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Les qualités organoleptiques de la viande bovine Bases scientifiques pour une bonne utilisation culinaire Cahiers Sécurité des Aliments - CIV Décembre 2004 Cahiers Sécurité des Aliments

Les qualités organoleptiques de la viande bovine · 2019-02-27 · et du boucher, et, bien entendu, le talent du cuisinier. Enfin, en troisième partie du Cahier, quelques conseils

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Les qualités organoleptiques

de la viande bovineBases scientifiques

pour une bonne utilisation culinaire

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Première partie : Les différentes étapes de l'obtention de la viande

� 1. De l’élevage à l’abattoir ——————————————————————————————————————————————————————————————— 2� 1.1. L’élevage : la diversité du cheptel bovin français —————————————————————————— 2� 1.2. La préparation de la carcasse ———————————————————————————————————————————————— 3� 1.3. A l’abattoir, une première évaluation qualitative de la carcasse ————————— 3

� 2. La transformation du muscle en viande —————————————————————————————————————————————— 4� 2.1. Le muscle ——————————————————————————————————————————————————————————————————————— 4� 2.2. L'évolution du muscle après l’abattage : la maturation de la viande ————— 6

Deuxième partie : Les qualités organoleptiques de la viande bovine

� 1. La couleur de la viande ———————————————————————————————————————————————————————————————— 8� 1.1. Les bases structurales de la couleur ———————————————————————————————————————— 8� 1.2. Les facteurs de variation liés à l’animal et le rôle de l'éleveur ——————————— 9� 1.3. Les techniques mises en œuvre par les professionnels ——————————————————— 10� 1.4. La cuisson : ultime modification de la couleur de la viande —————————————— 10

� 2. La flaveur de la viande ————————————————————————————————————————————————————————————————— 11� 2.1. Les bases structurales de la flaveur ———————————————————————————————————————— 11� 2.2. Les facteurs de variation liés à l’animal et le rôle de l'éleveur ——————————— 11� 2.3. Les techniques mises en œuvre par les professionnels ——————————————————— 11� 2.4. La cuisson : étape indispensable à l'expression de la flaveur ———————————— 12

� 3. La jutosité de la viande ———————————————————————————————————————————————————————————————— 12� 3.1. Les bases structurales de la jutosité ———————————————————————————————————————— 12� 3.2. Les facteurs de variation liés à l’animal et le rôle de l'éleveur ——————————— 12� 3.3. Les techniques mises en œuvre par les professionnels ——————————————————— 12� 3.4. La cuisson : éviter l’assèchement de la viande ———————————————————————————— 12

� 4. La tendreté de la viande ——————————————————————————————————————————————————————————————— 13� 4.1. Les bases structurales de la tendreté ——————————————————————————————————————— 13� 4.2. Les facteurs de variation liés à l’animal ———————————————————————————————————— 13� 4.3. Les techniques mises en œuvre par les professionnels ——————————————————— 14� 4.4. La cuisson : deux façons de révéler la tendreté ———————————————————————————— 14

Troisième partie : Quelques conseils pour apprécier les qualités gustatives de la viande bovine

� 1. Bien choisir son morceau et son mode de cuisson ————————————————————————————————— 16� 2. Les différents modes de cuissons : principes et conseils ————————————————————————— 17

� 2.1. Les cuissons rapides —————————————————————————————————————————————————————————— 17� 2.2. Les cuissons lentes ——————————————————————————————————————————————————————————— 18

Sites Web utiles ——————————————————————————————————————————————————————————————————————————————— 19Glossaire ——————————————————————————————————————————————————————————————————————————————————— 19Bibliographie —————————————————————————————————————————————————————————————————————————————————— 20

SommaireAvant-proposAvec ce quatrième fascicule de la Collection “ Cahiers Sécurité des Aliments ”, le Centre d’Information des Viandes vous propose une information facilementaccessible sur les qualités organoleptiques de la viande bovine, fondée sur desdonnées scientifiques.

Les qualités organoleptiques recouvrent les propriétés sensorielles des viandes, qui sont à l’origine des sensations de plaisir associées à leur consommation : la couleur, la flaveur, la jutosité et la tendreté.

Nous détaillons, dans la première partie du Cahier, les étapes successives qui conduisent du muscle à la viande, et nous décrivons comment la structure et la composition du muscle conditionnent les qualités organoleptiques de la viandebovine.

Dans une deuxième partie, nous montrons que les qualités organoleptiques de la viande bovine dépendent de la conjonction de nombreux facteurs, impliquant à la fois la rigueur et le savoir-faire de l’éleveur, de l’abatteur, du transformateuret du boucher, et, bien entendu, le talent du cuisinier.

Enfin, en troisième partie du Cahier, quelques conseils de cuisson et préparationculinaire des différents morceaux permettront au consommateur de savourer une viande bovine dont il aura su préserver, voire bonifier, les qualitésorganoleptiques.

Déjà parus dans la collection “Cahiers Sécurité des Aliments” :

� Micro-organismes et parasites des viandes. Les connaître pour les maîtriser. CIV. 2002 ;� Encéphalopathies spongiformes des ruminants et santé publique. CIV. 2002 ;� Maîtrise de l’hygiène dans la filière viande. De l’éleveur au consommateur. CIV. 2003.

Nous remercions les membres du Conseil scientifique du Centre d’Information des Viandes pour leurs avis etcommentaires.

1.2. LA PRÉPARATION DE LA CARCASSE

• Avant l’abattageLes animaux, propres et en bonnesanté, sont transportés vers l’abattoir.Embarquement, transport, débarque-ment et attente dans les étables del’abattoir peuvent être des sources destress pour les animaux, qui nuiraientà leur bien-être et pourraient avoirdes conséquences défavorables surla qualité de la viande. C’est pourquoiune réglementation très stricte encadretoutes ces étapes et chaque partenairede la filière viande (éleveur, marchandde bestiaux, transporteur, abatteur,…) veille à ce qu’elles se déroulentdans les meilleures conditions possibles, conformément aux textesréglementaires en vigueur et auxaccords interprofessionnels sur lerespect du bien-être des animaux :durée du transport, densité de chargement, aménagement descamions (voir le dossier édité par leCentre d’Information des Viandes :Transport et bien-être des ruminants).A leur arrivée à l’abattoir, les animauxsont déchargés et placés en bouveriepour une période de repos où ils sontabreuvés à volonté.

• L’abattage L’abattage des bovins commence parl’immobilisation pour éviter touteblessure, puis l’animal est insensibiliséavant d’être saigné, ce qui rend l’opéra-tion indolore. La carcasse est ensuite préparée surla chaîne d’abattage : les opérateursprocèdent à l’arrachage du cuir, puisretirent les autres parties de l’animalqui ne sont pas consommables.Après ouverture des cavités abdo-minales et thoraciques, ils effectuentl’éviscération, c’est-à-dire le retrait desdifférents viscères.Enfin, ils enlèvent une partie des

graisses externes, afin d’améliorer laprésentation de la carcasse : c’estl’émoussage.Toutes ces opérations se font sous lecontrôle continu des agents desServices vétérinaires. L’équiped’inspection des Services vétérinairesest présente tout au long des périodesde travail pour, d’une part, contrôlerles bonnes conditions d’hygiène del’abattage, et, d’autre part, assurer uneinspection sanitaire systématiquedes animaux avant l’abattage et dechaque carcasse et des viscères correspondant à la fin des opérationsd’abattage. Le respect des mesuresde lutte contre l’ESB est de mêmecontinuellement contrôlé (voir le n°3de la collection “Cahiers sécurité desAliments” du Centre d’Informationdes Viandes “Maîtrise de l’hygiènedans la filière viande. De l’éleveur auconsommateur”.).

• Le ressuageLe refroidissement des carcasses,appelé ressuage, est effectué immé-diatement après l’abattage. Il consisteà amener les carcasses à une tempé-rature à cœur inférieure ou égale à7°C, température réglementaire au-dessus de laquelle ces dernières nepeuvent pas quitter l’abattoir pourêtre transportées vers un atelier dedécoupe ou un lieu de commercia-lisation. Le refroidissement des carcasses estobligatoire pour des raisons sanitaires,car le froid permet d’inhiber la multi-plication des micro-organismes. Il doitpour cela être réalisé suffisammentrapidement, mais, pour ne pas risquerd’altérer la tendreté de la viande, lachute de la température ne doit pasêtre trop brutale. Aussi, la descenteen température des carcasses estdonc finement pilotée afin de maîtriserla qualité bactériologique de la viandesans nuire à sa tendreté. Une tempé-

rature inférieure ou égale à 7°C àcœur est ensuite maintenue tout aulong du stockage des carcasses.

1.3. A L’ABATTOIR, UNEPREMIÈRE ÉVALUATIONQUALITATIVE DE LACARCASSE

À la fin des opérations d’abattage,avant d’être dirigées vers la chambrefroide de ressuage, les carcassesreconnues salubres par les agentsdes Services vétérinaires sont peséespuis classées et marquées par desagents qualifiés. Ces derniers sontinscrits sur une liste d’aptitude tenueà jour par l’Ofival et bénéficient d’uneformation continue pour éviter toutedivergence entre abattoirs. Ces opéra-tions peuvent également être réaliséesà l’aide d’un appareil de mesure oud’une machine à classer agréée parle ministère de l’agriculture. Cette procédure est standardisée àl’échelon communautaire, et 3 critèressont retenus pour juger de la qualitédes carcasses qui seront commercia-lisées :• leur poids,• leur conformation,• leur état d’engraissement.

• Le poids de la carcasseLe poids de la carcasse après réfrigé-ration est calculé en enlevant 2% aupoids mesuré avant le ressuage pourtenir compte des pertes d’eau parévaporation au cours du refroidisse-ment. Le poids de la carcasse froidereprésente en moyenne 55% du poidsde l’animal vivant, encore appelé poidsvif : c’est le rendement à l’abattage.

• La conformation de la carcasse Evaluer la conformation de la carcasseconsiste à décrire son aspect extérieurpour définir l’importance relative des

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Les différentes étapes de l’obte ntion de la viandeEn France, l’élevage bovin compte plus de 250 000 éleveurs pour le plus grand chepteleuropéen : près de 20,5 millions d’animaux. Avec une consommation moyenne estimée à 15,4 kilogrammes par habitant et par an (source OFIVAL, statistiques 2003), la viande bovineest la favorite des Français.

Cette première partie présente les étapes successives de la préparation de la carcasse puisde l’évolution du muscle et sa transformation en viande. Après l’abattage, le muscle est lesiège de phénomènes physico-chimiques qui vont progressivement modifier ses propriétés etplus particulièrement ses qualités organoleptiques.

1. De l’élevage à l’abattoir1.1. L’ÉLEVAGE :

LA DIVERSITÉ DU CHEPTEL BOVINFRANÇAIS

Dans le langage courant, on parlesouvent de viande de “bœuf”, maisles viandes bovines commercialisées

regroupent de nombreux produitsprovenant de différentes catégoriesd’animaux en fonction de leur âge etde leur sexe, et de différents typesraciaux (voir encadré 1).

LES TROISGRANDS TYPESRACIAUX CHEZLES BOVINS• les races à viande, dont le

lait des mères est unique-ment destiné à la croissancede leur veau, et qui sontsélectionnées pour leur qua-lités bouchères. Exemples :la Charolaise, la Limousine, la Blonde d’Aquitaine ouencore la Salers, laGasconne, l’Aubrac, …

• les races laitières, sélec-tionnées pour leur productionde lait qui est essentiellementdestiné à la consommationhumaine. Exemples : laPrim’Holstein, la Jersiaise etla Bretonne Pie Noire.

• les races dites “mixtes”,sélectionnées pour les deuxcritères à la fois, elles sontaussi réputées pour leur production de lait que pourleur viande. Exemples : laNormande, la Montbéliarde,…

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Illustration 1 Les catégories de bovins

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< 6 mois*

GROS BOVINS

18 à 24 mois

Age à l’abattage

36 moisGENISSE

Femelle n’ayantpas vêlé

5 à 10 ansen moyenne

VACHEFemelle

ayant vêlé

* conformément aux cahiers des charges en vigueur en France

VEAU DE BOUCHERIEMâle ou femelle

JEUNE BOVINMâle non castré

BŒUFMâle castré

TAUREAUMâle non castré

Agé de + de 24 mois

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masses musculaires par rapport ausquelette. La conformation donnedonc une assez bonne estimation durendement en viande de la carcasse. Les profils musculaires (profils rebondis, rectilignes ou concaves,selon le cas) et l’épaisseur des masses musculaires de la cuisse, dudos et de l’épaule sont appréciés, cequi permet le classement de la carcasse selon une grille communau-taire avec attribution d’une lettre.

• L’état d’engraissement

de la carcasse L’état d’engraissement de la carcasses’évalue d’après la quantité de graisseexterne déposée sous la peau, appelée“gras de couverture”, et la quantité degraisse interne, à l’intérieur des cavitésabdominales et thoraciques. Ce critèredonne indirectement une information surle rendement en viande. Comme pour laconformation, il existe une grille commu-nautaire de classement des carcassesselon leur état d’engraissement avecattribution d’un chiffre de 1 à 5.

L’indication du classement (lettre +

chiffre) est obligatoire par marquagede la carcasse sur chacun des quartiers :soit par estampillage à l’encre alimen-taire, soit par des étiquettes inviolableset solidement attachées. En France,une structure interprofessionnelle,Normabev, est chargée depuis juin2003 du contrôle de la présentation,de la pesée, du classement et du marquage des carcasses de grosbovins dans tous les abattoirs.

En fonction du marché, un prix au kilogramme est déterminé pourchaque classe. Poids et critères dequalité ont donc essentiellement uneimportance économique car c’estd’eux que dépend la rémunération del’éleveur, mais ils ne permettent quetrès peu de préjuger des qualités organoleptiques finales de la viandedestinée au consommateur.Cependant, il existe un lien entre l’étatd’engraissement de la carcasse et lateneur en lipides de certains muscles,teneur qui peut influencer des qualitésorganoleptiques comme la flaveur ouencore la jutosité de la viande. De plus,il semblerait que les animaux de trèsbonne conformation fournissent uneviande plus tendre que les autres.

Animal Carcasse55 %

muscles : 70 %

os

graisses de découpe

déchets (tendons,aponévroses...)

Illustration 2

Le rendement de l’abattage et de la découpe de la carcasse

Conformation classe

Excellente E

Très bonne U

Bonne R

Assez bonne O

Médiocre P

Tableau 1 :Classes de conformation

Etat d’engraissement classe

Très faible 1

Faible 2

Moyen 3

Fort 4

Très fort 5

Tableau 2 :Classes d’état d’engraissement

2. La transformation du muscle en viande2.1. LE MUSCLEPour bien comprendre l’évolution dumuscle après l’abattage, il nous fautrapidement décrire sa structure et sacomposition, et le mécanisme de sacontraction du vivant de l’animal.

• DescriptionLe muscle possède plusieurs niveauxd’organisation (voir illustration 3).

Les fibres musculaires, longues cellules dotées d’une activitécontractile, sont regroupées en faisceaux de taille variable. Chaquefibre présente de nombreux brins,appelés myofibrilles, constituésessentiellement de deux types defilaments protéiques : les filamentsfins d’actine et les filaments épais demyosine. Les cellules musculairesrenferment de la myoglobine, un

pigment rouge de nature protéiquecomprenant un atome de fer. Ce pigment assure le stockage et letransport de l’oxygène au sein de lacellule musculaire.Le tissu conjonctif assure le soutiende la structure du muscle en enrobantchaque fibre musculaire, chaquefaisceau de fibres, et l’ensemble desfaisceaux, c'est-à-dire le muscle lui-même. Il forme une enveloppe

externe autour du muscle, appeléeaponévrose, que le boucher enlèvelorsqu’il pare la viande achetée par leconsommateur. Cette enveloppe s’épaissit aux extrémités du muscle pourformer les tendons qui le rattachentaux os. Le tissu conjonctif constitueainsi une véritable armature interneet externe qui confère au muscle unecertaine résistance.Le tissu conjonctif est essentiellementconstitué de collagène, une protéinefibreuse qui joue un rôle importantdans l’évolution de la tendreté desviandes après leur cuisson. Une cuisson rapide et sèche, sur le grilpar exemple, provoque sa contrac-tion et donc un “durcissement” de laviande, tandis qu’une cuisson lenteet humide, en pot-au-feu par exemple,le solubilise en gélatine. On comprendaisément que la teneur et le degré desolubilité du collagène déterminent lescatégories de muscles (voir deuxièmepartie chapitre 4). Le tissu conjonctif contient égalementdes adipocytes, cellules qui stockentles lipides. C’est dans le tissuconjonctif, entre les faisceaux et/ouentre les fibres musculaires, que sedépose le gras musculaire au coursde l’engraissement de l’animal.

• Mécanisme de contractionLa contraction du muscle résulted’une interaction entre l’actine et lamyosine de façon coordonnée danschacune de ces fibres musculaires,avec glissement des filaments d’actinepar rapport aux filaments de myosine,ce qui conduit à un raccourcissementdes myofibrilles. La contraction dumuscle, suivie de sa relaxation,demande une consommation impor-tante d’énergie dans les cellulesmusculaires. L’énergie nécessaireprovient de la dégradation du glucoseet/ou du glycogène (polymère de glucose, molécule de réserve), soitpar voie oxydative aérobie (utilisationd’oxygène), soit par voie anaérobie.

Illustration 3

Structure du muscle

Illustration 4

Le mécanisme de contraction à l’échelle moléculaire

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fibresmusculaires

muscle tissu conjonctif (1er niveau)

myofibrille

filaments épaisde myosine

filaments minces d’actine

tissu conjonctif (2ème niveau)

Tête de myosine

1. La tête de myosine se lieau myofilament d’actine.

Filament d’actine

Filament de myosine

4. La tête de myosine estmise sous tension.

2. Phase active : la tête de myosinepivote et se replie en tirant le filamentd’actine.

Tête de myosine

3. La tête de myosine se détache.

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2.2. L’ÉVOLUTION DU MUSCLE APRÈS L’ABATTAGE : LA MATURATION DE LA VIANDE

Après l’abattage, le muscle est lesiège de phénomènes physico-chimiques qui vont modifier sa structure, sa composition et ses propriétés, dont tout particulièrementses qualités organoleptiques. Satransformation en viande, encoreappelée la maturation, est essentiel-lement le résultat de la variation dupH et de la plasticité du muscle.Après une courte phase de pantelanceoù les fibres musculaires se contractentde façon désordonnée, entraînant unépuisement de leurs réserves énergé-tiques, le muscle se rigidifie et entredans la phase de rigidité cadavé-rique. Ensuite, progressivement, sousl’effet de différentes enzymes tissu-laires, le muscle va se transformer enviande aux qualités organoleptiquesappréciées : c’est la phase de matu-ration proprement dite.

• L’évolution du pH :Le pH musculaire, ou degré d’aciditédu muscle, chute dans les 24 à 48heures après la mort de l’animal : ilpasse d’une valeur proche de la neutralité, de l’ordre de 7, dans lemuscle vivant, à 5,5/5,7 environ, 24à 48 heures après l’abattage.

Cette acidification provient de l’utilisa-tion des réserves en sucre (glycogène)

des cellules musculaires par voieanaérobie avec production d’acidelactique. Le métabolisme musculairese poursuit après la mort de l’animal,mais, après la saignée, le musclen’est plus approvisionné en oxygène.La production de l’énergie nécessaireaux contractions et à la relaxationdes cellules musculaires ne peut sefaire que par voie anaérobie, endégradant le glycogène musculaireen acide lactique. Dans le même temps,l’acide lactique produit s’accumuledans le muscle, provoquant son acidi-fication progressive.

La bonne acidification du muscle estessentielle pour la qualité de la viande,d’une part, en ralentissant la multi-plication des micro-organismes etfavorisant la bonne conservation dela viande, d’autre part, en permettantune bonne maturation de la viandeet l’acquisition des qualités organo-leptiques recherchées : couleur, jutosité, flaveur et tendreté. Pourcela, les réserves en glycogène dumuscle doivent être suffisantes aumoment de l’abattage.

Un muscle qui s’acidifierait mal, dontle pH resterait supérieur ou égal à 6après l’abattage, donnerait une viandecollante et sombre, du fait d’unecapacité de rétention d’eau anorma-lement élevée. On appelle ces viandesdes “viandes à coupe sombre”.Ce phénomène peut se produirelorsque les réserves en glycogène del’animal au moment de l’abattagesont insuffisantes pour permettre

une acidification normale du muscle.Aussi, durant la période précédantl’abattage, les professionnels mettent-ilstout en œuvre pour réduire lesdépenses physiques et les stressresponsables de la diminution en gly-cogène musculaire et ainsi éviter unemauvaise évolution du muscle et dela qualité de la viande.

• L’évolution de la dureté : Après l’abattage, la plasticité dumuscle change : le muscle perd sonélasticité et se rigidifie progressivementjusqu’à un stade de raidissementmaximal appelé rigidité cadavériqueou rigor mortis, atteint environ 24heures après l’abattage.

Lors de la contraction du muscle, lamyosine, en hydrolysant l’ATP, subitun changement de conformation : satête pivote en déplaçant le filamentd’actine auquel elle s’est liée. Pourassurer la relaxation du muscle, ilfaut une nouvelle consommation d’énergie pour que la myosine retrouvesa conformation initiale et se détachedu filament d’actine (voir illustration 4).Or, après l’abattage de l’animal, lesréserves de glycogène s’épuisent etla production d’énergie devient insuffisante ; il n’y a plus assez d’ATPdisponible pour permettre le relâche-ment entre les molécules de myosine etd’actine. D’où une perte des propriétésélastiques du muscle, qui se rigidifieprogressivement jusqu’au stade derigor mortis.

Figure 2 :Le processus d’acidification du muscle

Glycogène musculaire= réserves en sucre

Acide lactique

ENERGIE(ATP)

accumulédans le muscle

Figure 1 :Evolution du pH musculaireaprès l’abattage

pH

Temps(heures)

Abattage

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6.0

5.5

246 2420

pH 24hpH initial

Figure 3 :Evolution de la dureté du muscle après l’abattage

Dureté

Temps(jours)

Rigidité cadavérique

Maturation

2 7 10(température de conservation de la carcasse ≤ 7°C)

Au cours de la conservation, le durcis-sement du muscle est ensuite suivid’un long processus d’attendrissementnaturel : cette période est appelée lamaturation.

L’acidification du muscle est uneétape préalable à la maturation. Lachute du pH entraîne la libérationd’enzymes dans le cytoplasme desfibres musculaires. Les enzymes

libérées permettent un attendrissementmusculaire progressif par dégradationdes protéines myofibrillaires.

LA MATURATION DE LA VIANDE :UNE ÉTAPE INCONTOURNABLE

Qu’est-ce que la maturation ?La maturation est un processus d’attendrissement naturel de la viande. Elle résulte de phénomènesenzymatiques qui dégradent progressivement les myofibrilles (sans modification du collagène). La viandes’attendrit d’autant plus que la maturation dure longtemps. C’est également au cours de cette période que se forment les précurseurs des arômes et de la saveurde la viande. La maturation de la viande améliore donc à la fois sa tendreté et ses propriétés gustatives.

Comment est-elle conduite ?Pour les carcasses correctement refroidies à une température inférieure ou égale à 7°C, la maturationdébute dans les 24 à 48 heures après l’abattage. Selon la précocité des opérations de découpe et detravail de la viande, on distingue deux modes de conduite de la maturation :

• La maturation “sur os” :La carcasse est conservée en chambre froide pendant une à trois semaines. La maturation a lieu pendantce stockage. Après cette période, la carcasse est découpée, la viande travaillée, conditionnée, puis commercialisée.

• La maturation sous-vide :Le transformateur découpe la carcasse et travaille la viande rapidement après l’abattage (après le ressuage plus précisément). La viande ainsi découpée et travaillée est plus sensible aux altérations ;une maturation suffisamment longue ne peut alors s’envisager que sous-vide. La viande réfrigérée estdonc conditionnée immédiatement après la découpe. Le conditionnement sous-vide permet d’allongerles durées de conservation, et donc de maturation, jusqu’à 1 ou 2 mois.

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observe, au cours de sa conser-vation, l’apparition progressived’un brunissement à sa surface.Cette altération naturelle de la couleur au cours du temps est dueà un changement de forme chimiquedu pigment : c’est le phénomèned’oxydation de la myoglobine (voirencadré 3).

• La structure physique du muscle :Elle détermine sa capacité à absorberet à réfléchir la lumière. Cettestructure dépend du pH dans lemuscle. Ainsi, lorsque le pH du muscle est proche de la neutralité,sa structure est telle qu’il absorbe

fortement la lumière, ce qui luiconfère une couleur rouge sombre.Lorsque le pH diminue, le muscleréfléchit plus la lumière, ce qui luiconfère une couleur plus claire.C’est pour cette raison que dansles heures qui suivent l’abattage, lemuscle, en s’acidifiant, passe durouge sombre au rouge clair.

1.2. LES FACTEURS DEVARIATIONS LIÉS ÀL’ANIMAL ET LE RÔLEDE L’ÉLEVEUR

• La nature même de l’animal ou dumuscle

C’est l’âge de l’animal qui déterminela quantité de pigment musculaire :celle-ci augmente avec l’âge et la précocité (c’est-à-dire l’aptitude àatteindre rapidement l’âge adulte,caractéristique qui dépend notam-ment du sexe du bovin et de sa race).En effet, plus l’animal est précoce,plus il atteint rapidement sa pigmen-tation définitive, donc plus la pigmen-tation de ses muscles est intense àun âge donné. La pigmentation des muscles dépendégalement de la nature du muscle.Elle est donc variable d’un muscle àl’autre. Le rumsteck et la bavette sont,par exemple, plus pigmentés que lefaux-filet et le rond de gîte.La quantité de pigment musculairedépend exclusivement de ces facteursbiologiques. Elle est donc définiti-vement fixée au moment de l’abat-tage, et les opérations effectuées enaval dans la filière n’auront aucunerépercussion sur ce paramètre.

• L’alimentationL’éleveur ne peut pas modifier laquantité de pigment musculaire parle biais de l’alimentation donnée auxbovins. En revanche, selon certainstravaux scientifiques, une alimentationriche en vitamine E, une vitamineantioxydante, permettrait de limiterl’oxydation ultérieure de la myoglobineet d’augmenter ainsi la stabilité de lacouleur de la viande.

• La phase de pré-abattageSi les étapes précédant l’abattage nefaisaient pas l’objet d’une attentiontoute particulière de la part des opérateurs, elles pourraient être

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Les qualités organoleptiques de la viande bovineCette deuxième partie détaille les critères de qualité de la viande bovine recherchés par leconsommateur. Ce sont essentiellement ses qualités organoleptiques, qualités perçues parnos sens, mais aussi ses qualités culinaires, caractérisant l’aptitude de la viande à êtrepréparée et cuisinée.

Quatre principaux critères définissent les qualités organoleptiques de la viande bovine : ils’agit de la couleur, de la flaveur, de la jutosité et de la tendreté.

Différents facteurs, à différentes étapes de la filière, sont susceptibles d’influencer cescritères :

• des facteurs biologiques : ce sont les caractéristiques de l’animal et du muscle lui-même ;

• des facteurs zootechniques : il s’agit des pratiques d’élevage ;

• des facteurs technologiques : ce sont les transformations conduites aprèsl’abattage ;

• des facteurs culinaires : il s’agit des modalités de préparation et de cuisson de la viande.

1. La couleur de la viande

1.1. LES BASESSTRUCTURALES DE LA COULEUR

Trois principaux facteurs physico-chimiques déterminent la couleur dela viande : • La quantité de myoglobine présente

dans le muscle :La myoglobine est le pigment quiassure le stockage et le transportde l’oxygène dans les cellules mus-culaires. Elle est à l’origine de lacouleur rouge du muscle : plus il ya de myoglobine dans le muscle,plus le rouge est intense.

• La forme chimique de la myoglobine : Alors que la viande fraîche estd’une couleur rouge uniforme, on 9

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La préservation d’une belle couleur rouge durant la conservation est primordiale pour laviande bovine car elle est fortement liée à la notion de fraîcheur du morceau.

Illustration 5

Qu’est-ce qui détermine la couleur du muscle ?COULEUR

Lumière +/-absorbée / réfléchie

Myoglobine (Mb)

QuantitéForme chimique

Structure physiquedu muscle (liée au pH)

POURQUOI LA VIANDE FINIT-ELLE PAR “BRUNIR” ?

La myoglobine peut prendre trois formes chimiques, selon sonétat d’oxydo-réduction (état de l’atome de fer) et d’oxygénation(fixation ou non d’oxygène).

• Une viande de bœuf fraîche présente en surface une bellecouleur rouge vif qui est celle du pigment oxygénée : l’oxymyoglobine.

• Au cœur du morceau, il n’y a pas d’oxygène : la myoglobineest sous forme réduite et la viande présente une couleurrouge sombre, pourpre.

• Enfin, quelques millimètres sous la surface, la pression partielleen oxygène est faible, mais non nulle. La myoglobine estalors sous forme oxydée, de couleur brune, appelée metmyoglobine. Pratiquement invisible sur la viande fraîche,cette mince couche brune tend à se développer au fil de laconservation par oxydation progressive du pigment.

Le passage de la forme oxygénée à la forme réduite est totalementréversible : il dépend uniquement de la présence ou de l’absenced’oxygène au contact de la myoglobine.

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Mb réduite

(pourpre)

Mboxygénée(rouge vif)

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préjudiciables à la couleur de la viande.En effet, comme nous l’avons vu ci-dessus, le transport et les manipu-lations des bovins depuis leur départde l’élevage jusqu’à l’abattoir peuventconduire à une diminution de leursréserves en glycogène musculaire, leglycogène étant mobilisé lors de l’activité physique et sous l’action decertaines hormones sécrétées enréponse au stress. Pour que l’évolution des viandesaprès l’abattage ne soit pas altérée,les professionnels prennent unensemble de précautions qui limitentles perturbations émotionnelles(stress, peur…) de même que lesdépenses physiques des animaux :chargement et débarquement desanimaux dans le calme, qualité de laconduite des bétaillères, repos etabreuvement à volonté des animauxen étable à leur arrivée à l’abattoir.Ces mesures permettent à la foisd’assurer le respect du bien-être del’animal et d’obtenir les qualités organoleptiques de la viande, recher-chées par le consommateur.

1.3. LES TECHNIQUES MISESEN ŒUVRE PAR LESPROFESSIONNELS

La qualité bactériologique de la viandeinfluence sa coloration car le phéno-mène d’oxydation de la myoglobine(donc de brunissement) est accélérélorsque des bactéries se développentà la surface de la viande.En protégeant les morceaux de viandede l’oxygène et en limitant le dévelop-pement des micro-organismes, lestechniques mises en œuvre par lesprofessionnels de la filière ralentissentl’oxydation du pigment de la viandeet retardent son brunissement. Lastabilité de la couleur de la viandeest ainsi assurée au cours de saconservation.

• Découpe et travail de la viande La maîtrise de l’hygiène par les professionnels au cours de la découpe,du désossage de la carcasse et de la

préparation des pièces de viandes estdétaillée dans le n°3 de la collection“Cahiers Sécurité des Aliments” duCentre d’Information des Viandes : “Maîtrise de l’hygiène dans la filièreviande. De l’éleveur au consommateur”.Ces bonnes pratiques d’hygiène permettent de limiter au maximum lacontamination bactérienne de laviande et d’assurer de ce fait la stabilité de sa couleur. Lors du travail de la viande, ses protections naturelles que constituentla graisse et le tissu conjonctif sontretirées lors du parage. Le muscleainsi mis “à nu” est plus sensible àl’oxydation et risque de s’assombrir.Par conséquent, la viande travailléedoit être conditionnée rapidement demanière à la protéger de l’oxydation.

• Une conservation au froidTout au long de la conservation, latempérature de la viande est mainte-nue la plus proche possible de 0°C(entre 0 et 5°C) afin de ralentir l’oxydation du pigment et la multipli-cation des bactéries.

• Différents types de conditionnementPour le choix du conditionnement,les professionnels doivent mettre enbalance deux paramètres : l’oxygèneconfère à la viande fraîche sa bellecouleur rouge, attrayante, mais, encontrepartie, réduit sa durée deconservation en favorisant les oxydations et les altérations bacté-riennes.

- Donner la priorité à la durée deconservation :

Le conditionnement sous-vide protègela viande de l’oxydation par l’absenced’oxygène, ce qui augmente considé-rablement la durée de conservationdu produit. Mais en l’absence d’oxygène,la myoglobine se trouve à l’étatréduit, et la viande conditionnéesous-vide prend une couleur rougesombre. Cette couleur peut surprendrele consommateur, mais il faut savoirque ce phénomène est totalementréversible. Après ouverture de la barquette, lorsque la viande est remise

à l’air libre, elle retrouve naturellementsa belle couleur rouge vif d’origine enquelques minutes, la myoglobineretrouvant sa forme oxygénée.

- Donner la priorité à la couleur dela viande :

Certains conditionnements exploitentla présence d’oxygène pour que lacouleur de la viande soit optimale aumoment de l’achat : c’est le cas duconditionnement sous film étirable,qui conserve à la viande sa couleurrouge vif puisqu’elle est au contactde l’oxygène de l’air. C’est aussi lecas du conditionnement sousatmosphère protectrice avec oxygè-ne, qui exacerbe la couleur rouge vifde la viande car la forte teneur en oxy-gène augmente la stabilité du pig-ment. La durée de conservation deces viandes est cependant inférieureà celle des viandes conditionnéessous-vide.

1.4. LA CUISSON :ULTIME MODIFICATIONDE LA COULEUR DE LA VIANDE

La coloration de la viande est modifiéeà partir d’une température de 45°C. Au cours de la cuisson de la viande, l’élévation de la température engendreune dénaturation de ses protéines,c’est-à-dire une modification de leurstructure. La myoglobine subit cettedénaturation et précipite avec d’autresprotéines dénaturées pour former lespigments bruns caractéristiques de laviande cuite.Lorsque la température de cuisson estsupérieure à 90°C, d’autres réactionschimiques comme la caramélisationdes sucres et les réactions de Maillard(réactions entre sucres réducteurs etfonctions amines libres) interviennentdans l’accentuation du phénomène debrunissement de la viande.

2.1. LES BASESSTRUCTURALES DE LA FLAVEUR

La flaveur est essentiellement liée augras présent dans le morceau de viande,et en particulier au gras intramusculaire.Les graisses comprennent des composésqui évoluent lors de la conservation dela viande et se transforment au coursde la cuisson pour donner à la viandesa flaveur caractéristique. Plus la teneuren graisses dans le muscle est impor-tante, plus la flaveur de la viande estintense. Cela est vrai jusqu’à un seuilde dix pour cent au-delà duquel la flaveur n’évolue plus. La fraîcheur des graisses est aussidéterminante pour la flaveur car l’oxydation des lipides au cours de laconservation de la viande peut provoquerl’apparition de mauvais goûts commeun goût de rance par exemple. A noter également que la compositionen acides gras (mono/poly insaturés)des graisses influence la flaveur : lesacides gras poly-insaturés conféreraientune flaveur plus marquée à la viande.Enfin, au cours de la maturation de laviande, des composés précurseursd’arôme sont formés lors de l’évolutiond’autres molécules du muscle commeles protéines ou encore les nucléotides.

2.2. LES FACTEURS DE VARIATIONS LIÉS ÀL’ANIMAL ET LE RÔLEDE L’ÉLEVEUR

• L’état d’engraissement de l’animalet la nature du muscle

En général, la quantité de graisse intramusculaire augmente avec l’étatd’engraissement global de l’animal.Cette relation est en fait plus subtile,tout dépend du type de muscle et del’animal :

- Chez un bovin, les dépôts de graissesne se répartissent pas uniformémententre les muscles : certains musclesdeviennent plus facilement gras,d’autres restent toujours maigres.

- D’un bovin à l’autre et pour unmême état d’engraissement, lateneur en graisse d’un muscledonné peut varier.

La teneur en gras du muscle augmenteavec le degré de maturité de l’animalcar la graisse musculaire se déposetardivement. Les bovins les plus âgésprésentent donc les muscles les plus“persillés”. Le persillé représente lapartie visible de la graisse intramus-culaire de la viande. Une viande persillée est donc une viande parseméede minces filets de graisse. Les musclesdes femelles sont aussi plus persilléesque ceux des mâles car elles sontplus précoces. A noter que l’âge de l’animal a uneinfluence sur la composition en acidesgras des graisses déposées : lateneur en acides gras poly-insaturésaugmenterait avec l’âge.

• L’alimentation et la finition des animaux

L’éleveur peut augmenter l’état d’engraissement du bovin en assurantune “finition” suffisante des animaux,c’est-à-dire en leur apportant desrations riches en énergie pendant lapériode au cours de laquelle lesdépôts de graisses sont les plusimportants.L’éleveur peut également modifier lacomposition des graisses du bovinpar la maîtrise de l’alimentation.Chez les animaux jeunes, les phasesde pâturage ou l’apport de rationspauvres en énergie permettraientd’augmenter la quantité d’acidesgras poly-insaturés et d’intensifierainsi la flaveur de la viande.

2.3. LES TECHNIQUESMISES EN ŒUVRE PARLES PROFESSIONNELS

• Une conservation qui favorise lamaturation

Les professionnels veillent à ce quela maturation dure suffisammentlongtemps car elle est essentiellepour le développement de la flaveur.C’est au cours de cette étape que lescomposés précurseurs de la flaveurse forment par dégradation progressivedes constituants de la graisse de laviande. Le maintien correct de la chaîne dufroid, à chaque étape, par l’ensembledes intervenants de la filière viande,permet de ralentir l’oxydation desgraisses, phénomène qui conduit àl’apparition de flaveurs désagréables(les acides gras insaturés y sont particulièrement sensibles).Enfin, le conditionnement sous-videest particulièrement intéressant pourle développement de la flaveur.D’une part, il prolonge la durée deconservation donc la durée de matu-ration de la viande, d’autre part ilévite l’oxydation des graisses.

• Le travail du boucherMême si c’est essentiellement lagraisse intramusculaire qui confère àla viande sa flaveur, la présence degraisse intermusculaire l’accentue.Le boucher effectue donc un paragelimité des viandes provenant d’animauxplus maigres afin de préserver lagraisse intermusculaire.

2. La flaveur de la viandeLa perception de la flaveur met en jeu le goût et l’odorat. La flaveur est un ensemblecomplexe de sensations, formé des saveurs perçues par les papilles de la langue et desarômes perçus par voie rétro-nasale lorsque le morceau de viande est en bouche.

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2.4. LA CUISSON : ÉTAPE INDISPENSABLEÀ L’EXPRESSION DE LA FLAVEUR

La viande crue n’a qu’une flaveurpeu prononcée, liée à la présence desels minéraux et d’éléments dissous.Pour donner à la viande sa flaveur,

lors de la cuisson, les composés précurseurs formés au cours de lamaturation se transforment en composés non volatils responsablesde la saveur et en composés volatilsà l’origine des arômes. Les conditionsde cuisson, la température et la duréedu traitement thermique modifient lanature et la concentration des composésvolatils. La graisse joue un double

4.1. LES BASESSTRUCTURALES DE LA TENDRETÉ

La tendreté de la viande dépend dedeux éléments constitutifs du muscle :

- Le collagène : constituant essentieldu tissu conjonctif, cette protéinetrès résistante confère au muscle sadureté de base. Le morceau estd’autant plus dur que la quantité decollagène est importante et que cecollagène est insoluble (voir encadré 4).

- Les myofibrilles : elles subissent, aucours de la maturation de la viande,une désagrégation naturelle sousl’effet des enzymes libérées et activéespar l’acidification du muscle, ce quiprovoque un attendrissement dumuscle (voir première partie 2.2). Lamaturation est une étape essentiellepour révéler la tendreté des musclespauvres en collagène. Au contraire, ellen’attendrit que très peu les musclesriches en collagène, puisque ladégradation enzymatique touche lesprotéines des myofibrilles et non celles du tissu conjonctif.

Ainsi, plus les muscles sont riches encollagène plus ils sont durs. A contrario,plus les muscles sont pauvres en collagène plus ils sont tendres, àcondition qu’ils subissent une maturation suffisante.

4.2. LES FACTEURS DE VARIATION LIÉS À L’ANIMAL

La quantité de collagène dans lemuscle permet de distinguer desmuscles pauvres en collagène,essentiellement situés sur l’arrièrede la carcasse, et des muscles plusriches en collagène, plutôt situés surl’avant. De plus, la tendreté de la viandedépend de facteurs biologiques telsque l’âge et le sexe de l’animal.

4. La tendreté de la viandeLa tendreté est la facilité avec laquelle la viande est découpée, déchirée et broyée pendantla mastication.

3. La jutosité de la viandeLa jutosité de la viande est une caractéristique perçue lors de sa mastication.

Figure 4 : Processus de développement de la flaveur

précurseursde la flaveur

MATURATION

nouveauxprécurseurs

CUISSONréaction de Maillard +oxydation des lipides

composésvolatils

composés non volatilsou

composés volatils piégéspar la graisse

odeur

+saveur

3.1. LES BASESSTRUCTURALES DE LA JUTOSITÉ

On distingue la jutosité initiale oupremière jutosité, quantité de sucmusculaire qui s’écoule dans la bou-che aux premières mastications, et lajutosité finale ou seconde jutosité,engendrée par la salivation. La premièrejutosité dépend de la teneur en eaude la viande et plus particulièrementde l’eau dite “liée” aux protéinesmusculaires qui demeure dans leproduit aussi bien après hachagequ’après cuisson. C’est le gras intra-musculaire qui est essentiellementimpliqué dans la seconde jutosité, parson action stimulante de la sécrétionsalivaire.

3.2. LES FACTEURS DE VARIATION LIÉS ÀL’ANIMAL ET LE RÔLEDE L’ÉLEVEUR

• L’état d’engraissementLa seconde jutosité de la viande estliée à son persillé, qui varie avec la

nature du muscle et la catégorie debovin. L’état d’engraissement dépend,entre autres, du degré de maturité del’animal. C’est pour cela que la viandede veau peut quelquefois paraître unpeu sèche en bouche car elle provientd’animaux jeunes.

• L’alimentation et la finition desanimaux

Un état d’engraissement suffisantdoit être recherché pour diminuer lerisque de produire des viandes sèches.

3.3. LES TECHNIQUESMISES EN ŒUVRE PARLES PROFESSIONNELS

Le boucher effectue un parage limitédes viandes provenant des bovins lesplus maigres afin de préserver unpeu de graisse intermusculaire,bénéfique pour la jutosité.

3.4. LA CUISSON : ÉVITER L’ASSÈCHEMENTDE LA VIANDE

La cuisson doit faire l’objet de toutesles attentions, notamment lorsqu’elle

est réalisée en milieu sec pour lesmorceaux à cuisson rapide : un allon-gement de la durée et/ou une augmen-tation de la température de cuissonconduisent non seulement à un durcissement mais aussi à un assè-chement du morceau par accentuationdu phénomène d’exsudation de laviande. En pratique, on constate queles pertes de jus sont faibles lorsquela température de la viande à cœurest comprise entre 40°C et 50°C,alors qu’elles sont nettement plusmarquées au-delà de 60°C. Afin de préserver la jutosité d’uneviande, sa cuisson en milieu sec doitdonc être modérée et rapide. On peutcependant conseiller d’appliquer uneforte chaleur en tout début de cuisson,pour favoriser la formation d’unecroûte à la surface de la viande parcoagulation des protéines superfi-cielles. Cette “croûte” permet ensuitede limiter l’exsudation pendant unecuisson plus longue à températuremodérée.

LE COLLAGÈNE, RESPONSABLE DE LA DURETÉ DU MUSCLE

Le collagène est une protéine de structure fibreuse, qui possèdeplusieurs niveaux d’organisation : une fibre de collagène est unfaisceau de fibrilles, chacune de ces fibrilles étant elle-mêmeun faisceau de microfibrilles constituées d’un grand nombred’unités de tropocollagène. Chaque unité de tropocollagène estelle-même composée de trois chaînes polypeptidiques torsadées. On peut comparer ces enroulements successifs d’hélices auxficelles d’un cordage, et cette structure explique que les fibresde collagène présentent une grande résistance à la tension.

La structure fibreuse, mais aussi la triple localisation du collagène(il entoure chaque fibre musculaire, chaque faisceau de fibreset le muscle tout entier), confèrent au muscle sa résistance etsa dureté. Plus le muscle est riche en collagène, plus il est dur. La dureté du muscle dépend également de la solubilité du collagène. Cette solubilité est déterminée par le degré de réticulation du collagène et du nombre et de la nature des liaisonsintra et intermoléculaires qui se créent. Plus la cohésion estforte entre les fibrilles et entre les fibres, c’est-à-dire plus ledegré de réticulation est important, moins le collagène est solubleet moins la viande sera tendre.

4

Illustration 6

rôle dans le développement de la flaveur : d’une part, elle “fournit” desacides gras précurseurs qui, en s’oxy-dant au cours de la cuisson, seront àl’origine de molécules aromatiques etsapides, d’autre part, elle accentuela flaveur de la viande en piégeantcertains composés volatils libérés àla cuisson, jouant ainsi le rôle de solvant.

fibrille

fibre de collagène

microfibrille

hélice de tropocollagène

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La solubilité du collagène diminue avecl’âge car, lorsque le bovin vieillit, ledegré de réticulation de son collagèneaugmente (voir encadré 4), et lesmuscles, surtout ceux riches en collagène, deviennent plus durs.D’autre part, les femelles fournissenten moyenne une viande plus tendreque les mâles, les bœufs occupantlogiquement une position intermédiaire.

4.3. LES TECHNIQUESMISES EN ŒUVRE PARLES PROFESSIONNELS

La teneur en collagène du musclecaractérise le potentiel de tendretéde la viande. Les transformationstechnologiques mises en œuvre parles professionnels visent donc à :

- préserver la tendreté des musclespauvres en collagène, en veillant aubon déroulement de la maturation,

- améliorer la tendreté des musclesriches en collagène.

• La conduite du ressuageCertes, à l’abattoir lors du ressuage,le refroidissement des carcasses doitêtre suffisamment rapide pour desraisons sanitaires. Cependant uneréfrigération trop brutale est tout aussipréjudiciable et les professionnelsveillent à ne pas abaisser la tempé-rature de la carcasse en dessous de10°C pendant les 10 premières heuresqui suivent l’abattage. En effet, unrefroidissement trop rapide pourraitentraîner un durcissement des musclesappelé une “contracture au froid”,“cryochoc” ou encore “cold shortening”.Ce phénomène se produit lorsque latempérature du muscle descend endessous de 10°C alors que le pH estencore supérieur à 6. Cela conduit àune entrée en rigidité cadavériquedes muscles à l’état hyper-contracté.Par la suite, la maturation ne permetpas d’obtenir un attendrissementsatisfaisant de ces viandes. Leurpotentiel de tendreté est altéré demanière irréversible.Lorsque les opérateurs souhaitenteffectuer une réfrigération rapide de

la carcasse sans altérer la tendreté dela viande, ils appliquent au préalableune stimulation électrique à la carcasse.Cette stimulation accélère l’épuisementdes réserves glucidiques du muscleet par conséquent la chute du pH.

• Une conservation qui favorise lamaturation

La norme NF V 46-001 définit desdurées minimales de maturation àrespecter afin de valoriser la tendretédes viandes bovines :

- Si la maturation s’effectue “sur os”,c’est-à-dire sous forme de carcassesou demi-carcasses conservées dansdes chambres froides de l’abattoir,elle dure au minimum une semaine(mais n’excède pas 3 semaines engénéral).

- Si la carcasse est découpée rapi-dement après l’abattage (2 ou 3jours après), la viande est immé-diatement conditionnée sous vide,puis conservée au froid, pour unematuration minimum de 10 jours.

Le conditionnement sous-vide estparticulièrement intéressant pourl’expression de la tendreté : en augmentant considérablement ladurée de bonne conservation de laviande, il permet de prolonger lamaturation.

• Le travail des viandes Le travail des viandes au cours dudésossage et de la découpe permetde séparer les muscles ou groupesde muscles en plusieurs catégories,en fonction de leur teneur en tissuconjonctif et en collagène et donc enfonction de leur destination culinaire :

- Les muscles peu riches en collagènepeuvent être soumis à une cuissonrapide, soit une grillade, soit unrôtissage.

- Les muscles plus riches en collagènesont, soit destinés à une cuissonplus lente en atmosphère humidecomme le braisage qui permet lasolubilisation du collagène, soit uti-lisés après un attendrissage méca-nique comme le hachage ou lebroyage.

- Les muscles particulièrement richesen collagène sont quant à eux destinés à une cuisson lente enmilieu liquide, comme par exemplele pot-au-feu.

De plus, le savoir-faire du boucherest primordial pour augmenter latendreté d’une viande :

- Quelle que soit la nature du muscle,le boucher pare le morceau : pourcela il retire le collagène qui lerecouvre sous forme d’aponévrosesde couleur blanc nacré.

- Par la technique dite de “l’affranchi”,le boucher isole la partie centraledu muscle, moins riche en collagèneque le reste du muscle, pour mieuxla valoriser. Il différencie les “zones”tendres du muscle des “zones”plus dures par simple pression dupouce.

4.4. LA CUISSON : DEUXFAÇONS DE RÉVÉLERLA TENDRETÉ

• Pour les muscles pauvres en collagène : une cuisson rapide etmodérée

Pour préserver la tendreté des morceaux pauvres en collagène, leurcuisson doit être rapide et la tempé-rature de la viande ne doit pasdépasser 60°C à cœur. Ceci trouve sa justification dans lefait qu’au cours de la cuisson, ladureté de la viande augmente légère-ment à partir de 40°C et de façonsignificative au-delà de 60°C. Ce durcissement s’explique par deuxphénomènes :

- La résistance des myofibrilles, quiest très faible dans la viande crue,augmente au cours de la cuisson.Les fibres diminuent de diamètreet se raccourcissent lorsque latempérature augmente : la viandedurcit. Ce phénomène est cependantmoins marqué lorsque la viandeest bien maturée.

- Une rétraction du collagène se pro-duit entre 55°C et 70°C.

• Pour les muscles riches en colla-gène : une cuisson prolongée

Pour attendrir les morceaux riches encollagène, leur cuisson doit être longue,à l’eau ou à la vapeur. La température

de la viande doit dépasser 80°C àcœur. Ceci trouve sa justification dans le faitqu’à partir de 80/90°C, le collagèneest dénaturé, se solubilise et se

“gélatinise”. La présence d’eau estindispensable à la gélatinisation ducollagène et l’attendrissement de laviande est d’autant plus importantque la cuisson est longue.

Figure 5 : Maîtrise de la tendreté : les principaux facteurs déterminants

maturation

Muscle pauvreen collagène

TENDRETÉ

cuisson rapideet modérée(T°C < 60°C)

améliore préserve

préparationde la viande

Muscle richeen collagène

TENDRETÉ

cuisson longueen milieu humide

(T°C > 80°C)

améliore améliore

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Quelques conseils pour appréci er les qualités gustatives de la viande bovine1. Bien choisir son morceau et son mode

de cuisson

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La grande diversité des morceaux de viande bovine permet de varier les plaisirs. Comme nous l’avons expliqué ci-dessus, pour bien savourer un morceau, il convient dechoisir le mode de cuisson qui lui est le plus adapté en fonction de sa richesse encollagène.

• Les morceaux peu riches en collagène (morceaux essentiellement situés sur les partiesarrières de la carcasse) exigent une cuisson rapide afin de préserver leur tendreté : cesont des morceaux “à griller”, “à poêler” ou “à rôtir”.

• Les morceaux riches en collagène (plutôt situés sur les parties avant de la carcasse)requièrent en revanche une cuisson prolongée pour exprimer leur tendreté parsolubilisation et transformation en gélatine du collagène : ce sont des morceaux “à braiser” ou “à bouillir”.

Illustration 7

Morceaux repérables sur la silhouette d’un bovin(faces externes de la carcasse)

2.1. LES CUISSONSRAPIDES

Ce mode de cuisson convient auxmorceaux potentiellement tendres.Les cuissons rapides s’effectuent enchaleur sèche, sans ajout d’eau, eton distingue : • Le grillageIl soumet la viande à des chaleursvives sans utilisation de matièresgrasses et provoque une coagulationrapide et une coloration des protéinesde surface, puis une coagulation àcœur en fonction des temps d’exposi-tion à la chaleur.• Le poêlageIl consiste à cuire la viande dans unepoêle ou sur une plaque chauffante(entre 100°C et 150°C), par contactavec un corps gras, la plaque ou lapoêle étant huilée. Ce mode de cuissonest particulièrement bien adapté auxsteaks.

Avec le gril ou la poêle, la températureobtenue à cœur du morceau à l’issuede la cuisson en définit le degré decuisson : 45°C (bleu), entre 50°C et54°C (saignant), entre 55°C et 60°C(à point), au-delà de 62°C (bien cuit).

• Le rôtissageRôtir la viande consiste à la cuiredans un four par contact avec l’air àdes températures comprises entre220°C et 250°C. La montée de la

température est ici plus progressiveà cœur, ce mode de cuisson estadapté aux morceaux de viandesplus épais.

Qu’il s’agisse d’une grillade ou d’unrôti, on commence toujours par “saisir”le morceau, la poêle étant préchaufféeà feu vif, ou le four préchauffé à 250-300°C. Cette étape est très importantecar lorsqu’on saisit le morceau, il bruniten surface ce qui permet le dévelop-pement de la flaveur. En effet, unetempérature élevée à la surface de laviande déclenche les réactions deMaillard, à l’origine du changementde couleur et de la formation desmolécules aromatiques et sapidesde la viande. De plus, la croûte qui se forme

rapidement par coagulation des protéines superficielles lorsque l’onsaisit la viande, réduit les pertesd’eau au cours de la cuisson, ce quipréserve la jutosité de la viande. Il convient ensuite de préserver latendreté et la jutosité de la viande enbaissant le feu et en poursuivant parune cuisson modérée et rapide quipermet de maintenir une températureinférieure à 60°C au cœur du morceau.En effet, au-delà d’une températurede 60°C, la viande durcit en raisond’une rétraction du collagène et d’unraccourcissement des fibres muscu-laires. C’est également au-delà decette température que les pertes dejus de la viande sont les plus impor-tantes, ce que l’on constate pour lesviandes “bien cuites”.

2. Les différents types de cuissons : principes et conseils

Tous ces conseils culinaires pratiques reposent sur des bases scientifiques rigoureuses etsur une connaissance précise des facteurs qui influencent la tendreté de la viande, saflaveur et sa jutosité lors de sa cuisson.

QUELQUES CONSEILS POURLES CUISSONS RAPIDES

• Toujours bien préchauffer le gril, la poêle ou le four.• Ne pas piquer la viande pendant qu’elle cuit pour éviter une

perte de jus.• Arroser fréquemment un rôti avec son jus pendant la cuisson,

toutes les 5 minutes environ (ne pas ajouter d’eau).• Ne saler qu’à partir de la mi-cuisson pour préserver une bonne

jutosité de la viande.• Laisser reposer la viande après cuisson (quelques minutes

pour un steak, 15 minutes au moins pour un rôti) pour permettre à la viande de se décontracter, les fibres musculairess’étant contractées au cours de la cuisson, et d’améliorer ainsisa tendreté.

5

1. collier ● ■2. basses côtes ▼ ●3. côte ▼4. entrecôte ▼5. faux-filet ▼ ◆6. filet ▼ ◆7. rumsteck ▼ ◆8. queue ● ■9. rond de gîte ◆ ●10. tende de tranche ◆11. poire ▼12. merlan ▼13. gîte à la noix ◆ ●14. araignée ▼15. plat de tranche ▼ ◆16. rond de tranche ▼ ◆

17. mouvant ▼18. jarret (gîte de

derrière ● ■19. aiguillette

baronne ▼ ◆20. onglet ▼21. hampe ▼22. bavette d'aloyau ▼23. bavette

de flanchet ▼24. flanchet ■25. plat-de-côtes ■26. tendron ■27. milieu de poitrine ■28. gros bout

de poitrine ■

29. macreuse à bifteck ▼ ◆ ●30. paleron ● ■31. jumeau à bifteck ▼32. macreuse à pot-au-feu ● ■33. jumeau à pot-au-feu ■34. jarret (gîte de devant) ● ■

aloyau

cuisse

avant

▼ à griller ou poêler◆ à rôtir● à braiser■ à bouillir

morceauxindiqués sur lasilhouette

morceaux de la face interne de la cuisse

morceaux de l’intérieur de la carcasse

Morceaux repérables sur la face interne d’une demi-carcasse, après la fente de la carcasse

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2.2. LES CUISSONS LENTESTraditionnellement, les morceauxriches en collagène font l’objet d’unecuisson lente et plus longue. Qu’il s’agisse d’une blanquette, d’un bœufbourguignon ou d’un pot-au-feu, leprincipe de la cuisson est le même :on laisse mijoter longtemps à feumoyen le morceau de viande en présence d’une quantité plus oumoins importante de liquide pour lerendre moelleux. Ces cuissons prolongées attendrissentles morceaux de viande car, dans lavapeur d’eau ou dans l’eau en ébulli-tion, le collagène résistant se solubiliseprogressivement et est réorganisé enun réseau de courts peptides : lagélatine. Cette conversion se fait parhydrolyse de certaines liaisons covalentes du collagène. La cuissonprolongée entraîne une températurede la viande à cœur supérieure à 80/90°C nécessaire à la gélatinisationdu collagène.La viande, ainsi attendrie, conservetoutefois sa texture fibreuse car lesprotéines des fibres musculaires,contrairement au collagène, coagulentet sont insolubles.

• Le bouilliCe mode de cuisson par pochageconsiste à faire mijoter la viande àfeu moyen dans un grand volumed’eau à ébullition à peine perceptible,généralement en présence de légumeset d’aromates, comme par exemplepour le pot-au-feu. La viande cuite dans un bouillon estattendrie, mais elle perd de sa saveur.Cela s’explique tout simplement parle principe physique suivant : dansun milieu donné, les molécules onttendance à migrer, des zones où leurconcentration est élevée vers leszones où leur concentration est plusfaible, jusqu’à ce qu’il y ait équilibredes concentrations entre les différents“compartiments”. Le bouillon étant peuconcentré, les molécules aromatiqueset sapides de la viande qui se sontformées au cours de la cuisson vontdiffuser dans le bouillon.

On conseille souvent de placer lemorceau de viande dans l’eau seulement quand elle est bouillante,plutôt que de l’immerger dès ledépart dans l’eau froide. Cette pratique permet en effet aux protéinessuperficielles de la viande de coagulerplus rapidement, ce qui limite la diffusion de ses molécules aromatiquesdans le bouillon. En revanche, si l’objectif est d’obtenir un bouillon richeet savoureux, il est alors recommandéde plonger la viande dans l’eau froidepour favoriser la diffusion.

Il existe également des cuissons traditionnelles plus élaborées, quipermettent à la viande de s’attendrirtout en conservant sa saveur :

• La cuisson à l’étouffée Elle consiste à cuire la viande dansune atmosphère saturée en vapeurd’eau. On commence par faire revenir laviande à feu vif afin que les réactionsde brunissement (réactions de Maillard)engendrent la formation des arômescaractéristiques de viande grillée.La viande est ensuite placée en hauteurdans le panier d’une cocotte au fondde laquelle on met de l’eau et unbouquet garni. La cuisson se faisantà la vapeur, on évite la perte desaveur par diffusion des composésaromatiques et sapides de la viande.Au contraire, la saveur de la viandes’enrichit car la vapeur d’eau extraitles composés aromatiques du bouquetgarni et ces composés imprègnentprogressivement le morceau.

• Le braisageContrairement à la viande bouillie quicuit dans un grand volume de liquide,le braisage consiste à faire mijoter laviande dans une faible quantité deliquide, dans un récipient clos, à destempératures de 90°C et au-dessus,jusqu’à 220°C par exemple en cocotte-minute. Toute sa réussite repose surla réalisation d’un jus de cuissonriche et corsé qui “nourrit” la viandetout au long de la cuisson. On parleaussi d’une cuisson en ragoût, commepar exemple pour un bourguignon.

En pratique, on commence par fairerevenir la viande à feu vif afin que s’opère le brunissement de surfacepermettant la formation des arômespar réactions de Maillard.Puis, on associe divers ingrédientsdans la braisière, en y ajoutant parexemple des épices et des aromates,des légumes et une faible quantitéde liquide (jus de viande, vin blanc…).La cuisson très lente s’effectue alorsà feu doux. Notons que l’acidificationque permet l’ajout de vin ou de certainslégumes comme des tomates favorisela solubilisation du collagène et satransformation en gélatine.Le braisage préserve et enrichit lasaveur de la viande pour plusieursraisons : comme le jus dans lequelbaigne la viande est concentré, lesmolécules aromatiques des légumeset des herbes diffusent dans la viande.

Quel que soit le mode de cuisson, le plaisir du consommateur est entier,grâce à l'expertise des opérateurs,qui permet de préserver et mettre envaleur les qualités organoleptiquesde la viande bovine.

Sites Web utilesAssociation nationale interprofessionnelle du bétail et des viandes (Interbev)www.interbev.asso.fr

Centre d’Information des Viandes (CIV)www.civ-viande.org

Institut national de la recherche agronomique (INRA)www.inra.fr

Office national interprofessionnel des viandes, de l’élevage et de l’aviculture (Ofival)www.ofival.fr

GlossaireAffranchi : travail consistant à éliminer les parties les plus dures d’un morceau de viande (souvent distales).Carcasse : corps entier d’un animal de boucherie après saignée, éviscération, ablation des extrémités desmembres au niveau du carpe et du tarse, de la tête, de la queue et de la mamelle, et en outre, pour lesbovins, les ovins, les caprins et les solipèdes, après dépouillement.Collagène : protéine constituant l’élément principal du tissu conjonctif qui forme l’armature externe et internedes muscles. Il offre une grande résistance et confère à la viande sa dureté de base, donc sa destination culinaire.Conformation : caractérisation des profils (de très convexes à très concaves) d’un animal vif ou d’une carcasse.Contracture au froid : réaction des muscles après abattage sous l’action du froid, pouvant entraîner undurcissement irréversible de la viande.Cryochoc : voir contracture au froid.Emoussage : pratique consistant à éliminer une partie des gras de couverture des carcasses sur la ligne d’abattage.Etat d’engraissement : quantité de gras externe, interne, intermusculaire et intramusculaire. Sur la carcasse, elle est appréciée selon une grille standardisée (classement EUROP) comprenant 5 classes,allant de 1 (très faible) à 5 (très fort).Fibre musculaire : unité de base constituant le muscle ; c’est une cellule contenant un dispositif capable dese contracter et de se relâcher (myofibrilles). De l’évolution des fibres après la mort dépend une partie de latendreté de la viande (maturation).Flaveur : ensemble complexe de sensations olfactives et gustatives perçues au cours de la dégustation. Elle est couramment assimilée au goût.Gras (= graisse) : tissu de l’organisme spécialisé dans le stockage de l’énergie. On distingue plusieurs typesde gras selon leur localisation anatomique.Gras de couverture : gras sous-cutané.Lipides : composés insolubles dans l’eau ; ce sont les constituants essentiels des gras.Maturation : ensemble de phénomènes qui, postérieurement à l’établissement de la rigidité cadavérique,conduisent à un attendrissement progressif de la viande.Parage : travail sur un morceau de viande, consistant à éliminer les aponévroses et du gras en vue de lavente au consommateur.Persillé : partie visible des gras intramusculaires dans la viande.pH : état d’acidité d’un produit aqueux ou semi-aqueux, se mesurant sur une échelle de 1 (très acide) à 14(très basique). Le pH de la viande décroît de 7 à environ 5,5 au cours des 48 premières heures suivant l’abattage.Pouvoir de rétention d’eau : aptitude de la viande à retenir son eau de constitution.Qualités organoleptiques : ensemble des caractéristiques perçues par les sens. Elles comprennentnotamment les qualités perçues en bouche.Ressuage : première phase de la réfrigération, qui a pour but de ramener la température des carcasses etabats de 35-38°C (température en fin de ligne d’abattage) à une température inférieure ou égale à 7°C àcœur pour les carcasses et 3°C pour les abats, pour limiter la prolifération bactérienne.Rigidité cadavérique (= rigor mortis) : ensemble de phénomènes qui, au cours des 24 premières heuresaprès l’abattage de l’animal, conduisent à une perte définitive de l’élasticité du muscle et à sa rigidification.Tendreté : aptitude de la viande à se laisser découper et mastiquer.Tissu conjonctif : enveloppes externe entourant le muscle (aponévroses) et interne délimitant des groupesde fibres (faisceaux musculaires).Viande à coupe sombre : viande caractérisée par un pH élevé (supérieur à 6,0), une couleur rouge sombreet un pouvoir de rétention d’eau important.

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Le Centred'Information des Viandes

L e Centre d’Information des Viandes (CIV) est une association de loi 1901. Plate-forme d'échanges et d’information, il se situe au carrefour desprofessionnels, des pouvoirs publics et des consommateurs. Il doit sa création, en

1987, à l’Association nationale interprofessionnelle du bétail et des viandes (INTERBEV)ainsi qu’à l’Office national interprofessionnel des viandes, de l’élevage et de l’aviculture(OFIVAL). Il a pour mission principale de contribuer à ce que tous les publics aient unemeilleure connaissance des viandes bovine, ovine, porcine et chevaline, de leursproduits tripiers et des métiers qui s’y rattachent.

Une meilleure information sur la viande est en effet indispensable. Afin de définir lanature de cette information, le CIV s’est doté d’un Conseil Scientifique, d’un ConseilConsommateurs et d’un Comité Ethique, constitués de personnes indépendantes de lafilière viande et dont la consultation régulière permet d’appliquer une procédurerigoureuse de validation des informations diffusées.

Consommateurs, mais aussi médecins, enseignants, restaurateurs, journalistes sontles interlocuteurs du CIV et destinataires, à ce titre, de ses nombreuses actions :l’édition de documents scientifiques et grand public sur la viande et ses qualitésnutritionnelles, sanitaires et gastronomiques, ainsi que sur la réglementation quil’entoure ; la réalisation de campagnes de presse d’information ; la mise en placed’animations pédagogiques et d’actions de proximité pour aller à la rencontre desconsommateurs ; la diffusion d’informations lors de conférences, congrès, salons ou demanifestations grand public …

Pour en savoir plus et pour découvrir les nombreux documents d’information du CIV,rendez-vous sur le site Internet : www.civ-viande.org.

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