Les marches financiers internationaux - · PDF fileDès lors, le triomphe du marché et de la globalisation ne signifie nullement que les États doivent se retirer de la scène financière

Embed Size (px)

Citation preview

  • Introduction

    Linstabilit financire internationale est au cur des interro-gations que suscite la globalisation. Pourquoi les taux de changesont-ils si instables, et surtout si imprvisibles, comme onlobserve pour leuro vis--vis du dollar ? Les investisseurs inter-nationaux participent-ils effectivement une rpartition effi-ciente de lpargne lchelle mondiale ? Comment expliquer ledclenchement chronique des crises financires internatio-nales, du type de celles observes en Europe au dbut desannes 1990, au Mexique en 1994-1995, en Asie en 1997-1998,puis en Russie, au Brsil, en Turquie, en Argentine ? Dans cesconditions, faut-il poursuivre la libralisation des marchs finan-ciers ou bien doit-on introduire de nouveaux contrles, on pense la taxe Tobin, ou des rglementations assurant une meilleuregouvernance financire internationale ?

    Toutes ces questions relvent du fonctionnement et de ladynamique des marchs financiers internationaux : marchsinternationaux de capitaux, marchs des changes, marchs degestion des risques internationaux. Mieux connatre leurs fonc-tions et leur organisation, mieux apprcier les effets des innova-tions dont ils ont t lobjet, surtout depuis une quinzainedannes, mieux comprendre les mcanismes de linstabilitfinancire internationale, tels sont les principaux objectifs de cetouvrage.

  • Les dfis de la globalisation financire

    La globalisation des marchs financiers ne mrite ni excsdhonneur, ni excs dindignit. Cest un processus, sans douteimparfait et en mme temps irremplaable, dallocation desressources lchelle mondiale, mme si la rationalit grgairede certains agents conomiques vient souvent perturber leurfonctionnement. En ouvrant le jeu conomique parmi les paysmergents, la globalisation financire a offert des opportunits des conomies, des hommes qui en avaient peu. Aux avantagesque procurait dj la spcialisation internationale sajoute donc,dsormais, la possibilit de lisser au cours du temps les dsajus-tements entre pargne et investissement que provoquent danschaque pays ltat des finances publiques, limpratif du dve-loppement des infrastructures ou les spcificits dmogra-phiques. Et dans un monde de plus en plus incertain,linnovation financire ouvre des possibilits de couverture et detransfert des risques qui nexistaient pas dans le pass.

    Mais on sait dsormais que la libralisation financirenapporte pas seulement les bienfaits quont longtemps mis enavant, souvent de manire univoque, certains conomistes. Lesmouvements internationaux de capitaux ont emprunt deschemins imprvus en finanant dans la dernire dcennie, etencore aujourdhui, les dficits vertigineux de lconomie amri-caine (dficits budgtaires, dsquilibres de la balance des paie-ments courants) bien plus que le dveloppement des paysmergents. Et ils ont suscit une fragilit accrue et une instabilitchronique sur les marchs financiers internationaux.

    En effet, dans un contexte dinformation imparfaite et demyopie des horizons dcisionnels, les investisseurs internatio-naux ne se comportent pas toujours de faon rationnelle, enchoisissant les placements les plus porteurs ou les pays les plusprometteurs sur le plan de la croissance conomique. Ils rpon-dent aussi, parfois, des modifications endognes des anticipa-tions, refltant des sauts dans linscurit perue. Ces pisodessont de nature perturber la dtermination des prix sur lesmarchs financiers et lallocation de lpargne lchelle interna-tionale, et ils dbouchent sur des crises systmiques, source decots sociaux considrables : selon certaines analyses du Fondsmontaire international (FMI), les crises de change des

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX4

  • annes 1990 auraient cr des dficits cumuls de production,relativement la tendance, de 4 7 %, et les crises jumelles,combinant crises bancaires et crises de change, auraient suscitdes pertes de production de lordre de 15 %.

    Ds lors, le triomphe du march et de la globalisation nesignifie nullement que les tats doivent se retirer de la scnefinancire internationale. Plus quune mise en cause de la globa-lisation, cest dailleurs une demande de rgulations internatio-nales qui sous-tend implicitement, dsormais, le mouvementdaltermondialisation. Mais comment aborder lanalyse de cesmarchs ?

    De la macroconomie financireaux marchs financiers internationaux

    Lorsque les conomistes sintressent lorigine et aux effetsdes carts de taux dintrt entre diffrentes conomies natio-nales, ou bien aux dterminants des taux de change, ils sesituent assez naturellement une chelle globale, en exami-nant les comportements agrgs des investisseurs et des par-gnants, en valuant les carts de comptitivit ou de croissancedune conomie vis--vis de ses concurrents, en tudiant la situa-tion de sa balance des paiements courants ou celle des mouve-ments internationaux de capitaux, en discutant des choix depolitique conomique qui soffrent alors aux banques centralesou aux gouvernements selon le rgime de changes, fixes ouflexibles. Ce faisant, ils se rfrent ncessairement une descrip-tion relativement stylise des marchs sur lesquels sexprimentces comportements ou ces ajustements. Ils se situent alors dansle domaine de la macroconomie financire internationale. Lestaux dintrt et les taux de change relvent de la macroco-nomie et se trouvent au cur dun ensemble dajustements quisoprent une chelle agrge, celle des interdpendancesmacroconomiques internationales. Il nen est pas moins vraique ces deux variables se dterminent sur des marchs spci-fiques, les marchs de capitaux ou le march des changes, surlesquels interviennent des agents spcialiss et o sexprimentdes mcanismes de coordination et des techniques financirestout fait spcifiques. Aussi, ct des dmarches plus

    INTRODUCTION 5

  • thoriques de lconomie montaire [Lavigne et Pollin, 1997]*ou de la macroconomie financire [Aglietta, 2001], il convientgalement de se pencher sur lorganisation et le fonctionne-ment des marchs financiers internationaux. Dabord parce queles microstructures de ces marchs (types dintervenants, actifsfinanciers utiliss, organisation centralise ou dcentralise destransactions et du mode de formation des prix, fonctions spci-fiques des oprateurs) exercent des effets sur la dynamique descours de change ou des taux dintrt. Ensuite parce quilimporte galement de connatre les instruments ou les produitspermettant de financer les activits internationales et de grer lesrisques qui y sont associs [Eiteman, Stonehill et Moffet, 2004].

    Plan de louvrage

    Le chapitre I permet de comprendre le rle spcifique desmarchs financiers internationaux et brosse un tableaudensemble des trois grands types de marchs qui fonctionnent lchelle internationale : les euromarchs, le march des changeset les marchs drivs. Les fonctions que chacun deux permetdassurer sont analyses : les prts-emprunts en euromonnaies ;les achats-ventes de devises ; la couverture des risques de changeou des risques de taux dintrt.

    Dans le chapitre II, il sagit de mieux apprhender les opra-tions de financement bancaire en eurodevises et lorganisationdes marchs euro-obligataires, avant dexaminer les produitsdrivs permettant notamment de grer les risques de tauxdintrt.

    Le chapitre III est consacr au march des changes. Cela exigeun examen dtaill de lorganisation de ce march, le plusimportant du monde au regard des volumes de transactions, enmettant laccent sur la dynamique du march interbancaire etle poids des facteurs psychologiques dans la dtermination destaux de change trs court terme. Les oprations de change terme et les marchs drivs de change sont galementprsents.

    * Les rfrences entre crochets renvoient la bibliographie en fin douvrage.

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX6