9
Mon idée, c’est d’être ou de ne pas être : le Roi du Maroc est-il capable de gouverner? La jeunesse, vous n’avez encore frappé qu’à la première porte. Date : 02/06/2011 Par : Mohamed Rachidi Université de Sherbrooke, QC [email protected] Depuis quelques mois, le monde magrébin, et le reste du monde arabe, est cahoté par des mouvements populaires enviant la liberté et un futur meilleur, et ce après de très longues années d’attente sans espoir. Cependant, plusieurs têtes de régimes sont tombées, en Tunisie et Égypte. D’autres sont en liste, en Lybie, Yémen, Série et Bahreïn, dont les chutes sont un peu prolongées, car ces pays-là disposent de grandes volontés et moral de répression, sous les regards de la communauté internationale. Ce fléau des révolutions, le Maroc en fait partie d’une façon ou d’une autre. Ainsi, la naissance du mouvement du 20 février par un groupe de jeunes réclamant des changements radicaux à tous les niveaux pour faire prospérer la société. Des manifestations presque quotidiennes sont organisées sur tout le territoire, même dans les zones rurales. La répression immédiate par les forces de l’ordre est toujours le mode de réponse préféré de l’État. Plus particulièrement, ce dernier dimanche du 22/05/2011 a été plus violent. Reuters parle déjà d’un épuisement de patience 1

Mon idée, c'est d'être ou de ne pas être: le Roi du Maroc est-il capable de gouverner?

Embed Size (px)

DESCRIPTION

Mon idée, c’est d’être ou de ne pas être : le Roi du Maroc est-il capable de gouverner? La jeunesse, vous n’avez encore frappé qu’à la première porte.

Citation preview

Page 1: Mon idée, c'est d'être ou de ne pas être: le Roi du Maroc est-il capable de gouverner?

Mon idée, c’est d’être ou de ne pas être : le Roi du Maroc est-il capable de gouverner?

La jeunesse, vous n’avez encore frappé qu’à la première porte.

Date   : 02/06/2011

Par : Mohamed RachidiUniversité de Sherbrooke, [email protected]

Depuis quelques mois, le monde

magrébin, et le reste du monde arabe, est cahoté par des mouvements populaires enviant la liberté et un futur meilleur, et ce après de très longues années d’attente sans espoir. Cependant, plusieurs têtes de régimes sont tombées, en Tunisie et Égypte. D’autres sont en liste, en Lybie, Yémen, Série et Bahreïn, dont les chutes sont un peu prolongées, car ces pays-là disposent de grandes volontés et moral de répression, sous les regards de la communauté internationale.

Ce fléau des révolutions, le Maroc en fait partie d’une façon ou d’une autre. Ainsi, la naissance du mouvement du 20 février par un groupe de jeunes réclamant des changements radicaux à tous les niveaux pour faire prospérer la société. Des manifestations presque quotidiennes sont organisées sur tout le territoire, même dans les zones rurales. La répression immédiate par les forces de l’ordre est toujours le mode de réponse préféré de l’État. Plus particulièrement, ce dernier dimanche du 22/05/2011 a été plus violent. Reuters parle déjà d’un épuisement de patience chez la monarchie. Jusqu’à présent, plusieurs partis politiques hors-jeux du

pouvoir, associations et personnalités, à l’intérieur du Maroc et dans le monde, ont joint ledit mouvement. Depuis le 02/06/2011, on compte le premier mort dans les rangs du mouvement de 20 février, en l’occurrence du militant Kamal Ammari, fils de Safi, la ville la plus riche en phosphate et en sardine. Le défunt Ammari a été tabassé dans les jours antérieurs par la force du régime.

Le jour du vendredi 20 mai 2011 a marqué une manigance et un tournant exceptionnel. Il s’agit d’une œuvre soudaine et rodée des diplômés-chômeurs marocains qui ont contestés les changements directement au Roi Mohamed VI, lui réclamant de l’emploi, au moment où il prêtait de quitter la mosquée Sounna, à Rabat, après la prière de la mi-journée. Personnellement, je vois ce fait de chagrin comme un signe disant basta aux discours. Le peuple marocain a largement manifestée dans le passé et envoyée indirectement des messages au Roi, en critiquant sa bourgeoisie, son cabinet, son gouvernement et ses grandes responsables élus et engagés par des décrets royaux. Mai, le Roi a constamment sous-estimé leurs requêtes. Après cet incident, comme toujours, le Roi maintient de ne plus réformer

1

Page 2: Mon idée, c'est d'être ou de ne pas être: le Roi du Maroc est-il capable de gouverner?

comme le peuple l’espère. Un no comment parfait.

Pendant les rassemblements du dimanche 22/05/2011, les niveaux de contestation ont évoluées. Par exemple, à Tanger, Rabat, Casa, Nador et El Hoceima, les jeunes ont demandé cette fois d’ébouler le régime totalitaire. Le peuple est sur les portes de destituer la monarchie? En toute évidence, ils ont promu qu’ils transgresseront prochainement à la façon du modèle tunisien sur le terrain.

Depuis toujours, le peuple marocain était vivement persuadé que les mécontentements livrés au Roi sont enfouis par les hommes de son cercle avant qu’elles arrivent à son bureau. Cette fois, c’est tout à fait le contraire, un vrai vendredi de chagrin des diplômés en présence du chef des croyants, Mohamed VI. Cependant, je me demande ce que le Roi attend pour réagir, que ce soit en leur faveur ou contre? Autrement dit, j’ai des difficultés à comprendre ce qui l’empêche?

Deux actions à la fois extrêmes et simples sont prévues pour ce genre de situations. La première très classique et héritée de la tradition de la monarchie, il s’agit de corriger ces diplômés et tous les manifestants. Le principe est simple. Il serait de les emprisonner tous. Et si la capacité de prisons ne peut pas les accueillir en grand nombre, alors pourquoi ne pas transformer les établissements d’enseignement aux oubliettes, car ces établissements ne produisent que des chômeurs et des esprits qui, en retour, ne dérangent que le régime.

La deuxième action est la suivante : pourquoi ne pas dissoudre dès ces jours-ci le gouvernement et lancer la poursuite des corrupteurs. Car, protester près du palais royal, la première fois, et devant le Roi en personne, la deuxième fois, n’est pas un simple fait. C’est la position du Roi qui est en jeu. C’est le signe d’une tension de la jeunesse qui s’est libérée de l’emprise du régime et de toutes ses politiques horribles. C’est l’érosion de la peur chez cette jeunesse, voire le grand nombre de ses protestations, son organisation très efficace via des réseaux sociaux et des affiches, ses idées incitatives, sa prise de risques, sa dépendance… C’est le signe de non retour, une force est unie. Dans ce cas, je me rappelle avoir entendu ou lu, il y a quelques mois écoulés, un responsable américain où il dit que lorsque le peuple soulève, c’est lui la démocratie. Autrement dit, il sera trop tard pour les réformes, en ces moments le peuple s’organisera lui-même et n’a besoin de personne, surtout de ceux en pouvoir. Alors ce n’est pas très judicieux, que le Roi gagne du temps dans des poursuites ou libérations des islamistes, ou dans l’organisation de grands festivals (exemple, Mawazine 2011).

J’ai pensée à ces deux actions potentielles du Roi comme étant des choix extrêmement possibles, du fait qu’aujourd’hui la jeunesse marocaine n’a plus de confiance dans les discours aboutissant uniquement aux améliorations, tant que la même structure régnante est toujours en place. Les promesses sont révoquées. La jeunesse exige des plans et des achèvements radicaux. Alors, 1) soit le Roi s’aligne à la volonté de son peuple, donc de commencer par la dissolution du gouvernement et la démolition de l’ordre

2

Page 3: Mon idée, c'est d'être ou de ne pas être: le Roi du Maroc est-il capable de gouverner?

social et économique existant et qui ne profite que pour son entourage. Car ce même gouvernement ne représente qu’elle-même, moins de 31% de population a votée lors de la dernière élection législative. 2) Soit le Roi fait autrement et protège les intérêts de son entourage- qui protège des intérêts occidentaux- au détriment de l’amour que lui porte son peuple. Dans ce cas, il devrait donner l’ordre à la chasse des diplômés. Les nouvelles sur le terrain vont dans ce sens.

Je ne crois pas que cette dernière action soit une bonne solution. L’histoire marocaine nous a appris que toutes les manœuvres de tortures exercées par la monarchie contre son peuple dans le passé ont vite paralysées de la suite son influence politique, ainsi que son prestige religieux perçu par les tribus. La conséquence aurait été un rappel de l’occupation étrangère ou des guerriers du milieu de l’Afrique pour se maintenir (comme le fait Kadaffi). La deuxième, entant que solution également radicale, peut mieux servir à transiter cette période de crise et de performer des réformes à l’ampleur des attentes du peuple qui demande, en premier lieu, d’arracher les racines de corruption, de supra-influence des familles oligarchiques qui accaparent richesse et pouvoir sous l’ombrelle et au nom du Roi, … Alors, qui-ce qu’est empêche le Roi à s’engager?

La non-réaction du Roi jusqu’à présent me conduit à penser à deux hypothèses. La première est basée sur le fait que peut-être le Roi et son entourage ont le sac de joha1 toujours plein de mensonges

et de tactiques pour tromper le peuple, les instances et organismes internationaux, les gouvernements étrangers, par des délires qui ne surgiront jamais (grâce aux deux ministres de l’extérieur et de communication). Du fait qu’elle a lentement rêvé du futur promu, la jeunesse marocaine a aboli sa sensation pour les rêves. Le concret dans le court terme, rien que le concret, exige les mouvements de jeunes.

Je suis très persuadé que les promesses de changements que le Roi vienne de lancer jusqu'a aujourd'hui, comme la libération de certains prisonniers politiciens et défenseurs de droits, l’appel à la révision de constitution, en particulier de statuer le listel de la régionalisation, et autres, n'avait aucun rapport avec la pression de la rue marocaine. Pour ceux qui suivent l’actualiste internationale, vous le savez plus que moi, ces changements de dernière munîtes ont surgé pour deux buts très ciblés, et qui sont liés au dossier du Sahara et du Nord (le Rif2 marocain). Le premier, c’est que au moment que certains pays ennemis du Maroc préparaient une proposition à soumettre au Nations Unies- d’élargir la mission du MINURSO3 pour inclure la carte des droits de l’homme dans sa gestion du conflit de Sahara -, les français ont demandé aux responsables marocains des arguments d’un État de droits de l’homme, afin qu’ils puissent défendre leur position qu’est de bloquer une éventuelle proposition. D’où les dernières libérations des prisonniers.

Le deuxième but est lié à la révision de la constitution. Il est très intentionné que

1 Joha est le personnage le plus malin et le plus cités dans des contes anciens au Maroc. 2 Le Rif est le territoire nord marocain, ou tout simplement la chaîne montagneuse du Rif. 3 Le MINURSO est une unité des nations unies déployée depuis 1991 dans le sud du Maroc afin de surveiller le cessez-le-feu conclu entre les autorités marocaines et le front Polisario et de préparer un référendum pour déterminer le statuer futur du Sahara.

3

Page 4: Mon idée, c'est d'être ou de ne pas être: le Roi du Maroc est-il capable de gouverner?

la nouvelle loi constitutionnelle inclura la régionalisation. Les responsables marocains en comptent suffisamment pour convaincre la communauté internationale de l’intérêt de l’autogestion proposée pour les provinces du Sud au lieu de l’auto-détermination, d’une part, et en même temps, de continuer en divisant le Rif en trois régions à son appauvrissement de toutes sa richesse au profit d’autres régions et/ou des intérêts personnels de l’entourage du Roi, d’autre part. Tout en maintenant, bien évidement, le centralisme de l’État. À noter, la majorité des pape-responsables4 de différentes parties politiques étaient informées de tous ces plans.

Ce que je veux dire, la jeunesse est encore trop loin pour imposer quoique ce soit. Certes, ces changements sont faits, comme nous l’avons constaté, pour plaire au monde occidental et faire allure d’un Maroc qui n'a rien de semblant avec ce qui se passe dans d'autres pays avoisinants. Bref, la grande idée est que la rue marocaine est encore trop loin pour influencer le cours de la politique marocaine, malgré l’ampleur des contestations et des répressions subies. C'est les critiques occidentales qui dérangent la monarchie.

La deuxième hypothèse est que le Roi possiblement est incapable d’exercer ses fonctions et de décider de la nature et du rythme de changement qu’il faut entreprendre. Alors, croit-on à sa validité? Tel raisonnement nous oblige à penser les causes possibles. Personnellement, et comme tout le monde en est conscient, je vois que le Roi monopolise une très forte

personnalité. Ces actions, tout au long de chaque année et dans chaque région, sont la démonstration ferme. C’est un grand Roi, fondateur, partisan, trop mobile, ... Donc, sa personnalité ne peut barricader l’appel aux changements au niveau social, économique et de justice. Bien sûr, c’est son rôle également de préserver la continuité de la monarchie. Ainsi, il est normal qu’il résiste à l’égard de la révision des principes de la monarchie marocaine.

Bien que le Roi soit d’une personnalité favorable aux changements, en revanche, on constate que les réformes souhaitées par ce peuple ne pourraient se réaliser, et que la corruption continue. Quoique tout Roi soit une personne et un entourage dans sa gouvernance, ceci ne conduit à réfléchir cette fois sur son entourage. Alors, pour le mieux comprendre, qu’il est la structure de cet entourage?

Dès son accession au trône en 1999, le Roi marocain a hérité un entourage très complexe. Le premier entourage est affilié à l’ordre du colonialisme français, très riche et politiquement influent. Il continue encore à déposséder les marocains de leurs richesses et de leurs droits au travail, à l’enseignement, à l’habitat, etc. Il détient les grands secteurs de l’économie marocaine : banques, assurances, tourisme, immobilier, etc. Il s’est largement renforcé dans sa structure interne par des liens de mariage. L’objectif est d’accumuler plus de richesse et de pouvoir et endurer leurs intérêts et ceux de la France. Un tel lobi n’était pas toléré à s’illustrer pendant l’époque de Driss Basri, ex ministre de l’intérieur de l’époque du Roi Hassan II. Aujourd’hui,

4 Il s’agit essentiellement des partis suivants : le parti d’indépendance, l’union socialiste des forces populaires, le rassemblement

national des indépendants, la justice et développement, le parti du progrès et du socialisme, le mouvement populaire, etc.

4

Page 5: Mon idée, c'est d'être ou de ne pas être: le Roi du Maroc est-il capable de gouverner?

ce premier entourage détient même le gouvernement et tous ces ministères clés5.

Le deuxième entourage est celui hérité du cabinet du défunt Roi Hassan II, il s’agit en particulier des conseillers et des généraux. Ces deux gammes monopolisent les grandes licences d’exploitation, entre transport, pèche dans la haute mer, terres agricoles, exportations, immobilier, etc. Le troisième entourage est constitue de responsables de partis politiques pourris jusqu’au nez par la corruption et la mauvaise gestion des affaires publiques. Le quatrième entourage est apparu avec le Roi lui-même. Disant, ces amis d’enfance. La particularité de cet entourage, par rapport à celui tenu par Hassen II, c’est qu’en peu de temps, ils ont transformé la fortune du Roi en première puissance économique privée du royaume et deuxième dans l’Afrique. Un royal capitaliste dans un État communautaire et solidaire. En même temps, cet entourage du Roi s’est enrichi pour son propre compte de façon illicite. L’affaire a été révélée également par Wikiliks.

Les marocains, leur malaise fait la richesse de ces différents entourages. Malgré les grands dossiers de corruption révélés par la presse, les associations de lutte contre la corruption et de transparence, … aucune poursuite n’était engagée dans l’époque du Roi Mohamed VI. Sauf dans quelques dossiers, quand il le faut, pour véhiculer un message politique, et que les accusés seraient ensuite libérés à la fin du scénario. Au

contraire, c’est la presse et les associatifs qui se sont payés très chers, entre saisie, répressions, emprisonnement. Leur seul crime, ils ont informé le public des abus des hommes de l’État. Comme dernier exemple, il y a la poursuite encours du journaliste Rachidi Nini, le directeur du journal ALMASSAE. Cette dernière, comme étant le premier quotidien au Maroc, c’est temps qu’elle disparaisse, juge le régime.

La complexité de l’entourage, sa diversité et sa force, ne peut se permettre une perte des intérêts. Il constitue un bloc d’anti-changement très puissant. Très conscient, Mohamed VI ne peut et ne pourrait jamais changer l’équation, étant donné que le Maroc est en conflits permanents avec ses voisins, l’Espagne (avec le retour très attendu du parti populaire espagnol à la gestion du pays à partir de l’année prochaine) et l’Algérie (avec sa personnalité versatile), et que cet entourage du Roi soit prêt à tout déséquilibrer où cas ses intérêts soient menacés.

Pour conclure, dans ces idées simples, mais réelles, c’est toujours à la jeunesse de décider de son chemin. Quelque soit-il le chemin choisi, elle arrivera à son but propulsé, c’est sa démocratie. Et ce pour une simple raison : grâce à son nombre, la jeunesse marocaine constitue la base de la pyramide; grâce à sa force unie, c’est-elle qui tient entièrement toute cette pyramide debout, y compris l’entourage du Roi, donc elle peut laisser tomber cet entourage à tout moment. Surtout, à vous de décider quand il faut le dévaler.

*********************

5 Ces familles héritées du colonialisme français sont réunies, dans leur majorité, dans le parti d’indépendance. Ce dernier s’est montré encore puissant depuis le mariage du Roi de la princesse Lalla Salma qui fait partie d’une famille alliée de ce dit parti.

5