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Éditorial Editorial Éditorial Chères Lectrices, Chers Lecteurs, Dans la continuité de la riche actualité en Oncogériatrie que nous avons connue ces derniers mois, nous vous proposons de découvrir ce nouveau numéro du JOG : Volume V - Numéro 3, avec un dossier thématique intitulé « Thrombose, Vieillissement et Cancer » réalisé en collaboration avec le Groupe Francophone Thrombose et Cancer (GFTC). Pour la première fois, le Journal d’OncoGériatrie met en avant les maladies thromboemboliques veineuses chez les patients âgés atteints de cancer, au travers d’une synthèse sur la physiopathologie, les recommandations internationales, et l’accompagnement des traitements. Egalement dans ce numéro, nous publions un article original sur « Constipation du sujet âgé atteint de cancer », syndrome très fréquemment retrouvé chez le sujet âgé atteint de cancer, pour lequel il n’existe pas, à l’heure actuelle, de recommandation spécifique de prise en charge. Enfin, nous aurons le plaisir de vous retrouver à la rentrée pour notre prochain numéro, dédié au 50 ème congrès annuel de la Société Américaine d’Oncologie Clinique, mais également dans le cadre des journées de la SoFOG, qui se dérouleront du 17 au 19 Septembre à Strasbourg. Le succès de cette manifestation s’est confirmé ces dernières années, et sera en 2014 un temps fort de l’actualité Oncogériatrique. Nous vous souhaitons de très bonnes vacances d’été. Bonne lecture à toutes et à tous. Dimitri Verza Directeur de la publication du Journal d’OncoGériatrie® PharmD www.le-jog.com JOG J Oncogériatr 2014 ; 5 (3) : 49. 49 VOLUME 5 - N°3 - MAI-JUIN 2014 Le JOG - Le Journal d’OncoGériatrie ®

Mise en page 1€¦ · Thrombosis, Aging and Cancer Coordination : Dr F. Cajfinger Éditorial Editorial F. Cajfinger Mécanismes physiopathologiques Pathophysiology C.F rè e ,L P

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Éditorial

Chères Lectrices, Chers Lecteurs,

Dans la continuité de la riche actualité en Oncogériatrie que nous avons connue ces derniersmois, nous vous proposons de découvrir ce nouveau numéro du JOG : Volume V - Numéro 3, avecun dossier thématique intitulé « Thrombose, Vieillissement et Cancer » réalisé en collaboration avecle Groupe Francophone Thrombose et Cancer (GFTC). Pour la première fois, le Journald’OncoGériatrie met en avant les maladies thromboemboliques veineuses chez les patients âgésatteints de cancer, au travers d’une synthèse sur la physiopathologie, les recommandationsinternationales, et l’accompagnement des traitements.

Egalement dans ce numéro, nous publions un article original sur « Constipation du sujet âgéatteint de cancer », syndrome très fréquemment retrouvé chez le sujet âgé atteint de cancer, pourlequel il n’existe pas, à l’heure actuelle, de recommandation spécifique de prise en charge.

Enfin, nous aurons le plaisir de vous retrouver à la rentrée pour notre prochain numéro, dédié au50ème congrès annuel de la Société Américaine d’Oncologie Clinique, mais également dans le cadredes journées de la SoFOG, qui se dérouleront du 17 au 19 Septembre à Strasbourg. Le succès decette manifestation s’est confirmé ces dernières années, et sera en 2014 un temps fort de l’actualitéOncogériatrique.

Nous vous souhaitons de très bonnes vacances d’été.

Bonne lecture à toutes et à tous. �

Dimitri VerzaDirecteur de la publication du Journal d’OncoGériatrie®PharmDwww.le-jog.com

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49 VOLUME 5 - N°3 - MAI-JUIN 2014Le JOG - Le Journal d’OncoGériatrie®

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VOLUME 5 - N°3 - MAI-JUIN 2014

Rédacteurs en chefG. Freyer (Lyon) - O. Guérin (Nice)

Advisory boardL. Balducci (Tampa - USA) - J.-P. Droz (Lyon)

Comité de rédactionT. Aparicio (Bobigny) - L. Balardy (Toulouse) - E. Brain(Saint-Cloud) - E. Carola (Senlis) - D. Chaoui (Argenteuil)- T. Cudennec (Boulogne-Billancourt) - H. Curé (Reims)- L. de Decker (Nantes) - C. Falandry (Lyon) - D. Ghebriou(Argenteuil) - V. Girre (La Roche-sur-Yon) - V. LaunayVacher (Paris) - L. Mourey (Toulouse) - E. Paillaud (Créteil)- F. Retornaz (Marseille) - P. Soubeyran (Bordeaux) -L. Teillet (Paris) - H. Wildiers (Louvain - Belgique) -G. Zulian (Genève - Suisse)

Comité éditorialG. Albrand (Lyon) - E.-C. Antoine (Neuilly-sur-Seine) -A. Astier (Créteil) - R. Audisio (Londres - UK) - D. Azria(Montpellier) - S. Baffert (Paris) - S. Bonin-Guillaume(Marseille) - P. Chaibi (Paris) - A. Charrasse (Monaco) -P. Chassagne (Rouen) - S. Delaloge (Villejuif) -M. Extermann (Tampa - USA) - P. Follana (Nice) -E. François (Nice) - J.-M. Hannoun-Levi (Nice) - Y. Kirova(Paris) - V. Laroche (Chilly-Mazarin) - F. Lokiec (Saint-Cloud) - N. Magné (Saint-Priest en Jarez) - Y. Menu(Paris) - O. Mir (Villejuif) - M. Paccalin (Poitiers) - M. Puts(Toronto - Canada) - L. Ribière (Versailles) - L. Rotenberg(Neuilly-sur-Seine) - F. Rousseau (Marseille) - S. Schneider(Nice) - F. Scotté (Paris) - L. Sifer-Rivière (Paris) - C. Terret(Lyon) - M.-C. Van Nes (Liège - Belgique)

Comité scientifiqueM. Arcand (Sherbrooke - Canada) - J.-P. Aquino (Paris)- B. Asselain (Paris) - D. Benchimol (Nice) -R.-J. Bensadoun (Poitiers) - H. Bergman (Montréal -Canada) - G. Berrut (Nantes) - F. Blanchard (Reims) -M. Bonnefoy (Lyon) - I. Bourdel-Marchasson (Bordeaux)- T. De Baere (Paris) - M. Debled (Bordeaux) - L. Escalup(Paris) - J.-M. Ferrero (Nice) - M. Ferry (Valence) -J.-P. Gérard (Nice) - E. Gilson (Nice) - X. Hebuterne (Nice)- M. Hery (Monaco) - C. Jeandel (Montpellier) - P. Kerbrat(Rennes) - D. Khayat (Paris) - J. Latreille (Montréal -Canada) - J.-P. Lotz (Paris) - L. Mignot (Paris) - G. Milano(Nice) - E. Mitry (Boulogne-Billancourt) - F. Mornex (Lyon)- M. Namer (Nice) - F. Nourhashemi (Toulouse) - A. Pesce(Monaco) - J.-Y. Pierga (Paris) - F. Piette (Ivry-sur-Seine)- F. Puisieux (Lille) - M. Rainfray (Bordeaux) - G. Ruault(Paris) - O. Saint-Jean (Paris) - M. Schneider (Nice) -C. Thieblemont (Paris) - A. Thyss (Nice) - A. Toledano(Neuilly-sur-Seine) - J.-M. Vannetzel (Neuilly-sur-Seine)- U. Wedding (Berlin - Allemagne)

Comité de lectureListe communiquée en fin d’année

Membre fondateurT. Marquet

EditeurKephren Publishing88, rue du Dôme92100 Boulogne-Billancourt - FranceTél. : +33 (0)1 83 64 45 98Fax : +33 (0)1 83 64 44 [email protected]

Directeur de la publicationD. Verza

MaquetteAu support

ImprimeurS.P.E.I. Imprimeur, Pulnoy

[email protected]

CPPAP 0217 T 90198 CPPAP 0518 W 90876ISSN : 2106-8534ISSN (en ligne) : 2107-6669Dépôt légal : à parutionIndexé Base PASCAL (INIST-CNRS)Adhérent au SPEPS

Le Journal d’OncoGériatrie© est publiée en toute indépendance et sous l’unique et entière responsabilité du directeurde la publication et des rédacteurs en chef.Les articles publiés dans Le Journal d’OncoGériatrie© le sont sous la seule responsabilité de leurs auteurs.Tous droits de traduction, d’adaptation et de reproduction par tous procédés réservés pour tous pays©.

® Sommaire Table of contents

Imprimé sur papier recyclé. Imprimeur labelisé.

Éditorial EditorialD. Verza

Santé publique Public healthLa première fois que j’ai regardé le prix avant de prescrire…The first time I checked the price before prescribing...D. Ghebriou, J. Boisset, L. Joly, M. Boudraoui, A. Boutan-Laroze, D. Chaoui, C. Lobey, R. Vanica

Cas clinique Clinical case studyInhibiteur de tyrosine kinase d’EGFR chez le sujet âgé :à propos d’un cas d’adénocarcinome pulmonaireEGFR tyrosine kinase inhibitors in elderly patients:about a case report of lung adenocarcinomaM. Farhat, S. Fauvet, J.-Y. Tavernier, M. Hebben, A. Berteloot, A. Cortot

Article original Original articleConstipation du sujet âgé atteint de cancerConstipation in elderly cancer patientsT. Cudennec, T. Aparicio, D. Ghebriou, O. Guérin

Dossier thématique ReviewThrombose, Vieillissement et CancerThrombosis, Aging and CancerCoordination : Dr F. Cajfinger

ÉditorialEditorialF. Cajfinger

Mécanismes physiopathologiquesPathophysiologyC. Frère, L. Panicot-Dubois, M. Nguessan, C. Dubois

Quel Anticoagulant ?Which Anticoagulant treatment?M. Konan, D. Farge Bancel, P. Debourdeau, Y. Binan, A. Teixeira

ObservanceObservanceI. Mahé, J. Lazimi, Y. Bizet, M. Lamuraglia, J. Chidiac

Actualités thérapeutiques Therapeutic newsNouvel espoir pour les patientes atteintes de cancer du sein avancé résistant aux taxaneset prétraitées ou résistantes aux anthracyclines.

Une nouvelle analyse montre que l’afatinib (Giotrif®) est le premier traitement à apporter unbénéfice significatif sur la survie globale chez les patients atteints d’un cancer du poumonporteur des mutations les plus fréquentes de l’EGFR.Agenda Calendar

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La première fois que j’ai regardé le prixavant de prescrire…The first time I checked the price before prescribing...

D. Ghebrioua, J. Boisseta, L. Jolya, M. Boudraouia, A. Boutan-Larozea, D. Chaouib, C. Lobeyc, R. Vanicaa

a. Service Oncologie Médicale, Centre Hospitalier Victor Dupouy, 69 rue du Lieutenant Colonel Prudhon,95100 Argenteuil, France.b. Service Hématologie, Centre Hospitalier Victor Dupouy, 69 rue du Lieutenant Colonel Prudhon,95100 Argenteuil, France.c. Service Gériatrie, Centre Hospitalier Victor Dupouy, 69 rue du Lieutenant Colonel Prudhon,95100 Argenteuil, France.Auteur correspondant : Dr Djamel Ghebriou, Service Oncologie Médicale, Centre Hospitalier Victor Dupouy,69 rue du Lieutenant Colonel Prudhon, 95100 Argenteuil, France.Courriel : [email protected]

RésuméLes thérapies ciblées orales développées ces dernières années sont des traitements anticancéreux innovants dontle profil de tolérance est souvent mal évalué chez les sujets âgés. Ces thérapeutiques représentent un cout de santédéjà majeur pour un volume de prescription infime. Des mesures pour optimiser leur prescription doivent être prisespour permettre des économies de santé et une prise en charge optimale du sujet atteint de cancer.Mots clés : Economie, thérapie ciblée, oncogériatrie, conditionnement.

AbstractOral targeted therapies developed in the recent years are innovative anticancer treatments whose profile of tole-rance is often misjudged in elderly patients. These therapies represent an already major health cost, for a small pres-cription volume. Measures to optimize their prescription should be taken to allow health savings and an optimal mana-gement of cancer patients. Keywords: Economy, targeted therapy, geriatric oncology, packaging.

JOG J Oncogériatr 2014 ; 5 (3) : 53-5.

Santé publique Public health

Compte-rendu de la consultationdu 2 juin 2014Cet article est une œuvre de fiction. Toute ressemblanceavec la réalité est à imputer à cette dernière. (Jorge Volpi,La fin de la folie).

Je revois ce jour en consultation Madame H. Jacqueline,86 ans, accompagnée de sa fille, dans le cadre de sa priseen charge pour un cancer du sein gauche (RH+, Her2-)métastatique au niveau osseux pour lequel un traitementpar HORMONO®* (hormonothérapie) + CIBLIX®* 12 mg (thé-rapie ciblée) a été instauré il y a maintenant deux semaines.

Au plan socio-environnementalOn rappelle que cette patiente vit seule et qu’elle étaitautonome pour les ADL et les IADL. Sa fille l’aide depuis

quelques jours pour les courses et les tâches ménagèreslourdes en raison de la fatigue induite par les traitements.

Au plan médicalLa patiente a donc bien pris son traitement. Une semaineaprès le début du traitement elle a présenté des diarrhéesgrade 3 et des vomissements grade 3 avec une mucitegrade 3, qui ont motivé un arrêt rapide du traitement. Lapatiente a perdu près de 3 kg depuis la dernière consul-tation du 19 mai 2014. PS à 2 ce jour. Ces symptômessont liés au traitement par CIBLIX® 12mg.Voix OFF : ça s’est plutôt mal passé ! Que fais-je ? Jepasse à des comprimés dosés à 6 mg en espérant queça passera mieux ? Je regarde le Vidal : CIBLIX® 12 mg :exclusivement des boites de 30 comprimés pour 4200euros. C’est dommage, on va déjà en jeter 22 ! Quel prix

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* Les noms commerciaux des produits ont été volontairement modifiés pour des raisons d'anonymisation

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La première fois que j’ai regardé le prix avant de prescrire • The first time I checked the price before prescribing...

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pour CIBLIX® 6 mg ? Exclusivement des boites de 30comprimés pour 2 900 euros. Le test pour voir si elletolère bien coûte cher et ce traitement a déjà montré unetoxicité importante ; elle a 86 ans, elle ne va pas guérir…Dans ces conditions, le dossier sera rediscuté en Réunionde Concertation Pluridisciplinaire pour envisager la suitede la prise en charge. La patiente a vu son dentiste qui a débuté des soins den-taires. Nous débuterons le SUMAB®* deux mois après lafin des soins dentaires. Je reverrai la patiente rapidementpour m'assurer de l'amélioration de son état général etdu retour à l’état antérieur de son autonomie et lui rendrecompte de la proposition de RCP.Observation dictée en présence du patient. Docteur X.Nous nous questionnons et nous forgeons nos décisionsen nous basant sur nos convictions et notre expérience.Les questions :Quel bénéfice et quelle toxicité peut-on atten-dre du CIBLIX® à la dose de 6 mg ? Allons-nous la sous-trai-ter ? Allons-nous la sur-traiter en persistant dans cette voie?Doit-on privilégier ce traitement qui a montré en premier lieuune toxicité inacceptable au détriment de la qualité de vie ?Faut-il poursuivre HORMONO®en monothérapie ? Ou chan-ger le mécanisme d’action de l’hormonothérapie ?Les convictions : Cette association thérapeutique parHORMONO® + CIBLIX® à la dose 12 mg a montré une effi-cacité chez des patients jeunes sans comorbidité. Noussommes dans une situation non curative. La qualité devie est importante.L’expérience : La patiente présente une perte d’autono-mie réversible. Elle ira mieux dans les jours qui viennent. Cetteréversibilité de la perte d’autonomie pourrait être compro-mise si le prochain traitement administré est trop toxique.L’orientation qui consiste à changer de ligne de traite-ment pourrait être influencée par des arguments non médi-caux. En fait, plus que le prix, c’est le conditionnementqui pose problème. Vingt-deux comprimés soit 3 080euros ont été gaspillés. Si la patiente tolérait mal la dosede 6 mg, ce serait un nouveau gâchis d’une boite de 30comprimés soit 2900 euros.Certains confrères ne tiendraient pas compte du prix etdiminueraient la dose de CIBLIX® à 6 mg/j. Cette décision,pour avoir été discutée lors d’une session sur la toxicitéde thérapies ciblées chez le sujet âgé lors des JournéesSoFOG 2013 était minoritaire dans l’assemblée. La ten-dance serait possiblement différente s’il existait des condi-tionnements de 7 jours. Car en pratique clinique, lorsqueles thérapies ciblées sont mal tolérées, les toxicités appa-raissent très rapidement.

Chiffres clésLes dépenses de médicaments représentent 25 milliardsd’euros en 2012, soit une part conséquente dans le bud-get de l’assurance maladie.

D’après un rapport de l’Agence Nationale de Sécurité duMédicament (ANSM) 1, 1465 de tonnes de médicaments,périmés ou non, ont été collectées par les pharmacies fran-çaises en 2011. Aussi, chaque habitant a consommé 48boites de médicaments en 2012. « Chaque Français conserveen moyenne 1,5 kg de médicaments non utilisés dans sonarmoire à pharmacie » a expliqué la ministre de la Santélors de son discours du 26 septembre 2013. Ce phéno-mène favorise l’automédication inappropriée.Un médicament prescrit sur deux n’est pas consomméd’après un rapport de l'Inspection générale des affairessociales (IGAS) 2. Un autre rapport de l’ANSM sur l’ « ana-lyse des ventes de médicaments en France en 2011 » 3montre des données très intéressantes (Tableau 1). A l’hôpital, les antinéoplasiques et immunomodulateursreprésentent 38,5 % du CA des médicaments.En raison des différences de prix d’une classe à l’autre,les parts de marché exprimées en valeur ou en quantitéspeuvent présenter un écart important. En effet, les médi-caments de cancérologie (en particulier les thérapiesciblées) ont un coût unitaire élevé.On diagnostique près de 1000 nouveaux cancers parjour en France, et ce chiffre est en augmentation. C'estun problème majeur de santé publique. La prescription dethérapies ciblées orales onéreuses dans le traitement descancers représente donc une dépense de santé majeurequi ira en augmentant dans les années à venir.

Délivrance de médicaments à l'unitéCe concept a déjà été adopté en Amérique du Nord, dansplusieurs pays européens ainsi que dans les établissementsde santé en France. Il présente les avantages suivants :- la diminution des stocks de médicaments inutiles audomicile des patients ;- la réduction du gaspillage de médicaments ;- la réalisation d'économies pour l'assurance maladie,en particulier pour les molécules les plus coûteuses. Lerapport Caffet, réalisé au nom de la Commission desFinances en 2013, mentionne une expérimentation, menéedans 200 pharmacies, sur la base d'une réduction de 15%du nombre d'unités d'antibiotiques dispensés 4. Cettemesure permettrait d'ores-et-déjà de réaliser un million d'eu-ros d'économies par an. Partant de la même hypothèse,l'extension de la délivrance à l'unité dans les 22 000 offi-cines de pharmacie existant en France permettrait de réa-liser environ 100 millions d'euros d'économies.Mieux dispenser les médicaments pour mieux traiter età moindre coût est un des enjeux de la Loi n° 2013-1203du 23 décembre 2013 parue au JO n° 298 du 24 décem-bre 2013, dite loi de financement de la sécurité socialepour 2014.L’article 46 de cette loi pose les conditions pour expéri-menter la délivrance à l’unité de 14 molécules antibiotiques

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durant 3 ans par 78 officines volontaires dans 3 régionsde France (à savoir la Lorraine, le Limousin et la ProvenceAlpes Côtes d’Azur). Le Gouvernement doit présenter auParlement, au plus tard le 31 juillet 2017, un rapport dres-sant le bilan de l'expérimentation, notamment au regard

de son impact sur les dépenses, l'organisation de la filièrepharmaceutique et le bon usage des médicaments concer-nés.L’expérimentation devait commencer le 1er avril 2014mais le décret et l’arrêté fixant les conditions d’applica-tion sont en attente.En conclusion, les thérapies ciblées orales ont un indexthérapeutique étroit et généralement mal évalué chez lesujet âgé atteint de cancer. Le conditionnement actuel deces traitements onéreux n’est pas approprié pour permet-tre des adaptations de doses sans entraîner un gaspillageet des dépenses de santé importants et injustifiés. Notreprécieuse liberté de prescription ne doit pas nous fairebalayer d’un revers de main la question du coût des trai-tements. S’il est nécessaire de rationaliser les prescrip-tions médicamenteuses en général, l’adaptation du condi-tionnement des médicaments contre le cancer, etnotamment des thérapies ciblées orales, apparaît donccomme une nécessité au regard des économies impor-tantes qu’elle permettrait. Une délivrance à l’unité de cestraitements pourrait permettre de lever certains freins à laprescription des traitements anticancéreux chez le sujetâgé atteint de cancer, et favoriser une prise en charge opti-male. �

Conflit d’intérêt : aucun

Tableau 1 : Extrait de la présentation des parts demarché des médicaments en ville classés selon lesclasses de médicaments, en % du chiffre d’affairesréalisé (CA) et du % d’unités vendues (UV).

Classe demédicament

Chiffre d’Affaire (CA)réalisé

Unitésvendues (UV)

En % Rang(sur 14)

En % Rang(sur 14)

Systèmecardiovasculaire

17,3 1 11,2 3

Système nerveux(incluant lespsychotropes)

16,2 2 32,6 1

Voies digestiveset métabolisme

12,3 3 16,4 2

Antinéoplasiques etimmunomodulateurs

11,8 4 0,5 13

Antiparasitaires,insecticideset répulsifs

0,3 14 0,3 14

Bibliographie :1 Cavalié P, Djeraba A, coordinateur. Evolutions des consommations d'antibiotiques enFrance entre 2000 et 2012. Paris : ANSM ; Juin 2013.2 Grass E, Lalande F (Membres de l’inspection générale des affaires sociales). Enquêtesur le dispositif de recyclage des médicaments Cyclamed. IGAS ; Janvier 2005. Rapportn°2005 001.

3 Cavalié P, Falip E. Analyse des ventes de médicaments en France en 2011. Paris :Octobre 2012.4 Caffet JP, au nom de la commission des finances. Avis n° 127 (2013-2014). Paris :déposé le 6 novembre 2013.

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Introduction Le géfitinib (Iressa®, Astra-Zeneca) est un inhibiteur detyrosine kinase (ITK) spécifique du récepteur de l’EpidermalGrowth Factor (EGFR). Cette thérapie ciblée a obtenu en2009 l’AMM pour les patients atteints d’une forme avan-cée ou métastatique de cancer bronchique non à petitescellules (CBNPC) avec mutation activatrice du récepteurde l’Epidermal Growth Factor (EGFR) 1. Ces mutations sontprésentes chez 12 % des patients en Europe 2. Elles sontgénéralement de 2 types : délétion dans l’exon 19 ou subs-titution L858R, et confèrent une sensibilité aux ITK d’EGFR.

Certaines mutations d’EGFR associées aux mutationsactivatrices, telles que la mutation T790M, sont généra-lement acquises suite à un traitement par ITK EGFR et sontassociées à une résistance aux ITK EGFR 3. Trois ITKd’EGFR (géfitinib, erlotinib, et plus récemment, afatinib) ontdémontré une supériorité à la chimiothérapie dès la pre-mière ligne de traitement dans les CBNPC EGFR-mutés.Ces traitements, de par leur profil de toxicité et l’incidencedes cancers pulmonaires des sujets de plus de 75 ans,pourraient ainsi trouver un intérêt particulier dans la priseen charge des sujets âgés 4.

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Inhibiteur de tyrosine kinase d’EGFR chez le sujetâgé : à propos d’un cas d’adénocarcinomepulmonaire EGFR tyrosine kinase inhibitors in elderly patients: about a case report of lung adenocarcinoma

M. Farhata, S. Fauveta, J.-Y. Tavernierb, M. Hebbena, A. Berteloota, A. Cortotc

a. Pôle Gériatrie, Centre Hospitalier de Douai, rue de Cambrai, 59500 Douai, France.b. Pôle Médecine 1, Pneumologie, Centre Hospitalier de Douai, rue de Cambrai, 59500 Douai, France.c. Service de Pneumologie et Oncologie Thoracique, CHRU de Lille, Hôpital Calmette,Université de Lille Nord de France, France.Correspondance : Dr Sona FauvetPôle Gériatrie, Centre Hospitalier de Douai, rue de Cambrai, 59500 Douai, France.Tél. : +33 (0)3 27 94 74 50, fax : +33 (0)3 27 94 74 53, courriel : [email protected]

RésuméLe géfitinib (Iressa®, Astra-Zeneca) est une thérapie ciblée dont l’autorisation de mise sur le marché a été obtenuepour les patients présentant un adénocarcinome pulmonaire avec mutation activatrice de l’Epidermal Growth FactorReceptor (EGFR) dès la première ligne de traitement. Ses effets secondaires étant moins invalidants que les chimio-thérapies cytotoxiques conventionnelles, son recours paraît d’autant plus intéressant dans la population gériatrique.Nous présentons le cas d’une patiente de 83 ans traitée par géfitinib pour un adénocarcinome porteur d’embléede 2 mutations EGFR (délétion dans l’exon 19 et mutation T790M) avec métastase osseuse dont l’évolution, à unan de traitement, était dissociée avec stabilisation de la lésion pulmonaire et progression de la lésion métastatique. Mots clés : Géfitinib, mutation EGFR, adénocarcinome pulmonaire, thérapies ciblées, oncogériatrie.

AbstractGefitinib is a targeted therapy registered for the treatment of patients presenting lung adenocarcinoma with activa-ting EGFR mutation. Given that side effects are less important than with standard cytotoxic chemotherapies regi-mens, its use for geriatric people seems to be relevant. However, some mutations are associated with a lower effi-ciency of this treatment.We report here the case of a 83 years old woman treated with gefitinib for a lung adenocarcinoma with a bone metasta-sis and characterized by a double EGFR mutation (exon 19 deletion and T790M mutation). After one year of treatment, theevolution of the two lesions was dissociated with a stabilization of the primary tumor and a progression of the metastatis.Keywords: Gefitinib, EGFR mutation, lung adenocarcinoma, targeted therapy, oncogeriatry.

JOG J Oncogériatr 2014 ; 5 (3) : 57-60.

Cas clinique Clinical case study

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Nous décrivons le cas d’une patiente de 83 ans ayantbénéficié d’un traitement par gefitinib depuis la découverted’un adénocarcinome pulmonaire métastatique présen-tant une double mutation EGFR initiale avec délétion del’exon 19 et mutation T790M de l’exon 20.

Observation Madame X, 83 ans, était hospitalisée en unité de courtséjour gériatrique en février 2012 pour hypotension d’ori-gine iatrogène. On notait dans ses antécédents un adéno-carcinome colique traité par chirurgie et chimiothérapie en1994, un pacemaker pour un bloc auriculo-ventriculaire, unrétrécissement aortique, une hypertension artérielle essen-tielle, une dyslipidémie, un ulcère gastrique et une cataracteopérée. Il n’existait pas de consommation tabagique.L’évaluation gériatrique puis oncogériatrique révélait queMadame X vivait seule à son domicile, était autonome pourles activités de la vie quotidienne, sans déclin cognitif ni trou-ble de l’humeur, sans dénutrition protéino-énergétique avecun score au Mini Nutritionnal Assessment à 13 et une albu-mine et préalbumine normales.L’anamnèse retrouvait des antécédents d’infections pul-monaires répétées les mois précédents, avec l’apparitiond’une dyspnée stade III de la classification de la New YorkHeart Association NYHA. L’examen clinique mettait en évi-dence un wheezing auscultatoire modéré.

La biologie réalisée pour le bilande dyspnée était normaleLa radiographie du thorax montrait un élargissement dumédiastin. Le scanner thoracique injecté révélait un com-plexe ganglio-tumoral médiastino-pulmonaire lobaire supé-rieur gauche infiltrant la carène et la veine pulmonaire infé-rieure gauche (Figure 1). La fibroscopie bronchique

objectivait une infiltration tumorale de la bronche lobairesupérieure gauche remontant jusqu’à la carène et l’ana-lyse histopathologique des biopsies bronchiques révélaitun adénocarcinome bronchique peu différencié exprimantTTF1. L’analyse en biologie moléculaire mettait en évidencela présence de 2 mutations EGFR : une délétion dansl’exon 19 et une mutation T790M de l’exon 20, sans muta-tion des autres gènes testés (KRAS, HER2, BRAF, PIK3CA)ni de réarrangement d’ALK. Le bilan d’extension retrou-vait sur un scanner cérébral injecté (contre-indication à l’IRMdu fait du pacemaker) un processus expansif extra-axialosseux fronto-orbitaire gauche se rehaussant après injec-tion de produit de contraste, sans lésion intracérébrale(Figure 2). La nature métastatique de ce processus expan-sif était confirmée par biopsie osseuse, avec expressiondes mêmes mutations que la tumeur primitive. La tumeurétait classée cT4N2M1b (stade IV).

Un traitement par géfitinib était débuté après discussiondu dossier en réunion de concertation pluri-disciplinairelocale et au comité de thérapies ciblées régional. Le traite-ment était démarré en avril 2012 et initialement bien toléré,avec pour seul effet secondaire un rash acnéiforme traité pardiprosone. Les consultations suivantes notaient dès mai2012 une diminution de la dyspnée, mais une majoration dusyndrome de masse frontal gauche avec exophtalmie inva-lidante, diplopie et œdème sous orbitaire gauche. Cetteévolution tumorale dissociée était confirmée par le biland’évaluation radiologique en mai 2012, qui montrait unerégression de la masse thoracique mais une aggravation dela lésion osseuse (Figure 3). Une radiothérapie cérébrale de30 Gy en 10 fractions sur 2 semaines était alors effectuée

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Figure 1 : Masse ganglio-tumoralemediastino-pulmonaire lobaire supérieure gauche(Scanner thoracique injecté février 2012).

Figure 2 : Processus expansif osseux fronto orbitairegauche se rehaussant après injection(Scanner cérébral injecté février 2012).

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(pas d’indication retenue à un traitement de radiochirurgieou neurochirurgie), tout en maintenant le géfitinib.Actuellement, à douze mois de traitement par géfitinib,la tumeur thoracique reste contrôlée (Figure 4) mais lapatiente est invalidée par une aggravation de la sympto-matologie neuro-ophtalmologique.

Discussion Les récepteurs tyrosine-kinase sont des récepteurs quiinterviennent dans la signalisation cellulaire après stimu-lation par des facteurs de croissance. Les thérapies cibléessont aujourd’hui utilisées en oncologie, et dans les adé-nocarcinomes pulmonaires en particulier, avec commecible d’action certains récepteurs tyrosine-kinase dont lerécepteur EGFR. Ce récepteur active en effet plusieurs voiesde signalisation dont la voie PI3K/AKT et la voie des MAPkinases, promouvant la croissance tumorale et la diffusionmétastatique. Les mutations touchant le domaine kinased’EGFR sont responsables d’une activation constitutivedu récepteur5. La majorité de ces mutations, et notam-ment les délétions dans l’exon 19 et la substitution L858R,sont associées à une sensibilité aux ITK avec un bénéficeen termes de réponse et de survie sans progression.D’autres mutations sont associées à une résistance. Laplus fréquente de ces mutations dites de « résistance »est la mutation T790M, que l’on détecte principalementchez les patients qui présentent une progression sous ITK,en association à une mutation activatrice. Il s’agit du plusfréquent des mécanismes de résistance acquise aux ITKpuisque l’on détecte cette mutation chez environ 50 %des patients en progression sous ITK. La mutation T790Mpeut également être détectée, beaucoup plus rarement,avant tout traitement par ITK. Cette mutation, même si ellen’est présente que dans un petit contingent cellulaire peutêtre retrouvée grâce à la sensibilité des techniques de détec-tion actuelles. Son impact sur la réponse aux ITK estdébattu ; une étude récente a montré un taux de réponseaux ITK similaire, mais une survie sans progression médianeplus courte chez les patients avec CBNPC EGFR-mutéprésentant une mutation T790M avant traitement par ITKpar rapport à ceux sans mutation T790M6. Dans le casrapporté, la patiente a répondu sur la tumeur primitive àune administration de gefitinib, alors que la localisationsecondaire osseuse n’a pas évolué favorablement.Cette observation illustre la problématique des réponsesdissociées. La possibilité d’une variation du nombre decopies par FISH a été évoquée comme facteur prédictifde réponse aux inhibiteurs de tyrosine-kinase et pourraitfluctuer entre tumeur primitive et métastase 6. Le micro-environnement tumoral, la variation d’autres altérationsmoléculaires associées aux mutations EGFR, survenantnotamment sur les voies apoptotiques comme l’expres-sion de BIM par exemple 7, pourraient également rendre

compte de la discordance de réponse entre tumeur pri-mitive et métastase. De multiples biopsies sur les diffé-rents sites tumoraux seraient nécessaires pour évaluer leprofil moléculaire de chaque site. Ce geste invasif pour-rait s’envisager si des thérapeutiques spécifiques peuventêtre proposées aux patients. Néanmoins, les donnéesmanquent actuellement pour permettre de proposer unethérapeutique spécifique de seconde intention à cetterésistance tumorale induite 8. Dans le cas rapporté, les

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Figure 3 : Processus expansif frontal gauche prenantle contraste comprimant le globe oculaire gaucheet causant une exophtalmie. Hypodensité fronto-temporale gauche avec engagement sous-falcoriel(Scanner cérébral injecté août 2012).

Figure 4 : Radiographie pulmonaire octobre 2012.

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Bibliographie :1 Date de l'AMM (européenne centralisée) : 24 juin 2009.2 Mutations de l’EGFR dans le cancer du poumon : mise en évidence d’une cible molé-culaire permettant un accès spécifique aux thérapies ciblées, INCa, Boulogne-Billancourt,Février 2010.3 Antonicelli A, Cafarotti S, Indini A, Galli A, Russo A, Cesario A, et al. EGFR-TargetedTherapy for Non-Small Cell Lung Cancer: Focus on EGFR Oncogenic Mutation. Int JMed Sci 2013 ; 10 : 320-30. 4 Source : Francim/Hospices civils de Lyon/INCa/Inserm/InVS 2011.5 Merlin JL. Les inhibiteurs de tyrosine kinase en oncologie. La lettre du Pharmacologue2008 ; 22 : 51-62.6 Su KY, Chen HY, Li KC, Kuo ML, Yang JC, Chan WK, et al. Pretreatment epidermalgrowth factor receptor (EGFR) T790M mutation predicts shorter EGFR tyrosine kinase

inhibitor response duration in patients with non-small-cell lung cancer. J Clin Oncol2012 ; 30 : 433-40.7 Faber AC, Corcoran RB, Ebi H, Sequist LV, Waltman BA, Chung E, et al. BIM expres-sion in treatment-naive cancers predicts responsiveness to kinase inhibitors. CancerDiscov 2011 ; 1 : 352-65.8 Costa DB, Nguyen KS, Cho BC, Sequist LV, Jackman DM, Riely GJ. Effects of erloti-nib in EGFR mutated non-small cell lung cancers with resistance to gefitinib. Clin CancerRes 2008 ; 14 : 7060-7.9 Wu YL, Chu DT, Han B, Liu X, Zhang L, Zhou C. Phase III, randomized, open-label,first-line study in Asia of gefitinib versus carboplatin/paclitaxel in clinically selected patientswith advanced non-small-cell lung cancer: evaluation of patients recruited from main-land China. Asia Pac J Clin Oncol 2012 ; 8 : 232-43. 10 M. le Pr Jacques Caron. CHR de Lille Centre régional de Pharmacovigilance et d’in-formation sur les médicaments.

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mutations étaient détectées sur la localisation primitive etla métastase, mais la réponse thérapeutique n’en était pasmoins dissociée. Le traitement par géfitinib (Iressa) 250 mg, une fois par jour,a obtenu l’AMM pour le traitement des CBNPC localementavancé ou métastatique avec mutation activatrice EGFR 1,avec un gain absolu de survie sans progression de 3,2 moisdans le groupe géfitinib par rapport au groupe de chimio-thérapie par Carboplatine/Paclitaxel ; HR = 2,85 IC 95 % :2,05-3,98, p < 0,00019. Les effets secondaires enregistrésauprès du Centre Régional de Pharmacovigilance du CHRUde Lille10 révèlent que les plus fréquemment rapportés, sur-venant chez plus de 20% des patients, sont des diarrhéeset des réactions cutanées (éruptions cutanées, acné, séche-resse et prurit). Dans notre cas, l’acné a été la réaction indé-sirable imputable au traitement. Les arrêts de traitementpour effets indésirables concernent 3 % des patients dont1,3 % ayant présenté des affections pulmonaires interstitiellessévères grade 3-4 avec parfois des évolutions fatales 9. Desatteintes hépatiques cytolytiques restent fréquentes (sur-veillance régulière de la fonction hépatique recommandée),la survenue d’épistaxis et d’hématurie est rapportée. Iln’existe pas de contre-indication absolue au traitement pargefitinib.En gériatrie, les thérapeutiques employées soulèvent enpermanence la question de la balance bénéfice/risque. Cettequestion est fréquemment posée en oncogériatrie, avecl’objectif de tendre vers des thérapeutiques efficaces à galé-nique et posologie simples, et avec peu d’effets secon-daires. Le géfitinib, comprimé de 250 mg à prendre unefois par jour à heure régulière, répond à ces critères.Toutefois, le recours à cette thérapie ciblée nécessite uneconfirmation génétique de la présence d’une mutationEGFR sur biopsie tumorale. Pour l’obtenir, des examenscomplémentaires souvent invasifs sont nécessaires, par-fois non réalisables dans cette population gériatrique. Ence sens, le médecin oncogériatre apparaît comme unacteur nécessaire d’aide à la prise en charge de la patho-logie cancéreuse. Le choix des examens complémen-taires et la décision thérapeutique dépendent de l’état

général et des comorbidités. L’impasse est parfois diag-nostique avec des biopsies tumorales non réalisables. Ledéveloppement de techniques alternatives, par exempleà partir de cellules tumorales circulantes, pourrait per-mettre d’envisager un plus large accès des sujets âgés àce type de traitements. Dans notre cas, les localisationscancéreuses primitive et métastatique étaient accessiblespar biopsies locales, le bénéfice attendu de ces gestespermettant de débuter un traitement.

ConclusionLe traitement oral par géfitinib est indiqué dans le traite-ment de première ligne des adénocarcinomes pulmo-naires métastatiques EGFR mutés. Il est bien toléré et neprésente pas de contre-indication majeure. Une recherchesystématique des mutations EGFR est aujourd’hui indi-quée lors du bilan de tout adénocarcinome pulmonairemétastatique, nécessitant un recours à la biopsie par desexamens souvent invasifs.Le cas que nous rapportons illustre les nouvelles ques-tions que soulève l’utilisation de thérapies ciblées chez lepatient âgé, en fonction du statut moléculaire de la tumeur.La patiente présentait deux mutations EGFR, dont l’uneest associée à une résistance au géfitinib, et l’évolutionsous traitement était discordante. La réponse thérapeu-tique dès 3 mois de traitement était dissociée avec unestabilisation de la lésion primitive pulmonaire et une pro-gression de la lésion osseuse frontale gauche. Ce cas illus-tre les problématiques de l’expression de novo d’une dou-ble mutation, de la variabilité de réponse en fonction dusite et de l’intérêt de thérapeutiques nouvelles dans la pra-tique complexe de l’oncogériatrie.Les thérapies ciblées doivent inciter les praticiens à explo-rer les lésions tumorales par des explorations parfois inva-sives malgré l’âge et la fragilité des patients. L’évaluationoncogériatrique est nécessaire pour chaque patient afinde guider des prises de décision complexes, qu’ellessoient diagnostiques ou thérapeutiques en tendant versun bénéfice attendu supérieur au risque encouru. �

Conflit d’intérêt : aucun

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IntroductionL’augmentation croissante de patients âgés atteints decancer, compte tenu des données démographiques etépidémiologiques, et l’apparition de nouvelles thérapiesassociées à une augmentation significative de certainseffets indésirables, représentent aujourd’hui un véritableenjeu de prise en charge du cancer 1. La chronicisationdu cancer introduit un changement de perspective etrequiert de réfléchir à la façon d’accompagner ces patients2. Douleur, nausées/vomissements, diarrhée et consti-pation sont des événements fréquents et font l’objetd’une prévention qui est actuellement bien standardisée,différents groupes de travail ont été formés pour réflé-chir à l’élaboration de référentiels inter-réseaux (RIR) ensoins oncologiques de support 3. La constipation est défi-

nie selon les critères de Rome par l’émission de moinsde trois selles par semaine et/ou l’existence d’une diffi-culté à l’exonération des selles 4. La constipation n’estpas une conséquence physiologique du vieillissement nor-mal 5 et est, dans la plupart des cas, d’origine multifac-torielle 6.

Constipation et sujet âgéRelation entre sujet âgé et constipation La constipation est fréquente chez le sujet âgé. C’estun motif courant de consultation chez le médecin géné-raliste en France. La fréquence de la constipation aug-mente avec l’âge 7. Les sujets âgés auraient 5 fois plusde risques d’être constipés que les sujets jeunes 8. Laprévalence de la constipation est estimée à 40 % de la

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Constipation du sujet âgé atteint de cancerConstipation in elderly cancer patients

T. Cudenneca, T. Apariciob, D. Ghebriouc, O. Guérind

a. Service de Médecine Gériatrique, CHU Ambroise Paré, AP-HP, Boulogne-Billancourt, France.b. Service d'Hépato-gastroentérologie, Hôpital Avicenne, Bobigny, France.c. Service Oncologie Médicale, CH d’Argenteuil, France.d. Unité de coordination en Oncogériatrie, Pôle de Gérontologie, CHU de Nice / Centre Antoine-Lacassagne, France.

RésuméLa constipation est un problème fréquent chez le sujet âgé atteint de cancer, pour laquelle il n’existe pas de recom-mandations spécifiques de prise en charge. La constipation du sujet âgé atteint de cancer est souvent multifacto-rielle et son retentissement sur la qualité de vie est non négligeable. Une évaluation minutieuse permet souvent d’endéterminer la cause, liée au cancer lui-même ou à son traitement. Ce travail est une mise au point sur les étiologiesde la constipation, ses conséquences chez le sujet âgé atteint de cancer, et la conduite à tenir d’après les recom-mandations. Les règles hygiéno-diététiques préconisées en 1ère intention n’ayant pas démontré leur efficacité chezle sujet âgé et étant parfois difficiles à instaurer, le recours aux laxatifs osmotiques dans cette population est sou-vent nécessaire et se base sur leur efficacité et leur bonne tolérance. Mots clés : Constipation, personne âgée, cancer.

AbstractConstipation is a common problem in elderly cancer patients for who there is no management specific guidelines.Elderly cancer patients constipation is very often a multifactorial problem having a significant impact on quality oflife. A precise evaluation often helps to determine its cause, either linked to the disease itself or to its specific treat-ment. We reported here an overview on the causes of constipation, its consequences in elderly cancer patients andits management according to guidelines. As first intention diet and lifestyle rules did not demonstrate real efficacyin elderly and being sometime difficult to implement, the use of osmotic laxatives, which are efficient and well tole-rated, is often needed. Keywords: Constipation, elderly, cancer.

JOG J Oncogériatr 2014 ; 5 (3) : 61-8.

Article original Original article

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population de plus de 65 ans avec un risque relatif au-delà de 80 ans estimé à 2,6 (IC = 2,2 - 3,1) 9. Elle toucheenviron un quart des hommes et un tiers des femmesde plus de 65 ans 6. La prévalence est plus importantedans la population institutionnalisée. Dans la populationcommunautaire elle est respectivement de 57 % chez lafemme et de 64 % chez l’homme 10. Des chiffres supé-rieurs, jusqu’à 80 %, sont rapportés chez les maladesqui vivent en institution : unités de soins de longue duréeou Etablissement d’Hébergement pour Personnes AgéesDépendantes (EHPAD) 6. Les chiffres de prévalence doi-vent être prudemment analysés en raison de l’hétérogé-néité de la population âgée. La consommation de laxa-tifs est plus importante dans la population âgée (environ30 %) 11, et environ trois-quarts des sujets âgés vivantsen institution en utiliseraient 12. De la même manière quel’âge et le sexe féminin sont des facteurs de risque deconstipation bien établis, de nombreux facteurs liés à l'âgepeuvent contribuer à l'augmentation de la prévalence dela constipation chez les personnes âgées 5. Parmi cesfacteurs on peut évoquer une mobilité réduite, la déshy-dratation, l’altération de l’état cognitif et l’usage de cer-tains médicaments 10 (Tableau 1). Gériatrie et constipa-tion sont indissociables de la iatrogénie médicamenteusequi devra toujours être recherchée 13.

La constipation fonctionnelle figure parmi les indicateursmajeurs de l’autonomie des sujets âgés. La descriptionde l’autonomie d’une personne âgée est réalisée en utili-sant des outils d’évaluation validés et reproductibles. Laplus connue de ces échelles d’autonomie est celle de Katz14. Parmi les 6 questions relatives aux actes de la vie quo-tidienne qui constituent cet outil (Activities of Daily Livingou ADL), deux sont des témoins directs de l’exonération(Tableau 2). Un score de 6/6 indique une autonomie com-plète. Un sujet âgé dont le score est inférieur à 3/6 estconsidéré comme dépendant 14.

Rappels sur les mécanismesphysiopathologiquesD’un point de vue clinique, on distingue la constipationaigüe de la constipation chronique qui est définie par lescritères de Rome III comme évoluant depuis au moins 6mois 8. Schématiquement trois aspects de la fonctionintestinale sont importants dans le mécanisme du tran-sit : la motricité du côlon, l’absorption colique et le réflexede défécation 15. La continence relève de nombreuxfacteurs anatomiques comme la compliance rectale, lasensation anorectale, le fonctionnement du sphincteranal, des muscles et nerfs du plancher pelvien 16. Deuxmécanismes physiopathologiques interviennent dans lagenèse de la constipation, en pratique, les deux méca-nismes peuvent être associés 12 :1. La constipation fonctionnelle ou de transit se tra-duisant par un trouble de la motricité colique et donc dela progression au niveau du côlon ;

Tableau 1 : Facteurs de risque de constipationchez la personne âgée 10.Facteurs de risquede constipation

Niveaude preuve

Grade des recommandations

Polymédication 2 Présomption scientifique

Anticholinergiques 2 Présomption scientifique

Opiacés 3 Faible niveaude preuve scientifique

Supplémentsferriques

3 Faible niveau de preuvescientifique

Inhibiteurscalciques

3 Faible niveau de preuvescientifique

Anti-inflammatoiresnon stéroïdiens

2 Présomption scientifique

Immobilité 2 Présomption scientifique

Institutionnalisation 3 Faible niveau de preuvescientifique

Maladiede Parkinson

3 Faible niveau de preuvescientifique

Diabète 2 Présomption scientifique

Déshydratation 2 Présomption scientifique

Insuffisanced’apports en fibres

3 Faible niveau de preuvescientifique

Démence 2 Présomption scientifique

Dépression 3 Faible niveau de preuvescientifique

Tableau 2 : Grille d'évaluation de l'échelle d'autonomiede Katz 14.Echelle des activités de la vie quotidienne – Indice de Katz

Activités Définition d’une activité indépendante Score

0 0,5 1Soinscorporels

Ne reçoit pas d’aide ou ne reçoit de l’aideuniquement pour se laver une partiedu corps

Habillement Peut s’habiller sans aide à l’exceptionde lacer ses souliers

Toilette Se rend aux toilettes, utilise les toilettes,arrange ses vêtements et retourne sansaide (peut utiliser une canne ou undéambulateur, un bassin ou un urinalpendant la nuit)

Transfert Se met au lit et se lève du lit de la chaisesans aide (peut utiliser une canneou un déambulateur)

Continence Contrôle fécal et urinaire complet(sans accidents occasionnels)

Alimentation Se nourrit sans aide (sauf pour couperla viande ou beurrer du pain)

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2. La constipation terminale ou organique se tra-duisant par un trouble de la fonction ano-rectale etdonc de l’évacuation au niveau du sigmoïde ou durectum.

Conséquences du vieillissement Altération de la motricité colique liée à l’âgeLa mesure du temps de transit du sujet âgé fait l’objetde peu d’études. Les données disponibles ne montrentpas de différence significative entre les sujet jeunes etâgés 17,18. En conséquence, la constipation fonction-nelle n’est pas plus fréquente chez le sujet âgé, le tempsde transit et la fréquence des selles étant indépendantsde l’âge 6. En revanche, certaines maladies neurolo-giques comme la maladie de Parkinson, les accidentsvasculaires cérébraux, les dysautonomies et la maladied’Alzheimer sont à l’origine d’un ralentissement du tran-sit intestinal 6,19. Tel que rapporté par Wright et Staats20, le péristaltisme intestinal s'allonge généralement chezles personnes âgées affaiblies.Altération de la fonction ano-rectale liée à l’âgeLa constipation terminale est très fréquente chez lesujet âgé car la fonction ano-rectale s’altère avec le vieil-lissement 6. On note chez la personne âgée, une baissedu tonus de repos et de la force de contraction dusphincter anal ainsi qu’une diminution de la force mus-culaire de la paroi abdominale 16,21. En effet, la per-sonne âgée se distingue de la personne jeune par unediminution des pressions sphinctériennes au repos età l’effort, et par une augmentation de la pression intra-rectale lors des manœuvres de distension (surtout mar-quée chez la femme par des grossesses multiples etpar le syndrome de descente du plancher pelvien 22).L’hyposensibilité rectale paraît être alors la conséquenced’une altération de la sensibilité rectale 23. Une des par-ticularités du sujet âgé est la survenue d’une impac-tion fécale qui se définit comme une accumulation dematières dans le rectum ou le côlon distal avec absenced’évacuation depuis plusieurs jours 6.Troubles de la masticationL’apparition de la constipation est favorisée par les pro-blèmes de dentition ou de mastication, fréquents chezles personnes âgées 6.Association constipation / incontinence La constipation est souvent associée à l’incontinencefécale 24, la stase rectale pouvant provoquer une incon-tinence 25. On estime que 30 à 60 % des sujets incon-tinents présentent aussi des troubles de l’exonération18,26,27. Des facteurs de risque communs ont été iden-tifiés (sexe féminin, syndrome démentiel, diabète, séquellesde maladies neurologiques) 25. Cette incontinence estfavorisée par l’hypotonie anale et l’affaiblissement de lacontraction volontaire anale 28.

Constipation et CancerRelation entre cancer et constipationLa constipation est une complication fréquente chez lespatients atteints de cancer 29, qui altère considérable-ment leur qualité de vie 29. Cependant très peu d’étudesont évalué la prise en charge de ces patients 30. Laconstipation peut être un symptôme du cancer ou appa-raître plus tard dans la maladie 8. Chez les patients can-céreux, la constipation n’est pas seulement un symp-tôme inconfortable qui se traduit par un stress physiqueet émotionnel, mais peut également être assimilé à la pro-gression de la maladie 29.Spécificités liées au cancerLa prévalence de la constipation chez les patientsatteints de cancer est toujours corrélée au stade de lamaladie et à sa prise en charge (soins de support et chi-miothérapie) 29. Plusieurs études ont démontré que laprévalence de la constipation chez les patients atteintsd'un cancer semble être plus élevée que dans la popu-lation générale 29. Elle touche également, entre 50 et 90%des patients sous traitement analgésique, en particuliersous opioïdes majeurs (morphine) 29,31. La constipationest quasi-systématique pour les patients recevant desantalgiques de palier III de l’OMS ; elle est dose-dépen-dante et doit être prévenue de façon systématique 32.La constipation est souvent mal évaluée et sous-diag-nostiquée chez les patients atteints de cancer avancé31. De nombreux patients souffrant de constipation neremplissent pas les critères diagnostiques de Rome III(Tableau 3) 29. Une étude incluant des patients atteintsde cancers au stade avancé a rapporté une fréquenceélevée de constipation (50 %). Une discordance entreles critères de Rome III et l’évaluation réalisée par lemédecin a été rapportée dans 39 % des cas 31.

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Tableau 3 : Critères de Rome III 8.Critères généraux

• Présence pendant au moins les 3 derniers mois sur une période de6 mois

• Critères spécifiques présents lors d’au moins une sur quatredéfécations

• Critères insuffisants pour un syndrome de côlon irritable (IBS)

• Pas de selle, ou selles défaites rares

Critères spécifiques :présence de deux ou plus des critères spécifiques suivants

• Efforts à la défécation

• Selles dures ou en morceaux

• Sensation d’exonération incomplète

• Sentiment de blocage anorectal ou d’obstruction

• Manœuvres manuelles ou digitales nécessaires pour faciliterla défécation

• Moins de trois défécations par semaine

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Actuellement, il n’existe pas de dépistage établi pour lespatients atteints de cancer.Etiologie de la constipation chez les patientsatteints de cancerPlusieurs causes de constipation peuvent coexisterchez les patients atteints de cancer 33 : constipation d’ori-gine médicamenteuse, psychologique ou physiologique,liée à la tumeur elle-même ou à son traitement (Figure1).Tout ou partie de ces facteurs peuvent se produire enraison de l'évolution de la maladie, du vieillissement oudu traitement.

Constipation : une conséquence directe du cancerChez les patients atteints de cancer le métabolisme peutêtre modifié. Ainsi, une hypercalcémie ou une déshydra-tation vont augmenter le risque de développer une consti-pation chez les patients atteints de cancer 35.L’hypercalcémie touche environ 10 à 30 % des patientsatteints d’un cancer 36. Cette hypercalcémie existe prin-cipalement dans les cancers où la résorption osseuseostéoclastique est importante. L’hypercalcémie s’ac-compagne de plusieurs symptômes non spécifiquescomme la constipation, la déshydratation, les nausées,ou encore la fatigue. Le traitement le plus efficace de cettehypercalcémie en lien avec le cancer est l’hyper-hydra-tation avec du sérum physiologique et des bisphospho-nates par voie intra-veineuse. Ce traitement diminueral’hypercalcémie mais également les symptômes asso-ciés comme la constipation 36. La déshydratation est éga-

lement impliquée dans la constipation de la personne âgéeatteinte de cancer. En effet, l’augmentation compensa-trice des taux d’hormones anti-diurétiques et d’aldosté-rone pourrait entraîner un trouble de la résorption d’eauet d’électrolytes au niveau du côlon, expliquant le reten-tissement de la déshydratation sur le transit intestinal 37.Il n’est pas recommandé d’augmenter de façon impor-tante la ration hydrique chez le patient constipé non dés-hydraté dans le but d’améliorer son transit 4.Certain cancers peuvent directement être la cause dela constipation. Ainsi, une constipation peut être due àune tumeur du côlon. Il existe alors souvent une alter-nance diarrhée/constipation. Le stade ultime étant l'oc-clusion colique. Une compression extrinsèque coliquepar une carcinose péritonéale secondaire le plus sou-vent à l'extension d'un cancer digestif ou gynécolo-gique peut également occasionner une constipation.Enfin, des troubles de la défécation peuvent être occa-sionnés par une tumeur du rectum.Constipation : une conséquence indirectedu cancerLa fréquence de la constipation iatrogène augmente avecl’âge pour atteindre 30 à 40 % de la population âgée deplus de 65 ans 10. La constipation fait partie des effetsindésirables des médicaments cytotoxiques. Les chi-miothérapies anticancéreuses entraînent une constipa-tion par neurotoxicité directe des agents (alcaloïdes duVinca, thalidomide) et ce, de façon d’autant plus fréquenteque les doses administrées sont élevées 10. Les opioïdes restent le traitement le plus utilisé pour lesoulagement des douleurs résistantes aux antalgiquesusuels. Les propriétés antalgiques des opioïdes sontmalheureusement contrebalancées par des effets secon-daires digestifs quasi obligatoires au premier rang des-quels vient la constipation 38. Elle est la conséquencede l’action des opioïdes sur les récepteurs µ du systèmenerveux entérique et aboutit à une diminution à la foisde l’excitabilité neuronale et de la libération de neuro-transmetteurs, en particulier, l’acétylcholine 38. Un laxa-tif doit toujours être prescrit avec un traitement opiacépour prévenir le risque de constipation sévère. Le pres-cripteur peut être conduit à réduire les doses d’opioïdes(et donc la qualité de l’antalgie) pour proposer un meil-leur compromis entre l’amélioration de la douleur et lemaintien d’un confort digestif satisfaisant 39. Le déve-loppement de nouveaux antagonistes morphiniques péri-phériques tels que la méthylnaltrexone apparaît un pro-grès thérapeutique important pour autoriser une analgésiesuffisante sans altérer le confort de vie du malade pardes effets secondaires digestifs notables 38.Les Vinca-alcaloïdes, agents anticancéreux ciblant lesmicrotubules, sont couramment utilisés dans le traitementdes cancers. La vinblastine et la vincristine sont les Vinca-

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Figure 1 : Algorithme diagnostique de la constipationchez les patients atteints de cancer 34.

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alcaloïdes les plus courants. La constipation est l’un deseffets secondaires les plus fréquents avec ces molé-cules. Il est recommandé de prescrire un traitement pro-phylactique systématique contre la constipation chezles patients recevant de fortes doses de vinblastine 40.Il en est de même pour la vincristine 41.Les Taxanes sont utilisés en tant qu’agents cytotoxiquesdans le traitement des cancers, en inhibant la fonctiondes microtubules. Le taxotère, connu pour son actiondans le traitement du cancer du sein, provoque de façontrès fréquente et/ou fréquente des troubles gastro-intes-tinaux dont la constipation selon la dose administrée 42.Le thalidomide est un médicament inhibant l’angiogé-nèse utilisé dans le traitement des myélomes 43. Laconstipation est un effet secondaire très fréquent lors dutraitement. Les sétrons sont des antagonistes des récepteurs5HT3 sérotoninergiques, impliqués dans le réflexe devomissement et la sensation de nausées. Les princi-paux effets secondaires fréquents des antiémétiques detype sétron sont digestifs : les sétrons peuvent être res-ponsables de phénomènes de constipation parfois dura-bles 44,45.D'autres médicaments tels que les anticholinergiques(antidépresseurs et antihistaminiques) peuvent conduireà la constipation en provoquant une diminution de la sen-sibilité aux réflexes de défécation et une diminution dela motilité intestinale 46.Constipation comme symptôme révélateur de cancerUn cancer colorectal peut être révélé par une constipa-tion de survenue ou d'aggravation récente. Cependant,une constipation chronique ancienne n'est pas un motifsuffisant pour poser l'indication d'une coloscopie 4. Celle-ci reste soumise aux recommandations en vigueur 47. Lacoloscopie est recommandée si les symptômes sontapparus après l’âge de 50 ans, quand l’interrogatoire etl’examen clinique suggèrent l’existence d’une cause orga-nique, en cas de signes d’alarme ou dans les situationsrecommandées dans le cadre du dépistage systématiquedu cancer du côlon dans la population générale 4.

Conséquences de la constipation chezles sujets âgés atteints de cancerPrincipaux cancers du sujet âgéPlus de 50 % des cas de cancers diagnostiqués chaqueannée surviennent chez des personnes de plus de 65ans, le cancer étant la première cause de mortalité pourla tranche d’âge 65-80 ans 48. Dans 30,6 % des cas,les cancers surviennent chez des hommes de plus de75 ans et dans 6,1 % des cas au-delà de 85 ans 48. Cetteproportion est de 31,4 % chez les femmes de plus 75ans et de 9,9 % des cas au-delà de 85 ans 48. Le can-cer de la personne âgée constitue donc un problème de

santé publique majeur par ses aspects médico-socio-économiques 48. Enfin, beaucoup de patients atteintsde tumeurs digestives sont très âgés (40 % des cas detumeurs colorectales chez les hommes et 52 % chez lesfemmes ont 75 ans ou plus) 48. L’incidence et la morta-lité des principaux cancers du sujet âgé en 2012 sontnotifiées dans le Tableau 4.

Conséquences cliniquesLa constipation a un impact négatif sur la qualité de viedes malades 4. Chez les patients âgés de 65 ans et plus,atteints de cancer, il y a plus de complications cyto-toxiques que chez les patients jeunes (Tableau 5) 50. Laphysiologie et le métabolisme du patient âgé changentavec l’avancée en âge. Cette détérioration est un fac-teur important à prendre en compte pour établir le trai-tement du patient âgé atteint de cancer.La constipation constitue l’une des principales plaintesfonctionnelles du sujet âgé atteint de cancer. Les sujetsâgés citent plus fréquemment l’effort à la défécation,

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Tableau 4 : Incidence et mortalité des principauxcancers du sujet âgé (données InVS 2012) 49.Localisations Incidence Mortalité

Populationglobale

75 anset plus

Populationglobale

75 anset plus

Prostate 71 220 22 564(32 %)

8 685 6 640(76 %)

Côlon-rectum 42 152 19 039(45 %)

17 722 11 144(62 %)

Sein 48 763 11 619(24 %)

11 886 5 706(48 %)

Poumon 39 495 10 323(26 %)

29 949 10 149(34 %)

Mélanome 11 176 2 933(26 %)

1 672 725(43 %)

Tous cancers 355 354 115 310(32 %)

148 378 77 005(52 %)

Tableau 5 : Modifications physiologiques du sujet âgéet conséquences sur le traitement 50.Modifications physiologiques Conséquences sur le traitement

Ralentissement de la réparationde l’ADN

Toxicité prolongée

Diminution des réservesmédullairesRalentissement du renouvellementcellulaire

Toxicité hématologique et mucites

Atrophie de la muqueuse digestive Diminution de l’absorption

Augmentation de la massegrasse/masse maigre

Altération de la distributiondes médicaments

Diminution de la masse hépatique Réduction du métabolisme

Diminution de la masse rénale Réduction de l’excrétion

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la nécessité de manœuvres digitales pour faciliter la défé-cation et le sentiment de blocage anal 51. Au niveauanal, la constipation favorise la procidence et les sai-gnements hémorroïdaires, ainsi que l’absence de cica-trisation des fissures anales. La stase colique peutentraîner une irritation de la muqueuse et une hyper-sécrétion se traduisant par une « fausse diarrhée »,liquide et glaireuse et contenant des scybales 12. Descomplications telles qu’un fécalome ou une colectasiepeuvent survenir. Le fécalome peut se manifester parune constipation et même par une sub-occlusion. Ilest plus souvent révélé par une fausse diarrhée parfoisassociée à une incontinence anale (encoprésie), parti-culièrement fréquente chez l’enfant et le sujet âgé 12.Ces complications diversement associées entre elleschez un même malade peuvent entraîner une décom-pensation de tares viscérales sous-jacentes. Ces com-plications sont d’autant plus graves qu’elles survien-nent chez le sujet âgé fragile. Le pronostic vital peutparfois être engagé 6.

Conduite à tenir devant uneconstipation chez un sujet âgéatteint de cancerLa stratégie thérapeutique est basée sur l'identificationet la gestion des causes sous-jacentes associées à untraitement symptomatique. Une connaissance pratiquede la physiologie de l'intestin et de la pharmacologie dutraitement laxatif est le fondement de cette approche 33.

Traitement de la constipationde la personne âgée atteinte de cancerRecommandationsActuellement, il n’existe aucune recommandation ni réfé-rentiel pour la prise en charge de la constipation despatients âgés atteints de cancer. Malgré tout, des recom-mandations françaises et internationales existent, maiselles ne sont pas adaptées au contexte oncogériatrique4,8,52. L'impact négatif de la constipation peut êtremodulé par l'institution de mesures thérapeutiquesappropriées 29. En général la conduite à tenir est la sui-vante 52 :1. Exclure d’autres pathologies et causes secondaires

4,52 ;2. Mesures hygiéno-diététiques (8 semaines) 4,52 ;3. Laxatifs de 1ère intention : osmotiques, de lest (muci-lages), émollients (pas de consensus sur l’ordre) 4,52 ;4. Laxatifs de 2ème intention : stimulants, par voie rectale(suppositoires et lavements) 4,52. Certaines guidelinesrecommandent une supervision médicale à ce stade 52 ;5. Chirurgie en dernier recours ou pour traiter les trou-bles identifiés qui nécessitent une intervention chirurgi-cale 52.

Mesures hygiéno-diététiques Il n’existe pas de données démontrant que les modifi-cations du régime alimentaire ou du style de vie sont effi-cace sur la constipation des personnes âgées 8, de plusles règles hygiéno-diététiques sont parfois difficiles àinstaurer en raison de l’édentation ou d’un appareillagedentaire inefficace. Néanmoins toutes les guidelines pourle diagnostic et le traitement de la constipation recom-mandent que ces dernières soient mises en œuvre enamont de l’intervention pharmacologique 52.Utilisation des laxatifs chez le sujet âgéatteint de cancerLe laxatif est un médicament. Il est prescrit pour unedurée déterminée, dispensée et réévaluée. On distingue5 classes principales de laxatifs. Leur mode d’action etleur indication en pratique clinique sont rappelés dansle tableau ci-dessous (Tableau 6).Il n'y a pas eu d'étude comparative adéquate entre lesdifférents laxatifs pour formuler des recommandations fon-dées sur des niveaux de preuves. Néanmoins, certaineséquipes se sont penchées sur l’utilisation des laxatifs chezle sujet âgé et proposent les hypothèses suivantes :- les laxatifs par voie rectale sont souvent insuffisantschez les constipés chroniques polymédicamentés 21 ;- les laxatifs émollients par voie orale empêchent l’ab-sorption des vitamines liposolubles 21 ;- la posologie des laxatifs osmotiques sucrés doit êtreprogressivement adaptée dans les traitements prolon-gés en raison de l’adaptation de la flore bactériennecolique 21 ;- les laxatifs de lest sont contre-indiqués en cas d’ato-nie colique 21 ;- les laxatifs stimulants sont à proscrire car irritantspour la muqueuse digestive et perdent de leur efficacitéavec le temps 21 ;- les laxatifs minéraux sont en partie absorbés et peu-vent entraîner des troubles électrolytiques 21. Leur utili-sation chez le sujet âgé est peu usuelle 6 ;- les laxatifs salins ne sont habituellement pas utilisésdans le cadre de la prise en charge de la constipationde la personne âgée. En effet, ils contiennent notammentdu sulfate de sodium qui, absorbé, même en faible quan-tité, présente un risque de surcharge sodée en casd’HTA, d’insuffisance rénale ou cardiaque 6. De mêmeune absorption, même en faible quantité, de sels demagnésium peut induire une hypermagnésémie en casd’insuffisance rénale 6 ;- les laxatifs osmotiques à base de macrogol sontinertes, non absorbés ni métabolisés et infermentesci-bles par les bactéries coliques 21 ;- les laxatifs osmotiques à base de macrogol, en particu-lier le macrogol plus électrolytes, sont bien tolérés et ont mon-tré leur efficacité au cours des maladies neurologiques 5.

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Tableau 6 : Les principaux laxatifs 4,53.Laxatifs OsmotiquesRecommandés comme traitement médicamenteux de première intention de la constipation pour leur efficacité et leur bonne toléranceaprès les règles hygiéno-diététiques et en complément de celles-ciLaxatifs hydratants (macrogol)

Effet osmotique par fixation des molécules d’eauLaxatifs non métabolisés par la microflore colique

Sels de magnésium(hydroxyde de magnésium)

Effet osmotique par modification des échanges hydro électrolytiquesIls se rapprochent de la classe des laxatifs stimulants

Les sucres non absorbables(lactitol, lactulose, mannitol,sorbitol et pentaérythitol)

Effet osmotique qui résulte de leur concentration dans l’intestin grêle et le côlonLa production intra-colique d’acides gras volatiles augmente leur pouvoir osmotique mais la productiondes gaz favorise les ballonnements

Laxatifs lubrifiants (ou émollients)Ils peuvent être proposés en deuxième intentionHuiles minérales non absorbables Modification du transit par lubrification du bol fécal

Un traitement prolongé peut majorer une incontinence anale, favoriser des suintements anauxet être à l’origine de déficits en vitamine

Laxatifs stimulantsIls sont réservés à des situations particulières (sujet âgé ou constipation réfractaire aux autres traitements) en raison de leurs effets secondairesAnthracéniques, bisacodyl,docusate et picosulfate de sodium,huile de ricin

Stimulation de la motricité colique en favorisant une sécrétion d’électrolytes ainsi qu’une augmentationde la perméabilité membranaire de l’intestin

Laxatifs de lestIls sont également recommandés comme traitement médicamenteux de première intention

Mucilages, gommes,fibres alimentaires

Formation d’un ballast qui retient l’eau dans le tube digestifLes laxatifs de lest augmentent la fréquence des selles et améliorent leur consistance

Laxatifs par voie rectaleIls sont recommandés en cas de troubles de l’évacuation chez les personnes âgées et les malades atteints de pathologie neurologique

Suppositoires, lavements Ils favorisent le réflexe de défécation en agissant le plus souvent par effet osmotique

ConclusionLa constipation constitue une des principales plaintesfonctionnelles du sujet âgé atteint de cancer. Définir ledegré d’inconfort qu’entraîne la constipation constituedonc un des points essentiels pour la prise en charge.Une prise de conscience des représentations et destabous qui entourent la fonction d’exonération assortied’une bonne connaissance de la physiopathologie de laconstipation permet une prise en charge efficace. Lescritères diagnostiques actuels ne sont pas interprétés dela même manière par les patients et par les soignants,et nécessitent une mise au point. Il n’existe pas derecommandations adaptées à la prise en charge de laconstipation dans la population âgée atteinte de cancers.Le traitement de la constipation doit débuter par desmesures hygiéno-diététiques adaptées à chaque patient6. Pour individualiser le traitement, il faut tenir compte

des comorbidités du patient et comparer les laxatifs entermes de sécurité, de commodité d'emploi, et de coût.Une attitude préventive systématique doit être initiée lorsdu recours à une chimiothérapie reconnue pour ses pro-priétés pro-constipantes. La même attitude est recom-mandée lors de l’utilisation d’antalgiques de palier IIIchez le sujet âgé. Le traitement de la constipation chezles patients âgés traités par des opiacés nécessite uneprise en charge adaptée 46. L’utilisation de laxatifs PEGà action osmotique semble la thérapeutique idéale dèslors qu’elle est associée à des électrolytes 6. Malgrétout, la protocolisation de la prise en charge de la consti-pation du sujet âgé atteint de cancer reste difficile et néces-site la concertation du praticien avec toute l’équipe soi-gnante. �

Conflit d’intérêt : aucun

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Mécanismes physiopathologiquesPathophysiologyC. Frère, L. Panicot-Dubois, M. Nguessan, C. Dubois

Quel Anticoagulant ?Which Anticoagulant treatment?M. Konan, D. Farge Bancel, P. Debourdeau, Y. Binan, A. Teixeira

ObservanceObservanceI. Mahé, J. Lazimi, Y. Bizet, M. Lamuraglia, J. Chidiac

Dossier thématique• Thrombose, Vieillissement et Cancer • Thrombosis, Aging and Cancer

Dossier thématique• Thrombose, Vieillissement et Cancer • Thrombosis, Aging and Cancer

Coordination : Dr Françis CajfingerService d ‘Oncologie Médicale du Pr Khayat, Hôpital de la Salpêtrière,47 boulevard de l’Hôpital, 75013 Paris, France.Courriel : [email protected]

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ÉditorialEditorial

F. CajfingerService d ‘Oncologie Médicale du Pr Khayat, Hôpital de la Salpêtrière,47 boulevard de l’Hôpital, 75013 Paris, France.Courriel : [email protected]

JOG J Oncogériatr 2014 ; 5 (3) : 70.

« La vieillesse est un naufrage »Charles de Gaulle

Quelques faits.

…..La Maladie thromboembolique veineuse ou MTEV est la deuxième cause de décès au cours du cancer ;le risque de décès est multiplié par quatre en cas de thrombose veineuse profonde (TVP).

Vingt pour cent des cancers fera une MTEV et la présence d’un cancer augmente le risque de MTEV de 6 à 7fois. Le risque de récidive de MTEV chez les malades cancéreux est multiplié par 3 par rapport à la populationgénérale. Et l’incidence de la MTEV est plus marquée au cours des 6 premiers mois suivant le diagnostic de lamaladie cancéreuse.

Quel est l’impact de l’âge dans la relation entre MTEV et cancer ?

L’âge est un facteur de risque indépendant de MTEV qui s’ajoute aux autres facteurs de risque et, d’ailleursaux Etats-Unis, le Président Obama avait considéré que la thrombose était une cause nationale.Ne négligeons surtout pas nos malades cancéreux sous prétexte qu’ils sont âgés car la vieillesse ne doit plusêtre un naufrage… �

Docteur Francis Cajfinger

Conflit d’intérêt : aucun

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Thrombose, Vieillissement et Cancer • Thrombosis, Aging and Cancer

Mécanismes physiopathologiquesPathophysiology

C. Frèrea, b, L. Panicot-Duboisb, M. Nguessanc, C. Duboisb

a. Laboratoire d’Hématologie, Assistance Publique-Hôpitaux de Marseille, CHU Timone, Marseille, France.b. Vascular Research Center of Marseille, INSERM UMRS-1076, Aix-Marseille Université, Marseille, France.c. Service de Médecine Interne, Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, Hôpital Saint-Louis, Paris, France.Correspondance : Dr Christophe Dubois, Vascular Research Center of Marseille, INSERM UMRS-1076,Aix-Marseille Université, Faculté de Pharmacie, 27 boulevard Jean Moulin, 13385 Marseille Cedex 05,France.Tél. : +33 (0)4 91 83 55 61, fax : +33 (0)4 91 83 56 02, courriel : [email protected]

RésuméDepuis sa première description par Armand Trousseau, l’association entre thrombose et cancer a été large-ment documentée. Cette association semble réciproque : si le cancer favorise la survenue de thromboses,l’hypercoagulabilité observée au cours de la maladie néoplasique favorise à son tour l’extension du proces-sus tumoral. Des progrès considérables ont été réalisés dans la compréhension des mécanismes procoagu-lants et des interactions entre l’hémostase et le cancer. Les cellules tumorales expriment plusieurs protéinesprothrombotiques, dont principalement le facteur tissulaire, qui sont capables d’activer le système de la coagu-lation aboutissant à la génération de thrombine et à la formation d’un caillot de fibrine. La thrombine géné-rée en excès active les plaquettes, et contribue à l’expression endothéliale de molécules d’adhésion impor-tantes pour la migration des cellules tumorales dans l’espace extravasculaire. D’autres mécanismes, mettantprincipalement en jeu le facteur tissulaire, le système fibrinolytique, les plaquettes, les cellules endothélialeset les microparticules, favorisent la néoangiogénèse, la croissance tumorale et la dissémination métastatique.L’inflammation associée au cancer et les taux élevés de cytokines pro-inflammatoires participent égalementà l’hypercoagulabilité et favorisent la coopération cellulaire. Les effets du vieillissement sur l’hémostase et lescellules endothéliales contribuent à entretenir et à potentialiser ce lien entre thrombose et cancer. La com-préhension des mécanismes physiopathologiques responsables de l’association entre thrombose, vieillisse-ment et cancer ouvre de nouvelles perspectives pour la prise en charge des patients, et pourrait prochaine-ment déboucher sur le développement de nouveaux biomarqueurs diagnotiques et pronostiques. Mots clés : Cancer, thrombose, vieillissement, coagulation, facteur tissulaire.

AbstractSince its first description by Armand Trousseau, the association between thrombosis and cancer has beenwell documented. This association seems reciprocal: if the cancer promotes the occurrence of thrombosis,hypercoagulability observed in neoplastic disease also promotes the extension of the malignancy. Considerableprogress has been achieved in the understanding of the procoagulant mechanisms and interactions betweenhaemostasis and cancer. The prothrombotic tumor cells express several proteins, primarily Tissue Factor, whichare able to activate the coagulation system resulting in thrombin generation and fibrin clot formation. Thrombingenerated in excess activates platelets, and contributes to the expression of endothelial adhesion moleculesthat are crucial for the migration of tumor cells into the extravascular space. The other mechanisms mainlyinvolve the Tissue Factor, the fibrinolytic system, the platelets, the endothelial cells and the microparticles,which promote neoangiogenesis, tumor growth and metastasis. The inflammation associated with cancer andthe high levels of pro-inflammatory cytokines favor the hypercoagulability and promote cell cooperation. Theeffects of aging on hemostasis and endothelial cells contribute to maintain and potentiate the link betweenthrombosis and cancer. Understanding of the pathophysiological mechanisms responsible for the associa-tion between thrombosis, aging and cancer opens new perspectives for the treatment of patients and maysoon lead to the development of new diagnostic and prognostic biomarkers. Keywords: Cancer, thrombosis, aging, coagulation, tissue factor.

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IntroductionDepuis sa première description en 1865 par ArmandTrousseau 1, l’existence d’une relation étroite entremaladie thrombo-embolique veineuse (MTEV) et can-cer a été confirmée par de nombreuses études cli-niques. Chez les patients atteints de cancer, la MTEVest 4 à 6 fois plus fréquente que dans la population géné-rale 2. Ainsi, 15 à 20 % des patients atteints de néo-plasie active développent un événement thrombotiqueau cours de l’histoire naturelle de leur maladie 2. La MTEVreprésente la deuxième cause de décès au cours de lamaladie cancéreuse; elle constitue un facteur pronos-tique défavorable qui impacte la survie globale despatients, complique la prise en charge 3,4 et induit unsurcoût pour la collectivité. Certains types de cancerssont plus fréquemment associés à la MTEV : ainsi, lesadénocarcinomes du pancréas, de l’estomac, de l’oe-sophage, du poumon, les gliomes, le cancer de l’ovaire,et enfin le myélome multiple, sont les pathologies néo-plasiques les plus fortement associées au risque desurvenue de MTEV 5. La prévalence de la MTEV aug-mente de façon exponentielle avec l’âge, et l’incidencedu cancer est multipliée par 3 après 65 ans. Il existe eneffet au cours du vieillissement un état prothrombo-tique d’origine multifactorielle qui aggrave l’état d’hy-percoagulabilité observé au cours des néoplasies etaccroît le risque de survenue de thrombose. Chez le sujetâgé, l’association thrombose et cancer est donc encoreplus fréquente que dans le reste de la population 6.L’association entre thrombose et cancer, plus fré-quente au cours du vieillissement, semble réciproque :si le cancer favorise la survenue de thromboses, l’hy-percoagulabilité observée au cours de la maladie néo-plasique et du vieillissement favorise à son tour l’ex-tension du processus tumoral. Il existe en effet desinteractions multiples et complexes entre les cellulestumorales et le système de l’hémostase. Les cellulestumorales possèdent, pour leur part, la capacité d’ac-tiver directement le système de la coagulation princi-palement via le facteur tissulaire, et elles produisent denombreuses cytokines pro-inflammatoires qui contri-buent à l’état d’hypercoagulabilité. Le système de lacoagulation joue quant à lui un rôle majeur dans la bio-logie tumorale, favorisant la néoangionénèse, la proli-fération tumorale, et la dissémination métastatique. Lecancer favorise donc l’hypercoagulabilité qui, elle-même, facilite la progression et l’invasion tumorale.Des progrès considérables ont été réalisés durant lestrente dernières années dans la connaissance du sujetâgé, ainsi que dans la compréhension des interactionsentre hémostase et cancer. Cette revue a pour objetde synthétiser les connaissances actuelles sur les lienscomplexes entre thrombose, vieillissement et cancer.

Un Etat d’hypercoagulabilitéau cours du cancer,majoré chez le sujet âgéPlusieurs éléments, résumés dans la triade de Virshow(stase veineuse, lésions endothéliales et troubles de l’hé-mostase) favorisent l’apparition d’un thrombus vei-neux. Ces éléments sont couramment réunis chez lespatients atteints de cancer, volontiers aggravés chezle sujet âgé, notamment en cas d’insuffisance car-diaque.Chez le patient âgé atteint de néoplasie active, la

stase veineuse peut résulter d’une compression vas-culaire extrinsèque (par la tumeur elle-même ou lesadénopathies satellites) ou bien encore de l’immobi-lisation, fréquente chez le sujet âgé à mobilité réduite.Les lésions endothéliales peuvent quant à elles résul-ter d’une effraction traumatique des vaisseaux ou delésions endothéliales secondaires à la libération d’in-terleukine-1 (IL-1) et de tumor necrosis factor-α (TNF-α) par les cellules tumorales. L’hypercoagulabilité estd’origine mutifactorielle et implique des mécanismesprothrombotiques complexes liés au vieillissement,aux cellules tumorales elles-mêmes et à leurs inter-actions avec d’autres cellules du compartiment vas-culaire. Les traitements du cancer (chirurgie, gestesinvasifs, mise en place de voie veineuse centrale(VVC), chimiothérapie, radiothérapie, hormonothé-rapie, agents antiangiogéniques, …) et la présencede nombreuses comorbidités chez le sujet âgé (insuf-fisance rénale, hypoalbuminémie, insuffisance vei-neuse, déshydratation fréquente, insuffisance car-diaque, diabète, etc) contribuent à différents degrésà cet état d’hypercoagulabilité qui favorise la surve-nue de la maladie thromboembolique veineuse. Laprise en charge de ces patients s’avère donc com-plexe et nécessite la prise en compte de tous cesfacteurs. L’inflammation participe en outre à la patho-genèse de la thrombose chez le patient âgé atteintde néoplasie 7.

Mécanismes procoagulantsmis en jeu au cours duvieillissement et du cancerAu cours du vieillissement, et indépendamment ducancer, des modifications de l’hémostase peuventapparaître, et vont dans le sens d’une hypercoagu-labilité. En particulier, les taux de protéines procoa-gulantes telles que les facteurs V, VII, VIII, IX, XIII, lekininogène de haut poids moléculaire, la prékallicréineet le fibrinogène augmentent avec l’âge, générant unétat prothrombotique 8. Cet état prothrombotique estaggravé par des phénomènes procoagulants spéci-fiques au cancer.

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Le facteur tissulaire (FT ou CD142), est une gly-coprotéine transmembranaire exprimée de façonconstitutive par les fibroblastes de la paroi vas-culaire et les cellules épithéliales. Son expressionest rapidement inductible dans les monocytes,les cellules musculaires lisses et les cellules endo-théliales. Il joue un rôle-clef dans l’activation dela coagulation ; en effet, lorsqu’il se lie au facteurVIIa, il forme un complexe qui initie la voie extrin-sèque de la cascade de coagulation aboutissantà la génération de thrombine. Le FT est surexprimédans de nombreux types de cancers, en particu-lier ceux qui sont fortement associées à un risquethrombotique élevé 9,10. Une corrélation entrel’expression tumorale du FT et la présence demutations affectant les gènes KRAS, EGFR ouHER2/neu ou les gènes suppresseurs de tumeursp53 et PTEN a été démontrée pour plusieurs typesde cancer 11. Chez les patients atteints de can-cer du pancréas, les taux plasmatiques de FT sontcorrélés au risque thrombotique 12. De par ses pro-priétés procoagulantes, le FT semble constituerun élément déterminant de la thrombogénéicité dela maladie néoplasique. En effet, il est à l’originede la génération de thrombine. La thrombine ainsigénérée permet la transformation du fibrinogèneen fibrine et la formation du réseau fibrineux quiconstitue majoritairement le thrombus. Elle estaussi capable d’activer les plaquettes et de régu-ler tout le système de la coagulation par rétrocon-trôle. Des concentrations élevées de plusieursmarqueurs de la génération de thrombine, telsque le fibrinopeptide A (FPA), les fragments de laprothrombine (F1+2), et les complexes thrombine-antithrombine (TAT) sont d’ailleurs retrouvées chezles patients atteints de tumeurs malignes métasta-tiques. Les taux élevés de facteur Willebrand, de facteurVIII et de fibrinogène, résultant de l’inflammationassociée au cancer, pourraient également contri-buer au phénomène d’hypercoagulabilité observéau cours de la maladie néoplasique.Enfin, certaines cellules tumorales comme les cel-lules de mélanome, de cancer du côlon ou de LAM3 expriment une protéase à cystéine calcium-dépen-dante, dénommée facteur procoagulant du cancerqui active directement le facteur X en facteur Xa.Ce facteur procoagulant du cancer serait capabled’induire par ailleurs une activation plaquettaireidentique à celle induite par la thrombine 13. Il par-ticipe à la sévérité des tableaux d’ hypercoagula-bilité observée chez le sujet âgé atteint de cancer,et parfois à la résistance au traitement.

Rôle des facteurs de la coagulationdans la croissance tumorale et ladissémination métastatiqueOutre son rôle procoagulant, le FT participe à diffé-rents processus essentiels au développement tumo-ral et à la dissémination métastatique. Plusieurs méca-nismes, dépendant ou non de la génération dethrombine, sont mis en jeu au cours de ces proces-sus 9. La thrombine, outre son rôle dans la coagula-tion, active directement la prolifération et la migrationdes cellules endothéliales ce qui, dans le contexte dumicro-environnement tumoral, contribue au recrute-ment de néovaisseaux sanguins indispensables à lacroissance tumorale. La thrombine régule égalementl’expression de facteurs proangiogéniques au niveaudes cellules endothéliales et tumorales, en particuliercelle du vascular endothelial growth factor (VEGF) vial’activation des récepteurs associées aux protéases(PAR) ; le VEGF est également libéré par les plaquetteslors de leur activation par la thrombine. La thrombineinduit par ailleurs l’expression de différentes molé-cules d’adhésion comme l’integrine αIIbβ3, la P-selectine (CD62P), et le CD40 ligand, facilitant l’adhé-sion des plaquettes et des cellules tumorales àl’endothélium et à la matrice extracellulaire. De plus,la thrombine favorise la perméabilité vasculaire etactive des métalloprotéases qui dégradent la mem-brane basale, facilitant la dissémination tumorale dansl’espace extravasculaire. Elle permet également lalibération de facteurs de croissance, de chémokineset de protéines extracellulaires qui favorisent la proli-fération et la migration des cellules tumorales. Enfin,la thrombine joue un rôle important via la formationdu réseau de fibrine, qui constitue une matrice proan-giogénique facilitant l’infiltration vasculaire 9.Le FT contribue également au développement tumo-ral et à la dissémination métastatique par des méca-nismes indépendants de la génération de thrombine.Il intervient dans plusieurs voies de signalisation intra-cellulaires au niveau des cellules endothéliales ettumorales. Le domaine intracytoplasmique du FTserait directement impliqué dans l'expression de fac-teur proangiogéniques et dans la régulation de lamigration cellulaire. Le complexe FT/VIIa/Xa a la capa-cité de cliver le récepteur associé aux protéases detype PAR-2, présent au niveau de certaines cellulestumorales, dont l’activation induit la sécrétion de ché-mokines et de facteurs proangiogéniques favorisantà la fois la migration, l’angiogenèse et l’invasion tumo-rale 14. Les modèles murins ont permis de compren-dre l’importance des voies de signalisation induitespar la thrombine et le FT dans les processus de crois-sance tumorale et de diffusion métastatique. En effet,

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l’inhibition de l’expression des PAR est associée à unediminution des métastases pulmonaires dans unmodèle murin de mélanome 15. L’effet, en sus duvieillissement, n’a pas encore été étudié dans cesmodèles.

Rôle de la fibrinolyseLe vieillissement s’accompagne de modifications dusystème fibrinolytique : des taux élevés de PAI-1 etde thrombin activable fibrinolysis inhibitor (TAFI), fac-teurs de risque de thrombose, ont été rapportés chezles sujets âgés 8. Au cours du cancer, il existe en sus,une dérégulation de la balance fibrinolytique qui contri-bue au potentiel prothrombotique. Certains des com-posants du système fibrinolytique semblent jouer unrôle majeur au cours de la progression tumorale, enparticulier l’urokinase type plasminogen activator(uPA), son récepteur (uPAR), et l’inhibiteur de l’acti-vateur du plasminogène (PAI-1) qui sont exprimés etsécrétés par les cellules tumorales. Leur expressionpourrait en partie être médiée par l’activation de PAR-2 par le complexe TF-FVIIa/Xa. Récemment, il a éga-lement été démontré dans un modèle murin que l’ac-tivation de l’oncogène MET conduit à une augmentationde l’expression du PAI-1 16. Le PAI-1, en inhibant lafibrinolyse, retarde la dissolution du caillot de fibrine,contribuant à la fois au potentiel prothrombotique età la conservation de la matrice proangiogénique queconstitue le caillot fibrineux, facilitant l’infiltration vas-culaire. L’uPA, couplé à son récepteur, contribue à ladégradation de la matrice extracellulaire et à la dis-sémination tumorale, et améliore la prolifération, la crois-sance cellulaire et la motilité des cellules via la voiedu platelet-derived growth factor (PDGF) dans unmodèle cellulaire de cancer du sein 17. Cliniquement,les taux d’uPA et de PAI-1 sont corrélés à la surviesans rechute et la survie globale dans le cancer dusein 17, et les résultats des études cliniques ont per-mis de conclure à la valeur pronostique d’uPA/PAI-1avec un niveau de preuve élevé dans le cancer du sein18.

Interactions entre les plaquettes etles cellules tumoralesLe vieillissement s’accompagne d’altérations de lafonction plaquettaire. Un raccourcissement du tempsde saignement, ainsi qu’une élévation significative decertains marqueurs de l'activation plaquettaires (β-thromboglobuline, facteur plaquettaire 4) ont été obser-vés chez les sujets âgés. Une augmentation du contenuen phospholipides a également été retrouvée, sug-gérant une augmentation du signal transmembranaireavec l’âge 8. A cet état d’hyperactivation plaquettaire

observé chez le sujet âgé s’ajoutent des modificationsquantitatives et qualitatives des plaquettes au coursde la maladie néoplasique. Une thrombocytose modé-rée est en effet observée chez plus de 30% despatients atteints de cancer; elle s’accompagne d’uneactivation plaquettaire que reflète la présence de mar-queurs d'activation tels que le facteur plaquettaire 4,le CD62P, et LAMP-3 (CD63) 19. Chez les patientsatteints de cancer, un taux élevé de plaquettes est asso-cié à une évolution plus péjorative 20. A l’inverse,chez la souris, une déplétion en plaquettes est asso-ciée à une réduction du nombre de métastase 21. Dansdes modèles murins de souris déficientes en GPIb-IX (récepteur plaquettaire pour le facteur Willebrand)ou en GPVI (récepteur plaquettaire pour le collagène),le nombre de métastases pulmonaires est réduit parcomparaison aux souris contrôles 22,23. De plus, lesplaquettes activées relarguent des agents mitogèneset proangiogéniques tels que le PDGF et le VEGFfavorisant la croissance tumorale et la néoangigé-nèse. Par ailleurs, les plaquettes ont la capacité des’agréger autour des cellules tumorales, les protégeantde la destruction par les cellules NK et jouant un rôleimmunomodulateur envers ces dernières 24. Les pla-quettes jouent donc un rôle clef dans la croissancetumorale et la dissémination métastatique.

Rôle des microparticulesLes microparticules sont des structures vésiculairescomplexes libérées par les cellules au cours des pro-cessus d’activation et d’apoptose. Elles sont compo-sées d’une double couche de phospholipides et expo-sent des protéines transmembranaires et desrécepteurs ; elles contiennent également des com-posants cytosoliques provenant de leurs cellules mères25. L’activation d’oncogènes, tels que KRAS et lerécepteur du facteur de croissance épidermique(EGFR), ainsi que l’activation ou la perte du gène sup-presseur de tumeur p53 peuvent induire un proces-sus de vésiculation de la cellule tumorale 26. Les cel-lules tumorales libèrent des microparticulesprocoagulantes portant le FT (MP-FT+) qui contri-buent à augmenter le risque de MTEV. Le rôle patho-gène de ces MP-FT+ a été suggéré par plusieursétudes cliniques 25,27,28, et documenté chez la sou-ris 29. En effet, dans un modèle murin de thrombus,l’injection de microparticules de lignées tumoralespancréatiques humaines et murines induit un rac-courcissement du temps d’occlusion veineux et arté-riel, et ces microparticules spécifiquement dérivéesde la tumeur se lient au thrombus de manière dépen-dante du P-selectin glycoprotein ligand-1 (PSGL-1)29. De nombreuses études cliniques visant à établir

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le rôle des MP-FT+ dans la survenue des thrombosesassociées au cancer, et leur intérêt comme biomar-queur potentiel pour identifier des patients à risquede MTEV, sont actuellement en cours.Par ailleurs, les microparticules ont la capacité detransférer du matériel biologiquement actif entre lescellules, en particulier des récepteurs oncogéniqueset des transcrits ARN, et pourraient ainsi jouer un rôledans le processus de croissance tumorale.

Rôle de l’inflammationL’activation de la coagulation chez les patients atteintsde cancer favorise l'inflammation locale et systémiquequi, réciproquement, contribue à l’état d’hypercoa-gulabilité. Les cytokines pro-inflammatoires telles quel’IL-1 et le TNF-α, libérées par les monocytes activés,les cellules endothéliales activées et les cellules tumo-rales, contribuent au potentiel prothrombotique eninduisant l’expression du TF et en inhibant l’expres-sion de la thrombomoduline anticoagulante. Ces cyto-kines jouent également un rôle régulateur sur la fibri-nolyse en modulant l’expression endothéliale de t-PAet du PAI-1. De plus, la réaction inflammatoire induitune expression de molécules d'adhésion qui ampli-fie la coopération cellulaire des cellules du comparti-ment vasculaire. L’integrine αIIbβ3, la P-selectine, etle CD40 ligand, en favorisant l’adhésion des cellulestumorales à l’endothélium et à la matrice extracellu-laire, jouent eux aussi un rôle majeur dans la dissé-mination tumorale 7,30.

Rôle des thérapies anticancéreusesLa chirurgie oncologique, les gestes invasifs, la miseen place de voie veineuse centrale (VVC), et les agentsantitumoraux contribuent à augmenter le risque throm-botique chez les patients atteints de néoplasie évo-lutive, et plus encore chez le sujet âgé dont la tolé-rance au traitement est moindre. La toxicité deschimiothérapies conventionnelles est à présent clai-rement démontrée et participe au risque thrombotique.Les hormonothérapies contribuent également aurisque thrombotique en induisant une résistance à la

protéine C activée. La L-asparaginase induit quant àelle des déficits acquis en antithrombine qui prédis-posent à la survenue de MTEV 31. Chez les patientsatteints de myélome multiple, les traitements parimmunomodulateurs comme le thalidomide augmen-tent significativement le risque de thrombose 32. Enfin,les agents antiangiogéniques augmentent significati-vement le risque de thrombose artérielle 33.

Conclusions Les connaissances sur les mécanismes procoagulantsmis en jeu au cours du vieillissement et du cancer ontconsidérablement progressé au cours des dernièresannées. L’état prothrombotique observé chez le patientâgé atteint de cancer est d’origine multifactoriel etrésulte du vieillissement lui-même (vasculaire, endothé-lial et plaquettaire), de facteurs intrinsèques au cancer,telle la capacité des cellules tumorales à induire lagénération de thrombine, et de facteurs extrinsèquestels que la compression vasculaire et l’effet iatrogènedes traitements antinéoplasiques. De plus, l’inflamma-tion locale et systémique participe activement à l’étatprocoagulant. Réciproquement, au cours du cancer,l’hypercoagulabilité favorise la néoangiogénèse, la crois-sance et la dissémination tumorale par des méca-nismes mettant principalement en jeu le FT, la throm-bine, le système fibrinolytique, les plaquettes, lesmicroparticules et l’inflammation. Les effets du vieillis-sement contribuent à entretenir et à potentialiser cesinteractions multiples et complexes entre hémostaseet cancer.La compréhension des mécanismes physiopatholo-giques responsables de l’association entre thrombose,vieillissement et cancer ouvre de nouvelles perspectivespour la prise en charge des patients âgés. La mise enévidence, dans cette population donnée, de nouveauxbiomarqueurs diagnotiques et pronostiques devraitpermettre, dans l’avenir, d’améliorer la prise en chargeindividuelle de ces patients en tenant compte de leursspécificités. �

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Quel Anticoagulant ?Which Anticoagulant treatment?

M. Konana,b, D. Farge Bancela,c, P. Debourdeaud, Y. Binanb, A. Teixeirae

a. Service de Médecine Interne et Maladie Vasculaire, Hôpitaux Universitaires Saint Louis LariboisièreFernand Widal, APHP, 1 rue Claude-Vellefaux, 75010 Paris, France.b. Service de Médecine Interne, CHU de Treichville, Abidjan, Côte d’Ivoire.c. INSERM UMRS 1160, Paris VII - DIDEROT, France.d. Institut Sainte Catherine, 250 chemin de baigne pieds, CS 80005, 84918 Avignon cedex 09, France.e. Service de Gériatrie, Hôpitaux Universitaires Saint Louis Lariboisière Fernand Widal, APHP,200 rue du faubourg Saint Denis, 75010 Paris, France.Correspondance : Dr Antonio Teixeira, Service de Gériatrie, Hôpitaux Universitaires Saint Louis LariboisièreFernand Widal, APHP, 200 rue du faubourg Saint Denis, 75010 Paris, France.Tél. : +33 (0)1 40 05 42 90, fax : +33 (0)1 40 05 42 91, courriel : [email protected]

RésuméContexte : La population française va connaître, sur les trente prochaines années, une révolution démogra-phique au travers d’un phénomène de vieillissement. L’association entre vieillissement et cancer représenteun facteur de risque important et cumulatif d'événements thromboemboliques. Objectifs : Au travers d’une revue de la littérature, nous proposons une synthèse épidémiologique de la rela-tion vieillissement-cancer-anticoagulation et des schémas thérapeutiques proposés.Méthodes : Réalisation d’une revue systématique. Conclusion : Les héparines de bas poids moléculaire ont été validés dans la prévention et le traitement cura-tif de la maladie thrombo-embolique chez les patients cancéreux avec une variation du risque hémorragiqueen particulier, en fonction de la clairance rénale.Mots clés : Cancer, sujets âgés, thrombose veineuse, recommandations.

AbstractBackground: The French population will experience, over the next thirty years, a demographic revolution throughan aging phenomenon. The association between aging and cancer is a significant and cumulative thromboem-bolic events risk factor. Objectives: Through a literature review, we propose an epidemiological overview of the link between aging-related cancer and anticoagulation and the therapeutic regiments which can be proposed. Methods: Conducting a systematic review.Conclusion: The low molecular weight heparins have been validated in the prevention and therapy of throm-boembolic disease in cancer patients with a change in the risk of bleeding in particular according to renalclearance. Keywords: Cancer, elderly, venous thrombosis, guidelines.

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IntroductionLes maladies veineuses thromboemboliques (MTEV)représentées par les Thromboses Veineuses Profondes(TVP), incluant la thrombose sur cathéter veineux cen-tral (TVKTC), et les embolies pulmonaires (EP), sontdes pathologies fréquentes chez les sujets âgés deplus de 75 ans 1-3. L’avancée en âge représente unfacteur de risque important de MTEV, associée à d’au-tres facteurs plus spécifiques aux patients âgés telsque l’immobilisation, et la présence de comorbiditésassociées souvent sévères 2,4,5. Fort logiquement,considérant le vieillissement de la population, on vaassister à une recrudescence de ce type de maladiesen lien avec l’âge. La révolution démographique encours, qu’est le vieillissement de la population, va serencontrer particulièrement jusqu’en 2050 selon lesprojections de l’INSEE. A cet horizon, les plus de 65ans devraient représenter en France plus du tiers dela population 6. Parmi ces maladies, on peut particulièrement citercertains cancers, l’insuffisance cardiaque ou les mala-dies neuro-dégénératives, comme la maladied’Alzheimer. Cette dernière touche aujourd’hui 700 à800 000 individus en France, et concerne 150 000nouveaux cas par an, la prévalence augmente forte-ment avec l’âge pour toucher particulièrement lesindividus de plus de 80 ans 7. Le vieillissement et laprésence d’un cancer représentent des facteurs derisque importants et cumulatifs de survenue d’événe-ments thromboemboliques veineux 8,9. Par ailleurs,au-delà de 75 ans, la présence de nombreuses comor-bidités, notamment la coexistence d’une insuffisancerénale plus ou moins sévère (présente chez 10 % desindividus de plus de 65 ans), d’une hypoalbuminémieavec dénutrition, d’une amblyopie ou de troubles cog-nitifs et d’une dépendance pour la prise des médica-ments, introduisent des difficultés particulières quantau traitement des MTEV, et en particulier par le manie-ment des anticoagulants 10-14. Les patients âgés représentent la population la plusà risque de MTEV ou de ses complications, et il estessentiel d’avoir une vision claire des schémas thé-rapeutiques adaptés à leur proposer 10. En effet cespatients sont fréquemment, voire le plus souvent,exclus des essais cliniques 11 en raison des contre-indications relatives ou absolues liées aux comorbi-dités. Les schémas thérapeutiques chez le sujet âgésont en fait le plus souvent l’extrapolation des résul-tats obtenus chez des sujets jeunes conduisant à unegrande prudence dans la mise en œuvre individuelle.Une personne âgée ne saurait être écartée des lignesdirectives internationales spécifiques émises pour letraitement et la prophylaxie de la MTEV associée au

cancer 12. En effet, de nombreuses études ont mon-tré que chez les patients atteints de cancer, la MTEVreprésente une importante cause de mortalité 13-17,tout particulièrement pour les malades âgés, c’est la2e cause de décès derrière le cancer 18,19. A titred’exemple, l’EP représente 5-10 % des décès chezles patients hospitalisés atteints de cancer et estconsidérée comme la première cause de décès évi-tables 20.

Epidémiologie et facteurs de risquede la MTEV chez le sujet âgéIncidence de la MTEV au cours du cancerchez le sujet âgéL’incidence de la MTEV (associée ou non au can-cer) augmente avec l’âge 4,21,22. Le risque de MTEVest faible avant l’âge de 40-60 ans, puis augmentede manière significative pour atteindre une prévalencede 1 % chez les 75 ans et plus. On estime que chezl’individu âgé de 60 à 74 ans, la prévalence de MTEVest d’environ 3,5 pour 1 000 14,23.Chez les patients cancéreux, la MTEV est une com-plication fréquente, et environ 15 à 20 % des patientsatteints de cancer vont développer une MTEV symp-tomatique au cours de leur maladie 24,25. Il a été estiméqu’un malade sur sept hospitalisés atteints de cancerdécède par MTEV 26,27. Le risque de présenter uneMTEV est six à sept fois plus élevé chez les patientscancéreux par rapport aux patients non cancéreux.La plupart des complications thromboemboliques vei-neuses vont survenir au cours de la première annéeaprès le diagnostic de cancer 28. A titre d’exemple,la plus forte incidence de MTEV survient au cours dela première année de suivi chez les patients atteintsde cancer de l’estomac, de la vessie, de l’utérus, durein, du poumon et les cancers métastatiques dupancréas. Le risque de récidive après un premier épi-sode de MTEV est plus élevé chez les malades can-céreux 29. Ce risque est corrélé au stade de la néo-plasie : il est augmenté d’un facteur 2 à 3 chez lesmalades atteints de cancer localisé, et va atteindreun facteur 5 dans les formes localement avancées oumétastatiques 13,30.Facteurs de risque de la MTEV chez lepatient âgé et atteint de cancerQuel que soit l’âge des patients, les différents fac-teurs de risque (FDR) se conjuguent et doivent faireconsidérer ceux liés au cancer, au patient ou aux trai-tements (chirurgie, pose de cathéter, chimiothérapie).Ils peuvent varier pour un même patient tout le longde la maladie cancéreuse, au cours du traitement depremière ligne, du cancer ou lors de la rechute de cecancer voire lors des situations de soins palliatifs.

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FDR liés au cancer Le risque de MTEV est ainsi plus élevé chez lespatients porteurs d’adénocarcinome muco-secrétantdu tube digestif, de cancer pancréatique, pulmonaireou ovarien, de leucémie aigüe promyélocytaire, ou desyndrome myéloprolifératif 31. Le risque de MTEVaugmente également en fonction de l’extension tumo-rale 28. Ainsi, les cancers métastasés sont 10 à 20fois plus thrombogènes que les formes localisées 32.FRD liés au patient Plus encore que chez le patient jeune, il existe uncaractère multifactoriel de la MTEV chez ces patientsâgés 33. Parmi les facteurs cliniques, on citera l’étatd’hypercoagulabilité que l’on peut quasiment consi-dérer comme constitué chez le patient âgé. En effet,la stase veineuse va s’associer au vieillissement intrin-sèque du système veineux, réunissant les trois com-posantes de la triade de Virchow 9. Les autres fac-teurs liés au patient sont représentés par lesantécédents personnels ou familiaux de MTEV 31 etles comorbidités actives particulièrement présenteschez les patients âgés, l’insuffisance cardiaque, lesinfections, l’anémie, les atteintes hépatiques et l’in-suffisance rénale 17,34.L’hospitalisation elle-même, en particulier en chirur-gie, comme le suggèrent les données de Medenox®,augmente le risque de MTEV. L’augmentation durisque de MTEV a été chiffrée à un facteur 1,6 com-parativement aux malades non cancéreux et sanschirurgie 35. Ce risque peut être diminué par la miseen œuvre de la thromboprophylaxie 8,24,36. FDR liés au cancerParmi les facteurs de risque liés au traitement du can-cer, la chimiothérapie représente un facteur de risqueindépendant de MTEV chez ces patients cancéreux37. Pour assurer ces thérapeutiques, la pose de cathé-ter veineux central peut constituer un problème majeur,qui peut favoriser la survenue d’EP avec élémentaggravant, la perte de l’accès veineux chez ces patientsdans 10 % des cas 38. Les médicaments anticancé-reux conventionnels, notamment le Cisplatine®, lePlatine®, la Thalidomide® et la Lénalidomide® ont ététous associés à un taux élevé de MTEV 33.Chez le patient âgé, leur utilisation sera modulée parl’évaluation oncogériatrique préalable effectuée lorsde la Réunion de Concertation Pluridisciplinaire (RCP)37,39,40. La RCP permet, comme le proposent lesauteurs tel que Balducci, d’adapter la prise en chargethérapeutique, en tenant compte de certains critèresgériatriques (nombre de comorbidités), notamment lestroubles cognitifs , les syndromes gériatriques (l’incon-tinence, les chutes ou la présence d’une sarcopénie)et d’une atteinte dans les gestes de la vie quotidienne,

afin de classer les patients âgés atteints de canceren trois graduations de prise en charge thérapeu-tique à visée carcinologique : - Grade I : identique aux sujets jeunes ;- Grade II : modulée en fonction de la tolérance pré-visible ;- Grade III : orientée vers des soins palliatifs ou deconfort.

Traitement de la MTEV des patientscancéreux âgésProphylaxie de la MTEV chez le sujet âgéL’utilisation de la thromboprophylaxie adaptée chezle sujet âgé atteint de cancer permet de diminuer lerisque élevé de MTEV. Les études chez les patientshospitalisés ont montré que les héparines de baspoids moléculaire (HBPM), à une dose fonction dupoids corporel, sont la seule offre appropriée en alter-native à l’héparine non fractionnée (HNF) en cas deMTEV en termes de sécurité et d’efficacité 41,42,même en relais de l’hospitalisation. On pourra consi-dérer, à visée préventive de la MTEV, l’apport de dis-positifs mécaniques tels que les bas de contentiondes membres inférieurs, qui permettront égalementde lutter contre les syndromes post-thrombotiques 43.Que ce soit en milieu chirurgical ou en milieu médi-cal, il existe en France des précautions d’emploi desHBPM chez les sujets de plus de 75 ans ; elles sontdéconseillées, mais non contre indiquées, à doseprophylactique en cas d’insuffisance rénale sévèredéfinie par une clairance de la créatinine inférieure à30ml/min ; l’héparine calcique en 3 injections par jourvoire deux sera alors préférée 50.Dans le contexte de la chirurgie, la prophylaxie restebien codifiée et doit être adaptée en fonction des fac-teurs de risque liés au type de chirurgie, et au patient44. Du fait de leur grande efficacité et de leur grandefacilité d’utilisation 45, les HBPM sont largement uti-lisées y compris chez les patients de plus de 75 ans46, avec des indications, un schéma posologique etune durée de traitement propres à chaque molécule.Cependant, et notamment chez le sujet âgé, cesmolécules sont contre indiquées en cas d’insuffisancerénale sévère, introduisant un risque majeur de com-plication hémorragique 47,48. Celle-ci sera évaluée,en pratique, par la formule de Cockcroft 49, chez lespatients très âgés, il n’existe que peu de données spé-cifiques.En milieu non chirurgical, les stratégies prophylac-tiques de MTEV sont moins bien définies, du fait d’uneplus grande hétérogénéité des patients, et du nom-bre limité d’essais thérapeutiques spécifiques. Lesessais menés avec l’Enoxaparine® (Medenox® : pro-

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phylaxis in MEDical patients with ENOXaparin®) qui aévalué l’effet de la thromboprophylaxie del'Enoxaparine® dans une étude randomisée, contre pla-cebo et multicentrique chez 4 000 patients de plus de40 ans hospitalisés pour une pathologie médicaleaiguë, avec immobilisation récente et présentant aumoins 1 facteur de risque supplémentaire de MTEV50, la Daltéparine® (Prevent® : Prospective evaluationof deltaparin efficacy for prevention of VTE in immo-bilized patients) qui comparait le Deltaparine® au pla-cebo, 51 ou le Fondaparinux® (Artemis® : Arixtra forthromboembolism preventionin a medical indicationstudy), ont montré une réduction de près de 50 % desMTEV chez le patient hospitalisé avec l’emploi de cesmolécules 5. Ces essais ont permis pour chacune deces trois molécules d’obtenir l’AMM (Autorisation deMise sur le Marché) en traitement prophylactique dela MTEV, pour une durée maximale de traitement de14 jours, dans un champ relativement large : lespatients récemment alités pour une affection aigüeassociée à au moins un autre facteur de risque deMTEV, dont l’âge supérieur à 75 ans et la présenced’une néoplasie.En pratique gériatrique, l’analyse en sous-groupe despatients âgés inclus dans les études Medenox® et pourle Prévent®, montre que plus les patients sont âgés,plus l’efficacité est grande dans la prévention de laMTEV 45,52. Néanmoins, il est important de noter que dans l’étudeMedenox®, deux doses d’Enoxaparine® étaient utili-sées, la dose la plus faible à 20 mg et quotidienne-ment, ne s’est pas révélée plus efficace que le pla-cebo en terme de thromboprophylaxie, y comprischez les plus de 80 ans 50,52.

Le traitement curatif de la MTEVau cours du cancer chez les patientsâgés Concernant les HBPM, comme précisé précédem-ment, l’Agence Nationale de Sécurité du Médicamentet des produits de santé (ANSM) contre indique leurutilisation chez les patients avec une insuffisancerénale sévère. L’évaluation de la fonction rénale, parla formule de Cockcroft, doit donc être systématiqueaprès 75 ans 42 comme pour tout médicament.Les HBPM seront contre-indiquées en cas d’insuf-fisance rénale sévère définie par une clairance de lacréatinine inférieure à 30 ml/min ; elles sont décon-seillées, à dose curative, si la clairance est compriseentre 30 et 60 ml/min, ou lors d’association médica-menteuse dangereuse, notamment après 65 ans. Laprescription devra alors être évaluée, au cas par cas,selon le critère bénéfice/risque. Il est rappelé qu’il faut

un poids récent pour calculer la posologie, comptetenu de la marge thérapeutique étroite et de la néces-sité d’adapter les doses injectées selon le poids dupatient. La surveillance de l’activité anti-Xa sera assu-rée étroitement chez le sujet âgé, a fortiori en cas d’in-suffisance rénale et/ou de poids extrême (< 40 kg),ou en cas d’accident hémorragique.Devant une MTEV survenant au cours d’un cancer,une HBPM, en relais du traitement initial, est recom-mandée par l’ANSM. En outre la durée idéale du trai-tement par HBPM sera d’au moins 3 mois en fonc-tion de la tolérance, de l’évolution du cancer et desmodifications de son traitement. Au-delà de 6 mois,si le cancer est toujours traité, et si le patient tolèrele traitement, il est recommandé de poursuivre lesHBPM ; si le cancer n’est plus traité ou si le patientne tolère pas ou plus les HBPM, il est recommandéd’instaurer un relais par anti Vitamine K (AVK) 35,41,53.En cas de nécessité de recours aux AVK, le choixde la molécule doit se porter vers des dérivés à demi-vie longue qui améliorent la stabilité de l’anticoagula-tion, la Fluindione (Préviscan®) ou, de préférence, laWarfarine (Coumadine®) 42. L’ANSM recommande dedébuter par une dose diminuée de moitié chez lesujet âgé comparativement à celle recommandéechez un patient d’âge moyen 47. Concernant l’utili-sation des AVK, Rose et al. ont retrouvé, dans unecohorte de patients recevant un traitement par AVKpour des indications variées, un plus grande instabi-lité du taux d’INR (International Normalized Ratio)chez les patients cancéreux, ce qui conduisait plusfréquemment des contrôles biologiques. On retrou-vait également significativement plus de complica-tions thrombotiques 42. Il est à noter que le traitementpar chimiothérapie a été associé à une augmentationde la variabilité de l’INR, chez ces patients cancéreuxet âgés dont le risque de récidive de la MTEV est aug-menté sous AVK 43.Le traitement de la MTEV par AVK chez les patientsatteints de cancer est moins efficace et moins bientoléré que chez les patients indemnes de cancer.L’utilisation des AVK chez les patients cancéreux estdonc compliquée, en particulier chez les patientsâgés. Un certain nombre de médicaments peuventavoir un effet potentialisateur des AVK, on veillera enparticulier aux antifongiques, antibiotiques ou àl’Amiodarone® 54,55. De plus la dénutrition et hypo-albuminémie notamment, plus fréquemment retrou-vés dans la population âgée, ainsi que le risque dechute souvent multifactoriel, peuvent également ren-dre plus difficile le maniement de ces molécules et limi-ter leur utilisation pour des raisons de majoration, vule risque de complications 56.

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Conclusion Les HBPM ont été validées à la fois dans la préven-tion et le traitement curatif de la maladie thromboem-bolique chez les patients cancéreux. Il existe unevariation substantielle du risque hémorragique quel quesoit le type de cancer, en particulier chez les patientsà haut risque tels que les personnes âgées. La clai-rance rénale, fréquemment réduite chez les patientsâgés, rend l'utilisation des HBPM particulièrementdélicate dans cette population. Dans ces situations,

du fait d’accumulation de ces médicaments, on noteune augmentation du risque de saignement. L’intérêtdes HBPM dans le traitement curatif ou prophylac-tique de la maladie thromboembolique chez les patientscancéreux âgés pourrait alors apparaître comme limitépar le risque hémorragique.L’indication des AVK parfois nécessaire aura unmaniement plus difficile et une moindre efficacitéquand la MTEV est associée à un cancer. �

Conflit d’intérêt : aucun

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Patient âgé, thrombose et cancer :une incidence en augmentation,données épidémiologiques Le nombre des patients âgés atteints de thromboseet cancer est en augmentation. L’augmentation de l’in-cidence des événements thrombo-emboliques veineux(ETEV) mais aussi des cancers avec l’âge y participe.En effet, les patients âgés représentent le plus grandsous-groupe de patients atteints d’ETEV 1,2. Le risqued’ETEV double tous les 10 ans après 40 ans et atteint1 % par an chez les patients âgés de plus de 75 ans2. Par ailleurs, l’incidence de tous les types de tumeuraugmente également avec l’âge. En France, plus de164 000 nouveaux cas de cancers sont diagnostiquéschaque année chez les plus de 65 ans 3.

La Worcester Thromboembolism Study s’est inté-ressée à l’incidence, l’évolution et la prise en chargethérapeutique initiale des patients atteints d’ETEVselon leur âge (plus ou moins de 65 ans) pour lesannées 1999, 2001, 2003. Il apparaît que l’incidencedes ETEV totales augmente fortement avec l’âge quelque soit le type d’ETEV (Tableau 1). Par ailleurs, lespatients de plus de 65 ans avec ETEV sont plus sou-vent des femmes (60,8 vs 48,1 %, p < 0,001), avecun diagnostic récent de cancer (et rapportées au can-cer) (37,3 vs 20,7 %, p < 0,001), avec une hospitali-sation récente (44,9 vs 31,6 %, p < 0,001), une infec-tion sévère (28,2 vs 23,3 %, p = 0,017). Ces patientsont moins fréquemment un ETEV provoqué (18,0 vs29,7 %, p < 0,001) 1.

ObservanceObservance

I. Mahéa,b, J. Lazimib, Y. Bizetb, M. Lamuragliab, J. Chidiacb

a. EA Recherche Clinique Coordonnée Ville-Hôpital, Méthodologies et Société (ED 393) ;Unité Recherche Clinique Coordonnée Ville-Hôpital ; Université Paris-Diderot, Sorbonne Paris-Cité, France.b. Service de Médecine Interne, Hôpital Louis Mourier, AP-HP, Université Paris 7, 178 rue des Renouillers,92700 Colombes, France.Correspondance : Pr Isabelle Mahé, Service de Médecine Interne, Hôpital Louis Mourier, AP-HP,Université Paris 7, 178 rue des Renouillers, 92700 Colombes, France.Tél. : +33 (0)1 47 60 64 90, fax : +33 (0)1 47 60 64 91, courriel : [email protected]

RésuméLe nombre des patients âgés atteints d’événements thromboemboliques veineux dans un contexte de can-cer est en augmentation. La prise en charge thérapeutique comporte une prescription médicamenteuse adap-tée mais aussi la prise en compte et l’optimisation de l’observance au traitement, conditions nécessaires àaméliorer le rapport bénéfice risque du traitement anticoagulant dans cette population particulièrement fra-gile. Les mécanismes entrant en jeu dans l’observance et les particularités du sujet âgé seront abordées, per-mettant de proposer une prise en charge multidisciplinaire individualisée et Oncogériatrique.Mots clés : Maladie veineuse thromboembolique, sujets âgé, oncologie, observance.

AbstractThe number of elderly patients with venous thromboembolic events in the context of cancer is increasing.Therapeutic management includes drug prescription but also suitable consideration and optimization of treat-ment adherence, improve conditions for the risk-benefit ratio of anticoagulation in this particularly vulnerablepopulation. The mechanisms involved in adherence and elderly specific features will be addressed to providean individualized and oncogeriatric multidisciplinary approach.Keywords: Venous thromboembolism, elderly subjects, oncology, observance.

JOG J Oncogériatr 2014 ; 5 (3) : 83-92.

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Patient âgé, thromboseet cancer, un patient fragile :des recommandations, à la réalitédes pratiques Les patients inclus dans les essais thérapeutiques ran-domisés sur lesquels reposent les recommandationsactuelles avaient un âge moyen entre 50 et 60 ans 4.Dans les recommandations internationales, aucunespécificité n’est mentionnée en ce qui concerne l’âgedes patients. Donc, chez les sujets âgés, la recomman-dation classique s’applique : en l’absence de cancer,traitement initial par héparine (HNF ou HBPM), suivi d’unrelais AVK ; en cas de cancer, 3 à 6 mois d’HBPM sila clairance de la créatinine est supérieure à 30 ml/minou AVK si la clairance de la créatinine est inférieure à30 ml/min 5.Le registre RIETE nous offre un outil de choix pourobtenir une description de la réalité des patients atteintsde MTEV. Il s’agit d’un registre international multicen-trique prospectif recueillant les caractéristiques et le suivides patients inclus consécutivement pour ETEV. Laparticularité de ce registre est de laisser au praticien lelibre choix du traitement anticoagulant administré aupatient. Nous avons analysé les caractéristiques despatients de ce registre âgés de plus de 75 ans, ayantun événement thromboembolique veineux dans uncontexte de cancer 6. Au total 2 155 patients ayant ceprofil ont été étudiés, inclus entre 2001 et 2010 (Tableau2). L’âge moyen était de 80,9 ans ; 10 % avaient uneinsuffisance rénale sévère, 42 % avaient une anémieet 15 % avaient un traitement concomitant par antiagré-gants plaquettaires, 35 % étaient au stade métasta-tique. Nous avons analysé le traitement anticoagulantau long cours choisi par les praticiens dans notre ana-lyse du registre RIETE 6. Nous avons défini le traite-

ment au long cours par le traitement choisi au-delà des10 premiers jours : 3 groupes ont été constitués :HBPM au long cours, AVK au long cours, alternanceHBPM et AVK au cours du suivi. Dans notre étude,41,4% des patients ont reçu un traitement par HBPMau long cours, 49 % ont eu un relais AVK, 9,6 % onteu une alternance de traitement par HBPM et AVK aucours du suivi.Il existe donc en pratique un non-respect des recom-mandations chez plus de la moitié des patients âgésavec ETEV et cancer, chiffre voisin de celui retrouvé dansdifférentes enquêtes portant sur l’évaluation du suivi desrecommandations dans des populations différentes 7.Les patients âgés atteints de cancer et ETEV cumu-lent les FDR hémorragiques (l’insuffisance rénale, ladénutrition sévère, polypathologies et comorbidités,polymédication) mais sont également à risque de réci-dive thromboembolique veineux, ce qui rend le manie-ment et le suivi du traitement anticoagulant plus diffi-cile 8. En pratique, les patients âgés atteints de cancersont plus fragiles et présentent plus de comorbidités.Il faut prendre en compte le patient dans sa globalitéavec une prise en charge souvent pluridisciplinaireoncogériatrique : les troubles cognitifs, la dénutrition,la sarcopénie et l'isolement des personnes âgées, lesvariations d'INR en fonction de la polymédication. Afin de pouvoir améliorer l’observance au traitement,plusieurs étapes sont nécessaires 1. Mieux connaître les patients âgés avec thromboseet cancer ; 2. Identifier des freins potentiels à l’observance au trai-tement ;3. Mettre en place des moyens adaptés, individuali-sés pour améliorer l’observance au traitement.

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Tableau 1 : Incidence des événements thromboemboliques veineux avec l’âge 1.ETEV (Total) ETEV (Initiaux) TVP (Total) TVP (Initiales) EP (Total) EP (Initiales) TVP membres

supérieursTVP distales

isolées

#d'événements

n = 1,897 n = 1,567 n = 1592 n = 1,310 n = 545 n = 465 n = 186 n = 127

Taux ajustéà l'âge(95 % CI)

138(132,144)

114(108, 120)

116(110, 122)

95(90, 101)

40(36, 43)

34(31, 37)

14(12,16)

9(8, 11)

Taux spécifiques de l’âge< 65 ans 71 58 59 49 20 17 9 6

65 - 74 ans 411 336 334 268 130 112 45 26

74 - 84 ans 662 538 564 459 193 157 41 41

≥ 85 ans 900 781 781 674 237 222 61 23

ETEV : Evénements Thromboemboliques Veineux TVP : Thrombose Veineuse ProfondeEP : Embolie Pulmonaire * tous les taux sont donnés pour 100 000 habitants

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Patient âgé, thrombose et cancer :Observance Définition En premier lieu il est nécessaire de définir l’observanceau traitement (à préférer au terme compliance).L’observance (synonyme d’adhérence au traitement)définit le fait que le patient agit en accord avec la pres-cription médicamenteuse en termes de dose et d’inter-valle de prise. En d’autres termes c’est le pourcentagede doses de médicaments prises selon la prescriptionmédicamenteuse 9,10. La persistance au traitement estdéfinie comme la période située entre l’initiation et l’ar-rêt du traitement 11. Le terme d’observance est le plussouvent utilisé en français.

Mécanisme de l’observanceL’observance au traitement est centrée sur le patient.

Il doit être un acteur actif à la fois dans la décision thé-rapeutique et dans le suivi du traitement 12. Dans uneétude récente, Brown a développé un modèle concep-tuel des mécanismes de l’observance aux anticoagu-lants oraux, à partir d’une revue de la littérature, puisd’une étude qualitative (focus group) réalisée auprès de38 patients en fibrillation auriculaire âgés de plus de 60ans (âge moyen 69,9 ans) 13. Au total 4 concepts ontémergé, entrant dans le modèle, cohérents avec la lit-térature (Schéma 1) : connaissance de la maladie et ren-forcement continu, motivation à court et long terme(suivre le traitement pour éviter les complications), sys-tème personnalisé (par exemple pour les rappels de prisede traitement), boucle d'auto-efficacité (renforcement desacquisitions à mesure que les patients deviennent pluscohérents, confiants et adhérents au traitement). Ces4 concepts principaux sont à compléter par des fac-

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Tableau 2 : Caractéristiques et traitements anticoagulants au long cours des patients atteints d’événementsthromboemboliques veineux âgés de plus de 75 ans (Registre RIETE) 6.Patients atteintsde cancer, n (%)

Global 2155

Héparine de bas poidsmoléculaire 892 (41,4 %)

Antagonistede la vitamine K1 067 (49 %)

Valeur p

SymptômesTVP 1076 (49,9 %) 500 (56,0 %) 479 (45,3 %) < 0,001

EP 707 (32,8 %) 253 (28,4 %) 394 (37,3 %) < 0,001

TVP/EP 372 (17,3 %) 139 (15,6 %) 184 (17,4 %) 0,324

Caractéristiques cliniquesSexe, homme (écart type) 1116 (51,8 %) 442 (49,6 %) 561 (53,1 %) 0,127Age moyen,années (écart type)

80,9 (4,5) 81,1 (4,9) 80,7 (4,2) < 0,001

Poids moyen, kg 69,6 (12,3) 67,1 (12,1) 71,4 (12,3) < 0,001

ETEV préalable 340 (15,8 %) 118 (13,2 %) 197 (18,6 %) < 0,001Temps depuisle diagnostic du cancerMois, moyenne (écart type) 41,3 (66,7) 31,2 (51,8) 52,7 (74,7) < 0,001Mois, médiane(écart interquartile)

12,9 (50,8) 7,6 (37) 24,9 (68,5) < 0,001

Maladies sous-jacentesPneumopathie chronique 287 (52,4 %) 99 (42,7 %) 158 (62,7 %) 0,002Insuffisance cardiaquechronique

177 (36,9 %) 66 (30,1 %) 90 (44,8 %) < 0,001

CrCl, ml/min (écart type)* 40,5 (23,1) 41,9 (29,1) 38,6 (15,0) 0,074

Niveau CrCl < 30miL/min* 219 (10,2 %) 105 (11,8 %) 93 (8,8 %) 0,160Saignements majeursrécents

61 (2,8 %) 34 (3,8 %) 176 (1,9 %) 0,003

Anémie 908 (42,1 %) 481 (53,9 %) 75 (36,4 %) < 0,001

Thrombocytopénie 61 (2,8 %) 30 (3,4 %) 11 (5,3 %) 0,001

Traitements concomitantsAgents antiplaquettaires 308 (15,6 %) 113 (12,7 %) 164 (15,5 %) 0,087

Avec métastase 714 (34,9 %) 440 (49,3 %) 199 (18,8 %) < 0,001

* Formule de Cockcroft Gault

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teurs identifiés par la littérature (démographiques, psy-chosociaux, cognitifs). L’amélioration de l’observanceest un long processus comportant des étapes-clé lorsde l’initiation du traitement, lors de sa mise en œuvre,lors de l’arrêt du traitement prescrit 14.

Paramètres facteurs de l’observanceLes données de la littérature montrent que l’observancediminue avec le temps quels que soient la pathologie,l’âge, le niveau de risque, y compris en préventionsecondaire 15-18.Les raisons expliquant la non adhérence au traitementsont nombreuses et multifactorielles (Schéma 2) 10,13.Elles sont le plus souvent classées selon le mécanismeexpliquant le défaut d’observance au traitement : on dis-tingue ainsi les facteurs liés au patient, à la maladie, auprescripteur, à la pharmacie, au système de soin, et enfinau traitement (nombre de prises et tolérance) 11,19.

Particularités du sujet âgéLes deux alternatives thérapeutiques dans le traitementde la MTEV chez le sujet âgé avec cancer sont lesHBPM et à défaut les AVK, dépendant de la fonctionrénale, de l’acceptation du patient, de la durée de trai-tement par rapport à l’épisode thromboembolique.Certaines particularités du sujet âgé doivent être prisesen compte pour améliorer l’observance au traitement20. En effet, des troubles cognitifs sont souvent présentsà des degrés variables chez les sujets âgés. Pourtant,le nombre de médications ne fait qu’augmenter avecl’âge. D’autres facteurs tels que la vue, l’audition, le niveaud’éducation, le handicap ou invalidité, les ressourcessociales et financières sont autant de facteurs réduisantl’aptitude des sujets âgés à être observants à la pres-cription médicamenteuse 20. Une revue systématique

Schéma 1 : Modèle conceptuel d’adhérence au traitement 13.

Schéma 2 : Mécanismes expliquant un défautd’observance.Les interactions entre le patient, le médecin et le systèmede soins de santé, décrits, sont les mécanismes quipeuvent avoir un effet négatif sur la capacité du patientà suivre son traitement.

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de la littérature (9 études) s’est fixée comme objectifde décrire les barrières potentielles à l’observancechez les sujets âgés 21. Une fois encore une grandehétérogénéité est retrouvée, traduisant la complexitéde ce comportement qu’est l’observance. Les freinspotentiels à l’observance ont été classés en 3 groupes :facteurs liés au patient (connaissance de la maladie,fonctions cognitives, alphabétisation ou langue), fac-teurs liés au traitement (polymédication, effets indési-rables, complexité, coût) et les autres facteurs (aidant,entourage familial, logistique pour se procurer les médi-caments).L’association entre l’altération des fonctions cogni-tives et l’observance a été différemment appréciéedans la littérature, principalement en raison du biaislié à l’aidant dans la plupart des études 12,21. Chezle sujet âgé, le nombre de prises médicamenteusesest plus élevé que chez le sujet plus jeune, pouvantcontribuer à réduire l’observance 22.Le principal biais dans les études de l’observance chezle sujet âgé est lié au fait qu’il est nécessaire de tenircompte du degré d’assistance pour l’utilisation dumédicament reçu par le patient, et que cela n’est pastoujours fait.Pour le traitement injectable par HBPM qui est pré-conisé pour une durée d’au moins 3 à 6 mois, la dénu-trition et la sarcopénie sont susceptibles d’être unobstacle à l’acceptation du traitement. La prévalencede la dénutrition et la sarcopénie augmentent avec l'âge,et varient au sein d'une même population. La sarco-pénie et la dénutrition augmentent la morbimortalité,notamment en oncogériatrie. La dénutrition représenteen ville chez les patients de plus de 65 ans 4 à 10 %,en institution 15 à 38 % et à l'hôpital 30 à 70 % 23. La prévalence de la sarcopénie varie en fonction desétudes mais reste néanmoins importante et ne doit pasêtre négligée, notamment dans la prise en charge thé-rapeutique du patient avec cancer (chirurgie et chimio-thérapies). Elle représente 31,6 % des femmes deplus de 80 ans, 17,4 % des hommes de plus de 80ans au domicile en Italie 24, 7,9 % des femmes et 4,6% des hommes d’âge moyen de 67 ans vivant au domi-cile en Angleterre 25, 14,6 % des hommes, 12,4 %des femmes de plus de 85 ans chez des patients audomicile en Belgique 26.Il n'y a pas d'études à ce jour étudiant l'impact d'in-jections sous cutanée quotidiennes chez les patientssarcopéniques et dénutris. Au contraire, un passagequotidien infirmier peut prévenir la dénutrition, enapportant notamment les apports protéiques journa-liers qui jouent un rôle fondamental dans la lutte contrela dénutrition et la sarcopénie 23. Les AVK sont plusdifficiles à équilibrer chez les patients dénutris. Il n'existe

pas d'études étudiant la relation de l'équilibre des AVKchez les patients sarcopéniques.

Différentes approches de l’acceptabilitéau traitement par le médecin prescripteuret le patientDans les recommandations, il est fait mention del’importance de l’avis du patient dans la décision d’in-troduire ou renouveler un traitement anticoagulant.Or les études concernant les pratiques de l’anticoa-gulation, que ce soit dans la fibrillation auriculaire oules ETEV, montrent une sous prescription de l’anti-coagulant conformément aux recommandations, enlien avec des freins subjectifs, une surestimation durisque hémorragique du traitement, une sous-estima-tion du risque embolique du patient âgé et de l’ac-ceptabilité du traitement injectable pour les patientsavec cancer, et une impression que les recomman-dations ne sont pas extrapolables à tous les patientspour les AVK. Les études qualitatives montrent que l’acceptationdu traitement anticoagulant injectable prolongé estbonne. Chez des patients en soins palliatifs, Noble amontré pour la première fois dans une étude qualita-tive chez des patients avec un cancer évolué que letraitement par HBPM est mieux accepté par les patientsque le traitement par AVK, leur conférant plus deliberté, de confiance en leur traitement, les AVK ayantun effet négatif sur leur qualité de vie 27. Une étudeancillaire de LITE (qui a comparé l’efficacité et la tolé-rance d’un traitement prolongé par tinzaparine et AVKchez des patients avec ETEV et cancer) a montré queles patients recevant de la tinzaparine (1 injection parjour) étaient significativement plus satisfaits que lespatients sous AVK (p = 0,0024), en particulier en rai-son de l’absence de prélèvement pour la surveillancebiologique 28. En particulier, les patients déclaraientavoir moins d’oublis avec la tinzaparine qu’avec l’AVK,trouvaient que le traitement n’interférait pas avec leurtravail et que l’absence de surveillance biologique n’in-terférait pas avec leurs activités quotidiennes.Cimminiello 29 a étudié parallèlement la perception dupatient et du médecin du traitement injectable : il appa-raît clairement que les médecins sous-estiment lacapacité des patients à accepter un traitement injec-table par rapport à un traitement oral, y compris pro-longé. Les médecins sous-estiment également l’apti-tude des patients à être observants. Le messagetransmis au patient au moment de la prescription estessentiel : les patients partent de l’idée que le traite-ment injectable est plus efficace que le traitement peros, et sont prêts à suivre un traitement injectable encas de maladie mettant en jeu le pronostic vital.

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En pratique, prise en chargethérapeutique de l’épisode veineuxthrombo-embolique chez un patientâgé atteint de cancerOptimiser l’observance est fondamental pour obser-ver le plein effet du traitement en réduisant le risque d’ef-fet indésirable. Il est essentiel de prendre en compte lepatient âgé avec thrombose et cancer dans son par-cours de soin où de nombreux intervenants ont une place(Schéma 3).

Les principes : plan personnalisé de soinsCette complexité rend indispensable l’identifica-tion d’un référent du traitement anticoagulant. Ce pra-ticien référent, qu’il soit gériatre, oncologue, inter-niste, généraliste ou médecin vasculaire, devra fairele choix du traitement anticoagulant puis établir avecle patient et son aidant principal un plan personna-lisé de soins, prenant en compte la pathologie throm-boembolique, le cancer, les comorbidités et le risquehémorragique et la préférence du patient (Schéma4). La compréhension du patient et de son entou-rage est fondamentale. La décision thérapeutique seréalise donc au cas par cas, en fonction de la com-préhension, des représentations, de l'injection souscutanée, ou des prises de sang itératives pour lesINR. La prescription d'une HBPM au domicile permet unpassage infirmier au moins une fois par jour, notam-ment par l'intermédiaire d'un SSIAD (service de soinsà domicile) ou une HAD (hospitalisation à domicile),offrant une prise en charge pluridisciplinaire par unkinésithérapeute, un ergothérapeute, une auxiliairede vie ou une diététicienne et permet de lutter contrel'isolement surtout chez ces patients fragiles.

En cas de traitement antiagrégant plaquettaire encours, l’intérêt de son maintien devra être discuté, l’as-sociation avec un traitement anticoagulant majorantle risque hémorragique.La décision thérapeutique sera concertée et desrendez-vous réguliers devront être fixés pour rééva-luer le traitement, en fonction de la tolérance et del’acceptabilité du traitement.Il est essentiel qu’une information soit donnée régu-lièrement aux autres partenaires du réseau de soin dupatient, médicaux et paramédicaux. Parallèlement lepatient se verra remettre un document actualisé surson traitement (AFSOS) qu’il devra montrer aux par-tenaires de santé qu’il sera amené à rencontrer.

Les moyens : une éducationthérapeutique individualiséeTrois principes sont importants pour améliorer l’ob-servance 10 : insister sur l’importance et l’efficacitédu traitement, proposer un traitement simple, indi-vidualiser le traitement c’est-à-dire adapter le trai-tement au mode de vie du patient. Dans cet esprit,Bajorek a développé un guide de la gestion desmédicaments dédié aux sujets âgés pour améliorerl’utilisation adaptée des anticoagulants chez le sujetâgé 30 (Schéma 5).La motivation du patient dès l’introduction du trai-tement est la première étape : elle ne peut apparaî-tre que s’il comprend sa pathologie, les risques encou-rus et le bénéfice potentiel du traitement. Ce n’estqu’ainsi que les différentes options thérapeutiquesavec leurs avantages et inconvénients pourront êtreobjectivement envisagés.Les stratégies pour améliorer l’observance doiventêtre multidimensionnelles, incluant des méthodesd’amélioration à l’accès et l’administration des trai-tements anticoagulants adaptés à l’âge et ses comor-

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Schéma 3 : Parcours de soins du patient âgé avecthrombose et cancer.

HOPITALOncologue-Gériatre

ChimiothérapiesUrgencesChirurgie

FragilitéNausées

VomissementsAnorexie

PatientCancer

ThromboseAnticoagulant

Injections : ATB, FCBilans pré-chimio

COMORBIDITES

Généralistes Infirmière

Diététicienne

HAD

Psychologue

COMPLICATIONSInfectionsAplasies

Insuffisance rénale

Schéma 4 : Plan personnalisé de soins.Patient : Profiler

• Risque de non observance• Risque de récidive embolique et hémorragique• ETEV, localisation, durée de traitement

Patient : Plan Personnalisé de Soins• Choix thérapeutique : nom, voie, dose, heures• Education thérapeutique• Mode de rappel de prise du traitement• Rythme et mode de contact • Suivi de l’observance

Patient : Suivi Régulier• Observance oublis• Tolérance • Déshydratation +/- Clairance créatinine

ETEV : Evénements Thromboembolique Veineux

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bidités (altération des fonctions cognitives et phy-siques), ainsi qu’aux facteurs environnementaux etsociaux individuels du patient 20.Dans la population âgée, plusieurs types d’interven-tions se sont montrés efficaces pour améliorer le suivide l’administration du traitement. Chez les patientsavec troubles cognitifs, des interventions, comme lapréparation des médicaments mensuels, le passaged’une infirmière pour les patients autonomes, l’autoin-jection, peuvent avoir de l’intérêt 12.

Individualisation du traitement L’individualisation du traitement et de son suivi estfondamentale afin que le patient et le médecin défi-nissent ensemble une stratégie thérapeutique pour despériodes données.En matière de thrombose et cancer, au cours des 6premiers mois, la priorité est donnée au traitement parHBPM, compte tenu du rapport bénéfice risquedémontré de ces molécules. A cette période, la moti-vation et les explications du prescripteur sont essen-

tielles pour susciter la compréhension de l’intérêt dutraitement injectable, la motivation du patient et sonadhésion au traitement.Au-delà de 6 mois, s’il y a lieu de poursuivre les anti-coagulants, les 2 options HBPM et AVK sont envisa-geables. A cette période, il est important de prendreen compte les préférences du patient et d’adapter enconséquence les options thérapeutiques.

Conclusionles patients âgés atteints de thrombose et cancerreprésentent une partie grandissante de la populationdes patients ayant un cancer et une pathologie vei-neuse thrombo-embolique. Ces patients sont le plussouvent fragiles, cumulant des FDR emboliques maiségalement les FDR hémorragiques. Une prise encharge oncogériatrique avec suivi régulier, individua-lisé est nécessaire pour améliorer la prise en chargethérapeutique de ces patients et l’observance au trai-tement. �

Conflit d’intérêt : aucun

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Schéma 5 : Guide de la gestion des médicaments dédié aux sujets âgés pour améliore l’utilisation adaptée desanticoagulants chez le sujet âgé 31.

Décision sur letraitement approprié

Transfert desinformations

vérifiées

Surveillancede la

réponse

Administration du traitement(re-asssesment preparation,

administration and reconfing)

Informationssur le

traitement

Distribution etle stockage

du traitement

Questionsur le

traitement

Examende l’ordonnace

Enregistrementde la commande

(prescrire)

Décisionde prescrire

des médicaments

Unecommunication

efficace del’information

exacte, complèteet exhaustive

PATIENT

Collecte et lacommunication desdonnées examen de

vérification de la qualitéet de la sécurité

L’achat de médicamentset la gestion du matériel

Evaluation risques-avantages appropriée(décision de prescrire un traitement)

L’éducation et le soutien des patients(fourniture de médicaments

d’informations)

Examen de lagestion des

médicaments(révision de ladécision de lamédecine, ladécision deprescrire untraitement)

Suivi thérapeutiquepharmacologique(Moniteur pour la

réponse)

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Actualités thérapeutiques Therapeutic news

Nouvel espoir pour les patientes atteintes de cancer du sein avancé résistant aux taxaneset prétraitées ou résistantes aux anthracyclines.

La combinaison de vinflunine etcapecitabine (VFL + CAPE) améliore signi-ficativement la survie sans progression,avec un faible niveau de toxicités et préser-vant la qualité de vie des patients.

Le 2 juin, lors du 50ème congrès annuel de laSociété Américaine d’Oncologie Clinique, leslaboratoires Pierre Fabre ont annoncé lesrésultats positifs de leur étude pivot en phaseIII Vinflunine 305, pour les patientes atteintesd’un cancer du sein avancé résistant auxtaxanes et/ou prétraité aux anthracyclines. C’est une étape importante pour la pratiqueclinique, étant donné les preuves scien-tifiques limitées pour les options de traite-ment efficace contre ce type de tumeurs. C’estun nouvel espoir pour ces patientes ne répon-dant pas aux traitements de référencesactuels.

Etat des lieuxLe cancer du sein reste la première causede cancer chez les femmes à travers lemonde. Les cancers du sein, localementavancés ou qui ont évolué vers le stademétastatique, continuent de représenter undéfi médical majeur malgré les progrès colos-saux qui ont été faits au cours des deuxdernières décennies. Ce défi devient encoreplus difficile, lorsque les tumeurs despatientes deviennent résistantes aux anthra-cyclines et aux taxanes, traitements les plusutilisés dans la prise en charge en premièreligne par chimiothérapie dans ce type decancer. Selon un article récent publié dans les Annalsof Oncology, il est estimé qu’entre 5 et 10 %des cancers du sein sont déjà métastatiquesau moment du diagnostic.Malgré le besoin d’améliorer les options

thérapeutiques pour les patientes résistantesà ces traitements, il a été difficile d'élaborerdes directives internationales claires sur lesschémas thérapeutiques optimaux.Cependant, de nouveaux essais cliniques,avec des résultats positifs sont grandementnécessaires pour aider à identifier les straté-gies de traitement à considérer lorsque lespatientes commencent à ne plus répondreaux anthracyclines et aux taxanes. La prise en charge de ces patientes atteintesd’un cancer du sein avancé résistant auxtaxanes et résistant ou prétraité aux anthra-cyclines représente donc un challenge majeurde la médecine actuelle, dont le but ultimeest de développer des stratégies alterna-tives efficaces. C’est dans ce cadre que l’é-tude Vinflunine 305 a été réalisée.« Cette étude présente des données impor-tantes validées, montrant une efficacité sig-nificative, sans déficience de la qualité de viepour les patientes atteintes de cancer dusein, devenues résistantes aux chimio-thérapies les plus efficaces dans ce type decancer » a expliqué Matti Aapro, Doyen del’Institut Multidisciplinaire d’OncologieClinique de Genolier (Suisse), et principalinvestigateur de l’étude vinflunine 305.

Vinflunine 305L’objectif de l’étude Vinflunine 305 a été d’é-valuer la combinaison de vinflunine et decapecitabine (bras de traitement/combinai-son) versus la capecitabine seule (bras decontrôle), pour les patientes préalablementtraitées par anthracyclines et résistantes auxtaxanes. Présentée lors du congrès annuel de laSociété Américaine d’Oncologie Clinique2014, cette étude est un essai clinique ran-domisé et contrôlé de grande ampleur, inclu-

ant 770 patientes, de 21 pays différents.Cette étude a atteint son critère d'évaluationprincipal, avec une augmentation significa-tive de 30 % de la survie sans progression(p= 0,0426). Parmi les critères secondaires,le taux de contrôle de la maladie était signi-ficativement plus élevé pour le bras vinflu-nine en combinaison de la capecitabine (n= 384), par rapport au bras capecitabineseule (n = 386) (68 % versus 60,5 %). Il yavait également une augmentation de 2,9mois sur la durée de réponse dans le brasde l’étude combinaison, en comparaison del’étude du groupe de contrôle (8,4 mois vs5,5 mois), lors de l’évaluation par un comitéindépendant ayant examiné toutes les don-nées aveuglément. Bien que non significa-tive, l’étude présente une tendance de survieglobale médiane plus élevée pour le bras decombinaison vinflunine/capecitabine, parrapport à la capecitabine seule (13,9 vs 11,7mois).Selon le questionnaire de référence EORTCQLQ-C30, utilisé pour évaluer la santé d’unepatiente en relation avec sa qualité de vie,le bras de combinaison montre une amélio-ration continue de l’état général des patientes,en comparaison au bras seul, où la qualitéde vie commence à se détériorer après 12semaines de traitement. Les données montrent également que lathérapie combinée n’engendre pas de toxi-cité additionnelle sévère. En effet, les effetsindésirables ont été plus faibles que prévus,en comparaison de ceux connus lors de l'u-tilisation de la vinflunine seule dans le can-cer de la vessie : les neutropénies fébrilesétaient particulièrement faibles (2,1 % dansle bras de traitement vs 0,5 % dans le groupede contrôle), la présence du syndrome piedmain ou érythrodysesthésie palmo-plantaire,

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connu pour être un effet secondaire fréquentde la capecitabine, était largement en faveurde la thérapie de combinaison (de grade 3-4 de 3,7 % dans le bras de traitement vs 18%dans le bras de contrôle), et les taux d'alopé-cies ont été relativement faibles, affectant unepatiente sur dix dans le groupe de traitementet moins de 1 % des patientes dans le brascontrôle. L'incidence des troubles gastro-intestinaux était plus élevée dans le bras decombinaison (67 % contre 57 %), sauf ence qui concerne les diarrhées, qui étaientplus fréquentes avec la capecitabine seule(2,6 % vs 4,7 %). En conclusion, la qualité de vie a bien été con-servée dans le bras de l'étude de la thérapiede combinaison, faisant de cette nouvellestratégie thérapeutique, une option valablepour le traitement des patientes atteintes decancer du sein avancé, prétraitées par anthra-cyclines et résistantes aux taxanes. L’étudeVinflunine 305 ouvre donc une nouvelle portepour les patientes atteintes de cancer dusein avancé, et démontre qu'il est possiblede fournir un meilleur contrôle sur la progres-sion de la maladie et une meilleure opéra-bilité. Le Dr Aapro, MD, a ajouté que « jusqu'àprésent, la plupart des praticiens ont tentéd'éviter des thérapies de combinaison pourle traitement du cancer du sein métasta-tique, car ils ont tendance à augmenter latoxicité, sans offrir des avantages significat-ifs en termes de réduction de la progressionde la maladie. Cette étude démontre claire-ment que l'amélioration de l'efficacité a étéatteinte lors de la combinaison de vinflunineet de capecitabine, avec un profil d'innocuitégérable qui se compare favorablement autraitement par capecitabine seule, et démon-tre même une tendance positive dans laqualité de vie au fil du temps. Cela représenteune opportunité thérapeutique majeure pourla gestion des patientes atteintes de cancerdu sein avancé ».

Vinflunine (Javlor®) Vinflunine (Javlor®) est un agent cytotoxiquequi a été étudié dans plusieurs types detumeurs. Le principe actif de vinflunine appar-tient à une nouvelle génération d'inhibiteursde la tubuline avec une valeur thérapeutiqueaméliorée. Vinflunine (Javlor®) est le premierinhibiteur de microtubules fluoré composéd’extraits de la pervenche de Madagascar.Vinflunine (Javlor®) est aujourd’hui indiquéen monothérapie pour le traitement despatients adultes atteints de carcinomeurothélial à cellules transitionnelles avancéou métastatique, après échec d'un traitementpréalable à base de platine. Mécanisme d’action : vinflunine se lie à latubuline au niveau ou à proximité des sitesde liaison des vinca-alcaloïdes en inhibantsa polymérisation en microtubules, ce quientraîne la suppression du processus detapis roulant, perturbe la dynamique desmicrotubules, arrête les cellules en mitoseet induit la mort cellulaire par apoptose.Vinflunine in vivo démontre une activité anti-tumorale significative, aussi bien en termesde prolongation de la survie que d'inhibitionde la croissance tumorale, sur un large spec-tre de xénogreffes de tumeurs humainesimplantées chez la souris.Les molécules telles que la vinflunine, sontconsidérés comme des déstabilisateurs demicrotubule, tandis que les taxanes sontconsidérés comme stabilisateurs de micro-tubule. Dans les deux cas, ces moléculesont montré une efficacité clinique significa-tive contre les cancers, car elles conduisenttoujours à un blocage mitotique et l'apop-tose. L'activité anti tumorale des anti-tubu-line, telle que la vinflunine, est liée à leurcapacité à interférer avec la dynamique dela tubuline. Lorsque cela se produit, les chro-mosomes ne peuvent être séparés correcte-ment. La division cellulaire et la réplicationdeviennent inhibées. C'est pourquoi les anti-tubuline sont associés à l'arrêt et l'apoptose

mitotique. En présence de ces agents, les cel-lules cancéreuses s'arrêtent en plein essor,les tumeurs ne peuvent généralement pluscontinuer de croître et le cancer du patienta une bonne chance d'aller en rémission.Vinflunine (Javlor®) a établi deux nouveauxrecords dans la lutte contre les cancers ensituation métastatique. Il a été le premieragent cytotoxique à être évalué et approuvépour la deuxième ligne carcinome transi-tionnel de l'urothélium. Grâce à cette étude,vinflunine (Javlor®) est devenu le premieragent avec des effets gérables lorsqu'il estutilisé en combinaison avec la capecitabine,et démontre une amélioration de la surviesans progression dans une large populationde patientes atteintes de cancer du seinavancé résistantes aux taxanes, et précédem-ment traitées par anthracyclines.

Pierre Fabre en OncologieL'engagement du Groupe Pierre Fabre enOncologie est colossal. Il concerne lesinvestissements dans des activités derecherches internes, ainsi que des partenar-iats avec les principales organisations etinstitutions tiers d’Oncologie dans le monde.Le laboratoire est actuellement engagé dansplus de 50 essais cliniques de Phase I à laPhase IV post-commercialisation chez lespatients atteints de cancers. L'objectif dePierre Fabre est de trouver de nouvellesapproches thérapeutiques pour les cancersà forte prévalence, pour lesquels il n'existeactuellement pas de prise en charge optimale.C’est dans ce cadre que s’inscrit l’étudeVinflunine 305, pour laquelle les LaboratoiresPierre Fabre ont présenté un dossier auxautorités de santé en Europe, sur la base desdonnées de l’étude, afin de demander l'au-torisation d'utiliser vinflunine (Javlor®) danscette nouvelle indication. Ce fichier est encours d'examen par l'organisme européendes médicaments (EMA). �

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Une nouvelle analyse montre que l’afatinib (Giotrif®) est le premier traitement à apporter unbénéfice significatif sur la survie globale chez les patients atteints d’un cancer du poumonporteur des mutations les plus fréquentes de l’EGFR.

Le 2 Juin dernier, au cours d’une présenta-tion orale durant le 50ème Congrès Annuel dela Société Américaine d’Oncologie Clinique(résumé n° 8004), Boehringer Ingelheim aprésenté les résultats de survie globale d’uneanalyse des données combinées de deuxétudes de phase III (LUX-Lung 3 et 6).L’analyse a montré que le traitement parafatinib (Giotrif®) en première ligne chez despatients atteints de cancer bronchique nonà petites cellules (CBNPC) porteurs des muta-tions les plus fréquentes de l’EGFR (Del19/translocation L858R, représentant envi-ron 90 % des mutations de l’EGFR), a per-mis de prolonger la survie globale comparéà une chimiothérapie. Pour la première fois, un Inhibiteur de laTyrosine Kinase (TKI), afatinib (Giotrif®) mon-tre un bénéfice significatif en survie globalepar rapport à une chimiothérapie.

Résultats sur la survie globaleCes résultats sont issus d’une analyse com-binée des données de deux essais pivotstestant afatinib (Giotrif®) en première lignede traitement chez des patients atteints d’uncancer du poumon et porteurs des mutationsles plus fréquentes de l’EGFR. Afatinib(Giotrif®) a permis de prolonger la survie despatients porteurs des mutations les plusfréquentes de 3 mois (24,3 à 27,3 mois),réduisant de manière significative le risquede décès de 19 %. La réduction la plusprononcée du risque de mortalité, d’un pour-centage de 41 %, a été observée chez lespatients présentant le type le plus fréquentdes mutations de l’EGFR (délétion de l’exon

19 du gène de l’EGFR). Les conclusions decette analyse confirment les résultatsprécédemment publiés sur l’efficacité deGiotrif® versus chimiothérapie en premièreligne dans cette population (survie sans pro-gression, contrôle des symptômes liés à lamaladie).

« Les résultats de deux études différentessur l’afatinib montrent pour la première foisque, même malgré un changement de traite-ment ultérieur, un traitement ciblé de pre-mière ligne peut prolonger la survie depatients atteints de cancer du poumon posi-tif aux mutations de l’EGFR (délétion de l’exon19 du gène de l’EGFR), comparé à une chimio-thérapie. Ces résultats s’ajoutent à la listedes bénéfices déjà mis en évidence au coursde ces études, notamment une améliorationde la réduction de la tumeur, une plus longuedurée de contrôle de la maladie et une amélio-ration des symptômes liés à la maladie gênantla vie quotidienne, comme la toux, la douleuret l’essoufflement » a expliqué le professeurJames Chih-Hsin Yang, M.D. (Hôpital univer-sitaire national de Taiwan en Chine), inves-tigateur principal de cette analyse.

Le professeur Klaus Dugi, Directeur Médicalde Boehringer Ingelheim a, lui, indiqué : «Lecancer du poumon n’est pas une maladieunique. Nous sommes fiers d’avoir menédes recherches avec Giotrif® dans différenteslignes de traitement du cancer du poumon,permettant à terme de multiplier les optionsthérapeutiques pour les patients. Les résul-tats de survie globale des études LUX-Lung

3 et 6 combinées, associés aux données dequalité de vie déjà disponibles, contribuentde manière significative à renforcer les don-nées cliniques justifiant l’utilisation de Giotrif®

en première ligne de traitement du cancerdu poumon avec mutations de l’EGFR ».

Indications autorisées et expérimentalesde l’afatinibAujourd’hui, l’afatinib (Giotrif®) est indiquédans le traitement de certains types de CBNPCavec mutations de l’EGFR. Dans l’Unioneuropéenne, l’afatinib (Giotrif®) est indiquéen monothérapie dans le traitement despatients adultes naïfs de TKI anti EGFR (récep-teur du facteur de croissance épidermique)atteints d’un cancer bronchique non à petitescellules (CBNPC), localement avancé oumétastatique, qui présente une (des) muta-tion(s) activatrice(s) de l’EGFR. Aux Etats-Unis, l’afatinib est autorisé sousle nom de spécialité Gilotrif®, et le médica-ment fait actuellement l’objet d’un examenréglementaire dans d’autres pays.

Six autres abstracts concernant afatinib(Giotrif®) ou d’autres produits de la gammeoncologie de Boehringer Ingelheim ont égale-ment été présentés lors du congrès de laSociété Américaine d’Oncologie Clinique, quis’est tenu du 30 mai au 3 juin 2014 à Chicago. Dans la continuité de cette analyse, desétudes de phase III dans les cancers épider-moïdes de la tête et du cou et des étudesdans d’autres types de tumeurs sont actuelle-ment en cours. �

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Retrouvez l’agenda completdes congrès sur notre site internet

www.le-jog.com

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Agenda C

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Juin 2014• 10 - 11 juin, Paris – Best of ASCO• 24 - 25 juin, Paris – 1ère édition du Congrès de la Société Française du Cancerwww.congres-sfcancer.com – [email protected]

• 25 - 28 juin, Barcelone, Espagne – 16th World Congress on Gastrointestinal Cancerwww.worldgicancer.com – [email protected]

Septembre 2014• 10 - 12 septembre, Besançon – 30ème Congrès de la Société de Psychogériatrie de Langue Françaisewww.splf-besancon2014.com

• 17 - 19 septembre, Strasbourg – 10èmes Journées Nationales SoFOGwww.sofog.org – [email protected]

• 17 - 19 septembre, Rotterdam, Pays-Bas – 10th Congress of the European Union Geriatric Medicine Societywww.eugms2014.org

• 18 - 20 septembre, Nice – 3ème cours multidisciplinaire sur le cancer de la prostatewww.cours-rpc-nice-saintpaul.fr – [email protected]

• 26 - 30 septembre, Madrid, Espagne – ESMO 2014 – www.esmo.org

Octobre 2014• 15 - 17 octobre, Paris – 6ème Congrès national de l’Association Francophone pour les Soins Oncologiquesde Support (AFSOS) – www.afsos.org

• 22 - 24 octobre, Biarritz – 11ème édition du congrès Femmes & Cancerswww.congresmedical-team5.com

• 23 - 25 octobre, Lisbonne, Portugal – SIOG 2014 Annual Meeting – www.siog.org

Novembre 2014• 6 - 7 novembre, Lyon – 3èmes Rencontres Cancer, Sexualité, Fertilitéhttp://congres-cancersexualite.comm-sante.com/

• 13 - 16 novembre, Lisbonne, Portugal – 6th European Multidisciplinary Meeting on Urological Cancer (EMUC 2014)• 21 - 22 novembre, Genève, Suisse – 2nd ESMO Symposium on Immuno-Oncology• 25 - 27 novembre, Paris – 34èmes Journées Annuelles de la Société Française de Gériatrie et Gérontologiewww.jasfgg2014.com – [email protected]

Décembre 2014• 3 - 5 décembre, Le Mans – 31ème Congrès de la Société Française de Psycho-Oncologiehttp://congres-sfpo.comm-sante.com

• 6 - 9 décembre, San Francisco, Etats-Unis – 56th Annual Meeting American Society of Hematologywww.hematology.org

• 9 - 13 décembre, San Antonio, Etats-Unis – 37th Annual San Antonio Breast Cancer Sympsiumwww.sabcs.org – [email protected]

Agenda

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