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MODULES DE FORMATION SYNDICALE Réalisés dans le cadre du 6 ème programme-cadre de recherche de l’Union Européenne - CAPRIGHT L’Euro-syndicalisme au début du 21 ème siècle Synthèse d’un mouvement syndical transnational en construction Par Anne Dufresne et Corinne Gobin GRAID-Université libre de Bruxelles janvier 2009 * Ces fiches sont destinées à servir de support aux formations syndicales et peuvent être reproduites dans ce but exclusif. Leur adaptation ou traduction n’est autorisée qu’avec l’accord écrit des auteurs et moyennant citation com- pète de la source.

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Modules de forMation syndicaleRéalisés dans le cadre du 6ème programme-cadre de recherche de l’Union Européenne - CAPRIGHT

l’euro-syndicalisme au début du 21ème siècle synthèse d’un mouvement syndical transnational

en construction

Par Anne Dufresne et Corinne GobinGRAID-Université libre de Bruxelles

janvier 2009

* Ces fiches sont destinées à servir de support aux formations syndicales et peuvent être reproduites dans ce but exclusif. Leur adaptation ou traduction n’est autorisée qu’avec l’accord écrit des auteurs et moyennant citation com-pète de la source.

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avan

t-propo

sAvant-propos

Le présent document a été réalisé par le partenaire belge « GRAID » dans le cadre du réseau euro-péen scientifique CAPRIGHT 1, qui mobilise deux approches conceptuelles, celle des capacités (basée sur les théories de l’économiste Amartia Sen) et celle des régimes de ressources reposant sur un travail collectif réalisé dans RESORE, un des réseaux fondateurs de CAPRIGHT. C’est dans cette seconde approche que le présent travail s’intègre.

Un premier ouvrage collectif2 avait présenté le cadre général de cette approche qui a comme par-ticularité de focaliser la réflexion sur la question de la rémunération du travail, ce qui a mené au concept de régimes de ressource. Plusieurs régimes de ressource ont été élaborés au fil de la rela-tion productive en fonction des spécificités de chaque histoire nationale. Ils se définissent à travers l’examen des rapports institutionnels, juridiques et politiques créés autour du droit à rémunération : entre autres, les institutions qui légitiment ou non le tripartisme, les relations collectives du travail, les normes juridiques qui consacrent le droit au salaire et aux autres ressources de sécurité sociale, la légitimation sociale à l’origine de l’ouverture de ces droits. La combinaison de ces divers com-posants du rapport salarial forme un régime de ressources particulier. Bernard Friot a montré3 que ces divers régimes de ressources pouvaient être classés en fonction de leur plus ou moins grande aptitude à subvertir le rapport de domination et d’exploitation capitalistes. Deux d’entre eux ont eu la capacité d’invention au fil du temps de modes de contrôle collectif sur la production et la distri-bution des ressources qui offraient au milieu des années 1970 la démonstration de l’inutilité sociale du capitalisme : le régime du « salaire socialisé » et le régime de « services publics ».

L’histoire de la construction européenne que nous présentons ici à travers la focale de la constitution progressive d’un euro-syndicalime s’inscrit pleinement dans l’histoire de la formation de ces deux régimes de ressources comme instrument collectif d’émancipation. En effet, c’est au moment où le salaire socialisé et les services publics permettent de renforcer encore la socialisation des richesses produites à travers les politiques prises par les États d’Europe occidentale confrontés aux conflits sociaux, politiques et économiques post-68 qu’un vaste mouvement de contre-révolution s’enclenche (à partir de 1975) afin de démanteler peu à peu l’ensemble des rapports institutionnels et politiques qui étaient au cœur de ces deux régimes de ressources. La relance de l’intégration européenne par l’avènement d’un marché intérieur (1986) constitue une des réponses politiques fortes apportées par le monde des affaires et une majorité de la classe politique européenne, convertie au libéralisme économique, pour contrer cette maturation anti-capitaliste de la société.

Une des politiques de contre-révolution sera de marginaliser le mouvement syndical dans sa capacité à protéger, à consolider et à étendre ces deux régimes de ressources émancipateurs. La description de l’euro-syndicalisme que nous présentons dans ce document se construit sur la trame de cette marginalisation syndicale.

1 « Resources, rights and capabilities: in search of social foundations for Europe » est un programme intégré dans le cadre du 6ème PCRDT de l’UE, sous la direction de Robert Salais, Ecole normale supérieure (ENS), Institutions et dynamiques historiques de l’économie (IDHE), Cachan, France.2 Clasquin, B., et al. (eds), Wage and Welfare – New perspectives on Employment and Social Rights in Europe, PIE-Peter Lang, Bruxelles, 2004.3 Friot, B. (2007) Le salariat : pour une approche en termes de régimes de ressources, in François Vatin et Sophie Bernard (dir.), Salariat : théorie, histoire et formes, Paris, La Dispute, p. 147-186

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Introduction générale – Problématique et méthode

La littérature sociologique récente sur le syndicalisme dans les divers pays européens a comme toile de fond commune la mise en avant de son affaiblissement, voire d’une crise très profonde. Ce-pendant, cette « crise » du modèle syndical national est rarement mise en relation avec l’apparition d’une nouvelle dimension, qui est celle de la politique syndicale en construction au sein de l’Union européenne (UE). Or la nécessité d’analyse de la spécificité de l’objet « euro-syndical » s’impose désormais, du fait de la constitution du niveau communautaire comme niveau politique de régle-mentation primant sur l’ensemble des normes nationales dans les domaines de compétence de l’UE. En effet, les niveaux nationaux et communautaire s’imbriquent de plus en plus fortement dans le système politique qu’est devenu l’UE, imposant à l’ensemble des membres le respect d’un arse-nal de contraintes juridiques, économiques, monétaires et politiques de plus en plus fourni. L’euro-péanisation des systèmes politiques et économiques des Etats-membres s’accélère obligeant les organisations syndicales, tant bien que mal, à renforcer la dimension européenne du syndicalisme. Cet euro-syndicalisme, qui prend naissance dès la mise en place des premières structures politiques supranationales (Benelux, CECA, CEE), dispose aujourd’hui, après un demi-siècle d’expériences, d’institutions spécifiques et d’une histoire particulière. Il s’inscrit, juridiquement et politiquement, dans des procédures institutionnelles liées au fonctionnement de l’UE et crée une tension pour fonder de nouveaux droits au sein du droit du travail (exemple de la grève transnationale). Pourtant tant son passé que son présent sont encore très largement méconnus.

Les modules de formation proposés ici ont une visée très pratique : fournir aux structures de formation syndicales nationales une synthèse pédagogique claire sur la composition et le fonctionnement des organisations syndicales qui forment ce que l’on appelle l’Euro-syndicalisme. L’expérience des deux auteures lors de nombreuses séances de formation à la demande de syndicats belges et français met en évidence que les délégué(e)s syndicaux nationaux restent encore très largement sous-informé(e)s sur le fonctionnement du système politique européen en général, et sur la façon dont sont organi-sées les relations professionnelles à l’échelon de l’UE, en particulier. Il s’agit dès lors de réunir une information descriptive sous la forme la plus facile d’accès. Quatre thèmes (correspondant à quatre modules et à 10 fichiers) ont été retenus qui permettent d’effectuer un survol des éléments les plus importants de la réalité actuelle de ce mouvement transnational en formation.

Les 4 modules comprennent 10 fiches explicatives suivies des rubriques suivantes :

« Et aujourd’hui ? »• , rubrique consacrée aux débats d’actualité. Par exemple, les arrêts Laval/Viking concernant la grève transnationale.

« Détails de taille »• , rubrique consacrée aux tableaux et encadrés détaillés.

« Qu’en dites vous ? »• , rubrique correspondant à une batterie de questions reprises dans une fiche pédagogique et servant de matrice pour animer une discussion entre délégués et formateurs syndicaux. Les formateurs utilisant ces modules devront bien connaître le système de relations professionnelles et les évolutions en matière de droits sociaux du pays où ils en-seignent.

« Pour en savoir plus »• , rubrique où sont répertoriées les références bibliographiques.

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Plan des modules

Module I. l’hIstoIre de la MIse en place de l’euro-syndIcalIsMe ■

Fiche 0. Sept étapes vers l’actuel système de relations socio- ⒉professionnelles au sein de l’Union européenne

Module II. l’archItecture InstItutIonnelle de l’euro- ■ syndIcalIsMe

L’architecture institutionnelle repose sur 4 niveaux, respectivement examinés :

Fiche 1. Le niveau interprofessionnel ⒉La Confédération européenne des syndicats (CES).

Fiche 2. Le niveau sectoriel ⒉Les douze fédérations syndicales européennes (FSE) et leurs coordinations internes.

Fiche 3. Le niveau de l’entreprise ⒉Les comités d’entreprises européens (CEE). La directive de 1994 les instituant : l’avant et l’après.

Fiche 4. Le niveau régional ⒉Les comités syndicaux interrégionaux (CSIR).

Module III. l’eurosyndIcalIsMe et son InsertIon dans le cadre ■ polItIque de l’unIon européenne

Fiche 5. Les relations professionnelles à l’échelon ⒉interprofessionnel

Fiche 6. Le dialogue social sectoriel ⒉

Fiche 7. Un maillon manquant au système européen de ⒉relations socio-professionnelles : une Cour européenne du Travail ?

Module IV. l’euro-syndIcalIsMe en MouVeMent ■

Fiche 8. Les mobilisations transfrontières : euro- ⒉manifestations, euro-grèves

Fiche 9. Les initiatives transnationales : groupe de Doorn, ⒉coopérations sectorielles

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ireModule I ■

l’hIstoIre de la MIse en place de l’euro-syndIcalIsMe

Fiche 0

Les sept étapes vers l’actuel système de relations socioprofessionnelles au sein de l’Union européenne

Europe, syndicalisme et guerre froide 1.

L’investissement syndical dans le projet de la CECA2.

Le choc de la marginalisation dans le projet CEE3.

Les années 1960 : un euro-syndicalisme coincé dans un rôle 4. d’expertise technique

1968, vecteur du renforcement de l’euro-syndicalisme dans les 5. années 1970

La distanciation entre euro-syndicalisme et CEE (1978-1984)6.

Le marché intérieur de 1985 et le lancement du dialogue social 7. par la Commission Delors

Eclairage sur le contenu de la fiche ⒉

Cette fiche est structurée en sept sous-parties qui représentent un découpage de type chrono-logique afin de faire ressortir les étapes principales qui marquèrent la naissance puis l’évolution de l’euro-syndicalisme depuis la fin des années quarante jusqu’en 1991. L’adoption du Traité de Maastricht en 1991 constitue en effet, tant sur le plan de l’organisation des relations socio-professionnelles qu’avec le démarrage de la réalisation de l’Union économique et monétaire (UEM), la mise en place d’un nouveau système politique que nous examinerons, pour ce qui est de ses relations avec l’euro-syndicalisme, dans la fiche 5, en particulier.

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1. Europe, syndicalisme et guerre froide

L’émergence de l’euro-syndicalisme et du projet politique d’intégration européenne se fait dans le contexte particulier de l’après seconde guerre mondiale : un contexte de guerre froide. Depuis son émergence dans le courant du XIXe siècle, le mouvement syndical n’avait jamais réussi à s’unifier à l’échelon international et était divisé en différents courants politiques : socialiste/social-démocrate, communiste, chrétien et anarchiste.

Un début d’unification eut lieu en 1945 entre le courant socialiste/social-démocrate et le courant communiste avec la création de la Fédération syndicale mondiale (FSM).

Cette toute nouvelle unité éclatera dès 1949 à la suite du débat sur l’acceptabilité de l’aide financière américaine en Europe à travers l’application du plan Marshall, le courant syndical communiste analy-sant cette aide comme une source de dépendance définitive de l’Europe occidentale aux Etats-Unis et à la nouvelle organisation de coopération militaire en train de se constituer : l’OTAN.

Le courant syndical socialiste/social-démocrate choisira le soutien à une politique d’aide financière américaine pour la reconstruction de l’Europe occidentale, quittera les rangs de la FSM et créera en décembre 1949 la Confédération internationale des syndicats libres (CISL).

Une nouvelle organisation internationale sera créée à Paris pour mettre en oeuvre la répartition des aides américaines sur le terrain des 18 Etats européens qui avaient accepté cette aide, l’Organisation européenne de coopération économique (OECE) [qui deviendra en 1961 l’actuelle et très célèbre OCDE].

La première structure syndicale européenne est alors constituée pour suivre la politique de l’OECE : il s’agit d’une commission syndicale mixte, dénommée ainsi car elle regroupe des représentants syndicaux des courants socialistes/sociaux démocrates et chrétiens.

A partir de là, à chaque création d’une nouvelle institution politique à vocation européenne, les diri-geants syndicaux, socialistes et chrétiens, répondirent en instituant à ce même niveau une structure syndicale spécifique. Ce fut le cas lors de la mise en place du Benelux, de l’Autorité internationale de la Ruhr, de l’Agence européenne de productivité, de la Communauté européenne du Charbon et de l’Acier, et enfin de la Communauté économique européenne.

Les raisons du soutien des leaders syndicaux à l’intégration européenne

Cette attention à l’Europe institutionnelle en formation de la part de ces leaders syndicaux fut dès le départ ambivalente et reposa sur de multiples raisons, vécues comme source de tension à l’intérieur du syndicalisme :

l’importance d’être reconnu à tous les échelons de pouvoir comme un interlocuteur central et •incontournable des pouvoirs politiques comme devant être la caractéristique de tout système dé-mocratique ;

pouvoir être présent dans tout pouvoir organisant une partie de l’économie pour veiller à une •redistribution des richesses dans le progrès afin d’œuvrer à l’amélioration générale des conditions de travail et de vie des populations ;

participer à la diffusion en Europe de ce modèle démocratique fondé sur le tripartisme ;•

neutraliser les tensions nationalistes entre les peuples pour empêcher à l’avenir tant les guerres •nationalistes que le développement du fascisme et du nazisme ;

délégitimer le syndicalisme communiste en se positionnant soit comme les seuls leaders respon-•sables pour rebâtir l’Europe soit comme un soutien actif à la lutte anticommuniste américaine;

mettre en place les Etats-Unis d’Europe dans une logique de recomposition d’une puissance •politique européenne commune et spécifique face aux USA et à l’URSS.

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2. L’investissement syndical dans le projet de la CECA

Les leaders syndicaux socialistes/sociaux-démocrates et chrétiens vont dès lors fortement s’investir dans le soutien de la mise en place du Plan Schuman (1950) qui donnera naissance à la CECA (Communauté européenne du Charbon et de l’Acier) instituée par le Traité de Paris (1951). Deux structures syndicales, regroupant les secteurs charbon-acier, seront constituées auprès de la CECA : l’une d’obédience CISL, le comité des XXI; l’autre d’obédience chrétienne (issue de la Confédération internationale des syndicats chrétiens-CISC), la commission de coordination CECA.

Ce projet de contrôle politique commun de la production du charbon et de l’acier à l’échelon de 6 Etats est ressenti comme une forme innovante de tripartisme. Les leaders syndicaux seront associés directement à la Haute Autorité qui représente l’organe supranational chargé de réaliser les objectifs du Traité. Ainsi, sur les 9 membres de ce collège politique, 2 sont des personnalités syndicales : le socialiste belge Paul Finet, ex-président de la CISL et le social-démocrate allemand, Heinz Potthof. Un syndicaliste chrétien sera aussi intégré comme juge à la Cour de justice de la CECA. Un comité consultatif composé des représentants, en nombre égal, des producteurs, des travailleurs et des utilisateurs et négociants sera créé pour donner des avis sur le programme de travail de la Haute Autorité. Le monde syndical y fit adjoindre 2 commissions paritaires en 1955, l’une pour le charbon et l’autre pour l’acier, en vue de pouvoir recréer un face à face paritaire avec le monde patronal et tenter d’y œuvrer pour initier une négociation collective transnationale.

Le projet politique porté par la CECA est proche du positionnement syndical : empêcher à travers une autorité publique commune la formation de monopoles de production privés (lutte anti-trust) et planifier la production, disposer d’une capacité de ressources financières autonomes par un impôt supranational sur la production permettant de réaliser des politiques communes (notamment dans le domaine social et la réadaptation professionnelle), mettre en place une économie moderne qui refuse de fonctionner sur la mise en concurrence des salaires.

3. Le choc de la marginalisation dans le projet CEE

Lors de la mise en place de la Communauté économique européenne (1958), les leaders syndicaux socialistes/sociaux-démocrates et chrétiens vont être choqués par la perte des acquis qu’ils avaient obtenu lors de la formation de la CECA :

aucun leader syndical n’est nommé comme commissaire au sein de la Commission européenne ;•

le comité économique et social, qui se structure sur la représentation de trois groupes (produc-•teurs, travailleurs et autres (intérêt divers)), n’intègre pas en son sein des commissions paritaires et il dispose d’une autonomie et d’un rôle réduits par rapport au comité consultatif CECA (agenda de réunions et organisation interne dépendant du Conseil des ministres, pas d’avis d’initiative ni de liberté de publication des avis, choix des délégués par les Etats et non par les organisations syndicales elles-mêmes,...) ;

le tripartisme n’est reconnu que pour la création d’un comité de gestion pour le futur Fonds social •européen.

Le projet de la CEE n’est plus limité à une branche sectorielle de l’économie mais propose une vision particulière de l’intégration européenne dans le domaine du commerce. Il ne s’agit pas d’étendre le contrôle politique public sur l’organisation de l’ensemble de la production économique, la CEE n’est pas une extension du projet de la CECA. On peut parler même de rupture entre deux imaginai-res, entre deux façons de voir et de penser le rapport qui doit exister entre la sphère politique et la sphère économique d’une société. L’action de la CEE ne va plus se porter en amont du processus économique (la production) mais bien en aval, dans la recherche d’un accroissement de la circu-lation des produits, par la réduction puis la suppression des tarifs douaniers, au sein d’un marché commun progressivement organisé comme un espace de circulation commerciale unifié entre les Etats membres. Une exception notable sera faite dans le domaine de l’agriculture, vu le poids de celle-ci dans l’économie française et le poids qu’y accorde le général de Gaulle : là, la « tradition CECA » de restructuration de la production sera amplifiée.

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Le syndicalisme va essayer de s’adapter à cette nouvelle donne plus floue. Au début des années soixante, les forces syndicales au sein des 6 Etats formant la CEE se répartissent comme suit :

le courant socialiste/social-démocrate est fortement dominant regroupant plus de 60% des sa-•lariés syndiqués ;

le courant communiste représente près de 25% de la force d’affiliation ;•

le courant chrétien environ 15%.•

Considéré comme une force politique hostile, aucun communiste, qu’il soit syndicaliste ou député, ne sera associé aux institutions de la CEE avant la fin des années soixante. Dès lors, sur le plan syndical, seuls des syndicalistes des courants socialistes/sociaux-démocrates et chrétiens partici-peront aux institutions européennes (principalement au sein du Comité économique et social). Ces deux courants vont s’organiser, non de façon unifiée, mais en créant des organisations parallèles à l’échelon interprofessionnel :

le Secrétariat syndical européen (SSE) du côté socialiste (1958) ;•

l’Organisation européenne de la Confédération internationale des syndicats chrétiens (OE-CISC) •de l’autre (1958).

Malgré le poids dominant du courant syndical socialiste, la CEE, qui à son démarrage est fortement portée par le courant politique de la démocratie chrétienne, va sur-représenter le courant chrétien : 2 représentants socialistes pour 1 chrétien.

Des structures euro-syndicales, dans certaines branches sectorielles, vont se constituer en 1958 parallèlement aux deux organisations interprofessionnelles mais celles-ci uniquement au sein du courant socialiste, le syndicalisme chrétien ne disposant pas d’assez de force pour se disperser. Cinq secteurs vont ainsi se donner une organisation européenne :

l’Intersyndicale CECA (pour le secteur du métal et les charbonnages) issue de la transformation •du comité des XXI ;

le comité des transports de la Communauté ;•

le comité européen pour les travailleurs agricoles ;•

la commission de coordination CEE de la Fédération internationale des organisations syndicales •des travailleurs des industries diverses (regroupant la chimie, le papier, la céramique, le verre, le secteur pétrolier) ;

la commission commune pour les travailleurs du bâtiment et du bois.•

4. Les années 1960 : un euro-syndicalisme coincé dans un rôle d’expertise technique

L’euro-syndicalisme ne parviendra pas, durant cette première décennie de la CEE, à redresser le fait que la représentation syndicale dans l’appareil institutionnel communautaire était faible, fragile et mal adaptée à la défense d’une approche collective et militante (transformatrice) de l’organisation des rapports de travail.

Ainsi, plusieurs comités consultatifs de type sectoriel seront constitués pour aider la Commission européenne mais seule une partie d’entre eux fut organisée de façon paritaire. Dans certains, comme par exemple le comité consultatif pour les problèmes de la politique de structure agricole, les représentants syndicaux y étaient marginalisés (8 sur un total de 36 membres). Par ailleurs, ces comités fonctionnaient sur la base d’une culture de l’expertise : les membres y étaient considérés comme des experts individuels dont la parole n’engageait personne qu’eux-mêmes, ce qui perturbait la tradition syndicale de représentation et de force collectives. Cet éclatement et cette dispersion de la dimension collective du syndicalisme étaient accentués par le fait qu’il n’y avait aucune struc-ture de représentation interprofessionnelle, accréditée auprès de la Commission et du Conseil, afin d’examiner les projets de réglementations européennes.

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5. 1968, vecteur du renforcement de l’euro-syndicalisme dans les années 1970

Le climat revendicatif et contestataire qui s’installa en Europe occidentale après les évènements sociaux de 1968 permit un changement radical dans le mode et le contenu de gouvernement. De nouveaux leaders politiques, plus ouverts aux questions sociales ou plus radicaux arrivent au pouvoir, leur programme politique sera plus proche des projets syndicaux et débouchera sur le renforcement des droits sociaux collectifs, les leaders syndicaux seront mieux associés au pro-cessus décisionnel,...

À l’échelon de la CEE, cela se traduisit par la création de structures interprofessionnelles qui per-mettaient une rencontre de type tripartite entre les ministres, les chefs syndicaux et patronaux. Ainsi, un comité permanent pour l’emploi (CPE) fut créé fin 1970 pour débattre de l’orientation communautaire dans le domaine de l’emploi, un système de conférences tripartites annuelles fut mis en place pour discuter des grandes orientations macro-sociales et économiques, et des ins-titutions para-publiques qui intéressaient le monde syndical furent créées (Fondation européenne pour l’amélioration de l’environnement et des conditions de vie et de travail, Centre européen pour le développement de la formation professionnelle), la représentation s’ouvrit à la présence de dé-légués communistes, le Comité économique et social put enfin disposer du droit d’initiative pour formuler ses avis, le Conseil décida d’ouvrir le jeu institutionnel à la symbolique démocratique par l’élection des membres du parlement européen au suffrage universel,...

Ces transformations débouchèrent sur l’élaboration et la promulgation dès 1975 des premières directives (lois) sociales de dimension européenne. Ces changements permirent à l’euro-syndi-calisme de se développer et de mieux se structurer.

A l’échelon interprofessionnel, il fut créé en 1973 une confédération syndicale transnationale réunissant les forces syndicales européennes du courant CISL pour 15 pays, la Confédération européenne des syndicats (CES). Dès 1974, cette nouvelle CES intégrera en son sein le courant syndical chrétien de dimension européenne. Cette même année, une ouverture sera réalisée vers le courant communiste avec l’acceptation de l’affiliation de la CGIL italienne, démontrant ainsi la volonté unitaire promue par la nouvelle Confédération.

A l’échelon sectoriel, au début des années 1970, 10 comités syndicaux européens sectoriels étaient constitués.

6. La distanciation entre euro-syndicalisme et CEE (1978-1984)

Le début du rejet du keynésianisme, à l’échelon de la CEE, date de la fin de l’année 1975, c’est-à-dire au moment même où ses premiers effets se faisaient sentir à un échelon supranational, par l’adoption de lois européennes dans le domaine du droit du travail. D’année en année, les conférences tripartites entre ministres, syndicats et patronat à l’échelon européen, se firent plus houleuses, au fur et à mesure que s’implantent du côté patronal et de la Commission européenne, l’idée d’une restriction de la circulation de la masse monétaire (monétarisme), notamment par un contrôle strict sur les salaires, ainsi que celle du déploiement de l’aménagement du temps de travail (développement d’une flexibilité horaire et contractuelle) pour contrer l’imaginaire syndical de la réduction généralisée du temps de travail, qui avait été proclamée au Congrès de Londres de 1976 par la CES comme le coeur du programme syndical commun à réaliser en Europe. A partir de 1979, la CES refusa de tenir de nouvelles conférences tripartites, jugeant son programme inconciliable avec la doxa néo-libérale en train de se constituer comme programme de gouverne-ment au sein des élites politiques et patronales européennes.

La CES se concentra alors sur un travail militant orienté à la fois vers l’organisation de manifesta-tions et de rencontres syndicales européennes, et vers la recherche, à travers ses membres, d’al-liances nationales auprès des gouvernements non encore convertis au néo-libéralisme. En 1984, elle devra faire un constat d’échec : elle ne possède plus de relais politique significatif auprès des gouvernants, si ce n’est du côté français grâce à la présidence et au gouvernement socialistes, sous F. Mitterand. Ce sont ces socialistes français, profitant de la présidence du Conseil de la CEE

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durant le premier semestre de 1984, qui ouvriront à nouveau l’accès à des rencontres informelles à l’échelon de la CEE entre Conseil social, patronat et CES. Mais dans un contexte où les idées patronales libérales étaient tellement hégémoniques qu’il fallait trouver un terme faible pour ne pas faire outrage « aux forces du marché », ce qui donna le vocable de «dialogue social ».

7. Le marché intérieur de 1985 et le lancement du dialogue social par la Commission Delors

Avec l’accession de Jacques Delors à la présidence de la Commission, ce dialogue social fut institué auprès de cette instance, ce qui permettait sa stabilisation (la présidence de la Commis-sion étant nettement plus stable que la présidence des Conseils). Mais très vite, un fort malaise s’installa au sein de la CES dans un contexte général de « chamboulement » du projet européen découlant de la concentration sur l’objectif de mise en place accélérée d’un grand marché intérieur sans entraves. Le dialogue social fut relancé dès janvier 1985 sans que le monde syndical n’ait une connaissance claire du contenu du nouveau projet d’intégration européenne. Pour la CES un libéralisme étendu à toute la CEE qui paralyserait l’initiative de la norme sociale européenne était impensable. Elle était prête à faire des compromis (dont l’abandon de la réduction du temps de travail) mais en échange d’un pacte tripartite garantissant une intervention législative de la CEE dans le domaine social et une politique d’investissement industriel de la part du patronat permet-tant une relance globale de la croissance, se traduisant par une création nette et forte d’emplois. Dès lors, la CES dut subir une succession de chocs : la mauvaise surprise du projet de marché intérieur fondé sur la sacralisation du libre-échange, la forte opposition du Conseil à élaborer des lois sociales européennes dans le domaine du droit du travail, la pression faite par la Commission pour que ce soient les interlocuteurs sociaux seuls qui prennent la responsabilité de la norme sociale à travers la négociation collective, le développement de la culture du « partenariat social» qui poussait la CES à accepter les thèses portées par la doctrine du libre-échange dont la « flexi-bilisation du marché du travail ». Le dialogue social s’enlisa. Et la CES s’engagea dans deux com-bats : tenter d’imposer la mise en place d’un socle législatif de base dans le domaine du droit du travail, travailler à une réforme du Traité de manière à mieux équilibrer l’intervention des autorités communautaires et celles des interlocuteurs sociaux dans la production de la norme sociale afin de tenter de banaliser l’idée de règles sociales européennes. Cette dernière démarche visait à la fois à ouvrir le dialogue social aux acteurs syndicaux sectoriels et à étendre le vote à la majorité au sein du Conseil pour l’ensemble de la matière sociale et fiscale.

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Module II ■ l’archItecture InstItutIonnelle de l’euro-syndIcalIsMe

Sommaire du module

Fiche 1. Le niveau interprofessionnel ⒉

Fiche 2. Le niveau sectoriel ⒉

Fiche 3. Le niveau de l’entreprise ⒉

Fiche 4. Le niveau régional ⒉

Eclairage sur le contenu du module : ⒉

Avec le renforcement du processus d’intégration européenne, à partir de 1991, sous la pres-sion de la mise en marche du projet d’Union économique et monétaire, l’euro-syndicalisme se trouva dans la nécessité de renforcer ses structures et de les rendre aussi plus visibles aux yeux tant des institutions européennes que du monde du travail. Les multiples initiatives syndicales issues du passé et peu coordonnées furent mieux articulées afin de proposer un plan cohérent de niveaux d’intervention syndicale distincts de dimension européenne. L’euro-syndicalisme s’est alors présenté comme un ensemble articulé composé de quatre niveaux :

la structuration interprofessionnelle avec la Confédération européenne des syndicats •(CES) ;

la structuration sectorielle avec ses Fédérations syndicales européennes (FSE) ;•

le niveau de l’entreprise, avec la bataille ouverte par la CES pour développer les comités •d’entreprises européen (CEE) ;

le niveau régional avec les comités syndicaux interrégionaux (CSI).•

Le module passe en revue ces 4 niveaux dont l’information est synthétisée à chaque fois dans une fiche spécifique (4 fiches).

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e 1Fiche 1

Le niveau interprofessionnel La Confédération européenne des syndicats (CES)

La Confédération européenne des syndicats (http://www.etuc.org) est aujourd’hui (septembre 2008) constituée de 82 Confédérations syndicales nationales, réparties dans 36 pays et de 12 Fédérations syndicales européennes sectorielles (FSE) (cf. détails de taille A). Le Congrès, instance suprême qui fixe les orientations et la politique générales de la CES, se tient tous les quatre ans. Entre le Congrès statutaire fondateur de la CES en 1973 et le dernier en date organisé à Séville en mai 2007, 11 Congrès se sont ainsi déjà tenus (cf. détails de taille B). Le Congrès dans la vie de l’organisation syndicale est toujours un moment essentiel, d’autant plus lorsqu’il s’agit de mettre en contact des délégués de nombreux pays qui ont peu l’occasion de se croiser. Il s’agit d’élaborer un programme ou des orientations syndicales communes, travail central pour faire émerger un euro-syndicalisme de transformation sociale. L’élaboration d’un véritable programme syndical commun, basé sur un euro-keynésianisme de développement régional transfrontière et sur la réduction générale du temps de travail, fut réalisée lors du Congrès de Londres en avril 1976. Il servit de référence à la CES jusqu’en 1985. Depuis lors, l’adhésion des gouvernements européens au néo-libéralisme et d’autant plus, l’adhésion des partis socialistes aux programmes de réformes néo-libérales ont bloqué la CES dans sa possibilité de défendre un nouveau programme socio-économique radicalement différent du libéralisme ambiant.

La CES a son siège à Bruxelles. Le Comité exécutif s’y tient au moins 4 fois par an et le Comité directeur au moins 8 fois par an. Ce Comité directeur fut institué après le Congrès de 1991 pour pouvoir réunir une structure décisionnelle plus petite étant donné que le Comité exécutif au complet dépasse les deux cent personnes.

Les deux personnalités dirigeantes de la CES sont le Secrétaire général et le Président. Lors du Congrès de Séville, John Monks (britannique issu du TUC) a été reconduit dans ses fonctions de Secrétaire général qu’il occupe depuis le Congrès de Prague de 2003. A Séville, fut nommée pour la première fois de l’histoire de la CES une femme pour occuper le poste de la présidence, Wanja Lundby-Wedin (suédoise issue de LO-S).

Lors du Congrès de 1991, qui changea en profondeur les statuts de la CES, il y eut inversion du poids de ces deux fonctions dirigeantes : auparavant, le personnage-clé de la CES était le président, qui quittait une présidence nationale pour accéder au niveau européen ; le secrétaire général, était alors au second plan et plus lié à la gestion administrative de l’appareil. Cette logique reposait sur l’idée que vu le poids des Etats nationaux dans l’orientation de l’Europe, il fallait comme dirigeant quelqu’un qui avait construit un solide rapport de force national. Avec l’inversion des rôles et la consécration du Secrétaire général comme le « VIP » de l’organisation, l’accent est mis désormais sur l’importance du renforcement de la structure supranationale de l’euro-syndicalisme, en phase avec la consécration du niveau politique européen comme le niveau politique dominant pour définir les grandes orientations socio-économiques. Dès lors, le staff dirigeant du secrétariat général s’est élargi. Il est pour l’instant constitué, à côté du secrétaire général, de deux secrétaires généraux adjoints (Marie Helena Andre (Portugal) et Reiner Hoffmann (Allemagne)), et de quatre secrétaires confédéraux (Walter Cerfeda (Italie), Joël Decaillon (France), Jozef Niemiec (Pologne) et Catalene Passchier (Pays-Bas)).

La CES a soutenu la constitution d’instances de type «catégoriel» : un Comité Femmes, un co-mité Jeunes, la fédération européenne des retraités et des personnes âgées (FERPA), un groupe Euro-Cadres. Les trois premières disposent de deux voix chacune lors des votes au Congrès. Par ailleurs, le Comité Femmes dispose aussi de représentantes au Comité exécutif, avec droit de vote. La FERPA s’est rapidement structurée sous la forme d’une Fédération syndicale, disposant de ses

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e 1organes décisionnels et organisant ses Congrès. Elle souhaite disposer du même statut que celui des Fédérations sectorielles au sein de la CES (meilleure représentation au Congrès, droit de vote au Comité exécutif,...) et introduit systématiquement lors des Congrès de la CES des demandes de modification des statuts en ce sens (sans succès jusqu’alors).

La CES a créé également des «structures de services» qui lui permettent de produire sa propre expertise pour les domaines qui l’intéressent. La structure la plus importante est l’Institut syndical européen (ISE) pour la recherche, l’éducation et la santé/sécurité. Cet institut est constitué de trois départements : le département Recherche (http://www.etui-rehs.org/research) qui se veut être un pont avec le milieu académique pour travailler sur des thèmes socio-économiques. Ses travaux sont illustrés à travers la publication de la revue Transfer; le département Education (http://www.etui-rehs.org/education) qui se consacre à la formation syndicale de syndicalistes afin de les former à la dimension européenne des relations industrielles (notamment sur un plan linguistique pour favoriser l’inter-compréhension entre cultures syndicales et systèmes de relations professionnelles distincts) ; le département Santé/Sécurité (http://hesa.etui-rehs.org/uk/default.asp) qui propose son expertise dans l’étude du cadre législatif de l’Union européenne dans le domaine de la prévention des accidents et des risques professionnels et de la promotion de la sécurité dans l’organisation du travail. Ce département étudie sur une base comparative la façon dont ces lois européennes sont transposées et ensuite faites respectées pour chaque cadre national.

Enfin, une Agence pour le développement social (http://www.sdaasbl.org/fr/default.htm) oeuvre à promouvoir le dialogue social international et sert de structure d’aide pour les comités d’entreprises européens et les représentants des travailleurs dans les sociétés européennes.

La CES estime qu’elle représente 60 millions de travailleurs affiliés au sein de l’espace européen. Elle exerce son action syndicale auprès des Autorités de l’Union européenne et s’inscrit dans des relations professionnelles avec les organisations patronales européennes, Business-Europe (secteur privé) et le CEEP (secteur public) mais suit également les dossiers sociaux au sein du Conseil de l’Europe (organe international inter-étatique créé en 1949 et centré sur les questions culturelles et de défense des droits de l’Homme).

La question de l’unité syndicale et de la cohérence programmatique

L’euro-syndicalisme interprofessionnel est traversé par près d’un demi-siècle d’histoire. Au moment de sa restructuration en 1973, qui donna naissance à la dénomination actuelle de «Confédération européenne des syndicats », la CES correspondait à la consécration de la force syndicale socialiste/social-démocrate, dominante au sein d’une Communauté européenne composée de neuf Etats mem-bres, et dans un contexte socio-économique marqué par une volonté politique d’accroissement du poids de l’intervention publique dans l’organisation de la société en vue d’accroître les droits sociaux et culturels pour les populations. C’est ainsi avec sérénité que ces leaders socialistes s’ouvrirent à l’intégration progressive des autres courants syndicaux idéologiques, persuadés qu’ils étaient de la permanence de leur force. Ils partageaient alors la certitude que l’unité syndicale en marche cor-respondrait à un renforcement global de la force syndicale en Europe sans que cela ne nuise, au contraire, à la cohérence programmatique et revendicatif de l’eurosyndicalisme. La CES réalisa ainsi en 1973, lors de sa première grande restructuration, une ouverture aux syndicats émanant du courant international socialiste (CISL) des nouveaux pays entrants dans la CEE (Grande-Bretagne,Irlande, Danemark), tout en décidant d’affilier aussi plus largement d’autres syndicats européens de ce courant (venant de Suisse, de Norvège, de Suède, d’Autriche, d’Islande, de Finlande). Elle affilia aussi par solidarité le syndicat socialiste espagnol, l’UGT, alors clandestin, résistant à la dictature de Franco. A partir de là, l’étendue géographique de l’affiliation de la CES ne correspondra plus à l’espace géopolitique de la Communauté européenne. Un an plus tard, le Congrès extraordinaire de Copenhague de 1974 permit l’entrée du courant chrétien. Cette année fut aussi celle de l’ouverture au premier syndicat issu du courant communiste, la CGIL italienne.

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e 11991 constitue une nouvelle étape : à partir de cette date, la CES décide d’affiler tout syndicat •considéré comme démocratique sans qu’il ne soit issu nécessairement des 3 grands courants idéologiques historiques. De nombreuses petites structures corporatistes deviennent alors membres.

1995 fut l’année consacrant l’élargissement de l’affiliation aux syndicats d’Europe de l’Est. 1999 •clôtura les dernières séquelles de la guerre froide au sein de la CES avec l’acceptation, long-temps refusée, du syndicat communiste français, la CGT.

2003 vit l’entrée du petit syndical libéral belge, la CGSLB.•

Mais quels liens peut-il encore y avoir entre la première CES, composée de 17 membres, tous émanant du courant international socialiste (CISL) et la CES d’aujourd’hui, fière d’un quasi-mono-pole européen dans la représentation de quasi toute l’activité syndicale dans 36 pays, et forte de l’adhésion de 82 confédérations nationales ? Le noyau des 7 syndicats des 6 pays de départ avait toujours fait rimer l’idée d’intégration européenne avec la nécessité de mettre en place au plus tôt une véritable Autorité politique fédérale commune en vue de construire une Europe politique (les Etats-Unis d’Europe) qui devait oeuvrer à la mise en place d’une Europe sociale. Que reste-t-il encore de cette cohérence de départ face à des cultures syndicales extrêmement variées qui ne partagent plus une seule et même vision du contenu de l’Europe et de l’intégration européenne ainsi que des rapports à construire entre Etats membres et institutions supranationales ?

En effet, l’arrivée du TUC britannique et des syndicats nordiques, affaiblit, pour des raisons politiques distinctes, l’idée de départ d’oeuvrer à la réalisation d’une Europe politique fédérale. L’écroulement du système soviétique en 1989 déboucha sur un désarroi et une perturbation profonde sur le plan programmatique dans la plupart des syndicats et partis de gauche, ce qui favorisa la montée en puissance du courant démocrate-chrétien et des autres tendances centristes au sein de la CES. Ceci se traduisit par l’accession d’Emilio Gabaglio (émanant du courant ACLI/CISL italienne) au secréta-riat général, secondé par un autre démocrate-chrétien, Jean Lapeyre (CFDT), pendant douze ans (1991-2003), à un moment particulièrement crucial dans l’histoire de l’intégration européenne, avec l’acceptation et la mise en oeuvre de l’Union économique et monétaire. L’affiliation de plus en plus large conduisit à une nette dispersion programmatique dans les résolutions de Congrès. Le choix du fort soutien syndical de la CES au processus d’élargissement à l’Europe de l’Est fit passer les considérations d’ordre politique (stabiliser la zone en vue de favoriser sa «démocratisation») avant des considérations d’ordre syndical (comment se prémunir des délocalisations et du dumping salarial et social, et contrer les privatisations ?).

La question de la représentation, de la légitimité et de l’indépendance syndicale

Sur quoi repose la force d’un syndicat ? Dans un système politique démocratique, sa légitimité est double : celle qui lui est conférée par ses affiliés et celle qui lui est octroyée par le pouvoir politique en place. Ainsi, un syndicat sera d’autant plus puissant s’il peut s’appuyer sur une capacité d’affiliation forte et/ou sur une capacité de mobilisation forte. Mais sa puissance provient également du statut qui lui est conféré par le pouvoir politique : qui va être reconnu et sur quelle base comme syndicat représentatif ? La définition des orientations socio-économiques dans un pays sera-t-il organisé par l’Etat sur la base d’une délibération de type tripartite ou non ? L’acteur syndical est-il consacré comme une parcelle de l’Autorité publique et quels sont les degrés de cette reconnaissance (capacité de production de la norme sociale par la possibilité de produire des accords collectifs qui peuvent être étendus « erga omnes », gestion des systèmes sociaux de redistribution dans l’octroi de droits à ressources (allocation de chômage, de pension,...)) ? C’est parce que, à un certain moment de son histoire nationale, l’Etat s’est défini comme Autorité publique démocratique qu’il a pu faire reconnaître comme légitime le fait syndical face à une culture du travail de la « responsabilité individuelle» portée par le monde patronal. Il y a un phénomène d’imposition politique étatique du syndicalisme, sans lequel il ne pourrait pas se créer une relation paritaire relativement équilibrée.

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e 1En outre, l’histoire sociale en Europe occidentale sur ces deux derniers siècles a clairement démontré que la capacité revendicative syndicale, fondée sur l’élaboration d’un projet d’émancipation sociale menaçant, en tout ou en partie, le monopole de la propriété capitaliste, fut un élément-clé pour être décrété comme interlocuteur, bon gré mal gré mais incontournable, par les pouvoirs politiques. Dans les contradictions portées par un système politique qui se proclame démocratique, tout en valorisant un mode de contrôle capitaliste de la propriété productive, ne pas assumer cette tension inévitable entre le monde du travail et le monde patronal conduit à la disparition d’un syndicalisme revendicatif soit par son «incorporation corporative» dans l’Etat en tant qu’organe « neutre» soit par l’organisation patronale de l’entreprise en dehors de toute présence syndicale.

Comment fut construite la « légitimité syndicale» de l’euro-syndicalisme ?

Dans le contexte de l’immédiate après-guerre, les syndicats, dans chaque cadre national, était des forces avec lesquelles il était nécessaire et/ou inévitable de s’allier : pour mobiliser la population dans un vaste effort de reconstruction de l’économie nationale; car on était obligé de reconnaître l’effort de résistance contre les forces d’occupation de certaines de ces organisations; pour mieux contrer les tendances révolutionnaires du mouvement social en favorisant les organisations dites « réformistes» dans le contexte de la guerre froide et de l’alliance militaire avec les Etats-Unis, ... Cette situation, ainsi que l’accession au pouvoir dans de nombreux Etats de coalitions de gauche, peut expliquer que la CECA fut organisée avec une nette reconnaissance du fait syndical.

Cet acquis « CECA » fut cependant perdu lorsqu’il s’est agi d’élaborer et de mettre en place la CEE : le SSE, la CESL et ensuite la CES n’eurent de cesse de s’indigner auprès des dirigeants de la Communauté européenne de cette reconnaissance syndicale très faible en comparaison avec celle existant tant à l’échelon des Etats européens qu’au niveau international au sein de l’OIT (Organisation internationale du Travail). Pour les dirigeants syndicaux, cette reconnaissance devait être octroyée automatiquement à l’échelon de la CEE étant donné leur légitimité déjà acquise aux échelons na-tional et international : cette conception les éloigna longtemps de l’idée qu’un nouveau rapport de force, transnational, était à construire, sur la base d’une mobilisation, à dimension européenne, des salariés.

Cette mobilisation est par ailleurs difficile à réaliser :

les différences linguistiques et celles issues de modèles sociaux et syndicaux nationaux distincts •agissent comme des freins ;

certaines législations nationales empêchent les grèves de solidarité et/ou spontanées, ce qui •bloque en quelque sorte la possibilité de mettre en oeuvre un droit de grève transnational d’autant plus que l’UE refuse toute capacité législative dans ce domaine (cf. fiche 8) ;

la CES n’est qu’une confédération de confédérations : elle est inconnue de beaucoup d’affilés •et elle repose sur la force de décision des confédérations nationales dont certaines ont peu de poids dans la capacité à mobiliser par rapport aux structures sectorielles et sont de toute façon dépendantes d’arbitrages et de rythmes nationaux qui peuvent être contradictoires avec une mobilisation transnationale.

Cette «faiblesse structurelle interne» est en quelque sorte prolongée par une «faiblesse structurelle externe» à cause d’une reconnaissance politique « défaillante» de la part de l’UE :

il n’y a pas eu, à cet échelon, la transposition d’une culture de l’Etat, et encore moins de celle d’une •Autorité publique générale interventionniste qui forcerait «l’équilibre» dans la relation paritaire ;

cette évanescence d’une Autorité publique s’assumant comme telle se traduit aussi par la for-•mation d’une nouvelle culture politique centrée sur le «partenariat» et l’obligation de consensus entre tous les partenaires. Ce qui entre en porte-à-faux avec le rôle de « tenseur social» lié à l’activité même du syndicalisme ;

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e 1cette faiblesse étatique (absence d’autorité publique) traduite par une fonction publique peu •développée a conduit au soutien et au développement de nombreux organes de lobbying qui reçoivent de l’argent de l’UE mais qui aussi « offrent» des services de type administratif : le poids de ces lobbys divers (dénommés par l’UE «Société civile» et « récompensés» comme membres du système à travers l’organisation d’un «dialogue civil») amoindrit le poids syndical et court-circuite souvent sa propre capacité d’influence ;

l’accent essentiellement mis, dans le projet d’intégration européenne actuel, sur une politique de •développement des marchés commerciaux et financiers, a tendance aussi à disqualifier l’acteur syndical comme acteur central à consulter face aux puissants acteurs économiques comme le secteur des banques ou celui des assurances.

Enfin, n’oublions pas que l’argent est le nerf de la guerre et ceci est particulièrement vrai dans le cas du syndicalisme qui doit disposer de fonds propres pour pouvoir mener des politiques de so-lidarités : soutien de grèves, soutien de mouvements sociaux et syndicaux étrangers faibles et/ou persécutés,...Il lui est aussi indispensable d’avoir ses ressources propres pour pouvoir développer des analyses autonomes (centres d’études), des services d’aide aux affiliés (services juridiques) et de la formation pour ces cadres et ses délégués (centres de formation). Les ressources nationales sont loin d’être illimitées, puisqu’elles proviennent essentiellement des cotisations des syndiqués, et ce dans un contexte général de désyndicalisation. Le coût global du fonctionnement de la CES, en y intégrant le financement de ses diverses structures de services et le financement de ses activités externes (conférence, rencontres, .. .), est très largement supporté par la Commission européenne. Ceci implique un « retour» en échange qui fait de la CES, pour une partie de sa politique, un organe de diffusion administrative des programmes européens (dans le domaine de la formation professionnelle ou de « l’égalité des chances» par exemple). L’étude de l’évolution du vocabulaire de la CES dans ses résolutions de Congrès montre clairement qu’à partir du moment où la Commission s’est mise à la financer largement (avec l’accession d’Emilio Gabalio comme secrétaire général en 1991) la CES a intégré dans ses positions une vision et une analyse de plus en plus dépendantes de celle des Autorités européennes. L’ensemble de ces éléments font que la CES a dès lors de grandes difficultés à se constituer comme un « contre-pouvoir ».

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i ?Et aujourd’hui ?

Vers une revendication syndicale européenne commune ?

Avec l’élargissement important de la CES et la déstabilisation idéologique générale du syndicalisme européen depuis le début des années 1990, il a été de plus en plus difficile lors des Congrès de la CES d’établir un programme commun centré sur quelques grandes revendications communes clés. Ainsi, au Congrès de 1995, le président de la FGTB belge de l’époque, François Janssens, considérait que les résolutions adoptées par la CES commençaient à prendre l’allure d’un véritable catalogue de La Redoute. Chacun pouvait y trouver à son goût tellement il y avait de points adoptés considérés comme des priorités. Le Congrès de Bruxelles en avait ainsi adoptés 34.

Depuis lors, cette incapacité à se focaliser sur quelques grandes et fortes revendications s’est en-core aggravée. 157 points d’actions à entreprendre ensemble furent arrêtés dans les résolutions du Congrès de Prague de 2003. A Séville, lors du dernier Congrès de la CES en 2007, 111 points d’action différents furent adoptés.

Cependant, la CES a insisté à Séville pour que soit lancée une campagne syndicale officielle pour l’amélioration des salaires. Le DGB allemand aurait souhaité que l’on se centre sur une revendication syndicale plus précise : l’obligation légale d’un salaire minimum interprofessionnel dans chaque pays européen, étant donné qu’une telle loi fait défaut en Allemagne. Certains syndicats étaient tout à fait opposés à cette revendication : il s’agissait de ceux des pays nordiques et de l’Italie, où les salaires sont un objet central de la négociation syndicale, et qui voyaient cette proposition débouchant sur une déstabilisation possible de leur système de négociation.

Une organisation de mobilisation européenne, les Marches européennes pour l’emploi, réclame pourtant depuis des années l’obtention, à travers une loi européenne, de verrous de rémunération qui fixeraient des références-planchers en dessous desquelles il serait interdit de descendre tant pour le salaire, que pour la pension, l’allocation de chômage et le revenu minimum d’existence. Pour renforcer l’émergence d’un droit social européen commun, une façon de faire serait de revendiquer un même pourcentage européen du revenu national par habitant (RN/hab), pour créer des objets politiques européens de combat communs tout en tenant compte des écarts importants de richesse au sein de l’UE.

Des chercheurs européens, proches des milieux syndicaux, militent aussi en ce sens.

On pourrait ainsi fixer par une loi européenne que le salaire interprofessionnel garanti ne puisse être inférieur à 70% du RN/hab, le chômage/pension à 60% et le revenu minimum garanti de subsistance à 50%. Dans le cas de la Belgique par exemple, cela ferait un salaire minimum garanti de 1500 euros, 1300 euros pour l’allocation de chômage et la pension et 1070 euros pour le revenu minimum. Le fait de lier ces indicateurs au revenu national permet d’assurer une obligation de redistribution entre tous les revenus, y compris ceux de la propriété et de créer une dynamique d’augmentation avec l’augmentation de la croissance (et donc de l’ensemble du revenu national).

Cette revendication pourrait être complétée par la mise en place d’un système européen d’indexation salariale obligatoire pour protéger les salaires en cas d’inflation (le contrôle de l’Etat devant dès lors porter sur le système des prix des produits), l’ensemble des allocations sociales devant être par ailleurs strictement liées à la croissance des salaires.

Il est bien entendu qu’à terme la quasi-totalité de la richesse produite devrait être « salarialisée » et «socialisée » mais cette première revendication européenne commune sur le salaire devrait stopper l’actuel dumping salarial européen dans un contexte où il y a aujourd’hui un écart de 1 à 15 entre le salaire minimum bulgare (82 euros) et le salaire minimum luxembourgeois (1503 euros).

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illeDétails de taille

A) Liste des Confédérations nationales membres de la CES

Les confédérations nationales membres de la CES sont au nombre de 82 dont 69 pour l’Europe des 27 et 13 hors Union européenne (données datées de mars 2008)

-Allemagne DGB Deutscher Gewerkschaftsbund Bundesvorstand (Confédération allemande des syndicats)

-Andorre USDA Unió Sindical D’Andorra (Union syndicale d’Andorre)

-Autriche OGB Osterreichischer Gewerkschaftsbund (Fédération syndicale autrichienne)

-Belgique CSC/ACV Confédération des Syndicats chrétiens (Algemeen Christelijk Vakverbond) FGTB/ABVV Fédération Générale du Travail de Belgique (Algemeen Belgisch Vakverbond) CGSLB Centrale Générale des Syndicats Libéraux de Belgique

-Bulgarie CITUB Confederation of Independant Trade Unions of Bulgaria (Confédération des syndicats indépen-dants de Bulgarie) PODPREKA Confederation of Labour (Confédération du travail)

-Chypre SEK Synomospondia ergaton kyprou (Confédération des travailleurs chypriotes) DEOK Democratie Labour Federation of Cyprus TURK-SEN Kibris Türk isci sendikalari federasyonu (Turkish Workers’ Trade Union Federation)

-Croatie SSSH / UATUC Saveza Samotalnih Sindicata Hrvatske (Union des syndicats autonomes de Croatie)

-Danemark AC Akademikernes Centralorganisation (Confédération danoise des associations professionnelles) FTF Funktionaerernes og Tjenestemaendenes Faellesraad (Confédération des employés salariés et des fonctionnaires publics) LO-DK Landsorganisationen i Danmark (Confédération danoise des syndicats)

-Espagne UGT-E Union general de trabajadores (Confédération générale des travailleurs - Espagne) STV-ELA Eusko Langileen Alkartasuna (Basque Workers’ Union) CC.OO Confederacién sindical de Comisiones obreras (Confédération syndicale des commissions de tra-vailleurs) usa Union Sindical Obrera (Union syndicale ouvrière- Espagne)

-Estonie EAKL Eesti Ametiühingute Kesk Liit (Association des syndicats d’Estonie) T ALO Teenistujate Ametiliitude Organisatsioon (Association des syndicats des employés d’Estonie)

-Finlande AKAVA Confederation of Unions for academic professionals in Finland (Confédération des unions des pro-(Confédération des unions des pro-fessionnels académiques de Finlande) SAK Suomen Ammattiliittojen Keskusjarjesto (Organisation centrale des syndicats finlandais) STTK Suomen Teknis Toimihenkilokeskusjarjesto (Confédération des employés salariés)

-France CFDT Confédération Française Démocratique du travail CGT-FO Confédération générale du Travail -Force Ouvrière CFTC Confédération Française des Travailleurs Chrétiens CGT Confédération générale du Travail UNSA Union nationale des syndicats autonomes

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ille-Grèce ADEDY Anotati Diikisis Enoseon Dimosion Ypallilon (Confédération des Unions syndicales des travailleurs grecs de la Fonction publique) GSEE Geniki Synomospondia Ergaton Ellados (Confédération générale grecque du travail)

-Hongrie ASZSZ/ATUC Autonomous Trade Union Confederation (Confédération des syndicats autonomes) LlGA Democratie League of Independent Trade Unions (Ligue démocratique des syndicats indépendants) MOSz National Federation of Workers’ Councils (Fédération nationale des conseils d’entreprises) MSzOSz National Confederation of Hungarian Trade Unions (Confédération nationale des syndicats hongrois) SZEF Szakszervezetek Együttmükodesi Féruma (Forum pour la coopération des syndicats) ESZT Értelmiségi Szakszervezeti Tomorülés (Confédération des syndicats professionnels)

-Irlande ICTU Irish Congress of trade Unions (Congrès irlandais des syndicats)

-Islande ASI Althydusamband Islands (Confédération islandaise du travail) BSRB Bandalag Starfsmanna Rikis of Baeja (Confédération des employés d’Etat et municipaux)

-Italie CGIL Confederazione Generale Italiana dellavoro (Confédération générale italienne du travail) CISL Confederazione Italiana Sindacati Lavoratori (Confédération italienne des syndicats des travailleurs) UIL Unione Italiana dei Lavoro (Confédération italienne du travail)

-Lettonie LBAS Latvijas Brivo Arodbiedrlbu Savienfba (Confédération des syndicats indépendants de Lettonie)

- Liechtenstein LANV Confédération des travailleurs du Liechtenstein (Fédérations des employés du Liechtenstein)

-Lituanie LDF Lietuvos Darbo Federacija (Fédération du travail de Lituanie) LPSK/L TUC : Lietuvos Profesiniu Sajungu Konfederacija / Lithuanian Trade Union Confederation (Confé-dération des syndicats de Lituanie) LPSS (LDS) Lietuvos Darbiniku Sajunga (Syndicat lituanien)

-Luxembourg CGT-L Confédération générale du Travail du Luxembourg LCGB Lëtzebuerger Chrëschtleche Gewerkschaftsbond (Confédération chrétienne syndicale du Luxembourg)

-Malte CMTU Confederation of Trade Unions (Confédération des syndicats de Malte) GWU General Workers’ Union (Confédération générale des travailleurs)

- Monaco USM Union syndicale de Monaco

-Norvège LO-N Landsorganisasjonen i Norge (Confédération norvégienne des syndicats) YS Yrkesorganisasjonenes Sentralforbund (Confédération des syndicats techniques) UNIO Confédération des syndicats pour les professionnels

-Pays-Bas FNV Federatie Nederlandse Vakbeweging (Confédération syndicale des Pays-Bas) CNV Christelijk Nationaal Vakverbond (Fédération nationale des syndicats chrétiens) UNIE-MHP Vakcentrale voor Middelbaar en hoger personeel (Fédération syndicale pour les travailleurs des classes moyennes et de haut niveau)

-Pologne NSZZ Solidarnosc Niezalezny Samorzadny Zwiazek Zawodowy «Solidarnosc» (Syndicat indépendant et autonome «Solidarnosc») OPZZ Entente nationale des syndicats

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ille-Portugal CGTP-IN Confederaçao Gerai dos Trabalhadores portugueses-intersindical nacional (Confédération géné-rale des travailleurs portugais) UGT-P Uniao Gerai dos Trabalhadores (Confédération générale des travailleurs - Portugal)

-Roumanie BNS Blocul National Sindical (Le bloc national syndical) CARTEL ALFA Confederatia Nationala Sindicala (Confédération nationale syndicale - Cartel ALFA) CNSLR-FRATIA National Confederation of Free Trade Unions of Romania- FRATIA (Confédération natio-(Confédération natio-nale des syndicats libres de Roumanie - FRATIA) CSDR Confederation of Democratie Trade Unions from Romania (Confédération syndicale démocratique de Roumanie)

-Royaume-Uni TUC Trade Union Congress (Congrès syndical)

-Saint-Marin CSdL Confederazione SanMarineze dei Lavoro (Confédération des travailleurs de San Marino) CDLS Confederazione democratica dei Lavoratori sanmarinezi (Confédération démocratique des tra-(Confédération démocratique des tra-vailleurs de San Marino)

-Slovaquie KOZ-SR Confederation of the Trade Unions of Slovak Republic (Confédération syndicale de la République slovaque)

-Slovénie ZSSS Zveza Svobodnih Sindikatov Siovenije (Association slovène des syndicats libres)

-Suède LO-S Landsorganisationen i Sverige (Confédération syndicale de Suède) SAC~ Sverige Akademikers Centralorganisation (Confédération suédoise des associations professionnelles) TCO Tjastemannens Centralorganisation (Confédération suédoise des employés professionnels)

-Suisse SGB Schweizerischer Gewerkschaftsbund (Union Syndicale Suisse/Unione Sindacale Svizzera) Travail.SUISSE (Organisation faîtière des travailleurs. Dachorganisation der Arbeitnehmenden)

- Tchèquie CMK OS Czech-Moravian Chamber of Trade Unions (Confédération tchéco-morave des syndicats)

- Turquie DISK Türkiye Devrimci Isci Senikalari Konfederasyonu (Confédération des syndicats progressistes de Turquie) HAK-I S Confederation of Turkish Real Trade Unions (Confédération des véritables syndicats turcs) KESK Confederation of Public Servant Trade Unions (Confédération des syndicats des fonctionnaires publics) TÜRK-IS Türkiye Isci Sendikalari Konfederasyonu (Confédération des syndicats turcs)

Les confédérations nationales disposant d‘un statut d‘observateur au sein de la CES

-Bosnie et Herzégovine CTUBiH Confédération des Syndicats de Bosnie et Herzégovine

-Macédonie SSM Federation of Trade Unions of Macedonia (Fédération des syndicats de Macédoine)

-Serbie NEZAVISNOST Ujedinjeni Granski Sindikati «Nezavisnost» (Confédération syndicale «Indépendance»)

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illeDétails de taille

B) Les différents Congrès tenus par la CES* tous les 3 ans jusqu’en 1991, tous les 4 ans depuis lors

Congrès Dates Lieu

Assemblée générale constitutive 8 février 1973 Bruxelles

1er Congrès statutaire 9 février 1973 Bruxelles

Congrès extraordinaire 23-25 mai 1974 Copenhague

2e Congrès statutaire 22-24 avril 1976 Londres

3e Congrès statutaire 14-18 mai 1979 Munich

4e Congrès statutaire 19-23 avril 1982 La Haye

5e Congrès statutaire 13-17 mai 1985 Milan

6e Congrès statutaire 9-13 mai 1988 Stockholm

7e Congrès statutaire 13-17 mai 1991 Luxembourg

8e Congrès statutaire 8-12 mai 1995 Bruxelles

9e Congrès statutaire 29 juin-2 juillet 1999 Helsinki

10e Congrès statutaire 26-29 mai 2003 Prague

11e Congrès statutaire 21-24 mai 2007 Séville

C) Les structures décisionnelles au sein de la CES

1. Le Congrès

Le Congrès est l’instance suprême de la Confédération Européenne des Syndicats. Il a notamment la tâche :

de déterminer la stratégie et la politique générale de la Confédération ;•

d’approuver les résolutions et autres propositions politiques soumises par les autres organes •statutaires et les organisations membres ;

de contrôler l’activité des autres organes statutaires par la discussion et l’adoption des rapports •d’activités et financiers ;

d’élire les membres du Comité Exécutif, le Président, le Secrétaire Général, les Secrétaires Gé-•néraux Adjoints et les Commissaires aux comptes ;

de ratifier les décisions du Comité Exécutif concernant les demandes d’affiliation et l’attribution •du statut d’observateur de Confédérations Syndicales nationales et de Comités syndicaux euro-péens ;

de modifier les statuts.•

Le Congrès de la CES se compose de délégués des membres affiliés proportionnellement à leur nombre d’adhérents. Le Congrès élit les membres du Comité exécutif, le Président, le Secrétaire Général, deux secrétaires généraux adjoints, ainsi que quatre secrétaires confédéraux.

Le Secrétaire général est le responsable et le porte-parole de la Confédération. Le Président préside les organes directeurs de la CES.

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ille2. Le Comité exécutif

Le Comité Exécutif est l’instance suprême de la Confédération Européenne des Syndicats entre les Congrès.

Le Comité Exécutif dispose des pouvoirs suivants :

il décide des politiques nécessaires à la mise en oeuvre de la stratégie générale adoptée par le •Congrès ;

il détermine le mandat de la C.E.S. pour les négociations avec les organisations européennes d’em-•ployeurs et dans les relations avec les Institutions européennes et il évalue les résultats ;

il décide de l’action syndicale nécessaire pour soutenir les revendications et les positions syndicales •communes ;

il apprécie les activités du Comité de Direction et du Secrétariat; ceux-ci feront rapport sur leurs activités •lors de chaque session ;

il fixe le montant des cotisations et le budget.•

Le Comité exécutif se réunit quatre fois par an. Il se compose de représentants d’organisations affiliées proportionnellement à leur nombre d’adhérents. Si nécessaire, des décisions peuvent être adoptées par un vote à la majorité qualifiée des deux tiers.

3. Le Comité de direction

Le Comité de direction, organe plus restreint, est chargé d’assurer le suivi des décisions adoptées par le Comité exécutif entre ses sessions. Il se réunit huit fois par an et se compose de 21 membres élus du Comité exécutif.

Le Comité de Direction a aussi la charge de décider des actions urgentes à entreprendre.

Le Comité de Direction suit les négociations avec les organisations d’employeurs et les représentations auprès des Institutions européennes.

Le Comité de Direction a la charge de traiter des questions financières et d’organisation et de préparer l’ordre du jour du Comité Exécutif et de lui soumettre des recommandations.

4. Le Secrétariat

Le Secrétariat fonctionne sous la direction et sous la responsabilité du Secrétaire Général auquel est adjoint deux secrétaires généraux adjoints. Il se compose aussi de 4 secrétaires confédéraux.

Il exécute toutes les tâches qui lui sont confiées par les autres organes de la Confédération Européenne des Syndicats, dans le cadre de ses statuts.

Spécifiquement, le Secrétariat :

développe et maintient les relations entre toutes les composantes de la C.E.S. et avec les institutions •créées et gérées par elle ;

prépare les documents et l’ordre du jour de toutes les réunions des organes statutaires et/ou créés par •ces derniers ;

convoque, selon la nécessité, des groupes de travail ad hoc dont il fixe le mandat, la composition et le •fonctionnement ;

organise les représentations auprès des Institutions européennes et dans le dialogue avec les organisa-•tions patronales européennes ;

projette et recommande les actions syndicales à entreprendre par la C.E.S. et toutes ses composantes •afin d’atteindre les objectifs et pour soutenir les revendications communes de la C.E.S.

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us ?Qu’en dites-vous ?

a) La généralisation de la dite mondialisation, c’est-à-dire de l’extension mondiale des principes de libre-échange et de financiarisation de l’économie, semble avoir conduit aussi à une «mondialisation syndicale» : regroupement unitaire syndical à l’échelon de l’Europe mais aussi à l’échelon mondial avec la constitution de la nouvelle Confédération syndicale internationale (CSI). Mais cette unité, tant européenne que mondiale, ne semble pas avoir permis pour l’instant le renouvellement d’un fort programme syndical revendicatif permettant de poursuivre les objectifs généraux d’émancipation politique et socio-économique des peuples.

1. Une unité institutionnelle signifie-t-elle nécessairement une aseptisation et une neutralisation programmatiques ? Est-il possible d’établir un programme commun face à des philosophies syn-dicales très distinctes ? La meilleure dynamique syndicale possible face à l’existence de courants philosophiques distincts passe-elle par la coopération entre organisations différentes ou par la fusion au sein d’une même structure ?

2. Le capitalisme peut-il être «à visage humain» ? Les syndicats doivent-ils avoir comme action un «aménagement» de ce système pour « l’humaniser» ou peuvent-ils être une force pour poursuivre et renforcer l’autonomie et l’émancipation collectives ?

3. Y-a-t-il un sens à ce que le syndicat devienne une organisation « apolitique» ?

b) Réorganiser la CES comme structure de «contre-pouvoir» ainsi que le demandent certains de ses membres (comme la FGTB belge) nécessiterait un effort financier important de tous les membres afin d’assurer une plus grande autonomie financière de la CES face à un pouvoir politique qui se trouve en forte contradiction sur le plan programmatique avec les valeurs du droit du travail et du droit syndical.

4. Peut-on faire l’impasse sur la nécessité de nouveaux arbitrages sur le plan des ressources syndi-cales à l’heure où le système politique de référence est devenu un système européen commun ?

5. Considérez-vous le droit de grève comme devant être un élément de droit européen (supérieur au droit national) et dès lors un droit européen essentiel à obtenir ? Pourquoi ?

6. Qu’attendez-vous comme mobilisations à organiser sur le plan européen et quels sont pour vous les revendications syndicales européennes les plus urgentes à faire inscrire dans le programme de la CES ? Quelles sont pour vous les actions à mener pour renforcer le poids du syndicalisme en Europe ?

c) Dynamiser l’euro-syndicalisme passe par la constitution progressive d’un noyau revendicatif commun au-delà de la différence des diverses cultures syndicales nationales. Traditionnellement, c’est à l’occasion des Congrès que se font les arbitrages permettant l’élaboration d’un programme syndical actualisé.

7. Avez-vous déjà été associé, de près ou de loin, à un Congrès de la CES et à la préparation de ses résolutions ? Une fois ces résolutions adoptées, circulent-elles bien parmi votre syndicat ? Etes-vous au courant des orientations syndicales adoptées aux Euro-Congrès ?

8. Pensez-vous qu’il serait possible de faire converger les 82 confédérations syndicales de la CES autour d’une importante revendication commune qui resterait la référence de lutte conjointe tant qu’elle n’aurait pas été obtenue partout au sein de l’UE ? Sur quoi devrait porter en priorité cette revendication commune ?

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e 1 - pou

r en savo

ir plusPour en savoir plus

Barnouin, B. (1986), The European Labour Movement and European Integration, Frances Pinter Packages, Londres et Wolfeboro.

CES (1999), Pour un système de relations industrielles, Résolution approuvée par le IXe Congrès statutaire de la Confédération européenne des syndicats, 29 juin-2 juillet 1999, Helsinki.

Dølvik, J.-E. (1999), L’émergence d’une île ? La CES, le dialogue social et l’européanisation des syndicats dans les années 1990, Institut syndical européen, Bruxelles.

Dufresne, A. et Gobin, C., (2007), « Vers une offensive syndicale européenne ? Le onzième Congrès de la CES », in Chroniques internationales de l’IRES, Paris, pp.70-80.

Gabaglio, E. et Hoffman, R. (eds.), The ETUC in the Mirror of Industrial Relations Research, Institut syndical européen, Bruxelles, pp. 231-247.

Gabaglio, E. et Hoffmann, R. (1999), La CES : un processus en évolution, Institut syndical européen, Bruxelles.

Gobin, C.(1992) La Confédération européenne des syndicats. Son Programme au fil de ses Congrès, 86 pages, CRISP, Bruxelles.

Gobin, C. (1997a), L’Europe syndicale. Entre désir et réalité, Essai sur le syndicalisme et la construc-tion européenne à l’aube du 21ème siècle, 186 pages, Éd. Labor, Bruxelles.

Gobin, C. (1997b), « L’Europe sociale en trompe-l’œil…ou comment apprivoiser et fragiliser le syn-dicalisme », in Le Monde Diplomatique, Paris, novembre 1997, pages 20-21.

Gobin, C. (2000), Le programme de la Confédération européenne des syndicats. Les congrès de 1995 et 1999, 54 pages, CRISP, Bruxelles, 2000.

Gobin, C. (2004), La Confédération européenne des syndicats. Résolutions du congrès de Prague et position du syndicalisme belge, 54 pages, CRISP, Bruxelles.

Gobin, C, (2005), « La démocratie, le syndicalisme et la gouvernance de l’Union européenne : la mémoire du conflit démocratique en péril ? », in L’Europe et la mémoire. Une liaison dangereuse ? , M. Aligisakis, Ed. Institut européen de l’Université de Genève, collection Euryopa, pp. 41-70.

Hyman, R., (2001), Understanding European Trade Unionism : Between Market, Class and Society, Ed. Sage, London.

Hyman, R., (2005), «Trade Unions and the Politics of the European Social Model » in Economic and Industrial Delocracy, vol. 26, n°1, pp. 9-40.

Martin, A. et Ross, G. (1999), « In the Line of Fire : The Europeanization of Labor Representation », in Martin, A. et Ross, G. (eds.), The Brave New World of European Labor, Berghahn Books, New York et Oxford, pp. 312-368.

Wagner, A.-C. (2005), Vers une Europe syndicale, Une enquête sur la CES, Ed. du Croquant, Belle-combe-en-Bauges (France).

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Le niveau sectoriel Les 12 Fédérations syndicales européennes (FSE)

Dans la majorité des Etats membres (à l’exception du Royaume-Uni), le niveau sectoriel demeure encore un niveau de négociation très important. La spécificité de la branche est, en effet, de « déter-miner une zone homogène d’intérêt ». C’est ainsi que, traditionnellement, employeurs et syndicats, plutôt méfiants face à la négociation d’entreprise, ont toujours trouvé dans la négociation de branche le niveau pertinent pour réguler la concurrence sur des marchés du travail relativement homogènes. En effet, les acteurs de la branche se reconnaissent et partagent une même identité professionnelle : coutumes, modes de formation, structures des salaires.

Aujourd’hui, si la prépondérance de la branche dans les systèmes de relations professionnelles des divers pays de l’UE persiste, il est toutefois essentiel de souligner la forte tendance à la décentralisa-tion de la négociation collective vers le niveau de l’entreprise, une tendance qui s’accentue depuis les années 1980. L’introduction de l’UEM en 1993 n’a fait qu’accentuer cette tendance ainsi que la spirale à la baisse des salaires. Aujourd’hui, les syndicats se retrouvent toujours plus contraints dans la détermination et la défense des salaires. Le niveau de la branche est de plus en plus remis en cause par les employeurs qui n’hésitent pas à quitter les organisations représentatives et donc à s’exclure du champ d’application des accords collectifs.

A l’échelle européenne (au sein des Fédérations syndicales européennes/FSE), les branches peu-vent-elles créer un espace pertinent de négociation collective, en y trouvant le second souffle qu’elles perdent peu à peu au niveau national ?

Les acteurs européens de la branche sont les 12 Fédérations syndicales européennes (FSE). El-les ne furent consacrées comme membres à part entière de la CES que depuis 1991, année du Congrès tenu à Luxembourg. Elles obtinrent alors le droit de vote lors des Congrès et des réunions exécutives internes (Comité exécutif et Comité de direction), sauf sur les demandes d’affiliation et les questions financières.

Elles regroupent des organisations nationales représentatives d’un ou plusieurs secteurs, affiliées à leur confédérations nationales respectives. Les secrétariats européens des FSE (tous situés à Bruxel-les, sauf pour certaines branches des services privés) sont de très petites structures et manquent cruellement de ressources. Faute de moyens, elles ont pour la plupart un manque tant de visibilité que de légitimité vis-à-vis des structures nationales.

Très hétérogènes, les FSE ont chacune des règles de fonctionnement propres et des proportions de représentants des diverses nationalités. En revanche, la prépondérance des représentants allemands dans les présidences ou directions des secrétariats européens est notable.

Le paysage sectoriel communautaire a changé de configuration tout au long de la décennie des années 1990 du fait du nombre croissant de FUSIONS intersyndicales. De nombreuses FSE ont fusionné (cf. Détails de taille).

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e 21993, dans le secteur de la culture, fusions créant Euro-MEl, rebaptisé Organisation européenne •de l’international des médias et du spectacle (EAEA) en 1999.

1996, les secteurs chimie et mine fusionnent dans l’EMCEF.•

2000, agriculture, alimentation, tourisme, et Horeca fusionnent dans l’EFFAT.•

2000, les services privés se concentrent dans le géant Union Network Internationale Europa •(UNI-Europa).

Suite à ces concentrations, il ne reste plus que 12 FSE, et on ne peut exclure de nouveaux regrou-pements à venir.

Les 12 fédérations syndicales européennes (FSE)*FSESP services publicsUNI-Europa services privésFEM métallurgieETF transportsEFFAT alimentation, agriculture et tourismeEMCEF mines, chimie, énergieFETBB bâtiment, boisCSEE éducationFSE-THC textile, habillement, cuirEurocop policeFEJ journalismeEAEA médias, audiovisuel

* Pour leur structuration détaillée, cf. « Détails de taille».

Les fusions révèlent deux éléments intéressants sur les Fédérations syndicales européennes :

d’une part, leur similarité avec les fédérations sectorielles allemandes et,•

d’autre part, le problème de leur non-juxtaposition à l’ensemble des autres structures nationa-•les.

Les fusions intersyndicales à l’allemande

Les fusions européennes suivent en grande partie les fusions germaniques, la structure syndicale communautaire reflétant essentiellement la structure allemande. Cette prégnance du système alle-mand sur la structure européenne n’a rien de surprenant, étant donné le poids du syndicat allemand, qui demeure aujourd’hui encore le plus large d’Europe. C’est pourquoi, il est important de rappeler les spécificités de la négociation collective en Allemagne : l’importance du niveau de la branche et le principe d’autonomie contractuelle.

L’architecture syndicale « disloquée »

Le second point met en lumière la non-correspondance entre les secteurs fusionnant au niveau communautaire, d’un côté, et au niveau national, de l’autre, ce qui complique l’architecture syndi-cale européenne. En effet, l’un des problèmes actuels des FSE vient du fait que les fusions entre syndicats nationaux sont défensives et que les syndicats ne tentent pas de se réunir pour produire ensemble un plan stratégique au niveau communautaire, c’est-à-dire pour européaniser leur stratégie. La formation de configurations hétéroclites entre des structures syndicales nationales rend d’autant plus ardue la construction d’une structure européenne.

Ainsi, on peut s’interroger sur la perte d’identité de certaines centrales sectorielles - le textile/habille-ment (TH), par exemple - au sein de diverses fusions nationales. On s’autorisera alors l’hypothèse d’une opposition entre les fusions nationales de divers secteurs et la fusion européenne de centrales

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e 2nationales du même secteur. Autrement dit, ces deux types de fusion (entre secteurs nationalement ou entre nations sectoriellement) pourraient aller en sens contraire sur le plan des stratégies et des motivations.

Toutes ces difficultés d’articulation peuvent contrecarrer la recherche d’une zone d’intérêt commun par branche dans l’espace européen, et donc l’éventualité d’une négociation collective sectorielle européenne, nécessaire pour donner aux branches un second souffle.

Les coordinations salariales sectorielles

Toutefois, depuis le début des années 1990, suite à l’initiative de la Fédération européenne des mé-tallurgistes (FEM), pionnière en la matière, des efforts croissants sont entrepris pour construire des structures de coordination des négociations collectives dans les branches. En 1999, à Helsinki, la CES les y a d’ailleurs exhortés leur demandant de « faire face à la coordination de manière efficace et de manière adaptée aux secteurs concernés ».

Les pratiques liées à la coordination au sein des FSE sont très différentes selon les branches. Elles favorisent généralement dans un premier temps l’échange informel d’informations et la comparai-son des systèmes nationaux de négociation collective en leur sein. Puis, vient la nécessaire mise en place de la coordination qui pose des questions de structures. Selon les secteurs, les organes coordinateurs internes aux fédérations - groupe de travail, comité de coordination de la négociation collective (CCNC) ou Commission de travail restreinte - seront plus ou moins capables d’impulsion politique.

Quatre FSE ont déjà constitué leur propre comité de coordination de la négociation collective : la métallurgie (1993), le graphisme (1995), les secteurs mine/chimie/énergie (1996), ainsi que le textile/habillement/cuir (1997), tandis que deux autres fédérations (bois/bâtiment et services publics) ont mis en place des groupes de travail (qui précèdent en général la mise sur pied d’un comité). Si d’autres entament des discussions à ce sujet et que le concept est amené à s’étendre dans de nombreuses branches, il est important de souligner que la métallurgie est le secteur pionnier dans ce domaine. Historiquement, dans cette branche, « l’expérience de la CECA a renforcé l’investissement européen des fédérations syndicales».

La FEM est aussi la fédération la plus importante (cf. Détails de taille, b), représentant plus de six millions de membres parmi 72 syndicats affiliés de 33 pays. Elle a une influence toute particulière sur les stratégies et politiques syndicales européennes. Concernant la coordination, son approche (transmise aux autres FSE) est celle d’une coordination des fédérations nationales de branche. D’abord interne au mouvement syndical, la coordination permet d’avancer en dehors du dialogue social, en dépit de l’absence d’interlocuteur patronal. On peut même poser l’hypothèse selon laquelle, dans ce secteur précurseur, ce serait le blocage patronal initial qui a favorisé le développement d’une telle stratégie syndicale. « La thématique de la coordination est survenue après la mise en évidence de l’impossibilité de procéder à des négociations communes ». Depuis la 2ème Conférence sur les négociations collectives, en 1996, la coordination a donc été adoptée comme principe « par défaut » : à défaut d’une réelle possibilité de négociation collective face à un patronat qui ne veut pas s’orga-niser pour une telle éventualité. Dès lors, l’objectif est de parvenir à une coordination suffisamment forte, pour, à terme, faire pression sur les organisations patronales nationales et communautaires et les forcer à la négociation collective.

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i ?Et aujourd’hui ?

Le cas Siemens, en Allemagne

Si la décentralisation de la négociation collective vers le niveau de l’entreprise prend des formes différentes de pays à pays, la mutation s’opère tout particulièrement en Allemagne où la force des syndicats de branche a longtemps résidé dans leur capacité à formuler des revendications et à les satisfaire dans la négociation. Or, ils se sentent – tout comme la majorité des autres syndicats – tou-jours plus contraints à accepter une modération salariale imposée par le gouvernement. En outre, le niveau de la branche est de plus en plus remis en cause par les employeurs qui n’hésitent pas à quitter les organisations représentatives et donc à s’exclure du champ d’application des accords collectifs.

Un exemple récent illustre bien le phénomène de la perte de centralité du niveau sectoriel et de la décentralisation : le cas Siemens. A cause des menaces de délocalisation de la production, la di-rection de ce groupe a signé un accord dans deux usines allemandes avec la fédération syndicale Industrie Gewerkschaft Metall iG Metal le 25 juin 2004, imposant un passage de 35 à 40 heures (sur une base annuelle de 1760 heures) sans augmentation de salaires. En contrepartie, Siemens garantissait le maintien de l’emploi pour deux ans. L’objectif recherché par les employeurs était moins la délocalisation de la production que la création d’un précédent pour l’allongement du temps de travail, autrement dit pour la réduction du « coût du travail ». L’IG Metall n’a pas résisté à cette offen-sive patronale, son vice-président Bertold Huber allant même jusqu’à déclarer : « L’accord cadre en question est un grand succès des salariés et montre qu’il existe des alternatives à la suppression de postes ».

Si cet événement a été largement médiatisé, notamment en France, ce n’est pourtant pas un fait isolé, tant dans les entreprises privées que dans le secteur public. Aujourd’hui, face à ces difficul-tés, le syndicat IG Metall, qui revendique encore le statut de fédération syndicale la plus puissante d’Allemagne, voire d’Europe, s’est révélé incapable d’organiser une défense efficace. Si cet accord a certainement contribué à affaiblir le syndicat allemand, il avait aussi pour but de généraliser le « modèle » de clauses d’exemption aux accords paritaires de branche. Il s’est alors multiplié, en Allemagne, et chez ses voisins, diminuant d’autant le pouvoir des centrales sectorielles, qui tiennent beaucoup à leur capacité à négocier des accords.

Cet événement récent nous paraît très important à relater, comme révélateur du contexte actuel. Non seulement il marque la tendance à la suppression des acquis sociaux et à la dévalorisation de la négociation de branche, mais il révèle aussi le phénomène de spirale vers le bas qu’entraîne un échec syndical national sur les pays voisins (d’autant plus lorsqu’il s’agit des syndicats allemands). Ces tendances semblent prendre une ampleur inédite depuis les années 1990.

Question à débattre

Avez-vous eu à gérer les conséquences sociales d’une telle spirale vers le bas (type Siemens) dans votre secteur ? Si oui, expliquer les actions syndicales menées alors.

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illeDétails de taille

A) Structuration générale des 12 FSE

Nom de la FSESecteur (nombre de sous-secteurs) Pays Orga.

Affiliées1

Membres affiliés millions

Orga. Internationale2(EN)

FSESP (Services publics)Administration nationale / Autorités régionales / Services sociaux et de

santé / Utilités publiques (4)

33 185 8.0 PSI

UNI-Europa Services privés (10)* 33 282 7.0 UNI

FEM (métallurgie)Acier / Construction navale / Auto-mobile / Armement / TIC / Machi-

nes-outils / Garage (7)

65 30 6.5 IMF

FST = ETF (1999) Transports (6)Aviation civile / Chemin de fer / Nav-igation intérieure / Pêche maritime /

Tr. Maritime / Tr. par routes

34 199 3.0 ITF

EFFATAlimentation / Agriculture / Tourisme

(3)35 120 2.6 IUF / UITA

EMCEFMines / Chimie / Energie (3)

35 128 2.5 ICEM

FETBBBâtiment / Bois / Ameublement (3)

17 50 2.3 IFBWW

CSEEEducation (1)

19 81 2.1 EI

FSE-THCTannerie / Habillement / Chaussure

(3)59 32 1.2. ITGLWF

EurocopPolice (1)

21 29 0.6

FEJJournalisme (1)

32 56 0.3 IFJ

EEACulture (1)

0.3

Source : Composition personnelle sur base de documents des FSE.

* Assurances, Banques, Commerce, Nettoyage, Postes, Sécurité privée, Services aux personnes (coiffure), Télécommunications,

Travail intérimaire, Graphisme, Electricité, Jeux, Tourisme, Média/culture

(1) Ce sont les organisations nationales sectorielles qui s’affilient aux FSE. Si l’une d’entre elles organise des membres de différents secteurs, elle peut s’affilier aux diverses FSE correspondantes.

(2) Les FSE peuvent être les structures régionales européennes du SPI du secteur (comme la Fédération européenne des Travailleurs des Transports (ETF) par exemple). En revanche, FSESP ne l’est pas car tous ses membres ne sont pas affiliés au Secrétariat professionnel international.

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illeDétails de taille

B) Structure et composition de la Fédération européenne des métallurgistes (FEM)

Congrès

Le Congrès est l’organe statutaire le plus éminent de la FEM, et il se réunit tous les quatre ans. Il se compose d’environ 400 délégués et conseillers des organisations affiliées à la FEM. Le Congrès prend les décisions concernant les élections, les demandes d’affiliation, les questions financières, les Statuts, les orientations politiques fondamentales et le programme de travail de la FEM. Le dernier Congrès a eu lieu à Lisbonne les 6 et 7 juin 2007.

Comité exécutif

Le Comité exécutif est l’organe décisionnel de la FEM au cours de la période qui sépare deux Congrès. Le Comité exécutif se compose de 65 membres issus de 72 organisations affiliées dans 33 pays, et il se réunit deux fois par an. Il est présidé par le Président de la FEM.

Comité de direction

Le Comité de direction a été créé en juin 1999 en tant qu’organe destiné à conseiller et à soutenir le Secrétariat dans la préparation et la mise en oeuvre des décisions du Comité exécutif. Il comprend le Président, les Vice-Présidents et les représentants régionaux des huit régions de la FEM, comme l’établissent les Statuts.

Secrétariat

Le Secrétariat applique les décisions du Comité exécutif et prépare les réunions. Son personnel se compose d’environ 16 membres, et il est présidé par le Secrétaire général.

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us ?Qu’en dites-vous ?

1. Quels sont pour vous les éléments à améliorer pour assurer une meilleure représentativité des Fédérations syndicales européennes (FSE) par rapport à la structure de branche nationale ?

2. Etes-vous au courant des événements d’actualité concernant votre FSE ? Participez-vous à un groupe de travail de votre FSE à Bruxelles, en particulier ?

IG Bergbau, le syndicat des mines, fusionna avec le syndicat allemand de la chimie en 1993, les mêmes secteurs fusionnant dans l’EMCEF au niveau de l’UE en 1996. Puis, en 2000, l’ensemble des syndicats des services privés fusionna dans Ver-di au même moment se créait UNI-Europa ; le mégasyndicat européen des services privés.

3. Que pensez-vous de ce lien entre les fusions germaniques et les fusions européennes ?

4. Quelles sont les tendances générales de long terme dans votre pays quant aux fusions intersyn-dicales ? Correspondent-elles aussi aux fusions européennes ?

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r en savo

ir plusPour en savoir plus

Baumann, E., Laux, E.-L. et Schnepf, M. (1996), « Collective Bargaining in the European Building Industry – European Collective Bargaining ? », Transfer, vol. 2, no 2, juin 1996, pp. 321-333.

Kuhlmann, R. (1999), « Coordination of Collective Bargaining Policy in the European Metalworking Sector: A Response to Challenges Posed by the Euro », in Gabaglio, E. et Hoffmann, R. (eds.), Eu-ropean Trade Union Yearbook 1998, Institut syndical européen, Bruxelles, pp. 139-150.

Dufresne, A (2002), « La branche, niveau stratégique dans la coordination des négociations collec-tives ? », Chronique Internationale de l’IRES, 2002, n° 74, pp.5970.

Dufresne, A (2008), « La Fédération européenne de branche : entre dialogue social et coordination des négociations collectives, in Béroud, S., Gobin, C., Lefèvre, J., Pouvoirs et syndicalismes au 21ème siècle, Le Croquant, Paris.

Jobert, A. (2000, 2e édition 2002), Les espaces de la négociation collective, branches et territoires, Octarès, Toulouse.

Marginson, P. (2005), « Industrial Relations at European Sector-level: The Weak Link? », Economic and Industrial Democracy, vol. 26, no 4, pp. 511-540.

Rehfeldt, U. (2002), « Ver.di : problèmes d’organisation du plus grand syndicat du monde », Chroni-que internationale de l’IRES, n°75, mars 2002, pp. 1-6.

Schulten, T. et Bispinck, R. (1999), Tarifpolitik unter dem EURO. Perspektiven einer europaïschen Koordinierung : das Beispiel Metallindustrie, VSA-Verlag, Hambourg.

Schulten, T. et Bispinck, R. (2001) (eds.), Collective Bargaining under the Euro. Experiences from the European Metal Industry, Institut syndical européen, Bruxelles.

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e 3Fiche 3

Le niveau de l’entreprise Les comités d’entreprises européens (CEE)

Préambule historique

Dans le courant des années 1960, un phénomène commença à s’accentuer : ce qui fut appelé le développement des «multinationales» ou l’internationalisation de l’économie. À l’époque, de grands groupes industriels, d’origine américaine, japonaise ou européenne, spécialisés d’abord dans un secteur particulier, commencèrent à multiplier le nombre de leurs filiales à l’étranger (par rapport au lieu d’implantation de leur siège social). Ces grands groupes pratiquèrent rapidement une politique de concurrence entre les filiales exerçant une pression sur les conditions de travail ou les conditions salariales. Face à l’ampleur de ce phénomène, les premières réactions syndicales vinrent de quel-ques grands secteurs industriels, fortement marqués par cette politique de concurrence. Ainsi dans le secteur de la chimie, le leader syndical Charles Levinson, poussa à mettre en place des conseils de groupe mondiaux (réunion récurrente d’information entre les délégués syndicaux à l’échelle du groupe pour éviter les stratégies de concurrence entre les différents sites et financés par les Fédéra-tions sectorielles syndicales internationales). Mais la plupart des directions patronales de ces multi-nationales refusèrent de créer un contact officiel avec ces conseils syndicaux de groupe mondiaux. Il parut dès lors nécessaire pour le monde syndical de revendiquer l’établissement de structures bilatérales où pourraient être exercé de façon légale, obligatoire et structurée un droit général à la consultation et à l’information des travailleurs déjà conquis à certains échelons nationaux.

Cette revendication qui commença à être exprimée par le mouvement syndical européen au début des années 1970 mit de très longues années avant d’aboutir et être transformée en une loi, une norme européenne obligatoire. Ce fut le cas en 1994 avec l’adoption de la directive 94/45/CE du Conseil du 22 septembre 1994, concernant l’institution d’un comité d’entreprise européen ou d’une procédure dans les entreprises de dimension communautaire et les groupes d’entreprises de di-mension communautaire en vue d’informer et de consulter les travailleurs (Journal officiel n°9254 du 30/09/1994).

Les blocages qui peuvent expliquer ce délai de plus de 20 ans furent multiples et complexes :

les bases juridiques pour proposer une telle norme étaient faibles si l’on se borne à considérer •que la source du fondement juridique communautaire se limite aux articles du traité de Rome;

il fallait trouver un accord politique qui soit accepté par l’ensemble des gouvernements des Etats •membres de la Communauté européenne cette matière relevant d’un vote à l’unanimité;

il fallait parvenir à faire en sorte que le monde politique impose cette norme européenne dont •l’organisation patronale européenne du secteur privé, l’UNICE, ne voulait absolument pas;

il fallait aussi que le monde syndical européen harmonise son point de vue; or, sur cette question •les tensions étaient vives entre le syndicalisme allemand qui voulait non seulement conserver son système de «co-détermination» mais aussi si possible l’étendre à l’ensemble du groupe et d’autres syndicalismes radicalement opposés au système allemand (comme par exemple la FGTB belge centrée sur sa philosophie de contrôle ouvrier qui refuse que les délégués syndicaux se muent en « décideurs de l’entreprise », considérant le syndicalisme comme une institution de contre-pouvoir au sein de l’entreprise).

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e 3Une première alliance se concrétisa, en 1980, entre le monde syndical et un commissaire européen, le socialiste hollandais Henk Vredeling, en charge de la vice-présidence de la Commission de l’Emploi et des Affaires sociales. Celui-ci présenta en octobre 1980 une proposition de directive de réglementation du droit à « L’information et la consultation des travailleurs des entreprises à structure complexe, en particulier transnationale ». Cette proposition de directive ne cherchait pas à instituer un organe obligatoire de représentation des travailleurs à l’intérieur des entreprises transnationales. Elle se contentait d’imposer le droit à l’information dans chaque unité concernant les activités de l’ensemble du groupe à diffuser suivant les procédures localement prévues ainsi qu’à organiser obli-gatoirement une consultation chaque fois que les intérêts des travailleurs pouvaient être gravement atteints par des mesures prises au niveau du groupe. Cependant ce texte inventait la fameuse clause de «by-pass» qui permettait aux travailleurs de s’adresser directement à la société-mère -quelle que soit sa localisation géographique !- au cas où une filiale ne remplirait pas ses obligations d’informa-tion. De plus, en cas de manquement à ces obligations, les travailleurs avaient le droit d’ouvrir une procédure judiciaire devant les tribunaux locaux du lieu du siège social de l’entreprise.

Cette proposition provoqua un tollé spectaculaire au sein du monde patronal européen... mais aussi américain en raison de ce droit de « by-pass ». Les Etats-Unis firent directement pression sur les Autorités européennes et en automne 1982, le Parlement rejeta la plupart des points centraux de cette proposition. La nouvelle proposition révisée par la Commission en 1983 tomba ensuite très vite dans les oubliettes de l’histoire, le patronat américain menaçant de geler ses « investissements » en Europe.

Ce débat fut relancé au milieu des années 1980, lorsque commença à se généraliser des accords volontaires passés entre les délégués syndicaux et la direction de certains grands groupes transna-tionaux pour fixer une procédure interne et ad hoc de diffusion de l’information socio-économique concernant le groupe, dans le cadre du développement du marché intérieur européen : accords au sein de Thomson Consumer Electronic (France-1985), de BSN (France-1986), d’Alianz (Allema-gne1986), Bull (France-1988), Scansped (Espagne-1989),...

Ce précédent permit à la Commission européenne d’inscrire le droit d’information et de consultation des travailleurs au sein des entreprises de dimension transnationale au sein de la Charte commu-nautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs de 1989. Cette inscription dans ce texte lui permit de rédiger une nouvelle proposition de directive en 1991.

Cependant, il fallut attendre les nouvelles transformations apportées par le Traité de Maastricht de 1991 (et leur entrée en vigueur en 1993), qui vont notamment permettre d’étendre le vote à la majorité au sein du Conseil à de nouvelles matières sociales (la Grande-Bretagne s’était alors exclue de cet accord politique), pour qu’une directive soit enfin adoptée en septembre 1994. Cette directive aussi aboutit car le puissant syndicat allemand, le DGB, avait clairement annoncé que son soutien au Traité de Maastricht ne se ferait pas sans contrepartie et qu’il faisait de cette directive l’élément-clé dans cet échange de « bons procédés ».

Synthèse du contenu de la directive de 1994(Directive 94/45/CE du Conseil du 22 septembre 1994 concernant l’institution d’un comité d’entreprise européen ou d’une procédure dans les entreprises de dimension communautaire et les groupes d’entreprises de dimension communautaire en vue d’informer et de consulter les travailleurs, Journal officiel JO L 254 du 30.9.1994).

Cette directive impose l’obligation pour les entreprises (ou les groupes d’entreprises) de dimension communautaire de négocier avec les représentants syndicaux afin d’introduire une structure d’infor-mation et de consultation des travailleurs. L’obligation porte sur le fait qu’il faut qu’il y ait négociation et que celle-ci aboutisse à une structure mais la directive n’impose pas une forme déterminée pour cette structure (ce qui a permis de contourner les tensions syndicales portant sur la défense de tel ou tel modèle de consultation et de concertation).

Toute entreprise (et ses établissements) ou groupe d’entreprises (une entreprise qui exerce le contrôle sur un groupe d’entreprises) qui emploie au moins 1000 travailleurs dans les pays de l’Union

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e 3européenne (ainsi que la Suisse et la Norvège) et dans au moins 2 Etats-membres, au moins 150 travailleurs dans chacun d’eux sont obligés d’entrer en négociation, soit à l’initiative de la direction, soit si la direction reçoit une demande écrite provenant d’an moins 100 travailleurs (répartis au moins sur 2 établissements/entreprises de 2 Etats-membres distincts). Un groupe spécial de négociation formé de représentants des travailleurs de façon transnationale est alors constitué en vue de cette négociation.

En cas d’échec des négociations ou suite à un commun accord, les deux parties peuvent décider de ne faire appliquer que les prescriptions minimales qui sont prévues par la directive.

Quel est le minimum légal à appliquer :

il faut qu’il y ait • in fine une structure transnationale d’information et de consultation des travailleurs pour le groupe ;

l’information doit porter sur le niveau communautaire ou au moins sur deux établissements ou •entreprises dans des Etats différents mais pas sur le cas d’une entreprise dans un seul pays (nécessité d’une information à caractère transnational) ;

le comité d’entreprise européen comprend entre 3 et 30 membres et est composé des représen-•tants des travailleurs (élus ou désignés suivant les lois nationales), il s’agit ainsi d’une structure de « représentation unilatérale» face à la direction; si nécessaire, pour des raisons pratiques, il est possible de désigner un comité restreint de 3 membres ;

il faut organiser au moins une réunion par an avec la direction centrale sur la base d’un rapport •de la direction. Des réunions en cas de circonstances exceptionnelles peuvent être tenues ;

le comité d’entreprise européen, avant la réunion avec la direction, peut se réunir sans la pré-•sence patronale ;

les dépenses de fonctionnement sont assumées par la direction (mais c’est celle-ci aussi qui •contrôle l’ordre du jour, le contenu et l’organisation de la présentation faite aux travailleurs) ;

les indications sur le contenu de l’information à communiquer lors de la réunion sont les suivantes : • informations sur la structure, la situation économique et financière de l’entreprise, l’évolution pro-bable de ses activités, la production et les ventes, la situation et l’évolution probable de l’emploi, les investissements, les changements substantiels concernant l’organisation, l’introduction de nouvelles méthodes de travail ou de nouveaux procédés de production, les transferts de pro-duction, les fusions, la réduction de la taille ou la fermeture d’entreprises, d’établissements ou de parties importantes de ceux-ci et les licenciements collectifs.

Les problèmes posés par la directive de 1994

rien n’est vraiment entrepris par les Etats-membres pour forcer les directions qui ne se sont pas soumises à cette législation;

la souplesse laissée à l’accord à négocier sur son contenu fait de ce droit un droit très variable •dépendant des rapports de force direction/syndicats qui peuvent exister suivant une période déterminée (certains accords étant à durée déterminée doivent être renouvelé) et un lieu déter-miné (en général, le droit fixé contractuellement s’inspire de la législation nationale du lieu où l’accord se négocie). Par ailleurs, la diversité des accords a été encore accentuée par le fait que la Commission européenne a stimulé la négociation d’accords volontaires entre 1994 et 1996, année de la transposition de la directive dans le droit national ;

le renvoi aux législations nationales pour définir qui peut être considéré comme un représentant •de travailleurs peut être problématique dans le cas de pays à faible tradition ou poids syndicaux et où la législation dans ce domaine n’est pas très explicite (le cas de certains nouveaux pays entrants dans l’UE). Certains délégués syndicaux des pays d’Europe occidentale ont pu ainsi émettre des doutes sur le caractère réellement représentatif de personnes présentées comme

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e 3« représentant» les travailleurs dans le cas de pays d’Europe de l’Est.

le comité d’entreprise européen est un organe consultatif et ne dispose pas d’un droit à la né-•gociation d’accords collectifs.

L’évolution de cette législation :

En mai 2004, l’élargissement de l’UE a étendu la couverture géographique de la directive sur •l’institution d’un CEE de 18 à 28 pays, à savoir, les 25 États membres de l’UE plus trois autres pays faisant partie de l’Espace économique européen (EEE) (Islande, Liechtenstein et Norvège). Des comités sont maintenant implantés dans 820 grandes entreprises à travers l’UE et représentent quelque 14,5 millions de travailleurs.

En avril 2004, la Commission a lancé une phase de consultation des «partenaires sociaux» (CES, UNICE, CEEP) en vue de la révision de la directive, qui a mis au jour la divergence entre les syndicats de travailleurs, favorables à cette révision, et les organisations patronales, qui se sont prononcées contre elle. Le processus de révision (pour actualiser la directive a donc été suspendu). En mars 2005, la Commission a une nouvelle fois consulté les mêmes organisations sur la restructuration des entreprises et sur la question des «pratiques exemplaires» dans le contexte des CEE et elle les a encouragés à s’entendre sur les moyens requis pour promouvoir de telles pratiques. Les «partenai-res sociaux» ont alors inscrit la diffusion et l’évaluation de leurs conclusions communes sur les CEE dans leur programme de travail pour la période 2006-2008. L’élaboration de consignes communes s’est donc substituée à la mise au point d’une nouvelle loi.

Tout récemment, le 20 février 2008, une nouvelle phase de consultation s’est ouverte, l’objectif étant là encore d’ouvrir des négociations sur l’actualisation et l’affinement des modalités de fonc-tionnement de ces organismes, en vue d’une révision de la législation existante. Le 2 juillet 2008, la Commission européenne a annoncé sa décision de proposer une révision de la directive de 1994. Affaire à suivre…

Un drame social d’importance, la fermeture complète du site de l’usine Renault de Vilvorde en février 1997 mettra ainsi à nu qu’à cause de cette double souplesse laissée aux directions des entreprises transnationales (accords volontaires et accords issu de la directive de 1994, tous deux également fluctuant suivant le contenu du droit national du pays du siège social de l’entreprise), il n’existait pas de facto un droit européen, à la consultation, en temps utile, permettant de proposer une solution alternative à la fermeture.

La Commission européenne a dès lors préparé une nouvelle proposition de directive en vue d’har-moniser les législations nationales concernant l’information et la consultation des travailleurs. Cepen-dant, alors pourtant que chacun jurait aux échelons politiques belges, français et européen que la situation révélée par le cas Renault/Vilvorde était urgente et nécessitait une intervention immédiate, la proposition de directive finit par être adoptée 5 ans après ce drame et introduisait en plus un délai de transposition dans la loi nationale de 3 ans (mars 2005).

À l’échelon de l’Union européenne, cette prise en compte de l’« urgence sociale» a mis ainsi au moins sept ans avant de déboucher sur un résultat (au moins car l’Angleterre et l’Irlande ont obtenu une dérogation pour allonger les délais de transposition).

L’harmonisation des législations nationales en matière d’information et de consultation des travailleurs dans la directive de 2002

(Directive 2002/14/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2002 établissant un cadre général relatif à l’information et la consultation des travailleurs dans la Communauté européenne, Journal officiel, n°JOL 8O du 23/03/2002).

Cette directive concerne toute entreprise et/ou établissement (unité d’exploitation au sens juridique) dans les secteurs privé, public ou celui des ASBL situés sur le territoire des Etats membres. Doit être organisé dans toute entreprise d’au moins 50 travailleurs ou (selon le choix des Etats) dans tout établissement d’au moins 20 travailleurs le droit à l’information et à la consultation des travailleurs.

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e 3Ce que la directive prévoit

1. Le type d’informations à communiquer : a) l’information sur l’évolution récente et l’évolution probable des activités de l’entreprise ou de l’établissement et de sa situation économique ; b) l’information et la consultation sur la situation, la structure et l’évolution probable de l’emploi au sein de l’entreprise ou de l’établissement, ainsi que sur les éventuelles mesures d’anticipa-tion envisagées, notamment en cas de menace sur l’emploi ; c) l’information et la consultation sur les décisions susceptibles d’entraîner des modifications importantes dans l’organisation du travail ou dans les contrats de travail.

2. Le fait que l’information doit se faire en temps utile pour permettre aux délégués de préparer une phase de consultation;

3. Le fait que la consultation doit se faire aussi en temps utile et au niveau de direction adéquat;

Ces trois premiers éléments dans les modalités de fonctionnement peuvent être modifiés par voie d’accords d’entreprise.

4. L’existence d’une obligation de confidentialité à durée illimitée pour les délégués ou la non-com-munication de certaines informations stratégiques, si la direction l’estime nécessaire, et dans les limites fixées par les lois nationales. Avec cependant l’existence de recours possibles en cas d’abus;

5. Le principe d’une protection spécifique pour les représentants des travailleurs;

6. L’existence de procédures pour faire respecter les droits contenus dans la directive en cas de non-respect de celle-ci;

7. L’existence de sanctions « effectives, proportionnées et dissuasives» en cas de violation de la directive.

8. Une clause de non-régression des législations nationales par le fait de la transposition.

Initialement, dans la proposition de départ, il y avait une sanction importante qui était prévue : l’an-nulation de tout licenciement collectif par un tribunal tant que l’obligation d’information n’était pas remplie ou qu’il n’y ait pas eu réparation.

Ceci fut abandonné. Les problèmes posés par la directive de 2002 :

une dérogation a permis à l’Irlande et à l’Angleterre d’attendre mars 2009 pour imposer ce droit •au niveau des deux seuils de nombre de travailleurs fixés dans la directive ;

un accord d’entreprise peut à nouveau primer (mais plus partiellement par rapport à la directive •de 1994) sur une loi générale ;

les possibilités d’imposer une confidentialité aux délégués ou de ne pas communiquer une in-•formation dite stratégique sont importantes ;

le flou laissé sur le contenu des sanctions possibles affaiblit le texte par rapport à la proposition •initiale qui voulait faire passer un message fort : il y a des droits fondamentaux dans le droit du travail qui devraient primer sur les intérêts privés des entreprises.

MAIS la possibilité d’étendre le droit à l’information et à la consultation à toute entreprise à partir de 50 travailleurs ou de 20 pour un établissement représente une réelle avancée pour de nombreuses législations nationales.

La CES compte parmi ses résultats certains l’aide à une meilleure coordination entre les délégués des CEE. Elle organise à cette fin des euro-conférences régulièrement. Celles-ci ont essentiellement comme objectif de réunir des délégués des comités d’entreprises européens pour échanger des informations sur le fonctionnement de ces comités et voir comment améliorer la représentation des travailleurs dans les entreprises. La première de ces euro-conférences réunit ainsi des délégués syndicaux de comités d’entreprises européennes à Ostende (Belgique) les 16 et 17 octobre 1989. Depuis lors, ces euro-conférences sont organisées de façon régulière. Dernièrement, elle s’est tenue à Bruxelles les 18 et 19 juin 2008 autour du thème : « A l’offensive pour des comités d’entreprises européens plus forts ».

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i ?Et aujourd’hui ?

La non-transposition dans le droit belge d’un des éléments de la nouvelle directive de 2002

Le 23 mars 2005, tous les éléments de la directive de 2002 auraient dû être transposés dans le droit belge. Or le gouvernement belge a décidé que sa législation nationale remplissait déjà suffisamment les dispositions de la nouvelle directive et donc qu’il ne lui était pas nécessaire de faire quoi que ce soit.

Or, le droit belge ne prévoit le droit à l’information à la consultation pour l’information socio-économi-que qu’au seul niveau des comités d’entreprises qui sont institués dans toute entreprise d’au moins 100 travailleurs! A partir de 50 travailleurs, la seule instance consultative existante est spécialisée aux seules questions d’organisation de la prévention en matière de santé et de sécurité au travail! Le gouvernement belge jouait donc avec les mots et lésaient des milliers de travailleurs de l’extension de ce droit à l’information socio-économique.

Par ailleurs, les deux grandes organisations syndicales belges, CSC et FGTB, voulaient profiter de cette directive pour améliorer la loi belge : descendre le seuil de 100 à 50 travailleurs pour instituer les comités d’entreprises et instaurer un dispositif de représentation des travailleurs dans les PME à partir du seuil de 20 travailleurs. D’après ces deux organisations, l’ensemble des travailleurs « sans voix» dans les PME représente 48% de l’emploi du secteur privé et correspondent à près de 1.200.000 salariés. Déplacer le seuil à 20 travailleurs permettrait d’ouvrir le droit à la représentation à 400.000 salariés supplémentaires. Elles déposèrent plainte dès lors à la Commission européenne contre l’Etat belge.

Celui-ci fut mis en demeure par la Commission européenne de se mettre en règle dès décembre 2005 ; ce que le gouvernement belge ne fit pas, la pression émanant des patrons de PME étant très forte. La Belgique fut dès lors citée pour manquement devant la Cour de justice de l’Union européenne qui condamna ce pays lors de son arrêt du 29 mars 2007.

Bizarrement ce sont pourtant les syndicats belges qui sauvèrent la face à la Belgique. Celle-ci aurait dû payer 3 millions d’amende.. .et se mettre instamment en ordre par le biais de lois et d’arrêtés royaux. Mais les organisations syndicales belges préférèrent jouer le jeu de la négociation sociale avec le monde patronal en négociant un accord le 23 novembre 2007.

« Les partenaires sociaux ont démontré une fois de plus que la concertation reste le moyen privilégié pour aboutir à une solution », a affirmé Jan Vercamst, le président du syndicat libéral, la CGSLB.

Elles y ont négocié un « donnant-donnant » : accepter de négocier sur la question des grèves spon-tanées en échange d’une meilleure représentation syndicale dans les PME. Sur ce point, les avan-cées sont au nombre de trois (mais encore faut-il que ceci soit « stabilisé» à travers une convention collective du travail négociée au Conseil national du travail) :

les entreprises à partir de 50 travailleurs disposeront d’un droit à l’information et à la consulta-•tion pour les matières socio-économiques mis en oeuvre au sein des Comités actuels pour la prévention et la protection du travail (CPPT) ;

au-dessous de 50 travailleurs, dans toutes les entreprises où il y a une délégation syndicale, •celle-ci voit ses droits étendus dans le domaine de l’information et de la consultation ;

dans les entreprises de moins de 50 travailleurs, sans délégation syndicale, les interlocuteurs •sociaux doivent trouver des mécanismes adaptés d’informations des travailleurs à négocier au sein des commissions sectorielles paritaires.

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us ?Qu’en dites-vous ?

L’abaissement généralisé du seuil à 20 travailleurs pour élargir la présence syndicale belge dans le monde des PME par la voie de la délégation syndicale n’a pas été obtenu.

Pour obtenir un accord beaucoup plus modeste, les syndicats auraient accepté de discuter du droit de grève avec le monde patronal lors de cette négociation, celui-ci souhaitant supprimer le phéno-mène des grèves spontanées. Ceci risque d’aboutir à une limitation du droit de grève.

On remarque que les syndicats, actuellement, ont tendance à préférer la négociation sociale, même si celle-ci aboutit à remettre en cause des droits fondamentaux, à l’adoption de lois générales par le gouvernement.

Le jeu en vaut-il la chandelle ?

Le fonctionnement des CEE

1. Quels sont les problèmes que vous rencontrez en tant que représentant syndical dans une struc-ture de représentation des travailleurs au sein de l’entreprise ?

2. La qualité et le contenu de l’information communiquée sont-ils suffisants ?

3. La dimension européenne et/ou internationale du groupe rend-elle désuète ou incomplète l’infor-mation nationale communiquée ?

4. La clause de confidentialité est-elle souvent actionnée par la direction ?

5. Des éléments essentiels ne vous sont-ils jamais communiqués ?

La CES et la dynamisation des CEE

Si vous êtes délégués représentés au sein d’un comité d’entreprise européen, avez-vous déjà participé à une Euro-conférence réunissant à l’échelon européen (au sein de la CES) ce type de délégués ? Qu’en avez-vous pensé ? Quelles sont les forces et les faiblesses de ce type d’action ?

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ir plusPour en savoir plus

Levinson, C., Le contre-pouvoir multinational. La riposte syndicale, Edition du Seuil, France, 1974.

Béthoux É., 2004, « Les comités d’entreprise européens en quête de légitimité », Travail et emploi, n°98, pp. 21-35

http://www.travail.gouv.fr/pu blications/Revue Travail-et -Emploi/pdf/98 2637. pdt] f

Béthoux, É., 2007, «Entreprises multinationales et représentation des salariés en Europe : les comités d’entreprise européens entre logique de représentation et logique d’action », in Aballéa F., Lallement M. (dir.), Relations au travail, relations de travail, Toulouse, Octarès.

Waddington, J., (2007), « Douze ans après la directive, quelle est l’efficacité réelle des comités d’entreprises européens ? » in Chronique Internationale de l’IRES, n°104, janvier 2007, pp. 22-30.

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e 4Fiche 4

Le niveau régional Les conseils syndicaux interrégionaux (CSIR/CSI)

Les travailleurs des multinationales commencent à s’organiser au sein des comités d’entreprise européens, qui font émerger des solidarités transfrontalières (voir fiche 3). Les Conseils syndicaux interrégionaux (CSIR), qui organisent des liaisons syndicales dans les zones frontalières, constituent d’autres collectifs articulés aux réalités du terrain.

Les CSI regroupent les organisations syndicales des confédérations nationales affiliées dans les régions transfrontalières. Il existe aujourd’hui 44 CSIR depuis le nord de la Suède au sud de l’Espa-gne, de l’Irlande à l’ouest de la Hongrie à l’Est (cf. Détails de taille).

L’idée de mettre en place une structure syndicale transfrontalière est née en 1975 dans la région de Saar entre la Lorraine et le Luxembourg lorsque la récession a frappé l’industrie métallurgique. Cette région comptait à l’époque près de 40.000 travailleurs frontaliers, des Belges, des Français, des Allemands et des Luxembourgeois. Craignant que l’augmentation du chômage n’entraîne des conflits entre les travailleurs de différentes nationalités et convaincu que les problèmes économiques et sociaux de leurs régions respectives étaient similaires et liés, les syndicalistes et militants ont décidé en 1976 d’institutionnaliser leurs contacts informels. Leur but était d’imaginer une stratégie commune dépassant les frontières nationales qui associe d’une part la politique concertée des fédérations d’employeurs et d’autre part l’action des autorités publiques. Cet exemple fut suivi par d’autres. En 1981, la CES a reconnu l’existence de ces accords et entérine le terme de «Conseils syndicaux interrégionaux» pour désigner ces structures ; elle se charge aussi de la coordination de leurs activités.

Les fédérations nationales appropriées et le secrétariat de la Confédération européenne des syndicats (CES) (cf. fiche 1) coopèrent pour que les CSIR créent leurs propres groupes de travail et étudient les questions locales spécifiques. La CES soutient également le Comité de coordination des CSIR qui se réunit deux fois par an.

Les activités des CSIR visent en particulier à faire progresser, pour les travailleurs migrants et fron-taliers, l’harmonisation de la sécurité sociale et de la fiscalité. Leurs membres veillent à l’application de la législation du travail et des conventions collectives pour éviter que certains n’abusent des frontaliers pour écraser les salaires. Outre la lutte contre le dumping social, les CSIR sont impliqués dans la politique de l’emploi et de la formation professionnelle au sens large. Pour développer la capacité de mobilisation des syndicats, ils organisent des manifestations transfrontalières ou par-ticipent à d’autres manifestations. Ils remplissent en outre une importante fonction en signalant les paradoxes de la libre circulation des personnes. Grâce à leur réseau d’euro-conseillers syndicaux qui oeuvrent dans le cadre de l’Eures-transfrontalier, ou services européens de l’emploi, ils peuvent répertorier les inégalités de traitement dont sont victimes les travailleurs frontaliers en matière de fiscalité et/ou de sécurité sociale.

Au dernier congrès de la CES (Séville, mai 2007) a été indiqué l’importance d’une initiative politique visant à « encourager, favoriser et soutenir toutes les initiatives de coopération au niveau transfron-talier ». Sur la base de ce mandat, le comité de Coordination des CSIR a décidé de démarrer cette activité à partir de 7 nouveaux CSIR :

Friuli- Venezia-Giulia/Slovenie, Andalucia/ Algarve, Lom bardie/Tessin/Piemonte, Viadrina (Berlin-Brandenbourg/Lubuskie), Friuli-Venezia-Giulia Neneto /Croazia Sudoccidentale, Elbe-Neisse (Alle-magne-Pologne République Tchèque) Galicia/Norte de Portugal

Dans ce groupe de CSIR, la CES soutiendra une coopération qui doit aboutir à des échanges plus efficaces d’informations, tout en respectant les différents systèmes de négociations collectives.

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illeDétails de taille

Liste des 44 Conseils syndicaux interrégionaux

CSIR, Pays, date de constitution

1. Saar/Lor/Lux/Trier/Westpfalz D, F, L 19762. Maas / Rhein B, NL, D 19783. *Weser-Ems / Noordnederland D, NL 19794. *Hainaut/ Nord-Pas-de-Calais/ B, F, UK 1979 West Vlaanderen / South East England.5. *Dreilandereck Haut-Rhin/Nordwestschweiz/Südbaden F, D, CH 19806. *Rijn/IJsseli D, NL 19807. Lombardie / Tessin / Piemonte l, CH 19828. *Pyremed/Piremed F, E 19839. *Galicia / Norte de Portugal E, P 198510. *Interrégionale Syndicale des Trois Frontières F, L, B 198711. *Piemonte / Valle d‘Aosta / Rhône-Alpes / Arc Lémanique F, l, CH 1990 12. *Provence / Côte d‘Azur / Liguria F, 1 199013. *Landesteil Schleswig / S0nderjylland D, DK 199114. *Northern Ireland / Republic of Ireland UK, IRE 199115. *Euregio Baden/Bas-Rhin/Südliche Pfalz F, D 199116. Pyrénées Occidentales / Axe Atlantique E, F 199217. *Schelde / Kempen B, NL 199218. Elbe / Neisse D, PL, CZ 199319. Charleroi - Namur - Neuchâteau / Champagne - Ardenne F, B 199320. Extremadura / Alentejo E, P 199421. Andalucia / Algarve E, P 199422. Friuli - Venezia - Giulia / Siovenia l, SL 199423. *Friuli / Venezia -Giulia / Karnten l, A 199424. Arc Jurassien F, CH 199525. *Interalp D, A 199526. Friuli-Venezia-Giulia/Veneto/Croazia Sudoccidentale l, Croatie 1995 27. San Marino / Emilia Romagna / Marche l, S.Marino 199528. *0resund S, DK 199529. Castilla - Leon / Beira Nordeste E, P 199530. Pomerania (Mecklenburg-Vorpommern/Zachodnie Pomorze) D, PL 1995 31. Lombardia-Sondrio-Grigioni l, CH 199632. *Alpes Centrales l, A 199633. Viadrina (Berlin-Brandenburg/Lubuskie» D, PL 199634. Pouilles / Patras l, GR 199635. *BoBa (Bôhmen / Bayern) D, CZ 199736. *Circumpolar North FIN, S, N 199837. Burgenland /Westungarn A, H 199938. Karnten/Gorenjska/Koroska A, SL 200239. *Bodensee D, A,CH 200240. Dunaj / Vltava A, CZ 200441. JiZni Morava / Dolni Rakousko A, CZ 200642. HuSloCro H, SL, Croatie 200643. DKMT, H, R, Serbie 200744. Sicile-Malte, I, MT 2007

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r en savo

ir plusPour en savoir plus

Prince, J.-C., (1996), Le Défi de l’eurosyndicalisme. Les comités interrégionaux en Europe, Genève, Ed. CJE.

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Module III ■ l’eurosyndIcalIsMe et son InsertIon dans le cadre polItIque de l’unIon européenne

Sommaire du module

Fiche 5. Les relations professionnelles à l’échelon ⒉interprofessionnel

Fiche 6. Le dialogue social sectoriel ⒉

Fiche 7. Un maillon manquant au système européen de ⒉relations socio-professionnelles : une Cour européenne du Travail ?

Eclairage sur le contenu du module ⒉

Le système politique qui s’est constitué progressivement à l’échelon de l’UE produit des nor-mes qui s’imposent à celles des Etats nationaux. Il est dès lors primordial pour le syndicalisme qu’un système de relations socio-professionnelles à cet échelon puisse à la fois défendre les droits sociaux et syndicaux mais aussi permettre l’émergence de nouveaux droits communs.Ce module s’organise en trois fiches qui permettent de faire le tour du système de relations socio-professionnelles actuel aux différents niveaux : interprofessionnel (fiche 5) et sectoriel (fiche 6). La fiche 7, elle, met le doigt sur le maillon actuellement absent dans le système : une Cour européenne du Travail et ses conséquences sur un droit social européen encore très embryonnaire.

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e 5Fiche 5

Les relations professionnelles à l’échelon interprofessionnel

CEE : Un tripartisme au départ non assumé et assuré

Dans le contexte de démocratisation des systèmes politiques de l’après 2e guerre mondiale et du fait des liens étroits de type tripartite qui s’étaient tissés à l’échelon européen de la CECA entre le monde politique et les syndicalistes chrétiens et sociaux-démocrates, ces dirigeants syndicaux de la fin des années 1950 ne pouvaient imaginer que des décisions importantes se prennent dans le domaine socio-économique en passant totalement au-dessus de leur tête. Et pourtant ce fut le cas lors de la mise en place de la Communauté économique européenne fondée sur le Traité de Rome de 1957.

Les syndicats n’étaient mentionnés qu’à deux reprises dans ce Traité : d’une part par la mise en place d’un comité de gestion tripartite du Fonds social européen prévu au départ comme un fonds de financement de la réadaptation professionnelle pour accroître la mobilité des travailleurs (art. 124) ; d’autre part en tant que groupe d’intérêt représenté au Comité économique et social à côté du patronat et d’un 3e groupe « Intérêts divers » (art.193), comité qui restera toujours très marginal dans le fonctionnement de l’Europe communautaire. L’article 118 annonçait qu’allait s’établir une collabo-ration entre Etats et Commission sur un ensemble de matières sociales concernant directement le monde syndical mais rien n’était prévu pour y associer les syndicats. De façon plus générale, aucune procédure de consultation ni de concertation officielle ne leur permettait d’être tenu au courant des futures normes européennes à adopter par la Commission et le Conseil. Leur première revendication européenne d’avoir un syndicaliste nommé comme commissaire européen ne reçut aucun crédit de la part des nouvelles Autorités communautaires. Rien non plus ne faisait augurer d’une volonté politique de mettre en place des dispositifs légaux de négociation collective.

Il fallut attendre le début des années 1970, dans la foulée de la contestation sociale de la fin des années soixante, pour que le personnel politique se rapproche à nouveau des dirigeants syndicaux et les associe à des initiatives de type tripartite : création d’un comité permanent pour l’emploi (1970), Conférence sociale tripartite (1974), Conférences tripartite économique et sociale (1976, 1977, 1978). Il avait fallu ainsi plus de dix ans pour que les dirigeants syndicaux puissent avoir des rencontres officielles avec les ministres et la Commission responsables des politiques socio-économiques. Mais dès 1975, le patronat entame un virage néo-libéral marqué, appuyé par la Commission européenne. La CES ne trouvera plus aucun terrain d’entente dans le processus de concertation tripartite et le quittera en 1978.

C’est parce qu’elle se trouva en situation d’échec, la stratégie d’établir une alliance avec des res-ponsables politiques autour d’un projet néo-keynésien à l’échelon européen n’ayant pas fonctionné en 5 ans d’actions syndicales diverses, que la CES se résolut à essayer de se réinsérer dans une relation institutionnalisée à l’échelon de la CEE.

L’entrée dans l’ère du dialogue social

Ce fut Pierre Berégovoy, à l’occasion de la présidence française du Conseil lors du premier semestre de 1984, qui mit en place une structure de rencontre informelle, le dialogue social, qui se tiendra dans le prieuré bruxellois de Val Duchesse, entre la CES et les représentants patronaux européens. L’UNICE, représentant le patronat du secteur privé, était fortement opposé à toute élaboration de normes sociales et de conventions collectives. Le terme de « dialogue », tout à fait étranger au vo-cabulaire classique de la consultation et de la négociation, fut retenu afin de ne pas effaroucher le monde patronal.

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e 5Avec l’entrée en fonction de Jacques Delors comme président de la Commission le 1er janvier 1985, le processus de dialogue fut stabilisé et attaché aux services de la Commission. Il s’agissait de faire se rencontrer les trois interlocuteurs représentatifs à l’échelon interprofessionnel, la CES comme ac-teur syndical et l’UNICE et le CEEP (patronat des entreprises publiques) comme acteurs patronaux, autour de textes généraux sur les grandes orientations socio-économiques en vue d’aboutir à des compromis à travers des textes d’avis commun.

Un ensemble de relations extrêmement ambiguës se mettront alors en place. La CES s’engage dans le processus de Dialogue social tout en sachant qu’elle ne possède pas le rapport de force néces-saire pour contraindre l’UNICE à accepter une quelconque négociation européenne. Ce processus lui confère néanmoins une reconnaissance institutionnelle officielle en tant qu’interlocuteur social communautaire. À cause de l’idée que se fait la CES de la proximité entre ses intérêts et ceux de Jacques Delors suite à son passé syndical, elle espère que le Dialogue social donnera au président de la Commission une légitimité d’intervention plus forte pour proposer des instruments législatifs à partir des textes d’avis commun. Et ce fut bien là le principal malentendu. Jacques Delors présente bien parmi ses priorités la mise en place d’une dimension sociale au sein du nouveau projet de Mar-ché intérieur mais fait de la dynamique contractuelle la voie principale, sinon unique, de réalisation de celle-ci. Le nouvel article du Traité 118 B (Acte unique de 1986) reconnaît le dialogue social et l’associe aussitôt à la volonté contractuelle des deux parties.

Face à une production législative économique florissante pour libéraliser l’Europe, la CES se re-trouve dès lors écrasée sous une responsabilité impossible : construire une Europe sociale par le biais de conventions collectives face à un patronat qui ne souhaite que « dialoguer ». Cette situation aura sur l’euro-syndicalisme deux effets. Tout d’abord, accepter de se rapprocher de façon de plus en plus nette des visions du monde patronal en espérant trouver des compromis pour ouvrir une possibilité future de négociation (remplacement d’une dynamique de confrontation par une dyna-mique du consensus). Ensuite, se lancer dans une bataille pour que le Traité européen soit réformé en profondeur afin d’éviter le double blocage patronal dans le domaine social : ni loi ni convention collective.

Le dialogue social interprofessionnel à partir du Traité de Maastricht

La CES va réussir à négocier un accord avec l’UNICE pour introduire une procédure originale per-mettant d’instituer tant la consultation que la négociation collective à l’échelon de l’Europe commu-nautaire. Cette nouvelle procédure, d’abord simplement annexée au Traité de Maastricht (1991) dans un protocole signé à Onze suite au rejet britannique, deviendra un article du Traité à part entière lors de la nouvelle réforme arrêtée à Amsterdam (1997, art.138 et 139, cf. traité d’Amsterdam et de Nice dans Détails de taille).

Cette procédure donne aux interlocuteurs sociaux représentatifs le droit d’être consultés, en deux étapes, sur l’opportunité, ensuite sur l’orientation d’une proposition législative de la Commission. À la suite de cette consultation, les organisations consultées peuvent adresser un avis ou une recom-mandation à la Commission européenne ou l’informer de leur intention d’ouvrir une négociation sur le sujet ayant fait l’objet de la consultation. Dans ce dernier cas de figure, les interlocuteurs sociaux disposent d’un délai initial de neuf mois pour aboutir. En cas d’absence d’initiative de ceux-ci, la Commission retrouve sa capacité d’action. S’ils aboutissent à un texte d’accord collectif, celui-ci est transposable aux échelons nationaux soit à travers les pratiques propres aux Etats et aux interlocu-teurs sociaux, soit par une décision du Conseil sur proposition de la Commission.

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e 5Procédure de double consultation et de négociation (dite de dialogue social) instituée en 1991

Les acteurs Commission Interlocuteurs sociaux Conseil

Déroulement de l’action

1.Première consulta-tion : annonce d’une initiative législative

2.Deuxième consulta-tion : présentation du

contenu

Ils peuvent arrêter ces deux éta-pes en annonçant l’intention de

négocier sur le même objet dans un délai de 9 mois.

Si résultat et à la demande des deux parties, l’accord peut être changé en loi européenne (par

décision du Conseil).

Sans résultat, la Commission reprend son initiative.

Les éléments intéressants de la procédure

Pour la première fois depuis 1958, le pouvoir politique européen institue une procédure officielle •permanente qui associe les interlocuteurs sociaux à la prise de décision européenne, et qui plus est, à la source de celle-ci ;

En pouvant interrompre l’initiative législative de la Commission pour négocier un accord collectif •à la place, on crée un parallélisme entre loi et contrat et on attribue ainsi un pouvoir de co-légis-lateur aux interlocuteurs sociaux.

Par la possibilité de changer le contrat en loi européenne, ce parallélisme est encore renforcé ; •ce qui symboliquement attribue aux interlocuteurs sociaux un rôle politique d’Autorités publiques et permet une couverture totale de l’accord pour tous les salariés européens concernés.

Le fait que la Commission puisse reprendre l’initiative législative en cas d’échec de la négociation •empêche le patronat européen d’utiliser cette procédure pour bloquer l’adoption d’une norme sociale. Au pire, il ne peut que ralentir le processus.

Mais attention aux pièges et embûches

En effet, les problèmes posés par la procédure sont nombreux :

Le pouvoir ainsi attribué aux interlocuteurs sociaux est limité au domaine social ! Or dans la •réalité de l’UE, la matière sociale a été réappropriée par l’approche économique néo-libérale qui fait que l’essentiel des lois qui vont avoir un impact direct sur le domaine social, les lois sur le fonctionnement du marché intérieur, elles, ne sont pas adoptées à travers une consultation officielle des organisations syndicales (alors que les lobbies patronaux peuvent influencer encore plus en amont de la décision par des contacts directs avec les services qui préparent le futur texte de loi).

Donnons un exemple : lorsque les questions liées à la retraite sont envisagées sous l’angle du déve-loppement d’un libre marché des capitaux, la directive qui va organiser le développement des fonds de pension en Europe ne va pas s’intégrer dans cette procédure, alors que les lobbies bancaires et ceux des assurances auront tout loisir de faire pression en amont sur le commissaire concerné et que ces décisions influenceront lourdement le contenu du droit social de la retraite ;

En outre, pour que la procédure fonctionne, il faut qu’il y ait une initiative législative de la Com-•mission. Or, alors que cette procédure entra en vigueur en 1993 au même moment, la Commis-sion européenne publiait un livre vert, puis un livre blanc sur la politique sociale européenne, annonçant que la législation européenne en matière sociale serait minimale.

Cette procédure offre, au moins théoriquement, un pouvoir d’ordre législatif aux interlocuteurs so-•ciaux plus puissant que celui actuellement détenu par le parlement élu au suffrage universel !

Cette procédure s’inscrit dans une culture globale de « dialogue social », c’est-à-dire dans un cli-•mat politique marqué par une représentation des acteurs comme « partenaires » à la recherche du

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e 5consensus comme but premier et où l’objectif de compétitivité des entreprises est posé comme cadre naturel de l’échange. C’est pourquoi les accords conclus à cet échelon s’imposent de ne pas contrarier le bon développement des PME.

Par ailleurs, depuis la réforme du Traité de 1986 (Acte unique), la norme sociale européenne est •d’emblée considérée comme une norme qui doit être minimale. Les accords collectifs à conclure sont eux aussi considérés comme accords-cadres, généraux et minimaux. Ce qui a rompu avec le principe du début de la construction européenne : l’harmonisation des lois par le haut en vue d’augmenter le progrès social.

Si la Commission ne prend plus d’initiative, les interlocuteurs sociaux peuvent négocier à tout •moment des accords volontaires : au moment où ils le veulent et sur les sujets qu’ils souhaitent. Mais dans ce cas, ces accords dits « autonomes » ne seront plus étendus à tous par une décision du Conseil. Ils ne seront transposés dans le droit national qu’en fonction des rapports de force nationaux : sous la forme d’une convention collective au mieux, comme une simple déclaration d’orientation non contraignante au pire. Ce qui peut entraîner des disparités de droits entre les salariés européens suivant leur nationalité !

Notons aussi que le Traité de Maastricht (actuel art. 137, Traité de Nice) avait permis d’accroître l’initiative législative de l’UE dans le domaine social (plus de matières possibles dans le domaine de compétence européenne et plus de matières liées au vote à la majorité) et que ces directives pouvaient être transposées à l’échelon national tant par une loi que par une convention collective nationale ou un mixte des deux ; ce qui renforce dans le Traité, l’idée d’un parallélisme entre loi et contrat et confère une qualité politique forte aux interlocuteurs sociaux. Malheureusement ceci reste très symbolique dans un cadre où le pouvoir politique actuel de l’UE a choisi de s’abstenir dans l’élaboration de normes sociales européennes juridiquement contraignantes.

Etant donné tous les problèmes décrits, cette procédure n’a pas abouti à de nombreux résultats.

Seuls sept accords-cadres (voir le tableau dans Détails de taille) ont été adoptés à l’échelon inter-professionnel depuis 1995. À cette vitesse, et étant donné la décision des Autorités européennes de réduire la loi sociale au strict minimum, tout est fait pour que l’UE soit réellement une Union économique et monétaire et non une Union sociale.

Par ailleurs, les thèmes de négociation retenus ne se situent pas en général au cœur de la construc-tion du droit social, hormis l’accord qui limite le développement des contrats à durée déterminée ; ce qui accentue encore l’asymétrie entre une Europe qui produit à plein régime du droit économique de nature néo-libérale et un droit social européen marginal.

Cette procédure (la double consultation), au départ fixée pour organiser les relations socio-profes-sionnelles à l’échelon interprofessionnel a été officiellement étendue par la Commission européenne aux acteurs sectoriels représentatifs dès 1993, même si elle ne l’organisera vraiment en un système rationalisé qu’à partir de 1999 (cf. fiche 6).

Une extension de la notion de dialogue social comme terme générique

Après la mise en place de la procédure de double consultation/négociation et d’extension de celle-ci à l’échelon sectoriel, la notion de dialogue social s’est peu à peu imposée comme un terme géné-rique qui caractériserait et définirait tout système de relations socio-professionnelles partout dans le monde. Cette imposition et cette généralisation sémantique est dangereuse étant donné que la notion de « dialogue social » a été clairement utilisée par la Commission européenne comme un vecteur de transformation culturelle du syndicat : pour converger vers des syndicats « partenaires » du monde patronal, habitués à considérer comme naturel et normal l’économie de libre-échange, et donc le capitalisme. Ceci revient à imposer le consensus comme fonctionnement de la prise de décision. Cet état de fait met gravement en péril la culture démocratique qui se fonde sur l’évidence d’une pluralité de projets de société en conflit et donc sur la recherche de compromis dont la dyna-mique est la recherche de l’intérêt collectif des peuples.

Le système de dialogue social au sein de l’UE s’est agrémenté de nouvelles procédures de dialo-gue.

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e 5Le dialogue macro-économique

En juin 1999, lors du Conseil européen de Cologne, Oskar Lafontaine, alors ministre des Finances du gouvernement allemand à la Présidence européenne, a proposé d’instaurer une nouvelle ins-tance appelée «dialogue macro-économique». Elle visait à instaurer une nouvelle procédure entre trois catégories d’acteurs : les gouvernements nationaux qui gèrent les politiques budgétaires, les partenaires sociaux qui définissent les conditions de salaires et de travail, et la Banque centrale qui met en œuvre la politique monétaire. Les participants au dialogue étaient donc les représentants des deux formations du Conseil [Ecofin, et Travail et Affaire sociales (TAS)], de la Commission, de la Banque centrale européenne (BCE) et des « partenaires sociaux », CES, UNICE (aujourd’hui nommé BusinessEurop) et CEEP.

En réalité, après presque une décennie de fonctionnement, on constate que ce dialogue, dont l’ob-jectif affiché était d’améliorer la croissance et l’emploi, ne parvient toujours pas à dépasser le simple « échange de point de vue », et se trouve absolument dominé par le « diktat monétaire » de la BCE. Ainsi, face à la toute puissante politique monétaire unique de la Banque, les acteurs politiques et partenaires sociaux ne parviennent pas à évoluer respectivement vers un pôle de coordination des politiques budgétaires nationales, d’une part, et vers une coordination des négociations collectives, d’autre part.

Il apparaît, en définitive, que le Dialogue n’est actuellement ni un moyen ni une fin quant à la définition et à la mise en œuvre d’une politique économique européenne. L’essai d’Oskar Lafontaine - qui a d’ailleurs du démissionner très tôt - ne s’est pas transformé en une victoire des néo-keynesiens à la tête des institutions européennes, ce qui était prévisible. Ce Dialogue ne pouvait avoir de substance, ni créer une dynamique politique dans la configuration institutionnelle et politique de l’UEM. Stabilité monétaire et réformes structurelles y sont privilégiées au détriment d’une véritable prise de décision impliquant une délibération politique au niveau européen en matière de revenus et/ou d’emploi.

S’il est important de constater que ce dialogue macro-économique est bien resté «en panne», il est aussi nécessaire de s’interroger sur les enceintes de dialogue qui ne se limitent pas à celles prévues par Cologne, et qui évoluent au fil des Conseils européens et des nouvelles méthodes communau-taires d’action politique qui se développent. En effet, l’intégration du titre « emploi » dans le Traité (1999) et le processus qui en a découlé suite aux décisions du Conseil européen de Luxembourg (1997) avait fait l’objet de lieux et de moments de concertation variés et inégaux. Jusqu’à ce moment là, l’enceinte de dialogue était le Comité permanent pour l’emploi (CPE) tripartite (partenaires so-ciaux, Commission et ministres du Travail et de l’Économie et des Finances) qui donnait lieu à des rencontres sur les lignes directrices de politique économique et sur la stratégie de l’emploi.

Le Comité de concertation tripartite pour la croissance et l’emploi

Puis, lorsqu’en mars 2000, au conseil européen de Lisbonne, la décision a été prise d’intégrer l’en-semble de la démarche économique, structurelle et de l’emploi en créant un Conseil européen de printemps (chose acquise depuis 2003), on s’est alors aperçu que la réforme du CPE n’avait pas conduit à une intégration similaire de la concertation tripartite. Ce Comité ne répondait donc plus aux besoins de cohérence entre les différents processus auxquels étaient associés les partenaires sociaux. C’est pourquoi, la CES, l’UNICE/UAPME et le CEEP ont proposé de remplacer le CPE par un comité de concertation tripartite pour la croissance et l’emploi, qui examine l’ensemble de la stratégie communautaire définie à Lisbonne avant chaque Conseil européen de printemps.

Le programme triennal autonome des « partenaires sociaux »

Suite à leur déclaration commune pour le Sommet de Laeken, en décembre 2001, les interlocuteurs sociaux interprofessionnels (CES, UNICE, UEAPME et CEEP) s’étaient engagés à définir un programme de travail autonome trisannuel. Pour rappel, ils avaient clarifié dans ladite déclaration les différences entre la concertation tripartite (partenaires sociaux – autorités politiques), le dialogue social (procé-dure bipartite des partenaires sociaux, qu’elle soit ou non la conséquence d’une consultation de la Commission) et la consultation des partenaires sociaux (qui peut prendre plusieurs formes). Ils en appelaient aussi au développement d’un dialogue social plus autonome, basé sur une palette d’ins-

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e 5truments variés (divers types d’accords-cadres européens, avis, recommandations, déclarations, échanges d’expériences, actions de sensibilisation, débats ouverts, etc.).

En décembre 2002, ils ont donc présenté un premier programme triennal autonome (2003-2005) comprenant une vingtaine d’initiatives regroupés autour de trois grandes priorités : la mobilité, l’élar-gissement et l’emploi (cette dernière priorité englobe près des 2/3 des initiatives) (voir Détails de taille, D) prolongé en mars 2006, par un deuxième programme (2006-2008) plus concret quant aux réalisations à venir et insistant sur la signature d’accords autonomes (voir Détails de taille, E).

Marquant par là un recul flagrant de la « loi », ce nouveau dialogue « autonome », bipartite tend vers la conclusion d’accords volontaires non contraignants. Les trois derniers accords interprofessionnels signés sur le télétravail (2002), le stress (2004), et le harcèlement (2007) tous volontaires, confirment cette tendance.

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illeDétails de taille

A) Articles relatifs aux relations institutionnelles avec les syndicats issus des traités européens

Le traité de Rome (1957)•

« La Commission a pour mission de promouvoir une collaboration étroite entre les États membres dans le domaine social, notamment dans les matières relatives (…) au droit syndical et aux négo-ciations collectives entre employeurs et travailleurs » (article 118).

« L’administration du Fonds [social européen] incombe à la Commission. La Commission st as-sistée dans cette tâche par un Comité présidé par un membre de la Commission et composé de représentants des gouvernements et des organisations syndicales de travailleurs et d’employeurs. » (Article 124)

Un Comité économique et social est institué, « composé de représentants de différentes catégories de la vie économique et sociale, notamment des producteurs, des agriculteurs, des transporteurs, des travailleurs, des négociants et artisans, des professions libérales et de l’intérêt général » (article 193).

L’acte unique européen (1986)•

« La Commission s’efforce de développer le dialogue entre partenaires sociaux au niveau européen, pouvant déboucher, si ces derniers l’estiment souhaitable, sur des relations conventionnelles » (ar-ticle 118 B).

Le traité de Maastricht (1991)•

« La Commission a pour tâche de promouvoir la consultation des partenaires sociaux au niveau communautaire et prend toute mesure utile pour faciliter leur dialogue en veillant à un soutien équi-libré des parties. À cet effet, la Commission, avant de présenter des propositions dans le domaine de la politique sociale, consulte les partenaires sociaux sur l’orientation possible d’une action com-munautaire. Si la Commission, après cette consultation, estime qu’une action communautaire est souhaitable, elle consulte les partenaires sociaux sur le contenu de la proposition envisagée. Les partenaires sociaux remettent à la Commission un avis ou, le cas échéant, une recommandation. À l’occasion de cette consultation, les partenaires sociaux peuvent informer la Commission de leur volonté d’engager le processus prévu à l’article 4 (…) » (article 3 de l’Accord sur la politique sociale annexé au traité de Maastricht, qui deviendra le 118A dans le traité d’Amsterdam).

« Le dialogue entre partenaires sociaux au niveau communautaire peut conduire, si ces derniers le souhaitent, à des relations conventionnelles, y compris des accords. La mise en œuvre des accords conclus au niveau communautaire intervient soit selon les procédures et pratiques propres aux partenaires et aux États membres, soit (…) par une décision du Conseil sur proposition de la Com-mission. » (article 4 de l’Accord sur la politique sociale annexé au traité de Maastricht, qui deviendra le 118B dans le traité d’Amsterdam).

Le traité d’Amsterdam (1997)•

Article 138 (ex-article 118 A)

1. La Commission a pour tâche de promouvoir la consultation des partenaires sociaux au niveau communautaire et prend toute mesure utile pour faciliter leur dialogue en veillant à un soutien équilibré des parties.

2. À cet effet, la Commission, avant de présenter des propositions dans le domaine de la politique sociale, consulte les partenaires sociaux sur l’orientation possible d’une action communautaire.

3. Si la Commission, après cette consultation, estime qu’une action communautaire est souhaitable, elle consulte les partenaires sociaux sur le contenu de la proposition envisagée. Les partenaires sociaux remettent à la Commission un avis ou, le cas échéant, une recommandation.

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ille4. À l’occasion de cette consultation, les partenaires sociaux peuvent informer la Commission de

leur volonté d’engager le processus prévu à l’article 139. La durée de la procédure ne peut pas dépasser neuf mois, sauf prolongation décidée en commun par les partenaires sociaux concer-nés et la Commission.

Article 139 (ex-article 118 B)

1. Le dialogue entre partenaires sociaux au niveau communautaire peut conduire, si ces derniers le souhaitent, à des relations conventionnelles, y compris des accords.

2. La mise en œuvre des accords conclus au niveau communautaire intervient soit selon les procé-dures et pratiques propres aux partenaires sociaux et aux États membres, soit, dans les matières relevant de l’article 137, à la demande conjointe des parties signataires, par une décision du Conseil sur proposition de la Commission.

Le Conseil statue à la majorité qualifiée, sauf lorsque l’accord en question contient une ou plusieurs dispositions relatives à l’un des domaines visés à l’article 137, paragraphe 3, auquel cas il statue à l’unanimité.

Le traité de Nice (2000)•

« Un État membre peut confier aux partenaires sociaux, à leur demande conjointe, la mise en œuvre des directives prises en application du paragraphe 2. Dans ce cas, il s’assure que, au plus tard à la date à laquelle une directive doit être transposée (…), les partenaires sociaux ont mis en place les dispositions nécessaires par voie d’accord, l’État membre concerné devant prendre toute disposi-tion nécessaire lui permettant d’être à tout moment en mesure de garantir les résultats imposés par ladite directive » (article 137).

Le traité de Lisbonne (2008)•

Le principal apport du projet de traité constitutionnel devait concerner la reconnaissance formelle des partenaires sociaux et du dialogue social autonome. Ainsi, dans la partie I de ce projet de traité, pouvait-on lire que « l’Union reconnaît et promeut le rôle des partenaires sociaux à son niveau, en prenant en compte la diversité des systèmes nationaux. Elle facilite le dialogue entre eux, dans le respect de leur autonomie. Le sommet social tripartite pour la croissance et l’emploi contribue au dialogue social » (article I-48). Signalons également, dans la partie III consacrée aux politiques de l’Union européenne, que l’Union et ses États membres ont, entre autres, pour objectifs « la promo-tion de l’emploi, l’amélioration des conditions de vie et de travail, permettant leur égalisation dans le progrès, une protection sociale adéquate, le dialogue social, le développement des ressources humaines permettant un niveau d’emploi élevé et durable, et la lutte contre les exclusions » (article III 209). Ce projet de traité ne modifie pas substantiellement les procédures du dialogue social euro-péen, il reconnaît néanmoins l’importance de son rôle dans la construction de la dimension sociale de l’Europe.

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B) Accords mis en oeuvre conformément à l’article 139.2

Les textes de cette catégorie établissent des normes minimales et supposent la mise en oeuvre de certains engagements à une date limite. De l’article 139, paragraphe 2, il ressort que deux principaux types d’accords relèvent de cette catégorie, leur différence principale ayant trait à la méthode de mise en oeuvre prévue.

Type d’accord Liste des accords Mise en oeuvre

Accords mis en oeuvre par décision du

Conseil

Accord-cadre sur le •congé parental, 1995

Accord-cadre sur le travail •à temps partiel, 1997

Accord-cadre sur le tra-•vail à durée déterminée, 1999

Par directive 96/34/CE du Conseil •du 3 juin 1996

Par directive 97/81/CE du Conseil •du 15 décembre 1997

Par directive 1999/70/CE du Conseil •du 28 juin 1999

Accords autonomes

Accord-cadre sur le télé-•travail, 2002

Accord-cadre sur le stress •lié au travail, 2004

Accord-cadre sur le har-•cèlement et la violence au travail, 2007

Mis en oeuvre selon les procédures •et les pratiques propres aux em-ployeurs et salariés et aux États membres

Mise en oeuvre et suivi par les in-•terlocuteurs sociaux

Accords mis en oeuvre par décision du Conseil

La première sorte d’accord concerne ceux qui sont mis en oeuvre à la demande conjointe des parties signataires par décision du Conseil (dans la pratique jusqu’à présent par des directives du Conseil) sur proposition de la Commission. Cette catégorie inclut les trois accords-cadres interpro-fessionnels sur le congé parental, le travail à temps partiel et les contrats à durée déterminée, ainsi que les accords du secteur du transport maritime et de l’aviation civile relatifs au temps de travail, et l’accord du secteur des chemins de fer relatif aux conditions de travail des travailleurs mobiles effectuant des services d’interopérabilité transfrontalière. Les trois accords-cadres interprofessionnels ont été négociés à la suite d’une consultation de la Commission au titre de l’article 138, alors que les accords sectoriels utilisent la latitude qu’une directive laisse aux « partenaires sociaux » d’adapter les dispositions communautaires aux besoins spécifiques du secteur (Directive 93/104/CE du 23 novembre 1993 concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail). La responsa-bilité de s’assurer que les accords mis en oeuvre par décision du Conseil sont transposés et mis en œuvre relève des États membres, même dans les cas où ces dispositions sont mises en œuvre par l’intermédiaire de négociations collectives entre les interlocuteurs sociaux. La responsabilité du suivi de ces accords relève de la Commission bien que les interlocuteurs sociaux soient consultés systématiquement sur les rapports de mise en œuvre.

Accords autonomes

En ce qui concerne le second type d’accords - ceux mis en oeuvre conformément aux procédures et pratiques propres aux partenaires sociaux et aux États membres - ce sont patronat et syndicat eux-mêmes qui ont la responsabilité de mettre en oeuvre et d’assurer le suivi de ces accords. L’accord-cadre sur le télétravail de juillet 2002 est le premier exemple interprofessionnel de ce type d’accord et il est le résultat d’une consultation au titre de l’article 138. En octobre 2004, les interlo-cuteurs sociaux interprofessionnels ont signé leur second accord de ce type sur le thème du stress lié au travail, qui était également le résultat d’une consultation au titre de l’article 138.

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C) Matières de consultation des partenaires sociaux préalablement à l’adoption d’une proposition législative (article 137 du Traité de Maastricht)

L’entrée en vigueur du Traité de Maastricht, et son volet social, s’est traduite par l’obligation, pour la Commission, de consulter les partenaires sociaux préalablement à l’adoption d’une proposition législative dans les matières suivantes :

L’amélioration, en particulier, du milieu de travail pour protéger la santé et la sécurité des •travailleurs ;

Les conditions de travail ;•

L’information et la consultation des travailleurs ;•

L’intégration des personnes exclues du marché du travail ;•

L’égalité entre les hommes et les femmes en ce qui concerne leurs chances sur le marché du •travail et le traitement dans le travail ;

La sécurité sociale et la protection sociale des travailleurs ;•

La protection des travailleurs en cas de résiliation du contrat de travail ;•

La représentation et la défense collective des intérêts des travailleurs et des employeurs ;•

Les conditions d’emploi des ressortissants des pays tiers se trouvant en séjour régulier sur •le territoire de la Communauté ;

Les contributions financières visant à la promotion de l’emploi et de la création d’emplois, •sans préjudice des dispositions relatives au Fonds social.

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D) Programme de travail des partenaires sociaux européens, 2003-20051. EMPLOI

Thèmes Actions CalendrierLignes directrices pour l’em-ploi

rapport sur les actions des partenaires sociaux dans les États membres pour la mise en œuvre des lignes directrices

2003-2005

Éducation et formation tout au long de la vie

suivi du cadre d’actions et rapport d’évaluation 2003-04-05

Stress au travail séminaire en vue de négocier un accord volontaire 2003Égalité entre les femmes et les hommes

séminaire sur l’égalité des chances et la discrimination fondée sur le sexe en vue d’un cadre d’actions

2003

Restructurations dégager des orientations susceptibles de servir de référence pour aider à gérer les changements et leurs conséquences sociales dans des situations de restruc-turations sur la base de cas concrets

2003

Handicap mise à jour de la déclaration commune de 1999 en guise de contribution à l’année européenne du han-dicap

2003

Jeunes encouragement de l’intérêt des jeunes pour les scien-ces et les technologies afin de contribuer à corriger la pénurie de compétences, au travers d’une déclaration commune et/ou d’une campagne de sensibilisation

2003-2005

Racisme mise à jour de la déclaration commune de 1995 (avec la participation des pays candidats)

2004

Vieillissement de la main-d’œuvre

séminaire pour discuter d’études de cas et envisager d’éventuelles actions communes

2004

Harcèlement séminaire pour étudier la possibilité de négocier un accord volontaire

2004-2005

Télétravail surveillance du suivi donné à l’accord-cadre 2003-2005Travail non déclaré séminaire en vue d’un avis commun 2005

2. ÉLARGISSEMENTThèmes Actions Calendrier

Relations industrielles séminaires communs sur les relations industrielles (études de cas sur les différents moyens d’articuler les divers niveaux de négociation

2003-2005

Dialogue social deux réunions élargies du Comité de dialogue social par an

2003-2005

Restructurations étude sur les restructurations dans les pays candi-dats

2003-2004

Éducation et formation tout au long de la vie

inclusion des pays candidats dans le suivi du cadre d’actions

séminaire en 2004, inclu-sion dans préparation rap-ports en 2005

Mise en œuvre de l’acquis législatif

séminaire commun sur les comités d’entreprise euro-péens

2004

Politiques sociales et de l’emploi de l’UE après élar-gissement

réflexion prospective afin d’identifier les enjeux qui se poseront dans l’UE après l’élargissement (p.ex. augmentation de la diversité, migrations, travail trans-frontalier, etc.)

à partir de 2004

3. MOBILITÉThèmes Actions Calendrier

Plan d’action sur les compé-tences et la mobilité

séminaire afin d’identifier les domaines où une action commune des partenaires sociaux au niveau de l’UE pourrait contribuer à lever les obstacles à la mobilité (notamment pour les cadres), y compris les retraites complémentaires.

2003-2005

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E) Programme de travail des partenaires sociaux européens, 2006-2008

[….]

Afin de contribuer à l’accroissement du potentiel d’emploi et de croissance de l’Europe et de l’impact du dialogue social européen, les partenaires sociaux entreprennent de mener à bien une analyse commune des défis clés auxquels les marchés de l’emploi européens font face, en examinant des questions telles que :

les politiques macro-économiques et du marché du travail, •

les changements démographiques, le vieillissement actif, l’intégration des jeunes,•

la mobilité et les migrations, •

l’éducation et formation tout au long de la vie, la compétitivité, l’innovation et l’intégration des •groupes désavantagés sur le marché du travail

l’équilibre entre flexibilité et sécurité, •

le travail non déclaré.•

Sur cette base, ils1. décideront quelles recommandations communes il convient d’adresser aux institutions européen-

nes et nationales,

2. définiront quelles priorités devraient être intégrées dans un cadre d’actions sur l’emploi par les partenaires sociaux et

3. négocieront un accord-cadre autonome soit sur l’intégration des groupes désavantagés sur le marché du travail, soit sur l’éducation et la formation tout au long de la vie. Pour définir leurs mandats respectifs, ils étudieront différentes possibilités.

En outre, les partenaires sociaux européens4. négocieront en 2006 un accord-cadre volontaire sur le harcèlement et la violence,

5. termineront les études nationales sur l’évolution économique et sociale dans l’Europe des 10, les élargiront de manière à couvrir l’Europe des 15 et, sur cette base, promouvront et évalueront les orientations de référence sur la gestion du changement et ses conséquences sociales ainsi que les enseignements communs sur les comités d’entreprise européens,

6. continueront leur travail d’aide au développement du dialogue social dans les nouveaux États membres, l’étendront au pays candidats et examineront comment les centres de ressources des employeurs et des syndicats offrant une assistance technique aux 10 nouveaux États membres pourraient fournir de l’aide aux partenaires sociaux de tous les pays de l’UE,

7. feront rapport sur la mise en oeuvre des accords relatifs au télétravail ainsi qu’au stress au travail et sur le suivi du cadre d’actions sur l’égalité entre les hommes et les femmes,

8. sur la base de l’application des accords sur le télétravail et le stress et des cadres d’actions pour le développement tout au long de la vie des compétences et des qualifications et sur l’égalité entre les femmes et les hommes, développeront davantage leur compréhension commune de ces instruments et de la façon dont ils peuvent avoir un impact positif à divers niveaux de dialo-gue social.

Le CEEP, UNICE/UEAPME et la CES considèrent que ce programme de travail ne constitue pas une liste exhaustive. Les partenaires sociaux peuvent décider de le mettre à jour à la lumière des évolu-tions dans l’UE. En outre, ils continueront à surveiller la mise en pratique de la stratégie européenne pour la croissance et l’emploi.

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e 5 - qu

’en dites-vo

us ?Qu’en dites-vous ?

1. Ce n’est qu’en 1995, que la première convention collective européenne interprofessionnelle voit le jour alors que depuis l’Acte unique de 1986, cela faisait déjà 9 ans que la Commission réalisait un programme afin d’adopter près de 300 directives économiques pour réaliser le marché intérieur. Que dites-vous de ce décalage ?

2. Le livre blanc sur la politique sociale de la Commission européenne de 1993 annonce que l’adop-tion de lois sociales pour former le cœur d’un droit social européen commun restera minimale, tant en nombre qu’en termes de contenu. Pensez-vous que face à une absence de responsabilité politique en faveur du droit social, le processus de négociation collective peut être capable de suppléer à ce vide législatif ?

3. Est-ce normal d’après vous que les accords collectifs européens soient fixés comme devant être des accords-cadres contenant des règles minimales ne devant pas perturber le fonctionnement des petites et moyennes entreprises ?

4. Comment ont été transposés dans votre législation les accords européens ? Les accords volon-taires ont-ils eu plus de difficultés à être négocié à l’échelon national ? Comment ont-ils été pris en compte (loi, accords collectifs, code de bonne conduite,…) ?

5. Quels seraient les arguments pour réactiver le dialogue macro-économique ?

• L’instanceduDialoguepourrait-ellerencontrerledéfidelacohérencegénéraleentrelestroisregistres de politiques économiques : le monétaire, le budgétaire, et le salarial et constituer un véritable levier de gouvernance économique concertée au niveau de l’Union économique et monétaire (UEM) ?

• Pourrait-elleaussiêtreunélémentsusceptibledefavoriser,àl’intérieurdechaqueÉtatmem-bre, une réflexion permanente sur la bonne façon de créer les GOPE de l’Union, compte tenu des réalités nationales ?

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e 5 - pou

r en savo

ir plusPour en savoir plus

Conseil central de l’économie (2001), Avis sur l’Amélioration du fonctionnement du dialogue macro-économique, CCE2001/850, Bruxelles, 27 novembre 2001.

Degryse, C. (2000), « Dialogue social européen : bilan en demi-teinte », in Barbier, C. et Pochet, P. (coord.), Bilan social de l’Union européenne - 1999, Rapport n° 67, Institut syndical européen et Observatoire social européen, décembre 2000, Bruxelles.

Didry, C. et Mias, A. (2005), Le moment Delors, les syndicats au cœur de l’Europe sociale, P.I.E.-Peter Lang, Bruxelles.

Dølvik, J.-E. (1999), L’émergence d’une île ? La CES, le dialogue social et l’européanisation des syndicats dans les années 1990, Institut syndical européen, Bruxelles.

Dufresne, A., Gobin, C. (2007), « Vers une offensive syndicale européenne ? Le 11ème Congrès de la Confédération européenne des syndicates », Chronique Internationale de l’IRES, septembre 2007, n° 108, pp.70-80.

Freyssinet, J. (1998), « Dialogue social et construction européenne », Chronique Internationale de l’IRES, Les acteurs sociaux nationaux face à la construction européenne, numéro hors série, octobre 1998, pp. 5-23.

Goetschy, J. (1991), Le dialogue social européen de Val Duchesse, Travail et Emploi, no 47, pp. 42-52.

Jacobs, A. et Ojeda Avilés, A. (1999), « The European Social Dialogue: some legal issues », in Ber-cusson, B., Blanke, T., Bruun, N., Jacobs, A., Ojeda Avilés, A., Veneziani, B. et Clauwaert, S. (eds.), A legal framework for European Industrial Relations, ETUI Report, Institut syndical européen, Bruxelles, pp. 57-75.

Gobin, C. (2000), « Union européenne et dévaluation du contre-pouvoir syndical », in Fouquet, A., Re-feldt, U., Le Roux, S., Le syndicalisme dans la mondialisation, Éd. de L’Atelier, Paris, pp 137 -147.

Gobin, C. (2007), « Dialogue social » in Durand, P., Les nouveaux mots du pouvoir. Abécédaire cri-tique, Ed. Aden, Bruxelles, pp. 136-142.

Maggi-Germain, N. (2007), “Sur le dialogue social”, Droit social, n° 7-8, juillet 2007, pp. 796-807.

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e 6Fiche 6

Le dialogue social sectoriel

L’évolution du cadre institutionnel

L’histoire des relations professionnelles sectorielles au niveau communautaire – qui ne s’appelaient pas encore dialogue social sectoriel, mais plus classiquement consultation et/ou négociation socia-les – remonte à l’époque du Traité instaurant la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA), signé le 18 avril 1951.

Cette histoire débute ainsi au niveau de deux secteurs qui étaient centraux alors pour le mouvement syndical : le charbon et l’acier. Elle est donc bien plus ancienne que celle formalisée par la mise en place des récents Comités de dialogue social sectoriel (CDSS). En effet, ce n’est qu’à partir du 1er janvier 1999 que la Commission européenne a décidé d’harmoniser son dispositif au niveau des secteurs, remplaçant les anciens types de structure existantes (groupes de travail informels et Comités paritaires) par les seuls CDSS (cf. détails de taille, B). Le dialogue social sectoriel s’est alors géné-ralisé, comme une extension du dialogue social interprofessionnel institué à Val Duchesse en 1985 et de nouvelles règles du jeu, plus systématiques, ont été appliquées aux anciennes structures.

Formés à la demande conjointe des « partenaires sociaux », les CDSS sont désormais approuvés en dernier ressort par la Commission selon des critères de représentativité bien définis. Ils sont composés d’un maximum de 40 représentants (comprenant un nombre égal de chacune des deux parties). Chaque comité est censé adopter son règlement intérieur et son programme de travail (souvent annuel). Il dispose au moins d’une réunion plénière par an et traite de questions plus spé-cifiques lors de réunions de secrétariat élargi ou de groupes de travail restreints. Leur mandat de négociation est délivré par les organisations syndicales nationales.

Depuis la réforme de 1999, le nombre de comités est exponentiel : en dix ans, entre 1997 (veille de la création des CDSS) et 2007, nous sommes passés de 20 à 35 secteurs constitués en comités. Plus exactement 10 comités paritaires et 14 groupes de travail informels se sont transformés en CDSS, tandis que 11 secteurs se sont directement constitués sous cette nouvelle forme : la culture et les travailleurs intérimaires (1999), l’ameublement (2001), la construction navale, les services publics lo-caux (2003), l’audiovisuel, la chimie, les collectivités locales (2004), et plus récemment encore l’acier, les hôpitaux (2006), ainsi que le gaz et la restauration collective (2007) (voir détails de taille, B).

Sans retracer ici l’histoire des relations professionnelles sectorielles européennes depuis les années 1950, son étude sur la longue période montre que, depuis l’origine, l’évolution de ce pré-dialogue social sectoriel (DSS) est bien une réponse institutionnelle que les syndicats ont dû apporter face à l’évolution de l’intégration économique européenne. En effet, les deux conditions qui ont favorisé le développement du pré-DSS sont :

l’existence de politiques communes (agriculture, transports…) ; et •

l’introduction plus récente de politiques de libéralisation créant la nécessité de pallier leurs consé-•quences sociales (postes, télécommunications…).

Le pouvoir politique européen jouant un rôle primordial dans les deux cas.

Ces deux conditions du DSS correspondent d’ailleurs aux deux générations de Comités paritaires répertoriés ci-dessous.

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e 6Deux générations de comités paritaires (1963-1994)

Cinq comités paritaires

de première génération

(politiques communes)

Quatre comités paritaires

de deuxième génération

(politiques de libéralisation)

l’agriculture (1963) •

les transports routiers (1965)•

la navigation intérieure (1967/1980*)•

la pêche (1968)•

les chemins de fer (1972)•

les transports maritimes (1987)•

l’aviation civile (1990)•

les télécommunications (1990)•

la poste (1994)•

Plus récemment, une étude réalisée par l’Observatoire social européen (2004) a tenté de définir les dynamiques du dialogue social sectoriel en fonction des spécificités des secteurs, et le lien entre ces dynamiques et la nature des textes conjoints signés (cf. détails de taille, C.) dans ces secteurs. Selon cette étude, on peut regrouper les secteurs en six grandes catégories :

les secteurs intégrés aux politiques européennes (transports, agriculture), qui produisent surtout •des accords-cadres ;

les secteurs dont les espaces nationaux sont dérégulés (télécoms, poste, électricité…), mis en •concurrence et en interconnexion, qui produisent surtout des recommandations ;

les secteurs en déclin (textile, chaussure, sucre…) et fortement soumis à la concurrence interna-•tionale, qui produisent surtout des codes de conduite ;

des secteurs traditionnels (banques, assurances) à la recherche d’un « objet européen », et dont •le dialogue social n’est pas très dynamique ;

les secteurs en recherche d’une « image de marque » européenne (sécurité privée, nettoyage, •…) et d’un « label de qualité » qui s’essaient à des codes de conduite non basés sur les normes de l’OIT (éthique, par exemple)

enfin, le secteur du commerce qui expérimente les divers instruments dans sa volonté de mieux •faire ressortir ses enjeux spécifiques (par rapport aux autres secteurs et à l’interprofessionnel).

Cette étude montre à quel point le DSS est déterminé par le contexte économique, politique et social de chaque secteur : ouvert à la concurrence internationale ou non, au cœur des politiques européennes ou non, libéralisé ou non, etc.

Les documents conjoints du DSS : des « positions communes » destinées aux institutions européennes

L’ensemble des textes issus du dialogue social sectoriel dans les comités officiellement constitués représente un total de plus de 360 « documents conjoints ». Ces documents ont des intitulés officiels très variés : avis communs, déclarations, résolutions, propositions, orientations, recommandations, codes de conduite, labels sociaux, etc... Mais, malgré cette variété apparente dans les intitulés, plus de la moitié d’entre eux sont, en réalité, des « positions communes » non contraignantes destinées aux institutions européennes.

Les trois domaines les plus importants en nombre de textes signés sont :

« Dialogue social » ; •

« Politique économique et/ou sectorielle » qui correspond à des questions ‘techniques’ de stra-•tégies sectorielles, économiques, industrielles ou commerciales ;

« Conditions de travail » en grande partie car la catégorie inclut les formes de travail dites atypiques, •comme le télétravail.

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e 6Tandis que les domaines les moins souvent abordés comprennent la « non-discrimination », le « temps de travail » et la « santé/sécurité »

Concernant les fonctions attribuées au dialogue social (cf. fiche 5, dialogue social interprofession-nel) il est à noter qu’au niveau sectoriel, les CDSS ont en réalité comme fonction minimale leur consultation par la Commission, tandis que le travail bipartite de négociation autonome entre les acteurs ne s’est concrétisé que pour très peu d’entre eux. Et, les cinq seuls accords contraignants signés au niveau sectoriel jusqu’à aujourd’hui l’ont tous été dans les transports (Cf. détails de taille, A), où s’est exercée la pression législative. En effet, ce secteur a la particularité d’avoir dû négocier une mise en oeuvre spécifique dans chacun de ses sous-secteurs (route, chemins de fer,..) de la directive sur l’aménagement du temps de travail de 1993 qui prévoyait leur exclusion de son champ d’application générale.

Finalement, dans sa pratique, le DSS apparaît donc bien plus comme un lieu de consultation des conséquences sociales des politiques communautaires - économiques, commerciales ou indus-trielles, domaines sur lesquels les syndicats ont peu de prise – que comme un lieu de négociation sur des normes sociales.

Si la négociation est restée longtemps dépendante de la relativement faible – selon les époques – pression législative de la Commission, depuis le sommet européen de Laeken, en décembre 2001, la nature du DSS et le rôle que la Commission y joue se sont, tout comme pour l’interprofessionnel, peu à peu modifiés. En effet, le rôle d’acteur politique de la Commission, qui consistait à produire un programme de propositions législatives incitant les « partenaires sociaux » à entrer en dialogue, voire en négociation s’est réduit. Cela signifie en réalité que la Commission n’exerce plus de pression législative, évacuant ainsi la possibilité de conclure des accords-cadres à transposer en directive par le Conseil. Une deuxième évolution du dialogue, concomitante de celle évoquée ici, vient de l’introduction de la Méthode ouverte de coordination (MOC), instrument utilisé par la Commission européenne en matière sociale, en complément ou en substitut à la législation sociale existante.

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illeDétails de taille

A. Cinq accords sectoriels européens et leur mise en œuvre

Interaction entre niveau européen et national

Accord Dispositions de mise en œuvre Mise en œuvre

Accord européen re-latif à l’organisation du temps de travail des gens de mer,

30 septembre 1998

«… vu l’article 4, paragraphe 2, de l’accord sur la politique sociale qui dispose que la mise en œuvre des accords conclus au niveau européen intervient à la demande conjointe des parties signataires, par une décision du Conseil sur proposition de la Commission… »

Directive du Conseil 99/63/CE du 21 juin 1999

Accord européen sur l’aménagement du temps de travail dans les chemins de fer,

30 septembre 1998

« La Communauté des chemins de fer européens et la Fédération des syndicats des transports dans l’Union européenne, réunis au sein du Comité Pa-ritaire des Chemins de fer (…) conviennent que les dérogations en question doivent être réglées par la voie de la subsidiarité ».

Directive du Conseil 2000/34/CE du 22 juin 2000 modifiant la direc-tive 93/104/CE

Accord européen sur l’aménagement du temps de travail du personnel naviguant dans l’aviation civile,

22 mars 2000

«… vu que l’article 139, paragraphe 2, du Traité dis-pose que la mise en œuvre des accords conclus au niveau européen intervient à la demande conjointe des parties signataires, par une décision du Conseil sur proposition de la Commission ;

vu que les parties signataires font cette demande par la présente… »

Directive du Conseil 2000/79/CE du 27 novembre 2000

Accord entre la CER et l’ETF sur la licen-ce européenne pour conducteurs effec-tuant un service d’in-teropérabilité trans-frontalière,

27 janvier 2004

Article 16 – Suivi de l’Accord

Un comité compose de représentants de chaque partie ayant participé à l’élaboration de l’accord se réunira tous les 6 mois, durant les deux premières années, dans le cadre du Comité de dialogue social, pour discuter des problèmes liés à la mise en oeuvre de cet accord et étudier les principales expériences des services effectués en interopé-rabilité. Des discussions CER- ETF portant sur les principaux incidents ou accidents pourront permettre d’émettre des propositions paritaires.

Proposition de Directive du Parle-ment européen et du Conseil rela-tive à la certification du personnel de bord assurant la conduite de locomotives et de trains sur le réseau ferroviaire de la Commu-nauté. COM (2004) 142 final du 3 mars 2004

Accord entre la CER et l’ETF sur certains aspects des condi-tions d’utilisation des travailleurs mobiles effectuant des servi-ces d’interopérabilité transfrontalière,

27 janvier 2004

Clause 10 – Suivi de l’Accord. Les signataires du présent accord suivront sa transposition et son application dans le cadre du Comité de dialogue sectoriel “chemins de fer” mis en place conformé-ment à la décision 98/500/CE de la Commission européenne.

Clause 11 – Evaluation. Les parties évalueront les dispositions de l’accord deux ans après sa signature à la lumière des premières expérien-ces de développement de transport interopérable transfrontalier.

Clause 12 – Révision. Les parties reverront les dispositions ci-dessus deux ans après la fin de la période de mise en oeuvre fixée par la décision du Conseil instaurant cet accord.

Directive 2005/47/CE du Conseil du 18 juillet 2005

Source : OSE (2004 : 20).

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B. Chronologie des structures sectorielles au niveau communautaire(comités paritaires et groupes de travail informels), transformées en comités de dialogue social sectoriel officiellement créés (tableau actualisé jusqu’au 31 décembre 2007)

Comités paritai-res

Groupes de travail informels

CDSS * Secteurs

1954 X Mines

1963 X Agriculture

1965 X Transports routiers

1967 X Navigation intérieure

1968 X Pêche maritime

1969 X Sucre

1972 X Chemins de fer

(1977) 1982 X Chaussure

1983 X Horeca/Tourisme

1985 X Commerce

1987 X Transports maritimes

1987 X Assurances

1990 X Télécommunications

1990 X Aviation civile

1990 X Banques

1992 X Construction

1992 X Nettoyage industriel

1992 X Textile-habillement

1993 X Sécurité privée

1994 X Postes

1994 X Bois

1996 X Électricité

1998 X Services aux personnes (coif-fure)

1999 X Tannerie- Cuir

1999 Culture

1999 Travail intérimaire

2001 Ameublement

2003 Construction navale

2004 Audiovisuel

2004 Chimie

2004 Collectivités locales

2006 Acier

2006 Hôpitaux

2007 Gaz

2007 Restauration collective

9 CP 14 GTI 11 nouveaux 35 secteurs

* Dans la troisième colonne, l’année d’institution du CDSS n’est mentionnée que pour les secteurs directement institués sous cette forme à partir de 1999. Pour les autres, la croix indique que les dix comités paritaires et les quatorze groupes de travail informels concernés se sont tous transformés en CDSS entre 1999 et 2001 (sauf les mines en 2002).

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us ?Qu’en dites-vous ?

A. Questions de débat autour du thème

Quel intérêt le dialogue social sectoriel peut-il avoir pour les fédérations sectorielles européennes (FSE) ?

L’intérêt stratégique pour les FSE de participer au dialogue est-il :•

J d’obtenir des budgets de la Commission ?

J de leur permettre d’entrer dans le processus politique de l’UE et d’y acquérir une légiti-mité ?

Les FSE sont-elles : •

J dépendantes de l’agenda de la Commission ?

J dévouées à servir à valider les politiques communautaires ?

Le dialogue social sectoriel est-il, selon vous, cantonné à son rôle consultatif ?

L’institutionnalisation apparaît comme le seul moyen de reconnaissance politique de la FSE dans •le cadre du dialogue social. Le lien représentatif à sa base syndicale, c’est-à-dire sa capacité potentielle de transformation sociale par la mobilisation est très faible.

Dans ce cadre, commenter la phrase suivante « la légitimité à représenter ne trouve pas sa source dans l’institution elle-même mais dans le lien représentatif que les organisations syndicales entretien-nent avec le groupe social ‘au nom duquel’ elles parlent et agissent ».(Jean-Marie Pernot, Syndicats : lendemains de crise ?, Gallimard, Paris, 2005)

B. Débat sur base des commentaires des tableaux suivants

DSS : Nombre de documents par type 1978-20041978-1997 (Blanc) 1998-2004 (Rouge)

0

2

9

1

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128

5

22

19

29

31

79

0 20 40 60 80 100 120 140 160 180 200 220

Accord

Règlement intérieur

Recommandation

Outil

Déclaration

Position commune

Source : Banque de données (OSE, 2004a)

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DSS : Nombre de documents par an (1978-2004)Total : 341 documents

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1978

1980

1982

1986

1990

1992

1994

1996

1998

2000

2002

2004

Source : Banque de données (OSE, 2004a)

DSS : Nombre de documents par secteur 1978-2004 (341 docs)1978-1997 (blanc, 156docs) 1998-2004 (rouge, 185 docs)

00000000

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7

0 5 10 15 20 25 30 35

AudiovisuelConstruction navale

AmeublementServices aux

CultureTravail intérimaire

BanquesChimie

AssurancesBois

MinesNavigation intérieure

Tannerie et cuirCollectivités locales

ChaussureTransports routiers

ConstructionElectricité

SucreTextile et habillement

NettoyageSécurité privée

Transports maritimesHoreca / Tourisme

CommercePêche maritimeAviation civile

PostesChemins de fer

AgricultureTélécommunications

Source : Banque de données (OSE, 2004a)

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e 6 - pou

r en savo

ir plusPour en savoir plus

Benedictus, H et al. (2002), « The European social dialogue: development, sectoral variation and prospect », report to the Ministry of Social Affairs and employment, AIAS, Université d’Amsterdam.

De Boer, R., Benedictus, H. et Van Der Meer, M. (2005), « Broadening without intensification: The Added Value of the European Social and Sectoral Dialogue », European Journal of Industrial Rela-tions, vol. 11, no 1, pp. 51-70.

CCE (1995), Dialogue social : le bilan communautaire en 1995, Direction générale de l’emploi, des relations industrielles et des affaires sociales, Luxembourg.

CCE (1998), Décision 98/500/CE de la Commission du 20 mai 1998 concernant l’institution de co-mités de dialogue sectoriel destinés à favoriser le dialogue entre les partenaires sociaux au niveau européen, JO L 225, 12 août 1998, pp.0027-0028.

Dufresne, A. (2006), « The Evolution of Sectoral Industrial relations Structures in Europe », in Dufresne A., Degryse C., Pochet, P. (eds.), The European Sectoral Social Dialogue – Actors, developments and challenges, PIE-Peter Lang, Bruxelles, 2006, pp. 49-84.

Dufresne, A. (2006), « Sectoral Employer Strategies in the EU. Lobbying by partners ?”, in Dufresne A., Degryse, C., Pochet, P. (eds.), The European Sectoral Social Dialogue – Actors, developments and challenges, PIE-Peter Lang, Bruxelles, 2006, pp. 249-280.

Dufresne, A. (2002), « La branche, niveau stratégique de la coordination des négociations collecti-ves ? », Chronique Internationale de l’IRES, n°74, janvier 2002, pp.59-70.

ISE (1993), Comités sectoriels européens et dialogue social : expériences au niveau sectoriel et dans les multinationales, Institut syndical européen, Bruxelles.

Keller, B. et Bansbach, M. (2000), « The Transport sector as an example of sectoral social dialogue in the EU – recent developments and prospects », Transfer, Vol.6, No.1, pp.115-124

Keller, B. et Sörries, B. (1999), « Sectoral social dialogues: new opportunities or more impasses ? » Industrial relations journal, Vol.30, n°4, pp.330-344 ; reprint in Towers, B. et Terry, M. (eds.), Industrial relations journal. European annual review 1998/1999, pp.83-101.

OSE (2004a), Le dialogue social sectoriel 1997-2004, Rapport pour la DG Emploi affaires sociales de la Commission européenne, Bruxelles, juin 2004, Contrat VC/2003/0400 - SI2.365647.

OSE (2004b), European sectoral social dialogue 1997-2004, European Trade Union Institute for Research, Education and Health and Safety, Observatoire Social Européen, Working paper, (avec Pochet, P., Degryse, C., Jadot, D.), ETUI-REHS, 112 pages.

Weber, T. (2001) « The European Sectoral Social Dialogue » in Compston, H. et Greenwood, J. (eds) Social partnership in the European Union, Houndsmills, Palgrave.

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e 7Fiche 7

Un maillon manquant au système européen de relations socio-professionnelles : une Cour européenne du Travail ?

A l’échelon national, en Europe occidentale, trois éléments institutionnels jouèrent un rôle fondamental dans la transformation des régimes politiques bourgeois vers des régimes de démocratie sociale : l’adoption par les parlements de lois sociales contraignantes qui venaient limiter le principe de liberté commerciale de l’employeur, la négociation d’accords collectifs entre interlocuteurs sociaux, et le développement de tribunaux spécialisés dans les questions du droit du travail.

Concernant le développement d’un ensemble fourni de lois sociales, il fut nécessaire que le pouvoir politique (exécutif et/ou législatif) s’investisse dans la constitution d’un ordre public social sur la base d’un imaginaire public où le bien-être social des populations et des travailleurs primait sur le principe de liberté de commerce vu comme un principe absolu.

Pour ce qui concerne le développement de relations contractuelles, il fut nécessaire aussi que l’Etat assumât l ‘organisation d’un équilibrage des forces entre intérêt privé et intérêt collectif des populations afin que la force collective des travailleurs puisse être légitimées dans des procédures officielles de négociation. Un processus de négociation collective n’est autonome, libre et équilibré que s’il est inscrit dans une pratique légalement encadrée qui impose au patronat de devoir négocier avec les représentants syndicaux.

Encore faut-il que l’ensemble des normes adoptées (lois et accords collectifs) soit respecté dans la pratique quotidienne des rapports de travail ; des cours de justice spécialisées dans le droit social ont été nécessaires que le droit social puisse primer sur le droit civil afin de limiter la liberté de com-merce de l’employeur au nom de principes considérés comme plus généraux et fondamentaux.

La présence de ces trois éléments institutionnels en proportion variable renvoie à la spécificité social-historique de chaque cadre national et permet de facto le cadre minimum nécessaire à l’existence d’un système de relations socio-professionnelles.

Nous avons vu dans les deux fiches précédentes que le pouvoir politique européen est défaillant tant dans sa capacité à produire des normes sociales (Livre blanc sur la politique sociale de 1994) que dans sa force politique à imposer au monde patronal d’assumer un rôle législatif important dans le domaine social à travers les procédures contractuelles.

En outre, il n’existe pas de cour de justice européenne spécialisée dans les questions de conflits entre normes sociales et normes commerciales.

L’effacement d’une culture politique d’ordre public social à l’échelon européen fait que d’une part, le corpus de normes sociales contraignantes (lois et accords collectifs) est très restreint (en nombre et en contenu) et d’autre part, que des limitations dénaturent la force politique des normes qui mal-gré tout sont produites (obligation de règles sociales dites minimales, obligation de règles sociales qui respectent le bon fonctionnement des PME et la compétitivité des entreprises, préférence au développement de pratiques alternatives à la loi avec les processus des méthodes ouvertes de coordination (MOC),…).

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e 7L’absence d’une Cour européenne du travail s’inscrit dans un contexte institutionnel où la cour de justice européenne actuelle dispose d’un très grand pouvoir dans l’interprétation des normes géné-rales de fonctionnement de l’Union européenne. L’analyse des récents arrêts dans le domaine de la sécurité sociale et des relations de travail (Viking, Laval et Rüffert, explicités dans la rubrique Et aujourd’hui ?) montre aisément que cette cour est constituée pour faire respecter en tant que principe premier la liberté commerciale de l’employeur, et que dès lors, le droit social n’a qu’une existence hétéronome et secondaire, il ne peut exister que, si et seulement si, il n’entre pas en contradiction directement avec des intérêts économiques.

L’importance, pour le monde du travail, de la mise en place d’un système juridique qui parvienne à introduire une logique concurrente à celle du droit commercial découle directement du fait que la Cour de Justice européenne a imposé, avec l’aval de la classe politique européenne, que le droit communautaire prime sur chaque droit national, y compris sur le contenu des Constitutions natio-nales.

Ceci fut acté par l’arrêt « Costa vs Enel » du 15 juillet 1964 et par l’arrêt « Internationale Handelsge-sellschaft » du 17 décembre 1970.

Or quand on compare l’activité normative de l’Union européenne entre ces différents types de droit, cela saute aux yeux que l’Union est avant tout un espace d’organisation contraignante du libre mar-ché basé sur quatre libertés commerciales (produits, services, capitaux, travailleurs) ; c’est le droit de la concurrence qui représente la colonne vertébrale du droit communautaire.

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i ?Et aujourd’hui ?

Le 13 décembre 2007, lors du sommet européen à Lisbonne, les chefs d’Etat et de gouvernement européens proposaient une nouvelle version de traité européen, le Traité de Lisbonne, suite à l’échec du projet de traité constitutionnel par le rejet de ce texte lors des referendums français et hollandais. Ils déclaraient en outre que si la Charte des droits fondamentaux n’était plus intégrée dans ce nouveau projet de traité, celle-ci aurait néanmoins la même force juridique que celle conférée aux traités ; ce qui devrait réaliser au sein de l’Union européenne un parfait équilibre entre Europe sociale et Union économique et monétaire.Il est cependant permis de douter de cet équilibre à la lumière des arrêts récents adoptés par la Cour de justice européenne car au même moment que le sommet de Lisbonne la Cour de Justice sortit coup sur coup deux arrêts qui délégitiment directement la force collective syndicale nationale, l’arrêt dit « Viking » du 11 décembre 2007 et l’arrêt dit « Laval » du 18 décembre 2007.Plus récemment encore, deux nouveaux arrêts prononcés en 2008 poursuivent la délégitimation de l’action syndicale nationale ainsi que de l’action des Etats lorsque ceux-ci adoptent un droit social dérivé considéré comme trop contraignant par la Cour en vertu de la primauté du principe de liberté d’établissement de l’employeur, l’arrêt dit Rüffert du 3 avril 2008 et l’arrêt dit « contre Luxembourg » du 19 juin 2008.

L’arrêt dit « Viking » du 11 décembre 2007 (International Transport Workers’ Federation et Finnish Seamen’s Union contre Viking Line ABPet OÜ Viking Line Eesti)

Résumé du conflitEn octobre 2003, la société finlandaise de ferries Viking Line, propriétaire d’un navire dont la liaison qu’il effectuait entre Helsinki et Tallinn était financièrement déficitaire, décida de l’immatriculer en Estonie. Ce changement de pavillon devait lui permettre d’employer du personnel estonien à un niveau de salaire inférieur à celui en vigueur en Finlande. ITF réussit à empêcher l’ensemble de ses syndicats affiliés à entrer en tractation avec cet employeur, dont les syndicats estoniens, ce qui bloqua cette stratégie patronale. Mais avec l’entrée de l’Estonie au sein de l’Union européenne en 2004, Viking Line décida de porter l’affaire devant la justice, trouvant que ce blocage syndical était contraire au principe de la liberté d’établissement au sein de l’espace économique européen. Par ailleurs, les syndicats du transport menaçaient de lancer des grèves en vue d’obtenir la conclusion d’une convention collective interdisant ce type de pratique de changement d’équipage.

Un premier élément à condamner dans cette nouvelle justice européenne est que Viking Line a eu le droit de porter l’affaire devant un tribunal britannique : en prenant le prétexte que le siège de l’ITF est à Londres, le choix d’un tribunal britannique permettait d’une part à Viking Line de « dépassionaliser » et d’atténuer le choc de son choix de dumping social à l’encontre de ses marins nationaux, et d’autre part, de choisir une culture politique et judiciaire plus en phase avec la liberté de commerce.

Le deuxième élément inacceptable est l’arrêt lui-même. La Cour en effet considère que les actions collectives syndicales menées (menaces de grève et revendication d’une convention collective) sont bien des restrictions au droit de liberté d’établissement de l’employeur.Que ces restrictions ne sont justifiables que si elles assurent la protection d’une raison impérieuse d’intérêt général, telle que la protection des travailleurs, à condition qu’il soit établi qu’elles sont aptes à garantir la réalisation de l’objectif légitime poursuivi et ne vont pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif.

Conséquences sur le droit syndicalIl faudrait donc que les syndicats prouvent qu’ils n’auraient pas pu obtenir la protection des em-plois autrement que par cette menace de grève. La menace, et même pas la grève elle-même !, est ainsi considérée comme un arme de tout dernier recours et il faudrait pouvoir prouver qu’elle seule peut obtenir de l’effet, avant de pouvoir l’activer !!!!

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i ?L’arrêt dit « Laval » du 18 décembre 2007

Résumé du conflitUne entreprise lettone, Laval un Partneri, avait détaché des dizaines de travailleurs lettons sur un chantier de construction d’une école en Suède. Les syndicats suédois avaient essayé de négocier une convention collective imposant à cette entreprise le respect des avantages salariaux et sociaux à l’identique des travailleurs suédois de la construction. Face au refus de l’entreprise, des actions syndicales avaient été prises à son encontre, notamment en bloquant l’accès au chantier.

L’arrêt de la Cour porte en fait sur son interprétation de la directive européenne existante sur le détachement de travailleurs d’Etats membres dans le cadre d’une libre prestation de services dans un autre Etat membre.

Conséquences sur le droit syndicalLa Cour considère qu’un syndicat ne peut pas essayer de faire appliquer par convention collective des conditions plus avantageuses (ou supplémentaires) à celles qui se trouvent dans la directive et dans la législation sociale générale de l’Etat. Un syndicat ne peut également recourir à une action collective pour faire respecter ce type de « normes locales ».

L’arrêt dit « Rüffert » du 3 avril 2008, (Dirk Rüffert vs Land Niedersachsen)

Résumé du conflit

La loi du Land allemand de Basse-Saxe sur la passation de marchés publics impose d’attribuer les travaux aux employeurs qui s’engagent à respecter les conventions collectives du secteur du bâtiment dans la fixation des salaires tant pour eux-mêmes que pour leurs sous-traitants. Or dans le cadre d’un chantier public, un sous-traitant polonais de la firme allemande Objekt und Bauregie qui avait remporté le contrat, payait les travailleurs polonais détachés sur ce chantier moins que la moitié du salaire minimal prévu dans la convention collective.

L’arrêt de la Cour conclut que faire primer cette convention collective serait contraire au droit européen. D’une part la directive communautaire sur le détachement des travailleurs prévoit qu’il faut respecter les dispositions générales minimales en matière salariale fixées par les Etats or cette convention collective n’a pas un statut de disposition générale (elle ne concerne que l’adjudication de marchés publics, elle n’a pas été adoptée à l’échelon fédéral, …) et d’autre part, cette convention collective contrarie le principe de libre prestation de services qui ne peut être contraint qu’en cas de protection des travailleurs, or rien ne prouve qu’une augmentation de salaire supérieure au minimum légal allemand aurait comme conséquence une telle protection.

Conséquences sur le droit du travail

De facto, les seules conventions collectives valables seraient celles qui s’alignent sur le minimum légal prévu dans une disposition plus générale (loi ou accord interprofessionnel) ; ce qui vient casser toute la dynamique de la négociation collective sectorielle des systèmes nationaux où les secteurs forts syndicalement ont traditionnellement un rôle d’entraînement de la négociation collective.

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i ?L’arrêt dit « contre le Luxembourg » du 19 juin 2008

Résumé du conflit

La Commission européenne avait entamé une action judiciaire contre le Luxembourg considérant que celle-ci n’avait pas respecté l’esprit du législateur européen dans sa transposition de la directive sur le détachement des travailleurs dans son droit interne par une loi de 2002, loi qui serait trop contraignante pour les entreprises détachées en situation de liberte de prestation de services.

L’arrêt de la Cour confirme la position de la Commission et condamne le Luxembourg car celui-ci dans sa loi de 2002 aurait trop étendu la notion d’ordre public, ce qui serait préjudiciable pour les entreprises.

Ainsi la Cour considère comme abusif le fait que le Luxembourg impose le fonctionnement du système d’indexation des salaires pour tous les salaires et non seulement pour ceux qui se situent au minimum légal,

Serait aussi abusif le fait que le Luxembourg n’admet que les travailleurs détachés qui sont liés à l’entreprise par un contrat de travail écrit ou un contrat analogue suivant la directive 91/533, ce qui imposerait des tracasseries injustifiées aux prestataires de service car ils ont déjà répondu à cette obligation dans leur propre cadre national.

Tout autant abusif d’imposer la législation luxembourgeoise dans le domaine du temps partiel et du travail à durée déterminée alors que ces matières ne sont pas couvertes par la directive sur le détachement.Elle réaffirme en outre que seules les conventions collectives générales peuvent être considérées comme relevant de l’ordre public d’un Etat.Les dispositions luxembourgeoises imposant une procédure de déclaration préalable de recours à un détachement ne seraient pas claires et seraient dès lors dissuasives pour les entreprises.Le Luxembourg est également condamné pour avoir imposé que les documents légaux concernant le détachement des travailleurs soit détenu par une personne résidant sur le sol luxembourgeois afin de rendre effectif le contrôle éventuel du service national d’inspection du travail.

Conséquences sur le droit du travail

Seules les dispositions européennes minimales doivent être considérées comme relevant de l’ordre juridique qui s’impose à tous.Un Etat ne peut améliorer le droit social européen si cette action vient contrarier les intérêts des entreprises dans le cadre de la liberté de prestation des services.

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Quelques arrêts de la Cour de Justice qui transforment en profondeur la primauté du droit national et du droit constitutionnel des Etats ainsi que le contenu du droit social

Nom de l’arrêt Date et N° de l’af-faire

Type de déstabilisation du droit démocratique

Arrêt Costa 15 juillet 1964

Affaire 6/64

Déclaration de la primauté du droit communautaire sur tout droit natio-nal

Arrêt Internationale

Handelsgesellschaft

17 décembre 1970

Affaire 11/70

Déclaration de la primauté du droit communautaire sur les Constitutions nationales

Arrêt Viking 11 décembre 2007

C-438/05

Déligitimation du droit de grève et de l’action collective si cela contrarie le principe de libre prestation de ser-vices.

Arrêt Laval 18 décembre 2007

Affaire C-341/05

Délégitimation des conventions col-lectives de secteur ainsi que d’actions collectives syndicales si elles contra-rient le principe de libre prestation de services.

Arrêt Rüffert 3 avril 2008

Affaire C-346/06

Délégitimation des conventions col-lectives de secteur si elles contrarient le principe de libre prestation de ser-vices.

Arrêt contre Luxembourg 19 juin 2009

Affaire C-319/06

Imposition de la norme sociale mi-nimale européenne comme la seule possible face au principe de libre prestation de service

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us ?Qu’en dites-vous ?

1. Dans un système politique qui instaure la primauté du droit européen sur chaque droit national, un système judiciaire qui est construit sur la primauté du principe de la liberté de commerce n’aboutit-il pas à vider de leur substance chaque corpus de droit social national (droit du travail, droit syndical,…) ?

2. Que deviennent dès lors les conventions internationales du travail de l’OIT ?

3. Le droit social peut-il être un droit complémentaire du droit commercial ?

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e 7 - pou

r en savo

ir plusPour en savoir plus.

Charvin, R., (2002), «Régulations juridique et mondialisation néo-libérale. Droit ’mou’, droit ‘flou’ et non-droit », Actualité et Droit international, January 2002.

Coron, G., «Europe » (2007), in Durand, P., Les nouveaux mots du pouvoir. Abécédaire critique, Ed. Aden, Bruxelles, pp. 198-202.

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http://www.rtf6.org/IMG/rtf/la_diffusion_de_nouvelles_grilles_de_lecture_des_syste_mes_de_retraite_a_travers_le_droit_communautaire.rtf

Coron, G., (2007), « Le prisme communautaire en matière de retraites : la diffusion à travers le droit européen de la théorie des piliers (Regards sur le droit) », in Retraite et Société, n° 50, Les retraites en Europe, janvier 2007, pp. 250-277.

Gobin, C., Coron, G., Dufresne, A., (2005), « Chapter 6. The European Union. Reorganising Resources: Employment, Pensions and the Wage » with Gaël Coron and Anne Dufresne in Wage and Welfare, B. Clasquin et al. (eds), Ed. Pie-Peter Lang, Bruxelles, pp. 161-191.

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Module IV ■ l’euro-syndIcalIsMe en MouVeMent

Sommaire du module

Fiche 8. Les mobilisations transfrontières : euro- ⒉manifestations, euro-grèves

Fiche 9. Les initiatives transnationales : groupe de Doorn, ⒉coopérations sectorielles

Eclairage sur le contenu du module ⒉

Si l’Euro-syndicalisme se caractérise, essentiellement, par son activité institutionnelle de repré-sentation auprès des Autorités de l’Union européenne (UE) (cf. module III), il n’en reste pas moins que plusieurs types de mobilisations transfrontières furent organisées au fil de son histoire. Ce module se compose de deux fiches qui recensent les divers types d’action collective qui se sont développés à l’échelon transnational.

La fiche 8 répertorie les diverses manifestations publiques de l’euro-syndicalisme : euro-mani-festations, euro-grèves et euro-pétitions en distinguant les différents niveaux auxquelles elles s’organisent : interprofessionnel, sectoriel, et dans les sites de firmes multinationales.

La fiche 9 s’attache, elle, à décrire un type particulier d’action syndicale spécifique à certains secteurs et régions, la coordination des négociations collectives sur le salaire. En effet, la force d’un syndicat provient aussi de sa capacité à élaborer collectivement et de façon autonome des stratégies qui permettent de redresser des législations ou des programmes patronaux qui vont à l’encontre des intérêts des salariés. Se rencontrer, échanger des informations et ainsi mieux connaître les diverses cultures syndicales en présence ainsi que les systèmes sociaux et politiques de chacun permet de réduire les tensions inévitables provoquées par la mise en concurrence des salariés. L’Euro-syndicalisme, par la coordination des négociations salariales nationales essaie ainsi de développer des méthodes pour apprendre à collaborer syndicalement par-delà les frontières, renforcer la cohérence entre les forces syndicales et tenter de limiter la mise en concurrence des travailleurs qui découle d’une économie de libre-échange.

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e 8Fiche 8

Les mobilisations transfrontières : Euro-manifestations, euro-grèves

La grève est l’action collective qui a le plus d’impact sur l’organisation des employeurs, que ceux-ci soient issus du secteur privé ou public (patron-Etat), en bloquant l’activité de production ou le fonctionnement de l’appareil d’Etat.

Les législations existantes oscillent entre une volonté de reconnaître les actions collectives syndicales dont la grève comme un droit fondamental (la convention internationale n°87 de l’OIT par exemple) et une volonté de les limiter de façon à ce qu’elles ne « dérangent » pas l’activité productive ou celle de l’Etat (lui enlevant du même coup tout impact réel). A l’échelon de l’Union européenne (UE), cette ambiguïté est particulièrement présente.

D’une part, des droits démocratiques essentiels, le droit à l’association et le droit à la grève, sont explicitement exclus de la compétence législative par le Traité formant l’UE. D’autre part, un article a été introduit dans la Charte européenne des droits fondamentaux mentionnant le droit à la né-gociation et à l’action syndicales dont la grève. Mais la formulation de ce droit illustre parfaitement l’ambiguïté du système politique européen :

Article 28. Droit de négociation et d’actions collectives

« Les travailleurs et les employeurs, ou leurs organisations respectives, ont, conformément au droit communautaire et aux législations et pratiques nationales, le droit de négocier et de conclure des conventions collectives aux niveaux appropriés et de recourir, en cas de conflits d’intérêts, à des actions collectives pour la défense de leurs intérêts, y compris la grève »

Cela signifie que le droit de grève et le droit à l’action collective (comme par exemple de négocier une convention collective) existent mais dépendent du contenu du droit communautaire et de cha-que droit national, et donc de l’arbitrage qu’en feront les juges lorsque ces droits entreront en conflit avec le droit communautaire et les droits nationaux : il n’y a donc pas un principe absolu, et unique, de droit social européen pour protéger la grève et l’action collective.

Or nous avons vu dans la fiche 7 à quel point la jurisprudence de la Cour de Justice européenne devient de plus en plus restrictive à l’égard de ces droits syndicaux fondamentaux, faisant de plus en plus passer le principe de liberté de prestation de services comme un droit absolu.

La non-reconnaissance de ces droits fondamentaux à un échelon transnational a une incidence directe sur la difficulté à construire une solidarité sans frontières entre les salariés et sur la faiblesse de la légitimité de l’appareil syndical transnational aux yeux de ses salariés. Tant qu’il n’y aura pas un droit européen qui reconnaîtra et protégera la capacité d’action syndicale transnationale, l’euro-syn-dicalisme ne pourra pas jouer un véritable rôle de défense des intérêts des travailleurs européens.

Comment exercer une pression forte sur le monde patronal européen, qui lui possède toute latitude pour délocaliser des filiales sur l’ensemble de l’espace économique européen, alors que la grève de solidarité est interdite par certaines législations nationales, notamment dans deux des pays les plus puissants de l’UE (Allemagne et Grande-Bretagne), et n’est pas protégée par le droit européen ? Sans un droit de protection de l’action syndicale commun à l’ensemble des pays membres, il est de plus en plus difficile pour l’euro-syndicalisme de pouvoir organiser de larges actions face à une variété de législations sociales nationales de plus en plus grande au fur et à mesure de l’élargissement de l’UE.

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e 8A) L’Euro-syndicalisme interprofessionnel en action

Quatre périodes de mobilisation européenne

Au vu de toute l’histoire de la CES, il y a eu des périodes plus agitées que d’autres quant à l’organi-sation de mobilisations syndicales. L’on peut ainsi repérer quatre pics importants dans l’organisation d’une mobilisation syndicale interprofessionnelle : les années 1978-1983 ; les années 1996-1997 ; les années 2000-2003 ; les années 2005-2006.

*1978-1983 La première période correspond au refus de la CES d’accepter le virage néo-libéral affiché dès 1975 par le patronat européen, sur lequel vont peu à peu s’aligner les autorités communautaires ainsi que les gouvernements nationaux (plan Barre en France de 1976, élections de Margaret Thatcher en Grande-Bretagne en 1979, gouvernements néo-libéraux dès 1981 en Belgique et aux Pays-bas,…). La première manifestation interprofessionnelle européenne eut ainsi lieu à Bruxelles le 14 novembre 1975. Ce refus et le fait d’un décalage complet entre les positions syndicales et les positions tant patronales que gouvernementales aboutirent à une période où la CES ne fut plus associée au plus haut niveau de la discussion avec les autorités communautaires entre 1979 et 1983. La CES, s’ap-puyant essentiellement sur les dirigeants syndicaux nationaux qui tentaient de faire entendre leur voix divergente auprès des responsables politiques nationaux, s’engagea dans la voie de nombreuses actions transfrontières mais ne parvint pas à renverser cette tendance lourde. Elle réintégra dès lors à nouveau la scène institutionnelle auprès des Autorités communautaires à partir de 1984 à travers le désormais célèbre dialogue social.

*1996-1997 La deuxième période correspond à la mobilisation sociale qui se créa autour de la révision du Traité de Maastricht afin d’opérer un « rééquilibrage » entre une UE essentiellement orientée sur la réali-sation d’une Union monétaire et du libre marché, et une Europe qui intègrerait de réelles politiques sociales. Un événement mit le feu aux poudres : la fermeture d’une filiale de l’entreprise Renault, celle de Vilvorde en Belgique, sans qu’aient été appliqués les dispositifs légaux dans le domaine du droit à l’information et à la consultation des travailleurs. « Vilvorde » devint ainsi le symbole à la fois d’un patronat prompt à délocaliser dans des filiales où les salaires et les conditions de travail sont plus bas afin non de sauver une entreprise menacée mais d’accroître les bénéfices engendrés, et d’une mobilisation syndicale européenne qui fut fortement médiatisée.

*2000-2003 La troisième période correspond à la fois à la flambée internationale de la contestation dite altermon-dialiste depuis la manifestation de Seattle (à l’occasion de la Conférence de l’OMC du 30 novembre au 3 décembre 1999) et à la relance de l’actualité communautaire à travers la mise en place, lors du sommet européen de Laeken (14-15 décembre 2001) d’une « convention » présidée par V. Gis-card d’Estaing et chargée de rédiger un texte global de réforme de l’UE (qui deviendra le projet de traité constitutionnel). Huit euro-manifestations seront alors organisées de façon quasi-rituelle lors de chaque sommet de l’UE important entre 2000 et 2003 (dont trois euro-manifestations pour le seul second semestre de 2001 lors de la présidence belge du Conseil et une euro-manifestation, le 4 mars 2002 à Barcelone, lors du sommet européen de Barcelone, qui parviendra à réunir jusqu’à 300.000 personnes).

*2005-2006La quatrième période correspond à une mobilisation syndicale ambiguë autour du rejet de la directive dite Bolkenstein (libéralisation des activités de service). La CES s’était engagée de façon claire dans son soutien au projet de traité constitutionnel (qui sera avalisé par les chefs d’Etat et de gouverne-ment au Conseil européen de juin 2004) en s’appuyant notamment sur le fait que la Charte des droits fondamentaux adoptée par le Conseil européen de Nice de décembre 2000 était devenue une partie intégrante de ce projet de traité. Elle affirmait que jamais un projet de Traité n’avait été aussi « social ». Or un élément important freinait cette affirmation, le fait que la Commission européenne avait adopté une proposition de directive le 13 janvier 2004, prévoyant une large libéralisation des services dans le Marché intérieur. La CES s’attacha ainsi à contrer l’argument des opposants au projet

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e 8de traité constitutionnel qui considéraient que l’Europe allait « constitutionnaliser » le néo-libéralisme en démontrant qu’il restait possible de contrer une directive libérale sans qu’il ne soit nécessaire de remettre en cause l’ensemble du système politique européen dont le projet de traité. Elle mobilisa ainsi contre « Bolkenstein » mais pour le projet de traité constitutionnel, ce qui n’empêcha pas de nombreux militants syndicaux de venir manifester à la fois contre « Bolkenstein » et contre le projet de Traité.

Recensement des différents types d’action

Les euro-manifestations de la CES•La première manifestation interprofessionnelle européenne eut lieu à Bruxelles le 14 novembre 1975. Le thème en était « Emploi assuré-revenu garanti ». Elle eut lieu avant la tenue d’une conférence tripartite à laquelle étaient associés les dirigeants de la CES, le monde patronal, la Commission européenne et les ministres des affaires sociales, économiques et financières. Cette euro-mani-festation inaugure un style d’action au sein de la CES qui va peu à peu devenir quasi rituel : faire masse dans la ville et au moment où se tient une importante réunion européenne, généralement un sommet du Conseil européen.

La CES réitérera ce type d’action à Venise le 12 juin 1980 lors du Conseil européen des 12-13 juin 1980 (5.000 manifestants). À partir de 1980, les euro-manifestations au moment des Sommets euro-péens deviendront un outil de démonstration de l’existence de l’euro-syndicalisme régulier, même s’il fut délaissé à certains moments particuliers (par exemple entre 1984 et 1988 car la CES était alors concentrée sur la reprise d’un contact institutionnel avec les Autorités à travers la mise en œuvre du dialogue social). Les moments de renégociation des Traités favorisèrent à nouveau ce rituel : en 1996-1997 ; et de façon très régulière depuis 2000.

Une variante à ce rituel est d’organiser un Sommet syndical européen parallèle au moment où se tient le Conseil européen, dans la même ville ou dans une autre ville. La première action de ce type eut lieu à Stuttgart le 4 juin 1983 et réunit 80.000 personnes.

Etant donné la difficulté d’activer le droit de grève à l’échelon européen, ces euro-manifestations qui ont lieu durant la semaine réunissent des permanents syndicaux envoyés par les différents syndicats des pays membres de l’UE. Leur nombre est variable en fonction de l’enjeu du moment, les délé-gations des pays proches du lieu de l’euro-manifestation étant bien entendu mieux représentées. C’est le cas quand l’actualité sociale est tendue et que la manifestation a lieu au cœur géographique de l’UE (Bénélux, Allemagne, France). Il faut aussi savoir que depuis le début des années 2000, les mouvements altermondialistes ont assimilé l’UE comme un acteur-clé du développement du libre-échange à l’échelon européen et mondial et viennent manifester lors des principaux Conseils européens, s’ajoutant au cortège syndical.

Depuis l’institution en 2003 d’un sommet social tripartite la veille du Conseil européen de printemps, les euro-manifestations de ce type s’organisent à ce moment.

Mais bien que rare, il existe un autre type d’euro-manifestation, celle déclenchée par une actualité sociale qui n’est pas liée aux rythmes institutionnels définis par l’UE ou liée à une décision de l’UE. Ce fut le cas de l’euro-manifestation du 16 mars 1997 qui eut lieu à Bruxelles pour protester contre l’attitude brutale du patron de Renault lors de la décision de la fermeture du site de Vilvorde. Comme cette euro-manifestation eut lieu un dimanche, de nombreuses personnes, en plus des cadres syn-dicaux, y participèrent pour former un cortège d’environ 75.000 personnes.

Les journées européennes d’action syndicale de la CES•Ces journées d’action communes peuvent prendre plusieurs formes (manifestations, conférences de presse, rencontres officielles avec les gouvernements, voire certaines actions de grève natio-nale,…). Le principe central est d’organiser des événements syndicaux la même journée dans les pays membres de l’UE.

La première expression de ce type d’action eut lieu le 5 avril 1978. Il s’agissait pour la CES de dé-montrer aux Autorités communautaires la cohésion syndicale existante pour appuyer le programme de relance économique adopté par l’euro-syndicalisme au Congrès de Londres en 1976.

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e 8Depuis lors, à l’issue des Congrès de la CES, est décidée le plus souvent, la mise en place d’une ou de plusieurs campagnes syndicales communes entre deux Congrès. Ainsi dans le prolongement du Congrès de Prague (2004) et en pleine négociation des Autorités pour aboutir à un projet de traité constitutionnel, la CES organisa deux journées d’action syndicales sur le thème « Europe-that’s us ». Lors du dernier Congrès de la CES qui s’est réuni à Séville en mai 2007, a été lancée une campagne syndicale commune sur le thème « A l’offensive pour des salaires équitables ».

Les euro-pétitions •Ce mode d’action est beaucoup plus récent et nettement moins fréquent. La FERPA qui s’occupe du droit des retraités et des personnes âgées, a recouru à l’euro-pétition, en déposant le 10 octobre 2005 une euro-pétition de 350.000 signatures au Président de la Commission « Pétitions » du Parle-ment européen, afin de demander que l’UE reconnaisse le droit à une représentation syndicale des personnes âgées afin d’établir une concertation pour les lois européennes futures.

Pour sa part, la CES a lancé une euro-pétition en novembre 2006 pour soutenir les services publics avec comme objectif d’obtenir un moratoire sur la privatisation de ceux-ci et une législation euro-péenne (une directive-cadre) qui les protège et permette de garantir des services publics de qualité et accessible à tous. Elle a recueilli un demi-million de signatures.

B) L’Euro-syndicalisme sectoriel en action

La mine

Les forces syndicales sectorielles qui furent les premières à être organisées à l’échelon européen furent celles des secteurs de l’acier et des mines étant donné la mise en place d’une Autorité poli-tique européenne dans ces secteurs, la CECA.

Les mineurs se mobilisèrent précocement à l’échelon européen autour de la revendication d’un statut européen commun du mineur (qu’ils n’obtinrent jamais).

Les euro-manifestations•Citons notamment l’euro-manifestation du 6 juillet 1963 à Dortmund en République fédérale d’Alle-magne.

Les transports

Ce secteur, dans ses diverses composantes, a été et continue à être syndicalement très actif dans sa dimension de mobilisation européenne, étant donné que le transport fut considéré comme une politique européenne commune dès le traité de Rome de 1957. Dans le cadre de l’organisation d’un marché commun puis d’un grand marché intérieur, le transport est en effet un instrument stratégique dans la politique de libre-échange commercial.

Le rail

Les euro-manifestations•La première euro-manifestation des cheminots eut lieu à Bruxelles en 1978 et réunit 10.000 person-nes.

En 1985, les cheminots firent rouler un train d’information à travers l’Europe au départ de Vienne. Ils l’accueillirent à Bruxelles où une nouvelle euro-manifestation de circonstance fut organisée avec l’objectif de souligner l’absence d’une politique européenne en faveur du rail.

Le 19 novembre 1996, une nouvelle euro-manifestation fut menée par plus de 10.000 cheminots pour dénoncer le Livre blanc du Commissaire N. Kinnock accentuant la déréglementation du secteur et son ouverture à la concurrence.

Le 18 juin 1998, 2.000 manifestants syndicaux venus de 10 pays européens manifestent dans le quartier européen de Luxembourg à l’occasion du conseil des ministres des transports.

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e 8Les euro-grèves •

Les cheminots firent leur première euro-grève le 27 octobre 1992 et se retrouvèrent pour une euro-manifestation à Bruxelles pour protester contre les premières mesures européennes de libéralisation du rail.

Une nouvelle euro-grève fut organisée le 23 novembre 1998 face à des nouvelles mesures de libé-ralisation du rail mais ne fut bien suivie que par 3 pays sur 15 (Belgique, France et Grèce pour des arrêts de travail significatif ; dans 3 autres pays, elle fut soutenue plus symboliquement : Luxembourg, Espagne, Portugal) car les syndicats des pays nordiques, les Pays-Bas et l’Allemagne avaient déjà accepté et négocié les principaux éléments de la réforme européenne. Il faut ajouter cependant que les cheminots allemands, autrichiens et anglais, interdits de grève, ont distribué une information aux usagers et qu’il y eut des manifestations en Allemagne, en Autriche, au Royaume-Uni, au Danemark, en Suède et en Finlande.

Les journées d’actions européennes•Le 6 mars 2008 plusieurs actions transfrontières furent organisées par les cheminots sur les thèmes « Safety first », « Luttons pour l’avenir du rail » contre la poursuite de la libéralisation du rail. Notam-ment, il y eut un rassemblement à Hendaye (France, frontière espagnole) prévu à l’arrivée du train parti la veille de Lisbonne avec des délégations syndicales cheminotes portugaises, espagnoles et françaises ; un rassemblement à Calais où se réuniront des délégations anglaises, belges et françaises ; un rassemblement à Luxembourg où se réuniront des délégations luxembourgeoises, belges, allemandes et françaises ; une rencontre débat / formation à Modane (France) sur les thè-mes des trafics transfrontaliers, de l’interopérabilité et des conditions de travail des personnels du secteur ferroviaire.

L’aviation civile

Journées d’action syndicale européennes•Le 7 mars 1994 fut organisée dans le secteur une journée de protestation contre la déréglementation européenne. Il y eut des arrêts de travail en Grèce, au Portugal et en Italie.

Le 19 juin 2002, ce furent tant les aiguilleurs du ciel que l’ensemble du personnel du secteur qui firent grève pour protester contre le projet de libéralisation de l’aviation civile « ciel unique européen ».

Le transport routier

Journées d’action syndicale européennes•Le 9 juin 1997, les travailleurs du secteur organisèrent une journée d’action européenne contre un règlement communautaire de 1985 fixant le temps de travail hebdomadaire à 56 heures. Action de blo-cage aux frontières par des délégations française, espagnole, allemande, italienne et portugaise.

Le 8 septembre 1998, les routiers français, belges, allemands, espagnols, portugais et autrichiens menèrent des actions pour la limitation du temps de travail des conducteurs.

Les ports

Euro-grève•La première eurogrève eut lieu le 6 novembre 2001, la seconde le 19 décembre 2002. Le 17 janvier 2003, plus de 20.000 dockers ont cessé totalement ou partiellement le travail dans les ports de Bel-gique, de Finlande, du Danemark, de Hollande, de France, d’Espagne et du Portugal et même dans ceux de Chypre et de Malte, nouveaux pays membres. Le 10 mars 2003, quelques 6.000 dockers ont manifesté devant le Parlement européen à Strasbourg. Ces euro-grèves permirent le rejet de la directive de libéralisation des services portuaires par le parlement européen le 20 novembre 2003.

Le 16 janvier 2006, les dockers firent grève et se donnèrent rendez-vous à Strasbourg pour une manifestation musclée devant le parlement européen afin de protester contre la deuxième mouture de la directive européenne de libéralisation des services portuaires. S’y retrouvèrent près de 10.000 dockers avec des délégations française, belge, espagnole, allemande, polonaise et britannique. Cette démonstration de force divisera le parlement européen qui repoussera une deuxième fois lors

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e 8du vote le texte de la proposition de directive. Ce fut une grande victoire pour les dockers. La grève avait été quasi-totale dans presque tous les ports européens et anecdote, sur l’île de la Réunion, dans l’Océan indien, six cents dockers débrayèrent en solidarité avec leurs collègues européens.

Le textile

Les euro-grèves•Ceci est recensé comme la première euro-grève liée au développement de l’intégration européenne. Le 2 décembre 1980, près de 65% des 3 millions de travailleurs du textile de la CEE ont observé un arrêt de travail d’une heure. Motif : dénonciation du déclin de l’emploi dans le secteur et pression sur la Communauté européenne dans le cadre de la négociation pour renouveler l’accord multifibres négocié entre la CE et le GATT (négociation à Genève le 9 décembre 1980). Les précédents accords (73 et 77) avaient forcé à une libéralisation du commerce et permis d’importantes importations du textile des pays du Tiers monde vers l’Europe, ce qui avait provoqué la fermeture de plus de 4.000 entreprises en Europe (perte de 700.000 postes de travail).

La poste

Envoi de cartes postales aux Autorités communautaires, euro-manifestation •et journée européenne d’action syndicale

Face à la proposition d’une directive postale par la Commission européenne en octobre 2006 orga-nisant la libéralisation complète de la poste pour 2009, le syndicat européen de la Poste UNI Poste organisa une large campagne européenne pour la défense de la Poste.

Ceci s’est traduit pas une campagne d’envoi de carte postale au commissaire européen du Marché Intérieur, Charlie Mc Creevy, durant le printemps 2007, par une manifestation européenne à Berlin le 30 mai 2007 pour exiger le retrait de cette proposition européenne et enfin par l’organisation d’une journée européenne d’action, le 6 juin 2007, appelant à la grève le personnel des postes.

Notons que les secteurs à l’échelon européen dépassent régulièrement le seul cadre d’action des journées européennes d’information ou de manifestation pour pratiquer des arrêts de travail européen, les fameuses euro-grèves. Nous voyons que les secteurs qui se sont le plus mobilisés sont d’une manière ou d’une autre fortement touchés par la mise en pratique de la notion de libre circulation des services, que ce soient les services de transports de personnes ou de transports d’objets comme le transport routier ou la poste. Ces événements se sont déroulés pour l’essentiel depuis les années 1990.

Les plus opiniâtres furent sans conteste les cheminots ; les dockers quant à eux sont ceux qui ont réellement obtenu un arrêt de la libéralisation des ports. Leur rapport de force est en effet détermi-nant, les ports étant un point névralgique de la circulation commerciale européenne.

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e 8C ) L’euro-syndicalisme en action au sein des groupes multinationaux

Des initiatives transfrontières s’organisent aussi entre les travailleurs des sites d’une même multina-tionale. Si celles-ci sont le plus souvent soutenues par les fédérations sectorielles européennes, elles ne concernent qu’une entreprise et non tout un secteur. Citons-en quelques-unes pour mémoire.

Dans ces cas, euro-grèves et euro-manifestations vont de pair, les salariés interrompant le travail pour pouvoir manifester. Ces événements ont lieu depuis la moitié des années 1990.

ChimieLa première action transnationale de site répertoriée dans l’histoire de l’après-seconde guerre mondiale fut orchestrée en 1969 par la Fédération internationale des syndicats de travailleurs de la Chimie, dirigée alors par le célèbre syndicaliste Charles Levinson, qui organisa une action de grève simultanée contre la multinationale de Saint-Gobain (France) avec ses syndicats affiliés français, allemand, italiens et d’Amérique du Nord.

Télécommunication : AlcatelLe 22 mai 1996, plus d’un millier de salariés des différents sites européens d’Alcatel (France, Belgi-que, Espagne, Allemagne, Italie) manifestèrent à Paris contre le projet de 14.000 licenciements (les organisations syndicales ayant appelé à manifester : IG-Metall (Allemagne), FIOM-CGIL, FIM-CISL, UILM (Italie), CSC et FGTB (Belgique), CCOO, UGT (Espagne), CGT, CFDT (France).

Le 15 mars 2007, les salariés d’Alcatel organisèrent une journée d’action européenne contre l’an-nonce de suppression d’emplois dans le groupe suite à la fusion avec Lucent ainsi qu’une euro-manifestation à Paris.

Automobile : RenaultSuite à la décision prise par Renault de fermer son site belge de Vilvorde, les syndicats belges, français et espagnols décidèrent de recourir à l’euro-grève par un arrêt de travail d’une heure, le 7 mars 1997, dans tous les sites européens du groupe. Les Slovènes ne purent le faire car la loi interdit les grèves de solidarité. En Belgique, ce sont l’ensemble des salariés de l’automobile qui croisèrent les bras (30.000 personnes).

Le 11 mars 1997, 7.000 salariés dont 5.000 de Vilvorde manifestent devant le siège social de Renault à Billancourt (France). Le 19 mars, suite à l’échec de l’entretien avec le patron de Renault, six cents ouvriers de Vilvorde occupèrent le site français de Wavrin 5Lille) tandis que des actions syndicales furent menées sur les Champs-Elysées. Enfin, le 4 avril 1997, une journée d’action syndicale fut menée autour du débrayage pour quelques heures du travail dans les sites européens de Renault et autour d’une manifestation des salariés à Bruxelles organisée par les syndicats belges, français et espagnols du secteur.

Textile : Levi’sLe 5 octobre 1998, 1.000 salariés français et belges (accompagnés d’anciens salariés de Vivorde-Renault) manifestèrent à Bruxelles contre la fermeture de deux usines belges et d’une usine française au moment de la tenue du Comité européen d’entreprise de la multinationale américaine.

Distribution : Marks & SpencerLe 17 mai 2001, près de 4.000 manifestants vinrent des différents établissements européens de la firme pour une euro-manifestation à Londres afin de protester contre la décision brutale et sans concertation de Marks & Spencer de fermer en quelques mois toutes ses filiales étrangères.

Aéronautique : AirbusLe 16 mars 2007, les salariés d’Airbus se sont mobilisés lors d’une journée européenne d’actions décentralisées impliquant tous les sites de l’avionneur en Europe, contre le plan Power 8 de res-tructuration qui prévoit 10.000 suppressions d’emplois. Des manifestations furent organisées en Allemagne, Espagne, Grande-Bretagne et France contre le plan d’Airbus avec un débrayage de deux heures dans chacun des sites.

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i ?Et aujourd’hui ?

La difficile solidarité européenne entre sites d’un même groupe ?

Il n’est pas facile d’organiser une solidarité inter-sites au sein d’un même groupe multinational étant donné que l’employeur s’arrange pour alimenter la concurrence entre les sites. Par exemple quand un site ferme, la promesse est faite à d’autres sites d’y transférer la production. Ceci permet de réduire l’emploi là où le syndicalisme est le plus actif ou les salariés les mieux payés, les salariés des autres sites ayant alors la conviction que leur propre site en ressortira renforcé sur le plan de l’emploi et de sa stabilité.

Par ailleurs, l’entretien d’une conscience de solidarité européenne n’est pas organisée de la même façon suivant les cultures syndicales nationales. Ainsi, le syndicalisme allemand qui détient une place particulière au sein de l’euro-syndicalisme à cause à la fois de sa force numérique (le nombre d’affiliés le plus élevé au sein de l’UE avec la Grande-Bretagne) et du poids politique et économique de l’Allemagne a souvent tendance à voir l’intégration européenne comme une voie pour consolider avant tout la force économique du pays.

Ce qui crée régulièrement des tensions entre syndicats nationaux et rend la tâche difficile à la Fé-dération syndicale européenne (FSE). Ainsi, récemment lors de la décision d’organiser une action syndicale européenne commune chez Airbus, la FSE du Métal (FEM) n’a pas réussi à imposer l’idée d’une euro-manifestation commune à Bruxelles le 16 mars 2007 avec des arrêts de travail dans tout le groupe EADS et chez les sous-traitants. En effet, la plaie syndicale saigne encore du fait que la délocalisation de VW du site de Forest (Bruxelles-Belgique) s’est fait avec l’appui de l’IG-Metall allemand pour préserver les emplois à Wolfsburg, berceau du constructeur automobile allemand. Lors de la manifestation internationale de soutien des travailleurs de Forest, le 2 décembre 2006, l’IG Metall brillait par son absence. Quelques mois après, la mémoire de l’événement était encore assez vive pour empêcher certains autres syndicats européens du secteur de manifester solidairement avec l’IG-Metall en un même lieu.

Avez-vous connu de telles tensions de concurrence au sein de votre groupe ? Comment ont-elles été résolues et par qui ?

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illeDétails de taille

A) La mobilisation euro-syndicale interprofessionnelle : quelques dates et actions importantes

Dates Euro-manifestations

14/11/75 1ère euro-manifestation de la CES à Bruxelles sur le thème « Emploi assuré-Revenu ga-ranti ».

12/06/80 1ère euro-manifestation de la CES à l’occasion d’un Conseil européen à Venise : pratique qui deviendra vite quasi-rituelle.

04/06/83 1er Sommet syndical européen de la CES à Stuttgart en tant que « contre-sommet » euro-péen : première rencontre européenne interprofessionnelle qui réunit autant de monde (80.000 personnes).

18/10/89 Euro-manifestation de la CES pour réclamer une « Europe sociale » face au développement d’une législation économique pour mettre en œuvre le marché intérieur (17.000 pesonnes)

02/04/93 Euro-manifestation de la CES à Bruxelles dans le cadre d’une journée d’action syndicale européenne contre le chômage (Thème : Remettre l’Europe au travail). Au même moment, nombreuses manifestations nationales (Lisbonne, Athènes,…) ou transnationales (franco-allemande à Strasbourg : 25.000 personnes ou belgo-hollandaise et allemande à Maastricht : 15.000 personnes) et des mouvements de grève dans certains pays (grève générale de 4 heures en Italie avec 13 millions de grévistes ; en Grande-Bretagne des dizaines de milliers de mineurs, de cheminots,de travailleurs des métro-bus font grève contre la menace de suppression de postes,…).

16 /03/97 Euro-manifestation de la CES à Bruxelles contre la fermeture de Renault-Vilvorde et pour la sauvegarde de l’emploi réunissant 75.000 personnes (délégations belge, luxembour-geoise, française, espagnole, slovène, allemande, italienne, autrichienne, hollandaise, portugaise).

28/05/97 Euro-manifestation de la CES à Bruxelles dans le cadre d’une journée d’action européenne sur le thème « Pour une Europe de l’emploi ». 12.000 militants syndicaux font une chaîne autour des bâtiments de l’UE.

20/11/97 Euro-manifestation de la CES à Luxembourg dans le cadre d’un Sommet européen spécial de l’UE sur la politique d’emploi, avec forte participation des Marches européennes contre le chômage et de multiples militants de gauche (30.000 personnes).

06/12/2000 Euro-manifestation de la CES lors du Sommet européen de Nice, dans le cadre de la révision du Traité et de l’enjeu de l’adoption de la Charte des droits fondamentaux. Forte mobilisa-tion de la CGT pour sa première action au sein de la CES avec aussi une mobilisation des altermondialistes (70.000 manifestants).

14/03/02 Euro-manifestation de la CES la veille du Sommet européen de Barcelone avec la présence de nombreux syndicalistes et altermondalistes (300.000 personnes).

19/03/05 Euro-manifestation de la CES à Bruxelles contre la directive « Bolkenstein » (75.000 person-nes) avec des affiliés de la CES non membres de l’UE (Roumains, Croates, suisses,…).

14/02/06 Euro-manifestation de la CES à Strasbourg contre la directive « Bolkenstein » le jour du vote de cette directive par le Parlement européen (40.000 personnes).

05/06/08 Euro-manifestation de la CES à Ljubljana (Slovénie) sur le thème Plus de salaire, plus de pouvoir d’achat, plus d’égalité dans le cadre de la campagne syndicale issue du Congrès de Séville (lutte pour de meilleurs salaires et contre la précarité), réunissant 40.000 person-nes.

05/07/08 Euro-manifestation à Luxembourg de délégations syndicales belge, luxembourgeoise, alle-mande, française et suisse (avec une représentation de la CES) contre l’évolution négative de l’Europe en matière sociale face à l’arrêt de la Cour de Justice des Communautés euro-péennes du 19 juin 2008 attaquant la manière dont le Luxembourg a transposé la directive sur le détachement des travailleurs.

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us ?Qu’en dites-vous ?

1. Avez-vous déjà participé à une euro-grève ou une euro-manifestation ? Qu’en avez-vous pen-sé ?

2. La présence de la CES ou de votre FSE à ces événements était-elle facilement identifiable, visi-ble ?

3. Ne faudrait-il pas organiser systématiquement les euro-manifestations le week-end pour favoriser la participation de tous les salariés et non principalement des permanents syndicaux ?

4. Les cotisations syndicales des actifs ne devraient-elles pas réserver une partie spéciale au « fi-nancement des actions européennes » ?

5. Les restrictions législatives actuelles sur le droit de grève, tant à l’échelon européen que dans de nombreux Etats, ne sont-elles pas des freins essentiels dans la constitution d’une mobilisation syndicale transfrontières ? Ne représentent-elles pas aussi une menace dans la poursuite des restrictions légales de plus en plus poussées du droit de grève ?

6. Lorsque les sites d’une même firme sont touchés par des stratégies patronales de fermeture et/ou de délocalisation, très souvent effectuées de façon à privilégier un site au détriment d’autres, ne pensez-vous pas qu’il faudrait que les FSE organisent à chaque fois une euro-grève de secteur et non une simple euro-grève au sein du groupe ?

Discutez de l’exemple de la « contagion » en Europe de la notion de « service minimum obligatoire » à assurer dans les transports en commun et dans tous les services publics en général.

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r en savo

ir plusPour en savoir plus

Balme, R., Chabanet, D., Wright, V., (dir). (2002), L’action collective en Europe. Paris, Presses de la Fondation nationale des Sciences Politiques.

Decoene, A., (2007), La libéralisation des services portuaires et la grève des dockers, Courrier heb-domadaire du CRISP n° 1966-1967, Bruxelles.

Decoene, A., Hilal, N., Gobin, C., (2007), « Mobilisations transfrontières et Union européenne : difficul-tés et réalités de la contestation syndicale. L’exemple du syndicalisme du transport. », in Lien social et Politiques, n°58, dossier « Les solidarités sans frontières : entre permanence et changements », Montréal, pp.73-84.

Decoene, A., Dufresne, A., Faniel, J., Gobin, C., (2008), « Le droit de grève au 21ème siècle : d’un droit consacré à un droit décrié ? », in R. Cussó, A. Dufresne, C. Gobin, G. Matagne, J.-L. Siroux (éditeurs), Le conflit social éludé, pp. 189-222, Ed. Academia Bruylant, coll. Science politique n°8, Bruxelles.

Gobin, C., (2002), « De l’Union européenne à ...l’européanisation des mouvements sociaux », in Re-vue Internationale de Politique Comparée, vol. 9, n°1, Ed. De Boeck Université, Bruxelles, Printemps 2002, pp. 119-138.

Hilal, N., (2007), L’eurosyndicalisme par l’action. Cheminots et routiers en Europe, Ed. L’Harmattan, Paris.

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e 9Fiche 9

Les initiatives transnationales (groupe de Doorn, coopérations sectorielles)

Ces initiatives particulières correspondent à l’introduction de la « dimension européenne» dans le travail syndical national quotidien, en passant par le biais du niveau intermédiaire, le transfrontalier. En effet, ce niveau particulier déterminant des régions transfrontalières à niveau économique et social relativement homogène permet, dans un premier temps, une meilleure compréhension entre les représentants syndicaux (au niveau linguistique, en particulier). La coopération possible reste toutefois relative du fait des divergences dans leur fonctionnement syndical respectif.

La coordination salariale transfrontalière a le plus souvent été lancée ou consolidée par les syndicats allemands, plus particulièrement par l’IG Metall, dont le réseau interrégional est le plus poussé. Les deux processus abordés ici, le Groupe de Doorn et les coopérations sectorielles (initiés dès 1997 dans l’un et l’autre cas) ont vu la région Allemagne / Belgique / Pays-Bas progresser plus rapidement que les autres régions d’Europe.

Le groupe de Doorn : une initiative régionale

Nous commençons donc par la coopération transfrontalière en matière de politique contractuelle appelée « initiative régionale de Doorn ». Pionnière en la matière, elle a joué un rôle d’aiguillon en alimentant les discussions au sein des syndicats au plan européen.

Depuis la « loi sur la compétitivité» adoptée par le gouvernement belge en 1996, la Confédération des Syndicats Chrétiens (CSC) et la Fédération Générale du Travail de Belgique (FGTB), les deux principaux syndicats belges, ont été confrontées à la comparaison systématique de leurs performan-ces salariales avec leurs trois principaux partenaires commerciaux (Allemagne, France, Pays-Bas). C’est pourquoi, en juin 1997, les deux syndicats belges prirent l’initiative de réunir les confédérations allemandes, belges, et néerlandaises et leurs principaux syndicats de branche pour la première fois à La Roche (Belgique). Ils aboutirent à un accord sur la mise en place de rencontres annuelles et d’un groupe de contact. En 1998, les mêmes participants, rejoints entre-temps par les syndicats luxembourgeois se sont réunis pour une seconde rencontre à Doorn (Pays-Bas). Cette réunion a été très médiatisée et l’expérience labellisée « groupe de Doorn ».

Ce qui avait commencé par un premier échange de vues entre différents responsables syndicaux dans les Ardennes belges s’est ensuite transformé en un groupe d’experts entretenant des échan-ges d’informations et des prises de décision régulières, grâce à la déclaration de Doorn adoptée le 5 septembre 1998. Ils ont ensuite été rejoints par la France. Pour la première fois, les confédé-rations de différents pays de l’UE ont déterminé des orientations communes en matière salariale. Leur analyse part du constat que « l’augmentation de la productivité a bénéficié unilatéralement au capital alors que la part des salaires dans le revenu national a diminué » (Initiative de Doorn, 1998). Pour contrecarrer cette dérive fondamentale vers un régime compétitif entre systèmes nationaux de négociations collectives en Europe, ils veulent donc «oeuvrer en faveur d’un changement favorable aux travailleurs» en « soutenant les revendications, également, par-delà les frontières».

Plus récemment, en 2003, les participants ont convenu qu’ils ne se réuniraient désormais plus qu’une fois tous les deux ans, au niveau des directions des organisations. Cette réduction du nombre de réunions « politiques » révèle des tensions entre les syndicats participants sur le bien fondé de cette initiative. Aujourd’hui, le groupe de Doorn a perdu sa dynamique initiale. Cet « échec » s’explique essentiellement par la dérive salariale allemande depuis 2000. Le groupe de Doorn avait en effet pour objectif d’éviter le dumping salarial entre quatre pays proches et en interdépendance commerciale. Or, lorsque le plus important des quatre [l’Allemagne] ne suit plus jamais la règle, il est logique de

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e 9s’interroger sur le sens de la coordination. D’une part, il semble vain aux partenaires de se réunir dans ces conditions, et d’autre part, pour les Allemands, il était de plus en plus difficile d’expliquer cette situation.

Les deux dernières réunions ont eu lieu à Berlin puis à Bruxelles en novembre 2004 et 2006. En 2004 a été adoptée une déclaration commune. Celle-ci s’opposait à un allongement des heures de travail et soutenait la critique de la CES vis-à-vis de la proposition de la Commission en ce qui concerne les modifications apportées à la directive sur le temps de travail.

Les réseaux sectoriels interrégionaux

La coopération transnationale sectorielle se fait également entre trois ou quatre pays. Ce sont alors les syndicats eux-mêmes qui intensifient leur collaboration sous le regard plus ou moins impliqué de la Fédération syndicale européenne (FSE) (cf. fiche 2) qui les représente par ailleurs. Jusqu’à présent, les accords régionaux de coopération sur les négociations collectives partent essentiellement de l’Allemagne qui n’a pas moins de 11 frontières avec ses États voisins. S’il n’est pas étonnant que le syndicalisme allemand soit à l’origine de ces diverses initiatives, se pose tout de même la question du leadership syndical de l’Allemagne en Europe. Celui-ci peut avoir des effets négatifs dans d’autres pays européens qui, craignant une domination allemande pourraient n’accepter que formellement les textes de coordination adoptés les jugeant, en réalité, inappropriés.

C’est donc l’IG Metall (syndicat leader en Allemagne) qui, dans le cadre de l’approche de coordina-tion de la Fédération européenne des métallurgistes (FEM) (cf. Fiche 2), a été le premier à associer des représentants des syndicats étrangers aux négociations collectives. Or, les négociations se déroulant en Allemagne aux niveaux régional et sectoriel, la stratégie de coordination suivie est donc bien entendu, selon l’approche allemande, la mise en réseau régional d’acteurs sectoriels. Dans le cas de la Belgique et des Pays-Bas, un représentant par pays assiste aux négociations avec les employeurs dans la région de Rhénanie/Westphalie; des syndicalistes allemands sont invités à suivre les négociations dans les deux pays.

De nombreux autres accords, partant eux-aussi d’Allemagne ont été signés dans d’autres branches, depuis 1997 (cf. Détails de taille, c). Par exemple, dans la construction, IG-BAU a déjà signé de nombreux accords (avec l’Autriche, la Suisse, le Danemark, l’Italie, et la Pologne).

Même si « coopération » ne signifie pas la même chose dans chacun de ces cas, le dénominateur commun entre tous ces accords est celui des échanges d’observateurs lors des négociations, qui se prolongent par la suite par des échanges d’informations. Pour l’instant les thématiques abor-dées sont essentiellement les conditions de travail, les congés et le temps de travail. Toutes ces initiatives n’ont donc pas la même ambition que Doorn (en principe, elles ne concernent pas les négociations collectives), mais ont l’avantage de mener à des actions concrètes. Par exemple, poser le droit d’assistance aux travailleurs étrangers par la reconnaissance syndicale mutuelle est un pas important pour que les organisations nationales internalisent la dimension européenne des relations professionnelles.

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e 9Conclusions et perspectives sur le niveau transnational

Que ce soit l’initiative de Doorn ou les accords de coopération sectoriels, ils se caractérisent par leur transnationalité. Il est à noter que, à Doorn, un certain nombre de syndicats (en particulier des pays du sud) ont fait savoir qu’ils n’appréciaient guère le caractère régional de l’initiative. Ils considéraient qu’elle portait en germe un risque de fragmentation et d’affaiblissement du mouvement syndical et de la CES. C’est pourquoi, les représentants du groupe de Doorn ont réaffirmé à plusieurs reprises que ce groupe constituait, selon eux, plutôt qu’une division « une étape sur la voie de la collaboration européenne en matière de négociations collectives ».

Quel est en effet le rôle de la CES ou de la FSE dans ces processus à trois ou quatre pays ? On peut s’interroger sur la concurrence possible entre une construction syndicale communautaire (par des acteurs européens) et une construction transnationale (avec une coopération directe entre syndicats nationaux sans passer par l’Europe). C’est pourquoi, FSE et CES veulent souvent chapeauter ces accords de coopération pour qu’ils ne prennent pas de pouvoir sans contrôle communautaire. Ceci pose la question importante des formes d’européanisation possible et de la légitimité de l’acteur européen.

Quelle que soit l’articulation entre les niveaux et la dimension transnationale choisie, un élément essentiel pour stabiliser et développer la coopération relève de la confiance qu’a chacune des cen-trales nationales dans son pouvoir supranational (Secrétariat du groupe de Doorn, FSE ou CES). C’est bien par la création d’un tissu inter-syndical fort que les centrales nationales accepteront de lâcher de leur souveraineté pour un mandat européen aux instances supranationales.

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illeDétaiIs de taille

A) Composition du groupe de Doorn

Le groupe de Doorn est composé d’environ cinquante représentants des principaux syndicats

sectoriels et confédérations nationales des quatre pays représentés :

La Fédération Générale du Travail de Belgique (FGTB) / Aigemeen Belgisch Vakverbond •(ABVV) et la Confédération des Syndicats Chrétiens (CSC) / Aigemeen Christelijk Vakverbond (ACV) ;

La Fédération des syndicats allemands (Deutscher Gewerkschaftsbund, DGB) et le syndicat des •employés allemands (Deutsche Angestellten-Gewerkschaft, DAG) ;

La Confédération Générale du Travail du Luxembourg, (CGT-L) et la Confédération des syndicats •chrétiens du Luxembourg (Lëtzebuerger Chrëschtleche Gewerkschafts-Bond, LCGB) ; et

La Fédération nationale chrétienne (Christelijk Nationaal Vakverbond, CNV), La fédération syndi-•cale des Pays-Bas (Federatie Nederlandse Vakbeweging, FNV) et la Fédération des employés des Pays-Bas (Middelbaar en Hoger Personeel, MHP). En outre, des représentants de la CES, de l‘Institut syndical européen (ISE) et de la Commission sont invités à participer en tant qu‘ob-servateur.

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illeB) Réseaux transfrontaliers de négociations collectives

Centrales syndicales allemandes

Centrales syndicales parte-naires

Date de signature de l’accord

Chimie

IG Chemie-Papier-Keramik

(IG CPK)

General, Municipal and Boiler

makers (GMB)

(Rovaume-Uni)

mars 1997

IG Bergbau-Chemie-Energie

(IG BCE)

Chimie-Energie-CFDT

(France)Avril 1999

Construction

IG Bauen-Agrar-Umwelt

(IG BAU)

Filtea-CGIL, Filtea-CISL,

Feneal-UIL

(Italie)

Mars 1998

Suisse et Autriche Mars 1999

Budowlani, NSZZ Solidarnosc

(Pologne)Octobre 1999

FNV Bouw , « Hout en

Bouwbond » CNV

(Pays-Bas)Juin 2000

CCTBB/CCHB, « Centrale

Générale »

(Belgique)

Agriculture IG Bauen-Agrar-Umwelt

(IG BAU)

ZZPR

(Pologne)Août 2003

Portugal, Espagne Novembre 1998

Divers secteurs Gewerkschaft Holz und

Kunststoff (GHK)

Filtea-CGIL, Filtea-CISL,

Feneal-UIL

(Italie)

Juin 1999

Gewerkschaft Nahrung Genuss

gasttatten (GNGG)

Gewerkschaft Agrar Nahrung

Genuss (ANG) , Gewerkschaft

Hotel, Gastgewerbe

Persônlicher Dienst, (HG PD)

(Autriche)

Août 2000

Source : Composition personnelle sur base d’informations provenant essentiellement d’Eironline.

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illeC) Partenariats contractuels des unions régionales d’IG Metall

Structures régionales IG Metall Syndicats partenaires (pays)Berlin

(Brandenburg-Saxe)

NSZZ Solidarnosc (Pologne)

KOVO (République tchèque)

Munich

(Bavière)

GMBE (Autriche)

SKEI (Slovénie)

KOVO (République slovaque)

KOVO (République tchèque)

VASAS (Hongrie)

Düsseldorf

(Rhénanie – Westphalie)

FNV Bondgenoten (Pays-Bas)

CNV Bedrijven Bond (Pays-Bas)

CCMB (Belgique)

CMB (Belgique)

Hamburg

(District côtier)

CO-Industrie (Danemark)

Svenska Metall (Suède)

Stuttgart

(Baden-Württemberg)

FIOM-CGIL (Italie)

SMUV (Suisse)

Frankfurt

(Hesse, Rhénanie-Palatinat, Sarre)

CFDT (France)

CGT (France)

FO (France)

Hanover

(Basse - Saxe, Saxe-Anhalt)

AEEU (Royaume-Uni)

Source : (Gollbach et Schulten, 2000 :168).

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us ?Qu’en dites-vous ?

1. Pensez-vous que le type de coopérations transfrontalières décrites dans cette fiche a eu lieu/pourrait avoir lieu dans votre secteur/pays ?

2. Quelles sont les conditions nécessaires pour faire naître des accords de coopérations transfron-talières et est-il possible de signer un tel accord entre des organisations de poids inégal en terme de nombre de membres ?

3. Pourriez-vous imaginer que votre syndicat et les syndicats des régions frontalières à la vôtre négocient une seule convention collective du fait de leurs liens historiques très forts en matière syndicale ?

4. La FSE du secteur peut-elle servir de relais aux coopérations transfrontalières parallèlement à sa politique proprement communautaire ?

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ir plusPour en savoir plus

Autret, F. (2000), « Coordination syndicale européenne – Premières expériences entre syndicats allemands, belges et néerlandais », Regards sur l’économie allemande, CIRAC, no 45, mars 2000, Cergy-Pontoise, pp. 35-41.

Delcroix, J.-P. (1999), « Vers une coopération syndicale européenne », Année sociale 1998, Institut de Sociologie de l’Université Libre de Bruxelles, Bruxelles, pp. 397-404.

Dufresne, A. (2002), «La coordination des salaires en Europe : prémices et stratégies », in Pochet, P. (ed.), Politique salariale dans la zone euro, PIE-Peter Lang, Bruxelles, 2002, pp.87-118.

Version anglaise : “Wage Co-ordination in Europe: Roots and Routes”, in Pochet, P. (ed.), Wage Policy in the Eurozone, PIE-Peter Lang, Brussels, 2002, pp.79-109.

Gollbach, J. (2001), « Trade Union Collective Bargaining Partnerships », in Gabaglio, E. et Hoffmann, R. (eds.), European Trade Union Yearbook 2000, Institut syndical européen, Bruxelles, pp. 95-114.

Gollbach, J. (2005), Europäisierung der Gewerkschaften. Praktische Ansätze im spannungsverhältnis nationaler und europäischer strukturen und Traditionen, VSA, Hambourg.

Gollbach, J. et Schulten, T. (2000), « Cross-border Collective Bargaining Networks in Europe », Eu-ropean Journal of Industrial Relations, vol. 6, n° 2, pp. 161-179.

Initiative de Doorn (1998), La Déclaration de Doorn, déclaration conjointe adoptée par les syndicats de Belgique, d’Allemagne, du Luxembourg et des Pays-Bas, 5 septembre 1998, Doorn.

Kreimer-de Fries, J. (1999), «Tarifkooperation der Gewerkschaftsbünde BeNeLux Deutschland : Die «Erklarung von Doorn» in Schulten, T. et Bispinck, R. (eds.), Tarifpolitik unter dem EURO, VSA-Verlag, Hambourg, pp. 185-196.

Schulten, T. (2001), «The European Metalworkers‘ Federation‘s approach to a European Coordination of Collective Bargaining Experiences, Problems and Prospects », in Schulten, T. et Bispinck, R. (2001) (eds.), Collective Bargaining under the Euro. Experiences from the European Metallndustry, Institut syndical européen, Bruxelles.