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Mardi 27 septembre 2011 - 67 e année - N˚20740 - 1,50 ¤ - France métropolitaine - www.lemonde.fr --- Fondateur : Hubert Beuve-Méry - Directeur : Erik Izraelewicz Algérie 150 DA, Allemagne 2,00 ¤, Antilles-Guyane 2,00 ¤, Autriche 2,40 ¤, Belgique 1,50 ¤, Cameroun 1 500 F CFA, Canada 4,25 $, Côte d’Ivoire 1 500 F CFA, Croatie 18,50 Kn, Danemark 25 KRD, Espagne 2,00 ¤, Finlande 2,50 ¤, Gabon 1 500 F CFA, Grande-Bretagne 1,50 £, Grèce 2,20 ¤, Hongrie 700 HUF, Irlande 2,00 ¤, Italie 2,20 ¤, Luxembourg 1,50 ¤, Malte 2,50 ¤, Maroc 10 DH, Norvège 25 KRN, Pays-Bas 2,00 ¤, Portugal cont. 2,00 ¤, Réunion 1,90 ¤, Sénégal 1 500 F CFA, Slovénie 2,20 ¤, Suède 30 KRS, Suisse 3,00 CHF, Tunisie 2,00 DT, Turquie 6,00 TL, USA 3,95 $, Afrique CFA autres 1 500 F CFA, L a gauche a beau avoir rem- porté, dimanche 25 septem- bre, la majorité des sièges au Palais du Luxembourg, le Sénat n’en reste pas moins « une anoma- lie parmi les démocraties ». La for- mule avait été employée, en 1998, par le premier ministre, le socialis- te Lionel Jospin. A l’époque, elle avait beaucoup choqué, à droite. Elle reste juste, pour l’essentiel. Qu’il ait fallu attendre plus d’un demi-siècle pour que s’y pro- duise une alternance entre les deux grands courants politiques nationaux témoigne assez qu’il s’agit là d’une exception, inimagi- nable il y a peu encore. Et pour cause. Non seulement le mode de renouvellement par- tiel de la seconde Chambre du Par- lement – hier par tiers tous les trois ans, depuis 2003 par moitié – amortit efficacement les évolu- tions politiques du pays. Mais sur- tout, le mode de scrutin des séna- teurs surreprésente de façon stu- péfiante la France que l’on quali- fie de « profonde » : plus volon- tiers conservateurs ou modérés, les milliers de villages, de petits bourgs et de communes de moins de 9 000 habitants représentent la moitié de la population françai- se, mais fournissent près de 70 % des « grands électeurs » sénato- riaux. La France urbaine, tradition- nellement plus à gauche, souffre donc, au Sénat, d’un handicap structurel. Pour le surmonter, la gauche aura dû attendre une conjonction d’astres exceptionnelle : une suc- cession de victoires dans les élec- tions locales depuis dix ans, en particulier aux municipales ; une lente mutation du monde rural, ou plutôt rurbain, qui en modifie peu à peu la sociologie électorale ; des divisions et dissidences à droi- te ; une grogne sourde des élus locaux, y compris à droite, contre la réforme des collectivités territo- riales imposée à la hussarde par le gouvernement ; enfin le discrédit profond qui touche l’actuelle majorité et son chef, le président de la République. Le bouclier électoral dont la droite a si longtemps bénéficié au Palais du Luxembourg reste donc parfaitement anormal. Le Sénat est chargé par la Constitution d’as- surer « la représentation des collec- tivités locales ». Que la gauche ait dû patienter, pour y être majori- taire, de diriger vingt et une régions sur vingt-deux, soixante départements sur cent et la majo- rité des communes de plus de 9000 habitants témoigne, pour le moins, d’un déséquilibre. Le « comité Balladur », chargé en 2007 de réfléchir à la réforme des institutions, avait entrouvert la porte en recommandant de mieux tenir compte de la démo- graphie locale dans la répartition des électeurs sénatoriaux. Les sénateurs s’y étaient alors oppo- sés. Si la gauche revient au pou- voir en 2012, elle sera bien avisée d’engager cette réforme. Non pas pour remettre en cau- se le principe même d’une secon- de Chambre : plus tempéré, sou- vent plus solide et sérieux dans ses travaux, meilleur défenseur des libertés publiques, le Sénat constitue un contrepoids utile aux emballements de l’Assemblée nationale. Mais pour assurer au pays et à sa représentation parle- mentaire une véritable équité politique et une meilleure respira- tion démocratique. p L orsque Nicolas Sarkozy a été élu pré- sident de la République, en 2007, la droite détenait 203 sièges au Sénat, contre 128 à la gauche. A l’époque, la seconde Chambre semblait immuable- ment ancrée à droite. Quatre ans plus tard, la majorité prési- dentielle a perdu successivement les élec- tions municipales, cantonales et régiona- les. Et, pour la première fois depuis les débuts de la V e République, la gauche rem- porte la majorité au Sénat. Un séisme. La gauche détient désor- mais, après le renouvellement de la moi- tié des sièges au Palais du Luxembourg, dimanche 25 septembre, 177 sièges sur 348 : pratiquement 50 sièges gagnés en l’espace de quatre ans, dans cette Cham- bre qui a la réputation d’amortir les mou- vements politiques. Cela donne la mesure du désaveu qui frappe aujourd’hui M. Sarkozy et le parti qui l’a porté au pou- voir : l’UMP, qui détenait la majorité abso- lue jusqu’en 2004, est retombée à 124 siè- ges, soit à peine plus d’un tiers. Un tel renversement semblait difficile- ment imaginable. Il fallait à la gauche enregistrer un gain de 23 sièges pour faire basculer la majorité dimanche, elle en a conquis 25. Les manifestations de joie à gauche, dimanche soir, dans un Sénat qui n’avait jamais connu telle fièvre, n’en furent que plus exubérantes, tandis qu’à l’UMP, en revanche, l’ambiance était fran- chement sinistre. Dès la mi-journée, alors que commençaient à tomber les résultats des premiers tours dans les départements élisant leurs sénateurs au scrutin majoritaire, l’UMP avait vu se pro- filer le spectre de la défaite. Une « réunion d’urgence » était alors convoquée rue La Boétie, au siège du parti présidentiel, pour tenter de dresser un contre-feu. Département par département, là où c’était encore possible, l’UMP essayait de dissuader les candidats dissidents de se maintenir au second tour. Patrick Roger aLire la suite page 10 et pages 11 à 13 Crise Les ministres du travail du G20, réunis lundi 26 et mardi 27 septembre à Paris, prônent la création d’un socle de protection sociale pour amortir les conséquences humaines de la crise et participer à une mondialisation plus juste. Le rapport Bachelet considère cet objectif nécessaire et accessible. Page 8 Lobbying « Le Monde » a pu consulter les documents découverts par les enquêteurs dans le secrétariat particulier du patron des laboratoires Servier. Politiques et hauts fonctionnaires avaient leur fiche. P. 14 Les intrigues de Jacques Servier A près avoir enrichi les édi- tions du journal de fin de semaine, nous vous propo- sons aujourd’hui un Monde plus chaud, plus clair et plus agréable à lire. Après le grand récit du jour de la page 2, le début du quotidien vous fait directement entrer dans l’actualité. Pour Le Monde, celle-ci est d’abord internationale. Le quotidien est organisé autour de quatre piliers : Interna- tional (avec Planète et Europe), France (Politique et Société), Eco- nomie, Culture. Puis viennent les espaces de décryptage (Analyses, Débats et Enquête), avant les pages consacrées au sport et à la vie pratique. L’actualité du Web est répartie dans le journal. De nouvelles chroniques, en écono- mie notamment, viennent com- pléter celles que vous appréciez déjà. Bonne lecture. p E. I. Libye L’Armée nationale de libération diffère l’assaut final sur le fief des fidèles de Mouammar Kadhafi, alors que la plupart des habitants sont encore en ville. Selon le colonel Abdel Salam Jadalla (photo), commandant du front est, les combattants kadhafistes reclus dans Syrte sont désorganisés mais très déterminés. Page 3 Election Va-t-il afficher une longévité supérieure à celle de Leonid Brejnev, resté dix-huit ans au Kremlin ? Le premier ministre Vladimir Poutine a annoncé qu’il briguerait en 2012 un nouveau mandat de président de la Fédération. Le président Medvedev deviendrait son premier ministre. Page 5 Le Sénat à gauche, nouvelle donne pour 2012 Education Cinq syndicats d’enseignants des établissements catholiques s’associent à la journée d’action de l’éducation nationale, mardi 27 septembre. Ils réclament l’arrêt des suppressions de postes. P. 15 Editorial La prise de Syrte retardée par 1 500 jusqu’au-boutistes L’école privée aussi appelle à la grève Le socle de protection sociale, l’autre enjeu du G20 A nos lecteurs « Le Monde Economie » Vladimir Poutine décidé pour un nouveau règne en Russie t Cette victoire de l’opposition à la seconde Chambre est une première depuis 1958 t Le PS y voit un score « prémonitoire » de celui de 2012 et le « premier acte de la reconquête » t Pour la première fois, les élus Verts sont en position de former un groupe politique au Sénat t Gérard Larcher maintient sa candidature à la présidence lors de l’élection du 1 er octobre Le Palais du Luxembourg reste une « anomalie » t La gauche a porté à 177 le nombre de ses sénateurs, soit 2 de plus que la majorité absolue UK price £ 1,50 Les arguments anti-euro passés au crible Supplément Le regard de Plantu

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Mardi 27 septembre 2011 - 67e année - N˚20740 - 1,50 ¤ - France métropolitaine - www.lemonde.fr --- Fondateur : Hubert Beuve-Méry - Directeur: Erik Izraelewicz

Algérie 150 DA, Allemagne 2,00 ¤, Antilles-Guyane 2,00 ¤, Autriche 2,40 ¤, Belgique 1,50 ¤, Cameroun 1 500 F CFA, Canada 4,25 $, Côte d’Ivoire 1 500 F CFA, Croatie 18,50 Kn, Danemark 25 KRD, Espagne 2,00 ¤, Finlande 2,50 ¤, Gabon 1 500 F CFA, Grande-Bretagne 1,50 £, Grèce 2,20 ¤, Hongrie 700 HUF, Irlande 2,00 ¤, Italie 2,20 ¤, Luxembourg 1,50 ¤, Malte 2,50 ¤,Maroc 10 DH, Norvège 25 KRN, Pays-Bas 2,00 ¤, Portugal cont. 2,00 ¤, Réunion 1,90 ¤, Sénégal 1 500 F CFA, Slovénie 2,20 ¤, Suède 30 KRS, Suisse 3,00 CHF, Tunisie 2,00 DT, Turquie 6,00 TL, USA 3,95 $, Afrique CFA autres 1 500 F CFA,

L a gauche a beau avoir rem-porté, dimanche 25 septem-bre, la majorité des sièges au

Palais du Luxembourg, le Sénatn’en reste pas moins « une anoma-lie parmi les démocraties ». La for-mule avait été employée, en 1998,par le premier ministre, le socialis-te Lionel Jospin. A l’époque, elleavait beaucoup choqué, à droite.Elle reste juste, pour l’essentiel.

Qu’il ait fallu attendre plusd’un demi-siècle pour que s’y pro-duise une alternance entre lesdeux grands courants politiquesnationaux témoigne assez qu’ils’agit là d’une exception, inimagi-nable il y a peu encore.

Et pour cause. Non seulementle mode de renouvellement par-tiel de la seconde Chambre du Par-lement – hier par tiers tous lestrois ans, depuis 2003 par moitié– amortit efficacement les évolu-tions politiques du pays. Mais sur-

tout, le mode de scrutin des séna-teurs surreprésente de façon stu-péfiante la France que l’on quali-fie de « profonde » : plus volon-tiers conservateurs ou modérés,les milliers de villages, de petitsbourgs et de communes de moinsde 9 000 habitants représententla moitié de la population françai-se, mais fournissent près de 70 %des « grands électeurs » sénato-

riaux. La France urbaine, tradition-nellement plus à gauche, souffredonc, au Sénat, d’un handicapstructurel.

Pour le surmonter, la gaucheaura dû attendre une conjonctiond’astres exceptionnelle : une suc-cession de victoires dans les élec-tions locales depuis dix ans, enparticulier aux municipales ; une

lente mutation du monde rural,ou plutôt rurbain, qui en modifiepeu à peu la sociologie électorale ;des divisions et dissidences à droi-te ; une grogne sourde des éluslocaux, y compris à droite, contrela réforme des collectivités territo-riales imposée à la hussarde par legouvernement; enfin le discréditprofond qui touche l’actuellemajorité et son chef, le présidentde la République.

Le bouclier électoral dont ladroite a si longtemps bénéficié auPalais du Luxembourg reste doncparfaitement anormal. Le Sénatest chargé par la Constitution d’as-surer « la représentation des collec-tivités locales ». Que la gauche aitdû patienter, pour y être majori-taire, de diriger vingt et unerégions sur vingt-deux, soixantedépartements sur cent et la majo-rité des communes de plusde 9000 habitants témoigne,

pour le moins, d’un déséquilibre.Le « comité Balladur », chargé

en 2007 de réfléchir à la réformedes institutions, avait entrouvertla porte en recommandant demieux tenir compte de la démo-graphie locale dans la répartitiondes électeurs sénatoriaux. Lessénateurs s’y étaient alors oppo-sés. Si la gauche revient au pou-voir en 2012, elle sera bien aviséed’engager cette réforme.

Non pas pour remettre en cau-se le principe même d’une secon-de Chambre : plus tempéré, sou-vent plus solide et sérieux dansses travaux, meilleur défenseurdes libertés publiques, le Sénatconstitue un contrepoids utileaux emballements de l’Assembléenationale. Mais pour assurer aupays et à sa représentation parle-mentaire une véritable équitépolitique et une meilleure respira-tion démocratique. p

L orsque Nicolas Sarkozy a été élu pré-sident de la République, en 2007, ladroite détenait 203 sièges au Sénat,

contre 128 à la gauche. A l’époque, laseconde Chambre semblait immuable-ment ancrée à droite.

Quatre ans plus tard, la majorité prési-dentielle a perdu successivement les élec-tions municipales, cantonales et régiona-les. Et, pour la première fois depuis les

débuts de la Ve République, la gauche rem-porte la majorité au Sénat.

Un séisme. La gauche détient désor-mais, après le renouvellement de la moi-tié des sièges au Palais du Luxembourg,dimanche 25 septembre, 177 sièges sur348 : pratiquement 50 sièges gagnés enl’espace de quatre ans, dans cette Cham-bre qui a la réputation d’amortir les mou-vements politiques. Cela donne la mesure

du désaveu qui frappe aujourd’huiM. Sarkozy et le parti qui l’a porté au pou-voir : l’UMP, qui détenait la majorité abso-lue jusqu’en 2004, est retombée à 124 siè-ges, soit à peine plus d’un tiers.

Un tel renversement semblait difficile-ment imaginable. Il fallait à la gaucheenregistrer un gain de 23 sièges pour fairebasculer la majorité dimanche, elle en aconquis 25. Les manifestations de joie à

gauche, dimanche soir, dans un Sénat quin’avait jamais connu telle fièvre, n’enfurent que plus exubérantes, tandis qu’àl’UMP, en revanche, l’ambiance était fran-chement sinistre. Dès la mi-journée,alors que commençaient à tomber lesrésultats des premiers tours dans lesdépartements élisant leurs sénateurs auscrutin majoritaire, l’UMP avait vu se pro-filer le spectre de la défaite. Une « réunion

d’urgence » était alors convoquée rue LaBoétie, au siège du parti présidentiel,pour tenter de dresser un contre-feu.

Département par département, là oùc’était encore possible, l’UMP essayait dedissuader les candidats dissidents de semaintenir au second tour.

Patrick RogeraLire la suite page10

et pages 11 à 13

Crise Les ministres du travaildu G20, réunis lundi 26et mardi 27 septembre à Paris,prônent la création d’unsocle de protection socialepour amortir les conséquenceshumaines de la criseet participer à unemondialisation plus juste.Le rapport Bachelet considèrecet objectif nécessaireet accessible. Page8

Lobbying « Le Monde » a pu consulter les documentsdécouverts par les enquêteurs dans le secrétariatparticulier du patron des laboratoires Servier. Politiqueset hauts fonctionnaires avaient leur fiche. P.14

LesintriguesdeJacquesServier

A près avoir enrichi les édi-tions du journal de fin desemaine, nous vous propo-

sons aujourd’hui un Monde pluschaud, plus clair et plus agréable àlire. Après le grand récit du jour dela page 2, le début du quotidienvous fait directement entrer dansl’actualité. Pour Le Monde, celle-ciest d’abord internationale.

Le quotidien est organiséautour de quatre piliers : Interna-tional (avec Planète et Europe),France (Politique et Société), Eco-nomie, Culture. Puis viennent lesespaces de décryptage (Analyses,Débats et Enquête), avant lespages consacrées au sport et à lavie pratique. L’actualité du Webest répartie dans le journal. Denouvelles chroniques, en écono-mie notamment, viennent com-pléter celles que vous appréciezdéjà. Bonne lecture. p E. I.

Libye L’Armée nationalede libération diffère l’assautfinal sur le fief des fidèles deMouammar Kadhafi, alorsque la plupart des habitantssont encore en ville. Selon lecolonel Abdel Salam Jadalla(photo), commandant dufront est, les combattantskadhafistes reclus dans Syrtesont désorganisés mais trèsdéterminés. Page3

Election Va-t-il afficherune longévité supérieureà celle de Leonid Brejnev,resté dix-huit ans auKremlin ? Le premier ministreVladimir Poutine a annoncéqu’il briguerait en 2012un nouveau mandat de

président de la Fédération.Le président Medvedevdeviendrait son premierministre. Page5

LeSénatàgauche,nouvelledonnepour2012

Education Cinq syndicats d’enseignants desétablissements catholiques s’associent à la journéed’action de l’éducation nationale, mardi 27 septembre.Ils réclament l’arrêt des suppressions de postes. P.15

Editorial

LaprisedeSyrteretardéepar1500jusqu’au-boutistes

L’écoleprivéeaussiappelleàlagrève

Lesocledeprotectionsociale,l’autreenjeuduG20

Anos lecteurs

«LeMondeEconomie»

VladimirPoutinedécidépourunnouveaurègneenRussie

t Cette victoire del’opposition à la secondeChambre est unepremière depuis 1958

t Le PS y voit un score«prémonitoire » de celuide 2012 et le « premieracte de la reconquête »

t Pour la première fois,les élus Verts sont enposition de former ungroupe politique au Sénat

t Gérard Larchermaintient sa candidatureà la présidence lors del’élection du 1er octobre

Le Palais du Luxembourg reste une «anomalie»

t La gauche a portéà 177 le nombre de sessénateurs, soit 2 de plusque la majorité absolue

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1,50

Les argumentsanti-europassés au cribleSupplément

Leregard dePlantu

Les indégivrables Xavier Gorce

Société éditrice du « Monde » SAPrésident du directoire, directeur de la publication Louis DreyfusDirecteur du « Monde », membre du directoire, directeur des rédactions Erik Izraelewicz

Secrétaire générale du groupe Catherine SueurDirecteurs adjoints des rédactions Serge Michel, Didier PourqueryDirecteurs éditoriaux Gérard Courtois, Alain Frachon, Sylvie KauffmannRédacteurs en chef Eric Béziat, Sandrine Blanchard, Luc Bronner, Alexis Delcambre,Jean-Baptiste Jacquin, Jérôme Fenoglio, Marie-Pierre Lannelongue (« M Le magazine du Monde »)Chef d’édition Françoise TovoDirecteur artistique Aris PapathéodorouMédiateur Pascal GalinierDirecteur du développement éditorial Franck NouchiConseil de surveillance Pierre Bergé, président. Gilles van Kote, vice-président

0123est édité par la Société éditrice du « Monde » SADurée de la société : 99 ans à compter du 15 décembre 2000. Capital social : 149 017 497 ¤. Actionnaire principal : Le Monde SA.

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Portrait Le président du Conseil européen devrait être élu à la têtedes sommets de la zone euro et pourrait aussi prendre la présidencede l’Eurogroupe. «Mister Nobody» devient l’homme fort de l’Europe

HermanVan Rompuy, le stratègequiveut resteranonyme

BruxellesBureau européen

Jeudi 29 octobre 2009, à Bruxelles. Unhomme traverse le hall du Juste Lip-se, siège du Conseil européen, peupléde centaines de journalistes venussuivre un sommet. C’est Herman VanRompuy, à l’époque premier minis-

tre belge. Presque personne ne le recon-naît. Il désamorce deux questions sur sonavenir et s’en va boire une bière dans unbar voisin. Trois semaines plus tard, cepolitique que les caricaturistes de sonpays aimaient à dessiner en chanoinedeviendra le premier président perma-nent du Conseil européen.

Depuis, Barack Obama ne l’a toujourspas appelé, mais « HVR » est parvenu à sefaire une place à part parmi les dirigeantseuropéens. Il devrait accroître encore sonrayon d’action et être élu à la tête des som-

mets de la zone euro, lors de la prochaineréunion des chefs d’Etat et de gouverne-ment, les 17 et 18 octobre. Angela Merkel lepousse même à prendre la présidence del’Eurogroupe, qui rassemble les ministresdes finances, pour remplacer un Jean-Claude Juncker éreinté. Les deux hommesétaient déjà rivaux, et seuls candidatsdéclarés à la présidence du Conseil euro-péen, le 19 novembre 2009, le jour oùM. Van Rompuy a été désigné, donnant àla presse anglaise l’occasion de titrer sur« Mr. Nobody ». Ceux qui espéraient don-ner un visage à l’Europe en furent pourleurs frais.

En fait, l’anonymat ne le dérange pas. Ille revendique. « Notre temps a besoin desimplicité », expliquait-il il y a quelquesmois, lors de la présentation de son recueilde haïkus, ces courts poèmes japonaisdont il raffole. Le président du Conseil fuitles caméras et les micros, hormis peut-être ceux que lui tendent des journalistesflamands. Question de caractère pour cesexagénaire que l’un de ses ex-collèguesbelges décrit comme « un bon vivant cachédans un cierge ». C’est aussi par choix tacti-que : pour lui, un président trop visibleserait incapable d’insuffler ce qu’il l’appel-

le « l’esprit de club » entre les chefs d’Etat etde gouvernement. Ce qui ne l’empêchepas de rencontrer régulièrement, et « offthe record » (micros coupés et stylosposés), les correspondants à Bruxelles ou,comme lors d’un récent déplacement àLondres, de visiter les rédactions du Finan-cial Times et de Reuters, pour se faireconnaître… sans donner d’interview.

A ses débuts, M. Van Rompuy neconnaissait pas vraiment ses collègues. Ils’astreint alors à multiplier les voyagespour les rencontrer un à un. Cela lui per-met, confie-t-il, de « comprendre leurs pro-blèmes» pour mieux identifier les pointsdeblocage.Parfois, il luiarrive aussi de ren-dre un petit service : récemment, il a ainsireçu à l’improviste, à Bruxelles, le prési-dent du conseil italien, Silvio Berlusconi,qui souhaitait échapper à un interrogatoi-re relatif au scandale sur ses frasquessexuelles. « Il est très intelligent, mais sansvision. Il a pris ses distances avec les posi-tions traditionnelles de la Belgique enfaveurd’une Europecommunautaire », cri-tique un ancien membre du Conseil.

M. Van Rompuy a dû jouer des coudesvis-à-vis de José Manuel Barroso, sur ladéfensive et cherchant à protéger le droitd’initiativede laCommission,qu’ilpréside.Lesdeuxdirigeantssesontpartagélesrôlespour représenter l’Europe au G20 et au G8,après des heures de tractations entre leursconseillers. Une course-poursuite s’est ins-taurée entre leurs institutions: au nom dela Commission, M.Barroso s’était dépêchéde dévoiler ses propositions sur la réformedu pacte de stabilité, voici un an, avant quele président duConseil n’achève les consul-tations sur la même question engagées à lademande de ses pairs.

Face à l’urgence, Herman Van Rompuya d’ailleurs dû se concentrer sur la gestionde la crise de la zone euro, quitte à moinss’investir sur la scène internationale, dontraffole M. Barroso. Alors que la diplomatieeuropéenne conduite par Catherine Ash-ton reste dans les limbes, les sommetsavec les pays tiers, que préside M. VanRompuy, n’ont pas le même enjeu. Sous lapression des événements, le président duConseil a déjà pris l’habitude de réunirrégulièrement Jean-Claude Trichet (prési-dent de la Banque centrale européenne),Jean-Claude Juncker et José Manuel Barro-so afin de réduire un peu la cacophoniequi panique tant les marchés. Sans engénéral parvenir, faute d’une autorité suf-fisamment forte, à empêcher les politi-

ques demultiplier les déclarations,enAlle-magne en particulier.

« Son problème est qu’il est trop du côtédes présumés forts, critique Daniel Cohn-Bendit, coprésident des Verts au Parle-ment européen. C’est un courtier honnêtequi ne sait pas donner les impulsions. »

Herman Van Rompuy, lui, se défendd’être l’homme du directoire franco-alle-mand. A ses yeux, un compromis entre lesdeux grands de la zone euro est indispen-sable, mais jamais suffisant. Quand leurcomplicité est perçue comme trop « arro-gante», elle peut au contraire compliquerles choses. Le président garde un mauvaissouvenir du compromis de Deauville,quand Français et Allemands s’étaient misd’accord, dans son dos, en octobre 2010,sur la réforme du pacte de stabilité et decroissance. Ce jour-là, M. Sarkozy avaitrepris à son compte l’exigence de Mme Mer-kel d’associer le secteur privé au sauveta-ge des pays en détresse. Une porte ouverteà la restructuration des dettes qui avaitprécipité le naufrage de l’Irlande. « Iln’estpas le notaire des deux principaux action-naires, affirme Jean-Claude Juncker, il nesecontentepasde consulterseulementMer-kel et Sarkozy. »

Le chrétien-démocrate belge est pour-tant très proche de Nicolas Sarkozy, endépit de la différence évidente de styleentre les deux hommes. C’est un Français,Pierre de Boissieu, ancien secrétaire géné-ral du Conseil européen, qui a convaincul’Elysée de soutenir sa candidature, alorsqu’il devenait évident que Tony Blair, lepremier choix de M. Sarkozy, ne seraitjamais désigné. La directrice adjointe desoncabinet estuneénarque, Odile Renaud-Basso, en charge des affaires économi-ques. Une ancienne du Trésor que Nicolas

Sarkozy appelle « Madame Odile ».Autre signe de cette proximité : M. Van

Rompuyapoussédiscrètementla candida-ture de Christine Lagarde à la tête du FMI,alors quele chef de l’Etat était encore réser-vé sur la question après la démission deDominique Strauss-Kahn, en mai. En licepour un second mandat, mi-2012, M. VanRompuy suit d’ailleurs de très près la viepolitique française : avant l’été, il a déjeu-né avec François Hollande à Bruxelles.

Ilest ainsi,«HVR».Finstratège,toujourscandidat « à rien », prétendument guidépar le hasard, il prépare sans cesse le coupd’après, quitte à flinguer d’un mot sesrivaux. Ceux qui le connaissent bien disentque derrière sa vraie modestie se cachentun caractère bien trempé et une volonté defer. Adepte fervent du consensus, de lanégociation, il sait aussi trancher. « Aveccynisme s’il le faut, sans générosité si celas’impose», ironise un de ses anciens amis.

A 63 ans, le président du Conseil euro-péen soigne en Belgique la popularité quelui a valu son bref passage à la tête du gou-vernement, en 2009. Il n’a rien résolu à lacrise institutionnelle mais est parvenu àcalmer les esprits, ce qui a suffi à le trans-former en sauveur de la Nation. Le roiAlbert II l’apprécie tout particulièrementet pense sans doute que s’il avait conservéson poste il aurait évité au pays son inter-minable crise politique.

Mais le « hasard» l’a conduit ailleurs. Le«destin»,dirait-il plutôt.L’ancienélèvedescollèges jésuites et de l’Université catholi-que de Louvain ne croit pas vraiment quel’homme décide seul de son sort. S’il a per-du la foi à l’adolescence, il l’a retrouvée lorsde retraites dans des abbayes ou dans seslectures.C’est elle, sans doute, qui le pousseà penser que, sur terre, rien d’autre que lavie et la mort ne sont réellement impor-tants. Sauf l’Europe. p

Philippe Ricardet Jean-Pierre Stroobants

Les Hongrois appelésà secompteret à fairedesbébés

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Président : Louis DreyfusDirectrice générale :Corinne Mrejen

Pourlui, unprésident trop visibleseraitincapable d’insufflercequ’il

appelle«l’esprit declub» entreleschefs d’Etat etde gouvernement

Toujourscandidat«àrien», prétendument

guidépar le hasard,ilprépare sans cesse

lecoup d’aprèsHermanVan Rompuy,

lors d’uneconférence

de presseau sommet

européende Bruxelles,le 28 octobre2010. WIKTOR

DABKOWSKI/ZUMA/REA

C ’est une belle brune, vêtueseulement d’une culotterouge et de bas noirs. Dans

une main, elle tient un fouet, del’autre, elle cache ses seins nus.Cette aguichante créature ne sortpas d’un film sur les maisons clo-ses, mais d’une vidéo de 44 secon-des commandée par le Bureaucentral des statistiques en Hon-grie (KSH). Postée sur les réseauxsociaux, elle prétend encouragerles jeunes à répondre par voieélectronique au questionnaireduprochain recensement – s’ilsne veulent pas être dérangés parun agent sonnant à leur porte,comme l’héroïne du clip.

A partir du 1er octobre, durantun mois, quelque 37 000 agentsrecenseurs vont parcourir le terri-toire hongrois afin de recueillirdes données sur la population.Un soin particulier sera accordéaux minorités ethniques, notam-ment aux Roms, qui seraient de700 000à 800 000, sur environ10millions d’habitants. On esti-me que les deux tiers de cettecommunauté ne s’étaient pasdéclarés comme tels lors du der-nier recensement, en 2001, decrainte d’être stigmatisés. L’admi-nistration fait valoir qu’elle abesoin de statistiques précisespour mieux lutter contre les dis-criminations.

La démographie est un thèmesensible en Hongrie. La faiblefécondité de la population magya-re (un enfant par femme), quicontraste avec celle des Tziganes,trois fois plus élevée, obsède l’op-position d’extrême droite, autantque la droite au pouvoir. Dansl’espoir de relancer la natalité, legouvernement du conservateurViktor Orban a introduit uneréforme fiscale favorable auxfamilles des couches moyennes,

et gratifie désormais toutes lesaccouchées d’une décoration enforme de cœur, qu’elles sont invi-tées à accrocher fièrement à l’en-trée de leur maison, dès leurretour de la maternité.

Il n’est pas encore question demédailles pour les mères méritan-tes, mais l’équipe de M. Orbanassume souvent une rhétorique« rétro », sans crainte des compa-raisons avec les années 1930. Lanouvelle Constitution hongroise,adoptée en avril, est trufféede phrases à la gloire du travail,de la famille et de la patrie.«Les valeurs fondamentales quiassurent notre cohésion, souligneson préambule, sont la fidélité,lafoi et l’amour. »

Les autels de la ConstitutionDepuis le 1er septembre, ce tex-

te est obligatoirement exposédans toutes les mairies du pays,selon les consignes pointilleusesdictées par le secrétariat d’Etatchargé de l’administration régio-nale : il faut une table « décorée »et recouverte d’une plaque de ver-re, un « cordon aux couleursnationales », une chaise pour quechaque citoyen puisse feuilleterà l’aise le document et unemployé pour surveiller le tout(il y a déjà eu au moins deux« attentats » au ketchup contre ceque la presse appelle les « autelsde la Constitution »).

Sur Internet, des esprits facé-tieux ont fait circuler une faussepublicité Ikea, proposant un kitd’ameublement « Constitution»à prix modique, vase de fleursinclus. Comme à l’époque com-muniste, la Hongrie mal pensan-te se défend du discours officielavec les armes de la dérision.p

Joëlle Stolz(Autriche, correspondante)

0123Mardi 27 septembre 2011

international

Thierry CruvellierLe maîtredes aveux

présente

« Thierry Cruvellier fonde son ouvrage surune attention infaillible, presque impartialeet d’autant plus accablante. Un livre d’unequalité exceptionnelle. »Pierre Pachet, Le Monde

« Avec en arrière-plan l’histoire contempo-raine du Cambodge, ce saisissant récit faitentendre la parole des victimes, celle aussi,insupportable, du bourreau. »Nathalie Crom, Télérama

«Unrécit exceptionnel, infiniment troublant. »Marie-Françoise Leclère, Le Point

Des membres des forces rebelles, sur le front oriental de Syrte, dimanche 25 septembre. ENRICO DAGNINO POUR « LE MONDE »

Entretien

Aux portes de Syrte (Libye)Envoyée spéciale

L e colonel Abdel Salam Jadallaest, depuis le 12 avril 2011, lecommandant en chef de l’Ar-

mée nationale de libération libyen-ne sur le front est de Syrte. Ce sontses hommes qui mèneront l’atta-que finale dans le centre de Syrtecontre les forces de MouammarKadhafi, appuyés par les brigadesrévolutionnaires constituées decivils en arme.

Sous l’ancien régime, le colonelAbdel Salam Jadalla a servi pen-dant trente et un ans comme géné-ral,membredes forcesspéciales,del’armée régulière libyenne. Il étaitbasé à Benghazi le 15février, lors dusoulèvement de la ville. Il nous areçus dans le Musée de Syrte, situéà 30km à l’est du centre-ville.Syrte est aujourd’hui encerclée,qu’est-ce qui retarde l’entréedes troupes?

Nous coordonnons nos actionsavec les combattants de l’ouest [engrande majorité constitués desrebelles de la ville de Misrata]. Nousentrerons ensemble dans la ville.Mais sur le front est, nous avonspris du retard. Il y avait devantnous beaucoup de hameaux enco-re habités. A chaque fois que nousarrivons dans l’un d’entre eux,nous établissons un contact avecun cheikh ou un représentant.Quel type de négociationsmenez-vous avec eux?

Nous leur laissons la possibilitéde quitter les lieux. Hormis lesKadhafa (tribu de Kadhafi), il y atrois tribus dans la zone : les Fur-jan, les Hamamsala et les Maadanqui sont sur la ligne de front. Nousles prévenons qu’il va y avoir descombats à l’arme lourde, leurdisons de ne pas essayer de se bat-tre contre nous, qu’ils ne sont pasnos ennemis. Ils pourront rentrerchez eux plus tard. Mais beau-coup n’ont plus essence ni nourri-ture, cela complique leur évacua-tion.Les forces kadhafistes retran-chées dans le centre-ville n’ont

plus aucune chance de s’en sor-tir. Comment expliquer leurrésistance acharnée?

Vendredi [23 septembre], nousavons capturé le radio et le chauf-feur du général Mousbah AbdelHafez, cousin de Kadhafi etex-commandant en chef de la vil-le de Brega. Je leur ai posé la ques-tion. La grande majorité des com-battants à l’intérieur de Syrte sontdes officiers, des chefs des servi-ces de sécurité, des responsablesdes anciens comités révolution-naires. Des hommes qui ont prisune part active dans la répressiondu soulèvement de février, des cri-minels qui ont beaucoup de sanglibyen sur les mains. Ils saventque s’ils ne meurent pas au com-bat, ils seront jugés pour ces cri-

mes et qu’au bout du compte, c’estla mort qui les attend.Combien sont-ilset de quellesforces disposent-ils encore?

Selon nos informations, ils sont1 500 hommes. Aujourd’hui, ilscontrôlent le centre-ville parpetits groupes, qui ont perdu lecontact les uns avec les autres. Ilsn’ontplus de commandementcen-tralisé. Nous savons avec certitudequeMouatassim [undesfils duGui-de libyen] est à l’intérieur et qu’ilcircule de groupe en groupe. Maisen fait, il ne dirige plus rien dutout. Ils possèdent encore de gros-ses quantités de missiles, deroquettes, de toutes sortes demunitions. Mais ils n’ont plusbeaucoup de machines pour leslancer. Sur le front de l’est, ils en

ont quarante. Et leurs hommes nesont plus si nombreux.Si c’est la certitude de mourirqui prolonge les combats, pour-quoi ne pas proposer une amnis-tie?

Nous leur avons proposé de serendre, d’assurer leur sécurité jus-qu’à la prison. Le reste n’est pas denotre ressort, à nous les militaires.Cela dépend ensuite de la décisiondu Conseil national de transition(CNT), de la cour de justice, du peu-ple libyen.Que savez-vous des civils à l’inté-rieurde Syrte?

La plupart des habitants s’ytrouvent encore. Syrte est diviséeen plusieurs quartiers correspon-dant grosso modo à chacune destribus. Les kadhafistes contrôlent

les issues, ont établi des check-points dans les rues, interdisent lessorties. Plus on s’approche, plus ilsera possible d’établir des contactsavec les civils et plus ils auront dechance de pouvoir s’enfuir.

Nous pourrions rentrer rapide-ment dans la ville en utilisanttanks et canons. Mais il y a trop decivils à l’intérieur, dont certainssont nos alliés, pour lancer uneattaque massive. Même si notrearmée voulait prendre cette déci-sion, elle n’est pas envisageabledans notre situation. La majoritédes combattants ne sont pas desmilitaires mais des civils révolu-tionnaires qui n’ont pas suffisam-ment d’expérience pour mener cetype d’assaut. Par ailleurs, ils sontdifficiles à contrôler. Ce sont des

jeunes dont les émotions ont prisle pas sur la réflexion. En les lais-sant entrer brutalement à Syrte, lerisque serait grand d’assister à desrèglements de comptes person-nels et des actes de vengeance. Lestroupes qui entreront en premierseront les plus expérimentées.Quand avez-vous décidéde rejoindre la révolution?

En Libye, il y avait deux typesd’armée : les brigades spéciales etl’armée régulière. Nous, à l’arméerégulière, nous sommes fâchéscontre Kadhafi depuis longtemps.En quarante-deux ans, nous avonsessayé 25 fois de monter des opéra-tions pour le renverser et changerce régime, sans succès.

Quand les Libyens se sont révol-tés, les soldats les ont logiquementaccompagnés.Cettearmée réguliè-re a toujours été délaissée par Kad-hafi, le salaire d’un colonel étaitéquivalent à celui d’un simple sol-dat d’une brigade spéciale. Les seu-les unités bienorganisées dansnosrangs étaient les forces spéciales,c’est pourquoi ces dernières ontun rôle très actif devant Syrte. p

Propos recueillispar Cécile Hennion

Découverte du charnierde la prison d’Abou Salim

«Les kadhafistes savent que lamort les attend»Le chef rebelle Abdel Salam Jadalla estime à 1500 le nombre de loyalistes jusqu’au-boutistes retranchés dans Syrte

SyrteetBani Walid, bastionskadhafistes, résistent

ALORS QUE L’ANNONCE d’un gou-vernement de transition continuede se faire attendre, les forces duConseil national de transition(CNT) s’apprêtaient à lancer unnouvel assaut sur Syrte, derniergros bastion kadhafiste en Libyeavec Bani Walid. L’offensive surSyrte, qui compte quelque80000 habitants, a été suspenduesamedi24 et dimanche 25septem-bre pour laisser les avions del’OTAN bombarder plusieurscibles en ville et dans ses fau-bourgs. Ont notamment été visésdes dépôts de munition et des bat-teries antiaériennes.

Sur le front est de la ville, lestroupes du CNT ont atteint les fau-bourgs de Siwawa et Abou Hadi,habités majoritairement par desmembres de la tribu Furjan, ralliéeà la révolution. Mais les révolution-naires se sont heurtés à une forterésistance des combattants pro-Kadhafi, qui répliquent par des tirsnourris de roquettes, de mortierset d’artillerie. Des dizaines de civilsont profité de la pause dans l’offen-sive du CNT pour fuir la ville, encer-clée et privée d’eau, d’électricité etde communications.

Plusieurs milliers d’entre euxsemblent avoir été empêchés departir. Certains civils ont racontéaux médias étrangers ne pas êtreau courant de la chute de Tripoli,prise par le CNT le 21août. Les rebel-les ont par ailleurs annoncé avoircapturé 30combattants ennemis.

De violents combats ont égale-

ment eu lieu à Bani Walid, à150km au sud-est de Tripoli. Unetrentaine de combattants du CNTont été tués durant le week-end.Malgré plus de deux semaines decombats, les thuwar (révolution-naires) ne parviennent pas àcontrôler cette localité qui s’étendsur plusieurs kilomètres au fondd’une vallée rocailleuse. Les com-battants kadhafistes, retranchésdans les habitations, restent diffi-ciles à déloger. Les rebelles sem-blent avoir décidé d’attendre lachute de Syrte pour donner l’as-saut final à Bani Walid.

Signe de la fragilité des posi-tions du CNT dans les zones quilui restent hostiles, la ville de Gha-damès, à la frontière avec l’Algé-rie, a été attaquée par une colonnede combattants kadhafistes ren-forcés par des mercenaires toua-reg et algériens, selon le CNT. p

Service international

Les nouvelles autorités libyen-nes ont annoncé, dimanche25septembre, avoir retrouvé lesrestes de 1200 à 1700détenusexécutés en 1996 dans la prisond’Abou Salim, à Tripoli. Des orga-nisations de défense des droitsde l’homme avaient dénoncé l’as-sassinat de centaines de person-nes, en majorité islamistes, danscette geôle où étaient détenusdes prisonniers politiques. Cemassacre est indirectement àl’origine de la révolte qui a écla-té mi-février, puisque les premiè-res manifestations à Benghaziont eu lieu à l’appel de famillesde prisonniers tués, qui protes-taient contre l’arrestation deleur avocat. – (AFP.)

Ville aux mains des forces pro-KadhafiCombats en cours

Ville aux mains des rebelles

Brega

200 km

BenghaziBenghazi

Ajdabiya

Misrata

Ras Lanouf

Bani Walid

Tripoli

Syrte

L I B Y E

Mer Méditerranée

30123Mardi 27 septembre 2011

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international

R entré au pays vendredi23 septembre après presquequatre mois d’absence, le

président yéménite Ali AbdallahSaleh a promis, une nouvelle fois,« une transition pacifique du pou-voir » dans une allocution télévi-sée, dimanche soir, alors que sonpays sombre dans la violence.

Dans sa première allocution à lanation depuis son retour surprised’Arabiesaoudite, oùil était soignéà la suite de graves brûlures cau-séespar un attentataupalais prési-dentiel de Sanaa, le 3 juin, M.Salehs’est redit prêt à « un transfert dupouvoirpacifique parlebiais d’élec-tions et d’un scrutin présidentielanticipé ».

Unplandesortie de crise,misaupoint par le Conseil de coopérationdu Golfe (CCG) et soutenu par lesEtats-Unis et l’Union européenne,prévoit la démission de M. Saleh,l’immunité pour lui et sa familleainsi que la mise en place d’un gou-vernement de transition jusqu’à latenue d’élections anticipées. Atrois reprises déjà, le présidentyéménite a refusé de le signer sousdivers prétextes. Dimanche, il n’apas fait allusion à sa démission.

Les manifestants de la place duChangement, qui réclament son

départ depuis février, y voient unenouvelle tentative de brouiller lescartesetdegagnerdutemps.Same-di,destirsde l’arméecontreles pro-testataires avaient tué 17 person-nes, portant le bilan d’une semai-ne de violences à une centaine devictimes dans la capitale.

Le retour de M. Saleh a, en effet,été précédé d’une offensive de l’ar-mée et de la garde républicaine,commandée par son fils aînéAhmed, contre les manifestants dela place du Changement, mais aus-si contre les troupes du général dis-sident Ali Mohsen et le quartiergénéraldu cheikhSadek Al-Ahmar,qui dirige la puissante confédéra-tion tribale des Hached, désormaisenguerreouverteaveclecamppré-sidentiel.

La multiplication des combats,parfoisà l’arme lourde, à Sanaa et àTaëz, enfonce encore un peu plusleYémen dans la guerre civile. Pen-dant ce temps, des groupes pro-ches d’Al-Qaida ont pris le contrô-le de régions entières dans le suddu pays. Selon des témoins citéspar l’AFP, deux hommes accusésde vol ont eu la main coupée ceweek-end dans la ville de Jaar. p

Christophe Ayad(avec AFP et Reuters)

JérusalemCorrespondant

L a nouvelle initiative de paixdu Quartet pour le Proche-Orient (Etats-Unis, Union

européenne, Nations unies et Rus-sie), annoncée vendredi 23septem-bre, à New York, ne s’engage passous les meilleurs auspices. Mah-moud Abbas, président de l’Autori-té palestinienne, a été accueilli defaçon triomphale, dimanche, àRamallah, où il a promis un « prin-temps palestinien », tout en rappe-lantfermementsapositiondeprin-cipe : « Il n’y aura pas de négocia-tions sans légitimité internationale

ni un arrêt complet de la colonisa-tion » juive dans les Territoiresoccupés, a-t-il affirmé.

La direction palestinienne, com-me le gouvernement du premierministre israélien, BenyaminNétanyahou, n’a pas encore adoptédepositionofficielle,maislesinten-tions des deux parties paraissentclaires : les Palestiniens subordon-nent une éventuelle reprise desnégociations au vote de l’ONU surleur demande de reconnaissanced’unEtatpalestinien(c’estla«légiti-mité internationale » évoquée parM.Abbas), mais, sur le fond, ils esti-ment que la proposition du Quar-tet ignore deux éléments essen-tiels : l’arrêt de la colonisation et laréférence aux frontières de 1967,comme base de discussion pour unpartage des frontières.

Or, le texte du Quartet ne faitallusion que de façon indirecte àces principes : en évoquant la« vision » définie par le présidentaméricain (le 19 mai, Barack Oba-ma avait soutenu la création d’unEtatpalestiniensurlabasedesfron-tières de 1967) ; en soulignant,d’autrepart, que les partiesdoiventse garder d’« actes provocateurs» eten insistant sur le fait que de nou-vellesnégociationsdoiventrepren-dre sans « condition préalable ».

Dans les deux cas, il s’agit d’éviterd’aborder de front la question de lacolonisation.

Cette déclaration est cependantcontradictoire, puisqu’elle renvoieà la feuille de route adoptée en2003 par le Quartet, laquelle pré-voyait « le démantèlement despoints de colonisation construitsaprès mars2001 ».

«Sans condition préalable»Ayantanticipélesréservespales-

tiniennes, les dirigeants israéliens,soucieux d’effacer l’accueil favora-ble reçu par M.Abbas à l’ONU, ontsaisi l’occasion pour reprendrel’avantage: M.Nétanyahou a réité-ré son appel pour une reprise desnégociations«sansconditionspréa-lables», tandis que Avigdor Lieber-man, ministre des affaires étrangè-res et chef du parti ultranationalis-te Israel Beitenou (« Israël, notremaison»), a estimé que le gouver-nement israélien devait accepter laproposition du Quartet, précisé-ment parce qu’« elle inclut un pointtrès positif : l’ouverture de négocia-tions sans condition préalable ».

Enrefusantde négocier, ainsistéM.Nétanyahou, M.Abbas détruit leprocessus de paix. En réalité, celui-ci est moribond depuis septem-bre2010,datedesdernièresrencon-

tres israélo-palestiniennes officiel-les.Lesréactionsisraéliennesàl’ini-tiative du Quartet incitent à penserque, parallèlement au processusqui se déroule aux Nations uniessur la demande de reconnaissanced’un Etat palestinien, les deux par-ties sont de nouveau entrées dansle jeu politique consistant à faireretomberla responsabilitédu statuquo sur l’adversaire.

Mahmoud Abbas, dont la crédi-bilité parmi les Palestiniens étaiten chute libre, bénéficie d’unregaindepopularitédepuissondis-cours à l’ONU, mais ce succès ris-que d’être éphémère. M. Lieber-man, comme d’autres responsa-bles israéliens, a prévenu que lastratégie onusienne de M. Abbasaura « des conséquences dures etgraves» pour les Palestiniens, allu-sion transparente à des mesures dereprésailles : des sanctions écono-miquesàl’annexion pureet simpledes « blocs de colonies », la pano-plie est théoriquement large. Unetelle surenchère ne fait cependantpas l’unanimité : l’establishmentmilitaireisraélien y est hostile, esti-mant qu’elle aurait pour effet deremettre en cause la coopérationen matière de sécurité entre Israé-liens et Palestiniens.p

Laurent Zecchini

Les femmes saoudiennes pourront déposer leur bulletin de vote dans les urnes et auront le droit de se présenter

lors des élections aux conseils municipaux en 2015. FAHAD/REUTERS

AlgerEnvoyée spéciale

L e drapeau du nouveau régi-me de Tripoli flotte, en dou-ble exemplaire même, sur

l’ambassade de Libye dans le quar-tier El Biar, à Alger. Les bureauxsont ouverts dans la journée,tenus par une équipe réduite auminimum. Il n’y a pas de visa dis-ponible, pas encore d’ambassa-deur en ce dimanche 25 septem-bre. D’Algérie, une autre voixlibyenne s’est pourtant expriméeavec force, celle d’Aïcha Kadhafi, lafille de Mouammar Kadhafi, qui aplongé dans un vif embarras lesautorités algériennes au momentprécis où celles-ci reconnaissaientde facto le nouveau pouvoir de Tri-poli, à travers le Conseil nationalde transition (CNT).

Dans un enregistrement sono-re de quelques minutes diffusévendredi sur la chaîne syrienneArraï–canal privilégié du clan Kad-hafi depuis sa chute –, Aïcha Kad-hafi, réfugiée en Algérie depuis le29 août, a assuré que son père seportait « bien ». « Il est toujours là, ilcroît en Dieu, son moral est bon »,a-t-elle lancé avant d’appeler « leslions de Tripoli, Terhoua, Assabaa,Nouayel, Sabah, Beni Walid, Ousa-lim, El Habade » et tous les « moud-jahidine de l’est de la Libye au sud »à poursuivre les combats contre lenouveau régime libyen et sonfutur gouvernement qualifié de« mascarade ».

« Vengez-les ! vengez-les ! »,a-t-elle exhorté en évoquant les« martyrs » partisans du colonelKadhafi et après avoir fustigé, enles citant nommément, plusieursdes nouveaux dirigeants libyensaccusés d’avoir « trahi ». Elle anotamment mentionné Mah-moud Jibril, numéro deux du CNT,et Abdelhakim Belhadj, gouver-neur de Tripoli.

Dimanche, depuis New York, oùil se trouve dans le cadre de la66e assemblée générale des

Nationsunies, leministre desaffai-res étrangères algérien, MouradMedelci, a réagi. « Je ne peux qu’ex-primer ma surprise devant une tel-le déclaration, qui vient d’unedame que l’Algérie a accueillie avecle reste de sa famille pour des rai-sons humanitaires », a-t-il déclaréà l’agence de presse algérienne. « Jetiens à dire que cette sortie est inac-ceptable et que des décisions serontprises pour qu’à l’avenir des com-portements de ce type-là ne puis-sent plus avoir lieu », a affirméM.Medelci qui a tenu à rappeler lavolonté de l’Algérie de travaillerdésormais « étroitement » avec lenouveau pouvoir libyen.

Des réfugiés à la frontièreComment et par quels moyens

en effet, la famille de MouammarKadhafi, tenue au secret en Algé-rie, privée, en théorie, du droit decommuniquer,a-t-ellepu ainsilan-cer un tel appel ? Après des mois detension entre le CNT et Alger, accu-sée d’avoir soutenu le régime ducolonelKadhafi, la diatribeguerriè-re de sa fille ne pouvait pas plusmal tomber.

Dimanche, selon un témoincontacté par Le Monde à Djanet,dans le sud algérien, non loin dela frontière libyenne, des combat-tants libyens blessés, partisans etadversaires du colonel Kadhafi,seraient arrivés dans l’un desdeux hôpitaux de la ville, à l’en-droit même où Aïcha Kadhafi estsupposée avoir accouché d’unepetite fille.

Dans cette zone, les passagesde convois d’essence et de nourri-ture se seraient intensifiés. Unpeu plus haut, au poste frontièrede Debdeb, fermé après l’arrivéede la famille Kadhafi, des réfu-giés, touaregs notamment, sepressent tandis que de l’autrecôté, à Gadhamès, en territoirelibyen, des combats ont fait huitmorts parmi les partisans du nou-veau régime. p

Isabelle Mandraud

La filledu colonelKadhafiembarrassele pouvoiralgérienRéfugiée en Algérie, Aïcha Kadhafi a appelé lespartisans de son père à poursuivre les combats

L’initiativedu Quartet pour le Proche-Orient, jugéeincomplètepar les Palestiniens, semble déjà enterréeAccueilli en triomphe à Ramallah, M.Abbas écarte une négociation sans arrêt de la colonisation

P our la deuxième fois de leurhistoire, les Saoudiensse ren-drontauxurnes, jeudi29 sep-

tembre, pour renouveler la partieéligible de 285 conseils munici-paux. Pour la dernière fois, les fem-messerontempêchées d’y prendrepart. A l’occasion de son discoursannuel devant le Majlis Al-Choura(Conseil consultatif), dimanche25 septembre, le roi Abdallah a eneffet ouvert la porte à une partici-pation des femmes à certaines ins-tances politiques de cettemonarchie absolue. Conscient del’opposition d’une bonne partie dela société saoudienne, ainsi que decertains membres de la familleroyale, à toute avancée concernantle statut des femmes, le souveraina placé sa décision sous les auspi-ces de l’islam et des intérêts supé-rieurs du pays.

« La responsabilité devant notrereligion, l’intérêt de notre patrie etde ses citoyens exigent que l’on nes’arrête pas devant les obstacles destemps présents. Nous devons ren-forcer notre détermination parnotre patience et notre travail enrelationavecAllahpourlessurmon-ter », a indiqué le souverain dansson allocution. Avant d’affirmerqu’« une modernisation équilibrée,enconformité avec nos valeurs isla-miques qui défendent les droits, estune demande importante dansune époque où il n’y a pas de placepour les faibles et les hésitants».

Après avoir rendu hommage àla place de la femme dans l’histoi-re islamique, le roi a assuré : « Par-ce que nous refusons la marginali-sation du rôle de la femme dans lasociété saoudienne dans tous lesdomaines, conformément à la cha-ria, et après des consultations avecde nombreux savants [religieux],nous avons décidé: premièrement,la participation des femmes auMajlis Al-Choura, en tant que mem-bres à partir de la prochaine ses-sion dans le respect des principesde la charia ; deuxièmement, pourla prochaine session également[les élections de 2015], les femmesauront le droit de se présenter auxconseils municipaux ainsi que ledroit de vote dans le cadre des prin-cipes de l’islam. »

Cette ouverture était attenduede longue date. Au début de l’an-née, des suffragettes saoudienness’étaient d’ailleurs mobilisées surles réseaux sociaux pour deman-der que les prochaines électionsmunicipales leur soient ouvertes.Le28mars, enplein printemps ara-be, annonçant la tenue de ces scru-tins en septembre, le président dela commission électorale, AbdelRahman Al-Dahmach, avait misen avant « des problèmes maté-riels », compte tenu de la sépara-tion en vigueur entre les sexesdans l’espace public saoudien,pour justifier cet apartheid électo-ral. « Il y a un plan, avait-t-il assuré,pour mettre en place les conditionsd’une participation des femmes »sans donner d’autres précisions.

Cette décision avait été vive-ment critiquée par les féministessaoudiennes, d’autant que lemême argument avait déjà étéavancé en 2005 (« Le plus impor-tant, c’est que nous allions dans labonne direction », assurait alors lefilsdu ministre des affaires ruraleset municipales, Mitab Ben Abdel

Aziz Al-Saoud, le prince Mansour,qui lui a succédé depuis lors).

En décidant de passer outre lesrésistances, le roi octogénaire aconfirmé son attachement pourune réforme en douceur qu’il doitnégocier au sein de la famille roya-le. En 2005, à la veille de son acces-

sion au trône, dans un entretien auMonde, il avait indiqué à proposdes femmes : « Avec le temps, leurétat d’esprit, la mentalité de leursmarisetdeleursfilsévolueront.Celaprendra moins d’années que n’encomptent les doigts d’une main.»

Après avoir nommé en 2009une femme au gouvernement,chargée de l’enseignement supé-rieur, et ouvert la première univer-

sité scientifique mixte du pays (unétablissement d’excellence deniveau international où la part desSaoudiens reste relative), le souve-rain a préféré le terrain des conseilsmunicipauxetduConseilconsulta-tif à des questions de société plusconflictuelles comme le droitrevendiquéparcertainesSaoudien-nesdepouvoirconduire,oularemi-se en cause du mahram, le tuteurmasculin (généralement un mem-bre de leur famille) qui leur estimposé dans l’espace public. Desdemandes qui sont liées à la partcroissante prise par les femmes,mieux formées que les hommes,dans la population active du pays.

Le choix du roi souligne sa pru-dence mais également les limitesde sa volonté réformatrice. L’expé-rience de conseils municipauxauxpouvoirs très relatifs aalimen-té une véritable frustration dans lecamp encore très minoritaire desréformateurs saoudiens. Cettefrustration pourrait d’ailleurs setraduire dans les urnes, jeudi, entermes de participation. p

Gilles Paris

Leroi d’Arabie saouditeaccorde le droitdevote aux femmes à partir de 2015Des Saoudiennes feront aussi leur entrée au Majlis Al-Choura, un conseil consultatif nommé

Leprésidentyéménitepour«unetransitionpacifique»Ali Abdallah Saleh n’envisage pas de démissionneralors que le pays s’enfonce dans la guerre civile

Lechoixdu roisouligne

saprudence maiségalementleslimites

desa volontéréformatrice

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50123Mardi 27 septembre 2011 international

Union européenne

Lacrisefinancière va favoriserl’intégrationeuropéennePARIS. Jean Leonetti, le ministre français des affaires européennes, se ditconvaincu qu’à la faveur de la crise actuelle, l’Europe va franchir une éta-pe vers l’intégration politique et économique. «Je pense que la gouver-nance politique européenne sera au cœur de la campagne électorale de2012», a-t-il estimé, dimanche 25septembre lors de l’émission internatio-nale de «TV5Monde-RFI-Le Monde». Pour M.Leonetti, la voie n’est pas cel-le d’un « fédéralisme au détriment des Etats», mais plutôt d’une «volontépolitique portée par les chefs d’Etat et de gouvernement ».Il réfute, par ailleurs, l’idée d’une agence de notation publique européen-ne, même s’il critique les agences. « Dégrader la note de l’Italie parce qu’el-les estiment que le gouvernement n’est pas en mesure de mener les réfor-mes à terme, c’est un critère politique. Mais casser le thermomètre pour neplus voir la fièvre et créer notre propre thermomètre n’est pas la solution.Qui pourra croire cette agence européenne le jour où elle ne dégradera pasla note d’un pays dont Standard & Poor’s aura décidé d’abaisser lanote?» p

Cuba Les Dames en blanc agressées à LaHavaneLA HAVANE. Les Dames en blanc, épouses de prisonniers politiques, ontété agressées, samedi 24 septembre, par des agents de la sécurité del’Etat. L’attaque visait à empêcher les dissidentes de se rendre à la messeà l’église de la Vierge de la Merced, patronne des détenus. – (EFE.)

Indonésie Le groupe Abou Sayyaf attaque l’arméeJOLO. Treize combattants islamistes et deux soldats indonésiens ontété tués lors d’affrontements, dimanche 25 septembre, sur l’île de Jolo,au sud de l’Indonésie. Les insurgés appartiennent au groupe terroristeAbou Sayyaf, affilié à Al-Qaida. – (BBC.)

Afghanistan Fusillade dans les locaux de la CIAKABOUL. Une brève fusillade a éclaté, dimanche 25 septembre, dans desbureaux de la CIA à Kaboul, selon un chef de la police. – (AFP, Reuters.)

MoscouCorrespondante

L a nouvelle est tombée samedi24septembre:VladimirPouti-ne, 59 ans début octobre, va

revenir à la tête de la Russie jus-qu’en2018etpourraitbienoccuperle poste de président jusqu’en2024,commel’autoriselaConstitu-tion. Voilà ce qui pourrait faire delui le chef de l’Etat russe doté de laplus grande longévité au Kremlin,plus que Leonid Brejnev(1906-1982), le secrétaire du PCsoviétique qui régna dix-huit ans,mais moins que Staline (1878-1953),qui resta trente ans au pouvoir.

Le sort du pays s’est joué envingt minutes, samedi, sur la scè-ne du stade Loujniki où avaientconvergé les 11 000 militants deRussie unie, le parti pro-Kremlin,dont c’était le congrès. Le scénarioétait parfaitement rodé. Premieracte : arrivée du « tandem » sousles applaudissements. Très vite, lepremier ministre Vladimir Pouti-ne invite les délégués à choisir leprésident Dmitri Medvedev,46 ans, pour lui succéder à la têtedu parti Russie unie (dont ni l’unni l’autre ne sont membres).

Deuxième acte : Dmitri Medve-dev monte sur scène. Il proposealorsauxmilitantsque son«cama-rade de tandem » devienne le can-didat du parti à la présidentielle de2012. Tonnerre d’applaudisse-ments, ovation du public : Vladi-mir Poutine remonte sur scène etpropose à Dmitri Medvedev dedevenir son premier ministre s’ilest élu en mars 2012, ce qui ne faitaucun doute.

Le parti Russie unie, qui contrô-le actuellement plus des deux tiersdelaDouma et détient90%dessiè-ges de gouverneurs, a ensuite vali-dé sa liste de candidats en vue deslégislatives du 4 décembre, par528 voix pour et 1 voix contre. Vla-dimir Poutine s’en est amusé :« Mais où est donc cette personne ?Qui est ce dissident ? »

Après des mois d’interroga-tions, le mystère est donc levé, Vla-dimir Poutine revient, à la faveurd’un jeu de chaises musicales avecson protégé, le président réforma-teur Dmitri Medvedev, à qui ilavait laissé la place en 2008, empê-ché de briguer un troisième man-dat consécutif par la Constitution.A peine élu, le jeune présidentréformateur avait préparé le ter-rain pour le retour de son mentor,s’empressant de faire voter une loiqui étendait le mandat présiden-tiel à six ans au lieu de quatre.

Tout était prévu depuis long-temps. « Je le dis sans détours, unarrangement pour le futur avaitété trouvé entre nous il y a plu-

sieurs années », reconnaît Vladi-mir Poutine. Il expose son pro-gramme et, surprise, voilà qu’ilreprend les thèmes préférés deson protégé Dmitri Medvedev,met l’accent sur la nécessité demoderniser le pays, ne craint pasd’évoquer les problèmes qui para-lysent la société et l’économie.

« Nous devons parler ouverte-ment de notre dépendance auxmatières premières, des inégalitéssociales dangereuses, de la violen-ce, de la corruption, des sentimentsd’injustice et de vulnérabilité que lapopulation éprouve lorsqu’elle aaffaire aux fonctionnaires de l’Etat,auxtribunaux, aux policiers»,mar-tèle Vladimir Poutine, après avoirréclamé « davantage de contrôlede la société sur la bureaucratie ».

Le message est clair. Critiqué enOccident et par une partie de lasociété russe pour avoir rogné leslibertés acquises après l’effondre-ment de l’URSS en 1991, l’ancienlieutenant-colonel du KGB (policepolitique soviétique) veut se for-ger une image de réformateur àpoigne.

Son troisième mandat, il le feradrapédans le manteau dePiotrSto-lypine (1862-1911), l’ancien pre-mier ministre du tsar Nicolas II,qui chercha à moderniser l’empiretout en matant les révoltes.Depuis quelques mois, M. Poutinelui voue un culte appuyé. Enjuillet, il a inauguré une stèle com-mémorative non loin du siège dugouvernement à Moscou.

Ils’agitau premier chefde rassu-rer les investisseurs étrangers, las-sés du mauvais climat des affairesen Russie. La corruption, devenueendémique ces dix dernièresannées, décourage les hommesd’affaires, empoisonne la vie de lapopulation, fait qu’aucun des pro-grammes mis en place ne peut êtrecorrectement appliqué, car, le plussouvent, les fonds sont volés.

Or pour se développer, le pays abesoin du savoir-faire et des fondsdes multinationales étrangères,sans cela, comment maintenir sonrang de premier exportateur debrut au monde ? L’autre souci estde juguler la fuite des capitaux. Ensix mois, 31,2 milliards de dollars(23,2 milliards d’euros) ont quittéle pays. Il s’agit probablement decapitaux spéculatifs en quête de

refuge plus sûr que les fonds d’in-vestissement russes, mais une tel-le hémorragie plombe l’économie.

Les défis à relever sont immen-ses. Il faut diversifier, mettre lebudget à l’abri des fluctuations descours du brut (80 % des revenusviennent du gaz et du pétrole),rebâtir de fond en comble lesinfrastructures à bout de souffle.

Avant tout, il faudra remédier àla grave crise démographique encours. Selon le Conseil russe desécurité, qui dessine les grandeslignes de développement du pays,la population active, d’ici à 2025,devrait baisser de 10 millions depersonnes, ce qui fait craindre unralentissement économique etune forte augmentation desdépenses sociales.

Le nouveau Stolypine est restémuet sur la libéralisation de la scè-ne politique. Visiblement, il a pla-cé ses espoirs dans Russie unie, « leparti des bureaucrates », pour

mener à bien la modernisation.Un simple coup d’œil jeté sur la

salle, samedi 24 septembre, pou-vait permettre d’en douter. Certes,les délégués portaient des costu-mes Armani ou d’aussi bonne fac-ture, beaucoup avaient au poignetdes montres Bréguet ou Rolex,presque tous avaient un iPad der-nier cri. Mais l’ambiance était tellequ’on se croyait tout à coup proje-té au milieu du 25e congrès duPCUS (Parti communiste del’Union soviétique).

Pas de débats, aucune initiative,mais des applaudissements à toutrompre, des petits drapeaux agi-tés frénétiquement, les gestesmécaniques du public : ovation,applaudissements. Dans la blogos-phère, le dépit pointait : « Bienve-nue en Union soviétique ! », écritun internaute, « Heureusementque Poutine n’a pas de fils », seréjouit un autre. p

Marie Jégo

Russie: le tandem Poutine-Medvedevveut succéderau duo Medvedev-PoutineL’actuel premier ministre sera à nouveau candidat à la présidence en mars2012

Leministredes financesKoudrine,seul mécontent

«Bienvenue enUnionsoviétique!»,«Heureusement que

Poutinen’apasdefils», écrivent des

internautessur leWeb

MoscouCorrespondante

Le ministre des finances, AlexeïKoudrine, est le seul fonctionnaireouvertement mécontent de «l’ar-rangement» trouvé entre Vladi-mir Poutine et Dmitri Medvedev.

«Je ne me vois pas dans un nou-veau gouvernement », a-t-il décla-ré, samedi 24 septembre, à Wash-ington où il participait à une réu-nion du G20. Ministre des finan-ces depuis onze ans, M. Koudrineest apprécié des investisseurspour sa rigueur et son profession-nalisme.

Samedi, ce proche de VladimirPoutine, natif comme lui de Saint-Pétersbourg, s’est permis de criti-quer Dmitri Medvedev et son pro-jet d’augmenter les dépenses mili-taires. En réalité, ce projet est toutautant celui du premier ministre

mais M. Koudrine a concentré sescritiques sur le partenaire«junior » du tandem. Selon lui, untel choix risque de mettre en périlles finances publiques de la Rus-sie. « Avant la crise, notre budgetétait à l’équilibre avec un baril à90 dollars [67 euros], cette annéeavec un baril à 109 dollars et l’an-née prochaine avec un baril à112 dollars », a-t-il rappelé.

Si les données macroéconomi-ques sont bonnes – croissance de4,1 %, dette publique égale à 30%du PIB, absence de déficit budgé-taire –, la dépendance aux matiè-res premières « constitue un ris-que pour notre économie», a souli-gné le ministre. Etrangement, lebudget actuel de la Russie ressem-ble à celui de l’URSS, les deux prin-cipaux postes budgétaires étant lemilitaire et le social. p

M. Jé.

international

Reportage

Rangoun (Birmanie)Envoyé spécial

I l souffle sur Rangoun un air deperestroïka. Depuis la forma-tion au printemps d’un gou-

vernement civil composé surtoutd’anciens généraux issus d’unejunte militaire cruelle et corrom-pue qui s’est « autodissoute » le30 mars, on est en train d’assisterà une accélération du processuscensé mener la Birmanie vers une« démocratie disciplinée », selonles propres termes du pouvoir.

« Nous jouissons en ce momentd’un degré de liberté politique réel.Je suis aujourd’hui plus optimisteque je ne l’étais il y a quelquesmois », juge Toe Kyaw Hlaing,ancien président du syndicat desétudiants en médecine durant lemouvement démocratique de1988, noyé dans le sang par la sol-datesque birmane.

Emanant d’un homme qui voitrégulièrement Aung San Suu Kyi,chef de file de l’opposition et dissi-dente divinisée, une telle remar-que en dit long sur les change-ments en cours. La « Dame », com-me tout le monde l’appelle ici,exprime désormais, pour la pre-mière fois, son optimisme. En ter-mes mesurés, certes, mais quitranchent sur le scepticisme qu’el-le affichait depuis sa libération,en novembre 2010, au terme desept années continues de résiden-ce surveillée.

Depuis qu’elle a rencontré, le19août, le président TheinSein,ellerépète qu’elle pense que ce derniercherche à provoquer des change-ments«positifs».Mêmesila«ques-tion de savoir jusqu’où il pourraallermérite d’être examinée», com-me elle l’a indiqué, le 18septembre,à l’Agence France-Presse.

Rien n’a filtré de précis sur la

teneur des discussions lors de cet-te rencontre inopinée qui a sym-bolisé avec éclat la politiqued’ouverture. Mais selon une sour-ce birmane, l’épouse du présidentaurait, avant le dîner en intimes,spontanément pris dans ses brasl’ancienne bête noire du régime !

La plupart des analystes res-tent prudents sur la pérennité dela glasnost à la sauce birmane.« Les réformistes ont pour l’instantla main sur l’appareil d’Etat, maisles durs du régime, les affidés [del’ancien dictateur Tan Shwe] sonten mesure de fomenter un putschau cas où le processus démocrati-que aille trop loin », estime unepersonnalité birmane familièredu premier cercle du pouvoir, quirequiert le plus strict anonymat.

Au plus haut sommet de l’Etat,les relations seraient plus que ten-dues entre le chef de l’Etat et sonvice-président, Tin Aung MyintOo, considéré comme le chef defile du clan des ultraconserva-teurs, peu enclins à accepter unetropgrande libéralisation dusystè-me. « Il faut que le président aillevite s’il veut éviter de voir la factionadverse reprendre la main », affir-me Kin Zaw Win, un ancien dentis-te reconverti de longue date enmilitant des droits de l’homme, cequi lui a valu onze ans de prison,dont il est sorti en 2005.

Mais cet intellectuel, qui se pré-

sente comme l’un des soutiensd’une « troisième force », incarneaussi l’évolution du changementpolitique : « Je ne suis ni pour legouvernement ni pour la Liguenationale pour la démocratie(NLD) [Le parti d’Aung San SuuKyi] », explique-t-il. « En Birma-nie, on a trop tendance à voir leschoses en noir et blanc. La troisiè-me force est dans la zone grise. »

Si le pouvoir est divisé, la fac-tion des « libéraux », dont le pedi-gree ne reflétait pas autrefois uneobsession excessive pour la liber-té d’expression, a réussi à démon-trer sa volonté de réforme. Unpragmatisme visible sur le terrainde l’économie, où l’on peut entre-voir les prémices d’une libéralisa-tion d’un système longtemps cor-seté par la junte. « C’est l’écono-mie qui est le vrai ressort de cedébut d’ouverture politique », esti-me un observateur.

Qui aurait pensé que l’actuelchef de l’Etat, cet ex-premierministre au charisme incertain,général de la bande de galonnésqui ont mis le Myanmar en couperéglée depuis 1962, deviendraitl’homme par qui un souffle d’airest en train de s’engouffrer sur lavallée de l’Irrawady ? « Pas grandmonde », répondent les analystesétrangers dans Rangoun, capitaleéconomique du pays depuis quele régime a déplacé la capitale àNaypyidaw, une ville construiteau milieu de nulle part sur la rou-te de Mandalay.

Personne ne se faisait trop d’il-lusions sur l’impact réel des élec-tions générales du 7 novembre2010, considérées comme large-ment truquées et qui avaient plé-biscité le parti au pouvoir, l’Unionpour la solidarité et le développe-ment (USDP). D’autant que 35 %des sièges sont réservés à l’armée,au Parlement de Naypyidaw.

Mais les choses se sont précipi-tées durant cet interminable étéde mousson. La censure sur lapresse s’est sensiblement assou-plie. « En fin d’année dernière, onavait voulu publier une interviewquestions-réponses avec Aung SanSuu Kyi », raconte Thomas Kean,rédacteur en chef de l’éditionanglaise de l’hebdomadaire TheMyanmar Times. « Désormais, onparle d’elle régulièrement dansnos colonnes, même si nous som-mes toujours soumis à la censurepréalable avant publication. »

Le jeune Australien pose surson bureau des exemplairescaviardés des dernières publica-tions. Rien de très méchant, auregard des pratiques habituelles :suppression d’un paragraphe du

passage d’un article mentionnantque la secrétaire d’Etat américai-ne Hillary Clinton restait « scepti-que » quant à la réalité du proces-sus démocratique en cours, inter-diction de mettre à la « une » desportraits de représentants de l’op-position.

Dans les rues de Rangoun, onvoit des scènes incroyables : desvendeurs de journaux à la criéebrandissent des publications oùle visage souriant d’Aung San SuuKyi s’affiche en première page…

D’autres signes d’ouverture sesont accumulés. Le 17 août, le pré-sident Sein a annoncé que les exi-lés politiques pouvaient revenirau pays. Des rumeurs circulent àpropos de l’éventualité d’une pro-chaine libération graduelle desquelques 2 100 prisonniers politi-ques, même si rien de concret n’in-

dique que cet élargissement auralieu bientôt.

Le 18 août, le président a faitdes ouvertures de paix aux grou-

pes armés des ethnies minoritai-res qui continuent de bataillerdans les territoires frontaliers. Ilsexigent la mise en place d’unevéritable fédération où ils pour-

raient jouir d’une forme d’autono-mie. C’est sans doute là où les pers-pectives sont les plus sombres :l’armée continue de commettrede terribles atrocités contre lespopulations civiles, shan, karen,kachin, dans ces régions.

La poursuite de ces exactionslimite la possibilité pour les Amé-ricains et les Européens de leverles sanctions économiquescontre un gouvernement qui rêvede légitimité internationale. Ilespère notamment se voir attri-buer la présidence tournante del’Association des pays du sud-estasiatique (Asean), en 2014, ce quiexpliquerait en partie l’ouvertureen cours. Mais la Birmanie a enco-re un long parcours à accomplir sielle veut se débarrasser de son cos-tume d’Etat paria. p

Antoine Clapik

Les ONG localesaccompagnent l’émergenced’une sociétécivile enpleinessor

«Ilfaut queleprésident aille vites’il veutéviterde voir

lafaction adversereprendrela main»

Kin Zaw Winancien dentiste converti

en militant des droitsde l’homme

Desvendeursdejournaux à lacriée

brandissentdespublications

oùle visagesouriantd’AungSan Suu Kyi

s’afficheenpremière page

La Birmanie en bref

Nom officielUnion de Myanmar.

Population49millionsd’habitants.

PIB par habitant1100dollars(819 euros).

Indépendance1948.

Premier coup d’Etat militaireen 1962.

Elections générales ennovembre2010. Le nouveau gou-vernement est formé le 30mars.300 km

Golfe duBengale

Merd’Andaman

Irra

wad

dyINDE

BHOU. CHINE

THAÏLANDE

LAOS

VIET.BANG.

Rangoun

Mandalay

Naypyidaw

ASIE

BIRMANIE

Aung San Suu Kyi inaugurant une bibliothèque à Rangoun, le 23 septembre. SOE THAN WIN/AFP

Reportage

Rangoun (Birmanie)Envoyé spécial

En Birmanie, les défenseurs d’unesociété civile en plein essor n’ontpas attendu l’actuel climatd’ouverture pour pousser leurspions sur le terrain social. Le cyclo-ne Nargis qui a ravagé, en 2008, ledelta du fleuve Irrawaddy, tuant130000 personnes, avait, à l’épo-que, vu surgir une multitude d’or-ganisations non gouvernementa-les (ONG) dans un système fonc-tionnant en vase clos.

La junte militaire alors au pou-voir – dont l’actuel gouvernementest l’avatar civil – avait réagi avecune coupable indifférence audésastre. La flagrante impéritie desautorités, l’incapacité de ces derniè-res à faire face aux besoins des

sinistrés avaient provoqué unemobilisation de jeunes quis’étaient portés au secours de lapopulation dans ce pays dont untiers de la cinquantaine de mil-lions d’habitants vit sous le seuilde pauvreté.

«Les échecs du gouvernementont permis aux ONG d’occuper deplus en plus d’espace», expliqueKyaw Thu, responsable d’une ONGqui porte ses efforts sur le dévelop-pement de la société civile enmilieu rural. « Après le cyclone, ona vu naître un nombre croissant degroupes impliqués dans le dévelop-pement au niveau des villages. Legouvernement a fini par compren-dre qu’il ne servait plus à rien d’em-pêcher le travail des ONG, enregis-trées officiellement ou non.»

L’une des plus surprenantesmanifestations de l’actuelle mobi-lisation des militants sociaux est

«Myanmar EGRESS», acronymederrière lequel se cache une organi-sation mi-think tank, mi-ONG. Ellea son siège au premier étage d’unhôtel sans prétention du cœur deRangoun et s’occupe d’enseignerles principes du journalisme à de

futurs reporters, donne des coursde droit constitutionnel à desdéputés du Parlement ou à desmembres de partis politiques etpossède un institut de recherchesur les questions de gouvernance.

EGRESS se présente commel’un des fers de lance d’une « troi-sième force » qui accompagne les« pragmatiques » du gouverne-ment dans leur volonté d’ouvertu-re politique et économique. Com-me le dit l’un de ses membres, quidemande à ne pas être cité :« Nous ne travaillons pas pour legouvernement mais avec le gou-vernement ».

Nay Win Maung, le patron decette structure est un personnagecontroversé. Perçu par les unscomme l’un des acteurs du renou-veau, conspué par certains autres,surtout les opposants en exil, quil’accusent d’être un « cheval deTroie du régime », ce journalistequi a fait un détour par l’universi-té américaine de Yale est le filsd’anciens enseignants de l’acadé-mie militaire.

Ces liens avec le gouvernement

sont patents au point que le prési-dent Thein Sein se serait large-ment inspiré des écrits de NayWin Maung dans l’un de ses dis-cours sur la réforme prononcé enaoût. « Les élections du 7novembreont peut-être été truquées, laConstitution de 2008 promulguéeau temps des militaires, du vent,mais tout cela débouche sur le pro-cessus démocratique en œuvreaujourd’hui », rétorque-t-on àEGRESS. « Voilà l’essentiel. »

« Ce que nous voulons, c’estconstruire une alternative critiquequi soit constructive», expliqueHla Hla Win, qui enseigne l’an-glais dans une classe consacréeaux « mass media » à EGRESS.« Grâce à nous, les jeunes dévelop-pent une pensée critique et se for-ment au débat politique. La Birma-nie change, mon neveu de 9ansest sur Facebook. »

Les mentalités évoluent parmiles Birmans qui vénèrent autantla dissidente Aung San Suu Kyiqu’ils méprisent la caste des mili-taires. Khin Hnit Thit Oo, unejeune femme de 32 ans, responsa-ble d’une ONG de soutien auxenfants des rues, estime que lessanctions économiques impo-sées par les Américains et lesEuropéens pénalisent souventplus la population que les hom-mes d’affaires liés au régime.

De religion musulmane et d’ori-gine indienne, elle a reçu, en 2010,le prix des droits de l’homme dela République française. « Les sanc-tions doivent être levées, ne serait-ce que graduellement », esti-me-t-elle. « La priorité pour les Bir-mans, poursuit-elle, ce ne sont pasles droits politiques, mais les droitshumains de base! » p

A. Cl.

En Birmanie, les réformistesdu régimelaissent soufflerun air de«glasnost»Aung San Suu Kyi, Prix Nobel de la paix 1991 et chef de l’oppositionbirmane, a qualifié de «positifs» les changements déjà intervenus

Untiersdela cinquantaine

demillionsdeBirmans

vitsous leseuildepauvreté

6 0123Mardi 27 septembre 2011

europe

Fribourg-en-Brisgau(Allemagne)Envoyée spéciale

I l y avait eu, en février, l’appel de150 théologiens germanopho-nes à voir évoluer l’Eglise; puis,

au premier jour de la visite du papeen Allemagne, les demandes répé-téesderesponsablespolitiquesalle-mands,catholiquespratiquants,deprendreencomptecertainschange-ments sociétaux; sans compter lesattentes des protestants, partisansde rapprochements concrets entreles deux confessions chrétiennes.Rien n’y a fait.

Benoît XVI a quitté, dimanche25 septembre, son pays natal aprèsquatre jours d’une visite-mara-thon, durant laquelle il n’a pasdérogé à la ligne qu’il suit depuis ledébut de son pontificat : la défensed’une conception exigeante de lafoi. Une foi qui, à ses yeux, ne souf-fre aucune « édulcoration », aucu-ne adaptation « aux critères dumonde». Cette attitude a en partiedéçules attentes que cevoyage his-torique avait suscitées dans unpays où catholiques et protestantsfont jeu égal.

L’insistance du pape à défendreun nécessaire « approfondisse-ment de la foi », par la prière, lamesse ou l’étude de la Bible, estappréciée par une partie descroyants catholiques : la ferveurdes différentes célébrations quiont rassemblé plusieurs dizainesde milliers de personnes à Berlin,Erfurt et Fribourg, le prouve.

Mais, pour la frange la plus libé-rale des chrétiens, cette fermetés’apparentesurtoutàunefermetu-re. Les Allemands, avec leurs parti-cularismes, leur franchise et leurhistoire, ont souligné durant qua-tre jours cette dialectique qui tra-verse l’Eglise catholique.

Au fil de discours souvent diffi-ciles d’accès, Benoît XVI n’a pasménagé ses interlocuteurs. Classi-quement, il leur a rappelé sesinquiétudes face à la sécularisa-tion des sociétés modernes et au« relativisme subliminal » quioublie Dieu. Puis, de manière plusinattendue, il a exalté une Eglisedépouillée de « sa richesse terres-tre», mettant en exergue les pério-des de sécularisation – expropria-tiondebiens, suppression deprivi-

lèges–qui ont« contribuéà sa puri-fication et à sa réforme intérieure ».

En réponse aux divergences quitraversent l’épiscopat et les fidèlesallemands sur le sort des divorcés-remariés, l’ordination des femmesou le célibat des prêtres, le pape n’afaitaucuneouverture, maisaappe-lé les uns et les autres « à l’unité » età la fidélité à Rome. Aux chrétiens,il a surtout demandé de ne pas être« tièdes et faibles », des fidèles « deroutine », auxquels il a même dit

préférer « les agnostiques ».Car, si les sociétés traversent

«une crise de la foi», l’Eglise en por-te sa responsabilité, assure le pape.« Le préjudice ne vient pas desadversaires de l’Eglise, mais deschrétiens attiédis », a-t-il insisté.Dans une allusion aux scandalesde pédophilie, il a pointé le risquepour le message chrétien de dispa-raître derrière « l’inadaptation desmessagers ». S’il a rendu hommageau travail des fidèles engagés, le

pape a aussi fustigé une Eglise « destructures », souvent incapable deproposer « des points de contact »aux personnes en recherche deDieu. Des critiques qui ont réson-né comme un appel à un examende conscience pour l’ensemble descatholiques, invités à mener une« nouvelle évangélisation ».

Rappel à l’ordre également auxprotestants, devant qui le pape asalué la « quête de Dieu», qui avaitjalonné la vie du père de la Réfor-

me, Martin Luther. Cet hommageinédit a pu être entendu commeune incitation à revenir aux origi-nes alors que, vues de Rome, lesEglises protestantes ont parfoistrop sacrifié à la modernité.

Corrections fraternellesAu-delàdecescorrections frater-

nelles, diversement accueillies parles fidèles, c’est la déception desprotestants qui a prévalu après lavisitehistoriquedu pape àErfurt. Yvoyant un symbole fort sur le che-min du dialogue œcuménique, lesluthériens se sont certes réjouis dela visite du pape dans ce haut lieudu protestantisme, mais ils ontdéploré que Benoît XVI n’aille pasplus loin et plus vite dans un rap-prochement entre les deux confes-sions, divisées depuis près de cinqcents ans.

Ils attendaient notamment ungestepoursoulagerlescouplesmix-tes catholiques-protestants privésdu partage de la communion : lescatholiques voient dans ce sacre-ment la présence réelle du Christ,tandis que les protestants y célè-brent la Cène en mémoire de Jésus.

Or, pour Benoît XVI, l’affairesemble entendue: l’œcuménismen’empruntera pas cette voie, toutau moins avec les protestants. Cet-te fin de non-recevoir sur la com-munion a été d’autant plus ressen-tie comme un camouflet par cesderniersquelepapearéitéré,same-di, son espoir de voir cette questionréglée prochainement avec lesorthodoxes.

Quelques heures avant la fin dece voyage, visiblement épuisantpour le pape, des rumeurs venuesde Rome sur sa possible démissionà l’occasion de ses 85 ans, enavril2012, ont été démenties par leporte-parole du Vatican.p

Stéphanie Le Bars

BruxellesCorrespondant

L e premier ministre libéralnéerlandais, Mark Rutte,mesureàquelpointilestdiffi-

cile de gouverner en devant recher-cher l’appui d’une formation d’ex-trême droite comme celle du dépu-té Geert Wilders.

Un pied au pouvoir, un pieddansl’opposition,lePartidelaliber-té (PVV) de ce dernier multiplie lesprovocations et menace désormaisl’existence de la coalition de droite.Après un débat parlementaired’unetonalitéinéditeàLaHaye,jeu-

di 22 septembre, M. Rutte voit sesprojets budgétaires, le plan de nou-velle aide à la Grèce, et plus généra-lement, l’existence de sa coalitionmenacés.

« Soyez normal pour une fois,mon gars. » C’est en ces termes,inhabituels à la deuxième Cham-bre, que M. Wilders s’en est pris,jeudi, au premier ministre. M. Rut-tea répliqué : « Soyez normal, vous-même, mon garçon », soulignantle caractère « idiot » de son dis-cours. Un député du PVV avaitcomparé le premier ministre turc,Recep Tayyip Erdogan, à un « singeislamiste », et M. Wilders lui-

même l’avait dépeint auparavantcomme « un homme dangereux »en raison de ses récentes critiqueset de sa « rhétorique guerrière »contre Israël.

Exercice d’équilibrismeConsacrées, en principe, aux

grands problèmes de l’heure, les«considérationspolitiques généra-les » marquent le début de la nou-velle année parlementaire auxPays-Bas. Cette fois, elles ont per-misàlafragilemajoritéd’étalertou-tes ses divergences et à M. Wildersde se livrer à des attaques en règlecontretouslesaspectsduprogram-

me gouvernemental qu’il n’ap-prouve pas. En particulier la politi-que européenne et le soutien auxEtats en difficulté, ainsi que l’aideau développement.

En revanche, le chef du PVV sou-tient l’essentiel des projets budgé-taires, qui visent à économiser aumoins 18 milliards d’euros, ainsiquelesplansvisantàréduiredrasti-quement le nombre de deman-deurs d’asile, à punir sévèrement leséjour illégal ou à interdire le portdu voile intégral.

Depuis la difficile mise en placede sa coalition avec les chrétiensdémocrates, fin 2010,M. Ruttes’est

habitué à la collaboration avec unparti qui, soulignait-il, « dépasserarégulièrement les limites de la bon-neéducation». Ils’entientofficielle-ment à «l’accord de contenu » qu’ila passé avec l’extrême droite etnéglige les provocations auxquel-les se livrent M. Wilders et sesadjoints. Jusqu’ici, cet exercice d’é-quilibrisme lui a permis de fairepasser plusieurs réformes majeu-res et de préserver sa popularité.

Après les remous de la rentréeparlementaire,lechefdugouverne-ment risque cependant d’êtreconfronté à d’importantes difficul-tés. Il a, en effet, besoin de l’appui

de l’opposition pour approuverdesdispositionsrejetéesparM.Wil-ders. Or celui-ci s’est aussi livré, lasemaine dernière, à une attaque enrègle contre Job Cohen, le chef duParti social-démocrate, décrit com-me « le toutou du gouvernement ».

M.Cohen, qui a approuvé la pro-longation d’une mission en Afgha-nistan et soutient le principe d’uneaide à la Grèce, réfléchit désormaissérieusement à l’attitude que sonparti doit adopter : les sondagesindiquentqu’ilestleseulgrandper-dantdesrécentsévénementspoliti-ques à LaHaye. p

Jean-Pierre Stroobants

Critiquéepar l’extrêmedroite, l’aide à la Grèce fragilise le gouvernementnéerlandaisLe débat de politique générale a mis en évidence les divergences entre le premier ministre libéral Mark Rutte et le populiste Geert Wilders

Benoît XVI à l’aéroport de Fribourg, le 25 septembre, juste avant de s’envoler pour le Vatican à l’issue d’un voyage de quatre jours dans son pays natal. ARND WIEGMANN/REUTERS

EnAllemagne, le pape s’est fait critiqueet exigeantPour clore sa visite, Benoît XVI a exhorté les catholiques à ne pas être des fidèles «de routine», «tièdes et faibles»

70123Mardi 27 septembre 2011

Etablirdes normesminimales pour 75%dela populationmondiale

L e social fera-t-il entendre savoix lors du prochain G20des chefs d’Etat qui se tiendra

à Cannes, sous présidence françai-se, les 3 et 4 novembre ? C’est entout cas l’ambition des vingtministres du travail réunis à Paris,lundi 26 et mardi 27 septembre.Alors que la crise financière conti-nue de mettre à mal l’économiemondiale et de menacer les systè-mes sociaux, le rôle de redistribu-tion et de bouclier joué par la pro-tection sociale doit être renforcé,estiment-ils.

Les ministres ont identifié qua-tre domaines prioritaires : les poli-tiques de l’emploi, surtoutvis-à-visdes jeunes; lesocle depro-tection sociale (couverture mala-die, retraites, accidents du travail,etc.) ; le respect des droits fonda-mentaux du travail ; le renforce-ment de la cohérence entre les

politiques sociale et économique.Les discussions ont été longues

et les désaccords souvent vifs entreles pays du G20. Les traditions etles réalités économiques et socia-les divergent, mais le constat estidentique: lacrisecontinuedeplusbelle et « cette période ne peut ser-vir d’excuse pour méconnaître ouaffaiblir les normes du travail »,explique le document qui devraitêtre adopté lors de la conférence.

Lundi, dans une prévisionconjointe, l’Organisation de coo-pération et de développement éco-nomiques (OCDE) et l’Organisa-tion internationale du travail(OIT) estiment que si le taux decroissance de l’emploi se main-tient à son niveau actuel, « il nesera pas possible de récupérer les20 millions d’emplois perdus dansles pays du G20 depuis le début dela crise ». D’ici à 2015, ces pays

connaîtront une grave pénurie decréations d’emplois, estiment lesdeux organismes.

Le temps où, en 2008, en pleinecrise économique, les chefs d’Etats’accordaient pour reconnaître lerôle indispensable d’amortisseurjoué par les politiques sociales est

loin d’être révolu. Le document àdestination du G20 le rappelle :« Les systèmes de protection socialecontribuent à renforcer la résistan-ce aux soubresauts de l’économie,

amortissent l’impact des crises etfavorisent un rééquilibrage de lacroissance à long terme. »

C’était aussi le message des res-ponsables syndicaux reçus diman-che soir par le ministre français dutravail, Xavier Bertrand. « Si la sti-mulation de l’économie est le pro-blème qui préoccupe le plus les lea-ders du G20, la solution se trouvedansl’emploi et la protection socia-le », a dit Sharan Burrow, secrétairegénérale de la Confédération syn-dicale internationale.

Plus qu’un engagement moral,le développement de la protec-tion sociale, qui ne couvre actuel-lement qu’un quart des habitantsde la planète, est une nécessité. Lerapport Bachelet – du nom de l’an-cienne présidente du Chili qui enest la coordinatrice – sur le « soclede protection sociale », rendupublic lundi, le dit aussi explicite-

ment : « L’agitation qui s’est mani-festée dans plusieurs pays d’Afri-que du Nord et du Moyen-Orientfournit une autre illustration de cequi peut se passer en l’absence deprotection sociale efficace, de mar-ché du travail adapté, de perspecti-ves suffisantes (en particulierpour les jeunes). »

Le «socle deprotection sociale»,observé au début avec méfiance,devrait être lancé officiellement ennovembre à Cannes. Pour Gilles deRobien, coordonnateur du voletsocial du G20 et délégué pour legouvernement français à l’OIT,« les réticences, notamment cellesdes pays émergents, ont diminué :ils ne voulaient pas se voir imposerun système unique de protectionsociale. Quelques-uns restent néan-moins méfiants à l’égard d’un voletsocialsuspectéd’être lemoyen pourles économies occidentales d’instal-

ler un certain protectionnisme».Si le « socle de protection socia-

le » devrait faire l’objet d’unconsensus, les affrontements sontrestés vifs sur la question de la« cohérence ». Comment éviterque les organismes financiers etéconomiques – OMC, FMI, Banquemondiale – ne préconisentl’inverse de ce qu’avance l’OIT ?Que les exigences économiquesne contredisent les nécessitéssociales ? Devant ses homologuesdu G20, lundi, Xavier Bertrand aexpliqué que « mieux coordonnerles organisations internationales,cela veut dire que l’on ne discutepas commerce d’un côté, financesd’un autre et social ailleurs ».

Rien n’est fait, concède M. deRobien.Pour assurercette cohéren-ce, dont beaucoup de pays (Chine,Inde et Canada, notamment) neveulent pas entendre parler,jugeant qu’elle risque de briderleur croissance, la proposition queles organisations internationaless’échangent des places d’observa-teur a été, finalement, abandon-née.Certains Etatsproposentnéan-moins que les politiques socialessoient intégrées dans l’« évalua-tion mutuelle des progrès réalisésdans la voie d’une croissance dura-ble», unconcept néauG20 dePitts-burgh en 2009. « Dans tous lespays, les ministres des finances s’yrefusent, ils sont dans une citadelleet pensent que le bonheur des gensne naîtra que de la croissance éco-nomique, regrette Gilles deRobien. Ils ont la culture du chiffreet sous-estiment l’aspect humaincomme facteur de croissance. C’estun des changements que l’on veutinscrire lors du prochain G20. » p

Rémi Barroux

planète

TokyoCorrespondance

L a découverte de riz forte-ment contaminé au césiumradioactif dans la préfecture

de Fukushima incite les autoritésjaponaises à multiplier les contrô-les et perturbe les opérationsmenées pour soutenir l’agricultu-re des zones dévastées le 11 marspar le tsunami.

Vendredi 23 septembre, le gou-vernement a en effet annoncéavoir mesuré un taux de 500 bec-querels par kilogramme (Bq/kg)sur du riz récolté à Nihonmatsu,une ville à 56 km de la centrale deFukushima. Un seuil qui empêchesa commercialisation.

La découverte a été faite dans lecadre des mesures prises depuis le1er août, qui obligent à contrôler leriz cultivé sur des sols contaminésà 1 000 Bq/kg, une semaine avantla récolte. Si la mesure de contami-nation dépasse les 200 Bq/kg, unsecond test doit être effectué aprèsla récolte. Sinon, la mise en venteest autorisée. Le dispositif concer-ne dix-sept préfectures de l’est duJapon, qui assurent près de la moi-tié de la production annuelle del’Archipel. Dans la seule préfectu-re de Fukushima, 370 zones doi-vent se soumettre à ce doublecontrôle. Jusque-là, le niveaumaxi-mal détecté ne dépassait par136 Bq/kg.

Selon les règles instaurées le1er août, la découverte du riz haute-mentcontaminéfaitdeNihonmat-su une « zone de suivi prioritaire »,statut qui a contraint la préfectureà augmenter dès le 24 septembrele nombre de points de contrôleinstallés dans la ville (de 38 à 300).

La présence de ce riz contaminéinquiètele ministèredel’agricultu-re qui estimait que seulement10 % du césium présent dans lessols passaient dans les plants. Ilavait par conséquent interdit la

plantation de riz dans les sols pol-lués à 5 000 Bq/kg et plus. Or, leniveau de contamination de la ter-re dans laquelle a été cultivé le rizincriminé est de 3 000 Bq/kg.

70 appareils de mesureLa forte contamination du riz

de Nihonmatsu, qui suit celle desépinards, du thé, du bœuf et du laitdepuis le début, mi-mars, de la cri-senucléaire, menace les efforts desautorités pour tenterde rassurer lapopulationsur l’innocuité despro-duits agricolesdes régionsprochesde la centrale de Fukushima.

Le ministère de l’éducation adécidé d’aider financièrement lesautorités locales pour qu’elles dis-posent d’appareils de mesure decontamination des aliments desti-nés aux cantines scolaires. Soixan-te-dix machinesdevraientêtre ins-tallées dans tout leJapon, principa-lement dans le nord-est et dans larégion de Tokyo.

Leministère del’agriculture, lui,a décidé de recenser les dizainesd’opérations menées dans tout lepays pour « soutenir l’agricultureet la pêche des régions dévastées ».Sur son site Internet, on découvre

que, depuis le 27 avril, la cantinetokyoïte du géant de la téléphonieNTT sert des plats réalisés de préfé-rence avec des produits des préfec-tures de Fukushima, Miyagi etTochigi. De même, les 8 et 9 sep-tembre, la puissante fédérationsyndicale agricole JA a organisé àTokyo une vente de fruits et légu-mes de six préfectures du nord-est,une opération intitulée « Du cœurdu Tohoku à la table de chacun ».

Dans un souci de relance del’économie des zones dévastées,le ministère des affaires étrangè-res a annoncé, le 14 septembre,

son intention d’obtenir une enve-loppe de 17 milliards de yens(165 millions d’euros) dans le troi-sième budget supplémentaireconsacré à la reconstruction.

Sur ce total, 5 milliards de yensserviront à une opération d’aidepublique au développement(APD). L’argent devrait permettreà des pays pauvres d’acheter desproduits des régions sinistrées. Lapriorité irait aux produits de lamerenconserve. Leministèreassu-re que leur innocuité sera garantieet que leur vente n’interviendraqu’à la demande du pays aidé.

Avec le solde des 12 milliards deyens, le ministère souhaite notam-mentorganiserdesopérationspro-motionnellespourdémontrerl’ab-sence de danger des produits deszones sinistrées. Il prévoit d’invi-ter des étrangers, des Etats-Unis,d’Europe et du Proche-Orient,dont lescomptes Facebook etTwit-ter sont particulièrement suivis.L’objectif : leur faire visiter les pré-fectures de Fukushima, de Miyagiet d’Iwate afin de les convaincre detransmettre le message que « leJapon est sûr ». p

Philippe Mesmer

CONTRIBUER à une mondialisa-tion plus juste, tel est l’objectif dela mise en place d’un socle de pro-tection sociale. Le constat est sim-ple: 5,1milliards de personnes,75 % de la population mondiale,ne sont pas couvertes par unesécurité sociale adaptée. Dans lerapport du groupe de travail, prési-dé par l’ancienne présidente duChili et directrice d’ONU-Femmes,Michelle Bachelet, rendu publiclundi 26 septembre à l’occasion dela réunion du G20 des ministresdu travail, l’édification de ce socleest un objectif non seulementnécessaire mais aussi accessible.

«L’idée maîtresse est que person-

ne ne devrait vivre en dessous d’uncertain niveau de revenu, et quetoute personne devrait pouvoiravoir accès au moins aux servicessociaux essentiels », écrivent lesrapporteurs. Comment cette idéeva-t-elle se concrétiser ? Pourrépondre à la diversité des situa-tions économiques dans le mon-de, on parle dorénavant de« socles» au pluriel. Il n’est pasquestion de proposer un modèleunique qui ne prendrait pas encompte les besoins et, surtout, lesmoyens différenciés de chaquepays.

Déjà, dans le monde, les initiati-ves foisonnent. Le programme bré-

silien de « Bolsa familia» (« boursefamiliale») fournit, depuis 2003,une allocation aux familles pau-vres sous certaines conditions,comme la scolarisation desenfants, la vaccination ou la sur-veillance alimentaire.

Au Mexique, le plan s’appelle«Oportunidades », au Chili, « ChiliSolidario». En Chine, la couvertu-re santé de base est passée de 15 %à 85% de la population, intégrant800 millions de personnes dans lesystème coopératif rural. En Inde,c’est le plan « Mahatma Gandhi »qui assure cent jours de travailpar an et par ménage aux famillespauvres. L’Afrique ne manque pas

non plus d’initiatives, maislesbesoins restent énormes.

Le rapport recommande auG20 d’appeler les pays donateurs,les organisations internationales…à soutenir ces initiatives nationa-les: « Les pays parmi les moinsdéveloppés auront besoin d’uneaide extérieure pour bâtir leur pro-pre système de protection sociale. »Ils doivent bénéficier de finance-ments supplémentaires. Desoutils fiscaux appropriés doiventêtre trouvés par le FMI pour que«les politiques sociales soient sou-tenables». Des contributions pri-vées doivent aussi être sollicitées.

Le chemin parcouru sur cette

question a été long. « La dynami-que a été forte », explique le Fran-çais Martin Hirsch, ancien haut-commissaire aux solidarités acti-ves contre la pauvreté, l’un desneuf membres du groupe de tra-vail international. « On est passédu stade où tout le monde s’en fou-tait à celui où certains se sont oppo-sés, pour finir par le premier actede lancement du socle de protec-tion sociale. » C’est maintenantaux chefs d’Etat du G20 qui se réu-niront, les 3 et 4 novembre à Can-nes d’établir le socle de protectionsociale comme un objectif univer-sel et concret.p

R. Bx

La centrale nucléairesous haute surveillance

LeJaponrenforcelescontrôlesaprèsladécouvertederizcontaminéprèsdeFukushimaTokyo multiplie les efforts pour convaincre les consommateurs de l’innocuité des produits agricoles provenant du nord-est du pays

«Lesréticences,notammentcelles

despaysémergents,ontdiminué»Gilles de Robien

délégué pour le gouvernementfrançais à l’OIT

Enpleine crise, la protection sociale s’invite au G20Les ministres du travail, réunis à Paris lundi 26septembre, craignent une forte aggravation du chômage

La découverte, jeudi 22septem-bre, d’hydrogène à une concen-tration supérieure à 1% – etdonc anormalement élevée –dans une conduite reliée à l’en-ceinte de confinement du réac-teur 1 de la centrale nucléaire deFukushima a incité l’Agence desûreté nucléaire et industrielle(NISA) à ordonner, le 25septem-bre, à l’opérateur Tepco (Compa-gnie d’électricité de Tokyo) devérifier si ce gaz ne se trouvaitpas également dans les tuyaute-ries des réacteurs 2 et 3.Pour le réacteur 1, Tepco veuteffectuer une mesure précise dela concentration d’hydrogène,avant de décider de mettre enplace de nouvelles mesures,comme des injections d’azote,pour limiter les risques d’explo-sion. Des mesures similairesseront prises si de l’hydrogèneest détecté dans les autresréacteurs.Ces derniers rebondissementsreflètent les difficultés de repri-se de contrôle de la centrale parl’opérateur japonais.

Prélèvements, en mai, par des experts de Greenpeace, d’échantillons de terre dans une rizière située dans la province de Fukushima, à 60 km de la centrale. MARKET REDONDO

8 0123Mardi 27 septembre 2011

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Créditphoto:DidierGuy

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JohannesburgCorrespondance

I l y a suffisamment d’eau pourtous les habitants de la planèteà condition que cette ressource

soit beaucoup mieux utilisée etrépartie plus équitablement. C’estle principal enseignement du rap-port « Eau et alimentation »,publié lundi 26 septembre par leGroupe consultatif pour la recher-che agricole internationale(CGIAR), qui regroupe une soixan-taine d’Etats et d’ONG.

L’étude scientifique analyse lasituation des bassins de dix grandsfleuves dans le monde (Nil,Mékong, Volta, etc.) en Afrique, enAsie et en Amérique du Sud.«D’énormes volumes d’eau de pluiesont perdus ou jamais exploités »,explique Alain Vidal, du CGIAR, quiévoque un « défi politique ». « Avecde modestes améliorations, nouspourrions doubler, voire triplernotre production alimentaireactuelle. » Multiplier celle-ci pardeux permettrait de faire face àl’augmentation de la population,de 7milliards à 9,5milliards de per-sonnes, prévue d’ici à 2050.

Dans le bassin du fleuve Limpo-po (long de 1 750 kilomètres), quis’étend sur 415 000 km2 et quatrepays (Afrique du Sud, Botswana,

Zimbabwe, Mozambique), un tiersdes 14millions d’habitants vit avecmoins d’un dollar par jour. Ce sontsurtoutdes petits paysans pourles-quels l’accès à l’eau est limité.

Coauteur de l’étude sur le bas-sin du Limpopo, Amy Sullivan esti-me que la sécurité alimentaire etla baisse de la pauvreté dans larégion passeront par le développe-ment de l’agriculture fluviale : « Ilfaut encourager l’installation debacs de récupération de la pluie etde points d’eau pour le bétail pourque les habitants ne craignent plusl’avenir et puissent faire des projetsà plus long terme en agrandissantleur lopin de terre et leur cheptel. »

Précipitations erratiquesDans les prochaines années, le

changement climatique pourraitfortement perturber la saison despluies – de septembre à avril –,accentuant la nécessité de se pré-munir contre le caractère de plusen plus erratique des précipita-tionsdans cette régionmajoritaire-ment semi-aride.

Côtoyant cette agriculture desubsistance, les grandes exploita-tions commerciales (20 % des fer-miers, 60 % des terres), essentielle-ment situées en Afrique du Sud, sesont développées grâce à l’irriga-tion. Mais l’exploitation de l’eau a

atteint son maximum et le secteurva également devoir faire desefforts. Aggravé par le réchauffe-ment, le phénomène d’évapora-tion devra, par exemple, être limi-té par l’installation de conduitsacheminant l’eau jusqu’auxchamps. L’étude souligne égale-ment la nécessité de réfléchir à deschangements de types de culture,comme remplacer celle du maïspar celle des fruits, à plus fortevaleur ajoutée, pour mieux renta-biliser l’utilisation de l’eau.

Une plus grande concertation

entre les ministères au sein d’unmême pays est vivement encoura-gée. Avec l’exploitation dans lesprochaines années de nouvellesmines de charbon dans le nord del’Afrique du Sud, le long du fleuveLimpopo, des discussions ontactuellementlieuentrelesdéparte-ments de l’agriculture, de l’énergieet de l’eau. « C’est compliqué car lesintérêts sont très divergents, maisc’est tout de même la première foisqu’ils se parlent », s’enthousiasmeAnthony Turton, spécialiste del’eau, qui assiste aux négociations.

Promoteurdelathéoriedu«par-tage des bénéfices», cet expert sud-africain juge aussi nécessaire uneréallocation des activités au niveaurégional selon les atouts des uns etdes autres: «Des activités agricolespourraient être déplacées auMozambique où la terre est plushumide, tandis que le Zimbabwe,par exemple, investirait dans le sec-teur du tourisme au lieu de cultiverdes fruits dans une région aride etde consommer beaucoup d’eau.»

Le 22 septembre, à Maseru, lacapitale du Lesotho, les ministresde l’eau de l’ensemble des pays dela Communauté de développe-ment d’Afrique australe (SADC) sesont réunis pour la première fois.« C’est remarquable car ici on se batvraiment pour l’eau », commenteHorst Vogel, responsable d’un pro-gramme de développement trans-frontalier de l’eau (GIZ-TWM) dansla SADC. « Les Etats finissent parcomprendre que c’est une ressour-ce limitée et qu’il faut donc tra-vailler ensemble pour l’utiliser aumieux et au bénéfice de tous. » p

Sébastien Hervieu

Parmi les dix grands bassins flu-viaux étudiés par le Groupeconsultatif pour la rechercheagricole internationale (CGIAR),celui du Mékong illustre particu-lièrement les insuffisances de lagouvernance de la ressource eneau. «Les pays membres de laCommission du Mékong (Cam-bodge, Laos, Thaïlande et Viet-nam) font passer avant toutleurs intérêts particuliers»,

constatent les auteurs du rap-port. Ceux-ci estiment que la res-source en eau est pourtant suffi-sante pour répondre à la pres-sion démographique régionaleet aux besoins en énergie et enproduits alimentaires.«La diminution de la pauvretédépendra en grande partie desréponses institutionnelles»apportées à la question de la ges-tion de l’eau, estiment-ils.

Environnement Mortde Wangari Maathai,Prix Nobel de la paix 2004Pionnière africaine de la luttecontre le changement climatique,Wangari Maathai est morte à Nai-robi, au Kenya, dimanche 25sep-tembre, à l’âge de 71ans, des suitesd’un cancer. Wangari Maathai,Prix Nobel de la paix 2004 pourson engagement envers le dévelop-pement durable, avait fondé en1977 le Mouvement de la ceintureverte, destiné à lutter contre ladéforestation en Afrique. Le Mon-de publiera sa nécrologie dans uneprochaine édition.

Bolivie : la police disperseune marche indigèneLa police a dispersé, dimanche25 septembre, un rassemblementd’un millier d’Indiens amazo-niens qui marchaient depuis lami-août vers La Paz, afin de protes-ter contre un projet de route tra-versant un parc naturel, le Tipnis.Ce lieu est la terre ancestrale de50000 Indiens de trois ethniesamazoniennes. Les marcheurscampaient près du village deYucumo, dans le nord-est du pays,bloqués par un barrage érigé pardes partisans du gouvernement.Le principal syndicat de Bolivie, laCOB, a appelé à une grève généra-le pour mercredi. – (AFP.)

Appel à une gestion plus équilibrée du bassin du Mékong

L’agriculture fluviale, remède à lacrise alimentaireUne meilleure utilisation de l’eau des plus grands fleuves du monde permettrait de doubler, voire de tripler les récoltes

L e gouvernement françaischerche-t-il à marginaliserles petites associations

jugées parfois plus turbulentes ?La parution d’un décret définis-sant les conditions d’agrément etde représentativité des associa-tions de protection de l’environne-ment a mis la communauté desorganisations non gouvernemen-tales (ONG) en émoi. Au point quedeux d’entre elles, Ecologie sansfrontière et Générations futures,ont déposé devant le Conseil d’Etatdeux recours visant à l’annulationdudécretetdesonarrêtéd’applica-tion, qui datent du 12 juillet. Dansun communiqué, le 20septembre,une vingtaine d’associations –outrelesdeuxdéjàcitées,ony trou-veRobindestoits,Sciencescitoyen-nes, Réseau environnement santé,etc. – dénoncent un texte « visant àrestreindre le droit qu’ont les asso-ciations dites agréées pour la pro-tection de l’environnement à parti-ciper aux instances consultativesen matière d’environnement ». Par-mi celles-ci, le Conseil supérieur del’énergie, le Haut Conseil des bio-technologies, le Conseil nationalde l’eau ou des déchets…

Ces petites associations crai-gnent de voir les plus « grosses » eten particulier France nature envi-ronnement(FNE) confisquer ledia-logue environnemental. Le décretprévoit qu’à partir de 2015, uneassociation devra, pour participeraux discussions au sein des instan-ces consultatives, compter aumoins 2 000 membres, justifierd’une « expérience et de savoirsreconnus » et faire preuve d’une« certaine indépendance».

FNE «clairement avantagée»« Le gouvernement veut faire le

ménage dans le paysage associa-tif », proteste Nadir Saïfi, vice-pré-sident d’Ecologie sans frontière,qui dénonce un « décret avanta-geant clairement FNE ». « Nousn’avons pas envie de passer 80 %denotre tempsà chercherdes adhé-rents, explique-t-il. Le job de notreassociation est de lutter contre lapollution de l’air. »

« Nous sommes reconnus pourla qualité de notre expertise, sur lespesticides par exemple, et nous nevoyons pas pourquoi il faudrait fai-

rela preuve denotrereprésentativi-té », estime, de son côté, NadineLauverjat, de Générations futures.

Certaines organisations, com-me Greenpeace et WWF, quis’étaient associées au courrier deprotestation envoyé à la ministrede l’écologie en juillet, n’ont pasrejoint la procédure engagéedevant le Conseil d’Etat. « Le décretn’est pas à proprement parler scan-daleux, dit Sylvain Tardy, deGreenpeace. Mais on peut com-prendre l’inquiétude de voir despetites associations comme la Crii-rad, spécialisée dans la recherchedela radioactivité,être excluesmal-gré leur expertise. » Au WWF, Jac-ques-Olivier Barthe, le directeurde la communication, dit « com-prendre que certains puissent sesentir floués ».

Au ministère de l’écologie, ons’étonne. « Ce décret est la traduc-tion même du Grenelle, fait-onvaloir. Tout le monde était d’ac-cord pour renforcer la représentati-vité du mouvement associatif afinqu’il ait dans la nouvelle gouver-nance la même place que lesautres,comme lescollectivités terri-toriales ou les syndicats. » Le minis-tèrenese prive d’ailleurs pasdefai-re remarquer que toutes les asso-ciations n’ont pas protesté.

En effet, FNE, qui regroupe quel-que 3 000 associations locales, nes’oppose pas au décret. « Nous nesouhaitons pas qu’une association,montée au dernier moment contretel ou tel projet, puisse avoir lamême voix que des organisationsreconnues nationalement », avan-ce Benoît Hartman, porte-parolede FNE. Pour le président BrunoGenty,«ledécretobligeraàun fonc-tionnement plus démocratique et,plutôt que de rester dans la frag-mentation,celaaideraàdes regrou-pements et à l’élaboration de posi-tions communes plus fortes ».

Mais il ne sera pas si simple defédérer des compétences aussi dif-férentes. L’avocat Louis-NaritoHarada, qui a déposé le recoursdevant le Conseil d’Etat, estimeainsi que « malgré un paysagehétéroclite, il sera difficile pour denombreuses associations de seregrouper sans risquer de perdreleurs fondamentaux ». p

Rémi Barroux

EnFrance, les petites ONGcraignentde perdre laparoleUn décret durcit les règles de participationaux commissions environnementales

france

aaaSuite de la première page

Pratiquementpartout,àl’excep-tion de la Manche, où le maintiend’une candidate centriste aurapour effet de permettre la réélec-tion du sénateur socialiste sortant,Jean-Pierre Godefroy, les consi-gnes de retrait seront observées.Mais cela ne sera pas suffisantpour endiguer la vague.

Au fil de l’après-midi, les résul-tats confirmeront la poussée de lagauche. Difficile, alors, d’affirmeravec certitude que ses gainsseraient suffisants pour lui assurerla majorité. Ce n’est qu’à partir dumoment où tombent les résultatsdu second tour des départementsau scrutin majoritaire que cette«victoire historique » prend forme.Le passage des 3 sièges du Morbi-han à gauche met fin au suspense.

La victoire de la gauche ne faitalors aucun doute. Gérard Larcher,le président sortant (UMP) duSénat, Patrick Ollier, le ministrechargé des relations avec le Parle-ment, Alain Marleix, le responsa-ble des élections à l’UMP, ont pour-tant tenté d’entretenir le doute, enlaissant entendre que la majoritéen sièges de la gauche ne ferait pasnécessairement une majoritépour l’élection à la présidence duSénat, qui aura lieu samedi 1er octo-bre. Dans une brève déclaration àla presse, dimanche en début de

soirée, M. Larcher, confirmantqu’il serait candidat à sa propresuccession, a estimé que « la majo-rité sénatoriale reste à construire ».

En réponse, la gauche dénonced’éventuelles tentatives de« débauchage ». Mais il apparaîtpeu vraisemblable que le prési-dent sortant parvienne à inverserla logique politique issue du scru-tin. Cela ne serait pas rendre servi-ce à l’institution elle-même. Il luifaudrait en outre convaincre lesdeux ministres élus, Gérard Lon-guetet Chantal Jouanno, de démis-sionnerde leurs fonctionsministé-rielles pour rejoindre le Sénat.Tous deux devaient s’en entrete-nir, lundi, avec M. Sarkozy, mais ilest probable que le chef de l’Etatpréférera s’éviter un nouveauremaniement et leur demanderade rester au gouvernement.

Malgré la mauvaise volonté decertainsresponsables de la droite àle reconnaître, la majorité sénato-riale existe, elle a simplementchangé de camp. « Comme ils seconsidèrent comme propriétairesde cette maison, ils n’arrivent pas às’imaginer que ça se passe autre-ment», note Jean-Pierre Bel, le pré-sident du groupe socialiste, quidevrait recevoir, mardi, l’inves-titure de son groupe pour briguerla présidence. La sénatrice des Yve-lines Catherine Tasca a cependantconfirmé au Monde son intention

de se porter également candidateet de solliciter un vote du groupe.

Accompagné de Martine Aubryet de François Hollande, et entouréde nombreux supporteurs eupho-riques, M. Bel a prononcé, peuavant M. Larcher, une déclarationsaluant la « fin d’une fatalité ».« Pour la première fois dans l’histoi-

re de la VeRépublique, le Sénat vaconnaître l’alternance. Le change-ment est en marche », a-t-il déclaré,espérant que ce succès en appelle-rait d’autres, au printemps 2012.Conscient, toutefois,que lamajori-tésénatorialedegauchereste étroi-te, il a affirmé « tendre la main à

tous ceux qui souhaitent la rejoin-dre».

Tout au long de la soirée, M. Bels’est entretenu avec ses alliéspour commencer à esquisser lescontours de sa future majorité.Dans un premier temps, il souhai-te que la gauche présente un can-didat unique dès le premier tour àla présidence du Sénat et que celui-ci fasse le plein des voix. Le PS doitdonc entendre les demandes deses partenaires et leur donner desassurances.

Les Verts, qui passent de 4 à10 sénateurs, veulent avoir l’enga-gement formel que le seuil deconstitution d’un groupe seraabaissé de 15 à 10 membres. Legroupe PCF et apparentés reste ledeuxième groupe de gauche avec21 membres et entend bien êtreconsidéré comme tel. Le PRG, qui a11 élus, espère arriver à retrouver,avecdivers appoints, un groupede16 ou 17 membres.

Satisfaire tout le monde sansmécontenter personne ne sera pas

chose aisée. D’autant que la courtevictoire de la gauche ne l’autorisepas à revendiquer une gouvernan-ce exclusive, notamment auniveau des commissions perma-nentes. « Ici, tout se fait à la propor-tionnelle. Il y aura probablementune discussion pour savoir com-ment se présideront les commis-sions », rappelle le président dugroupe UMP, Jean-Claude Gaudin,qui prône « une gouvernance par-tagée ». La droite pourrait ainsiréclamer la présidence de la com-mission des finances, en invo-quant la réciprocité avec l’Assem-blée nationale, où cette présidenceest attribuée à l’opposition.

Après s’être enfermé dans sonbureau, dans la soirée, avec quel-ques responsables du groupeUMP, M.Gaudin a admis la défaitedu parti présidentiel. « Il est clairque nous avons perdu », jugeait-il,reconnaissant une victoire de gau-che plus large que prévue. Pour lesénateur des Bouches-du-Rhône,plusieurs facteurs se conjuguent

pour expliquer ce sérieux revers.Du bout des lèvres, il évoque laréforme territoriale : « L’intercom-munalité paraît compliquée àbeaucoup.On nevoyaitpasl’urgen-ce de toutes ces modifications »,note-t-il.

Certains, dans les rangs de lamajorité, sont encore plus sévères.« Je n’attribue la faute de la défaiteà personne mais je pense que le pré-sident de la République ne nous apas forcément rendu service. Laréforme territoriale nous effrite »,maugrée André Dulait, vice-prési-dentdugroupeUMP. Lepartiprési-dentiel apparaît très clairementcomme le principal perdant de cescrutin, alors que les centristes,malgré quelques pertes, s’en sor-tent plutôt bien. Cette défaite de ladroite au Sénat pourrait bien accé-lérer certains reclassements. p

Patrick Roger

n Sur Lemonde.frRetrouvez tous les résultatset les biographies des sénateurs élus

LES ÉLECTIONS SÉNATORIALES

Ladroitepourraitréclamerlaprésidencedelacommissiondesfinances,invoquant

laréciprocitéavecl’Assemblée

Au Sénat, dimanche soir 25 septembre, de gauche à droite : Harlem Désir, Martine Aubry et François Hollande. BRUNO LEVY/FEDEPHOTO POUR « LE MONDE »

Lesélus ruraux ontdonné le Sénatà la gaucheLe PS et ses alliés doivent leur victoire aux sièges gagnés dans les départements votant au scrutin majoritaire

«Celapourraitpermettred’avancersurlecumuldesmandats»

Le Sénat avant le dimanche 25 septembre 2011 :343 sièges, dont 165 à renouveler

Nombre total de siègespar sensibilité politique

152

29

160

2

Total343

Le Sénat après le dimanche 25 septembre 2011 :348 sièges, dont 177 à gauche

Nombre total de siègespar sensibilité politique

177

23

148Total348

a Gauche(72 sièges renouvelables)

a Centre(19 sièges renouvelables)

a Droite(72 sièges renouvelables)

a Sièges vacants(2 sièges renouvelables)

Entretien

Guy Carcassonne est professeurde droit constitutionnel à Paris-X.Ancien collaborateur de MichelRocard à Matignon (1988-1991), ila fait partie de la commission Bal-ladur de réforme des institutions.La gauche majoritaire au Sénat,est-ce une révolution?

Politiquement, c’est une pre-mière, pas seulement sous laVe République puisque si les répu-blicains, sous la IIIe, y étaient deve-nus majoritaires assez tôt, la gau-che, elle, ne l’a jamais été franche-ment, faisant dire du Sénat qu’ilétait une Chambre traditionnelle-ment modérée, un euphémismepour conservatrice. Donc oui, poli-tiquement, c’est très nouveau.

Institutionnellement, en revan-che, on a déjà connu le Sénat dansl’opposition; opposition à deGaul-le, de 1962 à 1969, et surtout, oppo-sition à la gauche durant les quin-ze années où elle a été au pouvoirsous la Ve.Comment expliquez-vous cetteforte poussée de la gauche?

Ses victoires dans les électionslocales devaient bien finir par serépercuter au Sénat, même si lepoids excessif des petites commu-nes a retardé cette échéance. Ajou-tez-y des divisions à droite et le

basculement se comprend.Peut-on avoir une surprise lorsde l’élection du président duSénat, samedi 1er octobre, com-me le laisse entendre la droite?

Une surprise serait indigne. Sila gauche a la majorité absolue etqu’elle ne peut avoir la présiden-ce, ce serait vraiment indigne.En avril1998, Lionel Jospin quali-fiait le Sénat «d’anomalie pourla démocratie». La gauche majo-ritaire va-t-elle être tentée debousculer l’institution?

Je ne le crois pas. Lorsque Lio-nel Jospin parlait d’anomalie, jepense qu’il visait le mode de scru-tin qui donne une représentationun peu caricaturale, et non l’insti-tution elle-même. De fait, s’il y adeux Assemblées, c’est pour repré-senter deux objets différents,l’une le peuple, l’autre le territoi-re. En soi, je suis convaincu quec’est une bonne chose, ne serait-ceque pour se prémunir un peucontre les engouements d’uneAssemblée unique.

Pour le reste, Olivier Duhamel[professeur de droit constitution-nel à Sciences-Po Paris, anciendéputé européen (PS)] avaitbrillamment démontré que l’hos-tilité des forces politiques àl’égard des institutions diminuetoujours au fur et à mesure qu’el-

les s’en approchent. La gauche vadécouvrir à la seconde Chambredes vertus insoupçonnées…Il n’y aura donc pas de consé-quence sur le fonctionnementdes institutions?

La gauche n’a jamais été empê-chée de gouverner par le Sénat dedroite ; la droite ne le sera pasdavantage par un Sénat de gau-che. Tout au plus l’adoption desprojets de loi prendra-t-elle unpeu plus de temps ce qui,d’ailleurs, n’est pas mauvais.Ce résultat aura-t-il des consé-quences sur la présidentielle?

Ce ne sont pas les territoires quivotent à la présidentielle. Cela dit,ce vote est évidemment un reverspour l’actuelle majorité d’autantplus spectaculaire qu’il est prochedes échéances majeures.Ce basculement peut-il favoriserdes projets de la gauche si celle-ci emporte la présidentielle?

Oui, mais uniquement pour leslois organiques relatives au Sénat,pour lesquelles son accord estrequis, contrairement aux autreslois organiques. Cela pourrait per-mettre d’avancer enfin sur lecumul des mandats, comme le PSle promet dans son programme. Ils’est engagé à ce que les députéset les sénateurs ne puissent pluscumuler leur mandat avec la res-

ponsabilité d’un exécutif local.Sauf à se ridiculiser, il ne pourrapas rester immobile sur ce sujet.

Quant à des révisions de laConstitution, par exemple pourintroduire une «règle d’or»[d’équilibre des financespubliques], il faudrait que la gau-che obtienne la majorité des troiscinquièmes du Parlement ou pas-se par des référendums. Au moinsces derniers deviendraient-ilstechniquement possibles car,avant de les convoquer pour modi-fier la Constitution, il faut que letexte ait été voté en termes identi-ques par les deux Assemblées.Peut-on imaginer qu’au-delà de2012, la gauche puisse avoir lemonopole des pouvoirs en Fran-ce, ce qui ne s’est jamais vu?

On peut tout à fait l’imaginer.Un risque ou une opportunité?

Pourquoi diable faudrait-il s’eninquiéter si c’est au profit de lagauche, après l’avoir trouvé nor-mal chaque fois que ça s’est pro-duit, très souvent, au profit de ladroite ? La situation ne serait nou-velle que par l’identité de ses béné-ficiaires. Le Conseil constitution-nel, la presse, l’opinion seront tou-jours là, qui restent les rempartsles plus solides contre les excès. p

Propos recueillis parFrançoise Fressoz

10 0123Mardi 27 septembre 2011

politique

L a droite a perdu son « AAApolitique ». Sa majorité auSénat, qu’elle pensait imper-

dable. A sept mois de l’élection pré-sidentielle,Nicolas Sarkozy encais-se une défaite majeure, à l’issued’une semaine marquée par la cri-se des banques, le retour des affai-res et la mise en cause de ses pro-ches Nicolas Bazire et Brice Horte-feux. Claque supplémentaire, Pier-re Charon, l’ancien conseiller duchef de l’Etat tombé en disgrâce,qui s’était présenté en dissidencecontre l’avis du « Château », a étéconfortablement élu au Sénat.

A l’Elysée, Franck Louvrier,conseiller du président, « prendactedelaprogressiondelagauche »mais ajoute qu’elle est « la consé-quence logique» des scrutins anté-rieurs, municipaux, régionaux etdépartementaux.« C’estunedécep-tionmaispasunesurprise»,aégale-ment expliquéle secrétaire généralde l’UMP, Jean-François Copé. Bref,il s’agirait d’un reflet du passé etpas de l’électorat actuel.

En réalité, la droite a été surpri-se par l’ampleur de la vague rose.« On savait que ce ne serait pas faci-le. Mais des départements commele Morbihan qui passent à gauche,onne s’y attendait pas», reconnais-sait-on dimanche 25 septembre àMatignon. Dans un communiqué,le premier ministre, FrançoisFillon, a accusé le coup en concé-dant que « l’opposition enregistreune forte poussée » avant de pro-mettre : « Ce soir, la bataille com-mence. » « C’est vraiment une sur-

prise, notait un ministre impor-tant du gouvernement, sous lechoc. On s’attendait à une pousséemécanique de la gauche, mais onespérait sincèrement la contrer. Onne pensait pas que les divisionsnous coûteraient aussi cher. » Pource ministre, la défaite de la majori-té montre « le manque d’attractivi-té de la marque UMP et un problè-me assez grave de la droite dans lemonde rural».

Prenant acte de la défaite, ladroite tente d’en minimiser la por-tée. Benoist Apparu, secrétaired’Etat au logement, explique ainsiqu’une bataille perdue au Sénatest certes « un séisme institution-nel,un impact sur l’ambiance géné-rale, dans la presse », mais que« cela ne fera pas bouger une voixpour la présidentielle ». « Le prési-dent de la République, il ne faut pasle mêler à cela, a lancé l’ancien pre-mier ministre Jean-Pierre Raffa-rin, sur France 2, dimanche. L’élec-tion présidentielle est au mois demai et, en général, les vainqueursde septembre-octobre dans les son-dages ou dans les élections ne sontpas les vainqueurs de mai. »

Nul ne croit en un putsch possi-ble contre Nicolas Sarkozy. « Cen’est pas le sujet », note un minis-tre. Pourtant, le même concède« qu’en ce moment », son camp« n’est vraiment pas en forme ».

En effet, le scrutin intervientaprès une semaine de révélationsdansl’affaire de Karachi.Les minis-tres reviennent inquiets de leurscirconscriptions. « Le climat n’estpas sain, il n’est pas bon », observeBenoist Apparu. « Ces affaires ali-mentent le “tous pourris” sur le ter-rain. Les électeurs accusent les poli-tiques de leur demander des effortset de ne pas en faire eux-mêmes »,regrette un ministre.

L’entourage du président cher-che à se rassurer et rappelle que,au début de la campagne présiden-tielle de 2007, Nicolas Sarkozyétait attaqué, que ce soit dans l’af-faire Clearstream ou sur les condi-tionsd’acquisition de son apparte-ment. Cette année, il a été décidéde faire le gros dos. « Il n’y a pas destratégie de Nicolas Sarkozy, car iln’est pas concerné par cette affai-re », assure ainsi Brice Hortefeux,en référence au volet financier del’enquête sur l’attentat de Karachi.

L’Elysée n’a pas constitué, com-me du temps où Claude Guéantétait secrétaire général, une cellu-le interne pour gérer les affairesdélicates. Xavier Musca, qui lui asuccédé à ce poste, se concentresur la crise de l’euro et des ban-ques. « Qu’est-ce vous voulez qu’ilfasse? Commander des écoutes ? »,s’agace un proche du président.

Il n’empêche, des membres dupremier cercle des sarkozystessont touchés : son mentorEdouard Balladur, son alter ego del’époque, Nicolas Bazire, et soncompagnon politique de toujours,Brice Hortefeux. Nicolas Sarkozy aamorcé le lâchaged’Edouard Balla-dur, dès jeudi, en minimisant sonpropre rôle dans sa campagne pré-sidentielle. L’Elysée a appelé Nico-las Bazire à la sortie de sa garde àvue, et fait savoir qu’il était « plusmarqué qu’inquiet ».

L’exécutif laisse entendre quele dossier concernant Nicolas Bazi-re est vide, mais le range désor-mais dans le camp des simplesamis du président. « C’est un amidu président de la République,mais ce n’est pas son procheconseiller, il ne l’a jamais été », adéclaré samedi Henri Guaino,conseiller spécial de M. Sarkozy.

Reste le cas de Brice Hortefeux,qui a prévenu Thierry Gaubert desa mise en cause dans l’affaire deKarachi. « Il s’est fait avoir commeun bleu », accuse un proche duchef de l'Etat. M. Hortefeux n’a pasreçu le moindre coup de fil du pré-sident, qui semble prendre ses dis-tances avec lui.

Les affaires compliquent le dis-positif de campagne. Depuis sarelaxe en appel pour ses propossur les Auvergnats, Brice Horte-feux se voyait un avenir politique.Aujourd’hui, il se contente dedire : « J’aiderai où je serai utile. » p

Arnaud Leparmentieret Vanessa Schneider

LES ÉLECTIONS SÉNATORIALES

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«C’estunséismeinstitutionnel,unimpactsur

l’ambiancegénérale»Benoist Apparusecrétaire d’Etat

au logement

T oute la droite n’était pas endeuil, dimanche 25septem-bre, après la perte de sa majo-

rité au Sénat. Un petit grouped’élus parisiens UMP «savouraitla victoire », celle de Pierre Charon,candidat dissident et aujourd’huisénateur de Paris. L’élection de cetancien conseiller de Nicolas Sarko-zy, provisoirement exclu du partiprésidentiel, est un camoufletpour la fédération parisienne del’UMP, pour Matignon et pourl’Elysée, qui, de concert, avaientétabli une liste excluant lesbarons de la droite parisienne.

Chantal Jouanno, ministre dessports et tête de liste parachutéedes Hauts-de-Seine à Paris, effec-tue son atterrissage sur une lour-de défaite. Alors que l’UMP espé-rait pour sa liste quatre élus, deuxde ses candidats, seulement, siége-ront au Palais du Luxembourg :Chantal Jouanno et le sortant Phi-lippe Dominati. Les deux autressièges promis à la droite revien-nent à Yves Pozzo di Borgo, séna-teur sortant Nouveau Centre, etau dissident Pierre Charon. Tousdeux voteront pour le candidat dela majorité présidentielle à la pré-sidence du Sénat, Gérard Larcher.

Promesses de mandats à venir,menaces de refus d’investiturepour les futures élections législati-ves: l’UMP Paris n’avait pas ména-gé ses efforts pour convaincre lesgrands électeurs de se prononcerpour la liste officielle. Mais lesecret de l’isoloir, comme le prédi-sait M.Charon, a été fatal aux can-didatures de la sortante CatherineDumas et du filloniste Pierre-Geor-ges Courtois, numéros3 et4.

Ce revers ouvre une brèche

dans le projet de Philippe Goujon,président de la fédération parisien-ne, de faire venir le premier minis-tre dans la 2e circonscription deParis, aussi convoitée par RachidaDati, maire du 7e arrondissement.

Les élus UMP parisiens ne sontpas les seuls à se réjouir du décolla-ge manqué de la candidatureFillon. «Le vote des maires UMPpour la liste de Charon, c’est lerésultat du double jeu de Jean-Fran-çois Copé [secrétaire général del’UMP], qui fait tout pour flinguerla candidature de Fillon à Paris»,souffle un ministre. Ravi, le mairede Paris, Bertrand Delanoë (PS),n’a pas manqué de souligner un«échec personnel» pour le pre-mier ministre.

«Essayer de rassembler»Lors de la réunion de rentrée

du Conseil de Paris, les 26 et 27sep-tembre, la droite, qui a rarementété aussi divisée, devait partagerles mêmes bancs. Il faut «essayerde se rassembler », plaide M. Gou-jon, qui, une semaine avant, récla-mait l’exclusion des dissidents. Ilest nécessaire de changer d’hom-mes et de méthodes, répond-ondu côté de M. Charon. Il n’est pascertain que Mme Jouanno amorcedans les meilleures conditions lamission de renouvellement quelui a confiée l’Elysée.

M.Pozzo di Borgo voudrait unarrêt des parachutages politiquesdans la capitale. «Il faut que la droi-te cesse de considérer Paris commeune sous-préfecture et qu’elle sesouvienne de l’échec de la candida-ture Séguin aux municipales de2001!», plaide l’élu centriste. p

Eric Nunès

AParis,Pierre Charons’imposecontre l’Elysée

S’ajoutantà la criseet aux affaires,ladéfaite aggravele désarroi à droiteL’entourage de M.Sarkozy ne veut y voir que la conséquence des élections locales antérieures

110123Mardi 27 septembre 2011

politique

LES ÉLECTIONS SÉNATORIALES

Sièges gagnés à gauche

Nombre de sièges gagnés

Sièges gagnés à droite

Stabilité

+ X

Pyrénées-Atlantiques

Pyrénées-Orientales

Landes

Loire-Atlantique

Maine-et-Loire

Morbihan

Manche

Orne

MayenneLoiret

Indre-et-Loire

Loir-et-Cher

Nièvre

Jura

MeuseMoselle

Marne

Haute-Marne

Hauts-de-Seine

Paris

Seine-Saint-Denis

Val-de-MarneOise

Pas-de-Calais

Nord

Meurthe-et-Moselle

Hautes-Pyrénées

Lot Lozère

Haute-Loire

Puy-de-Dôme

Loire

Isère

Lot-et-Garonne

1

1-Val-d'Oise2-Essonne

3-Seine-et-Marne

23

Guadeloupe Martinique Réunion Nouvelle-Calédonie Mayotte Saint-Pierre-et-Miquelon

Françaisà l’étranger

Yvelines

La gauche gagne 25 sièges

+ 1

+ 1

+ 1

+ 1

+ 1+ 1

+ 1

+ 1

+ 1+ 1

+ 1

+ 2

+ 1+ 1

+ 1

+ 1

+ 1+ 1

+ 1

+ 2 + 1 + 1 + 1 + 1+ 1

A u Sénat, à l’occasion de cetteélection historique, toutchange, sauf le centre ! La

gauche progresse nettement, ladroite fait tout aussi nettement lechemin inverse, mais l’improba-ble « famille centriste» tient, dansl’ensemble, son rang. En conti-nuant, comme à l’accoutumée, dese chercher une introuvable cohé-rence, dans le fatras de sigles d’unemyriade de partis politiques…

En regardant les résultats dudimanche 25 septembre dans ledétail, une ligne de fracture sedégage. Les formations qui se veu-lent autonomes (l’Alliance centris-te de Jean Arthuis, une spécificitésénatoriale, et le MoDem de Fran-çois Bayrou) ont eu des difficultés.Ensemble – elles présentaient descandidats communs –, elles per-dent six sièges.

Les chapelles centristes qui seréclament de la majorité (le Nou-veauCentred’HervéMorinetlePar-ti radical de Jean-Louis Borloo) ont,elles, tiré leur épingle du jeu. Ellesappartiennent toutes les deux à lanouvelleAlliancerépublicaineéco-logiste et sociale (ARES) créée auprintemps autour de M. Borloolorsque ce dernier a décidé de rom-pre avec l’UMP et d’afficher sesambitionsprésidentielles.«Cescru-tin montre que le parti unique dedroite est rejeté. Cela m’impose uneréflexion et me crée une vraie res-ponsabilité», estime M. Borloo.

Pourtant, c’est le parti d’HervéMorin – allié à M. Borloo pour lessénatoriales, mais rival pour l’inv-estiture à la présidentielle – quifait la meilleure opération. LeNou-veau Centre, composé principale-ment des anciennes troupes deM.Bayrou qui ont choisi de le quit-teraprès lepremier tourdelaprési-dentielle de 2007 pour s’arrimer àla droite, passe de neuf à treizeélus. « Cette élection, c’est le ras-le-boldes grands électeurs divers droi-te ruraux, qui n’ont pas supportéles réformes territoriale et fiscaleratées, dit M. Morin. Ajoutez à celalanauséesurlaprétendue“Républi-

que irréprochable” que l’on nouspromettait, et vous obtenez ça ! »

Le bilan du Nouveau Centre estcependant terni par la défaite sur-prise de son ministre MauriceLeroy, titulaire du maroquin de laville, l’un des trois membres dugouvernement en lice dimanche.Il était pourtant bien implantélocalement, en tant que présidentdu conseil général du Loir-et-Cher.

Les discussions vont aller bontrain, au Sénat, pour savoir dansquel groupe parlementaire les cen-tristes vont siéger. Jusqu’alors, laplupart se retrouvaient dans legroupe Union centriste, qui n’avaitd’union que le nom. Les voixs’égayaient souvent, les jours devote. Qu’en sera-t-il demain?

Les clés de la maisonL’ARES de MM. Borloo et Morin

fait pression pour obtenir plus delisibilité. « Il faut un groupe de l’Al-liance ouvert à tous ceux qui veu-lent incarner l’aile progressiste dela majorité », estime LaurentHénart, bras droit de M. Borloo.Autrement dit, aussi bien les radi-caux que les néocentristes deM. Morin laissent la porte ouverteà l’Alliance centriste et au MoDem.Mais ils demandent les clés de lamaison. Les discussions ne fontdonc que commencer. « Il faut uneclarification de la ligne du grou-pe», estime M. Morin.

L’ARES estime pouvoir comptersur vingt sénateurs, contre moinsde quinze pour l’Alliance centristeet le MoDem. Mais tous savent quepour négocier des postes au Sénat,il vaut mieux être unis.

Au MoDem, on demande à voir.« Je ne suis pas sûr que l’ARES soiten position de force. C’est le Sénat.Tous les sénateurs ne votent pascomme leurparti », analyse un pro-che de M. Bayrou. Et d’ajouter :« M.Morin veut une clarification. Siêtre clair, c’est être indépendant,c’est très bien ! » « C’est le bazar »,convenait, dimanche soir, l’un desnégociateurs à l’œuvre.p

Pierre Jaxel-Truer

LaMoselle, à contre-courant, élit les chefsdefile de deux listes concurrentes UMPLa stratégie de la droite a coûté au PS le seul siège qu’il a perdu dimanche

MetzCorrespondant

En Moselle, rien ne se passejamaiscommeailleursavecladroite. Tandis que, dans tous

les autres départements, l’UMPperddessièges,lepartidelamajori-té présidentielle gagne un poste desénateur. Deux listes concurrentesavaient obtenu l’investiture del’UMP, autre exception nationale.Et l’éparpillement a payé, chacuneparvenant à faire élire son chef defile : le sénateur sortant PhilippeLeroy, 71 ans, pour le «canal histori-que»; le député et maire de Woip-py,FrançoisGrosdidier,50ans,pré-senté comme le candidat du«renouveau ».

De plus, l’électron libre Jean-LouisMasson(diversdroite)estréé-luhautlamain.Lagauche,quiavaitcréé la surprise en 2001 en obte-nant trois sièges, est contrainte, ducoup, d’en céder un : celui de Jean-PierreMasseret,troisième surlalis-te d’union PS-PC. Président duconseil régional de Lorraine, il sié-geait au Sénat depuis 1983.

Beaucoup, à l’UMP, considèrent

que ce bon résultat n’est qu’unjuste rééquilibrage du rapport deforcepolitiqueréel,danscedéparte-ment traditionnellement acquis àla droite ; la réparation d’un « acci-dent de l’histoire».

Candidats «amortis»Il est vrai qu’aux sénatoriales de

2001, la droite parlementaire étaitplus divisée que jamais, six listesayant été présentées. Avec1 050 voix seulement, la gaucheavait remporté trois sièges surcinq. La droite, qui avait obtenu700voix de plus que le PS, avait dûse contenter des deux restants.

L’analyse générale de FrançoisGrosdidier est plus iconoclaste.« L’UMP a une règle qui consiste àinvestir les sortants sans jamais sedemander s’ils ne sont pas fatiguésou amortis. Le moment est peut-être venu de contester ce principequi, de mon point de vue, expliquepour une large part les piètres résul-tats que notre formation a obtenuspartout ailleurs », dit-il. Députéd’une circonscription difficile pourladroite, Metz-1, surlaquelle lorgnela très médiatique Aurélie Filippet-

ti (PS), M.Grosdidier vient en toutcas de réussir sa reconversion auSénat. « Je n’ai pas fait campagnecontre Philippe Leroy mais à côté delui, veut-il convaincre. Sa liste étaittrès institutionnelle, très “conseilgénéral”,tandisquelamienneincar-nait davantage les préoccupationsdes maires, sans parler de l’écart degénérations.Si je ne m’étais pas pré-senté, nous aurions eu une liste cen-tristeou alors monsiège serait allé àlagaucheouchezMasson,quisepré-sente comme un antisarkozyste dedroite,et dont personnene peutêtresûr du vote pour l’élection du prési-dent du Sénat», analyse-t-il.

Tous les caciques de la droite lor-raine étaient opposés au principede la double investiture, à l’excep-tion de Nadine Morano, ministrede l’apprentissage et anciennedéputée de Meurthe-et-Moselle,favorable à « l’exception mosella-ne» défendue par « [son] ami Fran-çois ». François Grosdidier sourit :« Ma stratégie a payé. Il y a encorepeu, on me faisait passer pour undiviseur mais dimanche, tout lemonde est venu me féliciter.» p

Nicolas Bastuck

A peine descendu de voiture,il a grillé la politesse à toutle monde. « Le Sénat sera à

gauche pour les trois prochainesannées », a annoncé en primeurFrançois Hollande, peu avant19heures et avecles réserves d’usa-ge, dans la cour d’honneur duPalais du Luxembourg.

Martine Aubry, arrivée depuisune demi-heure, n’avait pas enco-re dit mot. Le député de Corrèze,bien sûr, s’est défendu d’avoir vou-lu la prendre de vitesse. « Moi, je necherche pas à tirer je ne sais quellecouverturesénatoriale», a-t-il affir-mé. Non sans rêver pourtant, dansl’hypothèse d’une victoire en2012, à des lendemains exécutifsqui chantent. « C’est la premièrefois qu’un chef de gouvernementsocialiste pourrait bénéficier d’une

majorité de gauche au Sénat. NiFrançois Mitterrand ni Lionel Jos-pin n’ont eu cette possibilité »,a-t-il rappelé. De l’art de tirer lebénéfice politique d’une victoirehistorique, mais sans en avoirl’air : c’est le petit jeu auquel sesont livrés M. Hollande etMme Aubry, dimanche 25 septem-bre, autour de Jean-Pierre Bel, lavedette de la soirée.

Cinquante «aubrystes»Après avoir descendu l’escalier

de concert, depuis le bureau dupatron des sénateurs socialistes,les deux favoris de la primaire,côte à côte, écoutent attentive-ment l’allocution du potentielfutur troisième personnage del’Etat. « Pour la première fois dansl’histoire de la Ve République, le

Sénat va connaître l’alternance »,annonce sobrement M. Bel.

Au même moment, un SMS dudéputé européen et ex-sénateurHenri Weber informe Lionel Jos-pin: «Fin de l’anomalie démocrati-que. » L’ancien premier ministrerappelle sans tarder son informa-teur et peut entendre en direct lebruit des applaudissements et desyouyous. Rarement les sous-sols dela vénérable Assemblée aurontrésonné de tels transports. « C’estun grand bonheur, déclare MartineAubry. Cette victoire vient de loin.Des municipales de 2008, des régio-nales de 2010, des cantonales de2011… » Subliminale manière desouligner son apport de premièresecrétaire à ce basculement et de seprojeter vers la suite. «Pour moi quisuis candidate à la présidence de la

République, cela m’impose de réité-rer deux arguments : abroger la loisurlescollectivitésterritorialesetfai-reunenouvelleétapedeladécentra-lisation», a-t-elle annoncé.

En réalité, chacun a des raisonsde se réjouir. En plus de l’électionprobable de M. Bel, un de ses pro-ches, à la présidence du Sénat, lesamis de M. Hollande devraientconserver celle du groupe socialis-te, qui échoira vraisemblablementà François Rebsamen, le maire deDijon, ou à Didier Guillaume, de laDrôme. Ils peuvent aussi se félici-ter d’une des victoires les plus inat-tendues du scrutin de dimanche,celle de Frédérique Espagnac dansles Pyrénées-Atlantiques. A 39 ans,l’ancienne attachée de presse deM. Hollande est arrivée en tête dusecond tour, alors que personne nel’imaginait élue.

Les partisans de Mme Aubry peu-vent aussi être satisfaits. Dans leSénat sortant, ils n’étaient qu’unetrentaine.Désormais,ilsserontunecinquantaine. La maire de Lille anotamment renforcé son assisedans le Nord, où le sortant, BernardFrimat, « hollandais » déclaré, n’apasétéréinvesti,etoùtroisdesqua-tre nouveaux élus, DelphineBataille, Dominique Bailly et RenéVandierendonck, la soutiennent.

Ailleurs, Mme Aubry peut se pré-valoirdequelquesvictoiressymbo-liques, comme celle de Jean-PierreSueur, dont l’élection dès le pre-miertour, dansle Loiret,estun suc-cès dans un département dominépar la droite. Enfin, plusieurs per-sonnalités qui la soutiennententrent au Sénat, comme lesanciens ministres Alain Richard(Val-d’Oise) et Marie-Noëlle Liene-mann (Paris).

A qui profite la chute de la droi-te sénatoriale ? « A la primaire »,répondent en cœur les socialistes,quinemanquentpasd’yvoirlepre-mier acte d’une alternance prési-dentielle. Mais un troisième candi-dat à la primaire était décidé àjouer les trouble-fête. Arrivé vers21 h 30, après le départ des deuxfavoris, Jean-Michel Baylet, séna-teur radical de gauche du Tarn-et-Garonne, réclame sa part. « Ce nesont pas les socialistes qui vontimposer leur candidat et leur pro-jet! », proteste-t-il. p

David Revault d’Allonneset Thomas Wieder

AuPalais duLuxembourg, les socialistesfêtentla «fin del’anomalie démocratique»Mme Aubry et M.Hollande, les deux favoris de la primaire, ont chacun des raisons de se réjouir

Saint-Denis (La Réunion)Correspondant

D euxsiègespourl’UMP,obte-nus par Michel Fontaine etJacqueline Farreyrol ; deux

pour la gauche, décrochés par PaulVergès (Parti communiste réu-nionnais, PCR) et Michel Vergoz(PS) : les résultats des sénatorialesà La Réunion ont l’apparente sim-plicité de l’équilibre, mais ilssignent la défaite de deux ténorsde la vie politique locale, Paul Ver-gès et Jean-Paul Virapoullé.

Le premier conduisait une listeconstituée par le PCR avec leMoDem et favorite pour un dou-blé. Or les chiffres montrent quenon seulement les grands élec-teurs centristes n’ont pas suivi,mais aussi, de façon inattendue,que le PCR n’a pas fait le plein dessuffrages dans son propre camp.

En réaction, dès dimanche soir,M. Vergès a surpris en annonçantqu’il présenterait immédiatementsa démission au président duSénat. Pour justifier son geste, il adénoncé un « divorce » entre la« représentation d’un suffrage res-

treint» d’environ1200 grandsélec-teurs et le « reste de la population ».Il a expliqué qu’il préférait rester« aux côtés de tous ceux qui souf-frent », pour « éviter l’explosionsociale dans ce pays ».

Cette défaite, pour M. Vergès,n’est pas sans rappeler celle desrégionales de 2010, et même celledes législatives de 2007 où, au seindu parti, certains avaient, à demi-mot, souhaité qu’il passe le témoinaux jeunes.

Pactiser avec l’adversaireAgé de 86 ans, Paul Vergès, frère

de l’avocat Jacques Vergès et fils deRaymond Vergès, l’un des « pères »de la départementalisation, a fon-dé le Parti communiste réunion-nais en 1959. Il compte derrière luiprès de soixante ans d’une carrièrepolitique au cours de laquelle il aenchaîné tous les types de man-dats – dont déjà deux fois, avantcette élection, celui de sénateur –,et entraîné son parti dans un coursparfois sinueux, pour rester dansle sens du courant.

Après avoir milité pour l’auto-nomiedeLa Réunionjusqu’à l’élec-

tion de François Mitterrand en1981, M.Vergès n’apas craint,à l’oc-casion, de s’éloigner de l’idéologiedu parti, voire de pactiseravec l’ad-versaire. « Il n’y a pas cinquantemanières de combattre, il n’y en aqu’une, c’est d’être vainqueur », aun jour expliqué ce bretteur infati-gable.

Un autre facteur apu jouer dansla démission surprise de M. Ver-gès : certains, au Parti, n’auraientpas apprécié que la sénatrice sor-tante (PCR) Gélita Hoarau ait étéplacéeen deuxième position sur laliste. Avec le geste de M.Vergès, elledevrait retrouver son siège.

L’autre perdant du scrutin estJean-Paul Virapoullé,sénateur sor-tant, qui avait choisi de se mettre« en congé » de l’UMP, s’attirantune suspension du parti : il seretrouvesimple conseiller munici-pal après quarante ans de carrière,marquée par des échecs depuis lesmunicipales de 2008.

Au bout du compte, derrière lerevers pour MM. Vergès et Vira-poullé, l’UMP sort véritable vain-queur de ce scrutin.p

Hervé Schulz

ALaRéunion,PaulVergès,86ans,surprendendémissionnantjusteaprèssonélectionLe Parti communiste réunionnais n’a pas fait le plein des suffrages

Latrès éclatéefamillecentriste voitseprofiler le «bazar»desnégociationsDerrièredesrésultatsglobalementstables, c’estleNouveauCentre deM.Morin quisortgagnant

12 0123Mardi 27 septembre 2011

130123Mardi 27 septembre 2011 politique

RENOUVELLENT LEUR

CAMPAGNE

RADIOD’UNE ANNÉE SUR L’AUTRE

AUX US, PAYS DU RETOURSUR INVESTISSEMENT

92%DESANNONCEURSNATIONAUXAMÉRICAINS

IL DOIT Y AVOIRUNE RAISON.

Source : RADIO INK / KATZ RADIO

NRJ Global :01 40 71 43 3922 rue Boileau75016 Paris

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DeBonneville

-Orlandini

LES ÉLECTIONS SÉNATORIALES

I l n’était pas totalement inter-ditde sourire, dimanche 25sep-tembre au soir, en observant

Cécile Duflot, radieuse, lever lesbras au ciel, histoire d’afficher sajoie. Dix sénateurs, désormais,contre quatreauparavant : on pou-vait en effet sortir le champagne àla Chocolaterie, le siège des Verts.Pourquoi sourire ? Parce qu’il y apeu, le Sénat était l’objet de tousles quolibets chez les écologistes.

La seconde chambre était, auchoix – et l’un n’excluant pas lesautres –, ringarde, conservatrice,vouée à disparaître. Quant au séna-teur, il était perçu comme un mon-sieur d’un certain âge, forcémentblanc, naturellement enclin aucompromiset passantune certainepartie de son après-midi dans l’hé-micycleàdigérersesrognons.Quel-que chose comme le portrait deM.Bertin, éternelle incarnation dunotable dur et madré, peint parIngres. Bref, l’exact opposé du rêveécolo, « faire de la politique autre-ment».

Le Sénat a beau ne pas les fairerêver, les Verts ont donné des preu-vesderéalisme.Enattendantdefai-re émerger un nouveau monde,plus conforme à leurs valeurs, ilsont eu à cœur de capitaliser surleurs bons résultats électoraux desdernières années. « Et nous avonstoujours veillé à respecter stricte-ment la parité en plaçant les fem-mes en position éligible », expliqueun conseiller de Mme Duflot. L’hon-neur est donc sauf. Preuve du pro-fessionnalismequiprévautaujour-d’hui à Europe Ecologie-Les Verts(EE-LV), l’accord signé avec le PS afait l’objet d’un soin particulier.Démarrées en décembre2010, avecJean-Vincent Placé côté EE-LV, et leduoFrançoisLamy-ChristopheBor-gel pour le PS, les négociations sesontdérouléesdansunclimatinha-bituellement serein.

Il faut dire que les bons résul-tats des écologistes aux européen-nes, puis aux régionales, avaientincité les socialistes à sortir de ceque Jean-Vincent Placé appelle le« rapport de forces brutal ». Et l’ac-cord a sans doute bénéficié desrelations cordiales développées auplus haut niveau des deux partis,entre Martine Aubry et CécileDuflot.

Les résultats obtenus par EE-LVsont une divine surprise pour lesdirigeants, qui se désolent sou-vent, dans l’intimité, d’avoir enleur sein des militants opiniâtreset structurés, mais désarmésdevant des campagnes électoralesexigeant des qualités de rondeurqui, pensent-ils, leur font souventdéfaut. Les dix sièges obtenusprouvent que les Verts savent

désormaisserrerles mains et,com-me le dit un dirigeant d’EE-LV,« montrer qu’ils peuvent respecterdes deals ». Nul besoin donc, pourl’instant,delancer une école de for-mation.

Ce résultat va permettre de fai-re aussi émerger de nouvelles per-sonnalités chez les écologistes.M. Placé, le « Richelieu des Verts »,seulécologiste tête deliste en Fran-ce, déjà starisé par les proposd’Alain Marleix, chargé des élec-

tions à l’UMP, évoquant « notreCoréen national », devrait voir sonpoidscroître. EstherBenbassa (Val-de-Marne), universitaire franco-israélienne, directrice d’études à lasection des sciences religieuses del’Ecole pratique des hautes études,titulaire de la chaire d’histoire dujudaïsme moderne, devrait y faireentendre sa voix, de même qu’An-dré Gattolin, un proche de DanielCohn-Bendit, élu dans les Hauts-de-Seine.

EE-LVestdéjàtenduverslasuite.L’obtentiond’ungroupeparlemen-taire requérait auparavant de fran-chir le seuil de quinze sénateurs. Ceseuil n’avait pas été négocié avec lePS dans l’accord électoral ; il l’a étédimanche soir au Sénat, passantdésormais à dix. L’intérêt, pour lesVerts, est évident : moyens finan-ciers supérieurs, mais surtouttempsde parole autonomequi per-met une véritable existence politi-que et médiatique.

Reste le plus épineux : les négo-ciations pour les législatives de2012. L’accord avec les socialistesest prévu pour le 5novembre, maisEE-LV se prépare déjà à un calen-drier décalé. Les Verts réclament

quatre-vingts circonscriptionsréservées, une trentaine gagnablesen cas de victoire de la gauche, unequinzaineen cas dedéfaite.Les réu-nions s’enchaînent depuis… neufmois. M. Placé, qui multiplie lesallers-retours avec la rue de Sol-férino, a déjà compris qu’en cas dedésignation de François Hollande,l’union sera, comme toujours, uncombat. p

Anne-Sophie Mercier

LeFN revendiqueune «imprégnation»deses idées chez les élus locauxAvec 50 grands électeurs acquis à sa cause, le parti récolte 1157voix

Cantonale partielle

BernadetteChiracréélueconseillèregénéraledeCorrèzeBernadette Chirac a été réélue, dimanche 25 septembre, conseillèregénérale de Corrèze au premier tour avec 60,81 % des voix, a annoncéla préfecture. L’épouse de l’ancien président de la République, JacquesChirac, a recueilli 1 153 voix sur les 1 896 exprimées, devant le socialisteRémy Runfola (392 voix, 20,68 %). Sylvain Roch (PCF-Parti de gauche)est troisième (12 %).Mme Chirac, 78 ans, avait été réélue en mars pour un sixième mandatavec une voix de plus que la majorité requise et 50,04 % des suffragesexprimés. Le scrutin avait été annulé le 23 juin, les magistrats rete-nant l’irrégularité constatée dans la commune de Meyrignac-l’Eglise,où 49 enveloppes avaient été comptabilisées alors que seulement48 personnes avaient signé les listes d’émargement. Le conseil généralde Corrèze est présidé par l’ancien premier secrétaire du Parti socialis-te et candidat à la primaire François Hollande. – (AFP.) p

Budget

Leseuil d’assujettissement àla taxesurles hauts revenussera abaisséA deux jours de la présentation du projet de loi de finances pour 2012 enconseil des ministres, mercredi 28septembre, le gouvernement s’est ditprêt, comme prévu, à abaisser le seuil d’assujettissement à la contribu-tion exceptionnelle de 3% sur les hauts revenus, initialement fixé à500000 euros par part. « Je suis prête à ce que nous abaissions le seuil», adéclaré Valérie Pécresse, la ministre du budget, dimanche 25septembresur RTL. «A quel niveau? Le débat parlementaire le dira», a-t-elle ajouté.Plusieurs sénateurs et députés UMP, en particulier le président duSénat, Gérard Larcher, et celui de l’Assemblée nationale, BernardAccoyer, avaient plaidé pour un abaissement du seuil à 250 000 eurospar part. Le rapporteur du budget de l’Assemblée, Gilles Carrez (UMP,Val-de-Marne), avait indiqué au Monde le 21 septembre qu’il pensaitavoir convaincu l’exécutif de s’en tenir à ce seuil et d’asseoir la contribu-tion sur le revenu fiscal de référence (RFR), une assiette large intégrantles revenus du travail et ceux du capital.p Claire Guélaud

Mairie de Paris

BertrandDelanoë (PS)redit qu’il neserapas candidat àsa successionLe maire socialiste de Paris, Bertrand Delanoë, 61 ans, a confirmé, diman-che 25 septembre, qu’il ne serait pas candidat à sa succession aux élec-tions municipales en 2014 et qu’il n’irait donc pas au-delà d’un secondmandat. Il a de nouveau indiqué qu’il aimerait passer le flambeau à sapremière adjointe, Anne Hidalgo, 52 ans. « Evidemment, je ne serai pascandidat en 2014. Au bout de treize ans, je me mettrai au service de latransmission», a déclaré M. Delanoë sur Radio J. – (AFP.) p

Ilya peu, le Sénat étaitl’objetde tous

lesquolibetschezlesécologistes

M ême s’il n’a pas d’élus auPalais du Luxembourg, leFront national a enregis-

tré un bon score en termes de voixaux élections sénatoriales, diman-che 25 septembre. En revanche, enpourcentage, les candidats FNrecueillent seulement entre 3 % et4% des suffrages.

Ce scrutin n’est traditionnelle-ment pas favorable au FN, fauted’éluslocaux parmi lesgrands élec-teurs.Dimanche, surles37départe-ments métropolitains où le partid’extrême droite était présent, ilrécolte 1 157voix, alors qu’il n’avaitque 50 élus acquis à sa cause.

En 2001, le FN avait rassemblé300voix sur trente départements,d’après l’AFP. A titre de comparai-son, sur les mêmes départementscette année (Ile-de-France mise àpart), il en récolte 930, soit un sco-re multiplié par trois.

De plus, en 2001, le FN disposaitd’un nombre plus important degrands électeurs, même s’il devaitaffronter la concurrence du Mou-vement national républicain(MNR) de Bruno Mégret.

Cette année, les candidats FNont réalisé des pointes dans cer-tains de leurs bastions, comme le

Pas-de-Calais (101 voix, contre21 voix en 2001) ; la Moselle(87voix, contre13 en2001)ou enco-re le Nord (141 voix, contre 79 en2001). « On fait un très beau carton,c’est une grosse poussée », s’estréjouie Marine Le Pen dimanchesoir. « Cela démontre une impré-gnation de nos idées chez les éluslocaux», a-t-elle continué.

«L’UMP s’éteint»Lesecrétairegénéraldu FN, Stee-

ve Briois, voit lui aussi dans cesrésultats une pénétration frontis-te « dans les territoires ». Il ajoute :« Les élus sans étiquette votent FN.Certains de l’UMP aussi. Cela veutdire qu’on a un vivier pour les500 signatures » nécessaires àMme Le Pen pour se présenter à laprésidence de la République.

Mais cette « poussée » n’est paslaseule satisfaction pourleparti deMarine Le Pen. «Cela redistribue lescartes», avance Louis Aliot, numé-ro deux du FN. « La dynamique estpour les partis d’opposition. L’UMPn’implose pas. Elle s’éteint », assurele vice-président chargé du projet.

Cetteextinctionde l’UMP,prédi-te par les dirigeants du FN, leur sertà persévérer dans leur stratégie :

refuser toute alliance avec la droiteparlementaire et parier sur unedécomposition du parti majoritai-re. Pour se poser en force alternati-ve, voire de substitution. Cettedécomposition serait en bonnevoie, selon les stratèges frontistes.« Avec l’affaire de Karachi, il y a unclimat de fin de règne, de ruptureentre les élites et le peuple. Les séna-toriales ne sont qu’un élément dutableau », avance un proche deMme Le Pen.

La perte du Sénat par la droiteouvre en tout cas un champ pourle FN : certaines circonscriptionsne sont plus assurées pour l’UMP,et certains de ses cadres pour-raient être attirés par le parti lepé-niste. Marine Le Pen ne s’y trompepas : « C’est un scrutin très impor-tant, très riche d’enseignements. Ilest révélateur de ce qui peut se pas-ser aux législatives.»

Mais pour gagner des élus UMP,il faut, pour le FN, devenir attractif.Ce qui signifie continuer la straté-gie dite de « dédiabolisation ». « Ilfautpoursuivrel’effortsurlaconsti-tution d’un vrai programme. Ilfaut continuer le travail de désen-clavement », note M. Aliot. p

Abel Mestre

Jean-Vincent Placé, seul écologiste tête de liste en France, a fait son entrée au Sénat, dimanche. B. LÉVY/FEDEPHOTO POUR « LE MONDE »

LesVerts démontrentleur intégrationprogressivedans le monde des élusL’accord avec le PS permet aux écologistes de passer de quatre à dix sièges de sénateur

Lagénérosité du groupeenversles élus locaux

société

LA CORRESPONDANCE de JacquesServier raconte les pratiques desannées 1990, où les lois sur lefinancement des partis politiquesn’existaient pas et où les élusavaient pour habitude de solliciterle privé pour leurs activités loca-les. Si les documents retrouvésdans les tiroirs du patron du grou-pe n’évoquent pas directement lefinancement de partis, certainesnotes en disent toutefois long.

L’une figure dans les échangesavec Bernard Charles, député etmaire (radical de gauche) deCahors (Lot). L’homme, pharma-cien de profession, est du genreinsistant. Tous les ans, à partir de1991, il va solliciter l’aide de Servierpour l’Institut de formation deCahors (IFC), une école de visite

médicale implantée sur sa ville. Le7février 1992, le laboratoire adhèreau club de l’établissement et verse50000francs (7 600euros). Lagénérosité de l’industriel incitel’élu à le relancer. En 1994, le secré-tariat de Jacques Servier reçoit unnouvel appel à cotisation. Classi-que. La note manuscrite rédigéesur la feuille l’est un peu moins :«On ne donne plus pour son écolede VM (visite médicale), mais peut-être pour sa campagne.»

L’histoire ne dit pas si Servier abien financé la campagne du dépu-té, qui n’a pas souhaité répondreaux questions du Monde. Aprèstout, il n’y aurait rien d’illégal sil’entreprise n’a pas versé cetteannée-là plus de 500000francsdans ce but. Ce que l’on sait, c’est

que le laboratoire a maintenu debonnes relations avec l’élu du Lot,en versant à l’IFC 25000francs decotisation en 1994, 25 000francsen 1997, et 15000francs en 1998.

«Reprendre contact»Servier ne soutient pas seule-

ment les écoles de visite médicale.Il supporte aussi la presse locale.Direction Poitiers, dans la Vienne,à la fin des années 1990. Jean-YvesChamard, qui n’a pas souhaitérépondre à nos questions, est alorsvice-président du conseil général.Le 22janvier 1998, le député RPR se«permet de reprendre contact»avec Servier « afin de [leur] propo-ser de nouvelles insertions publici-taires dans [son] journal», préci-sant que «l’an dernier», en 1997, ils

avaient «accepté de réaliser unmontant total de 48 000francsréparti sous la forme de deux publi-cités». Dans cette lettre, une notemanuscrite encore en dit long:«CBZ [vraisemblablement pourChristian Bazantay, le secrétairegénéral du groupe] paye sur sonbudget, fera un hors budget». Aveccette précision : « Prépare sa cam-pagne régionale mi-mars.»

Ces trois initiales («CBZ») figu-rent aussi sur un document publiépar Mediapart relatif aux sommes«déjà touchées» par l’ex-maire deLourdes (1989-2000) et ex-députédes Hautes-Pyrénées PhilippeDouste-Blazy et sur lequel on peutlire : « campagne législative Lour-des 40000 (CBZ)». p

E. CA.

A l’historien Jacques Mar-seille, à qui il s’est longue-ment confié en 2007 (Le

médicament et la vie, Perrin), Jac-ques Servier expliquait : « Si j’habi-te à Paris depuis longtemps, c’estpour la seule raison que, dans notrepays, il faut constamment intri-guer dans la capitale, multiplier lespas et les démarches, se débattretoujours. » Les documents décou-verts par les enquêteurs dans levoletparisiendel’affaire duMedia-tor – une audience se tient lundi26 septembre dans la procédureouverte devant le tribunal de Nan-terre – en disent long sur les « intri-gues » du docteur Servier, le prési-dent-fondateur des laboratoiresdu même nom.

Cet ensemble de lettres et decartons d’invitation retrouvésdans le secrétariat particulier deJacques Servier, et que Le Monde apu consulter, lève le voile sur unmonde où les tables sont dresséesà Neuilly ou à l’hôtel Meurice, oùl’on déjeune avec le groupe Hottin-ger, « banquier et gérant de fortu-ne », mais aussi avec Eric Woerth,alors ministre UMP du budget, oul’actuel maire de Neuilly (diversdroite) Jean-Christophe Froman-tin. Bref, un monde où rien n’estlaissé au hasard dans les rapportsentretenus avec les décideurs. Ilen va de l’avenir de la « Maison »,de ses 20 000 salariés et de sonchiffre d’affaires (3,7 milliardsd’euros, en 2009-2010). Cela s’ap-pelle du lobbying. Toutes les gran-des entreprises le pratiquent.Chez Servier, il est minutieuse-ment pensé, organisé.

Pour tisser au mieux ses liensavec le tout-Paris, le patron se faitrédiger des fiches sur les politi-ques et personnalités du mondedu médicament. Celle de PhilippeDouste-Blazy, frappée du sceau« confidentiel », et rédigée en 1992par le docteur Patrice Labardens,un membre du groupeServier. Elledétaille, à la manière d’un CV, lacarrière médicale et politique dece « très proche de Raymond Bar-re », qui, le « 12 mars 1989, contretoute attente, est élu maire de Lour-des». La troisième rubrique, réser-vée aux « relations avec nous »,juge ces dernières « excellentes ».Et pour cause. Le cardiologuerejoint en 1986 le « groupe desconsultants » du laboratoire. Il par-ticipe à l’expérimentation de l’hy-pertenseur Coversyl et rédige desarticles « sur honoraires ».

De nombreux courriers attes-tent de liens tissés depuis le milieudes années 1980 avec ce jeune car-diologue toulousain, très vite rat-trapé par la politique. Le labora-toire a commencé par lui financer(85 392 francs, soit environ 13 000

euros) une étude épidémiologi-que sur l’infarctus du myocardeavant de l’aider, en 1992, à organi-ser des universités de la santé.

A chaque victoire de son pou-lain dans les urnes, Jacques Servierprend le temps de rédiger un petitmot personnel auquel PhilippeDouste-Blazy, qui fut ministre(UMP) de la santé en 2004-2005,répond en retour.

«Rien d’illégal»Le lobby de Servier s’exerce jus-

qu’où on ne l’attend pas. Le FCLourdes, ce club de rugby qui futprésidé par le grand-père deM. Douste-Blazy, fut ainsi très lar-gement financé en 1998(361800 francs, soit 55 000 euros).Joint par Le Monde, l’ancien minis-tre de Jacques Chirac s’étonned’une telle somme – « je ne sais pasce qui s’est passé » – mais assure« qu’il n’y a rien eu d’illégal ». Aureste, il nie tout « rapport privilé-gié » avec Servier. « Je n’ai jamaisdemandé, en tant que ministre, àun directeur d’administrationd’augmenter le prix d’un médica-ment,affirme-t-il. Jamais, lelabora-toiren’est venuprésenter un amen-dement servant ses intérêts. »

Mais il n’est pas le seul à êtreapproché. Si l’on croit la fiche rédi-gée par le groupe sur RoselyneBachelot, les contacts se nouentavec la députée de Maine-et-Loire,en 1992, lors d’un déjeuner avec« Servier, [Jean-Philippe] Seta[l’actuel directeur opérationnel dugroupe] au cercle Hippocrate ». Laministre a beau avoir assuré, le21 septembre, n’avoir « jamaisdéjeuné ni en tête-à-tête ni en cer-cle restreint avec M.Servier », l’opé-ration semble s’être renouvelée en1994, 1995 et 1997.

Régulièrement, l’industrielconvie politiques et scientifiquesdans ce cercle Hippocrate deréflexion sur l’économie de la san-té où il a ses habitudes. Il lui arriveaussi de décrocher une invitationà la table même des ministres de lasanté. Le compte-rendu rédigé à lasortie de son déjeuner avec Ber-nard Kouchner, le 22 juillet 1998,alors secrétaire d’Etat (PS) à la san-té,en dit long sur sesattentes. C’estClaude Nègre, l’un des collabora-teurs de Servier, qui, dans unenote de deux pages, rassemble les

« impressions [qui] se sont déga-gées ou ont été confirmées par cedéjeuner ». « Bernard Kouchnerm’a paru beaucoup plus calme,modéré, réaliste, voire modeste,que lors de son précédent ministè-re. Il a mûri », rapporte-t-il.

A ce « libéral qui s’ignore », qui,visiblement,« abandonnait uncer-tain nombre de préjugés à [leur]égard », le conseiller du Dr Servierestime qu’il « serait judicieux deprofiter du temps que durera sonministère pour lui soumettre despropositions très structurées (…),

luiapporterdesidées simples,prati-ques etefficaces, susceptibles deser-vir ses intérêts et de ménager lesnôtres ».

Petites attentionsLes personnalités du monde du

médicament, également, sontmises en fiche. A la lecture d’undocument d’avril 2001, onapprend ainsi qu’un membre ducabinet Kouchner est considérécomme ayant une « grandeinfluence sur les sujets médicauxgénéraux».

L’ancien patron de l’agence dumédicament, Didier Tabuteau,« estimé par Matignon et ElisabethGuigou, met son nez partout ».« C’est l’homme au centre du systè-me », avec ses amis et ses « enne-mi(s) intime(s) », également fichés.Selon Servier, le professeur LucienAbenhaim, qui fut directeur géné-ral de la santé de 1999 à 2003, faitpour sa part figure d’« autoritémorale » « pour [ses] avis sur lesmédicaments ». D’autres sontconsidérés comme sans « aucunpouvoir » ou « très antimédica-ment en général».

Mais il y a aussi les techniquesplus classiques de lobbying. Com-me inscrireceux quicomptent (Eli-sabeth Guigou, qui fut ministre PSde l’emploi et de la solidaritéentre 2000 et 2002, et son mari,Jean-Louis Guigou) sur la liste desVIP aux remises de Légion d’hon-neur. Ou envoyer du champagnede chez Fauchon (à 250 euros lacaisse) aux médecins pour Noël.

Enretour deces «petites»atten-tions, il y aura bien quelque renvoid’ascenseur… L’intervention duprofesseur Griscelli, qui a suggéréde nuancer les responsabilités deServier dans le rapport du Sénatsur le Mediator, pourrait être luecomme telle quand on voit le nomdu professeur sur la liste très res-treinte des invités du Dr Servierpour son discours devant l’Acadé-mie des sciences morales et politi-ques, le 10 décembre 2007. p

Emeline Cazi

Entretien

I l y aura un avant et un aprèsMediator », aime à répéterXavier Bertrand, le ministre de

la santé. Sa « réforme en profon-deur » du système, dont le médica-ment du groupe Servier a révéléles défaillances, sera examinée parlesdéputés àpartir demardi27sep-tembre. Catherine Lemorton,députée PS de Haute-Garonne etpharmacien, a remis en 2008 unrapport sur « les prescriptions, laconsommation et la fiscalité desmédicaments », sévère pour leslaboratoires, resté « lettre morte ».Le projet de loi permettra-t-ild’éviter un nouveau Mediator?

Pas tout à fait. Le contrôle estcertes amélioré, mais le texte ne vapas assez loin car il reste des inters-tices dans lesquels l’industrie peuts’engouffrer.Quelles sont les insuffisances ?

M.Bertrand avait promis l’indé-

pendance de la formation initialeet continue des médecins, grâce àdeux taxes sur l’industrie, quidevaient rapporter 400 millionsd’euros.Or dans les projets de loi definance et de financement de laSécurité sociale, 160 millions sontprévus.Commentva-t-oncompen-ser ce qu’apportait jusque-là l’in-dustrie?Ya-t-ileucommed’habitu-de un chantage à la délocalisationet aux licenciements? Aussi, s’il y aun doute sur un médicament, cesera encore aux fabricants de prou-ver l’intérêt de le maintenir. Ilspourront certes saisir des expertsindépendants, grâce à la créationd’un groupement d’intérêt publicgéré par l’assurance-maladie, laHauteAutoritéde santé et l’Institutnational de veille sanitaire (INVS),qui fournira des études de pharma-covigilance et de pharmaco-épidé-miologie.Maiscelaneserapasauto-matique, et rien n’assure qu’aucunacteur privé n’y siégera.

Y a-t-il des oublis?Oui, le ministre avait promis un

portail Internet publicqui recense-rait tous les médicaments. Il n’y arien dans la loi. Concernant lesliens d’intérêt des experts, un pasa été fait puisqu’il y a obligation deles déclarer, avec sanction pénaleen cas de manquement. Mais onnesaitpas qui contrôlera. Le minis-tre renvoie la réponse à des décretsau Conseil d’Etat. Cela échappedonc au débat parlementaire. Cen’est pas le seul élément pourlequel la méthode est utilisée, c’esttoute la faiblesse de cette loi.Vous plaidez pour qu’une compa-raison soit établie, avant la misesur le marché, non pas avec unplacebo, mais avec un médica-ment. Ce qui est proposé est-ilsatisfaisant?

Absolument pas. Il faut rendreobligatoireladémonstrationqu’unfutur médicament apporte unplus. C’est une idée que je pousse

depuis trois ans. Le ministre s’y ditfavorable, mais nous oppose que lalégislationeuropéennel’interdit,etqu’ilfaut d’abordla modifier. J’aieubeauchercher, jen’aipastrouvétra-ce d’une telle interdiction.La Cour des comptes vient depointer du doigt le manque derigueur dans la fixation des prix.

Lalogique voudraitquele Comi-té économique des produits desanté soit obligé de fixer le prixd’un médicament en fonction deson intérêt thérapeutique. Or onsait bien que les discussions sur lesprix s’apparentent à une négocia-tion de marchands de tapis entrel’Etat et les laboratoires. Pourtant,le projet de loi n’aborde pas lesujet. Nous réclamons que les par-lementaires aient accès auxconventions signées avec chaquelaboratoire. Il y a là un vrai para-doxe, on nous demande de nousexprimer sur le budget de la Sécusans savoir comment sont fixés

les prix des médicaments !L’Inspection générale des affai-res sociales (IGAS) a préconiséla suppression de la visite médi-cale. Le ministre n’a pas retenucette option. Vous n’y êtes pasnon plus favorable, pourquoi?

Ne faisons pas des visiteursmédicaux des boucs-émissaires. Ilssont déjà sévèrement touchés parlessuppressions depostes. Jepensequ’il faut plutôt profiter de cetteprésence sur le terrain pour faireremonter les effets secondaires desmédicaments que peuvent signa-ler les médecins. Mais il faut proté-ger ces professionnels pour éviterqu’ils ne perdent alors leur place.En ce qui concerne la visite médica-lecollectiveàl’hôpital, l’optionrete-nue, son principe va dans le bonsens puisqu’elle évite touttête-à-tête entre médecin et labora-toire.Mais cela semble peuapplica-ble. S’il n’y aura aucun problèmedanslescentreshospitaliersuniver-

sitaires (CHU), où cela se pratiquedéjà, que se passera-t-il dans lespetits hôpitaux, quand un seulmédecin sera disponible?La représentante de Servier àl’Assemblée vient de voir sondroit d’accès retiré à titre provi-soire. Les relations entre parle-mentaires et laboratoires vont-elles changer?

Leslaboratoiresontunetellefor-ce de frappe que j’ai parfois l’im-pression que le combat est perdud’avance. Nous recevons toujoursdes invitations des laboratoires ànous rencontrer en dehors de l’As-semblée.Accepter ou non, c’est uneaffaire d’éthique personnelle. Lesmentalités évoluent, certes, mais ilest regrettable, alors que la sonnet-te d’alarme avait déjà été tirée, qu’ilait fallu attendre que le chiffre de2000 morts soit avancé pour êtreun peu écouté. p

Propos recueillis parLaetitia Clavreul

Dans une conversation téléphoni-que interceptée par les policiersen charge de l’enquête sur leMediator – ce médicament dulaboratoire Servier qui aurait cau-sé la mort de 500 à 2000 person-nes – et révélée par le Journal dudimanche, Jean-Philippe Seta, ledirecteur opérationnel du grou-pe, évoque la succession du prési-dent Jacques Servier et un éven-tuel départ pour l’étranger. «Engros, ce que m’a expliqué le DrSer-vier, ce qui est évident pour lui,c’est une gouvernance avec unetête hollandaise, c’est impératifque le pouvoir ne soit plus en Fran-ce…», dit-il à Jean-Philippe Gille,un cadre juridique de la société, le21juin. Et d’ajouter que M.Servier«cherche une solution juridique“élégante”, c’est-à-dire qui ne soitpas trop coûteuse fiscalementpour transférer le centre de déci-sion hors de France (…) La seuleéquation qui préserve l’indépen-dance et la pérennité».

Un transfert du laboratoireServier à l’étrangerévoqué

Lelobbying trèspolitique des laboratoires ServierDes notes du groupe attestent des méthodes d’approche des leaders spécialistes de la santé, dont M.Douste-Blazy

Loisurlemédicament:«Ilrestedesintersticesdanslesquelsl’industriepeuts’engouffrer»Catherine Lemorton, députée PS, auteur d’un rapport sur le médicament en 2008, évalue le projet de réforme soumis à l’Assemblée le 27 septembre

Jacques Servier à son arrivée à l’Assemblée pour une audition parlementaire sur le Mediator, en mars. CHARLES PLATIAU/REUTERS

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150123Mardi 27 septembre 2011 société

Z éro retrait d’emploi pour larentrée 2012 ! » : c’est sous cemot d’ordre que cinq syndi-

cats de l’enseignement privé ontappeléàparticiperàlajournéed’ac-tion dans l’éducation nationale,mardi 27 septembre. La FEP-CFDT,leSNEC-CFTC,leSPELCetleSNPEFP-CGTontinvitélesenseignantsàfai-re grève ; le Synep-CFE-CGC devaitprivilégier d’autres modes d’action– signature de pétitions, informa-tion à l’attention des familles,manifestations locales.

« Cinq syndicats de l’enseigne-ment privé sous une même bande-role, ça a quelque chose d’inédit »,reconnaît Bruno Lamour, secrétai-regénéraldelaFEP-CFDT, organisa-tion majoritaire dans l’enseigne-ment privé, « mais nous étionsdéjà mobilisés avant l’été contre lessuppressions de postes, et il y adeux ans pour la défense des retrai-tes… Ceux qui pensent que c’est dujamais-vu depuis le mouvement de“l’école libre”, en 1984, exagèrentun peu. »

Même souci de la nuance de lapart de Luc Viéhé, son homologuedu SPELC : « Bien sûr que la grèven’est pas une habitude culturelledans l’enseignement catholique,que nous ne sommes pas le fer delance des mobilisations, mais ilfaut arrêter de voir les collègues duprivé comme de gentils ensei-gnants obéissants et disciplinés. »

Privé-public, même combat ?L’enseignement catholique perd1 428 postes en cette rentrée, soitmoins de 10 % des 16 000 suppres-sions opérées dans l’éducation

nationale au titre de la RGPP (révi-sion générale des politiques publi-ques) – alors qu’il accueille 18 %des élèves (2 millions d’enfants etd’adolescents). En quatre ans, sur66 000 postes d’enseignants sup-primés, 4 600 ont été rendus parl’enseignement privé.« 4600 “seu-lement”, pointent nos détracteurs,mais c’est méconnaître autantnotre situation que notre fonction-nement », s’indigne LaurenceRoger,secrétairegénérale duSNEC-CFTC. « Nos effectifs n’ont cesséd’augmenter, nous frôlons en collè-ge et lycée les 40 élèves par classedans les grandes villes. En primaire,des classes au-delà de 30 élèves, çan’a plus rien d’exceptionnel »,témoigne-t-elle.

Si la rentrée 2011 s’avère diffici-le, celle de 2012 pourrait bien êtreimpossible, redoutent les syndi-cats. Sur les 14 000 suppressionsde postes programmées en 2012,1 350 incomberaient à l’enseigne-ment privé. La promesse faite parNicolas Sarkozy de « sanctuariser »l’école primaire n’a pas calmé l’in-quiétude chez les parents d’élèves.« Chez nous, un poste en moins,c’est une classe qui ferme », affirmeBéatrice Barraud, présidente del’Association des parents d’élèvesde l’enseignement libre (APEL).

« Dans le public, certains ensei-gnants n’ont pas de charge de clas-se [remplaçants, détachements],tandis que dans le privé, tous lesenseignants effectuent leur servicedevant élèves », explique-t-elle. Defait, seules les décharges syndica-les et les décharges de chefs d’éta-

blissement du premier degré sontadmises dans l’enseignementcatholique.

Pourtant, l’influente associa-tion de parents d’élèves du privé –823 000 familles adhérentes,contre 300000 pour la FCPE – n’apas appelé à la grève le 27 septem-

bre. « Nous comprenons la positiondes syndicats et des enseignants,mais ne souhaitons pas que lesparentsd’élèves s’y associent, expli-que Mme Barraud. Nous entendonsprivilégier la négociation avec leministère. »

Interlocuteur privilégié de laRue de Grenelle, le Secrétariatgénéral de l’enseignement catholi-

que (SGEC) travaille depuis plusd’un an à l’élaboration de « mesu-res alternatives, structurelles etcompensatoires » pour amortir lessuppressions d’emplois en tou-chant, a minima, au tissu des éta-blissements et à l’offre de forma-tion. « On travaille dans sept direc-tions, précise Yann Diraison, délé-gué général en charge des ressour-ces humaines au SGEC, et deuxsont déjàbienavancées : ledévelop-pementde l’enseignementà distan-ce et une gestion différente de ladotation globale horaire des éta-blissements, annualisée. »

Autres axes de réflexion : ladiminution du nombre d’options,la réduction du volume horaired’enseignement des élèves en col-lège… sans oublier la piste, trèspolémique, de la réforme de l’obli-gation réglementaire de servicedes enseignants. Celle-ci pourraitêtre « annualisée, et non plus heb-domadaire, pour tenir compte dufonctionnement des établisse-ments, dont le rythme de travailn’est pas linéaire sur l’année »,avance M.Diraison.

« Contrairement aux syndicatsd’enseignants, qui demandent l’ar-rêt des suppressions de postes, nousestimons que le pays a opté pourunepolitiquebudgétairerestrictive,etnousn’encontestonspasleprinci-pe», soutient Eric de Labarre, secré-taire général de l’enseignementcatholique. Un discours que lesorganisations syndicales rejettent:sans être totalement opposées aux« mesures compensatoires » encours d’élaboration, elles récla-ment d’être associées à la réflexion,et récusent toute nouvelle vaguede suppression de postes.

Reste une inconnue : le taux demobilisation le 27 septembre.« Qu’il y ait, ou non, des centainesde milliers de personnes dans lesrues, on a passé un cap, analyse lesociologue François Dubet. L’appelà la mobilisation venu d’une inter-syndicale de l’enseignement privémodifie la nature de cette journéede mobilisation, qui ne s’apparenteplus à une grève rituelle de rentrée.On est au-delà, plus haut dansl’échelle du malaise enseignant. » p

Mattea Battaglia

L e voyage de Kamel Daoudi sepoursuit dans les limbesadministratifs. Assigné à rési-

dence en Haute-Marne, dans le vil-lage de Fayl-Billot, depuis le 15sep-tembre 2010, cet ancien militantislamiste a eu la surprise de voirdébarquer les gendarmes, mardi20septembre, à l’Hôtel du Cheval-Blanc, où il occupait une chambre.

Les militaires l’ont invité àprendre ses affaires et à monterdans leur voiture, direction lacommune de Lacaune (Tarn), à750km de là. Ses conditions d’assi-gnation ont été durcies, un moisaprès la publication, dans Le Mon-de du 19 août, d’un article relatantl’absurdité de sa situation admi-nistrative. «Ils le sanctionnentaprès le tapage médiatique, expli-que son avocat, Me ChristopheMounzer. Ils ont juste patienté unpeu pour que ça ne se voit pas.»

Dorénavant, M.Daoudi doitpointer à la gendarmerie quatrefois par jour au lieu de trois,dimanche et jours fériés compris.«Ma chambre au centre-ville est àpeine plus grande qu’une celluleou une chambre de bonne, au der-nier étage, dit-il. Ce n’est pas possi-ble d’y recevoir ma famille.»

Zone juridique griseKamel Daoudi poursuit donc sa

découverte des départementsfrançais. Agé de 37 ans, déchu de lanationalité française, il a étécondamné à six ans de prison, endécembre2005, pour «associa-tion de malfaiteurs en relationavec une entreprise terroriste».Au terme de sa peine, il a été visépar une interdiction définitive duterritoire. L’administration fran-çaise comptait le renvoyer versson pays de naissance, l’Algérie.

Mais, en décembre2009, laCour européenne des droits del’homme (CEDH) annule la mesu-re d’éloignement au nom du ris-que pour son intégrité physiqueen cas de transfert aux servicesalgériens. Kamel Daoudi est alorsassigné à résidence à Aubusson(Creuse) où il a rencontré sa com-pagne, qui tombe enceinte. C’esten la conduisant à l’hôpital qu’ilviole les conditions de son assigna-tion. Après quelques mois en pri-son, il est déplacé à Fayl-Billot.

Depuisla décision de la CEDH,Kamel Daoudi est dans une zonejuridique grise. Personne ne saitcombien de temps l’administra-tion continuera à payer son héber-gement en pension complète. Jus-qu’à la démocratisation de l’Algé-rie? Quant à un recours éventuel,il se heurte aux lenteurs judiciai-res. Aucune date d’audience n’aété fixée pour le recours déposépar Me Mounzer contre l’assigna-tion en Haute-Marne, il y a un an.

L’origine du nouveau transfertserait la lassitude de ses hôtes. Le8septembre, les propriétaires del’Hôtel du Cheval-Blanc ont écrit àla préfecture, lui annonçant que lachambre mise à disposition deM.Daoudi ne le serait plus à comp-ter du 20septembre. Motif invo-qué: le «préjudice» subi. Tout sepassait bien, pourtant, avec cethomme barbu et massif, aux che-veux mi-longs. Il mangeait à part,lisait beaucoup. Sa femme et lesenfants venaient lui rendre visitependant les vacances.

«Il est resté plus d’un an cheznous, explique Freddy Coyer, lepropriétaire de l’hôtel. La préfectu-re nous avait dit au départ quec’était pour un ou deux jours maxi-mum, et sans nous expliquer la rai-son de sa présence.» M.Coyer a étéchoqué de voir les gendarmes,mardi, sérieusement armés.«Nous, on n’a jamais reçu d’armespour se défendre. Remarquez, il n’ya jamais eu de soucis… » Sauf avecl’administration: quatre mois deretard de loyer.p

Piotr Smolar

AssignationàrésidencedurciepourM.Daoudi

Des innovationspour «faire des économiessansréduire l’offrede formation»

L’ordinateur en guise de profes-seur « Ce n’est pas nécessairementla panacée, mais ça a permis à deslycées de taille plutôt modeste defaire des économies sans réduirel’offre de formation ni renoncer àl’innovation pédagogique », expli-que Michel Larrory, à l’initiativedu projet Loread – pour « Lorraineenseignement à distance». L’idéea germé à la fin des années 1990,lorsqu’il dirigeait le lycée Jean-Baptiste-Vatelot de Toul (Meurthe-et-Moselle).

« L’enseignement des options, lelatin notamment, posait problè-me car nous ne pouvions plusmaintenir un professeur face àune poignée d’élèves, deux ou troisle plus souvent, explique-t-il. Pourrester attractif, nous avons misésur Internet ». La plate-forme ini-tiale concerne cinq lycées lor-rains. Le « tuteur », un enseignantexerçant dans l’un ou l’autre desétablissements, est chargé de l’en-seignement de l’option – latin,grec, chinois, mais aussi italien,espagnol… Il met en ligne sescours, ses consignes et ses outilspédagogiques auxquels leslycéens ont accès dans leur lycée.

Le « référent», souvent unenseignant, parfois un sur-veillant, encadre le travail des élè-ves dans chacun des établisse-ments. « Ce n’est pas “que” de l’en-seignement à distance : les élèvessont assis en classe, sous la supervi-sion d’un adulte, et travaillent àheures fixes », souligne M. Larrory,aujourd’hui à la tête du lycée Jean-

XXIII de Montigny-lès-Metz(Moselle).

En cette rentrée, le dispositifconcerne 22 établissements, dontcertains importants, et près de 350élèves. « Mais leur nombre devraitcroître rapidement », prédit M. Lar-rory: « En Haute-Normandie, enLozère, Loread fait des émules. » LaRue de Grenelle s’en réjouit : dansune note datant de mai à l’atten-tion des recteurs d’académie, leministère a proposé l’extensiondu dispositif d’ici à 2012 sur labase du volontariat des établisse-ments privés. Objectif assumé:«réduire le coût en emplois des dis-ciplines à faible effectif».

Le jeu des combinaisons horai-res Trouver une autre manière decomptabiliser le temps de travaildes professeurs: c’est l’une des pis-tes mises en avant dans l’enseigne-ment catholique pour « optimi-ser » les moyens budgétairesalloués. « L’annualisation de ladotation horaire globale et sa ges-tion doivent être de notre ressort »,soutient Yves Ruellan, directeurde l’externat Saint-Joseph-La Cor-deille d’Ollioules (Var), parailleurs président du Syndicat desdirecteurs d’établissements catho-liques du second degré (Synadic).

Au sein du groupe scolaire qu’ildirige (2 250 élèves, 170 ensei-gnants), une cinquantaine de pro-fesseurs chargés de l’accompagne-ment personnalisé ont déjà vu cetemps d’enseignement globalisé.« Nous étions d’accord sur le fait

que les trente-six semaines annuel-les ne sont pas effectuées : l’accom-pagnement débute plutôt fin sep-tembre et s’interrompt en mai,explique M. Ruellan. Si l’ondécompte les voyages scolaires, lesstages, on tourne plutôt autour devingt-cinq semaines par an. »

Les heures récupérées sontmises à profit « au bénéfice detous », soutient-il. « On organisedes séquences de cours moins lon-gues avec des classes dédoublées,par exemple en anglais pour deslycéens professionnels qui ont vrai-ment besoin d’une remise àniveau. Trois professeurs officientface à deux classes réunies : l’élèveprogresse, l’enseignant ne perdpas en confort, l’établissement ygagne. L’expérience est pour l’ins-tant très positive. »

Au lycée Notre-Dame-du-Vœu,à Hennebont (Morbihan), Marie-Noëlle Loizel, la directrice, expéri-mente de nouveaux rythmes sco-laires. Un «calibrage des séquencesde cours sur quarante-cinq minu-tes» lui a permis de récupérer unvolume d’heures réinvesti au pro-fit de l’enseignement en petit grou-pe. «Nos élèves de seconde peuventchoisir trois modules parmi une cin-quantaine – méthodologie, orienta-tion, exploration… –, en première,c’est un module seulement.» Del’accompagnement personnaliséinclus dans l’emploi du temps desélèves, sans rémunération supplé-mentaire des enseignants: de quoisatisfaire le ministère. p

M. Ba.

«Ilfaut arrêter devoirlescollèguesdu privé

comme degentilsenseignantsobéissants»

Luc Viéhésecrétaire général du SPELC

Répartition des élèves 2,02mil-lions d’enfants sont scolarisésdans l’enseignement catholiquesous contrat, soit 18% environ dunombre total d’élèves. 850000sont inscrits dans le premierdegré, plus de 1,1million dans lesecond degré, et près de 50000dans l’enseignement agricole(chiffres 2010).

Parcours Un enfant sur deuxdurant sa scolarité fréquente unétablissement privé.

Nombre d’enseignants Ils sont136928 à exercer dans 8970 éta-blissements privés (13,7% dunombre d’écoles). 1528 postesont été supprimés dans le privé en2011, et 4600 postes depuis qua-tre ans, sur un total de 66000.

Législation Selon la loi Debré de1959, les établissements privéssous contrat accueillent tous lesélèves, quelle que soit leur reli-gion. L’Etat rémunère les ensei-gnants.

«Nous necontestonspasl’effort àfournir »Questions à Eric de Labarre, secrétaire généralde l’enseignement catholique

4600 postes supprimés en quatre ans

Touché, l’enseignementprivé se mobilise aussiCinq syndicats du privé ont appelé à participer à la journée d’action dans l’éducation nationale, mardi 27septembre

En avril, vous avez lancé un«avertissement solennel» àl’Etat et dénoncé une situation«inconcevable», avec un millierd’écoles menacées par les sup-pressions de postes. Votre étatd’esprit est-il le même?

Avec presque 1500 postes enmoins en 2011, la préparation decette rentrée a été tendue. Nousavons dû assumer le rôle, difficile,d’arbitre; multiplier les redéploie-ments d’une école à l’autre pourpréserver le tissu des établisse-ments catholiques, en milieu ruralnotamment. En comparaison, larentrée a été plutôt sereine. Et posi-tive en termes d’effectifs : la haus-se enregistrée depuis quatre ans seconfirme. On a gagné 6500 élèvesen 2010, et probablement aumoins autant cette année. Le corol-laire, c’est qu’il nous faut rejeterdes dizaines de milliers de deman-des d’inscription.Comment pouvez-vousaccueillir plus d’élèves avecmoins de moyens, sans toucherà l’offre de formation?

Il nous faut amortir les suppres-sions d’emplois. Certaines de nospistes de réflexion, comme l’an-nualisation du service ensei-gnant, peuvent effrayer. Maisd’autres mesures sont possibles.On peut regrouper les classes à fai-bles effectifs. Regrouper, aussi, cer-taines matières enseignées dansles lycées technologiques et pro-

fessionnels. Et revoir l’accueil desplus jeunes en maternelle : dès2012, nous ne prendrons plus encompte les moins de 3 ans dans lecalcul du volume d’enseigne-ment. Ils seront accueillis dans lalimite des places disponibles, oudans des structures qui ne sontpas sous contrat avec l’Etat, com-me il s’en ouvre dans les diocèsesd’Arras et de Saint-Etienne.Pourrez-vous encore «amortir»les suppressions de postes quis’annoncent en 2012?

Nous ne contestons pas l’effortà fournir pour assainir les finan-ces publiques, mais nous ne pour-rons rendre des postes en 2012–entre 1 300 et 1 400 – que si celas’accompagne de mesures com-pensatoires. Réduire d’une heurele temps d’enseignement danstous les collèges et lycées permet-trait d’économiser jusqu’à15000 postes. Et même lorsqu’onaura allégé d’une heure l’emploidu temps des collégiens, la duréed’enseignement en France resteraencore au-dessus de la moyenneeuropéenne ! L’annonce du gel dunombre de classes en primairel’an prochain et la décision deramener les coupes de 16 000 à14000 sont des éléments de natu-re à nous rassurer. Ce que nousattendons, c’est que l’éducationsoit au centre de la campagne pré-sidentielle.p

Propos recueillis par M. Ba.

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société

C omment créer la polémiqueà deux jours de la tenue ducongrès du mouvement

HLM, qui réunit de mardi 27 à jeudi29septembre, à Bordeaux, tous lesacteurs du logement social ? Inter-rogé par Le Journal du dimanche, lesecrétaire d’Etat au logement,Benoist Apparu, s’en est pris à la loide solidarité et de renouvellementurbain (SRU), votée en 2000.

Selon lui, le taux de 20% de loge-ments sociaux d’ici à 2020, imposéaux communes de plus de3 500 habitants (1 500 en Ile-de-France) « appliqué partout n’a pasde sens ». M. Apparu se dit « prêt àétudier un taux de 25% à Paris et enrégion parisienne, mais un tauxinférieur à 20 % dans d’autresendroits. Là où la démographie estfaible, où l’écart entre loyers HLM etprivé est minime, pousser à faire dulogement social n’a aucun intérêt».

«Le socle des 20% est incompres-sible», explique au Monde ThierryRepentin, président de l’Unionsociale pour l’habitat (USH), quichapeautelesorganismesHLM.« Sinous voulons résorber la crise dulogement et répondre à la demandedes 1,2million de ménages en atten-te d’un logement social, il faut à la

fois augmenter ce seuil et élargir lacarte des communes concernéespar la loi», estime M.Repentin, parailleurs sénateur PS de Savoie.

Aujourd’hui, 940 communesrelèvent de la loi SRU. Selon les der-niers chiffres officiels, 591 d’entreelles (63 %) ont rempli leur engage-ment de construction pour les troisans. Pour le président de l’USH, lescommunesdemoinsde3500habi-tants, épargnées par la loi,

devraient, elles aussi, être mises àcontribution. « Un plancher mini-mum de 10 % à 15 % de logementssociaux pourrait être exigé», consi-dère M.Repentin.

L’autre angle d’attaque du secré-taire d’Etat au logement concernela définition du logement social :«Qu’est-ce qu’on comptabilise dansces 20 % de logements sociaux. (…)

Posons-nous la question. Mais si onpasse à 25 % de logements sociauxdans certaines zones, je pense que laloi SRU devrait y intégrer l’accessionsociale à la propriété.»

« C’est l’argument de tous ceuxqui ne veulent pas des familles trèsmodestes sur leur territoire, s’insur-ge Thierry Repentin. Pour pouvoiraccéder à la propriété, même socia-le, il faut deux smic et demi à troissmic. Tous les maires acceptent ceshabitants-là. Les locataires, pluspauvres, sont beaucoup moins bienaccueillis.»

Depuis son adoption, la droite arégulièrement tenté de diminuerla portée de cette loi, emblémati-quede la gauche.Enmai, Jean-MarcRoubaud, député et maire (UMP)de Villeneuve-lès-Avignon (Gard),avait déposé une proposition de loiqui allait dans le même sens que laréflexion du secrétariat d’Etat.

Cosigné par une quarantaine dedéputés UMP, le texte de M. Rou-baud voulait inclure dans les 20 %les logements construits au titre del’accession à la propriété. Cettemanœuvre avait été dénoncée parla gauche comme un moyen de semettre en conformité avec les obli-gationslégalessans réaliserde véri-

tables HLM. Avant lui, en 2006,Patrick Ollier, alors député desHauts-de-Seine, avait défendu lamême idée. A l’époque, l’abbé Pier-reenpersonnes’étaitdéplacéàl’As-semblée nationale pour s’insurgercontre ce projet.

M. Apparu avait jusque-là tou-jours démenti vouloir toucher à laloi SRU. En juin 2010, le secrétaired’Etat au logement s’était mêmeprononcé pour « augmenter lessanctions pour les villes qui refusentcomplètement d’appliquer la loiSRU ». Une piste qu’il reprendaujourd’hui.

Avant la convention UMP sur lelogement du 8 novembre, ce coupde boutoir apparaît comme un bal-lon d’essai. M. Apparu prévient que«l’électionprésidentielleseral’occa-sion d’en débattre». C’est aussi unélément de différenciation fortavecleprogrammeduPartisocialis-te. Le PS s’est engagé à porter à 25 %par commune le seuil de loge-ments sociaux. En attendant, lesecrétaire d’Etat au logement aural’occasion de tester en direct sa pro-position, jeudi 29 septembre, lorsde son discours de clôture ducongrès HLM. p

Catherine Rollot

J ean et Xavière Tiberi, respecti-vement âgé de 76 et 74 ans, ontà nouveau rendez-vous avec la

justice. Quinze ans après la révéla-tion, en avril 1997, par Le Canardenchaîné, d’un système de fraudeélectorale qui aurait permis à JeanTiberi (UMP), maire du 5e arrondis-sement de Paris et député, de gla-ner des voix illicites aux électionsmunicipales de 1995 et aux élec-tions législatives de 1997, la courd’appel de Paris examine ce dos-sierà partir du 26 septembreet jus-qu’au 11 octobre.

En première instance, le 27 mai2009, le tribunal correctionnelavait condamné le couple :trois ans d’inéligibilité, dix moisd’emprisonnement avec sursis et10 000 euros d’amende pourJean ; neuf mois d’emprisonne-ment avec sursis et 5 000 eurosd’amende pour Xavière.

L’ancien maire de la capitale(1995-2001), qui a toujours nié lesfaits, avait été reconnu coupabled’« atteinte à la sincérité du votepar des manœuvres frauduleu-ses ». Dans un jugement de 140pages, les juges avaient estiméqueM.Tiberiétait belet bienimpli-qué « dans un système d’inscrip-tions frauduleuses », même s’iln’avait jamais été directementmis en cause.

Lors de l’audience de premièreinstance, entre le 2 février et le4 mars 2009, Jean Tiberi avait finipar reconnaître l’existence d’unefraude électorale, mais il en avaitrejeté l’entière responsabilité surses collaborateurs.

Pourtant, une note rédigée desa main, où il donne des instruc-tionsconcernantles listes électora-les, figure dans le dossier. Celle-ciprouve, au minimum, que M.Tibe-ri suivait de près les manœuvresd’arrière-cours mises en œuvrepour lui assurer des voix supplé-mentaires. Las. Même si Jean Tibe-ri savait l’existence de fraudes,« rien ne permet de dire qu’il enétait l’organisateur », avait plaidél’un de ses avocats, Me Jean-YvesLeborgne.

Cette défense n’avait pasconvaincu le tribunal, qui avaitécarté ces arguments. Ils « ne résis-

tent pas aux éléments matériels dudossier », avaient conclu les juges,pas plus que n’avaient résisté lesdénégations de Mme Tiberi. « Elle aconsidéré que ces accusationsétaient des mensonges, des faribo-les et des billevesées », notaient lesmagistrats, mais « un tel discourss’efface devant les éléments à char-ge », relevaient-ils.

C’est que les infractions rele-vées à l’issue de la procédure neplaidaient pas en faveur des Tiberiet du clan qui agissait à leur côté.Entre autres faits troublants, l’ins-truction ouverte en mai 1997après les plaintes du candidat desVerts Yves Antonin Frémion-

Danet et de la socialiste LyneCohen-Solal, avait notammentmis au jour la présence sur les lis-tes électorales du 5e arrondisse-ment de personnes domiciliées àdes adresses qui n’existaient pas.

L’enquêtemenée parlesgendar-mes avait également permis dedécouvrir que des familles,connues pour leur sympathie enfaveur du RPR (devenu UMP en2002), s’entassaient à vingt-cinq« dans un immeuble insalubre nepouvant abriter plus de troisfamilles ».

Ou encore, plus étonnant, unmembre du comité départemen-tal du RPR n’abritait pas moins detrente-huit électeurs dans sonmodeste logement. Bien évidem-ment, tous ces électeurs fantômesavaient en commun d’être des pro-ches du RPR ou d’avoir bénéficiéde quelques services émanant desTiberi : un logement de la Ville ouun emploi à la mairie de Paris.

Ces investigations avaient éga-lement permis de dévoiler le rôlede Xavière Tiberi. Bien que ne pos-

sédant aucun mandat, pendant delongues années, l’épouse de JeanTiberi a imposé sa présence et sonautorité auprès des partenaires deson mari et des fonctionnaires dela mairie.

Omniprésente dans la procédu-re et à la mairie du 5e arrondisse-ment, elle apparaît en premièreligne auprès de son mari et desmalversations qui lui sont repro-chées. Lors de l’audience du tribu-nalcorrectionnel, elle aadmis l’ins-cription illicite de plusieurs mem-bres de sa famille, tout en s’échi-nant à minimiser son rôle.

Considérée comme un « élé-ment central de la fraude », Anne-Marie Affert, première adjointe deJean Tiberi dans le 5e arrondisse-ment, avait été condamnée à deuxans d’inéligibilité, neuf mois deprison avec sursis et 1 500 eurosd’amende. Elle aussi a interjetéappel et comparaît de nouveau.Après avoir nié son implication,elleavaitfinipar dénoncer lesTibe-ri de manière implicite. p

Yves Bordenave

Avantla conventionUMPsur le logement

du8novembre,cecoup de boutoirapparaîtcommeunballon d’essai

Pourle mouvement HLM, le socle de 20%de logementssociauxpar commune doit rester«incompressible»Le secrétaire d’Etat au logement, Benoist Apparu, a déclaré, à deux jours du congrès HLM– du 27 au 29septembre, à Bordeaux –, que ce taux «appliqué partout n’avait pas de sens»

En2009, Jean Tiberiavaitété reconnu

coupabled’«atteinteàla sincéritéduvotepar desmanœuvres

frauduleuses»

Faux électeursdu 5e arrondissement:lesépoux Tibericomparaissent en appelCondamné en première instance à trois ans d’inéligibilité, l’ancien maire de Paris avait finipar reconnaître l’existence d’une fraude tout en rejetant la responsabilité sur ses collaborateurs

Discrimination

Une applicationpour téléphonescritiquéepour homophobieDes associations de défense des droits des homosexuels ont dénoncé,dimanche 25 septembre, une application pour les téléphones portablesdotés du système Android de Google, destinée aux mères de famille etintitulée « Mon fils est-il gay ? ». Un porte-parole de Google France aexpliqué que « les applications ne sont pas filtrées avant d’être publiéessur Android Market », et qu’« elles ne sont retirées qu’après avoir étésignalées et revues au cas par cas ». Mi-septembre, une application iPho-ne baptisée «Juif ou pas juif ? » avait suscité l’indignation d’associationsantiracistes, avant d’être supprimée. – (AFP.) p

Education

SégolèneRoyal proposedesinternats dès l’écoleLa candidate à la primaire socialiste, Ségolène Royal, a proposé, samedi24 septembre, de créer « des internats scolaires de proximité » qui offri-raient un meilleur encadrement éducatif aux élèves dès leur plus jeuneâge, dans les quartiers difficiles. Interrogée samedi par le quotidien Libé-ration sur ce que serait, à ses yeux, une « mesure courageuse » à destina-tion des banlieues, Mme Royal répond: « Ce serait de donner l’opportuni-té à tous les enfants dans les écoles de pouvoir accéder à des internats sco-laires de proximité qui ne disqualifient pas les parents et qui donnent àtous les enfants un encadrement éducatif dès le plus jeune âge. » « C’estla bataille pour la réussite scolaire », a ajouté la présidente de la régionPoitou-Charentes. p

Santé Manifestation de soutien à la maternité des LilasPlusieurs centaines de personnes, dont Jean-Luc Mélenchon (Front degauche), Eva Joly (Europe Ecologie-Les Verts) et Harlem Désir (PS),étaient rassemblées, samedi 24 septembre, devant la maternité des Lilas(Seine-Saint-Denis). L’avenir de cette maternité privée à but non lucra-tif, ouverte en 1964 pour promouvoir une naissance moins médicali-sée, est menacé par les restructurations hospitalières.

Entrée en vigueur de la nouvelle convention médicaleLa nouvelle convention médicale, qui instaure notamment des primesà la performance dans la rémunération des médecins, est entrée envigueur dimanche 25 septembre, après sa parution au Journal officiel.« La rémunération à la performance valorise de plus l’engagement desmédecins traitants dans la prévention, le suivi des pathologies chroni-ques et l’efficience des prescriptions », souligne le texte. Le dispositif doitpermettre aux médecins de toucher chaque année jusqu’à 9 100 eurosde prime s’ils atteignent tous leurs objectifs.

Faits divers Disparition d’un père et de son enfantdans le CalvadosLa justice devait lancer, lundi 26 septembre, un appel à témoin au sujetde la disparition d’un père de famille, Sylvain Jouanneau, 37 ans, et deson fils, 8 ans, disparus depuis début septembre à Caen (Calvados). Lecamping-car du père a été retrouvé près de Caen, et une voiture luiappartenant découverte au Pays basque. Selon Le Parisien, les enquê-teurs n’écartent pas la possibilité que l’homme, qui vivait séparé de lamère de l’enfant, puisse s’en prendre à son fils.

Un homme meurt carbonisé dans un foyerde travailleurs près de LyonUn homme de 33 ans est décédé dans la nuit de samedi 24 à dimanche25 septembre, quand sa chambre, située dans un foyer de la SNCF à Oul-lins (Rhône), près de Lyon, a été ravagée par le feu.

Un homme tué par balles à la sortie d’une boîte de nuitprès d’AjaccioUn homme de 19 ans a été tué par balles, dimanche 25 septembre, sur leparking du Pub Saint-James, à Porticcio (Corse-du-Sud), établissementde nuit dans lequel il travaillait comme vigile. Il a été atteint par plu-sieurs projectiles, alors qu’il était assis au volant de son véhicule. Xavière et Jean Tiberi, le 2 mars 2009, lors du premier procès devant le tribunal correctionnel. MARC CHAUMEIL/FEDEPHOTO

16 0123Mardi 27 septembre 2011

économie

BruxellesBureau européen

C ontestée au sein du G20, lataxe sur les transactionsfinancières émerge peu

à peu en Europe. La Commissioneuropéenne devrait adopter, mar-di 27 septembre, une propositionlégislative destinée à placer lesvingt-sept Etats membres auxavant-postes dans ce domaine.

Avec la chancelière allemandeAngela Merkel, le président fran-çais Nicolas Sarkozy a beaucoupinsisté auprès du président de laCommission José Manuel Barrosoafin qu’il lance le projet au niveaueuropéen avant le sommet du G20

à Cannes (Alpes-Maritimes), les 3et 4 novembre. La taxe est l’unedes priorités de la présidence fran-çaise du G20, en dépit de l’opposi-tion des Etats-Unis et des paysémergents. Mais l’Europe, affai-bliepar la crisedes dettessouverai-nes, est-elle en mesure de montrerl’exemple ?

Sur le Vieux Continent, la taxesur les transactions financières neverra pas le jour avant 2014. D’icilà, lesdiscussions s’annoncent lon-gues et risquent de creuser un peuplus le fossé entre les pays de lazone euro et le Royaume-Uni.

Le tandem franco-allemandplaide depuis des mois pour cetype de prélèvement, afin de mon-trer aux contribuables-électeursque les financiers aussi sont misà contribution pour remplir lescaisses des Etats surendettés. PourParis, il s’agit en particulier definancer l’aide au développement.

Le Royaume-Uni et la City deLondres s’opposent à une telleapproche européenne, tout com-me la Suède, et quelques pays del’Union monétaire, dont les Pays-Bas et Malte. « Le Royaume-Uni estpourtant l’un des onze pays euro-péens à avoir mis en place une taxespécifique sur la transaction desactions cotées à Londres », observeun responsable européen.

En cas de veto persistant de Lon-dres, il est d’ores et déjà envisagéàBruxelles que le projet voit plutôtle jour sous la forme d’une « coopé-ration renforcée » entre les seulspays de la zone euro. L’Allemagne

et la France y sont prêtes. La miseen place d’une telle taxe en Europeserait «une étape cruciale pour for-ger un consensus au niveau mon-dial afin de ne pas handicaper lacompétitivité européenne », ontécrit leurs ministres des finances,François Baroin et WolfgangSchäuble, à la Commission mi-sep-tembre.

Apaiser les débatsPour Algirdas Semeta, le com-

missaire chargé de la fiscalité quiporte l’initiative, « l’enjeu est demontrer que la taxe peut fonction-ner au niveau européen, en évitantles délocalisations ». Un point devue qui ne fait pas l’unanimité au

sein de la Commission. Quelquescommissaires, dont la BritanniqueCatherineAshton,chargéedesrela-tions étrangères, et le Belge KarelDe Gucht, au commerce, devaients’opposer à la proposition. Ils crai-gnent, comme les professionnelsdu secteur, que la taxe n’affaiblissel’industrie financière européenne,en accélérant le départ de certainesactivités. « Leur opposition pour-rait retarder le projet, mais pas l’en-terrer étant donné la pression misepar Paris et Berlin », dit un hautfonctionnaire.

Les discussions portaient enco-re, lundi matin, sur deux grandssujets : d’une part le taux de lataxe, d’autre part sa territorialité.

Tandis que Paris évoque un pré-lèvement de l’ordre de 0,05 %, laCommission est partie d’hypothè-ses différentes, en faisant une dis-tinction selon les types de transac-tions : une taxe de 0,1 % sur lavaleur des actions et des obliga-tions échangées, 0,01 % pour lesproduits dérivés. Il s’agira de seuilsminimaux, libre ensuite à chaqueEtat defixer ses proprestaux(com-mepourla TVA,elleaussiharmoni-sée au sein des Vingt-Sept).

Toutes les transactions effec-tuées au sein de l’Union européen-ne (UE) ou en provenance, et à des-tination de l’UE seront concernées.Certaines opérations de change,tout comme les opérations effec-

tuées par des particuliers seront,elles, exemptées.

Au total, la taxe pourrait,d’après les estimations, rapporterentre 30 et 50 milliards d’eurospar an en régime de croisière. Pourapaiser les débats, la Commissionde Bruxelles ne devrait pas tropinsister à ce stade sur son inten-tion, mal vue à Berlin et à Londres,d’affecter les revenus de cette taxeau budget européen. Dans la fou-lée de sa proposition, les ministresdes finances des Vingt-Septenvisa-gent de débattre du sujet dès leurprochaine réunion, le 4 octobre,afin de présenter un front le plusuni possible au G20.p

Philippe Ricard

EnbaisseLa Bourse de Tokyo – L’indice Nikkei esttombé, lundi 26 septembre, à son plus basniveau depuis le 1er avril 2009, à 8 374,13 points.Les investisseurs s’inquiètent de la faiblecroissance mondiale, des dettes européenneset de la flambée du yen, la devise japonaise.

L’Europeveut taxerles transactions financièresParis et Berlin cherchent à faire avancer un dossier qui ne séduit pas Londres et qui divise la Commission

EnhausseL’Algérie – L’excédent de la balancecommerciale du pays a augmenté de 18 % lorsdes huit premiers mois de l’année par rapportàla même période de 2010, à 15,97 milliards dedollars, selon les douanes. Les exportations ontprogressé de 18,26 %, à 47,14milliards de dollars.

Lescoursdu jour ( 26/09/11 , 09h44 )

Bill Gates apporteson soutien au projet

BruxellesBureau européen

S ous pression du G20, les paysde la zone euro veulent allerplus vite et plus loin pour

régler la crise des dettes souverai-nes. Il leur faut bien sûr régler lecas grec, mais aussi enrayer sacontagion aux autres maillons fai-blesde l’unionmonétaire et au sec-teur bancaire.

Dans une déclaration commu-ne samedi 24 septembre à Wash-ington, les Dix-Sept se sont doncengagés devant les Etats membresdu Fonds monétaire international(FMI) à faire « tout le nécessaire » et« assurer la stabilité financière decette zone dans son ensemble ».

Tandis que la mission d’inspec-tion mandatée par le FMI, Banquecentrale européenne (BCE), et laCommission européenne devaitretourner à Athènes lundi, l’Alle-magne s’apprête à ratifier la refon-te du Fonds européen de stabilitéfinancière (FESF).

Après la France, la Belgique, oul’Italie, elle sera le sixième pays, surdix-sept, à faire de la sorte. La fin duprocessus est espérée d’ici à la moi-tié du mois prochain, avant leconseil européen des 17 et 18 octo-bre, soit plus de trois mois aprèsl’annonce du plan. Mais les débatsrestent incertains aux Pays-Bas, enSlovaquie et en Finlande.

D’un montant de 160 milliardsd’euros, le second programmed’aide prévoit d’organiser le défautpartiel de la Grèce, avec la contribu-tion des créanciers privés, et derefondre le FESF selon trois axes: lerachat de la dette des pays menacés

sur le marché secondaire, deslignesde crédits préventifspourlespays fragilisés, et des prêts dédiés àla recapitalisation des banques.

Mais la crise s’est aggravée cetété, et les Dix-Sept ne peuvent plusse contenter de l’accord du21 juillet. Ils débattent désormaisde l’étape d’après. Certains pays,comme l’Autriche, n’excluent pasundéfautenbonneetdueformedela Grèce. Une option repoussée parla France et par la Commissioneuropéenne.

En marge des réunions du FMI,WolfgangSchäuble,leministrealle-mand des finances, a par ailleurssuggéré d’anticiper la création duMécanisme européen de stabilité(MES), qui ne devait pas prendre larelève du FESF avant la mi-2013.

Celapourraitpermettredepréci-ser l’une des pistes examinéesdepuis quelques semaines: trans-formercetinstrument en une sortede banque, afin de le faire interve-nir avec l’aide de la BCE pour réglerles problèmes de liquidités et defonds propres des établissementsfinanciers les plus menacés. Uneoption repoussée jusqu’ici par laBCE.

Sans attendre, les Européenssongent, pour pallier au plus pres-sé, à renforcer encore le FESF quidispose d’une force de frappe de440 milliards d’euros. « Nous réflé-chissons à la possibilité de doter leFESF d’un effet de levier plus impor-tant », a indiqué lundi le commis-saire européen aux affaires écono-miques et monétaires, Olli Rehn,dans un entretien au quotidienallemand Die Welt. p

P. Ri.

Lazoneeurofera«toutlenécessaire»poursastabilitéSous pression du FMI, les Dix-Sept veulent agirau-delà du plan de sauvetage de la Grèce

Euro 1euro dollar (achat)Or Once d’or 1689,00 dollarsPétrole Lightsweet crude 78,27 dollarsTauxd’intérêt France 2,456 (à dix ans)Tauxd’intérêt Etats-Unis 1,731 (à dix ans)

Le milliardaire américainBillGates a apporté son soutienau projet d’une taxe sur les tran-sactions financières, même sielle n’est pas adoptée de manièreuniverselle. Jusqu’à présent, l’ex-patron de Microsoft s’était ditsceptique sur une taxe qui seraitboycottée par les Etats-Unis.Mais dans un rapport, établi à lademande de Paris dans le cadrede la préparation du G20 et pré-senté vendredi 23septembre, ilaamendé sa position. Il préconi-se aussi de taxer l’émission encarbone des transports maritimeet aérien, ce qui pourrait rappor-ter 100milliards de dollars (75mil-liards d’euros) par an. – (AFP.)

170123Mardi 27 septembre 2011

économie

Genève (Suisse)Correspondance

D ix jours après l’annonced’une fraude de 2,3 mil-liards de dollars (1,7 mil-

liard d’euros), commise par un tra-der londonien de la banque UBS,l’Allemand Oswald Grübel, direc-teur général du géant bancaire hel-vétique, a démissionné, samedi24septembre, disant vouloir assu-mer la responsabilité de cette pertemassive. Ilsera remplacéparleTes-sinois Sergio Ermotti, actuel direc-teur d’UBS pour la zone Europe,Asie et Afrique, nommé directeurpar intérim, avec effet immédiat.

A 67 ans, M.Grübel, que la pres-se suisse alémanique avait baptisé« Saint Ossie » pour avoir acceptéde prendre les rênes, en 2008,d’UBSalorsenpleinedébâcle,asou-haité que son départ permette auxclients, aux investisseurs et auxautorités politiques de concentrerà nouveau leur attention sur les«qualités et les forces» d’UBS.

Une semaine auparavant, s’ex-primant dans le journal Sonntag,M. Grübel semblait inébranlable,excluant toute démission. Il sedisait«responsablemaispascoupa-ble » de la perte de 2,3 milliards dedollars, estimant que l’on ne pou-vait rien faire contre quelqu’un quidécide d’agir avec une « énergie cri-minelle », comme le courtierKweku Adoboli, aujourd’hui incul-pé pour « fraudes comptables».

C’est une réunion à Singapour,mercredi 21 septembre, avec leGovernment of Singapore Invest-ment Corporation (GIC), le fondssouverain, premier actionnaired’UBS (6,41 % du capital), qui auratout fait basculer.

Le GIC était entré, fin 2007, dansle capital de la grande banque, déjàtouchée par ses engagements surle marché des crédits hypothécai-res américains à haut risque – lessubprimes. Depuis, le bilan est plu-tôtmauvais: lesactionnairesasiati-ques ont perdu près de 77% de leurinvestissementinitial, qui s’élevaità 11 milliards de francs suisses(9milliards d’euros).

Dès l’annonce du trou dû auxopérations de négoce non autori-sées à Londres, le GIC avait expri-mé sa déception. En se rendantà Singapour, M. Grübel espérait

obtenirunblanc-seingpourremet-tre de l’ordre dans la banque d’in-vestissement qui, en 2007 et 2008,avait déjà fait perdre quelque50 milliards de dollars à UBS dansles subprimes. En guise de répon-se, le fonds souverain singapou-rien a publié un communiqué sursa « préoccupation face aux faillesinternes de contrôle », exigeantqu’UBS « agisse au plus vite pourrestaurer la confiance ».

Selon le Financial Times du lun-di 26 septembre, la volonté deM. Grübel de maintenir UBS entant que banque universelle (ban-que de détail, de gestion de fortu-ne et banque d’investissement) etson souhait de remodeler leconseil d’administration d’UBS sesont heurtés à l’opposition de cer-tains administrateurs.

Pour beaucoup d’experts, ladémission de M. Grübel laisseentiers les problèmes et peu d’es-poirs de réels changements. Same-di 24 septembre, depuis Singa-pour, Kaspar Villiger, président duconseil d’administration d’UBS,a expliqué que le modèle de ban-que intégrée sera maintenu. Maisles activités de banque d’affairesseront davantage encadrées. Plusquestion d’autoriser une spécula-tion effrénée sur les taux de chan-ge, mais seulement des « opéra-tions nécessaires à nos clients »,a promis le directeur par intérimSergio Ermotti, un ancien de Mer-rill Lynch

Le conseil d’administrationd’UBS l’a chargé d’accélérer laréduction des activités de banqued’investissement, et de détailler ceprocessus à New York le 17 novem-bre. En août, la grande banqueavait annoncé son intention desupprimer 3 500 postes sur les18000 actuels, dont près dela moi-tié dans ses activités de banqued’investissement. p

Agathe Duparc

Q uandtirerlorsqu’onnedis-pose que d’une seule car-touche ? C’est le dilemmedes autorités européen-

nes, notamment françaises, pourdécider d’un éventuel renfloue-ment des banques. L’exécutif fran-çais nie tout plan de recapitalisa-tion des établissements finan-ciers. En réalité, rien n’est exclu.« Ce sont les marchés qui fixeront lerythme d’une éventuelle opéra-tion », assure un proche de NicolasSarkozy.

Une opération à chaud a étéenvisagée, dimanche 11 septem-bre, lors d’une réunion des ban-quiers à Bercy, comme l’a révélé leJournaldudimanchedu 25septem-bre.L’économiste enchef dela Ban-que centrale européenne (BCE)Jürgen Stark avait démissionné,les marchés étaient en chute libre.

Mais il a échoué : BNP Paribasn’a pas voulu être solidaire de ceplan, et la Société générale a refuséd’aller seule au guichet, de peurd’être stigmatisée. « Il s’agissait dediscussions exploratoires », tempè-re un conseiller de M. Sarkozy.

L’annonce parla Société généra-le, lundi 12 septembre, que la ban-que allait renforcer ses fonds pro-pres, suivie le 14 septembre de latéléconférence entre Angela Mer-kel, Nicolas Sarkozy et GeorgesPapandréou pour accélérer la miseen œuvre du plan grec ont donnéun certain répit.

Désormais, l’idée est d’agir àfroid, dans un contexte plus favo-

rable. Pour cela, il faut que le plande sauvetage de la Grèce et le fondseuropéende stabilisation financiè-re (FESF) entre en vigueur. Une éta-pe décisive devrait être franchiejeudi 29 septembre par le vote duBundestag.

«Prêts à agir»Paris craignait une crise politi-

que si Mme Merkel connaissait tropde défections dans son camp etque le plan n’était adopté que grâ-ce aux voix de l’opposition. L’en-tourage de la chancelière assureque ce risque s’est éloigné avec lesgaranties de contrôle données auBundestag sur l’usage des fonds lasemaine dernière.

Dans la foulée, une initiativefranco-allemande est envisagée.Les Européens pourraient annon-cer des plans de renforcement desfonds propres de leurs banquessimultanément, comme en 2008.« Tous les pays européens sontprêts à agir, si nécessaire », assureun proche du président français.

Reste à trouver les bons outils.La liquidité des banques est assu-rée par la BCE. L’institut d’émis-sion a signé des accords, notam-mentavec la Réserve fédérale amé-ricaine, pour permettre aux ban-ques européennes en manque dedollars d’avoir accès au billet vert.Mais les banques ne veulent passolliciter la BCE, de peur d’être stig-matisées par les marchés.

Reste à renforcer les fonds pro-pres des banques. BNP Paribas et laSociété générale ont indiqué leurintention d’atteindre un ratio defonds propres de 9 % dès 2013,alors que les accords de Bâle 3 leurdonnaient jusqu’à 2019.

Pour cela, les banques doiventmaigrir, réduire leurs activités demarché, voire couper dans leursdividendes. «Depuis 2008, les ban-ques françaises ont augmenté leursfonds propres de 50 milliards d’eu-rosetfaitaupremiersemestredecet-te année 11 milliards de bénéfice»,défend un conseiller de l’Elysée.

Si ce n’est pas suffisant, il fau-

dra une intervention extérieure.L’investissement direct des Étatsn’est pas privilégié, encore moinsla nationalisation. Ce serait, expli-que une source française, mettreen danger la notation des États parles agences financières et avoir unremède pire que le mal.

Dans ce contexte, le Fonds euro-péen de stabilité financière (FESF)permet d’aider les banques desÉtats en difficultés. Il devrait ser-vir à recapitaliser les banquesgrecques et portugaises, maispourrait aussi être utile auxautres pays. Ce fonds sera opéra-tionnel mi-octobre, lorsque la Slo-vaquie aura ratifié, en dernier, leplan de sauvetage décidé à Bruxel-les le 21 juillet.

La deuxième piste serait derecouriràdes investisseursinstitu-tionnels. La caisse des dépôts peutêtre le bras armé de l’Etat, mais ellerechigne, selon une source finan-cière, à se faire « tordre le bras »pour secourir les banques les plusen difficulté. Le cas de Dexia, enpourparlers avec la Banque posta-le, est le plus épineux.

L’autre piste consisterait àoctroyer des garanties comme en2008 et faire entrer au capital desbanques des investisseurs privésouétrangers comme les fonds sou-verains, tels celui du Qatar. Cettethèse aurait été défendue par BNPParibas. On se dirigerait donc plu-tôt vers des solutions à la carte,annoncées simultanément. p

Arnaud Leparmentier

Lesactivitésde banqued’affaires seront

davantageencadrées.Iln’y auraplus de

spéculationeffrénéesurlestaux dechange

Les actifs hérités de la crisecontinuent de peser sur le bilande Dexia.Lundi 26septembre,Les Echos ont annoncé que labanque franco-belge pourrait sedébarrasser de 20milliards d’eu-ros d’actifs. Le groupe, frappépar la crise des subprimes de2008 et sauvé in extremis parles Etats belge et français,

aaccéléré son programme decession en 2011 et enregistrédes provisions qui lui ont valuune perte historique de 4mil-liards d’euros au deuxième tri-mestre.Spécialisé dans le finan-cement des collectivités, Dexiapourrait aussi adosser cette acti-vité à La Banque postale, selonLe Figaro de samedi.

Réflexionsaugouvernementpouraider les banques françaisesLa ratification du plan de sauvetage de la Grèce par le Bundestag est un préalable

E n quelques semaines, l’accèsdes entreprises au finance-ment sur les marchés a pris

un virage à 180 degrés. Alors qu’aupremier semestre, les investis-seurs se ruaient sur les empruntsà haut rendement dits high yield,émis par les sociétés très endettées– communément appelés junkbonds–,depuisaoût,ilssesonttota-lement retirés de ce marché.

Compte tenu de l’accroisse-ment des incertitudes sur le sortde la zone euro, les acheteurs dedette se réorientent vers des actifsqu’ils jugent plus sûrs comme lesemprunts de grandes entreprisesconnues et bien notées par lesagences de notation. Depuis lami-septembre, Suez Environne-ment, Autoroutes du sud de laFrance (ASF), Saint-Gobain, Dano-ne, Schneider Electric, RCI banque(filiale de Renault), ont effectuésans difficulté des levées de fonds.« Coté high yield, aucune opéra-tion : le marché est fermé pour lemoment», constate Paul Santucci,responsabledes émissions d’entre-prises chez HSBC France.

Pourtant l’année avait biendébuté, poussant les sociétés trèsendettéesà se tourner vers les mar-chés. Certaines avaient mêmerenégocié avec leur banquier pourqu’une partie importante de leurfinancement se fasse par empruntobligataire. Celles-ci seront sansdoute obligées de revenir sur leurstratégie ou de céder des actifs. « Lasituation n’est pas dramatiquemais certaines sont dans une posi-tion délicate », juge M.Santucci.

Au premier semestre, ces socié-tés ont emprunté 49,94 milliardsd’euros sur le marché des capitauxselonlesdonnéesdeThomsonReu-ters, contre 68,345 milliards surl’ensemble de 2010, 31,24 milliardsen 2009 et 10,12 milliards en 2008.Les emprunts high yield qui consti-tuaient, en 2008, 0,2 % des émis-sionsdedettedes entrepriseseuro-péennes, en représentaient 29 %

au premier semestre, selon les sta-tistiques de la Société générale.

« Des entreprises avaient mêmefait leur première apparition cetteannée sur ce marché avec desemprunts très mal notés – parfoisCCC +, ce qui jusqu’alors était rareen Europe », indique ChristopheRichard, spécialiste du marché deshigh yield chez Natixis.

Situation délicateCes entreprises s’étaient pour la

plupartrenducompte lorsde la cri-se financière de 2008 que le robi-net du crédit pouvait se fermersubitement. Elles avaient alorsdécidé de réduire leur dépendanceau financement bancaire.D’autant que les établissementsfinanciers, soumis à des réglemen-tations plus strictes et à la pressiondes marchés, étaient de moins enmoins enclins à prendre du risquesur leur bilan. « A travers les régle-mentations en discussion (Bâle 3),les banques seront de moins en

moins amenées à offrir des finance-ments à long terme aux entreprises,car ils vont nécessiter pour elles demobiliser beaucoup de capital »,estime Michel Favre, directeurfinancier de Rexel.

Le cas de cette entreprise fran-çaise, leadermondial deladistribu-tion de matériel électrique, illus-tre bien le phénomène. Pour cettesociété très endettée depuis sonrachat par LBO en mars 2005,l’orientation vers les marchés obli-gataires, auquel elle a eu recoursfin 2009 et en mai 2011, était unedécision stratégique.

Avec la crise et après le rachat deson homologue néerlandais Hage-meyer en 2008, elle a connu destensions début 2009 sur son ratiod’endettement. « Notre situationfinancière s’était dégradée et il yavait un risque que, dans les neufmois, les banques nous demandentde rembourser notre dette, et nousmettent en défaut de paiement »,se souvient M. Favre.

Fin 2009, les choses s’arrangentet Rexel en profite pour remettreà plat toute la structure de sonendettement. L’entreprise, quiavait devant elle des rembourse-ments importants à honorer fin2012etfin2013,souhaitaitles étalerdans le temps. Ce qu’elle a fait enpassant par le marché obligataire.

Maisaujourd’hui,pour lessocié-tés qui n’ont pas eu l’opportunitéde sécuriser leur financement enempruntant sur les marchés avantl’été, la situation est délicate.« Pour les sociétés qui ont contractédes emprunts high yield, il y a unmurdedettesqui arriveraàéchéan-ce en 2013 et en 2014 et qu’il faudrarefinancer », constate un profes-sionnel. Mais il n’est pas certainqu’aujourd’hui,soumises àlapres-sion d’une recapitalisation oud’une restructuration, les banquessoientde bonne composition pouraccorder des crédits à des entrepri-ses à risques. p

Cécile Prudhomme

Social

Près d’unsalarié sur troispenseà quitterson entreprisePrès d’un tiers (30%) des salariés français « songent sérieusement à quit-ter leur entreprise », indique une enquête publiée lundi 26 septembre etréalisée par le cabinet Mercer auprès de 2 000 personnes, interrogéesen ligne à leur domicile. Ce chiffre marque une hausse de 57 % par rap-port à une précédente enquête menée en 2007. Seuls 50 % des salariés« ressentent encore un fort attachement » à leur entreprise. Le taux desalariés se déclarant « satisfaits » au travail tombe de 72% à 57 %entre 2007 et 2011. – (AFP.) p

Crise de l’euro La Banque centrale européenneattaquée devant la Cour de justice européenneMarkus Kerber, professeur de droit à Berlin, déjà à l’origine de recoursdevant la Cour constitutionnelle allemande pour dénoncer le sauveta-ge de la Grèce, devait déposer, lundi 26 septembre, une plainte devant laCour de justice européenne contre la Banque centrale européenne(BCE), affirme La Tribune du même jour. M. Kerber, qui parle au nom del’association Europolis, accuse la BCE d’avoir violé des articles du traitéeuropéen en rachetant des dettes souveraines depuis 2010.

La Grèce prête à plus d’efforts malgré le coût politiqueLe ministre grec des finances Evangélos Vénizélos a promis, dimanche25septembre, que son pays continuera de réduire son déficit « quel quesoit le coût politique ». Il s’exprimait à Washington devant l’assemblée del’Institut international de la finance, association de 450 banques.

Conjoncture L’inflation s’apaise et la croissanceralentit au VietnamL’inflation au Vietnam a atteint 22,4% en septembre en rythme annuel,contre 23% en août, marquant un premier ralentissement en un an,selon des statistiques publiées le 24septembre. Hanoï a aussi annoncéune croissance de 5,76% sur un an en septembre, contre + 6,54% en 2010.

L’établissement franco-belge Dexia en quête d’argent

Lefinancementpar les marchésse fermepourles entreprisesquiprésentent un fort endettementLes investisseurs ne veulent plus acheter que de la dette de grandes sociétés en bonne santé

Enpleine tourmente,UBSs’interrogesurson modèleOswald Grübel, le directeur généralde la banque helvétique, a démissionné

18 0123Mardi 27 septembre 2011

économie

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BerlinCorrespondance

P lus de soixante ans après lafin de la période nazie, deuxgrands noms de l’économie

allemandeviennentde leverle voi-le sur les heures les plus sombresde leur histoire : les Quandt, illus-tre famille d’entrepreneurs alle-mands, qui possèdent près de lamoitié des parts du constructeurautomobile BMW ; et Hugo Boss,célèbre marque de vêtements.

Dans les deux cas, il s’est moinsagi d’un choix que d’une nécessité.Les marques connues du grandpublic ne peuvent plus faire l’éco-nomie de la transparence.

Hugo Boss, fondée en 1924 etaujourd’huipropriétédel’investis-seur britannique Permira, voyaitavec inquiétude depuis plusieursannées se multiplier les rumeursle consacrant « tailleur du Führer »et « concepteur des uniformes SS ».L’ouvrage Hugo Boss, 1924-1945(éd. C. H. Beck), de l’historienRoman Köster, y met un terme etexpose dans le détail les liens de lafirme avec le régime nazi.

«Hugo Boss a bien taillé des uni-formes pour la Wehrmacht, les SS etles Jeunesses hitlériennes, expliqueM. Köster au Monde. Mais l’entre-prise était à l’époque une petitemarquedansunmarchédel’unifor-me très décentralisé. Les entrepri-ses n’étaient pas impliquées dans ledéveloppement des patrons desuniformes.» Comme laplupart desentreprises à l’époque, Hugo Bossa recours au travail forcé, limitédans son cas à 140 travailleurs.

Il en est autrement de la familleQuandt. L’Ascension des Quandt(éd. C. H. Beck), de l’historien Joa-chim Scholtyseck, révèle l’am-pleur des liens entre la dynastied’entrepreneurs et le régime nazi.

Le patriarche Günther Quandt,membre du NSDAP, le parti hitlé-rien, dès 1933, est ainsi décrit parM. Scholtyseck comme une « piècedu régime nazi », un homme d’af-faires dont le modèle économiqueest « inséparable des crimes dunational-socialisme»et «corespon-sable du régime ». Profitant de l’a-ryanisation des entreprises juivesd’Allemagne, il a activement tra-vaillé à l’intégration de l’une d’el-les dans son groupe. Le travail for-cé est pratiqué à grande échelle –plus de 50 000 travailleurs.

C’est le témoignage poignantd’un des anciens détenus d’uncamp de travail près de Hanovre,dans un documentaire de 2007,qui a forcé la porte du bunkerQuandt. La famille entretenait jus-qu’ici une discrétion et un silencedogmatiques. Après ce film, ilsmettent leurs archives familiales àdisposition des chercheurs.

«Collaboration»M. Scholtyseck, assisté de trois

chercheurs, est mandaté par lafamille,par l’entremisedel’univer-sité de Bonn, pour faire une plon-gée dans ce passé trouble.

« De grands groupes cotés enBourse comme la Deutsche Bankavaient déjà ouvert leurs archives,mais jusqu’ici très peu d’entrepri-ses familiales », explique l’histo-rien. Mon livre est très dur pour lafamille Quandt. »

M. Scholtyseck considère qu’ilreste beaucoup à faire, pas seule-ment en Allemagne. « On trouvedans les archives Quandt beau-coup de choses sur la collaborationplus ou moins forcée des entrepri-ses françaises avec l’industriel pen-dant la guerre, raconte-t-il. Celaouvre la porte à un immensechamp de recherches. » p

Cécile Boutelet

L a Grande-Bretagne n’a plusd’industrie à la différence delaFrance. Parceque l’Angleter-

re, il y a vingt-cinq ans, a fait lechoix des services, et notammentdes services financiers.» Cette peti-te phrase, lancée en février 2009par le président de la RépubliqueNicolas Sarkozy, était erronéeà l’époque. Dix-neuf mois plustard, elle le reste. Et plus quejamais. Car les « bonnes nouvel-les» industrielles s’accumulent auRoyaume-Uni. Notamment dansle secteur automobile.

Au moment où, en France, cer-taines usines de Renault ou de PSAPeugeot Citroën sont menacéesd’une réduction de la production,voire de fermeture, les annoncesd’investissement se multiplientoutre-Manche. Dernière en date :celle du groupe indien Tata, dont lafiliale Jaguar Land Rover – rachetéeen 2008, pour 2,3 milliards de dol-lars (1,47 milliard d’euros de l’épo-que)–vainvestir410millions d’eu-ros pour construire une usine demoteurs dans les Midlands.

L’ouverture de ce site est pré-vue pour 2012 ; 750 emplois serontcréés. Au total, le groupe va inves-tir plus de 1,1 milliard d’euros paran au cours des cinq prochainesannées pour lancer 40 modèles, etannonce vouloir créer des milliersd’emplois au Royaume-Uni.

Tata n’est pas le seul à investir.En juin, BMW a décidé que son usi-ne britannique, située à Cowley,produirait la nouvelle version desa Mini. Celle du groupe Nissan,àSunderland (nord dupays), reste-ra le centre de production de sonmodèle Qashqai pour la nouvelleversion. Au total, les investisse-ments ont atteint respectivement500 millions et 192 millions delivres. Plusieurs milliers d’em-plois ont été sauvés.

Par ailleurs, Nissan, après avoirétudié la possibilité d’assemblerson véhicule électrique, la Leaf,dans plusieurs sites en Europe,a finalement choisi son usine deSunderland. Le constructeur nip-pon a consenti un investissementde 420 millions de livres sterlingpermettant de sauvegarder2 250 emplois et 550 postes trèsqualifiés. Enfin, Ford veut investir1,5 milliard de livres en rechercheet développement (R &D) sur cinqans sur quatre sites en Angleterreet au Pays de Galles. Le construc-teur américain assure d’ailleursenviron 30 % de la R &D du secteurautomobile britannique.

Pourquoi un tel engouement ?L’environnement social plus sou-ple sans doute. Le marché du tra-vail est moins régulé qu’en France.Par ailleurs, les prélèvements aux-quels sont soumises les entrepri-ses sont moins élevés. « Le niveaudes salaires est moins importantpour un constructeur à partir dumoment où il arrive à vendre desvéhicules haut de gamme beau-coup plus rentables que des petitsmodèles très rentables », souligneGaëtan Toulemonde, analyste à laDeutsche Bank. Par ailleurs, letaux de change de la livre par rap-port à l’euro est plus avantageux.

Surtout le gouvernement deDavid Cameron multiplie lesappelsau secteur privé pour inves-tir dans l’industrie britanniqueafin de tenter de compenser les

effets sur l’emploi du ralentisse-ment économique, accentué parun plan de rigueur budgétairesans précédent. Le projet du grou-pe indien Tata bénéficiera ainsi de

11,5 millions d’euros d’aides publi-ques,par unnouveau fondsdesou-tien aux régions.

Pour Nissan et Ford, le soutienfinancier promis par le gouverne-ment a pesé dans la balance. Le

groupe américain a reçu 360 mil-lions de livres sous forme d’unegarantie de crédit et le construc-teur nippon une aide de 21 mil-lions de livres. Ces soutiens inter-viennent après les 300 millions delivres offerts sous forme de garan-tie de prêt à General Motors pourqu’il maintienne ses activités auRoyaume-Uni.

Les Cassandre diront que, hor-mis le constructeur de voituressportives Morgan (moins de1 000 véhicules produits par an),l’automobilebritanniquesouscapi-taux britanniques n’existe plus.Jadisréputée,l’industrieautomobi-le britannique a de fait sombré audébut des années 1980. Les grandsconstructeurs ont disparu, BritishLeyland (avec les marques Austin,Morris,MGRiley,Wolseley),legrou-pe Rootes (Hilman, Humber, Sun-beam, Singer), Triumph.

Côté production en revanche, leRoyaume-Uni a réussi à mainte-nir, bon an mal an, un certainniveau: 1,4 million de véhicules en2010, contre 1,8 million en 2002.En France, les constructeurs ontdélocalisé petit à petit leur produc-tion : en 2010, 2,2 millions d’unitésétaient produites contre 3,7 mil-lions huit ans plus tôt. En revan-che, la Grande-Bretagne a peud’équipementiers, contrairementà la France, et importe donc descomposants.p

Nathalie Brafman

Confrontée à un ralentissementdes commandes, lié aux réduc-tions des budgets de la défenseen Europe, et notamment auRoyaume-Uni, la société britanni-que BAE Systems, deuxièmegroupe de défense mondial,seprépare à annoncer la sup-pression de près de3000emplois (sur environ100000), ont affirmé, dimanche25septembre, le Sunday Telegra-ph, le Sunday Times et la chaîneSky News. Une porte-parole de

BAESystems a qualifié ces arti-cles de spéculations. «Nousn’avons encore rien annoncé offi-ciellement. Nous prévoyons, lors-que ce sera le cas, d’informer enpremier lieu le personnel »,a-t-elle dit. Les suppressionsd’emplois devraient toucherprincipalement la division desavions militaires et se concen-trer sur deux sites outre-Man-che: Warton et Brough, où sontconstruits les avions Eurofigh-ter-Typhoon, et Hawk.

Outre-Rhin,deuxmarques rattrapéesparleur passé naziDeuxlivres consacrésàBMW et Hugo Bossmettentau jour les liens avecle parti hitlérien

L’environnementsocialplus soupleetletaux dechange delalivre par rapportàl’euroexpliquent

cerenouveau

C ’est l’émoi chez PrismaPresse, filiale du groupeallemand Gruner + Jahr

(Bertelsmann). Un article decinqpages, prévu le 7 septembredans le bimestriel Géo Histoire,a été supprimé sur décision duservice publicité, qui redoutait deperdre des budgets. SelonLe Canard enchaîné du 14 septem-bre, l’enquête censurée mettaiten cause les activités de certainesentreprises françaises sous l’Occu-pation, parmi lesquelles Boussac,Berliet, Renault ou Louis Vuitton.

Le passé trouble du malletierest pourtant connu. Dès 2004, Sté-phanie Bonvicini avait révélé,dans le livre « Louis Vuitton, unesaga française» (Fayard), que lamaison de luxe avait été la seuleà pouvoir rester dans les murs del’Hôtel du Parc à Vichy où Philip-pe Pétain avait installé son gou-vernement en 1940. Henry Vuit-ton – frère du dirigeant GastonVuitton – avait en outre été déco-ré par les nazis, en remerciementde sa loyauté. L’enquête deGéo Histoire rappelait que la mai-son avait fabriqué 2 500 bustesofficiels du maréchal Pétain.

«L’enquête était sérieuse,appuyée sur des travaux d’histo-riens», selon Emmanuel Vire,secrétaire général du SNJ-CGTà Géo. La rédactrice – pigiste –avait reçu les félicitations de larédactrice en chef déléguée, Syl-vie Bommel, qui a transmis,mi-août, l’article au service juridi-que de Prisma, pour validation.

Mais c’est le service de la publicitéqui a mis son veto. «Si cet articleétait passé, je sautais et peut-êtrele rédacteur en chef aussi », s’estjustifiée Mme Bommel devant qua-tre journalistes.

La maison mère de Louis Vuit-ton, LVMH, est l’un des plus grosannonceurs de la presse magazi-ne en France. Mais une sourceproche de LVMH assure «qu’aucu-ne intervention, aucune pressionn’a été exercée».

Une autocensure sans fonde-ment? La rédaction de Géo Histoi-re a saisi le comité d’éthique deGruner + Jahr. D’autant que sacharte souligne l’importance dela «séparation entre la publicité etles contenus rédactionnels». Sansmême entendre la rédaction deGéo, le comité d’éthique a jugé le16septembre sa plainte sans fon-dement. «Le rédacteur en chefdoit tenir compte des éventuelsinconvénients qu’[un article] pour-rait causer à la notoriété et à la lon-gévité du titre», a-t-il tranché. Indi-gnés, les représentants du person-nel de Prisma ont demandé la réu-nion d’un comité d’entrepriseeuropéen de Gruner +Jahr.

Le PDG de Prisma, Rolf Heinz,a déclaré au Canard enchaîné quel’article « n’était pas suffisam-ment documenté ni approfondi.Ni la direction de Prisma Presse, nil’éditeur, ni la régie publicitairen’ont demandé à la rédaction enchef d’écarter l’article ». p

Xavier Ternisienet Nicole Vulser

Les VuittonsousVichy,Prismaet la censure

BAE s’apprête à supprimer 3000emplois

L’usine Jaguar de Birmingham, au Royaume-Uni. CHRIS RATCLIFFE/BLOOMBERG

L’industrie automobilemultiplielesinvestissements au Royaume-UniJaguar Land Rover, filiale de l’indien Tata, va construire une usine de moteurs dans les Midlands.BMW et Nissan ont également engagé des dépenses sur leurs sites industriels britanniques

190123Mardi 27 septembre 2011

SÉLECTION publiée sous laresponsabilité de l'émetteurDernier cours connu le 26/9 à 9hValeur Cours date

en euro valeur

CM-CIC EUROPE 18,91 22/9

Fonds communs de placementsCM-CIC EURO ACTS C 14,31 22/9CM-CIC SELECT.PEA 6,17 22/9CM-CIC MID EUROPE 18,23 22/9CM-CIC TEMPERE C 163,30 22/9CM-CIC DYN.EUROPE 28,27 22/9CM-CIC FRANCE C 24,56 22/9CM-CIC EQUILIBRE C 65,34 22/9CM-CIC DYNAM.INTLE 24,28 22/9CM-CIC OBLI C.T.D 133,97 23/9CM-CIC MID FRANCE 29,01 22/9

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SICAV ET FCP

PER - Price Earning Ratio (ou cours/bénéfice) : cours de Bourse divisé par le bénéfice par action estimé pour l'exercicecourant. PER : FactSet JCF Estimates ; données : la Cote Bleue. n/d : valeur non disponible.

FRANCE CAC 40 2823,10 26/9 0,46 4169,87 16/2 2693,21 23/9 8,00

ALLEMAGNE DAX Index 5187,96 26/9 -0,17 7600,41 2/5 4965,80 12/9 8,00

ROYAUME UNI FTSE 100 index 5022,96 26/9 -0,87 6105,77 21/2 4791,01 9/8 8,00

ETATS-UNIS Dow Jones ind. 10771,48 23/9 0,35 12876,00 2/5 10597,14 22/9 10,40

Nasdaq composite 2483,23 23/9 1,12 2887,75 2/5 2331,65 9/8 14,80

JAPON Nikkei 225 8374,13 26/9 -2,17 10891,60 17/2 8227,63 15/3 12,30

LES BOURSES DANS LE MONDE 26/9, 9h44

Pays Indice Dernier % var. Maxi Mini PER cours 2011 2011

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VALEURS DU CAC40

Cours en euros.◗ : valeur pouvant bénéficier du service de règlement différé (SRD). # : valeur faisant l'objet d'un contrat d'animation.Plus haut et plus bas : depuis le 1/1/2011. n/d : valeur non disponible. A : acompte, S : solde, T : totalité.

ACCOR ......................... ◗ 19,73 19,76 -0,18 -40,77 36,20 19,21 0,62 T FR0000120404AIR LIQUIDE ....................... ◗ 83,34 84,37 -1,22 -11,94 100,65 80,90 2,35 T FR0000120073ALCATEL-LUCENT ........... ◗ 2,18 2,18 -0,05 -0,14 4,47 2,06 0,16 T FR0000130007ALSTOM ............................ ◗ 23,48 23,61 -0,55 -34,43 45,32 22,70 0,62 T FR0010220475ARCELORMITTAL ................ 11,15 11,46 -2,75 -58,64 28,55 10,46 0,16 A LU0323134006AXA .................................... ◗ 8,37 8,30 0,89 -32,74 16,16 7,88 0,69 T FR0000120628BNP PARIBAS ACT.A ........ ◗ 26,08 25,32 3,02 -45,22 59,93 22,72 2,10 T FR0000131104BOUYGUES ....................... ◗ 24,71 24,90 -0,76 -23,39 35,05 20,88 1,60 T FR0000120503CAP GEMINI ...................... ◗ 24,11 24,21 -0,39 -30,96 43,38 22,55 1,00 T FR0000125338CARREFOUR ..................... ◗ 15,38 15,47 -0,65 -42,95 31,98 14,65 1,08 T FR0000120172CREDIT AGRICOLE ............ ◗ 4,55 4,42 2,87 -52,10 12,92 4,01 0,45 T FR0000045072DANONE ............................ ◗ 43,79 43,67 0,27 -6,87 53,16 41,92 1,30 T FR0000120644EADS ................................... ◗ 20,61 20,68 -0,31 18,21 25,39 17,55 0,19 T NL0000235190EDF ...................................... ◗ 19,85 19,89 -0,20 -35,33 32,75 17,89 0,58 S FR0010242511ESSILOR INTL .................... ◗ 52,53 52,93 -0,76 9,04 57,72 46,60 0,83 T FR0000121667FRANCE TELECOM ............ ◗ 11,47 11,50 -0,26 -26,45 16,65 11,12 0,60 A FR0000133308GDF SUEZ ........................... ◗ 20,09 20,18 -0,47 -25,18 30,05 18,32 0,67 S FR0010208488LAFARGE ........................... ◗ 23,43 23,55 -0,49 -50,05 48,76 22,29 1,00 T FR0000120537L’OREAL ............................ ◗ 70,64 71,22 -0,81 -14,97 91,24 68,83 1,80 T FR0000120321LVMH MOET HEN. ............ ◗ 104,10 105,45 -1,28 -15,43 132,65 97,67 1,40 S FR0000121014MICHELIN ........................... ◗ 42,78 43,06 -0,65 -20,34 68,54 41,20 1,78 T FR0000121261PERNOD RICARD ............... ◗ 59,41 60,05 -1,07 -15,56 72,78 56,09 0,67 A FR0000120693PEUGEOT ............................ ◗ 15,99 16,11 -0,71 -43,72 33,60 15,12 1,10 T FR0000121501PPR ..................................... ◗ 105,20 105,75 -0,52 -11,60 132,20 98,30 3,50 T FR0000121485PUBLICIS GROUPE ........... ◗ 30,68 30,80 -0,37 -21,33 41,84 29,10 0,70 T FR0000130577RENAULT ............................ ◗ 24,54 24,65 -0,45 -43,59 50,53 23,04 0,30 T FR0000131906SAFRAN .............................. ◗ 22,58 22,61 -0,13 -14,79 30,50 21,45 0,50 T FR0000073272SAINT-GOBAIN .................. ◗ 27,37 27,37 n/d -28,91 47,64 26,07 1,15 T FR0000125007SANOFI ............................... ◗ 46,73 46,99 -0,55 -2,33 56,82 42,85 2,50 T FR0000120578SCHNEIDER ELECTRIC ..... ◗ 37,16 37,59 -1,14 -33,64 61,83 35,94 3,20 T FR0000121972SOCIETE GENERALE ......... ◗ 16,91 16,64 1,62 -57,94 52,70 14,31 1,75 T FR0000130809STMICROELECTR. ............. ◗ 4,65 4,74 -1,81 -39,86 9,73 3,96 0,09 A NL0000226223SUEZ ENV. .......................... ◗ 10,36 10,38 -0,14 -32,94 15,99 10,02 0,65 T FR0010613471TECHNIP ............................. ◗ 56,68 57,99 -2,26 -17,97 78,14 53,63 1,45 T FR0000131708TOTAL ................................. ◗ 30,58 30,85 -0,88 -22,88 44,55 29,40 0,57 A FR0000120271UNIBAIL-RODAMCO ........ ◗ 126,35 126,90 -0,43 -14,63 162,95 124,05 2,70 D FR0000124711VALLOUREC ....................... ◗ 47,21 47,66 -0,93 -39,94 89,58 46,49 1,30 T FR0000120354VEOLIA ENVIRON. ............. ◗ 10,13 10,15 -0,25 -53,68 24,30 9,38 1,21 T FR0000124141VINCI ................................... ◗ 30,47 30,78 -1,01 -25,10 45,48 29,49 1,15 S FR0000125486VIVENDI .............................. ◗ 14,66 14,76 -0,68 -27,43 22,07 14,10 1,40 T FR0000127771

Lundi 26 septembre 9h30Valeur Dernier Cours % var. % var. Plus Plus Divid. Code cours préc. /préc. 31/12 haut bas net ISIN

Assurances Groupamareporte son entréeen BourseL’introduction en Bourse de l’assu-reur mutualiste Groupama, pré-vue de longue date, a été une nou-velle fois reportée, et est désor-mais attendue « plutôt vers 2015 »,annonce son directeur général,Jean Azéma, dans un entretien auquotidien Les Echos, lundi 26 sep-tembre. Vendredi, l’agence d’éva-luation financière Standard&Poor’s avait abaissé d’un cran lanote de dette à long terme dugroupe, à BBB. L’assureurmutualiste a lancé un plan deréduction des coûts de 300 mil-lions d’euros sur les deux prochai-nes années. – (AFP.)

Axa se séparede son activitéde capital-investissementL’assureur Axa a engagé la ventede sa filiale de capital-investisse-ment, Axa Private Equity, selonune information de la chaîne bri-

tannique Sky News, confirmée,lundi 26 septembre, par une sour-ce proche du dossier. La banqueCrédit suisse aurait été mandatéepour s’occuper de cette vente quiintervient en pleine tempêtefinancière et serait motivée parles nouvelles règles prudentiellesimposées aux assureurs, Solven-cyII. L’action Axa a perdu 33 %depuis le début de l’année.

Internet Groupon revoità la baisseson chiffre d’affairesLe site internet américain Grou-pon, spécialiste des bons de réduc-tion sur les services et commerceslocaux, a annoncé, vendredi23 septembre, qu’il revoyait à labaisse son chiffre d’affaires dansson document d’entrée en Bourse,le situant désormais à 688 mil-

lions de dollars (512 millions d’eu-ros) pour les six premiers mois del’année, au lieu des plus de 1,5 mil-liard qu’il revendiquait en août.Groupon a également annoncé ledépart de sa directrice d’exploita-tion, Margo Georgiadis, cinq moisaprès son embauche. – (AFP.)

TélécommunicationsSamsung a vendu10millions desmartphones Galaxy SIILe groupe sud-coréen SamsungElectronics a annoncé, dimanche25septembre, avoir vendu dix mil-lions de la nouvelle version deson téléphone multifonction,Galaxy SII, depuis qu’il a été lancéen avril. Les ventes de la nouvelleversion de son smartphone vedet-te se sont accélérées depuis juillet,mois qui avait vu le cinq millioniè-me appareil vendu. L’appareils’est vendu à 3,6millions d’exem-plaires en Corée du Sud, 3,4mil-lions en Europe et 2,3millionsdans le reste de l’Asie. – (AFP.)

Marchés

Energie

AvecBerre-l’Etang, unetroisièmeraffineriedevrait fermeren FranceL’américain LyondellBasell devrait annoncer, mardi 27 septembre, la fer-meture de sa raffinerie de Berre-l’Etang (Bouches-du-Rhône), quiemploie 350 salariés. Ce serait la troisième en dix-huit mois, après lessites de Total à Dunkerque (Nord) et du suisse Petroplus à Reichstett (Bas-Rhin) – illustrant le problème des surcapacités dans l’Hexagone et enEurope. Cette unité avait été rachetée à l’anglo-néerlandais Shell en 2008mais n’a jamais été rentable, affirme son propriétaire. Celui-ci n’a pasinvesti pour développer l’outil industriel, rétorque l’intersyndicale (CGT,CFDT, CFE-CGC, FO, CFTC), qui menace d’« une grève de grande ampleur»en cas de fermeture. Cela porterait alors à quatorzele nombre de raffine-ries qui ont dû mettre la clé sous la porte, en France, depuis 1978.p

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Lavie desentreprises

Chaque lundi, retrouvez ce nou-veau rendez-vous, consacré auquotidien concret de l’entreprise :management, ressources humai-nes, gouvernance.

L e 24 août, Steve Jobs annon-çait qu’il démissionnait deson poste de PDG d’Apple. Sa

maladie, révélée en 2004, n’étaitplus un secret pour personne. Peuavant, Maurice, (son prénom a étémodifié), cadre supérieur dans ungrand groupe, apprend qu’il est«atteint d’une grave maladie»,comme on le dit pudiquement.Dire, ou ne pas dire? Il a tranchépar la négative. Ne pas dire pour nepas risquer de freiner sa carrière.

Faut-il donc être Steve pourdire et garder son job ? Un diri-geant trop précieux et irremplaça-ble, mais qui doit informer lasociété, ses actionnaires, sous pei-ne de délit ? A l’instar d’un chefd’Etat, qui se doit d’être transpa-rent quant à sa santé ?

On se souvient aussi d’une pho-tographie de Paul Allen, cofonda-teur de Microsoft avec Bill Gates,dans un grand magazine améri-cain. Il était atteint de la maladiede Hodgkin. La légende de la photol’indiquait clairement. Pas de mys-tère. Respect plutôt. Faut-il êtreAméricain, plutôt que Français,pour que cette attitude soit jugéecourageuse, et non dangereuse ourisquée, pour l’entreprise ?

Dire, conseillent les psys. Pouraugmenter les chances de guéri-son. Pour qu’un coup de fatigue nesoit pas interprété comme uncoup de paresse. Mais que la pré-sence à son poste soit au contraire

valorisée, comme une preuve d’at-tachement. Ne pas dire, répond l’in-téressé, pour ne pas en pâtir profes-sionnellement; pour se préserverun espace où il n’est pas perçu com-me malade, et peut, quelques heu-res par jour, tenter d’oublier.

«Bruits de couloir»Plus du tiers des salariés ayant

repris leur travail après un cancer,interrogés deux ans après le dia-gnostic, estiment avoir été pénali-sés, selon une étude de la Directionde la recherche des études, de l’éva-luation et des statistiques (Drees).Deux tiers ne l’ont donc pas été,diront les optimistes!

«Quand l’arrêt de travail émanede l’Institut Curie, c’est un faux pro-blème de vouloir cacher sa mala-die. Les bruits de couloir vont trèsvite», remarque Solange de Nazel-le, assistante sociale, responsabledu service social de cette institu-tion spécialisée dans le traitementdes cancers. Son conseil : la consul-ter, elle ou ses semblables.

Car tout dépend de la situation,du secteur d’activité, du caractèrecompréhensif du supérieur, maisaussi du comportement de l’inté-ressé avant, quand tout allait bien.Les sérieux, consciencieux, conci-liants, ont peu de souci à se fairequant à leur situation profession-nelle, affirme-t-elle. Et les collè-gues? Ils sont compréhensifs à94%, selon la Drees! A l’entreprise,qui se veut désormais irréprocha-ble au plan social et sociétal, d’enfaire autant ! p

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Budget réduit,audienceen haussepour«Midi enFrance»L’émission quotidienne de France 3 a battuson record avec plus de 8 % de part d’audience

Réseaux & médias

Ma vie en boîte |Chroniquepar Annie Kahn

Dire ou ne pas dire?

Collioure(Pyrénées-Orientales)Envoyé spécial

B udget revu à la baisse,audiences en (légère) haus-se… L’émission quotidienne

itinérante « Midi en France », deFrance 3, a abordé la rentrée sur denouvelles bases, faisant presqueoublier des débuts douloureux.Après«ungalopd’essai»,defévrierà juin, « l’émission s’installe »depuis la rentrée, se félicite PierreSled, le directeur des programmesde France 3.

Au lancement de l’émission, enfévrier,sesdétracteursétaientnom-breux, pointant son coût et desaudiences en berne : il en coûtait110 000 euros par jour à France 3pour une émission qui ne dépas-sait pas 5% de part d’audience.

La société de production R & G,qui réalise l’émission, disposaitalors de 50 000 euros environ. Acharge pour France 3 de fournir lesmoyens techniques.

Cette saison, la durée de « Midien France » a été amputée de moi-tié, et la facture réduite à40 000 euros. Un « budget nor-mal », estime Jean-Pierre Cottet,ancien patron de France 3.

Un léger mieux. Le magazinesemble avoir enfin trouvé sonpublic. En moyenne, la partd’audience dépasse désormais les6%. D’où des «pics ». Comme à Col-lioure (Pyrénées-Orientales), où lacaravane de 80 salariés, anima-teurs et techniciens, avait dresséson chapiteau, lundi 19septembre,pour une semaine.

A cette occasion, «Midi en Fran-

ce» a dépassé 8% de part d’audien-ce. Soit un score pas très éloigné dela moyenne de la chaîne, fixée à9,4% selon Médiamétrie.

« Il y a besoin en France d’uneémission, qui ne soit pas parisianis-te, où l’on voit les visages des Fran-çais», indique M. Cottet. « Midi enFrance» serait le « signal du reposi-tionnement de France 3 sur le ter-rain de la télévision régionale, de laproximité », analyse PhilippeBailly, président du cabinet d’étu-des NPA Conseil.

«Découvrir une région»Pour«colleràl’identitédelachaî-

ne », comme le dit M. Bailly, «Midien France» a choisi d’étoffer la pré-sence de l’animatrice Evelyne Tho-mas. Cette dernière va désormaisco-présenter l’émission avec Lau-rent Boyer.

A l’antenne, le magazine se pré-sentecomme«unesortede“Thalas-sa” de la France éternelle », décrit leréalisateur Stéphane Gateau, le Gde R & G. Il fait « découvrir unerégion» sous tous ses aspects.

Cette approche semble séduireles collectivités locales. Collioure,« a aidé gracieusement l’émissiondans toute sa logistique», expliquele maire socialiste Michel Moly.

Car les villes y trouvent leurcompte. « Quand nous avons pris lamairieen1989nousavonsvoulupri-vilégier l’événement. Chaqueannée, nous avons fait venir les télé-visions», ajoute le maire. Selon lui :«Celaabeaucoupparticipéaudéve-loppement de Collioure. En 1989, iln’y avait que 70 commerces aujour-d’hui 250.» p

Guy Dutheil

économie

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0123LA BOUTIQUE

Du lundi au vendredi9 h 30 à 18 h

Samedi 10 h à 14 h

A près plus de deux ans d’ab-sence, pour cause de faillite,le lanceur russe Sea Launch

areprisson activité.Samedi 24sep-tembre, une fusée Zenit, tiréed’une plate-forme dans le Pacifi-que, a mis en orbite Atlantic Bird 7,un satellite de télécommunica-tions du français Eutelsat.

Ce succès signe le retour d’untroisième acteur sur le marché deslanceurs de satellites commer-ciaux de télécommunications de4 à 6 tonnes. Ce marché, d’unevingtaine de gros satellites par an,estdominéparl’européen Arianes-pace devant le russo-américain ILSavec sa fusée Proton.

Ce retour réussi était souhaitépar les opérateurs de télécommu-nication désireux d’avoir une lar-ge palette d’offres pour répondre àuneactivité croissante.Elle est por-téeparle développement dela télé-vision numérique, par Internet, et,surtout, par la demande des paysémergents.

Pour l’heure, si deux lanceurssuffisent à répondre aux besoins,le moindre décalage de tirs de l’unou de l’autre a des répercussionssur les opérateurs de satellites

entraînant des retards dans leursprogrammes.

Un troisième concurrent per-met d’assouplir les contraintes,voire de mieux négocier les prix.C’est justement une guerre destarifs qui avait conduit SeaLaunch, en juin 2009, à se mettresous le régime du chapitre 11 de laloi américaine sur les faillites.

A l’époque, le groupe, créé en1995 par l’américainBoeing, lenor-végienKvaerner, l’ukrainienYuzh-noye et le russe Energia, spécialisédans le spatial, avait été mis à malpar cette course aux prix qu’ilavaitlancée, mais aussi parl’explo-sion, en 2007, de l’une de sesfusées sur son pas de tir.

Sorti de la faillite, Sea Launch,contrôlédésormaisparleseulgrou-pe russe Energia, doit, selon lesexperts, encore faire ses preuvesavantde relancer une offensive surles prix. En son absence, depuisdeux ans, le coût des lancementss’est stabilisé autour de 60 à100millionsdedollarsdanslagam-me des satellites de 3 à 6 tonnes.

Renforcé par sa position de lea-der, Arianespace s’est toujoursrefusé à jouer sur les tarifs, quitte à

être parfois plus cher. Son PDGJean-Yves Le Gall estime que la fia-bilité a un prix. Avec le lancementréussi d’Ariane 5, mercredi 21 sep-tembre, le lanceur européen a ins-crit son quarante-sixième succèsd’affilée en huit ans.

Fusée chinoiseLe montant des primes d’assu-

rancesest un bonindicateur de cet-te fiabilité. Alors que le coût d’uneassurance représente 5 % à 6 % dela valeur du satellite à lancer, elleoscilleentre4,5%et 5,5%pour Aria-nespace, 5,5 % à 6,5 % pour Protonet 7 % pour Sea Launch.

Le retour d’un lanceur russeintervient alors que d’autresacteurs s’intéressent à ce marché.A commencer par les Chinois qui,avec leur fusée Long March, vontlancer, début octobre, le satelliteW3C à la demande d’Eutelsat.

Ce sera la première fois, depuistreize ans, que Pékin mettra enorbite un satellite de communica-tion occidental. Depuis 1998, laréglementation américaine, diteInternationalTraffic in ArmsRegu-lations(ITAR), quirestreintl’expor-tation et la vente de matériels et de

composants sensibles fabriquésaux Etats-Unis à certains pays, aété étendue aux satellites de com-munications. Elle empêche toutlancement à partir du sol chinois.

W3C échappe à cette restriction,car il s’agit un satellite dit « ITARfree », sans composants sensiblesaméricains, fabriqué par ThalesAlenia Space. Si le choix d’Eutelsata été fait en fonction des perfor-mances techniques et du calen-drier de lancement, le prix a étéaussi prépondérant. Il est infé-rieur de 40 % à un lancementd’Arianeet de 20 % àcelui d’un Pro-ton ou d’un Sea Launch.

L’arrivéedesChinoiss’accompa-gneduretouraméricainsur lemar-ché commercial, avec la sociétéSpaceX et sa fusée Falcon. Pourl’heure, cette jeune firme, soute-nue par la NASA, qui lui a passé descontrats, vise le lancement depetits satellites. Les deux autreslanceurs, Delta et Atlas, avaientquitté le marché commercial voiciune dizaine d’années pour seconsacreraux lancements de satel-lites gouvernementaux et militai-res, plus lucratifs.p

Dominique Gallois

Leretour deSea Launchva accroître laconcurrencedans les lanceursde satellitesSorti de la faillite et désormais 100% russe, l’opérateur a mis en orbite un satellite Eutelsat

20 0123Mardi 27 septembre 2011

décryptages ANALYSES

N icolas Sarkozy aime lessapeurs-pompiers. Il admi-re le courage de ces «héros

du quotidien». Il le leur a déclaré,chaleureusement, samedi 24sep-tembre, lors du congrès de la Fédé-ration nationale des soldats dufeu. Et, pour preuve de sa recon-naissance et de celle de la nation, illeur a annoncé la mise en placed’un nouveau système d’alerte,moderne et performant, en cas desinistre climatique.

Le président de la Républiqueparle en connaisseur: en matièrede dépressions climatiques, lemoins qu’on puisse dire est qu’ilest servi. Et qu’il ne manqued’aucun système d’alerte: toussemblent même se déclenchersimultanément et ils témoignentd’une défiance tous azimuts, cha-que semaine plus menaçante, àsept mois de l’électionprésidentielle.

Le dernier coup de torchon estvenu du Palais du Luxembourg. Etquel coup de torchon! Depuis plusd’un demi-siècle, le Sénat parais-sait immuablement, indéracina-blement ancré à droite. Cela n’in-terdisait pas les turbulences ou lesmouvements de grogne, comme legénéral de Gaulle en fit les frais en

1969. Mais le mode d’élection dessénateurs semblait avantager tropnettement la France «profonde»des villages et des petits bourgs, laFrance rurale, conservatrice oumodérée, pour que la gauche puis-se espérer y emporter la majorité.

C’est pourtant ce qui s’est pro-duit, dimanche 25 septembre. Sanspréjuger de l’élection à venir duprésident du Sénat et des manœu-vres à laquelle elle va donner lieu –tant Gérard Larcher semble dési-reux de conserver à tout prix sonfauteuil –, le résultat politique estlà: pour la première fois sous laVe République, la gauche est majori-taire dans la deuxième Chambredu Parlement.

Ce succès constitue un doubleéchec pour le chef de l’Etat. Long-temps, celui-ci est apparu, dansson camp et au-delà, comme unmagicien électoral. La conquête, en1983, de la mairie de Neuilly-sur-Seine au nez et à la barbe de Char-les Pasqua l’avait d’emblée installédans ce rôle flatteur. Sa campagnevictorieuse de 2007 l’a brillam-ment confirmé.

Mais il a, depuis, complètementperdu la main, incapable d’éviter àson camp défaite sur défaite. En2008, les élections municipales et

cantonales sont marquées par unenette victoire de la gauche. Auxeuropéennes de 2009, le scoremédiocre de la majorité présiden-tielle (27,9% des voix) est opportu-nément masqué par celui, désas-treux, des socialistes. En 2010, c’estla déroute aux régionales, où lagauche ne laisse échapper que l’Al-sace. En 2011, la droite perd à nou-veau du terrain aux cantonales etne dirige plus que 40 départe-ments sur 100.

Les élections sénatoriales sol-dent, aujourd’hui, cette successionde revers. Mais le président de laRépublique paye également le prixde sa politique. Nul doute, en effet,que la réforme des collectivités ter-ritoriales, de leur organisation etde leurs finances, a laissé des tra-ces, tant elle a été imposée auxsénateurs alors que bon nombred’entre eux, y compris dans lamajorité, y étaient pour le moinsréticents. En 2010, le gouverne-ment leur avait tordu le bras pourfaire voter son texte; ils ne l’ontpas oublié et leurs «grands élec-teurs» non plus.

Malheureusement pour la majo-rité, rien ne vient alléger le climatdépressif dans lequel est plongé lepays. Tout y contribue. Car, au-delàdu savoir-faire électoral éventé, cesont les «fondamentaux» dusarkozysme qui sont en cause et

les ressorts de son succès de 2007qui sont cassés.

En arrivant à l’Elysée, le chef del’Etat avait l’ambition de créer un«choc de confiance». C’est aujour-d’hui une défiance de plomb qu’ex-priment les Français. Rendue publi-que le 23 septembre, la dernièreenquête de l’Insee sur le moral desménages est sans ambiguïté. Sonindicateur synthétique plonge de5points par rapport à juillet, il sesitue à son niveau le plus faibledepuis février2009 et à sonniveau le plus bas depuis une quin-zaine d’années, si l’on excepte lapériode de l’automne 2008, auplus fort du déclenchement de lacrise. Situation financière, niveaude vie, chômage, rien n’échappe àce pessimisme.

Les chefs d’entreprise n’y échap-pent pas davantage : l’autre indica-teur de l’Insee, sur le climat desaffaires en France, est tout aussidécourageant. Les perspectives decroissance pour les prochainsmois, constamment revues à labaisse, n’ont guère de chance d’in-verser la tendance.

La crise économique et financiè-re depuis trois ans, celle des dettespubliques et de l’euro qui la prolon-ge et l’amplifie aujourd’hui ontradicalement changé la donne,plaident le président et ses parti-sans. Evidemment. Mais personne

n’a oublié que Nicolas Sarkozyavait su convaincre les Françaisqu’il aurait, lui, la volonté et l’éner-gie de bousculer des montagnes.Personne n’a davantage oubliéque, à l’automne 2008, il avait sufédérer les énergies transatlanti-ques pour éviter que la faillite deLehman Brothers ne provoque uneffondrement de l’économie mon-diale.

Depuis dix-huit mois, en revan-che, la crise grecque a été le révéla-teur de plus en plus cruel de laparalysie européenne en général,et française en particulier. La réu-nion des ministres des finances duG20 à Washington vient d’en faireà nouveau la démonstration. Faute

de sa ratification par tous les Etatsde la zone euro, le second plan desauvetage de la Grèce, adopté dansson principe il y a deux mois, nesera pas opérationnel avant lami-octobre, au mieux. Et tout lais-se penser que les marchés lejugent déjà caduc. Le chef de l’Etatse présente volontiers comme lemieux armé pour affronter les

tempêtes. Pour l’heure, il apparaîtsurtout comme tétanisé et impuis-sant face à la crise.

Enfin, il y avait cette promessed’une «République irréprochable».Mois après mois, jour après jour,cette pauvre République apparaîtau contraire l’otage des copains etdes coquins, engluée dans de détes-tables affaires où l’argent gangrè-ne le pouvoir, dans l’opacité et l’im-punité. Hier, c’était – et c’est enco-re – l’affaire Bettencourt. Désor-mais, ce sont des proches du prési-dent, et jusqu’à Brice Hortefeux,directeur présumé de sa campa-gne de 2012, qui sont ou vont êtreentendus par la justice, soupçon-nés d’avoir contourné sans scrupu-

les les lois sur le financement descampagnes électorales, et déjà misen examen pour certains.

Dans ce climat délétère, dedébandade et de fin de règne, lefutur système d’alerte des sapeurs-pompiers de France et de Navarreparaît bien dérisoire. p

[email protected]

L a République française est-elle prête à accepter une fem-me à l’Elysée ? La réponse en

apparence évidente – oui – ne l’estpeut-être pas autant que cela, tantl’inclusion des femmes dans laVe République a été un long et labo-rieux processus. « La Ve ou la Répu-blique unisexe », écrit MarietteSineau, directrice de recherche auCNRS, jugeant qu’après le droit devote et d’éligibilité enfin« octroyé» aux Françaises en 1944,l’avènement de la Ve République,en 1958, a marqué « la fin des gran-desespérances».Sondernierouvra-ge, Femmes et pouvoir sous laVe République, retrace les stationsde ce chemin de croix qu’auront euà gravir les femmes en politique.

Mariette Sineau met singulière-ment à mal l’image véhiculée parces thuriféraires d’un général deGaulle précurseur en la matière.« Plus que d’autres dirigeants fran-çais, il a donné une image mâle delapolitique,écrit-elle. DeGaulleper-cevait les femmes comme un agentdéstabilisateur du corps politique,(…) une source de complications. »Sous les républiques gaullienne etpompidolienne, les femmes enpolitique sont des exceptions.Alors que la société est en train dechanger en profondeur, le sérailpolitique reste quasi exclusive-ment masculin. Entre 1958 et 1973,le pourcentage de femmes élues àl’Assemblée nationale reste infé-rieur à 2%.

Après cette période initiale de«glaciation » vient le « dégel » gis-cardien. Pour la première fois, en1974, une femme, Arlette Laguiller(Lutte ouvrière), est candidate àl’élection présidentielle. « Eh bien,oui, je suis une femme et j’ose meprésenter comme candidate à laprésidence de cette Républiqued’hommes », lance-t-elle crâne-ment lors de sa première interven-tion télévisée. Elu, Valéry Giscardd’Estaing tente de se dégager des

archaïsmes gaullistes et de donnerune image « modernisée » de lapolitique. La féminisation de la viepolitique y participe. Indéniabledans la sphère gouvernementale,elle reste enrevanche peu évidentedans les assemblées : les femmesreprésentent 3,7 % de l’Assembléenationale élue en 1978 et 1,7 % duSénat en 1977. Simone Veil reste lafigure emblématique de cettepériode.

Thème majeurDans ses discours, François Mit-

terrand apparaît comme un deceuxquiontlemieuxcomprisl’im-portance du féminisme. « C’estpourtant sur le terrain de l’égalitépolitique entre les sexes que va semanifester l’antinomie la plus viveentre principes socialistes énoncéset pratiques avérées », note Mariet-te Sineau. De même qu’il s’est cou-lésansdifficultésdanslemouleins-titutionnel de la Ve République,François Mitterrand en accepte lesbarrières que celle-ci met en tra-vers de l’accès des femmes à lareprésentationpolitique.« Visiteurintéressé du féminisme », FrançoisMitterrand n’aura été l’artisan, entant que chef de l’Etat, d’aucuneréforme précipitant la féminisa-tion de la politique.

C’est ce monopole maintenuquelles que soient les majoritéspolitiques qui va faire germer leprojet paritaire pour l’accès auxfonctions électives. A partir de1995, la question de la place desfemmes dans la vie politiquedevient un thème majeur. « Jac-ques Chirac n’avait vocation, ni parles valeurs auxquelles il adhère, nipartempéramentpersonnel,àdeve-nirleaderenmatièred’égalitépoliti-que, constate l’auteur. Paradoxale-ment, c’est pourtant sous son sep-tennat que vont se produire lesavancéeslesplusradicalesenmatiè-re de représentation des femmes »,sous l’impulsion, notamment, dugouvernement de Lionel Jospin.

Dixans après l’« invention » de laparité, cette dernière est loind’avoir irrigué toutes les strates dela vie politique. Les institutions dela Ve font de la résistance. p

Patrick Roger

Au-delàdusavoir-faire électoral éventé,cesont les«fondamentaux » dusarkozysme

quisonten cause etles ressortsdesonsuccès de 2007 quisontcassés

France | Chroniquepar Gérard Courtois

Comme un climatde fin de règne

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Femmesen politique

210123Mardi 27 septembre 2011

Rémi LefebvreChercheur au Céraps

Professeur de science politique à l’université Lille-IIet chercheur au Centre d’études et de recherchesadministratives, politiques et sociales (Céraps). Sarecherche actuelle porte sur le militantisme au Partisocialiste et le processus de « démocratisationpartisane». Il est l’auteur, avec Frédéric Sawicki, de«La Société des socialistes » (Editions du Croquant,2006) et vient de publier « Les Primaires socialistes »(Editions Raisons d’agir, 172pages, 8 euros). (PHOTO DR)

Ce ne sont pas les sondagesmais bien les sympathisantsde gauche qui trancheront laprimaire au terme d’uneconfrontation oùchaque can-didat cherche à faire enten-

dre sa différence. Le vote déjouera peut-être les pronostics, la campagne, dominéepar les sondages, s’apparente à une cour-se de chevaux et fait prévaloir le jeu surles enjeux politiques. Loin de mettre encause les logiques d’opinion, la primaireconsacre la personnalisation et le poidsdes sondages dans la vie politique.

Jusqu’en 2006, les ressources partisa-nes ont joué un rôle déterminant dans leprocessus de désignation du candidatsocialiste. La maîtrise du parti et les logi-ques d’appareil structurent alors forte-ment la sélection présidentielle. En 1981,François Mitterrand est investi candidatalors que les sondages placent son rivalMichel Rocard en meilleure position faceà Valéry Giscard d’Estaing.

Dans un parti où la légitimité militantea été réaffirmée depuis 1971, la représenta-tion alors dominante est que la mobilisa-tion électorale peut défaire les prévisionsdes enquêtes d’opinion.

En 1995, la difficile succession de Fran-çois Mitterrand et le vide laissé par la non-candidature de Jacques Delors, pourtantadoubé par les sondages, conduisent à lapremière primaire fermée (réservée auxadhérents), qui oppose Henri Emmanuel-li, premier secrétaire, à Lionel Jospin. Cedernier l’emporte en s’appuyant notam-ment sur la meilleure présidentiabilitéque lui confèrent les sondages. Mais« l’opinion » n’a pas imposé son candidataux socialistes.

L’élection présidentielle de 2007 mar-que un glissement net vers l’affirmationdes logiques d’opinion. Consacrée com-me la seule capable de battre NicolasSarkozy, Ségolène Royal s’impose dansl’opinion avant d’être investie par lesadhérents qui avalisent le verdict des son-dages. La campagne, fût-elle interne, avocation à séduire les électeurs dans leurensemble, puisqu’ils pèsent indirecte-ment, à travers les sondages, sur le proces-sus de désignation.

La primaire socialiste conduit ainsi àun résultat paradoxal : la candidate inves-tie par les militants en 2006 a construit salégitimité en partie contre ou à l’extérieurde l’organisation. Certains des dirigeantset des militants ont alors l’impressiond’avoir été dépossédés de leur choix,d’autant que la base militante a étéconjoncturellement élargie à travers lavague d’adhésions des militants dits « à20 euros ».

Le Parti socialiste s’émancipe ainsisignificativement de sa tradition histori-que, qui l’avait conduit à écarter MichelRocard à la fin des années 1970 : les mili-tants choisissent la porte-parole qui opti-mise le mieux leurs chances collectivesde victoire et non celle qui incarne leurpréférence programmatique ou idéologi-que.

L’opinion a « naturalisé » la légitimitéde la candidate. Mais l’investiture deSégolène Royal n’est pas seulement leproduit d’une bulle médiatico-sonda-gière. Les socialistes sont d’autant plusréceptifs aux verdicts des sondagesqu’ils sont repliés sur leurs luttes person-nelles, qu’ils ont perdu une large part deleur autonomie à l’égard du jeu médiati-que et que leur ancrage dans la sociétés’est affaibli.

C’est précisément parce que le PS estdésormais principalement une entrepri-se de conquête de mandats électifs, prêteà tous les ajustements tactiques, qu’unnombre croissant de ses élus et de sesmembres sont si attentifs aux verdicts àcourt terme des sondages d’opinion etfont passer au second plan les positionspolitiques prises par les candidats en pré-sence. La personnalisation des enjeuxinternes est le produit de la déshérenceidéologique du parti.

L’adoption du principe des primairesouvertes en 2009 scelle-t-elle l’accepta-tion de la démocratie sondagière ou tra-duit-elle une volonté d’en limiter l’empri-se, le vote permettant aux sympathisantsde se réapproprier la désignation du can-

didat ? S’agit-il avec cette nouvelle règledu jeu d’opposer la logique électorale àcelle des sondages ? On peut en douter.Des objectifs contradictoires ont présidéau choix des primaires, qui sont à la fois leproduit de phénomènes structurels (lemanque d’ancrage social du parti, l’étroi-tesse de sa base militante) et d’uneconjoncture critique (celui du calamiteuxcongrès de Reims) instrumentalisée parune coalition de réformateurs (TerraNova, Arnaud Montebourg).

Mais la sensibilité croissante des socia-listes aux enquêtes d’opinion et la perted’autonomie du parti à l’égard des logi-ques médiatiques ont aussi fortementcontribué à légitimer cette nouvelle pro-cédure. En adoptant les primaires, lessocialistes ont cédé aux injonctionsmédiatiques à la transparence et à l’ouver-ture. Journalistes et sondeurs sont globa-

lement favorables à une procédure quipersonnalise et dramatise la compétitionpolitique.

Les logiques d’opinion pesaient certesdéjà sur la désignation du candidat lors-que les primaires étaient fermées mais,en ouvrant le processus de sélection prési-dentielle, les socialistes tendent à les ren-forcer. Laurent Fabius écrit dans Le Mon-du 26 août 2009 : « Désormais, c’est l’opi-nion qui fait le parti. »

La vie politique est devenue un feuille-ton médiatique, arbitré par les sondages,où priment dans le commentaire journa-listique les ambitions présidentielles, lespetites phrases et la déconstruction desstratégies de communication. Dans le dis-cours médiatique, le jeu, entendu commela dimension concurrentielle de la compé-tition entre personnalités, tend à préva-loir sur les enjeux, c’est-à-dire la confron-

tation de visions du monde, d’idées, deprogrammes.

Cette tendance contribue à la fermetu-re du champ politique sur lui-même et à ladéréalisation des questions politiquesaux yeux des citoyens les moins politisés.En renforçant la personnalisation et l’indi-vidualisation de l’offre électorale, les pri-mairesne peuventqu’accentuer cette stra-tégisation du jeu politique. Elles introdui-sent une nouvelle séquence dans untemps présidentiel allongé et dilatent l’in-trigue sondagière.

Les primaires confortent une concep-tion de la politique entendue comme« course de chevaux » (les sociologuesanglo-saxons des médias parlent de « hor-se race journalism »). La campagne est ain-si depuis des mois principalement abor-dée sous l’angle des « favoris », des vain-queurs potentiels, du candidat « le mieuxplacé ». L’attention médiatique est large-ment focalisée sur le scoring des candi-dats dans les sondages, omniprésentsalors même que leurs limites méthodolo-giques sont flagrantes.

Trente-cinq sondages ont été spécifi-quement consacrés aux primaires entrele 31 mars 2009 et le 22 septembre 2011(chiffres de l’Observatoire des sondages).Avec les primaires, la question de l’élec-tion tend ainsi un peu plus encore à n’êtreabordée que sous l’angle du vainqueurpotentiel et des vaincus et de leurs perfor-mances respectives dans les enquêtesd’opinion. Le choix des dirigeants socialis-tes de ne pas multiplier les débats contra-dictoires entre les candidats, voire de lesescamoter, renforce ce phénomène.

Les primaires contraignent les acteurspolitiques à se situer de plus en plus parrapport à « l’opinion publique ». L’ouver-ture du mode de désignation renforce lalégitimité des stratégies d’appel à l’opi-nion et d’influence sur ceux qui contri-buent à la modeler et à la fabriquer (jour-nalistes, commentateurs, instituts desondages…).

Parce que, à travers les sondages, jour-nalistes et acteurs politiques revendi-quent un pouvoir prophétique sur l’issuede la compétition électorale, celui que lesenquêtes d’opinion créditent des meilleu-res chances de l’emporter jouit d’une for-te légitimité. Dominique Strauss-Kahn alargement profité de ce phénomène jus-qu’en mai. Sur la foi des sondages, l’hypo-thétique candidature du directeur duFonds monétaire international s’étaitalors imposée dans l’espace médiatique,produite par la presse et confortée par lescommentateurs politiques de manièrecirculaire.

La promotion de sa candidature à l’in-térieur du parti, fondée sur sa capacité àremporter l’élection, authentifiée par lessondages, cherchait à produire un effetdissuasif sur les autres candidats. Le «pac-te » passé avec Martine Aubry était fondésur l’idée que le candidat le « mieux pla-cé », implicitement dans les sondages,devait se présenter. Les primaires devai-ent alors ratifier leur verdict.

Le même phénomène bénéficieaujourd’hui, dans une moindre mesure,à François Hollande. La logique média-tico-sondagière conforte un nouveau« meilleur » candidat. C’est sur la base dessondages que François Hollande estconsacré comme le favori des primaires.Les commentaires incessants sur la« course en tête » du candidat contri-buent d’autant plus à le légitimer que lagauche a perdu les trois dernières élec-tions présidentielles et qu’une nouvelledéfaite apparaît « impossible ».

Les enquêtes d’opinion ont des effetsdémobilisateurs sur les soutiens de Marti-ne Aubry (les élus locaux notamment),qui peuvent anticiper, sur la base desenquêtes d’opinion, une défaite de leurcandidate et sont incités à ne pas êtretrop identifiés à elle.

Se mettre dans le sillage de celui donton prévoit la victoire, sur la base des son-dages, devient une stratégie naturelledans un parti professionnalisé où lesenjeux de pouvoir ont acquis une dimen-sion centrale. Si l’on peut douter de leurqualité et s’ils sont rituellement présen-tés comme non prédictifs du résultatfinal (la « photographie » à l’instant « T »),les sondages produisent ainsi des effetsqui sont bien réels sur le jeu politique etmédiatique.

Les sondages feront-ils in fine la pri-maire ? Dans quelle mesure les enquêtesd’opinion et la « présidentiabilité » diffé-rentielle des candidats pèseront-elles surle choix effectif des sympathisants ? Leseffets des sondages sont plus nets sur lejeu politique que sur les votants. La victoi-re « inattendue » d’Eva Joly lors de la pri-maire écologiste face à Nicolas Hulot,pourtant favori des sondages, invite à laprudence.

Toutefois, le corps électoral mobilisé,proche des cercles militants, était alorsrestreint et sans doute peu sensible auxenquêtes d’opinion. Les prochainsdébats entre les six candidats peuventêtre l’occasion de défaire les pronosticsdes sondages. On peut néanmoins pen-ser qu’ils exerceront des effets autoréali-sateurs sur une partie des électeurs de laprimaire, tentés de se porter sur le« meilleur » candidat. La tentation est for-te de « sécuriser » la victoire sur la basedes informations produites par les sonda-ges, fussent-elles de piètre qualité. p

décryptages LE GRAND DÉBAT

LA PRIMAIRE est un événement sans pré-cédent qui pose de redoutables problè-mes aux instituts de sondages.Deux types de sondages sont réalisés etinvoqués dans les commentaires. Lespremiers tentent de sonder le corps élec-toral de la primaire dont on ne sait rienou pas grand-chose (les prévisionsoscillent entre 500 000 et 5 millions departicipants).

Leur fiabilité est très faible comptetenu des incertitudes sur l’ampleur de laparticipation, un des enjeux politiquesles plus saillants de la consultation, etde la méconnaissance des caractéristi-ques sociologiques ou territoriales desvotants. Il est donc impossible deconstruire des échantillons représenta-tifs (de quoi ?).

Faute de précédent, aucun « redresse-

ment » sérieux n’est possible. Ces diffi-cultés n’empêchent pas la plupart desinstituts de produire des enquêtes enmultipliant les types de groupes sondés(participants « sûrs » à la primaire, sym-pathisants de gauche ou socialistes…).

Les échantillons bricolés sont sou-vent de taille insignifiante : OpinionWay a publié le 1er septembre une enquê-te reposant sur une population étri-quée de 222 électeurs potentiels (voir lesanalyses fouillées de l’Observatoire dessondages).

Prudence voire abstinenceLe deuxième type de sondage propo-

se plus classiquement des intentions devote à l’élection présidentielle construi-tes à partir de scénarios de premier et desecond tours avec les différents candi-

dats des primaires. Depuis juin, toutesles enquêtes donnent Martine Aubry etFrançois Hollande vainqueurs ausecond tour avec de meilleurs scorespour le second.

Ces limites méthodologiques ont étémaintes fois relevées par les candidats,les journalistes ou les sondeurs eux-mêmes. Ségolène Royal, consacrée parles sondages en 2006, les dénonceaujourd’hui. Elle a saisi la Haute Autori-té de la primaire qui a conseillé aux can-didats de saisir « aussi souvent que néces-saire » la Commission des sondages.

La prudence, voire l’abstinence,devrait être de mise. Mais l’addictiondes commentateurs politiques aux son-dages et la peur du vide (une campagneprivée d’« opinion ») rendent irrépressi-ble l’usage des sondages. p

Lapersonnalisationdesenjeux internes

estle produitdela déshérence

idéologiquedu parti

Laprimaire: une premièrepour les sondeurs

Onaurait pu penser que les primairesauraient eupour effetde limiterl’influencedes sondagessur le processusélectoral. Maisil n’en est rien!

Versune démocratie sondagière

22 0123Mardi 27 septembre 2011

décryptages DÉBATS

Je me bats, depuis que j’ai pris mesfonctionsde commissaire européenàl’agriculture, pour défendre et péren-niser le programme d’aide alimen-taire pour les personnes les plusdémunies (PEAD). Et je vais continuer

de le faire avec détermination, avec tousceux qui, comme moi, pensent que l’Euro-penepeutpasfairedéfautauxbanques ali-mentaires, alors que la crise économiquefragilise de nombreux foyers européens.

Depuis vingt-cinq ans, ce programmede distribution imaginé par Coluche amontréson efficacité.Cette idéed’unhom-me incarne brillamment l’esprit de solida-rité qui anime le projet européen dans sonensemble. Nous voulons plus de signes decette Europe solidaire, de cette Europeunie, de cette Europe déterminée à releverlesdéfisdeladurabilitééconomique,écolo-gique et sociale. Nous n’en voulons pasmoins.

Je suis bien placé pour savoir qu’aucunargument technique ou juridique quivaille ne justifie le blocage des plans PEAD2012 et 2013. Ce qui fait défaut aujourd’huichez quelques Etats membres, c’est sur-tout la volonté politique de partager, auniveau européen, un tel projet aux retom-bées sociales positives considérables.

Le fait que les Etats membres aient leurspropres politiques sociales ne justifie pas,àmon avis, l’ambition de certains de rédui-re à néant un programme européen qui afait ses preuves.

Dès septembre2010, après avoir écoutéles Etats membres et le Parlement euro-péen,j’aiproposéunebasejuridiquetransi-toire, mais solide.

Cette proposition permet de préserverl’aide alimentaire pendant deux ans, letemps de redonner un cadre légal plusdurable auprogramme de distribution. J’aifait cette proposition avant même la déci-sion finale du tribunal qui, en avril, a jugéillégales les dispositions du plan 2009.

Bien sûr, les stocks d’intervention liés àla politique agricole commune (PAC) ont

presque disparu. Mais, à l’inverse, lesbesoins des banques alimentaires n’ontcessé de grossir. Aujourd’hui, ce sont plusde 18 millions de personnes, dans vingtEtats membresde l’Union européenne, quibénéficient de l’aide distribuée par le biaisdu PEAD.

Il est temps pour les Etats membres demettre fin à une situation de blocage quin’a que trop duré. Il est temps d’arrêter dejouer avec la peur, pour des millions defoyerseuropéens,denepasavoir accèsàdela nourriture en quantité suffisante com-me ils le font habituellement grâce au tra-vail des banques alimentaires.

Il est temps également de prendreconscience que Bruxelles, sur qui il est debon ton de « taper», fait parfois des chosesqui ne sont pas si mal et qu’il convient deles défendre.

Aucœurdelapolitiqueagricolecommu-ne, qui va fêter dans quelques mois ses50 ans, est inscrit un idéal : celui d’assurerl’approvisionnement des marchés en ali-mentssains, dequalité etenquantité suffi-sante.

Le programme d’aide alimentaire pourles personnes les plus démunies est unefacette de cet idéal.

Nousdevonsfairelesréformesnécessai-res pour que cette ambition reste au cœurdu projet européen. Nous devons être fiersde ces réalisations. Il appartient à chacund’entre nous de veiller à ce qu’elles restentdes éléments forts de la construction euro-péenne.p

Jean-MichelDelacomptée

Ecrivain et essayiste

De plus en plus de voix sem-blent s’élever pour dire quelaseule solutionpour sortirde la crise des dettes publi-ques dans la zone euro estd’accepter de «prendre ses

pertes », ce qui signifie un défaut impor-tant sur la dette grecque (50 % au moins) àla charge des banques, des investisseursinstitutionnels(sociétésd’assurances,cais-sesderetraite…),etdesEtats,cequipermet-trait d’assainir la situation financière de laGrèce, comme de la zone euro.

Cela serait juste si la Grèce était un petitcas isolé, mais trois facteurs remettent encause ce postulat : la Grèce n’est pas isoléedans la zone euro, d’autres pays sont nonsolvables en l’absence de réformes impor-tantes, notamment l’Italie, et surtout ledéfaut d’un pays rend crédible le défautpotentiel de tous les pays ayant besoin deréformes pour assurer la solvabilité deleurs finances. Ce n’est pas une coïnciden-

ce si les taux que paient l’Italie et l’Espagnepour s’endetter ont augmenté peu aprèsque la zone euro a orchestré un mini-défaut grec.

Nous pensons que si la Grèce était unpays isolé, la solution consistant à faire undéfaut et une forte dévaluation du taux dechangeserait la meilleure:elle permettraità la Grèce d’alléger le poids de sa dettepublique et d’espérer reconstituer unecapacité à exporter et à créer des emplois àmoyen terme, après une période transitoi-re très difficile.

Mais la Grèce faisant partie de la zoneeuro,lasituationesttrèsdifférente:en l’ab-sence de mécanisme de résolution de criseorganisé, les investisseurs craignent que letraitement de la Grèce serve de précédentpour tous les pays en situation difficile.Ainsi,undéfautmassifdelaGrèce,avecsor-tie ou non de la zone euro, conduirait à uneaggravation rapide de la crise dansd’autres pays fragiles, et ce jusqu’à l’Italie,ébranlant l’euro dans ses fondations, avecun risque d’explosion de la zone. Le choixauquel sont confrontés les gouverne-ments est donc binaire: sauver la Grèce oucourir le risque de perdre l’euro.

La situation de la Grèce est terrible : enun an, le PIB a reculé de 6 %, l’emploi de5 %, le pouvoir d’achat de 15 %. La baissedessalaires n’a pas suffi àredresser le com-merce extérieur, les exportations conti-nuent de reculer. Au total, le déficit exté-rieur représente toujours 12 % du PIB.Danscette configuration, il semble impos-sible de réduire le déficit public. Malgré

des mesures de rigueur supplémentaires,il serait encore de 10 % du PIB cette annéealors que l’objectif était de le ramener à7,5%. La Grèce est entrée dans une spiraledépressive dont elle aura du mal à sortirsans aide extérieure.

Si la Grèce était un pays isolé, il y auraitun large consensus sur les mesures à pren-dre : défaut très important (50 % ou plus)sur la dette publique, dévaluation massi-ve. Cette politique aurait des effets trèsdurs à court terme. Mais l’expérience del’Espagne et l’Italie, sorties du systèmemonétaire européen en 1992, montre queles fortes dévaluations (30% à 40 %) génè-rent à moyen terme une croissance rapidetirée par les exportations et les investisse-ments étrangers. Progressivement, le défi-cit extérieur est éliminé.

L’appartenance de la Grèce à l’unionmonétaire change la donne. Les investis-seurs ont tendance à considérer que laméthode appliquée à un pays de la zoneeurosertdecadre, demodèlepour letraite-ment des autres pays. Si la Grèce faisaitdéfaut, ils anticiperaient donc un défautdes autres pays en situation difficile.

Le Portugal, puis peut-être l’Espagne et,plus grave, l’Italie seraient secoués. Onchange alors de dimension : la dette de laGrèceest de450milliards d’euros,mais cel-ledel’Italiede prèsde2 000milliards d’eu-ros. Aucun fonds, aucun montage finan-cier ne peut assurer le sauvetage de l’Italie.Et l’Italie représente un risque systémiquemassif pour le système financier euro-péen et mondial.

En outre, un défaut ouvrirait la porte àdes anticipations de sortie de la zone euro.Comme le défaut sur la dette publique nerésoudrait pas l’énorme déficit extérieurde la Grèce (12 % du PIB environ), la Grècedevrait quand même continuer à s’endet-ter auprès du reste de l’Europe, et le tauxd’endettement public remonterait. Pourenrayer cette spirale, la Grèce serait ame-née à considérer la négociation d’une sor-tie de la zone euro. Ces anticipationsseraient alors appliquées au cas de l’Espa-gne par exemple.

Le risque de défaut et l’onde de choc quecela peut entraîner chez les investisseursavec un effet domino d’une ampleur sansprécédent ne peut être négligé: on ne peutcourirlerisque,dansunmarchéaussifragi-le, de déclencher une telle onde. Déjà l’Ita-lie connaît des difficultés croissantes àlever de l’argent sur les marchés.

Si l’on ne peut envisager un défaut, ilfautdoncenvisageruneautresolution:cel-le du soutien sans faille à la Grèce, quitte àdurcir les conditions de mise en œuvre decesoutien,nonsousformedemesuressup-

plémentairesmaisd’ingérencedanslapoli-tique économique. Ce soutien devrait semanifester sous deux formes : le finance-ment pendant au moins cinq ans (le tempsminimal pour que de telles réformes aientun impact sur la croissance) et un soutienplus direct à la croissance.

Cela pourrait prendre la forme d’unetask force, comme il semble s’en monterune à Bruxelles, qui interviendrait dans lapolitique économique du pays. Le soutienàune fiscalité attrayante pour les entrepri-ses, comme l’a montré l’Irlande, seraitune avancée très positive. Les négocia-tions sur les plans de soutien et la réformedu fonds de soutien aux pays en difficultémontrent la réticence des pays du Nord às’engager dans cette voie. Cependant, si lesoutien à la Grèce s’arrête, le scénariocatastrophe du défaut sera enclenché.

Ce n’est pas la bonne solution pourobtenir des réformes de la Grèce : il seraitplus efficace de renchérir l’ingérence éco-nomique, en la faisant entériner par unvote populaire afin d’en asseoir la légiti-mité démocratique. Faut-il laisser un scé-nario de défaut domino avec des consé-quences désastreuses pour l’UE se mettreen place, alors que d’autres solutionssont possibles ? Les pays du Nord de lazone euro ne sont pas en situation denégocier : ils perdraient avec l’explosionde l’euro non seulement les créances despays du Sud, mais aussi en termes de com-merce extérieur, avec un risque non négli-geable de faire exploser, aussi, le marchéunique.p

Lebruitdébordedepartout.Sesravagessusci-tent une inquiétude croissante. Un pro-gramme international d’études d’impactpour évaluer le bruit dans les océans vientd’être lancé (Le Monde du 3septembre). Unouvrage récemment paru, Le Son comme

arme, les usages militaires et policiers du son (LaDécou-verte, 180p., 16 euros), qui décrit les capacités dévasta-trices des impulsions acoustiques, note qu’auj-ourd’hui «l’espace sonore est sommé de se plier à la rai-son sécuritaire et commerciale ».

Même inquiétude,plus générale, en ce qui concernenotre vie quotidienne. Il a fallu attendre décem-bre1992 pour l’inscription dans le code de l’environne-mentd’une loi relativeà la lutte contre le bruit, et quin-ze ans de plus pour la présentation d’un rapport parle-mentaire sur la question. L’un des intérêts majeurs dece dernier réside dans l’attention qu’il accorde à tousles bruits, sans se limiter à l’approche centrée sur lestransports et le travail. Soucieux de favoriser «un cer-tainartdevivreensembledansunespacesonoreharmo-nieusement partagé », il formule dix-neuf proposi-tions, dont quatre sont consacrées aux bruits de voisi-nage, cause de souffrance pour 20% des Français.

Parmi ces nuisances dominent la musique ampli-fiée, le volume des postes de télévision et de radio, lesbruits de chantiers, les aboiements, les pétarades decyclomoteurs, les conversations la nuit aux terrassesdes cafés, qu’il faudrait compléter – inventaire nonexhaustif – par les tondeuses, élagueuses, souffleursde feuilles, par les taille-haies, les éoliennes, les rave-parties, les canons effaroucheursd’oiseauxàlacampa-gne, par les avions de tourisme, les hélicoptères, lesdameuses de neige, les hors-bord, les jet-skis sur lescôtes, outre les excès phoniques de toute nature quipolluent l’espace urbain jusqu’à contaminer désor-mais le silence des hôpitaux et des cliniques.

Les propositions du rapport parlementaire por-tentpour l’essentielsur l’information du public, l’édu-cation des jeunes à l’école, la médiation entre particu-liers,avec la créationde «référents bruit »dans lapoli-ce et la gendarmerie, et, globalement, sur l’applica-tion de la législation en vigueur. L’expérience prouveque les forces de l’ordre se montrent peu disponiblespour se déplacer à l’occasion de plaintes liées au bruit.

Ces propositions de bon sens déboucheront peut-êtresurquelquesprogrès,mais,danslesfaits,elless’ap-parentent à des vœux pieux. En témoigne l’échec de laréglementation relative à la neutralisation phoniquedes engins de chantiers : pour s’en convaincre, il suffitde marcher dans les rues ou d’ouvrir sa fenêtre.

Malgré ses qualités, le travail de la mission parle-mentaire ne changera donc strictement rien, ou pasgrand-chose, à la situation actuelle, faute de proposi-tions énergiques.

Le rapporteur le député UMP, Philippe Meunier,plaide pour l’application du principe « pollueurpayeur» en matière de pollution sonore comme pourles pollutions industrielles. Il a entièrement raison.Mais alors il faut en tirer, comme pour les pollutionsindustrielles, toutes les conséquences. Or l’énoncé dece principe ne s’accompagne d’aucun projet d’actionqui soit à la hauteur des ravages observés.

Il est impératif, par exemple, d’œuvrer avec lesindustriels à la disparition des engins de jardinageaussi bruyants que polluants. Il en va de même pourles outils de bricolage, et plus encore pour les enginsde travaux publics, y compris pour les méthodes deconstruction d’immeubles et de bâtiments divers.

Ce serait agir dans l’intérêt des ouvriers autant queduvoisinage. Autre exemple: qu’attend-on pour enga-ger une vaste opération de sensibilisation du publiccontre les méfaits du bruit et pour le droit au silencecomme on sait le faire pour d’autres causes, sécuritéroutière, tabac, alcool, etc.? Le rapport en mentionne lanécessité sans insister. C’est très regrettable. Il eût étéégalement opportun de prévoir un calendrier pour lamise en œuvre des propositions avancées, qui se limi-tent finalement à de simples suggestions.

On ne peut plus laisser les nuisances sonores accroî-tre leur emprise. Problème de santé publique, sansaucun doute. Mais pas seulement: une société esclavedubruitentretientunerelationétroiteavec laviolence.Elle favorise les incivilités tout en aiguisant la véritablesouffrance, le plus souvent dédaignée, voire méprisée,des personnes qui subissent ces nuisances. Elle nourritles antagonismes de la vie courante. La crise financière,avec, à la clé, l’aggravation du chômage et des tensionssociales, ne peut qu’accentuer le phénomène.

En second lieu, la société du bruit va à contre-cou-rant de cette société de la connaissance où se joued’ores et déjà la prospérité du pays. A titre indicatif,le rapport note la forte entrave que constitue, pourles jeunes qui étudient, un environnement bruyant.La remarque vaut pour toutes les formes de travailintellectuel. Comment concilier l’étude et le raffut, lesavoir et le vacarme ?

Enfin, il serait temps qu’on reconnaisse effective-ment à chaque citoyen le droit à la tranquillité sono-re que lui reconnaît déjà le code de la santé publique,de même que la Constitution lui reconnaît le droit àla sécurité. Aussi est-il indispensable que la luttecontre le bruit figure parmi les enjeux du débat à l’oc-casion de la prochaine élection présidentielle. p

DacianCiolosCommissaire européen chargé

de l’agricultureet du développement rural

«Depuisvingt-cinq ans,ceprogramme

dedistribution imaginéparColuche a montré

sonefficacité»

L’Europenedoit pas cesserde subventionnerles banques alimentaires

Patrick ArtusDirecteur de la recherche

et des études à la banque Natixis

LaurenceBooneDirectrice des études économiques

européennes de Bank of America ML

«Ladette dela Grèceestde 450 milliardsd’euros,mais celledel’Italie de près

de2 000milliardsd’euros»

¶Jean-Michel

Delacomptéevient de publier

«Petit éloge des

amoureux du

silence»

(Gallimard,

134 p., 2 euros)

¶Dacian Ciolos

Roumain, il est affilié

au Parti démocrate libéral

(centre-droit). Il est l’un des

concepteurs de l’actuelle

politique agricole commune

européenne

«Unesociété esclavedu bruitentretient unerelation étroite

avec laviolence»

«Prendre sespertes»sur la dette de la Grèceest une fausse solutionUndéfautprovoquerait un effetdomino désastreux pour lazone euro

Pourun droitcitoyen ausilenceEtendrela lutte contreles nuisancessonores

230123Mardi 27 septembre 2011

culture

E t si c’était en banlieue pari-sienne que battait le mieuxlejeunecœur del’artcontem-

porain ? Dispersés sur toute l’Ile-de-France, une vingtaine de cen-tres d’art s’y emploient active-ment. Et, à l’initiative du réseauTramcréé en1981, une vaste opéra-tion baptisée « Hospitalités » lesréunit cet automne. Chaque same-di, des bus vous emmèneront ain-si à la découverte de projections,de performances, de débats, etbien sûr d’expositions.

Le bout du monde ? Beaucoupde ces micro-institutions sont àquelques minutes de RER du cen-trede Paris.Dansuneabbayecister-cienneou unsupermarché,unchâ-teau ou une quasi-MJC, surgissantd’un terrain vague ou se noyantdansle dense tissu urbain… Impos-sibled’en dresser latypologie. Cha-que initiative a son identité et sesfragilités. Ses dadas, et son budget(plutôt restreint). Seul point com-mun : la plupart brillent par leurgénéreuse radicalité, couveusesdes plasticiens de demain.

Loin des blockbusters, la margese permet des libertés que Pariss’interdit trop souvent. « Nos lieuxexcentrés sont moins soumis au“poids moral” que les institutions

parisiennes, et sont davantagedans un rapport éthique à l’expéri-mentation, dans l’espoir d’ouvrird’autres perspectives », résumePierre Bal-Blanc, directeur du Cen-tre d’art contemporain (CAC) deBrétigny-sur-Orge.

Photo à Pontault-Combault, artnumérique à Saint-Denis… Lestâches sont bien réparties. Et toutle spectre de la jeune création sevoit couvert, de manière à chaquefois subjective. C’est ainsi que Lio-nel Balouin, directeur de la galerieManet de Gennevilliers, a le chicpour dénicher les plus promet-teurs des artistes français : il aoffert leur première monogra-phie au duo Dewar & Gicquel,dont les sculptures incongruesconnaissent depuis un beau suc-cès. Inaugurées il y a trois ans, LesEglises, à Chelles, lui emboîtent lepas avec allégresse : on a pu y voir,à peine sorties du Salon de Mon-trouge, les toiles de Farah Atassique les collectionneurs s’arra-chent aujourd’hui.

Directrice de la Ferme du Buis-son de Noisiel, Julie Pellegrin n’hé-site pas à inviter le plus pointu descurateurs londoniens, MathieuCopeland, pour réaliser un moisentier de performances. Quant

aux cartons d’invitation, onglets,calendriersetautresestampespro-duites avec tant d’imagination parle Centre national de l’estampe etde l’art imprimé (Cneai) de Cha-tou, la collection en a été achetéeen intégralité (plus de 500 numé-ros) par l’Etat en 2010.

L’inattendu ? Beaucoup desdirecteurs tentent d’en faire leurquotidien. Le Micro Onde de Véli-zy accueillait en juillet un ban-quet des plus fins, 80 plats concoc-tés par le gourmand éditeurFabien Vallos. En 2010, le centres’était permis de produire le pre-mier spectacle chorégraphiquedu plasticien Emmanuel Lagarri-gue : « Ce sont eux qui ont eu l’idée,pasmoi, et ils m’ont donné une pos-sibilité inédite d’investir un pla-teau plus grand que celui du Théâ-tre dela Ville, dans une liberté abso-lue », se souvient l’artiste. Com-missaire invitée de la Maisonpop’de Montreuil, structure pour-tant fragile, Raphaël Jeune inviteles artistes à ne « surtout pas faired’exposition ».

Dans ces contextes particuliers,la médiation s’élève au rang d’art.De multiples initiatives aident lapopulation locale à franchir le paset à aiguiser son esprit. Le Mac/Val

de Vitry-sur-Seine en est lemeilleur laboratoire : « Les œuvresn’ontpastoutesuneévidence, etcel-les qui sont bavardes sont rares »,explique Alexia Fabre, sa directri-ce. « Nous donnons donc beaucoupla parole aux artistes, par le biaisd’audioguides, de fictions. Et sur-tout, nous trouvons des chemins detraverse:visites gustatives,musica-les, scientifiques, poétiques… »

A Brétigny, Pierre Bal-Blanc a luiaussi une tactique pour ne pasrenoncer aux exigences de sa pro-grammation: « Je choisis des artis-tes désirant impliquer la collectivi-té, qui font naître l’œuvre à partirdu terrain où ils expérimentent.Tous les publics de proximité sontdonc impliqués, participent à destournages, aident à la réalisationdes œuvres. » Directrice de la Gale-riedeNoisy-le-Sec, MarianneLana-vère développe une stratégie assez

proche : « Je m’adresse autant auxvoisins qu’aux curateurs étrangers,et je traite de manière équitable cesdeux échelles a priori opposées.Nous travaillons avec les associa-tions du quartier, les centres médi-caux, les écoles. Nous les invitons,mais nous allons aussi chez eux,pour des expositions hors les murs.Et chaque visiteur est, s’il le souhai-te, accompagné dans sa visite. » Dusur-mesure, dont bénéficie cha-cun des 11 000 visiteurs annuels,et qu’autorise le soutien apportépar la ville, mais aussi la région, ledépartement et l’Etat, « un très bonéquilibre pour les négociations».

Quand elles sont subvention-nées par une tutelle unique, lasituation est souvent plus difficile.C’est ainsi que Judith Quentel s’estvu débarquer du Château de Cha-marande, géré par le seul conseilgénéral de l’Essonne, après six ansde bons et loyaux services durantlesquelselle asuattirer despointu-res comme Philippe Ramette ouDaniel Buren. « A chaque élection,nous devons faire un énorme tra-vail avec les élus afin qu’ils s’empa-rent de cet outil dont ils pensent, apriori, que c’est un lieu de Pari-siens », confirme Marianne Lana-vère, à Noisy-le-Sec.

Paradoxalement, la hautequali-té de ces programmations attiredavantage l’attention des profes-sionnels étrangers que celle desParisiens. L’exemple de Pierre Bal-Blanc est parlant. Parmi lesmeilleursexperts delaperforman-ce, ce dernier a renouvelé le genreen réalisant de véritables bou-quets de happenings qui ontséduit la Tate Modern de Londresou la Biennale de Berlin. Seuls lesmuséesparisiens semblent letrou-ver trop exotique. Même succèsinternational pour Claire Le Restif,quitravailleavec l’Allemagne ou laTurquie. Et consécration pour lesLaboratoires d’Aubervilliers, quele commissaire Okwui Enwezor,auteur de la Documenta11, rallie àsa triennale du Palais de Tokyo auprintemps 2012. Mérite de ceregard étranger : nous rappelerque, si le Grand Paris demeure unfantasme, dans le domaine de l’art,le défi n’est pas loin d’être relevé. p

Emmanuelle Lequeux

« Hospitalités ». Du 24 septembre au12 décembre, pendant 12 samedis, l’as-sociation Tram propose 12 parcours enbus à travers l’Ile-de-France. 6 ¤.Inscription et programme : Tram-idf.frTél. : 01-53-34-64-15.

Sur France Info“A la une du monde”du lundi au vendredi à 21h25

avec

Labanlieue, frichebénie pourl’art contemporainC’est de l’autre côté du périphérique parisien qu’il faut aujourd’hui aller chercher la jeune création. Explications

Loindesblockbusters,lamarge se permet

deslibertésqueParis s’interdit

tropsouvent

AIvry, leCrédac s’installedans laManufacture des Œillets

Le Cpif

Espace Camille LambertLe Cac

Micro Onde

Maréchalerie

Maison des arts

Maison d’artBernard Anthonioz

La Ferme du buisson

Les églises

La Galerie

Synesthésie

Galerie E. Manet

Cneai

Abbaye de Maubuisson

Galerie Villa des Tourelles

Espace Khiasma

Mac/Val

CredacESSONNE

SEINE-ET-MARNE

PARISHAUTS-DE-SEINE

YVELINES

VAL-DE-MARNE

SEINE-SAINT-DENIS

VAL-D’OISE

La Maison populaire

Les Laboratoires d’Aubervilliers

Vélizy-Villacoublay. Ouvert depuis quatre ansà la jeune création française. Installation

d’œuvres dans les espaces verts.Bientôt : Thierry Fontaine

Malakoff. Artistes émergents, de Jeanne Susplugas à RenaudAuguste-Dormeuil, et célèbres voisins comme Boltanski.

En cours : Natacha Nisic

Versailles. L’école d’architecture accueilleprès du château plasticiens, architectes et

designers, comme Tadashi Kawamata.En cours : Lucy + Jorge Orta

Pontault-Combault.Photographie plasticienne,de Philippe Durand àPierre Gonnor et ouverturesur les pratiques numériques.En cours : Laura Henno

Nogent-sur-Marne. Gérée parla Fondation Rothschild, un espaceréservé au graphisme le plus novateur.En cours : Frédéric Teschner

Chelles. Une église désacralisée qui s’est faitremarquer par l’acuité de ses choix et lancede jeunes artistes français. Bientôt:Guillaume Robert

Montreuil. De jeunes commissairesinterviennent sur des cycles d’un an.Bientôt : «Plutôt que tout»

Aubervilliers. Véritable fourmilière où semêlent plasticiens, mais aussi écrivains,sociologues et théâtreux

Saint-Denis. Un pionnier des artsnumériques qui dispose ici

d’un lieu d’expérimentations.Bientôt : Veit Stratmann

Gennevilliers. Cette école d’art municipale déniche les plasticiensqui feront l’actualité de demain, Julien Prévieux ou Katinka Bock.

En cours : Philippe Daney et Michel Verjux

Saint-Ouen-l’Aumône. Du cloître cistercienjusqu’aux granges, l'abbaye s’offre depuis 2001à des monographies d’artistes, d’Orlan à Erik

Samakh. En cours : Jan Kopp

Les Lilas. Arts visuels,performances et littérature.Bientôt : Vincent Meessen

Noisy-le-Sec. Expositions collectivesdans un manoir XIXe.En cours : Meris Angioletti

Noisiel. Le centre d’art invitedes stars comme Gianni Mottià y faire leur coup d’éclat.

Ivry-sur-Seine. Un des lieux préférésdes plasticiens qui les aide depuis vingt-quatre ansà produire de nouvelles pièces, de Stéphane Calaisà Bojan Sarcevic.En cours : Mircea Cantor

Juvisy-sur-Orge. Dans une écolede pratique artistique amateur,110 m2 réservés aux jeunes artistes.En cours : Dominique Licois

Vitry-sur-Seine. Collectionvariée, et expositionspersonnelles, de ClaudeLévêque à Simon Starling.Bientôt : Jesper Just

Chatou. Actuellement en travaux, le Cneai a quittéson île des impressionnistes pour investir

un espace du 20 de la rue Louise-Weiss, vivierde galeries à Paris. En cours : «Open Books»

Nanterre. Premiers en France à montrerles vidéos du Turc Ali Kazma, avant

leur tour du monde. Bientôt : «Para doxa»

Brétigny-sur-Orge. Programmation originalequi a révélé Clemens vonWedemeyer ou MarieVoignier. En cours : Ei Arakawa, Gela Patashuri

et Sergei Tcherepin

«C’EST INCROYABLE, on ne se croi-rait pas en France!» C’est ainsiqu’une conservatrice de la TateModern de Londres a salué le nou-veau lieu dont dispose le Crédacd’Ivry-sur-Seine (Centre d’artcontemporain) depuis le 15septem-bre: une usine de brique et de ver-re, mélange unique d’architectureChicago et Bauhaus appelé laManufacture des Œillets.

Sacré cadeau pour cette structu-re pionnière qui célébrera son25e anniversaire en 2012. Les espa-ces du 3eétage, où le centre d’arts’est installé, offrent une lumineu-se vue sur la ville à travers d’im-menses baies vitrées.

Nominé au prix Duchamp 2011,le jeune artiste roumain MirceaCantor n’en revient toujours pas. Ils’était préparé à exposer sur l’an-cien site du Crédac : des sous-solsbiscornus, avec lesquels se battaitsans rechigner la directrice ClaireLe Restif, auteure de superbes

expositions malgré un budgetmodeste de 325 000 euros annuels(dont 100000 réservés à l’artisti-que). «Mais c’est plus beau queChelsea, à New York », s’est-il excla-mé à sa première visite.

Tout s’est fait très vite. La ville aacheté le site en 2009 après queson propriétaire, Eric Danel, a étémis en liquidation judiciaire.«Pour les habitants d’Ivry, cela aété une grande joie que ce haut lieude la mémoire ouvrière ne soit passaucissonné en lofts», raconte Clai-re Le Restif. C’est alors qu’elle seprend à rêver, mais elle sait que lamairie souhaite consacrer le lieu àla création d’un centre dramatiquenational. Elle conçoit un projet.Soutiens actifs du Crédac depuis ledébut de leur mandat, en 2001, lesélus se laissent séduire. «Je suisarrivée un peu comme un chiendans un jeu de quilles, mais j’ai étéécoutée, et j’ai aussi essayé de servirde courroie de transmission avec le

ministère dans les négociationsautour du centre dramatique, pré-vu pour 2014. L’installation duCrédac permet dès aujourd’hui dedonner une visibilité à la manufac-ture.» Département, région et Etat,les trois autres autorités de tutelle,entérinent le projet.

Un signal politique fort«Avant, pour nous, faire une

expo, c’était comme construire unbateau dans une bouteille, onn’avait même pas de monte-char-ge! Aujourd’hui, nous disposonsd’un espace de stockage, d’unedocumentation, d’une salle pourles enfants, et nous avons juste10m2de moins pour les exposi-tions, se félicite Claire Le Restif. Cegeste de la mairie est un signal poli-tique fort : mettre un centre d’artcomme la première roue du carros-se, alors que beaucoup de ces struc-tures sont fragilisées en cemoment, c’est un vrai signe de gau-

che, sans pour autant être populis-te.» Ce qui l’enchante aussi, c’estde voir « combien les œuvres deMircea vivent avec la lumière. Celava beaucoup faire évoluer monrapport à l’exposition ». Dans lagrande salle, un avion bricolé enhameçon géant vient saisir lesregards; plus loin, un arc-en-cielgravé dans le verre joue avec lesnuages; et dans la dernière salle,plongée dans le noir, une vidéomontre une ronde de femmessemblant surgies de la Grèce anti-que, qui marchent dans le sable enbalayant les pas de celle qui les pré-cède. Leur lumière intérieure sup-porte toutes les lueurs rivales. p

E. Le.

« More Cheeks than Slaps », MirceaCantor. Crédac, 25-29, rue Raspail,Ivry-sur-Seine (94). Tél. :01-49-60-25-06. Tous les jours de14 heures à 18 heures, 19 heuresle week-end. Entrée libre. Credac.fr.

24 0123Mardi 27 septembre 2011

culture

Unearia etdes envoléesd’anthologiedansune partition époustouflante

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S ur la page d’accueil de sonsiteInternet, PhilippeManou-ry a affiché une citation de

Samuel Beckett : « Avec toute cetteobscurité autour de moi, je me sensmoins seul. » Posture ou mélanco-lie ? Le musicien répond solitude.Celleque lui et ses collègueséprou-vent dans un monde où la plupartdes gens (y compris les plus culti-vés)expriment« unetotalemécon-naissance de ce qui se passe enmusique contemporaine ».

Musica, le festival internationaldes musiques d’aujourd’hui qui sedéroule à Strasbourg jusqu’au8 octobre, est sans doute lemeilleur moyen de panser cesplaies. La programmation offre eneffetpar sonampleur (unequaran-taine de concerts) comme par sondynamisme(unevingtainede créa-tions) un authentique panoramade la musique contemporaine, etc’est précisément à PhilippeManouryquecetévénement musi-calde la rentrée a demandéde don-ner le coup d’envoi avec la créationde son quatrième opéra La Nuit deGutenberg.

Avec ses longs cheveux argen-tés, le compositeur de 59 ans rap-pelle Franz Liszt au même âge, lasoutane en moins et le cigare enplus. Comme le grand Hongrois,Manoury, installé depuis 2004 enCalifornieoù il enseigne à l’univer-sité de San Diego, est un virtuosedu clavier… version informatique.

Il s’est intéressé très jeune à lamusique sur ordinateur avantd’entrer dans le temple (encore enconstruction)de laspécialité: l’Ins-titut de recherche et de coordina-tion acoustique/musique (Ircam)fondé par Pierre Boulez en 1977, àParis.

Après un séjour de dix-huitmois au Brésil, Manoury intègrel’Ircam pour y réaliser un projet decomposition et y élit quasimentdomicile pendant la phase de lan-cement de l’institution dont il seral’un des principaux animateurs.Les œuvres fondamentales (Jupi-ter, Pluton) qu’il a composées à la

fin des années 1980 avec électroni-que « en temps réel » (c’est-à-direavecdes transformationsinforma-tiques si rapides qu’elles semblentréalisées dans l’instant) ont aboutià la conception d’un logiciel, MaxMsp, dont le succès s’est affirmétant dans les cercles de l’avant-gar-de que chez U2 ou Michael Jackson.Notamment pour gérer la relationentre sons et images, comme c’estle cas dans La Nuit de Gutenberg.

A travers la figure de l’inven-teur de l’imprimerie, le composi-teur ne cherche d’ailleurs pas àcélébrer un pionnier de la techno-logie,mais s’intéresse àdifférentesformes d’écriture nées à travers lessiècles. Rien de surprenant de lapart de quelqu’un qui a toujours

eu comme objectif « de créer uneécriture informatique qui soit aussisolide que l’écriture traditionnel-le ». En témoignent les fameuses«partitions virtuelles» dontl’adjec-tif s’avère un mot-clé dans l’uni-vers du compositeur. Ainsi des« chœurs virtuels » (vocalité élec-tronique diffusée par haut-parleurs) qui émergeaient de K,créé en 2001 à l’Opéra Bastille, etdont on retrouve l’écho dans LaNuit de Gutenberg, au moment oùla voix d’une hôtesse de cybercafése transforme en polyphonied’époque sumérienne…

Cybercafé? Homme du numéri-que, le compositeur est forcémentun homme du Web. « Le Stockhau-sen de l’Internet, on l’attend enco-re… mais j’espère qu’il va venir »,constate avec amusement Manou-ry en évoquant un compositeurqu’il a beaucoup admiré. « On vitune phase embryonnaire, et il peuten sortir un jour quelque chose de

bouleversant, une œuvre artistiquequi prendrait en considération cesmoyens-là et en tirerait quelquechose de susceptible de faire date.Peut-être y parviendrai-je…» Il sou-rit. Puis, plus sérieusement : « Leplus intéressant sur Internet réside,selon moi, dans l’horizontalité dusavoir… Vous cherchez une infor-mation sur les fonds sous-marins etvous tombez sur La Grande Vague,de Katsushika Hokusai. Cetterecherche vous transporte dans unchamp qui n’est pas celui que vousaviez envisagé. » La Toile, commeréseau de communications, luiparaît, en revanche, synonyme dedésastre. Il l’a ciblé dans sa parti-tion par une allusion à Moïse etAaron, l’opéra d’Arnold Schoen-berg, ainsi commentée : « Le nou-veau médium a suscité un nou-veau fétichisme. On joue avec nosiPhone comme on dansait autourdu veau d’or. »

Nourrir sa réflexion artistiquede considérations sociales est uneconstante chez Manoury.« L’œuvre d’art, dit-il, peut mettreen évidence des choses qu’aucunsociologue ou qu’aucun hommepolitique ne voit. »

Et cette mise en abyme de l’écri-ture perceptible dans La Nuit deGutenberg est au fond caractéristi-que de bien des entreprises artisti-ques présentées à Musica, tellesque The Cave, de Steve Reich, ouLuna Park, de Georges Aperghis.Mais qu’il s’agisse de Debussy revupar Jarrell ou Verrières, de Mozart« transformé » par Pesson ouSchiller transporté par Eötvös ;qu’ils partent du cinéma (Chapli-nOperas, de Benedict Mason) oudu rock (Doctor Faustus Lights theLights, de Rodolphe Burger), c’estun long processus d’extension quiest ici mis en œuvre. De quoi éclai-rercette obscuritédont parlaitBec-kett. p

Pierre Gervasoni

Festival Musica. Dans divers lieux deStrasbourg. Tél. : 03-88-23-47-23. Festi-val-musica.org ; Philippemanoury.com

GUTENBERG, qui a vécu à Stras-bourg entre 1434 et 1444, y réappa-raît cinq siècles plus tard, dans lenouvel opéra de Philippe Manou-ry, sous les traits d’un vieil hom-me à la dérive dans un mondequ’il ne comprend plus. Marginalau Moyen Age par son attitudevisionnaire, l’inventeur de l’im-primerie à caractères mobiles– ou plutôt le barbu hagard quicroit le réincarner – le redevient,par attachement anachroniqueaux livres, à l’heure d’Internet etdes écrits dématérialisés.

Le personnage central (NicolasCavallier, excellent) de La Nuit deGutenberg cristallise les interro-gations d’une entreprise multi-média qui suit les vicissitudes del’écriture depuis ses originessumériennes (tablettes d’argile)jusqu’à ses extensions informati-ques (écrans de cybercafé).

Inégal et simpliste, le livret deJean-Pierre Milovanoff (on rêvede ce qu’un Umberto Eco auraittiré d’un tel sujet) comporte quel-ques jolies trouvailles d’ordrepoétique que la mise en scèneintelligente de Yoshi Oïda exploi-te avec goût.

Subtile et spectaculaireLa plus grande force de ce spec-

tacle très réussi provient néan-moins de la partition époustou-flante de Philippe Manoury.Orchestre (magnifiquement diri-gé par Daniel Klajner), électroni-que (réalisée à l’Ircam selon unedouble orientation, subtile et spec-taculaire) et voix (solistes oumadrigalesques) bénéficient d’untraitement magistral. Nombreuxsont les morceaux d’anthologie :l’aria excitante de l’hôtesse inter-nautique (Mélanie Boisvert), les

envolées chaleureuses de la lectri-ce idéale (Eve-Maud Hubeaux), labande-son d’un film sur les auto-dafés (pronazis ou anti-Rushdie),le chœur des enfants s’extasiantdevant l’explosion de bombes ato-miques façon jeu vidéo…

Commandée par l’Opéra natio-nal du Rhin, cette œuvre excep-tionnelle à plus d’un titre mérite-rait de l’être également vis-à-visde la règle qui veut que les grandsthéâtres lyriques ne program-ment que des créations qu’ils ontsuscitées… afin d’apparaître bien-tôt sur d’autres scènes. p

P. Gi

La Nuit de Gutenberg. Opéra nationaldu Rhin, Strasbourg, le 24 septembre.Prochaines représentations les 27 et29 septembre à 20 heures puis le 8 octo-bre à 20 heures, à la Filature de Mulhou-se. 0peranationaldurhin.eu

Le Centre Wallonie-Bruxellesfait sa rentrée

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«LeStockhausendel’Internet, onl’attendencore…mais j’espère

qu’ilva venir»Philippe Manoury

compositeur

PhilippeManoury donnele«la»(électronique) de MusicaLe compositeur, pionnier de l’Ircam, ouvre le festival de Strasbourgavec la création de son quatrième opéra, «La Nuit de Gutenberg»

Eve-Maud Hubeaux (Folia) et Nicolas Cavallier (Gutenberg). ALAIN KAISER

Danse

L ’art c’est le ménisque. » Pourarriver à cette conclusion car-tilagineuse, il a fallu passer

par nombre d’élucubrations et sla-lomer dans les courbes d’un étran-ge spectacle intitulé Dance Is a Dir-ty Job but Somebody’s Got to Do It.Extravagantà premièrevue, ce rap-prochement entre deux territoiresapparemment sans communemesure que sont l’art et l’anatomietrouve son point de jonction danslecorpsdudanseur.Et c’esten tour-nant autour des genoux, puis surun seul – en raison d’une opérationdu… ménisque de l’interprète – quelemot d’espritfinal de lapièce, écri-te et mise en scène par le comédienScali Delpeyrat, sonne comme uneévidence.

Au Théâtre des Abbesses, à Paris,ils sont quatre interprètes – deuxcomédiens, dont Scali Delpeyrat etl’épatante Elisabeth Mazev, unmusicien et un danseur – à tricoterce patchwork entre théâtre, danse,comédie musicale et vidéo. Autourde deux figures fameuses, celles deFred Astaire et de Michael Jacksondont le premier a dit au second« qu’il était un danseur en colèrecommelui »,cedrôledeshowaccro-che une analyse moqueuse maisamoureuse de la danse depuis lavalse musette jusqu’au hip-hop.Une maille à l’endroit en français,une à l’envers en anglais comme leveut la mode, nos performeurs ontla langue bien pendue mais possè-

dent le talent de traiter légèrementles choses graves en les prenant ausérieux.

Dance Is a Dirty Job but Somebo-dy’s Got to Do It, dans un décor degala de fin d’année, est la versionlongue d’un coup d’essai de dix

minutes présenté en juin2010 lorsdu concours Danse élargie, pilotépar le Théâtre de la Ville, à Paris, etle Musée de la danse, à Rennes. Les-té duprixdu Public,Scali Delpeyrata finalisé le spectacle au coursd’unerésidencedetravailàl’Espace

des arts de Chalon-sur-Saône, où lapièce a été créée le 13septembre. p

Rosita Boisseau

« Dance Is a Dirty Job… ». Théâtre desAbbesses, Paris 18e. Jusqu’au 1er octo-bre. 20 h 30. Tél. : 01-42-74-22-77.

Languebien pendue, chevilles bien tenuesAux Abbesses, Scali Delpeyrat propose un spectacle entre théâtre, danse et comédie musicale

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THÉÂTRE DU ROND-POINT

Avec

Jean Arthuis, sénateur de la Mayenne (Alliance centriste)et président de la commission des finances du Sénat

Philippe Aghion, économiste, professeur d’économieà l’université Harvard et à l’Ecole d’économie de Pariset auteur de Repenser l’Etat

Jérôme Cahuzac, député (PS) de Lot-et-Garonne et présidentde la commission des finances de l’Assemblée nationale

Maria Nowak, économiste, présidente fondatrice de l’Associationpour le droit à l’initiative économique (ADIE) et du Réseau européende la Microfinance (REM), et auteur de L’espoir économique. Microfinance et entrepreneuriat social, ferment d’unmonde nouveau

Marc Roche, correspondant duMonde à Londres et auteur de LaBanque, Prix du livre d’économie 2010, et du Capitalisme hors la loi

Et d’autres intervenants…

Un débat animé par Erik Izraelewicz,directeur duMonde,en partenariat avec TNS Sofres, et avec l’interventiond’Edouard Lecerf, directeur général

L’Etat soumisà la tyrannie des marchés

La bataille est-elle perdue ?Quel sort pour la démocratie ?

Lundi 10 octobre 2011 à 19h30

OscarWilde

Réservations : Théâtre du Rond-Point2 bis, avenue Franklin-D.-Roosevelt, 75008 Paris. Tél. : 01 44 95 98 21

Tarif : 15 € / Réduit* : 12 €.Moins de 30 ans : 8,50 €.www.theatredurondpoint.fr

Informations : www.lemonde.fr/debats

*SDL, abonnés duMonde, duMonde «Dossiers et Documents », duMonde.fr et du Théâtre du Rond-Point, sur présentation d’un justificatif.Dans la limite des places disponibles.

culture

O relsan a perdu le visagepoupin qu’il affichait surson premier album, Perdu

d’avance. Il a les traits amincis, rac-cords avec le look de vengeur mas-qué qu’il arbore sur la pochette deson second opus, Le Chant des sirè-nes. Comme si le rappeur voulaits’éloigner de l’image du loser pourendosser la panoplie du super-héros avide de revanche.

Le morceau d’ouverture de l’al-bum rappelle si on en doutait quele chanteur nourrit quelques ran-cœurs : « Merci quand même pourle coup d’pub/Merci les Chiennesde garde pour le coup de pute. » Letchatcheur Bas-Normand – Auré-lien Cotentin de son vrai nom – n’arien oublié de la polémique àlaquelle il doit sa petite notoriété.

Rappel des faits. Sorti enfévrier 2009, Perdu d’avance estbien accueilli par la critique. Orel-san s’y singularise en enfant d’uneclassemoyenneprovinciale,dépei-gnant avec une verve comique etdépressive la génération Internet.Deux mois plus tard, une contro-verse enfle à propos d’une chan-

son, Sale pute – qui ne figure passur l’album – mais met en scèneun garçon qui, découvrant que sacopine le trompe, se saoule et luiécrit un mail l’agonisant d’injureset de menaces gore. Influencée parl’esthétique « white trash » améri-caine d’Eminem, la chanson estillustrée par un clip auto-produit,mis en ligne sur Internet. Choquéspar ce qu’ils considèrent commeune apologie de la violence faiteaux femmes, des internautes semobilisent afin d’empêcher lesconcerts du rappeur, en particu-lier celui prévu au Printemps deBourges, poussant les politiques àprendre position.

Si lePrintempsde Bourges résis-tera aux pressions, les Francofo-lies de La Rochelle annuleront lavenue d’Orelsan et de nombreusessalles préféreront à leur tour nepas le programmer. Orelsan plaidenon coupable : « J’essayais de mon-trer comment une pulsion peuttransformer quelqu’un en mons-tre », répète-t-il aujourd’hui. « Enaucun cas je ne faisais l’apologie dela violence conjugale. Ce personna-

ge pathétique me dégoûte, maisc’était une façon de représenterartistiquement la haine. »

Une surenchère de sadisme tri-vial qui ressemble à une envie de

se faire remarquer ? L’albums’écoulera finalement à un petit30 000 exemplaires. « Il y a eubeaucoup de mauvaise foi dans cesattaques mais ce n’est pas la pre-

mière ni la dernière fois que le rapsert de bouc émissaire », soupireAurélien Cotentin.

Le rap, notre homme baignededansdepuisses 12 ans. Jeunebas-ketteur, il s’initie au genre enapprenant par cœur des mor-ceaux d’IAM ou de NTM. « Même sileurenvironnement étaitcomplète-ment différent de celui d’un petitblanc d’Alençon, je trouvais ça funet leur réalisme me touchait.Quand Doc Gynéco décrivait despigeons picorant du vomi detoxico, cela me parlait plus que lesromances de la chanson françai-se. »

Si quelques copains gravitentautour de cette passion, Orelsantrouve son style en solitaire. Aprèsun diplôme de management, lesimpasses professionnelles lemènent pendant trois ans à un jobde réceptionniste-veilleur de nuitqui lui laissent le temps de déve-lopper ses talents d’observateurdes frustrations adolescentes.

Dans Le Chant des sirènes, onretrouve (Plus rien ne m’étonne,Mauvaise idée) cette faculté dechroniquer avec cruauté et auto-dérision les travers d’une généra-tion nourrie de mangas, de jeuxvidéo, de films X et de blogs, mêmesi, à 29 ans, Orelsan se donne sou-vent le rôle du grand frère dépassé.Son débit traînard et malicieuxfait alors merveille dans l’humournoir et la justesse des détails glau-ques.

Autre constante, une façon den’envisagerles relations amoureu-ses que sous l’angle de la décep-tion et du cynisme. Objets de désirdéçu ou trop vite assouvi, les fillesont rarement le beau rôle dans leschansons d’Orelsan, au point quepourraient pointer à nouveau desaccusations de misogynie. « Cettefaçon crue de parler de sexe appar-tient aussi bien aux filles qu’auxgarçons », s’offusque le rappeur,«Dans mes chansons, les rôles peu-vent très bien s’inverser. » Elles ontété d’ailleurs nombreuses – leschanteuses Olivia Ruiz et Anaïs, la

romancière Virginie Despentes – àdéfendre,aumoment dela polémi-que, celui dont on trouve aussideux titres dans le premier albumde Luce, ancienne gagnante de laNouvelle Star.

S’il s’essaie à des moments bonenfant (la morale cul-cul de La ter-re est ronde), on préfère Orelsandans le registre vachard. Avec LaPetite Marchande de porte-clefs,saisissante comptine inspirée parle commerce des enfants en Asie,Suicide social est l’un des sommetsprovocateurs du disque. A quel-ques minutes de son suicide, ungarçon y vomit consciencieuse-ment toutes les composantes de lasociété française. Ouvriers, pay-sans, fachos, chanteurs engagés,lesbiennes, « fils de bourges »,gamins des cités, « France de José-phineAngeGardien» ou des « liber-tins », tout passe à une effrayantemoulinette misanthrope. Matièreà nouvelle polémique ?

« Je joue là d’une accumulationde clichés » désamorce le rappeur.« La France semble composée decouches sociales qui ne se croisentjamais et véhiculent des tas d’idéesreçues. Je démontre ici par l’absur-de que nous avons tous en nousune partie de l’autre. A l’origine, jedonnais les clefs à la fin de la chan-son.J’ai préféré supprimerl’explica-tion au risque d’être ambigu. » p

Stéphane Davet

Le Chant des sirènes d’Orelsan,1 CD 3e Bureau/Wagram. Concert :Le 14 décembre, à Paris, au Bataclan.

Anne-CatherineGillet«Knoxville : Summerof 1915, op.24», de SamuelBarber. «Les Nuits d’été,op.7», d’Hector Berlioz.«Les Illuminations, op.18»,de Benjamin BrittenOrchestre philharmonique royal de Liè-ge, Paul Daniel (direction).

Cela faitmainte-nant unedizained’annéesque lesopranolumineux

d’Anne-Catherine Gillet enchantenos scènes lyriques – sa Micaëla,dans Carmen, à l’Opéra-Comiqueen 2009, était émouvante à pleu-rer. Voici son premier enregistre-ment. Une superbe réussite, quimêle judicieusement les universpoétiques de Barber, Berlioz etBritten, et s’impose par la qualitéde son exigence musicale. Grâce,véhémence, volupté, l’art consom-mé (et parfois heureusementconsumé) d’Anne-CatherineGillet est de ceux qui touchent cequ’en d’autres temps on eût appe-lé l’âme. p Marie-Aude Roux1 CD Aeon/Outhere.

Marsalis/ClaptonPlay the Blues

Le trompet-tiste dejazz améri-cain Wyn-ton Marsa-lis fait tan-dem avecl’un des

héros de la guitare rock et blues,l’Anglais Eric Clapton. Au vu desimages du DVD qui accompagnel’album Play the Blues, cela a étéplutôt relax. Le répertoire tiré deconcerts captés du 7 au 9 avril auLincoln Center, à New York, puisedans des classiques des années1920, les couleurs jazz-blues deLa Nouvelle-Orléans (Ice Cream,TheLast Time), avec un passage éti-ré par Layla, un sommet de Clap-ton en 1970, avec son groupeDerek & The Dominos. Claptonjoue la pompe ou s’installe élé-gamment dans des parties solis-tes. Dans la formation montéepar Marsalis, on trouve clarinetteet banjo. Les amateurs de l’atta-chement de Marsalis aux textesoriginaux s’y retrouveront. Etceux de Clapton dans ses fonda-mentaux et les origines de sa pas-sion pour le blues (Fourty-Four,Kidman Blues). p Sylvain Siclier1 CD et 1 DVD Rhino-RepriseRecords/Warner Music.

JujuIn Trance

Grandvoyageur,le guitaris-te britanni-que JustinAdams estun habituédes projets

croisés. On l’avait découvert auxcôtés de Jah Wobble, bassiste post-punk du groupe PIL. Après un pre-mier album «world », DesertRoad, en 1990, ilmultiplie les colla-borations avec les musiciens dumonde, produisant notammentles albums de Tinariwen, accom-pagnant la Marocaine Najat Ata-bou. Le Gambien Juldeh Camarajoue de la vièle à une corde. Ilspublient ensemble leur troisièmealbum, In Trance, sorti des ateliersRealWorld, le paradis de PeterGabriel installé en son moulin deBath. C’est là que la première colla-boration entre le quawwali pakis-tanais Nusrat Fateh Ali Khan et legroupe Massive Attack a forgé unnouveau son anglo-pakistanais.In Trance répond au cahier descharges et possède une énergierayonnante, une rythmique impa-rable, et transpire le bonheur dejouer. p Véronique Mortaigne1 CD RealWorld/Harmonia Mundi.

«Merciquand mêmepourlecoup d’pub/Merciles Chiennes

degarde pourlecoup depute»

Orelsan« Le Chant des sirènes »

Sélection CD

WAHIB CHECHATA

Orelsanpas enfant de chœur,mais pas sans cœurA trop jouer sur les clichés, le rappeur a récolté l’ire des féministes. Il revient avec un deuxième opus, et règle ses comptes

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mode

MilanEnvoyée spéciale

Po-si-ti-ver », le mot estlâché par plusieurs sty-listes à Milan. Face àl’avalanchede mauvai-ses nouvelles – du pro-cès de Berlusconi à la

crise financière, en passant par lesatellite dont on attendait la chu-te, ce week-end… sur la Lombar-die –, les créateurs de mode ontdécidé de riposter.

« Plus les temps sont difficiles,plus j’ai envie de montrer que lamode est un refuge pour l’esprit,une bulle de légèreté ! », déclareAngela Missoni, la pétulantedirectrice artistique de Missoni.Dimanche 25 septembre, elle aprésenté des silhouettes inspi-rées par le Flamenco, avec encoreplus de volants, de couleurs vita-minées et de franges qu’à l’ordi-naire.

Mambo Italiano, chante en bou-cle Sofia Loren sur la bande-sondu défilé Dolce & Gabbana. Dansun décor de fête de village, des jeu-nes femmes sensuelles défilentdans des robes années 1950 auximprimés potager (piments,tomates, poivrons…), des bloo-mers fleuris et des fourreaux desoie et de coton crocheté. Commeune ode à une Italie de carte posta-le et à son art culinaire.

Les modèles balancent noncha-lamment un petit sac en osier etcuir, couleur turquoise, se déhan-chent sur des sandales compen-sées aux brides nattées, façon can-nage, et se glissent dans desmaillots de bain rétro pour aller àla plage. Le soir venu, leurs tenuessont rebrodées de pierres réflé-chissantes, rappelant l’éclat deslampions.

« Nous avons voulu capturertout ce qui fait la beauté de l’Italieet sa joie de vivre », a déclaré le tan-dem de créateurs, avant d’emme-ner dîner l’actrice américaine

Scarlett Johansson au Gold, le res-taurant qu’ils possèdent à Milan.

Au cinquième jour des défilésféminins pour le printemps-été2012, une évidence s’impose : lesannées 1920, cette périoded’euphorie d’avant… la grandedépression de 1929, ont été pourbeaucoup une source d’inspira-tion. Après Gucci et Etro, BottegaVeneta a montré, ce week-end, depetites robes droites savammentfrangées et perlées, coupées loindu corps.

Si les formes sontsimples, le tra-vail est d’exception comme cesplastrons en carreaux de vinyle etmétal doré, posés géométrique-ment, façon art déco. Ou ces robesbleu tourmaline, avec des applica-tions de caoutchouc sur du satinlaqué, qui donnent aux manne-quins une démarche altière.

A l’exception de Salvatore Ferra-gamo, les pastels sont de mise. Ilssont, chez Emilio Pucci, du plusbel effet, apportant une touche deromantisme aux collections tou-jours sexy de Peter Dundas, ledirecteur artistique. Des robes fou-lards, en mousseline de soie rebro-dée, succèdent à des pantalonstaille haute, et à des jupes sous desmicro-brassières qui laissent lenombril à l’air.

Ces bohémiennes chics, rappe-lant la Brigitte Bardot des « annéesgitanes », portent de maxi-créo-les, des croix autour du cou et delongues écharpes. Du blanc, de l’oret du « nude » (couleur chair) vien-nent contrebalancer les myriadesde couleurs utilisées partielle-

ment délavées. « Quand les tempssont incertains, c’est le momentpour tous de donner le meilleurd’eux-mêmes : mon défi est de fai-re les vêtements les plus beaux,afin que les femmes qui les portentse sentent belles à leur tour », souli-gne Peter Dundas, un géant blond,mi-norvégien, mi-américain.

Autre star de l’été 2012 : le blancvirginal. Tailleur-pantalon à pin-ces, robe bustier, bottines décou-pées, sac et chapeau canotier… Surle podium d’Emporio Armani, il seporte des pieds à la tête, simple-ment surligné d’un trait noir, com-me le cadre autour d’un tableau.

Il est aussi le clou de la collec-tion Jil Sander, qui le décline sur lapièce emblématique de la maison– la chemise en coton blanc –, pourdessiner une silhouette nouvelle.

Laborantine, scientifique ouvierge postmoderne ? On ne sait,mais la femme Jil Sander est enmajesté dans sa robe chemisierimmaculée, boutonnée devant oudans le dos, avec deux bijoux enstrass posés au creux de ses reins.Des dessins de Picasso, comme untrait de crayon coloré, viennentréveiller la blancheur des pull-overs. Des bonnets de laine,mi-rasta, mi-voilette (signés ducélèbre chapelier britannique Ste-phen Jones) apportent une touche

de couleur. Même les vichys etimprimés à carreaux laissent tou-jours les blancs transparaître.« L’épure d’un vêtement est un peuma quête du Graal : pour moi, c’estl’expression de la beauté intérieu-re », explique en coulisses RafSimons, le directeur artistique dela griffe.

« Il faut positiver », martèleConsuelo Castiglione, la directriceartistique de Marni, après avoirmontré une collection de vête-ments si inventifs qu’elle pourraitprétendre, à Paris, au titre de «hau-te couture ». Robe en forme de« A » et au décolleté rectangle oujupe en raphia brodée de perlessous un pull jacquard presque rigi-de : l’allure est fraîche, les formesarchitecturales.

La richesse est dans le travaildes matières, comme cette robetissée avec un fil coupé (échevelé)puis imprimée de fleurs, pour uneffet en 3 D, ou cette autre, enentrelacs de cuir beige et marron,qui prend l’apparence d’un canna-ge. Les broderies mêlent plasti-que, sequins et cristaux. « C’est lemoment de montrer les ressourcesde l’artisanat italien, et de fairerêver les gens avec des choses diffé-rentes », avance Consuelo Casti-glione. Pari réussi.p

Véronique Lorelle

ELLES SE PEIGNENT les ongles,lisent au lit, photographient lepublic agglutiné derrière lavitrine. Les mannequins vivan-tes dans la boutique milanaisede Dolce & Gabbana, au numé-ro 2 de l’étroite via Spiga,étaient là, à la nuit tombée,pour attirer l’attention des pro-meneurs. Mais, c’est moinspour vendre les articles du célè-bre tandem italien, que ceuxsignés – pour la plupart – d’in-

connus. « Nous ne sommes plussi jeunes, ont expliqué à la pres-se Domenico Dolce et StefanoGabbana. Nous voulons aider denouveaux stylistes à émerger, etmontrer ce qu’ils sont capablesde faire. »

Talents du futurC’est ainsi qu’ils ont transfor-

mé l’une de leurs nombreusesboutiques en magasin multi-marque pour talents du futur.

On y trouve des vêtementssignés Martin Grant, Commuunou Dévastée, trois petites mai-sons – la première créée par unAustralien, la seconde par unduo de Japonais et la troisièmepar un tandem venu de Cahors– qui défileront cette semaine àParis. Des créateurs de toute laplanète sont vendus dans celieu : de l’Espagne à la Russie, dela Turquie aux Etats-Unis.

Il s’agit là des coups de cœur

personnels de Domenico Dolceet de Stefano Gabbana. Ils achè-tent les pièces qui leur plaisent,pour leur magasin baptisé Spi-ga 2. Et se contentent d’épar-piller leurs accessoires autourdes vêtements de leurs « pou-lains ». Le magasin, presque unespace de vie, vaut le détour,mais il ne faut pas s’attendre àdes prix accessibles. Pièces ensérie limitée obligent. p

V. L.

MILAN PRÊT-À-PORTER PRINTEMPS-ÉTÉ 2012

Larichesseestdans letravail

desmatières.Lesbroderies

mêlentplastique,sequinsetcristaux

Les coupsdecœur du duoDolce &Gabbana, viaSpiga

J Emilio PucciLUCA BRUNO/AP

j Jil Sander

ANTONIO CALANNI/AP

J MarniALESSANDRO GAROFALO/REUTERS

Lesannées 1920, période d’euphorieavant laGrande Dépression,ontinspiré nombredes créateurs quiont défilé dans lacapitale lombarde

Rêver, malgrétout

j Dolce & Gabbana.STEFANO RELLANDINI/REUTERS

270123Mardi 27 septembre 2011

Préparerà quoi?Pierre Berbizier

sport

Ce ne fut pas le match le plusagréable à regarder de la Coupedu monde, mais il l’a emportéhaut la main pour la dramatur-gie: l’Argentine a battu l’Ecossed’un petit point (13-12), diman-che 25septembre, grâce à unessai à sept minutes du coup desifflet final, marqué par le Mont-pelliérain Lucas Gonzalez Amoro-sino et transformé par son capi-taine, Felipe Contepomi.A cet instant, les Ecossais, quiavaient dominé les débats grâceà leur supériorité sur les tou-ches, menaient 12-6 et pou-vaient envisager de prendre lapremière place de la poule B,

donc de rencontrer la France enquarts de finale.Ils devraient finalement rentrerplus tôt que prévu au pays, àmoins qu’ils ne battent l’Angle-terre, samedi 1er octobre, parsept points d’écart – ou en inscri-vant quatre essais. Pareil exploitne s’est pas produit depuis 1986.Défensivement héroïques sousla pluie battante de Wellington,les Pumas argentins rencontre-ront la Géorgie le 2 octobre à Pal-merston North. L’hypothèse laplus probable leur octroie ladeuxième place de leur poule etun quart de finale contre les AllBlacks, le 9octobre à Auckland.

Football, Ligue 1

LePSG,nouveauleader du championnatRennes, tenu en échec par Saint-Etienne (1-1), le 25 septembre, lors de la 8e

journée, a laissé filer sa chance de se hisser en tête du championnat. Paris,en revanche, n’a pas manqué l’occasion de prendre la place de leader.Face à Montpellier, le 24, le PSG de Javier Pastore a marqué les esprits(0-3).Paris partage le podium avec Lyon et Toulouse. Quant à Sochaux, il a étébalayé dimanche par Auxerre (4-1), avec un triplé de Dennis Oliech.

Cyclisme Mark Cavendishchampion du mondeMark Cavendish est devenu cham-pion du monde de cyclisme surroute, dimanche 25 septembre,près de Copenhague. Le Britanni-que a battu au sprint l’AustralienMatt Goss et l’Allemand AndreGreipel. Cavendish, 26 ans, est ledeuxième coureur britannique àrevêtir le maillot arc-en-ciel sur laroute, 46 ans après Tom Simpson.L’épreuve, disputée sur un circuitsans difficulté de relief, s’est cou-rue à une allure très rapide, pro-che du record de 2002, quand l’Ita-lien Mario Cipollini s’était impo-sé à Zolder (Belgique). Le Norvé-gien Thor Hushovd, tenant dutitre, a été retardé par une chutecollective à quelque 80 kilomè-tres de l’arrivée.

Rugby

Takapuna(Nouvelle-Zélande)Envoyé spécial

C inq essaisencaissés, une ren-contre « pliée » après vingtminutesde jeu, un sélection-

neur sur les nerfs… On aurait puimaginer les joueurs français abat-tus après le match contre les AllBlacks, perdu 17-37, samedi 24 sep-tembre, à l’Eden Park d’Auckland.

Mais, à part Louis Picamoles,énervé d’avoir été remplacé à lami-temps, les Bleus sont apparusplutôt rassurés : « C’est loin d’êtreun coup d’arrêt, au contraire, ajugé Imanol Harinordoquy aprèsle match. Il y a encore beaucoup detravail mais cela nous donne ausside l’espoir. » Même « positive atti-tude » chez Maxime Médard(« Nous avons fait preuve de solida-rité »), Fabien Barcella (« Il n’y arien de rédhibitoire ») ou VincentClerc (« Je ne suis pas inquiet. Onmonte en puissance »).

Une nouvelle illustration desprogrès de la langue de bois ? C’estpossible, mais les Bleus ont, para-doxalement, quelques raisonsobjectives de se satisfaire du résul-tat de cette rencontre. Si l’équipede France alignée n’était pasl’« équipe B » annoncée par cer-tains, ce n’était pas la « meilleure »non plus (Parra à un poste qu’ilconnaît mal, une première ligneprivée de Mas et Servat, Traille

dans un mauvais jour…), commel’avait affirmé le sélectionneurMarc Lièvremont, et son degré demotivation n’était pas maximal :elle n’était pas sous la menaced’une élimination prématurée.

Les All Blacks, eux, ont présentéau contraire leur meilleure équipe(à l’exception de Kieran Read, bles-sé) et accumulé les facteurs demotivation:revanchedel’élimina-tion de 2007, invincibilité à l’EdenPark, 100e sélection de RichieMcCaw. Une motivation soulignéepar le choix d’interpréter le Kapa oPango avant le match.

Un écart de 20 points (le mêmequ’en finale de la première Coupedu monde, il y a vingt-quatre ans,entre les deux mêmes équipes)dans ces circonstances n’apparaîtpasénorme.Ilestd’ailleursplusfai-ble que lors du dernier match entrela France et la Nouvelle-Zélande(12-39), en novembre 2009, à Mar-seille. La différence de niveau avaitparu plus flagrante ce jour-là. De làà dire que le retard a été comblé…

Au fil des performances desBleus dans la compétition, MarcLièvremont n’a cessé de se tendre.C’est dans la logique des choses. Enrevanche, sa gestion médiatique

du groupe apparaît déconcertan-te, les accès de colère dans lesquelss’affiche sa frustration alternantavec des tentatives quelque peuforcées pour « positiver ». Il reste,entout cas, fidèleàla stratégiedéfi-nie avant de s’envoler pour la Nou-velle-Zélande : ne pas tout misersur le match contre les All Blacks,atteindre un pic de forme pour ledernier match de poule contre lesTonga, chercher des ressourcespour compenser le retard sur leséquipes du Sud.

Seulement, on ne sait toujourspassi l’équipede France estcapabled’élever son niveau de jeu et degommer ses faiblesses défensivesrécurrentes (déjà 8essais encaissésdans le tournoi et 19 plaquagesmanqués contre les All Blacks). Lesélectionneur possède-t-il encorequelques marges de manœuvre ?Un début de réponse sera donné,lundi26 septembre,avec l’annoncede l’équipe retenue pour affronterles Tonga, la « meilleure possible»,bien sûr, pour un match décisif envue de la qualification pour lesquarts de finale.

La tâche des Tonguiens s’an-nonce ardue : pour se qualifier, illeur faudra battre les Bleus deplus de sept points d’écart tout eninscrivant quatre essais. Pour cematch, les Bleus devraient enre-gistrer le retour d’Alexis Palisson,peut-être aussi celui de NicolasMas, et pourquoi pas les débutsdu petit nouveau, Jean-MarcDoussain, comme remplaçant.

Le choc de samedi n’a fait queconfirmer que les All Blacks méri-tent leur statut de favoris de lacompétition et que les Bleus nepeuventrivaliser sans une motiva-tion hors norme. « Chaque fois quela France a battu une grandenation du Sud, c’est parce qu’elle amis un engagement terrible », rap-pelait Marc Lièvremont en août.

Si une logique froide – et quel-que peu barbante – continue deprévaloir, l’équipe de France sequalifiera samedi prochain contrele Tonga, puis sera éliminée enquarts de finale par sa vraie « bêtenoire » en Coupe du monde, l’An-gleterre. Heureusement, surtouten rugby, rien n’est jamais écrit àl’avance. p

Philippe Périn

A l’aube de cette Coupe dumonde, le sélectionneurMarc Lièvremont nous

avait promis que les deux mois depréparation allaient lever tous lesdoutes entourant l’équipe deFrance. En termes de collectif etde condition physique, elle devaitnous permettre de nous mettreau niveau des nations du Sud etde pouvoir rivaliser. Samedi24 septembre, contre la Nouvelle-Zélande, les Bleus sont retournésà l’école : « Je sais… Je sais… Ce queje sais, c’est que je ne sais plusrien. » Nous avons été battus surles impacts individuels et collec-tifs. Même en mêlée fermée, cen-sée être notre point fort, nousavons été chahutés. Les erreurs dedéfense individuelles sont laconséquence logique de ces chan-gements perpétuels. Cela ne per-met pas de mettre en place uneorganisation collective huilée,complice, efficace. Pour preuve, larelation troisième ligne-charniè-re, fragilisée. Les Blacks se sontengouffrés dans ce canal avecgourmandise. Et quand on saitque la défense révèle souvent

l’état d’esprit d’une équipe, celapose problème. Les joueurs ne sesentent pas en sécurité, ont dumal à se situer dans ce système. Ilssont trop vite sous pression, cequi génère et accentue les erreursindividuelles.

Logique destructriceC’est également toute la prépa-

ration tactico-technique qui estremise en cause. Face au formida-ble triangle d’attaque néo-zélandais Carter-Nonu-Smith, onn’a pu voir que Maxime Mermozsur une interception et AurélienRougerie pour son courage… C’estsymptomatique des interroga-tions que pose cette préparation.Plus on avance dans cette compéti-tion, plus on se pose de questionsalors qu’on s’attendait à uneréponse en forme de montée enpuissance de l’équipe. Elle ne sem-ble même plus pouvoir assumerson statut d’équipe de contre. Cegroupe n’offre pas de solution.

Quant à la préparation psycho-logique, je ne prendrai qu’unexemple : comment peut-onconstituer une charnière Yachvili-

Parra alors que ces deux joueurssont en concurrence au poste dedemi de mêlée ? Quand tu n’aimespas celui qui est au bout de ta pas-se… Une forme de perversité s’ins-talle dans l’association de cettecharnière ainsi constituée.

D’ailleurs, cette gestion semblegénérer beaucoup de frustration àl’intérieur. Marc Lièvremontparaîtde plus enplus isolé. Parado-xalement, une seule victoire, enquarts de finale contre les Anglais,peut balayer toutes les critiques,cette logique de turnover perma-nent arrive à bout de souffle. Logi-que destructrice quand elle met àbas l’âme de cette équipe : la mêléefermée, seul secteur sur lequel onpouvait s’appuyer face aux Blacks.On en est là : logique implacabledes Blacks face à une logique encontreplaqué, la nôtre. Si cetteéquipe de France ne cesse de poserdes questions, le point de ruptures’annonce sûrement. Désormais,que peut-il bien se passer ? p

Pierre Berbizier est manageur duRacing Métro 92 et ancien entraîneur del’équipe de France (1991-1995).

Les Pumas argentins donnent l’estocade à l’Ecosse

Lyon - Bordeaux 3 - 1Toulouse - Nancy 1 - 0Evian-Thonon - Caen 2 - 4Nice - Dijon 1 - 1Valenciennes - Marseille 1 - 1Lille - Lorient 1 - 1Montpellier - Paris SG 0 - 3Auxerre - Sochaux 4 - 1Brest - Ajaccio 1 - 1Rennes - Saint-Etienne 1 - 1

Classement: 1. Paris SG 17points; 2.Lyon 17 ; 3. Toulouse 17 ;4.Montpellier 16; 5. Rennes 15;6. Lille 13; 7. Lorient 13; 8. Caen13; 9. Auxerre 11 ; 10. Dijon 10;11.Saint-Etienne 9; 12. Sochaux9; 13. Marseille 7 ; 14. Bordeaux7; 15. Evian-Thonon 7 ; 16. Valen-ciennes 6 ; 17. Nice 6 ; 18.Brest 6 ;19. Ajaccio 6; 20. Nancy 4.

Onnesaittoujourspassil’équipedeFranceestcapabled’éleversonniveaudejeu

Les résultats de la 8e journée de Ligue 1

Le All Black Ma’a Nonu prend le dessus sur Damien Traille, à l’Eden Park d’Auckland, samedi 24 septembre. BOGDAN CRISTEL/REUTERS

Aprèsla défaite, les Bleusprônent la«positive attitude»Echaudé par sa défaite contre la Nouvelle-Zélande (17-37), le XV de Francetente de se remobiliser pour passer, le 1er octobre, l’obstacle des Tonga

28 0123Mardi 27 septembre 2011

& vous

Bicyclette

BordeauxCorrespondante

D ans une ruelle en terre bat-tue, au centre de Blanque-fort, une commune de

15 000 habitants au nord de Bor-deaux, un atelier vélo pas commeles autres a ouvert ses portes enmai : l’atelier « des mobilitésmodernes ». Le nom est emphati-que mais les services pragmati-ques : dans les anciens locauxd’une imprimerie, la commune aouvert un atelier d’aide à la répara-tionde vélos sur le modeparticipa-tif – chacun donne un coup demain, client compris. Une person-ne est salariée à mi-temps, assistéed’une demi-douzaine de bénévo-les. On peut aussi construire –gra-tuitement – son propre vélo avecceux donnés par les habitants.

Au-delà de l’atelier, en régiemunicipale, la commune loue plu-sieurs types de vélos : VTC (vélotous chemins), vélos pliants, vélosà assistance électrique (VAE) etbi-porteurs (une remorque devantle vélo). Tous les VTC sont d’occa-sion. Pour chaque location – de5 euros mensuels pour un vélo deville, à 5 euros la semaine pour unVAE –, casque, antivol et paniersont prêtés.

«Faire tomber les blocages»Côté services, des stages de

remise en selle sont proposés parShirley Spies, la jeune animatricede l’atelier, qui intervient égale-ment à l’association bordelaiseVélo-cité. « On essaie de montrerquele vélo, c’est économique, écolo-gique et bon pour la santé », dit-elle.

Des partenariats et des rencon-tres sont organisés avec les rési-dents d’une maison de retraite,des jeunes de la MJC, d’une épice-rie sociale, avec les responsablesdes Pédibus [des parents serelayant pour emmener les grou-pes d’enfants à l’école] des écolesélémentaires, avec les collèges etlycées… « On tisse la toile petit àpetit en essayant de s’adapter auxdifférentsprofils etdemandes d’uti-lisateurs pour essayer de faire tom-ber les blocages de la pratique de labicyclette», souligne Virginie Lan-nes, chargée de mission à la mairiesur les questions de développe-ment durable et de citoyenneté.

Mais en zone périurbaine, à13 km du centre de Bordeaux, ledéfi est difficile, malgré 20 km depistes cyclables sécurisées, desaménagements spécifiques etdésormais le prêt de vélos : « Il y aun combat très dur dans une villetelle que la nôtre, reconnaît Vin-cent Feltesse, le maire de Blanque-fort, qui appartient au Club des vil-les cyclables, une associationd’élus de 1 500adhérents. Les gensont le « réflexe voiture» pour tout :le travail, l’école, les commerces, lesservices… C’est une vraie bagarre àmener et l’atelier est l’un desmoyens pour la gagner. » p

Claudia Courtois

Enselle,citoyens!

Lecode (vestimentaire) a changéDécontraction oblige, la tenue est moins conventionnelle au bureau. Pas toujours facile de trouver le ton juste

Mode de vie

P assage obligé de septembre :ranger ses habits d’été, faireletri,etsileportefeuilleleper-

met, s’acheter quelques vêtementspour faire bonne figure au travail.Seule contrainte : être de bon ton,suivrele fameuxcode vestimentai-re implicite ou explicite de l’entre-prise. Deux Français sur dix affir-ment jouir d’une « liberté totale »pour se vêtir au travail, selon unsondage réalisé auprès de 1 604internautes par le site de recrute-ment Monster en septembre2010.Lamêmeproportiondoit,enrevan-che, suivre un « dress code » strict.Quant aux six autres, ils naviguentà vue, veillant à ce que leur tenue«nenuisepasàl’imagedel’entrepri-se», dixit Monster.

Alors que France 3 s’est dotée,mercredi 21 septembre, d’une

« charte vestimentaire » afin quele style de ses présentateurs« parle d’une seule voix », selon ledocument, Le Monde a sondé desexperts ès mode pour compren-dre d’où viennent ces diktats etquelles tendances se dessinent.

Ces règles sont apparues enEurope au début du XIXe siècle. « Lasociété industrielle et bourgeoise aimposé des codes de neutralité auxhommesaveclecostume.Laperson-ne ne devait pas trop marquer sonstylenitémoignerd’unepersonnali-té qui dépasse le cadre de son tra-vail. Il s’agissait d’être un bon pro-fessionnel et de ne pas séduire »,explique Xavier Chaumette, histo-rien de la mode. Le salarié doitalors donner « une image basiquequi puisse plaire au plus grandnombre ». Quant au tailleur fémi-nin, « il s’impose à la fin du XIXe siè-cle dans les milieux moyens et

urbains», ajoute-t-il. Ces modèless’étendront rapidement aux socié-tés industrielles, puis aux colonies.

Aujourd’hui, dans les secteursde la diplomatie, de la finance oudu conseil, chez les cadres supé-rieurs et les commerciaux, descodes assez stricts perdurent.« C’est encore l’uniforme du costu-me bleu ou gris et des chaussuresnoires », note Xavier Chaumette.

En France, l’employeur peutlégalement apporter des limites àla liberté de se vêtir s’il peut invo-quer une raison légitime quant à latâche à accomplir et si cette limita-tion est proportionnée au butrecherché (code du travail, articleL. 1121-1). Selon Xavier Chaumette,ces codes sont conservés par utilitémanagériale:«C’est,dansuneorga-nisationhumaine,une façondefor-mater pour mieux contrôler.»

Ces règles sont-elles encore en

phase avec l’époque ? Vincent,cadre supérieur dans une banque,qui souhaite garder l’anonymat,en doute. Pour ce quinquagénaire,le secteur financier « s’est figé,alors que la société et les clients ontévolué ». Il ose le sobre col roulésous la veste. « Mais en interne,c’est encore mal vu. J’ai pourtantl’impression que ma tenue plusdécontractée facilite les échangesavec mes clients chefs d’entrepriseet, de fait, me rend meilleur profes-sionnel », constate-t-il.

Bien dans sa peauXavier Chaumette approuve.

« Les codes imposés sont souventassez ringards », reconnaît-il.D’ailleurs, décennie après décen-nie, l’Europe perdde son influence.Les diktats du Vieux Continent« ontpris du plomb dans l’aile surlaCôte ouest des Etats-Unis dès la fin

de la seconde guerre mondiale »,analyse Frédéric Godart, sociolo-gue de la mode à l’Insead (Instituteuropéen d’administration desaffaires) et auteur de Sociologie dela mode (La Découverte, 2010). « Latenue décontractée (casual wear)du vendredi est apparue dans lesannées 1960, puis s’est généralisée.Le monde du conseil et des ban-ques,derniers bastionsdu formalis-me, a cédé dans les années 1990. »Date phare : IBM délaisse, en 1995,l’emblématique uniforme chemi-se blanche, costume bleu nuit.

Car, parallèlement, « certainesactivités créatives, comme le ciné-ma, la mode et la publicité, ont prisle pouvoir, entraînant un profondchangement de valeurs, noteM. Godart. Ce mouvement a étéamplifié par l’explosion d’Internet.Dans la Silicon Valley, créatifs etingénieurs se sont rencontrés, défi-nissant de nouvelles modes ».

Pour Laurent, 40 ans, qui tra-vailledansuneagencemédiaàLon-dres, « le dress code n’existe pas. Ils’agit d’être bien dans sa peau. Cepeut être jean et T-shirt ou mêmeshort en été. Le tout doit être décent,bien entendu ». Ce cadre s’interro-ge : «Pourquoi nepas projeter notreimage réelle plutôt que de se dégui-ser ? » Des revendications existen-tielles auxquelles font désormaisface les entreprises en quête desmeilleurs talents. « Dans le mondedu conseil, à Amsterdam ou en Bel-gique, le côté informel prédomine,sauf pour un rendez-vous avec leclient, ajoute M. Godart. Mais cemouvement est plus lent à arriverau Royaume-Uni et en France. »

Dans ce contexte informel,d’autres codes sont implicites et« bien plus difficiles à décrypter »,analyse-t-il. Tout le monde ne peutpas, comme Mark Zuckerberg, fon-dateur de Facebook, arriver entongs à une réunion. Les interroga-tions sont nombreuses : quelT-shirt mettre ? De quelle couleur ?Quelle forme de pantalon ? « L’effetde mode joue à plein. Et pour quel-qu’un qui débarque, cela demandeun temps de socialisation poussépour savoir comment s’habiller »,poursuit-il. Certains choisissent lemimétisme.Quin’apasvuuncollè-gue changer d’apparence pour res-sembler à un supérieur ? Formelsou pas, les codes sont aussi unefaçon de « rassurer certains en don-nant un sentiment d’appartenan-ce», explique M.Chaumette.

Dans une société mondialisée,quelles seront les tendances dedemain ? Europe et Etats-Unisjoueront-ils encore un rôle phare ?« L’adoption du costume par leJaponet laChine sontdes puresimi-tationsdel’Occident, remarqueFré-déric Godart. Mais on ne sait pasvraiment comment le continentasiatique va évoluer. Nous assis-tons déjà à des mutations intéres-santes. La Malaisie veut ainsi pro-mouvoir un costume formel plusproche de son identité. » Le codevestimentaire est devenu un indi-cateur insoupçonné, mais bienréel, de puissance économique. p

Laure Belot

Petitsconseils de prospour éviterle détailqui tue

Lebestiaire inspire les artistesDansle parcet lechâteaud’Avignon, aux Saintes-Maries-de-la-Mer, sous la forme d’œuvres contemporaines, les ani-maux sont à l’honneur jusqu’au 31 octobre (sculpture de Joa-na Vasconcelos, ci-contre). A Paris, au Musée de la chasse etde la nature, l’artiste Françoise Petrovitch a installé, souventmalicieusement, ses œuvres – sculptures, céramiques, des-sins à l’encre, peintures, etc. – posant son regard sur l’anima-lité de l’homme. Et, dans toute la France, une quarantaine demonuments gérés par le Centre des monuments nationauxcélèbre les animaux avec l’intervention d’une soixantained’artistes (la sculpture monumentale Ahghafarnese, de Fabri-ce Langlade, photo à l’extrême gauche). A ne pas rater nonplus, à partir de novembre, l’exposition « Bêtes Off » à Paris,qui clôt la manifestation. p Mélina Gazsi(PHOTOS KEINEFENN ; ATELIER JOANA VASCONCELOS/DMF LISBONNE)

« Bêtes et hommes, si loin, si proche… », château d’Avignon, aux Saintes-Maries-de-la-Mer (Bouches-du-Rhône). Culture-13.fr. Jusqu’au 31 octobre.Françoise Petrovitch, Musée de la chasse et de la nature,62, rue des Archives, Paris 3e. Jusqu’au 18 janvier 2012. Chassenature.orgMonuments et animaux, Monuments-nationaux.fr« Bêtes Off », Conciergerie, 1, quai de l’Horloge. Paris 1er. Du 16 novembreau 11 mars 2012.

UBS ne s’intéresse plus auxdessous des banquières

OLIVIER CULMANN/TENDANCE FLOUE

Les dessous des banquières dugroupe suisse UBS ont déjà faitcouler beaucoup d’encre. Labanque a édicté, en automne2010, un code de 44 pages,allant jusqu’à décrire les colo-ris adéquats des sous-vête-ments à porter. Révélé par lapresse, le document avaitdéclenché l’hilarité, y comprissur le site «Hereisthecity », ras-semblant pourtant l’intelligent-sia financière. « Il y a eu uneréaction générationnelle derejet chez les moins de 30 ans »,commente Fréderic Godart,sociologue de la mode. Depuis,la banque a rétropédalé.En cette rentrée 2011, le codevestimentaire des 1 500 sala-riés de « front office »,c’est-à-dire ayant un contactavec les clients des agences,tient en une phrase : « Tailleuret costume noirs, chemise blan-che, foulard et cravate rou-ges », précise Jean RaphaelFontannaz, porte-parole dugroupe.

QU’ON LE VEUILLE ou non, notretenue au travail est remarquée,commentée, voire… analysée. « Orla majorité des jeunes n’ont pasvécu dans des codes bourgeois etn’ont plus conscience de l’effet queleur apparence produit sur lesautres, explique Xavier Chaumet-te, historien de la mode. Afin d’évi-ter les impairs, il est préférable d’al-ler vers des codes classiques. »Petits conseils de pros pour éviterle détail qui tue.

Evitez la chemisette Apparuedans les années 1920, la chemise àmanches courtes, qui laisse doncvoir les avant-bras, est, selonXavier Chaumette, « à bannir si onveut être élégant ». Les chemisesdoivent être plutôt sobres, « uniesou avec par exemple des motifs dis-

crets comme le prince-de-galles».Quant au tissu, il ne doit pas êtretrop léger, « afin que les tricots depeau éventuels ne se voient pas ».

Soignez les quatre «C»:chaussettes, col, ceinture,chaussures « Oubliez les chaus-settes blanches ou fantaisie, sauf sicela fait partie d’un look très étu-dié, explique M. Chaumette, etoptez plutôt pour du noir ou dubleu marine. » La Rolls de la chaus-sette reste celle en fil d’Ecosse, et,pour encore plus d’élégance,« choisissez-les montantes pourmasquer la jambe lorsque vousêtes assis ». La ceinture est sobre–notamment la boucle –, sombreet pas trop large. Quant au col, « ilne doit pas être boutonné », ajouteDarrel Moos, distributeur de la

marque haut de gamme Brioni.«Et il est préférable qu’il ait de peti-tes baleines pour bien se tenir. »Les chaussures, elles, qu’ellessoient habillées ou plus simples,doivent être propres et entrete-nues, y compris les talons. « C’estanalysé comme un signe rassu-rant », ajoute M. Moos.

Bannir l’extralarge Les années1980 ont marqué toute une géné-ration d’hommes qui continuentà porter le pantalon très haut,quasiment au nombril. « C’esttotalement dépassé, expliqueM. Chaumette. Tout comme lesvestes trop larges. Les Françaisachètent oversize. Cela ne se faitplus depuis vingt ans. » Manchesde veste et chemise « doiventavoir un centimètre de décalage

en longueur », ajoute DarrelMoos. Les revers aux pantalonssont « à oublier », poursuit-il, « etles costumes noirs sont à réserveraux cérémonies ». La chemise seporte dans le pantalon depuis queles tailles sont basses, « sauf dansun milieu artiste, avec une jolieveste », précise M. Chaumette.

Enfin, en vrac, ces observa-teurs déconseillent le tee-shirtdans le pantalon, les dessous tropvisibles pour les femmes, ainsique les chemisiers trop ajustésdont les boutons bâillent.

Quant aux bijoux, le conseilest d’en porter « peu, car ils sonttrès connotés socialement ». Ulti-me recommandation : évitez laterrible cravate sur l’épaule lors-que vous déjeunez. p

L. Be.

290123Mardi 27 septembre 2011

A la traceSamedi en page2, aujourd’hui en page30. Quel chemin jusque-là ! Ilm’a fallu parcourir les terres étrangères des pages International, survo-ler les joutes politiques et sociales des pages France, sortir indemne desaléas boursiers et des mesures d’austérité des pages Economie et éviterde m’emmêler les crayons en pages Culture. Bien qu’aux premièresloges d’une météo capricieuse, ce nouvel espace offre une vue imprena-ble. Une inquiétude pourtant : ai-je été suivie ou ai-je laissé quelquemalencontreuse empreinte dans les pages visitées ?Un coup d’œil dans mes rétroviseurs. Aucune trace sur le papier. Et surInternet, ma traversée serait-elle passée inaperçue? «L’impression de faci-lité qui domine l’univers du Web masque la réalité d’une surveillance dis-crète et active, souvent à votre insu», souligne le site de la Commissionnationale de l’informatique et des libertés (Cnil.fr) qui, à la rubrique «Vostraces», m’invite à découvrir comment je suis «pistée, tracée, profilée ».«Démarrer l’expérience». Une jeune femme m’annonce d’emblée quela configuration technique de mon ordinateur n’a pas de secret pour elle.Elle ne bluffe pas. Elle connaît l’adresse IP de ma machine et le nom d’hô-te associé. Le strip-tease continue. Elle perce aussi à jour mon systèmed’exploitation, mon navigateur, la résolution de mon écran, jusqu’auxderniers sites visités. Observer ce que l’on peut faire des cookies? Oui,volontiers. Je renseigne mon pseudo, l’année de ma naissance et monhumeur du jour. « Nous venons d’insérer le cookie cnil-cookie_traces survotre ordinateur. Supprimez-le de votre disque dur». Sur-le-champ !Quels indiscrets moteurs de recherche qui utilisent et conserventmes recherches pour mieux me connaître ! Ainsi en va-t-il d’une inno-cente investigation qui me livre illico en pâture à une régie publicitaire.Dernière suggestion de la CNIL, celle de partager mon expérience via lesréseaux sociaux Facebook ou Twitter. Plutôt que de la disperser auxquatre vents, cantonnons-la ici. p

Société Initiative mal adaptéeJean-François Copé et Hervé Mariton, respectivement président de l’UMPet député UMP, ont proposé que chaque jeune français fasse une «allé-geance aux armes» lors de sa Journée d’appel de préparation à la défense.Même si nous sommes conscients du caractère hautement électoralistede cette sortie, nous répondons à MM. Copé et Mariton que les jeunes n’at-tendent pas de vieilles recettes réactionnaires mais un véritable engage-ment républicain. Nous partageons pourtant le constat dressé par lamajorité présidentielle: le sentiment républicain a été mis à mal. Suppres-sion de la carte scolaire, affaiblissement de l’éducation nationale, climatsécuritaire jusque dans les lycées, chasse aux camarades de classe immi-grés… Rien ne nous aura été épargné!Nous proposons, par exemple, à nos (ir)responsables politiques la miseen place d’un service civique obligatoire qui permettrait à tous les jeunes,pendant quelques mois, de s’investir dans la vie associative de leur pays.

Théo Iberrakene, Douai (Nord)

Courriels

C’est tout Net! Marlène Duretz

Lundi26septembreTF1

20.45 Le Client.Téléfilm. Arnauld Mercadier. Avec GérardDarmon, Eric Berger (France, 2011).22.30 New York unité spéciale.Série. Fin tragique (S12, 24/24, inédit) V ;Passage à l’acte ? (saison 10, 2/22) V.Le Trio infernal (saison 3, 21/23) V (145 min).

FRANCE2

20.35 Castle.Série. Triple tueur (saison 3, 6/24, inédit) ;Où est Angela ? Double face (S1, 9 et 10/10).22.45 Mots croisés.Magazine. Duel : Actualité et bilan d’un quin-quennat. Avec Henri Guaino et Edwy Plenel ;Débat : Karachi et ses conséquences politiques.Avec Sylvie Pierre-Brossolette, Nicolas Beytoutet Nicolas Domenach (85 min).

FRANCE3

20.35 Les N˚ 1 du rireet de la chanson. Divertissement.22.35 Soir 3.23.00 Mon meilleur ennemi,Klaus BarbieFilm Kevin MacDonald (Fr. - GB, 2007) U.0.25 La Case de l’oncle Doc (60 min).

CANAL+

20.50 Platane.Série (saison 1, 10 à 12/12, inédit).22.30 Spécial investigation.Fonctionnaires, taisez-vous ! U (60 min) .

ARTE

20.40La Tour infernalep

Film John Guillermin et Irwin Allen. AvecSteve McQueen, Paul Newman (EU, 1974).23.20Musica - Joshua Bell.Le Violoniste nomade. Documentaire (All., 2007).0.15 La Femme du pharaonp

Film Ernst Lubitsch. Avec Emil Jannings, LydaSalmonova, Paul Wegener (1921, muet, 115 min).

M6

20.45 Mesrine : l’instinct de mort pp

Film Jean-François Richet. Avec Vincent Cassel,Cécile de France, Gérard Depardieu (2008) V.22.40 Alerte évasion.Jacques Mesrine : l’évadé public n˚ 1. Documentaire.0.00 Michel Vaujour se fait la belle par les airs.Documentaire (France, 2011, 70 min).

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Météorologue en directau 0899 700 703

1,34 € l’appel + 0,34 € laminute7 jours/7 de 6h30-18h

Nord-Ouest

Ile-de-France

Nord-Est

Sud-Ouest

Sud-Est

Jours suivants

www.meteonews.fr

Températures à l’aube l’après-midi

Front chaud Front froid

DépressionAnticyclone

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En EuropeAmsterdamAthènesBarceloneBelgradeBerlinBerneBruxellesBucarestBudapestCopenhagueDublinEdimbourgHelsinkiIstanbulKievLa ValetteLisbonneLjubljanaLondresLuxembourgMadridMoscouNicosieOsloPragueReykjavik

RigaRomeSofiaStockholmTallinTiranaVarsovieVienneVilniusZagrebDans le mondeAlgerAmmanBangkokBeyrouthBrasiliaBuenos AiresDakarDjakartaDubaiHongkongJérusalemKinshasaLe CaireMexicoMontréalNairobi

New DelhiNew YorkPékinPretoriaRabatRio deJaneiroSéoulSingapourSydneyTéhéranTokyoTunisWashingtonWellingtonOutremerCayenneFort-de-Fr.NouméaPapeetePte-à-PitreSt-Denis

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Amiens

Metz

Strasbourg

Orléans

Caen

Cherbourg

Rennes

Brest

Nantes

Poitiers

Montpellier

Perpignan

Marseille

Ajaccio

Nice

Clermont-Ferrand

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Mercredi

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EUROPE: Soleil et grande douceur du Portugal jusqu’à l’Ukraine

En Europe12h TU

Mardi, des hautes pressions protégerontla France du courant perturbé. Malgré laprésence de quelques passagesnuageux demoyenne et de hautealtitude, un temps sec et généralementensoleillé s'imposera sur l'ensemble dupays, après dissipation d'éventuellesgrisailles matinales. Les températuresafficheront des valeurs estivales,comprises entre 23 et 31 degrés de Lilleà Toulouse.

Saint VincentCoeff. demarée

LeverCoucher

LeverCoucher

Conditions estivales

Aujourd’hui

météo & jeux écrans

Mardi27 septembreTF1

20.45 Football.Ligue des champions (1re phase, 2e journée, gr. D) :Lyon - Dinamo Zagreb. Au stade Gerland, à Lyon.22.50 Les Experts : Manhattan.Série. Chambre forte. Poupées cassées.Esprit d’équipe (saison 2, 11, 9 et 10/24) U.1.10 L’Affiche du soir. Magazine (60 min).

FRANCE2

20.35 Histoires en série.Quand le mensonge s’installe dans nos vies.Au sommaire : Une double vie sans issue ;L’Incroyable Imposture de l’enfant loup ; etc.22.45 Réunion de famille.Présenté par Jean-Luc Delarue (125 min).

FRANCE3

20.35 Mission sacrée.Téléfilm. Daniel Vigne. Avec Christophe Malavoy,Micky Sébastian, Eric Fraticellii (France, 2011).22.05 et 23.40 Ce soir (ou jamais !).Magazine présenté par Frédéric Taddeï.23.15 Soir 3 (25 min).

CANAL+

20.50 L’Arbre pp

Film Julie Bertuccelli. Avec Charlotte Gainsbourg,Morgana Davies (Australie - France, 2010).22.35 Football.Ligue des champions (1re phase, 2e journée).23.45 Cleveland contre Wall Streetpp

Film Jean-Stéphane Bron. Avec Barbara Ander-son, Keith Taylor (Fr. - Sui., 2010, v.o., 98 min).

ARTE

20.39 Thema -Parents - profs : la crise !20.40 C’est mon élève, c’est mon enfant.Documentaire. Isabelle Cottenceau (Fr., 2011).21.35 Jamais sans les parents. Documentaire.22.00 Débat. Animé par Daniel Leconte.23.35 The Killing. Série (S2, 7 et 8/10).0.35 Die Nacht/La Nuit (50 min).

M6

20.45 Desperate Housewives.Série. Ce qui nous fait peur. L’Humiliation.Joyeux Thanksgiving (S7, 6 à 8/23, inédit).23.15 Les Français,l’Amour et le Sexe.[5-6/8]. Le sexe autrement... tout est permis ! V.Libertinage et nouvelles tendances W (90 min).

Lessoiréestélé

Les résultats du Loto sont publiés dans nos éditionsdatées dimanche-lundi, mardi, mercredi et vendredi.Tous les jours Mots croisés et sudoku.

Sudoku n˚11-230 Solution du n˚11-229

Rédaction : 80, boulevard Auguste-Blanqui,75707 Paris Cedex 13Tél. : 01-57-28-20-00 ; télex : 202806F ;

télécopieur : 01-57-28-21-21Courrier des lecteurs : par télécopie : 01-57-28-21-74 ;

Par courrier électronique : [email protected]édiateur : [email protected]

Abonnements : par téléphone : de France 32-89(0,34¤ TTC/min) ; de l’étranger : (33) 1-76-26-32-89.

Sur Internet : www.lemonde.fr/abojournal/Tarif 1 an : France métropolitaine : 394 ¤

Internet : site d’information: www.lemonde.frfinances : http://finance.lemonde.fr

Emploi : www.talents.fr/ Immobilier: http ://immo.lemonde.fr

Documentation : http ://archives.lemonde.frCollection : Le Monde sur CD-ROM : CEDROM-SNI 01-44-82-66-40

Le Monde sur microfilms : 03-88-04-28-60

Résultats du tirage du samedi 24 septembre.4, 33, 36, 40, 41 ; numéro chance : 6.Rapports :5 bons numéros et numéro chance : pas de gagnant ;5 bons numéros : pas de gagnant ;4 bons numéros : 2 686,50 ¤ ;3 bons numéros : 15,90 ¤ ;2 bons numéros : 6,80 ¤ ;Numéro chance : grilles à 2 ¤ remboursées.Joker : 2 406 948.

Motscroisés n˚11-230

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5 6 8 7Realise par Yan Georget (http://yangeorget.blogspot.com)

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Tres facileCompletez toute lagrille avec des chiffresallant de 1 a 9.Chaque chiffre ne doitetre utilise qu’uneseule fois par ligne,par colonne et parcarre de neuf cases.

Lesjeux

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Solution du n° 11 - 229HorizontalementI. Plaisanterie. II. Réclusion. Nu.III.Onc. Ce. Iléus. IV. Fil. Blinis.V. Initiales. Té.VI. Téméraires.VII. Al. Rs. Nat.VIII.Untel. Titras.IX. Rue. Amer. Are.X. Sismographes.

Verticalement1. Profiteurs. 2. Lénine. Nui (uni).3. Acclimatés. 4. Il. Télé. 5. Suçoir.Lao. 6. Ase. Aar. MG. 7.Ni. Blister.8. Toiler. Ira. 9. Enlisent. 10. En.Sarah. 11. Inuit. Tare. 12. Eusses.Ses.

Philippe Dupuis

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1. Il faut les exprimer pour qu’ilssoient pris en compte. 2. Suit lescomptes de près. Tour complet.3.Donne un plus grand choix auxamateurs de toiles. 4. Partd’ombre. Restent après lamoisson.5. Serré pour être plus fort. Serviced’un autre temps. 6. Accord. Pèrebien populaire. 7. Passer de pis enpis. Vaut bienmieux que la force.8. A droite dans l’ouvrage. Titre del’Empire ottoman. 9.Massacrai àcoups de ciseaux. 10.Descendu.Exprime. Sorties de la caisse.11.Un homme dans lesmoteurs.12. Bon endroit pour la ramener.

I. Se débrouille pour en faire voirunmaximum. II. Retient le plusgros au passage. III. Le dessus dela croûte. Fit son entrée. IV. Seretrouve comme deux ronds deflan. Romains.V. Reste à réglerdans les comptes. Ne servent plusque dans les assemblages.VI. Enpanne d’aisance. Bien située.VII. Repris pour correction.Utiliser des chemins de traverse.VIII. Etendre les cordages. Donnéavant exécution. IX. S’ajoutentsouvent à nos paiements. Grandesouvertures sur le large.X. Sedébrouille pour que vous nesentiez rien.

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AU CARNET DU «MONDE»

NaissancesEmeline ROYER

etStéphane LAPIERRE

sont heureux d’annoncer la naissance de

Nathan,

le 22 septembre 2011.

Nadège et Pascal ROYER,Claudine et Alain LAPIERRE,

Eve et Noémie,partagent leur bonheur.

DécèsM. Claude Davaille,

son époux,Anne Davaille-Ribe et Neil Ribe,Florence Davaille,

ses enfants,Isabelle et Aline,

ses petites-fillesAinsi que toute la famille,

ont la tristesse de faire part du décès de

Mme Monique DAVAILLE,néeMACQUET,

survenu le 23 septembre 2011, à Paris.

La cérémonie religieuse sera célébrée lemercredi 28 septembre, à 15 h 30, enl’église de Saint-Rémy-lès-Chevreuse oùl’on se réunira.

14, allée de Port Royal,91190 Gif-sur-Yvette.

Charles et Edith,Georges Lionel,Isabelle,

ses enfants,Ses petits-enfantsEt arrière-petits-enfants,

ont la douleur de faire part du décès de

Georges DELANNOY,ancien élève de l’Ecole Polytechnique,directeur général du CERCHAR,

directeur généraldes Houillères du Centre-Midi,chevalier de la Légion d’honneur,

officier dans l’ordre national du Mérite,

survenu le 19 septembre 2011,à l’âge de quatre-vingt-neuf ans.

Les obsèques ont eu lieu dans l’intimitéfamiliale.

74, rue Saint-Didier,75116 Paris.

Jean Marc, Christine, Aurélie et ElsaGuillot,ses fils, belle-fille et petites-filles,Gérard et Jacqueline Edelheit,

son frère et sa belle-soeur,

ont la tristesse de faire part du décès de

Geneviève EDELHEIT,

survenu le 21 septembre 2011dans sa soixante-douzième année,à La Réole (Gironde).

13, Muraille,33210 Saint-Pardon-de-Conques.208, avenue du Maine,75014 Paris.

Bernard FUCHS,chirurgien dentiste,

21 juin 1934 - 17 septembre 2011.

Saint-Rémy-lès-Chevreuse. Toulon.Paris. Corte.

Félix Gambini,son époux,Josette Trucy,

sa soeur,Lucie Lausanne,

sa belle-sœuret ses enfants et petits-enfants,Les familles parentes et alliées,Ses très chers et fidèles amis,

ont la profonde tristesse de faire part dudécès de

Marie GAMBINI,née CANCELLIERI,

chevalier de la Légion d’honneur,officier de l’ordre national du Mérite,

chevalier de l’ordre nationaldes Palmes académiques,

survenu le 22 septembre 2011.

La cérémonie religieuse se tiendrale mercredi 28 septembre, à 11 heures,en l’église paroissiale de Saint-Remy-lès-Chevreuse.

L’inhumation aura lieu dans le caveaufamilial, le vendredi 30 septembre et seraprécédée à 10 heures, d’une messe enl’église de l’Annonciation à Corte(Corse).

Cet avis tient lieu de faire-part.

Philippe Langlois,son époux,Pierre,

son filset son épouse, Catherine,Paul,

son petit-fils,Sylvie, Marie-José et Laurence,

ses nièces,Les familles Policard, Martinez, Holt,

Buret, Ruesche, Le SaintEt tous ses amis,

ont la douleur de faire part du décès de

Jeanne LANGLOIS,née POLICARD,

survenu le 9 septembre 2011,à l’âge de quatre-vingt-un ans, après unevie exemplaire et des dernières années decourage et de stoïcisme.

L’inhumation a eu lieu au cimetière duPère-Lachaise, le 14 septembre.

Monique Canto-Sperber,directrice de l’École normale supérieure,Les professeurs et élèves

de l’École normale supérieure,

ont appris avec émotion le décès du

professeur Jean LECLANT,ancien élève de l’École normale

supérieure (promotion Ulm Lettres 1940),grand orientaliste,

professeur émérite d’égyptologieau Collège de France,

secrétaire perpétuel de l’Académiedes inscriptions et des belles lettres,membre de l’Institut françaisd’archéologie du Caire (IFAO),directeur de la mission des experts

archéologues en Ethiopie, de la missionarchéologique française de Saqqarahet de la mission archéologique française

au Soudan.

Jean Leclant était un esprit d’une grandeélégance, un maître dont se souviendrontlongtemps ses élèves, ses collaborateurs etamis.

École normale supérieure,45, rue d’Ulm,75005 Paris.

Fontainebleau.

Claire et François Durand-Ruel,ses enfants,Diana et Manon,

ses petites-filles,Les familles Roy et DelachambreAinsi que toute la famille,

ont la tristesse de faire part du décès du

docteur André LEMOINE,chevalier de la Légion d’honneur,

commandeurde l’ordre national du Mérite,

ancien interne des Hôpitaux de Paris,ancien chef de clinique chirurgicale

à la Faculté,ancien attaché consultantdes Hôpitaux de Paris,

ex-chef de service d’orthopédietraumatologie de l’hôpital Léopold Bellan,

chirurgien honoraireà l’Hôpital américain de Paris,

survenu à Fontainebleau, le 24 septembre2011, à l’âge de quatre-vingt-dix ans.

La cérémonie religieuse sera célébréele mercredi 28 septembre, à 16 heures, enl’église Saint-Louis de Fontainebleau,suivie de l’inhumation au cimetière deFontainebleau.

Ni fleurs ni plaques.Une messe sera célébrée ultérieurement

à Paris.

Cet avis tient lieu de faire-part.

Claire et François Durand-Ruel,4, villa des Beaux-Arts,92100 Boulogne.

Jean-Philippe,son fils,Florence,

sa belle-fille,Mathilde, Delphine et Raphaël,

ses petits-enfants,

ont la grande tristesse d’annoncer le décèsbrutal de

Michèle MERX,

survenu le jeudi 22 septembre 2011.

E l l e s e r a i n humée l e ma r d i27 septembre, à 15 heures, au cimetièred’Alfortville, 182, rue Etienne Dolet.

Antoine Ranson et Isabelle Gaudin,Christine et Christophe Ranson,

ses enfants,Alexandre, Cécilia, Joséphine,

ses petits-enfantsEt leur famille,

ont l’immense tristesse de faire part dudécès de

Margareta RANSON,née LEVIN,

survenu à Paris, le 23 septembre 2011,à l’âge de soixante-dix-neuf ans.

Les obsèques auront lieu le vendredi30 septembre, à 15 heures, au crématoriumdu cimetière du Père-Lachaise, Paris 20e.

A vous tous qui aimiez célébrer l’amitiéet la joie au restaurant

Le Vieux Casque,

sachez que notre amie,

Claude RICHARD,

nous a quittés, sereine et apaisée,entourée d’affection,le 24 septembre 2011, à Paris.

Une bénédiction aura lieu le jeudi29 septembre, à 14 h 30, en l’église Saint-Sulpice, place Saint-Sulpice, Paris 6e,suivie de l’inhumation au cimetière deMontfort-l’Amaury (Yvelines).

40, rue Jacob,75006 Paris.

Virginie, Aymée, Éric et AntoineRogé,ses enfants,Luc Famibelle,

son petit-fils,Elise Antic

et ses enfants,Annie Legrand,Christine Tourasse,

ont la tristesse de faire part du décès du

docteur Émile ROGÉ,neuro-psychiatre

et psychanalyste jungien,

survenu le 23 septembre 2011,à l’âge de soixante-dix-huit ans.

La cérémonie sera célébrée le mercredi28 septembre, à 14 h 30, en l’église Notre-Dame-de-l’Assomption, 88, rue del’Assomption, Paris 16e.

L’inhumation aura lieu dans le Quercy,dans l’intimité familiale.

Cet avis tient lieu de faire-part.

Cécile Heatley,Alain Roy,Elisabeth Gérard,

ses enfants,Ses petits-enfants,Ses arrière-petits-enfants,

ont la tristesse de faire part du décès de

Jean ROY,musicologue, critique musical

et écrivain,commandeur de la Légion d’honneur,

commandeurde l’ordre national du Mérite,

dans sa quatre-vingt-seizième année.

L’inhumation aura lieu le mercredi28 septembre, à 14 h 30, au cimetièredu Montparnasse, 3, boulevard EdgarQuinet, Paris 14e.

Cet avis tient lieu de faire-part.

5, rue Lhomond,75005 Paris.

Max Moulin,M. et Mme Huet,M. et Mme Moulin,M. et Mme Conscience,

leurs enfants et petits-enfants,Ses amis, ses collègues,

ont la tristesse de faire part du décès de

Jacques VILAIN,conservateur général du Patrimoine,directeur honoraire du Musée Rodin,directeur honoraire du FRAME,chevalier de la Légion d’honneur,

officier dans l’ordre des Arts et des Lettres.La messe d’enterrement aura lieu

en l ’ég l i se d’Ét roussa t (Al l ie r ) ,le 28 septembre 2011, à 14 h 30.

Des dons peuvent peuvent être faits à laFondation du Patrimoine pour larestauration de l’église Saint-André deTaxat

Cet avis tient lieu de faire-part.

3, allée Marie Laurent,75020 Paris.12, rue du Puits Petit,19200 Ussel.

Anniversaires de décèsGayel,

aujourd’hui tu aurais eu vingt-trois ans.

Puisses-tu trouver la paix, la joie,la consolation et la plénitude dans tonailleurs.

Maman, Gaty.

SouvenirLe 27 septembre 2002.

Elisabeth RENIER-LAJEUNIE.

C’était hier... Elle n’a pas quitté noscœurs.

Marie-José Lajeunie,Dominique, Nicolas et Antoine Renier.

Communications diversesL’AJTM,

Alliance pour un judaïsmetraditionnel et moderne,

célèbrera les offices de Rosh Hashanales 28 et 29 septembre 2011,

rue du Pasteur Wagner, Paris 11e,et de Kippour, les 7 et 8 octobre,à l’Espace Saint-Martin, Paris 3e,autour du rabbin Gabriel Farhi

et vous présente ses meilleurs vœuxpour l’année 5772.

Contacts : 06 07 18 37 87ou www.ajtm.org

L’Église réformée de Paris-Batignollesorganise le samedi 1er octobre 2011,

la 9e Nuit de la Parole,avec huit prédications de pasteurs :

Alain Houziaux,La foi aide-t-elle à vivre ou la foi comme

désinvolture ? (Écclésiaste 11),Vincens Hubac,

Le retournement (Jean 20),Jean-Pierre Rive,

Je crois parce que je choisis ma vie?(Deutéronome 30),James Woody,

« C’est pas ma faute ! »(2 Corinthiens 12),Antoine Nouis,

L’amitié de Dieu (Exode 33),Gill Daudé,

Le temps de croireou la création du temps ? (Genèse 1),

Frédéric Chavel,Une voix forte (Marc 15),Jean-Marie de Bourqueney,

La foi en question ;la foi est une question (Marc 8),

le samedi 1er octobre 2011de 21 heures à 1 h 15 du matin,

au Temple réformé,44, boulevard des Batignolles, Paris 17e,

(métro Rome).

La France en situation postcoloniale ?Deux journées de débats, concert,

lectures de textes,les 30 septembre et 1er octobre 2011à l’Ecole normale supérieure,45, rue d’Ulm, Paris 5e

Programme complet sur:www.parisduvivreensemble.org

a Spécial éducation La journée de mobilisationdes enseignants Les syndicats du public et du privé ont appelé lesprofesseurs à faire grève et à manifester, mardi 27septembre, pour dénon-cer «les dégradations des conditions d’apprentissage des élèves et de tra-vail des personnels ». Reportage à Paris et analyse de la mobilisation.

a Chat Les financiers de l’ombre sont-ils au cœurde la crise de la zone euro? Débat en direct, mardi 27 septembre,à 14 h30, avec Marc Roche, correspondant du Monde à Londres et auteurdu livre Le Capitalisme hors la loi (éditions Albin Michel).http://lemonde.fr/chat/

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Grasset

uneréussiteparfaite«

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«Ungrand romanhistorique contemporainet un thriller implacable dont le héros est cetraître qu’on ne peut s’empêcher d’aimer. »B�����dL�h�,RTL

«Le récit haletant d’un siècle de révolte,de passions, de drames intimes. »th����yG��d�ll�,LesEchos

«Des traîtresmots captivants. »G�ll��M����-Ch��fi��,ParisMatch

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« Il n’y a plus de vérité, il n’y a que des points devie, et ceci : c’est le traîtrequi porte la vérité duconflit. Qui en rappelle toutes les dimensions,les ambiguïtés, les fourvoiements. »ph�l����L��ç��,Libération

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s�l�c��� p��x G��c��� 2011s�l�c��� p��x i����ll�� 2011

s�l�c��� d� p��x f���c� t�l�v�����s�l�c��� G���d p��x d�� L�c��c�� d� Elle

présent Dans toutes Les

séLeCtions Des LiBraires

EnCatalogne,find’unspectacleagonisant

Lettred’EspagneSandrine Morel

E n 1993, Nicolas Sarkozy étaitdéjà hyper, mais seulementministre, à Bercy; Domini-

que de Villepin n’était encorequ’une éminence grisonnante àl’Elysée. L’un soutenait Balladur,l’autre conseillait Chirac. En pre-mière ligne dans la guerre des«amis de trente ans », ils sontdevenus ennemis depuis près devingt ans, et Patrick Rotman ne selasse pas de raconter cette histoi-re. Après l’avoir scénarisée dans lefilm de Xavier Durringer LaConquête, il l’a remise en scène eten perspective dans Les Fauves, undocumentaire diffusé dimanche25septembre sur France 2.

Tout est intéressant. D’abord, onrévise: la dissolution de 1997, leséclats de Villepin à l’ONU, laconquête de l’UMP par Sarkozy,Cécilia, le Kärcher, Clearstream…Ensuite, on teste ses nouvellesconnaissances: tiens, mais c’estNicolas Bazire, là-bas, dans un coinde ces images d’archives de la cam-pagne présidentielle d’Edouard Bal-ladur en 1995, qui lui vaut aujour-d’hui d’être mis en examen pourcomplicité d’abus de bien sociaux.Il murmure à l’oreille du premierministre, et on vérifie: il porte deslunettes, mais pas de valise.

Enfin, on écoute le témoignagede quelques seconds rôles, plutôtseconds couteaux en l’occurrence.Est-ce le calme des bureaux et desbibliothèques où ils sont inter-viewés, la profondeur des fau-teuils où ils sont assis? Toujoursest-il qu’ils sont en veine de confi-dences. Jean-François Copé, secré-taire général de l’UMP, raconteainsi qu’il avait monté un réseaud’espions chiraquiens dans lescabinets balladuriens, ou com-ment Nicolas Sarkozy avait « déci-dé de foutre en l’air le CPE» du gou-

vernement Villepin auquel il par-ticipait en 2006. L’ancien premierministre Jean-Pierre Raffarins’émerveille encore de la façondont l’actuel président leréveillait à l’aube pour lui « don-ner en une minute les trois phrasesqui le matin à la radio vont sonneraux oreilles des Français d’unemanière assez définitive».

François Baroin, aujourd’huiministre de l’économie, se sou-vient de l’ambiance « très particu-lière » qui régnait dans le gouver-nement après la révélation de l’af-faire Clearstream. Une ambiance«à la John Le Carré», précise l’agré-gé de lettres Xavier Darcos, ancienministre de l’éducation nationale,qui semble en frémir encore.

Et puis, soudain, on réalise que,quelques heures avant la diffu-sion de cette enquête, le mêmeJean-François Copé rappelait,devant la victoire de la gauche auxélections sénatoriales, « la nécessi-té d’être rassemblés et non pas divi-sés, au sein d’une majorité prési-dentielle d’abord au service desFrançais». Il faudra qu’il nousraconte tout ça, dans dix ans. p

Vite vu. Une ombre est passée surle visage de Bernadette Chirac, réé-lue conseillère générale en Corrè-ze dimanche, quand un reporterd’i-télé lui a demandé si son maril’avait appelée. Puis elle s’est repri-se: « Oui. Il est content. Il n’est pashabitué à autre chose qu’à des vic-toires, lui. » Humour corrézien.

L ’agonie du taureau Afligido a duréune vingtaine de minutes.Vingtminutes pendant lesquelles de

300 à 400 personnes, à pied et à cheval,l’ont poursuivi à travers champs, munisde lances et de pics. L’animal, de 608 kg et5 ans d’âge, a fui. « Pas assez brave », regret-terontles 30 000spectateurs. Oscar Barto-lomé, 27 ans, l’a finalement atteint auflanc. Plusieurs fois. Enhardis, les partici-pants à cet encierro traditionnel de la villede Tordesillas, en Castille-Léon, ont alorsentouré l’animal, agonisant, qui s’estallongé, éreinté, aux pieds d’un arbre. Ilsse sont approchés. Personne n’avait depuntilla pour l’achever. Il a fallu aller enchercher une. Le tuer. « Je me sens commeCristiano Ronaldo. Comme Dieu », a tran-ché Oscar, acclamé par la foule.

Pendant ce temps, une jeune activisteécologiste aspergeait les spectateurs degaz lacrymogène.

Le 13 septembre, la fête du Toro de laVega, classée « d’intérêt touristique » parla région, a une nouvelle fois provoqué lapolémique en Espagne, entre défenseursdes animaux qui dénoncent sa cruauté etgardiens d’une « tradition » qu’aurait ins-taurée en 1355 Pierre Ier de Castille, plusconnu sous le sobriquet de « Pierre lecruel ».

Ces dernières années, l’Espagne a misfin à plusieurs fêtes qui mettaient en scè-ne la souffrance d’un animal, tandis qued’autresperdurent.Depuis 2002, on ne jet-te plus de chèvre du haut du clocher del’église de Manganeses de la Polvorosa,dans la province de Zamora. Mais on lance

toujours une dinde depuis le clocher deCazalilla, en Andalousie, lors de la San Blas.

En2009, la mairiede Coria,près de Cace-res, en Estrémadure, a interdit aux specta-teurs de lancer leurs fléchettes affûtéessur le taureau lors de l’encierro de la saint-Jean. Mais plusieurs provinces de la côteméditerranéenne pratiquent toujours lafête du Toro embolado, lors de laquelle onincendie les cornes de l’animal.

A Lekeito, au Pays basque, on continuede se pendre au cou d’une oie attachée àune corde jusqu’à la décapiter. Maisdepuisquelques années, l’oie estpréalable-ment tuée. On décapite aussi un canardsuspendu à Carpio del Tajo lors des fêtesde Santiago, mais à cheval. Et on envoietoujours des fourmis arrosées de vinaigreet de farine pour que, rendues hargneuses,elles mordent le public lors des fêtes deLaza à Ourense.

« Les organisations de défense des ani-maux gagnent du terrain petit à petit,mais les hommes politiques agissent enfonction de la pression populaire ou de cri-tères qui ne répondent pas à la logique »,souligne Théo Oberhuber, chef de campa-gne de l’association Ecologistes en action.

Dernière contradiction en date, diman-che 25 septembre, la Catalogne a enterrépour toujours la corrida. Mais les corre-bous, fêtes célébrées traditionnellementdans la province de Tarragone, sont tou-jours autorisées, et même protégées par laloi pour des raisons « identitaires » et de« tradition ». Parmi celles-ci, les torosembolados, mais aussi le capllaçat, qui

consiste à traîner le taureau au moyen decordes accrochées à ses cornes dans lesrues de la ville, et les bous a la mar, lorsduquel des centaines de personnes pour-suivent un taureau jusqu’à le faire tomberà l’eau. « Nous demandions la suppressiondes deux, souligne M. Oberhuber. Dans lescorrebous, la souffrance du taureau n’estpas moindre que dans les corridas. » Ceparadoxe n’a pas gêné les parlementairesqui ont voté l’interdiction mais a confortél’idée que, en supprimant les corridas, laCatalogne nationalistese débarrassaitsur-tout d’une fête trop « espagnole ». « Cer-tains partis ont pris en considération le faitque les correbous ont des aficionados dans

de nombreux villages, alors que les corri-das n’ont pas beaucoup d’adeptes en Cata-logne », explique le responsable écologis-te, qui juge la décision « hypocrite ». Defait, la Plaza Monumental était l’une desdernières arènes en fonctionnement deCatalogne. Les abonnés n’étaient plus quequelques centaines et la place souvent àmoitié vide. La Catalogne n’a peut-êtrefinalement qu’accéléré la fin d’un specta-

cle qui agonisait. Par manque d’aficiona-dos, plus que par excès de défenseurs desanimaux.

En général, en Espagne, la corrida est enperte de vitesse. Elle a cessé d’intéresserlesEspagnols, simplement.La crise aidant,depuis 2007, le nombre des fêtes taurinesa baissé de 34 %. Selon le sondage Gallup,les aficionados ne sont plus que 26 % de lapopulation. Et surtout, ils vieillissent. Plusde 80 % des jeunes de 15 à 24 ans disent nepas être intéressés du tout par les toros.

La corrida, deuxième spectacle d’Espa-gne, est-elle pour autant menacée? Il sem-ble au contraire que l’interdiction catala-ne l’a renforcée. Pour éviter qu’elle nesubisse le même sort qu’en Catalogne, larégion de Madrid l’a déclarée « bien d’inté-rêtculturel».Et lesprofessionnels delatau-romachie ont obtenu ce qu’ils deman-daient depuis des années : le 31 août, la cor-rida, qui dépendait du ministère de l’inté-rieur pour des questions d’ordre public,est passée sous la tutelle du ministère dela culture. « La fermeture de la Monumen-talestun attentat contre lesdroits constitu-tionnels, celui d’accéder librement à unspectacle, et pour les travailleurs, celuid’exercer leur profession. Et elle fragiliseaussi une manifestation artistique recon-nue comme telle », s’insurge le présidentde l’Union des éleveurs de taureaux deLidia. Le Parti populaire (PP, droite) ad’ailleurs déposé un recours auprès du tri-bunal constitutionnel. p

[email protected]

L’interdictionaconfortél’idéeque,en supprimantlescorridas, la Catalogne

nationalistesedébarrassaitsurtoutd’une fêtetrop«espagnole»

Tiens, mais c’estNicolasBazire, là-bas,dansun coin de cesimages d’archives!

C’est tout vu ! | Chronique télépar Isabelle Talès

Inamicalement vôtre

0123

pTirageduMondedatédimanche25-lundi26septembre2011:431964exemplaires. 1 2 3

32 0123Mardi 27 septembre 2011