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Sommaire Lorsque l’on est étudiant il y a des noms que l’on rencontre sans que l’on ne sache vraiment ce qu’ils représentent. On se demande périodiquement qui étaient ces enseignants partis à la retraite bien avant que l’on démarre soi-même son cursus universitaire. Etudiant à la Faculté de médecine Nancy à partir de 1989, j’avais croisé à plusieures reprises ce nom de Paul Sadoul, parti à la retraite en 1985. Ce n’est que lorsque j’ai intégré le laboratoire de physiologie, presque 10 ans plus tard, que j’ai compris quelle avait été l’ampleur du travail de grand Lorrain dans la recherche de la prise en charge des patients atteints de pathologie respiratoire. Aujourd’hui, l’unité Inserm 14 qu’il avait créée de toutes pièces en 1960 a été fermée, mais le monde entier résonne encore du chemin que Paul Sadoul à contribuer à ouvrir. Les médecins et les chercheurs qu’il a contribué à former sont aujourd’hui dans le monde entier. Paul Sadoul a été un des fondateurs de l’ANTADIR et de l’ESCRP (European Society of Clinical Respiratory Physiology). Paul Sadoul a pour ma part réussi ce que tout enseignant espère. Ses élèves existent aujourd’hui même s’ils ne l’ont jamais ou très rarement croisé dans leur vie. Bien qu’habitant la même ville, je ne l’ai vu personnellement qu’une seule fois. Même si je ne suis que son petit ou arrière petit-fils spirituel, je suis fier de faire partie de cette école. Edith Puchelle, ancien membre de l’unité 14 a rendu un hommage à Paul Sadoul à l’occasion de la “Sadoul lecture” de l’ERS. Congrès ERS 2011 La 21 ème édition du Congrès de l’European Respiratory Society s’est déroulée à Amsterdam fin septembre 2011. Comme chaque année, l’ANTADIR, dans le cadre de sa mission de recherche a permis à un groupe de médecins régionaux coordonnés par le Dr Dan Veale de participer à cette grande manifestation devenue le plus grand congrès mondial de Pneumologie. Après l’hommage rendu au Pr Sadoul, précurseur de la pneumologie moderne qui nous a récemment quitté et qui avait été à l’origine de la création de l’ERS et fondateur de l’ANTADIR, ce numéro présente une sélection d’ articles marquants relatifs aux progrès réalisés dans la prise en charge des maladies respiratoires chroniques. Que Dan Veale et son groupe soient remerciés pour la qualité de ce travail collaboratif. Bonne lecture et rendez-vous à Vienne l’an prochain ! Pr Jean-François Muir Président Antadir Association n°24 - décembre 2011 Editorial Hommage au Pr Paul Sadoul (1918-2011) : Pr Cyril SCHWEITZER, CHU Brabois - Nancy Session pédiatrique : Présentation de cas singuliers......p.2 - Les nouveaux traitements dans la mucoviscidose ........................................... p.2 - Les maladies pulmonaires graves pédiatriques au stade terminal ............................ p.4 Les patients au congrès de l’ERS...........................p.6 - La FFAAIR au congrès et nos projets ................. p.7 Les Exacerbations des BPCO.........p.8 Le Sevrage Tabagique ................... p.10 Les Nouvelles avancées dans l’arrêt du tabac ..................... p.10 Les avancées dans le traitement antibiotique des bronchectasies non mucoviscidosiques......................... p.12 Le traitement non pharmacologique de l’exacerbation de BPCO ......... p.12 Syndrome d’apnées hypopnées obstructives du sommeil, insomnie et pression positive continue..... p.14

n°24 - décembre 2011 Congrès ERS 2011 Editorial€¦ · Congrès ERS 2011 La 21ème édition du Congrès de l’European Respiratory Society s’est déroulée à Amsterdam fin

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Page 1: n°24 - décembre 2011 Congrès ERS 2011 Editorial€¦ · Congrès ERS 2011 La 21ème édition du Congrès de l’European Respiratory Society s’est déroulée à Amsterdam fin

Sommaire

Lorsque l’on est étudiant il y a des noms que l’on rencontre sans que l’on ne sache vraiment ce qu’ils représentent. On se demande périodiquement qui étaient ces enseignants partis à la retraite bien avant que l’on démarre soi-même son cursus universitaire. Etudiant à la Faculté de médecine Nancy à partir de 1989, j’avais croisé à plusieures reprises ce nom de Paul Sadoul, parti à la retraite en 1985. Ce n’est que lorsque j’ai intégré le laboratoire de physiologie, presque 10 ans plus tard, que j’ai compris quelle avait été l’ampleur du travail de grand Lorrain dans la recherche de la prise en charge des patients atteints de pathologie respiratoire. Aujourd’hui, l’unité Inserm 14 qu’il avait créée de toutes pièces en 1960 a été fermée, mais le monde entier résonne encore du chemin que Paul Sadoul à contribuer à ouvrir. Les médecins et les chercheurs qu’il a contribué à former sont aujourd’hui dans le monde entier. Paul Sadoul a été un des fondateurs de l’ANTADIR et de l’ESCRP (European Society of Clinical Respiratory Physiology).Paul Sadoul a pour ma part réussi ce que tout enseignant espère. Ses élèves existent aujourd’hui même s’ils ne l’ont jamais ou très rarement croisé dans leur vie. Bien qu’habitant la même ville, je ne l’ai vu personnellement qu’une seule fois. Même si je ne suis que son petit ou arrière petit-fils spirituel, je suis fier de faire partie de cette école.

Edith Puchelle, ancien membre de l’unité 14 a rendu un hommage à Paul Sadoul à l’occasion de la “Sadoul lecture” de l’ERS.

Congrès ERS 2011

La 21ème édition du Congrès de l’European Respiratory Society s’est déroulée à Amsterdam fin septembre 2011.Comme chaque année, l’ANTADIR, dans le cadre de sa mission de recherche a permis à un groupe de médecins régionaux coordonnés par le Dr Dan Veale de participer à cette grande manifestation devenue le plus grand congrès mondial de Pneumologie.Après l’hommage rendu au Pr Sadoul, précurseur de la pneumologie moderne qui nous a récemment quitté et qui avait été à l’origine de la création de l’ERS et fondateur de l’ANTADIR, ce numéro présente une sélection d’ articles marquants relatifs aux progrès réalisés dans la prise en charge des maladies respiratoires chroniques.Que Dan Veale et son groupe soient remerciés pour la qualité de ce travail collaboratif.Bonne lecture et rendez-vous à Vienne l’an prochain !

Pr Jean-François MuirPrésident

Antadir Association

n°24 - décembre 2011

Editorial

Hommage auPr Paul Sadoul (1918-2011) :

Pr Cyril SCHWEITZER, CHU Brabois - Nancy

Session pédiatrique : Présentation de cas singuliers ......p.2

- Les nouveaux traitements dans la mucoviscidose ........................................... p.2

- Les maladies pulmonaires graves pédiatriques au stade terminal ............................ p.4

Les patients au congrès de l’ERS ...........................p.6

- La FFAAIR au congrès et nos projets ................. p.7

Les Exacerbations des BPCO .........p.8

Le Sevrage Tabagique ...................p.10

Les Nouvelles avancées dans l’arrêt du tabac .....................p.10

Les avancées dans le traitement antibiotique des bronchectasies non mucoviscidosiques .........................p.12

Le traitement non pharmacologique de l’exacerbation de BPCO .........p.12

Syndrome d’apnées hypopnées obstructives du sommeil, insomnie et pression positive continue .....p.14

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24 patients adultes par le Dr Grassemann (Chest 2007) qui confirme une bonne tolérance et une amélioration durable de la fonction respiratoire. Des essais prometteurs chez la souris ont montré l’efficacité du INO-4995 (Traynor-Kaplan AE, Am J Respir Cell Mol Biol 2010) ou d’autres modulateurs des caneaux sodés épithéliaux (Jones AM, Drugs 2009 ; Boncoeur E, Am J Physiol Lung Cell Mol Physiol. 2010).

Traitement individualisé des patients selon la mutation génétique Le Dr Kerem (Jerusalem) a présenté les 5 classes de mutation des protéines CFTR. Les mutations les plus accessibles à une correction thérapeutique sont celles où l’anomalie génétique est un codon STOP conduisant à une protéine tronquée. Si ce codon STOP pouvait être caché lors de la transcription de l’ADN la protéine serait alors à nouveau normale.PTC124 est une molécule donnée oralement qui permet de supprimer un allèle non-sens de la mutation

Les agents hyperosmolaires Isabelle Sermet-Gaudelus (Paris) a présenté l’intérêt des agents hyperosmolaires dans la mucoviscidose. La disparition du liquide de surface des voies aériennes, issue des anomalies du canal chlore, est en effet le point de départ de la baisse de la clearance muco-ciliaire et de l’infection secondaire du mucus. L’utilisation de thérapeutiques modifiant le liquide de surface des voies aériennes n’est pas aujourd’hui consensuelle. Tarran R (Mol Cell 2001) montrait certaines discordances entre l’effet in vivo et l’effet in vitro des agents hyperosmolaires. Le sérum salé hypertonique présente certains avantages. Robinson M (Thorax 1997) mettait en évidence par radio-aérosol chez 10 patients adultes l’intérêt du sérum salé hypertonique par rapport à un aérosol de sérum physiologique dans la clairance muco-ciliaire à court terme. Cet effet était concentration dépendante et plaide pour l’utilisation de concentrations autour de 7%. Le VEMS à court terme n’était pas modifié. Sur le long terme

l’étude d’Elkins MR (NEJM 2006) permettait de mettre en évidence une amélioration de la qualité de vie des patients adultes (pas des enfants) avec tout particulièrement une diminution des exacerbations, pas réellement d’amélioration de la fonction respiratoire au terme de 48 semaines d’essais thérapeutique d’un sérum salé hypertonique à 7%.L’essai le plus important (324 sujets) concernant le mannitol sous forme de poudre sèche inhalée s’étendait sur 26 semaines contre placébo suivi d’un essai ouvert de 26 autres semaines (Bilton D, ERJ 2001). Il a pu être noté une amélioration sensible de la fonction respiratoire et une diminution des exacerbations. Il est cependant à noter que les effets secondaires du mannitol sont souvent plus importants que ceux du sérum salé hypertonique.D’autres méthodes peuvent par ailleurs augmenter le liquide de surface des voies aériennes. Il a été cité le Moli1901 polypeptide administré par voie inhalée qui permet d’ouvrir un canal chlore alternatif. Un essai a été conduit chez

Le premier cas concernait une pathologie rare. Il s’agissait de la présentation par le Dr CY Poon (Cardiff) d’un nouveau-né chez qui une atrésie de l’œsophage avait été diagnostiquée en période anté-natale. Une mutation 16q24.1-q24.2 (de son petit nom une inversion péricentrique du Chromosome 16) avait été identifiée à l’amniocentèse. Très rapidement après la naissance la saturation de l’enfant s’est dégradée aboutissant à son décès à 66h de vie. L’autopsie a révélé le diagnostic de

à l’hippocratisme digital, il faudra désormais penser à l’histiocytose.

Enfin une autre présentation par le Dr C. Calogero (Florence) concernait un diagnostic de déficit en protéine C du surfactant, lié à une mutation 8p21, qui s’était initialement présenté sous la forme d’épisodes récurrents de toux et de cyanose chez un nourrisson de 18 mois. Encore un diagnostic à ajouter à la longue liste des diagnostics étiologiques de la toux chez le nourrisson.

dysplasie capillaire des alvéoles, pathologie vasculaire exceptionnelle, létale sans accès à la greffe pulmonaire, mais fréquemment (40%) associée à des malformations digestives.

La présentation du Dr Ottink (Maastricht) concernait un enfant de 2,5 ans qui s’était initialement présenté avec des hémorragies sous-inguéales et qui a présenté ensuite un syndrome interstitiel sévère qui s’est révélé être un histiocytose de Langerhans. Entre ongles au poumon on pense

Session pédiatrique :présentation de cas singuliers

Pr Cyril SCHWEITZER, CHU Brabois - Nancy

Le dimanche matin a eu lieu une session pédiatrique sous forme de Quizz interactifs.

Les nouveaux traitements dans la mucoviscidose

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tendances du premier essai avaient pourtant permis d’évoquer une diminution des exacerbations.

Inhibition de l’élastase des neutrophiles

Le Dr S. Elborn (Belfast) présentait un autre axe des nouveaux traitements. Il s’agit d’inhiber le relarguage des protéases issues des réactions neutrophiliques qui dégradent les protéines parenchymateuses du poumon et des autres organes atteints dans la mucoviscidose. Cette piste part du principe que les antibiotiques diminuent la quantité d’élastase dans les voies aériennes. De même l’un des effets de l’azithomicine dans la mucoviscidose est de diminuer l’inflammation en diminuant le relarguage des produits issus des neutrophiles (Saiman L, JAMA. 2003).Certaines molécules particulières ont déjà été testées cliniquement. Dans certains cas il a pu être constaté une diminution des biomarqueurs inflammatoires, mais aucune amélioration cliniquement significative n’a pu être mise en évidence.

CFTR-G542X. Cette molécule a donné satisfaction chez la souris transgénique pour la mucoviscidose (Du M, Proc Natl Acad Sci U S A. 2008). Un essai de phase II a été conduit en Israel où ce type de mutation est très fréquent chez 23 patients adultes. Il s’en est suivi une amélioration des échanges épithéliaux au bout de 28 jours de traitement manifestés par l’amélioration des différences de potentiel nasal (Kerem E, Lancet 2008). Un essai chez 30 patients pédiatriques a retrouvé des résultats similaires (Sermet-Gaudelus I, Am J Respir Crit Care Med. 2010). Un essai plus large (238 patients dont 40 français) est actuellement en cours. Son objectif sera de mettre en évidence une amélioration de la fonction respiratoire sur le long terme.

Pour les autres types de mutations d’autres molécules ont été citées : VX-770, VX-809 et même le thé vert...

L’inconnu de ces thérapeutiques qui se basent sur les modifications de la transcription génomique reste bien sûr l’activation (ou la désactivation) d’autres gènes que ceux visés par le traitement. Des effets secondaires

pourraient alors exister. Le Dr Kerem pense que ce risque est faible. Il donne l’exemple d’une voiture qui circule sur l’autoroute et dont le conducteur voit surgir un panneau STOP. Dans le contexte il est peu probable que le conducteur s’arrête s’il n’y a qu’un seul panneau sans autres signalisations préalables. Il estime que la transcription ne s’arrêtera pas non-plus pour un seul signal discordant sans avertissements préalables.

Le DenufosolLe Dr F. Ratjen (Toronto) présentait le Denufosol, un agoniste P2Y2 dont l’intérêt est d’activer des canaux chlorure alternatifs. Cette molécule stimule le transport du chlore et des fluides à travers l’épithélium via un mécanisme indépendant de la molécule CFTR. Le Denufosol atteint aujourd’hui le développement en phase III avec 2 essais l’un sur 350 patients, l’autre sur 450 patients. La tolérance était tout à fait excellente en utilisant la voie nébulisée sur 48 semaines. Aucun des 2 essais n’a permis de conclure véritablement sur une amélioration durable du VEMS. Les

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Le Dr Ratjen (Toronto) traitant des problèmes de la mucoviscidose. Il plaidait pour une utilisation raisonnée des antibiotiques en évitant les antibiothérapies trop longues et qui ne changent pas de façon satisfaisante les paramètres fonctionnels respiratoires. Il plaidait pour une utilisation plutôt à partir des symptômes. Les stéroïdes peuvent être utilisés sur des arguments issus de l’expérience sans réels fondements scientifiques. L’oxygène améliore la qualité de vie des patients sans modifier la mortalité à moyen terme. En résumé il s’agit d’un suivi régulier des patients et d’un traitement au coup à coup des exacerbations, tout en assurant une nutrition adéquate.

Le Pr Fauroux (Paris) présentait ses arguments pour l’utilisation des supports techniques que sont l’oxygène et la VNI. Là encore il n’y a

2 - l’absence de contre-indication chirurgicale ou aux immunosuppresseurs,

3 - la mauvaise qualité de vie, 4 - la pleine compréhension des

conséquences de la greffe.

Le dernier exposé par le Dr Robinson (Nashville) concernait la notion d’entrée dans les soins palliatifs. Le point principal de cet exposé visait à faire comprendre à l’assistance que la transition entre les soins curatifs et les soins palliatifs n’était pas aussi franche et nette que l’on peut parfois le penser. Il s’agit d’une transition progressive, lente entre la découverte de la maladie et le décès (figure ci-dessous). Cette notion de frontière doit être combattue de manière à pouvoir utiliser l’ensemble de l’arsenal thérapeutique nécessaire au confort du patient.

pas de réponse universelle mais des solutions qui doivent s’adapter à chaque patients car aucune de ces techniques n’a d’impact prouvé sur la mortalité à long terme. Il est pour le Pr Fauroux important d’avoir des mesures fonctionnelles, en particulier du travail respiratoire, pour s’assurer que les supports techniques ont un effet réel sur la ventilation et l’hématose.

Le Dr Aurora (Londres) parlait lui de la transplantation pulmonaire pédiatrique. Il y a environ 130 greffes pédiatriques annuelles dans le monde. Les centres qui la pratiquent font entre 1 et 4 greffes chez des enfants par an. Devant le faible nombre d’organes disponibles il est important de se donner des critères précis d’inscription sur liste (Aurora, Lancet 1999). Sont reconnus comme critères : 1 - une espérance de vie < 2 ans,

Les maladies pulmonaires graves pédiatriques au stade terminal

Cette session un peu particulière avait pour but de donner des conseils et/ou recommandations pour les situations toujours difficiles des insuffisances respiratoires terminales.

Découverte de la maladie Décès

Curatif

Palliatif

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Ces derniers temps on peut vraiment dire que le monde européen se tourne vers le patient et les associations des patients. En 2010, la FFAAIR a été invitée pour la première fois de son histoire au Congrès Européen des Maladies Respiratoires (ERS) pour partager le stand avec la SPLF. Nous avons eu la surprise agréable de découvrir dans le programme du congrès 2011 (un grand beau livre, qui reflète tous les évènements du congrès) notre photo avec le Président de l’ERS, illustrant la participation des patients.Cette année à Amsterdam, grâce à l’invitation du Fond Européen du Poumon (ELF, le porte-parole de l’ERS auprès du grand public) la FFAAIR tenait son propre stand au sein du Village International (VI) de l’ERS.Les associations des patients de différents pays ont été bien regroupées cette année dans l’espace du VI où, comme d’habitude, on voyait des sociétés scientifiques de toute la planète.L’ELF qui s’occupe des intérêts du patient au niveau européen, a organisé quelques événements « spécial patient ».

Les patients au congrès de l’ERSDr Liliya Belenko-Gentet, FFAAIR - Paris 6

1 - L’organisation du Comité Consultatif des patients. Toutes les associations de patients présentes au congrès sont devenues membres.

2 - Le lancement de ce programme « Patient, un ambassadeur professionnel » contient des cours on-line pour apprendre aux associations de patients respiratoires à intervenir et à s’engager à la prise de décision au niveau européen. Ces cours apporteront les connaissances sur la structure et la législation de l’Union Européenne, sur l’organisation de l’ERS et l’ELF, sur la situation avec les maladies respiratoires dans différents aspects, les outils de communication, d’influence. Cela permettra de prendre en compte la voix du patient en Europe, d’engager plus les politiciens, les professionnels et les médias et enfin d’économiser (on espère) de l’énergie et de l’argent. L’ELF pense à impliquer dans ce programme aussi tous les autres acteurs de la santé publique dans le but d’optimiser les relations avec les patients.

d’experts. L’ELF va proposer sur son site la version patient du guideline.

4 - L’annonce de la Journée Mondiale de la mesure de souffle 2012. Elle aura lieu le 27 juin 2012. La devise de cette journée : « Pendant l’année Olympique rejoignez les courses pour les poumons sains ».

5 - La présentation de « La carte routière respiratoire de l’Europe (CRRE) - European Respiratory Roadmap ». C’est le premier document de ce genre qui va servir de base de communication entre la communauté respiratoire et ceux qui prennent les décisions. Il a pour but de souligner les priorités de la santé respiratoire pour la décennie prochaine, c’est pourquoi la CRRE propose une stratégie focalisée et le plan d’action coordonné. En particulier, on parle d’un besoin de faire avancer la prévention et le soin, de définir les objectifs de la recherche, d’augmenter le rôle du patient dans le système de santé publique et d’améliorer la formation. Quant à la prévention, cela concerne l’accessibilité et la régularité des tests des poumons (mesure du souffle qui permet de diagnostiquer l’asthme et la

Le coût du programme est de 80000 euros. La préparation va durer jusqu’au congrès de l’ERS de 2012, où l’ELF recrutera des participants. Pour les associations de patients c’est gratuit, mais la seule langue de communication, c’est toujours l’anglais.

3 - La discussion sur l’implication des associations de patients dans les guidelines (recommandations scientifiques et pratiques) de l’ERS. A partir de l’année 2000, l’ERS a publié plus de 65 recommandations. Ce sont toujours des produits de la médecine basée sur les preuves. En même temps, la voix des utilisateurs du soin n’a pas souvent été entendue. Pendant la réunion récente le Comité Scientifique de l’ERS a voté à l’unanimité le concept de l’implication du patient et du public. L’ELF a élaboré la procédure de cette implication, qui inclue l’engagement des patients à partir de l’initiation du guideline (Le budget doit refléter cette participation dés le début). C’est l’ELF qui s’occupera du recrutement des associations de patients et qui les entrainera et formera des groupes

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BPCO), la protection de la population vulnérable contre la pollution de l’air, l’accès assuré aux informations fiables sur la santé pour les patients et le grand public, le développement du partenariat entre les professionnels de santé, les hautes autorités et les associations de patients, la promotion d’un soutien social et des programmes d’éducation pour les personnes dans une situation précaire. Dans le domaine du soin, ce document propose d’optimiser l’accès et la qualité de la réhabilitation pulmonaire en Europe, d’assurer l’aide à la fin de vie y compris pour les malades sans pathologie maligne, de mettre l’accent sur le soin dans les stades précoces, de profiter des technologies modernes de communication (téléphones portables etc.), de développer la télémédecine pour améliorer le soin à domicile (cela en diminuera le coût). Une approche intégrée, centrée sur le patient doit être adoptée. Le mouvement vers le self-management (autogestion) d’une affection chronique par le patient est inévitable. Le rôle des patients dans la recherche change, il y devient un vrai partenaire et un expert.En fin de la décennie prochaine le patient expérimenté prendra aussi sa place à coté du médecin et de l’infirmière dans le domaine de l’éducation thérapeutique. Le patient, acteur à valeur requise du système de santé, devient un symbole du futur.

6 - Le symposium « La valeur du patient en tant que le partenaire de la recherche ». Ce sujet est très populaire depuis quelques années. La période de stagnation dans le monde des nouveaux médicaments, le manque d’idées et d’argent ont amené au développement du rôle du patient dans la recherche. Maintenant l’implication du malade aux études correspond au nouveau « standard or ». Après de nombreuses discussions on a décidé que le patient doit assister à la recherche dès le début. Aujourd’hui les scientifiques et les représentants des associations de patients continuent de chercher les outils et les conditions de la

participation active dans les essais cliniques.

7 - « Le premier Symposium de l’ERS des patients ».Il s’est déroulé le dernier jour du congrès. Ce symposium a été également adressé aux journalistes. Les organisateurs du congrès (le Président de l’ERS Pr. Marc Decramer a aussi participé) voulaient montrer une image claire et compré- hensible de la situation de l’asthme et de la BPCO en Europe. Ils parlaient des deux projets Européens PROactive (qui étudie la BPCO) et U-BIOPRED (qui cherche à soigner l’asthme sévère) et ils invitaient les patients à être impliqués aux priorités scientifiques.

Pendant le tour traditionnel du Président de l’ERS celui-ci a serré la main d’Alain Murez et lui a parlé en français : le cas unique. Le photographe officiel a fait beaucoup de clichés, on pourra les voir sur le site de l’ELF plus tard.Nous avons profité de notre présence au congrès pour discuter avec nos collègues des associations de différents pays notre idée de créer une fédération européenne des associations des malades de l’apnée du sommeil. Jusqu’à ce moment il n’existe pas d’organisations des patients avec cette affection au niveau européen. En même temps la nécessité de défendre ces intérêts est forte. La pathologie est souvent mal connue par le grand public, le diagnostique arrive tard et l’inégalité des soins saute aux yeux. C’est logique que l’initiative de la mobilisation européenne contre l’apnée du sommeil vient de France où pour le moment (et c’est très important de garder ces avantages) le progrès dans le diagnostique et le soin est vraiment considérable et l’activité des organisations des patients est

efficace (« Charte… », « Manifeste… »).L’idée de se réunir a trouvé ses partisans, nos collègues Belges, Hollandais, Irlandais, Italiens ont exprimé leur approbation. On a vu aussi l’intérêt envers ce projet de coté de structures européennes (l’EFA, l’ELF) et de quelques labos. Maintenant le temps est venu de lancer ce projet, la FFAAIR fait déjà les premiers pas.L’activité européenne de la FFAAIR va être développée aussi pour le programme « Séjours Vacances ». L’association Italienne des malades BPCO (et peut-être quelques autres) veut étudier notre expérience et rejoindre ce programme, le sujet est à discuter avec le partenaire indispensable de ce programme, l’ANTADIR.On peut conclure que notre Fédération ne soit pas passée inaperçue au grand événement européen. Après le congrès j’ai reçu une lettre de remerciement de la part de l’ELF, où notre contribution est appelée « fantastique ». Donc « Allez les bleus, allez les membres de la FFAAIR ! »

La FFAAIR au congrès et nos projets Notre stand avait une apparence sympathique grâce aux posters qui montraient l’activité des membres de la Fédération. Les photos des vacances des malades attiraient le regard. Nous avons préparé du matériel en anglais pour la distribution, cela a été bien apprécié

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Il y avait plusieurs séances et symposiums sur la thématique des exacerbations des BPCO lors du congrès ERS de septembre 2011 à Amsterdam. Il semble que cette thématique ne soit enfin plus considérée comme une fatalité banale et inévitable, à traiter avec quelques jours d’antibiotiques. On constate que chaque exacerbation est un événement important dans la vie d’un patient souffrant de BPCO et que, de plus, le nombre d’exacerbations a une valeur pronostique. Ces événements méritent donc d’être pris au sérieux, anticipés, pris en charge avec plus de vigueur et méritent des projets de recherche supplémentaires. Le congrès nous a permis une mise à jour sur ce sujet.

Les Exacerbations des BPCODr Dan VEALE, ANTADIR - Paris 6

Bien sûr le premier problème est la définition de ce qu’est une exacerbation ! On peut avoir une définition très précise et basée sur les faits cliniques, augmentés d’analyse de crachats et d’examens supplémentaires, ou bien on peut utiliser une définition prise par les patients. Lors de la mise en comparaison de deux traitements que l’on veut jauger objectivement, à pied d’égalité, on se heurte toujours à des problèmes de définition d’utilité clinique ou de définitions plus précises.

L’origine d’un tiers des cas d’exacerbation de BPCO reste indéterminée. Les infections bactériennes seraient responsables de la moitié des étiologies identifiées (Murphy

analyser. Ceci étant donné, seuls 50% des 7376 patients ont eu une exacerbation pendant l’année de l’étude. En dehors de la question de comparaison des bronchodilatateurs, cette étude nous pose d’autres questions. Y a-t-il des patients plus susceptibles d’avoir des exacerbations, et quelles sont leurs caractéristiques ? Un autre papier bien discuté lors du congrès sur ce sujet est aussi apparu dans le New England Journal (Horst JR, Vestbo J, Anzueto A et al étude ECLIPSE. Susceptibility to exacerbation in chronic obstructive pulmonary disease. NEJM 2010 ; 63:128138). Dans ce travail les auteurs ont testé l’hypothèse que les patients BPCO dit “exacerbateurs fréquents » représentent un phénotype clinique particulier. Ils ont analysé des données de l’étude ECLIPSE (Evaluation of COPD longitudinally to identify predictive surrogate endpoints). Les auteurs ont analysé en prospective les fréquences d’exacerbation chez des patients classés GOLD stade 2 à 4 sur une période de 3 ans. A nouveau, la définition d’exacerbation était un tout petit peu différente (événements conduisant à la prescription d’une antibiothérapie et/ou des corticostéroïdes (exacerbation modérée) ou à une hospitalisation (exacerbation sévère). Il est important de souligner que la prescription des antibiotiques dans ce contexte varie beaucoup entre les pays d’Europe.

Cette étude a montré que plus le trouble ventilatoire obstructif s’aggrave, plus les exacerbations deviennent fréquentes et sévères. Donc au cours de la première année de l’étude le nombre

TF, The rôle of bacteriae in airway inflammation in exacerbations of chronic obstructive pulmonary disease Curr Opin Infect Dis 2006 ;19 :225-230). Dans la clinique journalière, la prescription d’antibiotiques en cas d’exacerbation repose sur des indications cliniques, essentiellement l’aspect du crachat mais souvent d’autres faits cliniques et l’état général du patient ainsi que son stade de BPCO. Par contre l’aspect de purulence est plus un reflet de la réaction inflammatoire que de la présence de bactéries. Les critères d’Anthonisen sont les plus utilisés, ils consistent en : augmentation de la dyspnée, du volume de l’expectoration ou de la purulence. Il y a exacerbation si deux de ces critères sont réunis.

Une autre définition dans une étude dont on a beaucoup parlé (Vogelmeier C, Hederer B, Glaab T et al POET-COPD investigators. Tiatropium versus salmeterol for the prevention of exacerbations of COPD NEJM 2011 ; 364 :1093-1103) est une augmentation ou apparition de plusieurs symptômes respiratoires (toux, expectoration, respiration sifflante, dyspnée ou oppression dans la poitrine) pendant au moins 3 jours et nécessitant un traitement par antibiotiques et/ou corticothérapie systémique ou une hospitalisation (exacerbation modérée). Les concepteurs de cette étude ont voulu voir l’effet de bronchodilatateurs pour repousser une récidive d’exacerbation et ils se sont trouvés dans l’obligation de prendre ces patients modérés pour avoir suffisamment d’exacerbations à

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d’exacerbations par patient était respectivement 0.85, 1.34, et 2.0 pour les patients de stades GOLD 2, 3 et 4. En fait le meilleur facteur prédictif de la survenue d’exacerbations dans la première année de suivi prospectif était un antécédent d’exacerbation traitée dans l’année précédent l’inclusion dans l’étude. Lors de cette première année de l’étude, 22% des patients de stade GOLD 2, 33%,de stade GOLD 3 et 47% des patients de stade GOLD 4 ont eu des exacerbations Par contre les auteurs ont constaté que parmi les patients BPCO certains sont plus enclin à faire des exacerbations indépendamment du Stade GOLD. Il sera intéressant de voir si les stades BODE qui prennent en compte des critères supplémentaires en plus du VEMS (Dyspnée MRC, IMC, distance de marche en test de 6 minutes) peuvent mieux décrire ces ‘exacerbateurs’ fréquents. Mais il reste que dans cette étude le meilleur facteur prédictif de la présence d’exacerbations fréquentes était l’existence d’exacerbations antérieures.

Dans ce cas il semble intéressant d’identifier les patients à fort risque d’exacerbation, même chez les patients avec une obstruction bronchique modérée car cette population est plus grande que celle des patients avec obstruction sévère, impliquant que beaucoup d’exacerbations viennent de ces patients modérés. Lors de la première année de cette étude, 29% des patients de stade GOLD 4, 43% de stade GOLD 3 et 56% de stade GOLD 1 n’ont pas eu d’exacerbation.

En identifiant les patients les plus susceptibles on peut mieux travailler sur la prévention. C’est dans cette optique que le COPDgene study était conçu. On attend des résultats de cette étude et les seuls résultats sortis lors du Congres ERS étaient sur l’évaluation d’imagerie. Cette étude va examiner les caractéristiques cliniques, fonctionnelles et radiologiques, mais aussi examiner les thérapeutiques utilisées pour identifier les caractéristiques des patients à plus fort risque d’exacerbations répétés. Parmi les objectifs figurent des traitements plus efficaces, des traitements préventifs

and long term outcomes of acute exacerbations of chronic bronchitis. Thorax 2006; 61: 337-342.). L’étude la plus récente apparait dans le New England Journal (Albert RK et al. Azithromycin for prevention of exacerbations of COPD, N Eng J Med 2011;365:689-698). Cette étude a démontré que dans une population sélectionnée (patients sous oxygénothérapie, ou au moins un traitement par corticoïdes systémique dans l’année précédente, au moins une prise en charge en hospitalisation ou en service d’accueil des urgences pour une exacerbation dans l’année précédente), sur 1142 patients randomisés et sous traitement quotidien par azithromycin (250 mg/j), on observait une diminution de la fréquence des exacerbations, mais associée à un degré modéré d’ototoxicité. L’apparition de résistance aux antibiotiques mériterait d’être étudiée de façon beaucoup plus approfondie.

Une étude sur un autre macrolide moxifloxacin a était donnée à des patients BPCO comme dose pulsée de 5 jours par semaine pendant 8 semaines. (Miravitlles M, Marin A, et al. Efficacy of moxifloxacin in the treatment of bacterial colonisation in COPD Eur Respir J 2009; 34:1066-1071). Le médicament a diminué le nombre d’exacerbations en analyse selon protocole, mais il n’y avait pas d’effet en analyse sur l’intention de traiter. Une analyse de sous groupe a montré un effet plus positif chez des patients avec crachat ou muco-purulent en début de l’étude.

Les faits les plus établis pour diminuer le nombre d’exacerbations sont l’arrêt du tabac, le fait d’être vacciné contre la grippe et le pneumocoque, une bonne utilisation des bronchodilatateurs et peut être corticostéroïdes inhalés. Il serait intéressant de voir l’effet de la réhabilitation respiratoire sur la réduction des exacerbations dans la BPCO, avec cette prise en charge complète qui est la clé des avancées dans cette maladie en dehors de l’arrêt du tabac.

et des traitements limitant le nombre d’exacerbations.

Comme depuis quelques années, un numéro spécial du Lancet est publié en même temps que le Congrès ERS. Dans ce numéro spécial (Lancet 2011 ; 378 961-1048), il y a une série de trois articles très synthétiques sur l’immunologie du BPCO, sur le développement des traitements et sur les controverses dans le traitement du BPCO. Il semble que l’utilisation des bronchodilatateurs plus tôt dans l’évolution de la maladie pourrait freiner le déclin, mais il y manque une étude ciblée sur des patients GOLD Stade 1 et 2. Mais ceci pose des questions sur les possibilités d’adhérence à ces traitements dans ce groupe de patients moins atteints.

L’étude TORCH (Calverley P, Anderson JA, Celli B et al. Salmeterol and fluticasone proprionate and survival in chronic obstructive pulmonary disease. N Eng J Med 2007;356 775-789) montre que ce traitement diminue le nombre d’exacerbations et diminue la mortalité en comparaison avec placebo.

On peut isoler des bactéries des voies aériennes basses dans 50% des patients atteints de BPCO (Patel IS, Seemungal TAR, et al Relationship between bacterial colonisation and the frequency, character and severity of COPD exacerbations Thorax 2002 ; 57 :759-764). On a démontré une association avec une inflammation et avec la progression de la maladie et la fréquence des exacerbations. On peut poser en hypothèse qu’une réduction du nombre de bactéries dans les voies aériennes basses pourrait diminuer le nombre et la sévérité des exacerbations. Ceci suppose un traitement de prophylaxie.

Dans cette optique on discute du rôle de macrolides, et déjà dans les années 1970 il y avait des études sur la prophylaxie chez les patients à bronchites chroniques. Depuis des années il y a des résultats contradictoires des différentes études. (Wilson R, Jones P et al –MOSAIC Study Group. Antibiotic treatment and factors influencing short

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Le Sevrage TabagiqueDr Bertrand MICHY, Hôpital de Belle Isle – Metz.

La pratique quotidienne de la consultation de tabacologie pose le problème des patients utilisateurs au long cours de substituts nicotiniques. Une étude danoise en double aveugle a évalué pour la première fois l’efficacité de la Varenicline en remplacement de ces substituts nicotiniques.139 patients utilisant depuis plus d’un an des substituts nicotiniques (hors patch) ont été randomisés pour 3 mois de traitement, 70 dans un groupe Varenicline et 69 dans un groupe placebo. L’arrêt des substituts de nicotine était recommandé après 1 à 2 semaines. Le suivi comprenait des visites à 0, 2, 6, 9

cauchemars étaient supérieures dans le groupe Varenicline avec respectivement 56.5% et 49.9% versus 11.8% et 37.4% pour le groupe placebo.On note que 10 à 12% des patients ont fumé lors des 6 derniers mois de suivi. Il y avait 6 fumeurs réguliers à la visite des 12 mois (entre 1 et 6 cigarettes par jour).En conclusion, en dépit d’un manque de puissance probable pour certains critères, l’usage de la Varenicline semble être une option intéressante pour le sevrage des substituts nicotiniques chez les patients les utilisant au long cours.

et 12 mois (et 2 appels téléphoniques). L’arrêt des substituts nicotiniques était auto-rapporté par le patient et confirmé par un test de CO-exhalé.Le taux d’arrêt des substituts nicotiniques était significativement supérieur à 12 et 36 semaines, mais non significatif à 1 an (42.9% d’arrêt avec Varenicline versus 36.2% avec placebo). Un test de Mantel-Haenszel réalisé sur les 12 mois de suivi montre une supériorité significative du traitement par Varenicline avec un odds ratio de 1.83 (95%IC ; 1.43-2.35) P<0.0001.Il n’y a eu aucun événement indésirable grave. Les prévalences des nausées et

A placebo-controlled trial with varenicline for long term nicotine replacement product users P. Tonnesen, K. Mikkelsen (Copenhagen, Denmark)

Les nouvelles avancées dans l’arrêt du tabac

Dr Bertrand MICHY, Hôpital de Belle Isle – Metz.

Le repérage pour prise en charge des patients fumeur est une nécessité bien connue. Pour mémoire tout fumeur est concerné, quel que soit son âge, le plus tôt étant le plus efficace pour augmenter son espérance de vie.La prise en charge minimale du tabagisme devrait passer par tous les professionnels de santé, avec l’identification du statut de fumeur, la disponibilité en salle d’attente de brochures et affiches de prévention, la proposition du recours à l’assistance téléphonique (en « France tabac info service ») et le conseil minimal. N’oublions pas que le taux de succès du sevrage tabagique sans aucune aide n’est que de 3% par an.

études rapportent ainsi : des changements d’humeur (< 4 semaines), des difficultés de concentration (< 2 semaines), des envies impérieuses de fumer (au long cours), un accroissement de l’appétit (+5-6 kg), des insomnies, de la constipation (17%), des ulcérations buccales (40%) et une toux productive.La seconde barrière est l’ambivalence du fumeur et la fluctuation de sa motivation à arrêter.Pour le patient entrant dans un processus d’arrêt du tabac, on peut proposer des traitements médicamenteux qui diminueront l’inconfort. Ces thérapeutiques doivent néanmoins être accompagnées d’un soutien

Nous nous interrogeons d’abord sur le contenu du support psychologique que nous allons apporter au patient.Il faut initialement rappeler l’impact du tabagisme sur le patient, avec de manière objective un poids plus faible et une augmentation de la vigilance et du stress. Mais de manière subjective, les fumeurs signalent paradoxalement fumer pour diminuer leur anxiété. Cette sensation de « bien être » correspond en fait à la disparition de la sensation de manque. Ce mécanisme doit être expliqué au patient.Quelles sont les barrières qui mènent à l’échec du sevrage tabagique ? La première barrière est l’inconfort. Les

P. Hajek (London, United Kingdom), P. Tonnesen (Gentofte, Denmark), K. Fagerstrom (Kågeröd, Sweden), Y. Martinet (Vandoeuvre-Les-Nancy, France)

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psychologique. Celui-ci consiste à renforcer l’abstinence initiale et à renforcer la motivation fluctuante du patient dans le temps. Dans ce but il faut bien expliquer à notre patient les symptômes d’inconfort auxquels il sera confronté, tout en le rassurant sur leurs brèves durées dans le temps. Les mécanismes d’action des traitements seront expliqués pour que le patient comprenne leurs fonctions mais aussi leurs délais d’action et leurs limites. Une surveillance du poids est indispensable. La prise de poids est en effet une cause majeure d’échec du sevrage tabagique et demeure ensuite une peur pour le patient qui souhaiterait réessayer un sevrage.Bien entendu les morbidités du tabac et les bénéfices à court, moyen et long terme de l’arrêt sont expliqués au patient pour le convaincre d’intégrer un processus de sevrage.Pour clore cette partie relatant de la psychologie en lien avec l’arrêt du tabac, il est intéressant de rappeler quelles sont les barrières qui conduisent les praticiens à ne pas aborder la question du tabac avec leurs patients ? Les causes rapportées sont par ordre de fréquence : le manque de temps (42%), l’inefficacité de cette démarche (38%), un manque de compétence (22%) et le caractère déplaisant de ces discussions (18%)(1)

Dans la deuxième partie de cette exposée, nous allons voir quelles sont les thérapeutiques médicamenteuses efficaces.Les premières lignes usuelles sont toutes significativement efficaces comme le montrent les chiffres de la Cochrane Library.• Substituts nicotiniques versus placebo, OR 1.58 (IC95% ; 1.50-1.66) (2)

• Buproprion versus placebo, OR 1.69 (IC95% ; 1.53-1.85) (3)

• Varenicline versus placebo, OR 2.31 (IC95% ; 2.01-2.66) (4)

Qu’en est-il des associations ? • patch + libération rapide, OR 3.6 (IC95%; 2.5-5.2) (5)

• patch + buproprion, OR 2.5(IC95%; 1.9-3.4) (5)

• Varenicline + substituts nicotiniques : pas d’efficacité dans une étude avec 239 patients (manque de puissance ?)

pour arrêter de fumer.La cigarette électronique n’a pas encore fait ses preuves dans une étude de haut niveau de preuve.Les vaccins anti-nicotine sont une voie d’avenir mais encore en cours d’études.Enfin de nombreuses interrogations sont suscitées par l’utilisation du Snus dans les pays scandinaves. Il s’agit de sachets de tabac contenant très peu de nitro-amines, que l’utilisateur place entre la gencive et la lèvre. La nicotine est délivrée comme avec une cigarette en évitant les toxiques accompagnant le tabac dans les cigarettes. Le risque respiratoire, cardio vasculaire et de cancer (poumon et ORL) semble inexistant dans les études. Toutefois on note un taux de cancer du pancréas qui serait deux fois supérieur à la norme. De plus nous ne disposons pas de données chez les femmes enceintes. La question posée, outre celle des risques méconnus, est l’éventuelle possibilité de recours à ce composé pour sevrer le tabagisme. Des études suédoises semblent favorables au Snus(10).

Nous conclurons sur l’importance du dialogue avec les patients fumeurs pour les amener à l’arrêt total et définitif de la cigarette qui est un objectif prioritaire de santé publique.

mais pas d’effets secondaires majeurs en plus (6)

• Varenicline + Buproprion : une étude de phase 2, en faveur d’un bénéfice à 6 mois (7)

Comment choisir entre tous ces traitements ? Dans la pratique il convient d’associer le patient au choix de la spécialité. Pour cela on décrit brièvement les différents types de traitement et leurs modes de fonctionnement. On prend ensuite en compte les échecs passés et les traitements alors associés.En ce qui concerne la durée des traitements des études suggèrent un bénéfice à l’allongement chez des patients traités par substituts nicotiniques ou Varénicline.Enfin d’autres études suggèrent un bénéfice à débuter un traitement par substituts nicotiniques ou Varenicline avant l’arrêt du tabagisme (2)(8). A l’inverse, une réduction du tabagisme avant intervention médicamenteuse et arrêt définitif est aussi possible, sans démontrer de différence de résultats(9).Tous les protocoles de réduction de la consommation de cigarettes doivent garder l’objectif final d’un arrêt total du tabac.

Pour finir, un petit mot sur les alternatives aux traitements usuels

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Les avancées dans le traitement antibiotique des bronchectasies non mucoviscidosiques

Dr Bertrand MICHY, Hôpital de Belle Isle – Metz.

Long term azithromycin treatment: A randomised placebo-controlled trial in non-CF bronchiectasis; results from the BAT trial J. Altenburg, C. de Graaff, T. van der Werf, W. Boersma (Alkmaar, Groningen, Netherlands)

Les bronchectasies sont des dilatations des bronches et des bronchioles pulmonaires associées à des cycles inflammatoires et infectieux. L’impact sur la vie quotidienne des patients est d’autant plus important que la fréquence des exacerbations est importante. Le diagnostic de dilatation de bronches (DDB) est porté sur la tomodensitométrie haute résolution. Nous présentons ici des résultats de l’étude BAT menée en Hollande qui vise à évaluer l’efficacité d’un antibiotique, l’Azithromycine, pour son action antibiotique et anti-inflammatoire.89 patients avec DDB ont été randomisés en double aveugle contre placebo. Pour être inclus il fallait avoir présenté au moins 3 exacerbations l’année précédente.L’Azithromycine montre à 12 mois une réduction significative de la fréquence des exacerbations : 1.28/an (SD 1.32) versus

placebo 2.67/an (SD 1.95), P<0.0001. Il n’y a par contre pas de différence significative pour la fonction pulmonaire, les marqueurs inflammatoires ou la qualité de vie (St George’s respiratory questionnaire).Il n’y a pas d’évènement indésirable grave rapporté. Cependant environ un patient sur 5 a présenté de la diarrhée ou des douleurs abdominales sans que cela ne conduise à la sortie du protocole.Les principaux germes retrouvés dans les expectorations étaient l’Haemophilus Influenza et le Staphylocoque Aureus. Pseudomonas Aeruginosa n’était présent que dans 4 à 8% des expectorations. Les auteurs rapportent cependant une nette augmentation de la résistance antibiotique des germes en fin de suivi (à un an).La surveillance des effets indésirables et de l’acquisition de résistance antibiotique au long cours semble indispensable.

Des données complémentaires concernant les modifications scanographiques suite au traitement seront ultérieurement disponibles pour cette même étude.La dose minimale efficace d’Azithromycine est peut être encore à confirmer. On sait en effet que d’autres études dans d’autres indications utilisent l’Azithromycine pour son action anti-inflammatoire à la posologie de 3 fois par semaine.En conclusion le traitement antibiotique au long cours par Azithromycine chez les patients porteurs de bronchectasies semble être une prévention secondaire efficace des exacerbations. D’autres études encourageantes sont en cours actuellement, notamment avec de la Ciprofloxacine en poudre pour inhalation.

Le traitement non pharmacologique de l’exacerbation de BPCO

Dr Bertrand MICHY, Hôpital de Belle Isle – Metz.

La BPCO est une des premières causes de mortalité au monde. La prise en charge de ses exacerbations pose la question de l’efficacité de la kinésithérapie respiratoire. En effet si différentes revues de la littérature(11) ont montré une expectoration facilitée et plus productive

avec toux productive (âgés de 34 à 91ans et recrutés de novembre 2005 à avril 2008) ont été randomisés dans cette étude. 261 patients dans un groupe « kinésithérapie respiratoire active » et quotidienne avec le kinésithérapeute. Toutes les techniques de kinésithérapie

grâce à la kinésithérapie, l’intérêt à long terme n’a pas pu être mise en évidence. L’étude anglaise Matrex présentée ci-dessous avait pour objectif de répondre à cette interrogation(12).

526 patients en exacerbation de BPCO

Chest physiotherapy during exacerbations: is there an added value? JJ. Cross (Norwich, United Kingdom)

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respiratoire pouvaient être utilisées (percussion, vibration…) avec cependant l’obligation du recours à la technique ACBT (Active Cycle of Breathing Technique). Le groupe contrôle de 264 patients n’était pas un groupe placebo. En effet s’il n’y avait pas de séance quotidienne avec le kinésithérapeute dans ce groupe, la méthode ACBT était enseignée initialement aux patients. Seuls 186 patients par groupe étaient évaluables.

La technique ACBT combine trois méthodes respiratoires permettant d’évacuer le mucus des poumons : 1 - Respiration contrôlée (respiration

faible et relâchée) 2 - Exercices d’expansion thoracique

(respirations profondes, souvent avec une inspiration retenue pendant 3 secondes, suivie d’une expiration calme et spontanée)

L’analyse des coûts retrouve un faible bénéfice pour la « kinésithérapie active », sans significativité statistique.

Il est difficile de tirer des conclusions depuis cette étude pour notre pratique quotidienne. Premièrement, la comparaison ne se faisait pas avec un bras placebo. La conclusion des auteurs quant à l’inutilité de la kinésithérapie respiratoire chez le BPCO en exacerbation avec toux productive oublie la probable efficacité de l’enseignement des techniques de kinésithérapie à l’admission du patient. Deuxièmement, des études sur des sous-groupes particuliers ou dans des circonstances particulières montreraient peut être des résultats différents, comme le suggère notre pratique clinique (exemple du patient très encombré avec expectoration abondante).

3 - Méthode d’expiration forcée (expiration, un ou deux souffles).

Les objectifs principaux étaient l’évaluation de la qualité de vie à 6 mois, évaluée par le St George’s Respiratory Questionnaire (SGRQ), et la comparaison des coûts des deux techniques. Les critères secondaires étaient la fréquence des exacerbations, le nombre de ré-admission, le volume des expectorations ou encore la performance au test de marche à 6 minutes.

L’analyse en intention de traiter n’indiquait pas de différence significative à 6 mois post randomisation pour le score du SGRQ : 0.03 (IC95%, -0.14 à 0.19). Les analyses per protocole ne changent pas ce résultat. Toutes les analyses sur des critères secondaires ou sous-groupes sont en faveur d’une similitude d’efficacité des deux options thérapeutiques.

Références

1. Vogt F, Hall S, Marteau TM. General practitioners’ and family physicians’ negative beliefs and attitudes towards discussing smoking cessation with patients: a systematic review. Addiction. 2005 oct;100(10):1423–31.

2. Stead LF, Perera R, Bullen C, Mant D, Lancaster T. Nicotine replacement therapy for smoking cessation. Cochrane Database Syst Rev. 2008;(1):CD000146.

3. Hughes JR, Stead LF, Lancaster T. Antidepressants for smoking cessation. Cochrane Database Syst Rev. 2007;(1):CD000031.

4. Cahill K, Stead LF, Lancaster T. Nicotine receptor partial agonists for smoking cessation. Cochrane Database Syst Rev. 2011;(2):CD006103.

5. A clinical practice guideline for treating tobacco use and dependence: 2008 update. A U.S. Public Health Service report. Am J Prev Med. 2008 août;35(2):158–76.

6. Ebbert JO, Wyatt KD, Hays JT, Klee EW, Hurt RD. Varenicline for smoking cessation: efficacy, safety, and treatment recommendations. Patient Prefer Adherence. 2010;4:355–62.

7. Ebbert JO, Croghan IT, Sood A, Schroeder DR, Hays JT, Hurt RD. Varenicline and bupropion sustained-release combination therapy for smoking cessation. Nicotine Tob. Res. 2009 mars;11(3):234–9.

8. Hajek P, McRobbie HJ, Myers KE, Stapleton J, Dhanji A-R. Use of varenicline for 4 weeks before quitting smoking: decrease in ad lib smoking and increase in smoking cessation rates. Arch. Intern. Med. 2011 avr 25;171(8):770–7.

9. Lindson N, Aveyard P, Hughes JR. Reduction versus abrupt cessation in smokers who want to quit. Cochrane Database Syst Rev. 2010;(3):CD008033.

10. Ramström LM, Foulds J. Role of snus in initiation and cessation of tobacco smoking in Sweden. Tob Control. 2006 juin;15(3):210–4.

11. Garrod R, Lasserson T. Role of physiotherapy in the management of chronic lung diseases: an overview of systematic reviews. Respir Med. 2007 déc;101(12):2429–36.

12. Cross J, Elender F, Barton G, Clark A, Shepstone L, Blyth A, et al. A randomised controlled equivalence trial to determine the effectiveness and cost-utility of manual chest physiotherapy techniques in the management of exacerbations of chronic obstructive pulmonary disease (MATREX). Health Technol Assess. 2010 mai;14(23):1–147, iii-iv.

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Syndrome d’apnées hypopnées obstructives du sommeil, insomnie et pression positive continue

Dr Wojciech TRZEPIZUR, CHU Service de pneumologie - Angers d’après une communication du Dr XL Nguyên

Le SAHOS est classiquement associé à une somnolence diurne excessive, ce symptôme clinique étant un point important de la définition de la maladie. On associe donc facilement le ronfleur Pickwickien typique à un personnage au sommeil lourd, bruyant et prolongé du fait de son inefficacité et ayant un recours fréquent aux siestes. Les observations cliniques récentes viennent complexifier cette présentation caricaturale en suggérant que le SAHOS serait fréquemment associé à l’insomnie. Alors que les deux phénomènes étaient jusqu’ici considérés comme diamétralement opposés, plusieurs études ont montré une coexistence fréquentes des deux maladies parmi les malades référés dans les laboratoires du sommeil. Ainsi, dans les cohortes de sujets SAHOS, 39 à 50% des sujets apnéiques présentent une plainte d’insomnie considérée comme modérée à sévère à la fois sur des critères cliniques évalués par l’index de sévérité de l’insomnie (ISI) et sur des critères polysomnographiques (latence d’endormissement ou le temps d’éveil intra-sommeil allongés)(1,2). De même, dans les cohortes de sujets référés pour des problèmes d’insomnie, les enregistrements PSG révèlent que 30 à 40% des patients présentent des troubles respiratoires nocturnes (IAH>5/heure)(3).

Le SAHOS et l’insomnie sont les deux pathologies du sommeil les plus fréquentes avec une prévalence de 2 à 4 % et de 9 à 13% respectivement(4,5). De plus les études de cohortes nous apprennent que la prévalence des deux pathologies augmente avec l’âge et que le risque statistique d’avoir les deux maladies associées est plus important

pas être un frein à l’acceptation du traitement(6).

Lors de l’ERS d’Amsterdam, la même équipe a présenté des données sur l’effet du traitement par PPC sur les symptômes d’insomnie chez les patients adressés pour SAHOS au laboratoire du sommeil. 80 patients ont été inclus, traités par PPC auto-pilotée et suivis sur une période de 24 mois. Des questionnaires évaluant l’insomnie (ISI), la qualité du sommeil (Pittsbourg Sleep Quality Index) la somnolence diurne (Echelle de Somnolence d’Epworth) et la dépression (QD2A) ont été réalisés avant mise sous traitement et à la fin de l’étude. Le suivi a montré une diminution de l’insomnie évaluée par l’ISI sur l’ensemble de la population étudiée (13,7±5,7 à T0 vs 8,2±6,3 à T24) ainsi qu’une régression de la somnolence et une amélioration de la qualité du sommeil. La moitié des patients qui présentaient une insomnie associée au moment du diagnostic de SAHOS a montré une diminution considérée comme cliniquement significative de l’insomnie (diminution de l’ISI de 9 points). Cette amélioration était indépendamment associée au degré d’observance de la PPC, et à la sévérité du SAHOS.

ConclusionCes données récentes nous apprennent que SAHOS et insomnie ne doivent plus être considérés comme des entités opposées chez les patients se présentant en consultation du sommeil. Aucun lien physiopathologique ne peut être à ce jour affirmé. Une coexistence indépendante des deux maladies

chez les sujets âgés. Il n’existe pas de données épidémiologiques permettant de préciser la prévalence de la coexistence des deux maladies au sein de la population générale. De même, il reste difficile de définir avec certitude s’il existe un lien de causalité entre les deux. Le caractère éveillant des troubles respiratoires nocturnes a été avancé pour expliquer la coexistence des deux anomalies. Cependant, d’autres études physiopathologiques nous apprennent que la privation ou la fragmentation du sommeil, peuvent majorer l’IAH. Autant il est donc difficile de statuer sur les rapports de causalité entre les deux maladies, autant les études cliniques s’accordent pour affirmer l’effet délétère de l’association des deux pathologies sur les conséquences neuropsychologiques (somnolence, vigilance, dépression)(1)

et possiblement sur les effets cardio-vasculaires.

Le traitement par PPC pose un problème d’acceptation important, 30 à 50% des patients ne se traitant plus 5 ans après le diagnostic. On pourrait s’attendre à ce que les patients apnéiques et insomniaques posent un problème encore plus important d’acceptation et d’observance du traitement. En 2010, Nguyen et col se sont intéressés à la compliance au traitement par PPC de 73 patients présentant à la fois un SAHOS et un problème d’insomnie et de 75 patients apnéiques seul. A six mois de traitement, l’observance des sujets SAHOS et insomniaques n’était pas statistiquement différente des sujets SAHOS sans problème d’insomnie (3,7±2,3 vs 4,2±2,3 h/nuit). L’existence d’une insomnie associée au SAHOS ne semble donc

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du fait de leurs prévalences respectives importantes reste une hypothèse tout aussi plausible. Le traitement par PPC peut être proposé avec une perspective d’observance identique aux autres malades et un impact favorable sur l’insomnie dans près de la moitié des cas. La PPC ne peut cependant pas à elle seule résoudre l’ensemble de ces cas complexes et de nouvelles approches thérapeutiques intégrées associant PPC, approches médicamenteuses ou techniques cognitivo-comportementales seront probablement nécessaires(7).

Références

1. Krakow B, Melendrez D, Ferreira E, et al. Prevalence of insomnia symptoms in patients with sleep-disordered breathing. Chest 2001; 120:1923-9.

2. Smith S, Sullivan K, Hopkins W, Douglas J. Frequency of insomnia report in patients with obstructive sleep apnoea hypopnea syndrome (OSAHS). Sleep Med 2004; 5:449-56.

3. Krakow B, Melendrez D, Pedersen B, et al. Complex insomnia: insomnia and sleep-disordered breathing in a consecutive series of crime victims with nightmares and PTSD. Biol Psychiatry 2001; 49:948-53.

4. Young T, Palta M, Dempsey J, Skatrud J, Weber S, Badr S. The occurrence of sleep-disordered breathing among middle-aged adults. N Engl J Med 1993; 328:1230-5.

5. Shochat T, Umphress J, Israel AG, Ancoli-Israel S. Insomnia in primary care patients. Sleep 1999; 22 Suppl 2:S359-65.

6. Nguyen XL, Chaskalovic J, Rakotonanahary D, Fleury B. Insomnia symptoms and CPAP compliance in OSAS patients: A descriptive study using Data Mining methods. Sleep Med; 11:777-84.

7. Wickwire EM, Collop NA. Insomnia and sleep-related breathing disorders. Chest; 137:1449-63.

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Prochaine parution de la lettre “Inspirer” :

1er semestre 2012

La lettre Inspirer est publiée par la Fédération ANTADIR - 66 boulevard Saint- Michel 75006 Paris Tél. : 01 56 81 40 60 - Fax : 01 56 81 40 61 - Site internet : www.antadir.com

Directeur de la publication : Pr Jean-François MUIRComité de rédaction : Dr Liliya Belenko-Gentet, Dr Bertrand Michy, Pr Cyril Schweitzer, Dr Wojciech Trzepizur, Dr Dan Veale.Réalisation : ICO ImprimerieTirage : 4 000 exemplaires

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