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Les jachères longues pâturées dans les Andes. acquis interdisciplinaires

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Les jachhres longues ptiturbes dans les Andes. Acquis interdisciplinaires DOMINIQUE HERV~, GILLES RIVII~RE

Avec la montPe en puissance des prtioccupations environnementales et des interrogations sur le developpement durable, I’int&@t pour la pratique des jach&‘es duns les agricultures traditionnelles se renouvelle. S’agit-il de survivances qu’il conviendrait defaire disparaitre duns une demarche visant d rendre /‘agricu/tureplus intensive ? S’agit-ii au contraire de pratiques adapt&es aux conditions 21 la fois pPdociimatiques, Pconomiques et sociaies cr Une &mite collaboration entre /es

des pays concern& 7 Ce texte montre qu’on ne peut pas s'en tenir, pour repandre ~3 cette sciences homaines

question, i7 un biian agronomique de ia pratique de ia jachere, mais qu’il faut skier ceile-ci et les sciences natwelles permettru seule de r&user un dualisme

duns ie contexte de iu 9 communautP paysanne 1 (en /‘occurrence en AmPrique iatine) duns m~aphysiquep~~m~ a laquelle e//e a lieu : il s’av&e en @et que s’agissant d’une jach&e collective elle y prend

C. l&i-Strauss. 1983.

une place qui d&passe de beaucoup sufonction agricoie et pastorale. 11 temoigne de ce fait = La complexit@ que decouvrent

de I’intPr& d’une collaboration entre agronome et anthropologue. les sciences sociales 1.. .] ne tient pas seulement au perfectionnernent

Et de iafacon de la conduire.

La pratique de I’interdisciplinaritP dans les recherches en milieu rural a fait I’objet, au CNRS, d’actions incita- tives successives (Programmes Piren, puis Pirevs). Elle explore un nouveau mode de penser la recherche (Couty, 1990 ; Gastellu et al., 1994 ; HervG! et RiviPre, 1997). Dans une perspective interdisciplinaire, les chercheurs considerent que ieur propre discipline ne peut rendre compte de la total&? d’une rPalite complexe. Conduits par des savoirs, des perceptions, des points de vue et des dynamiques propres, ils se proposent d’arpenter ensemble des limites discipli- naires qui sont parfois floues et rarement etanches. Cette intention les distingue des recherches oti les apports disciplinaires restent cloisonnPs, evitant par commodite ou par crainte les questionnements r&i- proques.

L’&ude’ des jacheres longues paturees dans les Andes2 nous a semble propice a ce type de dPmarche pour plusieurs raisons. Les jachPres longues p&m?es se situent a [‘interface entre le c nature1 n et le e cultivP * et elles sont un lieu de rencontre et de confrontation entre cc I’individuel 0 (unite de produc- tion, famille) et le = collectif 0 (village, communautP). Cette pratique ne peut &re apprPhend@e que si I’on prend simultanement en compte plusieurs aspects (historiques, socio&onomiques, techniques, symbo- liques, etc.). C’est dans la mesure oti cette complexit@ est reconnue et assumee par tous les chercheurs qu’elle ouvre des possibilites d’interdisciplinarite.

Notre equipe s’est formee progressivement au sein d’une m@me unite de recherche de I’Orstom, par agrP- gation de nouvelles disciplines (agronomie, ethno- logie, zootechnie pastorale, sociologie3) avec des chercheurs qui avaient deja une longue experience du monde andin et qui etaient int&ess& par les rep& sentations et les pratiques paysannes. Nous sommes parvenus a un accord pour travailler ensemble sur des concepts partag& dans une communaute paysanne aymara, Pumani, sit&e sur I’altiplano central bolivien entre 3900 m et 4100 m d’altitude (carte U4.

des moyens d’observation et b I’accroissement des connaissances

Celle-ci constitue un exemple interessant a mais aux transformations acctWrPe5

plusieurs titres. D’une part, parce qu’elle est rep&en- de leur objet d’&de, 21 I’histoire. y

tative des communaut& agro-pastorales andines. M, Auge, ,996,

D’autre part, Pumani conserve plusieurs traits des communautes I originelles y_ Jusqu’aux annees 1950,

-- Abstract - Long grazing fallow in the Andes : Interdlscfplinary aims.

An interdisciplinary approach comes into view between the lines of this team Investigation synthesis which deals with andean fatlow dynamics. It questions agronomic and social sciences. An agronomist and an anthropologist, facing initial semantic difficulty to define fallow, gather their points of view concerning the same peasant community of Bolivian high plateau. This community is still functioning as the archetype of andean communltk?s. They challenge to explain why land has been fallowing during ten years since such a long time, and how collective management is changing. Firstly each research worker tries to answer within his proper scientific sphere. The agronomist checks more deeply some of the fallow functions: soil fertility restoration (quimicai, biological and physical) depending on fallow duration, the impact of long fallow on parasitism (Ciobodera pailida, Premnotrypes latithorax) and fueiwood production. The best fallow duration is not ten years for every fallow functions. The combination of these functions may have changed in the past. The anthropologist studies history of land access and actual social representations. Interdisciplinary dialog occur between them, but reality looks to be more complex and qule-t unpredictable as expecting specific fallow dynamics repeatly fail. Fallow duration looks not to change because this time is fix, cyclical; It represents the history and the memory of the community. What actually changes Is the type of land access, from collective to private, and the deslgual access to these types of land. it implies a new focus to on-farm management. We conclude that edafoiogical constraints are not the only deterministic reason for long fallow duration. We teased out the different reasons, which are multiple, jerarquized and linked within a dynamic process, as threads are. It is the main goal of an interdisciplinary research.

DOMINIQUE HERVE

Agronome, Orstom-LER.

BP 5045,

34032 Montpellier cedex 1, France

Courrlel :

[email protected]

GILLES RIVICRE

Anthropologue, Cerma-Ehess, 54, bd Raspail, 75006 Paris, France

Courriel : [email protected]

1 Le programme de recherche s’est structure B partir de deux appels d’offre : I’un emanant de I’Orstom, action incitative Durr 1992-1995) intitulee y Dynamiques et usages des ressources renouveiabies I, I’autre du programme Environnement du CNRS 1992-1997), Cornit& a Systemes ruraux * puis * Systemes ecologiques et actions de I’homme x Ce dernier nous a invite a r&fi&hir, B l’occasion des journees de Saint-Ma10 (1994) et Carry-ie- Rouet (19973, sur notre pratique de I’interdisciplinarite * dans le processus de la conduite des recherches, depuis la formulation des questions jusqu’a la construction des objets et au choix des demarches methodologiques n.

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la communaute d’Ayo Ayo regroupait plusieurs ayllu5 (Pumani, Qullana, Sullkawi) devenus depuis des communautes independantes dont certaines ont obtenu le titre de canton (carte 2). Pumani n’a jamais ete incorpore a I’hacienda voisine de Qullana. Par contre les autres ex-uyllu d’Ayo Ayo furent entiere- ment integres a des haciendas, ce qui a eu pour effet de demanteler totalement (Qullana, Sullkawi) ou partiellement (Ayo Ayo) les soles gerees collective- ment. Au moment de la reforme agraire (1953). les parcelles de I’hacienda ont et@ redistribuees aux anciens * colons )I, sans que renaisse pour autant une gestion collective des terres. Pumani constitue done bien un cas exemplaire d’une communaute agropas- torale ayant conserve I’organisation socio-econo- mique et politique ancienne. Enfin, dans cette commu- naute, la jachere collective Ctait restee de longue duree et, au moment 00 nous avons commence nos travaux (1990), elle amorcait un changement important dans le processus de gestion communautaire des terres qu’il etait possible de suivre u en direct * sur le terrain.

Nous avons considere le theme de la jachere comme une sorte de forum restreint sur lequel s’ou- vraient plusieurs portes empruntees par les differentes

’ Les jachPres rongues disciplines, chacune d’elles ‘apportant un ensemble de paturees qui entrent dans un systeme d’assolement connaissances. Pratiquant des regards croises,

cork&if SOnt design&s commentant et critiquant jes informations que nous dam res Andes sous echangions regulierement, nous sommes parvenus a

differents termes par les chercheurs : 0 sectorial

fallowing systems 0 (Orlove et Codoy. 1986) * sistemas

de barbecho sectorial * (Mayer, 1989), 0 agricultura

en campos abiertos * (Kervyn, 1989).

* assolements collectifs m (Morlon. 1992) etc. Ces

termes, et bien d’autres. sont utilises pour definir

une gestion collective de la succession de periodes

d’exploitation et de periodes de repos du sol au

tours d’un cycle de duree determinee. Les vocables varient selon les pays et

parfois les regions voisines. II est alors difficile de forger un concept standard car s’il

y a une relative unite des pratiques, il n’en va pas de meme pour les discours et

les representations, modelees par les cultures et

les histoires. Nous avons convenu de nous tenir a

I’expression jacheres longues pdturees puisque

c’est cette partie de I’assolement collectif qui

constitue notre objet d’etude commun.

3 Outre les cosignataires de cet article, ont egalement

participe a la recherche Didier Cenin (zootechnicien pastoraliste) et Luz Pacheco

definir des niveaux d’entente, pratique et conceptuelle. II s’agissait d’emblee d’associer a I’analyse realisee a partir des instruments conceptuels des observateurs, une analyse qui tienne compte des representations locales. Le theme de la jachere nest pas reste = fixe * tout au long de la recherche ; il a et6 modifie ou rede- fini au fur et a mesure qu’augmentaient les connais- sances a son propos et, pour chacun des chercheurs, a partir des Cclairages nouveaux fournis par ses collegues et des questions soulevees par I’analyse des pratiques et des representations paysannes.

Nous presenterons ici une synthese des acquis obtenus grace a notre pratique de I’interdisciplinarite. Nous rendrons compte de la construction de I’objet d’etude, des questions posees au tours de la recherche et d’une aventure qui, plus qu’a des conclu- sions, a conduit a des bilans auxquels aucun chercheur a lui seul n’aurait pu parvenir.

Comment definir la jachbe I

La jachere est un theme dont I’etude pose de nombreux problemes conceptuels, quels que soient le milieu et la societe ou il est trait& Les definitions varient grandement selon les specialistes (Sigaut, 1977, 2-3 : 154 et 1993 : 114 ; Sebillotte, 1977, 1993a :

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128-141, 1993 b ; JATBA, 1996 ; Roussel, 1996 : 7-18). Nous n’avons pas echappk g cette difficult6 qui nous a obliges a de multiples clarifications, a un * travail collectif sur les decalages de sens entre les vocabu- laires des uns et des autres 2 (Jollivet, 1992 : 240). Au sein de notre equipe, les points de vue etaient au depart divergents, mais I’acceptation des apports disci- plinaires respectifs nous a conduits B une certaine harmonisation quant a I’usage des termes.

La jachPre est dPfinie par I’agronome comme une * interculture n dans le temps et dans I’espace, c’est-a- dire une &ape dans un systeme de culture ; selon IeS auteurs, elle est un * repos * de la terre et/au une succession de travaux culturaux. Elle est aussi, comme le rappelle le zootechnicien-pastoraliste, une zone de parcours, temporaire, support de ressources fourra- g&es h&&ogPnes. Ce milieu, non totalement maitrisk est Pgalement un lieu de collecte de combustible ligneux, de plantes a usage medicinal et rituel, et d’ali- ments de substitution. La pratique de la jachere - non travail du sol durant un certain temps, mais interven- tion humaine consistant, dans le cas &udie, a faire paturer les ovins et a prelever des ligneux comme combustible - modifie I’Ctat du milieu entre I’apres- rPcolte et I’installation de la culture suivante, ce qui a des con%?quences sur la colonisation par la vegetation et sur I’aptitude a produire du sol.

Lethnologue et le sociologue partent des rep&en- tations et pratiques locales pour definir I’objet d’Ctude.

Ainsi, dans le cas consid&& le terme aynuqa, utilise localement, leur semble prCf&able a celui de a jachere m qui n’a pas d’bquivalent exact en aymara ; il reflPte mieux les usages locaux, renvoyant a la fois B un espace et $I un cycle temporel oh des elf?ments mat& riels sont combines a d’autres qui ne le sont pas. Pour les paysans aymaras, la richesse et la complexit@ du a systeme d’aynuqu * (ensemble d’cWments en interac- tion) ne s’kpuisent pas dans I’acte productif et renvoient A d’autres dimensions qu’il est impossible d’evacuer (sociales, konomiques, religieuses, symbo- liques, juridiques). Les jachkes longues paturees ne peuvent etre reduites a une succession d’activitk techniques ou a certains * &tats * de la terre

b labouree *, c au repos a, etc.) ; I’accent y est mis non seulement sur les relations de production mais aussi sur les relations qui unissent les hommes entre eux et ceux-ci aux dieux et aux esprits dans des rapports fond& sur une rkiprocite generalisee (Rivi&e, 1994, 1996 ; Cenin et al., 1994).

L’etymologie du terme uynuqa est riche d’ensei- gnement. La racine ayni- renvoie a des formes d’en- traide entre individus, dans les travaux notamment et, plus g&&alement, B des Pchanges en biens et services consid&& comme equivalents ; elle contient aussi I’idGe de * dette morale n. Le suffixe -nuqa a plusieurs sens, dont celui de r6pCtition d’une adion et celui de localisation. Le terme aynuqa (‘aynuqar’la)

4 Une fois acceptee I’idee qu’un meme terrain pouvalt @tre partage, I’enquPte a ete menee dans une seule communaute en raison de la difficult& pour une equipe de taille reduite, d’apprehender l’ensemble des dynamiques sociales, Cconomiques et techniques, et leur complexit& Cexperience de terrain acquise par les differents chercheurs dans d’autres regions andines et la bibliographic disponible ont cependant 86 des references constantes, t&s utiles pour = penser * le cas consid&?.

5 Croupe lignager ayant un ancetre commun, constituant une unit6 territorlale, sociale et symbolique, inclue dans une communaut& Chaque ayllu a ses autorit& politico-administratives et rituelles propres.

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aurait done originellement d&.ign@ la repetition, dans un espace particulie6, de prestations en travail, nombreuses, entre plusieurs individus. Or ce sens correspond bien ?I ce que diverses sources anciennes rapportent a propos de la mise en usage des terres par I’ensemble du village et dans une ambiance festive. Le labour des parcelles detenues par chaque famille ou lignage dans les aynuqa, etait une operation lourde effect&e avec la b&he andine’, et aussi rapidement que possible en raison des contraintes climatiques8. Seuls des @changes de travail sous la forme d’ayni repondaient a ces besoins et permettaient de labourer et.prPparer les parcelles pour la pomme de terreg.

Pendant les an&es de repos, on parle de samat uynuqa. La racine sama- du verbe aymara samaria renvoie (comme samay en quechua) a quantite de significations : repos certes, mais aussi souffle, haleine, recuperation des forces, etc. On signifie alors qu’il riy a pas de travail humain direct qui, dit-on, * blesserait la terre m, mais on considere que la terre = souffle m,

6 Comme en quechua 00 * r&up&e ses forces x grace a la fertilisation animale, certain5 termes @@ant aux precipitations mais aussi aux * forces/f+nergie m

des parcelles incluses dans transmises par les dieux... un cycle de rotation font La pratique de la jachere longue paturee dans le @Zalement ref&ence aux systeme d’aynuqa pouvait constituer un objet de

relations interpersonnelles, dans les travaux agricoles

recherche commun, a I’intersection des differentes

notamment (laymi, matiay, approches disciplinaires des chercheurs impliqu&. Elle etc. ;~f, Godenziet se trouvait reliee tant ti I’&OkItiOn de I’aptitude ti

Vengoa, 1994 : Ball6n et al., produire du sol durant I’interculture et aux fonctions

1992 ; DeMbach-Salazar, productives directes qui Iui sont assign@es, qu’aux 1985 : Rivi&e. 1994 :

Riviere et al., 1996 : 85-87). representations que les paysans aymaras se font du systeme d’aynuqa et, plus g@n&alement, de la

’ La b&he andine (uysu en * nature m. Enfin, le mode de gestion de ce systeme aymara, chaquitaklla en devait n&essairement @tre replace dans I’histoire de la

quechua) resulte de communaute afin de mieux comprendre les dyna- I’adjonction d’un appui-pied

et d’une poignCe au baton miques rkentes et les differentes logiques qu’il

fouisseur. maintenant renferme. Une recherche a I’interface entre sciences

poutvu d’une lame biologiques et sciences sociales a done et6 tentee sur m&allique ; elle permet un les jacheres d’un terroir particulier, Pumani, que nous

retournement du sol commencerons par presenter avant de preciser les

(Bourliaud et ai., 1986). questions qui nous ont r&mis.

* Kayni n’augmente pas la quantite globale de main

d’ceuvre disponible; il Le syst&me d’aynuqa a Pumani permet par contre une

meilleure gestion de celle-ci dans le temps. Le territoire de cette communaute d’altitude (encadre 7,

photo 7) se rPpartit en deux types de terres, les terres

g Remarquons que si de sayaria et les terres d’aynuqa (carte 2, photo 2). Leur a”jourd’hui tputes les SoleS principale difference tient, non ZI I’acces - dans les

sent aPPelees aynuqa, ce deux cas les parcelles sont privatives -, terme se reRre plus

mais aux

specifiquement A la modalit& de gestion des intercultures. premiere dans la rotation, La sayaiia est I’ensemble des parcelles apparte-

semee en pomme de terre, nant B une famille nucleaire et Situ&S autour de I’ha- ce wi S’exPliquerait Par le bitation principale. Les animaux sont rassembles la

sens Originel d” terme. nuit a proximite des maisons, les ovins dans un corral

lo Le quinoa est une et les bovins attaches au piquet. Au m@me endroit Cbenopodiade<uitivee sont stock& les bouses sechees utilisPes pour le

depuis I’epoque combustible, les d6jections Ovines utilisees comme precolombienne dont le engrais et le bois de feu preleve sur les jacheres prove-

Petit grain est consomme. nant d’un arbuste Baccharis incarum. Qu’elles soient bouilli, grille ou en farlne. Cetait la seule x cMale *

cultivees ou laissees pour certaines en jachere longue,

qui etait cultivee ?I une ou encore exploitees en prairies permanentes altitude suobrieure A celle humides (ayjadiru, carte 2), auxquelles toutes ies

du ma’is families n’ont pas acck, ces parcelles font partie du

domaine privP de la famille. L’usage des rCsidus de

culture apres la rPcolte et le parcage des animaux (bovins, ovins) dans les intercultures y sont Pgalement prives ; la famille decide librement des successions de

culture, sans contraintes exterieures. On y trouve de I’orge semPe plusieurs annPes conskutives ou. en rotation apres une annPe de pomme de terre et, parfois, de quinoa1° (Chenopodium quinua). Cette orge fourragere - I’occurrence du gel emp@che la formation de grain - est destinee & I’affouragement en vert des bovins. Plus rarement des surfaces reduites sont culti- &es en luzerne.

En uynuqa, des regles communautaires ouvrent les intercultures a tous les animaux de la communaute et

bornent les cycles culturaux (dates de fin de recolte et de debut de labour, figure 7). Les jacheres longues pdturees sont pratiquees sur les aynuqa, dont le nombre correspond a celui des annees qui composent le cycle, treize a Pumani (carte 2, fi9ure 2). A trois ann@es de culture succPdent dix annPes de - repos -

durant lesquelles les aynuqa sont paturees par les

ovins (figure 3). Aux diffCrents moments du cycle correspondent des modes de gestion et des fonctions spfkifiques (encadrk 2). Laynuqa, espace 00 plus qu’en aucun autre la sociabilit6 est obligatoire, est en droit partage entre tous les membres de la communaute. II

* produit 0 seulement s’il y a r&iprocit@ permanente entre les hommes et les dieux. En effet, la fertilite et la

production dependent des attitudes et des I engage-

ments n des hommes, de leur ponctualite envers les dieux. Cette r@ciprocite g&Walis@e est articulee sur le systPme de * charges * (cargo) que tout individu doit

assumer tout au long d’un cursus ascendant oti alter- nent charges politico-rituelles et religieuses.

Encadre 1. Production agricole en milieu contraignant.

Les hauts plateaux bollviens, situ& a 3 800 m d’al- titude, recoivent 450 mm de precipitations annuelles, entre octobre et mars. En absence d’irri- gation, i’agriculture est dependante des plules. La date de debut de la saison des pluies est trPs variable (de septembre a d&embre) et les risques de skheresse sont frequents. La periode des cultures est cake par rapport aux rlsques de gel des debut et fin de cycle. Si I’on se r&f&e aux stations m&eorologiques d’Ayo Ayo et de Patacamaya, les probabllit& pour accomplir un cycle normal sont entre une chance sur dix et une chance sur deux pour la pomme de terre (120 jours libres de gel), entre une chance sur quatre et sept chances sur dix pour le quinoa (150 jours libres de get). Dans ces conditions, le paysan cherche a disperser les risques B la fols dans le temps et dans I’espace. II repartit ses parcelles sur different5 types de sol, dans des situations topographlques contras- t&es car les pentes beneflcient par rapport aux plaines d’une diffkence de temperature de quelques degres qui pennet d’allonger de mani&e significative la pCriode sans risque de gel.

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Par ailleurs, pour chaque uyfluqa cultivee, une date de fin des recoltes est fixee plus tard par IeS autorites traditionnelles, afin de permettre I’entree des animaux, bovins et anes dans un premier temps, puis ovins et ports. Dans les aynuqa sata et phawa, les animaux doivent Ptre retires avant les premieres semailles, en septembre-octobre @gure 7). En I’absence de clotures, I’interdiction de faire paturer les animaux dans la sole cultivee puis I’ouverture de celle-ci apres la recolte, permettent de combiner des activites agricoles et pastorales sur un meme espace ; cette gestion est moins contraignante que la surveillance individuelle d’un grand nombre de parcelles dispersees qui devraient etre constamment protegees des animaux.

Les autorites etablissent la liste des membres de la communaute qui a tour de role devront attiser les feux dans I’aynuqa afin d’eloigner la grele ou les gelees et la communaute designe les chamanes, choisis parmi les personnes qui ont demontre des pouvoirs et savoirs particuliers (Riviere, 1995). Mediateurs entre les hommes et les dieux, les autorites et les chamanes veillent a la realisation des rituels communautaires, en particulier dans les aynuqa, sieges de divinites qui eont faims, a dates fixes, et exigent des offrandes et sacrifices au debut de chaque cycle, C’est a dire tous les 13 ans.

Chacune des 13 aynuqa principales (ti9ure 2) inclue un uywiri - espace sack ou sont celebres differents rituels en rapport avec la fertilite, les phenomenes climatiques, la x chance m individuelle et collective -, et une x parcelle de la Vierge = qui appartient A I’eglise. Represent@ sous la forme d’un cBne de pierres, pourvu dune niche, I’uywiri est un lieu de contact et de transi- tion entre les differents * niveaux p du monde et les esprits et divinites qui les habitent. Les offrandes et rituels cycfiques qui sont realises a I’uywir! de I’aynuqa ont notamment pour objet * d’amorcer * la circulation des liquides dans le cosmos, indispensable pour obtenir les pluies, et de demander les faveurs de la Pacha Mama, divinite de la terre, ou plus exactement principe de la fertilite. La a parcelle de la Vierge n qui se trouve dans chaque aynuqa principale est placee sous la responsabilite d’un economo (sorte de marguillier), charge de faire cultiver cette parcelle par les membres de la communaute. Les differents travaux agricoles sont consider& comme des devotions envers la patronne du village. Les produits recoltes sont vendus a des prix infe- rieurs a ceux du marche, et I’argent reuni est verse dans la caisse de I’eglise. Ces parcelles sont aujourd’hui de taille respectable car elles n’ont pas ete morcelees.

Le systeme d’aynuqa constitue d’une part un systeme d’exploitation a la fois individuelle et collec- tive d’une partie du territoire villageois et, d’autre part, une organisation faite de normes, decisions, droits et sanctions ; I’assemblee communale est I’instance responsable de sa gestion. Celle-ci obeit a des normes, contraignantes pour les individus, mais que des deci- sions collectives annuelles rendent plus flexibles. La communaute, par I’intermediaire de ses autorites tradi- tionnelles, conserve un rdle essentiel dans la synchro- nisation de I’agriculture et de I’elevage. La gestion du terroir et en particulier des jacheres associe constam- ment, bien qu’inegalement ou irregulierement, deci- sions individuelles et collectives dont I’imbrication renvoie a un debat important et tres actuel en Bolivie

- et ailleurs - sur I’usage et la gestion des terres communautaires (Her!& et al., 1995).

Durant notre recherche les differents points de we sur la jachere ont ete developpes comme autant de facettes dun objet commun et complexe. Les ques- tions qui nous ont reunis concernaient la duree et la persistance de la jachere dans les systemes d’uynuqa de la communaute de Pumani. Elles devaient inte- resser suffisamment les disciplines convoquees pour que chacun des chercheurs leur consacre un certain temps et ressente le besoin de prendre en compte des elements de reponse provenant des autres disciplines. Mais cela, nous ne I’avons decouvert que dans le deroulement meme de la recherche.

Bilans agronomiques

II s’agit, pour les agronomes, de comprendre quelles fonctions actuelles de la jachere pourraient expliquer sa duree fixee a dix ans puis d’identifier ce qui, dans

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I1 II faut ici noter que la fonction production de

bois de feu n’est devenue pertinente qu’au tours de la recherche ; elle nous a

conduit 2 &valuer les conditions d’installation

des jeunes plants d’un arbuste de la famille des

Ast&ac&s (Baccharis incarum).

JFMAMJJASONDJFMAMJJASONDJFMA

A- 1 I I A I / A+1

labours X X X X X X

pomme de terre - / u u

I

orge I I I I

qulnoa - 1 L--.--J I

rkcolte - sems =

t+gure 1. Calelmer cmriil oe I arinef H-I d At I m3sin oe u. newel

I’ensemble du systeme de production, peut s’opposer B sa reduction. Nous reviendrons sur le second point apt& I’expose des bilans agronomiques. Nous dispo-

sions dans les aynuqa de la communautP de Pumani de parcelles de jachPres d’ages differents et connus a

priori. La comparaison en diachronie des Ptats du sol etait done r@alisable, mais A la condition de limiter autant que faire se peut la variation entre parcelles des caracteristiques observables non liees ti I’tige de la jach(?re.

Differentes competences disciplinaires ont Pt6 mobilisees, pour @valuer les fonctions presumees de la jachere. Les fonctions examinees sont Pnum&@es, en commenCant par les moins vraisemblables, que nous eliminerons progressivement, pour nous concentrer

sur celles qui se sont r&Ses les plus importantes dans le contexte Ptudie : la maltrise des adventices, le stockage de I’eau dans le sol, I’enrichissement mineral de I’horizon labour et I’am~lioration de ses propriMs physiques, la reduction de la pression des pathogenes, la production de fourrage, la production de combus- tible ligneux pour la cuisine”. Cette liste n’est pas exhaustive, d’autres fonctions possibles de la jachere n’ont pas Pt6 explorees : collecte de plantes medici- nales, faune du sol, impact des fourmili@res. Le poids respectif de chacune de ces fonctions ne peut @tre determine que si l’on confronte les resultats partiels des differentes disciplines concernees, rarement habi- t&es ti travailler ensemble. Traiter de I’evolution de la

b

QUTAflA UMAJAQSU

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QL!za aynuqa principale comportant un Uywiri et une “parcelle de la Vierge”

CM4./.4QSU ayouqa secondaire mode a me aynuqa principale

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Encadri! 2. Les aynuqa. A Pumani, une partie du territoire de la commu- naut# est divisPe en autant de soles (aynuqaj qu’il y a d’annkes dans la rotation collective, laquelle dolt tire respect& par tous. Une nouvelle uyrwqc? est done ouvertle chaque atMe selon un ord,re &@bll, pour cullrlvler de la pomme de ten% nourrtturk!! de base des payoans (fisure 3). glle est explolt6e pendant trola al% puis lalssb en rapos pendant diX aris. La surcession dwcultures est Bgaiement d&flnle. Chaque uymu~a erlt semQe la premik? annCe (sata O~IIU@, en pomme de terre, la seconde @Wwrcp) et la troEsl&me (WI4 en org&$ bile ou qulnoa (Dfmto 3). Pendant les zlntw!es de * repos a, elw devknnleinlt clb 8Wfl GIJQU~~ (Iltt& ralement a aymqa polltr le p&wage 4 et I’on dlt qu’a elks appartiennent zlEors aux bergers *. L&s unit& dam@stlques ant de5 parcerles en nombre variable, disper%!@s dans chacune dies Soles. Celles cl peuvent We d’un Saul tenant au compos&s d’un secteur prlndpal (toujours si&ge de dlvinttCs localis&% et mat&riallst?es) et d’un uu plusleurs secteurs secondalres, non n&es%W?ment Jointifs. II y a une quarantaine d’anr&s environ, le mercredi des C@nld~, Ls autorltCs tradttlonnelles proc6datent %I la rCpartltlon des parcelles de la nouvelle aynuqa en fOrKlOon des besoins des families. Aujourd’hui, cette rripartitlon est plus symbollque que r@elle car les parcelles sent indivi- dualisees et mises en valeur par les memes families B chaque cycle. La dremonie a d&armais pour fonction de marquer le debut des labours et demander aux dleux une bonne annCe agrlcole.

fertilite des sols cultives constitue bien en soi un defi interdisciplinaire.

Contrairement a d’autres regions oti la pression des adventices limite le nombre d’ann@es successives de culture, les adventices sont ici maitrisPes par le buttage et la r&olte de pomme de terre d& la

Photo 3. Parcelles de ble. de quinoa et d’orge dans une sole d’aynuqa en trolsi@me am& de :!iiurl, (D. Hew&)

premiere annee de culture. Recoltees avec les cultures fourrageres suivantes, elles sont stockees pour I’ali- mentation des animaux. On ne se pose done pas la question de I’influence de la duree de la jachere sur I’incidence des adventices.

Dans les conditions de deficit hydrique de I’alti- piano, la pratique de la jachPre n’augmente pas le stockage de I’eau dans le sol (Brugioni, 1994 : 141- 153). Chumidite est maintenue dans I’horizon labour&, entre le labour de fin de la periode des pluies (fevrier-mars) et la periode de plantation de la pomme de terre (octobre-novembre). Pour augmenter I’humidite stockee, la date du labour pourrait @tre avancee (Vacher et al., 1994 : 127-139).

Voyons maintenant dans quelle mesure la p&iode de jachere enrichit le sol en Plements minPraux. Les restitutions au sol au tours de la jachere sont limitees. Les lititires des arbustes et graminees dures sont en partie entrainees par les ruissellements. Les dejections que les ovins laissent au paturage sont le produit transform@ des matieres v&g&ales qu’ils ont ingerees. A I’occasion du labour, en fin de jachere, les arbustes

A-l A A+1

S = sayaria = aynuqa cultivke

nouvelle sole labourke pomme de terre orge, quinoa orge, quinoa

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I2 Nous ne pouvons detailler ici ces mCthodes.

Les principes en sont I’augmentation du nombre

d’echantillons par classe d’age de jach&e et

I’elimination des valeurs extrCmes (CV < 30 O/O), le croisement systematique

avec les don&es de texture, la comparaison de

couples de parcelles voisines, - jointives n, d’dge

de jachere tres contrast6

I3 Ces recherches seront poursuivies en 1999-2001

dans le cadre d’un projet de I’union europeenne,

Tropandes.

Photo4. Parcelle d’ayuqa lahour& en fin de jachbre, pr@te pour la plantation de pomme de terre (D Hervki

sont arraches B environ dix centimetres de profondeur et retires de la parcelle ; il y a peu de materiel herbace g enfouir @h&o 4). La biomasse restituee au sol & la fin de la jachere provient done essentiellement des racines. Les systemes racinaires des Asteracees arbus tives constituent des formes d’immobilisation de nutri- ments, phosphore en particulier. Elles contribuent egalement a des remontees minerales d’horizons plus profonds. Les systPmes racinaires des Poaches sont les principaux fournisseurs de necromasse souterraine mais on connait mal, compte tenu des conditions climatiques, comment evolue la matiere organique. Durant le cycle de cultures, la fertilisation est limitee a un apport de dejections ovines a la plantation de la pomme de terre. A ces niveaux faibles d’apport corres- pondent des biomasses rPduites ti la rPcolte dont les parties exportees sont les tubercules, la partie aerienne de I’orge, la plante entiere de quinoa en incluant la racine pivotante puisque les plantes sont le plus souvent arrachees.

graphique et texturale de ces parcelles (Hen@, 1994a ; Hen@ et Sivila, 1997)12.

Nous avons apprecie la richesse minerale du sol par son contenu en cations @changeables, phosphore assimilable et carbone organique, tout en controlant I’effet de la texture (majoritairement sablo-limono- argileuse) : - La somme des cations echangeables augmente jusqu’b dix ans de jachere (Hew?, 1994a : 166-167), mais la corrPlation n’est nette (R2 = 0,692) que pour les textures plus limoneuses (limon > 30 O/O. Her@ et Sivila, 1997 : 192-194). Lorsqu’on compare la somme des cations echangeables sur des couples de parcelles jointives ayant respectivement deux et quinze ans de jachere, on trouve une difference hautement significa- tive (Her& et Sivila, 1997 : 196).

Pour verifier la contribution de la jachere a I’enri- chissement de I’horizon cultive, now comparons in situ des stocks d’Wments dans le sol (horizon des vingt premiers centimetres) en fonction de I’%ge de la jachere, en prenant en compte les differeWes compo- santes, chimique, biologique et physique de I’aptitude du sol a produire (Boiffin et Sebillotte, 1982) et en appliquant des methodes dejjs eprouvees (Morel et Quantin, 1964 ; Picard, 1971 ; Feller et Milleville, 1977 ; Moreau, 1984-85). Divers protocoles ont et@ choisis pour s’adapter B l’h&&og&Git@, essentiellement topo-

- Le taux de phosphore assimilable diminue jusqu’8 dix ans de jachPre alors que la population de myco- rhizes vPsiculo-arbusculaires augmente (Her@ 1994a : 167 ; Sivila et Her!&, 1994 : 193-194). En fin de jachere, le sol est done pauvre en phosphore assimi- lable mais riche en mycorrhizes qui facilitent I’assimila- tion du phosphore. Ce contraste est accentue dans les textures sableuses (plus de 60 % de sable). - Le taux de carbone organique tend a diminuer la premiere annee de jachere puis tend a augmenter (Hew& 1994a : 165-166). Aucune relation nette n’est ConfirmPe entre le carbone rapport6 g la somme argile plus limon fin - comme le proposent Feller et al. (1993) - et I’age de la jachere (Her& et Sivila, 1997 : 193-195). L’enrichissement de I’horizon IabourP est

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notable en cations jusqu’a dix ans, le bilan est mitige pour les autres elements (C, N, P). Plutot que leur quan- tite dans le sol, c’est leur mobilisation sous differentes formes, rendues accessibles aux plantes par I’activite microbiologique, qui permettrait de mieux comprendre les processus en jeu au tours de la jachere13.

La mesure de I’indice d’instabilite (Is de Henin), qui indique un degre de sensibilite du sol a la dispersion et done a I’erosion, peut nous renseigner sur I’evolu- tion de T&at de surface au tours de la jachere. Is diminue jusqu’a vingt ans de jach@re alors que ses composantes subissent des variations contrastees (Hen@ et Ramos, 1996). La fraction dispersee (argile + limon) augmente jusqu’a diX ans et le coefficient de permeabilite K augmente apres dix ans. II faut done attendre cette duree de jachere pour constater une evolution favorable de la structure superficielle du sol. En effet l’etat de surface, le plus souvent croute des la derniere annee de culture, ne s’ameliorera qu’a la faveur du microrelief en buttes et sillons et de rema- niements locaux (action des fourmilieres, pietinement par les ovins, piegage de sables eoliens, etc.) facilitant la germination des semences. Les Poacees annuelles, une fois installees dans les sillons, provoquent par leur systeme racinaire dense une microfissuration superfi- cielle. Celle-ci est relayee ensuite en profondeur par une porosite verticale creee par les radnes a pivot des Asteracees arbustives (Herve, 1995 : 75-77).

Mais la capacite a produire du sol integre egale- ment la pression des pathogenes qu’il peut abriter. Lagronome s’est naturellement interesse au nema- tode quiste de la pomme de terre (Clobodera pallida). dont on sait que la population decroit avec les annees de non-culture du tubercule. A Pumani, du fait de la jachere longue, aucune parcelle d’uynuqa echan- tillonnee n’a presente d’ceufs ni de Ian/es de ce nema- tode. Une faible population n’a ete detectee que dans deux parcelles de suyoiia ou I’intervalle entre deux cultures de pomme de terre Ptait inferieur a cinq ans (Esprella et al., 1994 : 171-183). Retenons ce seuil de cinq ans pour la discussion ulterieure sur la reduction de la duree de la jachere. Un autre nematode (Nacobbus aberruns) se maintient par contre sur des hates adventices presents dans la jachere jusqu’au dela de dix ans.

Cependant, c’est a un autre pathogene que les agriculteurs de Pumani ont fait allusion pour legitimer la longue duree de la jachere : un ver de la pomme de terre (Premnotfypes lufifhorux). Cette explication revient frequemment, lors des discussions collectives, dans la bouche de ceux qui s’opposent au regroupement d’ay- nuqa (cf. chapitre * les aynuqa : un avenir incertain n). Ce regroupement la meme annee de deux aynuqa contigues, qui devraient normalement etre mises en culture deux annees successives, aurait pour effet de reduire dune annee la duree de la jachere. La ques- tion a d’abord Pte soumise aux specialistes des sciences sociales : ne s’agissait-il pas d’un argument jnteresse, avance par les paysans tes plus aises pour justifier le maintien du statu quo, face a de jeunes agri- culteurs qui reclamaient la fusion des soles afin de cultiver plus de terres ? En fait, la meme explication etait proposee par la plupart des paysans comme une

justification collective du systeme d’aynuqa, revendi- quee par rapport a d’autres communautes, qualifiees de = modernes “, ou ce systeme a disparu.

La question revenait done a I’agronome. Ce dernier constatait chaque annee, a la recolte des tubercules, des degiits de cette larve de coleoptere, variables selon les conditions climatiques et le derou- lement du cycle cultural. Le cycle de I’insecte depend etroitement du cycle de la culture de pomme de terre ; il peut etre influence par la date et les modalites de travail du sol, mais non par une variation de la duree de la jachere. Par contre, I’insecte adulte &ant marcheur, plus les distances qu’il aura a parcourir sont courtes, plus les possibilites d’infestation sont elevees. C’est le cas lorsque le lieu de r@colte est proche du lieu de plantation et, a plus forte raison, lorsque la pomme de terre est cultivee deux an&es successives sur la meme parcelle. Une infestation peut aussi se trans- mettre depuis la sole d’uynuqa qui vient d’etre recoltee en pomme de terre, vers celle, contigue, qui sera plantee la meme annee. Cependant on constate qu’a quatre reprises, au tours du cycle de treize ans, la sole nouvellement mise en culture est eloignee de la sole recoltee d’environ cinq kilometres (de Tuntachawi a Irupata, de Qasilla a Wallani, de Umajatsu a Siwartira, de Kantiriya a Titiri, voir carte 2). Cette rupture dans la continuite de la succession des soles dans I’espace bloque, a chaque fois, cette possibilite d’infestation.

L’infestation peut aussi provenir des lieux de stoc- kage des tubercules recoltes. Ceux-ci sont conserves dans les maisons, en tas sur le sol en terre battue. Les larves qui sortent des tubercules infect& pen&rent dans le sol pour se transformer en nymphes. Les insectes adultes tendent ensuite a se deplacer entre ces lieux de stockage et les parcelles cultivees. Les risques d’infestation sont eleves si les distances parcourues sont courtes. A Pumani, le nombre d’an- nees de jachere commande le nombre de secteurs contigus d’uynuqa. Du fait de la jachPre longue en uynuqa, les maisons 00 se trouvent les lieux de stoc- kage des plants, localisees en sayaria, se trouvent eloi- gnees des parcelles d’aynuqa, ou la pomme de terre est cultivee. Dans I’ex-hacienda voisine de Qullana14, les parcelles sont plus proches des maisons et la popu- lation du ver de la pomme de terre est, a la recolte, beaucoup plus elevee qu’a Pumani (Chavez, 1997).

On verifie done que I’effet de la duree de la jachere peut etre indirect, a travels une disposition spatiale particuliere par rapport aux maisonnees des parcelles de pomme de terre en rotation collective (Hen/e et al., 1994b : 40 ; Chavez, 1997). Le controle de ce ver de la pomme de terre ne concerne done pas la duree de la jachere mais la localisation des parcelles cultivPes. Cet exemple montre I’interet de confronter les discours paysans tant au diagnostic agronomique qu’aux analyses des sciences sociales et, dans tous les cas, de ne pas s’en tenir aux seuls enonces recueillis par enquete. II fait ressortir le role de garde fou d’une disci- pline autre que celle a qui est c logiquement ‘1 posee une question don&e. En absence de dialogue entre disciplines, la seule issue est souvent d’evacuer la ques- tion non resolue, en se limitant done a un bilan partiel.

Pour evaluer le role de la jachere dans I’elevage, il faut mesurer son offre fourragere en periode s&he et

I4 Lors de la Reforme Agraire de 1953, les * colons 8 ont recu we partie des terres de I’hacienda Qullana, individualisees en longues bandes paralleles contigues, sur lesquelles ils ont construit leur maison. II5 pratiquent aussi une rotation de cultures mais sur des parcelles qui ne sent jamals eloignees du lieu de stockage des plants de pomme de terre. Le controle par traitement insecticide rep&e a demontre son inefficacite a Qullana.

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I5 Parmi les documents ancient qui mentionnent la

pratique de la jachere, citons celui mentionne par

J.V. Murra, pour une periode tardive ii est vrai :

* Don Guillermo Cato, medidor oficial de tierras en el Cuzco, declarb en 1713 que la

papacancha era una medida que s6lo’se usa en tierra fria

de papas donde a reconocido que un top0 que se reparte a un yndio se supone a ser por

siete en tierras frias... y a ueces por diez. Y que la raz6n

de esto es que coma las papas no se siembran cada

afio en un mesmo paraxe porque no le permite la tierra

sino al cauo de cinco arias... o al cauo de siete en tierras m& frigidas y al cauo de nuebe en

las punas mas bravas. Si se diere solo un topo... a un

yndio para su sustento anual... solo en un ario lo pudlera hater porque 10s otros cinco siguientes no tubiera donde sembrar...

Todas las medidas de puna de yndios deuen ser quanto

menos sextuplicadas... m (Rostworowski, 1964 :23-4, cite par J. Murra, 1975 : 49.

50). Traduction : * Don Cuillermo

Cato, arpenteur officiel des terres B Cuzco, a declare en

1713 que la papacancha &ait une mesure que I’on utilise

seulement dans les terres froides de pomme de terre oti

il a reconnu qu’un top0 que I’on donne A un mdien vaut

pour sept dans les terres froides... et parfols pour dix. Et

la raison en est qu’on ne sPme pas les pommes de

terre chaque ann@e en un m@me endroit parce que la

terre ne le permet pas mais au bout de cinq ans... ou de sept dans les terres les plus

froides et au bout de neuf dans les punas les plus rudes.

Si I’on ne donnait qu’un topo... A un indien pour sa

subsistance annuelle... il ne pourrait le travailler qu’une

en p&iode humide. La couverture vegetale augmente en pPriode s&he de 5 g 25 % durant les dix premieres an&es de jachere, ce qui traduit le developpement de Baccharis incururn, trPs peu consomme par les ovins. Les espPces herbacCes, qui reprbsentent en periode humide I’essentiel de la biomasse consommable par les animaux, se developpent surtout durant les cinq premieres annees (Genin et al., 1995). Au dela de cinq ans, I’apport fourrager total par unit@ de surface n’augmente pas avec I’age de la jachere (Cenin et Fernandez, 1994 : 201-213). La reduction de la durPe de la jachere de dix ti cinq ans - car une duree minimum de cinq ans est Wcessaire pour contrbler le nCmatode quiste de la pomme de terre (Globodera pallida) - ne diminuerait pas, en valeur absolue, la quantite de fourrage consommable par les ovins mais la surface des jacheres p.%urCes serait reduite. Cependant, la production d’orge fourragere - qui constitue la totalit@ de I’orge produite - serait accrue du fait d’un retour plus frequent dans la rotation.

Une interrogation subsiste toutefois concernant les arbustes de Baccharis incarum qui sont arraches au

tours de la jachPre et surtout, a la fin de celle-ci, lors du labour, pour &re stock& comme combustible : quelle serait la consPquence sur I’approvisionnement en combustible ligneux d’une reduction de la jachPre a cinq ans ? On deduit d’un bilan des quantit& de Baccharis incurum produites et consommees i Pumani que, dans cette hypothese, un deficit de combustible ligneux risquerait de se produire (Hen/P et al., 1994 : 27-29 ; Hen@ et al., 1996 : 16-18 ; Ayangma et Hen&, 1996). Si la biomasse ligneuse utilisable comme combustible provenait de pieds extraits au labour d& cinq ans de jachere, elle ne representerait que 60 010 de la biomasse totale. Mais la reduction de la jachere B cinq ans se traduisant par un doublement de surface cultivee, on obtiendrait finalement une production de

128 t de matiere s&he peu differente de la production ti IO ans (125 t). La consommation totale de ligneux dans la communautP est estimee a 210 t. Actuellement, la collecte occasionnelle, preferentielle- ment dans les jacheres de 5 a 9 ans, permet de combler les 85 t manquantes. Dans le scenario d’une reduction de la jachere B cinq ans, ces prPl&ements se realiseraient sur des jacheres de quatre B cinq ans. On eliminerait alors en moins de cinq ans tous les

pieds de taille significative qui sont justement des pieds semenciers ; le renouvellement de la ressource serait menace. II serait done raisonnable, dans ce cas, de limiter la collecte occasionnelle (arrachage d’ar-

bustes en cows de jachere). Ce deficit de 85 t pourrait- il &re cornpens@ par un accroissement de I’utilisation comme combustible des bouses s@ch@es ? II faudrait utiliser alors 118 t de bouses s&h@es, ce qui rep@- sente 22 O/o de la consommation actuelle. Dans ces

annee parce que les clnq conditions on percoit bien ce que cette mesure enWe-

annPes suivantes i, n.aurait rait a la fertilisation organique ; une plus grande utili- pas pu semer. To&s les sation de bouses B des fins energetiques risque ainsi de

mesures dans la puna des deplacer les contraintes du secteur energetique vers le indiens doivent @tre au mains secteur agropastoral. Disposant d’une m@me palette de

sextuP’ees... ” wr Ia mesure ressources energetiques (ligneux, dejections animales), appelee papacancha. utilisee

au debut de I.epoque les exploitations n’ont aucune raison d’avoir les m@mes coloniale. voir Rostworowski, dispositifs d’adaptation et de flexibilite et on peut

1981 [iw8]. prevoir une augmentation de la precarite des familles

les plus demunies en combustibles. La r@duction de la jachere a cinq ans comporte des risques pour I’approvi- sionnement energetique des familles.

En r&urn@, ZI Pumani, les analyses agronomiques confirment une partie des fonctions de la jachPre etudiees, mais pour une duree qui ne correspond pas toujours, et pour toutes, a celle du cycle de rotation actuellement pratique. Pour certaines fonctions, une reduction de la jachPre ?I cinq ans est envisageable, pour d’autres elle pose probleme.

Persistances et logiques

La question reste done posee de la duree du cycle. La tradition orale affirme que celui-ci * a toujours et6 de 13 ans *, ce qui est d@montr@ tout au moins sur

plusieurs g&Wations. Si le nombre d’annees montre bien une remarquable continuitP, il faut se demander si ce qu’il recouvre est rest@ inchange en terme de pratiques et de fonctions.

On ne peut, dans Vetat actuel de nos connais- sances, expliquer avec certitude le nombre d’aynuqa B Pumani ou; plus exactement, le nombre d’annees du cycle (3 annees de culture suivies de IO ans de jachere = 13 ans, dans le cas etudie). Les sciences sociales peuvent cependant apporter certains Wments d’explication : - un nombre d’annees a saris doute et@ empiriquement determine au tours des siWes. compte tenu du d&e- loppement des techniques, des differences dans la qualit@ des sols et des terrains. Les 13 aynuqa initiales (nombre sans doute en rapport avec celui des lignages originaux) se sont ensuite etendues en m@me temps qu’augmentait la population, occupant progressive- ment toutes les terres labourables disponibles (processus ache@ au milieu du xxe siiXle approximati- vement). - La dispersion des aynuqa a permis de borner le terri- toire communal et de le defendre des tentatives de spoliation par les communautes voisines. Un secteur cultive trois an&es puis utilisc! collectivement pour la

pdture des animaux pendant plusieurs ant-&es est mieux protf?g& Si un cycle trop court a des cons@ quences agronomiques negatives, un cycle trop long est difficilement contrblable socialement en raison de la difficult@ d’identifier les parcelles dans I’aynuqa. Un cycle de treize annees est entierement parcouru de trois ti quatre fois par un individu durant sa vie active et la celebration obligatoire des divinites au tours de cycles fixes reaffirme periodiquement les droits collec- tifs et individuels.

Pour une histoire des jachkres longues ptiturees

Selon toute vraisemblance, la pratique de la jachere longue paturee trouve son origine dans la culture des tubercules (Bourliaud et al., 1986), la succession de cultures &ant de deux ans (pomme de terre, quinoa) ou trois ans (pomme de terre, tubercules secondaires andins, quinoa). On peut penser qu’avant I’introduction

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des ovins et bovins par les espagnols, les aires de paturage ouvertes aux camelides Ptaient plus &en- dues et en acces libre. Elles incluaient les parcours @uruma) et les prairies permanentes humides (uyjadiru) Ptaient paturCes de maniere alternee pendant et aprPs la saison des pluies. Les uynuqa offraient pour leur part des residus de culture, des adventices, puis la vegetation herbacee et arbustive des jacheres longues. Un contr6le des troupeaux de camClidCs etait toutefois necessaire afin qu’ils ne franchissent pas les limites de la communaute ou n’entrent pas dans les parcelles pendant la pPriode de culture.

Avec la colonisation, de nouveaux elements furent introduitsY5 : cCrCales, ovins et bovins, araire $I traction bovine remplacant progressivement la b&he andine, mais la rotation collective a jachere longue fut respectee. Les jacheres longues pdturees acquirent alors de nouvelles fonctions, en particulier celle de support de I’alimentation des ovins. Ceci obligea a mettre en pratique de nouvelles formes de droit et de contr6le comme la vaine pature16.

i\ partir de la seconde moitie du xlxe siecle, plusieurs facteurs introduisent des changements struc- turels dans le mode de gestion des uynuqu. Dune part, les nouvelles legislations privilegient un mode d’acc@s * prive * et individuel. Ceci eut pour consequence de faire disparaitre progressivement I’ancienne pratique de redistribution periodique des terres en fonction des besoins des familles (voir encadre 2)“. Depuis lors, chaque famille retrouve ses parcelles au debut du cycle d’exploitation d’une uynuqa. D’autre part, I’ac- croissement demographique, amorce ZI la fin du xlxe si@clela, a contribuCl a modifier les formes d’occupa- tion de I’espace (Pacheco, 1994 ; Riviere et al, 1996). A partir des annees 1930, les uyjadiru ont et6 divises et int@gr@s a des sayaria. Depuis les annPes 1950-1960, le sysMme s’est bloqu& toutes les terres de puruma sont occupees et privatisees, qu’elles soient exploitees en prairies permanentes ou qu’elles soient cultivees. Depuis lors, un nouveau couple ne peut obtenir de terres que dans les parcelles de sayaria et d’aynuqa des parents, ce qui a conduit g un morcellement, trPs variable selon les familles.

Comme [‘ensemble du monde rural, Pumani a subi les effets de la R&olution nationale de 1952 : ouver- ture d’un vaste march@ du travail (dans les viltes et les zones de colonisation), education obligatoire, etc. Depuis lors, beaucoup d’habitants de Pumani peuvent trouver B I’exterieur de la CommunautP des revenus complPmentaires lorsque les terres sont insuffisantes ou la production mauvaise. Les flux migratoires vers d’autres regions de Bolivie ou en Argentine se sont accrus a partir de la grave secheresse de 1982-1983, reduisant encore plus la quantite de main-d’o?uvre disponible localement. A partir de 1983, divers orga- nismes officiels et ONC ont lance des projets et octroye des p&s pour louer les services d’un tracteur ou acheter des bovins destinPs a I’embouche ou la production laitiere.

L’enchainement des differents facteurs mentionnes a eu pour effet de rPduire I’etendue de certaines oynuqa, surtout celles sit&es en plaine, au profit de sayaria air des habitations ont &P construites a proxi- mite de points d’eau. i\ I’inverse, les aynuqa sit&es sur

les versants, moins affectees par les gelees et plus eloi- gnees des points d’eau, ont et& pr&ervees.

L’Ploignement des parcelles d’aynuqa des lieux de residence est maintenant percu comme un handicap pour I’application de certaines strategies. La dlspersion de ces parcelles entre aynuqa et a I’interieur de chaque aynuqa contribuait b rPpartir les risques climatiques entre plaines et versants, et entre differents types de sol. MCme si cette contrainte demeure, beaucoup de paysans tendent a regrouper leurs parcelles p&s du domicile, dans la sayaria ou dans les secteurs d’ay nuqa proches (Riviere et al., 1996). Ce processus s’est accelere avec le developpement de I’elevage bovln qui est moins tributaire que les cultures des aleas clima- tiques. Ces Cvolutions s’inscrivent toutefois dans certaines limites. II faut d’une part &re proprietaire de parcelles pour pouvoir les &changer et, d’autre part, conserver apres le regroupement un minimum de diversite, en particulier topographique, compte tenu des risques climatiques. Dans tous les cas, les paysans se differencient selon leurs strategies de production : cultures alimentaires sur des parcelles dispersees, en pente ; production fourragPre destinCe B I’Clevage bovin, en plaine et a proximite des habitations.

Les aynuqa : un avenir incertainlg

Travail16 par des dynamiques diverses dont I’origine s’ancre g differentes pCriodes, le systeme d’aynuqa a fonctionne B Pumani sur un cycle de 13 ans, tout au moins jusqu’a une date r&ente... En effet, au tours de I’annee agricole 1990-1991 furent regroupPes deux aynuqa (Qatiawiri et Pti Jawira/Wari Suntisitia) qui auraient dQ etre ouvertes a la culture deux annees ConsPcutives (carte 2). Les sayaAa de la zone Jisk’a Juqhu s’&aient, depuis quelques decennies, profond@- ment &endues sur I’aynuqa Qariawiri, reduisant d’au- tant son territoire. Mais d’autres facteurs ont contribue a cette prise de decision lors de I’assemblee commu- nale du mercredi des Cendres 1990. Tout d’abord une pression provenant des secteurs de la population les moins pourvus en terre. D’autre part, la volontP des autorites de retenir dans la communautP les jeunes obliges d’emigrer temporairement, faute de terre. II est aussi possible que la presence, cette an&e-l& a la t&e de la communaute, d’un Secretaire GPnPral, instituteur et residant B La Paz, ait facilite I’adoption d’une d&i- sion qui rompait avec la norme communale.

Neanmoins, alors que les conditions climatiques pour les labours etaient favorables en 1990, 38 % des parcelles de la nouvelle aynuqu ouverte (sata uynuqa) n’ont pas Gte labourees ; en temps normal ce pourcen- tage tourne autour de 10 % (HervP, 1994c : 286-287). Ceci montre que toutes les familles n’ont pas pu s’adapter a la nouvelle situation, faute de main- d’ceuvre, de semences, de temps, etc. Les recoltes furent mauvaises en raison d’une pluviom&rie defici- taire et de gelPes en tours de cycle. La mauvajse annke fut aussi attribuPe B un manquement dans les rituels, les offrandes n’ayant ete faites qu’8 I’un des uywiri des deux soles reunies. La recolte qui s’annon-

l6 Limpact de la colonisation sur le mode de gestion des terres et I’elaboration de nouvelles formes de drojt dans les Andes reste ti etudier, dans une perspective historique et comparative notamment (Chamoux et Contreras, 1996).

I7 Les &apes de ce processus plus ou moins rapide selon les communautb reste A Ptudier.

‘* Entre 1893 et 1993 approximativement, la population de Pumani a connu une augmentation de I’ordre de 400 %.

lg D’apr& Her& et Riviere (1996) et Riviere et al. (1996 : 102-103).

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2o Abri temporaire oti se refugient les families

lorsque les aynuqa mises en culture sont sit&es pres

de leur domicile. Elles doivent alors kloigner leurs

troupeaux des parcelles cultivees pendant plusieurs mois. Depuis une vingtaine

d’annees, et avec I’autorisation des autorites,

des parcelles oti ont 6% &ig@es des anaqa sont

transformees en sayaria, devenant ainsi des lieux de rkidence et de production

permanents (Pacheco, 1994 ; Riviere et al., 1996).

Fait bonne fut, dit-on, * emport&e/volee * par la gelee (Riviere, 1994).

L’expCrience ne fut pas renouvelee I’annee suivante. Les membres de la communaute les plus demunis demanderent a nouveau que deux aynuqa fussent rPunies lors de I’assembl@e de 1992. En fait ce secteur de la population, dans sa majorite retenu par des travaux ?I I’exterieur de la communautk ne put s’imposer. Par ailleurs, ceux qui disposaient de terres en quantitP suffisante s’oppokent a un nouveau regroupement. Arguant du possible chatiment des dieux, les autorites communales, qui representaient aussi les secteurs les plus favoris&, dPcid@rent de * revenir a la coutume a.

En 1996, on pensait qu’un nouveau regroupement allait se produire. En effet, cette annee-18, la sata aynuqa (Titiri) avait une surface trPs reduite. Les sayafia de Qhapaq Amaya se sont &endues progressivement, en empietant sur son territoire. De nombreux paysans envisageaient un regroupement avec I’aynuqa suivante et adjacente de Siwiqani. En fait, il n’en fut rien et I’aynuqa Titiri fut seule labouree. De multiples ajustements furent en meme temps mis en place : replis sur sayui7a, reports interannuels, etc. Cannee suivante (1997), I’aynuqa labour@e (Siwinqani-Ananta) etait une des plus grandes de Pumani - sa surface est comparable & celle obtenue apr& la reunion des deux uynuqa en 1990 - et le pourcentage de parcelles non labourees equivalent ti celui de 1990. Pour les paysans, la situation n’etait cependant pas la m@me. Celle de 1997 etait previsible puisqu’elle s’inscrivait dans un cycle connu d’avance. En 1990, en revanche, la decision de regroupement ayant et@ prise en fevrier, au moment du diibut des labours. il etait difficile pour beaucoup de s’y adapter.

En d’autres termes, le cycle de treize ans se perpetue en dPpit de changements sur des pas de temps differents : - d’une part, des changements sur le long terme et des pressions diverses pour qu’il y ait regroupement de deux aynuqa lorsque les terres manquent ; - d’autre part, un d&@quilibre dynamique, car modifie chaque an&e, entre les ressources en terre et en main d’ozuvre disponible ; ce theme a et@ explorP a I’aide d’une formalisation informatique permettant des simulations (Paz, 1997).

Les jachkes longues une imbrication de diverses logiques

p%ur@es :

La longueur du cycle, inchangee depuis le debut du siPcle semble-t-il, resulte done d’aspects agronomiques empiriquement @prouv&, et d’aspects sociaux, reli- gieux et symboliques qui entrent dans la constitution d’une charpente ideologique dans laquelle sont ench&sPes les pratiques. Le systitme d’aynuqa est 2 la fois une G memoire et une histoire - de la commu- naute, un des principaux supports de son identite (Riviere, 1994). Les Pumaneniens s’appuient sur les annees des cycles &oul& pour dater des &@nements

importants, individuels (naissance, mariage, etc.) ou collectifs (bonnes rkoltes, sfkheresses, changements de gouvernement, etc.). En outre, ils revendiquent leur systeme d’uynuqa comme un signe les distinguant des communautf3 voisines 00 il a totalement ou partielle- ment disparu. A ce systeme, ils continuent d’associer des qualit& particulieres (efficacite, sagesse, fidelite & la 4 tradition *, solidarite, entraide, etc.), m@me si, dans le contexte actuel, certaines sont toutes relatives.

Toute modification peut aussi etre interprktee comme un bouleversement susceptible de provoquer la cokre des dieux, x habit&s 8 a des offrandes reali- sees sur un mode cyclique rigoureux (Rivkre, 1994). C’est Ia un argument regulierement pr&ente par les autorites traditionnelles, souvent issus des secteurs les plus favoris& en terres, pour maintenir le statu quo et ne pas modifier la taille des soles d’uynuqa mPme les annees 00 la nouvelle sole ouverte est de surface rPduite (RiviPre et al., 1996). Se pose done la question du detournement des systemes d’interpretation tradi- tionnels par des individus qui souhaitent maintenir leurs privileges et, plus largement, celle du pouvoir dans une soci& oti les charges traditionnelles (cargos), politiques et religieuses, annuelles et rotatives, sont accapakes ou contrblees par certains groupes.

Le systeme d’uynuqa tel que nous le connaissons aujourd’hui a Pumani, Porte les traces de fonctions et de dynamiques diverses dont I’origine s’ancre a diffe- rentes p&iodes. Les bases matPrielles de son fonction- nement ne sont pas restees les memes et la hi&archie des fonctions qui lui sont attribuees a pu varier, travailICes par des dynamiques qui ne les placent pas dans une relation mecanique et synchrone au sein du syst@me. Cela veut dire qu’aujourd’hui ces systemes peuvent contenir des * contradictions * (Codelier. 1984, 1991) ou des decalages entre les differents aspects (agronomiques, sociaux, konomiques. symboliques, etc). Des elements relevent de la xlongue dur@en. d’autres de cycles ou periodes qui ont pu changer, et de pratiques mises en ceuvre par des unit& de production qui montrent des differences socio@conomiques croissantes.

Temps fixe, espace modifk : wers une nouvelle perspective de recherche

Le regroupement, la meme annee, de deux secteurs d’aynuqa successifs (1990) a eu pour consPquence de reduire d’un an la durPe totale de la jachke. Cette experience n’a pas 6362 renouvelee. Cest d un autre niveau que le systPme est en train d’evoluer : b partir des modifications de I’espace contrblees par les indi- vidus et les familles. La creation de sayaria sur des terrains en uynuqa se poursuit sous des formes trPs variees : @changes definitifs de parcelles. transforma- tion des abris d’anaqa20 en domicile permanent, modification du statut des parcelles. Ces changements fanciers sont ent&in@s, sans difficult@ apparente, par les autoritk traditionnelles. Le propriPtaire qui met en valeur des parcelles cc privees x, isolees au milieu d’une

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aynuqa, encourt le risque de voir ses semis d&wits par les troupeaux d’ovins, ce qui I’oblige a Ctablir de nouveaux accords avec les familles vivant a proximite afin d’en assurer le gardiennage. En consequence, les sayaria representent une part accrue de I’exploitation et c’est sur leur espace ou a proximite que se concentre la plupart des activites agro-pastorales. II semble en particulier que le paturage journalier des ovins ou la collecte occasionnelle de combustible ligneux se realisent en priorite dans la ou les aynuqa les plus proches des habitations.

Le temps cyclique restant stable, c’est dans des modifications de I’espace que s’expriment des strate- gies familiales de plus en plus differenciees : regroupe- ment des terres a proximite des habitations, facilitant le developpement d’une production laitiere dans les elevages bovins, recours au tracteur compensant partiellement, pour le travail du sol, I’emlgration d’hommes adultes, etc. Si un modele de fonctionne- ment du systeme d’aynuqo peut etre Plabore, il appa- rait que les voies d’evolution sont multiples et locales (Hen&, 1994b). Dans le cas Ptudie, les dynamiques sont a rechercher du tote des strategies individuelles et familiales, spatiales et foncieres, qul tendent a s’im- poser aux regles communautaires.

La perspective dans laquelle les jacheres longues pdturees etaient analysees s’est done progressivement modifiee. La question de leur duree a ete discutee sur la base du diagnostic de fonctions actuelles de la jachere. La question de leur persistance a ete abordee dans la profondeur historique et, du fait des evolutions en tours, en terme de devenir. Le croisement de ces deux approches nous a conduits a la conclusion que si le temps etait et restait bien fixe, et tel qu’il avait ete defini collectivement, I’espace et son acces etaient sensiblement modifies par des dynamiques indivi- duelles. Pour en rendre compte, il fallait aborder les jacheres longues paturees dans une nouvelle perspec- tive, pour I’agronome a partir du fonctionnement des exploitations familiales et, pour I’anthropologue, du point de vue de la communaute paysanne. La dyna- mique de la jachere devenait alors un revelateur du fonctionnement de ces unites de production agro- pastorales dans le cadre de la communaute. Ce glisse- ment ne s’est pas opere sans tiraillements, car la gestion d’exploitations familiales, interdependantes au sein d’une communaute, suscitait de nouvelles ques- tions pour chacune des disciplines, Nous n’en donne- rons ici qu’un bref apercu.

Lorsqu’il s’agit de faire face a des risques clima- tiques eleves et a une modification annuelle des surfaces disponibles en aynuqa, le probleme principal des agriculteurs est d’adapter leurs moyens de produc- tion a d’eventuels desequilibres entre terre et main- d’aeuvre disponibles. La stabilite du cycle, et de I’ordre dans lequel les soles d’aynuqa sont mises en culture, leur permet d’anticiper sur les differences de qualite des terrains et de taille des parcelles suivant les annees, et de les corriger par des reports d’une annee sur I’autre ou en g&ant des stocks. Cette possibilite d’anticiper est fondamentale pour gerer I’incertitude et mettle en jeu une premiere gamme de flexibilite. Chaque agriculteur Ctablit des accords de reciprocite

avec d’autres familles dans tous les domaines de I’existence, tant pour assurer une production agro- pastorale que pour maintenir des reseaux d’echanges materiels et symboliques. Certains de ces accords, qui peuvent etre assimiles a des contrats de metayage, tendent a reduire les desequilibres terre-travail, dans un sens ou dans I’autre suivant les annees (Paz, 1997).

La gestion des jacheres resulte done de negocia- tions entre familles dont les strategies peuvent etre differentes mais qui sont interdependantes, et d’un arbitrage par des instances communales, * garantes a de I’equilibre dans le domaine du social et du cosmique. Pour comprendre comment ces differents acteurs parviennent a des consensus au sujet de la taille, de la duke et des regles de gestion des jacheres, il faut se donner les moyens d’explorer B la fois les interactions entre familles et la viabilite de la commu- naute. A cette condition, on pourra relier et rendre intelligible la gamme des evolutions des jacheres- aynuqa, des reactions, adaptations des familles et de la communaute, car, on le comprend bien maintenant, tous ces elements font systeme.

Conclusions

La recherche que nous avons menee n’a pas manque de mettre en doute certaines de nos analyses et de

*’ Nous rejoignons ici Godelier pour qui il n’y a pas de - determinisme = ecologique mals des determinations ecologiques qui n’agissent sur la societe que conjuguees aux dtierminations des capacites productives dont disposent ces societes. Quand nous parlons de wontraintes* materielles, nous entendons done les effets conjugues, hierarchises et simultanes de donnees de la nature et de donnees de la culture, leur produit combine n (Godelier, 1984). Cuille- Escuret signale justement que * dans une societe humaine il n’y a pas 2 proprement parler de contrainte Ccologique premiere qui soit isolable d’une contrainte socia[e, et ?r partir de laquelle on pourtait d@mSler I’echeveau des relations socioecologiques. Tout simplement parce qu’il n’existe pas de puissance naturelle s’exeqant sur un groupe humain independamment des systemes economiques, politlques et symboliques qui sont indispensables a sa survie et a celle des individus qui la composent... = (1989 : 163- 164, souligne par I’auteur

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nos previsions, Nos resultats montrent que les rela- tions milieu-societe ne peuvent etre apprehendees a partir dun seul determinisme ecologlque : des causa- lit& multiples interviennent, articulees dans des rela- tions complexes et dynamiques2’.

L’analyse agronomique des fonctions de la jachere a permis de mesurer leur poids respectif. Plutot que de definir une duree optimale de la jachere, nous avons identifip ties Plpments pemetiant de d&cuter de son &olution, en tenant compte de son impact sur ie milieu et de ses consequences sur le fonctionnement des systemes de production. Lanalyse agronomique peut apporter des justifications a la jachere longue, mais en aucun cas a la fixite de sa duree sur une tres longue periode. Si le choix empiriquement Cprouve dune dunk de la jachere collective resuite de la combi- naison inegaie de diffbentes fonctions, en reiativisant certaines et en satisfaisant d’autres, il est difficile d’expii- quer la stabilite du cycle iorsque I’on sait que ces fonc- tions, et leur hierarchic, ont pu varier dans ie passe. Quelles que soient les origines des dix an&es de jachere, on est done amene a remet&e en cause l’idee d’une surdetermination du milieu dans la genese de regles collectives. Canthropologue apporte un eclairage sur ce point, en expiiquant la resistance a faire evoluer ces cycles alors que, sous la pression demographique, la surface consacree au systeme d’oynuqa se reduit. Demeler i’bcheveau des hibrarchies de fonctions qui evoluent reste done bien un defl interdisciplinaire.

Cexpioration a l’interface des deux domaines disci- piinaires et I’interpretation des discours et des pratiques paysannes a oblige chacun des pattenaires a redefinir ies voles de sa recherche. La poursuite de celle-ci ne se justifle que parce que le cas etudie est exemplaire, representatif de situations en partie revoius dans de nombreuses communautes agropas- torales andines. Certes les jacheres longues paturees sont des types d’organisation que I’on peut rencontrer dans une vaste region des Andes. Tous ont en commun la gestion individuelie et collective d’un terri- toire ou les activites et la duree du cycle sont etroite- ment associees. Mais c’est en diversifiant Ies etudes dans une perspective piuridisciplinaire et comparative que I’on pourra comprendre ieurs transformations et fonctions actuelies. Le dialogue engage! est ainsi

amene a se prolonger durablement.

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