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Lundi 25/03/2013 Maud ROUCHOUSE– Elodie LEMOINE Espace éthique Rhône-Alpes IFSI Rockefeller Ethique, déontologie et législation 1

Lundi 25/03/2013 Maud ROUCHOUSE–Elodie … · [Pour aller plus loin sur ce sujet, cf. Raymond Massé, Ethique et santépublique, «Enjeux, valeurs et normativité] 30. 31. Indissociabilitéde

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Lundi 25/03/2013

Maud ROUCHOUSE– Elodie LEMOINE

Espace éthique Rhône-Alpes

IFSI Rockefeller

Ethique, déontologie et législation

1

PlanI) Les principes -Elodie Lemoine-

1) Remise en contexte:

- apparition des principes

- Statut

2) Explication singulière: qu’enseigne l’éthique?

a) Le respect de l’autonomie

b) La bienfaisance

c) La non-malfaisance

d) Le principe de justice

3) Philosophie et principes: exemple de l’autonomie

Autonomie et Vulnérabilité: Paul Ricoeur

II) Ethique et droit: La loi bioéthique de 2011 -Maud Rouchouse-

III) Cas pratique: la décision éthique en fin de vie

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Du contexte d’apparition au contenu concret, quels repères pour la pratique?

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1) Remise en contexte: - Le domaine de l’éthique se caractérise par son hétérogénéité

- Pluralisme moral

- Aspect multidisciplinaire de l’éthique

- Instaurer des principes // moyen d’avoir en commun une base solide de laquelle partir pour réfléchir, pour décider et agir

- Attention, l’éthique ne se réduit pas à ces principes: d’autres sont reconnus: dignité, vulnérabilité, …

- Le Rapport Belmont – 1978: texte dans lequel ils apparaissent pour la première fois. Mais pourquoi des principes? - La médecine devient ultra performante: quelles conséquences?

- Connaissance des expérimentations effectuées durant la Shoah

- Scandales médicaux (Brooklyn, Willowbrook,etc.)

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1) Remise en contexte:

� BREF, la médecine et le monde a besoin de repères éthiques pour « réguler » la pratique mais SURTOUT ne jamais retomber dans les atrocités commises dans le passé

� La pensée bioéthique naît à partir du moment où le sentiment est celui qu’une norme a été violée

� Paul Ricoeur: le sentiment de la transgression d’une norme appelle l’éveil de la conscience morale et le besoin de normativité

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1) Remise en contexte:

Rapport Belmont

- Issu de la Commission

Nationale Américaine pour la Protection des Sujets humains dans la Recherche Biomédicale et Comportementale

-Fruit d’une réflexion commune

-Concerne uniquement la recherche

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1) Remise en contexte: - Les principes de l’éthique biomédicale de Tom Beauchamp et James Childress – 1979: deuxième texte dans lequel apparaissent les principes

- Trois principes [Belmont]:

-Le respect des personnes (comprend la notion d’

autonomie)

-La bienfaisance

-La justice

- la non-malfaisance (rajouté par Beauchamp et Childress)

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1) Remise en contexte: - Ces principes émergent au sein d’un contexte

institutionnel, c’est-à-dire au niveau de l’autorité de l’état

- L’éthique cesse d’être une affaire personnelle pour devenir sujet d’intérêt officiel et reconnu

- Naissance en France du CCNE en 1983: www.ccne-ethique.fr

- Quel est le statut de ces principes? Quelle légitimité?

� In Rapport Belmont: «Reconnus dans notre culture»

� Gardons à l’esprit la relativité des principes!

- In Beauchamp et Childress [manuel de référence de l’éthique médicale]

� Principes reconnus dans la « morale commune »9

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a) Le principe du respect de

l’autonomie

Rapport Belmont

[A= Autonomie]

�A in Respect de la personne

�A à respecter

�Si absence d’A: exigence de protection

Une personne autonome est une personne capable de réfléchirsur ses objectifs personnels et de décider pour elle-même d’agir conformément à cette réflexion

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a) Le principe du respect de

l’autonomie

Rapport Belmont

�Dans le cadre de la recherche: notion de consentement libre et éclairé(exemple du prisonnier)

�Ppale caractéristique: Réflexion du patient

�Importance du choix réfléchi:« digne » de respect

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a) Le principe du respect de l’autonomie

Les principes de l’éthique biomédicale

�But de l’ouvrage: application des principes à la prise de décisiondes individus

[≠ uniquement recherche mais aussi décisions de santé]

�Préconisation: principe qui ne doit pas être prioritaire sur les autres

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a) Le principe du respect de l’autonomie

Les principes de l’éthique biomédicale

[Beauchamp et Childress]

�Nature de l’A:

- Auto-Nomos: se donner àsoi-même sa propre loi

- Deux conditions à l’A:

- Liberté (Absence de contraintes extérieures)

- Action - Capacité àagir intentionnellement

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a) Le principe du respect de l’autonomie

Les principes de l’éthique biomédicale

� Attention à ne pas imposer l’A: injonction à l’autonomie = néfaste

� Défense d’un DROIT DE CHOISIR (quelque soit le choix)

� Respect de l’A peut aussi passer par:

-Dire la vérité-Respecter l’intimité-Protéger la confidentialité de l’information-Obtention du consentement-Aider autrui s’il le demande

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a) Le principe du respect de l’autonomie

« Une personne autonome est une personne capable de réfléchir sur ses objectifs personnels et de décider par elle-même d’agir conformément à cette réflexion. Respecter l’autonomie c’est donner leur poids aux opinions et aux choix réfléchis des personnes autonomes tout en s’abstenant de faire obstacle à leur actions à moins que de façon évidente ces actions ne causent un préjudice aux autres. Manquer de respect envers une personne autonome c’est nier le fruit de ses réflexions ou refuser de lui fournir les renseignements pour porter un jugement réfléchi alors qu’aucune raison ne nous oblige à le faire. »

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a) Le principe du respect de l’autonomie

Avis du CCNE

2005 – n°87

« Refus de traitement et autonomie de la personne »

www.ccne-ethique.fr

Différenciation de trois aspects:

- Autonomie d’action

- Autonomie de pensée

- Autonomie de volonté

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a) Le principe du respect de l’autonomie

� A d’action: mouvement dans l’espace

� A de pensée: mener une argumentation réfléchie

� A de volonté:

- Autolimitation: maîtrise rationnelle de la sensibilité; résolution consciente et personnalisée

- Souveraineté individuelle: avoir des préférences et se déterminer en fonction de ces dernières [Donc en fonction d’une conception du BIEN qui nous est propre]

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b) Principe de bienfaisance

Rapport Belmont

� Assurer le bien-être

� ≠Bonté-Charité = OBLIGATION

� Deux règles de base:

- Ne pas faire mal

- Augmenter les avantages et réduire le plus possible les

torts

� Hippocrate – Claude Bernard [Médecin-Physiologiste/19ème siècle]

� Dans la recherche: Tension entre bien-être individuel et bien-être sociétal 21

b) Principe de bienfaisance

Les principes de l’éthique biomédicale

� Pour traiter les personnes d’une façon morale, il faut s’efforcer d’assurer leur bien-être »

� DEVOIR

� Vouloir le bien peut se heurter à des difficultés:

-Matérielles

-Conflits entre les principes

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c) Le principe de non-malfaisance

Les principes de l’éthique biomédicale

� Adage Hippocratique: Primum non nocere

� Balance avantages – inconvénients

� Exemple:

� -Faire une autre chimiothérapie (+: petit espoir d’amélioration)

� -Effets du traitement (-:souffrance, qualité de vie impactée, etc.)

� Où se situe la frontière entre bienfaisance et malfaisance?

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d) Le principe de justice

Rapport Belmont

� Justice définie par l’injustice

� - « Il y a une injustice lorsqu’un bienfait auquel une personne a droit lui est refusé sans raison, ou lorsqu’un fardeau lui est indûment imposé. »

� - Communauté de droits et de devoirs: référence à un système supérieur (la LOI)

� Par exemple: comment être juste dans la répartition du soin? 26

d) Le principe de justice

Oui, mais comment concevoir la justice?

- 5 formules:

-A chaque personne une part égale

-A chaque personne selon ses besoins particuliers

-A chaque personne selon ses efforts personnels

-A chaque personne selon ce qu’elle contribue à la société

-A chaque personne selon son mérite

-Importance du concept d’égalité--Principe qui demande de s’interroger sur la façon qu’ont

les hommes d’être égaux-

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Difficultés relatives au principisme1er problème 2ème problème

�Principe = généralité / cas = particulier

� Comment appliquer de la généralité à de la particularité?

�Problème dans l’applicabilité des principes

�Exemple de la Maladie d’Alzheimer (cf. suite)

� Existence de dilemmes éthiques (B et C)

� B et C qualifient ces principes de « prima facie » [obligation d’application]

� SAUF si, conflit avec un principe d’égal valeur

� Il existe des situations où les principes sont en conflit

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Difficultés relatives au principisme2ème problème (suite):

�Exemple: Greffe d’organes

� Pp de bienfaisance: tout le monde doit être greffé

� Pp de justice: critère de répartition équitable (le critère de l’urgence peut-il être considéré comme un critère juste?)

�Exemple: Maladie d’Alzheimer

� Pp de bienfaisance: « tout » gérer pour le patient pour assurer son bien-être

� Pp du respect de l’A: lui laisser un champ d’expression autonome

�Comment faire quand une situation appellent deux principes entrant en contradiction?

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Difficultés relatives au principisme� Beauchamp et Childress proposent deux solutions:

� Spécification des principes: les rendre plus adaptés aux cas particuliers

� Pondération des principes: leur donner plus ou moins de poids selon les situations [Difficulté à donner des règles à cette technique]

� [Pour aller plus loin sur ce sujet, cf. Raymond Massé, Ethique et santé publique, « Enjeux, valeurs et normativité]

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Indissociabilité de l’autonomie et de

la vulnérabilité- Paul RICOEUR-� Autonomie chez Ricœur [Soi-même comme un autre;

Parcours de la reconnaissance]

� Critère de la capacité

� DIRE

� FAIRE

� RACONTER SON RECIT

� SE SAVOIR L’AUTEUR DE SES ACTES

� La capacité est accompagnée de l’ombre de son négatif: incapacité

� Mémoire = oubli

� Promesse = trahison

� Etc. 32

Indissociabilité de l’autonomie et de

la vulnérabilité- Paul RICOEUR-� La capacité ne va pas sans son envers, l’incapacité

� Quel rapport entre autonomie [capacités] et vulnérabilité[négatif des capacités]? (Le Juste 2, « Autonomie et Vulnérabilité »)

� L’autonomie est d’emblée attribuable à chaque être(tout un

chacun est autonome) MAIS, elle est toujours menacée, DONC elle fait toujours l’objet d’une reconquête

C’est parce que l’homme est autonome, qu’il doit le devenir

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Indissociabilité de l’autonomie et de

la vulnérabilité- Paul RICOEUR-� L’homme capable sait dire, sait faire, se reconnaît comme

étant unique, sait qu’il est l’auteur de ses actes.

� Capacité: puissance

� Fragilité: puissance amoindrie

� Exemple de la capacité à « dire »: quelle fragilité?

� Non maîtrise du langage (handicap, maladie,…)

� Se croire incapable de dire (fragilisation par maladie, manque d’assurance,…)

� Manque d’approbation d’autrui (du soignant, du proche,…)

� Parler d’autonomie, c’est donc considérer que le sujet peut-être vulnérable mais que cela n’annule pas pour autant son autonomie [faisant l’objet d’une reconquête permanente]34

Du droit à l’éthique, comment faire au mieux?

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Quand un homme demande à mourir

Documentaire d’Anne Georget- 2011

� Michel, 53 ans, fait un AVC en 2008. Il en sort atteint d’un Locked-in-Syndrome.

� Aujourd’hui, 2011: Michel possède toute sa conscience et ses capacités intellectuelles sont intactes MAIS ne parle plus, ne mange plus et ne bouge aucune partie de son corps.

� Il réclame l’application de la Loi Leonetti: les traitements qui le maintiennent artificiellement en vie doivent être arrêtés

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Article L1110-5 CSP – Loi Léonetti

� Les actes de prévention, d’investigation ou de soins ne doivent pas être poursuivis par une obstination déraisonnable.

� Lorsqu’ils apparaissent inutiles, disproportionnés ou n’ayant d’autre effet que le seul maintien artificiel de la vie, ils peuvent être suspendus on ne pas être entrepris.

� Les professionnels de santé mettent tout en œuvre pour assurer à chacun une vie digne jusqu’à sa mort.

� Si le médecin constate qu’il ne peut soulager la souffrance d’une personne, en phase avancée ou terminale d’une affection grave et incurable, quelle qu’en soit la cause, qu’en lui appliquant un traitement qui peut avoir pour effet secondaire d’abréger sa vie, il doit en informer le malade… 38

� Introduction de la notion « d’obstination déraisonnable », de « dignité »

� Mais qui décide réellement ?

� Le malade ? La famille ? Le médecin ?

⇒dépend de l’autonomie de la volonté du malade

⇒S’il est hors d’état d’exprimer sa volonté : décision collégiale médicale après consultation de la famille

⇒S’il peut s’exprimer : Il décide, mais quid de son consentement éclairé ? Discussion ouvert…

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Quand un homme demande à mourir

Documentaire d’Anne Georget- 2011

� Michel est dépendant d’une sonde d’alimentation et d’une trachéotomie

� L’équipe médicale reste sourde à sa demande et applique soins et traitements que Michel ne désire plus.

Au regard du droit et de l’éthique, que penser de cette situation?

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Respect de l’autonomie:

Michel est-il autonome?

� Deux remarques:

- Michel a toutes ses facultés mentales

- Michel communique [alphabet ERASIN]

� Rapport Belmont- Beauchamp/Childress:

� Importance du choix réfléchi et personnel

⇒Pas d’influence extérieure (ni la famille – ni les soignants)

⇒Décision qui mûrit au fil des 3 années [Action conforme à la réflexion]; consentement éclairé

⇒Autonomie de pensée + autonomie de volonté41

Son autonomie est-elle respectée?

La famille

� Pas de coercition – respect de la liberté de choix [exemple de la trachéotomie]

� Soutien dans la décision de Michel malgré le caractère difficile du choix de mourir

� Reconnaissance de la capacité à décider malgré la vulnérabilité physique

� Malgré tout, peut-on parler d’une attitude rationnelle quand il est question de ses proches?

Les soignants

� Non respect du consentement de la personne pourtant légalement protégée par L1111-4 du CSP

� Priorisation de l’obligation de protéger la vie VS l’obligation de respecter le consentement de la personne

� Priorisation de l’autonomie de l’équipe soignante VSl’autonomie du patient

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La prise en charge est-elle bienfaisante?

� Telle qu’elle est effectuée

� La décision médicale n’est-elle pas prise en considération du bien-être de l’ équipe plutôt qu’en considération du bien-être du patient?

� Difficultés à s’accorder sur une conception du bien-être:

� L’équipe: maintenir la vie à tout prix - assurer les soins quotidiens

� Michel: arrêter les traitements qui le maintiennent en vie; dans la balance avantages/inconvénients, les inconvénients surpassent les avantages

� L’équipe en pensant assurer le bien-être de Michel, n’est-elle pas plus malfaisante que bienfaisante?

� Opposition entre qualité de vie (visée par Michel) et quantité de vie (recherchée par l’équipe)

� Dans la décision: primat de la conception du bien propre au patient par rapport à de celle de l’équipe

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La prise en charge est-elle bienfaisante?

� N’y avait il pas d’autres moyens d’être bienfaisant dans la prise en charge?

� Fallait-il donner l’espoir à Michel d’une réelle amélioration compte tenu des perspectives d’évolution? [cf. discours de sa femme]

� Quid de la gastrotomie et de la trachéotomie?

=> Réflexion générale sur les gestes médicaux à engager au nom d’une forme de bien-être… [Le pouvoir technique implique-t-il forcément le devoir?]

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En quoi l’impératif d’égalité est-il impacté

par la décision de l’équipe?

� Existence d’une loi valable pour tout un chacun [Lois de 2002 et 2005]

� MAIS, inexécution de cette loi au cas par cas: situation de Michel [refus de l’équipe de l’entendre]

=> Inégalité dans le rapport à la justice

=> à situation égale, traitement inégal [un autre patient, dans un autre lieu, avec une autre équipe pourrait voir sa volonté respectée]

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