.

    Le gouvernement raffirme sa dtermination de lutter contre loptimisation fiscale en

    interdisant les dductions dintrts verss dans un pays o ceux-ci ne sont pas

    imposables et en se promettant de mieux contrler les prix de transfert lors

    doprations de restructuration. Mais ceci sera-t-il compatible avec la baisse des

    moyens de ladministration fiscale ?

    La contribution climat nergie (CCE) est une taxe carbone sappliquant aux produits

    nergtiques : elle sera calcule en fonction dun prix de la tonne de CO2 (7 euros en

    2014, qui devrait monter 14,5 euros en 2015, 22 euros en 2016). Ainsi, la taxe

    intrieure de consommation sur les produits nergtiques devrait augmenter

    progressivement. La mesure ne rapporte que 340 millions deuros en 2014 ; elle

    devrait rapporter 4 milliards en 2016. La progression est cependant lente ; une

    hausse plus rapide donnerait un signal plus clair et permettrait dimpulser et de

    financer les ncessaires mesures dconomies dnergie.

    Une baisse de 15 milliards deuros des dpenses publiques.

    Lampleur de la rduction des dpenses publiques prvue en 2014 est historique. Or

    les services publics ont dj beaucoup souffert de la Rvision gnrale des politiques

    publiques (RGPP) de Nicolas Sarkozy. Prpars par des quipes daudit mixtes

    incluant des cabinets de consultants privs (Deloitte, Cap Gemini, BCG, Accenture,

    20 Lvolution et les conditions de matrise du crdit dimpt en faveur de la recherche .http://www.ccomptes.fr/content/download/60065/1491770/version/1/file/evolution_conditions_maitrise_credit_imp%C3%B4t_faveur_recherche.pdf.

    http://www.ccomptes.fr/content/download/60065/1491770/version/1/file/evolution_conditions_maitrise_credit_imp%C3%B4t_faveur_recherche.pdfhttp://www.ccomptes.fr/content/download/60065/1491770/version/1/file/evolution_conditions_maitrise_credit_imp%C3%B4t_faveur_recherche.pdfhttp://www.ccomptes.fr/content/download/60065/1491770/version/1/file/evolution_conditions_maitrise_credit_imp%C3%B4t_faveur_recherche.pdfhttp://www.ccomptes.fr/content/download/60065/1491770/version/1/file/evolution_conditions_maitrise_credit_imp%C3%B4t_faveur_recherche.pdfhttp://www.ccomptes.fr/content/download/60065/1491770/version/1/file/evolution_conditions_maitrise_credit_imp%C3%B4t_faveur_recherche.pdf
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    Ernst and Young, McKinsey, BearingPoint, IDRH, etc.), de nouveaux modles

    organisationnels avaient t imposs, souvent sans tenir compte des particularits du

    service public : restructuration, individualisation des rmunrations, mise en

    comptition des agents et des services, mobilit force, retrait des services publics

    dans les zones rurales et semi-urbaines, etc. Les services dconcentrs de ltat et

    les oprateurs publics ont t particulirement affaiblis21. Et paralllement la RGPP,

    le mode de financement des hpitaux a t modifi pour mettre en place une

    tarification lactivit etune forte diminution de leur masse salariale, aboutissant

    selon les tablissements des rductions deffectifs de 5% 10% sur 4 ou 5

    ans 22. La RGPP a t prolonge, sous une forme un peu attnue, par la MAP

    (modernisation de laction publique).

    Les nouvelles coupes budgtaires prvues par le PLF 2014, et qui doivent se

    prolonger jusquen 2017, vont donc limiter encore un peu plus la capacit desadministrations et des oprateurs entretenir les infrastructures et assurer un service

    public de qualit sur tout le territoire. Elles risquent en outre daggraver les ingalits

    territoriales alors que celles-ci se sont beaucoup accrues ces dernires annes.

    Le budget comporte donc 15 milliards de rductions de dpenses. Soit :

    - 6 milliards de baisse des dpenses sociales. Les prestations familiales ne bnficient

    daucun gain de pouvoir dachat. Les mesures en faveur des familles les plus pauvres

    (hausse de lASF et du complment familial pour les plus pauvres) sont finances par

    des rductions des prestations de familles plus laise (qui subissent la rduction de

    la PAJE et du CLCA) ; le gain net pour les finances publiques tant de 200 millions.

    La politique familiale se concentre de plus en plus sur les plus pauvres. Au nom dun

    argument de justice sociale (donner dabord aux plus pauvres), cest le modle libral

    de protection sociale qui est ainsi promu : des prestations minimales, rserves aux

    pauvres, les autres tant incits se tourner vers des protections prives. Le RSA

    est lui augment de 2%, en pouvoir dachat. Cest un rattrapage bienvenu. Mais pour

    viter la poursuite de la baisse tendancielle, le gouvernement aurait d annoncer que

    les prestations familiales et le RSA seraient dornavant indexs sur les salaires (et

    non surles prix). Les rformes des retraites fournissent 2 milliards dconomies grce

    la perte de 1% du pouvoir dachat des retraites de lAGIRC-ARRCO et au report du

    1eravril au 1eroctobre de lindexation des pensions du rgime gnral (soit une perte

    de 0,7% de pouvoir dachat). Le gouvernement anticipe 0,3 milliard dconomies des

    ngociations de lassurance chmage (moins de prestations donc pour plus de

    chmeurs). Les prestations de sant ne progresseraient que de 1,1% (en volume),

    21 IGA, IGF et IGAS, Bilan de la RGPP et condition de russite dune nouvelle politique de rforme delEtat, sept. 2012. URL : http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/124000520/0000.pdf22 Ibid., p.34.

    http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/124000520/0000.pdfhttp://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/124000520/0000.pdfhttp://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/124000520/0000.pdfhttp://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/124000520/0000.pdfhttp://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/124000520/0000.pdf
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    grce des baisses de tarifs de mdicaments et dactes, sans aucune nouvelle

    mesure de dremboursement.

    - 6 milliards de baisses des dpenses de ltat. Le point dindice de la fonction

    publique reste gel, donc les fonctionnaires continueront subir des pertes de

    pouvoir dachat. Les effectifs de la fonction publique seraient stables (les 10 000

    postes crs dans lducation nationale, les 1000 postes crs dans la police et la

    justice seraient compenss par 7900 postes de moins dans la Dfense, 2 600 de

    moins au ministre de lconomie, etc., avec un bilan ngatif de 1000). Sy ajoutent

    des conomies de fonctionnement et dinvestissement dont certaines sont trs

    contestables comme la baisse de lAPD (aide publique au dveloppement), la baisse

    des subventions pour lacheminement des quotidiens, la forte rduction de la prime

    dapprentissage, larrt de grands chantiers culturels ou patrimoniaux, la non -

    indexation des allocations logement. Il ny a pas de grandes remises en cause desdomaines dintervention de ltat, mais des baisses de dpenses qui risquent souvent

    de nuire son efficacit. Faut-il rduire le nombre de fonctionnaires affects au

    contrle fiscal, linspection du travail, au contrle sanitaire, etc. ?

    - 3 milliards de rduction des concours de ltat aux collectivits locales, ce qui

    obligera celles-ci rduire leurs dpenses alors mme quelles doivent mettre en

    place la rforme des rythmes scolaires, quelles doivent financer le dveloppement

    des crches et que les dpenses sociales augmentent (hausse de 2% du RSA).

    Toutefois, les dpartements pourront augmenter de 1,2 milliard les droits de mutation.

    Est-ce sa capacit de rduire les dpenses publiques que sera jug le

    gouvernement ? Bernard Cazeneuve le revendique : Je veux tre le ministre des

    conomies, pas celui des impts . Franois Hollande le disait le 13 novembre 2012 :

    La dpense publique atteint aujourdhui 57 % de la richesse nationale. Ctait 52 %

    il y a cinq ans. Est-ce que lon vit mieux pour autant ? Non ! La France nest-elle

    pas le deuxime pays du monde (aprs le Danemark) pour le niveau des dpenses

    publiques ? Rduisons les dpenses publiques et nous serons sauvs. Pourtant,

    cette politique qui devrait nous sauver, les gouvernements, celui de Fillon et celui

    dAyrault, ne lengagent que lentement. Manque de courage ? Et si la baisse des

    dpenses publiques tait une stratgie illusoire ?

    Dabord, la France est en priode de chmage de masse et de dficience de la

    demande. De sorte que la baisse des dpenses publiques se traduit par une nouvelle

    baisse de la demande, donc de la production, puis de la demande prive. Et non pas

    par un essor de lactivit. Un jeune qui nest pas embauch comme enseignant ne

    devient pas ingnieur dans une entreprise innovante ; il devient chmeur. Certes, onpeut toujours prtendre que les chmeurs supplmentaires pseront sur les salaires,

    que la baisse des salaires entranera des gains de comptitivit, ce qui terme

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    relancera lemploi. Mais avec quels dlais et quels sacrifices ? Faut -il miser sur des

    gains de comptitivit sur des pays qui eux-mmes essayent de gagner en

    comptitivit sur nous ? Ne peut-on craindre au contraire que la zone euro ne

    sengage ainsi dans une spirale sans fin : baisse du PIB, chute des recettes fiscales,

    nouvelles politiques daustrit ?

    Surtout que la France a perdu 10 points dactivit du fait de la crise. Ne pas se

    donner comme objectif de les regagner, cest se rsigner la persistance dun

    chmage de masse. Les dpenses publiques reprsentent la moiti du PIB. Si elles

    naugmentent plus, les dpenses prives devraient augmenter de 4% lan, pour

    retrouver une croissance satisfaisante, disons de 2% lan. Est-ce concevable ?

    Surtout, les dpenses publiques sont foncirement utiles. Le gouvernement

    prcdent a dj essay de les rduire au maximum avec la RGPP. Il est difficile de

    continuer indfiniment ; il est dangereux de sengager rduire de 75 milliards les

    dpenses publiques comme le fait le gouvernement actuel, sans sinterroger sur

    lutilit des dpenses supprimes. Les jeunes enfants ont besoin de plus de crches,

    pour que toutes les mres qui le souhaitent puissent travailler plein temps. Il

    faudrait augmenter nettement les allocations familiales, si on veut faire chapper tous

    les enfants la pauvret. On aura besoin de plus de prestations vieillesse si on veut

    garantir aux jeunes quils pourront partir la retraite un ge satisfaisant , avec un

    niveau de retraite correct. Le dbat sur les rythmes scolaires lillustre aussi : les

    parents veulent pour leurs enfants des activits priscolaires de qualit ; ceci

    demande demployer des animateurs bien forms ; l encore, il faut plus de dpenses

    publiques. Dans les communes, dpartements et rgions, la population refuse des

    fusions autoritaires qui, sous prtexte dconomies, diminueraient les services publics

    de proximit. La transition cologique suppose, elle aussi, des dpenses publiques :

    rnovation urbaine, transports collectifs, aide aux travaux dconomies dnergie. En

    situation de chmage de masse, ces dpenses publiques ne se font pas au dtriment

    des dpenses prives, au contraire

    Certes, on peut toujours trouver des exemples de gaspillage dans les dpenses

    publiques. Mais nen trouve-t-on pas plus encore dans certaines dpenses prives,

    dans les dpenses publicitaires, dans les salaires ridiculement levs des banquiers

    et oprateurs de marchs, des cadres dirigeants, dans les dividendes excessifs que

    versent les grandes socits ?

    Le poids des dpenses rgaliennes nest pas suprieur celui des aut res pays

    dvelopps. La France se caractrise surtout par le poids important de la protection

    sociale et des dpenses profitant directement aux mnages, de sorte que cest surles mnages que pserait toute baisse importante des dpenses publiques.

  • 7/27/2019 Le PLF 2014 un budget de rsignation

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    15

    Dpenses publiques par fonction (en % du PIB, 2007)

    Zone

    euro

    Allema-

    gneFrance RU Sude EU

    Administration gnrale 3,6 2,9 4,1 2,2 5,6 2,1

    Charge de la dette 3,0 2,9 2,7 2,2 1,8 2,7

    Dfense 1,3 1,0 1,7 2,3 1,6 4,1Scurit 1,7 1,5 1,5 2,5 1,3 2,0

    Affaires conomiques 3,9 3,2 3,2 2,9 4,0 3,5

    Total 13,5 11,5 13,2 12,1 14,3 14,4

    Environnement 0,8 0,5 1,0 1,0 0,4 0,0

    Logement, quipements

    collectifs

    1,0 0,8 1,9 1,1 0,7 0,7

    Education 4,7 3,9 5,5 6,1 6,7 6,0

    Culture 1,1 0,8 1,4 1,0 1,1 0,3

    Sant 6,8 6,5 7,8 7,0 6,6 7,4

    Protection sociale 18,2 19,4 21,8 15,1 21,1 6,7

    Total 46,1 43,5 52,6 43,2 51,0 35,5

    Si les dpenses publiques reprsentent aujourdhui 57% du PIB contre 52% en 2007,

    ce nest pas quelles aient explos depuis 5 ans (leur croissance, en volume, na t

    que de 1,4% lan), cest que le PIB, lui, na pas progress, quil est en 2013 au mme

    niveau quen 2007. Aprs la crise (cause par lexplosion , puis limplosion de la

    finance, et non par une quelconque hausse des dpenses publiques), les politiques

    daustrit ont bris la reprise de croissance en 2012. Le gouvernement doit-il sedonner comme objectif de prolonger laustrit pendant 4 ans encore ? Ne nous y

    trompons pas : une austrit par la baisse des dpenses publiques serait encore plus

    pnible conomiquement et socialement pour la masse de la population que

    laustrit par la hausse des impts.