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L’expérience de la 2 L’expérience de la 2 e e génération au Québec : les génération au Québec : les jeunes d’origine haïtienne jeunes d’origine haïtienne Conférence dans le cadre de la série Conférence dans le cadre de la série Brown Bag Brown Bag Métropolis Métropolis Ottawa, le 13 novembre 2008 Ottawa, le 13 novembre 2008 Maryse Potvin, Ph.D. sociologie, Maryse Potvin, Ph.D. sociologie, Professeure, Faculté d’éducation, Université du Québec à Professeure, Faculté d’éducation, Université du Québec à Montréal (UQAM) Montréal (UQAM) Directrice du pôle « discriminations et insertion » du Centre Directrice du pôle « discriminations et insertion » du Centre d’études ethniques des universités montréalaises (CEETUM) d’études ethniques des universités montréalaises (CEETUM) Chercheure au Centre Métropolis du Québec Chercheure au Centre Métropolis du Québec

Lexpérience de la 2 e génération au Québec : les jeunes dorigine haïtienne Conférence dans le cadre de la série Brown Bag Métropolis Ottawa, le 13 novembre

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L’expérience de la 2L’expérience de la 2ee génération génération au Québec : les jeunes d’origine au Québec : les jeunes d’origine

haïtiennehaïtienne

Conférence dans le cadre de la série Conférence dans le cadre de la série Brown BagBrown BagMétropolisMétropolis

Ottawa, le 13 novembre 2008Ottawa, le 13 novembre 2008

Maryse Potvin, Ph.D. sociologie, Maryse Potvin, Ph.D. sociologie, Professeure, Faculté d’éducation, Université du Québec à Montréal (UQAM)Professeure, Faculté d’éducation, Université du Québec à Montréal (UQAM)

Directrice du pôle « discriminations et insertion » du Centre d’études ethniques Directrice du pôle « discriminations et insertion » du Centre d’études ethniques des universités montréalaises (CEETUM)des universités montréalaises (CEETUM)

Chercheure au Centre Métropolis du QuébecChercheure au Centre Métropolis du Québec

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Plan de présentationPlan de présentation

• Jeunes 2Jeunes 2ee génération : un vieux débat mais des génération : un vieux débat mais des données récentes au Canadadonnées récentes au Canada

• L’exemple des jeunes d’origine haïtienne au L’exemple des jeunes d’origine haïtienne au Québec :Québec :– Une expérience sociale spécifique ? Une expérience sociale spécifique ? – Différents des autres jeunes Québécois ?Différents des autres jeunes Québécois ?– Première et seconde générationPremière et seconde génération– L’action de différents pôles identitaires (dont : L’action de différents pôles identitaires (dont :

haïtianité, québécitude, haïtianité, québécitude, blacknessblackness).).– Rôle du racisme : tension entre les pôlesRôle du racisme : tension entre les pôles– Pistes d’actionsPistes d’actions

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La 2La 2ee génération : un vieux débat génération : un vieux débat

• Début XXème siècle aux USA : École de Chicago, maintien de Début XXème siècle aux USA : École de Chicago, maintien de l’ethnicitél’ethnicité

• Consensus relatif : enfants nés dans la « pays d’accueil » de parents Consensus relatif : enfants nés dans la « pays d’accueil » de parents immigrants (Gans, 1992; Portes, 1996; Waters, 1996; Perlmann et immigrants (Gans, 1992; Portes, 1996; Waters, 1996; Perlmann et Waldinger, 1997; Zhou, 1997; Portes et Rumbaut, 2000). Waldinger, 1997; Zhou, 1997; Portes et Rumbaut, 2000).

• Certains incluent dans la «2e génération» les enfants d’immigrants Certains incluent dans la «2e génération» les enfants d’immigrants arrivés en bas âge (moins de 5, 7 ou 10 ans) (Portes, Zhou,Jensen). arrivés en bas âge (moins de 5, 7 ou 10 ans) (Portes, Zhou,Jensen).

• Rumbaut et Ima suggèrent le concept de «Rumbaut et Ima suggèrent le concept de «génération 1.5génération 1.5» pour » pour désigner les jeunes nés à l’étranger mais socialisés et éduqués désigner les jeunes nés à l’étranger mais socialisés et éduqués principalement aux E-U. principalement aux E-U.

• Ce concept : présomption d‘une expérience sociale spécifique et Ce concept : présomption d‘une expérience sociale spécifique et comparaison avec d’autres groupes (dont la 1ère génération).comparaison avec d’autres groupes (dont la 1ère génération).

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La 2La 2ee génération : données génération : données récentes au Canadarécentes au Canada

• Pour Statistiques Canada, la deuxième génération = née au Canada Pour Statistiques Canada, la deuxième génération = née au Canada (question sur pays de naissance des parents réintroduite en 2001)(question sur pays de naissance des parents réintroduite en 2001)

• Les “jeunes issus de l’immigration”= nés au Canada ou immigrants. Les “jeunes issus de l’immigration”= nés au Canada ou immigrants. jusqu’où remonter ? (Boyd)jusqu’où remonter ? (Boyd)

• Ne tient pas compte de l’âge des parents au moment de leur migration. Ne tient pas compte de l’âge des parents au moment de leur migration. Peuvent être de 2e génération, selon la définition adoptéePeuvent être de 2e génération, selon la définition adoptée

• L’Enquête canadienne sur la diversité ethnique (CIC) = a montré les L’Enquête canadienne sur la diversité ethnique (CIC) = a montré les spécificités de l’expérience de la 2e génération de plusieurs “minorités spécificités de l’expérience de la 2e génération de plusieurs “minorités visibles”, mais aussi son hétérogénéïté (variabilité selon les origines, le visibles”, mais aussi son hétérogénéïté (variabilité selon les origines, le sexe, etc. : Boyd, 2008).sexe, etc. : Boyd, 2008).

• Plusieurs indicateurs: Plusieurs indicateurs: chômage, salaires moindres, réussite scolaire et chômage, salaires moindres, réussite scolaire et scolarité élevées, multilinguisme, perceptions similaires sur discriminations scolarité élevées, multilinguisme, perceptions similaires sur discriminations et sentiment de victimisation élevé (« droits acquis »), etc. (Reitz et et sentiment de victimisation élevé (« droits acquis »), etc. (Reitz et Banerjee, 2007). Banerjee, 2007).

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La 2La 2ee génération : données génération : données récentes au Canadarécentes au Canada

• Les jeunes de 2e génération issue des minorités visibles Les jeunes de 2e génération issue des minorités visibles s’estiment davantage victimes de discriminations, parce s’estiment davantage victimes de discriminations, parce qu’en tant que natifs du Canada, ils s’attendent à ce que qu’en tant que natifs du Canada, ils s’attendent à ce que leurs droits de citoyens et l’égalité sociale soit respectésleurs droits de citoyens et l’égalité sociale soit respectés. .

• Les études, dans le dernier numéro de la Revue Les études, dans le dernier numéro de la Revue Diversité CanadienneDiversité Canadienne, montrent toutes que le moment , montrent toutes que le moment crucial de prise de conscience : transition vers crucial de prise de conscience : transition vers l’emploil’emploi//entrée sur le marché du travail.entrée sur le marché du travail.

• Au Québec, études des années 1980 et 90 ne Au Québec, études des années 1980 et 90 ne distinguaient pas 1ère-2ème générations. distinguaient pas 1ère-2ème générations.

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Intérêts et intuitions de Intérêts et intuitions de rechercherecherche

• Années 1980 et 1990, ces jeunes des minorités « visibles »:Années 1980 et 1990, ces jeunes des minorités « visibles »:

– Population d’origine haïtienne: autour de 150 000. La moitié = Population d’origine haïtienne: autour de 150 000. La moitié = née au Québecnée au Québec

– Indicateurs négatifs: monoparentalité forte, pauvreté, crise Indicateurs négatifs: monoparentalité forte, pauvreté, crise d’autorité parentale, taux de chômage (données par quartier + d’autorité parentale, taux de chômage (données par quartier + stat Can et Consortium de McGill).stat Can et Consortium de McGill).

– Jeunes au centre de débats publics et de discours alarmistes Jeunes au centre de débats publics et de discours alarmistes sur l’intégration, l’échec scolaire, la violence urbaine, dans les sur l’intégration, l’échec scolaire, la violence urbaine, dans les médias, les milieux associatifs et intellectuels et les officines médias, les milieux associatifs et intellectuels et les officines gouvernementales. gouvernementales.

– Phénomènes identitaires :Phénomènes identitaires : Blackness Blackness, Malcolm X, Islam, rap, , Malcolm X, Islam, rap, etc.etc.

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Ces jeunes, au centre des débatsCes jeunes, au centre des débats

• Dépeints comme problèmes et/ou victimes, sous Dépeints comme problèmes et/ou victimes, sous l’angle de la « pathologie sociale » et d’un conflit l’angle de la « pathologie sociale » et d’un conflit culturel propre  à la deuxième génération.culturel propre  à la deuxième génération.

– Catégorie «problème», aliénée, anomique, prise entre Catégorie «problème», aliénée, anomique, prise entre deux systèmes culturels présumés inconciliables ou deux systèmes culturels présumés inconciliables ou antagonistes.antagonistes.

– Associés à : gangs de rues criminalisés, pauvreté, Associés à : gangs de rues criminalisés, pauvreté, demandes d’accommodements raisonnablesdemandes d’accommodements raisonnables

– Le concept leur semble « réservé »Le concept leur semble « réservé »

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Ces jeunes, au centre des débatsCes jeunes, au centre des débats

– Image de crise : associée aux jeunes minoritaires les Image de crise : associée aux jeunes minoritaires les plus insérés dans la culture majoritaire et dans le plus insérés dans la culture majoritaire et dans le champ des rapports sociaux de la société«d’accueil».champ des rapports sociaux de la société«d’accueil».

– Insertion culturelle forte vs insertion sociale affaiblie Insertion culturelle forte vs insertion sociale affaiblie (néoracisme /discriminations)(néoracisme /discriminations)

– Il leur est demandé d’incarner, plus que les autres Il leur est demandé d’incarner, plus que les autres citoyens, les réussites du « modèle d’intégration » (et citoyens, les réussites du « modèle d’intégration » (et du « Nous inclusif ») et d’attester par là du bon du « Nous inclusif ») et d’attester par là du bon fonctionnement des décisions politiques prises à leur fonctionnement des décisions politiques prises à leur égard, de la « cohésion sociale » et de l’ordre égard, de la « cohésion sociale » et de l’ordre dominant.dominant.

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Ces jeunes, au centre des débatsCes jeunes, au centre des débats

• Leurs dits « problèmes » nous renseignent plus sur les sociétés Leurs dits « problèmes » nous renseignent plus sur les sociétés d’accueil elles-mêmes, et ses rapports majoritaires-minoritaires. d’accueil elles-mêmes, et ses rapports majoritaires-minoritaires.

– Ex. Quartiers défavorisés de Montréal-Nord et St-Michel, Ex. Quartiers défavorisés de Montréal-Nord et St-Michel, souvent comparés à des ghettos et aux banlieues françaises. souvent comparés à des ghettos et aux banlieues françaises. Refus au Québec de parler de ghettos mais Refus au Québec de parler de ghettos mais de facto, de facto, une partie une partie de ces jeunes constitue un « nouvelle classe urbaine de ces jeunes constitue un « nouvelle classe urbaine marginale ».marginale ».

• Ils mettent en cause le « modèle d’intégration » et d’égalité de la Ils mettent en cause le « modèle d’intégration » et d’égalité de la société dite d’accueil ; société dite d’accueil ; « […] l’on découvre les « deuxièmes « […] l’on découvre les « deuxièmes générations » quand les enfants semblent moins bien traités que générations » quand les enfants semblent moins bien traités que leurs aînés ou quand ils n’acceptent plus d’être aussi mal traités » leurs aînés ou quand ils n’acceptent plus d’être aussi mal traités » (préface de (préface de Dubet, 2007 : 7) Dubet, 2007 : 7)

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Ces jeunes, au centre des débatsCes jeunes, au centre des débats

• Ils connaissent une assimilation segmentée (Zhou, Ils connaissent une assimilation segmentée (Zhou, 1997), même si certains réussissent scolairement et 1997), même si certains réussissent scolairement et professionnellement (ex. Gouverneure générale), professionnellement (ex. Gouverneure générale), quittent les quartiers ethniques et échappent ainsi au quittent les quartiers ethniques et échappent ainsi au statut de « deuxième génération ». statut de « deuxième génération ».

« Pour l’essentiel, le thème de la seconde génération « Pour l’essentiel, le thème de la seconde génération apparaît quand s’interrompt le processus migratoire, apparaît quand s’interrompt le processus migratoire, quand les enfants et les petits enfants des premiers quand les enfants et les petits enfants des premiers venus ne sont plus des immigrés et ne sont pas devenus venus ne sont plus des immigrés et ne sont pas devenus non plus, malgré le temps, des Français ou des non plus, malgré le temps, des Français ou des Québécois comme les autres » (Dubet, Québécois comme les autres » (Dubet, IbidIbid). ).

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Notre recherche sur les jeunes Notre recherche sur les jeunes d’origine haïtienned’origine haïtienne

• Série d’interventions sociologiques (années 1990-début 2000)Série d’interventions sociologiques (années 1990-début 2000)

– Processus de réflexion collective sur plusieurs semaines avec chaque groupes Processus de réflexion collective sur plusieurs semaines avec chaque groupes (5 groupes de 10 personnes: 50)(5 groupes de 10 personnes: 50)

– Reproduction de relations sociales «en laboratoire » Reproduction de relations sociales «en laboratoire » – Autres informateurs clés (entrevues individuelles: 40)Autres informateurs clés (entrevues individuelles: 40)– Participation à des événements et émissions de radioParticipation à des événements et émissions de radio

• Séances avec des jeunes de 2e génération d’origine haïtienne, de milieux Séances avec des jeunes de 2e génération d’origine haïtienne, de milieux défavorisés et aisés (diversité : sexe, âge, quartiers, situation défavorisés et aisés (diversité : sexe, âge, quartiers, situation professionnelle…)professionnelle…)

• Première et 2e générations: similitudes et différences, réciprocité des Première et 2e générations: similitudes et différences, réciprocité des regards et attentes mutuellesregards et attentes mutuelles

Potvin, 1997, 1999, 2000, 2001, 2002, 2007a,b, 2008Potvin, 1997, 1999, 2000, 2001, 2002, 2007a,b, 2008

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Jeunes d’origine haïtienneJeunes d’origine haïtienneObjectifs Objectifs • Comprendre comment les processus sociologiques de production des Comprendre comment les processus sociologiques de production des

inégalités, des discriminations et des frontières, à l’œuvre dans le quotidien inégalités, des discriminations et des frontières, à l’œuvre dans le quotidien de ces jeunes, agissent sur la construction de leur identité et, plus de ces jeunes, agissent sur la construction de leur identité et, plus largement, de leur « expérience sociale ». largement, de leur « expérience sociale ».

• Mettre au jour le caractère pluriel et variable des processus et modalités de Mettre au jour le caractère pluriel et variable des processus et modalités de participation et d’appartenance, mais aussi les stratégies de résistance, participation et d’appartenance, mais aussi les stratégies de résistance, d’opposition et de négociation de la seconde génération, tout en replaçant d’opposition et de négociation de la seconde génération, tout en replaçant ces processus dans les rapports sociaux de leur société. ces processus dans les rapports sociaux de leur société.

• En quoi ces jeunes se distinguent des autres jeunes natifs du groupe En quoi ces jeunes se distinguent des autres jeunes natifs du groupe «majoritaire» et de la première génération qui a immigré ?«majoritaire» et de la première génération qui a immigré ?

• Une expérience sociale spécifique aux 2e générations ou une expérience Une expérience sociale spécifique aux 2e générations ou une expérience propre aux groupes racialisés, ethnicisés, défavorisés ?propre aux groupes racialisés, ethnicisés, défavorisés ?

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Jeunes d’origine haïtienneJeunes d’origine haïtienne

Différences et similitudes avec les autres jeunes Québécois ?Différences et similitudes avec les autres jeunes Québécois ?

• Processus d’insertion socio-culturelle qui, par la consommation de masse, Processus d’insertion socio-culturelle qui, par la consommation de masse, l’école, les médias et la culture des pairs, les rendent indifférenciables l’école, les médias et la culture des pairs, les rendent indifférenciables culturellement des autres jeunes, ce qui n’exclut pas, mais ne signifie pas culturellement des autres jeunes, ce qui n’exclut pas, mais ne signifie pas non plus, une intégration parallèle dans une culture et des réseaux non plus, une intégration parallèle dans une culture et des réseaux « ethniques ». « ethniques ».

Cheminement et réussite scolaires (McAndrew et al., 2005)Cheminement et réussite scolaires (McAndrew et al., 2005)

• Plusieurs variables considérées : fortes distinctions selon langue maternelle, naissance au Plusieurs variables considérées : fortes distinctions selon langue maternelle, naissance au Québec, EHDAA, milieu social…Québec, EHDAA, milieu social…

• Très fortement issus de milieux défavorisés correspondant à des déciles supérieurs de l’indice Très fortement issus de milieux défavorisés correspondant à des déciles supérieurs de l’indice socio-économique, ils sont, à plus de 60 %, nés à l’extérieur du pays et connaissent un profil de socio-économique, ils sont, à plus de 60 %, nés à l’extérieur du pays et connaissent un profil de scolarisation plutôt éclaté. scolarisation plutôt éclaté.

•Plus de 40 % d’entre eux n’intègrent le système scolaire québécois qu’au secondaire.Plus de 40 % d’entre eux n’intègrent le système scolaire québécois qu’au secondaire.

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Jeunes d’origine haïtienneJeunes d’origine haïtienne• Au secteur français, près du quart intègre le secondaire avec 2 ans de retard ou Au secteur français, près du quart intègre le secondaire avec 2 ans de retard ou

plus, et continue d’en accumuler en secondaire 3. C’est le cas du tiers des élèves plus, et continue d’en accumuler en secondaire 3. C’est le cas du tiers des élèves arrivés à l’âge normal et de plus des deux tiers des élèves arrivés en retard. arrivés à l’âge normal et de plus des deux tiers des élèves arrivés en retard.

• Après 5, 6 ou 7 ans d’études: taux de diplomation inférieurs à ceux de l’ensemble Après 5, 6 ou 7 ans d’études: taux de diplomation inférieurs à ceux de l’ensemble de la population (écart après sept ans de 17,2 %) ou même de l’ensemble des de la population (écart après sept ans de 17,2 %) ou même de l’ensemble des élèves issus de l’immigration (écart après sept ans de 5,6 %). Les taux d’accès et élèves issus de l’immigration (écart après sept ans de 5,6 %). Les taux d’accès et de diplomation collégiale sont à l’avenant. de diplomation collégiale sont à l’avenant.

• Aux épreuves de secondaire 4 et 5, leurs résultats, bien que plus faibles que ceux Aux épreuves de secondaire 4 et 5, leurs résultats, bien que plus faibles que ceux de la population dans son ensemble, sauf en anglais écrit langue seconde, sont de la population dans son ensemble, sauf en anglais écrit langue seconde, sont globalement positifs. Les élèves diplômés du secondaire poursuivent leurs études globalement positifs. Les élèves diplômés du secondaire poursuivent leurs études collégiales.collégiales.

• La situation des créolophones et des anglophones originaires des Antilles: plus La situation des créolophones et des anglophones originaires des Antilles: plus négative que celles des autres groupes.négative que celles des autres groupes.

• Francophones, originaires des Antilles ou de l’Afrique, se distinguent positivement. Francophones, originaires des Antilles ou de l’Afrique, se distinguent positivement. Ces derniers ont, à certains indicateurs, des résultats plus favorables que Ces derniers ont, à certains indicateurs, des résultats plus favorables que l’ensemble des élèves issus de l’immigration et, parfois, de l’ensemble de la l’ensemble des élèves issus de l’immigration et, parfois, de l’ensemble de la population scolaire.population scolaire.

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Jeunes d’origine haïtienneJeunes d’origine haïtienne

• L’élève à risque: garçon créolophone ou anglophone d’origine L’élève à risque: garçon créolophone ou anglophone d’origine antillaise, né à l’étranger, arrivé en secondaire en cours de antillaise, né à l’étranger, arrivé en secondaire en cours de scolarité secondaire et fréquentant une école de la région de scolarité secondaire et fréquentant une école de la région de Montréal. Montréal.

• S’il accumule du retard supplémentaire avant le secondaire 3, ses S’il accumule du retard supplémentaire avant le secondaire 3, ses chances d’obtenir un diplôme secondaire passent de faibles à chances d’obtenir un diplôme secondaire passent de faibles à extrêmement limitées, alors que le retard qu’il aurait pu extrêmement limitées, alors que le retard qu’il aurait pu accumuler au secondaire semble moins opérant.accumuler au secondaire semble moins opérant.

• Ce qui les distinguerait : le racisme. Néo-racisme différentialiste, Ce qui les distinguerait : le racisme. Néo-racisme différentialiste, exacerbé à l’égard de cette seconde génération, située à la fois exacerbé à l’égard de cette seconde génération, située à la fois dedans et dehors. Ces jeunes, qui incarnent simultanément dedans et dehors. Ces jeunes, qui incarnent simultanément « l’Autre » (l’étranger) et le « Même » (le natif), brouillent la « l’Autre » (l’étranger) et le « Même » (le natif), brouillent la catégorisation Nous-Eux du groupe majoritaire. catégorisation Nous-Eux du groupe majoritaire.

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Jeunes d’origine haïtienneJeunes d’origine haïtienne

• Première et seconde générationPremière et seconde génération

– Trois vagues migratoires d’haïtiens, depuis les années 60. Des profils et modalités Trois vagues migratoires d’haïtiens, depuis les années 60. Des profils et modalités d’intégration différents.d’intégration différents.

– Des rapports inter-vagues et intergénérationnels ambivalents: reprochent à la Des rapports inter-vagues et intergénérationnels ambivalents: reprochent à la première vague d’immigrants des années 1960-1970, de n’avoir « rien léguée » en première vague d’immigrants des années 1960-1970, de n’avoir « rien léguée » en termes de ressources communautaires.termes de ressources communautaires.

– La construction « communautaire » : fin du mythe du retour, invisibilité des jeunes, La construction « communautaire » : fin du mythe du retour, invisibilité des jeunes, engagement différent, prise de conscience de l’ancrage au Québec, engagement différent, prise de conscience de l’ancrage au Québec, préoccupations qui changent. Jeunes = au centre de ces préoccupations – préoccupations qui changent. Jeunes = au centre de ces préoccupations – alarmisme.alarmisme.

– Réciprocité des regards et attentes mutuellesRéciprocité des regards et attentes mutuelles

– L’historicité « québécoise » et distinctions générationnelles : police, actions L’historicité « québécoise » et distinctions générationnelles : police, actions collectives, médias, transnationalisme des repères culturels, musique, héros Noirs, collectives, médias, transnationalisme des repères culturels, musique, héros Noirs, afrocentrisme….afrocentrisme….

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Jeunes d’origine haïtienneJeunes d’origine haïtienne

L’action de différents pôles identitaires : entre L’action de différents pôles identitaires : entre haïtianité, québécitude et haïtianité, québécitude et blacknessblackness

• Pour ces jeunes, il n’existe pas «d’ailleurs» (auquel ils sont souvent Pour ces jeunes, il n’existe pas «d’ailleurs» (auquel ils sont souvent renvoyés). Ils ne sont pas des immigrés. renvoyés). Ils ne sont pas des immigrés.

• Ne trouvent pas « refuge » dans la communauté haïtienne à Ne trouvent pas « refuge » dans la communauté haïtienne à Montréal, perçue comme un espace minoritaire créé par et pour la Montréal, perçue comme un espace minoritaire créé par et pour la «première génération», offrant des services aux nouveaux arrivants «première génération», offrant des services aux nouveaux arrivants et un tremplin politique à une élite constituée + que des outils et un tremplin politique à une élite constituée + que des outils d’insertion à ces jeunes. d’insertion à ces jeunes.

• Naviguent entre différents « pôles » identitaires, parfois difficilement Naviguent entre différents « pôles » identitaires, parfois difficilement et parfois non, afin de trouver des ressources positives pour donner et parfois non, afin de trouver des ressources positives pour donner sens à leur expérience fragmentée par le racisme. sens à leur expérience fragmentée par le racisme.

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Jeunes d’origine haïtienneJeunes d’origine haïtienne

• Circulent principalement entre Circulent principalement entre trois pôles d’appartenancetrois pôles d’appartenance, qui sont des , qui sont des lieux de participation significatifs, conduisant à des actions lieux de participation significatifs, conduisant à des actions normatives, normatives, stratégiques ou éthiquesstratégiques ou éthiques chez les jeunes, qui vont varier selon les situations chez les jeunes, qui vont varier selon les situations et relations sociales : et relations sociales :

– une communauté haïtienne minoritaire (pôle haïtien), léguée par la première une communauté haïtienne minoritaire (pôle haïtien), léguée par la première génération au Québec et constituant un faible support concret et matériel à leur génération au Québec et constituant un faible support concret et matériel à leur expérience (ressources, réseaux, capital social et complétude institutionnelle);expérience (ressources, réseaux, capital social et complétude institutionnelle);

– un espace sociétal québécois (pôle québécois), qui les intègre culturellement et un espace sociétal québécois (pôle québécois), qui les intègre culturellement et les rejette socialement tout à la fois, pour un grand nombre d’entre eux ; les rejette socialement tout à la fois, pour un grand nombre d’entre eux ;

– une communauté une communauté BlackBlack (pôle (pôle BlackBlack), symbolique, diasporique et transcendante, ), symbolique, diasporique et transcendante, qui agit comme support d’un méta-récit universalisé, transnational et historicisé qui agit comme support d’un méta-récit universalisé, transnational et historicisé donnant un sens à leur expérience du racisme au Québecdonnant un sens à leur expérience du racisme au Québec..

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Jeunes d’origine haïtienneJeunes d’origine haïtienne

• Chacun de ces pôles comporte une face sombre et une face Chacun de ces pôles comporte une face sombre et une face lumineuse, des ressources positives et une dimension négative. lumineuse, des ressources positives et une dimension négative.

• Chaque pôle est traversé par une tension, qui agit sur les Chaque pôle est traversé par une tension, qui agit sur les représentations ambivalentes qu’ont les jeunes de leurs représentations ambivalentes qu’ont les jeunes de leurs appartenances et participation. En tension les uns avec les autres.appartenances et participation. En tension les uns avec les autres.

• Cet équilibre instable caractérise leur expérience, donnant aux Cet équilibre instable caractérise leur expérience, donnant aux jeunes le sentiment de vivre une expérience bien « à eux » : celle jeunes le sentiment de vivre une expérience bien « à eux » : celle de jeunes de jeunes Black Black de deuxième génération haïtienne. de deuxième génération haïtienne.

• La spécificité de cette expérience commune : tension entre leur La spécificité de cette expérience commune : tension entre leur forte intégration culturelle et leur participation sociale et politique forte intégration culturelle et leur participation sociale et politique affaiblie. affaiblie.

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Jeunes d’origine haïtienneJeunes d’origine haïtienne

Le pôle haïtienLe pôle haïtien

• Espace d’affectivité : filiation, extension de la vie familiale et « complétude Espace d’affectivité : filiation, extension de la vie familiale et « complétude institutionnelle » au Québec, mais aussi : expérience douloureuse d’immigration des institutionnelle » au Québec, mais aussi : expérience douloureuse d’immigration des parents, images négatives dans les médias et ruptures. parents, images négatives dans les médias et ruptures.

• Leur paraît peu organisée, sans ressources, peu attirante et incapable de répondre Leur paraît peu organisée, sans ressources, peu attirante et incapable de répondre aux besoins qu’ils croient spécifiques à leur génération. Ils ne connaissent ni ses aux besoins qu’ils croient spécifiques à leur génération. Ils ne connaissent ni ses structures ni son évolution, et ne pensent pas continuer le travail des « anciens ». structures ni son évolution, et ne pensent pas continuer le travail des « anciens ».

• L’attachement au pays d’origine des parents : faible et symbolique. Plusieurs n’y sont L’attachement au pays d’origine des parents : faible et symbolique. Plusieurs n’y sont jamais allés. jamais allés.

• Ils peinent à s’identifier à un groupe minoritaire, extranéïsé et objet de préjugés Ils peinent à s’identifier à un groupe minoritaire, extranéïsé et objet de préjugés défavorables de la part du groupe dominant. Statut minoritaire, faiblesse de ses défavorables de la part du groupe dominant. Statut minoritaire, faiblesse de ses structures associatives, de ses réseaux, de son pouvoir politique et économique. structures associatives, de ses réseaux, de son pouvoir politique et économique.

• Ils désirent déborder de la communauté tout en s’attendant à ce qu’elle « fasse Ils désirent déborder de la communauté tout en s’attendant à ce qu’elle « fasse quelque chose» pour les doter des ressources qu’ils ne trouvent pas ailleurs.quelque chose» pour les doter des ressources qu’ils ne trouvent pas ailleurs.

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Jeunes d’origine haïtienneJeunes d’origine haïtienne

Le « pôle » québécois : fLe « pôle » québécois : fragmenté et mis en opposition avec les deux autres ragmenté et mis en opposition avec les deux autres

• Lieu de références culturelles (école, télé, travail, quartier, amitiés, musique), mais Lieu de références culturelles (école, télé, travail, quartier, amitiés, musique), mais leur sentiment d’être rejetés sur la base de «différences» est aussi alimenté par leur sentiment d’être rejetés sur la base de «différences» est aussi alimenté par

– les images des médias, les images des médias, – la discrimination en emploi, la discrimination en emploi, – le traitement différentiel et « injuste » de la police,le traitement différentiel et « injuste » de la police,– leurs expériences douloureuses à l’école ou dans leur quartier, leurs expériences douloureuses à l’école ou dans leur quartier, – l’effritement progressif de leurs amitiés avec des Québécois francophones, l’effritement progressif de leurs amitiés avec des Québécois francophones, – leur perception d’un nationalisme « marginalisant » et leur difficulté à développer des leur perception d’un nationalisme « marginalisant » et leur difficulté à développer des

actions communes et à affirmer leur citoyenneté. actions communes et à affirmer leur citoyenneté.

• Perçus comme des « Haïtiens »: blocage de leur mobilité et restent fixés en bas de la Perçus comme des « Haïtiens »: blocage de leur mobilité et restent fixés en bas de la société sans être pour autant des immigrés. société sans être pour autant des immigrés.

• En dépit d’un accès à la scolarité et à la formation, ces jeunes ne parviennent pas à En dépit d’un accès à la scolarité et à la formation, ces jeunes ne parviennent pas à surmonter la cristallisation des handicaps sociaux associés aux catégories populaires surmonter la cristallisation des handicaps sociaux associés aux catégories populaires ou défavorisées et attribuées, souvent indûment, à « l’immigrant du Tiers-Monde ». ou défavorisées et attribuées, souvent indûment, à « l’immigrant du Tiers-Monde ».

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Jeunes d’origine haïtienneJeunes d’origine haïtienne

Le « pôle » québécois (suite)Le « pôle » québécois (suite)

• En dépit aussi d’une politique d’immigration sélective, les rapports inégaux En dépit aussi d’une politique d’immigration sélective, les rapports inégaux entre le Nord et le Sud continuent d’alimenter un certain « imaginaire » entre le Nord et le Sud continuent d’alimenter un certain « imaginaire » collectif infériorisant qui affecte ces descendants d’immigrants, même parmi collectif infériorisant qui affecte ces descendants d’immigrants, même parmi les plus scolarisés. les plus scolarisés.

• Ils estiment que le marché du travail fonctionne sur des préjugés, dévalorise Ils estiment que le marché du travail fonctionne sur des préjugés, dévalorise leurs « différences » (qu’ils voient comme des atouts), les exploite et les leurs « différences » (qu’ils voient comme des atouts), les exploite et les exclut parce qu’ils appartiennent à un groupe minoritaire qui n’a pas le poids exclut parce qu’ils appartiennent à un groupe minoritaire qui n’a pas le poids du nombre pour établir un rapport de force ou se construire un marché « du nombre pour établir un rapport de force ou se construire un marché « parallèle ». parallèle ».

• Le fait que certains d’entre eux « s’en sortent » accentue la frustration et le Le fait que certains d’entre eux « s’en sortent » accentue la frustration et le sentiment d’exclusion des autres (trahison, abandon…). sentiment d’exclusion des autres (trahison, abandon…).

• Leurs problèmes seraient mal traduits par le discours dominant et ne Leurs problèmes seraient mal traduits par le discours dominant et ne correspondraient pas à la division « classique » souverainistescorrespondraient pas à la division « classique » souverainistes// fédéralistes fédéralistes

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Jeunes d’origine haïtienneJeunes d’origine haïtienne

• Sont conscients des rôles sociaux qu’ils ont intériorisés, des valeurs civiques Sont conscients des rôles sociaux qu’ils ont intériorisés, des valeurs civiques de la société québécoise, mais refusent simultanément d’adopter une logique de la société québécoise, mais refusent simultanément d’adopter une logique strictement normative (hypocrisie du « Merit System »).strictement normative (hypocrisie du « Merit System »).

• De même, ils adhèrent à la défense de leurs intérêts sur des marchés, De même, ils adhèrent à la défense de leurs intérêts sur des marchés, (scolaires et du travail), mais demeurent critiques à l’égard d’une logique (scolaires et du travail), mais demeurent critiques à l’égard d’une logique purement instrumentale et marchande, perçue comme un piège néolibéral de purement instrumentale et marchande, perçue comme un piège néolibéral de responsabilisation individuelle des « échecs » (doivent se solidariser pour responsabilisation individuelle des « échecs » (doivent se solidariser pour contrer l’exclusion dont ils se sentent victimes). contrer l’exclusion dont ils se sentent victimes).

• La tension entre ces logiques indique un espace de subjectivité. Permet aux La tension entre ces logiques indique un espace de subjectivité. Permet aux sujets de prendre leur distance et d’être critique à l’égard des rôles et des sujets de prendre leur distance et d’être critique à l’égard des rôles et des stratégies, à partir d’une conception éthique de leur propre vie. stratégies, à partir d’une conception éthique de leur propre vie.

• Cette logique de subjectivation est alimentée par l’expérience du racisme : en Cette logique de subjectivation est alimentée par l’expérience du racisme : en se sentant différenciés et infériorisés, ces jeunes vivent une tension plus forte se sentant différenciés et infériorisés, ces jeunes vivent une tension plus forte entre les normes sociales (l’égalité, le mérite, la compétence, l’utilité, etc., qui entre les normes sociales (l’égalité, le mérite, la compétence, l’utilité, etc., qui participeraient à une sorte « d’hypocrisie » sociale) et leurs stratégies pour participeraient à une sorte « d’hypocrisie » sociale) et leurs stratégies pour défendre leurs intérêts, mettant en conflit leurs différents pôles identitaires.défendre leurs intérêts, mettant en conflit leurs différents pôles identitaires.

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Jeunes d’origine haïtienneJeunes d’origine haïtienne

Le pôle Le pôle BlackBlack

• Ne donne pas de ressources matérielles ou pratiques mais joue le rôle Ne donne pas de ressources matérielles ou pratiques mais joue le rôle d’intermédiaire symbolique entre leur québécitude et leur haïtianité. d’intermédiaire symbolique entre leur québécitude et leur haïtianité.

• Agit à la fois comme réponse culturelle aux problèmes d’insertion sociale et comme Agit à la fois comme réponse culturelle aux problèmes d’insertion sociale et comme politisation de l’identité qui les démarque de la 1ère génération et des autres jeunes. politisation de l’identité qui les démarque de la 1ère génération et des autres jeunes.

• Pour ces jeunes, l’identité Black, syncrétique, exprime beaucoup plus leur sentiment Pour ces jeunes, l’identité Black, syncrétique, exprime beaucoup plus leur sentiment de partager une «expérience» et un destin communs permettant d’articuler une de partager une «expérience» et un destin communs permettant d’articuler une identité, une opposition et une historicité. identité, une opposition et une historicité.

• Le pôle Noir donne une continuité, un sens et un ancrage historique en Amérique du Le pôle Noir donne une continuité, un sens et un ancrage historique en Amérique du Nord, à la fois plus large, plus intégré à leur expérience et plus « moderne » que les Nord, à la fois plus large, plus intégré à leur expérience et plus « moderne » que les quelques bribes d’histoire d’Haïti qu’ils possèdent. Il permet une appartenance quelques bribes d’histoire d’Haïti qu’ils possèdent. Il permet une appartenance symbolique à diverses cultures, histoires, héros, courants de pensées, modes et symbolique à diverses cultures, histoires, héros, courants de pensées, modes et mouvements de lutte. mouvements de lutte.

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Jeunes d’origine haïtienneJeunes d’origine haïtienne

Le pôle Le pôle BlackBlack

• Fournit : images de « réussite » et de résistance, ancrage historique, Fournit : images de « réussite » et de résistance, ancrage historique, fragments de mémoire, sentiment d’une expérience commune et foi (par fragments de mémoire, sentiment d’une expérience commune et foi (par l’Islam, pour certains jeunes convertis). Par sa dimension symbolique, l’Islam, pour certains jeunes convertis). Par sa dimension symbolique, l’identité Black « leur appartient » : adaptée à leur vie «moderne » et l’identité Black « leur appartient » : adaptée à leur vie «moderne » et urbaine, dote de capacités créatrices et critiques (ex. musique). urbaine, dote de capacités créatrices et critiques (ex. musique).

• Elle agit comme support d’une action libératrice et solidaire, qui permet une Elle agit comme support d’une action libératrice et solidaire, qui permet une construction des appartenances plutôt qu’une soumission à des construction des appartenances plutôt qu’une soumission à des appartenances. appartenances.

• Transclassiste et transnationale, unifie les expériences des Noirs à travers Transclassiste et transnationale, unifie les expériences des Noirs à travers le monde, médiatise les identités noires. le monde, médiatise les identités noires.

• Permet de se poser contre la domination : retrouver ses racines, Permet de se poser contre la domination : retrouver ses racines, s’autodéfinir, se «libérer le cerveau» des chaînes posées par le rapport aux s’autodéfinir, se «libérer le cerveau» des chaînes posées par le rapport aux « Blancs », etc. « Blancs », etc.

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Jeunes d’origine haïtienneJeunes d’origine haïtienne

Le pôle Le pôle BlackBlack

• Le racisme devient une «catégorie cognitive » qui recompose l’identité Le racisme devient une «catégorie cognitive » qui recompose l’identité autour de la « diaspora noire » et d’une mémoire «mondialisée » autour de la « diaspora noire » et d’une mémoire «mondialisée » (mouvements noirs et cultures Black), leur permettant de faire l’analogie (mouvements noirs et cultures Black), leur permettant de faire l’analogie entre leur situation et celles des populations noires dans le monde. entre leur situation et celles des populations noires dans le monde.

• Les figures des luttes américaines, comme Malcolm X ou Luther King, Les figures des luttes américaines, comme Malcolm X ou Luther King, permettent, par leur plasticité postmoderne, de concilier le procès permettent, par leur plasticité postmoderne, de concilier le procès d’individuation avec l’appartenance à une entité collective. d’individuation avec l’appartenance à une entité collective.

• Par ses ressources culturelles, les jeunes estiment appartenir à cette Par ses ressources culturelles, les jeunes estiment appartenir à cette «communauté de sentiments » aux référents historiques non nationaux. «communauté de sentiments » aux référents historiques non nationaux.

• Mais le pôle Black n’est pas non plus sans ambiguïté : la couleur de la peau Mais le pôle Black n’est pas non plus sans ambiguïté : la couleur de la peau les restreint dans leur liberté comme sujet et cette les restreint dans leur liberté comme sujet et cette BlacknessBlackness ne leur donne ne leur donne pas de ressources pratiques d’insertion sociale, capables de répondre aux pas de ressources pratiques d’insertion sociale, capables de répondre aux besoins quotidiens. besoins quotidiens.

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Conclusion Conclusion • Variations de l’expérience selon origines ethniques, sexe, classe. Variations de l’expérience selon origines ethniques, sexe, classe.

• Sentiment toutefois de vivre une expérience semblable & Sentiment toutefois de vivre une expérience semblable & spécifique: pour eux, les jeunes noirs de 2e génération ont « les spécifique: pour eux, les jeunes noirs de 2e génération ont « les mêmes problèmes » d’injustice mais n’arrivent pas à se positionner mêmes problèmes » d’injustice mais n’arrivent pas à se positionner comme acteur au sein d’un rapport de force. comme acteur au sein d’un rapport de force.

• Ils doivent concilier plusieurs pôles d’appartenances identitaires Ils doivent concilier plusieurs pôles d’appartenances identitaires pour se faire une place au sein de leur société pour se faire une place au sein de leur société

• Ils se disent impuissants pour se rassembler, se construire des Ils se disent impuissants pour se rassembler, se construire des réseaux, revendiquer collectivement la reconnaissance de leurs réseaux, revendiquer collectivement la reconnaissance de leurs droits (et de leurs problèmes) et faire contrepoids aux situations droits (et de leurs problèmes) et faire contrepoids aux situations discriminatoires.discriminatoires.

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ConclusionConclusionL’identité circule difficilement entre ces pôles. L’identité circule difficilement entre ces pôles.

• Elle se conçoit à travers un rapport de domination, dérive parfois vers une obsession Elle se conçoit à travers un rapport de domination, dérive parfois vers une obsession de l’authenticité, une essentialisation de la couleur et un rejet du « Blanc » pour de l’authenticité, une essentialisation de la couleur et un rejet du « Blanc » pour s’assumer individuellement et collectivement. s’assumer individuellement et collectivement.

• Elle vise aussi l’intégration des jeunes Noirs à une société qui les prive d’une fonction Elle vise aussi l’intégration des jeunes Noirs à une société qui les prive d’une fonction sociale correspondante aux attentes qu’elle suscite. sociale correspondante aux attentes qu’elle suscite.

• Ces divers modes de définition de soi renvoient aux différents héritages qui les Ces divers modes de définition de soi renvoient aux différents héritages qui les constituent et à des modes de participation variés. constituent et à des modes de participation variés.

• Selon les relations sociales et les interlocuteurs qu’ils rencontrent, l’identité ou le Selon les relations sociales et les interlocuteurs qu’ils rencontrent, l’identité ou le «Nous » des jeunes prend un sens différent pour s’opposer, s’affirmer, se distinguer, «Nous » des jeunes prend un sens différent pour s’opposer, s’affirmer, se distinguer, exister ou se comprendre : devant la première génération, ils mettent souvent de exister ou se comprendre : devant la première génération, ils mettent souvent de l’avant leur «québécitude », leur individualité, leur l’avant leur «québécitude », leur individualité, leur Blackness Blackness ou leurs « racines ou leurs « racines africaines » ; devant les flics, ils sont dominés, jeunes, Noirs et immigrés ; devant les africaines » ; devant les flics, ils sont dominés, jeunes, Noirs et immigrés ; devant les institutions ou les militants antiracistes, ils font valoir leur «haïtianité » ou leur institutions ou les militants antiracistes, ils font valoir leur «haïtianité » ou leur BlacknessBlackness..

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ConclusionConclusion• Par opposition à l’exclusion, ils se dotent de ressources culturelles Par opposition à l’exclusion, ils se dotent de ressources culturelles

pour se construire une identité « à eux », identité qui n’appartient ni pour se construire une identité « à eux », identité qui n’appartient ni aux « parents » immigrants, ni aux autres jeunes québécois. aux « parents » immigrants, ni aux autres jeunes québécois.

• L’expérience du racisme est en elle-même une source L’expérience du racisme est en elle-même une source d’identification et d’explication de leur expérience, qui décompose d’identification et d’explication de leur expérience, qui décompose puis recompose l’identité du sujet. puis recompose l’identité du sujet.

• Cette «expérience » procède à la fois d’une distance critique à Cette «expérience » procède à la fois d’une distance critique à l’égard de la communauté haïtienne au Québec et de l’ordre l’égard de la communauté haïtienne au Québec et de l’ordre dominant, tout comme d’une adhésion à ce qu’ils nomment la dominant, tout comme d’une adhésion à ce qu’ils nomment la diaspora et la diaspora et la BlacknessBlackness (la Négritude de Césaire) dans laquelle ils (la Négritude de Césaire) dans laquelle ils puisent des ressources culturelles. puisent des ressources culturelles.

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ConclusionConclusion• La seconde génération tend à négocier son rapport à la citoyenneté La seconde génération tend à négocier son rapport à la citoyenneté

et à l’ethnicité selon des modes qui s’accommodent bien mal des et à l’ethnicité selon des modes qui s’accommodent bien mal des schèmes réducteurs à partir desquels les discours dominants schèmes réducteurs à partir desquels les discours dominants l’appréhendent. l’appréhendent.

• Les marqueurs ethniques mobilisés par ces jeunes, déployés en Les marqueurs ethniques mobilisés par ces jeunes, déployés en partie en réaction à l’exclusion symbolique et matérielle, sont aussi partie en réaction à l’exclusion symbolique et matérielle, sont aussi producteurs de modèles identitaires alternatifs fondés sur la producteurs de modèles identitaires alternatifs fondés sur la résistance, le métissage, le cumul des appartenances et résistance, le métissage, le cumul des appartenances et l’alternance des codesl’alternance des codes. .

• Cette expérience spécifique de la 2e génération est surtout Cette expérience spécifique de la 2e génération est surtout révélatrice des problèmes de la société québécoise, des débats qui révélatrice des problèmes de la société québécoise, des débats qui la traversent et des rapports sociaux qui lui donnent sens.la traversent et des rapports sociaux qui lui donnent sens.

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Pistes d’actionPistes d’action• Parler de ces problèmes en toute transparence dans les discours normatifs (prise en compte Parler de ces problèmes en toute transparence dans les discours normatifs (prise en compte

sérieuse au niveau politique)sérieuse au niveau politique)

• En éducation : Prioriser un soutien scolaire maximal aux cours des deux premières années du En éducation : Prioriser un soutien scolaire maximal aux cours des deux premières années du secondaire au secteur Jeunes et, pour les années subséquentes, à l’éducation des adultes (de secondaire au secteur Jeunes et, pour les années subséquentes, à l’éducation des adultes (de plus en plus nombreux : Potvin, en cours) plus en plus nombreux : Potvin, en cours)

• Prioriser, en milieu scolaire, des interventions spécifiques à l’égard des jeunes noirs de milieux Prioriser, en milieu scolaire, des interventions spécifiques à l’égard des jeunes noirs de milieux défavorisésdéfavorisés

• Examiner de près les outils et processus de classements des élèves arrivés du Tiers-Monde Examiner de près les outils et processus de classements des élèves arrivés du Tiers-Monde (incohérence systémique actuelle = effets sur les trajectoires des jeunes).(incohérence systémique actuelle = effets sur les trajectoires des jeunes).

• Introduire une perspective antiraciste plus importante dans l’éducation à la citoyenneté au Introduire une perspective antiraciste plus importante dans l’éducation à la citoyenneté au secteur scolaire francophone, avant d’en arriver à conclure aux bienfaits des écoles secteur scolaire francophone, avant d’en arriver à conclure aux bienfaits des écoles Afrocentristes… Afrocentristes…

• Investir dans les modèles positifs, le mentorat en emploi, les jeunes médiateursInvestir dans les modèles positifs, le mentorat en emploi, les jeunes médiateurs

• Introduire des monitoring et indicateurs de cheminement et de réussite scolaires, et une plus Introduire des monitoring et indicateurs de cheminement et de réussite scolaires, et une plus grande imputabilité des milieux scolaires quant aux classements et aux soutiens des élèves grande imputabilité des milieux scolaires quant aux classements et aux soutiens des élèves (notamment ceux en grand retard scolaire). (notamment ceux en grand retard scolaire).