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Exploitation d es f lux vidéo o u p hoto d ans l e cadre d 'une o pération d e secours Mémoire de formations spécialisées Référent : Lieutenant-Colonel M arian V ARYN Adjoint au chef de groupement Sud SDIS des Bouches-du-Rhône COMSIC Zonal de la zone Sud Rédacteurs : Capitaine Jean-Jacques CASALOT SDIS de Corse-du-Sud Capitaine C hristophe G UILLOT SDMIS du Rhône Lieutenant A rnaud C OLOMBO SDIS d u G ers T R S 5 2 0 1 4

Mémoire de formations spécialisées - Accueil 1.pdf · 2015-12-03 · l’organisation et l’ensemble des cours dispensés pendant le stage TRS5… Nos collègues des différentes

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Exploitation des flux vidéo ou photo dans le

cadre d'une opération de secours

Mémoire de formations

spécialisées

Référent : Lieutenant-Colonel Marian VARYN Adjoint au chef de groupement Sud SDIS des Bouches-du-Rhône COMSIC Zonal de la zone Sud

Rédacteurs : Capitaine Jean-Jacques CASALOTSDIS de Corse-du-Sud

Capitaine Christophe GUILLOT SDMIS du Rhône Lieutenant Arnaud COLOMBO SDIS du Gers

TRS5

2014

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TRS 5

Capitaine Jean-Jacques CASALOT SDIS de Corse-du-Sud

Capitaine Christophe GUILLOT SDMIS du Rhône Lieutenant Arnaud COLOMBO SDIS du Gers

Exploitation des flux vidéo ou photo dans le cadre d'une opération de

secours

FORMATION DE SPECIALITE

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Directeur de publication Col Francis MENE, Directeur de l’ENSOSP

Direction des documents pédagogiques de l’ENSOSP Col Francis MENE, Directeur de l’ENSOSP

Auteurs Capitaine Jean-Jacques CASALOT SDIS de Corse-du-Sud Capitaine Christophe GUILLOT SDMIS du Rhône Lieutenant Arnaud COLOMBO SDIS du Gers

! ISBN ! ISSN ! DÉPÔT LÉGAL

©ENSOSP, 2014-2015

Diffusion et vente de droits

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REMERCIEMENTS

Nous tenons à remercier toutes les personnes qui nous apporté leur concours pour la rédaction de ce mémoire :

Lieutenant-Colonel VARYN, notre directeur de mémoire, pour ses conseils et ses

recadrages…

Colonel PARIS et Lieutenant-Colonel GIROUD et les différents intervenants pour l’organisation et l’ensemble des cours dispensés pendant le stage TRS5…

Nos collègues des différentes structures de la Sécurité Civile pour les informations qu’ils

nous ont apportées: Lieutenant-Colonel CHABERT, SDMIS du Rhône

Commandant HURIET, SDIS du Haut-Rhin Chef de Bataillon MOULBACH, DGSCGC

Commandant SETTI, SDIS de Haute-Corse Commandant LAVAL, COMSIC du SDMIS du Rhône

Capitaine RODRIGUEZ, SDIS des Bouches-du-Rhône Capitaine GAUYAT, BSPP

Chef CATTIN, sapeurs-pompiers de Monaco Lieutenant-Colonel ANTONINI et M. CAULE, SDIS des Landes

Infirmière ALFRED du SDMIS du Rhône Les Marins Pompiers de Brest

M. BOURSET, technicien réseau SDMIS du Rhône M. Gilles MARTIN, VISOV – COZ Sud

L’ensemble des COMSIC et personnels des SDIS qui ont bien voulu prendre de leur temps

pour répondre à notre questionnaire.

Les professionnels qui nous ont donné des réponses techniques aux nombreuses interrogations que nous avions :

M. DUMAZ chargé de mission pôle risque, pôle de compétitivité d’Aix en Provence M. VANVOOT, société XVR,

Mme VERBRUGGE, avocat et photographe M. DUCASSE, société Hypercable

M. AZIBERT, société MSA M. ZUNINO société NOVADEM

M. MONDIERE société CAMSPORTS M. BARGUIRDJIAN, société TECKNISOLAR SENI

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RÉSUMÉ De tous temps, l’homme a été fasciné par l’image et de tous temps, il a utilisé celle-ci

comme moyen de communication avec ces congénères ou pour la postérité. La facilité d’acquisition, de transmission, de partage des photos et vidéos ont permis à tout

un chacun de devenir un artiste, un journaliste ou un réalisateur. Mais cette facilité est-elle profitable aux sapeurs-pompiers dans l'accomplissement de leurs

missions ? Nous verrons comment techniquement, juridiquement et opérationnellement, les SDIS

peuvent tirer profit de ces évolutions pour améliorer le service rendu à la population tout en facilitant le travail de leurs personnels.

ABSTRACT !

From time immemorial, the human has been fascinated by the image and he always used it as a means of communication with his congeners or for posterity.

The ease of acquisition, transmission, sharing photos and videos allowed anyone to

become an artist, a journalist or a filmmaker. But is this facility profitable to firefighters in the performance of their tasks ? We will see how technically, legally and operationally, SDIS can take advantage of these

developments to improve service to the public while facilitating the work of their staff.!

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1ere partie : L'environnement de l'image

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2eme partie : L'utilisation de l'image

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3eme partie : Quel emploi de l'image pour demain ?

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INTRODUCTION De tout temps l’homme a perçu le dessin, la peinture, la cartographie, l’image, la photo, le

cinéma comme un moyen d’expression, d’information, de communication, de partage. Les peintures rupestres de la Grotte Chauvet, datent de – 28 000 ans avant Jésus Christ,

elles sont les plus anciennes « images » authentifiées. Les animaux dessinés sur la paroi en sont la première trace. Les artistes ont utilisé des techniques de superposition d’images qui laissent penser qu’ils souhaitaient donner du mouvement à leurs œuvres.

Plus tard avec la naissance des premières écritures en Mésopotamie vers – 3 500 avant Jésus Christ, l’image devient le support des premiers moyens d’expression écrite. Les pictogrammes et les hiéroglyphes utilisés par les égyptiens en sont la meilleure illustration.

u moyen âge, l’écriture ayant évolué vers des codes précis. On embellit les textes par des lettres dessinées ou des dessins. Ces enluminures apportent une note de fraicheur et d’humour. Elles deviendront plus sérieuses et plus sophistiquées avant de disparaitre avec l’arrivée de l’imprimerie.

Un grand pas sera franchi en 1839 avec l’invention du daguerréotype, premier appareil

photographique. Outre l’avancée technologique avec l’emploi de la chimie pour fixer une image, nous retiendrons ce témoignage d’époque :

« Une heure après, toutes les boutiques étaient prises d'assaut. Mais il n'a pas été possible de rassembler assez d'instruments pour satisfaire la marée des daguerréotypeurs en herbe. Quelques jours plus tard, on pouvait voir sur toutes les places de Paris, face aux églises et aux palais, des chambres noires montées sur leur trépied. Tous les physiciens, chimistes et intellectuels de la capitale polissaient des plaques argentées. Même les épiciers prospères n'ont pas pu se refuser le plaisir de sacrifier un peu de leurs ressources sur l'autel du progrès, en les laissant se volatiliser avec de l'iode et fondre dans les vapeurs de mercure. » écrit dans son « Histoire de la photographie », le spécialiste Helmut Gernsheim

On notera l’enthousiasme avec lequel les Parisiens ont accueilli cette invention. Les frères Lumière apporteront en 1895, le mouvement à l’image avec l’invention du

cinéma. En cela les frères Lumière ont traduit le rêve de nos artistes du Paléolithique. Aujourd’hui nous assistons au raz-de-marée de l’image avec les avancées technologiques

qui nous permettent d’avoir de l’image sur nos téléviseurs, ordinateurs, téléphones en mode nomade et ceci partout dans le monde. Le cinéma ne cesse de battre des records d’entrées et poursuit son avancée avec les technologies 3D.

Notre société se développe, se bâtit autour des technologies de l’image. Les chaines d’information en continu et les magazines en sont les meilleurs exemples. Certains utilisent même le vocabulaire de l’image dans leur slogan:

« Le poids des mots, le choc des photos », Paris Match, Les sapeurs-pompiers peuvent-ils passer à côté de ce mouvement de la société ?

Sauraient-ils ne pas prendre en compte la puissance de communication que peut représenter l’image ? Certainement pas mais il leur sera indispensable d’éviter les nombreux écueils qui pourraient mettre en danger le fonctionnement hiérarchisé de leurs structures.

Dans ce mémoire nous nous intéresserons tout d’abord à définir l’environnement de

l’image, que ce soit sur le plan juridique ou fonctionnel. Nous verrons ensuite les applications concrètes qu’ont déjà trouvées les sapeurs-pompiers dans les différentes situations opérationnelles. Enfin, nous commencerons modestement à tracer la voie de la structuration des sapeurs-pompiers pour une exploitation efficiente de l’image.

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1 ANALYSE DE LA THÉMATIQUE

1.1 Pourquoi un tel mémoire ? Comme nous l’avons vu précédemment l’homme a toujours utilisé l’image et aujourd’hui

nous sommes plongés dans une société qui produit et diffuse des images en continu. Les progrès technologiques poussent les acteurs de la sécurité civile à explorer, tester,

mettre en place, utiliser, des images pour les missions qui leurs sont confiées. La miniaturisation des outils de prise de vues (caméras, appareils photo numériques,

smartphones) permet des prises de vues au plus proche de l’événement sans contrainte lourde. Les appareils ont des modes automatiques qui gèrent la lumière, les vitesses d’obturation, la sensibilité, permettant à chacun de se découvrir des talents de photographes.

Les images ainsi acquises bénéficient de moyens de transport adaptés permettant une diffusion et une circulation rapides et sans dégradation. Les opérateurs améliorent leurs couvertures hertziennes par le 4G (LTE) et développent des réseaux de transport filaire, comme la fibre optique, permettant déjà des débits importants. Le futur laisse présager une augmentation exponentielle de ceux-ci.

Ces données ainsi transportées utilisent aujourd’hui des supports de diffusion performants permettant de restituer la fluidité et la qualité des images.

Les barrières techniques sont levées progressivement afin d’envisager une utilisation opérationnelle des images par les sapeurs-pompiers. Le développement des outils a également gommé les frontières entre photo, image, cartographie, dessin. Toutes ces disciplines se mélangent, se croisent, se complètent et on passe des unes aux autres très facilement.

Un grand nombre de SDIS a, aujourd’hui, la capacité de produire ou d’utiliser des images produites par d’autres dans sa salle opérationnelle ou sur le terrain.

Nous nous attacherons dans ce mémoire à partager les expériences de chacun, à mettre en évidences les contraintes juridiques, à proposer un mode d’organisation et de mettre en évidences les évolutions futures.

1.2 La réduction du sujet original Comme nous l’avons vu les sapeurs-pompiers commencent à utiliser les images pour

accomplir leurs missions ; Nous pouvons dégager plusieurs utilisations de ces images. Elles peuvent servir pour la prévision, l’opération, le retour d’expériences, le déclenchement des secours, l’information du public, la communication externe, …

!

L’utilisation d’images pour la prévision est sûrement l’utilisation la plus courante chez les sapeurs-pompiers. Rapidement, les services prévision des SDIS, ont utilisé les images pour répondre à la demande de création de plans particuliers.

La photo est vite devenue un outil indispensable pour se représenter le plan de masse d’un établissement, son environnement et évaluer les effets d’un accident ou d’une catastrophe.

Nous constatons que les nouvelles générations de plans ETARE reprennent largement les supports photographiques sous forme de vues globales (vues aériennes) ou particulières (vues de clarinettes permettant le branchement des engins incendie dans une raffinerie).

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D’autres utilisations courantes chez les sapeurs-pompiers de l’image sont celles du retour d’expérience et de la communication. De nombreux SDIS utilisent les images, photos ou lesvidéos pour figer un évènement, transcrire une SITAC, décrypter une opération ou informer le public.

Ces sujets ne seront pas traités dans notre mémoire. Nous avons vu apparaitre dans les années 1990 les messageries instantanées puis dans les

années 2000 les réseaux sociaux. D’une utilisation texte à son origine, on arrive aujourd’hui à véhiculer par les réseaux sociaux des masses d’images qui pourraient détenir un message d’alerte permettant le déclenchement des secours. Cette thématique à elle seule doit faire l’objet d’une étude particulière que nous ne réaliserons pas dans ce document.

!

Nous nous attacherons spécifiquement à traiter dans ce mémoire l’utilisation des images pour le suivi d’une opération de secours. En effet, ce domaine est le dernier en date que les sapeurs-pompiers essayent de s’approprier et est celui qui présente le plus large potentiel de développement.

1.3 La démarche méthodologique / Un intérêt marqué par les SDIS

Afin d’avoir une meilleure appréciation de l’utilisation de l’image dans les différents SDIS, nous avons transmis un questionnaire à tous les COMSIC départementaux par l’intermédiaire des COMSIC de zones.

A partir de questionnaire, donné en annexe, outre une appréciation du type d’exploitation opérationnelle effectué, nous comptions définir l’environnement dans lequel celle-ci se faisait (cadre juridique, qui exploite les images, freins à l’exploitation, …).

Malheureusement, le peu de réponses complètes que nous avons reçu (24 SDIS uniquement) ne nous a pas permis d’établir les tableaux de bords espérés.

Figure 1: Plan de masse annoté

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11 Figure 2 : Utilisation de l'image par les SDIS

Toutefois, grâce aux données que nous avons pu recueillir, nous pouvons dégager

certaines grandes tendances : • peu de SDIS utilisent la photo ou la vidéo pour des besoins opérationnels, une grande

partie se contentant de transmettre des photos par mail ; • 40 % des SDIS ayant répondu envisagent dans le futur de développer des solutions

exploitant l’image en situation opérationnelle ; • uniquement un SDIS sur 3 a pris en compte l’aspect juridique ; • les principaux freins au développement de solutions basées sur l’image sont le coût et le

manque de ressources.!

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2 L'IMAGE : UN VECTEUR DE COMMUNICATION INDISPENSABLE

2.1 L’attrait pour l’image Ce sujet étant vaste et complexe, nous ne présenterons ici que quelques pistes afin de

nous permettre de comprendre l’attrait de l’homme pour l’image. Outre le fait de la couleur, du mouvement, des technologies mises en place, pourquoi

sommes-nous attirés par l’image ? Nous avons vu que l’image a toujours fait partie des moyens d’expression de l’homme et

qu’elle a toujours eu un succès. Qu’est ce qui explique cet engouement pour l’image ? Afin de répondre à cette question, nous présentons ci-dessous le processus de décodage

de l’image par l’homme. !

Figure 3

En outre, nous pouvons émettre que l’attrait de l’image pour l’homme vient du fait que chacun va pouvoir projeter son expérience, sa culture, sa personnalité dans la modélisation mentale de l’image. Chacun y « verra » des choses qui lui font sens.

La vision d’une image est très personnelle et chacun ne voit pas la même chose. Nous vous proposons de faire l’expérience suivante avec cette image qui est très souvent

utilisée en stage de communication : Que voyez-vous sur cette image ?

Figure 4 : Image Jeune-Vieille

Certains d’entre nous voient une veille femme et d’autres une jeune!"#$$%&!!

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Figure 5: Analyse de l'image Jeune-Vieille

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Cela montre que l’image est une appropriation de chacun résultant d’un processus complexe qui laisse la place à des éléments subjectifs.

Si nous intégrons l’image dans le schéma de la communication nous obtenons :

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L’image vient dans ce schéma comme un intermédiaire supplémentaire entre l’émetteur et le récepteur et ne facilite pas forcement la communication entre les deux entités. Nous verrons dans le paragraphe suivant comment nous pouvons améliorer ce schéma afin de tirer tout le bénéfice de l’image.

2.2 L'image chez les sapeurs-pompiers Notre profession a toujours cherché à utiliser les progrès techniques afin d’améliorer ces

procédures et réduire les risques pour les intervenants. On trouve ainsi, en 1926, le film du lieutenant John Kenlon de New York

(https://www.youtube.com/watch?v=a8KE5PkfHZ8 ) qui filme son trajet de la caserne jusqu’au lieu du sinistre. Quelle était sa volonté ? On peut penser que sa démarche ne relevait pas d’une intention opérationnelle, néanmoins il y a eu une recherche d’intérêt.

Plus récemment les sapeurs-pompiers ont commencé dans les années 2000 à compléter leur message radio par l’envoi de photos par mail. Ainsi nous trouvons l’idée de compléter, illustrer un texte par une photo. Nous rejoignons l’idée que l’image est un complément d’information.

L’image pouvant être subjective l’idée de compléter l’image par un texte permet au récepteur de tirer tout le bénéfice de celle-ci à la lecture du texte. Nous mettons ici en évidence la complémentarité ente l’image et le texte. !

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Aujourd’hui plusieurs SDIS cherchent à aller plus loin en produisant leurs propres images ou en utilisant des images produites par d’autres (partenaires, monde libre).

RECEPTEUR EMETTEUR IMAGES

EMETTEUR RECEPTEUR

IMAGES

Figure 7: Schéma amélioré de la communication

Figure 6: Schéma de la communication par l'image

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Avec leurs moyens, leurs environnements, leurs risques, leurs organisations, les SDIS se lancent dans un domaine complètement vierge où tout est à inventer.

Cela rappelle à certains l’arrivée des premiers postes radio après la guerre d’Algérie. Le matériel avait été acheté, mais tout restait à inventer : la doctrine, la procédure, la formation. Au-delà de cela, il a fallu que les sapeurs-pompiers prennent conscience de l’intérêt de ce matériel et de leur désorganisation. Il faut que les sapeurs-pompiers prennent la mesure des apports de l’outil image et l’intègrent dans leur processus de prise de décision. Nous affirmons que cet outil deviendra dans quelques années un outil primordial comme l’est aujourd’hui la radio, grâce notamment au progrès de la technique.

Nous sommes comme nos collègues d’après-guerre en route pour franchir une nouvelle étape dans la modernisation de nos outils de communication. Il est probable que l’évolution de nos technologies nous amène également à faire évoluer nos outils et nos procédures de commandement. Cela est encore un autre sujet.

Nous souhaitons que ce mémoire éveille la conscience de tous afin que nous mettions en place une doctrine et des procédures avant que les événements nous rappellent à l’ordre. (Ouragan, attentats…..).

Les militaires confrontés à des crises majeures ont mis en place une stratégie pour

l’utilisation des images dans le suivi opérationnel. Les militaires français avec la Direction du Renseignement Militaire (DRM) exploitent des

Renseignements d’Origine HUMaine (ROHUM), des Renseignements d’Origine ElectroMagnétique (ROEM) et des Renseignements d’Origine IMages (ROIM). C’est la combinaison de ces trois informations qui donnent de la valeur au renseignement.

Cette direction basée à Creil compte 1600 collaborateurs afin de fournir aux décideurs le renseignement souhaité, dont l’objectif est d’affirmer notre souveraineté et notre indépendance dans la décision. Cette direction possède sa propre Ecole Inter-armée basée à Strasbourg. La volonté affichée de la France est de se donner les moyens d’acquérir ses propres images afin d’avoir sa propre capacité d’appréciation.

Le livre blanc de 2013 confirme l’importance du renseignement et donne notamment une

place prépondérante aux renseignements images en actant un effort particulier qui doit être consacré au recueil et à l’exploitation des données.

Les sapeurs-pompiers bénéficient de la même typologie d’information sur une

crise majeure (attentat, évènement climatique) : • nous possédons du renseignement humain (intervenants, COS, appels téléphoniques), • nous avons la possibilité d’avoir des informations électromagnétiques (mesures de températures, mesures d’explosimétrie, mesures CO, analyse spectrale de produit, détection de radioactivité, etc…), • et nous commençons à travailler avec des images.

Comme nous l’avons fait dans d’autres domaines (les transmissions et la Gestion

Opérationnelle et Commandement), il convient de se rapprocher des méthodes de travail de l’armée française.

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3 UN CADRE JURIDIQUE ENCORE FLOU La réglementation qui consacre le droit de faire et d’utiliser des images est certainement

une des plus complexes du droit français. Elle est en effet définie dans un certain nombre de codes et lois mais son interprétation est souvent laissée à l’appréciation des tribunaux tant la diversité des cas ne pourrait être expressément prise en compte. Nous verrons tout d’abord quels sont les textes applicables de manière générale puis spécifiquement à la Sécurité Civile enfin nous nous intéresserons plus précisément aux conséquences pour l’exploitation d’images par les sapeurs-pompiers et les risques qui pourraient en découler.

3.1 Les textes qui régissent l'image

3.1.1 La législation générale Les principales règles qui fixent la réglementation sur l’image sont le droit du créateur de

l’image et le droit à l’image. Le droit du créateur de l’image est une notion qui découle du Code de la Propriété

Intellectuelle. Il s’agit du droit d’auteur qui permet de s’opposer à des utilisations non autorisées. La règle générale définie par ce code est que tout ce qui n’est pas formellement autorisé par l’auteur est strictement interdit.

Le droit à l’image est une règle définie dans les articles 9, 16 et 544 du Code Civil. Il s’agit

du droit de la personne qui y est représentée de s’opposer à la diffusion de son image. Cette notion est également applicable pour les images de biens (mobiliers, immobiliers, animaux, …) ; le droit à l’image est alors celui du propriétaire du bien. Contrairement au cas précédent, la règle applicable pour le Code Civil est que tout ce qui n’est pas formellement interdit est autorisé. Toutefois au vu des termes peu précis employés dans le Code Civil, les interdictions relèvent généralement de la jurisprudence. Néanmoins, celle-ci émanant souvent de la Cour de cassation ou du Conseil d'Etat, la valeur qui lui est accordée fait souvent office de référence.

De manière générale, les conflits sur l’image viennent plutôt lors de la diffusion d’images.

L’utilisation dans une sphère privée ne pose souvent pas de problèmes. En plus des principales sources juridiques décrites précédemment, d’autres textes

juridiques français ou internationaux viennent apporter des compléments à une réglementation déjà très éclatée. On peut ainsi citer la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, la Convention de Sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales, la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, la loi sur la liberté de la presse, le Code Pénal… Le synoptique page suivante permet de récapituler les différentes sources légales qui pourraient autoriser ou non la diffusion d’une image (source : « Droit à l’image et droit de faire des images »- Joelle Verbrugge – Guides Compétence Photo – Editions Knowware).

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Les règles qui autorisent

la diffusion d'une image

Liberté d'expression

( y compris artistique )

Liberté de la presse

( droit à l'information )

- Art. 11 de la déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen (France) - Art. 10 de la Convention de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales (Conseil de l'Europe) - Art. 19 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme (Nations Unies)

Loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse

Figure 8: Règles de diffusion de l'image

Les règles qui pourraient s'opposer

à la diffusion d'une image

Dispositions générales Le droit à l'image

sur les biens

Le droit de la

Propriété Intellectuelle

Dispositions spécifiques

diverses

- Art. 9 al. 1er du Code Civil : droit au respect de la vie privée (France) - Art. 8 de la Convention de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés Fondamentales : vie privée (Conseil de l'Europe) - Art. 16 du Code Civil : droit au respect de la dignité de la personne humaine (France) - Art. L226-1 du Code Pénal : protection des images captées dans un lieu privé (France)

- Droit du créateur d'une oeuvre représentée sur l'image (Art. L111-1 et suivants du Code de la Propriété Intellectuelle)

Fondement le plus souvent invoqué : Art. 544 du Code Civil

Figure 9: Règles s'opposant à la diffusion d'une image

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Comme on peut le voir, il est très difficile de prime abord de savoir si une image peut ou ne peut pas être exploitée. La bonne application de ces contraintes juridiques impose donc de s’intéresser à certains termes et aspects afin de bâtir une réflexion la plus précise possible sur les droits et les devoirs.

3.1.1.1 LA NOTION DE PUBLICATION OU DE DIFFUSION Les tribunaux ont considéré qu’il y a publication ou diffusion dès lors que l’image quitte

l’espace privé du photographe (ou vidéaste) pour être montrée à des tiers. Ceci s’applique également lorsque la communication se fait au sein d’une corporation, même si elle est liée par le secret professionnel. En effet, la jurisprudence considère que la divulgation d’informations de nature à identifier les personnes est interdite lorsque celle-ci porte atteinte à leurs droits, dans le cas où bien évidemment cette divulgation n’est pas nécessaire au suivi médical de la personne.

3.1.1.2 LIEU PUBLIC OU LIEU PRIVÉ ? La cour de cassation criminelle a considéré qu’un lieu public était un lieu accessible à tous

sans autorisation spéciale de quiconque, que l’accès en soit permanent et inconditionnel ou subordonné à certaines conditions, heures ou causes déterminées (Cass. Crim., 28/6/1988, Pourvoi n°87-85.460). Par opposition, la même cour a défini qu’un lieu était privé si quiconque ne peut y pénétrer ou y accéder sans le consentement de l’occupant, peu important que ce lieu se trouve dans un lieu ouvert au public (Cass. Crim., 16/2/2010, Pourvoi n°09-81.492).

Cette dernière définition a amené des jugements récurrents en faveur de la personne photographiée lorsque celle-ci était dans son véhicule sur la voie publique.

Dans le cadre de la prise d’images dans un lieu privé par les forces de l’ordre, celles-ci doivent expressément avoir été autorisées par un magistrat.

3.1.1.3 LA NOTION D’AUTORISATION DE DIFFUSION Une autorisation explicite est nécessaire pour la fixation, la reproduction ou la diffusion

d’images prises dans un lieu privé. Ainsi, la cour de cassation criminelle a considéré que « la fixation de l’image d’une personne, vivante ou morte, sans autorisation préalable des personnes ayant le pouvoir de l’accorder, est prohibée et la diffusion ou la publication de ladite image sans autorisation entre nécessairement dans le champ d’application des articles 226-1, 226-2 et 226-6 du Code Pénal » (Cass. Crim., 20/10/1998, pourvoi n°97-84.621).

Même s’il est nécessaire d’obtenir une autorisation pour la diffusion d’images de personnes prises sur la voie publique, les tribunaux ont souvent considéré, au titre du droit à l’information, que si celles-ci ne sont pas centrées sur une personne en particulier, elles peuvent être diffusées sans le consentement individuel. De même, toujours au titre de la liberté de communication des informations, la cour de cassation civile a jugé qu’on « ne peut s’opposer à la réalisation et à la divulgation de son image chaque fois que le public a un intérêt légitime à être informé » (Cass.Civ.2, 30 juin 2004, Legifrance n°02-19599). Enfin, la Cour d’appel de Versailles a considéré que « l’image participant à l’information dont elle est l’un des moyens d’expression, les nécessités de l’information peuvent justifier qu’il soit dérogé à l’absence de consentement de la personne dès lors qu’il est démontré le rapport direct et utile de la représentation de l’image avec une information légitime du public » (CA Versailles, 23 juin 2005, Legifrance n° RG 382). Cette dernière décision est fondamentale dans l’exploitation d’images par les sapeurs-pompiers. En effet, la notion d’urgence ne permet généralement pas de recueillir les autorisations nécessaires pour prendre des images et les exploiter. Il est ici reconnu que, pour un public adapté et légitime (les sapeurs-pompiers), les images opérationnelles ne nécessitent pas d’obtenir d’autorisation préalable pour être exploitée.

Ce jugement, s’il donne un droit indispensable aux sapeurs-pompiers, ne doit toutefois pas être considéré comme un blanc-seing. En effet, l’autorisation d’exploiter des images brutes sans accord préalable dans le cadre immédiat d’une opération de secours, ne sera pas forcément accordée dans le cadre d’images analysées à froid (dans le cas de Retex) et sera certainement refusée lors de la publication de ces images sur un calendrier de sapeurs-pompiers. Une analyse précise devra donc impérativement être effectuée par les SDIS sur la nécessité d’obtenir ou non une autorisation écrite avant toute utilisation autre que celles justifiées par l’urgence.

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3.1.1.4 DROIT À L’IMAGE APPLICABLE OU NON ? Pour que le droit à l’image puisse être invoqué, il est nécessaire que le sujet puisse être

reconnaissable sans ambiguïté, que ce soit par lui-même ou par les lieux dans lequel il est filmé ou photographié. Les tribunaux considèrent souvent que le fait de « flouter » le visage d’une personne est suffisant pour respecter le cadre de la loi. Toutefois une décision de justice rendue par le tribunal de grande instance de Paris le 7 novembre 2014 vient de condamner France Télévisions et le producteur d’un reportage sur la Brigade des Sapeurs-Pompiers de Paris à 7000 € de dommages et intérêts (au titre de l’atteinte à la vie privée et de l’atteinte au droit à l’image) pour avoir diffusé des images d’une femme lors d’une dispute conjugale : bien que le visage de la femme et de son compagnon ait été flouté, la plaignante a fait valoir qu’elle était reconnaissable à sa silhouette et à l’intérieur de son appartement ; la juge a estimé que peu importait « qu'elle ne soit identifiable que par les personnes qui la connaissent, le droit à la vie privée n'étant pas réservé aux personnes connues d'un large public ». Par ailleurs, le magistrat a décidé que malgré le fait que le cameraman soit parfaitement visible par la victime, une autorisation de diffusion aurait été nécessaire car « compte tenu de son état, l'absence de réaction à la présence d'un cameraman ne saurait valoir autorisation implicite à la diffusion des images ».

3.1.1.5 LES IMAGES INTERDITES En parallèle de toute la réglementation générale, certains textes de loi interdisent toute

prise d’image. On peut bien évidemment citer l’article 16 du Code Civil qui interdit toute image qui attente à la dignité humaine, mais également l’Arrêté du 7 avril 2011 relatif au respect de l'anonymat de certains fonctionnaires de police et militaires de la gendarmerie nationale qui interdit de filmer ou photographier certaines catégories de fonctionnaires du ministère de l’intérieur pour des raisons de sécurité.

On peut noter par ailleurs que l’interdiction de filmer des œuvres dans certains musées ne repose sur aucun fondement juridique dans la mesure où, selon le Code de la Propriété Intellectuelle, le droit de reproduction s’étend sur une période de 70 ans après la mort de l’auteur et que donc la plupart des œuvres sont tombées dans le domaine public.

3.1.1.6 LES IMAGES SORTIES DE LEUR CONTEXTE Une image est un élément qui a une valeur forte. Comme cela a été vu dans le chapitre

précédent, son interprétation peut varier d’une personne à l’autre ou selon comment est présentée l’image. Ceci est d’autant plus vrai lorsqu’une image est exploitée hors de son contexte original. Ainsi, la cour d’appel de Versailles a jugé que des photos de personnes réalisées dans la foule au moment de la gay-pride peuvent être utilisées sans autorisation, mais qu’elles ne peuvent en aucun cas être réutilisées librement pour illustrer un article sur l’homosexualité (CA Versailles, 31/01/2002). Il en serait certainement de même si les sapeurs-pompiers utilisaient une photo d’habitation détruite lors d’un sinistre pour illustrer un article sur les violences urbaines.

3.1.1.7 L’EXPLOITATION D’IMAGES DANS LE CADRE D’UNE ENTREPRISE Aucune disposition légale ne contraint un employeur à obtenir une autorisation de diffusion

d’images de ses employés dès lors que celles-ci sont employées dans le cadre de la relation professionnelle et qu’il n’y a pas d’opposition manifeste de l’employé. Néanmoins, la jurisprudence a régulièrement considéré qu’en cas de litige, l’absence d’autorisation écrite entrainait la condamnation de l’employeur, même si les images avaient été prises dans le cadre d’un contrat de travail.

3.1.1.8 LE DROIT À L’IMAGE SUR LES BIENS Si la juridiction sur l’image des personnes est souvent sujette à discussions mais

commence à se stabiliser, celle ayant trait au droit à l’image sur les biens donne aujourd’hui naissance à des jugements allant dans des directions totalement différentes. Ainsi, la cour de cassation a considéré que « le propriétaire d’une chose ne dispose pas d’un droit exclusif sur l’image de celle-ci ; il peut toutefois s’opposer à l’utilisation de cette image par un tiers lorsqu’elle lui cause un trouble anormal » (Arrêté de la cour de cassation réunie en assemblée plénière le 7/05/2004). Par opposition, l’article L122-4 du Code de la Propriété Individuelle fixe que « toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de

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ses ayants droit ou ayant cause est illicite ». Néanmoins, la Cour de cassation a considéré que lorsqu’une œuvre protégée par un droit d’auteur fait partie d’une image montrant un ensemble plus large, il peut être permis de reproduire l’œuvre initiale sans autorisation dans la mesure où celle-ci ne constitue plus qu’un élément accessoire de l’image finale (Cass. Civ. 1ere ch., 15/03/2005, Pourvoi n°03-14.80). Ceci est confirmé par le droit européen, dans l’article 5.3.i de la directive européenne 2001/29 du 22 mai 2001 qui vise « l’inclusion fortuite d’une œuvre ou d’un autre objet dans un autre produit ».

Au niveau de l’exploitation d’image sur les biens par les sapeurs-pompiers, il est probable que le même raisonnement que pour les images sur les personnes soit retenu par les tribunaux, au titre du droit à l’information.

3.1.2 La législation sur les images aériennes

3.1.2.1 UNE SPÉCIFICITÉ RÉGLEMENTÉE En plus des mesures précédentes qui sont applicables en toutes situations, l’utilisation

croissante de drones ou de moyens aériens pour effectuer des prises de vue impose de s’intéresser particulièrement aux règles applicables pour les images aériennes.

La principale source juridique pour ce type d’image se trouve dans le Code de l’Aviation Civile. Ce dernier, dans son article D133-13, définit en particulier les zones interdites (« est interdite la prise de vue aérienne, par appareil photographique, cinématographique ou par tout autre capteur, des zones dont la liste est fixée par arrêté interministériel ». La liste de ces zones est déposée en préfecture et « il appartient au pilote et à son employeur éventuel de s’assurer […] de la possibilité d’effectuer librement des prises de vues aériennes ». Dans le cadre du service public, « sont fixées par décision conjointe des ministres intéressés les conditions dans lesquelles font usage d’appareils photographiques, cinématographiques et de télédétection, les fonctionnaires ou agents de l’Etat à bord d’aéronefs d’Etat » (Art. D133-3, Code de l’Aviation Civile).

3.1.2.2 LES PRISES DE VUES À PARTIR D’UN ENGIN HABITÉ Tout pilote d’aéronef qui désire réaliser lui-même des prises de vues ou transporter un

photographe à cette fin doit être titulaire d’une Déclaration de Niveau de Compétences Activités Particulières – Photographie qu’il doit obtenir auprès de la DGAC.

De plus, certaines prises de vue nécessitent le dépôt préalable d’un Manuel d’Activité Particulière (MAP), document décrivant l’organisation et les moyens mis en place, l’obtention d’éventuelles dérogations aux hauteurs de survol ainsi que les autorisations particulières comme l’utilisation d’aéronefs étrangers.!

3.1.2.3 LES PRISES DE VUES À PARTIR DE DRONES La simplicité d’utilisation et le faible coût de certains drones amène souvent à négliger la

réglementation applicable aux prises de vues effectuées avec ce type d’aéronefs. Celle-ci est en particulier définie dans l’arrêté du 11 avril 2012 « relatif à la conception des aéronefs civils qui circulent sans aucune personne à bord, aux conditions de leur emploi et sur les capacités requises des personnes qui les utilisent ». Celui-ci fixe dans son article 3 les activités concernées (dont les relevés, photographies, observations et surveillances aériennes). L’article 4.2 du même arrêté indique que tout pilote de drone doit être titulaire du brevet théorique également imposé aux pilotes d’U.L.M.. Par ailleurs, comme dans le cas de l’utilisation d’un aéronef avec pilote, le dépôt d’un MAP est obligatoire.!

3.1.3 Les particularités applicables aux SDIS Si la réglementation générale est applicable aux sapeurs-pompiers, certains textes

spécifiques viennent donner des libertés supplémentaires ou au contraire de nouvelles contraintes du fait du statut de fonctionnaire ou d’agent du service public.

3.1.3.1 L’UTILISATION DE CAMÉRAS DANS LE CADRE DE LA VIDÉOPROTECTION La Loi N°2011-267 du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la

performance de la sécurité intérieure (LOPPSI) qui a été codifiée dans le Code de la Sécurité Intérieure (CSI) a modifié en profondeur le régime juridique relatif à la vidéo-protection en y

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incluant des missions dévolues aux sapeurs-pompiers. L’article L251-2 du CSI prévoit désormais que « La transmission et l'enregistrement d'images prises sur la voie publique par le moyen de la vidéo-protection peuvent être mis en œuvre par les autorités publiques compétentes aux fins d'assurer : […]7° La prévention des risques naturels ou technologiques ; 8° Le secours aux personnes et la défense contre l'incendie ». Ainsi, concernant le droit d’accéder aux images de caméras de vidéo-protection placées sur la voie publique, l’article L252-3 du même code indique que « l'autorisation peut prescrire que les agents individuellement désignés et dûment habilités des services de police et de gendarmerie nationales ainsi que des douanes et des services d'incendie et de secours sont destinataires des images et enregistrements. Elle précise alors les modalités de transmission des images et d'accès aux enregistrements ainsi que la durée de conservation des images, dans la limite d'un mois à compter de cette transmission ou de cet accès, sans préjudice des nécessités de leur conservation pour les besoins d'une procédure pénale. La décision de permettre aux agents individuellement désignés et dûment habilités des services de police et de gendarmerie nationales ainsi que des douanes et des services d'incendie et de secours d'être destinataires des images et enregistrements peut également être prise à tout moment, après avis de la commission départementale de vidéo-protection, par arrêté préfectoral. Ce dernier précise alors les modalités de transmission des images et d'accès aux enregistrements. Lorsque l'urgence et l'exposition particulière à un risque d'actes de terrorisme le requièrent, cette décision peut être prise sans avis préalable de la commission départementale de vidéo-protection. Le président de la commission est immédiatement informé de cette décision, qui fait l'objet d'un examen lors de la plus prochaine réunion de la commission. »

Cette nouvelle disposition donne donc un cadre légal aux possibilités pour les sapeurs-pompiers d’exploiter les images des caméras urbaines ou les caméras de surveillance de massifs. Il faut néanmoins bien prendre en compte que les agents autorisés à visualiser les images produites doivent être expressément désignés par arrêté préfectoral.

Concernant l’usage de drones en intervention, l’article 3 de l’arrêté NOR DEVA1206042A du 11/4/2012 autorise leurs utilisations mais en les considérant en activités particulières puisqu’il classifie celles-ci en « surveillances aériennes, qui comprennent la participation aux activités de lutte contre l’incendie ». Le modèle de drone employé, selon la mission donnée, devra donc être en adéquation avec l’annexe II de cet arrêté.

3.1.3.2 LES PARTICULARITÉS DUES AU STATUT DES AGENTS Tout producteur d’image, y compris un agent public, est considéré comme un auteur.

Néanmoins, la loi N°2006-961 du 1er aout 2006 dite loi DADVSI, qui a modifié le Code de la Propriété Intellectuelle (CPI), dans son article 33 (articles 131-3-1 et 131-3-2 du CPI), indique que « Dans la mesure strictement nécessaire à l'accomplissement d'une mission de service public, le droit d'exploitation d'une œuvre créée par un agent de l'Etat dans l'exercice de ses fonctions ou d'après les instructions reçues est, dès la création, cédé de plein droit à l'Etat ». Le même article étend cette mesure aux collectivités territoriales, aux établissements publics à caractère administratif, aux autorités administratives indépendantes dotées de la personnalité morale et à la Banque de France. Cette disposition ne s’applique pas dans le cadre d’une exploitation commerciale par l’employeur, pour laquelle la collectivité ne dispose que d’un droit de préférence. Par ailleurs, l’article L127-1 du CPI limite les droits moraux de l’agent afin de ne pas entraver le service public.

3.1.3.3 LA LOI INFORMATIQUE ET LIBERTÉS A partir du moment où des images sont archivées, si elles se rapportent à une personne

identifiée ou identifiable, elles deviennent des données à caractère personnel dont le traitement informatique relève de la loi 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée dite « loi informatique et libertés » . Cette dernière impose alors au responsable du traitement d’informer les personnes dont les images sont utilisées de la finalité du traitement, des personnes destinataires des images et de l’existence d’un droit d’accès et de rectification. Il est à noter que la loi informatique et libertés considère que le simple fait de capturer des images ou de les transmettre tombe sous le coup de la loi mais, dans le cadre d’une utilisation immédiate à des fins opérationnelles, le droit à l’information rappelé au § 3.1.1.3 semble prédominant.

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3.1.3.4 LA COMMUNICABILITÉ DES DOCUMENTS ADMINISTRATIFS Parallèlement aux contraintes de la loi informatique et libertés, les services publics qui

stockent des informations sont soumis aux dispositions de la loi 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public. Cette dernière, dans son article 1er, instaure « le droit de toute personne à l’information […] en ce qui concerne la liberté d’accès aux documents administratifs. Sont considérés comme documents administratifs, […], quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l’Etat, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d’une telle mission. Constituent de tels documents notamment les dossiers, rapports, études, comptes rendus, procès-verbaux, statistiques, directives, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles, correspondances, avis, prévisions et décisions ». En conséquence de ce précepte, l’article 2 impose que « les autorités mentionnées à l’article 1er sont tenues de communiquer les documents administratifs qu’elles détiennent aux personnes qui en font la demande ».

En application de ces règles, les SDIS ont obligation de transmettre tout document relatif à une intervention à tout usager qui en fait la demande, quel qu’en soit le motif (article 10), y compris si cela est au préjudice de l’établissement public. Il est toutefois intéressant de noter que la loi n’impose de transmettre que les documents achevés (article 2). Ainsi, dans le cas où le document est destiné à être conservé (en particulier pour des RETEX), il n’est pas interdit d’expurger celui-ci de toutes les images qui pourraient causer du tort à l’administration avant de considérer celui-ci comme achevé. Par ailleurs, l’article 6 de la loi 78-753 définit les conditions de communication des documents, en particulier au regard du droit à l’image. Pour ce qui est des images issues de systèmes de vidéo-protection (pour lesquelles la CADA s’est déclarée non compétente dans son avis n°20073618 du 20 septembre 2007), l’article L253-5 du Code de la Sécurité Intérieure précise que « toute personne intéressée peut s'adresser au responsable d'un système de vidéo-protection afin d'obtenir un accès aux enregistrements qui la concernent ou d'en vérifier la destruction dans le délai prévu ».

3.1.3.5 L’ARCHIVAGE DES INFORMATIONS Le livre II du Code du patrimoine, dans ses articles L211-1 à L212-5 définit que tout

document produit par un organisme public doit donner lieu à une procédure d’archivage selon des critères de sélection définis. En ce qui concerne les SDIS, les règles d’archivage ont été normées dans l’instruction ministérielle DPACI/RES/2005/19 du 31 décembre 2005 (Annexe 4). Cette classification fonctionnelle détermine pour chaque type de document son cycle de vie et propose des règles de conservation. Dans la partie B traitant des missions opérationnelles, il apparaît qu’aucune proposition n’est faite pour la conservation des données image, excepté pour les dossiers d’opérations importantes qui comporteront certainement ce type de données. L’instruction ministérielle datant de 2005, soit avant l’explosion du mode de communication par l’image, ce sont donc des règles de bon sens qui vont s’appliquer. Il sera certainement nécessaire pour les SDIS d’inclure les normes de conservation pour les images dans leur règlement intérieur après accord avec l’administration des archives. Il faut néanmoins prendre en compte que les archives étant imprescriptibles, plus aucune action ne sera possible sur les images archivées à l’issue de la durée d’utilité administrative (DUA) qui sera définie. Nous ne saurions donc que conseiller de prévoir la destruction des documents images pour les opérations courantes à l’issue d’une DUA réduite au minimum (la fin d’intervention).

3.1.4 Quelles contraintes pour la Sécurité Civile ? Le respect des règles de droit énoncées dans les précédents paragraphes implique des

contraintes fortes pour tous les organismes concourant à la sécurité civile, en particulier pour les services publics.

3.1.4.1 LA PROTECTION DE L’IMAGE DU SERVICE PUBLIC Le statut d’agent public impose un certain nombre de devoirs. En particulier, le conseil

d’Etat (Conseil d'Etat, no 97189, 28 juillet 1993) a décidé que « le devoir de réserve s'impose à tout agent public » afin, entre autre de ne pas porter atteinte à la considération du service public par

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les usagers. L’usage de photographies ou de vidéos, de par son caractère instantané et permanent, peut être extrêmement préjudiciable pour l’image d’un SDIS s’il n’est pas contrôlé avant diffusion, en particulier dans le cas d’attitudes déplacées.

3.1.4.2 LE RESPECT DU DEVOIR DE DISCRÉTION PROFESSIONNELLE L’article 26 de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des

fonctionnaires et le Décret n° 2013-412 du 17 mai 2013 relatif aux sapeurs-pompiers volontaires imposent un devoir de discrétion professionnelle à tout sapeur-pompier. Le développement des réseaux sociaux a vu croître exponentiellement sur internet le nombre de d’images d’interventions publiées par des sapeurs-pompiers, souvent par méconnaissance de la faute grave qu’ils commettaient. Un rappel à l’ordre est donc nécessaire au sein des SDIS, soit en intégrant cette problématique dans une charte informatique soit en éditant un guide du bon usage des médias sociaux comme ont pu le faire la Brigade des Sapeurs-Pompiers de Paris (annexe 2) ou le Ministère de l’Intérieur (Annexe 3).

3.1.4.3 EVITER LES CONDAMNATIONS AU TRIBUNAL CIVIL Les SDIS sont de plus en plus visés par des plaintes déposées pour obtenir réparation suite

à des sinistres. De part leur mode de travail dans l’urgence et dans l’adaptation, il est fréquent que les techniques employées ne soient pas conformes aux référentiels édités. Or, lorsque des images sont archivées, elles sont accessibles à tout usager. Il apparaît donc évident qu’elles deviennent donc potentiellement des preuves à charge contre les services d’incendie (tuyaux enchevêtrés, personnels sans casque ou ARI, …). Une réflexion doit donc être menée avant tout archivage d’images et ces dernières doivent être examinées en détail concomitamment par des agents opérationnels et des juristes. Par ailleurs, toutes les images qui ne sont pas nécessaires pour des retours d’expérience doivent être détruites dès la fin des opérations.

3.1.4.4 LA DÉSIGNATION DE RÉFÉRENTS DANS LE DOMAINE DE L’IMAGE L’accès aux images de vidéo-protection par les sapeurs-pompiers est ouvert uniquement

aux personnes nominativement désignées. Il convient donc d’identifier dans les SDIS un certain nombre d’agents qui deviendront des référents pour pouvoir visionner ces informations en cas de nécessité.

3.2 Synthèse des différents éléments à prendre en compte en situation opérationnelle

L’exploitation de photos ou de vidéo dans un cadre opérationnel par des SDIS nécessite donc de se poser préalablement les questions suivantes : quel est le sujet (ou le bien) que je filme, le lieu est-il public ou privé, est-ce que vais diffuser mes images, est-ce que je vais les conserver ou les détruire ? Les schémas suivants permettront de simplifier la prise de décision lorsqu’il sera nécessaire de traiter des images :

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Utilisation exclusivement

opérationnelle ?

Exploitation également

pour RETEX uniquement ?

Le bien est-il approprié ?

L'image a t'elle été prise dans un

lieu public ?

Ne fait pas l'objet de cette étude

En plus des règles applicables à la partie opérationnelle, prendre en compte toutes les contraintes

dues à l'archivage

Non Non

OuiOui

Image d'un bien

Image d'une personne

Non

Exploitation possible

sans condition

Autorisation écrite conseillée (obligatoire si pas de destruction immédiate de

l'image)

Voir diagramme 3.2

Voir diagramme 3.3

Non

Oui

Oui

Diagramme 3.1 : Synoptique général de prise de décision avant exploitation d’image

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Le bien est-il un élément

accessoire de l'image ?

Le bien fait-il l'objet d'un droit de propriété

intellectuelle ?

Le bien est-il soumis à une

réglementation (musée, gare, métro,...) ?

Oui

Oui

Non

Non

Au titre du droit d'auteur

Au titre du droit des marques, dessins et

modèles

Le propriétaire ne pourra s'opposer à la diffusion de l'image que s'il démontre

que cette diffusion lui cause un "trouble anormal"

Vérifier le contenu de cette réglementation et son bien-

fondé

* Si l'auteur est vivant ou décédé depuis moins de 70 ans, il faut son accord pour toute diffusion * Si l'auteur est mort depuis plus de 70 ans, diffusion libre sous réserve d'indiquer le nom de l'auteur et éventuellement le titre de l'oeuvre

La représentation de la marque ou le modèle représenté sont-ils utilisés d'une façon susceptible d'atteinte au titualire des droits ? Si oui : s'abstenir de la diffusion Si non : diffusion autorisée

Diffusion autorisée

Non

Oui

!

!

Diagramme 3.2 : Synoptique de prise de décision avant diffusion de l’image d’un bien

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La personne est-elle un élément

accessoire de l'image ?

Oui

Non

Non

Oui

Mieux vaut obtenir une autorisation ou s'abstenir

Diffusion autorisée

Diffusion autorisée

Oui Diffusion soumise à autorisation préalable

La personne est-elle

reconnaissable par l'image ou le

contexte ?

Non

Non

Oui

L'image est-elle contraire à la

dignité humaine ?

Non Diffusion soumise à autorisation préalable

L'image est-elle dans son contexte ?

Non

Oui

Diffusion fortement déconseillée même avec autorisation

Diffusion envisageable

Oui

La diffusion de l'image peut-elle

avoir des repercussions

graves ?

La personne représentée est-elle liée à l'évènement et la diffusion est-elle

nécessaire ?

!

!

Diagramme 3.3 : Synoptique de prise de décision avant diffusion de l’image d’une

personne

!

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4 LA GESTION DES FLUX

4.1 Des flux de sources diverses Il est important de différencier les sources de production images afin de les trier et de leur

réserver un traitement différent. Nous réutiliserons ces éléments dans la suite du mémoire. Nous avons distingués deux grandes familles de Flux :

• les flux produits par les sapeurs-pompiers, • les flux non produits par les sapeurs-pompiers.

4.1.1 Les flux produits par les sapeurs-pompiers Nous pouvons affirmer que les flux produits par les sapeurs-pompiers (drones,

images au sol,…) lors d’une opération de secours sont authentifiés : on connait l’émetteur, la date et ils sont rattachés à un évènement précis et connu.

De plus, la prise de vue est faite pour une utilisation sapeur-pompier avec un objectif relevant de la sécurité civile. Les angles de vue et la volonté du preneur de vue seront de transmettre une information opérationnelle. L’indépendance de nos services pour la production des images est très importante si nous voulons faire de l’information image un renseignement pour la chaine hiérarchique.

Il serait incongru d’attendre la diffusion sur des chaines d’information en continue des premières images pour enfin avoir la conscience de l’ampleur de l’évènement.

4.1.2 Les flux non produits par les sapeurs-pompiers Les flux non produits par les sapeurs-pompiers sont de deux types :

• partenaires, • du monde libre.

Nos partenaires institutionnels utilisent des images afin de réaliser leurs missions. Celles-ci

peuvent être utilisées par les SDIS dans des missions conjointes de sécurité civile. Nous pouvons citer les images de vidéo-protection des villes, qui ont pour objectifs

d’assurer la tranquillité, le maintien de l’ordre et qui dans certaines situations peuvent être utilisées pour suivre une opération de secours ou confirmer ou infirmer une demande de secours.

Nous avons aussi les images des réseaux de transports en commun qui ont pour objectif la surveillance du réseau au titre de son exploitation (fraudeur, détérioration, détection de panne, évaluation de flux etc…..), de sa sureté (détection des pickpockets, suivi des tagueurs, agression etc….) et de la sécurité des usagers (détection de personne tombée sur la voie etc……).

Nous pouvons également bénéficier d’images produites par les services de police ou de gendarmerie à bord de leurs hélicoptères. Ces images sont destinées au commandement des forces de l’ordre afin de prendre en compte une situation dans sa globalité et de diriger l’action de leurs unités au sol.

Sous le couvert de différentes conventions et montages juridiques nous pouvons bénéficier de ces images. Elles sont authentifiables mais ne sont pas toujours pertinentes au regard de nos besoins. Nous reviendrons en détails sur ces images dans les parties suivantes.

Restent les images du monde libre que nous pouvons trouver sur les réseaux sociaux

(Facebook, Twitter,...) et les images mises en ligne sur les réseaux de partage de vidéo (Youtube, Instagram). La difficulté d’exploitation de ces images est double. D’une part, il faut trouver la bonne image parmi de nombreuses et d’autre part, son authentification n’est pas aisée.

Par contre elle a l’avantage souvent d’être produite dans les premiers moments de l’évènement alors que les premiers moyens de secours ne sont pas encore sur les lieux.

Nous pouvons résumer la situation des sapeurs-pompiers par le schéma suivant.

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4.2 Quel crédit apporter aux images ? Les événements récents nous éclairent sur l’utilisation de l’image. Lors de l’accident de

train de Brétigny sur Orge 12 juillet 2013, les réseaux sociaux ont rapidement annoncé la survenue de la catastrophe avec à l’appui la parution d’images d’un train accidenté.

Très vite la cellule VISOV (voir paragraphe 7.5) forte de son expertise mise au service de la sécurité civile française a identifié que l’image produite et tweetée correspondait à un accident de train survenu en Russie. Sans cette analyse pertinente de l’image faite de recoupements, les services de secours auraient pu mettre plusieurs heures avant de s’apercevoir que l’image proposée ne correspondait pas à l’événement. Cette image prise comme information aurait pu conduire à brouiller l’image de la situation que pouvaient avoir les sapeurs–pompiers.

On imagine que l’image diffusée n’était pas destinée à brouiller ou induire en erreur les services de secours ou à instaurer un climat de panique, mais prise sans discernement par eux, elle aurait pu conduire à une fausse représentation de la situation.

On peut également donner comme exemple « le faux massacre de Timisoara ». Peu avant Noël 1989, TF1 annonce dans son journal télévisé qu’un charnier a été découvert dans la ville de Timisoara en Roumanie. L'emballement médiatique est appuyé par une photo de 19 corps, dont un bébé couché sur le ventre d’une femme, désignée comme étant sa mère. Après autopsie, on révéla que l’enfant avait succombé de la mort subite du nourrisson et que la femme n’était pas sa mère. Les corps présentés font bien partie d’une tuerie mais ne correspondent pas au charnier annoncé dans les médias.

Nous pourrions imaginer qu’une organisation terroriste planifie un acte sur notre territoire

et pousse le vice jusqu'à inonder les réseaux sociaux de fausses informations, de fausses images.

SDIS

Flux produits par les sapeurs-pompiers

Hélicoptère gendarmerie

Drones

Caméras de vidéoprotection ( ville, transport)

Images filmées au sol

Du monde libre

Réseaux sociaux

Sites de partage de vidéos et photos

Flux non produits par les sapeurs-pompiers

?

Qu’est-ce que je fais de tout ça

Partenaires

Figure 10: Différentes sources d'images

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Ceci afin d’amplifier son acte par une désorganisation des secours ou un mouvement de panique et en discréditant le message des autorités.

L’image révèle sa puissance mais doit être prise avec beaucoup de précaution. Nous pouvons ajouter que celui qui prend une image le fait toujours avec un objectif et

que celui qui la diffuse en a également un, qui peut être différent... L’objectif peut être de vanter la beauté d’un pays et assurer la commercialisation d’un voyage.

Plan large sans trace de civilisation, prise un jour de beau temps avec des couleurs et des reflets. Cette image a été retouchée après sa prise. L’objectif peut être de susciter une émotion chez le lecteur afin d’interpeller le lecteur sur une cause.

Plan serré laissant apparaitre au premier plan des assiettes vides. Cette première vision est complétée par les enfants qui tiennent les assiettes. On comprend rapidement le message que veut véhiculer cette image.

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L’objectif peut être de vouloir donner un point de vue général d’une situation.

Le plan large en hauteur nous donne une vue de l’étendue de la catastrophe et met en avant également l’impact sur les habitations et les populations. L’image nous suggère le dessarois des habitants sans pour autant nous les montrer.

Nous constatons que les sources potentielles d’images sont nombreuses et qu’elles sont toutes prises avec un objectif qui peut influencer notre perception de la situation.

Dans le domaine de la vidéo, le film de Chris Marker tourné en 1957 « lettre de Sibérie » montre comment, avec les mêmes images de la ville de Iakoutsk et de ses habitants, on peut, en changeant la musique et les commentaires, donner une image paradisiaque de la ville ou une image d’enfer. L’image liée à la parole et à la musique donne toute la force à l’image et peut appuyer des discours contradictoires.

L’auteur du film dira « Les mots peuvent faire dire tout ce que l’on veut à l’image »

On touche du doigt que l’utilisation et le maniement d’images à usage du suivi d’une opération de secours demande de la prudence et un minimum de sensibilisation.

En résumé, nous avons mis en évidence que : • les sources d’images sont nombreuses et que l’authentification était nécessaire, • l’on doit s’attacher à comprendre quel était l’objectif de la personne qui a pris l’image

afin de ne pas se laisser enfermer par l’angle de prise de vue proposé, • l’on doit également s’attacher à ne pas se laisser influencer par le packaging qui entoure

l’image (commentaire écrit, commentaire oral, musique, couleur, noir et blanc, etc…).

4.3 Information contre renseignement Comme souvent, ce sont les militaires qui ont utilisés les images afin d’en tirer un avantage

stratégique sur le champ de bataille. Durant la première guerre mondiale les avions sont équipés d’appareil photos permettant à

l’état-major de suivre l’avancée de la ligne de front. Plus tard, lors de la deuxième guerre mondiale on fera du renseignement photographique et vidéo un élément clé pour la planification des opérations. On estime que 80% du renseignement produit pendant la seconde guerre mondiale s’est appuyé sur des éléments photographiques ou vidéos.

Depuis les moyens techniques se sont considérablement modernisés avec la possibilité d’obtenir des images directement produites par les satellites. De ces années d’exploitation et d’expérience, les militaires ont tiré un cycle que doit suivre l’information pour devenir renseignement.

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Figure 11 - The Intelligence Cycle

Nous devons faire la différence entre information et renseignement. Information : Déf du Larousse : Tout évènement, tout fait, tout jugement porté à la connaissance d’un public plus ou moins large, sous forme d’images, de textes, de discours, de sons. Renseignement : Nous définirons le renseignement comme une suite d’étapes qui visent à analyser, recouper, vérifier l’information afin de la fiabiliser. Le renseignement est une information travaillée.

Afin d’illustrer la différence entre l’information et le renseignement, nous proposons de

retenir la phrase suivante : « une information devient un renseignement quand elle est recoupée 3 fois »

Des travaux du Commandant Huriet, « Renseignement image et sécurité civile », MasterII ‘gestion des risques et des crises de Sécurité Civile’, nous retiendrons les conclusions suivantes concernant le renseignement de type image :

• le renseignement doit être livré au bon endroit au bon moment, • le renseignement est un outil permettant de manœuvrer face à de situations complexes

caractérisées par le flou, l’instabilité, l’ambiguïté et l’incertitude. S’il est adapté aux guerres et conflits, il semble également largement transposable aux crises et situations accidentelles que rencontrent les forces de sécurité civile,

• le renseignement de type image est une discipline exigeante qui demande principalement du temps et de la méthode. Mais les apports liés à ce type de renseignement peuvent être décisifs tant la compréhension d’une situation complexe que dans la prise de décision.

Apportons un éclairage sur cette conclusion.

« Le renseignement doit être livré au bon endroit au bon moment » Un renseignement est exploitable s’il arrive à la bonne personne au bon moment dans sa

phase de réflexion. Si la décision est prise ou si le renseignement n’apporte pas un éclairage sur la

Information Renseignement Analyser Recouper Vérifier

Figure 12: de l'information au renseignement

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situation, il a perdu tout son intérêt. Il faut que l’image ou la vidéo soit prise dans un timing donné et dans un but précis.

Pour les preneurs de vue du SDIS, il faut définir à priori les scénarios et les objectifs des vidéos et clichés à réaliser et les caler sur le déroulement opérationnel d’une opération.

Sans ordre spécifique, notre preneur de vues va dérouler son scénario et fournir aux décideurs des images exploitables en cohérence avec la problématique et la réflexion menée. Les décideurs auront toujours la possibilité de demander au preneur de vues des images spécifiques en cours de scénario.

Nous invitons les SDIS à travailler sur des scénarios de prise de vues. Ce travail doit être le résultat de la mise en commun des souhaits des décideurs, des contraintes techniques et de temps.

« il semble également largement transposable aux crises et situations

accidentelles que rencontrent les forces de sécurité civile » Le Livre Blanc de la Défense et de la Sécurité Nationale de 2013 intègre dans sa

problématique les situations de crise de type « sécurité civile » : « Le concept de sécurité nationale, introduit par le Livre Blanc de 2008 et inscrit dans la loi

du 29 juillet 2009, a répondu à cette évolution. Visant un objectif plus large que la simple protection du territoire et de la population contre les agressions extérieures imputables à des acteurs étatiques, il traduit la nécessité, pour la France, de gérer les risques et les menaces, directs ou indirects, susceptibles d’affecter la vie de la nation. Par menaces, on entend toutes les situations où la France doit être en mesure de faire face à la possibilité d’une intervention hostile. Par risques, on entend tous les périls susceptibles, en l’absence d’intention hostile, d’affecter la sécurité de la France : ils comprennent donc aussi bien des évènements politiques que des risques naturels, industriels, sanitaires ou technologiques »

On comprend que dans l’esprit du rédacteur les « risques » sont mis sur le même plan que les « menaces »

Le rédacteur va encore plus loin « Le concept de sécurité nationale exprime la volonté d’adopter une approche globale dans

l’identification des risques et des menaces comme dans la réponse qu’il convient de leur apporter en combinant un ensemble de moyens qui incluent la connaissance et l’anticipation, la protection, la prévention, la dissuasion et l’intervention. »

Le rédacteur de préciser que les réponses apportées aux risques et aux menaces sont de même type.

Comme pour les militaires, l’analyse du terrain, la reconnaissance et l’identification de

notre adversaire et nécessaire afin de conduire une réflexion adaptée. Notre Méthode de Raisonnement Tactique est d’ailleurs issue de la Méthode de Raisonnement Tactique des militaires.

« discipline exigeante qui demande principalement du temps et de la méthode » Au vu de nos exposés sur l’image et des risques qui entourent l’utilisation de l’image, nous

ne pouvons que souscrire au fait que l’analyse de l’image est une discipline à part entière qui demande un apprentissage et de la méthode.

La partie la plus délicate pour les secours est le facteur temps. En effet, le renseignement doit être produit dans un temps très court si nous voulons coller au « bon endroit au bon moment ».

En conséquence, nos moyens de production doivent donc être rapidement et facilement

mis en œuvre et les scénarios de prise de vues établis. Ces flux doivent ensuite être analysés, recoupés, vérifiés et distribués au bon interlocuteur au bon moment.

4.4 Comment exploiter les flux ? Nous avons vu dans les parties précédentes :

• pourquoi l’image avait un attrait pour les sapeurs-pompiers,

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• le crédit que nous pouvions apporter à ces images, • les différents types d’image disponible, • comment passer de l’information au renseignement.

Forts de toutes ces informations, nous avons deux problèmes à résoudre : • quelle stratégie, doit-on mettre en place pour faire de l’information un renseignement, • comment gérer techniquement le recueil, le stockage et l’accès à ces données.

4.4.1 La stratégie pour faire de l’information un renseignement Au vu des expériences de nos collègues militaires et des contraintes lies à l’utilisation des

outils de l’image, nous préconisons de dédier une personne pour la prise en compte de ces flux, l’analyse, l’interprétation, la vérification et la diffusion. Nous sommes dans une vision proche de celle des militaires dans la conception. Néanmoins le facteur temps est beaucoup plus prégnant pour nous.

De plus ce filtre entre l’image et les acteurs de secours (COS, CODIS, PC, opérateurs) est impératif. En effet comment les équipes réagiraient si elles assistaient en directe à une explosion et à la disparition de leur collègue.

Comment avons-nous réagi le jour des attentats des World Trade Center ? Les images peuvent avoir ce pouvoir de sidération qui cloue, scotche, la chaine de

commandement la rendant inopérante ou l’aiguillant sur des décisions « émotionnelles ». Des images fortes violentes pourraient nous pousser à faire fi de nos procédures et de

l’intérêt général pour ne répondre qu’à l’émotion. Le commandement doit être préservé de cela afin de garder la tête froide pour prendre les

meilleures décisions. Ce filtre doit être joué par une personne formée qui est capable :

• d’accéder au flux, • d’authentifier la source, • d’analyser la source pour en tirer une information qui deviendra un renseignement, • de donner le renseignement aux bonnes personnes au bon moment.

Nous proposons deux niveaux de réponse :

• un niveau départemental au sein des SDIS, • un niveau zonal au sein des Centre Opérationnel de Zone (COZ).

Au niveau des SDIS

Dans un premier temps nous proposons de recouper ce besoin avec la doctrine GOC, il apparait que l’officier RENSEIGNEMENT pour le niveau Pc de colonne et l’Officier ANTICIPATION pour le PC de site sont les deux personnes qui peuvent jouer ce rôle d’ANALYSTE. Cette phase d’organisation permettra à chaque SDIS de caler ses besoins, ses attentes et de voir la portée du renseignement image.

Néanmoins au vu des paragraphes précédents, cette phase sera transitoire. Les

SDIS qui voudront exploiter au mieux les moyens investis et se protéger des recours judiciaires dédieront une personne à cette mission. Elle réalisera un travail transverse à destination des différents acteurs opérationnels.

Au niveau zonal au sein des COZ Nous proposons d’utiliser le personnel des COZ afin de réaliser le travail d’analyse des

images et de production du renseignement. Les COZ sont armés 24h/24, 365j/365 avec du personnel issu des unités militaires de la Sécurité Civile et des unités du génie. L’organisation opérationnelle repose sur une veille permanente en salle de commandement et sur des astreintes de cadres. Ces unités sont habituées à gérer des évènements d’ampleurs au niveau stratégique et décisionnel (plan neige, Chikungunya, épisode de vaccination H5N1, sommet OTAN, coupe de

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monde, jeux olympiques). Les COZ sont équipés de moyens techniques tout aussi performants que les CODIS. Il veille en permanence les chaines d’infos, les SYNERGI de la zone, les dépêches de l’AFP. Ils ont des outils de communication dédiés, messagerie du ministère de l’intérieur, visioconférence. Certains comme le COZ Sud Est sont relié sur un réseau informatique dédié (réseau LUMIERE : voir paragraphe 6.2) aux services de l’Etat et aux collectivités locales.

De plus, le régime de travail de ces agents permet d’avoir un nombre d’agents restreint pour assurer le fonctionnement, ce qui en fait des acteurs très compétents.

Les moyens techniques que possèdent les COZ et les systèmes des SDIS peuvent se combiner pour donner accès depuis les COZ aux flux vidéos et images.

A la demande du CODIS, le COZ mettra à disposition son expertise (ANALYSTE) afin de créer du renseignement image. L’information sera redescendue au CODIS (officier renseignement du CODIS) qui aiguillera l’information au bon moment au bon endroit.

Le fait de tourner sur un nombre d’agents restreints permettra de cibler la formation et d’assurer une qualité dans la prestation rendue au SDIS.

La complémentarité des services et le travail entre les CODIS et les COZ renforcerait l’efficience de nos secours.

L’analyste doit être sensibilisé, formé et posséder des outils permettant de transformer

l’information image en renseignement image. Un nouvel emploi doit être créé dans la profession afin qu’un enseignement particulier y soit consacré et que la doctrine GOC évolue. Cette approche est déjà mise en place en Espagne et en Australie dans la gestion des feux de forêts.

Nos recherches ne nous ont pas permis de mettre en évidence une technique, une

méthode d’analyse de l’image. Les étudiants en écoles d'art de la photographie utilisent la méthode SPRI pour commenter et étudier un cliché. Cette méthode ne permet pas de faire du renseignement image. L’armée possède un cursus de formation intitulé « interprètes, analystes en sciences et techniques de l’image ». Cette formation peut servir de base à une réflexion sur nos propres besoins.

Au vu des éléments déjà abordés dans ce mémoire nous proposons une grille simplifiée (annexe 8) permettant la prise en compte de l’information dans le but d’en faire un renseignement.

4.4.2 La gestion technique de ces informations : Les sources d’information sont variées, sont transportées par des moyens différents et ont

des formats particuliers. Comment faciliter la tâche de notre ANALYSTE afin qu’il ne jongle pas entre différents outils et ne soit pas obligé de faire une multitude de manipulations ?

Pour cela il faut que les sapeurs-pompiers puissent s’équiper de Régies Vidéo (Mélangeur) Les mélangeurs vidéo sont des pupitres comprenant des « barres de touches » qui

permettent de sélectionner les sources vidéos. Les quatre fonctions principales d'un mélangeur sont :

• commutation directe d'une image à l'autre (permet de passer d'une image à l'autre et de sélectionner les sources à diffuser),

• enchainement (permet de faire des transitions entre les images), • médaillon (permet d'incruster une image en médaillon dans une autre image), • incrustation (permet de superposer du texte sur une image).

Avec cet outil nous sommes capables de réceptionner les images, de les trier, de les filtrer

et de les redistribuer sur des écrans au CODIS. Nous pouvons également, mettre à disposition de l'ANALYSTE, un logiciel d'analyse

multimédia. Comme nous l'avons vu (paragraphe 4.1) des images et vidéos d'événement en cours sont

disponibles rapidement sur les réseaux sociaux et les sites de partage d'images. Ces solutions informatiques par recherche de mots clés, analysent des supports WEB et remontent les images en lien avec l'opération.

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Ces deux outils permettent à l'ANALYSTE de réceptionner et gérer l'ensemble des flux que nous avons identifié.(paragraphe 4.1).

Figure 13: le métier d'analyste !

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5 L'IMAGE EN OPÉRATION

5.1 Une image pour qui ? Pour quoi ? La réponse n’est pas unique et simple, elle dépend de nombreux facteurs. Nous allons reprendre les différents types d’image et voir quel renseignement on peut en

tirer et définir à qui le renseignement est destiné.

5.1.1 Les images produites par les sapeurs-pompiers

5.1.1.1 IMAGES PRODUITES PAR LES DRONES ET AVIONS Nous avons des images authentifiables facilement et qui donnent des prises de vues grand

angle et panoramiques. Elles permettent d’avoir une vision très large, souvent au-delà de la zone d’intervention. Ces images permettent de partager la même conscience de l’évènement. Ces informations sont destinées à l’Officier ANTICIPATION qui va en faire un renseignement à destination du DOS (niveau stratégique). Le DOS peut évaluer les flux et cibles potentielles. Ce type de renseignement construit est très proche de la construction du renseignement militaire. La différence est que le temps d’une opération de secours est très largement inférieur à une opération militaire. Le temps de construction du renseignement est donc ramené à un temps très court.

Ce type de prise de vues peut donner des images qui permettent de faire le contour du sinistre, de visionner les périmètres, de situer l’emplacement des engins de secours. Ces prises de vues sont destinées également au niveau COS (niveau tactique). Elles permettent de compléter la reconnaissance, de modifier, d’adapter, de compléter le dispositif. Ce type d’images, orienté, recoupé avec les messages radio, les informations GPS, peut servir de support à la SITAC.

A un niveau de zoom encore plus important, elles peuvent permettre de voir directement

l’action des sapeurs-pompiers. On peut voir les lances, suivre les binômes engagés en zone d’exclusion. Ces images sont destinées aux chefs de secteurs, chefs d’agrès, experts (niveau opératif) qui peuvent évaluer, mesurer les actions en cours. Exemple 1:

!(Document produit par le CDT Huriet sdis68)

Image panoramique qui donne une vision du sinistre et de ses conséquences possibles. On voit ici le nuage se propager en direction d’une autoroute (sens du vent établi) après avoir survolé une zone industrielle.

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Faut –il évacuer la zone industrielle ? Faut-il couper l’autoroute ? Voici une information de type image qui peut, après recoupement avec des mesures au sol, devenir un renseignement. Exemple 2:

(Document produit par le CDT Huriet sdis68)

Nous avons ici une vue, centrée sur le sinistre, qui montre les accès et une partie du dispositif. Cette image est plus particulièrement destinée au niveau tactique. Elle montre une vue du sinistre et du dispositif sapeur-pompier. Exemple 3 :

!(Document produit par le CDT Huriet sdis68)

!

Ici nous avons une photo centrée sur le sinistre. Elle permet de suivre l’action des moyens et donne des informations sur le type de sinistre. Nous voyons une lance en action sur un engin alimenté. Un expert pourrait identifier une typologie de contenant, lire des informations (zoom encore possible) se rendre compte de l’état de l’installation afin d’alimenter sa réflexion sur les mesures à prendre.

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Exemple 4

!(Document produit par le CDT Huriet sdis68)

!

Ici l’image est utilisée comme support à la SITAC. L’image associée à une charte graphique permet d’améliorer la compréhension de la situation. !

5.1.1.2 IMAGES PRODUITES PAR DES CAMÉRAS AU SOL Les images produites au sol par des caméras (sur casque ou par sapeur-pompier)

permettent de visualiser la progression des équipes, repérer les accès, évaluer les actions engagées, assurer la sécurité du personnel, adapter et modifier les ordres. On peut également piloter la collecte de données (lecture d’un manomètre). Ces informations de type image n’ont pas besoin de filtre et doivent être directement accessibles aux chefs de secteurs, chefs d’agrès et experts (niveau opératif). !

5.1.2 Les images non produites par les sapeurs-pompiers

5.1.2.1 IMAGES DE PARTENAIRES Comme nous l’avons déjà dit ces images ne sont pas destinées par essence à produire un

renseignement à destination des services de secours. Néanmoins, il est possible d’en tirer certaines informations qui pourront devenir un renseignement.

" Image des caméras de villes et de transports

Ces caméras sont fixes et dirigées pour filmer les voies publiques et les lieux publics. Leur angle est limité mais un bon niveau de zoom est possible. Elles servent à confirmer la survenue d’un accident, à évaluer les moyens à engager et peuvent donner l’ambiance sur zone. Cette dernière possibilité n’est pas négligeable au vu de la forte augmentation des incivilités envers les sapeurs-pompiers.

Néanmoins, leur utilisation est très compliquée. Dans la grande majorité des cas, il faut faire la demande à un PC de supervision qui sélectionne le flux pour nous. Toutes les manipulations de zoom sont également pilotées par un centre de supervision, ce qui nous rend dépendants. Par contre ce sont des images qui sont produites en permanence et peuvent être acheminées dans nos CODIS (niveau stratégique) avec très peu de formalités (convention).

La Brigade des sapeurs-pompiers a le pilotage direct des caméras de la ville de Paris. Leur expérience montre une faible utilisation et le peu d’intérêt pour le suivi opérationnel d’une opération de secours. !

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Figure 14 : Mur d'image de caméras urbaines!

!

" Images des hélicoptères de la gendarmerie Ces images sont destinées en priorité aux forces de maintien de l’ordre. Le pilotage des

caméras est impossible par les sapeurs-pompiers. Par contre des départements ont signé des conventions avec la gendarmerie pour

bénéficier des images de l’hélicoptère sur une opération de secours. Comme nous l’avons déjà évoqué, des images prises avec un grand angle peuvent avoir un intérêt mal grès que nous ne maitrisions pas le vecteur et que nous ne pilotions pas la caméra. Ces caméras sont équipées également d’un capteur infra rouge. Les images sont destinées au niveau stratégique.!!

!(Image du site AZF prise par l’hélicoptère de la gendarmerie à 13H45 le 21 septembre 2001) !

5.1.2.2 IMAGES DU MONDE LIBRE On peut facilement se les procurer, par contre un important travail d’authentification et de

tri est à effectuer. Elles demande le passage par un filtre. Prises de loin en général, elles peuvent dans les premiers instants donner une dimension au sinistre mais elles sont rapidement sans intérêt après l’arrivée des secours. Elles sont destinées au CODIS (niveau stratégique).

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Ici, nous avons une image issue d’une vidéo prise par un témoin le 4 janvier 2015 à 10 :57

lors d’un feu de bergerie sur la commune de Sourcieux-les-Mines (69). Sur la vidéo, on entend les sirènes des engins de secours qui quittent la caserne. Aucun

secours n’est sur place. Cette vidéo est publiée très rapidement sur le site de France 3.

5.2 L'intégration de l'image aux autres informations

Nous avons vu que l’image pouvait, après un cycle d’analyse, être utilisée pour créer du renseignement. On peut aussi utiliser l’image comme support d’autres informations. L’image dans ce cas apporte une conscience supplémentaire aux informations qui sont ajoutées sur le support.

L’utilisation la plus concrète est celle faite par les sapeurs-pompiers pour réaliser la SITAC. !

!

!

!

!

SITAC sur tableau blanc avec dessin aux feutres de couleurs

SITAC sur fond cartographique

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!

Nous avons ici 3 générations de support de SITAC, qui montrent l’apport de l’image dans la prise de conscience des éléments de terrain.

5.3 Les risques de mauvaise utilisation Nous sommes tentés de projeter nos belles images en plein écran afin de montrer notre

opération de secours comme un bon film d’action dont nous sommes les acteurs. Tout le monde est concerné par l’image mais personne ne se sent investi de tirer de l’information et de fabriquer du renseignement. Elle passe en fond de notre activité.

Au mieux, les situations grotesques, les manquements manifestes, pourraient être relevés par les équipes et seraient utilisés pour plaisanter autour du café. Cela ferait passer nos moyens comme des outils de contrôle et de flicage

L’autre risque et d’avoir des images qui permettent au CODIS d’avoir une vision, une

conscience très précises de la situation. Voir même beaucoup plus précises que le COS. Le risque est que le CODIS prenne la main sur l’opération en déclenchant des moyens non réclamés par le COS et demande à celui-ci de modifier son dispositif.

De manière générale, il ne faut pas que le niveau directement supérieur utilise les images pour s’ingérer dans la gestion de l’action du niveau inférieur.

Le DOS ne doit pas utiliser les images pour donner au COS la manière de mettre en œuvre le dispositif. De même, le COS ne doit pas utiliser les images pour intervenir dans les choix des chefs de secteur, chefs d’agrès et experts. Chacun doit rester à sa place et ne pas interférer sur les prorogatives des niveaux inférieurs.

Cela rejoint l’enseignement du Générale Chinois Sun Tzu qui publia dans son ouvrage « L’Art de la Guerre » la phrase suivante :

« Le souverain doit se garder d’interférer dans la conduite de la guerre, sauf à vouloir la perdre. »

Le Cdt Huriet de préciser dans son mémoire : « Cette précision revêt ici une réelle importance : un des premiers dangers qui guette la

mise en application de l’outil vidéo sur le théâtre des opérations est l’ingérence du Prince (ou souverain) dans la ‘conduite de la guerre’. En effet, la vision directe d’événements sur lesquels le Prince pense (faussement) avoir toute légitimité pour agir peut l’inciter à passer à l’action dans des domaines qui ne le concerne pas (opératif, tactique) et pour lequel il est incompétent. Stratège, mais ni planificateur, ni technicien, le Prince aurait alors toutes les ‘chances’ d’agir maladroitement, voire dangereusement. »

Toutes ces mauvaises utilisations résultent du manque de formation, de préparation et de

procédures des équipes dans l'utilisation des images. !

Avant même d’avoir la possibilité d’exploiter ces informations, nous sabotons leurs utilisations par de mauvais usages. !

Nous avons déjà insisté sur le besoin de créer un métier d’analyste qui fabrique du renseignement et distribue les images aux bons interlocuteurs, au bon moment. Nous voudrions maintenant insister sur les procédures qui doivent être écrites afin de permettre à l’analyste de

SITAC sur fond photographique

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travailler dans un cadre serein avec des consignes partagées par le CODIS, le COS, les opérateurs CTA/CODIS et le chef de salle. Elles doivent aussi établir l’activation des moyens de prise de vues avec les objectifs à atteindre par les photos ou vidéos en fonction des sinistres. Des scénarios de base doivent être établis pour le preneur de vue afin que les informations puissent rapidement être traduites en renseignement.

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6 LES VECTEURS DE TRANSMISSION D’IMAGES !

La loi de modernisation de la Sécurité Civile a permis le déploiement du réseau d’Infrastructure Nationale Partagée des Transmissions. Toutefois, le réseau ANTARES, de par sa bande passante trop étroite, ne permet pas de transmettre d’images autres que celles de petite dimension. De fait, il a été nécessaire pour les utilisateurs de s’appuyer sur d’autres solutions pour transporter les images produites entre le terrain et les centres opérationnels.

6.1 Les solutions institutionnelles A l’issue d’une expérimentation de 3 ans, la DGSCGC a lancé un marché pour disposer

d’une structure opérationnelle concrète de services de communications satellitaires à l’échelle de la métropole à son profit et à celui des SDIS. Le périmètre fonctionnel portait sur :

• le déport par satellite des systèmes informatiques opérationnels des CODIS et la constitution d'un système informatique opérationnel pour le COZ ;

• le prolongement technologique d'Antares par l'exploitation satellite dans les CO et PC mobiles. Ce marché d’une durée de 4 ans a été attribué fin 2012 à la société Astrium, filiale d’Airbus

Defence and Space. Basée sur le satellite géostationnaire AB2, ce service apporte une parfaite couverture du

territoire de la France métropolitaine.

Figure 15 : Couverture du satellite AB2

L’intérêt d’une telle solution est de pouvoir maintenir des communications (Antares, téléphonie, transmission de données, …) lorsque les moyens traditionnels sont inexistants, détruits ou saturés. Les signaux transmis via le satellite sont dans un premier temps transmis au Téléport d’Astrium situé à Toulouse, puis redirigés vers leur destination finale au moyen de liaisons terrestres (Internet ou RTC) ou également satellitaires :

Figure 16 : Détail des possibilités de liaison par satellite