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© 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Cahiers de nutrition et diététique (2011) 46, S46-S53 Les boissons de l’effort : bases physiologiques de leurs utilisations et composition Sport drinks: physiologic basis for their use and composition Correspondance / Correspondence [email protected] C.- Y. Guezennec Pôle de médecine du Sport de l’Essonne, Centre National du Rugby, 91460 Marcoussis, France Résumé Il est aujourd’hui bien démontré qu’une hydratation et un apport alimentaire adaptés aux conditions de l’activité physique intense sont des facteurs de la performance. Par ailleurs, la qualité des nutriments et le moment de l’administration jouent un rôle sur la prévention de la santé des pratiquants sportifs. Le rappel sur des bases de la physiologie de l’activité physique permet de définir les besoins d’apport énergétique avant, pendant et après l’effort. Ces notions indiquent les durées et le niveau des efforts qui nécessitent un apport alimentaire pendant la période d’activité physique. Un consensus se dégage pour proposer systématiquement un apport d’hydrates de carbone se situant entre 20 et 30 g par heure pour les efforts intenses de plus d’une heure. Le besoin hydrique peut être fixé à partir des connaissances sur la thermorégulation, la perte d’eau à l’effort vient principalement du débit sudoral. Ce débit, déterminé par l’intensité de l’activité physique et la contrainte climatique de l’environnement, peut s’échelonner de 0,5 à 4 litres par heure. Dans la mesure où une déshydratation supérieure à 2 % du poids corporel est responsable d’une diminution importante des capacités physiques et mentales, il est indispensable de compléter au moins en partie cette perte d’eau. Ces éléments soulignent le fait que l’apport d’eau est indispensable pendant et après les exercices prolongés et qu’il doit s’accompagner d’un apport modéré de sodium. La recommandation admise afin de compenser ces pertes et aussi de favoriser la vidange gastrique de l’eau est 20 à 30 meq.L–1 de sodium et 20 5 meq.L–1 de potassium dans la composition des boissons de l’effort. La réhydratation abondante avec de l’eau non minéralisée pendant des efforts très prolongés fait courir un risque d’hyponatrémie dont les conséquences sont graves. L’ensemble de ces données permet de soutenir les recommandations concernant les boissons de l’effort. Les seuls éléments ayant fait la preuve de leur efficacité sur la performance et la prévention des conséquences physiopathologiques des efforts de longue durée sont l’eau, les sucres et le sel. On peut choisir de les fournir séparément, mais le meilleur procédé consiste à les apporter ensemble dans une boisson. Les recommandations internationales s’accordent pour définir les compositions de ces boissons, les différentes concentrations par litre doivent se situer entre 15 et 87 g de glucides, 460 à 1150 mg de sodium et présenter une osmolarité qui ne dépasse pas 330 mOsm par kg d’eau. © 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. MOTS CLÉS Boissons de l’effort ; physiologie de l’activité physique ; hydratation ; dépense énergétique

Les boissons de l’effort : bases physiologiques de leurs utilisations et composition

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Cahiers de nutrition et diététique (2011) 46, S46-S53

Lesboissonsdel’effort:basesphysiologiques deleursutilisationsetcomposition

Sportdrinks:physiologicbasisfortheiruseandcomposition

Correspondance / [email protected]

C.-Y.Guezennec

Pôle de médecine du Sport de l’Essonne, Centre National du Rugby, 91460 Marcoussis, France

RésuméIl est aujourd’hui bien démontré qu’une hydratation et un apport alimentaire adaptés aux conditions de l’activité physique intense sont des facteurs de la performance. Par ailleurs, la qualité des nutriments et le moment de l’administration jouent un rôle sur la prévention de la santé des pratiquants sportifs. Le rappel sur des bases de la physiologie de l’activité physique permet de définir les besoins d’apport énergétique avant, pendant et après l’effort. Ces notions indiquent les durées et le niveau des efforts qui nécessitent un apport alimentaire pendant la période d’activité physique. Un consensus se dégage pour proposer systématiquement un apport d’hydrates de carbone se situant entre 20 et 30 g par heure pour les efforts intenses de plus d’une heure. Le besoin hydrique peut être fixé à partir des connaissances sur la thermorégulation, la perte d’eau à l’effort vient principalement du débit sudoral. Ce débit, déterminé par l’intensité de l’activité physique et la contrainte climatique de l’environnement, peut s’échelonner de 0,5 à 4 litres par heure. Dans la mesure où une déshydratation supérieure à 2 % du poids corporel est responsable d’une diminution importante des capacités physiques et mentales, il est indispensable de compléter au moins en partie cette perte d’eau. Ces éléments soulignent le fait que l’apport d’eau est indispensable pendant et après les exercices prolongés et qu’il doit s’accompagner d’un apport modéré de sodium. La recommandation admise afin de compenser ces pertes et aussi de favoriser la vidange gastrique de l’eau est 20 à 30 meq.L–1 de sodium et 20 5 meq.L–1 de potassium dans la composition des boissons de l’effort. La réhydratation abondante avec de l’eau non minéralisée pendant des efforts très prolongés fait courir un risque d’hyponatrémie dont les conséquences sont graves. L’ensemble de ces données permet de soutenir les recommandations concernant les boissons de l’effort. Les seuls éléments ayant fait la preuve de leur efficacité sur la performance et la prévention des conséquences physiopathologiques des efforts de longue durée sont l’eau, les sucres et le sel. On peut choisir de les fournir séparément, mais le meilleur procédé consiste à les apporter ensemble dans une boisson. Les recommandations internationales s’accordent pour définir les compositions de ces boissons, les différentes concentrations par litre doivent se situer entre 15 et 87 g de glucides, 460 à 1150 mg de sodium et présenter une osmolarité qui ne dépasse pas 330 mOsm par kg d’eau.

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MOTS ClÉSBoissonsdel’effort;physiologiedel’activitéphysique;hydratation;dépenseénergétique

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SummaryIt is well established that hydration and nutrients supply are determining factors of physical exercise performance. The type and the timing of nutrients administration are involved in sport practitioners health. A brief overview of physical exercise physiology allows to define the energy needs before, during and after sport activities. During exercise, carbohydrates should be consumed at a rate of 20-30 grams per hour for physical exercise lasting more than one hour. Hydration needs could be established according to the principles of thermoregulation. The sweat rate is the main factor to predict body fluids decrease. It is determined by environmental conditions and ranges from 0.5 l/h to 4 l/h. A water deficit exceeding 2% of body weight decreases physical and mental performance. Thus, adequate fluid intake is important for health and optimal performance. Moreover, sweat contains substantial amounts of sodium and it is therefore admitted that moderate sodium supply in the range of 20-30 meq.L–1 complete the sodium loss and facilitate gastric emptying. Hyponatremia can result from a failure to replace sodium loss with excessive water intake. These general data supports recommendations for the use of sport beverages. The main components proposed in order to maintain performance and health are water, carbohydrates and sodium. International guidelines give indications for the composition of sport beverages, which should contain 15 to 87 grams of carbohydrates and 460 to 1150 mg of sodium per liter, and not exceed 330 mOsm per kg of water. © 2011 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

KEywORDSSportBeverage;physicalactivityphysiology;hydration; energyexpenditure

Introduction

L’intérêt pour la pratique sportive des boissons de l’effort peut s’analyser à partir des connaissances sur la physiologie de l’exercice physique. Ces données permettent de définir leur composition et leurs indications en fonction du type de pratique sportive et de son niveau à partir des besoins énergétiques et hydriques. Ces objectifs sont clairement définis dans une publi-cation récente [1] qui résume les différents consensus sur la composition des boissons de l’effort et leur mode d’utilisation.La pratique de toute activité physique repose entièrement sur les mécanismes de la contraction musculaire [2]. Le muscle squelettique est assimilable à un moteur thermique, pour se contracter il doit recevoir de l’énergie, mais son rendement n’est pas parfait. La production d’énergie mécanique se situe entre 15 et 25 % de l’énergie consommée, le reste apparaît sous forme de chaleur. Pour assurer les besoins du muscle il faut dans le même temps apporter de l’énergie et évacuer la chaleur.

Lebesoind’énergie

Les substrats énergétiques utilisés pour le travail musculaire varient en fonction de l’intensité et de la durée de l’exercice musculaire. On distingue schématiquement trois cas différents : les efforts intenses et de courte durée de quelques secondes à la minute, qui font appel au métabolisme anaérobie utilisant les stocks intra-musculaire d’énergie, les efforts maximaux de moyenne durée, de quelques minutes à une heure, qui solli-citent à la fois le métabolisme anaérobie et aérobie, alimenté à la fois par les réserves en glycogène musculaire et par les réserves d’autres tissus de l’organisme, et enfin, les efforts prolongés au-delà d’une heure, pour lesquels le métabolisme est strictement aérobie. La description de ces voies permet de fixer le niveau de dépense et les besoins d’apport.

les efforts intenses de courte durée

Le métabolisme anaérobie alactique est la seule source de substrat pour les efforts intenses d’une durée inférieure à

quelques dizaines de secondes. La quantité d’énergie fournie peut atteindre une valeur de 250 Kcal par min pendant 7 à 10 secondes chez des athlètes, les substrats énergétiques utilisés par cette voie sont les réserves intramusculaires en phosphagène : ATP et créatine phosphate. Ils sont strictement intra-musculaires et leur resynthèse se fait uniquement pendant la période de récupération à partir des réserves de glycogène musculaire. Pour ce type d’activité physique, il est inutile de prévoir un apport nutritionnel pendant l’effort car il ne sera pas directement utilisé et les réserves endogènes sont largement suffisantes pour couvrir les besoins de la récupération à court terme.

Leseffortsdemoyennedurée

Dès que le travail musculaire intense dépasse 10 à 15 secondes, les muscles mettent en jeu la glycolyse anaérobie. Cette voie métabolique aboutit à la production d’acide lactique à partir du glycogène musculaire, et produit 120 à 130 Kcal par minute chez des athlètes entraînés. Le facteur limitant de ce type d’exercice maximal n’est pas l’épuisement du glycogène mais l’augmentation rapide de l’acidose muscu-laire qui bloque les voies métaboliques. La resynthèse du glycogène utilisé ne peut se faire que lors de la récupération. Ce métabolisme est sollicité dans les épreuves sportives de courte durée. Dans ce cas, il est inutile ou impossible de prévoir un apport alimentaire pendant l’effort. Il est aussi mis en jeu dans les entraînements fractionnés avec des pics d’intensité et des temps de récupération et dans les sports collectifs. La diminution des réserves glycogéniques peut devenir un facteur limitant, il est donc utile de prévoir un apport alimentaire pendant les périodes de récupération.

Leseffortsprolongés

Les efforts plus prolongés utilisent essentiellement le méta-bolisme aérobie, qui devient la seule voie métabolique mise en jeu au-delà de 15 à 20 minutes d’effort. La puissance maximale du métabolisme aérobie correspond à la consom-mation maximale d’oxygène (VO2 max). La valeur moyenne

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S48 C. - Y. Guezennec

du VO2 max dans une population d’adultes jeunes sédentaires est de 45 ml.min.–1 kg–1. Elle peut atteindre 85 ml.min.–1 kg–1 chez les athlètes de haut niveau dans les sports d’endurance. Ces athlètes peuvent maintenir autour de 70 % à 80 % du VO2 max pendant 2 heures et 50 % du VO2 max pendant 8 à 10 heures. Selon la fraction de consommation d’oxygène utilisée, la dépense calorique pour des efforts épuisants d’une heure se situe entre 600 et 1500 Kcal. Les substrats glucidiques et lipidiques couvrent la majorité des dépenses, cependant un des facteurs limitant le maintien d’un niveau d’effort constant est la diminution progressive des réserves glycogénique musculaires et hépatique. Selon les résultats de Karlsson et Saltin [3], la consommation en glucose du muscle est respectivement de 0,7, 1,4 et 3,4 mmoles.kg-1.min-1 à 50, 75 et 100 % de la consommation maximale d’oxygène (VO2 max). Elle est en grande partie couverte à partir des réserves glycogéniques musculaires. L’épuisement du glycogène musculaire survient en moyenne après environ 90 minutes d’exercice à 75 % du VO2 max ou 4 h à 55 % du VO2 max. La réduction du glycogène musculaire n’impose pas l’arrêt du travail musculaire, mais limite considérablement la capacité de travail maximal.Par exemple, un marathonien capable de soutenir une vitesse de course stable jusqu’au deux tiers de la course sera obligé de terminer à faible allure ou en marchant s’il n’a pas prévu un plan alimentaire rigoureux en début de course permettant de suppléer par un apport oral d’hydrates de carbone (CHO) à la baisse des réserves endogènes. Il a été largement démontré que ce type d’apport retarde l’épuisement du glycogène musculaire et permet de maintenir la glycémie [1]. Ce rôle déterminant de l’apport exogène d’hydrates de carbone pendant l’effort est illustré par le schéma classique de Peronnet (Fig. 1) [4] qui représente les différences théoriques de performances sur le marathon de coureurs recevant un apport glucidique, comparés à ceux qui ne reçoivent rien. L’apport exogène d’hydrates de carbone sert principalement au maintien du débit de glucose sanguin. Lors de l’exercice musculaire, la production de glucose est la seule source endogène pour alimenter le débit de glucose sanguin. La diminution des réserves glycogéniques hépatiques devient critique à partir de 2 à 3 heures d’effort continu autour de 70 % du VO2 max. Sans apport exogène d’hydrates de carbone, son épuisement conduit inéluctablement à une hypoglycémie. Le système nerveux central est très sensible à l’hypoglycémie induite par l’exercice. Il est en grande partie responsable de la sensation de fatigue des exercices physiques prolongés.Deux autres sources de substrats viennent aider et voire suppléer aux réserves glycogéniques pour ce type d’effort. En premier lieu, le pourcentage de l’énergie fournie par l’oxydation des lipides augmente en fonction de la durée de l’effort. Pour une durée de course de 30 minutes, le pourcentage est de 10 %, il passe à 30 % pour 2 heures, et dépasse 60 % au-delà de 3 h. Les protéines participent aussi au métabolisme musculaire par le biais de l’oxydation des acides aminés branchés. Lors d’un exercice prolongé, l’oxydation de la leucine peut représenter jusqu’à 10 % du métabolisme total. Cependant, ces voies métaboliques ne permettent pas de suppléer à la glycogénolyse hépatique pour alimenter les besoins en glucose du muscle. Ce rappel souligne le rôle déterminant des hydrates de carbone comme carburant énergétique principal pendant l’exercice physique. Un moyen efficace permettant d’optimiser la performance consiste à augmenter le niveau des apports glucidiques ali-mentaires avant et pendant l’exercice physique. Les apports après l’effort permettent d’améliorer la récupération.

L’apportd’hydratesdecarboneavantl’exercice

Il a été largement démontré qu’un apport élevé d’hydrates de carbone, entre 60 et 70 % de l’apport énergétique total, les jours précédents un exercice prolongé, augmente le taux de glycogène musculaire et favorise la performance [5]. Par-contre, les effets de l’ingestion d’une ration riche en hydrates de carbone dans l’heure précédent un exercice prolongé donnent des résultats beaucoup plus inconstants [1,6]. Ces contradictions s’expliquent par les différences dans le moment de l’ingestion des hydrates de carbone avant l’effort, leur quantité et surtout leur nature [6]. L’ingestion de glucose avant l’exercice est suivie d’une hyperglycémie réactionnelle qui provoque une forte réponse insulinique. Cette réponse insulinique peut induire une hypoglycémie en début d’effort. Ce phénomène est favorisé par l’augmentation du transport du glucose du secteur circulant vers le muscle dès le début du travail musculaire. Ce phénomène a été rendu responsable de la diminution de performance lors d’un effort précédé de l’ingestion d’un sucre rapide (plusieurs dizaines de minutes avant son début. Cet inconvénient a soutenu l’intérêt de l’apport d’hydrates de carbone avec des Index Glycémiques (IG) faibles avant l’effort. Malheureusement ce type de nutriment ingéré avant l’exercice physique ne s’est pas avéré aussi efficace que prévu car il ne permet pas d’augmenter les réserves glycogéniques de la même façon que le glucose. La recommandation proposée par l’International Society of Sports Nutrition [7] est l’ingestion de 1 à 2 g d’hydrates de carbone par kg de poids corporel associés à 0,15-0,25 g de protéines 3 ou 4 heures avant le début d’un exercice prolongé.

L’apportd’hydratesdecarbonependantl’exercice

L’amélioration de la performance sous l’effet d’une ingestion d’hydrates de carbone est perceptible pour des efforts très intenses de moins d’une heure [8]. Cet effet devient constant pour tous les efforts d’une durée supérieure à une heure. L’apport optimum se situe entre 30 et 60 g d’hydrates de carbone par heure d’effort. C’est pour ce type d’apport que les effets sur la performance sont les plus nets.

Sans glucide : impossible de maintenir son e�ort

Vitesse de course

(m/min)

250

200

150

100

50

Le coureur frappe le mur à 30 km

Le coureur frappe le mur à 24 km

Le coureur marche

ARRIVÉE

ARRIVÉE

DÉPART

0 1 2 3 4 5 6Temps (heures)

Réserve deglycogène musculaire

inférieursupérieure à la normale

3h30 min

5 heures

1h30d'écart

Figure1.Écarts théoriques de performance entre deux marathoniens de capacités physiologiques équivalentes résultant de l’absence d’apport glucidique exogène pour le plus lent. D’après [4].

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Les boissons de l’effort : bases physiologiques de leurs utilisations et composition S49

Selon les études le gain de performance pour des efforts menés jusqu’à l’épuisement autour de 70 % de la capacité aérobie maximale se situe entre 15 et 30 % du temps de tra-vail supplémentaire [1,6,7]. L’analyse des différentes études montre que le meilleur gain de performance est obtenu par l’ingestion de soluté glucidique dont la concentration est autour de 8 % avec une légère teneur en sodium. Une étude menée par Fielding [9] a permis d’établir une relation entre la fréquence d’apport et la performance : un apport de 10 g d’hydrates de carbone dilué dans 200 ml d’eau toutes les 30 minutes, comparé à un apport de 80 g toutes les heures pendant quatre heures de vélo, s’est avéré plus efficace pour le sprint final. Donc il serait préférable d’apporter de plus faibles doses fréquemment. La séquence d’absorption d’hydrates de carbone considérée aujourd’hui comme opti-male pour les efforts au-delà de deux heures est un apport de 10 à 15 g toutes les 15 ou 20 minutes. Cet apport doit être principalement composé de glucose. Sur un plan pratique, il semble qu’un apport alimentaire de glucose se situant autour de 1,1 à 1,2 g par minute d’exercice musculaire soit un maximum, mais il peut être intéressant d’influencer l’IG en ajoutant dans des proportions variables du fructose ou des maltodextrines. Le fructose seul ou en trop grande quantité doit être évité en raison des troubles digestifs qu’il peut produire, par ailleurs le fructose est le sucre simple le moins disponible pour l’oxydation, son taux d’oxydation à l’effort est inférieur à 0.5g.min–1. Le maltose présente une disponibilité identique à celle du glucose. Concernant les polymères de glucose, leur taux moyen d’oxydation se situe entre 0,60 et 0,80 g.min–1. La vitesse d’oxydation des hydrates de carbone complexes est très variable. Elle dépend de leur solubilité, de la nature des amidons et de l’enveloppe fibreuse des aliments. Certains amidons très solubles ont une vitesse d’oxydation identique au glucose, alors que des nutriments comme les pâtes alimentaires ou des céréales ont un taux d’oxydation inférieur à 0.6 g/min. Les effets de l’IG sur la performance ont fait l’objet de nombreuses discussions. Aujourd’hui il est admis que l’on doit privilégier l’usage d’hydrates de carbone avec un IG élevé pendant l’effort [10].

L’apportd’hydratesdecarbonelors de la récupération

Il est largement démontré que l’apport d’hydrates de car-bone dès l’arrêt de l’exercice musculaire accélère de façon très significative la resynthèse des stocks de glycogène. La consommation de 1,5 g par kg de poids corporel dans les 30 premières minutes de récupération et poursuivi toutes les 2 heures jusqu’à 6 heures après l’effort est la recom-mandation admise par tous pour favoriser la récupération [1,7]. La vitesse de resynthèse du glycogène musculaire est

identique dans la phase de récupération après l’ingestion de glucose ou de polymères de glucose, mais elle est plus lente avec du fructose. A l’inverse le fructose accélère la vitesse de resynthèse du glycogène hépatique. Dans la mesure ou la glycogénosynthèse est soutenue par l’action de l’insuline, il est utile dans la phase de récupération d’administrer des hydrates de carbone avec un index glycémique élevé. Certaines études auraient tendance à montrer que l’addition d’un faible apport de protéines à la ration glucidique pourrait améliorer la vitesse de resynthèse du glycogène, mais ce point est encore discuté [11].

le besoin en eau

Lesperteseneaupendantl’effort

La production de chaleur pendant l’exercice physique est proportionnelle à son intensité. Il en résulte une augmentation de la température centrale qui est, avec la diminution des réserves énergétiques, une des causes principales de la fatigue. L’organisme dispose de plusieurs processus pour évacuer la chaleur, cependant, celui qui est réellement capable de réguler l’accumulation de chaleur dans le corps humain est la sudation. L’évaporation de 1 litre de sueur à la surface de la peau permet d’évacuer 580 Kcal. Au cours de l’exercice, les débits sudoraux sont adaptés à l’intensité de la charge thermique. Le débit sudoral dépend des conditions climatiques, du type et de l’intensité de l’exercice, mais aussi du niveau d’entraî-nement, et de l’acclimatation du sujet. Un tableau de synthèse des différents débits sudoraux par type de sport a été publié par l’American College of Sport Medicine [11]. Il montre que les valeurs s’échelonnent en moyenne de 0,5 à 2 L par heure. Mais lors de conditions climatiques extrêmes, des débits beaucoup plus importants ont pu être décrits pouvant atteindre 4 L par heure. Ce débit sudoral est responsable d’une perte hydrique qui sera prévisible en connaissant le niveau de travail musculaire et l’ambiance thermique. Une partie importante de la perte liquidienne provient du compartiment plasmatique, mais si la perte est importante le compartiment intracellulaire participe au remplissage du secteur circulant et on peut aboutir à une déshydratation intracellulaire dont les conséquences peuvent être graves pour la santé.Un sujet de 70 kg qui court 15 km dépense approximati-vement 1000 Kcal, 750 Kcal vont apparaître sous forme de chaleur. Pour évacuer cette chaleur il faudra évaporer à peu près 1,3 litre de sueur en climat tempéré. Ce calcul devient beaucoup plus compliqué s’il faut tenir compte de l’ambiance climatique. Dans ce cas, il est plus facile de tenir compte de tables préalablement établies (Tableau 1).

Tableau 1. Besoins en eau en litres par heure pour différentes ambiances et par type d’activité

Niveaud’activité 23°C 50%humidité

23% 100%humidité

30° 50%humidité

40° 100%humidité

Légère (travail assis) 0,100 0,200 0,300 0,5

Modéré (marche) 0,300 0,6 1 1,5

Intense (course 15 Km/h) 1,3 2 3 impossible

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S50 C. - Y. Guezennec

Conséquencesd’unehydratationinsuffisante

Au cours de l’exercice, les apports spontanés en boisson sous l’effet de la soif ne permettent, dans les meilleurs des cas, que de remplacer 80 % des pertes hydriques. Lorsque le niveau d’hydratation est laissé libre malgré la parfaite disponibilité en boissons, il est classique d’enregistrer des niveaux de déshydratation volontaire variant de 2 à 6 % du poids corporel [12]. Ce niveau de pertes est directement responsable d’une baisse des performances physiques et mentales, qui apparaît pour une perte de poids corporel supérieure à 2 % et qui s’aggrave rapidement au-delà [11].

L’hypovolémie

Lorsque les pertes hydriques sont supérieures aux apports, il en résulte une diminution des volumes liquidiens circulants ou hypovolémie.Cette hypovolémie a une influence sur le système cardio-vasculaire. Afin de maintenir un débit sanguin musculaire adapté à l’intensité de l’exercice, et compte tenu de la réduction du volume systolique liée à la déshydratation, le système cardiovasculaire s’adapte par une augmentation progressive de la fréquence cardiaque. Cette réaction a pour but de maintenir un débit cardiaque constant en dépit d’une réduction des volumes circulants. Ce phénomène est identifié sous le terme de dérive cardiaque ; il augmente de façon significative le travail cardiaque [13].Une autre conséquence de l’hypovolémie est la réduction du débit sudoral et du débit sanguin cutané. Ceci a pour conséquence de limiter considérablement l’efficacité des processus de thermolyse. Associé à la chaleur métabolique, ce phénomène majore l’augmentation de température centrale. L’hyperthermie qui en résulte est à l’origine d’une altération importante de l’ensemble des mécanismes de la contraction musculaire et du fonctionnement du système nerveux à l’étage central et périphérique, objectivé par une modification du signal électromyographique et une baisse du débit sanguin cérébral [14]. Lors de l’exercice, il se produit une diminution du débit sanguin splanchnique qui est majorée par la déshydratation. Ce phénomène est responsable d’une fréquence élevée de troubles digestifs (douleurs, diarrhée, vomissements…) lors des exercices prolongés. La meilleure protection réside dans une hydratation efficace [15].

Déshydratationetexercicephysiqueprolongé

Plusieurs conséquences pathologiques peuvent résulter d’une mauvaise hydratation. Elles s’échelonnent selon une échelle de gravité. Le plus grave est le coup de chaleur d’exercice. Cet accident est gravissime puisqu’il y a peu de temps encore, il conduisait à la mort dans presque 50 % des cas. À son origine, il y a certes un exercice musculaire trop intense en climat chaud mais aussi pratiquement toujours une hydratation insuffisante comme facteur associé [16]. Moins grave, la déshydratation chronique en période chaude est responsable de fatigue.Ces données permettent de rappeler que la sensation de soif est un paramètre très imparfait de contrôle de la restauration des pertes liquidiennes. Cette imprécision de la soif dans la compensation des pertes rapides observées lors du travail musculaire s’explique par ses mécanismes. Un des facteurs déclenchant de la soif se situe au niveau du système nerveux

central. Il est le résultat d’une déshydratation intracellulaire de cellules hypothalamiques. Ce phénomène se produit avec retard par rapport aux fluctuations rapides du milieu circulant. Lors de l’exercice musculaire, un autre facteur dipsinogène est représenté par la sécrétion d’angiotensine II, mais cette action est elle aussi retardée par rapport au début de l’exercice.

L’hydratationpendantetaprèsl’effort

Il est donc essentiel de restaurer au mieux les pertes liqui-diennes liées à la sudation. Les objectifs poursuivis par la réhydratation au cours de l’exercice sont le remplacement le plus rapidement possible des pertes liquidiennes dans le but de stabiliser le travail cardiaque, de préserver un débit sudo-ral suffisant pour assurer une thermolyse efficace, équilibrer le bilan thermique et maintenir les performances nerveuses et cognitives. Par ailleurs, ces pertes sudorales entraînent une perte d’électrolytes. La concentration moyenne de sodium dans la sueur est entre 20 et 80 mmol.L–1 et celle de potassium entre 4 et 8 mmol.L–1. Ces concentrations montrent que de fortes quantités de sodium sont perdues lors des débits sudoraux intenses alors que les pertes de potassium restent modérées. La diminution du niveau de sodium plasmatique qui résulte de ces pertes sudorales est un facteur important de fatigue et de diminution des performances [17].Ces éléments soulignent le fait que l’apport d’eau est indispensable pendant et après les exercices prolongés et qu’il doit s’accompagner d’un apport modéré de sodium. La recommandation admise afin de compenser ces pertes et aussi de favoriser la vidange gastrique de l’eau est de 20 à 30 meq.L-1 de sodium et 20.5 meq.L-1 de potassium dans la composition des boissons de l’effort. La réhydratation abondante avec de l’eau non minéralisée pendant des efforts très prolongés fait courir un risque d’hyponatrémie dont les conséquences sont graves [17].

Laréhydratationpendantl’effort

Le problème majeur posé par la réhydratation au cours de l’exercice musculaire est celui de la vitesse avec laquelle les pertes sudorales seront remplacées. La vitesse de remplace-ment des liquides de l’organisme dépend à la fois :• du volume des apports liquidiens ;• de la vitesse de vidange gastrique ;• et du niveau d’absorption intestinale des fluides.

La vidange gastrique est influencée par le volume ingéré, la composition des boissons, leur température, et l’intensité de l’exercice.

La vidange gastriqueLa vitesse de vidange gastrique augmente avec le volume de boisson ingérée. Une étude menée par Mitchell et Voss [18] a montré que le débit d’évacuation gastrique augmente linéai-rement jusqu’à un niveau de remplissage de 600 à 1000 ml, avec chez certains sujets, des débits pouvant atteindre 1600 ml.h–1. L’ingestion unique d’un important volume de liquide provoque une vidange gastrique dont la vitesse suit une courbe comportant une phase initiale rapide et une phase tardive plus lente. Cependant, l’ingestion répétée de grands volumes à intervalles de temps rapprochés augmente la fréquence des douleurs abdominales liées à la distension

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aiguë de l’estomac [19]. Il existe cependant de très grandes différences interindividuelles dans les vitesses de vidange gastrique, qui pourraient être expliquées, au moins en partie, par l’adaptation de certains sujets à l’ingestion de larges volumes. Ceci souligne l’importance d’essayer ces stratégies de réhydratation à l’entraînement, afin d’opti-miser le volume des apports tout en conservant le confort gastrique. On remarque une augmentation de la sensation de pesanteur abdominale, l’inconfort abdominal apparaît pour la majorité des sujets dès la 45ème minute. L’ingestion répétée de 150 ml de boisson peut, dans la majorité des cas, être facilement réalisée toutes les 20 minutes au cours de l’exercice, et favoriser ainsi la vidange rapide de l’estomac. L’ingestion de volumes plus importants (300-350 ml toutes les 20 minutes) va mettre en jeu la tolérance digestive des sujets. Il est important que les sportifs testent et connaissent leur tolérance aux pesanteurs gastriques liées à l’ingestion de volumes conséquents de boissons.

L’osmolarité de la boissonL’osmolarité de la boisson ingérée joue un rôle déterminant dans la vitesse de vidange de l’estomac. L’étude princeps de Costill et Saltin [20] permettait déjà de mettre clairement en évidence l’influence de l’osmolarité des solutés glucosés de réhydratation sur la vitesse de vidange gastrique. Au repos, et après l’ingestion d’un bolus de 400 ml de solutés glucosés dont les osmolarités varient de 209 à 902 mosm/l, les mesures de résidu gastrique réalisées à différents temps permettent de montrer que la vitesse de vidange de l’estomac diminue avec l’augmentation de l’osmolarité du soluté. En pratique, si l’on veut diluer des hydrates de carbone dans l’eau de boisson, il ne faut pas que le soluté de glucose dépasse 10 % de la solution préparée. Dans la mesure où l’osmolarité de la boisson ingérée est un facteur limitant de la vidange gastrique et pouvant réduire la disponibilité en eau de l’organisme, il faut privilégier l’utilisation de polymères de glucose et de solutions de disaccharides qui permettent de réduire l’osmolarité des boissons tout en préservant leur charge énergétique. Le consensus actuel est de limiter la concentration de soluté glucidique entre 6 et 8 % [21].Il est utile de faire varier la concentration en soluté des boissons de l’effort en fonction des conditions climatiques. En ambiance froide, le besoin d’énergie est prépondérant, lorsque la température augmente, il faut privilégier l’apport d’eau (Tableau 2).

La température de la boissonLa température de la boisson est un facteur de contrôle de la vidange gastrique. L’estomac accélère la vidange lorsque les boissons fraîches sont consommées. Cependant, il semble que les boissons glacées aient un effet freinateur sur les processus physiologiques de thermorégulation en agissant sur les récepteurs thermiques profonds. C’est pourquoi il parait plus judicieux de conseiller la consommation de boissons fraîches entre 10 et 15 °C qui pourront participer

au refroidissement du noyau central de l’organisme, et être agréablement rafraîchissantes, ce qui, comme nous l’avons vu, favorisera leur consommation spontanée.

L’intensité de l’exerciceL’intensité de l’exercice est un des facteurs de contrôle de la vidange gastrique. Il a été démontré que les exer-cices de faible et moyenne intensité n’avaient que peu de conséquences sur la vidange de l’estomac. Par contre, la vidange gastrique est ralentie pour les efforts très importants au-dessus de 70 % de la capacité aérobie [22]. La vitesse d’absorption intestinale agit sur la disponibilité des fluides ingérés. En premier lieu il se produit une réduction du débit sanguin splanchnique sous l’effet de l’exercice qui diminue l’absorption intestinale dans son ensemble. Cependant, des études réalisées à l’aide de marqueurs isotopiques montrent que la vitesse d’absorption des fluides est peu influencée par l’exercice physique [23]. Les travaux de Nancy Rehrer [24] ont permis d’établir le fait que l’ingestion de soluté d’hydrates de carbone améliorait le débit sanguin splanch-nique à l’effort et par conséquent l’absorption intestinale des fluides. Ce phénomène semble aussi favorisé par un faible apport de sodium.Les bases que nous venons d’exposer montrent que l’intérêt d’une boisson de l’effort consiste à apporter dans le même temps l’énergie, sous forme d’hydrates de carbone, l’eau et du sel. Le principe de base consiste à rechercher l’association optimale qui permettra la meilleure disponibilité de ces éléments sans inconfort digestif

la récupération

L’objectif est de compléter aussi rapidement que possible les pertes en eau et en électrolytes. Les données d’observation réalisées sur les consommations spontanées de sportifs montrent que la restauration des pertes hydriques est souvent plus rapide que celle des pertes sodées. La recommandation est donc d’utiliser des boissons de l’effort qui apportent les deux éléments. Il est préférable d’assurer un apport régu-lier plutôt que d’ingérer des volumes importants en prises espacées. Le volume optimum est de 1,5 L de boisson pour chaque kilogramme perdu de poids corporel [21]. Plusieurs consensus s’accordent pour définir les intervalles de variation admissibles pour les boissons de l’effort (Fig. 2).Il est donc important, d’encourager l’apport volontaire en boissons, sans attendre l’apparition de la soif et d’améliorer la palatabilité des boissons. Le caractère agréable des bois-sons de l’effort peut être amélioré par leur température et leur goût. Pendant la récupération d’un exercice de longue durée, l’apport hydrique est amélioré par l’ingestion de bois-sons dont la température avoisine 15 °C. De même, au cours d’un exercice réalisé en ambiance chaude, la consommation spontanée de boissons à 15 °C est de 32 à 43 % supérieure à celle d’une boisson maintenue à température ambiante.

Tableau 2. Concentrations recommandées en glucides selon les conditions de pratique

Conditionsdepratique(àintensitéetduréeégale) Concentrationenglucides

Température froide 60 grammes /litre

Température modérée 40 grammes /litre

Température chaude 20 grammes /litre

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S52 C. - Y. Guezennec

De plus, l’aromatisation des boissons de l’effort favorise le volume des boissons spontanément absorbées.

L’hydratationavantleseffortsimportants

Le niveau d’hydratation quotidien en situation d’entraîne-ment physique peut influencer considérablement la tolérance à un effort important. Un état d’hydratation normal est défini par le terme d’« euhydratation ». En pratique on peut l’apprécier à partir des critères suivants [25] :• un poids corporel stable d’un jour sur l’autre en admettant

une variation de 0,5 kg ;• un apport de boissons quotidien permettant un débit

urinaire suffisant et une concentration urinaire stable d’un jour sur l’autre ;

• des paramètres biologiques sanguins permettant d’exclure une hémoconcentration.

Lorsqu’un entraînement physique bien conduit est associé à une euhydratation, on observe une augmentation chronique des volumes circulants. Ce facteur fait partie des adaptations qui augmentent la performance dans la mesure où le trans-port de l’oxygène par la circulation sanguine est amélioré par des volumes circulants élevés. Cette adaptation est totalement obtenue si le sportif, même amateur s’astreint à un plan d’hydratation rigoureux dans sa vie quotidienne. Une étude brésilienne [26] menée en climat chaud (température sèche de 27 °C et humidité ambiante de 80 %) a permis de vérifier l’intérêt d’une hydratation abondante en situation d’entraînement intense chez des footballeurs. Les sujets suivant le programme d’hyperhydratation absorbaient en moyenne 4,6 L/j, contre 2,7 L/j chez les sujets contrôles.Malgré l’augmentation du débit urinaire, l’hyperhydra-tation permet une augmentation de l’eau corporelle. La participation à un match de football à l’issue de la semaine d’hydratation contrôlée a mis en évidence une moindre augmentation de la température corporelle chez les sujets hyperhydratés. Après la réalisation des deux mi-temps du match, les performances sont meilleures chez les sujets hyperhydratés.

Les effets de l’hyperhydratation dans les heures qui précèdent un effort important est un sujet de discussion dans la mesure où les mécanismes de la diurèse ne per-mettent pas de retenir une grande partie de l’eau ingérée. Ce phénomène a conduit de nombreux auteurs à proposer d’asso-cier un apport de glycérol afin de retenir l’eau dans le secteur circulant. Cet apport présente cependant des inconvénients sur le plan de la tolérance digestive et cette pratique n’est pas recommandée [21]. Il est préférable de favoriser une euhydratation dans les jours précédents.

Pratiquessportivesspécifiquesethydratation

En dehors de l’adaptation étroite des besoins aux dépenses selon les principes qui ont été exposés dans la première partie, certaines pratiques sportives ou de loisirs exposent plus particulièrement à un déficit d’apport hydrique. La raison principale est le plus souvent la difficulté

d’avoir de l’eau à disposition. Sans être exhaustif, nous allons évoquer des circonstances qui concernent le plus grand nombre. En premier lieu, la pratique des sports de montagne. Le plus souvent l’hydratation est très insuffisante en raison de la difficulté d’emporter sur soi la quantité d’eau nécessaire pour une journée d’activité et aussi pour une autre raison, qui tient au fait que les mécanismes de la soif sont en partie inhibés par les conditions de l’environnement. En montagne l’air froid stimule des thermorécepteurs au froid de la face qui inhibent la soif. Cet état est une des causes de la fatigue qui s’installe progressivement et compromet à la fois la sécurité et le plaisir des pratiques sportives.

Conclusionspratiques

L’ensemble de ces données permet de soutenir les recomman-dations concernant les boissons de l’effort. Les seuls éléments ayant fait la preuve de leur efficacité sur la performance et la prévention des conséquences physiopathologiques des efforts de longue durée sont l’eau, les sucres et le sel. On peut choisir de les fournir séparément, mais le meilleur procédé consiste à les apporter ensemble dans une boisson. Plusieurs consensus s’accordent pour définir les intervalles de variations admis-sibles dans les boissons de l’effort. Cette possibilité de faire varier le contenu en soluté et eau permet de s’adapter aux différentes conditions d’utilisation des boissons de l’effort. En climat chaud, la priorité est l’apport d’eau, il sera donc utile de choisir les boissons les moins concentrées. Lors de la récupération, il faut favoriser la resynthèse la plus rapide des réserves glycogéniques. Dans ce cas, il est intéressant de préconiser les boissons les plus concentrés en hydrates de carbone. Par ailleurs tous les consensus s’accordent pour ne pas conseiller l’apport dans les boissons de l’effort de com-posés ergogéniques pour des raisons de sécurité ou d’éthique. Dans la majorité des cas l’efficacité de ces composés n’est absolument pas établie. Pour une partie d’entre eux les risques pour la santé sont réels. Enfin, il est certain que l’usage de produits à la frontière des aliments et du médicament est la porte ouverte à l’utilisation de substances interdites.

BOISSON POUR LE SPORT ENERGY DRINK

Quantités minimales conseillées

Quantités maximales conseillées

Glucides

Sodium

Osmolalité*

Caféine Arginine Taurine Vitamines ne font pas partie des recommandationsde composition des boissons pour le sport

*Quantité de molécules des solutés contenu dans l'eau

15 g/l 35 g/l 57 g/l 87,5 g/l 107 g/l

460 mg/l 1150 mg/l

200mOsm

/kg d'eau

330mOsm

/kg d'eau

330mOsm

/kg d'eau254

mOsml280

mOsml

Osmolalité du sang : 290 mOsml/kg

500 mg/l

Figure2.Recommandations européennes concernant la composition des boissons de l’effort.

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Conflitsd’intérêts

L’auteur a été normalement rémunéré pour la rédaction de cet article.

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