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ÉTUDE ORIGINALE Médecine palliative 54 N° 2 – Avril 2004 Med Pal 2004; 3: 54-58 © Masson, Paris, 2004, Tous droits réservés Les nouvelles technologies de l’information au service de l’enseignement des soins continus intégrés : une expérience marseillaise Geneviève Botti, Laboratoire d’Enseignement et Recherche sur le Traitement de l’Information Médicale (LERTIM), Faculté de Médecine de Marseille. Sébastien Salas, Eric Dudoit, Roger Favre, Service d’Oncologie Médicale, Hôpital de la Timone adultes, Marseille. Gérard Soula , Marius Fieschi LERTIM, Faculté de Médecine de Marseille. Summary New communication technologies for teaching integrated continuous care: the Marseille’s experience We submit methodology, description and evaluation of a peda- gogic internet site developped for students of the Diplôme d’Université « Accompagnement et soins palliatifs approche multidisciplinaire de la fin de vie » of the Faculté de Médecine de Marseille. Key-words: palliative care, physician-patient relations, medical informatics, education, medical-methods, internet. Résumé Nous présentons ici la méthodologie, la description et l’évalua- tion d’un site Internet à vocation pédagogique développé pour les étudiants du Diplôme d’Université « Accompagnement et soins palliatifs approche multidisciplinaire de la fin de vie » de la Faculté de Médecine de Marseille. Mots clés : soins palliatifs, relation médecin-malade, informati- que médicale, formation médicale, internet. Introduction Les nouvelles technologies de l’information et de la communication prennent place progressivement dans le domaine de la formation médicale. Leur utilisation comme outils au service de la pédagogie donne une nouvelle dy- namique à l’enseignement et un rôle plus actif à l’étudiant dans son apprentissage. Les disciplines cliniques, tradi- tionnelles, en viennent aussi à les utiliser. Dans le cadre des soins palliatifs, on pouvait noter par exemple l’expé- rience menée dès 1998 à la Faculté de Pharmacie de l’Uni- versité d’Alberta au Canada [1], prouvant l’intérêt de ces technologies au sein même d’un domaine aussi sensible. Mais, en France, il n’y avait pas encore eu de réalisation de ce type à notre connaissance. L’enseignement des « soins palliatifs » présente la par- ticularité d’aborder très largement la relation entre le soi- gnant d’une façon générale (aide soignante, assistante so- ciale, bénévole, infirmière, kinésithérapeute, médecin, psychologue…) et le soigné en fin de vie. Au moment où il n’y a plus d’espoir de guérir, il est encore plus important qu’à n’importe quel autre moment de la vie, que cette re- lation existe, ne soit pas évitée et se révèle authentique. La réflexion éthique, philosophique, psychologique qui est proposée dans ce cadre amène inévitablement nous sem- ble-t-il à faire prendre conscience à « l’étudiant » qu’un travail personnel, une remise en question de ses habitudes, est nécessaire pour aborder cette relation avec un esprit d’ouverture, sans préjugé, sans jugement de valeur. Les nouvelles technologies de l’information ont un rôle à jouer par la souplesse et surtout l’interaction qu’elles amè- nent entre étudiants et enseignants, ou même simplement entre étudiants. La création du site Internet qui fait l’objet de cet article a pour objectif d’y contribuer. Matériel et méthode L’expérience qui est décrite a pu être réalisée grâce à la synergie de deux structures Tout d’abord, le Service d’Oncologie Médicale de l’Hô- pital de la Timone adultes, sous la responsabilité du Pro- Botti G et al. Les nouvelles technologies de l’information au service de l’ensei- gnement des soins continus intégrés : une expérience marseillaise. Med Pal 2004; 3: 54-58. Adresse pour la correspondance : Geneviève Botti, S.I.M. Hôpital Timone adultes, 264 rue Saint Pierre, 13385 Mar- seille Cedex 05. Tel : 04 91 38 70 84. e-mail : [email protected]

Les nouvelles technologies de l’information au service de l’enseignement des soins continus intégrés : une expérience marseillaise

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Page 1: Les nouvelles technologies de l’information au service de l’enseignement des soins continus intégrés : une expérience marseillaise

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Médecine palliative

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N° 2 – Avril 2004

Med Pal 2004; 3: 54-58

© Masson, Paris, 2004, Tous droits réservés

Les nouvelles technologies de l’information au service de l’enseignement des soins continus intégrés : une expérience marseillaise

Geneviève Botti, Laboratoire d’Enseignement et Recherche sur le Traitement de l’Information Médicale (LERTIM), Faculté de Médecine de Marseille.

Sébastien Salas, Eric Dudoit, Roger Favre, Service d’Oncologie Médicale, Hôpital de la Timone adultes, Marseille.

Gérard Soula , Marius Fieschi LERTIM, Faculté de Médecine de Marseille.

Summary

New communication technologies for teaching integrated continuous care: the Marseille’s experience

We submit methodology, description and evaluation of a peda-gogic internet site developped for students of the Diplôme d’Université « Accompagnement et soins palliatifs approche multidisciplinaire de la fin de vie » of the Faculté de Médecine de Marseille.

Key-words:

palliative care, physician-patient relations, medical informatics, education, medical-methods, internet.

Résumé

Nous présentons ici la méthodologie, la description et l’évalua-tion d’un site Internet à vocation pédagogique développé pour les étudiants du Diplôme d’Université « Accompagnement et soins palliatifs approche multidisciplinaire de la fin de vie » de la Faculté de Médecine de Marseille.

Mots clés :

soins palliatifs, relation médecin-malade, informati-que médicale, formation médicale, internet.

Introduction

Les nouvelles technologies de l’information et de lacommunication prennent place progressivement dans ledomaine de la formation médicale. Leur utilisation commeoutils au service de la pédagogie donne une nouvelle dy-namique à l’enseignement et un rôle plus actif à l’étudiantdans son apprentissage. Les disciplines cliniques, tradi-tionnelles, en viennent aussi à les utiliser. Dans le cadredes soins palliatifs, on pouvait noter par exemple l’expé-rience menée dès 1998 à la Faculté de Pharmacie de l’Uni-versité d’Alberta au Canada [1], prouvant l’intérêt de cestechnologies au sein même d’un domaine aussi sensible.Mais, en France, il n’y avait pas encore eu de réalisationde ce type à notre connaissance.

L’enseignement des « soins palliatifs » présente la par-ticularité d’aborder très largement la relation entre le soi-gnant d’une façon générale (aide soignante, assistante so-ciale, bénévole, infirmière, kinésithérapeute, médecin,psychologue…) et le soigné en fin de vie. Au moment oùil n’y a plus d’espoir de guérir, il est encore plus important

qu’à n’importe quel autre moment de la vie, que cette re-lation existe, ne soit pas évitée et se révèle authentique.La réflexion éthique, philosophique, psychologique qui estproposée dans ce cadre amène inévitablement nous sem-ble-t-il à faire prendre conscience à « l’étudiant » qu’untravail personnel, une remise en question de ses habitudes,est nécessaire pour aborder cette relation avec un espritd’ouverture, sans préjugé, sans jugement de valeur. Lesnouvelles technologies de l’information ont un rôle àjouer par la souplesse et surtout l’interaction qu’elles amè-nent entre étudiants et enseignants, ou même simplemententre étudiants. La création du site Internet qui fait l’objetde cet article a pour objectif d’y contribuer.

Matériel et méthode

L’expérience qui est décrite a pu être réalisée grâce à la synergie de deux structures

Tout d’abord, le Service d’Oncologie Médicale de l’Hô-pital de la Timone adultes, sous la responsabilité du Pro-

Botti G et al. Les nouvelles technologies de l’information au service de l’ensei-

gnement des soins continus intégrés : une expérience marseillaise. Med Pal

2004; 3: 54-58.

Adresse pour la correspondance :

Geneviève Botti, S.I.M. Hôpital Timone adultes, 264 rue Saint Pierre, 13385 Mar-

seille Cedex 05. Tel : 04 91 38 70 84.

e-mail : [email protected]

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Geneviève Botti

et al.

fesseur Roger Favre, qui comprend une Unité de SoinsPalliatifs de 4 lits à ce jour et, depuis fin 2002, une UnitéMobile de Soins palliatifs au sein desquelles travaillentdes équipes interdisciplinaires. Les personnes impliquéesdans ces équipes sont aussi, pour certains, des enseignantsà la Faculté de Médecine de Marseille, pour le Diplômed’université « Accompagnement et soins palliatifs : appro-che multidisciplinaire de la fin de vie ».

Ensuite, le Site Pédagogique de la Faculté de Médecinede Marseille qui est administré par le Laboratoire d’Ensei-gnement et Recherche sur le Traitement de l’InformationMédicale (LERTIM) sous la responsabilité du ProfesseurMarius Fieschi et supervisé par le Docteur Gérard Soula.Il propose une nouvelle approche de l’enseignement quidonne un rôle plus actif à l’étudiant dans son apprentis-sage et permet à l’enseignant de mieux percevoir l’impactde son enseignement [2].

Les objectifs du site s’appuient sur trois axes

La communication

Il s’agit d’introduire une participation plus active del’étudiant dans l’enseignement par le biais du forum. Surles thèmes qui génèrent habituellement de nombreusesquestions telles que les aspects philosophiques, psycho-logiques et religieux, un forum permet aux enseignantsd’initialiser un dialogue et de répondre dans le calme etpour tous aux questions de chacun. Il permet aussi auxétudiants d’exprimer leur ressenti et leur vécu sur cer-taines situations, ce qui est enrichissant pour tout lemonde. L’enseignant peut se faire une meilleure idée del’impact de son enseignement et des réactions qu’il sus-cite. Les cours polycopiés étant par ailleurs disponiblesen ligne ainsi que l’adresse électronique de l’enseignant,des questions ou des remarques spécifiques peuvent luiêtre adressées.

La liste de distribution contenant les mails de tous lesétudiants permet à l’enseignant d’adresser nominative-ment s’il le souhaite une information complémentaire àcelle qui est disponible sur le site. Elle en diffère dans lesens qu’elle interpelle activement et personnellementl’étudiant, alors que dans la consultation du site, c’est luiqui prend l’initiative.

Cette communication instaurée dans un premier tempsdans un objectif d’enseignement peut être élargie à lapratique clinique elle-même : les étudiants étant quasi-ment tous des professionnels de la santé, ils peuventavoir besoin d’un avis dans le cadre de leur activité desoignant. Le demander par le biais de la messagerie dansun dialogue à deux présente l’avantage par rapport autéléphone de ne pas déranger l’interlocuteur à un mo-ment défavorable et de lui laisser le temps de penser saréponse.

Enfin, les étudiants peuvent communiquer entre euxet créer des liens, ce qui va dans le sens de l’ouverturerecherchée.

Nous développerons un peu plus l’aspect du forum. Eneffet, l’intérêt pédagogique des forums a été souligné parde nombreux auteurs : dans son mémoire de DIU de Pé-dagogie Médicale, le Dr JC Dufour [3] indique que « l’uti-lisation des forums de discussion, et plus généralementcelle des réseaux en pédagogie, est portée par la théorieconstructiviste initiée par Piaget dans les années 1970 «…qui place l’apprenant au centre du processus : il est leconstructeur de sa propre connaissance…

Apprendre n’est pas un processus de transmission,mais un processus de transformation ». Dans ce contexte,l’enseignant prend en compte les conceptions de l’appre-nant pour améliorer l’acquisition decompétences. Le forum se présentecomme un moyen pour l’enseignantde connaître les conceptions de l’ap-prenant. P. Scherrer [4] met l’accentsur le caractère public du forum :c’est une chose, dit-il, de maîtriser lacommunication interpersonnelle etprivée, c’en est une autre d’être ca-pable de « prendre la parole » publi-quement. « Le forum étant par excellence le lieu des avispartagés, de la confrontation des points de vue, des ques-tions…, l’élève devra s’initier aux techniques de l’argu-mentation… tout cela dans des situations de communica-tions réelles, porteuses de sens et du même coup bien plusmotivantes… ». La communication écrite asynchrone pra-tiquée dans les forums présente des avantages et des li-mites qui ont été bien individualisées à la suite du Collo-que virtuel sur les Technologies Educatives et laFormation à Distance [5] :

– facile à utiliser et à moindre coût, elle donne letemps de mûrir la réflexion avant d’intervenir, de se do-cumenter et d’apporter ainsi des contributions construiteset d’intervenir quand on le désire ;

– elle élimine les contraintes de temps, fuseaux ho-raires, emplois du temps chargés ;

– elle permet des échanges transversaux par son sys-tème d’affichage ;

– elle permet l’archivage des contributions : avoir re-cours après coup au contenu et utiliser les interventionspour compléter des recherches ou des apprentissages.

Les limites de la communication écrite asynchrone pra-tiquées sur les forums se situent dans la difficulté de main-tenir l’attention dans un projet bien défini et le manque defamiliarisation avec cet outil chez de nombreux utilisateurs,la culture (de réseau) personnelle de chacun. Ces différentesconsidérations nous permettrons d’initialiser une réflexiondans la discussion qui suivra les résultats.

L’enseignantse fait une idée de l’impact

de son enseignementet des réactions

qu’il suscite.

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La mise à disposition d’information

Elle peut être réalisée sous différentes formes :– cours polycopiés, diaporamas… ;– schémas et protocoles de soins ;– information sur le DU lui même : lieux de stages,

mémoires des années antérieures… ;– références bibliographiques proposées par les inter-

venants ou les étudiants ;– liens avec d’autres sites : dans une optique documen-

taire pure (site Légifrance qui permet d’accéder aux textes deloi, site PubMed de la National Library of Medicine afin deréaliser des recherches bibliographiques Medline…) ; dansune optique communication peut s’ajouter la documentation(exemple des sites de l’ASP, des Dames du calvaire…) ;

– de la documentation sur forme textuelle (par exem-ple texte d’un livre sur les soins palliatifs ou la douleur),audio ou vidéo (parties de conférences concernant lessoins palliatifs ou la fin de vie, la mort…).

L’objectif de cette ressource est de donner les moyensà l’étudiant de s’informer sur les ma-tières enseignées bien entendu, maisaussi et de façon beaucoup plus large,lui donner des clés pour son propredéveloppement personnel en tant quesoignant, qui n’est pas un « métier »comme un autre. L’information est sé-lectionnée. Pertinente, elle évite laperte de temps à laquelle on est iné-vitablement confronté lorsqu’on cher-

che

de novo

dans internet qui amène beaucoup de bruit(information qui ne nous intéresse pas) et du silence (dif-ficile de trouver ce qui nous intéresse). Le parti pris de laqualité a été systématiquement retenu.

Suivant en cela A. Bressand et C. Distler [6], pourqui « l’information ne vaut que par les relations dontelle est la clé, le symbole ou la condition », une infor-mation n’est intégrée au site que si elle présente unebonne raison d’y être. Si dans un premier temps, il abien fallu dresser le contexte, poser les éléments de base(juridiques par exemple), très vite ce sont les demandesdes étudiants qui ont généré des évolutions, par exem-ple la connexion avec d’autres sites, des ajouts dans labibliographie ou encore une vidéo concernant le tou-cher-massage. Ce soin, dont il avait été question encours, avait suscité l’intérêt de tous : à la demande desétudiants, un film a été réalisé grâce à la synergie deplusieurs personnes du service d’oncologie et du tech-nicien de la salle de visio-conférence de la Faculté deMédecine.

La possibilité de se tester

Une information plus dynamique car interactive estdisponible dans le cadre de la ressource « autotest » sous

la forme de Questions à Choix Multiples en relation avecles cours.

La population du D.U. pour l’année 2002-2003

Une petite enquête réalisée lors du premier cours duD.U. a montré que 22 personnes étaient présentes ce jour-là, en majorité des femmes (3 hommes inscrits seulement),40 % ayant entre 30 et 33 ans avec des extrêmes de 24et 66 ans. L’origine géographique a montré une grandedispersion : Marseille, Toulon, Aix en Provence et leursalentours, Digne, Arles…, élément paraissant positif pourl’utilisation d’un réseau. D’un point de vue professionnel,les infirmières représentaient plus de 50 % de l’effectif ;il y avait aussi des médecins, bénévoles, psychologues,aides soignantes et kinésithérapeutes. Les trois quartsd’entre les inscrits utilisent internet avec plus d’une con-nexion par semaine (mais peu sont des habitués de la mes-sagerie électronique), et sont tous favorables (à une non-réponse près), à tenter le test de ce nouvel outil que seraitun site internet.

Résultats

La mise en œuvre

Le planning des opérations

Il se présente sous les aspects suivants :– enquête « AVANT », lors du premier cours

23/10/2002 ;– présentation des résultats de l’enquête, pré-annonce

du site30/10/2002 ;– annonce de l’ouverture du site, adresse, explica-

tions18/12/2002 ;– premiers messages sur le forum pour le nouvel an

01/01/2003 ;– différents thèmes proposés sur le forum par le mo-

dérateur JFM 2003 ;– enquête « APRÈS » 3 mois de fonctionnement

12/03/2003 ;– présentation des résultats de l’enquête « APRÈS »

18/05/2003 ;– un point de l’utilisation, à « distance » des cours

01/08/2003.

Le site lui même

On peut y accéder à l’adresse suivante : http://medi-dacte.timone.univ-mrs.fr/Learnet/Default.asp.

3 grandes fonctions sont mises en œuvre : le tutoratà distance, l’autotest (QCM) et la fonction « en savoirplus ». Les deux dernières sont accessibles à tous, la pre-mière est protégée par un mot de passe afin de protégerles échanges du forum.

L’information ne vaut que par les relations dont elle est la clé, le symbole ou la condition.

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L’utilisation en terme de connexions

Le

tableau I

donne une idée du nombre de connexions.Alors qu’au moment de la rédaction de cet article un re-gard en arrière sur la période universitaire écoulée est pos-sible, on peut dire qu’environ 1 000 accès ont été réaliséssur le tutorat à distance, principalement en janvier et fé-vrier, surtout le mardi et le jeudi (les cours avaient lieu lemercredi) et en parties égales entre les enseignants et lesétudiants (ce qui indique une surveillance importante desenseignants). En revanche l’accès à l’information, logi-quement plutôt du fait des étudiants, s’est poursuivi assezrégulièrement jusqu’à l’été. Il y a eu beaucoup d’accès auxQCM, mais très peu ont abouti à la réalisation du test luimême (accès « pour voir »).

En terme d’utilisation du forum

11 étudiants et 3 enseignants ont pris part au forum enémettant 80 messages. Les enseignants ont initialisé 5 thè-mes de discussion : «

burn out

», «

parle-moi

», «

spiritua-lité

», «

souffrance des familles

» et «

euthanasie

» qui ontrecueilli respectivement 17, 14, 6, 5 et 0 messages. Par lasuite, après la fin des cours en amphithéâtre, des étudiantsont spontanément initié des thèmes concernant leurs pré-occupations concrètes relatives à la parution de polycopiés,à la préparation des mémoires, à l’examen… On constatequ’il y a environ 1 message émis pour 10 connexions donc10 % de « passage à l’acte de la parole ». Cela peut paraîtrepeu, mais les dialogues lorsqu’ils ont eu lieu ont été trèsenrichissants comme en témoigne la séquence indiquéedans le

tableau II

.

En terme de ressenti de la part des étudiants

L’enquête « APRÈS », réalisée après 3 mois de fonc-tionnement du site, a recueilli 21 réponses :

– cinq personnes indiquent être allées sur le site plusd’une fois par semaine ;

– quatorze moins d’une fois par semaine ;

– deux n’y sont jamais allées (possédaient un accèsprofessionnel qu’elles n’utilisaient pas).

Soixante-dix % ont acheté un livre signalé dans labibliographie. Dans les commentaires libres, un grandnombre de réponses fait état d’unmanque de temps pour réaliser plusde connexions, et il faut se souvenirque les étudiants sont effectivementdes professionnels de la santé en ac-tivité. Mais sans doute d’autres rai-sons peuvent intervenir comme freinà la communication : une certaineauto censure, le manque d’aisancetechnique, le fait que l’accès internetsoit souvent un accès professionnel etnon pas personnel. Une personne indique qu’elle n’en apas ressenti le besoin dans la mesure où la discussion étaitfacile dans l’amphithéâtre. Une autre, et il faudrait peut-être creuser, parle de la difficulté de s’exprimer par écrit.

Discussion

L’intérêt pédagogique de ce type d’outil nous paraîtévident. Il a favorisé globalement la communication entreétudiants et enseignants, entre étudiants eux-mêmes, etc’était l’objectif souhaité. La première difficulté résidedans le fait que tous les étudiants ne possèdent pas unaccès internet et de bonnes conditions d’utilisation. C’estun frein réel, surtout pour des personnes prises par uneactivité professionnelle consommatrice de temps, quin’ont pas le profil de l’étudiant standard. Mais d’un autrecôté, ces personnes se sentent sans doute plus concernéesen règle générale par l’enseignement que dans un autrecursus médical, et ceci compense peut-être cela. Ladeuxième remarque concerne l’utilisation du forum. Pen-dant cette première année, c’est l’intuition et non l’expé-rience qui a guidé les enseignants.

Tableau I : nombre de connexions au site pédagogique.Table I: number of connections to the pedagogic site.

Tutorat à distance

(dont forum) QCM Information

Enseignants 376 (287) 53 95

Étudiants 383 (212) 135 183

Visiteurs 3 (2) 22 17

Total après 4 mois 762 (501) 210 295

Total après 6 mois 933 (617) 255 410

Internet favorisela communication

entre étudiantset enseignants,

entre étudiants eux-mêmes.

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Il faut arriver à dégager des façons de faire, une habi-leté à poser les questions, le moment, la formulation, unegrande réactivité dans le suivi des réponses… pour confor-ter un dialogue qui s’installe, susciter une réflexion touten laissant de l’espace afin que l’expression soit suffisam-ment libre et spontanée. En résumé, éviter de dire « je vousordonne de parler » ! Une réflexion est en cours à ce sujet.

Références

1. Pereira J, Murzin T. Integrating the “new” with the “tradition-nal”: an innovative education model. J Palliat Med 2001; 4:31-7.

2. Fieschi M., Soula G, Giorgi R, et al. Experimenting with newparadigms for medical education and the emergence of a dis-

tance learning degree using the internet: teaching evidence-based medicine. Med Inform Internet Med 2002; 27: 1-11.

3. Dufour JC. Place des forums de discussion en pédagogie :pourquoi, quand et comment les utiliser ? Mémoire de DIU dePédagogie médicale, Faculté de Médecine de Marseille, Sep-tembre 2002.

4. Scherrer P. Intérêt pédagogique des forums [Web Page]. Dis-ponible sur http://www.ac-versailles.fr/crdp/crdphtml/inter-net/pedago/pedaforum.htm

5. Les technologies éducatives et la formation à distance [WebPage]. Disponible sur http://intif.francophonie.org/Collo-que/FAD/themes/analyse.cfm

6. Bressand A, Distler C. La planète relationnelle. Paris : Flam-marion, 1995, p 30.

Tableau II : Exemple d’échanges sur le forum.Table II: sample of interactive communication on the forum.

Auteur : O Date : le 28/01/03 à 16:17

Tu as raison G, le travail « en conscience » demande à la personne d’être en paix avec les moments pénibles qu’elle a vécus car elle sera à nouveau confrontée à certains de ces moments lorsqu’elle sera aux côtés d’un patient en difficulté. Si ces moments douloureux (deuils etc...) n’ont pas été réglés, la blessure morale risque d’être réactivée…

Auteur : E Date : le 28/01/03 à 18:09

Et si nos souvenirs n’étaient rien d’autres que le rêve, un rêve, celui du moi qui s’inscrit dans une étendue

Auteur : M Date : le 28/01/03 à 12:39

Bonjour, En tant que bénévole depuis 3 ans, je peux témoigner que le « burn out » peut également nous toucher. Certaines associations préfèrent d’ailleurs prévenir les futures recrues qu’un « break » est souvent nécessaire voire recommandé au bout de 2 ans. Il n’est pas rare en effet de s’apercevoir que certains bénévoles s’investissent à fond les premiers mois et qu’au fil du temps leur enthousiasme s’émousse jusqu’à provoquer bons nombres de comportement décrits durant le cours de mercredi dernier. Malheureusement, les groupes de parole n’y changent rien (je parle de ceux auxquels j’ai pu participer qui servaient plutôt de psychanalyse à certains). À mercredi !

Auteur : C Date : le 28/01/03 à 20:38

Pendant quelques temps je suis intervenu auprès de personnes âgées dans une maison de retraite religieuse. Mes patients étaient à l’infirmerie, et l’ambiance était plutôt au palliatif gériatrique… Les infirmières étaient donc des bonnes sœurs pour la plupart étrangères, espagnoles ou irlandaises. Elles avaient une charge de travail considérable, travaillaient 7 jours sur 7, sans vacances, hormis quelques jours tous les 3 ans pour visiter leur famille ! Il ne m’a jamais paru (à ce que j’ai pu constater) qu’elles étaient atteintes d’épuisement professionnel. L’une d’entre elles, alors que je lui parlais de son travail, m’a seulement dit un jour « tout ce que je regrette, c’est de ne pas avoir assez de temps à consacrer à la prière » – Question 1 : Les personnes mues par une forte spiritualité seraient-elles à l’abri ?– Question 2 : Le « burn-out » ne serait-il pas, un peu, une maladie de notre société de plus en plus matérialiste ?

Auteur : E Date : le 29/01/03 à 09:37

La question de la spiritualité renvoie à la question de l’investissement psychique et au « mécanisme » de la sublimation… Il est évident que la psychologie des valeurs qui s’intéresse aux questions des croyances répondrait que l’étayage culturel et cultuel permet un recentrement de l’identité qui autorise d’échapper à la dépression