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Ecole Régionale Supérieure de la Magistrature NUMERO 04 - SEPTEMBRE 2014 Version Electronique sur http://revue.ersuma.org Revue semestrielle d’Etudes, de Législation, de Jurisprudence et de Pratique Professionnelle en Droit des Affaires Droit des Affaires - Pratique Professionnelle l’ERSUMA Revue de Revue de l’ERSUMA Numéro 04 - Septembre 2014 Editorial Doctrine Etudes Législation Jurisprudence : Commentaires d’arrêts Pratique professionnelle Bibliographie

N°4 SEPTEMBRE 2014 - Revue de l'ERSUMA

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    Un Etablissement de formation,de spcialisation, de recyclage,

    de perfectionnement et de rechercheen Droit des Affaires de lOHADA

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    NUMERO 04 - SEPTEMBRE 2014 Version Electronique sur http://revue.ersuma.org

    Revue semestrielle dEtudes, de Lgislation, de Jurisprudence et de Pratique Professionnelle en Droit des Affaires

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    Droit des Affaires - Pratique ProfessionnellelERSUMARevue deRevue de lERSUMA

    Numro 04 - Septembre 2014

    Editorial

    Doctrine

    Etudes

    Lgislation

    Jurisprudence : Commentaires darrts

    Pratique professionnelle

    Bibliographie

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    DROIT DES AFFAIRES PRATIQUE

    PROFESSIONNELLE

    NUMERO 4

    Septembre 2014

  • 2

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    DIRECTEUR DE PUBLICATION

    Dr. Flix ONANA ETOUNDI, Magistrat, Enseignant-Chercheur HDR, DIRECTEUR GENERAL de lERSUMA

    COMITE DE REDACTION

    Dr. Gourouza Magagi ZEINABOU ABDOU, Assistante, Facult des Sciences

    Economiques et Juridiques, Universit Abdou Moumouni de Niamey, Niger

    Dr. Louis Jean Bedel TCHOUAMBIA TOMTOM, Assistant la FSJP de

    lUniversit de Douala, Cameroun

    Dr. Dsir GATCHOUP TCHINDA, Assistante, Facult des Sciences Juridiques et

    Politiques, Universit de Yaound 2, Cameroun

    Dr .Karel Osiris Coffi DOGUE, (LL.D. Montral), Chef des Services Etudes,

    Formations et Recherche, ERSUMA

    Dr. Flix FANOU, Universit Cheick Anta Diop de Dakar, Sngal

    Dr. Marlize Elodie NGNIDJIO TSAPI, Facult des Sciences Juridiques et

    Politiques, Universit de Yaound 2, Cameroun

    Mohamadou BOYE, Matre-Assistant Associ, Universit Gaston Berger de

    Saint-Louis, Sngal

    Pr. Louis MARQUIS, Avocat, Ecole de Technologie Suprieure, Montral, Canada

    Dr .Toussaint KWAMBAMBA BALA, Professeur Associ { lUniversit de

    Bandundu et { lUniversit Catholique du Congo, Avocat

    Dr. AKONO MINLO Ruben, Enseignant la Facult des Sciences Juridiques et Politiques de lUniversit de Ngaoundr, Cameroun

    Dr. Robert ASSONTSA, Charg de Cours { la FSJP de lUniversit de Dschang,

    Cameroun

    Me Jrmie WAMBO, Assistant-Juriste, CCJA

    SECRETARIAT DE LA REVUE :

    Dr. Karel Osiris Coffi DOGUE, (LL.D. Montral), Chef des Services Etudes,

    Formations et Recherche, ERSUMA

    Ghislain OLORY-TOGBE, (M.Sc.), Juriste de Recherche, ERSUMA

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  • 5

    SOMMAIRE

    Editorial ......09 Doctrine

    1. La vente lectronique dans les espaces UEMOA, CEDEAO et OHADA, par Dr

    Gourouza Magagi ZEINABOU ABDOU, . 11

    2- La poursuite des infractions pnales OHADA devant les juridictions dinstances

    camerounaises: o est pass le ministre public ? , par Louis Jean Bedel

    TCHOUAMBIA TOMTOM, ....................... 32

    3- Lapport en industrie en droit OHADA : une nouvelle approche, par Abel

    BILLONG BILLONG, .. 57

    4- La titrisation dans lespace UEMOA, par Mouhamadou BOYE, .... 78

    5- La problmatique de la protection juridique des titulaires de cartes bancaires

    dans le traitement des rclamations dans lespace UEMOA , par Coulibaly Mamadou

    KOUNVOLO, ... 109

    6- Le dlit diniti dans les marchs boursiers de lespace OHADA, par Dr Dsir

    GATCHOUP TCHINDA, . 133

    7- Regard critique et pratique sur lagent des srets de lOHADA, par Dr Karel

    Osiris Coffi DOGUE, (LL.D. Montral), .... 159

    8- La place du recours en cassation en droit communautaire OHADA , par Dr Flix

    FANOU, . 181

    9- Le statut de lentreprenant dans lAU.DCG. Rvis : entre le pass et lavenir, par

    Dr Michel GONOMY, .. 204

    10- Les mthodes de cotation dans les marchs boursiers rgionaux de lAfrique

    subsaharienne : essai danalyse juridique, par Dr. Marlize Elodie NGNIDJIO TSAPI,

    .. 215

    11- Mdiation et OHADA, par Ibii OTTO, . 237

    12- Analyse du statut de membre dune socit cooprative et ses implications

    juridiques au regard de lacte uniforme de lOHADA, par Dr Alioune Badara

    THIAM. 258

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    Etudes

    1- Linscription de faux douanire dans lespace OHADA, par Dr Beauclair NJOYA

    NKAMGA, .. 278

    2- Dcouvrir et faire dcouvrir la frontire entre la prvention et le rglement des

    diffrends et le droit commercial international uniforme , par Pr. Louis MARQUIS,

    .. 295

    3- Le ministre public et la mise en mouvement de laction civile en droit de la

    proprit intellectuelle dans lespace OHADA, par Samuel Emmanuel NGOO et

    Fabrice NGUELE MBALLA, . 303

    4- Le rgime de linsuffisance dactif en droit OHADA des procdures collectives ,

    par Hubert TSAGUE DONKENG, . 317

    5- La rvision de l'AUDCG : ouverture la dmatrialisation et aux changes

    lectroniques scuriss, par Me Thierry PIETTE-COUDOL, . 331

    6- Les imprcisions du lgislateur de la Rpublique Dmocratique du Congo dans

    la dtermination de la juridiction comptente en matire de saisies dans la loi-

    organique n 13/ 011-b du 11 avril 2013 , par Dr Toussaint KWAMBAMBA BALA,

    . 354

    7- Rflexions sur les droits de lexploitant de mines en droit camerounais , par

    Dr AKONO MINLO Ruben, . 362

    Lgislation et Jurisprudence

    1- Un mauvais bourgeon en droit camerounais du contentieux de lexcution

    force : lautorisation assigner bref dlai (rflexions partir de lordonnance

    N 013/ce du 28 fvrier 2011 rendue par la Cour dAppel du Littoral dans laffaire

    Dame MBENDE Claire c/ socit africaine dassurance et de rassurance (SAAR)) ,

    par Dr Robert ASSONTSA, .. 382

    2- Premires applications de lacte uniforme portant organisation des procdures

    simplifies de recouvrement et des voies dexcution en Rpublique

    Dmocratique du Congo : cas des tribunaux de commerce de la ville province de

    Kinshasa, par Mme Marie KITETE LOSAMBA, 397

    3- Les entreprises publiques congolaises (RDC) transformes en socits

    commerciales lpreuve de lacte uniforme relatif au droit des socits

    commerciales et du groupement dintrt conomique , par Gilbert TONDUANGU

    KONGOLO, ........... 418

  • 8

    4- Bref aperu du rglement de procdure de la Cour Commune de Justice et dArbitrage de lOHADA tel que modifi le 30 janvier 2014 Ouagadougou, par Me Jrmie WAMBO, .. 437

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    EDITORIAL La Revue de lERSUMA : une rfrence acadmique et une autorit scientifique

    plus que confirmes !

    La Revue de lERSUMA confirme sa notorit acadmique et son autorit scientifique

    avec sa rgulire parution, le nombre lev, la qualit et la diversit de ses articles. Cette

    cinquime parution (numro 4) sinspire de lactualit OHADA et de la ligne de

    dveloppement et de consolidation des activits de lOrganisation dfinie par le Conseil

    des Ministres, comme si les contributeurs sen taient inspirs.

    En effet, le contenu se veut focalis dans une premire ligne directrice sur les rvisions

    du Droit des socits commerciales et du GIE, du droit des srets, du droit commercial

    gnral et du rglement de procdure de la CCJA. Il propose ainsi au lecteur des articles

    sur le nouveau rgime de lapport en industrie, la titrisation, lagent des srets,

    lentreprenant, la vente et les changes lectroniques dmatrialiss ainsi quun aperu

    du nouveau rglement de procdure de la CCJA.

    Dans une deuxime ligne directrice, des axes anciens, remis au got de nouvelles

    problmatiques ainsi que des thmes de droit communautaire africain sont analyss.

    Cest ainsi que le lectorat pourra se satisfaire de trois articles diffrents portant sur le

    droit pnal des affaires, de deux autres sur le contentieux de lexcution force ainsi que

    de deux contributions portant sur le dlit diniti et sur les mthodes de cotation

    boursire, toutes revisites la lumire des volutions rcentes des matires

    concernes.

    Enfin, dans une troisime catgorisation, le sommaire de ce numro permet de constater

    que la mdiation et les autres modes de rglement des diffrends font lobjet de deux

    contributions indites et sans doute utiles pour les spcialistes de la matire.

    Il ne nous reste plus qu{ souhaiter, { nos lecteurs de parcourir ce numro avec autant

    de plaisir que nous avons eu dabngation { finaliser sa conception et sa rdaction.

    Le Directeur Gnral

    Flix ONANA ETOUNDI

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    LA VENTE ELECTRONIQUE DANS LES ESPACES UEMOA, CEDEAO ET OHADA

    Dr. GOUROUZA MAGAGI Zeinabou ABDOU

    Assistante la Facult des Sciences Economiques et Juridiques

    Universit Abdou Moumouni de Niamey

    INTRODUCTION

    La vente1 est le contrat par lequel, une personne, le vendeur , sengage { transfrer la proprit de biens dtermins une autre personne, lacheteur , qui, en change, sengage { payer le prix convenu2. Cette dfinition de la vente est large et rejoint celle retenue par la Convention de Vienne du 11 avril 1980 (CVIM)3 selon laquelle ni la nationalit des parties ni le caractre civil ou commercial des parties au contrat ne sont pris en considration pour lapplication de la prsente Convention 4. LActe Uniforme de lOrganisation pour lHarmonisation du Droit des Affaires en Afrique (OHADA)5 sur le droit commercial gnral6 qui nexclut pas lapplication du droit

    1 La prsente tude ne traite que de la vente des choses mobilires, corporelles ou incorporelles. La vente internationale immobilire est rgie le plus souvent par des rgles particulires qui prennent en comptent la spcificit de la vente immobilire, mais aussi les dispositions du droit substantiel de lEtat sur le territoire duquel limmeuble est tabli. 2 Cette dfinition de la vente est dduite des droits et obligations dcrites par le code civil (V. art. 1582 du code civil nigrien), par lActe Uniforme OHADA portant sur le droit commercial gnral et par la Convention sur la Vente Internationale de Marchandises (CVIM) de 1980 de la Commission des Nations Unies pour le Droit Commercial International (CNUDCI). A noter que la CNUDCI a t cre le 17 dcembre 1966 par lAssemble gnrales des Nations Unies lors de sa 21me session par sa rsolution n2205. Elle encourage lharmonisation et lunification progressives du droit commercial international. Et lAUDCG sest inspir de la CVIM ; ce qui explique lexclusion de la vente aux consommateurs, de services et de certains types de marchandises par les deux Traits. Sur linfluence de la CVIM sur luniformisation du droit en Afrique V. dans ce sens Alain Fnon, "Linfluence de la CVIM sur le nouveau droit africain de la vente commerciale , Penant 853. 3 De nombreux pays africains ne sont pas signataires de cette Convention. Les Etats africains layant ratifi sont le Bnin, le Gabon, le Libria, la Mauritanie, lOuganda et la Zambie. 4 Cf. art. 1-3 de la Convention de Vienne. Celle-ci ne sapplique quaux seules ventes de marchandises lorsque les parties sont tablies sur le territoire dEtats diffrents ; { lexclusion notamment, des contrats de fourniture de marchandises fabriquer ou produire lorsque lacheteur produit une part essentielle des lments, les contrats complexes associant une prestation de service { lobligation pour le vendeur, les ventes sur saisie par autorit de justice ou aux enchres. 5 Organisation pour lHarmonisation en Afrique du Droit des Affaires. 17 Etats africains sont parties au Trait de lOHADA : Bnin, Burkina-Faso, Cameroun, Centrafrique, Comores, Congo, Cte dIvoire, Gabon, Guine Bissau, Guine Conakry, Guine Equatoriale, Mali, Niger, Rpublique Dmocratique du Congo, Sngal, Tchad. Le Trait relatif { lharmonisation du droit des affaires en Afrique a t sign Port Louis le 17 octobre 1993, et rvis Qubec Le 17 octobre 2008. 6 LAUDCG. Il a t adopt le 15 octobre 2010, il remplace et abroge lacte uniforme du 17 avril 1997 portant sur le droit commercial gnral. Il comporte 307 articles repartis en cinq (5) livres. Consacrs respectivement au statut du commerant (Livre I), au Registre du commerce et du crdit mobilier (Livre II), au bail commercial et au fonds de commerce (Livre III), aux intermdiaires de commerce (Livre IV) et enfin { la Vente commerciale (Livre V). Il faut relever quavant ladoption de

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    commun, a adopt cependant une conception restrictive de la vente en limitant son champ dapplication { la vente commerciale . En effet, larticle 2347 de lActe Uniforme sur le droit commercial gnral (AUDCG) prvoit que les dispositions du Livre VIII ne sappliquent quaux contrats de vente de marchandises8 entre commerants9, personnes physiques ou morales. Larticle 235 du mme Acte uniforme exclut galement du champ dapplication du Livre VIII certaines catgories de vente notamment celles aux consommateurs10, celles dans lesquelles de faon prpondrante, une partie fournit une main duvre ou des services, les ventes aux enchres, les ventes sur saisies par autorit de justice, les ventes de valeurs mobilires, deffets de commerce ou de monnaies, les mobilisations et autres oprations sur crances ou instruments financiers ; les ventes de navires, bateaux, aroglisseurs et aronefs et les ventes dlectricit11.

    Au niveau de lUnion Economique et Montaire Ouest Africaine (UEMOA)12 et de la Communaut Economique des Etats de lAfrique de lOuest (CEDEAO)13, il nexiste pas de textes spcifiques sur la vente. Cest donc le droit commun contenu dans les codes civils14 des Etats qui sapplique. Or il a t constat que les ventes se font le plus souvent par des moyens lectroniques. C'est la raison pour laquelle les lgislations africaines notamment, ont pris en compte cette nouvelle donne. Aussi, pour se conformer { lre

    lAUDCG, la plupart des Etats de lAfrique de lOuest et de lAfrique Centrale ne disposaient de dispositions spcifiques la vente commerciale. 7 Lart. 234 correspond { lancien art. 202 de lAUDCG. 8 Sur une abondante jurisprudence, voir notamment, larrt de la Cour Suprme de Cte dIvoire, arrt n57 du 06 fvier 2003, Ohadata J-03- 233 ; TGI de Mfoundi, jugement civil n246 du 4 mars 2002, Ohadata J-04-216 ; TGI, Dakar, jugement n117 du 15 janv. 2002, Ohadata J-05-90. 9 Il peut sagir selon cet article dun commerant, personne physique qui exerce les actes de commerce dfinis par larticle 3, { titre de profession habituelle, ou de personnes morales (socits commerciales) dfinies par larticle 6 de lActe Uniforme sur les Socits commerciales et les Groupements dIntrt Economique (AUSGIE). 10 Le consommateur est une personne qui agit, selon lAUDCG, { des fins qui nentrent pas dans le cadre de son activit professionnelle. Il sagit plus spcifiquement, selon lart. 236-a) des ventes de marchandises achetes pour un usage personnel, familial ou domestique moins que le vendeur, un moment quelconque avant la conclusion ou lors de la conclusion du contrat, nait pas su et nest pas cens savoir que ces marchandises taient achetes pour un tel usage . Sur le consommateur, V. Civ. 24 janvier 1995, D. 1995, J., note Plaisant (G). Le consommateur est toute personne qui agit en dehors de sa comptence professionnelle . 11 Cf. art. 235 et 236 AUDCG. 12 LUEMOA compte 8 Etats membres { savoir Bnin, Burkina Faso, Cte dIvoire, Guine Bissau (depuis le 2 mai 1997), Mali, Niger, Sngal et Togo. Son Trait a t sign le 10 janvier 1994 et sa mission est de raliser lintgration conomique des Etats membres, { travers notamment le renforcement de la comptitivit des activits conomiques dans le cadre dun march ouvert et concurrentiel et dun environnement juridique scuris et rationnel. 13 Actuellement, lespace couvert par la CEDEAO stend sur 15 Etats membres: Bnin, Burkina Faso, Cap-Vert, Cte dIvoire, Gambie, Ghana, Guine Bissau, Libria, Mali, Niger, Nigeria, Sngal, Sierra Lone, Togo. La Mauritanie a quitt la CEDEAO en 2010. Elle a t cre le 28 mai 1975 et est charge de promouvoir la coopration et lintgration avec pour objectif de crer une union conomique et montaire ouest-africaine. Tous les Etats membres de lUEMOA sont galement membres de la CEDEAO. 14 Au Niger par exemple, ce sont les dispositions des articles 1582 1701 du code civil qui traitent de la vente. Au Sngal, la vente est rgie par les art. 264 371du code des obligations civiles et commerciales, au Cameroun .Il faut souligner que dans la plupart des Etats dexpression franaise, le code civil applicable tire son essence du code civil franais davant les indpendances, sous rserve des diffrentes modifications intervenues dans les lgislations de chaque Etat, { lexception de la Guine Equatoriale de tradition juridique hispanophone et de la Guine Bissau de tradition juridique lusophone.

  • 13

    des Technologies de lInformation et de la Communication15 et lapparition de nouveaux modes de preuve, lUEMOA, la CEDEAO et lOHADA, ont adopt des nouvelles rgles16 visant { rsoudre les difficults souleves { loccasion des transactions commerciales conclues distance : il sagit du commerce lectronique17 communment e-commerce.. Ce dernier se dfinit comme l'activit conomique par laquelle une personne propose ou assure, distance et par voie lectronique, la fourniture de biens et la prestation de services 18. En effet, ces trois institutions, lune sous-rgionale, et les deux autres vocation rgionale, distinctes du point de vue de leurs missions19, ont d incorporer le support lectronique dans leur environnement juridique alors mme que laccs { internet est encore trs limit dans certains membres pays dont les populations, dans leur grande majorit, sont fortement analphabtes.

    En rponse lamlioration et { la performance des moyens techniques, lUnion Economique et Montaire Ouest Africaine (UEMOA) a adopt un dispositif juridique20 relatif la scurisation des paiements lectroniques par la reconnaissance dans la zone de prdilection la preuve lectronique. A travers notamment le Rglement n15/2002/CM/UEMOA21 relatif au systme de paiement dans les Etats membres de lUEMOA qui constitue un des volets essentiels de laction de lUEMOA pour adapter la lgislation des Etats aux nouveaux enjeux de la mondialisation et au dveloppement du commerce lectronique.

    Au niveau de la CEDEAO, le cadre juridique des transactions commerciales repose sur lActe additionnel A/SA.SA.2/01/10 du 16 fvrier 2010 portant transactions lectroniques22. Ce texte vise crer un cadre harmonis par la rglementation des transactions lectroniques et reconnait en consquence la valeur probatoire de lcrit

    15 TIC. Les changes, les transactions se font le plus souvent par des moyens lectroniques. C'est la raison pour laquelle les diffrentes lgislations, africaines notamment, ont pris en compte cette ralit nouvelle. 16 Des dispositions similaires existent en France et ont t introduites dans la lgislation nationale par la loi n2000-230 du 13 mars 2000 portant adaptation du droit de la preuve aux technologies de linformation et relative { la signature lectronique. Ces dispositions ont modifi les articles 1315 et suivants du Code civil. 17 Le e-commerce a fait un chiffre daffaires de 320 milliards deuros en 2011. Voir Ch. FERAL-SCHUHL, Cyberdroit, Le droit { lpreuve de lInternet, Dalloz, 5e dition, 2008, p. 245. 18 17 Lart. 8 de la loi sngalaise n 2008-08 du 25 janvier 2008 sur les transactions lectroniques retient dailleurs la mme dfinition du commerce lectronique. 19 La principale mission assigne { lUEMOA est lintgration conomique et montaire, celle de la CEDEAO est la promotion de la coopration et de lintgration et lOHADA vise surtout et avant tout la scurisation des transactions commerciales dans lespace commun harmonis et unifi. 20 Ladoption de ce cadre juridique a t faite avec linitiative de la Banque Centrale des Etats de lAfrique de lOuest (BCEAO) de lUEMOA dans le cadre de son Programme de modernisation des systmes de paiement. Soulignons au passage que lmission de la monnaie unique de lUnion est confie { la BCEAO. Elle assure entre autres missions, la surveillance du bon fonctionnement des systmes de paiement de la zone UEMOA et dispose { ce titre dun pouvoir rglementaire, de gestion et de contrles desdits systmes. 21 Ce rglement vient remplacer la loi uniforme de 1995 relative { lharmonisation de la rglementation bancaire dans les pays membres de lUEMOA. Mais cette loi na pas pris en compte les progrs technologiques intervenus dans les systmes de paiement. 22 Le Prambule de lActe Additionnel de la CEDEAO prcise que les transactions lectroniques sont en plein dveloppement et portent notamment sur la vente (cf. paragraphe 9 dudit Prambule).

  • 14

    lectronique. Il sapplique { toute transaction de quelque nature que ce soit, prenant la forme dun message lectronique.

    Au Niveau de lOHADA, cest le nouvel Acte uniforme OHADA23 adopt Lom le 15 dcembre 2010 qui introduit le chantier de la signature lectronique dans le cadre de linformatisation du Registre du Commerce et du Crdit mobilier (RCCM)24. L'amlioration du texte relatif au droit commercial (AUDCG) vise au renforcement de la scurit juridique et judiciaire dans l'excution des contrats commerciaux 25. Les mesures ainsi adoptes doivent permettre la modernisation et linformatisation du RCCM et terme inciter les oprateurs conomiques { sinformer en temps rel et de faon fiable sur leurs potentiels partenaires ou sur les garanties offertes par leurs dbiteurs de la sous-rgion.

    Les rgles minimales ainsi adoptes dans les diffrents espaces (UEMOA, CEDEAO et lOHADA26) prennent en compte la fois les modes contemporains de conclusion des contrats, et leur dimension internationale tout en facilitant aux ressortissants de leurs Etats membres la conclusion des contrats notamment de vente lectronique. Le commerce lectronique constitue une nouvelle technique de vente plus quun contrat de distributions de biens ou de prestations de service. Il se caractrise par trois mots : limmatrialit, linteractivit et linternationalit 27, en intgrant les normes internationales qui ignorent les frontires.

    Parmi les contrats de vente lectronique, nous nous intresserons ici aux seuls contrats internationaux28, car le problme de la dtermination de la loi applicable ne se pose gure dans un contrat interne qui relve imprativement du droit national29. Or un contrat est international30 (par nature) ds lors quil transcende les frontires et les distances entre les personnes.

    23 Les dispositions relatives aux moyens technologiques constituent lune des innovations majeures intgres dans lActe Uniforme OHADA relatif au droit commercial gnral. 24 Sagissant du Registre de Commerce et du Crdit Mobilier, chaque Etat Partie dispose d'un RCCM ou de plusieurs et chaque Etat Partie dispose d'un Fichier National o sont centraliss les dossiers reus par le(s) RCCM et le Fichier Rgional est situ au niveau fdral de l'OHADA la Cour Commune de Justice et dArbitrage (CCJA) d'Abidjan. 25 Thierry Piette- Coudol, Rvision de lAUDCG : ouverture la dmatrialisation et aux changes lectroniques scuriss, op. cit. p. 2, article publi sur internet, avril 2011. 26 Voir sur ce sujet Justine Diffo Tchunkam, Droit des activits conomiques et du commerce lectronique Lesprit du droit commercial gnral issu de la rforme du 15 dcembre 2010, p. 65 -66. 27 Philippe Le Tourneau, Contrats informatiques et lectroniques, D., 3me d., 2004, op. cit., p.281 28 Le contrat international est celui qui prsente lui-mme et directement un lment de rattachement avec ltranger. Il sagit selon la jurisprudence de celui qui se caractrise par un mouvement de flux et de reflux , de valeurs, de services ou de biens au travers des frontires ou par le fait quil se rattache des normes juridiques manant de plusieurs Etats. Elle a admis aussi un critre souple selon lequel le contrat international est celui qui porte sur une opration qui met en jeu les intrts du commerce international . 29 Voir ce propos, C. Kessedjian, les dangers lis un mauvais choix du droit applicable , RIDC 1995, n2, p. 373 ; commerce lectronique et comptence juridictionnelle , Confrence de la Haye de droit international priv, Rapport des travaux, Ottawa, doc. Pr. n12, aot 2000 ; consultable sur www.hcch.net/f/conventions. 30 Sur le caractre international dune vente, V. Bernard JADAUD et Robert PLAISANT, Droit du commerce international, 4me d., Paris, Dalloz, 1990, p.92 ; V. HEUZE, La vente internationale de marchandises. Droit uniforme, Paris, LGDJ, 2000, p. 27.

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    Le choix du contrat de vente lectronique31 se justifie pour la simple raison que le commerce lectronique se fait en gnral par la vente. En plus que, le contrat tant la technique privilgie de tout change conomique, la rencontre du contrat et du commerce tant invitable 32. Mais ce type de commerce est effectu par le vecteur (indirect et immatriel) des technologies de linformation et de la communication de linternet.

    Le cadre juridique prvoyant lutilisation du numrique dans les changes et les procdures commerciaux dans les espaces UEOMA, CEDEAO et OHADA, se limite respectivement au Rglement de lUEMOA sur le systme de paiement dans les Etats membres de lespace, { lActe Additionnel /SA.SA.2/01/10 du 16 fvrier 2010 portant transactions lectroniques dans lespace de la CEDEAO et { lAUDCG en attendant ladoption de lActe Uniforme OHADA sur le droit des contrats33. Nanmoins , certains Etats parties ces diffrents traits ont prvus un niveau purement local des textes applicables aux activits et au commerce lectronique. Cest le cas du Sngal, du Cameroun et du Burkina-Faso qui ont adopt une lgislation spcifique en la matire : Loi sngalaise n2008-08 du 25 janvier 2008 sur les transactions lectronique ; Loi n2010/21 du 21 dcembre 2010 rgissant le commerce lectronique au Cameroun et la Loi n 045-2009portant rglementation des services et des transactions lectronique au Burkina Faso.

    LActe Additionnel de la CEDEAO et le Rglement de lUEMOA ont prvu expressment lutilisation de la voie lectronique pour conclure des transactions. Mais lAUDCG/OHADA ne prvoit lutilisation des procdures lectroniques que dans le cadre de linformation du Registre du Commerce et du Crdit mobilier notamment pour les demandes ou formalits prvues par ledit Acte Uniforme ou par tout autre Acte Uniforme ou par toute autre rglementation. Ces demandes ou formalits peuvent tre effectues par voie lectronique ds lors quelles peuvent tre transmises et reues par cette voie par leurs destinataires 34. Il sagit l{ dune dmatrialisation prudente des oprations et des procdures 35. LAUDCG na pas prcis de faon expresse lutilisation de la voie lectronique pour conclure une vente commerciale, mais son art. 240 prvoit implicitement cette possibilit en disposant que le contrat de vente commerciale peut tre crit ou verbal ; il nest soumis { aucune condition de forme. Il peut tre prouv par tout moyen . Aux termes de cette disposition, lcrit doit sentendre de toute communication utilisant un support crit, y compris le tlgramme, le tlex ou la tlcopie 36, et pourquoi pas linternet. Sagissant dune vente commerciale conclue sur support papier ou support lectronique, dans un Etat membre de lOHADA, les

    31 La vente lectronique nest pas le seul type de contrat qui se ralise { distance ; il y a aussi des formules anciennes de contrats distance notamment le contrat par correspondance, par tlphone, par tlcopie ou par minitel (qui commence disparaitre). V. Philippe Le Tourneau, contrats informatiques et lectroniques, D., 3me d., 2004, p. 279 -28 32 Justine Diffo Tchunkam, op. cit. 67 33 Projet dActe uniforme relatif au droit des contrats. 34 Cf. art. 79 AUDCG. Lalina 2 dudit article prvoit par contre les changes ou transmissions lectroniques faisant lobjet de lgislations particulires sont exclues du champ dapplication du Livre V de lAUDCG. 35 Justine Diffo Tchunkam, Actualit et perspective du droit OHADA, 36 Ndiaw Diouf, La vente commerciale, communication prsente lors de la formation continue des magistrats, ERSUMA.

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    dispositions du Livre VIII portant sur la vente commerciale37 peuvent trouver application.

    Le contrat de vente lectronique soulve toutefois certaines difficults juridiques, dont entre autres question relative aux conditions de formation et de validit de la vente lectronique dans le dbat judiciaire38 la lumire de la multiplicit et de la diversit des textes -rgionaux et sous rgionaux39 - (I), mais aussi la question de la dtermination de la loi applicable au dit contrat quand on sait que les rgles de droit international priv le rgime applicable aux conflits de loi ont t conues pour un monde physique et non dmatrialis (II).

    I. LES CONDITIONS SPECIFIQUES DE FORMATION ET DE VALIDITE DE LA VENTE ELECTRONIQUE DANS LES ESPACES UEMOA, CEDEAO ET OHADA

    Quel est le champ dapplication des textes diffrents textes ? Larticle 2 de lActe Additionnel de la CEDEAO, prvoit que ce dernier sapplique notamment { toute transaction lectronique de quelque nature quelle soit, prenant la forme dun message lectronique . Le champ dapplication de lActe Additionnel est vaste et couvre toute transaction lectronique, quelle soit commerciale ou non, { lexception des actes viss { larticle 3 dudit acte40.

    Quant { lAUDCG, il sapplique { toute vente commerciale conclue par quel que soit la forme et pouvant tre prouv par tout moyen 41.

    Enfin, concernant celui du Rglement de lUEMOA, il ne vise que certains participants dtermins et certaines oprations , en loccurrence les transactions bancaires et financires et les systmes de paiement42. Si ce Rglement sapplique aux transactions bancaires conclues par certains participants, il sapplique alors au contrat de vente lectronique. Le champ dapplication de ce texte est donc limit aux oprations de banque et aux systmes de paiement. Ds lors, la question de la valeur

    37 A noter que les dispositions de lActe uniforme sur la vente commerciale ont un caractre suppltif { lexception des articles 235 et 236. Les parties peuvent donc en carter lapplication par convention contraire. En plus, ces dispositions doivent tre combines avec les usages de la profession commerciale. 38 La question de ladmissibilit et de la recevabilit de la preuve lectronique a t rgle par plusieurs lgislations nationales (Loi sngalaise n2008-08 du 25 janvier 2008 sur les transactions commerciales, sous rgionales (UEMOA), rgionales (OHADA et CEDEAO). Sur ladmissibilit de la preuve par la Cour de Cassation franaise voir nnotamment Voir aussi, les dveloppements dAbdouramane Ouattara, la preuve lectronique Etude de droit compar Afrique, Europe, Canada, p. 42- 43 39 Sur la question de la multiplication des organisations en charge de lintgration conomique voir notamment, Sadou Nourou Tall, La CEDEAO et LUEMOA : concurrence ou complmentaire ?; Nouvelles Annales africaines, N1, 40 Larticle 3 de lActe Additionnel de la CEDEAO du 16 fvrier 2010 exclut de son champ dapplication, les jeux dargent, mme sous forme de paris, de loterie lgalement autoriss ; les activits de reprsentation et dassistance en justice et les activits exerces par les notaires . 41 CF. art. 240 AUDCG. 42 Selon larticle 17 dudit Rglement Les dispositions du prsent titre sappliquent { toute information, de quelque nature quelle soit, prenant la forme dun message de donnes utilis dans les transactions bancaires et financires et dans tous les systmes de paiement .

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    juridique du contrat lectronique ne peut se soulever que dans le cadre dun litige gnr par les systmes de paiement. Cette limite nentrave en aucune faon les rpercussions significatives quune telle admission peut avoir sur le droit de la preuve et sur le contrat de vente conclu par voie lectronique. En effet, ladmission dune rglementation stricte relative aux changes lectroniques et plus spcifiquement la vente lectronique permet de rgler plusieurs problmes, notamment ceux de la preuve de la vente avec le recours { des procds techniques complexes tels que lcrit lectronique coupl la signature lectronique43 ou le certificat lectronique.

    En effet, les ventes distance prsentent des particularits certaines par rapport aux activits commerciales classiques se droulant dans lunivers analogique. Son originalit rside, surtout, dans la suppression des distances gographiques et la rduction du temps grce la dmatrialisation des supports 44 : linstantanit, limmatrialit et linternationalit45 sont donc les traits caractristiques de la vente lectronique.

    Parlant de limmatrialit, la vente lectronique supprime les distances gographiques, elle offre notamment la possibilit aux consommateurs de faire une commande sans dplacement et un choix de produits disponibles 24/24 46.

    La transnationalit du processus contractuel et la pluralit dintermdiaires techniques constituent galement des caractristiques propres47 la vente lectronique. Et ce caractre transnational se rattache au commerce international et donc la vente internationale48.

    Pour concilier le dveloppement dun commerce lectronique fiable et le renforcement de la scurit des transactions commerciales, lUEMOA, la CEDEAO et lOHADA ont adopt des dispositions spcifiques qui peuvent sappliquer au contrat de vente pour assurer la protection du consommateur (en ligne) et celle du commerant (pour ce qui concerne les dispositions de lAUDCG). En gnral, ce sont les dispositions de droit commun qui sappliquent. La particularit de la vente { distance ipso facto induit { ladoption et { lapplication des dispositifs spcifiques propres { celle-ci.

    43 La signature lectronique est un mcanisme technique cr par les professionnels de la scurit informatique : il sagit de la "signature numrique" qui est toujours appliqu { des fins purement techniques. 44 Papa Assane Tour, Lencadrement juridique des transactions lectroniques , communication prsente lors de la Formation dlocalise des magistrats de la zone Afrique Centrale, in Thme : Le droit des technologies de l'information et de la communication et la cybercriminalit, ERSUMA. 45 V. Philippe Le Tourneau, la vente en ligne et le commerce lectronique, ouvrage prcit. 46 Papa Assane Tour, op. cit., p. 3 47 Parlant de ces caractristiques, V. Papa Assane Tour, article prcit. 48 A noter que la vente ne prend pas le caractre international du seul fait que les deux parties au contrat sont des ressortissants de deux pays diffrents ou par le fait que le prix pay franchit ou est appel franchir une frontire, mais plutt dans les cas suivants dfinis par la Loi uniforme sur la vente internationale : - lorsque les deux parties ont leurs domiciles commerciaux respectifs dans deux pays diffrents ; - lorsque la marchandise est transporte dun Etat { un autre ; - lorsque loffre et lacceptation ont t accomplies sur le territoire dEtats diffrents ; et enfin - lorsque la dlivrance de la marchandise se ralise sur le territoire dun Etat autre que celui de loffre et de lacceptation .

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    LAUDCG et lActe Additionnel de la CEDEAO ont prvu trs peu de conditions particulires de fond. Ce sont donc les rgles de droit commun qui sappliquent { cet gard.

    Les textes communautaires renvoient la question des conditions de formation et de validit du contrat de vente lectronique aux dispositions de droit commun en la matire en y ajoutant toutefois quelques spcificits (A). Ils prcisent en revanche des nouvelles conditions scuritaires (B)

    A : Les conditions de formation et de validit de la vente lectronique

    Soulignons au passage que le Rglement N 15/2002/CM/UEMOA ne et lAUDCG ne prvoient pas de rgles particulires de validit du contrat. Ici sapplique donc le droit commun.

    La formation de la vente lectronique suppose avant tout le respect des conditions de formation poses par le droit commun. Ainsi, la vente lectronique se forme par la rencontre de loffre et de lacceptation. Mais ici, loffre et lacceptation prsentent certaines particularits : il sagit dune offre lectronique49, suivie dune acceptation lectronique (art. 19).

    Loffre lectronique est { linstar de la vente traditionnelle, une proposition de contracter prcisant les lments du contrat mais accompagne de conditions contractuelles assurant la traabilit du contrat projet. Loffrant doit mettre la disposition de la clientle les conditions contractuelles applicables, notamment les tapes suivre pour conclure le contrat de vente, les moyens qui permettent lutilisateur didentifier les erreurs ventuelles commises dans la saisie avant la conclusion du contrat. Sil sagit dun consommateur, la mise { disposition par voie lectronique de ces informations suppose, avant tout que ce dernier ait accept lusage de ce procd (art. 16 et 18 de lActe Additionnel de la CEDEAO). Toutefois, lorsque ces informations sont communiques { un professionnel, son consentement { lusage de la voie lectronique nest pas requis ; il suffit juste quil ait communiqu son adresse professionnelle pour quelles puissent lui tre communiques (art. 17 de lActe Additionnel de la CEDEAO). Loffre de vente doit notamment comporter la chose et le prix. Cest l{ une condition sine qua non de validit de toute vente fusse-t-elle lectronique50.

    49 Cf articles 10 et 18 de lActe Additionnel de la CEDEAO et 243 de lAUDCG. Voir galement sur ce sujet, Justine Diffo Tchunkam, droit des activits conomiques et du commerce lectronique, lHarmattan, p. 68 71. 50 Cest le sens de larticle 2/2 du projet dActe Uniforme sur le droit des contrats : une proposition de conclure un contrat constitue une offre si elle est suffisamment prcise et si elle indique la volont de son auteur dtre li en cas dacceptation.

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    Enfin, loffre prend fin, soit { l'initiative de l'offrant soit l'initiative du destinataire : on parlera alors de rvocation51 ou de rejet52 selon le cas.

    Lacceptation53 lectronique est quant { elle, lintention dfinitive du destinataire de conclure le contrat aux conditions de loffre lectronique. Elle consiste donc agre une offre de manire pure et simple. Cest le sens de lart. 19 Acte Additionnel qui prcise pour que le contrat soit valablement conclu, le destinataire de loffre doit avoir eu la possibilit de vrifier le dtail de sa commande notamment du prix avant de confirmer celle-ci pour exprimer son acceptation . Cest aussi le sens de lart. 243 de lAUDCG54.

    Si dans la vente traditionnelle, les modalits de lacceptation sont diverses (acte dexcution, acquiescement exprs, silence circonstanci), il faut souligner que dans la vente lectronique, les textes prvoient des mesures permettant de garantir la porte de son acceptation notamment par la vrification de sa commande et son acceptation qui seffectue, en gnral, par le systme de double clic . Le premier clic donne la possibilit de relecture et damendement de la commande aprs une premire approbation et le second clic constitue lacceptation au sens juridique55. Dans le mme sens, la loi-type56 de la Commission des Nations Unies pour le Dveloppement du Commerce lectronique (CNUDCI) confirme, par exemple, que le fait de cliquer sur le bouton jaccepte constitue une forme valable de consentement. Elle ajoute au surplus, qu { moins que les parties nen dcident autrement, lacceptation dune offre peut tre exprime lectroniquement. En effet, la volont dune personne daccepter loffre de contracter que lui fait une autre personne ralise lchange des consentements. Cependant, toute la problmatique consiste savoir si le simple clic vaut acceptation au regard des consquences juridiques certaines qui sy attachent?

    Il est aujourdhui admis que le cliquage sur un bouton dacceptation prsent sur une page web commerciale est, lui seul, suffisant pour exprimer rellement lintention de linternaute { accepter des termes essentiels du contrat qui lui sont proposs57. Et Pourtant la mise en action du bouton dacceptation entrane la

    51 La rvocation intervient { linitiative de lauteur de loffre aprs lexpiration du terme prvu. Sil se rtracte avant, il engage sa responsabilit. Si un dlai na pas t fix, alors loffre doit tre maintenue pendant un dlai raisonnable, auquel cas loffrant engage l{ aussi sa responsabilit. 52 Le rejet intervient { linitiative du destinataire de loffre. 53 A noter que le silence ou linaction ne peuvent { eux seuls valoir acceptation, dans la mesure o tout contrat se conclut, soit par acceptation expresse dune offre, soit par un comportement clair et univoque des parties qui indique suffisamment leur accord . Voir art. 243 al. AUDCG. 54 Lart. 243/AUDCG dispose : Loffre doit tre accepte dans le dlai stipul par lauteur de loffre ou, { dfaut dune telle stipulation, dans un dlai raisonnable, compte tenu des circonstances, notamment de la rapidit des moyens de communication utiliss par lauteur de loffre. Une offre verbale doit tre accepte immdiatement, { moins que les circonstances nindiquent le contraire.Constitue une acceptation, toute dclaration ou autre comportement du destinataire indiquant quil acquiesce { loffre. Le silence ou linaction ne peut lui seul valoir acceptation . 55 Lutilisation de lInternet a dvelopp la pratique de manifester son acceptation par un clic de souris sur une icne intitule ok ou valider . 56 57 Lionel THOUMYRE, Lchange des consentements dans le commerce lectronique , consultable sur le site www. juriscom.net, 15 mai 1999, p.18.

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    transmission dinformations numriques qui seront reconnues par un logiciel, lequel les convertira en informations intelligibles pour le commerant destin les recevoir.

    Les textes prvoient, en outre, lacceptation pralable par le cocontractant de lusage de la voie lectronique58. Sil sagit dun professionnel, ces informations, il faut le rappeler, peuvent lui tre adresses par voie lectronique ds lors quil a communiqu son adresse professionnelle lectronique59.

    Il ne suffit donc pas que le contrat de vente soit form, encore faut-il quil soit valide. Ainsi, pour tre valable, le contrat doit remplir certaines conditions de fond60, lesquelles sont relatives la dtermination du prix et de la chose, objet de la vente.

    Sur la question de la dtermination du prix et de la chose, si le contrat est conclu sur un Etat membre de lUEMOA ou de la CEDEAO, il faut se rfrer au droit commun (cest--dire aux dispositions contenues dans le code civil de lEtat dans lequel le contrat est form). LActe Additionnel prcise toutefois que toute personne physique ou morale qui exerce une activit entrant dans le champ dapplication du prsent Acte Additionnel doit, mme en labsence doffre de contrat, ds lors quelle mentionne un prix, indiquer celui-ci de manire claire et non ambigu, et notamment si les taxes et frais de livraison sont inclus 61. En revanche, sil est form dans un Etat partie { lOHADA, ce sont les dispositions de lAUDCG qui sappliquent et lesquelles prvoient quune proposition de conclure un contrat ne produit deffet qu{ la condition dtre suffisamment claire et prcise et dindiquer la volont de son auteur dtre li en cas dacceptation 62. Et pour que la proposition soit considre comme prcise, elle doit dterminer la quantit et le prix ou donner les indications qui permettent de les dterminer63.

    Parlant enfin de la dtermination de la chose, les articles 10 de lActe Additionnel64 et 241 alina 2 de lAUDCG65 en font une condition spcifique de validit de loffre.

    Enfin, la vrification est aussi une condition de validit de loffre lectronique ; cest la porte de lart. 19 de lActe Additionnel de la CEDEAO selon lequel pour que le contrat soit valablement conclu, le destinataire de loffre doit avoir eu la possibilit de

    58 Cf article 16 de lActe Additionnel de la CEDEAO les informations qui sont demandes en vue de la conclusion dun contrat ou celles qui sont adresses au cours de son excution peuvent tre transmises par voie lectronique si leur destinataire accepte lusage de ce procd . 59 Cf. art. 17 Acte Additionnel de la CEDEAO. 60 Les conditions de fond sont les seules { tre respectes puisquaucune condition de forme nest prvue. 61 Cf. art. 5 de lActe Additionnel de la CEDEAO du 16 fvrier 2010. 62 Cf. alina 3 de larticle 241 AUDCG. 63 Cest le sens de lalina 2 de lart. 241(ancien art. 210) Une offre est suffisamment prcise lorsqu'elle dsigne les marchandises et, expressment ou implicitement, fixe la quantit et le prix ou donne les indications permettant de les dterminer . 64 Aux termes de lart. 10 Acte Additionnel, les conditions auxquelles sont soumises la possibilit de bnficier doffres promotionnelles ainsi que celle de participer { des concours ou { des jeux promotionnels, lorsque ces offres, concours ou jeux sont proposs par voie lectronique, doivent tre clairement prcises et aisment accessibles. 65 Lalina 2 de lart. 241 prcise qu une offre est suffisamment prcise lorsqu'elle dsigne les marchandises et, expressment ou implicitement, fixe la quantit et le prix ou donne les indications permettant de les dterminer . Comp. art. 33 c. civ. du Niger.

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    vrifier le dtail de sa commande notamment du prix avant de confirmer celle-ci pour exprimer son acceptation .

    Il convient galement de mentionner quune fois le contrat conclu, il a la mme valeur juridique quune vente faite entre personnes physiques et sur support papier. Il peut donc servir de preuve en cas dinexcution de son obligation par une des parties contractantes. La preuve ne se confond plus avec la preuve sur support papier car les textes de lUEMOA, de la CEDEAO et de lOHADA mettent fin { cette confusion. Et selon le Rglement de lUEMOA, lcrit sous forme lectronique est admis en preuve au mme titre que lcrit sur support papier et a la mme force probante que celui-ci sous rserve que puisse tre dment identifie la personne dont il mane et quil soit tablit et conserv dans des conditions de nature { en garantir lintgrit 66. Cest aussi le sens de larticle 30 de lActe Additionnel de la CEDEAO, de lart. 19 du Rglement de lUEMOA et des articles 79 { 82 de lAUDCG. Ils mettent en place des procds de preuves lectroniques savoir lcrit lectronique et la signature lectronique67, ainsi que le certificat lectronique68 qui permet dauthentifier le signataire du document lectronique.

    A cet effet, larticle 18 du Rglement de lUEMOA dfinit lcrit69 en y incluant tous les modes et supports dexpression de la pense, y compris lcrit lectronique. Et larticle suivant (19) du mme Rglement donne la valeur probatoire de lcrit sur support papier { lcrit lectronique. Cet article admet non seulement lcrit lectronique titre de preuve, il lui confre en outre une valeur probatoire quivalente lcrit traditionnel. Larticle 22 du Rglement de lUEMOA prcit, ajoute qu une signature lectronique70 ne peut tre dclare irrecevable au seul motif quelle se prsente sous forme lectronique la signature scurise lie un certificat lectronique qualifi a la mme force probante que la signature manuscrite . Mais lart. 83 de

    66 Cf. article 19 du Rglement n 15/2002/CM/UEMOA. 67 Selon le Rglement de lUEMOA, la signature lectronique est une donne qui rsulte de lusage dun procd rpondant aux conditions dfinies { larticle 23 du dit Rglement. Or larticle 23 du Rglement n15/2002/CM/UEMOA prvoit qu un dispositif de cration de signature lectronique ne peut tre considr comme scuris que sil satisfait aux exigences dfinies { lalina 2 . 68 Le Rglement de lUEMOA dfinit le certificat lectronique comme un document sous forme lectronique attestant du lien entre les donnes de vrification de signature lectronique et un signataire. Quant { lAUDCG, son art. 84 le dfinit comme une attestation lectronique qui lie des donnes affrentes la vrification de signature une personne et confirme l'identit de cette personne . 69 Aux termes de larticle 18 du Rglement de lUEMOA, lcrit sentend dune suite de lettres, de caractres, de chiffres ou de tous autres signes ou symboles dots dune signification intelligible, quels que soient le support et les modalits de transmission . 70 La signature lectronique existe dj depuis plusieurs annes au niveau international. Les juristes se sont en effet empars d'un instrument technique cr par les professionnels de la scurit informatique et appel "signature numrique". Cette dernire est toujours en utilisation des fins purement techniques. En revanche, la signature lectronique voit ses paramtres techniques encadrs et limits par le Droit pour en faire un instrument juridique. Les juristes de l'American Bar Association aux Etats-Unis ont t les premiers se lancer dans l'aventure. Leurs travaux ont ensuite t ports la Commission des Nations Unies pour le Droit Commercial International (CNUDCI) qui a publi en 2001 une "Loi type de la CNUDCI pour les signatures lectroniques". La Loi type a t adopte par diverses organisations rgionales.

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    lAUDCG/OHADA va plus loin, puisquil prvoit que la signature lectronique est la marque du consentement du signataire au contenu de lacte sign 71.

    Mais il ne suffit pas que le contrat de vente lectronique soit form, il faut en plus que dautres conditions supplmentaires qui sattachent { la spcificit mme du contrat lectronique soient remplies pour quil puisse tre valable.

    B : Les conditions scuritaires de la vente lectronique

    En effet, la validit dun contrat lectronique et son assimilation { la vente traditionnelle exigent le recours des procds techniques72 (souvent complexes) permettant de construire une architecture de confiance et de garantir notamment lidentification et lintgrit de lauteur de la signature lectronique. Identification et "intgrit" sont donc les conditions scuritaires de validit de la vente lectronique73. On peut mme y ajouter une 3me condition scuritaire savoir la documentation74.

    1 Lidentification de lauteur

    Pour des raisons de scurit juridique, il est important que les auteurs dune vente lectronique - dmatrialise ou numrise - puissent tre identifis. En effet, si dans la vente traditionnelle, cette identification se ralise par lapposition de la signature manuscrite du vendeur et de lacheteur, le commerce lectronique a fait apparatre un autre procd didentification nomm gnralement signature lectronique75 . Lidentification se prsente ds lors comme une validit du contrat de vente lectronique. Il sagit dune exigence principale de scurit et de validit souligne par les textes communautaires76 et rappele dans plusieurs dcisions de justice. Les juges ont notamment eu { dcider de la possibilit didentifier lauteur dun e-mail grce aux

    71 Thierry Piette-Coudol, op. Cit. p. 4. Lart. 83dispose en effet La signature lectronique qualifie est applique un document et permet d'identifier le signataire et de manifester son consentement aux obligations qui dcoulent de l'acte . 72 Il sagit notamment de la cryptographie cl asymtrique/ symtrique (Cf. art. 84 AUDCG et art. 27, paragraphe 6 du Rglement de lUEMOA). 73 Cass. Civ. 2, 4 dcembre 2008. Dans cet arrt, la cour de cassation a rappel dans cet arrt que lcrit lectronique ne vaut preuve qua condition que son auteur puisse tre dment identifi et quil soit tabli et conserv dans des conditions de nature { en garantir lintgrit . Ceci est conforme aux dispositions de larticle 1316-1 du code civil franais. 74 Il nexiste pas de jurisprudence sur larchivage du document lectronique. Les textes de lUEMOA, de la CEDEAO et celui de lAUDCG font de la documentation ou archivage une condition scuritaire et de validit du document lectronique. 75 Tout comme pour la signature traditionnelle, la fonction principale de la signature lectronique est didentifier des changes lectroniques, mais aussi { approuver lcrit lectronique. Voir { ce sujet, J. Larrieu, les nouveaux moyens de preuve : pour ou contre lidentification des documents informatiques des crits sous seing privs ? , Cahier Lamy, nov. 1988, p. 8 et dc. 1988 (I), p. 26 76 Aux termes de larticle 19, Lcrit sous forme lectronique est admis comme preuve au mme titre que lcrit sur support papier et la mme force probante que celui-ci, sous rserve que puisse tre dment identifie la personne . Cest galement le sens de larticle 30 de lActe Additionnel de la CEDEAO qui reprend en substance les mmes dispositions. Enfin selon larticle 83 de lActe Additionnel de la CEDEAO, la signature lectronique qualifie est applique un document et permet notamment didentifier dument le signataire.

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    autres documents papiers adresss sous forme lectronique77, et reconnatre comme preuve lors dun litige un document lectronique78 ou refuser de reconnaitre une valeur probatoire une signature scanne 79ou encore sanctionner une partie lors de lutilisation par cette dernire dune carte bancaire alors mme que lautorisation initiale qui a t donne est prime80.

    2 Lintgrit

    Le Rglement de lUEMOA, lActe Additionnel de la CEDEAO et lAUDCG exigent que les procds employs pour conclure une transaction commerciale garantissent lintgrit du document. Les parties contractantes doivent avoir la certitude que la vente est intgre81. Lintgrit est une condition supplmentaire qui garantit que le contenu dun message na pas t altr, intentionnellement ou non, pendant lchange lectronique. Elle apporte la certitude sur lidentit du signataire ; elle permet donc dauthentifier les acteurs dchanges lectroniques.

    Les modalits techniques qui permettent dobtenir une telle intgrit est le certificat ou la signature lectronique. Larticle 23 du Rglement de lUEMOA prcise les lments qui permettent de scuriser une signature lectronique en disposant : Un dispositif de cration de signature lectronique ne peut tre considr comme scuris que sil satisfait aux exigences dfinies { lalina 2 ci-aprs et sil est certifi conforme { ces exigences dans les conditions prvues par lalina 3 ci-dessous.

    Un dispositif scuris de cration de signature lectronique : doit garantir, par des moyens techniques et des procdures appropris, que les donnes de cration de signature lectronique ne peuvent tre : tablies plus dune fois et que leur confidentialit est assure ; trouves par dduction et que la signature lectronique est protge contre toute falsification ; protges de manire satisfaisante par le signataire contre toute utilisation par des tiers ; ne doit entraner aucune modification du contenu de lacte { signer et ne pas faire obstacle ce que le signataire en ait une connaissance exacte avant de le signer.

    Un dispositif scuris de cration de signature lectronique doit tre certifi conforme aux exigences dfinies { lalina 1 par des organismes agrs par la Banque Centrale et selon des rgles dfinies par instruction prise cet effet par elle . LActe Additionnel de la

    77 V. CE, 28 dcembre 2001. 78 Cf. Crim. 8 dcembre 2009 79 Cass. 2 Civ. 30 avril 2003 : De labsence deffet dune signature scanne, D. 2003. Somm. 2827, obs. Christian le Stan). 80 Cf. Crim. 14 novembre 2000. Larrt rendu par la chambre de la cour de cassation en matire dabus de confiance est original dans le sens o il adapte le droit pnal aux nouvelles technologies de linformation. En lespce, la cour rejette le pourvoi form par le Prsident du Conseil dadministration dune socit spcialise dans la vente par correspondance qui a conserv et utilis le numro de carte bancaire quune cliente lui avait fourni en vue du rglement dune prcdente commande pour rgler la contrepartie financire dun envoi que la cliente navait pas accept. 81 Il ny a en effet pas de scurit juridique si une circonstance (technique ou humaine) peut modifier le contenu de la vente.

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    CEDEAO pose galement cette condition dintgrit { travers les dispositions de larticle 2382 et celles de larticle 29.

    3- La documentation

    Les textes communautaires font de la documentation (archivage ou conservation) une condition scuritaire de validit et dadmission de lcrit ou de la signature lectronique comme mode de preuve en cas de litige entre les parties une vente lectronique. Et comme la question de la conservation est indissociable de celle de la preuve, la vente conclue sous forme lectronique doit tre archive dans des conditions offrant des garanties de scurit contre toute altration, modification ou destruction, en somme dans des conditions { garantir son intgrit. Larchivage correspond { lide de prennit de linformation83 avec la possibilit de la restituer intacte. Ce faisant, il subordonne donc la valeur probatoire de la vente lectronique son archivage. Ainsi, larticle 96 de lAUDCG prvoit la numrisation84 des dossiers et documents papier. De mme larticle 10 de la Loi -type de la CNUDCI sur le commerce lectronique de 1996, dispose lorsquune rgle de droit exige que certains documents, enregistrements ou informations soient conserve, cette exigence est satisfaite si ce sont des messages de donnes qui sont conserves, sous rserve des conditions suivantes : linformation que contient le message de donnes doit tre accessible pour tre consult ultrieurement, doit tre conserv sous la forme sous laquelle il a t cr, envoy ou reu 85.

    Une fois form, le contrat de vente conclu par voie lectronique produit des effets sur la situation juridique des parties et le sort des marchandises. Et chaque partie doit respecter lobligation dcoulant dudit contrat. En cas dinobservation, des sanctions peuvent tre prononces. Toute la question est de savoir quel texte faudrait-il appliqu et quel est le juge comptent pour prononcer la sanction dcoulant de linexcution des obligations contractuelles.

    82 Aux termes de larticle 23 du Rglement de lUEMOA, lorsquun crit est exig pour la validit dun acte juridique, il peut tre tabli et conserv sous forme lectronique sous rserve que puisse tre dment identifie la personne dont il mane et que son intgrit soit garantie . 83 A noter que lobjectif premier de linformatique nest pas de prenniser linformation et mme de la rendre intacte. 84 Il sagit au niveau de lAUDCG dune dmatrialisation des demandes et pices justificatives entrant dans le cadre du RCMM, des conditions de validit dune telle demande, de son authentification par voie lectronique par le greffier (art. 89) et enfin de lobligation d'archiver lectroniquement les documents de dclaration dmatrialiss (art. 91). 85 V. crim. 8 dcembre 2009.

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    II.LA DETERMINATION DE LA LOI APPLICABLE A LA VENTE ELECTRONIQUE

    Dans le cadre des relations commerciales sur Internet, les parties en prsence doivent changer de nombreux documents lectroniques (emails, formulaires de commande en ligne, envois de factures lectronique, ). En cas de litige portant sur cette transaction, elles seront amenes { prouver ce quelles allguent ; cette tche savre dlicate lorsque les lments de preuve sont essentiellement des documents lectroniques do lintroduction dune rglementation spcifique applicable aux transactions conclues par internet notamment la vente lectronique.

    A noter avant toute chose que lapplication de lAUDCG, de lActe Additionnel de la CEDEAO et du Rglement de lUEMOA vitent davoir { recourir aux rgles de droit international priv pour les contrats de ventes (lectroniques) entrant dans leurs champs dapplication respectifs, du moins pour les questions quils rglent et nont aucune incidence sur les ventes purement nationales. Par contre, les rgles de conflit de loi interviennent lorsque ni lAUDCG, ni lActe de la CEDEAO ne peuvent trouver application et exceptionnellement lorsque par leffet du principe dautonomie de la volont, le contrat reste soumis une autre loi valablement choisie par les parties.

    Aussi, lintroduction de dispositions spcifiques rglementant les changes conclus lectroniquement dans lespace UEMOA, CEDEAO et OHADA, soulve plusieurs questions notamment celles relatives la juridiction comptence et surtout la dtermination de la loi applicable en raison du caractre immatriel de la vente. Ces difficults sont dautant plus importantes compte tenu de la multiplicit des lgislations dans le domaine qui implique aussi la comptence de plusieurs juges. A supposer quun conflit naisse { loccasion de lexcution86 dun contrat conclu par internet entre deux individus dont lun est ressortissant dun pays partie { lOHADA (par exemple un ressortissant de la Rpublique dmocratique du Congo)et lautre ressortissant dun pays partie la CEDEAO (par exemple un ressortissant de Cap Vert), quelle loi applicable une telle vente?

    Cette question relative la dtermination de la loi applicable renvoie celle plus gnrale de la dtermination du juge comptent pour trancher un litige relatif une vente en ligne .

    En principe, le juge comptent est celui du lieu o lobligation qui sert de base { laction a t excute ou doit tre excute87. Mais le lieu dexcution de lobligation litigieuse savre difficile { dterminer lorsque lexcution a lieu en ligne. Do lintrt

    86 Sagissant de la responsabilit en cas de non-excution dun contrat conclu lectroniquement, larticle 6 de lActe Additionnel de la CEDEAO rappelle que la personne qui exerce une activit entrant dans le champ dapplicable du prsent Acte est responsable de plein droit { lgard de son cocontractant de la bonne excution des obligations rsultant du contrat, que ces obligations soient excuter par elle-mme ou par dautres prestataires de services, sans prjudice de son droit de recours contre ceux-ci . Cette personne ne peut sexonrer de sa responsabilit quen apportant la preuve que linexcution ou la mauvaise excution est imputable au cocontractant ou un cas de force majeure . 87 Le Rglement communautaire du Conseil de lEurope du 22 dcembre 2000 contient des dispositions similaires concernant la comptence judiciaire, la reconnaissance et lexcution des dcisions en matire civile et commerciale. Voir art. 2 et 5 dudit Rglement.

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    de faire une distinction entre la vente de marchandises et celle de fourniture de services. Sil sagit dune vente de marchandises, le lieu de lexcution est celui o en vertu du contrat les marchandises ont t ou auraient t livres. Par contre sil sagit dun contrat de fourniture de service (par exemple en cas de tlchargement dun logiciel ou dun morceau musical), le lieu de lexcution est celui o les services ont t ou auraient d tre fournis. Il sagit donc du lieu o les donnes auraient t tlcharges pour lexemple prcdent.

    En somme, le rgime de la comptence territoriale interne88 est tendu la comptence internationale avec toutes ses implications. A cette comptence gnrale, sajoutent des comptences spciales.

    Les parties peuvent aussi insrer dans leur contrat de vente lectronique une clause attributive de juridiction et donner par-l, mme, comptence une juridiction dsigne davance de rsoudre un ventuel conflit pouvant survenir dans lexcution de leurs obligations respectives. Si une telle clause est licite, elle doit tre prvue avant la naissance du diffrend, et ne doit en aucun cas donner comptence un autre juge qui nest pas comptent (matriellement et territorialement) pour rgler le litige. Elle ne doit enfin pas attribuer comptence aux tribunaux du pays de leur domicile si le consommateur et le professionnel ont, lors de la conclusion du contrat, leur domicile dans un autre Etat 89.

    Une fois dtermin le juge comptent, il faut dterminer la loi applicable. En gnral, les parties conviennent par une disposition du contrat, de la loi applicable (A), mais lorsquelles ne le font pas, cest le juge qui doit la dterminer (B).

    A La dtermination de la loi applicable par convention

    Lorsque le vendeur et lacheteur ressortissant des Etats parties { lOHADA, { lUEMOA et { la CEDEAO (ou dEtats parties un ou deux de ces Traits) concluent une vente par internet, ils peuvent prvoir dans leur contrat lectronique des dispositions relatives la loi applicable ce contrat90 : il sagit de la loi dautonomie91. Les parties sont en principe libres de choisir la loi qui rgira leur contrat, et ce, mme si la loi quelles dsignent na aucun lien avec le contrat92. Ce sont les dispositions de lart. 7 de lActe additionnel de la CEDEAO qui prvoient cette possibilit en disposant 2) cette disposition est sans prjudice de la libert des parties de choisir la loi applicable leurs transactions. Toutefois, en labsence de choix des parties, la loi applicable sera celle de la

    88 Aussi, en vertu des articles 14 et 15 du Code civil, les tribunaux nigriens sont comptents lorsquun national est partie au litige en qualit de demandeur ou de dfendeur pour lexcution des obligations mme contractes { ltranger. 89 Philippe Le Tourneau, op. cit. p. 300. 90 Il faut rappeler que les rgles relatives la rsolution de problme de conflit de loi, sont celles habituelles prvues par le droit international priv. 91 Rappelons que la loi dautonomie est le principe fondamental des contrats. 92 Sous rserve dune fraude { la loi et de lapplication par le juge de ses lois de police ou dordre public.

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    rsidence habituelle du consommateur tant quil y va de son intrt . Cest galement lesprit de lalina 2 de larticle 234 de lAUDCG qui rappelle : Sauf stipulations conventionnelles contraires, le contrat de vente commerciale est soumis aux dispositions du prsent Livre ds lors que les contractants ont le sige de leur activit dans un des tats Parties ou lorsque les rgles du droit international priv mnent { lapplication de la loi dun Etat Partie .

    Une fois que les parties ont choisi la loi applicable, le contrat sera subordonn cette loi mme si le contrat cause de cela tre considr comme nul.

    La conclusion de conditions en ligne contenant une clause attributive de juridiction nest valable que si les conditions sont confirmes par lenvoi dun courrier lectronique, et seulement dans la mesure o il sagit dune information consultable ultrieurement sur le disque dur de lordinateur de lacheteur. Cest dire alors que laffichage seul { lcran des conditions, suivi de leur impression { titre dchange, sera probablement jug insuffisant .93

    Enfin, les parties peuvent dcider de ne pas soumettre les litiges qui peuvent natre { loccasion de lexcution dune vente passe lectroniquement aux tribunaux tatiques et choisir de les rgler par la voie extrajudiciaire. Elles peuvent ainsi choisir de sen remettre { la justice prive notamment - modes alternatifs de rglement des litiges (commerciaux)94 qui a lavantage dtre plus rapide, simple et plus discret et mme moins coteux que la justice tatique. Le recours un arbitre supprime la difficult de dterminer le juge comptent et { la lourdeur qui sattache { une procdure judiciaire.

    Sagissant du rglement des litiges suite { un contrat de vente lectronique, les parties peuvent ainsi recourir { larbitrage95 ou la mdiation ou encore la conciliation96 en ligne sur la base dun accord pralable. A noter que de nombreux organismes97 servent darbitres sur le plan national et international, pour le rglement des diffrends, notamment ceux lis aux oprations de commerce lectronique.

    93 Thomas GERBEAUX, op.cit., p.15. 94 Sur la question des modes alternatifs des rglements des litiges commerciaux, lire Komi, Tsakadi, Quelle place pour les MARCS dans lharmonisation du droit OHADA des contrats ?, Rev. Dr. Unif. 2008, pp. 511-515 ; E. Caprioli, Arbitrage et mdiation dans le commerce lectronique, lexprience du cyber tribunal, Rev . arb. 1999, p. 224 ; E. Camous, Rglement non juridictionnel des litiges de la consommation, contribution critique des modes alternatifs de rglement des conflits, LGDJ, 2002 95 En tant que mode alternatif de rglement des conflits, larbitrage fait intervenir un tiers choisi par les parties qui rgle le conflit en amiable compositeur, en toute quit. 96 A noter que la mdiation et la conciliation nont quun caractre facultatif et ne conduisent pas une dcision qui aura autorit de chose juge. Par exemple, le mdiateur nessaye que de rapprocher les parties en leur soumettant ventuellement un projet de rglement amiable. V. Perrin, M-D, Conciliation et mdiation, Petites affiches, 26 aot 2002, n170. Comp. Voir art. 2044 2058 c. cive. Franais. 97 Il existe des sites (gnralistes ou spcialiss) qui proposent un rglement des litiges en ligne. Certains dentre eux sont spcialiss dans un seul mode de rglement ou dans un seul type. Ctait le cas du cyber-tribunal (qui nexiste plus depuis dcembre 1994, il tait spcialis dans la mdiation et larbitrage), le eResolution depuis 2000 (socit canadienne spcialise dans le contentieux des noms de domaine et de manire plus large au commerce lectronique). V. Eric A. Caprioli, Arbitrage et mdiation dans le commerce lectronique (lexprience du cyber tribunal), consultable sur www.caprioli-avocats.com/publications/1-commerce-electronique-et-internet/44-arbitrage-mediation

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    Sur la question de larbitrage, il est noter que les parties peuvent recourir cette voie soit avant la naissance mme du litige par une disposition du contrat (clause compromissoire) soit aprs la naissance du litige (par le biais dun compromis)98. La validit dune telle clause doit tre examine par rfrence au droit national de lEtat qui a vocation { sappliquer (Etat du for).

    Une fois que larbitre choisi par les parties, tranche le conflit, sa dcision simpose aux deux protagonistes99. Cest dailleurs la diffrence fondamentale qui existe entre ce dernier et la mdiation ou encore la conciliation100. Le cadre juridique de larbitrage de lOHADA101 est lActe Uniforme relatif au droit de larbitrage et le rglement darbitrage de la Cour commune darbitrage102 pour lOHADA, ce qui nempche aux Etats de prvoir des dispositions relatives { ce type de rglement amiable.

    Parlant de la mdiation, qui fait intervenir un tiers neutre avec laccord des parties dans le but de les aider trouver une solution satisfaisante et quitable, sans jamais les obliger 103. Elle est utilise pour rgler des litiges individuels entre les consommateurs, les entreprises ou les institutions. Ce mode de rglement est plus utilis que larbitrage contenu de sa rapidit et de son cot.

    Enfin, avec la conciliation, les parties qui ont intrt trouver une solution, essaient de rgler leur conflit avec, souvent, la prsence dun conciliateur. Cest le dernier recours avant une procdure judiciaire qui ncessite pour sa russite, un minimum de bonne volont.

    Le recours ces modes de rglements de litiges prsente des avantages indniables par rapport la justice tatique, notamment la rapidit et la souplesse et doit ce titre tre privilgi et encourag.

    Par contre, si les parties ne font pas cas dans leur contrat, des modes extrajudiciaires de rglements de litiges ventuels, il revient au juge qui doit dterminer la loi applicable au contrat form par voie lectronique.

    98 Cest le lieu de relever que le code des obligations civiles et commerciales du Sngal a prvu des dispositions relatives { larbitrage (art. 826-1 826- 4). 99 Larbitrage dbouche souvent sur une sentence arbitrale ; la dcision rendue est de nature juridictionnelle et a autorit de chose juge. 100 La conciliation a t aussi institue par lOHADA et lActe Uniforme portant sur les procdures simplifies de recouvrement et des voies dexcution a dailleurs institu un pralable obligatoire de conciliation, selon lequel la juridiction saisie sur opposition procde une tentative de conciliation. Si celle-ci aboutit, le Prsident dresse un procs-verbal de conciliation sign par les parties, dont une expdition est revtue de la formule excutoire (cf. art. 12. AUPS/ voies dexcution). 101 Sur la question de larbitrage OHADA, voir Bayo Bybi Blandine, Lefficacit de la Convention darbitrage en droit OHADA , ERSUMA, mars 2013, p. 61 -83. 102 Il faut ajouter cette liste la dcision n004/99/CCJA du 3 fvrier 1999 relative aux frais darbitrage et la Dcision n004/99/CM portant approbation de la Dcision n004/99/CCJA relative aux frais darbitrage et le prambule du Trait de lOHADA. 103 Komi Tsakadi, op. cit. p.513.

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    B La dtermination de la loi applicable par le juge

    La question de la dtermination de la loi applicable au contrat de vente lectronique par le juge se pose dans lhypothse o les parties nont pas prvu dans leur convention la rgle applicable. Comment le juge va-t-il trancher ce litige ? Va-il appliquer le texte de la CEDEAO (tant entendu que tous les Etats de lUEMOA sont aussi parties { la CEDEAO) ou celui de lOHADA ?

    Traditionnellement, pour dterminer la loi applicable un contrat de vente, il faut se rfrer la dtermination du moment et du lieu de sa conclusion. La manire de dterminer le moment et le lieu de la formation du contrat a t dfinie tant par le lgislateur que par la jurisprudence et la doctrine. Mais avec lintroduction de lInternet dans le commerce, un nouveau critre doit tre dfini. La dtermination du moment et du lieu de la formation du contrat lectronique est intressante dans la mesure o la vente lectronique est un contrat entre absents que les solutions traditionnelles ne peuvent rsoudre.

    Selon la prsomption valable, un contrat prsente les liens les plus troits avec le pays o la partie qui doit fournir la prestation caractristique a, au moment de la conclusion du contrat, sa rsidence habituelle. Or dans un contrat de vente, il existe deux obligations principales : celle de fournir la chose pour le vendeur et celle de payer le prix pour lacheteur. Lobligation caractristique est celle de la livraison ; donc la loi applicable un contrat de vente est celle du lieu de rsidence du vendeur.

    La dtermination de la loi applicable par le juge doit tre faite en distinguant les contrats entre professionnels et des contrats entre consommateurs.

    Sil sagit de ventes conclues avec des consommateurs, la loi applicable au contrat de vente lectronique est donc celui o est situ le principal tablissement du vendeur ou, si selon le contrat, la prestation doit tre fournie par un tablissement autre que le principal tablissement, celui o est situ cet tablissement 104. Cest le sens de lart. 7 de lActe Additionnel105 qui dispose Lexercice des activits entrant dans le champ dapplication du prsent Acte additionnel est soumis { la loi du pays membre de la CEDEAO sur le territoire duquel la personne qui lexerce est tablie . Toutefois, cette disposition ne peut pas avoir pour effet de priver un consommateur (lacheteur) des

    104 Thibault Verbiest, Commerce lectronique : loi applicable et juridiction comptente, consultable sur http://www.journaldunet.com/juridique/juridique.shtml. 105 Cf lalina 1 de lart. 7. Comp. voir Convention de Rome du 19 juin 1980 et le Rglement du Conseil de lEurope du 22 dcembre 2000 en matire de reconnaissance et dexcution des dcisions en matire civile et commerciale. La Convention de Rome est relative la loi applicable aux obligations contractuelles entre le 1er avril 1991 et le 17 dcembre 2009 qui sapplique. Aprs le 17 dcembre 2009, cest le Rglement 593/2008 du 17 juin 2008 portant sur le mme objet qui sapplique. Sont cependant exclu dans son champ dapplication ltat et { la capacit des parties, les obligations relatives { un droit de famille, sauf la donation se rattachant { une obligation contractuelle, les obligations nes dinstruments ngociables, le droit des socits, des associations et autres personnes morales, les questions de reprsentations et les contrats dassurance et de rassurance

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    dispositions plus protectrices de la loi de sa rsidence habituelle106. Une telle disposition nous ramne la loi du lieu du double-clic chaque fois quil y va de lintrt du consommateur.

    Sil sagit de ventes conclues entre professionnels, la loi applicable est en principe celle de lEtat membre (UEMOA ou CEDEAO ou AUDCG) sur le territoire duquel le vendeur exerce son activit, sauf stipulation contraire des parties107 : aussi, lorsque la loi dtermine en fonction des rgles de conflit de loi est celle dun Etat partie { lOHADA, cest donc lAUDCG qui sappliquera. Mais lorsque la loi applicable est celle dun Etat non partie { lOHADA, mais partie { la CEDEAO, alors ce sera lActe Additionnel de la CEDEAO en combinaison avec le droit commun du pays qui sappliquera.

    106 Cf alina 2 de lart. 7 de lActe additionnel de la CEDEAO. Comparativement, une telle disposition existe en droit franais : article 7, II, 1 de la loi franaise sur lEconomie numrique du 17 juillet 2003 ; cest aussi lesprit de lart. L.121-20-6 du c. Consom. lorsque les parties ont choisi la loi dun Etat non membre de la Communaut europenne pour rgir le contrat, le juge devant lequel est invoque cette loi est tenu den carter lapplication au profit des dispositions plus protectrices de la loi de la rsidence habituelle du consommateur 107 Cf. art. 7 Acte additionnel de la CEDEAO.

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    CONCLUSION

    Ladaptation du droit de la vente aux nouvelles technologies de lInformation et de la Communication dans les espaces UEMOA, CEDEAO et OHADA permet sans aucun doute de rgler certaines difficults relatives aux contrats du commerce lectronique, notamment la vente. Cette dmatrialisation prudente et ncessaire du droit de la vente qui doit se poursuivre avec ladoption dune lgislation plus complte et sur les transactions lectroniques En attendant celle-ci, lapport de la jurisprudence des diffrents Etats membres de lUEMOA, de la CEDEAO et de lOHADA en la matire nous permettra de mieux comprendre ce nouveau mcanisme institu dans les changes commerciaux. Nos conomies africaines en y faisant recours se modernisent, se dveloppent et participent la marche de la mondialisation.

    La reconnaissance du certificat et de la signature lectroniques par cette rglementation vient par ailleurs rsoudre le problme de linsuffisance de la rglementation des messages lectroniques en gnral et des changes lectroniques en particulier. Une telle reconnaissance se prsente en outre comme un remde aux obstacles du dveloppement des transactions lectroniques permettant dappliquer aux actes commerciaux et leurs lments probants les techniques lectroniques.

    La dmatrialisation ne doit pas sarrter ici ; elle doit se poursuivre avec ladoption (immdiate) dune loi uniforme sur les transactions lectroniques dune part, et dautre part, avec ladoption de textes relatifs { lensemble des documents lectroniques y compris pour les actes civils et les actes lectroniques authentiques comme cest le cas dans beaucoup de pays europens.

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    La poursuite des infractions pnales OHADA devant les juridictions dinstances camerounaises: o est pass le Ministre public ?

    Par :

    Louis Jean Bedel TCHOUAMBIA TOMTOM

    Docteur/Ph. D. en Droit priv de lUniversit de Dschang

    Assistant { la FSJP de lUniversit de Douala

    Introduction

    Pour protger le monde des affaires contre les drapages qui peuvent porter atteinte sa crdibilit et sa transparence, le lgislateur OHADA, de manire subtile, en plus des sanctions non rpressives108, na pas voulu que le droit des affaires volue en marge du droit pnal109. Conscient des enjeux atteindre, il a institutionnalis limmixtion du droit pnal dans lensemble des moyens { mettre en uvre pour discipliner les oprateurs conomiques dans leurs actions quotidiennes et assainir le monde des affaires en Afrique. Il a donc soumis les Actes uniformes { lpreuve du droit pnal pour briser la tendance { limmoralit qui prvaut dans le milieu daffaires. Face la dlinquance conomique diversifie, le lgislateur OHADA a essay de multiplier les incriminations nouvelles contre les dlinquants conomiques. Cest dans ce sens que larticle 5, alina 2 du Trait fondateur110 dispose que Les Actes uniformes peuvent inclure des dispositions dincrimination pnale, les Etats parties sengagent { dterminer les sanctions pnales encourues . En application de ce texte fondateur, lordre communautaire na pas dict un Acte uniforme codifiant lensemble des agissements punissables. Il a inclu les dispositions parses dans divers Actes uniformes. Sur neuf Actes uniformes en vigueur ce jour111, six ont tabli des agissements punissables112.

    108 Prvues pour contrecarrer les garements et les indlicatesses des hommes daffaires, par exemple, la non convocation dun actionnaire, sanctionne par la nullit des rsolutions de lassemble gnrale. 109 A ce sujet, un auteur pense quil est bon que chacun se dfende avec les armes civiles et commerciales sans faire intervenir lappareil toujours effrayant du droit pnal . Cf. HAMEL, Prface louvrage collectif, Le droit pnal des socits anonymes, Dalloz, 1955. Un autre pense quil nest pas sain pour lconomie quun pays que les chefs dentreprises risquent pour quelque vnielle inadvertance, mme pour une audace malchanceuse et mme si finalement aucune sanction pnale nintervient, de subir le terrible choc psychologique que constitue la dure preuve de la comparution devant les juridictions. 110 Trait du 17 octobre 1993, sign Port-Louis (Iles Maurice), rvis le 17 octobre 2008 Qubec (Canada). 111 Voir, Tableau synoptique des incriminations pnales OHADA prsent par TCHANTCHOU (H.) et AKOUETE AKUE (M.), Ltat du droit pnal OHADA , Revue de lERSUMA, n spcial, nov.-dc. 2011, p. 30. 112 Il en est ainsi de lActe uniforme sur le droit commercial gnral, de lActe uniforme sur le droit des srets, de celui portant organisation et harmonisation des comptabilits des entreprises, de lActe relatif au droit des socits commerciales et au Groupement dintrt conomique, de lActe uniforme rgissant lorganisation des procdures collectives dapurement du passif et, enfin, de lActe sur les socits coopratives. Il convient de noter toutefois que loprationnalit des dispositions pnales contenues dans lActe uniforme sur les socits coopratives nest pas vidente parce que cet Acte nest

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    Dans lordonnancement juridique interne de chaque Etat partie { linstar du Cameroun, cest le Ministre public qui est charg du respect de cet ordre pnal. Cest lui lautorit garante du respect des prescriptions pnales OHADA en gnral au moyen de la saisine des juridictions rpressives, de lexercice monopolis de laction publique et de lexcution des dcisions pnales rendues. Mais, son rle n'y est pas limit. Il passe en effet pour tre un garant de l'ordre public communautaire. C'est le cas dans certaines procdures o il n'y a ni prvenu113, ni Ministre public demandeur ou dfendeur. Son intervention se justifierait par la ncessit de garantir dune part aussi bien lordre public interne que lordre public international des Etats parties ; dautre part de veiller au bon suivi de lorthodoxie juridique communautaire114. Cest lui qui normalement doit saisir le tribunal aprs avoir rassembl les indices et identifi les auteurs115.

    Certains Actes uniformes lassocient aux investigations conomiques ncessaires { lassainissement du milieu des affaires. Les articles 899 de lActe uniforme sur les socits commerciales et du Groupement dintrt conomique116 et 387 sur les socits coopratives incriminent lagissement du commissaire aux comptes, qui naura pas rvl au Ministre public les faits dlictueux dont il aura eu connaissance. Il a donc le droit de recevoir une communication absolue117. Il peut galement se trouver { lorigine du dclenchement dun redressement judiciaire ou dune liquidation des biens118. Cela suppose quil dispose de plusieurs informations quil recherche lui-mme ou qui lui sont fournies par un tiers. Il peut toute poque, requrir communication de tous actes, livres ou documents pouvant lui donner des informations sur linfraction commise119. Outre sa charge de veiller { la dfense de lordre public conomique et social qui touche essentiellement la vie des entreprises, le Ministre public est aussi le porte-parole de la socit auprs de la juridiction saisie120.

    entr en vigueur que trs rcemment, et, surtout, aucun Etat na eu le temps dy laborer des textes nationaux complmentaires 113 En procdure collective, on le sait, cest une lapalissade, il n ya pas de prvenu. Il ny a que des parties en demande et en dfense. Mais, il est clair que la prsence du Ministre public dans ces procdures peut tre une source de renseignement pour lui. La prsence de cet organe judiciaire est ncessaire pour prserver lefficacit du droulement des procdures collectives (cf. SOINNE (B.), Lintervention du Ministre public dans les procdures collectives , Dalloz, 1983, Chr., p. 11 ; KOUENGUEN NGUETKNKAM (Y.), Le Ministre public dans les procdures collectives OHADA, Mmoire de DEA, FSJP, Universit de Yaound II, 2005-2006 ; SOINNE (B.), Lintervention du Ministre public dans les procdures collectives , op.cit., p. 11.). La poursuite des infractions pnales prvues par le lgislateur OHADA ne se fera qu{ loccasion dun autre procs. 114 TCHANTCHOU (H.), op.cit., p. 6. Le traitement des entreprises en difficult est en pleine volution dans le monde entier. Le mouvement gnral consiste { sauvegarder lentreprise pour garantir lemploi, la circulation des richesses et le maintien de lactivit conomique. 115 TCHANTCHOU (H.), op.cit., p. 3. 116 Adopt le 30 janvier 2014 Ougadougou au Burkina faso. 117 LAFORTUNE (M.-A.), Le Ministre public et lentreprise en difficults , Petites Affiches, 12 janvier 1994, n 5, p. 3. 118 Cf. art. 29 de lAUPC. 119 Il en va ainsi de lart. 47 de lAUPC. Il communique au juge-commissaire, sur sa demande ou mme doffice, les renseignements utiles { ladministration de la procdure collective et provenant de toute procdure pnale, nonobstant le secret de linstruction. Cf. KOM (J.), Droit des entreprises en difficult OHADA, Prventions-traitements-Sanctions, Collection Droit uniforme, PUA, 2013, p. 117). 120 Cest { juste titre que lon a pens que sa prsence dans ces procdures serait un mobile qui viendrait le galvaniser, car inform de toutes les pripties de la procdure, il mettrait facilement et mme efficacement en mouvement laction publique.

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    Lon sait que le parquet a une action trs importante et une puissance considrable dans la mise en mouvement de laction publique pour la poursuite des infractions prvues par les Actes uniformes OHADA { linstar de la banqueroute121 et infractions assimiles122. Pourrait-il dailleurs en tre autrement lorsque lon sait que lun des objectifs poursuivi par le lgislateur OHADA est lassainissement et la moralisation du climat des affaires dans les Etats parties au Trait de lOHADA?123 Cest dailleurs pour cette raison que lattractivit conomique du droit OHADA a t trs vite mise en exergue124. On comprend donc que cest par le droit que chaque socit se construit tous les jours. Lorsquil nexiste pas, quil est mconnu ou viol, la socit se dlite125. Le droit a donc un rle plus actif jouer pour accompagner et favoriser le dveloppement conomique et social126. Comme on le constate, le droit est appel jouer le premier rle dans lintgration conomique et la croissance. Son inapplication peut causer un prjudice au monde des affaires. Lassainissement du monde des affaires est une condition indispensable du dveloppement conomique ; et ce dernier est lui-mme un droit fondamental tel que consacr par larticle 22 de la Charte africaine des droits de lhomme et des peuples qui proclame lobligation des Etats dassurer le dveloppement conomique 127.

    Entre les prvisions lgislatives et la mise en uvre effective de ce rle aussi logieux du Ministre public, il existe un foss remarquable128. Pour preuve, lon constate, avec beaucoup de curiosit dailleurs, quaucune action publique relative aux

    121 Il faut nanmoins reconnatre quen dehors de la poursuite exerce par le reprsentant du Ministre public, laction publique ici peut tre mise en mouvement { linitiative du syndic par une plainte avec constitution partie civile ou une citation directe, soit sur initiative de tout crancier agissant en son nom propre ou au nom de la masse (Cf. art. 234 al. 1 de lAUPC). 122 LActe uniforme portant organisation des procdures collectives dapurement du passif distingue entre linfraction de banqueroute et les infractions assimiles la banqueroute. Dans les deux infractions, seules sont diffrentes, la qualit de la personne poursuivie (commerant ou dirigeant) et la nature de la faute. 123 Il ne pouvait pas tre autrement surtout parce que le droit pnal devrait inluctablement accompagner le Droit communautaire dans ses objectifs dassainissement de lenvironnement conomique en Afrique. Cf. SOCKENG (R.), Droit pnal des affaires OHADA, Presses Minsi Le Competing, mars 2007, p. vii. 124 Cf. POUGOUE (P.-G.) et KALIEU ELONGO (Y.R.), Introduction critique { lOHADA, PUA, Yaound-Cameroun, 2009, pp. 177 et ss. ; v. galement, MODI KOKO BEBEY (H.D.), La rforme du droit des affaires de lOHADA au regard de la mondialisation de lconomie , confrence, Maison des sciences de lHomme, Ange Gupin, Nantes, 16 mai 2002. 125 POUGOUE (P.-G.), OHADA et intgra