Les_Fondations_du_Bouddhisme

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    LES FONDATIONS DU BOUDDHISME

    Elna ROERICH

    Traduit par

    Rosalie CASELA et Yves CHAUMETTE

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    ELENA ROERICH

    lna Roerich (lna Ivanovna Chapochnikova) est ne le 12 fvrier 1879 en terre de Russie. Le 28 octobre 1901 elle pousait Nicolas Roerich.Elle mourut Kalimpong, prs de Calcutta, en 1955. Ses cendres furentinhumes sur les flancs d'une montagne et un stpa fut rig sur cetemplacement.

    Quoiqu'elle ait choisi de rester dans l'ombre, elle avait collabortroitement toutes les entreprises de son mari et avait elle-mme publiquelques livres, habituellement parus sous des pseudonymes. Elle traduisit

    en russe laDoctrine Secrte , ouvrage monumental rdig par madameBlavatsky et inspir par un groupe de sages anciens et mystrieux - lesMatres ou Mahatmas - en qui rsidait la sagesse divine. De plus, elle aentretenu une volumineuse correspondance avec ses tudiants et amis travers le monde. Elle a crit sur des sujets thiques et philosophiques, eten particulier sur l'importance du rle de la femme dans la nouvelle re.Pour plusieurs, elle fut un authentique instructeur spirituel.

    En 1941, l'occasion de leur quarantime anniversaire de mariage,Nicolas Roerich crivait au sujet de son pouse lna

    "Quarante annes, c'est bien long. Durant un si long voyage,rencontrant bien des temptes et des dangers extrieurs, ensemble nousavons vaincu tous les obstacles. Et les obstacles sont devenus despossibilits. Mes livres portent la ddicace suivante : " lna, monpouse, mon amie, ma compagne de voyage, mon inspiratrice !"

    Chacun de ces rles a t prouv dans le feu de la vie. Et Petersbourg, en Scandinavie, en Angleterre, en Amrique et dans toutel'Asie nous avons travaill, tudi, largi nos consciences. Ensemble nousavons cr, et ce n'est pas sans raison que l'on dit que cette oeuvre devraittre attribue deux auteurs : un auteur masculin et un auteur fminin."

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    LIVRE

    "L'volution de l're nouvellerepose sur la pierre angulaire de

    la Connaissance et de la Beaut."

    Nicolas ROERICH

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    PREFACE

    La premire dition des Fondations du Bouddhisme a t publie sousle nom de Natalie Rokotoff, un pseudonyme parfois utilis par MadameElena Roerich.

    Depuis sa disparition en 1955, les diteurs, aprs avoir consult sonfils, Svtoslav Rorich, ont dcid d'utiliser le propre nom de MadameRoerich.

    L'ouvrage que voici contient plusieurs ajouts qu'elle souhaitait incluredans la deuxime dition.

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    AVANT - PROPOS

    Le grand Gautama a donn au monde un enseignement complet pour la parfaite construction de la vie. Toute tentative pour difier ce grandrvolutionnaire conduit l'absurdit.

    Bien sr, d'autres tres se sont succds avant lui et ont uvr pour leBien Commun, mais leurs enseignements sont tombs dans l'oubli au coursdes millnaires. On peut donc considrer que Gautama fut le premier enseigner les lois de la matire et de l'volution du monde.

    La pense collective contemporaine permet dsormais d'tablir unpont prodigieux qui relie Gautama, l'Illumin, au temps prsent. Nous neformulons ceci ni pour le glorifier ni pour le diminuer, mais comme un faitvident et inaltrable.

    La loi de l'intrpidit, la loi du renoncement la proprit, la loi de lavaleur du travail, la loi de la dignit de la personne humaine au-del descastes et des distinctions extrieures, la loi de la vraie connaissance, la loide l'amour fond sur la connaissance de soi, font des rvlations desinstructeurs un continuel arc-en-ciel de joie pour l'humanit.

    Etablissons les fondations du bouddhisme selon ses principesmanifestes. Le simple Enseignement, dont la beaut gale celle du cosmos,dispersera toute ide d'idoltrie, indigne du grand Instructeur des hommes.

    La connaissance est le fil conducteur de tous les grands instructeurs.La connaissance permettra une libre et vitale approche du grand

    Enseignement, aussi vitalement rel que la grande Matire elle-mme.Laissant de ct les complexits ultrieures, nous nous concentrerons

    sur ces fondements indniables.

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    Joie tous les peuples !

    Joie tous ceux qui uvrent !

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    PREAMBULE

    Il est inutile, dans l'tude des fondations du bouddhisme, de s'arrter sur les complications et ramifications ultrieures. Il est important de savoir que l'ide de purifier l'Enseignement est toujours vivante dans laconscience bouddhiste. Peu aprs la mort de l'Instructeur, des concilesclbres eurent lieu R jagriha et, plus tard, Vail et Patna, quirestiturent l'Enseignement son originale simplicit.

    Les principales coles du bouddhisme existantes sont le Mahyna(Tibet, Mongolie, les Kalmoucks, les Bouriates, Chine, Japon, Inde du

    Nord) et le H nayna (Indochine, Birmanie, Siam, Ceylan et Inde). Cescoles voquent toutes deux les qualits de l'Instructeur lui-mme.

    Les qualits de l'Eveill sont : Muni le Sage, du clan deskya ;kya Simha kya le Lion ; Bhagavat le Bni ; Sdhu l'Instructeur ;Jina le Conqurant ; le Souverain de la Loi Bienveillante.

    La venue du Roi sous l'image d'un puissant mendiant est d'uneexceptionnelle beaut. "Allez, vous les mendiants, apportez le salut et labienveillance aux peuples", dans ce commandement de l'Illumin, tout estcontenu dans le terme "mendiants."

    En comprenant l'enseignement du Bouddha, vous ralisez d'oprovient le sens de l'affirmation des bouddhistes "Le Bouddha est unhomme." Son enseignement de Vie est au-dessus de tout prjug. Letemple n'existe pas pour lui ; mais il existe effectivement un lieud'assemble et un foyer de connaissance (en tibtain : du-khang et tsug-

    lag-khang).L'Eveill a contest la conception conventionnelle de Dieu. L'Eveill a

    ni l'existence d'une me ternelle et immuable. L'Eveill a donn unenseignement pour tous les jours. L'Eveill s'est battu de toutes ses forcescontre les possessions. L'Eveill a combattu personnellement le fanatismedes castes et les privilges de classe. L'Eveill a affirm la valeur de laconnaissance fiable car acquise par l'exprience et la valeur du travail.

    L'Eveill a recommand d'tudier la vie de l'univers dans toute sa ralit.L'Eveill a pos les fondations de la communaut, prvoyant la victoire dela Communaut Mondiale.

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    Des centaines de millions d'adeptes du Bouddha sont dissmins dansle monde entier, et chacun d'eux affirme : "Je prends refuge dans leBouddha1, je prends refuge dans l'Enseignement, je prends refuge dans leSangha.2"

    Les crits traditionnels bouddhistes et les recherches contemporainesfournissent d'amples dtails sur la vie du Bouddha Gautama. Certainschercheurs fixent la date de sa mort l'anne 483 avant Jsus-Christ.D'aprs les chroniques cingalaises, le Bouddha a vcu de l'an 621 l'an543 av. J.-C. Mais les chroniques chinoises ont fix la naissance duBouddha en 1024 av. J.-C. On estime que l'Instructeur est mort l'ge dequatre-vingts ans environ. On connat son lieu de naissance, Kapilavastuau Npal, ainsi que la ligne royale deskya laquelle Gautamaappartenait.

    Les biographies du grand Instructeur ont certainement t enjolivespar ses contemporains et disciples (spcialement dans les crits les plustardifs) mais, afin de prserver la couleur et le caractre de l'poque, nousdevons, dans une certaine mesure, nous rfrer aux crits traditionnels.

    D'aprs les traditions du sixime sicle av. J.-C., le royaume de

    Kapilavastu se situait au nord de l'Inde au pied de l'Himalaya, ces terrestaient peuples de nombreuses tribuskyas, descendants de Ikshvku dela race solaire des Kshatriya. Les habitants taient gouverns par l'anciendu clan qui rsidait dans la cit de Kapilavastu, dont il ne reste prsentaucune trace ; elle fut dtruite par un roi voisin ennemi dj du temps duBouddha. A cette poque,uddhodana, le dernier descendant directd'Ikshvku, rgnait Kapilavastu. Ce roi et la reine My donnrentnaissance au futur grand Instructeur qui reut le nom de Siddhrta, qui

    signifie "celui qui atteint son but."Des visions et des prophties prcdrent sa naissance, et l'vnement

    lui-mme, le jour de la pleine lune de Mai, fut accompagn de tous lessignes propices dans le ciel et sur la terre. Ainsi le grand rishi Asita, quidemeurait dans l'Himalaya, et qui avait appris par les dvas qu'unbodhisattva, le futur Bouddha, tait n dans le monde des hommes au parcLumbin et qu'il ferait tourner la Roue de la Doctrine, se mit

    1 Illumin, Eveill2 communaut

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    immdiatement en route pour rendre hommage au futur Instructeur deshommes.

    Lorsqu'il parvint au palais du roiuddhodana, il exprima le dsir devoir le bodhisattva nouveau-n. Le roi ordonna d'apporter l'enfant au rishi,en s'attendant sa bndiction. Mais en voyant l'enfant, le rishi sourit puisse mit pleurer. Le roi demanda avec anxit la raison de ce chagrin et s'ilvoyait un triste prsage pour son fils. A ceci, le rishi rpondit qu'il nevoyait rien de nfaste pour l'enfant. Il se rjouissait car le bodhisattvaparviendrait l'illumination complte et deviendrait un grand bouddha ;mais il s'attristait parce que sa propre vie serait trop courte et qu'il nevivrait pas assez pour entendre prcher la grande doctrine.

    La reine My quitta cette vie aprs avoir donn le jour au grandbodhisattva et ce fut sa sur Prajpat qui en prit soin et l'leva. Prajpat est connue, dans l'histoire bouddhiste, comme la premire femme discipledu Bouddha et la fondatrice et dirigeante d'une communaut fminine.

    Le cinquime jour, cent huit brahmanes, ayant une profondeconnaissance des Vdas, furent invits par le roiuddhodana son palais.Ils devaient donner un nom au prince nouveau-n et lire sa destine grce

    la position des astres. Huit des plus savants dirent : "Celui qui a de telssignes deviendra soit un monarque universel, Tchakravartin, soit, s'il seretire du monde, un bouddha, et il cartera de la vision du monde le voilede l'ignorance.

    Le huitime, le plus jeune, ajouta : "Le prince quittera le monde aprsavoir vu quatre signes : un vieillard, un malade, un cadavre et unanachorte."

    Le roi, dsirant garder son fils et hritier, prit toutes les prcautionspour le retenir prs de lui. Il entoura le prince de tout le luxe et de tous lesplaisirs que lui permettait son pouvoir royal. Plusieurs faits nous indiquentque le prince iddhrta reut une brillante ducation, puisque laconnaissance en tant que telle tait tenue en grande estime cette poque,et, d'aprs une remarque d'Ashvaghosha dans le Bouddhacarita, la cit deKapilavastu avait reu son nom en l'honneur du grand Kapila, fondateur dela philosophie Snkhya. On peut trouver des chos de cette philosophiedans l'Enseignement du Bni.

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    Pour donner plus de conviction, le Canon attribue cette description dela vie luxueuse la cour de Suddhodana au Bouddha lui-mme.

    "On a pris soin de moi avec une suprme et infinietendresse, moines. Au palais de mon pre, on aconstruit pour moi des bassins de lotus, un bassin delotus bleus, un autre de lotus blancs, un autre encore delotus rouges qui fleurissaient en mon honneur. Et, moines, je n'utilisai que de l'huile de santal de Bnars.De Bnars provenaient les tissus de mes trois robes.Jour et nuit, un parasol blanc me protgeait de la chaleur,du froid, des poussires ou de la rose. J'habitais troispalais, moines ; un d'hiver, un autre d't et untroisime durant la saison des pluies. Lorsque j'tais dansle palais de la saison des pluies, entour de musiciens, dechanteurs et de danseuses, je n'en sortais pas pendantquatre mois. Et, moines, alors que, dans le domaine desautres seigneurs, on ne donnait aux serviteurs et auxesclaves qu'une assiette de riz rouge ou de la soupe deriz, dans la maison de mon pre, on leur servait du riz etde la viande."3

    Mais cette vie luxueuse et heureuse ne pouvait combler le grandesprit. Et dans les plus anciennes traditions, nous voyons que l'veil de laconscience aux souffrances, la dtresse et aux problmes de l'existenceeut lieu bien plus tt que ce qui est relat dans les crits ultrieurs.

    Ainsi, selon l'Anguttara-Nik ya, le bodhisattva s'exprimait en cestermes : "Entour d'une telle richesse, lev dans de telles dlicatesses, lapense me vint 'En vrit, l'tre non-clair, soumis au vieillissementsans pouvoir y chapper, se sent oppress la vue d'une personne ge ;moi aussi je vieillis et ne puis l'viter. Si moi, qui suis sujet tout cela,devait voir quelqu'un d'g, d'oppress, de tourment ou de malade, ce neserait pas bien pour moi' [La mme chose est rpte pour la maladie et lamort]. Ainsi, comme j'y rflchissais, toute exaltation sur la jeunessedisparut compltement."

    3 Anguttara-Nik ya

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    Ds sa prime enfance, le bodhisattva se montra d'une compassionexceptionnelle et d'une attention aigu l'gard de son entourage. D'aprsle Mahvastu, le bodhisattva fut amen dans le parc par le roi et sescourtisans. Selon ce texte, il tait assez grand pour se promener seul et il

    arriva un village rural o il vit un serpent et une grenouille dchiquetspar une charrue. La grenouille fut emporte pour tre mange et le serpentfut jet au loin. Ceci veilla chez le bodhisattva une grande dtresse. Il futrempli d'un profond chagrin ; il prouva une extrme compassion. Ensuite,dsirant rflchir dans une solitude complte, il alla vers un jambosier (sorte d'glantier) dans un endroit isol ; l, assis par terre, cach par lesfeuilles, il se plongea dans ses penses. En ne le voyant pas, son pres'inquita. Un des courtisans le trouva l'ombre du jambosier,profondment absorb dans ses penses.

    Une autre fois, il vit des laboureurs, les cheveux hirsutes, les pieds etmains nus, le corps sale et tremp de sueur ; il vit aussi des bufs que l'onpiquait avec des aiguillons de fer, haletants, leurs flancs et leurs croupessaignants, le cur battant sous l'effort, alourdis par leurs jougs, harcelspar les mouches et les insectes, entaills par le soc, du sang et du pusdgoulinant de leurs blessures. Son tendre cur fut touch de compassion.

    "A qui appartenez-vous ?" demanda-t-il aux laboureurs."Nous appartenons au roi" rpondirent-ils.

    "A partir d'aujourd'hui, vous n'tes plus esclaves, vous ne devrez plusservir. Allez o il vous plaira et vivez dans la joie."

    Il libra aussi les bufs et leur dit : "Allez ! A partir d'aujourd'hui,mangez l'herbe la plus tendre, buvez l'eau la plus pure et que les brises desquatre hmisphres vous rafrachissent." Puis apercevant un jambosier quilui offrait de l'ombre, il s'assit son pied et se plongea dans une profondemditation.

    Devadatta, voyant une oie qui volait au-dessus de sa tte, la tira et elletomba dans le jardin du bodhisattva, qui la prit, extirpa la flche et bandala blessure. Devadatta envoya un messager rclamer l'oiseau, mais lebodhisattva refusa de s'en dessaisir et rpondit qu'il n'appartenait pas

    celui qui avait essay de le tuer, mais celui qui l'avait sauv.

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    Le jour de son seizime anniversaire, conformment la coutume deson pays, le prince eut choisir une pouse, aprs avoir prouv savaillance en sortant victorieux de l'preuve Svayamvara. L'pouse choisiefut la princesse Yaodhar du mme clankya. Elle devint la mre de

    R hula, qui plus tard allait devenir un disciple de son pre et un arhat.

    Mais le bonheur personnel, si grand fut-il, ne pouvait satisfairel'ardente aspiration spirituelle du bodhisattva. Son cur continuait rpondre toute peine humaine, et sa pense, voyant combien tout ce quiexiste est transitoire, ne connaissait pas le repos. Il errait travers lespices de son palais comme un lion piqu par quelque dard empoisonn, etdans sa peine il gmissait : "Le monde est plein d'obscurit et d'ignorance ;personne ne sait comment soigner les maux de l'existence !"

    C'est cet tat d'esprit que font symboliquement allusion les quatrerencontres prdites, aprs lesquelles il quitta son royaume et chercha librer le monde de ses souffrances. Dans une ancienne biographie en vers,lors de la troisime rencontre, il est dit que seuls le bodhisattva et soncocher virent le cadavre que l'on transportait de l'autre ct de la route.D'aprs ce Stra, le prince achevait alors sa vingt-neuvime anne.

    Un jour le prince dit Chandaka, son cocher, qu'il dsirait faire unepromenade dans le parc. L, il vit un vieil homme et le cocher lui expliquace qu'tait la vieillesse et comment tout le monde y est assujetti.Profondment impressionn, le prince fit demi-tour et retourna au palais.

    Peu de temps aprs, au cours d'une promenade, il rencontra un maladequi respirait avec peine, le corps convuls et gmissant de douleur. Soncocher lui dit ce qu'tait la maladie et comment tout le monde y estassujetti. Et de nouveau il s'en retourna. Tous les plaisirs lui semblrentfltris et les joies de la vie curantes.

    Une autre fois, il rencontra une procession : les uns portant des torchesallumes, d'autres une litire o un drap enveloppait quelque chose. Lesfemmes qui l'accompagnaient taient cheveles et pleuraient faire piti.C'tait un cadavre et Chandaka lui dit que tout le monde devait finir ainsi.Et le prince s'exclama : "O hommes de ce monde ! Que votre illusion estfatale ! Invitablement votre corps doit tomber en poussire, et cependantsans vous en proccuper, vous continuez vivre dans l'insouciance." Le

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    cocher, voyant la profonde impression que cet vnement avait produitechez le prince, tourna ses chevaux et retourna vers la ville.

    Puis il arriva un autre incident qui sembla indiquer au prince lasolution de sa qute. Lorsqu'ils passrent prs des palais de la noblesse,une princessekya vit le prince du balcon de son palais et le salua avecune stance o le mot Nibutta (Nirvna) revenait chaque ligne.

    "Heureux le pre qui t'engendra,

    Heureuse la mre qui t'a nourri,

    Heureuse l'pouse qui appelle mari

    Ce seigneur si glorieux,Elle a dpass toute peine."

    Le prince, entendant le mot Nibutta, dtacha de son cou un prcieuxcollier de perles et l'envoya la princesse pour la remercier de l'instructionqu'elle lui avait donne. Il pensa :

    "Heureux ceux qui ont trouv la dlivrance. Aspirant la

    paix du mental, je dois chercher la batitude duNirvna."

    La mme nuit, Yaodhar rva que le prince l'abandonnait. Elle serveilla et lui raconta son rve "O, mon Seigneur, o que tu ailles, laisse-moi aussi aller avec toi."

    Et lui, pensant aller l o il n'y a pas de peine (le Nirvna), rpondit :"Qu'il en soit ainsi, partout o j'irai, puisses-tu venir aussi."

    Aprs le retour du Bouddha, Yaodhar et Prajpat , sa mre adoptive,furent les premires femmes devenir ses disciples.

    C'tait la nuit. Le prince ne pouvait trouver la paix sur sa couche. Il seleva et sortit dans le jardin. Il s'assit sous le grand jambosier et se mit rflchir sur la vie, la mort et les maux de la vieillesse. Il concentra sapense, se libra de la confusion et une tranquillit parfaite descendit sur

    lui. Dans cet tat, son il mental s'ouvrit et il contempla une formemajestueuse, calme et pleine de dignit. "D'o viens-tu et qui peux-tu bientre ?" demanda le prince. La vision rpliqua : "Je suis unramana.

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    Troubl par la pense de la vieillesse, de la maladie et de la mort, j'ai quittma maison pour chercher le chemin du salut. Toute chose se hte vers sondclin ; seule la vrit demeure jamais. Tout change et il n'y a pas depermanence; toutefois les paroles des bouddhas sont immuables."

    Siddhrta demanda : "Peut-on parvenir la paix en ce monde desouffrance ? Je n'en peux plus de la vanit du plaisir et le dsir me dgote.Tout m'opprime et l'existence mme me semble intolrable."

    Le ramana rpondit : "L o il y a chaleur, l se trouve aussi lapossibilit de froid. Les cratures sujettes la souffrance possdent aussi lafacult de plaisir. L'origine du mal indique qu'on peut dvelopper le bien.Car ces choses sont corrlatives l'une de l'autre. Ainsi, l o il y abeaucoup de souffrance, l il y aura beaucoup de flicit, si seulement tuouvres les yeux pour le voir. Comme un homme tomb dans un tas desalets devrait chercher le plus proche tang couvert de lotus, ainsi toi,cherche le grand lac d'immortalit du Nirvna pour nettoyer la souillure dupch. Ce n'est pas la faute du lac si on ne le cherche pas. Ainsi lorsqu'ilexiste une route bnie qui conduit l'homme limit par le pch au salut duNirvna, ce n'est pas la faute de la route, mais celle de l'homme, s'il nel'emprunte pas. Lorsqu'un homme accabl par la maladie ne profite pas de

    l'aide du mdecin qui peut le gurir, ce n'est pas la faute de celui-ci. Ainsilorsqu'un homme opprim par la maladie de l'ignorance ne cherche pas leguide spirituel de l'illumination, ce n'est pas la faute du guide capable dedtruire toute errance."

    Le prince couta ces paroles de sagesse et dit : "Je sais que j'atteindraimon but, mais mon pre me dit que je suis encore trop jeune et tropimptueux pour mener une vie deramana."

    Le vnrable personnage rpondit : "Tu devrais savoir que, pour chercher la vrit, aucun moment n'est inopportun."

    Le cur de Siddhrta tressaillit de joie. "Il est temps maintenant dechercher la vrit. Il est temps prsent de couper tous les lienssusceptibles de m'empcher d'atteindre l'illumination parfaite."

    Le messager cleste couta la rsolution de Siddhrta avec

    approbation : "Va de l'avant, Siddhrta, et atteins ton but. Car tu es unbodhisattva, un futur bouddha ; tu es destin illuminer le monde. Tu es leTathgata, le Parfait, car tu auras toutes les vertus et seras Dharma-R ja,

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    Roi de Vrit. Tu es Bhagavat, le Bni, car tu es appel devenir unsauveur et un rdempteur du monde.

    Parviens la perfection de la Vrit. Mme si la foudre te tombe sur latte, ne cde jamais aux attraits qui sduisent les hommes et les loignentdu chemin de la vrit. Comme le soleil poursuit son cours en toute saisonsans en chercher d'autre, de mme si tu ne t'cartes pas du droit chemin dela vertu, tu deviendras un bouddha.

    Persvre dans ta qute et tu trouveras ce que tu cherches. Poursuisinbranlablement ton but et tu vaincras. La bndiction de toutes lesdivinits, de tous ceux qui cherchent la lumire est sur toi, et la sagessecleste guide tes pas. Tu seras le Bouddha, tu illumineras le monde et tusauveras l'humanit de la perdition."

    Ayant ainsi parl, la vision disparut et l'me de Siddhrta fut remplied'extase. Il se dit :"Je me suis veill la Vrit et je suis rsolu atteindremon but. Je romprai tous les liens qui m'attachent au monde, et je partiraipour chercher la voie du salut. En vrit, je deviendrai un bouddha."

    Le prince retourna au palais contempler une dernire fois tous ceuxqu'il aimait plus que tous les trsors du monde. Il se rendit chez la mre deR hula et ouvrit la porte de la chambre de Yaodhar . Une lampe d'huileparfume brlait ; sur le lit jonch de jasmins dormait Yaodhar , la mrede R hula, dont la main reposait sur la tte de son fils. Restant sur le seuil,le bodhisattva les regarda avec un pincement de cur. La douleur de lesquitter le saisit. Mais rien ne pouvait branler sa rsolution et, d'un cur courageux, il rprima ses sentiments et se retira. Il enfourcha sa monture,Kanthaka, et, trouvant les portes du chteau grand ouvertes, il sortit dans lanuit silencieuse, accompagn seulement de Chandaka, son fidleconducteur. Ainsi Siddhrta, le prince, renona aux plaisirs du monde,dlaissa son royaume, coupa tous ses liens et partit, seul et sans abri.4,5

    4 Avaghosha, Fo-Sho-Hing-Tsan-King, A life of Buddha, version chinoise du Buddhacarita5 Buddhist Birth Stories, ou Jtaka Thales

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    CONTEXTE HISTORIQUE

    Jusqu' prsent, quatre sites en Inde ont attir les plerinages desadeptes de l'enseignement du Bouddha Bni. Son lieu de naissance,Kapilavastu, une ville situe au nord de l'Inde, au pied de l'Himalaya, lasource de la rivire Gandak ; elle fut dtruite pendant la vie mme duBouddha. Puis le lieu de son illumination, Buddhagay, o se trouvaitUruvel, l'arbre souvent mentionn, l'ombre duquel Gautama unit toutesses ralisations dans l'illumination. Le lieu de son premier sermon, Sarnath(prs de Bnars), o, d'aprs la lgende, le Bouddha mit en mouvement laRoue de la Loi ; on peut encore y voir des traces de trs anciennescommunauts. Enfin le lieu de sa mort Kusinr au Npal.

    Dans les notes du voyageur chinois Fa-Hsien (392-414 av. J.-C.), quia visit l'Inde, nous trouvons une description du domaine de Kapilavastu,ainsi que d'autres endroits vnrs.

    Malgr cela, et en dpit des antiques colonnes du roi Aka, certainsaimeraient faire croire que le Bouddha est un mythe et sparer ce nobleenseignement de la vie. L'crivain franais Snart, dans un essai, affirmeque le Bouddha est un mythe solaire. Mais ici galement, la sciencetmoigne de la personnalit humaine de l'Instructeur, le BouddhaGautama. Ainsi l'urne contenant une partie des cendres et des os duBouddha, trouve Piprawa (dans les Terai npalais), porte une date etune inscription ; l'urne historique contenant quelques reliques del'Instructeur, enterre par le roi Kanishka a t dcouverte prs dePeshawar ; ces deux urnes donnent un tmoignage prcis de la mort dupremier Instructeur de la communaut mondiale, le Bouddha Gautama.

    Il ne faudrait pas croire que la vie du Bouddha se passa dans laquitude et la reconnaissance universelle. Au contraire, certainesindications font tat de calomnies et de toutes sortes d'obstacles quel'Instructeur, en vrai guerrier, dut surmonter. Ceci ne fit que le fortifier, etaccrot encore la valeur de sa ralisation. Diffrents incidents mettent enlumire l'hostilit dont firent preuve son gard des asctes et desbrahmanes qui le hassaient. Les premiers parce qu'il rprouvait leur fanatisme, les seconds parce qu'il refusait d'admettre leurs droits desprivilges sociaux et la connaissance de la vrit par droit de naissance.

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    Aux premiers, il disait : "Si l'on pouvait parvenir la perfection et selibrer des liens qui attachent l'homme la terre en renonant simplement la nourriture et aux coutumes lies la condition humaine, un cheval ouune vache auraient atteint ce niveau depuis longtemps".

    Aux seconds, il disait : "D'aprs ses actions, un homme peut devenir un paria ou un brahmane. Le feu allum par un brahmane et le feu allumpar unhdra brlent d'une mme flamme, brillante et lumineuse. A quoivous a conduit votre isolement ? Pour vous procurer du pain, vous allez aumarch comme tout le monde et vous attachez de la valeur aux pices quisortent de la poche d'unhdra. Votre isolement n'est en fait que de l'abuset vos ustensiles sacrs, des instruments de duperie.

    Les possessions d'un riche brahmane ne sont-elles pas unedsacralisation de la loi divine ? Vous considrez le sud comme la lumireet le nord comme l'obscurit. Il arrivera un moment o je viendrai du lieude minuit et vos lumires s'teindront. Mme les oiseaux volent vers lenord pour donner naissance leurs petits. Mme l'oie grise connat lavaleur des possessions terrestres. Mais le brahmane essaie de remplir d'or sa ceinture et d'amasser ses trsors sous le seuil de sa maison. Brahmanes,vous menez une vie mprisable qui vous mne une fin pitoyable. Vous

    serez dtruits les premiers. Si je vais vers le nord, j'en reviendrai aussi."(selon les traditions orales de bouddhistes de l'Inde.)

    On connat des cas prcis o, aprs ses discours, un grand nombre deceux qui l'coutaient s'en allrent mcontents, tandis que le Bni disait :"Le grain s'est spar de la balle ; la communaut de ceux dont lesconvictions sont intactes s'tablit. C'est une bonne chose que lesprtentieux soient partis".

    Rappelons-nous d'autres pisodes : un jour, son plus proche disciple etparent, Devadatta, eut l'ide de jeter une pierre l'Instructeur qui passait etrussit mme le blesser au pied.

    Rappelons-nous aussi le cruel destin de son clan et de son pays,dtruits pour assouvir la vengeance du roi voisin. Selon la lgende, leBouddha se trouvait loin de la ville avec son disciple bien-aim Ananda aumoment de l'attaque de son pays, il prouva une forte migraine et secoucha sur le sol, se recouvrant de sa robe pour cacher au seul tmoin lechagrin qui submergeait son cur stoque.

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    Les maladies physiques ne l'pargnaient pas non plus. On mentionnequ'il souffrait de fortes douleurs dans le dos ; sa mort mme fut provoquepar de la nourriture empoisonne. Tous ces dtails rendent son imagevritablement humaine et proche de nous.

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    PAROLE DU BOUDDHA

    Le termebouddha n'est pas un nom, mais indique un tat d'esprit, unesprit parvenu au point le plus lev de son dveloppement ; traduitlittralement, il signifie "l'illumin", ou celui qui possde la connaissanceet la sagesse parfaites.

    D'aprs les Suttas Plis , le Bouddha n'a jamais revendiqul'omniscience que lui ont attribue ses disciples. "Ceux qui t'ont dit,Vaccha, que l'Instructeur Gautama connat tout, voit tout, dclare possder des capacits illimites de clairvoyance et de connaissance et proclame

    "En mouvement ou immobile, veill ou endormi, toujours et en tout lieu,l'omniscience m'habite", ces personnes ne rptent pas ce que j'ai dit etm'accusent faussement, contre toute vrit."6

    Les pouvoirs dont disposait le Bouddha ne sont pas miraculeux, car unmiracle viole les lois de la nature. Le pouvoir suprme du Bouddha est enparfait accord avec l'ordre ternel des choses. Ses pouvoirs surhumainssemblent miraculeux tout comme l'action de l'homme peut sembler miraculeuse aux tres infrieurs. Les hros qui se sacrifient, ceux qui sebattent pour la vraie connaissance, manifestent leurs ralisationsexceptionnelles aussi naturellement que l'oiseau vole ou que le poissonnage.

    D'aprs un texte, le Bouddha "n'est que l'an des hommes, n'ayant pasplus de diffrence avec les autres que le premier poussin avoir bris sacoquille n'en a avec les autres poussins de la mme couve." Laconnaissance l'leva un niveau diffrent des tres, parce que le principede diffrenciation rside dans les profondeurs de la conscience.

    Le caractre humain du Bouddha Gautama est spcialement souligndans les crits les plus anciens qui contiennent l'expression suivante"Bouddha Gautama, le plus parfait des bipdes."

    Les Suttas Plis contiennent plusieurs dfinitions trs vivantes desqualits suprieures de Gautama, l'Instructeur, qui a montr le chemin.

    Mentionnons quelques unes d'entre elles : "Il est le conducteur de la 6 Majjhima-Nik ya

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    caravane, le fondateur, l'instructeur, l'incomparable entraneur d'hommes.L'humanit roulait comme une roue de charrette sur la voie de sadestruction, perdue, sans guide ni protecteur. Il lui a montr le chemin suivre. Il est le Seigneur de la Roue de la Loi bienveillante. Il est le Lion

    de la Loi."7

    "C'est un merveilleux mdecin ; par sa compassion, il gurit les

    hommes gravement malades."8

    "Le vnrable Gautama est un laboureur. Son champ estl'immortalit."9

    "Il est la lumire du monde. C'est lui qui lve l'homme de la terre.

    C'est lui qui dvoile ce qui est cach. C'est lui qui porte la torche dansl'obscurit pour que ceux qui ont des yeux puissent voir ; ainsi Gautamaillumina son enseignement sous tous ses aspects."

    "Il est le Librateur. Il libre parce que lui-mme s'est libr." Saperfection morale et spirituelle tmoigne de la vrit de son enseignementet la puissance de l'influence qu'il exerait sur son entourage repose sur l'exemple de son travail personnel.

    Les anciens crits mettent toujours l'accent sur le fait quel'enseignement s'applique dans la vie. Gautama n'vita pas la vie, mais ilprit part la vie quotidienne des travailleurs. Il essaya de les diriger versl'enseignement, leur offrit de participer ses communauts, accepta leursinvitations et ne craignit pas de visiter les courtisans et les r jas, les deuxcentres de la vie sociale dans les cits de l'Inde. Il essaya de ne pasenfreindre inutilement les coutumes traditionnelles ; bien plus, il s'efforade donner son enseignement en s'appuyant sur une traditionparticulirement vnre, si elle n'entrait pas en conflit avec les principesde base.

    Son enseignement n'tait pas abstrait. Il n'opposa jamais l'idal d'unevie mystique et transcendantale la ralit existante. Il faisait valoir laralit de toutes choses et conditions existantes au moment prsent.

    7

    ikshsamuccaya, compilation dentideva8 ntideva, Bodhicaryvatra9 Sutta Nipta

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    De mme, disciples, les choses que j'ai perues et que je ne vous aipas communiques sont beaucoup plus nombreuses que celles que je vousai indiques. Et pourquoi, disciples, ne vous les ai-je pas rvles ? Parceque cela ne vous servirait rien, parce que cela ne contribuerait pas une

    vie plus leve, parce qu'elles ne vous conduiraient pas perdre toutapptit pour le monde, supprimer tout dsir, cesser tout attachement autransitoire ; elles ne vous guideraient pas la paix, une connaissancesuprieure, l'veil, au Nirvna. Par consquent, je ne vous les ai pascommuniques. Et que vous ai-je communiqu ? Ce qu'est la souffrance, lasource de la souffrance, la cessation de la souffrance et le chemin quiconduit la cessation de la souffrance."

    Et dans chaque cas particulier, son enseignement tait si adapt et sipratique qu'il s'tablit une tradition de trois cercles d'enseignement : pour les lus, pour les membres de la communaut et pour tous.

    En fondant ses communauts, l'Eveill s'effora de crer lesmeilleures conditions pour ceux qui taient fermement dtermins travailler l'expansion de leur conscience pour parvenir une plus hauteconnaissance. Ensuite il les envoyait dans le monde comme instructeurs dela vie, comme messagers d'une communaut mondiale.

    La discipline constante de paroles, de penses et d'actions exige deses disciples, sans laquelle on ne peut avancer dans la voie de laperfection, est presque irralisable pour ceux qui vivent dans les conditionshabituelles de la vie : des milliers de circonstances extrieures etd'obligations triviales distraient constamment celui qui s'efforce d'atteindreson but. Mais la vie au milieu d'tres unis par une mme aspiration, par despenses et des habitudes communes, tait d'un grand secours, car elle

    fournissait, sans perte d'nergie, des possibilits de se dvelopper dans ladirection dsire.

    Le Bouddha qui enseignait que, dans tout l'univers, il n'existe quedes corrlations ; qui savait que rien n'existe sans coopration ; quicomprenait que l'goste prsomptueux ne pourrait btir l'avenir car, selonla loi cosmique, il se situerait hors du courant de la vie qui entrane tout cequi existe vers la perfection planta patiemment les semences ; il fondales cellules sur une base communautaire, prvoyant dans un avenir lointainla ralisation de la grande Communaut Mondiale.

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    Il fallait observer les deux rgles suivantes pour tre admis dans lacommunaut : le renoncement complet toute possession personnelle et lapuret morale. Les autres rgles concernaient le strict contrle de soi et lesobligations envers la communaut. Chaque personne qui y entrait

    prononait la formule : "Je prends refuge dans le Bouddha, je prendsrefuge dans l'Enseignement, je prends refuge dans le Sangha pour dtruirema peur." Ceci grce aux enseignements du premier, la vrit immuabledu second, l'exemple donn par le troisime, exemple de la grande loiexpose par le Bouddha.

    Le renoncement la proprit s'appliquait dans la vie avec austrit.De plus, le renoncement ne devait pas tant tre prouv extrieurementqu'accept en toute conscience.

    Un jour, un disciple demanda au Bouddha : "Comment doit-oncomprendre la rgle concernant le renoncement la proprit ?" Undisciple avait renonc toute chose, et pourtant l'Instructeur continuait lui reprocher ses possessions. Par contre, un autre tait entour d'objets,mais il ne lui tait fait aucun reproche.

    "Le sentiment de possession ne se mesure pas au nombre d'objets mais

    aux penses. On peut avoir des objets sans pour cela les possder."L'Eveill conseillait toujours de ne possder que le strict minimum

    pour ne pas y consacrer trop de temps.

    Toute la vie de la communaut tait strictement discipline car l'enseignement du Bouddha se fondait sur une autodiscipline d'acier, afinde brider penses et sentiments incontrls et de dvelopper une volontindomptable. Ce n'est que lorsque le disciple tait matre de ses sens quel'Instructeur soulevait lgrement le voile et assignait une tche. Ledisciple tait alors progressivement admis dans les arcanes de laconnaissance. De ces hommes disciplins, ayant renonc tout ce qui estpersonnel et, par consquent, fermes et intrpides, Gautama l'Eveilldsirait faire des travailleurs du bien commun, des crateurs de laconscience des peuples et des prcurseurs de la Communaut Mondiale.

    Le courage tait plac la base de toute ralisation dans

    l'enseignement de Gautama. "Il n'y a pas de vraie compassion sanscourage ; aucune discipline de soi ne peut se raliser sans courage ; lapatience est courage ; on ne peut sonder la profondeur de la vraie

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    connaissance et atteindre la sagesse d'un arhat sans courage." Gautamaexigeait de ses disciples qu'ils suppriment tout sentiment de peur. Ilexigeait intrpidit dans la pense et dans l'action. Le nom mme donn auBouddha Gautama, "le Lion", et ses exhortations personnelles ses

    disciples de passer travers tous les obstacles comme un rhinocros ou unlphant prouvent la profondeur du courage qu'il exigeait. Ainsi,l'enseignement de Gautama peut tre, avant tout, considr commel'enseignement de l'Intrpidit.

    "Nous nous appelons des guerriers,

    disciples, car nous combattons.

    Nous combattons pour de hautes vertus,

    des efforts courageux et une sagesse sublime,

    C'est pourquoi on nous appelle des guerriers."

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    La tradition affirme que, lorsque Gautama ralisa l'illumination, ellelui rvla la "chane des causes" (les douze Nidnas), rsolvant ainsi le

    problme qui le tourmentait depuis des annes. En mditant de la cause l'effet, Gautama rvla la source du mal :

    12) L'existence est souffrance, car elle implique vieillesse, mort et denombreuses peines.

    11) Je souffre parce que je suis n.

    10) Je suis n parce que j'appartiens au monde de l'existence.

    9) J'existe parce que j'entretiens l'existence en moi.8) J'entretiens l'existence parce que j'ai des dsirs.

    7) J'ai des dsirs parce que j'ai des sensations.

    6) J'ai des sensations parce que j'entre en contact avec le mondeextrieur.

    5) Ce contact est produit par l'action de mes six sens.4) Mes sens se manifestent parce que, tant une personnalit, je

    m'oppose l'impersonnel.

    3) Je suis une personnalit parce que ma conscience en est pntre.

    2) Cette conscience s'est cre en consquence de mes existencesprcdentes.

    1) Ces existences ont obscurci ma conscience car je n'avais pas laconnaissance.

    On numre d'habitude les douze formules dans l'ordre inverse :

    1) Avidy (obscurcissement, ignorance)

    2) Samsk ra (karma)

    3) Vijina (conscience)4) Nma-r pa (forme, sensorielle et non sensorielle)

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    5) Shad-yatana (les six bases transcendentales des sentiments,sensations)

    6) Spar a (le contact)

    7) Vedan (les sentiments)8) Trishn (la soif, le dsir)

    9) Updna (les efforts, les attaches)

    10) Bhva (existence)

    11) Jti (la naissance)

    12) Jar (la vieillesse, la mort).Ainsi, la source et cause primordiale de toute la souffrance humaine se

    trouve dans l'obscurit et l'ignorance. Par consquent, Gautama dfinit etcondamne l'ignorance avec prcision. Il affirma que l'ignorance est le plusgrand crime car elle est la cause de toutes les souffrances humaines, nousobligeant attribuer de la valeur ce qui n'en a pas ; souffrir alors qu'onne devrait pas ; prendre l'illusion pour la ralit ; passer notre vie

    rechercher le futile, ngligeant ce qui est le plus prcieux en ralit : laconnaissance du mystre de l'existence et de la destine humaines.

    La lumire capable de dissiper cette obscurit et de nous librer de lasouffrance fut proclame par Gautama l'Eveill comme la connaissancedes Quatre Nobles Vrits :

    1) La souffrance de l'existence incarne, cause par la rcurrenceconstante des naissances et des morts.

    2) La cause de ces souffrances se trouve dans l'ignorance, dans lasoif de satisfaction personnelle pour les possessions terrestres quientranent la perptuelle rptition d'une existence imparfaite.

    3) La cessation de la souffrance se trouve dans la ralisation d'untat illumin, incluant tout, crant ainsi la possibilit d'arrter consciemment le cercle de l'existence terrestre.

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    4) La voie de la cessation de la souffrance consiste renforcer progressivement les lments perfectionner pour supprimer lescauses de l'existence terrestre et approcher la grande vrit.

    Gautama a divis le chemin qui mne cette vrit en huit parties :

    1) Comprhension juste (ce qui concerne la loi des causes).

    2) Pense juste.

    3) Parole juste.

    4) Action juste.

    5) Vie juste.

    6) Travail juste.

    7) Juste vigilance et juste autodiscipline.

    8) Concentration juste.

    Celui qui a observ ces principes dans sa vie se libre de la souffrancede l'existence terrestre qui rsulte de l'ignorance, du dsir et des envies.Lorsque l'on ralise cette libration, on parvient au Nirvna.

    Qu'est-ce que le Nirvna ? "Le Nirvna reprsente la capacit decontenir toutes les actions, c'est la limite de l'inclusion totale. Lefrmissement de l'illumination attire la vritable connaissance. La quituden'est qu'un signe extrieur qui n'exprime pas l'essence de cet tat." Notrecomprhension contemporaine nous permet de dfinir le Nirvna commeun tat de perfection de tous les lments et de toutes les nergies dans un

    individu, amens au maximum d'intensit ralisable dans le prsent cyclecosmique.

    Gautama l'Eveill fit aussi remarquer dix grands obstacles ouentraves :

    1) L'illusion de la personnalit.

    2) Le doute.

    3) La superstition.

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    4) Les passions physiques.

    5) La haine.

    6) L'attachement la terre.

    7) Le dsir de jouissance et de repos.

    8) L'orgueil.

    9) Le contentement de soi.

    10) L'ignorance.

    Pour atteindre la plus haute connaissance, il faut se librer de cesentraves.

    Le bouddhisme expose, dans les moindres dtails, les subdivisions dessens et les mcanismes du processus intellectuel en tant qu'obstacles oumoyens de dveloppement pour faciliter la connaissance de soi par l'entranement mental et l'analyse de chaque objet en dtail. En suivantcette mthode de connaissance de soi, l'homme parvient finalement connatre la vraie ralit et voit la vrit telle qu'elle est. C'est la mthode

    applique par tout sage instructeur pour dvelopper le mental du disciple.En prchant les Quatre Nobles Vrits et le noble sentier, Gautama

    condamna, d'une part, les mortifications corporelles pratiques par lesasctes, et, d'autre part, la licence indiquant le chemin des huit tapescomme la voie de l'harmonisation des sens et de la ralisation des sixperfections d'un arhat : compassion, moralit, patience, vaillance,concentration et sagesse.

    L'Eveill insista sur la ralisation par ses disciples du concept desdeux extrmes, puisqu'on ne peroit la Ralit qu'en les juxtaposant. Si ledisciple tait incapable de matriser ce concept, le Bni ne l'introduisait pas une connaissance plus avance, car cela aurait t non seulement inutilemais aurait mme pu s'avrer nuisible. Raliser ce concept est plus facilelorsque l'on a assimil le principe de relativit. Le Bouddha affirmait larelativit de tout ce qui existe, faisant remarquer les ternels changementsdans la nature et l'impermanence de toute chose dans le flux de l'existencesans limite qui s'efforce ternellement vers la perfection, et l'on peut voir

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    dans la parabole suivante jusqu' quel point il adhrait ce principe derelativit :

    "Supposons" dit un jour le Bouddha ses auditeurs "supposons unhomme en route pour un long voyage, qui se trouve devant une granderivire ; de ce ct-ci les dangers abondent, mais de l'autre ct le terrainest sr et sans danger ; il n'y a pas d'embarcation avec laquelle traverser lecourant ni aucun pont vers l'autre rive. Supposons que cet homme se dise"Vraiment voici une grande et large tendue d'eau, mais il n'existe aucunmoyen pour atteindre l'autre rive. Si je ramassais des branches, des racineset du feuillage, que j'en fasse un radeau, que port par ce radeau, pagayantdes mains et des pieds, je traverse sain et sauf et aborde sur l'autre rive !"Supposons donc que cet homme fasse comme il l'a dit, fabrique un radeau,le lance sur l'eau et, s'aidant des pieds et des mains, arrive en sret l'autre bord.

    Maintenant, aprs avoir travers et rejoint l'autre rive, supposons quecet homme se dise "Vraiment, ce radeau m'a rendu un grand service car,grce lui, en m'aidant des pieds et des mains, j'ai travers en sretjusqu' cette rive. Et si je soulevais mon radeau, que je le porte sur la tteou sur les paules et que je continue ainsi mon chemin ?"

    Qu'en pensez-vous, disciples ? En procdant ainsi, l'homme agirait-ilde faon juste l'gard du radeau ?

    Par rapport au radeau, quelle serait l'action juste ?

    Eh bien, disciples, cet homme devrait se dire "Rellement, ce radeaum'a rendu un grand service car, grce lui, en m'aidant des pieds et desmains, j'ai travers en sret jusqu' ce lointain rivage. Mais je vais lelaisser sur la berge et continuer mon voyage". Ainsi cet homme agirait defaon juste l'gard de son radeau.

    De la mme manire, disciples, je vous expose mon enseignementcomme un radeau ; c'est un moyen de s'en sortir, et non une possession conserver. Comprenez clairement cette analogie du radeau : le Dharma est laisser derrire soi lorsque l'on parvient au rivage du Nirvna."

    Ici nous voyons le peu d'importance qui doit tre attach quoi que cesoit dans ce monde de relativit My. Toute chose, mmel'enseignement du Parfait Illumin, a seulement une valeur provisoire,

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    transitoire et relative. Cette parabole fait aussi ressortir la ncessit del'effort qui s'exprime travers les pieds et les mains, l'Enseignement n'estefficace que si l'on y applique tous ses efforts.

    Les communauts du Bouddha offrirent un abri aux candidats les plusvaris et rassemblrent donc les lments les plus divers. Dans leMilindaPa ha nous trouvons ceci : "Quelles sont les causes qui poussentquelqu'un se joindre la communaut ?" demanda une fois Milinda soninstructeur bouddhiste Ngasena. Le sage rpondit que certains hommesadhrent au Sangha pour chapper la tyrannie d'un souverain ; d'autrespour se sauver des brigands ou parce qu'ils sont cribls de dettes, mais il yen a aussi certains qui dsirent simplement qu'on pourvoie leurs besoins.

    Si certains se joignirent la communaut la recherche de privilgessociaux ou matriels, plus nombreux furent les vrais rformateurs de lasocit, rassembls sous le vaste abri de possibilits que l'enseignement duBouddha offrait au milieu de la sombre ralit fodale de son poque.Dans leSutta Nip ta , l'on trouve de svres condamnations de la conditionsociale et de la moralit publique de cette poque.

    La communaut admettait tout le monde sans distinction de race, de

    caste ou de sexe, et les qutes les plus diverses, les recherches de voiesnouvelles s'y panouissaient.

    Les communauts du Bouddha n'taient pas des monastres, et y treadmis n'tait pas une initiation. D'aprs les paroles de l'Instructeur, seule laralisation de l'Enseignement faisait du nophyte un homme nouveau et unmembre de la communaut. Il rgnait dans la communaut une galitabsolue entre tous les membres. Un membre diffrait d'un autre par la datede son admission. A l'lection de l'an, l'ge n'tait pas pris enconsidration. L'anciennet n'tait pas le fait des cheveux gris. Dequelqu'un dont le seul mrite tait son grand ge, on disait qu'il tait"vieux-en-vain." Mais "est un an celui en qui la justice parle, qui sait sematriser, qui est sage."10

    Le Bouddha ne demandait pas de vivre en communaut ferme. Ds lecommencement, il y eut certains disciples qui prfrrent une vie solitaire.De ceux qui s'isolaient trop, le Bouddha disait : "Une vie solitaire dans la

    10 Dhammapada

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    fort est utile celui qui la poursuit, mais elle contribue peu au bien-tredes hommes."

    L'Eveill ne souhaitait pas tablir trop de rgles. Il s'effora d'viter leformalisme et la standardisation d'un rglement, aussi bien quel'imposition de trop d'interdits. Toutes les rgles avaient pour but deprotger et de sauvegarder la complte indpendance du disciple. Il taitdemand au membre de la communaut d'tre simple et dcent, maiscomme l'lvation spirituelle ne dpend pas de la manire de se nourrir etde se vtir, le Bouddha laissait une certaine libert ses disciples en cedomaine. Incits par Devadatta, certains disciples demandrent l'Illumind'tablir une discipline plus stricte pour la communaut et d'interdire deconsommer de la viande ou du poisson. Le Bouddha refusa en disant quechacun tait libre d'appliquer lui-mme ces mesures de discipline maisqu'elles ne devraient pas tre imposes comme une obligation tous. Lamme tolrance s'exerait l'gard des vtements, car il tait inadmissibleque la libert puisse dgnrer en privilge pour quelques-uns. Se fiant lasagesse du vnrable Sona, le Bouddha lui dit : "Sona, tu as t lev dansle raffinement, je t'ordonne de porter des sandales avec des semelles."Sona demanda alors que cette permission s'tende tous les membres duSangha et le Bni accda tout de suite cette requte.11

    Dans le Vinaya, nous voyons que toutes les rgles, dans lacommunaut tablie par le Bouddha, taient toujours inspires par unencessit vitale. LeVinaya dcrit un pisode touchant qui aboutit unenouvelle rgle pour le Sangha.

    Un jour, un moine eut une maladie intestinale et gisait dans sesexcrments. Lorsque le Bni, suivi du vnrable Ananda, passa dans les

    dortoirs, il arriva la cellule du moine et le vit dans cet tat.Et le voyant ainsi, il alla vers lui et lui dit :

    "Qu'est-ce qui vous arrive, moine, tes-vous malade ?

    J'ai une maladie intestinale, Seigneur.

    N'avez-vous personne pour prendre soin de vous, moine ?

    11 Mahvagga

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    Non, Seigneur

    Pourquoi les moines ne prennent-ils pas soin de vous ?

    Parce que, Seigneur, je ne leur suis d'aucun service."

    L-dessus, le Bni dit au vnrable Ananda : "Allons, Ananda, apportede l'eau et lavons ce moine."

    "Oui, Seigneur" rpondit le vnrable Ananda et il apporta de l'eau.Ensuite le Bouddha versa l'eau pendant que le vnrable Ananda lavait lemoine. Et le Bouddha le tenant par la tte, le vnrable Ananda par lespieds, ils le soulevrent et le posrent sur son lit.

    A cette occasion, le Bni runit les membres de l'ordre et leur demanda : "Moines, dans tel et tel quartier, y a-t-il un moine qui estmalade ?

    Oui, Seigneur

    Et qu'a-t-il ?

    Il a une maladie intestinale, Seigneur

    Et y a-t-il quelqu'un qui prend soin de lui, moines ?

    Non, Seigneur

    Pourquoi les moines ne prennent-ils pas soin de lui ? Moines, vousn'avez ni pre ni mre qui puisse veiller sur vous. Si vous ne prenez passoin l'un de l'autre, qui donc, en vrit, prendra soin de vous ? Quiconque,

    moines, veut compter sur moi devra prendre soin des malades.Si le malade a un prcepteur, celui-ci devra veiller sur lui jusqu' ce

    qu'il soit guri et de mme s'il a un instructeur ou un condisciple du mmeVihra, ou un disciple logeant avec son instructeur. Et s'il n'a ni l'un nil'autre, alors la communaut devra prendre soin de lui ; et quiconquen'agira pas ainsi se mettra en faute."

    La rpugnance de l'Instructeur tablir de nombreuses rgles fixes,spcialement des interdictions, et le dsir de sauvegarder la vitalit de lavie commune s'expriment avec nettet dans ses dernires recommandations

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    son disciple Ananda : "Je confie la communaut le soin de changer lesrgles mineures."

    Mais beaucoup d'mes faibles sont plus leur aise si leurs obligationssont strictement dfinies ; de l a dcoul la multiplicit de rgles etd'interdits du bouddhisme plus tardif. Il est beaucoup plus ais de sesoumettre des rgles, mme sous contrainte, que de manifester l'nergiepersonnelle consciente que l'Instructeur exigeait de ses disciples. Lacommunaut ne cherchait pas priver ses membres de leur personnalit,mais les unir en troite amiti et intimit en une unique aspiration au biengnral. La communaut ne dsirait pas niveler les particularitsindividuelles ; au contraire, l'Eveill apprciait chaque initiative, chaquemanifestation d'individualit, car l'Enseignement affirme que chacun estson propre crateur et librateur, et que les efforts personnels sontabsolument indispensables pour parvenir ce but lev. Ainsi la sourceindividuelle avait toutes les possibilits de se dvelopper. "Evitez lesquerelles, affirmez-vous en vous-mmes sans exclure les autres." Ceci taitaccept comme une rgle dans la communaut.

    Et le bouddhisme craignait si peu les manifestations individuelles, quesouvent les paroles inspires d'un des membres de la communaut taient

    acceptes comme faisant partie du Canon avec les orientations donnes par l'Instructeur.

    Une discipline austre, une surveillance constante de ses penses, deses paroles et de ses actes, faisaient de la communaut une coled'apprentissage aussi bien que d'entranement. L'Instructeur, en faisant dela connaissance le seul moyen d'chapper aux chanes terrestres, et del'ignorance le crime le plus odieux, prescrivit tous de fouler la voie de la

    connaissance.Paralllement la condamnation de l'ignorance, nous trouvons une

    condamnation aussi svre de la frivolit.

    "L'insens, l'ignorant, est lui-mme son plus grand ennemi, car ilcommet de mauvaises actions qui produisent des fruits amers.

    Mme si un insens est le compagnon d'un sage pendant toute sa vie,

    il reste toutefois ignorant de la vrit, comme la cuillre ignore la saveur de la soupe.

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    Longue est la nuit pour celui qui veille, long est un mille pour celuiqui est las, longue est la ronde des vies et des morts pour les insenss quine connaissent pas la Vrit."12

    Il se fixa comme tche de rappeler souvent aux parents d'enseigner leurs enfants toutes les sciences, tous les arts et, par-l, d'aider leur conscience crotre. De mme, il a constamment mis en avant la ncessitvitale du voyage. Il y voyait un but rellement instructif, car le voyagedtache l'homme de la routine quotidienne et dveloppe en lui mobilit,ingniosit et adaptabilit, qualits indispensables qui prparent leprocessus d'expansion de conscience.

    L'enseignement de Gautama exige d'tre authentique, mais il necomporte pas de dogme suivre aveuglment, car l'Instructeur, affirmantla connaissance en toutes choses, ne voyait pas l'utilit d'une foi aveuglepour largir la conscience. "Par consquent" disait l'Eveill, "je vous aiappris croire une chose, non parce que vous l'avez entendue, maisseulement lorsque votre conscience l'a vrifie et accepte."

    Dans un entretien avec un jeune brahmane, l'Eveill indiqua commentun disciple consciencieux arrive matriser la Vrit : "Lorsque, aprs

    mre considration, le disciple reconnat que l'homme en question estentirement libr de toute possibilit d'erreur, il fait confiance cethomme. L'approchant avec confiance, il devient son disciple. Etant devenuson disciple, il ouvre ses oreilles. Ayant ouvert ses oreilles, il prteattention l'enseignement. Ayant entendu l'enseignement, il le garde l'esprit. Il analyse la signification des vrits qu'il a retenues. Il mdite sur elles. De sa mditation nat sa dcision. Ce qu'il a dcid, il l'entreprend.Ce qu'il a entrepris, il en apprcie la signification. L'ayant apprcie, il y

    applique tous ses efforts. Grce aux efforts appliqus, il approche laVrit. Ayant pntr dans ses profondeurs, il voit. Cependant, tout cecin'est que la reconnaissance, et non la possession de la Vrit. Pour lamatriser totalement, il faut effectuer, alimenter et renouveler inlassablement ce processus psychologique."13

    12 Dhammapada13 Majjhima-Nik ya

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    Ce discours montre clairement que le disciple avait toute libert pour discuter l'enseignement qui lui tait donn et que connaissance et matrisede la vrit ne sont acquises que par l'effort personnel.

    L'enseignement du Bouddha, comme enseignement de Vrit,comprenait tous les grands enseignements antrieurs et, par consquent,soulignant leur vrit, il en rejetait toute dprciation. Rejetant toutedprciation, l'Enseignement n'en dvalorisait aucun. La ralisation dugrand principe de coopration ouvrait toutes les voies.

    On reconnaissait, dans les communauts du Bouddha, un renoncementralis par l'individu, mais on assimilait un reniement de l'ignorance. Onpouvait renoncer, dans les communauts du Bouddha, des considrationsinsignifiantes, mais un reniement quivalait se retirer de la communaut.Il tait habituel de ne jamais mentionner celui qui tait parti lacommunaut devait vivre pour le futur. De plus, souvent celui qui taitparti revenait, alors le retour n'tait suivi d'aucune question, sauf une : "Tune renies plus ?"

    Au dbut de l'enseignement, la discipline visait surtout purifier lecur et l'esprit de tous les prjugs et dfauts. Selon les progrs, l'accent

    de l'enseignement se transfrait et se concentrait sur l'expansion deconscience.

    Il est difficile un homme de s'lever sans passer la svre preuve dela purification. "Si la robe est sale, le teinturier peut la passer autant de foisqu'il veut dans le bleu, le jaune, le rouge ou le lilas, sa couleur resteravilaine et douteuse. Pourquoi ? A cause de la salet de la robe. Si le cur est impur, il faut s'attendre au mme triste rsultat.

    "Je dis qu'il ne suffit pas de porter une robe pour tre un combattant dela lumire. Il ne suffit pas d'aller tout nu, couvert de boue, asperg d'eau,de s'asseoir sous un arbre, de vivre en solitaire, de se tenir dans uneposition, de jener, de se tresser les cheveux."14 "Un homme n'est pas unmendiant simplement parce qu'il se nourrit d'aumnes."15 "Un hommen'est pas un ascte simplement parce qu'il vit dans une fort."16 "N'est pas

    14

    Majjhima-Nik ya15 Dhammapada16 ikshsamuccaya, compilation dentideva

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    digne de porter la robe safran l'impur qui manque de sincrit dans sesactes, l'ignorant qui ne se matrise pas."17

    "La plus odieuse des trois sortes d'action malveillante, disait l'Eveill,n'est pas la parole, ni l'acte physique, mais la pense."18 Ds la conceptiond'une mauvaise action, l'homme est dj coupable, qu'elle soit mise excution ou non.

    "Le premier lment, en toutes choses, est la pense. L'lmentprpondrant est la pense, tout dcoule de la pense. Si un homme parleou agit avec une mauvaise pense, la souffrance s'ensuit comme la rouesuit les pas de la bte qui tire le chariot.

    Si un homme parle ou agit d'aprs une pense juste, le bonheur le suitd'aussi prs que son ombre qui ne le quitte jamais.

    L'ennemi cherche nuire l'ennemi, hait celui qui le hait, mais pireest le mal fait par une pense mal dirige."19

    L'Instructeur insista particulirement sur la ncessit de veiller sur sespenses, parce que si le disciple, trop confiant dans les rsultats atteints,diminuait sa vigilance, il payerait cher la moindre ngligence. Cetavertissement fut donn par une parabole : "Un homme fut bless par uneflche empoisonne. Le mdecin, ayant extrait la flche, conseilla aubless de surveiller la blessure trs attentivement. Mais le patient s'imaginan'avoir plus rien craindre. Sans soin, la blessure s'enflamma et provoquala mort dans d'atroces souffrances."20

    "La vigilance est la route vers l'immortalit ; la ngligence, la routevers la mort. Les vigilants ne meurent pas, les ngligents sont comme s'ils

    taient dj morts.Chez les inconstants en pense, ignorants de la vraie loi ou d'une

    confiance vacillante, la sagesse ne peut s'panouir.

    17 Dhammapada18

    Mahjjhima-Nik ya19 Dhammapada20 Majjhima-Nik ya

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    On ne devait pas expulser un membre simplement parce que l'onn'tait pas d'accord avec lui dans l'apprciation de ses actes. L'expulser signifierait donner libre cours un torrent de mots enflamms et amener ladsunion dans la communaut. "Un membre de la communaut ne rptera

    pas ce qu'il a entendu de faon dsunir les autres, mais tentera de lesrapprocher en ne prononant que des paroles de paix."24

    "Jamais la haine n'a dtruit la haine ; seule la bont peut en venir bout ; telle est la loi ternelle.

    Il m'a tromp, il m'a abus, il m'a subjugu, il m'a vol ; chez ceux quinourrissent de telles penses, la colre ne se calme jamais.

    Si un homme se proccupe des fautes des autres et est toujours enclin se fcher, ses propres passions vont crotre et il est loin de la destructiondes passions."25

    "Certaines personnes ne connaissent pas la ncessit du contrle desoi ; si elles sont d'humeur querelleuse, nous pouvons excuser leur conduite. Mais ceux qui en savent davantage devraient apprendre vivreen harmonie.

    Si un homme trouve un ami sage vivant avec droiture et d'un caractreconstant, il peut vivre avec lui, surmontant tous les dangers, heureux ettranquille. Mais avec les insenss, pas de camaraderie. Plutt que de vivreavec des gostes vaniteux querelleurs et obstins, mieux vaut rester seul."26

    Influenc en toute chose par la conformit au but, l'Eveill ne cherchapas systmatiser son enseignement. Il dsirait que chaque point de

    l'enseignement affecte aussi puissamment que possible la volont de sesdisciples. Ne visant que la croissance et le dveloppement de laconscience, il accordait une grande libert de pense et d'action pour toutle reste. Le Bouddha dsirait que chacun se fixe sa discipline individuelle.

    "Comment le Bouddha choisissait-il ses disciples pour la tche ?Pendant le travail, alors que la fatigue s'tait dj empare des disciples, le

    24

    Anguttara-Nik ya25 Dhammapada26 Mahvagga

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    Bouddha posait la question la plus inattendue et attendait une rponseimmdiate.

    "Ou posant devant eux l'objet le plus simple qui soit, il suggrait de ledcrire en pas plus de trois mots ou pas moins de cent pages. Ou plaantun lve devant une porte scelle, il lui demandait : "Comment feriez-vouspour l'ouvrir ?"

    Ou demandant aux musiciens de jouer sous les fentres, il leur disaitde chanter des hymnes trs dissemblables.

    Ou, passant devant les disciples, il leur demandait combien de fois ilavait fait cela.

    Ou, remarquant une mouche agaante, il demandait l'lve de rpter les paroles inattendues qu'il venait de prononcer.

    Ou, notant la peur provoque par des animaux ou des phnomnesnaturels, il mettait ses lves en condition de la matriser. Le Lion puissanttrempait ainsi le glaive de l'esprit." (Ecrit d'aprs l'enseignement oral dubouddhisme hindou).

    Il ne faudrait pas oublier le passe-temps favori du Bouddha avec sesdisciples pendant les moments de repos. L'Instructeur lanait un mot enl'air, et sur sa base, les disciples construisaient toute une pense. Il n'existepas de moyen plus sage de tester le niveau de conscience.

    Par sa connaissance et sa ferme prise de conscience que tout ce quiexiste change, le Bouddha aguerrissait ses lves, les armait de courage, depatience et de compassion et en faisait de vrais guerriers pour le bien

    commun.Les exemples de complet ddain pour ce qui rend la vie facile et

    conventionnellement agrable abondent, particulirement dans les ancienscrits.

    Le renoncement toute chose personnelle donne naissance au sens devraie libert ; de la libert nat la joie ; de la joie la satisfaction ; de lasatisfaction le sens du calme et du bonheur.

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    L'Eveill fraya son chemin vers le cur des humains, non par desmiracles, mais par son enseignement pratique de la perfection de la vie detous les jours et par son exemple personnel de grande coopration.

    Si grande tait sa tolrance et son dsir d'troite coopration avec leshommes, que jamais il ne s'leva contre leurs rites et leurs croyances."Vnrez vos croyances et ne condamnez jamais celles des autres." Il ne seproccupait pas des formes extrieures et s'efforait seulement de donner une plus vaste comprhension de la signification intrieure en l'expliquantd'un nouveau point de vue.

    "Alors que le Bni se trouvait dans un bosquet de bambous prs deR jagriha, il rencontra Srigla, un chef de famille, qui, en joignant lesmains, se prosterna vers les quatre directions du monde, vers le znith enhaut et vers le nadir en bas. Et le Bni, sachant qu'il suivait en cela unesuperstition religieuse traditionnelle pour carter le mal, demanda Srigla, "Pourquoi accomplis-tu ces tranges crmonies ?"

    Srigla rpondit :"Trouves-tu trange que je protge ma maison contrel'influence des dmons ? Je sais que toi, Gautamakyamuni que les gensappellent le Tathgata et le Bouddha Bni, tu serais trop heureux de me

    dire que les incantations ne servent rien et n'ont aucun pouvoir protecteur. Mais coute et sache qu'en accomplissant ce rite, j'honore, jevnre et conserve sacres les paroles de mon pre."

    Le Tathgata lui dit alors : "Tu fais bien, Srigla, d'honorer, devnrer et de conserver sacres les paroles de ton pre ; et c'est ton devoir de protger ta maison, ta femme, tes enfants et les enfants de tes enfantscontre l'influence nfaste des mauvais esprits. Je ne te reproche pasd'accomplir le rite de ton pre. Mais je trouve que tu ne comprends pas lacrmonie. Que le Tathgata, qui te parle maintenant comme un prespirituel et qui ne t'aime pas moins que ne le firent tes parents, t'explique lasignification des six directions :

    Protger ta maison par des crmonies mystrieuses ne suffit pas; tudois la protger par de bonnes actions. Tourne-toi vers tes Instructeurs l'est, vers tes parents au sud, vers ta femme et tes enfants l'ouest, vers tesamis au nord, et rgle au znith tes relations religieuses avec ce qui tedpasse et au nadir tes relations avec les serviteurs qui te sontsubordonns.

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    Telle est la religion que ton pre dsire que tu suives etl'accomplissement de la crmonie te rappellera tes devoirs".

    Srigla contempla le Bni avec vnration comme s'il avait contemplson pre et dit : "Vraiment Gautama, tu es le Bouddha, le Bni, le saintInstructeur. Je ne savais pas ce que je faisais, mais maintenant je le sais.Tu m'as rvl la vrit cache comme quelqu'un qui apporte une lampedans l'obscurit. Je prends refuge dans l'Instructeur Illumin, dans la Vritqui claire et dans la communaut de frres qui ont trouv la Vrit."27

    Ds le commencement de son activit, le Bouddha tait convaincuqu'une parole prononce au bon moment et sa juste place tait plusconvaincante que n'importe quel miracle dans son effet psychique pour l'homme et sa rgnration. Il commandait svrement ses disciples dene pas manifester les pouvoirs "miraculeux" qu'ils avaient acquis, devantceux qui ne connaissaient pas les principes inhrents ces pouvoirs. Par ailleurs, ces manifestations nuisent celui qui les produit, car elles leplacent au-dessus de son entourage et dveloppent son orgueil.

    Un disciple confirm ne doit pas se vanter de perfection surhumaine.Le disciple qui, avec de mauvaises intentions et par cupidit, se vante de

    perfection surhumaine, que ce soit des visions clestes ou des miracles,n'est plus un disciple de Skyamuni. "Je vous dfends, disciples,d'employer aucune incantation ou supplication, car elles sont inutiles,puisque la loi du Karma gouverne toutes choses. Celui qui tented'accomplir des miracles n'a pas compris la doctrine du Tathgata."28

    La parole et la puissance de conviction taient les seules armesutilises par l'Instructeur pour influencer les hommes. Nulle part nous netrouvons de colre ou d'indignation, seulement la sobre affirmation de lavrit. Le discipleariputra met en vidence ce fait : "Le Bni est parfaitdans la conduite de son discours."

    "Comme la terre supporte patiemment, sans chagrin ni plaisir, toutechose qui lui tombe dessus, pure ou impure, ainsi le Bouddha, indiffrent,supporte aussi bien la vnration que le ddain des hommes. Comme l'eau

    27 M.P.Grimblot, Sept Suttas Plis28 Paul Carus, The Questions of King Milinda

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    purifie et rafrachit tout sans distinction, que ce soit juste ou mauvais, leBouddha donne sa compassion aux ennemis et aux amis."29

    Nombreux sont les entretiens et les discours du Bouddha avec sesauditeurs sur ce qui les touche directement et les diverses discussions deleurs obligations l'gard de leur famille et du bien-tre social. Ce qui ledistingue des autres instructeurs et son plus grand mrite consiste dans lefait que, considrant le devoir de l'homme du point de vue de son utilitvitale, il cherchait appliquer dans la vie pratique une perception aigu etleve.

    Ce ct vital et pratique de l'Enseignement s'exprime magnifiquementdans la rponse du Bni Anthapindika, un homme d'une richesseincalculable, appel "la providence des orphelins et l'ami des pauvres", quivint le consulter.

    Apprenant que le Bouddha s'tait arrt dans le bosquet de bambousprs de R jagriha, Anthapindika se mit en route la nuit mme pour lerencontrer. Et le Bni perut immdiatement le cur pur de Anthapindikaet l'accueillit chaleureusement.

    Anthapindika dit : "Je vois que tu es le Bouddha, le Bni et je dsiret'ouvrir tout mon esprit. Aprs m'avoir cout, dis-moi ce que je dois faire.Ma vie est remplie par le travail, j'ai acquis de grandes richesses, et j'aiquantit d'affaires traiter. Toutefois j'aime mon travail et je m'y appliqueavec diligence. Beaucoup de monde travaille pour moi et dpend du succsde mes entreprises.

    Or j'ai entendu tes disciples vanter la batitude de l'ermite et dnoncer l'agitation du monde. "Le Saint Homme, disent-ils, a abandonn sonroyaume et son hritage, il a trouv le chemin de rectitude, montrant ainsiau monde entier l'exemple de la manire d'atteindre le Nirvna".

    Mon cur brle de faire ce qui est juste et d'tre une bndiction pour mes semblables. Je vais donc te demander : "Dois-je abandonner mesrichesses, ma maison, mes entreprises commerciales et, comme toi, choisir d'tre sans demeure afin d'atteindre la batitude d'une vie droite et juste ?"

    29 The Jtaka

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    Et le Bouddha rpondit : "La batitude d'une vie droite et juste peuttre atteinte par tous ceux qui foulent le noble sentier occulte. Celui quis'attache aux richesses ferait mieux de les abandonner que de leur permettre d'empoisonner son cur. Mais celui qui ne s'attache pas elles

    et qui, possdant des biens, les utilise justement, est une bndiction pour son prochain.

    A toi, je te le dis, reste dans ta position sociale et applique-toi avecdiligence tes entreprises. Ce n'est pas la vie, la richesse et le pouvoir quirendent les hommes esclaves, mais leur attachement la vie, la richesseet au pouvoir.

    Le moine qui se retire du monde pour mener une vie oisive n'en retireaucun profit. Car une vie d'indolence est une abomination, et le manqued'nergie est mprisable. Le Dharma du Tathgata ne demande pas unhomme qu'il choisisse d'tre vagabond ou d'abandonner le monde, moinsqu'il ne se sente appel le faire, mais le Dharma du Tathgata exige quetout homme se libre de l'illusion du soi, qu'il purifie son cur, qu'ilrenonce sa soif de plaisirs et qu'il mne une vie de droiture.

    Quelle que soit sa situation, qu'il reste dans le monde comme artisan,

    marchand, officier du roi, ou qu'il se retire du monde et se consacre unevie de mditation religieuse, il doit mettre tout son cur dans sa tche, trediligent et nergique. S'il est comme le lotus qui crot sur l'eau sans qu'ellele touche, s'il lutte dans la vie sans nourrir d'envie ni de haine, s'il vit dansle monde non la vie du soi mais une vie de vrit, alors certainement joie,paix et bndiction habiteront sa pense."30

    Le Bni rpondit de faon aussi belle, aussi vitale et aussi pratique auxquestions de Simha, le guerrier.

    "En ce temps-l, beaucoup de citoyens distingus s'taient rassembls l'htel de ville et, de bien des faons, faisaient l'loge du Bouddha, duDharma et du Sangha. Simha, le gnral en chef, un disciple de la secteNiggantha, tait assis au milieu d'eux. Et il pensa : "vraiment, le Bni doittre un Bouddha, un saint homme. Je vais aller le trouver".

    30 Paul Carus, The Gospel of Buddha

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    Donc Simha, le gnral, alla chez le chef du Niggantha, Ntaputta, etl'ayant approch, lui dit : "Je dsire, Seigneur, rendre visite au samanaGautama".

    Ntaputta dit : "Pourquoi vous, Simha, qui croyez en l'effet des actionsselon leur valeur morale, devriez-vous aller voir le samana Gautama quinie l'effet des actions ? Le samana Gautama, Simha, nie l'effet des actions ;il enseigne la doctrine du non-agir ; et c'est dans cette doctrine qu'ilentrane ses disciples".

    Alors le dsir d'aller trouver le Bni, qui avait surgi chez Simha, legnral, s'affaiblit.

    En entendant de nouveau les loges du Bouddha, du Dharma et duSangha, Simha revint faire sa demande au chef du Niggantha, et denouveau Ntaputta le persuada de ne pas y aller.

    Lorsqu'une troisime fois, le gnral entendit des hommes dedistinction vanter les mrites du Bouddha, du Dharma et du Sangha, legnral pensa : "Vraiment le samana Gautama doit tre un Saint Bouddha.Qu'ai-je faire des Nigganthas, et de leur consentement ? J'irai (sansdemander leur permission) trouver le Bni, le Saint Bouddha.

    Et Simha, le gnral, dit au Bni : "J'ai entendu dire, Seigneur, que lesamana Gautama nie l'effet des actions ; il enseigne la doctrine du non-agir en disant que les actes des tres sensibles ne reoivent pas leur rcompense, car il enseigne l'annihilation et le caractre mprisable detoute chose ; et c'est dans cette doctrine qu'il entrane ses disciples.Enseignes-tu la non-persistance de l'me et la destruction de l'trehumain ? Je t'en prie, dis-moi Seigneur, ceux qui parlent ainsi disent-ils lavrit ou portent-ils un faux tmoignage contre ta personne et font-ils ainsipasser un faux dharma pour ton dharma ?"

    Le Bouddha rpondit : "D'une certaine faon, Simha, ceux qui disentcela disent la vrit sur mon enseignement, et d'une autre faon, Simha,ceux qui disent le contraire disent aussi la vrit. Ecoute et je vais te dire :

    "J'enseigne, Simha, ne pas agir injustement, que ce soit en acte, en

    parole ou en pense ; j'enseigne ne pas accomplir ces actions mauvaiseset fausses qui psent sur le cur. Cependant, j'enseigne, Simha, agir de

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    faon juste, que ce soit en acte, en parole ou en pense ; j'enseigne accomplir ces actions vraies et bienveillantes qui lvent le cur.

    J'enseigne, Simha, qu'il faut radiquer toute chose mauvaise etincorrecte, tout acte injuste en pense, en parole ou en action. Simha, celuiqui s'est libr de ces conditions qui psent sur le cur, celui qui les adtruites pour qu'elles ne puissent plus ressurgir, de mme que l'ondracine un palmier pour qu'il ne puisse plus repousser, cet homme arussi liminer le soi.

    Je proclame, Simha, l'annihilation de l'gocentrisme, du dsir, de lamauvaise volont, de la tromperie. Toutefois, je ne proclame pasl'annihilation du pardon, de l'amour, de la charit et de la vrit.

    Je juge, Simha, les actes malveillants mprisables, qu'ils soientaccomplis par l'action, la parole ou la pense, mais j'estime la droiture et lavertu dignes d'loges".

    Et Simha dit : "Un doute reste encore tapi dans ma pense concernantla doctrine du Bni. Voudrait-il consentir dissiper ce nuage afin que jepuisse comprendre le dharma tel que le Bni l'enseigne ?"

    Le Tathgata ayant donn son consentement, Simha continua : "Je suisun soldat, Bni, et je suis charg par le roi de faire appliquer ses lois etde mener ses guerres. Est-ce que le Tathgata qui enseigne la bienveillancesans fin et la compassion pour tous ceux qui souffrent, nous permet depunir le criminel ? De plus, le Tathgata dclare-t-il qu'il est mauvais defaire la guerre pour protger nos maisons, nos femmes, nos enfants et nosproprits ? Le Tathgata enseigne-t-il la doctrine de la redditioncomplte, si bien que je devrais supporter que le mchant fasse ce qui luiplat et m'incliner avec rsignation devant celui qui menace de prendre par la violence ce qui m'appartient ? Le Tathgata soutient-il que toute lutte, ycompris une guerre pour une cause juste, devrait tre interdite ?"

    Le Bouddha rpondit : "Celui qui mrite une punition doit tre puni, etcelui qui mrite une faveur doit recevoir une faveur. Pourtant, en mmetemps, j'enseigne ne faire aucun mal aucun tre vivant mais tre pleind'amour et de bont. Ces injonctions ne sont pas contradictoires, car celui

    qui doit tre puni pour les crimes qu'il a commis, doit ses souffrances nonpas la malveillance du juge mais au mal qu'il a fait. Ses propres actes luiont amen la souffrance que lui inflige l'excuteur de la loi. Lorsqu'un

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    magistrat punit, qu'il le fasse sans haine ; de son ct l'assassin, lorsqu'ilest condamn mort, devrait considrer que c'est le fruit de sa propreaction. Ds qu'il comprendra que la punition purifie son me, il ne selamentera plus de son sort mais s'en rjouira."

    Et le Bni continua : "Le Tathgata enseigne que toute guerre, ol'homme essaie de tuer son frre, est lamentable, mais il n'enseigne pas queceux qui vont en guerre pour une juste cause aprs avoir puis tous lesmoyens de prserver la paix, mritent le blme. Doit tre blm celui quiest la cause de la guerre.

    Le Tathgata enseigne une complte reddition du soi, mais iln'enseigne pas de cder en toute chose face ces puissances quireprsentent le mal, qu'elles soient des hommes, des dieux ou des lmentsde la nature. La lutte doit exister, car toute vie est une forme de combat.Mais celui qui combat doit veiller ne pas lutter dans son propre intrtcontre la vrit et la droiture.

    Celui qui lutte dans son propre intrt pour tre grand, puissant, richeou clbre, n'aura aucune rcompense, mais celui qui combat pour ladroiture et la vrit sera grandement rcompens car mme sa dfaite sera

    une victoire.Le soi n'est un rceptacle valable pour aucun grand succs ; le soi est

    petit et fragile et ses contenus se rpandront bientt pour le bnficed'autrui, et peut-tre aussi, pour sa maldiction.

    La Vrit, toutefois, est assez grande pour recevoir les aspirations detous les sois, et quand tous les sois clateront comme bulles de savon, leurscontenus seront prservs et, dans la vrit, ils vivront une vie ternelle.

    Celui qui va au combat, Simha, mme s'il s'agit d'une juste cause,doit tre prt tre tu par ses ennemis, car telle est la destine desguerriers ; et si c'est ce qui l'attend, il n'a aucune raison de se plaindre.

    Mais le vainqueur devrait se rappeler l'instabilit des choses terrestres.Son succs peut tre grand, mais si grand soit-il, la roue de la fortune peuttourner nouveau et le faire tomber dans la poussire.

    Toutefois, s'il se modre et teint toute haine dans son cur, relveson adversaire abattu et lui dit "Maintenant faisons la paix et soyons

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    frres", il gagnera une victoire qui ne sera pas un succs passager, car sesfruits resteront pour toujours.

    Grand est un gnral victorieux, Simha, mais le plus grandvainqueur est celui qui a conquis le soi.

    La doctrine de la conqute du soi, Simha, n'est pas enseigne pour dtruire l'me des hommes mais pour la prserver. Celui qui a conquis lesoi est plus apte vivre, russir et vaincre que celui qui en est l'esclave.

    Celui dont la pense est libre de l'illusion du soi tiendra bon dans labataille de la vie et ne tombera pas.

    Celui dont les intentions sont la droiture et la justice ne connatra pasd'chec mais il russira dans ses entreprises et son succs sera durable.

    Celui qui abrite en son cur l'amour de la vrit vivra et ne mourrapoint, car il a bu l'eau de l'immortalit.

    Combats donc courageusement, gnral, et mne tes batailles avecvigueur, mais sois un soldat de la Vrit et le Tathgata te bnira."

    Quand le Bni eut ainsi parl, Simha, le gnral, dit : "GlorieuxSeigneur, glorieux Seigneur ! Tu as rvl la vrit. Grande est la doctrinedu Bni. En vrit, tu es le Bouddha, le Tathgata, le Saint. Tu esl'Instructeur de l'humanit. Tu nous montres la voie du salut, car certainement ceci est la vraie libration. Celui qui te suit ne manquera pasde lumire pour clairer son chemin. Il trouvera la bndiction et la paix.Je prends refuge, Seigneur, dans le Bni, dans sa doctrine et dans safraternit. Puisse le Bni me recevoir ds ce jour, et tant que je vivrai,

    comme un disciple qui a pris refuge en lui."Et le Bni dit : "Considre d'abord, Simha, ce que tu fais. Il convient

    une personne de haut rang comme toi de ne rien faire sans mre rflexion".

    La foi de Simha dans le Bni augmenta. Il rpondit : "Si d'autresinstructeurs, Seigneur, avaient russi faire de moi leur disciple, ilspromneraient leur tendard dans toute la ville de Vsl en criant :"Simha, le gnral, est devenu notre disciple !" Pour la deuxime fois,Seigneur, je prends refuge dans le Bni, dans le Dharma et dans le Sangha;

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    puisse le Bni me recevoir ds ce jour, et tant que je vivrai, comme undisciple qui a pris refuge en lui."

    Le Bni dit : "Depuis longtemps, Simha, les Nigganthas ont reu desoffrandes dans ta maison. Tu devrais donc trouver juste l'avenir de leur donner de la nourriture quand ils viendront vers toi pour qurir desaumnes."

    Le cur de Simha s'emplit de joie. Il dit : "On m'a dit, Seigneur, quele samana Gautama disait "Il ne faut donner qu' moi seul et personned'autre. Seuls mes disciples, et non les autres, devraient recevoir desoffrandes". Mais le Bni m'exhorte donner aussi aux Nigganthas. Bien,Seigneur, nous verrons ce qu'il y a de mieux faire. Pour la troisime fois,je prends refuge dans le Bni, dans son Dharma et dans sa fraternit."31 Entoutes choses, il suivait le principe de la conformit au but. "Quelsprivilges pourrait vous donner le ciel ? Vous devez tre des conqurants,ici en ce monde, dans les conditions o vous vous trouvez maintenant."32

    Un jour, un grand polmiste essaya d'embarrasser le Bouddha en leharcelant de questions sujettes controverse. L'Eveill cessa de lui prter attention et parla la foule autour de lui : "Cet homme ne dsire pas ce

    qu'il voit. Il dsire ce qu'il ne voit pas. Il cherchera longtemps et en vain. Iln'est pas satisfait par ce qu'il voit autour de lui et ses dsirs sont sanslimites. Flicitons ceux qui ont renonc au dsir."

    La doctrine du Bouddha s'est affirme comme une doctrine de la vie,car la pntration dans la vie quotidienne d'un enseignement lev etconforme au but marqua une re nouvelle dans la vie de l'humanit. Lesprcdentes interdictions et dngations furent remplaces par unenseignement positif et pratique dont la consquence fut d'lever l'thique un plus haut degr.

    La doctrine ordonna de s'abstenir de tout ce qui est ngatif, et destimuler avec nergie tout ce qui est positif et beau.

    Le Bouddha condamnait particulirement le suicide ainsi que d'ter lavie. "Tous tremblent quand ils doivent affronter une punition, tous

    31 Paul Carus, The Gospel of Buddha32 Milinda-Paa, The Questions of King Milinda

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    craignent la mort ; en jugeant les autres d'aprs vous-mmes, ne tuez pas nine soyez cause de tuerie."33

    "Le disciple doit s'abstenir d'ter la vie sous n'importe quelle forme. Ilvite d'ter la vie toute crature vivante. Laissant de ct le bton etl'pe, il est doux et plein de clmence, aimable et plein de compassionenvers toutes les cratures vivantes."

    Il tait interdit de consommer de l'alcool et d'intoxiquer autrui parceque l'ivresse mne la dchance, au crime, la folie et l'ignorance quiest la cause principale d'une nouvelle existence accablante. La ncessitd'une chastet complte pour raliser un total dveloppement spirituel taitaussi souligne. Mais avoir une pouse et lui tre fidle tait considrcomme une forme de chastet. La polygamie tait svrement condamnepar le Bouddha Gautama comme un effet de l'ignorance.

    Le Bni a clairement expos son Enseignement propos du caractresacr du mariage dans la parabole des Noces de Jambnada.

    "Le plus grand bonheur qu'un mortel puisse imaginer est le lien dumariage qui unit deux curs aimants. Mais il y a encore plus grandbonheur : c'est d'embrasser la vrit. La mort sparera le mari et la femme,mais la mort n'affectera jamais celui qui a pous la vrit.

    Par consquent, pousez la vrit et vivez avec elle en un mariagesacr. Le mari qui aime sa femme et dsire une union durable, doit lui trefidle de faon tre comme la vrit mme ; et elle se reposera sur lui, levnrera et le soignera. La femme qui aime son mari et dsire une uniondurable, doit lui tre fidle de faon tre comme la vrit mme ; et ilplacera sa foi en elle [, il l'honorera] et pourvoira ses besoins. Je vous ledis en vrit : [leur mariage sera sacr et bni, et] leurs enfants deviendrontcomme leurs parents et porteront tmoignage de leur bonheur.

    Qu'aucun homme ne soit clibataire, que chacun se marie en un amour sacr avec la Vrit. Et lorsque Mra, le destructeur, viendra sparer lesformes visibles de votre tre, vous continuerez vivre dans la Vrit etvous partagerez la vie ternelle, car la Vrit est immortelle !"34

    33 Dhammapada34 Paul Carus, The Gospel of Buddha

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    L'enseignement du Bouddha fit plus pour la libration et le bonheur dela femme qu'aucun autre enseignement de l'Inde. "La femme, disaitGautama, peut atteindre le plus haut degr de connaissance accessible l'homme elle peut devenir un arhat. La libert, qui est au-del des

    formes, ne peut dpendre du sexe, qui relve du monde des formes". Lesfemmes ont jou un rle important dans la communaut et beaucoupd'entre elles furent remarquables pour leur connaissance et leurs efforts.

    Nous citons sa rponse la question de Soma, une disciple "Commentune femme avec son mental limit peut-elle parvenir cette conditionqu'un sage n'atteint qu'avec difficult ? Quand le cur est calme, laconscience ouverte, alors la vrit est perue. Mais si l'on pense, je suisune femme, ou je suis un homme, ou je suis ceci ou cela, c'est Mra qui estconcern."35

    "Les portes de l'immortalit s'ouvrent tous les tres. Que celui qui ades oreilles s'approche, qu'il coute l'enseignement et qu'il ait foi."36