montesquieu_charles-louis_de_secondat_-_notes_sur_l_angleterre.pdf

Embed Size (px)

Citation preview

  • BIBEBOOK

    MONTESQUIEU

    NOTES SURLANGLETERRE

  • MONTESQUIEU

    NOTES SURLANGLETERRE

    1818

    Un texte du domaine public.Une dition libre.

    ISBN978-2-8247-1125-6

    BIBEBOOKwww.bibebook.com

  • propos de Bibebook :Vous avez la certitude, en tlchargeant un livre sur Bibebook.com de

    lire un livre de qualit :Nous apportons un soin particulier la qualit des textes, la mise

    en page, la typographie, la navigation lintrieur du livre, et lacohrence travers toute la collection.

    Les ebooks distribus par Bibebook sont raliss par des bnvolesde lAssociation de Promotion de lEcriture et de la Lecture, qui a commeobjectif : la promotion de lcriture et de la lecture, la diusion, la protection,la conservation et la restauration de lcrit.

    Aidez nous :Vous pouvez nous rejoindre et nous aider, sur le site de Bibebook.

    http ://www.bibebook.com/joinusVotre aide est la bienvenue.

    Erreurs :Si vous trouvez des erreurs dans cette dition, merci de les signaler :

    [email protected]

    Tlcharger cet ebook :

    http ://www.bibebook.com/search/978-2-8247-1125-6

  • Credits

    Sources : B.N.F. fl

    Ont contribu cette dition : Association de Promotion de lEcriture et de la

    Lecture

    Fontes : Philipp H. Poll Christian Spremberg Manfred Klein

  • LicenceLe texte suivant est une uvre du domaine public ditsous la licence Creatives Commons BY-SA

    Except where otherwise noted, this work is licensed under http://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0/

    Lire la licence

    Cette uvre est publie sous la licence CC-BY-SA, ce quisignie que vous pouvez lgalement la copier, la redis-tribuer, lenvoyer vos amis. Vous tes dailleurs encou-rag le faire.

    Vous devez attribuer luvre aux dirents auteurs, ycompris Bibebook.

  • NOTES SUR LANGLETERRE

    J dernier octobre I729 de la Haye; je s le voyage avecmilord Chestereld, qui voulut bien me proposer une place dansson yacht.. . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    Le peuple de Londres mange beaucoup de viande; cela le rend trs-robuste; mais lge de quarante quarante-cinq ans, il crve.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Il ny a rien de si areux que les rues de Londres; elles sont trs-

    malpropres; le pav y est si mal entretenu quil est presque impossible dyaller en carrosse, et quil faut faire son testament lorsquon va en acre,qui sont des voitures hautes comme un thtre, o le cocher est plus hautencore, son sige tant de niveau limpriale. Ces acres senfoncentdans des trous, et il se fait un cahotement qui fait perdre la tte.

    1. Ces notes ont paru, pour la premire fois, dans ldition desOEuvre compltes,donnepar Levre, en 1818, 5 vol. in-8.

    1

  • Notes sur lAngleterre Chapitre

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Les jeunes seigneurs anglais sont diviss en deux classes: les uns

    savent beaucoup, parce quils ont t longtemps dans les universits; cequi leur a donn un air gn avec une mauvaise honte. Les autres nesavent absolument rien, et ceux-l ne sont rien moins que honteux, et cesont les petits-maitres de la nation. En gnral les Anglais sont modestes.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Le 5 octobre 1730 (n. s. ), je fus prsent au prince, au roi et la reine,

    Kensington. La reine, aprsmavoir parl demes voyages, parla du thtreanglais; elle demanda milord Chestereld do vient que Shakespeare,qui vivait du temps de la reine Elisabeth, avait si mal fait parler les femmeset les avait fait si sottes. Milord Chestereld rpondit fort bien que, dansce temps-l, les femmes ne paraissaient pas sur le thtre, et que ctait demauvais acteurs qui jouaient ces rles, ce qui faisait que Shakespeare neprenait pas tant de peine les faire bien parler. Jen dirais une autre rai-son: cest que pour faire parler les femmes, il faut avoir lusage du mondeet des biensances. Pour faire bien parler les hros, il ne faut quavoirlusage des livres. La reine me demanda sil ntait pas vrai que, parminous, Corneille ft plus estim que Racine? Je lui rpondis que lon re-gardait ordinairement Corneille comme un plus grand esprit, et Racinecomme un plus grand auteur.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Il me semble que Paris est une belle ville o il y a des choses plus

    laides, Londres une vilaine ville o il y a de trs-belles choses.. . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    A Londres, libert et galit. La libert de Londres est la libert deshonntes gens, en quoi elle dire de celle de Venise, qui est la libert devivre obscurment et avec des p. et de les pouser: lgalit de Londresest aussi lgalit des honntes gens, en quoi elle dire de la libert deHollande, qui est la libert de la canaille.

    2. Nouveau style.

    2

  • Notes sur lAngleterre Chapitre

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Le Crasman est fait par Bolingbroke et par M. Pulteney. On le fait

    conseiller par trois avocats avant de limprimer, pour savoir sil y aquelque chose qui blesse la loi.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Cest une chose lamentable que les plaintes des trangers, surtout des

    Franais, qui sont Londres. Ils disent quils ne peuvent y faire un ami;que, plus ils y restent, moins ils en ont; que leurs politesses sont reuescomme des injures. Kinski, les Broglie, La Vilette, qui appelait Parismilord Essex son ls, qui donnait de petits remdes tout le monde, etdemandait toutes les femmes des nouvelles de leur sant: ces gens-lveulent que les Anglais soient faits comme eux. Comment les Anglaisaimeraient-ils les trangers? ils ne saiment pas eux-mmes. Commentnous donneraient-ils diner? ils ne se donnent pas diner entre eux.Mais on vient dans un pays pour y tre aim et honor. Cela nestpas une chose ncessaire; il faut donc faire comme eux, vivre pour soi,comme eux, ne se soucier de personne, naimer personne, et ne comp-ter sur personne. Enn il faut prendre les pays comme ils sont: quand jesuis en France, je fais amiti avec tout le monde; en Angleterre, je nenfais personne; en Italie, je fais des compliments tout le monde; enAllemagne, je bois avec tout le monde.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .On dit: En Angleterre, on ne me fait point amiti. Est-il ncessaire

    que lon vous fasse des amitis?. . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    Il faut lAnglais un bon dner, une lle, de laisance; comme il nestpas rpandu, et quil est born cela, ds que sa fortune se dlabre, etquil ne peut plus avoir cela, il se tue ou se fait voleur.

    3. Le Crasmantait un journal; crasmansignie artisan.(Note de ld. de 1818.)4. Conseillerest l pour examiner. (1818.)

    3

  • Notes sur lAngleterre Chapitre

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Ce 15 mars (v. s. ). Il ny a gure de jour que quelquun ne perde le

    respect au roi dAngleterre. Il y a quelques jours que milady Bell Mo-lineux, matresse lle, envoya arracher des arbres dune petite pice deterre que la reine avait achete pour Kensington, et lui t procs, sansavoir jamais voulu, sous quelque prtexte, saccommoder avec elle, et tattendre le secrtaire de la reine trois heures, lequel lui venait dire quela reine navait pas cru quelle et un droit de proprit seigneuriale surcette pice, lautre layant pour trois vies, mais avec dfense de la vendre.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Il me semble que la plupart des princes sont plus honntes gens que

    nous, parce quils ont plus perdre de leur rputation, tant regards.. . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    La corruption sest mise dans toutes les conditions. Il y a trente ansquon nentendait pas parler dun voleur dans Londres; prsent, il nya que cela. Le livre de Whiston contre les miracles du Sauveur, qui estlu du peuple, ne rformera pas les murs. Mais, comme on veut que loncrive contre les ministres dtat, on veut laisser la libert de la presse.

    Pour les ministres, ils nont point de projet xe. A chaque jour sutsa peine. Ils gouvernent jour par jour.

    Du reste, une grande libert extrieure. Milady Denham tant mas-que, dit au roi: A propos, quand viendra donc le prince de Galles?Est-ce quon craint de le montrer? Serait-il aussi sot que son pre et songrand-pre? Le roi sut qui elle tait, parce quil voulut le savoir de sacompagnie. Depuis ce temps, quand elle allait la cour, elle tait plecomme la mort.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .5. Vieux style.6. William Whiston (1667-1752), thologien et mathmaticien, fort clbre au dernier

    sicle par ses opinions et ses controverses religieuses.

    4

  • Notes sur lAngleterre Chapitre

    Largent est ici souverainement estim; lhonneur et la vertu peu.. . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    On ne saurait envoyer ici des gens qui aient trop desprit. On se trom-pera toujours sans cela avec le peuple, et on ne le connatra point. Si on selivre un parti, on y tient. Or, il y a cent millions de petits partis, commede passions. DHiberville, qui ne voyait que des jacobites, se laissa entra-ner faire croire la cour de France quon pourrait faire un parlementtory: il fut wigh, aprs beaucoup dargent jet, et cela fut cause, dit-on, desa disgrce. Les ministres de mon temps ne connaissaient pas plus lAn-gleterre quun enfant de six mois. Kinski se trompait toujours sur les m-moires de torys. Comme on voit le diable dans les papiers priodiques, oncroit que le peuple va se rvolter demain; mais il faut seulement se mettredans lesprit quen Angleterre, comme ailleurs, le peuple est mcontentdes ministres, et que le peuple y crit ce que lon pense ailleurs.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Je regarde le roi dAngleterre comme un homme qui a une belle

    femme, cent domestiques, de beaux quipages, une bonne table; on lecroit heureux. Tout cela est au dehors. Quand tout le monde est retir,que la porte est ferme, il faut quil se querelle avec sa femme, avec sesdomestiques, quil jure contre sonmatre dhtel; il nest plus si heureux .

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Quand je vais dans un pays, je nexamine pas sil y a de bonnes lois,

    mais si on excute celles qui y sont, car il y a de bonnes lois partout.. . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    7. Leibnitz comparait le roi dAngleterre et son Parlement un mari et sa femme, dontles rapports pouvaient parfois tre tendus, mais qui taient forcs de se mettre daccord.(Foucher de Careil, Leibnitz et les deux Sophies.Paris, 1876, p. 179.)

    5

  • Notes sur lAngleterre Chapitre

    Comme les Anglais ont de lesprit, sitt quun ministre tranger ena peu, ils le mprisent dabord, et soudain son aaire est faite, car ils nereviennent pas du mpris.

    Le roi a un droit sur les papiers qui courent , et qui sont au nombredune cinquantaine, de faon quil est pay pour les injures quon lui dit.

    Comme on ne saime point ici, force de craindre dtre dupe, ondevient dur.

    Un couvreur se fait apporter la gazette sur les toits pour la lire.. . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    Hier, 28 janvier 1730 (v. s.), M. Chipin parla dans la Chambre des com-munes au sujet des troupes nationales; il dit quil ny avait quun tyranou un usurpateur qui et besoin de troupes pour se maintenir, et quainsictaient des moyens que le droit incontestable de S. M. ne pouvait pasexiger. Sur les mots de tyran et dusurpateur, toute la chambre fut ton-ne, et lui les rpta une seconde fois; il dit ensuite quil naimait pasles maximes hanovriennes Cela tait si vif que la Chambre eut peur dequelque dbat, de faon que tout le monde cria aux voix,an darrter ledbat.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Lorsque le roi de Prusse voulut faire la guerre Hanovre, on demanda

    pourquoi le roi de Prusse avait soudain assembl ses troupes avant davoirdemand satisfaction. Le roi de Prusse rpondait quil lavait fait deman-der deux ou trois fois, mais que le sieur de Reichtembach, son ministre,avait toujours t rabrou et non cout par le sieur Debouche, premierministre, lequel avait de laversion pour la couleur bleue. Or, il se trouvaque le plus riche habit de Reichtembach, que je lui ai vu, tait bleu; ce quifaisait que ledit ministre ne pouvait avoir un moment daudience.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .8. Cest le timbre des journaux.

    6

  • Notes sur lAngleterre Chapitre

    Il y a des membres cossais qui nont que deux cents livres sterlingpour leur voix et la vendent ce prix.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Les Anglais ne sont plus dignes de leur libert. Ils la vendent au roi;

    et si le roi la leur redonnait, ils la lui vendraient encore.. . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    Un ministre ne songe qu triompher de son adversaire dans lachambre basse; et pourvu quil en vienne bout, il vendrait lAngleterreet toutes les puissances du monde.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Un gentilhomme nomm, qui a quinze cus sterling de rente, avait

    donn, plusieurs temps, cent guines, une guine lui en rendre dixlorsquil jouerait sur le thtre. Jouer une pice pour attraper mille gui-nes, et cette action infme nest pas regarde avec horreur? Il me semblequil se fait bien des actions extraordinaires en Angleterre; mais elles sefont toutes pour avoir de largent. Il ny a pas seulement dhonneur et devertu ici; mais il ny en a pas seulement dide; les actions extraordinairesen France, cest pour dpenser de largent; ici cest pour en acqurir.

    Je ne juge pas de lAngleterre par ces hommes; mais je juge de lAn-gleterre par lapprobation quelle leur donne; et si ces hommes y taientregards comme ils le seraient en France, ils nauraient jamais os cela.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Jai ou dire dhabiles gens que lAngleterre, dans le temps o elle

    fait des eorts, nest capable, sans se ruiner, de porter que cinq millionssterling de taxe; mais prsent, en temps de paix, elle en paie six.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    7

  • Notes sur lAngleterre Chapitre

    Jallai avant-hier au parlement la chambre basse; on y traita de laf-faire de Dunkerque. Je nai jamais vu un si grand feu. La sance duradepuis une heure aprs midi jusqu trois heures aprs minuit. L, lesFranais furent bien mal mens; je remarquai jusquo va lareuse ja-lousie qui est entre les deux nations. M. Walpole attaqua Bolingbrokede la faon la plus cruelle, et disait quil avait men toute cette intrigue.Le chevalier Windham le dfendit. M. Walpole raconta en faveur de Bo-lingbroke lhistoire du paysan qui, passant avec sa femme sous un arbre,trouva quun homme pendu respirait encore. Il le dtacha et le porta chezlui; il revint. Ils trouvrent le lendemain que cet homme leur avait volleurs fourchettes; ils dirent: Il ne faut pas sopposer au cours de la jus-tice: il le faut rapporter o nous lavons pris.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Ctait de tout temps la coutume que les communes envoyaient deux

    bills aux seigneurs: lun contre les mutins et les dserteurs , que les sei-gneurs passaient toujours; lautre contre la corruption, quils rejetaienttoujours. Dans la dernire sance, milord Thousand dit: Pourquoi nouschargeons-nous toujours de cette haine publique de rejeter toujours lebill? Il faut augmenter les peines, et faire le bill de manire que les com-munes le rejettent elles-mmes: de faon que, par ces belles ides, les sei-gneurs augmentrent la peine tant contre le corrupteur que le corrompu,de dix cinq cents livres, et mirent que ce seraient les juges ordinaires quijugeraient les lections, et non la chambre; quon suivrait toujours le der-nier prjug dans chaque cour . Mais les communes, qui sentaient peut-tre lartice, ou voulurent sen prvaloir, le passrent aussi, et la cour fut contrainte de faire de mme. Depuis ce temps , la cour a perdu, dansles nouvelles lections qui ont t faites, plusieurs membres, lesquels ontt choisis parmi les gros propritaires de fonds de terres; et il sera dif-cile de faire un nouveau parlement au gr de la cour; de faon que lon

    9. Le mutiny-billest le vote annuel du contingent militaire.10. Probablement Lord Townshend.11. Cest--dire le dernier prcdent.12. Cest--dire le gouvernement du Roi, le ministre.13. 1729.

    8

  • Notes sur lAngleterre Chapitre

    voit que le plus corrompu des parlements est celui qui a le plus assur lalibert publique.

    Ce bill est miraculeux, car il a pass contre la volont des communes,des pairs et du roi

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Autrefois le roi avait en Angleterre le quart des biens, les seigneurs

    un autre quart, le clerg un autre quart; ce qui faisait que, les seigneurset le clerg se joignant, le roi tait toujours battu. Henri VII permit auxseigneurs daliner, et le peuple acquit: ce qui leva les communes. Il mesemble que le peuple a eu, sous Henri VII, les biens de la noblesse; et, sousHenri VIII, la noblesse a eu les biens du clerg. Le clerg, sous le ministrede la reine Anne, a repris des forces, et il senrichit tous les ans de beau-coup. Le ministre anglais, qui voulait avoir le clerg, obtint de la pitde la reine Anne quelle lui laisserait de certains biens royaux, commela premire anne du revenu de chaque vch, et quelque autre chose,montant quatorzemille livres sterling par an, pour suppler aux pauvresbnces, avec cette clause que les ecclsiastiques y ont fait mettre: quetout bncier qui demanderait lapplication de partie de cette somme,serait oblig den mettre autant de son bien pour augmenter le revenudu bnce; et de plus, il a pass quon pourrait donner lglise, mmepar (pas) testament; ce qui a abrog lancienne loi, et fait que le clergne laisse pas de senrichir, malgr le peu de religion de lAngleterre. Leministre wigh naurait pas fait cela; mais il na pas os le changer, car ila toujours besoin du clerg.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Je crois quil est de lintrt de la France de maintenir le roi en Angle-

    terre, car une rpublique serait bien plus fatale: elle agirait par toutes sesforces, au lieu quavec un roi elle agit avec des forces divises. Cependantles choses ne peuvent pas rester longtemps comme cela.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

    9

  • Notes sur lAngleterre Chapitre

    L o est le bien, est le pouvoir; la noblesse et le clerg avaient autre-fois le bien, ils lont perdu de deux manires: 1 par laugmentation deslivres au marc (le marc de trois livres, sous saint Louis, tant peu peuparvenu 49, o il est prsent); 2 par la dcouverte des Indes , qui arendu largent trs-commun, ce qui fait que les rentes des seigneurs, tantpresque toutes en argent, ont pri. Le roi a surcharg les communes pro-portion de ce que les seigneurs ont perdu sur elles; et le roi est parvenu tre un prince redoutable ses voisins, avec une noblesse qui navaitplus dautres ressources que de servir, et des roturiers quil a fait payer sa fantaisie: les Anglais sont la cause de notre servitude.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Il y a dans cet ouvrage un dfaut qui me semble celui du gnie de la

    nation pour laquelle il a t fait, qui est moins occupe de sa prospritque de son envie de la prosprit des autres; ce qui est son esprit domi-nant, comme toutes les lois dAngleterre sur le commerce et la navigationle font assez voir.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Je ne sais pas ce qui arrivera de tant dhabitants que lon envoie dEu-

    rope et dAfrique dans les Indes occidentales; mais je crois que si quelquenation est abandonne de ses colonies, cela commencera par la nationanglaise .

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Il nest point demot anglais pour exprimer valet de chambre, parce

    quils nen ont point, et point de dirence demasculin et fminin. Au lieuque lon dit en France manger son bien, le peuple dit en Angleterremanger et boire son bien.14. Cest--dire lAmrique.15. On ne sait de quel ouvrage Montesquieu veut parler.16. Montesquieu a t prophte pour lAmrique du Nord, qui sest spare de lAngle-

    terre en 1770.

    10

  • Notes sur lAngleterre Chapitre

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Les Anglais vous font peu de politesses, mais jamais dimpolitesses.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Les femmes y sont rserves, parce que les Anglais les voient peu;

    elles simaginent quun tranger qui leur parle veut les chevaucher. Jene veux point, disent-elles, give to him encouragement .

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Point de religion en Angleterre; quatre ou cinq de la Chambre des

    communes vont la messe ou au sermon de la chambre, except dans lesgrandes occasions, o lon arrive de bonne heure. Si quelquun parle dereligion, tout le monde se met rire. Un homme ayant dit de mon temps:Je crois cela comme article de foi, tout le monde se mit rire. Il y aun comit pour considrer ltat de la religion; cela est regard commeridicule.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .LAngleterre est prsent le plus libre pays qui soit au monde, je nen

    excepte aucune rpublique; jappelle libre, parce que le prince na le pou-voir de faire aucun tort imaginable qui que ce soit, par la raison queson pouvoir est contrl et born par un acte ; mais si la chambre bassedevenait matresse, son pouvoir serait illimit et dangereux, parce quelleaurait en mme temps la puissance excutive; au lieu qu prsent le pou-voir illimit est dans le parlement et le roi, et la puissance executive dansle roi, dont le pouvoir est born.

    Il faut donc quun bon Anglais cherche dfendre la libert galementcontre les attentats de la couronne et ceux de la chambre.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .17. Lui donner dencouragement.18. Le mot acte est pris au sens anglais, il veut dire ici: born par la loi.

    11

  • Notes sur lAngleterre Chapitre

    Quand un homme en Angleterre aurait autant dennemis quil a decheveux sur la tte, il ne lui en arriverait rien: cest beaucoup, car la santde lme est aussi ncessaire que celle du corps.

    . . . . . . . . . . . . . . . . . . .Lorsquon saisit le cordon bleu de M. de Broglie, un homme dit:

    Voyez cette nation: ils ont chass le Pre, reni le Fils, et consqu leSaint-Esprit.

    n

    12

  • Une dition

    BIBEBOOKwww.bibebook.com

    Achev dimprimer en France le 11 juin 2015.