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NEVERGIVEUPTOME1-FINDYOU

Romance

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F.S.GAUTHIER

NEVERGIVEUPTOME1-FINDYOU

Romance

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ISBNformatpapier978-2-37447-329-1

ISBNnumérique:978-2-37447-328-4

Octobre2017-ImpriméenFrance

©Erato–Editions-Tousdroitsréservés

Cetteœuvreestprotégéeparledroitd’auteuretstrictementréservéeàl’usageprivéduclient.Toutereproductionoudiffusionauprofitdetiers,àtitregratuitouonéreux,detoutoupartiedecetteœuvre,eststrictementinterditeetconstitueunecontrefaçonprévueparlesarticlesL335-2etsuivantsduCodedelaPropriétéintellectuelle.L’éditeurseréserveledroitdepoursuivretouteatteinteàsesdroitsdepropriétéintellectuelledevantlesjuridictionscivilesoupénales

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ÀmonmarietàCorinne,Àmonéditriceetsonéquipe

ÀKatjapoursacorrectionetsesconseilsEtàtoutesmeslectrices,

Mercipourvotresoutienindéfectible.

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1

Gaby

Jesuisenretard,commed’habitude.J’enfilemavesteencuir,attrapemesclésetm’apprêteàquittermonpetitappartement,maislasonneriedemontéléphoneretentit.Jemedirigeàl’ouïepourmettrelamainsurmonportable,quiestposésurlereborddulavabo,etgrimacelorsquejeconstatel’indicatifdelaColombie.J’attendsetredoutececoupdefildepuisquej’aiprévenumonpaternel,ilya

trois mois de cela, de mon retour au pays. Il faut dire qu’il n’était guèreenthousiaste.J’expirebruyammentetdécroche.—Bonjour,père.— Mon jet est en route. Un de mes hommes passera te prendre à ton

appartementdemainmatinàseptheures.Je note qu’il est toujours aussi chaleureux et ne peux m’empêcher de

rétorquer:—Moi aussi, je vais bien. Je te remercie de t’en inquiéter. J’apprécie tout

l’amourquetumetsdanstespropos.Montonestsarcastique,maislesienclaquecommeunfouet.—Gabriela,jen’aipasdetempsàperdreenfutilités.J’aidesprojetsd’avenir

pourtoi,nousendiscuteronsàtonretour.—Dequellenaturesontces…Trop tard, ila raccroché. Je reportemonportabledevantmesyeuxet le fixe

avectoutleméprisdontjesuiscapable.—Connard.Iladesprojets?Çatombebien,moiaussi,JuanCarlosPérez!Jeveuxdes explications sur les circonstancesdudécèsdemamère et je les

obtiendrai,d’unefaçonoud’uneautre.Celafaitdix-sept longuesannéesque j’ysonge,que jemeremémorece jour

fatidique.Celanem’est guère compliqué puisque je souffre d’exaltation de lamémoire, plus communément connue sous le terme d’hypermnésie.Contrairement à ce que les gens pensent, ce n’est pas un don. Je souhaiteraispouvoiroubliercertainssouvenirsparfois.Monpère,siéprisdesafemme,n’apasverséuneseulelarmecejour-là.Quant

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àmoi,ilm’aabandonnéecommeonleferaitavecunanimal,alorsquej’avaisàpeineseptans.Oh,ilaréglétouslesfraismédicauxnécessairesàmasanté,ainsique ce pensionnat que je détestais tant. Il a ouvert un compte à mon nomégalement, gérépar le directeurde l’école jusqu’àmes seize ans, sur lequel ilversait de l’argent tous les mois pour mes besoins vestimentaires. Mais monpaterneln’ajamaisprisdenouvellesdemoi,pasuncoupdefil,aucunevisite.Etlà,j’apprendsqu’ilpossèdesonpropreavion.Depuisquand?J’ai mon billet sur un vol commercial, il peut donc se mettre son jet bien

profonddans son troudeballe enguisede suppositoire si ça lui chante, je nemonteraipasàborddesonjouet.Undesessbirespasserameprendre?Jen’aipasbesoindechaperon,j’aivingt-quatreans,merde!IlsaitquejerésidesurParis,maisjeneluiaipascommuniquémonadresseet

ilnemel’apasdemandéenonplus.Preuvesupplémentaire,s’ilenfaut,detoutl’intérêtqu’ilmeporte.Pourmesseizeans,monamieColleenm’ainvitéeàpasserlesvacancesd’été

chezelle,àMarseille.C’estsonpèrequis’estchargéd’obtenirl’autorisationetlespapiersnécessairesauprèsdumien.Etlàencore,rien.C’estàsedemandersij’aiexistéunjouràsesyeux.Jenesuisjamaisretournéeàl’internat.J’aivécudeuxansàMarseille,puisj’ai

mislecapsurParis,lavillenataledemamère,sansjamaisfaireappelàquiquecesoit.Alors,ilpeutallersefairefoutreavecsesprojets!Jesorsdemonappartement, légèrement irritée.J’enfourchemaDucati rouge

vifetdémarrelemoteur.Cesonm’apaisequelquepeu.Iln’yaquedeuxchosesquiparviennentàmecalmer:lavitesseetlamusique.Mabécaneestloind’êtreneuve,maisc’estunmonstre.Je l’adore.Ilm’afallu troisannéesd’économiespourparveniràm’offrircebijoud’occasion.Willmelarachète,maisellevamemanquer.J’arrive aubar et rejoins lesgars, avec cinquanteminutesde retard.Ce soir,

nousjouonsdansunpubirlandaisprochedujardinduLuxembourg,commetouslesvendredis,depuisunan.J’airencontréWilletMattdans larue.Jemesuisarrêtéepourlesécouter,nousavonsparléunpeuet,lasemainesuivante,jelesaccompagnaisavecmonpropreinstrument.Willestguitariste,blond,yeuxbrunsetpluspetitquemoi.Pourtant,jenesuis

passigrandequeça:1,68m.Matt,lui,jouedusynthéportatif.Ilestbrun,desyeux marron rieurs et toujours de bonne humeur. Contrairement à eux, je necherche pas à vivre de la musique. Même s’ils prétendent que je pourrais

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facilement percer dans ce domaine, c’est seulement un exutoire pourmoi, unmoyendem’évader.JetravailleàtempspartieldepuisdeuxansdansuneMECS,Maisond’Enfants

àCaractèreSocial.Certainsdirontquejesuismasochiste,c’estpeut-êtrelecas,maisjemesensutileauprèsdecesgosses.Jemevoiseneux,enquelquesorte.Jene suis pasquelqu’unqui s’attache aux autres, plusdepuisColleen.Ça faittrop mal quand les gens que vous aimez disparaissent ou trahissent votreconfianceeneux,commemonpère.Monamieestdécédéedansmesbras,d’uneoverdose.J’avaisàpeinedix-huit

ans.Encoreunchapitredemavieque j’aimeraispouvoireffacer.Onena faitdesbêtisesensemble, toutes lesdeux,mais jen’avaispascomprisàquelpointl’absence de ses parents et leur indifférence à son égard la faisait souffrir.Unpèreprisparsacarrière,unemèrequipassaitsontempsàcourird’uninstitutdebeauté à des boutiques de vêtements.Colleen nemanquait de rien, hormis del’affectiondessiens.C’estcequej’apporteàcesgamins,unpeuderéconfortetd’attention,dansla

mesuredemonpossible.Etilsmelerendentbien.J’avouequej’aitoutdemêmeeulecœurserréenleurfaisantmesadieuxcetaprès-midi.Pierre,unbambindesixans,aréussiàmefairemonterleslarmesauxyeux.Ils’estaccrochéàmoncou en pleurant et m’a suppliée de revenir. J’ai pouffé de rire lorsqu’il m’ademandé,suruntondereproche,quiallait leurjouerdelaguitaresi jen’étaisplus là. Ilsvontmemanquer.Vraiment.Mais j’aiunabcèsà crever,un rôle àjouer.J’aitoutsacrifiépourça.Je grimpe sur la petite scène et adresse un signe d’excuses aux gars quime

sourientbrièvement en retour. Je sorsmon instrumentde sahousse tandisqueMattbranditlalistedesmorceauxquenousdevonsjouer,maisjen’aipasbesoind’yjeteruncoupd’œil,jem’ensouvienstrèsbien.JememetsenplaceetécouteWillterminerHeathensdeTwentyOnePilots.Ce dernier lève deux doigts etme désigne. Ok. c’est àmoi d’interpréter les

deuxmorceauxsuivants. J’acquiesce tandisqu’il sesaisitde lapetitebouteilled’eau à côté de lui et avale une grande gorgée. Il la repose et s’approche dumicro.Jel’observe,fronçantlessourcils.— Une seconde d’attention, s’il vous plaît. Pour les habitués, je ne vous

présenteplusmacollèguequiaenfineul’amabilitédenousrejoindre.Pourlesautres,ouvrezbienvosoreilles,carelleaunevoixquevousneserezpasprêtsd’oublier.

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Ilse tourneversmoiavecunsouriredecomplaisance.Abruti ! Il saitque jedétestememettreenavantdelasorte.Jelefusilleduregardetiléclatederireavantdemedéclarer:—C’estladernièrefoisquejepeuxt’asticoterunpeu.Demain,tuserasàdes

milliersdekilomètres,alorsjen’aipaspurésister!Jelèvelesyeuxauciel.Willestunvraimôme,parfois.—Ons’yremet?luidemandé-je.Ilopine.Jebaisselesyeuxsurmoninstrumentetfrappetroisfoislamesurede

monpiedavantdememettreàjouer.

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2

Inconnu

J’entre dans le bar etmes tympans sont pris d’assaut par lamusique. Jemefaufile jusqu’au comptoir sans trop de mal, les personnes s’écartant sur monpassagedèsqueleursyeuxseposentsurmonvisage.Letypeinstalléàmadroitesetourneversmoi,m’observedeuxsecondes,se

lèveetdéguerpit.Ducoup,jem’assoissurletabouretqu’iloccupait.Lebarmanaunmomentd’hésitationavantdemedemandercequejedésireboire.—Votremeilleursinglemalt.Sansglace.Réponse sèche et froide, mais c’est ma nature et je la cultive depuis des

années,carcelam’esttrèsutiledansmonboulot.Je souris intérieurement tandis que le gars me sert, les mains légèrement

tremblantes.Riendansleslip,celui-là!J’attrapemaboissonetavaleunelonguegorgée.Monverreàlamain,jepivote

verslascènepourjeterunœilsurletypeaumicro.Ilnesedébrouillepastropmal,maismonregardesthappéparunesilhouettefémininequivaqueunpeuenretrait,nonloindelui.Ellesepenchepourextirperuneguitared’unétuiet là,maqueueseréveille.Oui,noussommesd’accord,elleaunculd’enfer!Jedétailleavecappréciationseslonguesjambesmouléesdanssonpantalonde

cuirnoiretremontesursonjolipostérieur.J’attendsqu’elleseredressepourvoirsilehautdesoncorpsestaussiprometteurquelebas.Pasdedoute,cettenanaestbandantedelatêteauxpieds.Elleporteunevestedecuirassezajustée.Sescheveux sont remontés sur l’arrière de son crâne et attachés en une sorte dechignonenpétard.J’adore.Bon,ceseraitbienqu’elleseretournepourquejepuissevoirlecôtéface.Siça

setrouve,elleestmyope,portedesculsdebouteillesurlenezetestédentée.Cedernierpointestpratiquepourunepetitepipeconventionnelle,mais j’apprécieun peu de douleur. Quoi ? Je suis tordu ? Je ne parle pas de me croquer labanane,nonplus!Lerectoestaussidélectablequeleverso.Savestes’ouvresuruncorsetdecuir

qui soutient ses seins généreux,marque la finesse de ses hanches, son ventreplat.Desmèchesbrunes,presquenoires, échappéesde sonchignon, encadrentsavamment son visage oblong à la peau halée. Mon regard s’attarde sur sa

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bouche pulpeuse et des images de ses lèvres pleines autour de ma queueenvahissentmonesprit.Jefermelespaupièrespourmeressaisiretlaisselacolère,sentimentquineme

quittejamaisvéritablementdepuisquejesuisgamin,refairesurface.Jesaisquejen’aiaucunechancedebaiserunefemmecommeelle,nimêmeunequiseraitplus singulièred’ailleurs, il suffit devoirmes traits pour le comprendre.Maisbon,jepeuxtoujoursfantasmerenl’admirant.Jeportedenouveaumesyeuxsurelle,jeveuxsavoirdequellecouleursontles

siens,maiselleneleslèvejamaiscomplètementverslasalle.Son acolyte, à moins que ce ne soit son mec, fait une petite allocution au

micro. C’est prétentieux et ça ne semble pas lui plaire à elle non plus. Ils’approche pour lui dire je ne sais quoi et j’ai soudain envie de lui éclater latronche contre le mur, mais elle n’esquisse aucun geste tendre ou sourireaffectueux en retour. Peut-être n’est-elle pas avec lui, tout compte fait. Ellepivotefaceàlasalle,maissespaupièressontbaissées.—Ouvrelesyeux,bébé!grondé-je.Je suis surpris lorsqu’elle entameFirestonedeKygo et ce, sans se servir du

micro.Finalement,lepetitconàsescôtésaraison.Savoixestchaude,sexy,unpeurauqueetglissesurmapeaucommeducaramelfondu.Ellem’ensorcelleetmespoilssedressentlégèrementsurmesavant-bras.Jel’observe,impressionné.Je n’y connais rien en talent musical, mais elle, elle me subjugue. Je le suisencore plus, alors qu’elle passe au morceau suivant :Human de Rag’n BoneMan.Elleaducoffreet,vulacorpulencedel’interprèteoriginaldecetitre,jeme demande où elle va chercher autant de puissance alors qu’elle est assezmenue.Touteslespersonnessonttournéesverselle,enadmiration,maislabellen’atoujourspasrelevésespaupièresetsemblecommehabitéeparlamusique.Jeveuxvoirsesyeux,merde!Jequittemon tabouret, approchede la scène et fais signe auguitariste. Il se

penchelégèrementversmoi,sanscesserdejouer,etjeluisorslachoselaplussalacequimevientàl’esprit:—Quand elle aura terminé cemorceau, demande-lui si elle suce aussi bien

qu’ellechante.Dis-luibienquec’estdemapartsurtout.Ouais, je suis vraiment un salopard sur ce coup-là, mais je suis certain

d’obtenirlerésultatescomptéensuite.Ilcesse immédiatementdegratterson instrument,mecontempleavecmépris

ets’apprêteàm’envoyerpromener,maismonregardluiclouelebecetilrecule

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même d’un pas. L’idée qu’il peut se la taper et pasmoi,me plonge dans unecolère noire. Je retourne à ma place, vide mon verre cul sec et attends, sansquitterlascènedesyeux.Leblondinetannonceunepausedecinqminutessitôtquelabruneterminesa

chanson.Ils’adresseàelleetmedésigned’unmouvementdetête.Saréactionest immédiate, elle braque ses prunelles tels des pistoletsmitrailleurs surmoidurantcinqsecondesetdétourneleregard.Jeluifaispeur.Jenepeuxlaquitterdesyeux,souslechoc,tandisqu’elles’entretientaveclesdeuxmusiciens.J’aidéjàvudesbillesd’unbleu turquoisevif comme les siennes, il y ahuit

ans,chezlesBlacks.Maisc’estimpossiblequecesoitlamêmegonzesse,n’est-cepas?Gaby, la fille de tous mes fantasmes. Elle avait seize ans et a débarqué de

Suisseavecsacopine,dont leprénomm’échappe.CettedernièrefricotaitavecPim’s,undesmotardsdugroupe.Jebossaisavecluisurlesbécanes.Gabymesaluaittouslesjours,maisjeluirépondaisparungrognementetprenaisgardeàluimasquermon visage. Chaque fois que je la sentais bouger dansmon dos,pour essayer d’entrevoir mes traits, je laissais tomber mes outils et allaism’enfermerdanslepetitbureaudugaragequiétaitpourvud’unevitresanstain.Jenevoulaispaslirelacrainteetencoremoinslerejetdanssesyeux,commejelevoyaissisouventdansceuxdesautresnanasquelesgarssetapaient.Combiendefoismesuis-jeastiqué lemancheen l’épiant,alorsqu’ellevenaitcollersonpetitnezcontrelafenêtredubureau?Unnombreincalculable.J’étais raide dingue de cette petite brunette aux courbes parfaites. Tout le

mondelesavait,saufelle.Etchaquefoisqu’undesgarsexprimaitlesouhaitneserait-ce que de s’approcher d’elle, je cognais commeun possédé.C’est de làquevientlesurnomqu’ilsm’avaientattribuéd’ailleurs:Démon.Voircettejeunefemmebrune,bienroulée,aveclesmêmesyeuxturquoise,me

rappelleGaby.Jemedemandesicettedernière,aveclesannées,ressembleraitàcelle qui se trouve non loin de moi, sur cette scène. Non, probablement pas.Pourtant,enl’observantbien…Tuprendstesrêvespourdesréalités,mec!Àmagrandesurprise,ellereportesonregardsurmoietnemelâchepas.Elle

sembledéterminée,maisàquoi,jen’ensaisrien.J’aimeraism’assurerquelateintedesesprunellesn’estpasdueàl’éclairagede

lasalle,maisellepassesoninstrumentausecondgarsquiledéposederrièresonsynthé.Elles’emparedumicrosansfiletm’adresseunclind’œilavantdemetournerledos.Merde,c’estbienlapremièrefoisqu’unefemmeagitdelasorteà

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monégard.Est-cequejel’intéresse?Tuasvutagueule?Tudélires,là!Ellefrappetroisfoissontalonsurleplancher,entameS&MdeRihannaetfait

glissersavesteencuirsursesépaules,s’endéfait,unbrasaprèsl’autre,d’unefaçon si sensuelle que ma queue durcit d’un coup. J’ai à peine le tempsd’apercevoir l’aigle aux ailes déployées, dessiné à l’encre noire entre sesomoplates,qu’elle se retournesubitement. J’ai rêvéouc’est lemême tatouagequelemien?Elleplantesesprunellesdanslesmiennesetsedéhanchedoucement, touten

passantlesdoigtsdesamainlibresursapoitrine,puisleslaissedescendre,avecune lenteurcalculée,sur l’intérieurdesacuisse.Mabiteestaussidurequedumarbreetsursautelorsqu’àlafind’unephrase,ellerejettelentementsatêteenarrière,sortleboutdesalangueroseetlafait lentementglisserlelongdesonmicro,engémissant.—Bordeldemerde,soufflé-je.Toutlemondealesyeuxbraquéssurelle.—Ellechauffetoutelasalle,là!marmonné-je.Après tout, ils peuvent bien tous baver commedes escargots, son regard est

rivéaumien.Elledéfait lentement labouclede sa ceinture et sort celle-ci despassantsde

son pantalon d’un geste vif, tout en quittant la scène. Elle s’approche demoid’unedémarcheféline,sensuelle,aguichante,maissansêtrevulgaire.J’ai le souffle court et ma queue palpite de plus en plus fort. Je manque

exploser dans mon froc, alors qu’elle fait durement claquer l’extrémité de saceintureàcôtédemacuisse.Putain, jesuisbrutalquand jebaise,maispasaupointd’utiliserunfouetoudeschaînes,merde!A-t-elledespratiquessexuellesparticulières,ousonchoixdechansonest-iljustedélibérépourm’allumer?LemorceautoucheàsafinetelleenchaîneimmédiatementavecSexwithme

deRihanna.Jesuisausupplice.Cettefemmeestunedéessedelascivité.Elleseglisseentremesjambesetposesamainlibresurmacuisse.Uncourant

électriquepartdecepointdecontact,remontejusqu’àmonaineetfaitvibrermaqueue comme celle d’un serpent à sonnettes. Le bout de ses doigts parcourtlentementmonventre,montorse,moncou.Jenerespireplusetdéglutisàgrand-peine.Samainpasseensuitedansmescheveuxendésordre,enagrippeunepoignéeà

l’arrière demon crâne et tire dessus d’un petit coup brusque, ce qui me faitlégèrementreculerlatête.

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Aucunefemmenem’a jamais touchécommeelles’yemploieetçam’excitecommeundingueautantqueçamefoutenrogne,carellemelaisseentrevoirceàquoijen’auraijamaisdroit.Ladiablessel’ignoreetpoursuitsadoucetorture.Elleplaquesesseinscontre

ma poitrine et frotte doucementmon entrejambe de son genou tandis que sesyeuxturquoiseflamboient.Cesontlesflammesdelavengeance.Monregardlafoudroieautantdedésirbrutquedecolèrenoire,maisçanela

déstabilisemême pas.Mesmains sont cramponnées au tabouret, mais j’ai deplusenplusdemalàmecontrôlerpournepaslaplaquercontrelecomptoiretlaprendrecommeunsauvage.Ellemelâcheets’écartetandisqueletitrearriveàsafin,puispivoteversle

barman.—SersunverreàmonsieurGlaçon,Brice,c’estpourmoi.Ellemefaitdenouveaufaceetmegratified’unlargesouriredecomplaisance.—Bonnenuit,Ice,susurre-t-elled’unevoixsexy,avantdetournerlestalons

souslesvivatsetcoupsdesiffletsdesautrespersonnesprésentesdanslebar.Jevaislatuer!Etlabaisercommeunfou!Bon,peut-êtrepasdanscetordre.

Maisbordel,sijequittemonsiègemaintenant,jesuiscertaindemarchercommeun cowboy tant mes couilles sont gonflées comme des melons et ma queuechargéecommeunfusilàpompeprêtàtirer.

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3

Gaby

JerejoinsWilletMatt,fièredemoi,aprèslaleçonquejeviensdedonneràcetabruti. Lorsque je l’ai assassiné du regard, le sien m’a figé sur place et j’aidétourné les yeux. Mais, j’ai pensé que si j’arrivais à affronter ce type, j’yparviendrai certainement avec mon père, alors j’ai pris mon courage à deuxmains.Jemesuisserviedelui,commeuntest.Ilestgrand,unmètrequatre-vingt-dixenviron,bâticommeunrugbyman.Son

t-shirt moulant ne cache rien de la musculature de ses abdominaux et de sespectoraux, ma légère exploration de son corps par-dessus ses vêtements leconfirme.Cetypeesttoutenmuscle.Uncorpsparfaitqui,jedoisl’admettre,estloindeme laisser indifférente.Dèsque j’ai posémamain sur lui,monventres’estmis à faire des cabrioles et le désir s’est répandudansmes veines à unevitesse fulgurante. Le tatouage à la base de son cou, une chaîne brisée,m’intrigue.Quantàsonvisage…Iln’estpaslaid,sansêtreuntopmodelnonplus.Sonprofilgaucheestpourvu

de trois cicatrices inesthétiques qui courent du haut de sa tempe jusqu’à samâchoirevolontaire.L’unepasseàl’extrémitéextérieuredesonœiletluilaisselapaupière légèrementplisséede façonnaturelle.Mais leplus saisissant, c’estson regard.Ses yeux, d’unbleu très clair, presque translucide, vousglacent lesangparleurhostilité.Ice.Çam’estvenucommeuneévidence.Cetypeestaussifroidqu’unblocdeglace.Seulssescheveuxchâtainfoncé,parsemésdemèchesplusclaires,sontd’unedouceurincroyable.—Jeneteconnaissaispascommeça,lâcheMattalorsquejerangemaguitare

danssahousse.—Fautpasmechercher.—En tout cas, il semble très à l’étroit dans son pantalon. Il ne cesse de se

tortillersursontabouret.—Tantmieux.Jesouhaitemêmel’avoirsuffisammentexcitépourqu’ilsedéversedansson

futal. Il aurait l’air fin. Mais, je ne suis pas en meilleur état que lui, monentrecuisseesttrempé.Jesaisqu’ilm’observeavecunelueurmeurtrièredepuisquejeluiaitournéle

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dos,carjeressenscommeunesortedecourantélectriquecontinuquipartdemanuqueets’étendjusqu’aucreuxdemesreins.—Onprendunverre,avantdepartir?demandeWill.Jeleregarde,dubitative.—Euh…—Dis-moicequetusouhaitesetjet’apportetonverreici.Je m’apprête à accepter et change d’avis immédiatement. Je n’ai fait que

rendrelamonnaiedesapièceàcemec,sijeluilaissevoirqu’ilmedéstabilise,iljubilera.Horsdequestion.Etpuis,noussommesdansunlieupublic,iln’oserapastenterquoiquecesoit.—Non,jeleprendsaucomptoiravecvous.—T’essûre?demandent-ilsenmêmetempsd’untonsceptique.Bonsang,ilsontvingt-sixansetcesontdeshommes,ouiounon?—Certaine.Jemeretourneetfocalisemonregardsurletypeblondquisetientunpeuplus

loinqueIce,aucomptoir.J’avanced’unpasassurémais,intérieurement,jen’enmènepaslarge,vulacarruredugars.Jem’accoudeaubar,dosàlui.MattmefaitfaceetWillseplacelégèrementenretraitànoscôtés,defaçonàcequenouspuissions converser. Les garçons commandent des bières, moi, je n’ai pas letempsd’ouvrirlabouche.—Servez-luidonclamêmechosequemoi.Voixtrèsrauque,basse,virile,autoritaire.Vraimenttrèssexy.Brices’activeavecunregardcraintif.Apparemment,Icefoutlatrouilleàtout

lemonde.JevoisMattécarquillerlesyeuxavantdesentirunlégersoufflechaudquicaressemoncoudélicieusementetfaitvibrermoncorps.Merde.—Soittuestrèsstupide,soittuasunesacréepairedecouilles.Rassure-moi,

tun’étaispasunmecavantdesubiruneopérationchirurgicalepourdevenirunefemme,n’est-cepas?murmure-t-ilàmonoreille.Jememordslalanguepournepasrire,maisnepeuxm’empêcherdesourire,

cequisurprendlesgarçons.—Peut-être.Vasavoir,réponds-jeàvoixhaute,maissansmeretourner.Bricedéposeunverreàmoitiéremplid’unliquideambrédevantmoietrecule

aussitôt.Oùsontdoncpassésleshommes?Lesvrais?Jemesaisisdelaboissonetl’avaled’untrait.L’alcoolmebrûlelagorge,mais

chassetoutecraintedemoncorps.LesgarsterminentleurbièreetMattesquisse

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ungestedelatêteendirectiondelasortie.JedéposeunbilletsurlecomptoiretpivotefaceàmonsieurGlaçon.—Adieu,Ice.Jesorsetrejoinslesgarçonsdehors.—Onsevoitdemainàl’aéroport,commeconvenu?demandé-je.—Oui,Mattmeconduira.Pourhuitheures,c’estbiença?—Oui.Nousnoussaluons,puisj’enfourchemonbébéetrentrechezmoi.Jemedévêts,entredansladoucheetrepenseàcequej’aiaperçudanslesyeux

d’Ice.De la surprise,undésir intenseetde lacolère,maiscen’estpascequim’intrigue le plus. Non, c’est cette petite lueur d’espoir, très fugace, qui meperturbe.Maisquem’est-ilpasséparlatêtepouragirainsi?Gesteapaisantensigne de paix, comme pour enterrer la hache de guerre, ou au contraire,audacieux,pourmeprouverquej’enétaiscapable?Aucuneidée.Jesorsdeladoucheetmeplantedevantlemiroir.—Quelquechosenetournepasrondcheztoi,mafille,dis-jeàmonreflet.Jehausselesépaules,mesèche,brossemesdents,enfilemanuisetteetrejoins

monlit.Jedorstrèsmal.Jerêvedemamèreetmeréveilleensursaut,lecœurbattantàtoutrompre.Ilmefautbiendeuxheurespourretrouverlesommeiletmonespritdériveversunnouveausonge.Deux yeux bleu pâle, presque translucides, me fixent durement, puis me

contemplentavecespoiretdisparaissent.Unsoufflechaud,aussi légerqu’uneplume,court lentementsurmoncouenunecaresseexquise, trèsviteremplacépar des lèvres exigeantes quim’embrassent avec langueur.Une langue, d’unesensualitéextrême,melèchedelabasedemonoreilleàmanuque,provoquantde délicieux frissons. Elle descend le long dema colonne vertébrale jusqu’aucreuxdemesreins,allumantunfeudebroussequisepropageenmoi.Desdentsmordillentmesfesses,petitspincementsvifsàlalimiteentredouleuretplaisir.Desmainspuissantesparcourentmescourbesavecdouceuretdesdoigtshabilesroulent ensuite lapointedemes seins, tirent lentementdessus. Jegémis etmecambre. Ils poursuivent leur chemin le longdemon ventre, s’emparent demaféminité,agacentmonpointsensible.Moncorpss’électriseetsetenddeplaisirlorsqu’undoigtpénètreenmoi avec force. Il va-et-vient avec lenteur d’abord,puisplusrapidement.Monbassinondulepourl’accompagner,pouvoirlesentirplus loin.Ma respiration se saccade et mon ventre se contracte tandis qu’unincendiemeconsumedel’intérieur.Uneboucheaspiremonclitoris,lelape,le

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suce,alorsqu’unseconddoigtrejointlepremieràl’intérieurdemoi.Mondoss’arqueetmatêteserenverseaumomentoùunevaguedeplaisirmesubmergeaveclaforced’unerivièreencrueetm’engloutit.Jem’éveilleencriant,alorsquelaclartédupetitmatininondelachambre.Je

m’assoisetbaisselesyeuxsurlamoiteurdemonentrejambe.Merde,c’estbienlapremière fois que çam’arrive.Maisbon,ça fait unmoment que je n’aipasutilisémonamiRocco,monvibromasseurrosebonbon.Ingénieuxetpratique,ilestdotédemultiplesvitessesdevibrations,unetêtetournanteetdeplus,onpeutleglisserdanssonsacàmains.Parcontre,jenesaispasàquoilesgenspensentquand ils fontévoluer leur invention.Dessextoysqui s’illuminentcommedesampoules,couleurauchoix.Manqueplusqu’ilfasseiPod,desfoisquel’envienousprennedecréerunediscothèquedansnotrevagin.Ilme faut bien cinqminutespourme ressaisir et comprendrequedes coups

insistantssontfrappéssurmaported’entrée.—Oui,oui,j’arrive.Paslapeinedevousexcitercommeça,marmonné-je.Jeme dirige jusqu’à la porte sansmême penser àme couvrir et ouvre cette

dernière.Jerestebouchebée,n’encroyantpasmesyeux,puisundésirprimairem’assaille,alorsquemonregardglissesurleslèvressensuellesdel’individu.

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4

Ice

Cette nanam’impressionne de plus en plus.Elle ose s’installer au comptoir,dosàmoi,certes,maisputain,elleaducran!Je m’approche de son oreille et ma queue tressaille de nouveau. Elle sent

tellementbon,bordel!Unparfumsubtiletsucré.Jemedemandesisapeauestaussisavoureusequesonodeuretilmefautfaireappelàtoutleself-controldontjesuiscapablepourmeretenird’ygoûter.Je vois son pote, les yeux emplis d’effroi et ronds comme des soucoupes,

reculerd’unpas,commesi j’allais lebouffer, lui,plutôtqu’elle.Quellecouillemolle,celui-là!Jeregrettedenepasvoirsonvisagelorsquejeluidemandesiellen’étaitpas

unmecavantdesubiruneopérationchirurgicalepourdevenirunefemme,maisjesuissûrqu’ellesourit.Jecrèved’enviequ’ellemeregardedenouveau,mêmesi ce n’est que pour une poignée de secondes. Mais, elle ne me fera pas ceplaisir.Pourquoileferait-elle?Elle exauce ma prière muette juste avant de quitter le bar et me surprend

encore, en faisant le truc le plus inattendu qui soit. Ellem’adresse un souriresincèreetpasseledosdesesdoigtssurlapartiedemonvisageabîmé.Caressedouceetlégèrequimefaitressentirtantd’émotionsquej’aidumalàfaireletri.Jelaregardecommeuncon,lesoufflecoupé,alorsquemaqueues’agitedeplusbelle.Cettefemmemetue.Jelasuisdesyeuxjusqu’àcequ’ellefranchisseleseuilpuis,sansmêmem’en

rendrecompteavantquejen’atteignelaportedubar,jel’épieàtraverslavitre.Putain,j’aivingt-neufans,maisj’ail’impressiond’enavoirquinze,là!Jesuissoulagé lorsqu’ellesecontentededonneruncoupsur l’épauledeses

compagnonsenguisedesalut.Jesuispathétique.Vraiment.Je manque d’éjaculer dans mon calecif quand elle retire le bâtonnet qui

maintient son espèce de chignon en place, puis secoue sa longue crinière.Bordel, ses traits sont plus mûrs, mais elle lui ressemble beaucoup tout demême!Lacolèregrondeenmoialorsquejelavoisrécupéreruncasqueetgrimpersur

unegrossecylindréerougevif.Elleestfolle,ellevasetuersurunenginpareil!

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Jesorsdubarentrombeaumomentoùelledémarresurleschapeauxderoue,maniesamachineavecdextéritéetdisparaîtdanslanuit.Bon,ellemaîtrise.Jesuisàlafoissurprisetrasséréné.Cependant,unequestionm’obsède.Jeretourneaubar,déterminéàobteniruneréponse.—Lachanteuse.Comments’appelle-t-elle?demandé-jeaubarman.—Euh…C’estque…Ilmegonfle,là!Jemepenchevivementsurlecomptoir,attrapel’encolurede

sa chemise dans mon poing et tire le bonhomme jusqu’à ce que nos nez setouchent.—Sonprénom,insisté-je,d’untonincisif.—Ga…Gaby.Bordeldemerde!Est-ilpossiblequecesoitlamême?MaGaby?—Sonnom?—Aucuneidée.Jelesecoueetilpanique.—Marchand!EllesenommeGabyMarchand.C’estelle,putain!Moncœuraunratéet touscessentimentsenfouisdepuis

desannées,remontentd’uncoupàlasurface.Jeregrette,encoreaujourd’hui,delui avoir cachémonvisageà l’époque. J’ai été lâche.Après tout, voir le rejetdanssonregardn’auraitajoutéqu’unepersonnedeplusàunelongueliste.Mais,jepensequecelam’auraitanéanti.Seulement,jenelesauraijamaissijen’essaiepas, n’est-ce pas ? Alors, là, maintenant, si j’ai, ne serait-ce qu’une infimechanced’apprendreàlaconnaîtreunpeu,jeveuxlasaisir.Jem’apprêteàposeruneénièmequestionaugars,maisjelevoisgrimaceret

émettre un geignement. Je relâche légèrementmon emprise sur sa chemise etaperçoisunedesesmainss’approcherdesonentrejambe.Ilesttraindesepisserdessus,cecouard!— Si tu ne souhaites pas également chier dans ton froc, file-moi

immédiatementsonadresse.— Personne ne sait où elle habite, pas même les deux musiciens qui

l’accompagnent.C’estlavérité.Elleesttrèssecrètecommefille.Toutcequ’onsait,c’estqu’ellevitdansleXIXearrondissement.Ilmedébite tout ça à une telle allure que je ne suis pas certain d’avoir tout

compris,saufl’essentiel.—Pourtant, tu la paies bien pour qu’elle se produise dans ton bar, avec les

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papiersadéquats,non?—Non,ellerefuse.Jenerémunèrequelesdeuxgarçons.Elleditqu’ellejoue

pourleplaisir,paspourl’argent.Çanem’étonnepas. En plein hiver, àMarseille, non pas qu’il y faisait très

froid, je l’ai vu retirer son blouson et le donner à un sans-abri.Oui, çam’estarrivé de la suivre à moto. Bon d’accord, très souvent, mais j’étais morducommeunchienenrut.Ellemeplaisait,mêmesijen’aijamaisdiscutéavecelle.Peut-êtrel’aurais-jetrouvéetartesijel’avaisfait,maisputain!Cequ’elleétaitbandante!Ungrondements’échappedemeslèvresàcesouveniretlegarsreprend:—J’aiinsisté,maiselleneveutriensavoir.Nemefaitespasdemal,s’ilvous

plaît,geint-il.Jelerelâcheetilsoupiretelunballonquisedégonfle.Jedécided’enrajouter

une couche et le gratifie demon regard le plusmauvais, avant de rapprochervivementmonvisagedusien.—Bouh!Ilfaitunbonddedeuxmètresenarrière.J’aidéjàvudespleutres,maiscelui-là

battouslesrecords!Jerejoinsmonbolide,uneZZR1400,delamêmecouleurquecelledeGaby,

cequime fait sourire. Je sorsmonportable et active la fonctionGPS. J’ai unpied-à-terreenbanlieueparisienne,mais jeneconnaispas lavillepourautant.LorsquelacarteduXIXearrondissements’affiche,jerâle.—Merde,faitchier!Ellenepeutpasvivredansunendroitpluspetit!Jegrimpesurmabécaneengrimaçant.Mescouillessontaussiduresquedes

noixdecocoetj’aiàpeinedébandé.Impossible,tantquejepenseàelle.Jenelatrouveraiprobablementpas,maisj’auraipeut-êtreunpotdecocuentombantsursamoto.Arrivédanslesecteur,jesillonnetouteslesrues,maisaucunetraceduvéhicule

rougeet encoremoinsde sapropriétaire. Je rentre à l’hôtel,dépité, lesburnesprêtesàexploseretlaqueueenflammes.Jemebranle sous la douche pourme soulager,mais dès que je rejoinsmon

plumardetquejefermelesyeux,sonimagemehanteetmaqueueseredresseàmefairemal.—Faitchier,merde!Jenedorsriendelanuit,finisparm’effondrerd’épuisementverscinqheures

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dumatin,pourêtretirédesbrasdeMorphéeuneheureplustardparlafonctionréveildemonportable.Autantdirequejesuisd’unehumeurdechien.Deplus,jedoisrécupérerunemorveuseetlaramenerenunseulmorceauchezsonpère.Commesij’avaisunegueuleàfairedubabysitting!Je me gare devant un vieil immeuble en briques dans une rue du XIXe

arrondissement,cequimefaitdenouveaupenseràelle.Bienévidemment,monservicetroispiècesréagitauquartdetour.J’appelleuntaxiet luicommuniquel’adresse.Ilsechargeradutransportdes

bagagesainsiquedelapetiteMariaPérez.Jenesaismêmepasàquoiressemblecette gosse ni son âge. Mais bon, vu le père, je l’imagine capricieuse etsuperficielle,cequin’améliorepasmonhumeur.J’entre dans l’immeuble et cherche le nom sur les boîtes aux lettres pour

prendre connaissance de l’étage. Je ne sais que penser lorsque mon cerveauintègrecequejelis:Pérez/Marchand1erétage.Merde,ceseraitunesacréecoïncidencetoutdemême,non?Jen’oseycroire

etpourtant,mes jambes s’élancent etgrimpent lesmarchesquatre àquatre. Jetambourinesurlaporteàlafairetrembler.Lorsqu’elles’ouvreenfin,jesuisàlafois auparadis et en enfer.Maqueuegonfle commeun tuyaud’arrosage souspressionprêtàexploser.Bordel,elleveutmecastrerouquoi?!Gabysetientlà,laboucheentrouverte,dansunenuisetteensatinrougeàfines

bretellesquiluiarriveàpeineàmi-cuissesetquinemasqueriendesestétonspointés vers moi. Ses cheveux sont en désordre, comme si elle venait des’envoyerenl’air.Elleferaitbanderuneunuque,nomdeDieu!Son regards’attardeun instant surmabouche,puiselle serre subitement ses

cuisses l’une contre l’autre et se mord doucement la lèvre inférieure. Monmissile se tend au maximum tandis que mes couilles se contractent, prêtes àenvoyerlasaucepourledécollage.Jem’agrippeavecforceàl’encadrementdelaporteengrognantpournepasluisauterdessus.—Désolée,sereprend-elle.J’étaisenpleinrêveérotiqueavecungrandviking

blond.Mes doigts serrent si fort le chambranle que le bois craque. Je vais lui en

donner du viking, moi ! Mon regard la harponne, mais la belle change deposture. Elle carre les épaules, redresse la tête, menton en avant. Une vraieguerrière.Etçameplaît.—Commentas-tueumonadresse?Tum’assuivie?demande-t-elled’unton

hargneux.

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—Non.JesuislàpourescorterlapetiteMariaPérezauprèsdesonpère,maisj’avouequeterevoirestloindemedéplaire.Jem’attendsàuneréponsesarcastiquedesapart,maiscertainementpasàce

qu’elleme fusille de ses prunelles pleines de colère etme demande d’un tonvenimeux:—Etcommentmonpèrea-t-ilobtenumescoordonnées?Sonpère?Lesbrasm’entombent.Jecomptaisluiavouerquijesuis,maissi

elleestvraimentsafille,jenepeuxpasprendrecerisque.—TunepeuxpasêtreàlafoisMariaPérezetGabyMarchand.Sesyeuxturquoises’arrondissentdesurprise.—Commentsais-tuquejemefaisappelerGabyMarchand?Ohbébé,j’aimeraistellementtedirelavérité.—Lebarman.Donc,ilestimpossible…Jen’aipas le tempsde terminerma tiradequ’elle tourne les talonsd’unpas

exaspéré.J’entreetfermelaportederrièremoi.Maqueuefrétilleaumomentoùellesepencheenavantpourrécupérerunpasseportdanslapochedesavesteencuir.Ellel’ouvreetmelecollesouslenez.—MariaGabrielaPérez,lis-je,avecregret.Alors,pourquoiMarchand?—C’étaitlenomdemamère.Elle se tourne d’unmouvement vif et range son passeport,mais la lueur de

tristessedanssonregardnem’apaséchappé.J’aienviedelaréconforter,maisjenesaispascommentm’yprendre.Cogner,jesaisfaire,maisça...—Tesbagagessontprêts?demandé-jepourlasortirdesespensées.Ellesoupire,sesaisitd’unpapiersurlatableetpivote,l’airdéterminé.—Jenevoyageraipasavectoi,Ice,etencoremoinsàbordducoucoudemon

paternel.J’aiunvolcommercial.Contrairementàcequepensemonpère,jesuisune grande fille. Alors, tu peux repartir d’où tu viens et refermes la porte ensortant,ceseragentildetapart,dit-elle,brandissantsacarted’embarquement.La revoilà en mode combattante. Oh, ma belle, on peut me qualifier de

beaucoupdechoses,maiscertainementpasd’êtrecomplaisant.—Tonpèremepaiepourteramener,poupée,alorsvat’habilleretnediscute

pas.Je luiarrachesonpapelarddesmainset ledéchireenpetitsmorceauxqueje

balance par-dessus mon épaule. Son regard, d’abord incrédule, me lance deséclairs.Jem’attendsàunerépliquefoudroyante,maisellemesurprendencore:

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— Bien. Je vais me vêtir. Si mon seigneur et maître veut bien avoirl’obligeancedepatienter.Jel’observe,suspicieux.Mêmesisontonestbelliqueux,jenel’imaginaispas

baisserlesarmessivite.J’ensuispresquedéçu.Ellem’adresseunlargesourire,s’emparedesavesteetd’untrousseaudeclés

surlatable.Ellesedirigeverslapiècequidoitluiservirdechambre,puisqu’unmatelas est installé à même le sol, et y pénètre. Elle repousse légèrement laporte,mais ne la fermepas. Je l’observe relever ses cheveux et les attacher àl’aided’unepince.Jedeviensfouquandellefaitsavammentglisserlesbretellesde sanuisette le longde sesbras, puis laisse lentementdescendre levêtementsoyeuxjusqu’àlachutedesesreinsoùjedécouvreunsecondtatouage.Je ne pense plus, je fonce droit sur elle avec ma queue qui bat comme un

tambour dans mon calebar. J’entame le dernier pas lorsqu’elle frappeviolemmentlaportedesontalonetjemelaprendsenpleinegueule.Elleafaillimepéterlenez,putain!—Jevaislatuer!grommelé-je.Jel’entendssebidonnerderrièrelaporte.Jenesaismêmepasoùjetrouvela

volontédenepasentrerpourlaplaquercontreunmuretlabaiseràfond.Puis,j’entends de l’eau couler. Super, je l’imagine complètement à poil sous ladouche,maintenant!Je tourne en rond au milieu de son appartement quasi vide, ce qui me

déconcerte,vulepaquetdepognonquesonpèredoitbrasser,etjerepenseàcequej’aivusursondos.Unephrasejolimentcalligraphiéeaucreuxdesesreins:«Aussibasquel’onsoit,onserelèvera.»Puis,cetatouageentresesomoplates,identiqueaumien,maiselleyaajoutéunnomjusteendessous:«Démon».Çameperturbeetmetoucheaupointd’enavoirmalaubidedepuisquejem’ensuisaperçu.Pourquoim’a-t-ellegravésursapeau?Cette nana me plaisait déjà par le passé, mais cette femme, aujourd’hui,

m’attirecommeunaimant.Inutilederêver,elleneserajamaisàmoi,mêmepaspouruncoupvitefait.Etpuis,mêmesielleledésirait,cequineserajamais lecas vu ma tronche, son père a d’autres desseins pour elle. Mais putain,l’imaginer dans les bras de ce vicelard de Manuel, me fait grave chier,maintenant!Bon,qu’est-cequ’ellefout?Çafaitbienquinzeminutesquel’eaucoule,elle

vaenavoirencorepourcombiendetemps?J’enaimarred’attendre!—Tuasbientôtterminé?crié-jeàtraverslaporte.

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Aucuneréponse.J’entredanslachambreetlà,j’aiunmauvaispressentiment.Placardvide,plusdedrapsur lematelas,fenêtrebéante.J’ouvre laportedelasalledebainsàlavolée.L’eaus’écouletoujoursdeladouche,maisplusdebellebrune.Jeviensdemefaireavoircommeunbleu!Je sorsen trombede l’appartementenclaquant laportederrièremoi.Rienà

foutre s’il est vandalisé ! Je dévale lesmarches et entends le bruit dumoteurd’une bécane. Je sors de l’immeuble aumomentmême où sa tête pivote versmoi.Unsacdesportnoirestarriméàl’arrièredesonengin,laguitaresurledosdelabelle.Ellem’adresseundoigtd’honneur,baissesavisièreetmetlesgaz,alorsquejenesuisplusqu’àdeuxpasd’elle.Cettenanameplaîtdeplusenplusetjesouriscommeunidiot.Siellepense

m’avoirberné,ellesetrompe.J’aieuletempsd’apercevoirlenomdel’aéroportsur le papier avant de le déchiqueter et elle va payer pour ce qu’elle vient defaire.

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Gaby

J’aitrompélegorilledemonpèreavecunefacilitédéconcertante.Passerparlafenêtreaétéunjeud’enfant.Jepratiqueleparkourdepuisquatreans,disciplineextrêmementphysiquequiconsisteàtransformerdesélémentsdumilieuurbainoururalenobstacleàfranchir.Lesgensconnaissentpeucetartdudéplacement,hormisàtraverslefilmYamakasid’ArielZeitoun.Jemetsmoinsdevingtminutespourparveniràdestination.WilletMattsont

déjàgaréssurleparking.Jem’arrêteauniveauducoffredelapetiteCliovertpommeetcoupelemoteur.Jedescendsdemamoto,retiremoncasqueetdéfaislasanglequimaintientmonbagage.—Bonjour,Gaby,mesaluent-ils.—Salut,lesgars.—Pastroptristedemelaissertonbijou?Si,maisjen’aipaslechoix.

—Jenepensepasquelacompagnieaérienneaccepteunexcédentdebagagesdelasorte.Jesorslespapiersliésàlavente,lessigneetlesluitends.Willm’adéjàréglé

lemontantcorrespondantque j’ai reverséàuneassociationcaritative.Làoù jevais,jen’aibesoinderien,hormisunebonnedosedecourage.Manuquesemetsubitementàmepicoter.Jemeretourne,maisneremarque

rienquim’inquiète.Etpuis,nonseulementParisdisposedetroisaéroports,maisj’aivuletaxiquiattendaitdevantl’immeuble.Impossiblepourcedernierdemesuivredanslesembouteillages.JelaissemoncasqueàWill,ilenferabiencequ’ilvoudra,etfaismesadieux

auxgarçons,sanseffusionniaucunregret.J’attrapelapoignéedemonsacetmedirigevers lebâtimentsansmeretourner,unebouled’appréhensionauventre.J’attendscejourdepuissilongtemps,maissuis-jeréellementprête?Netelaissepassubmergerpartesémotions,Gaby.Tupeuxyarriver.

Jenecomptepluslenombredefoisoùj’aientenducetterengaineaucoursdecessixdernièresannées,maislaprononcernem’aidepasvraiment.Je réimprime mon billet et rejoins la file d’attente pour enregistrer mes

bagages.Jemeremémorel’expressiondeIcelorsquej’aidémarrésoussonnez

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puis, je perçois, du coin de l’œil, une forme massive débouler comme unbulldozer.J’aiàpeineletempsdepivoterqu’unemainpuissanteseplaquesurmes fesses tandis que l’autre agrippe mes cheveux à l’arrière de mon crâne.J’ouvre la bouche pour crier, mais Ice me déstabilise totalement quand il medéclare:—Nem’abandonnepas, bébé, jenepeuxpasvivre sans toi !Cette femme,

c’étaituneerreur.Pardonne-moi,monamour!J’éclate de rire, puis ses lèvres s’abattent sur les miennes. Elles sont

exigeantes,chaudes,douces,sensuelleset,àmagrandesurprise,fontvolerdespapillons dansmon abdomen et apaisentmon stress.Alors, quand une langueaudacieuse vient caresser lamienne, je ferme les yeux et lui réponds sansmefaireprier.Icemetfinànotrebaiseretmecontemple,cherchantàlirejenesaisquoidans

mesyeux.Necomprenantpaspourquoicecontactbuccalm’atantpluetvoulantm’assurerquejen’aipasimaginéceconstat,jeposemesmainssursesjouesetpars à l’assaut de sa bouche, ce qui le surprend brièvement. C’est si doux etagréable quemes lèvres semettent à bouger lentement contre les siennes. Laboule d’angoisse dans mon ventre disparaît, laissant place à une délicieusechaleur.Jepratiquelesexesanslendemain,mêmesijen’airienfaitdepuisdeuxans,

maisjen’embrassepas.Jamais.C’estmarègle.Jetrouvequec’esttropintimeetneveuxpasprendrelerisquederessentirlamoindretendressepourquiquecesoit. Mais là, je clos mes paupières et me délecte de toutes les sensationsmerveilleusesquemeprocurecesimplebaiser.Ice me presse plus fort contre lui, plaquant ainsi mon ventre contre la

protubérancedesonjean.Ilsedéchaînesurmeslèvres,moncou,memordillelelobe de l’oreille, propageant toute cette tiédeur dans mon corps jusqu’à monclitoris qui se met à pulser. Je lui réponds avec la même ardeur, mes mainss’aventurantdanssacheveluresisoyeuse.—J’aitellementenviedetoi,bébé,murmure-t-ildesavoixrauque,avantde

reprendrepossessiondemabouche.Nos langues se cherchent, s’enroulent, se lèchent et se caressent. Ice me

soulève de samain plaquée surmon postérieur et je passe naturellement mesjambesautourdesataille,oublianttoutautourdemoi.Lachaleursetransformeenbrasier lorsqu’ilme fait légèrementmonter et descendre contre lui, frottantainsisavergedurecommedel’acier,surlacouturedemonpantalon.Monpoint

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sensiblesemetàpalpiterplusfort.Jegémis,Icegronde.Je perds la raison, alors quemes lèvres se détachent des siennes, partent en

explorationlelongdesamâchoire,soncou.Jefrotteplusviteetplusfortmonentrejambesurcettebossesisolide,maiscen’estpassuffisant,j’aibesoindelasentir en moi, qu’elle me remplisse. J’ai déjà éprouvé du désir, mais ça n’ajamaisétéaussipuissantqu’encetinstant.—Baise-moi,soufflé-je.Samains’agrippeplusfortàmescheveuxetseslèvresreprennentviolemment

possessiondesmiennes.Ilsebaisseetseredresseaussitôt,puism’emportejenesais oùd’unpas rapide. Ilmedépose au sol, dans la cabinedes toilettes pourhandicapés,avantdefermeràclé,sansquejamaisnoslèvresnesequittent.Jecroisquenousensommesincapables,animésd’undésirbrut,primitif.Samainquittemachevelureetjelasenstirersurl’étuidemaguitare.Jedéfais

lecrochetde la sanglesurmapoitrineet lepoidsdemon instrumentdisparaîtimmédiatement. Nos lèvres se séparent et Ice recule légèrement, son regardplongé dans le mien, tout en défaisant les boutons de son jean. Ses yeuxflamboient d’un désir ardent, ce qui décuple le mien et je suis brièvementsurprisedeneplusyvoircettehostilité.J’ail’impressionfugacedejoueràShifumialorsquenousplongeonsunemain

danslapochearrièredenospantalonsetenressortonschacununétuiargenté,cequinousfaitsourire.Sonexpressionrieusechangeradicalementsestraits.Ilestbeau. Ses cicatrices ne me rebutent pas, elles accentuent seulement son airdangereux lorsqu’il a ce regard antipathique, mais là, ce n’est pas le cas. Jepenseavecregretqu’ildevaitêtremagnifiqueavantderécoltercesmarques.Jeretireprécipitammentmesboots,monpantalonetmonstring trempé.Mes

yeux se rivent sur sa verge longue et épaisse, alors qu’il la recouvre dupréservatif. J’humectemes lèvres avec gourmandise, ce qui le fait gronder. Jen’aipasletempsdemepenchersursonmembrequ’ilmeplaquebrusquementcontrelacloison,passeunemainderrièrematête,l’autreàl’arrièredemacuissedénudée. Il soulèvema jambequ’il dépose contre sahanche et positionne sonsexeàl’oréedumien.—Nememénagepas,Ice,soufflé-je,agrippantsesépaules.Il tiredoucement surmes cheveuxpour redressermonvisagevers le sien et

s’emparedemeslèvrestelunassoiffé.Saboucheglissejusqu’àlabasedemonoreille,descendsurmoncou, l’embrasse, le lèche. Jebrûleetn’aspirequ’àcequ’ilapaisecesflammesquimedévorentdel’intérieur.

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—Prends-moi…Ice,dis-je,pantelante.Il plonge son regard affamé dans lemien etme pénètre d’un coup de reins

violent.Jerejettematêteenarrièreencrianttandisquemesyeuxseferment.Ilseretirelentement,puisreplongeenmoiavecvigueur.—Ohbordel,oui!m’écrié-je.Ce ballet se répète encore trois fois, puis Ice augmente le rythme de ses

puissantscoupsdereins,attisantl’incendieenmoi.—Putain…Gaby…C’esttropbon,bébé.Ilva-et-vientàunecadencedeplusenpluseffrénéeetlacloisontremblesous

chacundesesmartèlementsenmoi.Sesdentsmepincentaucreuxducou,alorsquemesonglesgriffent ses pectorauxpar-dessus son t-shirt.Nousne sommesplusquebouches,languesentremêlées,halètements,grognementsetcris.Lefeurugitdansmoncorps, seconcentreaucreuxdemes reinset sediffuse jusqu’àmanuque.Toutesmesterminaisonsnerveusessetendentàl’extrême.—Jevais…OhmonDieu,Ice,ouiiiiiii!hurlé-je.Il me donne un dernier coup de boutoir brutal, rejette sa tête en arrière et

exploseàsontourdansunfeulementbestial.

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6

Ice

La meilleure baise de toute ma vie et je ne pense qu’à recommencer ! Parcontre,desoncôté, j’endoute.Pasunmotdepuisquenoussommessortisdestoilettes.Ellemesuitsansrechigner,maissembleperduedanssespensées.Nulbesoind’êtredevinpourencomprendrelateneur.Jen’osepasaborderlesujet,decraintequ’ellemerejetteetjerefused’entendrecesmots.Unvraigamin.Noussommespresquearrivésaupieddu jetdesonpèrequandelleouvre la

bouche.—Jolisuppositoire,lâche-t-elle,avecmépris.Je l’observe, surpris, me demandant ce qu’elle peut bien reprocher à cet

appareil.Nousgrimponsàbordetellesaluelespilotesenespagnol,quieux,lareluquentavec lubricité. Je les fusilledu regard, ilsdégagentaussisecdans lecockpitetrefermentderrièreeux.Gaby paraît écœurée par le luxe à l’intérieur. Son vieux ne se refuse rien.

Moquettebouclettedans les tonsgrisclair, sièges inclinablesergonomiquesencuirblanc, cabinetde toilettes et salledebainsgrand luxe, ainsi qu’unepetitecuisine design qui permet de réchauffer des plats préparés, petit frigo et barintégrés.—Mmmm…Jeparieque lescueilleursdecaféontàpeinedequoibouffer,

grommelle-t-elle.Là,ellen’apasvraimenttort.Elleprendplacesurl’undessiègestandisqueje

rangenosaffairesdans le compartiment àbagagesqui est accessible envol etm’installeenfaced’elle.Elleregardeàtraverslehublotetsemblesongeuse.Jel’observe un long moment, sans rien dire. L’avion commence à rouler et ellefermelesyeux.—Donne-moilaforce,maman,murmure-t-elle,alorsquenousdécollons.Vusoncomportementdepuistoutàl’heure,jecomprendsqu’ellen’adhèrepas

au train de vie de son père, mais là, elle m’intrigue. La simplicité del’aménagementintérieurdesonappartementmerevientàl’esprit.—Tuaslaissétonlogementouvert.Tunecrainspasqu’ilsoitsquatté?Ellericaneetplantesonregarddanslemien.

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—J’ailaissélesclésaugardienavantdepartir.Ah,lefameuxtrousseausurlatable.Rusédesapart.Nosregardsrestentrivésl’unàl’autrependantuntempsinterminable,puisle

siencommenceàdériverlentementsurmontorse.Elleledétailleavecinsistanceetquandellesemordillelalèvre,maqueuesedressecommeunressort.Jedéfaismaceinturedesécurité,quittemonfauteuill’airderien,etmedirige

vers la salle de bains. J’entre et retire mon blouson ainsi que mon t-shirt. Jesouris quand, à travers le miroir, je constate que ses ongles ont laissé desmarquesdegriffuressurmapeau.Ouais,c’étaitexplosif.Jerenfilemoncuirpourqu’ellenepuissepasdistinguermontatouagedorsalet

laissemonvêtementouvert àdessein.Si elleveutmater, surtoutqu’ellene seprive pas ! J’espère que ça l’incitera à remettre le couvert parce que passerquasimentonzeheuresdevol,avecelleàproximité,sans la toucher,meparaîttotalement impossible. Je vais devenir fou. Je ne pense qu’à caresser sa peau,tétersesnichonsetgoûterlasaveurdesachattebrûlantedepuisquenousavonsquittél’aéroport.Je ressorset, lapremièrechoseque jevois,cesont ses longues jambesnues

galbéesetathlétiques.Elles’estchangéeetmetourneledos.Elleporteunerobelégère qui lui arrive au-dessus du creux des genoux. Mes yeux se portentimmédiatementsursonculquandellesepenchepourextirpersoninstrumentducompartiment à bagages. Des images obscènes de mes doigts profondémentancrés dans ses hanches et de ma queue la fourrant à fond par-derrièreenvahissentmonesprit.Jesoupiredefrustration,retourneàmaplaceetfermelesyeux.Jelesrouvreet

redressemonbuste,cequiécartepluslargementlespansdemoncuir,alorsquej’entendslespremièresnotesdeGlitterAndGolddeBarnsCourtney.Commelaveille,sespaupièressontbaisséesetsonpiednubatlamesure.Elle

semblevraimentailleurs lorsqu’elle joueet jemedemandesi lamusiquen’estpasunrefugepourelle.— Depuis quand chantes-tu ? demandé-je une fois qu’elle a terminé son

morceau.Son regard se voile de tristesse avant de se perdre de nouveau à travers le

hublot. Je ressens un pincement au cœur, pourtant, d’ordinaire, je ne suis pasquelqu’unquiselaisseattendrir.Elle reste un long moment silencieuse, puis murmure d’une voix à peine

audible:

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— Depuis que j’ai intégré l’internat en Suisse, à sept ans. Ma mère memanquait terriblement,alors jemesuismiseà fredonner lescomptinesqu’ellemechantait.Çamedonnaitl’impressionqu’elleétaitavecmoi,mêmesielleneleseraitjamaisplus.Jesuischoqué.—Pourquoitonpèret’a-t-ilenvoyéeàl’étrangersijeune?Satêtepivoteversmoietsesyeuxemplisdecolèrememitraillent.Ohbébé,

ça,c’estunsentimentquejeconnaistrèsbien.—Tutravaillespourlui,doncjesupposequ’ilt’ena…Sonacrimonies’amenuisejusqu’às’éteindrecomplètementdèsquesonregard

glisse surmon torsedénudé. Intéressant.Elle lorgnemon corps avecune telleaviditéquemoncornetàdeuxboules ressusciteaussitôt. J’ai l’impressionqueson inspection dure une éternité et commence à m’impatienter. Allez, bébé,saute-moidessus!Je fais doucement rouler lesmuscles demes pectoraux etma queue se tend

encoreplus lorsqu’elleentrouvrelégèrement laboucheetpasse lapointedesalangue sur sa lèvre inférieure. Puis, elle ferme subitement les yeux. Ah non,merde!—Ilfautqu’onparle,Ice,annonce-t-elled’untongrave.Putain,non!Jesaiscequivasortirdesaboucheetjeneveuxpasl’entendre.

La colèreme submerge comme une traînée de poudre. Je closmes paupières,refusantdevoirsonairdésoléoudurejetdanssonregard.—Inutiledemefairetoutundiscourssurtesremordsparrapportàcequis’est

passéplustôt!dis-jed’untoncinglant.—Hé!C’estquoitonproblème,ducon?!Etouvrelesyeuxquandjeteparle!Jem’exécuteetsuissurprisdelatrouverdebout,devantmoi,lesmainssurles

hanches,exaspérée.Elleest encoreplusbandantequandelleest furieuseet çam’excitecommeunmalade.—C’esttoi,monsouci.Jesuisatteintdepriapismedepuishiersoir.Tumates

mon corps comme si tu allais me bouffer et au lieu de te ruer sur moi, tum’annoncesqu’ondoitdiscuter!Rienàfoutresituéprouvesdesregrets!râlé-je.—Oh, et parcequemonsieur est frustré, c’est une raisonpourm’agresser ?

J’aiadoréchaqueinstantàl’aéroport,maistuétaismoinsconetbeaucoupplusattrayantdanslestoilettes!

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Jemeredressed’unbondetlatoisedetoutemahauteur,furibond.— Tu m’as trouvé attirant ? Tu te fous de moi, là ?! Je suis couturé de

cicatriceshideuses!Tucroisquejenesaispasàquelpointjesuisrepoussant?Mêmelesputainslesplusvieillesetlesplusmochesdanslesbordelsmalfamésneveulentpasdemoi!Tusaiscequeçafaitd’êtrerejetésansarrêtdepuis taplustendreenfance?!Ellereculed’unpas.Jenesaissi jeluifaispeurousielleestchoquée,mais

elleredresselementonetréplique:— Je ne sais pas ce que tu as vécu, mais je n’en suis certainement pas

responsable!Alors,cessedeteregarderlenombril,prendstescouillesenmainset remets-toienquestion!C’est toiseulqui repousse lesgensavec tonregardhostile et ton agressivité, ce n’est pas lesmarques sur ton visage ! J’allais teproposerunaccord,malgrémonprincipedenejamaiscoucherdeuxfoisaveclemêmehomme.Jet’aitrouvéséduisantquandtum’assouriàl’aéroport,maispaslà!crie-t-elle.Hein ? Quel accord ? Je me prends la plus grosse claque de ma vie rien

qu’avecsesmots,maischaque foisqu’elle inspirepourmedébiterunephraseassassine,sapoitrineremonteetmefaitdesappelsdephare.Etmoi,commejesuiscomplètementmabouletquemoncerveausetrouvedansmoncalecif,jeluidemanded’untoninnocent:—Onpeutbaiser,maintenant?Ellelèvelesyeuxauciel,incrédule,avantdetournerlestalonsetlâche:—Vachier,Ice!Je la regarde fouiller rageusement dans son sac, tout en analysant ce qu’elle

vientdemedire.Ellevoulaitmeproposeruneentente sexuelle?Putain,maisquelconjesuis!Puis-jerattraperlecoup?Jenesaispascommentm’yprendreavecune femme,etpourcause,aucune

n’ajamaisvouludemoi.Mêmemamèrem’aabandonnéquandj’avaiscinqans.Jem’approchedoucementderrièreelle.—Pardon,dis-je,penaud.Je n’en reviens pas moi-même de ce que je viens de dire. Qu’est-ce qu’il

m’arrive?Jamaisjenem’excusepourquoiquecesoit!Elleseredresseetpivotefaceàmoi,déconcertée.—Excuses acceptées,mais je ne ferai rien avec toi, Ice. Pas aujourd’hui en

toutcas.

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Mouais,mais cela signifie-t-il qu’il y aura une prochaine fois ou est-ce unemanièrepoliedemerepousserendouceur?—Quand,alors?Ellehausselesépaulestoutenm’adressantunsourirenarquois.—Unefoisquejeseraiàcoursdepiles,jesuppose.Monregardglissesurl’objetrosequ’elletiententresesmains.Ahnon,pasde

zizienplastique!Jenesaispasquiestl’abrutiquiainventécestrucs,maisilauraitmieuxfaitdesecasserunejambe!—Confisqué,dis-je,luiarrachantlesextoydesmains.—Hé,rends-moiça!s’écrie-t-elle,alorsquejepivotesurmoi-même.Jemedirigeverslasalledebainsetdécidedeprendreunedouchefroidepour

domptermesardeurs.Jeposemesmainssurlaparoi,baisselatêtepourlaisserl’eaucoulersurmanuqueetmeremémoresespropos.Personnenem’ajamaissuggérédemeremettreenquestionavantelle.PourMarcus, lechefduclandesBlacks,devenirunhommeconsistait,entre

autres,àêtreplusdurmentalement,savoirmanierunearmeetseservirdesespoings. Je ne suis jamais devenu un véritable membre des Blacks, quiaujourd’hui n’existent plus et qui étaient considérés comme faisant partie ducrimeorganisé.Monfrère,oui,etçaluiacoûtélavie,sixmoisaprèsl’arrivéedeGaby.Çaaétél’élémentdéclencheurdemondépartpourlacapitale.J’aigrandidanslaviolenceetçanem’ajamaisvraimentplu.Pour mon employeur, avoir fréquenté un gang et paraîtreméchant sont un

atout.Mon boulot actuel, même si je suis toujours entouré de brutalité, mesatisfaisaitpleinementjusqu’àilyapeu.Pluslesjourspassent,plusl’enviededémissionnermetente.Je rejoins le salonaprèsm’être séché et changé.Gabya incliné son siège et

s’estendormie.Elleesttellementbelle,putain,mêmequandelledort.Jem’installesurlesiègeàcôtédusien,nepouvantdétachermonregarddeson

visage.Seslongscilsnoirsreposentsurlanaissancedesesjoues,j’admiresonpetitnez,seslèvresquiappellentlesmiennesetjecommenceàsomnolerquandje l’entends geindre dans son sommeil. Elle s’agite, pousse de petits cris. Jem’assoisetmepencheverselle,retirelesécouteursdesespavillonsetcaressealternativementsatêteousajoueavecdouceurpourl’apaiser.—Mochailínálainndonn1,murmuré-jeàsonoreille.Ellemarmonneunebribedephrase,unmot,puisunautre,sansseréveiller.

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Jemedemandesiellesaitqu’elleparleendormant.Toutcequisortdesam’apprendbeaucoupdechoses.Aufuretàmesurequelesphrasesseforment,lacolèreboutenmoietjen’ai

qu’uneenvie:cognersurquelquechose.Gaby geint de nouveau. Je continue de lui prodiguer mes caresses et lui

chuchotedesparolesderéconfortdansmalanguenatale.JesaisqueJuanCarlosPérezestunnarcotrafiquant,maismaintenant,jepense

quec’estunmonstre.JenecomprendspaspourquoiGabyrendvisiteàsonpère,àmoinsquecene

soit définitif, vu lesprojetsqu’il apour elle,maisune chose est certaine : s’iltoucheàunseuldesescheveux,jeluividemonchargeurdanslebuffet!

1Majoliebrune.

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7

Gaby

Je récupèremon iPodainsiqu’unstringpropredansmonsac,merendsversl’évierdans le coincuisineetnettoiemonentrejambe trempé.Quand jepensequejem’apprêtaisàluiproposerunplanculoccasionnel!J’étaismêmeprêteàenfreindremaseconderègle !Jenesaispascequim’aprisà l’aéroport,maisc’étaittellementbonquejenepensequ’àremettreça!Et puis, ce corps divin avec son torse et ses abdos si bien sculptés, ses

tatouages à l’encre noire, tribaux pour la plupart, hormis deux prénoms,commentrésister?Connorestgravéperpendiculairementsurlecôtégauchedesonventre etGaib au niveaude son cœur. J’ai toujours une envie furieuse decaresser,lécheretmordillersapeau,maisilatoutgâchécetabruti!Jenevaispasmentir, Icem’attiredepuis laveille,malgré son regardhostile

quimerefroiditunpeu,maisjeparviens,jenesaiscomment,àpasseroutre.Lesgarsauxalluresdebadboyonttoujoursretenumonattention,mêmesiIceestlepremieràquijemedonne,cequiestplutôtironiquequandonsaitcequejefais.C’estpeut-êtremieuxcommeça finalement, jenedoispasoublierpourqui iltravaille.Qui l’a rejeté, enfant ? Samère ?Sonpère ?Les femmes également si j’en

croiscequ’iladéclaré.Est-ceseulementvrai?Est-cepourcetteraisonqu’ilaceregardàvousglacerlesang?Je sais que j’ai été dure dans mes paroles tout à l’heure, mais également

hypocrite. J’étais exactement comme lui à une époque. Je repoussais tout lemonde,envoulaisàlaterreentière,étaisbelliqueuse.SaufavecColleen.C’étaitunevraiegeek.Toujourslesyeuxrivéssurunécranetdumatérielélectroniquepleinsachambre.Sonobsessionpourl’informatiquen’apassuffiàladétournerdesespenchants

autodestructeursavecdesdroguesentoutgenre,auxquellesjen’aijamaisvoulutoucher.Cannabis,ecstasy,cocaïne,héroïne,toutypassait.Jenem’ensuispasaperçueimmédiatementnonplus.J’aieubeauluidired’arrêtercesmerdes,ellen’ajamaisécouté.Quandjesuisrentrée,cejour-là,jel’aitrouvéegisantsurlesol,inconsciente,

respirantàpeine.J’aiappelé lessecours,mesuisagenouilléeet l’aiprisedans

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mes bras. Je l’ai suppliée de se réveiller, l’ai secouée, mais elle n’est jamaisrevenueàelle.C’étaithorrible.Lessecourssontarrivés,maisColleenétaitdéjàpartiedepuisplusdecinqminutes,etmoi,j’étaisàlafoisanéantieetencoreplusencolèrequ’auparavant.Ilyavaituneseringueet tantde sachetsde stupéfiantsvariés, étalés sur son

bureau,quelesflicsm’ontsuspectéededealer.Deplus,lorsquelapersonneautéléphonem’ademandésijesavaiscequemonamieavaitpris,j’aitouttripotépourenfaireladescription.Cen’étaitpaslapremièrefoisquej’avaisaffaireauxgendarmes,donc,j’étaisplutôtmalbarrée.J’ai passé la nuit en garde-à-vue dans une petite cellule en béton. Le

lendemain, le typequis’estoccupédem’interroger laveille,étaitaccompagnéd’unautrebonhommeencivil,lacinquantaine.Audébut,j’aicruquec’étaitunflicaussi,maispasdutout.J’aiécarquillélesyeuxcommedessoucoupesquandilm’afaitlaproposition

la plus inattendue qui soit : il m’a offert un boulot. Moi, j’y ai vu uneopportunité, alors j’ai accepté de suivre cet homme, Gustave, mais je lesurnommeGrincheux.Ilamaintenantsoixante-cinqansetjeneconnaistoujourspas son patronyme ni ses fonctions véritables puisqu’il refuse de partager cesinformationsavecmoi.Aujourd’hui,ilsaitoùjemerends,maiscequ’ilignore,c’estquejen’aipasl’intentiondefairecepourquoiilmerémunère.Jerejoinsmonsiège,l’inclineetm’allonge,dosauhublot,TakeMeToChurch

de Hozier à fond dans les écouteurs. Je ferme les yeux, m’endors et monsubconscientdérive.Laclasseestterminée.Jemeprécipitehorsdel’écolepourrejoindremaman.Nousdevonsallerfairedes

coursesàBogotaetjevaismonterdansl’avionquisertdelignerégulièrepourlapremièrefois,alorsjesuisexcitée.Jeregardepartoutautourdemoi,maisjenelavoisnullepartetjecommenceàm’inquiéter.Elle est toujours accompagnée de deux hommes qui travaillent pour mon père lorsqu’elle vient me

chercher,àcausedesgroupesarmésquisévissentdanslepays.Céline,mamaman,estfrançaise.ElleétaitétudianteàParisetpassaitdanslespubsàlatélépourduparfumavantderencontrermonpapa.Ilssonttombésamoureuxaupremierregardetjesuisnéedixmoisaprès.Mamanavaitdix-neufans,papa,trente.Jeme dresse sur la pointe des pieds pour regarder au-delà des adultes qui récupèrent leurs enfants.

Mamanestgrande,blondeavecdesyeuxbleu-vert, impossiblede lamanquer.Etpourtant, jene lavoistoujourspas,maisjerepèreManueletAlberto,leshommesauservicedemonpère,quiapprochent.—Salutgamine,mesalueManuel.Alberto a vingt-six ans,maisManuel n’en a que quinze.Nous jouions beaucoup ensemble jusqu’à la

semainedernière,maisc’estunhommemaintenant.Enfin,c’estcequ’ildit.Àquelâgedevient-onadulte?Aucuneidée.—Oùestmaman?—Àlamaison.Jesuisrassurée,maiségalementdéçue.Jeneprendraipasl’avionaujourd’hui.

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—Tamèreest...Albertos’interrompttandisqueManuelluifaitlesgrosyeux.Monregardpassedel’unàl’autre.—Quoi?Elleestmalade?—Oui,c’estça,répondManuel.—Qu’est-cequ’ellea?—Tonpèretel’expliquera.Allezviens,gamine,onyva.

Je les suis sans plus poser de questions jusqu’à l’embarcation sur le RioVaupés. Je vis assez loin, de l’autre côté de la rivière, sur une très grosseexploitationdecaféquiappartientàmonpapa.Quand Manuel enfourche sa moto, je grimace en voyant le pistolet dissimulé dans son dos, sous la

ceinturedesonpantalon.Jedétestecesmachins,ilsmefontpeur.Jemontederrièreluitandisqu’Albertosemetauvolantdelajeep.Nousroulonsunlongmomentsurunchemindeterre,cariln’yapasderoute,ici.

J’aperçois lamaison,unegrandebâtisseblancheàunétage,construiteà lalisièredelaforêtamazonienne,moncœursemetàbattretrèsfortetj’aiunpeumalauventre.JesautedelamotodèsqueManuels’arrêtedevantleperronetpasselaporteencourant.—Maman!Aucuneréponse.Jemeprécipitevers lesescaliersquimènentà l’étage,mais jestoppenetaubasdes

marchestandisquemonpèrelesdescend.Ilestcouvertd’untrucrouge,commedelapeinture,maisplusfoncé.Ilenapartoutsursesvêtements,lafigure,sesbrasetsesmains.Monpèresefigelorsqu’ilmevoitetmeregardebizarrement.—Jet’interdisdemonter.Tuascompris?dit-ild’untonsec.Mon papa ne m’a jamais parlé comme ça, même quand je fais des bêtises. Je recule d’un pas et

l’interroged’unevoixtremblante:—Oùestmaman?Ilnemerépondpasetsedirigeversl’évierpourselaverlesmains.Jeredemandelamêmechosequatre

foisavantquemonpèreseretourneetmecrie:—Ellen’estpaslà,alorscessedeposerlaquestion!Jecomprendsquemonpèreestencolère,qu’ilvientdemementiretqu’ilestarrivéquelquechoseàma

mère.Jem’élancedroitversl’escalieretgrimpelesmarchesdeuxàdeux.—Reviensicitoutdesuite!hurlemonpèretandisquej’atteinslepalier.Jenem’arrêtepasetfoncedirectementdanslachambredemesparents,puis jememetsàhurler.Ma

mamanestlà,allongéeparterre,maissatêteressembleàunepastèquequiaéclatéentombantausol.Ilyadusangpartoutautourd’elleetdanslachambre.Jemejetteàgenoux,enlarmes,etsecouesoncorps.—Maman,réveille-toi!Jesangloteetlasupplieenmêmetemps.Jetournelevisagedemamamanversmoi,jeveuxqu’elleme

regarde,maiscequejevoisestencorepire.—Jet’aiditdenepasmonter!Monpèremetireenarrière,maisjerefusedelâchermamaman.Ilm’attrapeparlatailleetmeporteen

directiondemachambre.Jemedébatsdetoutesmesforcesetréclamemamèreàcorpsetàcris.Monpèremedéposeausoletmehurledelafermer,maisjen’enfaisrien.—Jeveuxmamaman!Maman!J’essaiedepasser le seuildemachambre,maismonpèrem’enempêche.Jeréclamemamèreencore

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plusforttandisqueleslarmesruissellentsurmespetitesjoues.—Elleestmorte!Cessedebeugleretdechialer,çanelaramènerapas!Matou,monchat,estmortl’annéedernière.Papal’aenterréderrièrelamaison.Jecomprendscesmots,

maisjeneveuxpasquemamamansoitmorte,alorsjememetsàhurlerdeplusbelle.Monpères’énerve,mecriedessus,puism’assèneungrandcoupdepoingsouslamâchoirequim’envoievoltigeràtraverslapièce.Mes larmes brouillentma vision,mais j’aperçois sa silhouette sortir dema chambre et fermer laportederrièrelui.Jerécupèremonpetitoursenpeluchesurmonlit,leserrefortcontremoietmedirige,tremblantdetout

moncorps,verslecoinleplusreculédemachambre.Jem’installedosàlaporte.J’aitrèsmalàl’endroitoùmonpapam’afrappée.Jeveuxquemamamanmeserredanssesbras.Jepleureencoreetencore,avantdem’endormir,malheureuse,terrifiéeetépuisée,alorsquelanuitcommenceàtomber.Le lendemain soir, je suis dans un pensionnat en Suisse.Mamaman estmorte etmon papa vient de

m’abandonner,dansunpaysetuneécolequejeneconnaispas,aveclamâchoirebrisée.

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8

Ice

JemepasselamainsurlevisageenmeréveillantetconstatequeGabyaquittésonfauteuil.J’aiveillésursonsommeilagité,maismacourtenuitaeuraisondemoidèsqueGabys’estapaisée.Jeredressemonsiègeet tombelenezsursonpetitculquibougedoucementsurlerythmedeHeySexyLadydeShaggy.Bienévidemment,ças’éveilledansmoncaleçon.Ellenepeutpasécouter,jenesaispas,moi,duheavymetal?!L’imagedesatêtebalançantsauvagementsalonguechevelureentremescuissesnuesenvahitmespensées.Bordel,c’estencorepire,achevez-moi!Je tends lamainet lapausedélicatement sur sahanche.Elle se retourne,un

grandsourireauxlèvresetéteintsoniPod.J’aiunlégermouvementdereculetretiremes doigts de sur son corps quand j’aperçois le couteau à steak qu’elletientdevantelle,contresapoitrine.—Salut.Biendormi?demande-t-elle.J’opineetm’enquiers:—Qu’est-cequetufais?Ellehausselessourcils,interrogative.J’ajoute:—Situcomptesm’embrocheraveccejouet,tuperdstontemps.—Oh,ça?Non,jem’ennuyais.J’aifaitdessandwichs,tuenveux?J’acquiesce,suspicieux.Lacuisineestàmoinsdedeuxmètres,alorsqu’est-ce

qu’elle fout avec cet ustensile dans les mains, ici, à se déhancher ? J’ai laréponsedèsqu’elle s’éloignepour aller chercher les en-casqu’elle apréparés.Lessiègesencuir,faceàmoi,sontéventrésàplusieursendroits.Mêmesilecuirest souple, elle a dû en baver pour taillader les coussins, surtout avec cetinstrument.Ellerevientavec,dansunemain,uneassietterempliedepetitssandwichsen

triangleetdansl’autre,unecanettedebière.Ellemetendletout,commesiellen’avaitrienfaitderépréhensible.—Merci.Pourquoiavoiragiainsi?demandé-jeendésignantlesfauteuilsd’un

signedetête.Elleesquisseunpetitsourire,déposeleboutdesesdoigtssurseslèvres,hausse

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légèrementlessourcils,unelueurespiègledansleregardetlâche:—Oups.Ondiraitunegaminequivientdefaireunebêtise,cequimedéconcerte,car

ellemesembleplusmaturequeça.—Pourunefemmequisepermetdemeprodiguerdesconseilsderemiseen

question,jetetrouvebienpuériletoutàcoup.— J’ai dérapé. Ça peut arriver, non ? répond-elle sans animosité, avant de

s’asseoir.Oui, et c’est compréhensible vu les paroles qu’elle a prononcées dans son

sommeil.Seulement, jemedemandesielleaconsciencede la réactionquevaavoirsonpaternelendécouvrantcequ’elleafait.—Tonpèrevanousbuterpouravoirabîmésessièges.Sonvisagepivoteversmoietellemerépondd’untonrailleur:—Ne t’inquiètepas, Ice.Pendant quemonpèreme sermonnera, tu auras le

tempsdet’enfuir.—Çan’ariendedrôle,Gaby.Si j’en juged’après tes réactions lorsquenous

sommes montés à bord, tu n’approuves pas le luxe dans lequel évolue tonpaternel,maistunesaispasdequoiilestcapable.Ses yeux semettent à flamboyer de colère,mais elle réplique d’un ton très

calme:—Aucontraire,Ice,jeconnaistrèsbienlesaptitudesdemonpère.Certes,maisilferaplusqueluibriserunoscettefois,surtoutsielles’amuseà

leprovoquerens’enprenantàsesbiens.Ellesoupire,puisajoute:— Je ne suis pas idiote. Ce n’est pas parce que je n’ai pas revumon père

depuismonentréeà l’internatque jenesaispasdequellemanière ilgagnesavie.Cen’estcertainementpasenexportantducaféqu’ils’estpayécetappareil.LesnarcotrafiquantspullulentenColombie,toutlemondelesait,maisjamaisilnepointeraitunearmesurmoi.Elleéprouvedoncdel’affectionpoursonpaternel,maisaprèstout,quelenfant

n’aimepassesparents,malgrécequecesderniersontpuluifaire?Etpuis,queconnaît-elledecemilieu?Probablementrien.Ellen’ajamaisététémoindequoiquecesoit lorsqu’ellevenait augarage,àMarseille.Le fournisseur deMarcusétaiteffectivementColombien,mais il senommaitGilberto.Jemedemandesielleneprêchepaslefauxpoursavoirlavérité.Lefaitqu’elleavoued’elle-même

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ne pas avoir vu son père depuis si longtemps, confortemon opinion sur JuanCarlosPérez:ilestsanscœur.PabloEscobar2,luiaumoins,aimaitsafamille.Unequestionmeturlupine,cependant.—Tuvasl’épouser?—Qui?s’enquiert-elle,déconcertée.—Manuel.Ellericane.J’attendsavecappréhensionsaréponsequinevientpas.Imaginer

ceperversposersesmainssurellenemeplaîtpasdutoutetmefoutenrogne.Gabym’alaisségoûterunmorceaudedessert,maiscommejesuisgourmandetégoïste,jeveuxlegâteauentierpourmoitoutseul.—Voilàdoncenquoiconsistesesfameuxprojets,murmure-t-elle.Elleresteunlongmomentperduedanssespensées,secouelégèrementlatête

etsoupire.Moi,jebousd’impatience.—Donc,tuvasconvoler,marmonné-je,désabusé.Ellepivotelégèrementversmoietinspectemestraitsavecminutie.—Tupréféreraisquecesoitavectoi,Ice?J’écarquillelesyeux,surpris.— J’ai envie de te baiser non-stop, bébé, mais pas au point de t’épouser.

L’amour,leromantisme,toutescesconneries,cen’estpaspourmoi.—Bien,maisjenevoispasenquoimaréponset’importe.Je sais que cela ne changera rien, je devraisme satisfaire de ce qu’ellem’a

accordéàParis,maisj’enveuxencore,alorsjeplongemonregarddanslesien.— Si tu acceptes l’union que prévoit ton paternel, je ne suis pas prêt de te

toucherànouveau.Manuel,aussivicelardsoit-il,vatecouvertelunmômeavecsonnouveaujouet.Jenepensequ’àcaressertapeau,tétertesnibards,goûterlasaveurdetachatteetenfoncermaqueueauplusprofonddetoidepuisquenousavonsquittélaFrance,dis-jed’untontrèsrauque.Mes paroles, loin de la répugner, semblent l’exciter. Ses yeux se mettent à

brûlerdedésir.Seslèvress’entrouvrent légèrementetsarespirations’accélère.Je pense qu’elle va, enfin, se jeter sur moi, mais tout à coup, je lis durenoncementdanssonregard.— La Colombie regorge de jolies filles, Ice. Tu n’auras que l’embarras du

choix,déclare-t-elle,avantdesesaisirdesaguitare.Jesuisdépité.Ellen’assumepassonappétencesexuellepourmoietcequ’elle

vientdemedirenemeplaîtpasdutout.Jel’écoutegratterunmorceauquejene

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reconnaispas,puismonregardglissesurunmotgravésursoninstrument.—Quiest-ce?demandé-jeinnocemment,luidésignantl’inscriptionsurledos

dumanchedesaguitare.Sonregardsevoiledenostalgie,cequimedéconcerte.—Untype.—C’esttonpetitami?—Non, jen’enai jamaiseu.Démonest…Jenesaismêmepascomment le

décrire.Jenepeuxpasaffirmerl’avoirconnunonpluspuisqu’ilnem’ajamaisadressélaparole,dit-elle,leregardperdudanslevague.Nousdiscutonsunmoment,ellem’expliquecequejesaisdéjà,àproposdece

Démonetdonc,demoi-même.Gabysembleàlafoisrêveuseetpleinederegretsenl’évoquant.—Tuétaisamoureusedelui?—Non. Il avait un cul à tomber et un dos sublime. Je rêvais demordre le

premier et de lécher le second sur toute la longueur avant de calerma tête aucreux de ses omoplates. J’imagine qu’à seize ans, on est sous le charme den’importe qui ouquoi.Pourmoi, c’était le versode son corpspuisque je n’aijamaispudistinguerlerecto.Mon cerveau ne retient que trois mots : cul, mordre, lécher. Une onde

électrique me parcourt l’échine pour se concentrer au creux de mes reins,affolantmonbaromètre dont l’aiguille se dresse immédiatement pour sortir demoncalecif.—Plusilmefuyait,plusjepersévérais.Sesgrognementsmefichaientunpeu

la trouille,maisc’étaitcommesiuneforce invisiblem’attirait indubitablementverslui.Cependant,cen’étaitpasréciproque.Puisunjour, ilestparti, laissantcetteguitareàmonintention.Merde.Siellesavaitàquelpointellesetrompe!Monattirancepourelleétait

incommensurable,mais j’avais tellement peur…Quel regard aurait-elle eu envoyantmasalegueule?— Peut-être n’a-t-il jamais souhaité te montrer ses traits parce qu’il était

affreux.Yas-tudéjàsongé?Elledéposesoninstrumentetpivoteversmoi.—La beauté extérieure n’est rien si on est pourri de l’intérieur,murmure-t-

elle.Elleaccompagnesesparoleseneffleurantlapartiedemonvisageabîmé,puis

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posesamainauniveaudemoncœur.Elle regardesesdoigtsposéssurmoietsemble troublée.Aumomentoùellecommenceà retirer samenottedemon t-shirt,jemesaisisdoucementdesonpoignetetredéposesamainsurmapoitrine.J’aimequ’ellemetoucheetjecroisqu’elleappréciedelefaireaussi.Leboutdesesdoigtscaressedoucementmonpectoraltandissesyeuxfixentmontorseavecavidité.—Gaby,jeneveuxpasparaîtreprésomptueuxenaffirmantquemoncorps,à

défautdematronche,tefaitenvie,maispourquelleraisonrenonces-tuàcequitetente?Sonregardremontejusqu’àtrouverlemien,puiselleretirelentementsamain

demoncorps.—Tutravaillespourmonpère,soupire-t-elleavecunepointed’amertume.—Etalors?—Tuesforcémentavariédel’intérieur,Ice.—C’estpourçaquetufaismarchearrièreetnem’aspasencoredemandémon

nom?—Oui.Elle pivote sur son siège, pose sa tempe droite contre le hublot et ferme les

yeux. J’ai la certitudequ’onne feraplus riende charnel ensemblemaintenantquejeconnaissonopinion.—Les apparences peuvent être trompeuses parfois. Je ne suis peut-être pas

aussimalfaisantquetulepenses,Gaby.—Prouve-le.—Comment?—Démissionneetrentrecheztoi,dit-elle.—Jenepeuxpas.—Jem’endoutais,murmure-t-elle.Je ne suis pas un saint,mais je ne peuxpas lui avouer qui je suis et encore

moinscequejesuis.

2PabloEmilioEscobarGaviria,néle1erdécembre1949àRionegro,Antioquia,Colombie,etmortle2décembre1993àMedellín,Colombie,estuncélèbretrafiquantcolombiendecocaïne.

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Ice

Nous n’échangeons plus unmot jusqu’à l’atterrissage àBogota où l’on doitrefairelepleindel’appareil,avantderepartirpourlapropriétédesonpère.Cedernierauraàpeineletempsderevoirsafillequ’ils’envolerapourjenesaisoù.Il estquinzeheures,heure locale, etnousavonsdeuxheuresà tueravantde

remonter à bord. Je la regarde pianoter sur son portable, puis elle le fixe unmomentavantqu’ilnevibreetlerangedanslapochepoitrinedesarobe.—Jenevaispaspoireautersurletarmacparcequemonpèreabesoinquel’on

refasse le plein de son jouet pour pouvoir prendre la poudre d’escampette dèsmonarrivée.Jeviensdepasserquasimentdixheuresdansuneboîtedeconserve,j’aibesoindemedégourdirlesjambes.Jevaisvisiterlaville,lâche-t-elled’untonrevêche,avantdeprendreladirectiondelasortie.Jelaretiensparlebrasavantqu’ellenes’éloigne.—Je t’accompagne.Lavillen’estabsolumentpas sûrepourunebelle jeune

femmecommetoi.—J’aibesoind’êtreseuleavantderetrouvermonpaternel,alorssitun’asrien

demieuxà fairequedemecoller au train, libreà toi,mais laisse-moiunpeud’espace,ok?Son ton exaspéréme surprend. J’acquiesce et lui emboîte le pas tout en lui

laissant deux mètres d’avance, ce qui me semble largement suffisant. Elles’engouffre dans un taxi et j’ai à peine le temps de poser mon cul sur labanquettearrièrequ’elleordonneauchauffeur:—Centrehistorique,10èmerueetinutiledefaireundétour,jenesuispasune

touriste.Jesuismédusépar l’aisancedesonespagnoletn’aipas refermémaportière

que lechauffeurdémarre.Gabysemblenerveuseet se triture lesdoigts tout lelongdutrajetsansmêmejeterunœilparlavitre,cequejetrouveétrangepourquelqu’un qui souhaite découvrir la ville. Bogota n’est pas très différente desgrandesagglomérationsdumonde.C’estunemétropolepolluée, stressanteparses embouteillages, mais elle peut surprendre par les couleurs vives de sesvieillesmaisonscoloniales,notammentdanslequartierdelaCandelaria,celui-làmêmeoùnousnousrendons.

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Parvenusàdestination,Gabysortdu taxisanss’inquiéterdurèglementde lacourse,dontjem’acquittesanslaperdredesyeux.Elleavancedroitdevantelle,puisbifurquesoudainementversl’entréed’unbar-restaurantsansmêmeregardersijelasuis.Jelarattrapeaumomentoùellepénètredansl’établissement.—Tucherchesàmesemer?—Passpécialement,maisj’aifaim.Nous commandons une spécialité locale qui consiste en du poulet frit

accompagnédepetitesgalettesdefarinedemaïsque lescolombiensnommentarepas.Gabysortsonportable,alorsqu’ilvibreetrépondenespagnol.—Oui,unmoment.Je l’observe sortir du bar, prêt à bondir au cas où l’envie lui prendrait

d’échapper à ma surveillance. Elle s’appuie contre le mur à côté de la portevitrée, son téléphone collé à l’oreille. Sa communication dure environ dixminutes, puis elle me rejoint, alors que le serveur dépose nos assiettes sur lecomptoir.—C’étaittonpère?—Non.Oùsontlestoilettes?demande-t-elleàl’employé.CedernierlesluiindiqueetGabys’yrendtandisquejecommenceàdéguster

monplatquicommenceàrefroidir.Peut-êtrequemajoliebruneaplusqu’uneenviedepisser,aprèstout.J’attendsetregardelesminutesdéfilersurmamontre.Cinq, dix, quinze. Il lui faut combien de temps pour couler un bronze, bonsang?!Jebondisdemontabouretetmedirigeverslestoilettes.Contrairementàceque jepensaisen franchissant laporte, celle-cidébouche

suruncouloird’environquatremètresde long.Cedernier est pourvude troisportesetd’unescalierquimèneàl’étage.J’ouvrecellededroiteàlavoléesansprendrelapeinedetoqueraupréalable.Leschiottessontbienlà,maispasGaby.Lacolèremesubmergecommeunrazdemarée.Je passe à la porte en face qui dessert un local contenant des produits

d’entretienainsiquetroiscasiersdevestiaires,puiscelleauboutducouloirquidébouchedansuneruellederrièrelebar.—Jevaislatuer!m’écrié-je,alorsquel’évidencemefrappedepleinfouet.Gabya-t-ellechoisicetétablissementauhasard?M’a-t-ellefaussécompagnie

ous’est-ellefaitenlever?Jepenchepourlapremièreoption,mêmesilaseconderesteenvisageable,surtoutdanscepays.Jeretourneaucomptoiretinterrogelepersonnelprésentsurleslieux.Iln’ya

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quedeuxsortiesdansl’établissement,l’entréeparlaquellenoussommesarrivéset la porte au fond du couloir qui sert aux locataires qui vivent à l’étage etparfoisaupersonneldubar.J’hésiteàappelersonpèrepourl’informerdeladisparitiondesaprogéniture

lorsqu’unefemme, la trentaine,entrepar laportequimèneauxtoilettes.Je luisautedessusetgrogne:—Une jeune femmebrune, trèsbelle,desyeuxbleu turquoise, lavingtaine,

l’avez-vousvue?Sonregardestcraintifetelleessaiedesedégagerdel’emprisedemesmains

sursesbras.—Oui.—Quand?Elleétaitseule?A-t-elleditquelquechose?— J’ai cru que c’était une nouvelle serveuse, bredouille-t-elle,me désignant

l’annoncesurlepilierducomptoirquejen’avaispasremarquée.—Çanerépondpasàmesquestions,dis-jed’untonsinistre.Ellesemetàtremblercommeunportablesurvibreur,jelarelâcheetajoute:— Je ne vous veux aucun mal, mais il faut que vous me répondiez, c’est

important,vouscomprenez?Elleacquiescedoucement.—Elle était seule et sortait du vestiaire quand je suis arrivée.On a discuté

deuxminutestoutauplus,ellem’ademandésijeconnaissaisuneboutiquede…Elle semet à rougir comme une adolescente, ce quime déconcerte,mais je

l’encourageàpoursuivre.—Unmagasindesextoys.Je luiaicommuniquéuneadressedans lecentre-

ville.Jel’aiaccompagnéedehorspourfumerunecigarette,ellem’asaluéepuis,je suis remontée à l’étage pour récupérermon tablier que j’avais oublié.Vousallezluifairedumal?Vumaminepeu avenante, saquestion est légitime. Je la rassure et quitte le

bar,unefoisqu’ellem’adonnélescoordonnéesdelaboutiqueetdécidedem’yrendreàmontour.C’est la seconde fois, enmoins de vingt-quatre heures, queGabyme berne

avec une facilité surprenante. Elle me fait passer pour un imbécile ! Je vaisretrouvermajoliebruneetenunseulmorceau,jel’espère.Surmonchemin,jecroiseunegrossedame,lacinquantainebiensonnée,qui

meregardeavectantdeméfiancequejefaisdemi-tour,sors lephallus roseen

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siliconedeGabydelapochedemoncuiretluicolledanslesmains.—Tiensmémé,çatedécoinceraduculetturetrouveraslesourire.Ouais, je suis trèsconparfois,mais sonaircraintifaaugmentémonhumeur

massacrante.J’arriveaumagasinetquestionnelesdeuxemployéesquimecertifientnepas

avoirvuGaby.Laserveusem’a-t-ellementi?Faitchier,merde!Je reprends ladirectiondu troquet, remonté commeune cocotte-minute sous

pression. La bonne femmeme jure sur Dieu et tous ses saints que c’est bienl’adressedecetteenseignequ’elleacommuniquéeàmajoliebrune.— Peut-être ne s’y est-elle pas rendue ? me suggère-t-elle d’une voix

tremblante.Pas faux,mais où est-elle allée dans ce cas ? Je sors etmènemon enquête

auprèsdes commerces àproximité.Rien. Jeviensdeperdredeuxheurespourquedalle!JesuisàlafoisinquietpourGabyetautantenrognecontreellequecontremoi-même.Jeretourneàl’aéroportetsuissurprisdelatrouveraupieddujetdesonpère.Jesoupiredesoulagement,puisunecolèrenoiremesubmergelorsqu’elleme

gratified’unimmensesourire.Jefoncedroitsurelleetm’apprêteàlasermonnerquandellemecoupel’herbesouslepied.— Je t’ai apporté un présent, Ice. Essaie de ne pas l’effrayer et souris,

d’accord?Elle fait un pas de côté et je découvre une femme, plus petite qu’elle,

mignonne,maisrienn’estnaturelchezelle.Sapoitrineesttropgrosse,jepariequ’elle a des implants mammaires. Ses lèvres sont gonflées comme si ellesavaientreçuuneinjectiondeBotoxetsachevelureblondenetrompepersonnetantsesracinessontnoires.— Ice, voici Carmela. J’ai loué ses services pour trois jours. Elle est à ton

entièredispositionpoursoulagertonétatdefrustration.Quoi?!Il y a deux jours, j’aurais baisé une femme comme elle. J’aurais vidé mes

couilles avec n’importe quelle prostituée consentante, en fait. Elles sontextrêmementraresànepasfuirenvoyantmagueule,maisdepuishiersoir,jenevoisquemabellebrune.IlfautquejecessedefaireunefixationsurGaby,jelesais,maisc’estplusfortquemoi.—Salut,mesaluelablondasseenmâchouillantsonchewing-gumcommeune

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vache.—Oùas-tudénichécettepétasse?!m’écrié-je,horsdemoi.Lablondes’écarteaussitôt,vacillantsursestalonsaiguilles,apeurée.Ellesort

uneliassedebilletsdesonsoutien-gorgeetlatendàGaby.— Hors de question que ce monstre me touche, lâche-t-elle, avant de

déguerpir.—Dansunemaisonclose,soupireGabyavecdépit.Je vois rouge. Jem’approche jusqu’à la frôler etplongemon regard furieux

danslesien.J’aperçoisunelueurdecraintedanssesyeux,maislabellecarrelesépaulesetredresselementon.—Tupensaisfairequoienm’amenantcetteputain,hormism’humilierunpeu

plus ?! Je t’ai dit que cette ville était dangereuse et tu cours te jeter dans lepremier bordelmalfamé ?!Que serait-il advenu si lemaquereau de cette fillet’avaitmislamaindessus?!—Jenevoulaispasterabaisser,Ice.Çapartaitd’unbonsentiment,maistuas

toutgâché,encoreunefois!Etpuis,jesuiscapabledemedéfendre,jenesuispasunegamine!—Permets-moi d’en douter. La prochaine fois que tu te défiles comme une

enfanttêtuequirefusedetenircomptedesconseilsavisésqu’onluiprodigue,jet’administreunefessée!Ellemedéfieautantd’agirqu’ellemefoudroieduregard.—Tu penses être plus forte que les autres parce que tume tiens tête ? Tu

m’épates autant que tu m’effraies, mais ton paternel etManuel ne seront pasaussimagnanimesquemoi!—Monpèrenemeferajamaisdemal.—Faux. Jene saispasqui tu cherches à convaincre,mais tu es trèsprolixe

dans ton sommeil.N’a-t-ilpasbrisé lamâchoired’unepetite fillede septans,alorsquecelle-civenaitdedécouvrirlecorpssansviedesamère?Elle recule d’un pas comme si je venais de la gifler, puis se ressaisit

immédiatement.— Ce n’est un secret pour aucun des hommes qui sont à son service, je

suppose !Mais, éclaire doncma lanterne, Ice. Si j’en crois tes propos, tu neportespasmonpaterneldanstoncœur,danscecas,pourquoitravailles-tupourlui?Merde.Elleestintelligenteenplus.Jehaissonpèrepourdeuxraisons:ilme

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rappelle, par ses activités, la mort de mon frère, mais également, par soncomportementenverscettepetitefilledeseptans,l’amantdemamère.Les pilotes nous interpellent et nous remontons à bord. Nous reprenons nos

places,l’unàcôtédel’autre.Gabynecessedemefixer,attendantcertainementuneréponseàlaquestionqu’ellem’aposéesurletarmac.—J’ai sauvé la vie de tonpère, il y a à peinequatremois. Ilm’aoffert du

boulotpourmeremercier.—Pourquoias-tuacceptésaproposition?—J’aibesoindetravailleretjenepeuxpasrentrerchezmoi.—Pourquelmotif?—Meurtre.Siellesavait...

—Mmm,fait-elle,méprisante.Ettuvastenterdemefairecroirequec’étaitunaccident?Jeluiadresseunsignededénégationdelatête.—Donc,tun’espasaussiblancquetuasvoulumelelaisserpenserenparlant

d’apparencestrompeuses,maisçanerépondtoujourspasàmaquestion.— Je suis reconnaissant envers ton père, même s’il ne me fait pas encore

totalementconfiance,c’estunhommetrèsméfiant,maisjen’appréciepasqu’onfrappeunenfant.Elleapprouve,puisfroncesoudainlessourcils.— Et que penses-tu des mômes qui meurent parce qu’un trafiquant leur a

vendudelacame?Questionpiège.Trèsfutédesapart.Cequiamèneuneautreinterrogation.—Personneneforcequiquecesoitàconsommer,Gaby.Maissituabhorres

tant les activités de ton père, alors pourquoi lui rendre visite, après tout cetemps?Desflammesapparaissentdanssesyeuxetellemerépond,irascible:—Jevienschercherdesréponsesetvoirsijepeuxpardonner.C’est bien ce quim’inquiète. Cette jeune femme est pleine de colère froide

contenue.Gabyestunebombeàretardementquirisqued’exploseràtoutinstant.Seulement,lorsquecelaseproduira,sonpèrerisquefortdel’abattresansaucunremord.

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Ice

Gabyfermelesyeux,maisjenecomptepaslalaissertranquille.— Pourquoi avoir demandé au chauffeur de taxi de nous conduire dans le

centrehistorique?—Jesouhaitaisvisiterlequartier.Ilesttrèsréputésurlenet.—Commentas-tusuquelebarpossédaitunesecondeissue?—Je n’en savais rien.Quand jeme suis rendue aux toilettes, j’ai découvert

plusieursporteset comme j’éprouvais lebesoindem’isoler sans t’avoir sur ledos,jesuissortie.D’accord.Siellen’estjamaisrevenuedanscepaysdepuissonenfance,jene

voispascommentelleauraitpulesavoirdetoutefaçon.—Quandes-turevenueàl’aéroport?—Environcinqminutesavanttoi.— Qu’as-tu fait pendant deux heures, hormis te rendre dans un bordel ?

grondé-je.—J’aiflâné.—Où?Gabyouvrelespaupièresetpivoteversmoi,irritée.—Jeviensdeteledire.Àquoirimecetinterrogatoireetcetonmalembouché,

Ice?Tonegoestblesséparcequej’aitrompétavigilance?Jedésiraisêtreseule,c’estsidifficileàcomprendre,pourtoi?—Ilauraitput’arriverquelquechose.Ellesembleuninstantdéconcertée,puisricane.— Laisse-moi deviner. Mon père t’a demandé de ne pas me lâcher d’une

semelleet ilvatebotter lesfessess’ilapprendquetut’esfaitavoirdeuxfois,c’estça?—Non.CepayspeutvraimentêtredangereuxpourunefemmeetManuelme

l’aordonné.—Ettuexécutestoujourssesmoindresdésirs?—Certainementpas.Ilm’aégalementspécifiédenepas t’approcherde trop

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près,maisonabaisé,toietmoi.Elleéclatederire,puisplongeunregardgravedanslemien.—Jeneleregrettepas.—Moi non plus, bébé,mais j’aimerais bien recommencer, soufflé-je dema

voixlaplusrauque.Sesyeuxs’embrasentsoudaindedésiretjem’enflammecommeunebrindille,

maisellevaencorerenoncer,jelesais.—IlnefallaitpasfairefuirCarmela,murmure-t-elle.—C’esttoiquejeveux.—Ice…—Oui,jesaisàquoim’entenir,lacoupé-jeensoupirantavecamertumeeten

fermantlespaupières.Jepose l’arrièredema têtecontre ledossierdemonfauteuil.Gabym’excite

autantqu’ellemetorture.Combiendetempsvais-jeladésirer?Est-cequecelame passera ? Peut-être aurais-je dû me soulager avec cette femme qu’elle aramenée,maisCarmelanem’apasémoustillélemoinsdumonde.J’ouvrebrusquementlesyeuxlorsquejesensdeuxmainsécartermescuisses.

Gabysepositionneentremesjambesetsepenchesurmoi.Elleattrapelebasdemont-shirt,leremontelentementlelongdemonventreetfaitpasserledevantduvêtementpar-dessusmatêtesanstoutefoismeleretirer.Salanguecaressesalèvre inférieure, alors que ses yeuxparcourentmonbuste.Mon souffle se faitcourtetjebandecommeunâne.J’aitellementenvied’elle,putain!Jen’osedirequoiquecesoitetencoremoinslatoucherdecraintequ’ellene

fassemarche arrière tandis que sesmains caressent lentementmon torse,monventre,s’activentsurlesboutonsdemonpantalon.Ellepassesesdoigtssouslaceinturedemoncaleçoneteffleuremongland.— Je veux goûter ta queue, susurre-t-elle, avant de poser sa bouche sur la

mienne.Sadéclarationm’exciteàmortetças’agitefurieusementdansmoncalecif.Je

lèvelégèrementmesfessesdusiègeetbaissemesfringuesd’unseulcoup.Mesmainsseposentsursesjouesetj’approfondisnotrebaiser,malanguefouillantsabouche, comme si ma vie en dépendait. Mes doigts quittent son visage etparcourent lentement ses courbes parfaites. Je passe une main sous sa robe,remontedoucementlelongdesacuisseetglissemesdoigtssoussonstring.Ellehalèteetécartelesjambespourmefaciliterl’accèsàsonintimité.

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Elle agrippemes cheveux lorsque jepassemonmajeur sur sa fente.Elle esttrempéeetçameplaîttellementquejegrognedecontentementdanssabouche.J’insère deux doigts dans sa moiteur et masse son bouton de rose avec monpoucetandisquemamainlibres’emparedesonseinpar-dessussesvêtements,lemalaxe, enpince légèrement lapointe.Ses lèvresquittent lesmiennes,puisellejettesatêteenarrièreetgémittandisquejeplongeplusprofondémentmesdoigtsenelle.—Ohoui…C’estbon,Ice…Continue,souffle-t-elle.Gabymesubjugueparsadésinhibitiontotale.Jel’observeprendresonplaisir

sans aucune pudeur et çam’excite comme un fou. Ses yeux sont fermés, seslèvresentrouvertes,sonsouffledevientdeplusenpluscourtaufuretàmesureque j’accentue lacadencedemesdoigtset lapressionsursonclitoris.Elleestencore plus belle dans l’extase et j’ai mal tant ma queue se tend à l’extrêmequandellejouitencriantlenomdontellem’affuble.Elles’effondresurmoi,haletante,sonfrontcontrelemien.Jeretiremesdoigts

de son vagin et les porte àma bouche aumoment où son front se décolle dumien. Jemedélectede sa saveur légèrement salée tandisqu’elleme sourit. Jelèchemesdoigtssanslaquitterdesyeuxetluiretournesonsourire.Seslèvresseposent doucement sur lesmiennes, glissent surmamâchoire, parcourentmoncou, l’embrassent, le lèchent.Ellespoursuivent lentement leurcheminsurmespectoraux, sucent mes tétons, les mordillent, puis reprennent leur route endirectiondemabitedressée.Jerejettematêtecontreledossier,savourantpleinementtoutescesattentions,

personnenem’ajamaistouchécommeellelefait.Jem’exécutesansrechignerquandellemedemandederapprochermonpostérieurauborddusiègeetinclinemonfauteuil.Jegrognedeplaisirtandisqu’unedesesmainss’emparedemahamperigide

etquel’autremalaxemesburnes.—Tuessidur,murmure-t-elled’untonappréciateur.Mes mains agrippent sa douce chevelure lorsqu’elle passe furtivement sa

languesurl’extrémitédemongland.Gaby lèche doucement mes bourses et remonte lentement de la base de ma

queueà sonextrémité, recommence, encoreet encore, commesi elledégustaitune glace. Mes hanches se mettent automatiquement en mouvement, enréclamantplus.—Suce-moi,bébé,geins-je.

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Ellem’avale lentement jusqu’à ce que je bute au fond de sa gorge, déglutit,m’aspire sur toute la longueur, lapemongland tout en caressantmes couilles,recommence,encoreetencore.—Ohoui…C’esttropbon,bébé!Elle accentue la cadence, décuplant mon plaisir et faisant inexorablement

monter ma sève. Elle introduit un doigt humide dans mon anus, ce qui mesurprend brièvement, et le fait doucement aller et venir. Ce léger frottementcontremaprostatem’amèneencoreplusprèsdelajouissance.—Ohputain…Oui…Tumesucessifort,bébé!Elle sedéchaîne surmabite, y ajoutantunepression supplémentaire avec le

boutdesesdents,justecequ’ilfaut,commej’aime.Jehalète,gémis,submergépar tant de sensations à la fois. Tout mon corps se tend alors qu’une ondeélectriquesepropagedansmesveinesetsetransformeenunmagmabrûlant.Lefeuseconcentreaucreuxdemesreinsetaugmenteencoreenintensité.—Gaby…Bébé…Jevaisvenir!Elle ne se retire pas, continue de cajoler ma queue, mon cul, mes couilles,

accélérant encore sesmouvements. Jeme répandsdans saboucheende longsjets puissants alorsquemoncœur explose et que je feule sonnomcommeunanimal.Je redresse la tête pour la contempler tandis qu’elle avale tout ce que je lui

donneetdorloteencoremavergeàpetitscoupsdelangue,cequiprolongemonplaisir.Mapremièrepipesanscapote.Jen’aijamaisprisunpiedpareil,putain!—N’épousepaslevicelard,soufflé-je.Elleéclatederire,embrasseleboutdemonglandetjel’observeserendreàla

salledebainsavecuneseulecertitude:lesexeavecelleestfabuleuxetjerefusequecelas’arrête.

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11

Gaby

J’aicédéà la tentation.Est-ceque jeme le reproche?Non,absolumentpas.J’aibeaumedirequeIceestà lasoldedemonpaterneletquejedoisl’éviter,monattirancepour lui est puissante. Jene comprendspaspourquoi et je croisqu’au fond, je m’en moque. Va falloir que je parvienne à résister ou que jecomposeavec,cequirisquedecompliquerunpeumesplans,maistantquejenem’attachepas,jedevraispouvoirm’ensortir.J’angoisselégèrement,alorsquenousvenonsd’atterrirsurlapistequijouxte

lapropriétédemonpère.Ellen’existaitpas lorsque j’étaisenfant,mêmesicen’est que de la terre battue, je me demande combien cela lui a coûté pouraménagerl’endroit.A-t-ilobtenulesautorisationsnécessaires?Je passe la sangle de ma guitare autour de mon corps et m’agrippe à mon

instrumentcommesic’étaitunebouéedesauvetage.—Çava?s’enquiertIce.—Oui.Montonnedoitpasêtretrèsprobant,carilmeregarde,dubitatif.Nous quittons l’avion et j’ai l’impression d’étouffer. Il fait chaud et humide

danscecoindupays.Luis, un jeune homme d’environ vingt-trois ans avec des airs d’Enrique

Iglésias, unearmeà feuglissée sous la ceinture à l’arrièrede sonpantalondetoile,sechargedemonbagage.Nouslesuivonssansunmot,maismonhumeurpassedel’anxiétéàl’irritationàmesurequenousprogressons.Jesuisstupéfaiteendécouvrantlespalissadesdeboisquicernentlapropriété.

Grincheux,parlebiaisd’undesesamiscolombiens,m’apourtantprévenuequemonpèreavaitclôturéleslieuxsuiteàlapseudo-attaquequiacoûtélavieàmamère, mais j’ai la sensation de m’apprêter à pénétrer dans un camp deconcentrationnazi.Àl’entréedelaplantation,Pedro,unsbirequidoitavoiràpeinedix-septans,

passeunscannerdétecteurdemétaux,sortedebâtonplatenplastiqued’environtrente centimètres, comme en possèdent certains services de police aux États-Unis,autourducorpsdeIce,puism’enjointàmesoumettreàl’examen.

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—Non,paselle.C’estinutile,ordonnelavoixautoritairedupropriétairedeslieux.Pedros’écarteet jedécouvreJuan,plantéàenvirondeuxmètresdenous,un

hommeàsescôtés,quimefixetandisquejelefusilleduregard.—Jenevoispaspourquoij’auraisdroitàuntraitementdefaveur,dis-jed’un

tonsec.J’arrachelescannerdesmainsdePedroetleporteversl’articulationgauchede

ma mâchoire, mon regard rivé à celui de mon père qui étincelle de colère.L’enginsemetàsonner,cequisurprendtoutlemonde,hormismonpaterneletmoi-même.Une semaine avant mon départ, Grincheux a demandé à un médecin de sa

connaissancedem’implanterunemicropuceGPSainsiqu’unpetitmorceaudemétalàcetendroit,àdessein.J’ai subideuxopérationsdansunecliniqueprivée suite aucomportementde

monpère.Unepourremettreenplacemesosbrisésetlesmainteniràl’aidededeuxbroches, ce quim’a valu demenourrir à l’aide d’une paille durant cinqsemaines.Laseconde,pourmelesretirer,maislesactesmédicauxsontcodifiéspar des lettres et des chiffres. Grincheux a donc parié sur le fait que monpaternel,mêmes’ilaréglélesfactures,n’estpasaucourantquelesbrochesnesontpluslà.De plus, d’après Grincheux, mon dossier médical a révélé que mon père

communiquait uniquement parmail avec le chirurgien et que le retrait de cesbrochesn’étaitmentionnédansaucundeceséchanges.CommentGrincheuxl’a-t-ilsu?Aucuneidée,maiscevieuxbonhommeaconnaissancedebeaucoupdechosesetadesamishautplacés,dontunàlaCriminelle.Leflicm’aexpliquécequiétaitassurémentarrivéàmamère,d’aprèslesdétailsquejeluiaidonnés.Larépartition du sang dans la pièce et autour de son corps, l’état de sa tête,mamémoireatoutenregistréavecminutie.Quelqu’unluiacolléunflinguedanslabouche et lui a fait exploser la cervelle. L’auteur de ce crime se tient juste àquelquespas,devantmoi.Les yeux demon père sont froids,méfiants, lesmiens flambent de rage. Je

rendsl’instrumentàPedro,sansquittermonpaternelduregard.Iceserapprochedemoi,posesamainsurmonépaulequ’ilpresselégèrement

desesdoigts.—Ne le provoquepas, bébé, souffle-t-il àmonoreille en français, avant de

retirersamain.

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Je vais me gêner. Et puis, tout le monde doit croire que je suis une jeunefemmeencolère,maisquej’aimetoutdemêmemonpèreetcedernierencoreplusquelesautres.C’estcequimesemblelepluscrédibleetsachuten’enseraqueplusdélectable.—Oùest-elle?demandé-jed’untonfielleux.Icesoupire,déçu,tandisquemonpèretressaille,ilnes’attendaitprobablement

pas à cette question qui le ramène dix-sept ans en arrière. Nous nous fixonsdurantuneéternité,horsdequestionquejeflanche.Sesyeuxdévientlégèrementsurlapersonnequisetientàmescôtés.J’en profite pour détailler mon paternel. Cheveux courts et bruns, presque

noirs, tempes grisonnantes, yeux marron foncé, moustache touffue, un mètresoixante-quinzeenviron.Encoreassezséduisantpourunhommedecinquante-quatreans,mêmes’ilestdevenugrasdubide, l’opulencen’apasquedebonscôtés.Monregardglissesursonfidèletoutou.Manuelestlégèrementpluspetitque

monpère.Cheveux courts et noirs, yeuxmarron clair, corpsmusclé,mais pasaussibiensculptéqueceluidemonvoisin,posturedroiteetl’airassuré.Trèsbelhomme de trente-deux ans, mais il me fait penser à un coq au milieu d’unebasse-cour et la lueur perverse dans son regardme laisse supposer qu’Ice n’aprobablementpastortàsonpropos.Lesyeuxdemonpèresereportentsurmoi.—Jevaist’yconduire,suis-moi.Juantournelestalonsetprendladirectiondelamaison,cequimedéconcerte.

J’avance et Ice m’emboîte le pas tandis que Manuel me gratifie d’un largesourirelubrique.— Salut, gamine, tu t’es embellie depuis la dernière fois que je t’ai vue,

déclare-t-il,alorsquej’arriveàsahauteur.Je stoppe ma progression, fait glisser mes yeux sur son corps à dessein et

réponds:—Pastoi.Iceestsiprochedemoiquejelesensseraidirdansmondos.Manuel,lui,est

vexé. Ses lèvres se pincent et ses poings se serrent à en faire blanchir sesarticulations. Je reprends mon chemin et l’entends murmurer d’un tonpernicieux:—Çavaêtreunvraiplaisirdetedresser,petitechienne.

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Icen’estpeut-êtrepasleplusdangereuxdessbiresdemonpère,finalement.Jepasseentrelesplantsdecaféieretrejoinsmonpaternelàl’entréedelacourquimèneàlamaison.Ilfroncelessourcils,regardantderrièremoi.—Quesepasse-t-il?s’enquiert-il.—Aucuneidée.Jeme retourne et vois Ice surplomberManuel. Je n’entends pas ce qu’ils se

disent, étant beaucoup trop loin, mais leur langage corporel me fait penser àdeuxclébardsprêtsàsesauteràlagorge.—LeBalafrét’atouchée?JetiqueausobriquetquemonpèredonneàIceetpivoteverslui.—Absolumentpas.—Bien.Ilnes’estpasintéresséàmoipendantdix-septansetilpensequ’ilvadiriger

maviesexuelle,alorsquej’enaivingt-quatre?Ilsefourre ledoigtdansl’œil,pournepasdireailleurs.Ilmetsesmainsenporte-voixetordonneàManueldeserendreàl’avion.Ce

dernier obtempère immédiatement et nous nous remettons en route.Mon pèreme conduit sur le côté de la maison qui jouxte la forêt et je découvre avecstupéfaction la tombe de ma mère. Une fois la surprise passée, la colère mesubmerge.Une simple plaque de marbre noire d’environ un mètre cinquante sur deux

mètrescinquanteàmêmelesol,cernéepardesgrillesenferforgéquidélimitentun périmètre à peineplus large, fait office de sépulture. Il ne lui amême pasaccordé un enterrement digne, ce fumier ! Elle n’a rien à faire ici ! Est-ceseulementlégal?Jenepensepas.Monirritationsetransformeenunehainefaroucheetjelefoudroieduregard.

J’ouvrelagrille,melaissetombersurlesgenouxetcaresseduboutdesdoigtscetteplaquedepierrechaufféeparlesoleil.—J’aifaitvenirunprêtre.Ilaconsacrélaterreetacélébrélesfunéraillesde

tamère,sejustifie-t-il.Pauvretype,cen’estpasçaquimeferachangerd’avissursoncompte.—Jedoism’absenterpouraffaires,maisnousdiscuteronsàmonretour.Ouais,c’estça,fuisdonclaqueueentrelesjambes.— J’y compte bien. Oh, et tant que j’y pense, tu devrais faire dératiser ton

suppositoirevolant,toutestboufféàl’intérieur.

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—Qu’as-tufait?Jenerépondspasetl’entendssoupirerd’exaspération.—Carmenapréparétachambre.J’yaifaitinstallerunlitplusgrand,maisn’ai

apportéaucuneautremodification.—Tropaimable.Va-t’en,j’aibesoind’êtreseule.J’écoute ses pas s’éloigner et soupire. Je n’ai jamais pu dire au-revoir àma

mère. Je ne suis même pas certaine qu’elle soit réellement là-dessous. Aprèstout,monpèreatrèsbienpumementirets’êtredébarrassédesoncorpsdanslaforêt. Ou alors, il se sert de cette stèle comme d’un avertissement pour lespersonnesquiviventsursesterres.Jeresteauprèsdelatombe,incapabledebouger.—Tumemanquestellement,maman.J’empoignemoninstrumentetmemetsàjouer.Àlafindumorceau,mesyeux

sontembuésdelarmes.Petite,mêmesimarelationavecmamèreétaitplusfusionnellequ’avecmon

père,j’adoraiscedernier.Ilauraitpumeracontern’importequoi,jel’auraiscrutellementjel’aimaisetn’auraisprobablementriensu.Mais,ilatoutdétruit.Ettoutçapourquoi?Deladrogueetdufric?C’esttellementfutile.Jedéposemaguitareetm’allongelelongdecetteplaque,unemainposéesur

cettedernière, commesi celamepermettait demeblottir dans legirondemamèreunedernièrefois.Jeluifaisuneseulepromesseetm’endorssereine,ayantl’impressionqu’ellem’étreintdesesbras.

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Ice

J’arrive au milieu de la cour lorsque Juan apparaît à l’angle de la grandemaison.—Ah,leBalafré,tutombesbien,jesouhaitejustementm’entreteniravectoi

avantmondépart.Jeleregarde,suspicieux.Jenesaisjamaisàquoim’attendreaveccethomme.

Ilest toutaussicapabledevousféliciterquedevouscolleruneballeentre lesdeuxyeuxenayantlemêmeairimpassible.—Comments’estcomportéemafilledurantlevoyage?Ellet’aparlédemoi?Là, j’ai une soudaine envie de rire, mais jeme contiens. Il se soucie de ce

qu’ellepensedelui?—C’estunejeunefemmeencolère,maisj’ignorepourquelleraison.Malgré

tout,ellesemblebeaucoupvousaimer.Iln’apasbesoindesavoirquejesaisparfaitementcequesafilleluireproche.

J’aperçoisune lueurde surprisedans sesyeux,maisc’est si fugaceque jemedemandesijen’aipasrêvé.—Mmm... Veille sur elle pendant mon absence et si elle fait des siennes,

recadre-la.Facile à dire.Si les femmesne sont quasiment rien sansunhommedans ce

pays,cequiestencoreplusvraidanscecoinreculédelaColombie,Gabyn’apasgrandi icietelleest loindesesoumettreauxdirectivesdequiquecesoit.Maisça,sonpères’enapercevrabienasseztôt.—D’accord.— Tu accompagneras Alberto lors du prochain transport. Ce dernier te

briefera,sasantésedégradeetilvamefalloirleremplacer.Enfin!Jecommençaisàdésespérer.—Bien.—Mafillenedoitriensavoirdetoutça.—Ellesedoutedéjàdelateneurdevosactivités,elleestloind’êtrenaïve.Il tique,medemandecequeGabysoupçonneexactement.Je luienfaisdonc

part.

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— Mmm... Moins elle en saura, mieux ce sera. Demande à Paco de teremplacerpourlasurveillerlorsquetut’absenteras.Jedoisyaller,maintenant.J’opineet il s’enva. JepréféreraisqueGabym’accompagne,pour sapropre

sécurité,mêmesiPacoestunmoindremalcomparéauxautres.JerejoinslecoindelamaisondèsqueJuandisparaîtentrelesarbres.Jeveux

m’assurerqueGabyvabien,maisjemecontentel’épierdiscrètementlorsquejel’entendsfredonnerAll IWantdeKodaline,d’unevoix tremblante.Lesparoless’adressentplusàunamantperdu,maisjecomprendsàquelpointGabyaimaitsamère.Elledéposesoninstrument,s’allongesurlaterrebattueetmurmuredesmots

quejen’entendspasdistinctement.Puis,ellesemetàpleurercommeuneenfantetcelamefendlecœur.J’hésite.Quandjevaismal,jepréfèrem’isoler,maiscontrairementàmajolie

brune,j’airemplacéleslarmesparlescoups.J’expiemasouffranceenfrappantdansunsacdeboxe.J’attendsunmoment,maisnelavoyanttoujourspasbouger,alorsquelanuit

tombe,jem’approcheetconstatequ’elledortàmoitié.Jeramassesaguitareetpasselasanglesurmonépaule.Jemebaisse,metsunemainsoussatête,l’autresoussescuissesetlasoulèvedansmesbras.Ellenebronchepasetcalesatêteaucreuxdemoncou.Alberto,hommebrunde taillemoyenneauventrebedonnant, laquarantaine,

montelagardedevantleperrondelamaison,commechaquefoisquesonpatrons’absente.Personnen’aledroitdepénétrerdanscettebaraquesansyêtreinvitéparlemaîtredeslieux,hormisManueletCarmen.Etencore,pourcettedernière,quisertàlafoisdefemmedeménageetdecuisinièreaugrandmanitou,elleadeshorairesàrespecter.—C’estlapetite?s’enquiert-il.—Oui.Elles’estendormiesurlastèleàcôtédelamaison.IlsepenchesurGaby.— Pauvre gosse, elle est encore plus jolie maintenant qu’elle est adulte,

murmure-t-il,alorsqu’ilnedistinguequ’uncotédesonvisage.Jesuissurpris.—TuasconnuGabyquandelleétaitenfant?—Ouais.Viens,jevaisteconduireàsachambre.Albertomeprécèdejusqu’auboutducouloir. J’entredans lachambreetsuis

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déconcertédetrouverdesjouetsetdesdessinsd’enfantaccrochésauxmurs.Jedéposemajoliebrunesurlelitetsoninstrumentaupieddecelui-ci.Nous ressortons et Alberto me propose de boire une bière avec lui sur le

perron.—CommentétaitGaby,petite?Ilsoupire,puisrépond:—Commetouslesgossesdevraientêtre.Insouciante,joyeuseetpleinedevie.

Pourquoicelat’intéresse-t-il?Jehausselesépaules,l’airindifférent.—Simplecuriosité.—J’espèrepour toiqu’ilne s’agitde riendeplusquecela,Manuel te tuera

sinon.Il en avait déjà l’intention un peu plus tôt lorsque je lui ai suggéré de se

montrer plus respectueux avec Gaby. Me remémorer ses propos envers cettedernièremefoutenrogneetmonregarddevientglacial.—Mêmesituesdangereux,jepensequetun’espasunsimauvaisbougreau

fond,alorslaisse-moit’expliquerquelquechose,leBalafré.Ilportesacanetteàseslèvresetavaleunegrandegorgéeavantdereprendre:—Masœuretmoiavonsperdunosparentslorsquej’avaisdixans.Carlos,le

pèredeJuan,nousarecueillisetnousaoffertunemploisursaplantation,quin’étaitpasaussivastequ’aujourd’hui,enéchanged’untoitetducouvert.C’étaitunhommegénéreux,mais son fils…Quelquesmoisaprèsnotrearrivée, Juan,quiavaitd’autresprojetsen têteetqui s’impatientaitque sonpèrene luicèdetoujourspaslesrênesdel’exploitation,atuésonpaternelenluitirantuneballeenpleincœur.Jen’aipaschoisid’êtreàsasolde,ilm’yaobligéenpointantsonarmesurlatêtedemasœur.—Vousauriezpupartir,non?—Pouralleroù?Nousn’étionsquedesmômeset iln’yaqu’une façonde

sortirdecemilieu:lesdeuxpiedsdevant.Oui,çajelesais.— Là où je veux en venir, c’est que Juan n’a jamais réussi à me modeler

complètementàsonimage,mais ilyestparvenuavecbrioencequiconcerneManuel.Jediraismêmequel’élèvesurpasselemaître.Alors,situtiensuntantsoitpeuàtavie,resteloindelapetite.Silepatronnetetirepasuneballedanslecrâne en te regardant droit dans les yeux,Manuel le fera,mais avec lui, c’est

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dansledosquetularecevras.J’acquiesce,maisilnem’apprendrien.Jelesaivusàl’œuvrepasplustardquelasemainedernière.Jerapportaisdes

denrées alimentaires sur la propriété lorsqu’un homme, un cueilleur de café,suppliait Juandenepas faire jene saisquoi.Cedernier a sorti son flingue, abuté le gars de sang-froid, puis a tourné les talons. Une femme s’est mise àhurlerets’estjetéesurlecorpssansvieenpleurant.Manuel,quimarchaitauxcôtésdesonpatron, commeà sonhabitude, s’est retournéet l’a abattued’uneballedansledos.Albertoestarrivéderrièremoiàcemoment-là.Jemedemandecequ’enpenseraitmajoliebrune.Non,enfait,jesuissûrdele

savoir.—CommentestdécédéelamèredeGaby?Jeconnaislaréponse,maisAlbertoest-ilprêtàm’enapprendreplus.Ilsoupiretandisquesonregardsevoiledetristesse.—Manueletmoidevionsl’escorterjusqu’àl’écoledelapetite,commechaque

jour,mais Juanm’avait envoyé chercher une caisse de victuailles àBogota etj’étaisen retard.Célineaimaitvraimentsonmari.Leur relationacommencéàs’effriterenvironunanavantcefameuxjour,quandelleadécouvertlesactivitésillégalesdesonépoux.C’étaitunefemmedouce,gentille,maistêtue.Elles’étaitmisentêtedeleconvaincredecessersontrafic,maisellen’ajamaismenacédele dénoncer. Je ne sais pas ce qui a bien pu se passer ce jour-là. Seuls Juan,Manuel et sa sœurCarmen étaient présents aumoment où le drame a eu lieu.C’estCélinequiarecueilli lesenfantsAlvarezquandManuelavaitneufansetCarmensept.LaColombieestunfoutupays.Bref,toutcequejesais,c’estquele patron a tué sa femme,mais j’ignore pour quelle raison.Avant que la nuittombe, Juan nous a convoqués, Manuel y compris, dans son salon et nous aordonnédedescendre tous lesouvriersde laplantation.Lesautorités l’ontcrulorsqu’iladéclaréquenousavionsétévictimed’uneattaqueparungroupedeparamilitaires.Celaluiapermisdecouvrirlemeurtredesafemme.—Combien?Je ne développe pas ma question, mais Alberto la comprend puisqu’il me

répond:—Unetrentainedepersonnes.—Desenfants?—Non.J’airéussiàluifaireentendreraisonsurcepoint,mêmesicelan’apas

étéaisé.Masœuretmoiavonsemmenélesgaminsjusqu’àlarivière.Lorsque

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nous les avons ramenés, la plantation ressemblait à une zone de guerre.Convoyerunpeudecocaïneestunechose,maisça…Etpuis,j’aisouhaitéquecesgossessoientépargnés,lesfillestravaillentsurlaplantation,maisquandjevoiscequelesgarçonssontdevenus,jemedemandesij’aibienfait.Jesaisiscequ’ilsous-entend.Luis,Miguel,Pepe,EstebanetManolosontdes

copies conformes de leur patron, alors que Pedro et Paco sont en passe de ledevenir,carilsn’ontquelesprécédentsetleuremployeurenguisedemodèle.—Gabyaassistéàcecarnage?demandé-jeeffaré.—Non,maisj’aitoujourseuundouteencequiconcerneCarmen.Quandj’ai

suggéréàJuand’éloignerGabyetCarmenaveclesautresmômes,ilm’ainforméqueletoubibvenaitd’injecterunpuissantsédatifàGaby.Est-cequetoutcelaestvrai,ouAlbertoest-ilentraindemetester?Jenepeux

me renseigner auprès des autres car, que ce soit la vérité ou non, je récolteraisûrementuneballedanslecrâne.Jeterminemabière,prendscongéd’Albertoetregagnemonlogis,songeur.Je

visdansunepetitemaisonenboisdedeuxpièces.Unecuisineouverteavecuncoinsalon,unechambre,unesalledebainspourvued’unedouche,d’unlavaboetdestoilettes.Cen’estpaslegrandluxe,maiscelameconvient.Lapropriété,plantationcomprise,s’étendsurcent-cinquantehectares.Toutes

les maisons des personnes qui travaillent pour Juan, sont semblables etdisséminéeslelongdel’exploitationsouslesarbresàcausedelachaleur.Nousavonsl’eaucouranteetl’électricité,maispasdetéléetencoremoinsderéseautéléphonique.Seulelagrandemaisonjouitdecesdeuxderniersprivilèges.Mabicoquesetrouveêtrelaplusprochedelagrandebâtisseblanche.Perdu dans mes pensées qui tournent autour des révélations morbides

d’Alberto, jegrignoteunmorceaudepainetunboutde fromageavantd’allerprendreunedoucheetderejoindremonlit.

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Gaby

Je me réveille aux aurores, désorientée, puis réalise où je me trouve. Monregardtombesurundessinpunaisésurlemuràmagauche.C’estuncroquisdepetitspersonnagesquej’aicrayonnéenfant,représentantmesparentsetmoi.Jemelèveetentreprendsdedéfairemonsac.Jeprendsunedouche,enfileun

short, un chemisier sansmanches et sors explorer lamaisondans laquelle j’aipasséledébutdemonenfance.Jememetsàtrembler,alorsquemamainseposesurlapoignéedelaportedelachambredemesparents.Tupeuxlefaire,Gaby.

Jeprendsunegrandeinspirationetpénètredanslapièce.Toutestidentiqueàce que j’ai connu. Murs blancs, mobilier en bois clair, comme dans toute lademeure.Unedouleurintensemetranspercelapoitrineetunchagrin immensemesubmergelorsquemonregardseposesurl’endroitoùj’aidécouvertlecorpssansviedemamère.Mêmeaprèstoutescesannées,j’ailasensationquec’étaithier.Jequittelachambre,leslarmesauxyeux.Jem’adosseàlaporteenfermantles

paupières et me contrains à respirer le plus calmement possible pour tenterd’atténuermapeine,maisj’aisimal…Jequitte l’étageetnoteaupassagequemonpèrea fait installerunesécurité

supplémentaire sur laportequidonneaccèsà sonbureau. Je suiscertainequetoutcequim’intéressenesetrouvepasdanscettepièce,maisdanscellequ’elledissimulederrièreunpandemur.Je redécouvre le rez-de-chaussée et suis surprise de constater que rien n’a

changé,hormislejardinàl’arrièredelabâtissequiestdigned’unecartepostale.Piscine à remous, dotée d’une petite cascade qui sort du décor en pierre,palmiers,transatsenboispourvusdematelasdequalitéetmêmeuncoinquifaitbar. Mon père ne s’est certainement pas payé un avion et cette piscine auxdimensionsdémesuréesenvendantdescacahuètessuruneplage.Jerejoinslacuisine.—Bonjour,mademoiselle,mesalued’unepetitevoixunefemmebrune.Elleesttoutemenue,voûtéecommeunepersonneâgée,lesyeuxbaissésausol

etsetriturelesdoigtsnerveusement.

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—Bonjour.Carmen,c’estça?Sesmainssemettentàtremblerlégèrementàl’évocationdesonprénom.—Oui,mademoiselle.Carmen a six ans de plus que moi. J’ai gardé le souvenir d’une pré-ado

réservée, mais là, je suis déconcertée de voir à quel point elle a changé. Jem’approched’elle etm’aperçois qu’elle n’est pas timide,mais apeurée. Jemesaisisdoucementdesesmainsetlespresselégèrement.—Tun’asabsolumentrienàcraindredemoi.Nousjouionsensembleavecton

frèrequandj’étaispetite,tut’ensouviens?Elle opine brièvement, redresse la tête et plonge des yeux hantés dans les

miens.Qu’a-t-ellevuouvécupouravoirceregard?— Je suis tellement désolée pour votre maman, murmure-t-elle d’un ton

contrit,avantdebaisserànouveauleregardsurlecarrelage.Mapoitrineseserre.—Merci.—Bonjour, tu es toujours aussimatinale, à ceque jevois, déclareunevoix

masculine.Carmen s’écarte aussitôt de moi comme si elle s’était brûlée et s’active à

préparer du café. Je me retourne vers l’homme qui vient de faire son entrée.Alberto a quarante-trois ans, le même âge qu’aurait ma mère aujourd’hui. Ilsemblefatiguéetmeparaîtplusvieuxquemonpaternel,alorsqu’ilaonzeansdemoinsquecedernier.Jelesaluefroidementet leremercieduboutdeslèvreslorsqu’ilmeprésente

sescondoléances.—Tuesdevenueunetrèsbellejeunefemme,Gaby.Commentvas-tu?Commes’ilenavaitquelquechoseàfoutre.

—Enquoi,celat’importe-t-il?demandé-je,ironique.Ilm’observeuninstant,désabusé.—C’estpourçaquetuesrevenue?Pourobtenirdesréponses,n’est-cepas?

s’enquiert-il.—Cen’estcertainementpasparcequetum’asmanqué,réponds-jesèchement.J’appréciaisAlberto quand j’étais gosse, il s’est toujoursmontré gentil avec

mamanetmoi,maismonpointdevueestbiendifférentaujourd’hui.—Gaby,jevousadoraistoiettamère,peuimportequetumecroiesounon,

maisellememanqueàmoiaussi.

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Sonairtristenem’émeutpaslemoinsdumondeetj’entredanslevifdusujet:—Pourquoim’as-tumenti?Ques’est-ilpassé,ce jour-là?demandé-jed’un

tonmordant.La culpabilité s’ajoute au chagrin immense qui transparaît déjà dans son

regard.—Jetedemandepardon,Gaby.Jenesaispaspourquoitamèreestdécédée,

c’estlavérité.Àmoinsqu’iln’aituntalentcachéd’acteur,ilmesemblesincère.Jepivoteaumomentoùj’entendsunesortedecouinementétoufféderrièremoi

etvoisCarmenportersamainàseslèvres.—Tulesais,toi?luidemandé-je.Elle tourne la tête en direction d’Alberto, m’adresse un vif signe de

dénégation, puis sort des tasses du placard au-dessus d’elle d’une maintremblante.Cettefemmeestterrorisée.Siellesaitquoiquesoit,ellenemedirarienenprésenced’undessbiresdemonpère.JelalaissedonctranquilleetfaisdenouveaufaceàAlberto.—J’imagineque tuasdeschosesbeaucoupplus intéressantesàfairequede

noustenircompagnie,non?—Jesuisseulementlesordresdetonpaternel,Gaby,maisjevaisvouslaisser

dèsqueMiguelseralàpourprendrelarelève.Pourmesurveiller,moi,ouCarmen?Grincheuxm’ainforméquelesenfantsdescueilleursavaientsurvécuàlasoi-

disantattaquedesparamilitaires,carAlbertolesavaitemmenéspique-niqueraubord de la rivière à ce moment-là. Je connais les prénoms de chacun dessurvivants ainsi que l’âge qu’ils ont aujourd’hui. Mon père a-t-il recruté sessbiresparmicesgosses?J’enai laconfirmationaumomentoùMiguel,quiavingt-deuxanset figure

surlalistequej’aiétudiée,faitsonentréeensaluantvaguementtoutlemonde.Sescheveuxbruns,dontlespointessontdécoloréesenjaunepisse.sontdresséssursoncrâne.Ildétaillemoncorpsd’unairlibidineuxetmegratified’unsourirecarnassier.—Tuveuxmaphoto?leprovoqué-je.Ilhausseunsourcil,surpris,maisneditrien.J’aibesoindesavoircequecepetitconadans leventreet jusqu’oùjepeux

aller.Jecontinuedoncsurmalancée:

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—T’asperdutalangueoutuasoubliédet’acheterunepairederoubignolespourmerépondre?demandé-je.Jesaisquejesuissurlabonnevoie,carsonregards’assombrit.—C’estquoi,tonproblème?s’enquiert-il.—Lespetitsmerdeuxdanstongenrequiattendentl’autorisationdeleurmaître

pour pouvoir lever la patte et pisser. Tu te prends certainement pour un caïd,maistuesseulementpathétique,dis-jed’untonméprisant.Ils’approchedemoi,leregarddeplusenplussombre.—Nemecherchepas,meprévient-il.Alberto, qui ne perd rien de notre échange, tente de m’arrêter verbalement,

maisjem’obstine:—Sinon,quoi?T’asriendanslefroc.Tun’esqu’untrouducul.Tonpatron

doitprobablementt’enculertouslesmatinspourquetusoisaussiobéissant.Bingo!Ilme saute dessus etm’attrape à la gorge. Je bute contre le plan de

travailderrièremoietCarmenpousseuncrid’effroitoutenbondissantdecôté.—Ilnefautpas…souffleCarmend’unevoixàpeineaudible.Miguelpivotesatêtedanssadirectionetlamitrailled’unregardsinistre.—Quandjetedemanderaidemesucer,tuouvriraslabouche,pourlemoment

tufermestagueuleettudégages,Carmen!Ellesortdelapièceencourant,puisMiguelresserresesdoigtssurmoncouet

plonge un regard cruel dans lemien. Je ne panique pas, repousse légèrementmondosenm’appuyant sur lemeubledemamaingaucheet tented’ouvrir letiroirdel’autre,alorsqu’Albertoluiintimedemelâcher.—Aucunefillenemeparlecommeça, tuvas leregretter,salechienne!me

crache-t-ilauvisage.Jeglissemamaindanslemeubleetmesaisisdupremierustensileàportéede

mesdoigts.J’espèreseulementquec’estquelquechosedeplustranchantqu’unelouche.—Lâche-làimmédiatement!crieAlberto.Lepetitconne l’écoutepas, je l’aibien tropénervé. Ilcommenceàcaresser

mapoitrinedesamainlibre,unsourirevicieuxauxlèvres.—Legrosatellementdemalàsedéplacerquej’ailetempsdet’enculeravant

qu’il arrive jusqu’à moi. Je suis sûr que tu vas aimer ça, espèce de salope,déclare-t-il avant de faire sauter les boutons de mon chemisier en tirantbrusquementsurlevêtement.

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Jesorsmesdoigtsdutiroir,monarmedefortuneenmain,etlèvelebraspourfrapperlorsqu’AlbertoécarteviolemmentMigueldemoi.Lafourchetteseplantedans le bras du plus vieux qui se met à beugler comme un veau tandis queMiguelpercutebrutalementlagrossetableenchêne.Icesurgitentrombedanslacuisine.Aumoinsunquivaégayermajournée.Bienvenueàlafête!

—Quesepasse-t-il,ici?gronde-t-il.S’ensuitunecacophonieinfernale.AlbertoluirelatelesfaitsetMigueltentede

se justifier,mais Ice ne regardequemoi et s’approche, foudroyant aupassageMiguelduregard.—Çava,bébé?s’enquiert-il,enfrançais.—Oui,toutbaigne.Il est tellement sexy, bordel.Un rictus déforme ses traits et ses prunelles se

glacentlorsqu’ellesglissentsurmagorge,puissurmoncorsageouvert.JedoisprobablementavoirlatracedesdoigtsdeMiguelimpriméesurmapeau,maisjene ressens aucune douleur. Ice se retourne d’un coup et fond surMiguel quiécarquillelesyeux,effrayé.Ill’attrapeauniveauducoldesont-shirtetsoulèvelegaminàsahauteur.—Ellem’ainsulté!—Et alors?Son pèrem’a demandé de veiller à ce qu’il ne lui arrive rien.

Touche-laencore,neserait-cequeduboutd’undoigtetjetecrève,c’estclair?!Migueldéglutitavecpeineethoche la tête. Ice luidonneunviolentcoupde

têteetlebalourdsemetàhurlerdedouleur.Ilrelâchebrusquementlegaminetlui ordonnededéguerpir.L’autre s’exécute, unemain sur sonnezqui pisse lesangetdeslarmesroulantsursesjoues.Sid’ordinaire,jen’approuveraispassongeste,là,jeluiensuisreconnaissante.Ice pivote ensuite vers Alberto, qui s’est assis et maintient son bras en

grimaçantdedouleur,ets’enquiertdelagravitédesablessure.—Carmen,allezchercherletoubib!Jen’aimêmepasremarquéqu’ellesetientprèsdel’embrasuredelaportetant

je suis occupée àme délecter du verso du corps de Ice.Épaules larges, t-shirtblanc près du corps qui épouse un dos long et musclé, taille étroite et shortminimaliste qui moule à la perfection son cul ferme et rebondi. Cuissespuissantes et jambes athlétiques. Son t-shirt est trempé de sueur comme s’ilsortaitd’uneséancedesport.Jememordillelalèvreinférieureetlâcheunpetitsoupird’enviemalgrémoi.Cemecàuncorpssublimeet jen’aspirequ’àune

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chose:levoirentièrementnu.—Àquoipenses-tu,bébé?Ice ne s’adresse à moi qu’en français, probablement pour que les autres ne

nouscomprennentpas.Jerépondssansréfléchir,alorsquejelouchemaintenantsursoncôtépile.—Es-tuaussidélectableàpoil,quevêtu?Parceque, là, j’aienviede lécher

chaqueparcelledetoncorps.Mesyeuxremontentlentementlelongdesescuisses,s’arrêtentsurlabossede

sonentrejambequiestentraindetriplerdevolume.Jemelècheleslèvres,puismonregardplongedansdeuxyeuxbleupâlequibrûlentdedésir tandisqu’unindexmefaitredresserlatête.—Cessedemematercommesituallaismebouffer,bébé.Çam’excitecomme

undingueet jene suispascertaind’avoir suffisammentde sang-froidpournepas t’allonger sur ce plan de travail, te besogner dans toutes les positionspossiblescommeundémentettefairejouirencoreetencore.Contrairement àMiguel, Iceme fait mouiller comme une fontaine avec ses

parolesetjeserremescuissesl’unecontrel’autre.— Peux-tu t’abstenir de déclencher une guerre nucléaire le temps que je

prenneunedoucheetquejemechange?Tudevraisenfaireautant,nonpasquelespectacledetesseinsàmoitiédénudésmedéplaît,maisjepréféreraisêtreleseulàenprofiter.Jehochelatêteetsouris,imaginantmesmainssavonnersonsuperbecorps.Je

leregardes’éloigneretmefocalisesursonpostérieur.—Ellem’apromisdenepasinsulterquiquecesoitletempsquejerevienne,

dit-ilenespagnol,àAlberto.Hein?Jesuissesfessesmuscléesdesyeuxalorsqu’ilsortdelacuisine,sans

comprendrepourquoi il s’enva.Mesneurones se reconnectent àmoncerveautandisquemonregardseposesurAlbertoquiesttoujourslà.Unbonhommeauxcheveuxgriset trapus’occupedesonbras.D’oùest-cequ’ilsort,celui-là?Jeperdslatêteouquoi?Je quitte la pièce et rejoins ma chambre pour changer de chemisier, puis

redescends.Lorsquejepénètredenouveaudanslacuisine,Alberto,dontlebrasestmaintenantbandé,m’observed’unairsongeur.— Tout le monde craint le Balafré depuis qu’il a collé une dérouillée

mémorableàManuel.Toi,parcontre,nonseulement ilne t’effraiepas,mais ilsemblet’attirercommeunemoucheleseraitavecdumiel.

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—Pasdutout,répliqué-jed’untonacerbe.—Unvieuxsingecommemoisaitreconnaîtrelatensionsexuellequicircule

entredeuxêtres,petite.Peum’importecequisepasseentrevous,maisManuelledescendras’ilapprendquetuenpincespourcegars.Celanedevraitpasmetoucheretpourtantc’estlecas.Jenesouhaitepasque

Icesefassetuerparmafaute,cependant,unequestionmeturlupine.—Pourquois’est-ilbattuavecManuel?—ManuelsecroitplusfortquetoutlemondeetadéfiéleBalafréencombatà

mainsnues.Illuiafalluplusieursjourspours’enremettre,maisleplusétrange,c’est que ton père les a observés se cogner dessus sans intervenir. Il a laisséManuelsefairedémolir.Probablementpourévaluerlaforcedesparticipants.

—Tuvascertainementcroirequemespenséessontdéplacées,maisdepuiscejour, je me demande si ton père ne préférerait pas un homme de l’acabit duBalafrépourgendre.JuanapromistamainàManuel.Pourquoimedirecela?Parcequ’ilpensequeIcem’attire?

Mon père n’accepterait pas que j’épouse quelqu’un d’autre que l’un de sesgars,surtoutsijedécidederesterici.Iceremplitcettecondition,jepeuxpeut-êtreobligermonpaternelàreconsidérersonchoixetainsi,gagnerdutemps.Albertoguettemaréaction,maisjeresteimpassible.—Quellessontsesfonctions?demandé-je.—J’imaginequecesontcellesduBalafréquit’intéressent.J’acquiesce.—Jusqu’àilyapeu,sonrôleconsistaitàveillersurlescueilleurs.Mmm.Veillerousurveiller?Jepenchepourlasecondeoptionvulapalissade

quiceintlapropriété.—Etmaintenant?—Ehbien,ildoitprendresoindetoidurantl’absencedetonpèreetjedoisle

formerpourqu’ilmeremplace.Albertovientdepiquermacuriosité.JeprendsplaceàtabletandisqueCarmen

réapparaît,noussertàchacununetassedecaféetquittedenouveaulapièce.—Tuprendstaretraite?demandé-jed’untonsarcastique.—Enquelquesorte.Jesuisatteintd’uncancergénéralisé.Celaexpliquesansdoutesonairfatigué,maispourquoin’est-ilpasàl’hôpital,

danscecas?Jem’apprêteàluiposerlaquestion,maisilmedonnelaréponse

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avantmêmequej’ouvrelabouche.—Personnenesortd’icisicen’estpouraffaires,Gaby.Tonpèrem’accordele

privilèged’abrégermes souffrances. Je nedevrais pas te dire tout ça,mais aupointoùj’ensuis,jenerisqueplusgrand-chose.Alberto, loin d’avoir peur, semble résigné. Moi, j’ajoute un meurtre

supplémentaireauxactivitésdemonpaternel.—Enquoivaconsisterlaformationd’Ice,hormisconvoyerdelacocaïned’un

pointAàunpointB?Ilestbouchebée.—Commentlesais-tu?— Ce n’est pas parce que je suis une femme que je ne sais pas faire

fonctionnermacervelle.— Si tu as hérité de la couleur des cheveux de ton paternel, tu ressembles

beaucoup à tamère,même si tes yeux sont plus vifs que les siens. Elle aussiavaitcomprisquelesactivitésdetonpères’étendaientau-delàdelaproductiondecafé.Sontontristemelaissecroirequec’estcettedécouvertequiacausélamortde

mamère.Albertodémentetme révèle lepeuqu’il sait,mais j’ai l’impressionqu’il neme dit pas tout. Ilme relate également la façon dontmon père s’estallouésesservicesetsaloyauté.JecomprendsmieuxcertaineschosesetmarancœurcontreAlbertos’atténue

quelquepeu.—As-tuassistéàl’enterrementdemaman?Sesyeuxsevoilentdetristesseetunepenséeincongrues’immiscedansmon

esprit.—Oui,elleestbiensouscettestèle,petite.Ilconfirmelesparolesdemonpèreconcernantlecuré,maism’apprendsque

cedernieraofficiésouslacontrainted’unearmeetaétéretrouvésansviedeuxjoursplustarddansunquartierdeBogota.Albertomesondeduregard,maisjenemontre rien. Jem’apprête àme leverquand il pose samain calleuse sur lamienneetlapressedoucement.—J’aimaisvraimenttamère,plusquejen’auraisdû,j’enconviens,maiselle

n’avaitd’yeuxquepoursonépoux,murmure-t-il.Je suis stupéfaite. Alberto était amoureux de mamère ? Je ne sais quoi en

penser,maisjevoislavéracitédesesproposdanssonregard.

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— Je lui ai fait une promesse, Gaby, lors de sa mise en terre. Ça n’aprobablementaucunevaleurà tesyeux,mais je tiendraimonengagementquoiqu’ilm’encoûte. Jemedoutepourquelle raison tu es revenue,petite, etquoiquejeteconseille,tun’écouterasprobablementrien,maisjetepriedeprendreen considération ceci : j’ai juré sur la tombe de ta mère que je ne laisseraispersonne te faire du mal. Ton père est un être impitoyable, mais surtout, netournejamaisledosàManuel.Jehochelatête,ayantbienreçulemessage.—Mercidem’avoirdit toutcelaet,désoléepour tonbras,dis-jeenpressant

légèrementsamain.Jequitte la table,nesachant toujourspaspourquoiJuanatuémamère,mais

pourunepremièrejournée,j’enaidéjàapprisplusquecequej’espérais.

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Ice

Jemesoulagesousladouche.Encore.Jesaisquejenesuispasprêtd’allongerGabysousmoi,surtoutmaintenantquenoussommesici.Mavievadevenirunenfer si je dois la côtoyer tous les jours sans pouvoir m’enfouir en elle. Jedevraishaïrsonpèredem’avoirdésignépourlasurveiller,maisjepréfèrequecesoitmoiplutôtqu’undecesgamins.CepetitcondeMigueladelachancequejemesoisretenudeluiéclaterlagueulecontrelatable.Manuelenpenseracequ’ilvoudra,mais il esthorsdequestionque je la lui

laisse. Gaby me plaît et elle me désirait, moi, personne d’autre, dans cettecuisine. Je veux également apprendre à la connaître autrement qu’à travers lesexe.Jemebranleplus fort, alorsque jeme remémoreson regard lascifdétaillant

moncorps,sesparoles,lanaissancedesesseinsfermesetgénéreux,sestétonspointésversmoi,m’exhortantvivementde les libérerde leurécrindedentelleblanche.Unrâleanimalfranchitmeslèvrestandisquejejouisendelongsjetsbrûlantscontrelaparoicarrelée.JerécupèreleBeretta92queJuanm’afourni,lepassesouslaceinturedemon

pantalon,ainsiquemonGlock26que je fixeàmachevilledroite. Je retournevoirmajoliebrunequi,j’espère,n’apasfaitdevaguesenmonabsence.Albertom’informequ’elleestsortie,accompagnéedesaguitare.Jel’aperçoisàl’entréedelaplantationdecaféoùellesembles’entretenirvivementavecPedroetPaco.Bonsang,ellenepeutdoncpassetenirtranquilledeuxsecondes?

J’accélèrelepaspourlarejoindreavantqu’ellenedéclencheleshostilités.—Quesepasse-t-il,encore?m’enquiers-je,parvenuàsescôtés.—Elleveutsortirdelapropriété,m’informePaco.Ça,jem’endoute.—Oùcomptes-tualler?Iln’yarienàvisiterdanslecoin,dis-jeenfrançais.—JesouhaitemerendreàCaruru,mebalader.C’estsansdoutemieuxquederestercloîtrésurlaplantation,aprèstout.—D’accord,maisjet’accompagne.Ellegrimace.J’ajoute:

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—Bébé,jeregrette,maisc’estçaourien.Àtoidechoisir.—D’accord,soupire-t-elle.Jeconçoisquec’estfrustrant,pourunejeunefemmedesonâgequiagrandien

Europe, de se retrouver privée de totale liberté ici. J’explique aux garçonsquellessontnosintentions.Dèsqu’ilss’écartentpournouslaisserpasser,Gabysemetenrouted’unpasvif,maisjelarattrapeenluisaisissantlebras.—Onvaprendreunvéhiculepourserendrejusqu’àlarivière,viens.Elleme suit sans rechigner jusqu’à l’auvent enbois qui abrite deux jeeps et

quatre motos tout-terrain. Ses yeux s’illuminent quand ils tombent sur sesdernières.—J’imaginequetonchoixseportesurunedeuxroues,maisnousnepouvons

enprendrequ’une.—Oh,d’accord.Tuesdéjàmontésurunemoto?—JeconduisuneZZR1400depuisquej’aimonpermis.Ellesembledéconcertéeetplissesoudainlesyeux.—C’estmoiquipilote,gronde-t-elle.—Non.Àsonair,jesaisqu’elles’apprêteàrépliquervertement,maisjeladevance:— Je t’ai vumanier ton engin, je ne reproche rien à ta conduite,mais je te

proposeundeal.Situn’essaiespasdemesemeraucoursdecettejournée,jetelaisserainousramener.Jevoispresque les rouagesde soncerveau semettreenbranle,puis elleme

gratified’uneminedéconfite.—Jeseraiprobablementtropcrevéeauretour,laisse-moiconduireàl’aller.—Non,tuseraiscapabledeprendrevolontairementuneornièrepourm’éjecter

duvéhiculeett’enfuirjenesaisoù.Ellem’adresseunsouriregoguenard,puismerépond:—LegrandméchantIcen’estqu’unpeureux.Je ne réplique pas, récupère les clés de la seule bécane à deux places,

enfourche l’engin, qui ressemble plus à une bicyclette, comparé au mien, etdémarretandisqueGabymontederrièremoi.Nous roulons depuis à peine deux minutes et ses mains commencent

doucementàsebaladersurmont-shirt,seglissentsouslevêtement.Ellecaressesubtilement mes abdos et ma queue s’allonge comme le nez de Pinocchio.Bordel,ellechoisitbiensonmomentpourmetripoter!

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Jeserrelesdentsetmeconcentrefarouchementsurmaconduitem’attendantàplusd’attouchements,maiselleposesatêteentremesomoplates.Sesmainssurmapeausontàlafoisundéliceetunsupplice.Majoliebruneplaquéecontremoi,m’entourantdesesbras,mefaitressentir

des émotions jusque-là encore inconnues. C’est étrange.Mon cœur se gonfle,monabdomenfaitdescabrioles,maisplusquetout,jesuisbien,apaisé.Arrivésàlarivière,nousempruntonsl’embarcationàmoteurquiappartientà

son père.Gaby gratte distraitement son instrument, elle semble complètementailleursetfredonnedescomptinesletempsdelatraversée.Caruruestunepetitemunicipalitéoùiln’yapasgrand-choseàvoir,demon

pointdevue,maisGabymedémontrelecontraire.Ellemefaitremarqueràquelpointlesautochtonessontavenants,chaleureuxetviventsimplement.Leballond’ungamind’environcinqans roule jusqu’àmoi, je le lui renvoie

doucementdupiedensouriant.Contre touteattente, lemômeme réexpédie laballe.Jeregardelejouetàmespieds,perplexe.Jenemesouvienspasavoirjouéavecunautreenfant,pasmêmeavecmonfrère,lorsquej’étaispetit.—Joue!m’ordonnelegosse.Jenesaispasquelle tête je fais,mais jevoisGabym’observer étrangement,

puis elle m’adresse un sourire espiègle et me pique la balle du bout de sachaussure.—OnvaapprendreàIcecommentonjoueaufootetonvaluimettrelapâtée,

dit-elle,s’adressantaubambinqui,lui,exulte.—Hé!m’insurgé-je.J’essaiede reprendre leballonàGaby,maiselle lepoussevers lemômequi

éclatederire.Cesonmeréchauffelecœuretjemesurprendsàentrerdansleurjeu,jecoursdel’unàl’autre,manquantlaballeexprès.Gabyestrayonnanteparsonsourireet jeprendsplaisirà jouer. Ilsmefont tournerenbourriquedurantunebonneheurepuis, je rends lesarmesennage,alorsque le soleil està sonzénith.Jem’assoisàmêmelesol,crevéetmourantdesoif.Legaminmedéconcerte

ensejetantàmoncou.—Onagagné?—Oui,bonhomme,c’esttoilechampion,dis-je,luiébouriffantlescheveux.Lebambinmeplanteunbisousurmajoueabîmée,jeleregarderejoindreses

parents,l’airahuri,etsursauteàlavoixdeGaby.

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—Tuesunhommetrèscomplexe,Ice.Jene répondspas, sachant trèsbienqueldilemmese jouedans soncerveau,

maisjenem’attendscertainementpasàlaquestionqu’ellemeposeensuite.—Combiendepersonnesas-tutuées?Malgrésonairimpassible,ellem’observed’unregardperçant.— Une seule, mais je suppose que c’est toujours une de trop à tes yeux,

murmuré-je,désabusé.Ellesoupire,ouvre laboucheet la refermeaussitôt tandisqu’unhommeà la

peautannéenousapproche.—Je suis lepèredeDiego, legarçonavec lequelvousavez si aimablement

acceptédejouer.Jeseraistrèshonorédepartagernotredéjeuneravecvous.Jejetteuncoupd’œilàGabyquihochelatêteensigned’assentiment.Jeme

lèveetnousemboîtonslepasaubonhomme.—C’étaitmonécole,lâchemajoliebrune,alorsquenouspassonsàcôtéd’une

constructionenbois.Elledemandes’ilestpossibledelavisiter,l’hommeacquiesceetnousconduit

versl’entrée.Quatretypes,entenuemilitaire,setiennentnonloinetjesuisdéconcertéd’en

reconnaîtreunparmieux,Rafael.Ilmesaluepolimentd’unsignedetête,puisdétailleunpeutroplonguementmacompagne.Gabyenfaitautantetlesmusclesdemonventresecontractentméchamment.—Tuvasresterenextasedevantluiencorelongtemps?Elleseretourne,ungrandsourireauxlèvres.—Ilestmignon.Tucroisquec’estunboncoupaulit?J’ai envie de lui tordre le cou pour lui faire ravaler ses paroles. Elle me

provoquedélibérémentet,malgrétout, jeplonge,têtelapremière.Jelagratifiedemon regard le plus glacial et gronde tant la colèreme ronge. Loin demecraindre,elleéclatederireetposesesmainsdechaquecôtédemonvisage.—Tum’attiresplusquelui,Ice,maisjenepeuxfaireabstractiondecequetu

es,nidelapersonnepourquitutravailles,murmure-t-elle.Ellemechauffe,sansmêmelevouloir,etm’asperged’eauglacée laseconde

suivante.Jefermelesyeux,enproieàplusieurssentimentscontradictoires.—Ice?Jerouvrelespaupièresetsoupirededépitquandelleretiresesdoigtsdemes

joues.

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—Peux-tuveillersurmaguitareletempsquej’ailleauxtoilettes?J’opine,puisfroncelessourcils,suspicieux.—Tucomptesmefaussercompagnie?Ellem’adresseunsourirerassurant.—Non,j’aiseulementbesoindevidermavessie.—Bien.Jet’attendsici.Je récupère son instrument et souris en repensant au jour où je l’ai acheté.

Gabypassaitdesheuresàécouterunsansdomicilefixejouerdelaguitare.Legarsl’ainvitéeplusieursfoisàs’asseoiràsescôtésetluiamontréouplacersesdoigts, comment gratter les cordes. Jamais je n’oublierai le sourire éclatantqu’elle affichait lorsqu’il lui confiait son instrument.Alors, j’ai demandé à undesBlacksde lui remettrecelui-cidemapart,mais jenemedoutaispasqu’ilseraitencoreensapossessionaprèstantd’années.Etpuis,Jenesaispourquoi,avantdequitterMarseille,jevoulaisqu’ellepossèdequelquechoseensouvenirdemoi.C’estidiot,non?Je passe la sangle surmon épaule et attends patiemment qu’elle ressorte de

l’école.Rafaelmejetteplusieursfoisuncoupd’œil,maisl’uncommel’autre,nefaisonspasminedenousconnaître.Jeluiadresseunlégersignededénégationalorsquesonregards’attardeunpeupluslonguementetilhochefurtivementlatête,mesignifiantqu’ilacomprismonmessage.Gabymesurprendlorsque,aprèsavoirrécupérésaguitarequ’elleglissedans

sondos,elles’emparedemamainenmesouriantetm’annonce:—Viens,jemeursdefaim.Nous passons à proximité du petit groupe en treillis sans qu’elle daigne

adresserun regardàRafael et çameplaît. Jedeviensdeplusenplusmouducerveau depuis que je l’ai retrouvée dans ce bar parisien, j’en ai conscience,mêmesijenecomprendspaspourquoi.Nousnousrégalonsdepoissongrillé,degalettesdefarinedemaïsetdefruits.

Gaby étanche sa soif de connaissance sur les us et coutumes de cettemunicipalitéquiregroupeplusdevingtethniesdifférentesd’indiens.LepèredeDiegodévisagemescicatricesdepuisunlongmomentetjemesens

de plus en plus mal à l’aise. Soudain, il se redresse, retire son t-shirt et memontresondosquiestparcourudequatrelonguesbalafres.—Jaguar,lâche-t-il,avantdemefaireànouveauface.Jevoisoùilveutenvenir,toutmoncorpsseraiditetmonmalaises’accroît.

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—Ettoi,quellebête?Unebeaucoupmoinsgrosse,maistrèsviolente.Gabym’observeavecunintérêtnonfeintet jenesaispourquoi,maisjen’ai

pasenviedeluimentiràcesujet.Jeplantemonregarddanslesienetrépondsenfrançais:—L’amantdemamère.Elleest choquée,puis sesyeuxsemettentà flamboyerd’horreur. Jevois les

questionsaffluerauxbordsdeses lèvres,mais lesmots lesplus inattendusquisoient,sortentdesabouche:—Ungroschat,traduit-elleenespagnolpourlepèredeDiego.Gaby répond à ses questions en brodant, puis amène subtilement la

conversationsurunautreterrainetjeluiensaisgré.Cettefemmeestadmirable.J’aiconsciencequejeviensdecommettreuneerreurenluirévélantcela,ilva

falloirquenousayonsuneconversation, seulement,unequestionme taraude :puis-jeluifaireconfiance?

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Ice

Nousremontonsàborddubateauenfindejournée.Gabynem’apasinterrogéde tout l’après-midi, mais je sais qu’elle attend lemoment propice, que noussoyonsloind’oreillesindiscrètes.J’aiàpeinedémarrélemoteurquelapremièrequestionfranchitseslèvres.—Quelâgeavais-tu?Jeréfléchisàcequejepeuxluidévoiler,puisdécided’êtrehonnête.—Gaby,jevaisrépondreàtesquestions,maisjedoistedemanderunechose

auparavant.Ellemeregardeunmoment,intriguée,puisacquiesce.—Tonpèreetseshommesnesontpasaucourantetjetiensàcequecelareste

ainsi,tucomprends?—Jenedirairien,Ice.Parcontre,j’aiuneexigenceégalement.Jesupposeque

s’enquérirdupasséd’unepersonnerevientàfaireconnaissanceavecelle,non?J’acquiesce,maisnevoispasoùelleveutenvenir.— Il y a des choses àmon sujet que je ne souhaite pas aborder. Je nepeux

doncexigerquetum’apprennestoutdetoi,puisquejeneseraipasenmesuredete rendre la pareille. Seulement, je suis intransigeante sur un point : pas demensonges.Soittudislavérité,soittutetais.—D’accord.J’avaissixansquandilm’adéfigurédelasorte.Ses traits se durcissent et la répugnance transparaît dans ses prunelles,mais

ellen’estpasdirigéecontremoi.—J’espèrequ’ilapayépourcequ’ilt’afait.—Jel’aitué.Elle me scrute, les yeux ronds comme des soucoupes. Elle neme pose pas

d’autresquestionsjusqu’àcequenousaccostions.—Pourquoit’a-t-illacérélevisage?Je la regarde s’asseoir en tailleur au bord de la rivière et je la rejoins. Je

soupire,fermelesyeux,etjerevistouscesinstantscommes’ilssedéroulaientmaintenantetquejen’étaisencorequ’unpetitgarçon.

*****

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J’aisixans,enfinpresque.Mamanditqueceseralecasdansquatremois.MonpapaestmortdansunaccidentilyadeuxsemainesetmamanadécidédevenirenFrance.NousarrivonschezunmonsieurquihabiteprèsdeMarseille.Jenesaispass’ilestgentiloupas,maisjenel’aimepas.Ilembrassemamansurlaboucheetsamainremontesoussajupe.Mamans’écartedeluietnousprésente,monfrèreConnoretmoi,aumonsieur.Ilnousregardedetraversetcrieaprèsmaman.—Qu’est-cequ’ilsfoutentlà,cesmorveux?!—J’aiobtenumonvisapourlesÉtats-Unis, jevais tentermachancelà-bas.Macarrièred’actricene

décollepasenEuropeetjenepeuxpasm’encombrerdedeuxgamins.

—Non,maistutefousdemoi?!Ilesthorsdequestionquejem’occupedetesgossespendantquetutepavanerasdanslesruescaliforniennes!Etnousdeux?Jepensaisqu’onseraitenfinensemble,maintenantquetonmariestdécédé!J’enaimarred’êtredeboutaumilieudusalon,alorsjevaism’asseoirsurlecanapéentissuetConnor

merejoint.Mamanetlemonsieurcrientdeplusenplusfort.—Tuasfuméunpétard,ouquoi?!Iln’ajamaisétéquestiond’unavenirensemble,macarrièrepasse

avanttout,cesmiochesycompris!ditmaman.Marie-Lou,notremamanest française.Onparlecette langue,Connoretmoi,ainsique l’anglaiset le

gaélique,maislà,jenecomprendspastouslesmots.—Connor,tusaiscequisepasse,toi?—Non,maisjen’aimepascebonhomme.—Moinonplus.Ilmefaitpeur.Noussursautonstouslesdeuxquandnousentendonsuneporteclaquer.Lemonsieursemetàhurleret

lanceunebouteillecontrelemur.Elleéclateenmillemorceaux.Mamann’estplusdanslapièceetjememetsàl’appeler.—Maman?Jemelèveducanapépourlachercher,monfrèremetsamaindanslamienneetnousappelonsmaman

touslesdeux.Lemonsieurseretourneets’approche.Ilal’airencolèreetj’aideplusenpluspeur.Ilnousgifleviolemment,Connoretmoi,etnousnousmettonsàpleurer.—Maman!Maman!crié-je,alorsqueleslarmesroulentsurmespetitesjoues.

Lebonhommenoushurled’arrêterdechialeretdebrailler,maisjecontinue,monfrèreaussi. Ilnousattrapepar lescheveuxetnous faitsortirde lapièce,nous traînedansunescalier,me lâchepourouvriruneporteetnouspousseàl’intérieurdecequiressembleàungarageremplid’outils.Jem’accrocheàmonfrère,quiestautantenlarmesetterroriséquemoi,pendantquelemonsieurferme

laporteàcléetsedirigeversl’établi.—J’aipeur,Connor.Qu’est-cequ’ilfait?Oùestmaman?Monfrèresangloteplusfortetsemetàtrembler,cequimeterrifieencoreplus.Jetournelatêteetvoisle

monsieurpasserdeschaînesdansdesanneauxfixésaumur,commeceuxquej’aivusdansuneécurie,unefois.Peut-êtrequecetendroitenétaituneavant.Lemonsieurs’approchedenousetattrapemonfrèreparlebras.Jecrie, frappelebonhommedemes

petitspoings,maisilmegiflesiviolemmentquejetombeausol.Ilpasseunedeschaînesautourducoudemonfrèreetglisseuncadenasentredeuxmaillonspourlafairetenir.Ilrevientmechercheretm’attachedelamêmefaçon.Ilprendunebouteillederrièresonétabli,retirelebouchon,boitlonguementetnousregarded’unairmauvais.J’aitellementpeurquejefaispipidansmonpantalon.

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—Bientôtneufansquej’attendsàcausedevousettoutçapourrien!Puisquevotre mère vient de vous abandonner comme des chiens, je vais vous traitercommetelsjusqu’àcequ’ellemerevienne!Mamannenousapasabandonnés,ilment,elleneferaitjamaisça!Iléteintlalumièreetsortdusous-sol.J’entendsmonfrèrechialeretappelermaman,jemerapprochede

luietnousnousserronsl’uncontrel’autre.Jenecomprendspascequinousarrive,Connornonplus.Nousfinissonsparnouscouchersurlesolenbétonfroid, tremblants,enlarmes,apeurésetnousfinissonsparnousendormir.Le lendemain, jeme réveille en ayant un peumal à la gorge. J’ai soif et j’ai faim. Jeme lève etme

dandine,unemainsurmonentrejambe.—J’aifaitpipidanslecoin,là,m’informemonfrère,enmedésignantl’angledumur.J’enfaisautantetmerassoisàcôtédemonfrère.Lemonsieurentre,unebouteilleàmoitiévidedansunemainetuntéléphonemains-libresdansl’autre.Il

compose un numéro et j’entends plusieurs fois la sonnerie, mais personne ne répond et le bonhommes’énerveetsemetàbeugler:—Jevaisfairepayertesmouflets,chaquejourjusqu’àcequetureviennes,pourm’avoirprispourun

conpendantneufans!Ilattrapeunegrandecléàmolette,papaenavaitunecommeçadanssongarage,puisillèvelebrasen

s’approchantdenous,l’airencoreplusméchant.Jem’écartevivementd’uncôtéetConnordel’autre.Jehurleetpleure,metordantdedouleur,alorsqu’il

mefrappeaveccetobjet.Jemerouleenbouleetappellemamamanquinevientpasmechercher.J’aimal,j’aipeur.Jemerecroquevilleencoreplusalorsquej’entendsuneporteclaquer.Monfrèremeparle,maisc’estcommesijen’étaispaslà.Jechialelongtempsetm’endors.J’ouvrelesyeux,j’aimalaudos.J’essaiedem’asseoiretyparviensavecbeaucoupdedifficultés.—Ilaapportédelapâtéepourchiensetunegamelled’eau,m’informeConnor.Lapâtéeestàmêmelesoletmonventremefaitmaltantilgargouille.—T’enasmangé?—Oui.Jemejettesurl’alimentquisentmauvaisetaungoûtbizarre,maisj’aitropfaim.—Connor,tudors?demandé-je,unlongmomentplustard.—Non.—J’aienviedefairecaca.Jenepeuxplusmeretenir.—Faisdanslecoinoùonafaitpipi.Jem’yrendsetunefoisquej’aiterminé,jemerendscomptequejen’aipasdepapierpourm’essuyer.Je

mereculotte,rejoinsmonfrèreetmemetsàpleurerdehonte,maisj’aiégalementpeurquelebonhommemefrappedenouveauparcequejeviensdefaireunebêtise.Lelendemain,nousrevivonsexactementlamêmescène,saufquelemonsieurfrappemonfrèrecettefois.

Ilnouslaissetranquilletroisjoursdurantlesquelsilnousapportenotregamelled’eauetnousjettedelapâtéeausol,puissonmanègerecommenceetilnousbatàtourderôle.Lebonhommeboittoutletempsetrenifleparfoiscequiressembleàdelafarine.Jenesaisdepuiscombiendetempsnoussommesici,maismamannerépondjamaisetjecommenceà

croirequeleméchantmonsieuraraison:ellenousaabandonnés.Monpapamemanquebeaucoup,maisjesaisqu’ilnepeutpasvenirnouschercher.L’homme entre,mais aujourd’hui, en plus de sa bouteille et du téléphone, il a un fusil. Je tremble de

trouilletandisquejeleregardechargersonarme.Ilcomposelenuméro,commed’habitudeetbalancele

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téléphone d’un geste rageur à travers la pièce. Il braque ensuite le fusil surmon frère et jememets àhurler.Ilserapprocheenmarchantcommes’ilallaits’écrouleretjesaisqu’ilabeaucoupbu.

Jesuisleplusprochedelui.Jemejettedanssesjambes,iltombepar-dessusmoi et sonarme lui échappedesmains. Il semet à battremon frère avec sespoingstandisquejemeredresseettendslebraspourattraperlabouteillequ’ila laisséesur lecoinde l’établi,comptant le frapperavec.Aumomentoùje lasaisis,ilmel’arrachedesmains.Illafrappesifortcontrelesol,qu’ellesecasseendeux.Ilmegifleviolemmentaveclamoitiédelabouteillecasséequiestdanssa main et je m’effondre à terre. Je hurle de douleur, le sang et les larmesobstruantmavision,maisj’entendstoutàcoupmonfrèremecrierengaélique:—Lefusil!Attrapelefusil,ilestjusteàcôtédetoi!Jecherchemaladroitementl’armedemamaindroiteetn’hésitepasunesecondequandjelasenssous

mesdoigts.Jelasaisis,meredressecommejepeux,placelefusildevantmoietcherchelagâchette,commej’aidéjàvuunmonsieurlefaireàlatété.—Tire!Tire!mehurleConnor.J’appuieaumomentmêmeoùunesilhouetteflouesepenchesurmoi.

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Ice

Jerouvrelespaupièresetdoitêtrelivide,carGabymemurmure:—Tun’espasobligédem’enparlersitunelesouhaitespas.Jefixel’eaudelarivièreetmemetsàluirelatertoutça.J’aperçoisunelarme

silencieuseroulersursajoueàlafindemonrécit.Ellel’essuied’ungestefurtif.—Jel’aituéd’uneballeenpleincœur.Lecoupdefeuaalertéleplusproche

voisinquinousadécouvertsetaprévenulessecours.Lemédecinquinousaprisenchargem’asouhaitémonanniversairequelquesheuresplustard.— Je suis désolée que tu aies dû subir tout ça. C’est pour cela que tu as

souventceregardsihostile?dit-elled’unevoixsuave.—Ce typem’a défiguré avec ce qui restait de cette bouteille parce quema

mèrenousarejetés,monfrèreetmoi.Ellel’afaitunesecondefoislorsquelesservices sociaux sontparvenus à la contacter.Elle adéclaréqu’ellenevoulaitplusrienavoiraffaireavecnous,qu’elleavaitrefaitsavieetqu’elleattendaitunenfantdesonnouveaumari.Jetelaisseimaginercequedeuxgarçonsdehuitetsixansontpuressentir.Ilm’aétéimpossibledeparlerdurantquatreans,suiteàcesévénements.Etçamefaittoujoursaussimaldanslapoitrine,commequandj’étaisgosse.—Jecomprends,Ice.—Bébé, lacolèrenemequitte jamaisparceque,par sa faute, lesenfants,à

l’école,n’ontjamaisvoulujoueravecmoi.Lesfilles,àl’époque,etlesfemmes,aujourd’hui,me rejettent. Visualise un ado, dont les hormones viennent de seréveiller,quivoitsonfrèresetapertouteslesnanasqu’ilveut,alorsqu’aucuneneselaisseapprocherdeluiparcequ’illesrépugne,leseffraie.J’aiàpeineterminémaphrasequelesparolesquem’aditesGabydansl’avion

mereviennentàl’esprit.La crainte du rejet est ancrée enmoi et j’en ai tellement souffert dansmon

adolescenceque je laisse lacolèremesubmergeravantmêmed’approcherunefemme.Silesfillesn’ontpasvouludemoi,pourquoienserait-ilautrementpourles femmes?Jesuis tellementpersuadédecefaitque je les repoussed’entréeavecmonregarddetueur.Iln’yadoncriend’étonnantàcequ’ellesgrimacent

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ouaientunmouvementde reculdèsqu’ellesvoientma tronche,mais c’est cequime suffit pour tourner les talonsetnepas revenir enarrière,mêmequandellestententdemerattraper.J’aivingt-neufpiges,maisjenesuisqu’unimbécile.— J’avais vingt-quatre ans lorsqu’une prostituée, qui elle en avait bien

quarante,m’adépucelé.Lasecondeétaitunpeuplusâgée.Jenesaispascequeveutdire séduireetencoremoinscequecela faitd’avoirunecopine.Tues lapremière àm’avoir accordé plus que n’importe qui d’autre,mais tu as raison,c’estmoiqui repousse lesgens. J’enai consciencemaintenant, et je tiensà teremercier.Ellehausselessourcils,surprise.Je pensais que les femmesme voyaient comme unmonstre avecma gueule

couturée,maisfinalement, iln’yaquemoiquiétaitconvaincudecela.Jevaisavoirunsacréboulotàfairesurmoi-même!Nousrestonsunlongmomentsansriendirepuis,jeluidemandedoucement:—Tuveuxbienjoueruntruc,pourmoi?—Tusouhaitesuntitreenparticulier?—Non.Cequitevientàl’esprit.Je souris en reconnaissant les premières notes deTombé sous le charme de

ChristopheMae.Certainesparolesdelamélodiem’interpellent.Jemedemandesijenepensequ’àbaisermajoliebrunepourm’oublierdanssesbras,parcequec’estexactementcequis’estpasséavecelle.Gabymesouritunefoislachansonterminée,puisfroncesoudainlessourcils

etsesyeuxmemitraillent.— Tum’as forcémentmenti sur quelque chose, Ice. Tum’as avoué ne pas

pouvoir rentrer chez toi pour meurtre. Cet après-midi, tu m’as déclaré avoirabattuuneseulepersonne,çanecollepas.Silavictimeestcethommequivousamaltraités,tonfrèreettoi,alorstuasforcémentbutéquelqu’und’autreailleursqu’enFrancepuisquetut’ytrouvaisiln’yamêmepasdeuxjours.Jesoupire,luicaresselajoueduboutdemesdoigtsetluimurmuredesmots

engaéliqueirlandais.Ellemeregardecommesiunesecondetêtevenaitdemepousser.—C’estquoicecharabia?Tuviensd’inventerunnouveaulangage?—Jeteprometsquenon.—C’esttrèsagréableàl’oreille,maisest-cequecelasignifiequelquechose?

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—J’aiditquenonseulementtuesunejoliefemme,maisquetueségalementtrèsintelligente.Jepeuxrentrerchezmoi.J’aimentiavantquenouspassionscemarchésurlebateau,donc,çanecomptepas.Ma réponse semble la soulager et je comprendspourquoi.Elle craignait que

j’aietuéuneautrepersonne,maisjeneveuxpasluimentirsurça,pasàelle.Jeneveuxpasqu’ellemeregardedelamêmemanièrequ’ellelefaitavecsonpère.—D’accord.Donc,pourquoirestes-tuenColombie?Cen’est pasà cette question qu’elle souhaite vraiment que je réponde, je le

sais.ElleveutsavoirpourquoijetravaillepourJuan.Jeluiadressemonplusbeausourire,cequiladéconcerte.—Pourleplaisirdetacompagnieetdenosconversations.Ellemesondeduregard,maisjenedirairiendeplus.—Tuparlescouramment le français, l’espagnolet l’anglais,maisd’oùes-tu

natif?—Joker.—Europe?—Idem.—États-Unis?tente-t-elle.Jeluidonnelamêmeréponsequeprécédemment.—Jesaisislesensdetontatouagequireprésenteunechaînebrisée,maisqui

estGaib?s’enquiert-elleenanglais.—C’estlediminutifd’unprénom,réponds-je,danslamêmelangue.Ellem’adresseunsourirevictorieux,puisrepasseaufrançais.—Tuasunlégeraccent lorsquetuemploies l’espagnol,mais tonanglaisest

fluide,assuré,jepariesurunpaysanglo-saxon.—Peut-êtreest-celecas…Oupas.Nousdiscutonscequimeparaîtêtredesheures,maisjen’apprendspasgrand-

chosesursoncompte.Elleesteffectivementtrèssecrète,commemel’aprécisécebarmanàParis.Puis,ellemeposeunequestionquejeredoutais.—Qu’est-ilarrivéàtonfrère?Là,j’aiintérêtàbienchoisirchacundemesmotsavantderépondre.Jeneveux

pasluimentir,maisjenepeuxpastoutluirévélernonplus.—Ilestdécédélorsd’unrèglementdecomptesentredeuxbandesrivales. Il

avaitvingt-troisans.

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—Oh.Jesuisdésolée,Ice.Tuenfaisaispartieaussi,decegang?—Ouietnon.Jen’aijamaisétéunmembreàpartentièredecegroupe.J’ai

accepté d’exécuter certaines tâches, mais j’ai toujours refusé d’en effectuerd’autres.—Tupeuxexpliciter?—Non.Ellegrimace,déçue,etmoi,jelatrouveadorable.—Quelâgeavais-tuquandtuasintégrécettebande?— J’avais douze ans lorsque Ludo, le fils de la famille chez qui on nous a

placés, et qui en avait quinze, a commencé à fréquenter ces gars. Il nous aemmenés avec lui. Connor était fasciné, moi beaucoup moins. Mon frère asympathisé aveceuxetquand il allait les rejoindre, je l’accompagnais. Jen’aijamais eu d’amis et je ne cherchais plus àm’en faire. La première fois qu’ilsm’ontvu,ilsontdétaillémonvisagecommesij’étaisunebêtedefoire.J’avaisbeau y être accoutumé, çam’a tout demême blessé. Puis, les moqueries ontsuivi.Leur chef a prismadéfense, c’était la première personne à le faire, en-dehorsdemonfrère.Gabyestsongeuseet jesaisexactementquellevaêtresaprochainequestion.

Enrevanche,cequim’inquiète,c’estlafaçondontellevatournersaphrase.Elleplongesesprunellesvivesdanslesmiennes.J’yvoisdel’espoir,maiségalementde la crainte, ce qui est assez contradictoire. Puis, elle clôt ses paupières ets’agrippeàsaguitare.Moi,jeretiensmonsouffle.—Ice,dansquellevilleétaitbaséecegang?s’enquiert-elle.J’expiredoucement,soulagé.—Pastrèsloindelacapitale.Je nemens pas vraiment,Marseille, à vol d’oiseau, n’est pas si éloignée de

Paris. Si je lui avais répondu que je ne pouvais pas lui indiquer la ville, elleaurait probablement exigédevoirmondos.Et, si elle avait évoquéMarseille,j’auraisdûluimentir,malgrémapromesse.Gabyouvrelesyeuxetsoupire,déçue.— J’ai grandi dans cemilieu, bébé, je ne connais que ça. Cela répond à la

questionquetuteposes,non?Elleparaîtréfléchir,puismurmure:—Oui.C’estdommage,Ice,jecroisquejecommençaisàt’apprécier.Jelaregarde,abasourdi.Jenepeuxpasdirequenousnousconnaissonsaprès

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cettejournéepasséeensemble,maisjepeuxaffirmerquelepeuquej’aientrevudesapersonnalité,meplaîtbeaucoupégalement.

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Ice

Jesorsdemacabanepoureffectuermonfootingquotidien,maismonregardesthappéparlasilhouettedemajoliebrune.Ellesetientsurlecôtédelagrandemaison, la tête légèrement penchée et semble détailler le mur, ce qui medéconcerte.J’avancepour la rejoindre,maséancedesport reléguéeausecondplan.Plus

j’approche, plus Gaby m’intrigue. Elle est vêtue d’un short moulant, d’unebrassièredesportetd’unepairedetennis.Satenuedévoiletantdeparcellesdesoncorpsauxcourbesdélicieusesquemonservice troispiècesse réveille.Sescheveuxsontattachésenunequeuedechevalhauteetsebalancentdoucementdanssondostandisqu’ellerecule,sansjamaistournerledosàcettefaçade.Ellesembleévaluerjenesaisquoi,puissemetàcourirverslemur.Qu’est-cequ’ellefout,encore?!

Jerestebouchebéealorsquejelavoissautersurlereborddelafenêtre.Sesdoigts s’agrippent aux aspérités des pierres au-dessus d’elle et je la regardegrimpercommeunearaignéejusqu’àlasecondeouverture,puisatteindreletoit.Jen’aipasletempsdeluicrierquoiquecesoitqu’elles’élancesurcedernier.Jecourslelongdelabâtissesanslaquitterdesyeuxetstoppenet,lesouffle

coupéetlabouchegrandeouverteenuncrid’effroiquinesortpas,lorsqu’ellesautedanslevide.Elleserattrapeàlabranchequisurplombelastèledesamèreet,danslemême

élan,franchitlapalissadedebois.—NomdeDieu!grondé-je.Jemedirigeaupasdecourseverslaclôturededeuxmètresdehaut,maispour

un gaillard d’un mètre quatre-vingt-onze comme moi, l’escalader est un jeud’enfant.Je suis surpris de la trouver non loin de là, en train d’étudier le bout d’une

feuilledepalmier.—Ça t’arrive souvent de jouer les virtuoses de l’évasion ? Tu aurais pu te

tuer!—Salut,Ice,répond-elle,sansmêmemejeteruncoupd’œil.Qu’est-cequ’elleacettefeuille,pourlacaptiverainsi?

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—Qu’est-cequetufais?—J’observelavie.Hein ? Je la scrute comme si une case de son cerveau s’était fait la malle

durantlanuit.Gabypivotesatêteversmoietéclatederireenvoyantcellequejefais.—Regarde,m’intime-t-elle,mecédantsaplace.Jem’approcheetsuisstupéfaitdedécouvrirunnid,accrochéàl’extrémitéde

lafeuille,*quiabriteunoisillonpasplusgrosqu’undéàcoudre.—C’estuncolibri,m’informe-t-elle.Jemeredresseetladarde,incrédule.—C’estpourcetrucquetuasmistavieendangerensautantdutoit?—Jen’aiprisaucunrisqueinconsidéré,Ice.Jesuisfreerunner.—Qu’est-cequec’est?—Jepratiqueleparkour.Jelascrutesanscomprendre.Ellem’expliqueenquoiconsistecettediscipline

etmonregardseglace.—C’estextrêmementdangereux.Ellem’adresseunsourirenarquois,indifférenteàmespropos.—Tuesuntrouillard,lâche-t-elle,avantdesemettreàcourir.Jeme lance à sa poursuite, pensant la rattraper en trois enjambées, mais la

belleenasouslepied.Ellejouelessingesaveclesbranchesàsaportée,cequimeralentit légèrement. Elle saute comme un cabri par-dessus des racines, destroncs,etcourtaussivitequ’unegazelle.*cf:https://www.youtube.com/watch?v=mXVaM-W6ssE.Nousparvenonsdevantl’entréedelaplantationenmêmetemps,cequisemble

lasurprendre.—Jecourstouslesmatins,bébé.Elle me reluque de la tête aux pieds et lâche un soupir à la limite du

gémissement.Iln’enfautpasplusàmatroisièmejambepoursetendre.Miguel, le nezviolet et enflé,metun termeà la tension sexuellequi circule

entreGabyetmoi.—Commentêtes-voussortis?s’enquiert-il,d’untonhargneux.—Noussommespasséstandisquetupiquaisunroupillon.Tuasdelaveine

quetonpatronnesoitpaslà,jerépondsd’untonacerbe.

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Nouspoursuivonsnotrecheminsansattendre.—Àtaplace,jeluiauraisditdesemêlerdesesfesses,m’informe-t-elle.Celanemesurprendpas,mabellebrunesembleêtreuneadepteduconflit.—Pourresterenviedanscemilieu,ilfautchoisirsesbatailles,bébé.Elle cesse de marcher alors que les cueilleurs, qui arrivent pour travailler,

murmurentlesurnomqueJuanetseshommesm’ontattribué.Ilsseplaquentdosauxplantsdecaféetbaissentlesyeux.Gabylesobservetouràtour,incrédule.—Qu’est-ce que vous attendez, ce n’est pas lemessie à ce que je sache ?!

Allez,auboulot!leurcrieLuis,toutenattrapantviolemmentlafemmelaplusprochedeluietlapoussantverslasecondeallée.Gaby regarde les personnes, hommes comme femmes, détaler comme des

lapinsapeurés.J’aiàpeineletempsdelavoirserrerlespoingsqu’ellesedirigeversLuisd’unpasrageur,seplantedevantluietlefoudroieduregard.— Touche encore une personne de cette façon et je démolis ta face de rat,

crache-t-elle.Luis la scrute d’un air méprisant et s’apprête à répliquer vertement, mais

j’interviens:— Je te conseille vivement de bien réfléchir avant d’ouvrir la bouche,mon

gars.Ilnem’écoutepasets’adresseàmajoliebrune:—Peuh,tucroisquetumefaispeur?Tuteprendspourqui?Jelechopesouslamâchoire,lesoulèveetplongemesprunellesglacialesdans

lessiennes.—Gabyestlafilledetonpatron,tuluidoislerespect.Tuvasdoncgentiment

luiprésentertesexcuses,sinonjetecollemonpoingdanslagueuleetonverraensuitequisecomporteracommeunegonzesse.Lemômemetienttêtedeuxsecondesavantdecapituler.Jelelibère.— Désolé, lâche-t-il du bout des lèvres sans même la regarder, avant de

déguerpir.Gabyl’observes’éloigner,soupire,puisnousnousremettonstranquillementen

routeverslamaison.—Commentfais-tupourleurclouerlebec?s’enquiert-elle.—Deuxjoursaprèsmonarrivéesurlapropriété,Manuelm’adéfiéencombat

àmainsnues.Ilétaitsisûrdeluiqu’ilaconviétoutlemondeauspectacle,lescueilleurs et les enfants compris. Je lui ai foutu la raclée de sa vie, je ne

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t’expliquepasdansquelétatétaitsonegoensuite.Ellemesortletrucleplusimprobablequisoit:—Donc, si jecomprendsbien, jedoismettreunedérouilléeàcesgarspour

qu’ilscessentdemalmenercespauvresgens.—Çanechangerarien.Cesontdesgossesquiseprennentpourdeshommes,

maistoutcommeManuelettonpère,ilsnerespectentpaslesfemmes.—C’estdéplorable.—Jesais,bébé.Ellepivoteetplantesesprunelles turquoisedans lesmiennes,alorsquenous

venonsd’arriverdevantleperrondesamaison.— Il y a toujours des gangs en France, non ?Alors, pourquoi laColombie,

Ice?Ah!Laquestionàlaquellejem’attendsdepuishiersoir.—Pourquoipas?réponds-jeenhaussantlesépaules.Ellesoupire,dépitée.Unpointmeturlupine.—Gaby,aimes-tutonpère?Elleouvrelabouche,puislareferme,cequimesurprend.Jem’attendaisàune

réponse affirmative et spontanée, mais certainement pas à ce qu’elle ait l’airperplexeetencoremoinsaumotquifranchitseslèvres.—Joker,lâche-t-elleavantdes’engouffrerdanslamaison.Qu’est-ce que cela signifie ? Est-elle si en colère qu’elle doute de ses

sentimentspourlui,ouledéteste-t-elletellementquelepointdenon-retouraétéatteintdepuisqu’elleestenfant?Je rentrechezmoien traînant lespieds, sansavoir trouvéde réponseàcette

question.

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Gaby

Il est quinze heures quand Ice m’accompagne sur la plantation. Malgré lachaleur suffocante de ce début du mois d’octobre, les employés sont tous autravail.Chacunestaffubléd’unpanieraccrochéàlatailleetydéposelescerisesdecaféquisontensuitereverséesdansdessacs.La récolte se fait à lamain, ce qui permet de ne pas abîmer les plants. Un

cueilleurmetenvirondeuxheurespourremplirunsacdequarantekilosquiestensuitemenédanslebâtimentauboutdel’exploitation,puispesé.Les cerises sont baignées dans des bassins d’eau pour trier le café dense,

réservéàl’exportation,ducafélégerquiremonteàlasurface,quilui,estdestinéàlaconsommationcolombienne.Lesgrainssontpassésdansunemachinepouréliminer lesmorceauxdepulpequi ne se sont pas dégradés lors dubain, puissont plongés dans des bacs à eau entre six et quarante-huit heures pourfermenter.Lesgrainssontabondammentlavés,puismisàsécherausoleildurantunedizainedejours.La phase de torréfaction ne se fait pas sur place,mais directement dans les

pays importateurs. Chaque producteur de café doit obligatoirement vendre saproductionàlaFédérationNationaleduCaféquifixeleprixd›achatettraitelenégoceàl›international.Lecueilleur,lui,estpayéenvironsoixante-dixcentimesd’eurosdukilorécolté,

unsalairedemisère.J’enaibienconscience.Ice m’observe échanger d’une voix douce avec une femme dans la petite

trentaine,maisnemecollepasauxbasques.—Bonjour,jesuisGaby.Commentvousappelez-vous?Sanscessersontravail,lafemmejetteuncoupd’œilautourd’elle,terrifiée,ce

quinemesurprendqu’àmoitié.—Vousn’avezabsolumentrienàcraindre.—Paula,répond-elleduboutdeslèvres.—Quelâgeavez-vous?—Vingt-septans,mademoiselle.—Vouspouvezm’appelerparmonprénom,Paula,d’accord?

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Ellehochebrièvementlatête.—Çafaitlongtempsquevoustravaillezsurlaplantation?—Depuisdix-septans.Jelaregarde,interloquée.Certainsenfantsnevontdoncpasàl’écoledansce

pays?—Avez-vousassezàmanger?—Oui,mademoiselle.Jesoupire.Lesgens,ici,secontententdecequ’onleurdonne,jamaisilsnese

plaindront. Et puis, ils ne me connaissent pas, alors pourquoi me feraient-ilsconfiance?Je lui presse doucement le bras, lui promets que les choses vont changer et

passe à la personne suivante. Les hommes demon pèrem’observent d’un aircurieux.JelesvoisinterrogerIceduregard,maiscelui-cileuradresseunsignededénégationdelatête.Cethommem’intriguedeplusenplus.Ilestici,certes,maisiln’estpasaussipourricommejel’aid’abordpensé.Pourquoitravaille-t-ilpourmonpèredanscecas?Après m’être présentée à tous les cueilleurs, je constate, par leur réaction

identique,quetoussontapeurés.Quesepasse-t-ildoncici?Jedéambulelelongdesalléeseninterprétanttoutessortesdetitres.Jechante

tantôt en français, enanglaisouenespagnol,m’accompagnant toujoursdemaguitare.Celasurprendtoutlemondeetjemedemandedepuiscombiendetempscesgensn’ontpasentendudemusique.Lessbiresnemedemandentpasdemetaire,cequimesurprendquelquepeu.Ice me raccompagne jusque devant le perron. Je crois qu’il est tout aussi

soulagé que moi que l’après-midi touche à sa fin et pressé de pouvoir serafraîchir. Je nem’adapterai jamais à cette chaleur humide qui règne dans cepays.

*****

Icedoitàpeinesortirdeladouchelorsquejefrappeàsaporte.Uneservietteminimalisteceintseshanchesetdesgouttelettesruissellentsursoncorpsparfaitetmusclé,memettantl’eauàlabouche.Miam!Jeclignedesyeuxcommeunechouette,laboucheentrouverte.—Ice,je…C’est…Ilestaussidéstabiliséquemoialorsquesonregardglissesurmaminijupeet

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mestalonscompensésquiallongentmesjambes.—Tupeux…murmuré-je.—Tebaisercontrelaporte,souffle-t-il.Lesimagesdecequ’ilvientdedéclarerenvahissentmonesprit.Jeserremes

cuisses l’unecontre l’autreetexhaleungémissementmalgrémoi. Jeclosmespaupières,luttecontreledésirquimesubmergeetparviensàmeressaisir.—Peux-tutecouvrir?Ilaprobablementdesidéespluslubriqueslesunesquelesautrespleinlatête,

carilmerépond:—Jevaismettreunecapote,viens.Ilsourit,alorsquejefaisunpasverslui,etsortdesatranselorsquejefrappe

brusquementsontorsedemonpoing.—Jesouhaitefaireletourdesbaraquesetquetum’indiquesquiyvit,tune

comptespasm’accompagnerdanscettetenue,si?—Ah...Jevaismevêtir,alors,soupire-t-il,dépité.—Jet’attendsici.Ilrepousselaportepuis,moinsdecinqminutesplustard,merejoint.Ilapassé

unt-shirtsansmanchesquimouleparfaitementsontorseetunpantalonquinemasqueriendelapuissancedesescuisses.Jenesaiscequiestpire:levoiràmoitié à poil ou m’imaginer lui retirer ses vêtements. Le désir s’insuffle denouveauenmoicommeunetraînéedepoudre.Cen’estpasnormal,cetteattirance.

Nous nousmettons en route et, au fur et àmesure de notre progression, Icem’expliqueque l’instituteur, lemédecinet lui, sont les seulsànepaspartagerleur logis.Lescueilleursviventàquatredansunebaraque,hormis lescouplesquiontdesenfants,tandisqueleshommesdemonpèresontdeuxparmaison.Manuelenoccupeuneavecsasœur,toutcommeAlberto.—Combienya-t-ildefamilles?—Unedizaine,jecrois.Etunequinzainedemômes.Jem’enquiersauprèsdemoncompagnons’ilsaitcequ’ilenest.Ices’arrêteet

mescrute,perplexe.Sonsilencem’enapprendplusquedesmotsetunecolèresourde enfle enmoi, aumoment où un coup de tonnerre retentit. Il semet àtomberdestrombesd’eau,cequiestcourantencettesaisonpluviale,maisjenebougepas,monregardrivéàceluideIce.—Jen’étaispasprésent,bébé,maisAlbertom’enaparlélesoirdetonarrivée.

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Tiensdonc.

—Quet’a-t-ilraconté?Icehésite,puissoupire.—Tufinirasprobablementparl’apprendredetoutefaçon,mais…Il jette un regard circulaire autour de nous, mes yeux en font de même et

accrochentdeuxgarsdanslavingtainequicourentdansnotredirection.—Pasici,viens,murmure-t-il.Lesdeuxtypeslesaluentd’unsignedetête,puisnousdépassent.—Quisont-ils?demandé-je,alorsquenousnousdirigeonsverssamaison.—Lepetit,c’estManolo,l’autresenommeEsteban.Je les ai aperçus sur la plantation un peu plus tôt, ils sont également armés,

mais c’est encore deux des gamins qui figurent sur la liste des survivants deGrincheux. J’imaginequ’AlfonsoetEdouardo,qui travaillaientpour luiquandj’étaisgamine,nesontplusdecemondepuisquejenelesaipasvus.Icemeconduità lasalledebainsetmefournituneserviettede toilettepour

quejemesèche.J’essoremescheveuxdanslelavaboetlesfrictionnequandilréapparaîtavecunt-shirtsecàlamain.—Tiens, change-toi. Je te prêterais bien un pantalon,mais je n’ai rien à ta

taille.—Merci,Ice.—Jevaispréparerducafé,tuenveux?Je grimace à l’idée de boire à nouveau ce jus de chaussette. Les meilleurs

grainsétant réservéà l’exportation, lesColombiensboiventducaféde secondchoixquiestdégueulasse,cequiesttoutdemêmeuncomblepourletroisièmepaysexportateur.Icemesourit,sortdelasalled’eauetrevientavecunpaquetdeCarteNoire,

probablementrapportédeFrance.—C’estmieuxquecettemerdeimbuvablequel’ontrouveici,non?J’opine,souriantjusqu’auxoreilles.—Doubletasse,s’ilteplaît.Dèsqu’il tourne les talons, je ferme laporte. Jene suispaspudique, surtout

aprèscequej’aidéjàfaitaveclui,maisjeneveuxpasqu’ilremarquelaceinturedepoignardsquejedissimulesousl’élastiquedemajupe.Jelesairécupérésdanslestoilettesdel’écoledeCaruru,commeconvenuavec

Pablo, un ami colombien de Grincheux, lors de mon escapade à Bogota.

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Grincheux savait que je devrais passer l’examen du scanner à l’entrée de lapropriété.Je souris en me remémorant la tête du gars quand je lui ai demandé où je

pouvais trouver une fille de joie. Complaisant, il a ordonné au type quil’accompagnait d’aller m’en chercher une et me l’a ramenée. Il me fallait unalibisolide.Parcontre,j’aiétéplusqu’étonnéedevoirRafael,l’hommequiaccompagnait

Pablo,vêtud’unetenuemilitaire.SiIcesavait…Let-shirtquecedernierm’agentimentprêtédescendjusqu’àmi-cuissesetest

assezlargeetépais,ilnedévoileriendecequejecache.IlmesuffitdeprendregardeàlaposturedemoncorpspourqueIceneremarquerien.Jeramassemesvêtementstrempésetrejoinslacuisine.Je prends place à table et remercie mon hôte lorsqu’il me sert une tasse

fumante et odorante. J’inspecte distraitement les lieux le temps que Ice sechange. J’ai toujoursaimé l’intérieurdecespetitesmaisons.Tous lesmeublessont en bois, un frigo, une plaque de cuisson.Desmoustiquaires sont clouéesauxouverturesquiserventdefenêtres.Ilfaittropchaud,dejourcommedenuit,pourinstallerdesvitresquineserviraientàrien.Icerevient,vêtud’unpantalondetoileetd’unt-shirt,maispiedsnus.Même

sespiedssontsexy,bordel.Ils’attableenfacedemoietjeluidemandedemerépétercequ’Albertoluia

appris.Jereste imperturbable, jesaisdéjàcequ’ilenest,mais j’espéraispeut-êtrequelesinformationsdeGrincheuxétaienterronées.—Gaby,çava?—Oui,pourquoiçan’iraitpas?—Tunedisrien.J’arqueunsourcil.—Queveux-tuquejedise?Icesemblecomplètementdéroutéetsepasseunemainsur levisage,comme

pouryvoirplusclair.—Jenesaispas.Tuessiimpassibleque…Dansl’avion,tusemblaistellement

encolèrecontretonpère,n’approuvantpassesactivités,maislà,tun’asaucuneréaction.Jenecomprendspas.C’estlebut,mongars.

— Je n’approuve pas, mais que puis-je y faire ? Cela s’est passé il y a

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tellementlongtemps,detoutefaçon.Icemedardeunlongmoment,puissoupire.Laconversationdéviesurtoutet

n’importequoi.— J’ai vu que tu ne possédais pas de lave-linge, tu es le seul à ne pas en

disposerd’un?—Non,toutlemondeestlogéàlamêmeenseigne.Enfin,sionveut.Maria,la

sœurd’Alberto,laveceluidePacoetPedro,vuquecesonteuxquiontplusoumoinsélevéscesgarçons.Sinon,c’estCarmenquiestresponsabledulingedeshommes,ycomprisceluidetonpère,maisjerefusedeluiconfierlemien,alorsjem’acquittemoi-mêmedecettetâche.—Pourquoi?— Cette femme est apeurée par tout ce qui l’entoure, imagine un peu sa

réactionquandj’aidébarqué.Alors,jepréfèrenepasl’effrayerinutilement.J’enrestebouchebée.Iceaurait-ilunfaiblepourelle?—Elleteplaît,c’estpourçaquetunesouhaitespasluifairepeur?Iléclatederire.—Pasdu tout,bébé.Carmenmefaitpenseràunesouris,unepetite fille.Je

suisfrustrésexuellement,maispasdésespéréàcepoint.Je suis loin d’être d’accord avec lui et pense que Carmen est tout sauf une

gamine.—Qu’est-cequil’effraieautant,d’aprèstoi?Ilhausselesépaules.—Jenesaispas.Ellen’adresselaparoleàpersonne,mêmepasàsonpropre

frère.Ellelecrainttoutautantqu’elletrembledevanttonpère,enfin,d’aprèslepeuquej’aivu.Commeparhasard.Jesuiscertainequ’ellesaitbeaucoupdechoses.Vafalloir

que je réussisseàgagner saconfianceetque jepuissem’isoleravecellepourdiscuter,maissij’aitoujoursunsbirecolléàmesfesses,celaneserapaschoseaisée.Jeterminemaboissonetmelèvepourprendrecongé.—Mercipourlecafé.—Àquelleheureprévois-tudet’évader,demain,bébé?Jefranchisleseuil,meretourneetluisouris.—Tuastoutelanuitpourledeviner,Ice.Je lui adresse un petit geste de la main et m’en vais. J’ai besoin de me

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retrouverseuleetderéfléchir.Existe-t-ilseulementdespreuvesdecequ’Albertoa révélé à Ice ? J’en doute, même si cela confirme ce que Grincheux et moipensions. J’ai hâte que mon paternel revienne pour que la partie puissesérieusementsejouer.

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Çafaitmaintenantunmoisquemonpèreestabsent,àcroirequejeluiaifaitpeur,maisIcemetientcompagnie,cequim’évitedetropcogiter.Ons’échappedelapropriététouslesjoursaupetitmatin.Oncourtenvironune

heurelelongdelapalissade,puisnousrevenonsenescaladantcettedernière,cequiévitedesejustifierauprèsdesgars.Nonpasquel’envied’endécoudremerebute,maisjechoisismescombats.Aprèsnotreescapade,jemerendstoujourssurlatombedemamèreavantde

rentrer. Icemerejointensuitesur laplantationoù jeprends le tempsdesaluerchacundesemployéspar leurprénom.Oui, je lesai tousmémorisésenmoinsd’unesemaine,sansmêmechercheràlefaire.Nous déjeunons ensemble et faisons plus ample connaissance. J’apprécie de

plusenplussacompagnieetjepensequec’estréciproque.Jenesaispassic’estunebonnechoseounonetjepréfèrenepasm’attardersurlaquestion.Je joue tous les après-midi et les cueilleurs commencent à s’habituer à ma

présence.J’essaied’égayerunpeuleurquotidien.Toutsemblepour lemieux,saufque la tensionsexuelles’épaissitdeplusen

plusentreIceetmoi,celaendevientinsoutenable.Monbas-ventresouffred’unesortedetendiniteaiguëtantmesmusclessecrispentdedésirensaprésenceetmesdoigtsneparviennentplusàmesoulager.Jenepeuxpasévitercethommeet jecroisquejen’enaipasenvie,alors ilnemerestequ’unesolution.Aprèstout,qu’ya-t-ildemalàsefairedubien?Jesorsdeladoucheetmesècherapidement.Jeneperdspasdetempsàenfiler

des sous-vêtements qui ne serviront pas à grand-chose et passe une robe. Jequitte lamaison et fonce chez Ice, lesmusclesdemonentrejambe se crispantd’anticipation.J’arrivedevantchez lui, lesoufflecourtet l’entrecuissehumide. Je frappeet

attendscequimeparaîtuneéternité.Lorsqu’ilouvreenfin,jem’embrasedelapointedemesorteilsàlaracinedemescheveux.Son torse aux abdos si bien dessinés, ses tatouages, les gouttes d’eau qui

parsèment son corps, la serviette qui lui ceint les hanches, la puissancede sescuisses,toutmerenddingue.

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—Bébé,cessedemeregardercommesituallaismebouffer,oualorsfais-le,gronde-t-il.Sa voix rauque résonne dans toutmon corps et son regard ardentm’achève

totalement.J’entre,Icerefermelaporteets’adosseàcelle-cisansmequitterdesyeux.Jedéfaislesboutonsdemarobeetlaisseglisserlevêtementausol.Sonregard

passedelasurpriseàundésirbrut,bestial.—Jen’yarriveplus,chuchoté-je.Il dénoue la serviette, la laisse choir à ses pieds etme dévoile son érection

magistrale. Jememords la lèvre,mais n’ai pas le temps de faire un pas qu’ilm’attrape par le bras,me plaque brusquement face contre la porte et se collecontremondos.—Trentejoursquejenepensequ’àça,bébé,susurre-t-ilàmonoreille.Unedesesmainsagrippentmescheveux,décollematempegauchedelaporte

et tire brusquement sur l’arrière demon crânepour redressermonvisage.Seslèvress’abattentsurlesmiennesetsalangues’enrouleautourdelamienneenunballetsensuel,érotique.Jesavourel’intensitédesonbaiser,ladouceurdesabouche,lachaleurdeson

corps plaqué contre le mien. Je gémis, appréciant l’audace de sa main quicaresse la rondeur de mon épaule, parcourt mon flanc, se promène sur monventre, puis s’empare d’un de mes globes généreux. Ses lèvres libèrent lesmiennesetsamainquittemescheveuxpourvenircaressermonsecondsein.Ice,pince légèrementmesmamelons, les étire, les fait doucement rouler entre sesdoigts,puissesdentsmordentlecreuxdemoncou.Monclitorissemetàpulsercommeuncœuraffolé,jemouillecommeunefontaineetmondésirsedécuplejusqu’àatteindredessommetsinexplorés.—Baise-moi!m’écrié-je.Unedesesmainslibèremonseinetjel’entendsfouillerletiroirdumeubleà

côtédelaporte,tandisquel’autres’aventurelentementlelongdemonventreetseposesurmonsexe.—Tuessidouceettrempée,bébé…Çameplaît,susurre-t-il,avantdeglisser

uncarréargentéentremeslèvres.J’ouvrelesachetavecmesdents,commeunelionnearracheraitunmorceaude

viande saignant d’une proie. Je manque le laisser tomber en criant de plaisirquandIcemepénètrebrusquementd’undoigt.Jemecambre, renversema têtecontresonépaule etgémis, alorsqu’il imprimeun légermouvementdeva-et-

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vientàsonmajeuretcaressemonclitorisdesamaingauche.La délivrance est proche et je grogne de frustration alors que ses doigts

magiques cessent de s’activer et quittent subitement mon corps. Je vois Iceportersonmajeuràseslèvresetlelécheravecdélectation.Loindemerépugner,celam’excitedavantage.Ils’emparedupréservatifquejetiensdansmamainetjetentedemeretourner

pourleregarders’équiper,maisilm’enempêche,plaquantunemaincontremondos.—Posetesmainsàplatsurlaporte,m’intime-t-il.J’obéis tandisqu’il revêt lepréservatif,puis ilpasseunbras surmonventre,

nousfaitreculeretpressesurmondospourmepencherenavant.—Jevaistebaiseràfond,bébé.Et,jeteprendraiautantdefoisquej’enaurai

envie,murmure-t-il.Jehochelatête,telunchiensurlaplagearrièred’unevoiture,tantjeledésire.Il écarte brusquement mes jambes à l’aide d’un de ses pieds et caressent

doucementmesfesses.—Tuasunculmagnifique.Je frémis tandis qu’une de sesmains se pose sur le creux demon genou et

remontelentementsurl’arrièredemacuisse.—Ice,s’ilteplaît,geins-je.Jeglapisquandsesdentsmordentlégèrementchacunedemesfessesetdevient

follealorsquesa langue remontedoucement le longdemacolonnevertébralejusqu’àmanuque.Ilpositionnesavergeàl’entréedemonsexe,ancreprofondémentsesdoigtsà

meshanchesetmepénètred’uneviolentepousséetoutenparsemantmondosdebaisers.—Ohoui,gémis-je.Je creusemes reins aumaximum lorsqu’il se retire, puis il replonge enmoi

avecvigueur.—J’aimet’entendrecouiner,bébé,çam’exciteencoreplus.Jerâledeplaisiràchacunedesespercées longuesetprofondes,senschaque

millimètredesoncorpsmeposséderentièrement.—Tumerendsfou,lâche-t-ilavantd’agripperplusfermementmeshanches.Ilsemetàévoluerenmoiavec tantdeforcequelefeuquicouvedansmon

ventre,sepropagecommeunéclairfoudroyant,décuplantmonplaisir.

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—Ohoui,Ice,oui!Nossoufflessefontcourtsetsemêlentjusqu’àn’enformerplusqu’un.Mon

cœurcognecommes’il s’apprêtait à sortirdemapoitrine, lesmusclesdemescuissesmebrûlent,mesparoiss’écartentautourdesonmembregonfléàchaquepénétrationetl’enserrentensuitedeplusenplusfort.—Putain,bébé,jeveuxtebaisertouslesjours!s’écrie-t-il.Icememartèleavecplusdeforceetderapidité,s’appliquantàfairemonterce

plaisirtoujoursplushautetl’orgasmenousfauche,aveclaviolencedévastatriced’untsunami.J’ouvrelesyeux.Iceestàmoitiévautrésurmoi.Jenesaisquelleheureilpeut

être,maisl’auroreselèveparl’ouvertureàmadroite.J’essaiedebougerunpeu,maisj’aimalpartout.Aprèsm’avoirprisecontrelaported’entrée,nousavonsremislecouvertsous

ladouche,puisavonstestélasoliditédelatabledelacuisine,pourfinirsurlecanapé.Jesuiscrevée,alanguie,maisbienheureuse.Cemecestunebêteaupieu,quoiquenousn’ayonspasencoremislespiedsdanssachambre.Mêmesimondésir semble assouvi, il suffit que je le regardepourquemon

appétencesexuelleseréveilleànouveau.C’esttoutàfaitcompréhensibleencequiconcerneIce,vuqu’ilnebaisepasautantqu’illesouhaiterait.Ilacomprisqu’il était le seul responsablede cette situation,mais il n’apas tiré sa crampequedeuxfoisdanssavienonplus. Il saitqu’ildoit se remettreenquestionetcesserdesevoircommelemonstrequ’iln’estpaspourchangertoutça.Jen’aipasdeproblèmecommeIceetnecomprendspascequ’ilm’arrive.Ai-

je viré nymphomane ?Le pire, c’est quema libido ne se réveille qu’avec lui.Bon,j’avouequ’iln’yapasgrand-choseàsemettresousladentnonplusdanslecoin.Etpuis,ilfautêtrehonnête,Iceestnonseulementbienmembré,maisaégalement un corps d’apollon. Je suis donc tout ce qu’il y a de plus normale,non?Jesursauteetsorsdemespenséestandisquedescoupssontfrappésàlaporte.

Icebougonnecontremoncou.—Nebougepas,bébé,jevaischasserl’intrus,murmure-t-ilàmonoreille.Il enjambemoncorps, déposeun rapidebaiser surmes lèvres et se retourne

pourrejoindrelacuisine.Mes yeux remontent lentement sur l’arrière de ses cuisses. Jemedélecte du

spectacledesesfessesnues,fermesetrebondies,puisj’aiunhoquetdestupeuretmeredressebrusquementlorsquejeprendsconsciencedecequejevois.

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Icesetientsurleseuil,maisjenevoisquelapartiegauchedel’arrièredesoncorpsdepuislecanapé,lacloisonmemasquantlereste.Jesaisquelevisiteurnepeutpasremarquermaprésences’iln’entrepas.J’avanceprudemmentdedeuxpas,leregardrivésurunmorceaudecetatouagequejepensaisneplusjamaisrevoir.Jeconnaiscedessinparcœur,jen’aivuqueçasurcemecquiavaitpourhabitudedebossertorsenudanscegaragemarseillais,cariln’ajamaisdaignémefaireface.Sontatouageestmagnifiqueetluicouvretoutledos.Jem’approchedèsqueIcecommenceàrefermerlaporte.Je tremblecomme

unefeuilledespiedsàlatêtetandisquejetendslentementlamainverssondos,avantqu’ilseretourne.Je suis submergée par tant d’émotions diverses que j’ai l’impression de

suffoquer.—Démon,soufflé-je..

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Ice

Jemefigecommeunestatue.J’ai toutmisenœuvre, lorsdenosébats,pourqu’elle ne puisse jamais distinguer mon dos et il a suffi d’une seconded’inattentiondemapart,quelcon!Je sens le bout de ses doigts m’effleurer, puis un courant d’air froid les

remplace. Je soupire et pivote lentement.Ma jolie bruneme tourne le dos etremetprécipitammentsarobe.—Bébé…—Non,pasmaintenant.Sa voix tremble, ce qui me déconcerte. Je ne sais pas quoi faire et encore

moinsquoidire.J’avanced’unpas,puismedégonfle.Ellevapéteruncâble,mehurlerdessusetpeut-êtremêmemefrapper,cequi

seraittoutàfaitlégitime,maisGabynefaitjamaisceàquoijem’attends.Ellepivotesurelle-même,focalisesonregardsurlemontantdelaporteetse

dirigedroitverscelle-ci.Je la suis des yeux comme un abruti, sous le choc. L’incrédulité,

l’incompréhension, la colère, toutes ces émotions transparaissent dans sonregard,maisplusquetout,elleestbouleversée.Mon cœur cesse de battre lorsqu’une larme silencieuse roule sur sa joue.

Merde,pasça,putain!Jemesensmalpourlapremièrefoisdemonexistence.Pourquoiçametouche

autantdelavoircommeça?Parcequej’ensuisresponsable?Jen’ensaisfoutrerien,maisj’ail’impressiond’avoirunelameplantéedanslebide.Elleouvrelaporteets’apprêteàsortirquandj’ouvreenfinlabouche.—Gaby,écoute-moi.—Pasmaintenant,chuchote-t-elle.Quand?Jecrainssaréponsesijeposelaquestion,alorsj’insiste.—Jet’enprie,bébé.—Peuxpas,souffle-t-elle,avantdes’enfuirencourant.Je la regardes’éloigner tandisquemoncœur se serredeplusenplus,prêtà

imploser.J’aisoudainenviedehurler,decogner.Cetteputaindechiennedevie

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esttellementinjusteavecmoi!Jeclaqueviolemment laporte,assèneunpremiercoupdepoingsurcelle-ci,

puisunsecondsuitdepeu,maiscen’estpassuffisant.Jemeretourne,saisisunechaiseetlafracassecontrelacloison.Desdébrisvolentàtraverslapièce,maisjem’enfousroyalement.—Faitchier,merde!jehurle.Je rejoins la salle debains, entre dans la douche et ouvre le jet d’eau froide

pourmecalmer.L’odeurdeGabyestpartoutautourdemoi,imprégnéesurmapeauetmemonteà la tête.Jesaisquecen’estquesexuelentrenous,mais jerefusequecelaseterminemaintenantetencoremoinsdecettefaçon.J’aime bien cette nana, elle a tout pour plaire. Non seulement la baise est

extraordinaire,maisGaby est sexy, douce, à l’écoute, compréhensive, franche,droite dans ses pompes. Je crève de trouille à la simple pensée qu’elle merepousse,neveuilleplusmeparler.Pour la toutepremière foisdemavie, jedésireavoirquelqu’uncommeelle.

Une personne avec qui je peux discuter, rire, râler, ou simplement qu’ellemetiennecompagnie.Gabym’acceptecommejesuis,mêmesiellemereprochedetravaillerpoursonpaternel.Etlà,j’aipeurd’avoirtoutperdu.JenepeuxpasaccompagnerAlbertopourqu’ilmebriefesurmesprochaines

fonctionssansm’êtreentretenuavecelleauparavant,maism’écoutera-t-elle?Jesors,mesècheetm’habillerapidement.Jesaisismesflingues,jetteunœilàmamontreetrejoinslagrandebâtisseaupasdecourse.Pacoestdéjàlà,pourveillersurmajoliebrune,jelesaluebrièvement.—OùestGaby?—Àl’étage.Ellen’avaitpasl’aird’allerbien.Ouais,jesais.

—Jemontevoircequ’ilenest.Ilacquiesceetjesuissoulagéqu’ilnesemettepasentraversdemonchemin.

JemontelesmarchesquatreàquatreetmedirigeverslachambredeGaby.Jecollemonoreillecontrelaporte,maisjen’entendsrien.Jetoquedoucement.—Bébé,c’estmoi.Ilfautquejeteparle.Pasderéponse.J’attends,frappeetréitèremesparoles.Toujoursrien.Jepose

mon front contre laporte, soupire,puis entends commeunbruissement contrecelle-ci.Jesaisqu’elleestlà,çapeutparaîtrestupide,maisjesenssaprésence.—Gaby,jet’enprie.

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Rien. Apparemment, ma jolie brune a décidé de rester muette comme unecarpe.—Bébé,jedoisaccompagnerAlberto,ilm’attend.Jenesaispascombiende

tempsjeseraiabsent,maisdèsmonretour,jeprometsdem’expliquer.Que dalle. C’est frustrant, bordel ! Je la supplie encore trois fois avant de

capituleretderedescendre.Jemesensencoreplusmalqu’ilyavingtminutes.—Ellevamieux?s’enquiertPaco.—Non.Veillebienàcequ’ilne luiarriverien,sinontuaurasaffaireàmoi,

dis-jed’untonplussecquejenel’auraisvoulu.Cegamin n’est pour rien dans lemal-être quime consume, je le sais,mais

devoirlaissermajoliebrune,blessée,parmafautedesurcroît,memetlesnerfsenpelote.Je sors à contrecœur de lamaison et pars retrouverAlberto.Aumoment de

pénétrerdanslebâtimentauboutdelaplantation,manuquesemetàmepicoteragréablement.Gabyestlà,j’ensuiscertain,maisquandjemeretourneetscrutelesalentours,jenelavoisnullepart.Est-cequejedeviensfou?Jesoupire,déçu,puissursautelorsqu’Albertom’interpelle.—Ah,tevoilà,enfin!J’aicroisélapetiteetellen’avaitpasl’aird’allerbien,

tusaiscequ’ellea?—Pourquoilesaurais-je?!réponds-je,d’untonincisif.Ilhausselessourcils,surpris.—Vuquevousêtestoujoursensemble,jepensais…—Jeveillesurelle,commesonpèremel’ademandé,lecoupé-jesèchement.—Oui,biensûr,maiscen’estpaslapeined’êtreaussiagressifavecmoi.C’est

quoitonproblème,àtoi?—Mauvaisréveil.Ilafalluquececonnardviennefoutreenl’airunmomentidylliqueenfrappant

àmaporteaupetitmatin.Ilfautbienuncoupable,non?—Combiendetempsserons-nousabsents?demandé-je.—Troisjours.Viens,onvarécupérerlamarchandise.J’accuselecoupsansrienlaisserparaître,maisjepensaispouvoirparleràma

joliebrunedèscesoir,ilpeutsepassertantdechosesd’icimonretour.JesuisAlberto,ayantuneimpressiontenaced’êtresuivi,épié.Jen’yprêtepas

plusd’attention,n’étantpasaumieuxdemaformementalecematin.Je le regarde déplacer un dépulpeurmécaniquequi n’est plus utilisé puisque

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l’endroit dispose d’une machine plus grosse et plus moderne. Il soulève unetrappe d’environ dix centimètres sur dix et un petit clavier apparaît. Albertocomposeuncodeàsixchiffres,puisunepartiedusol,formantuncarréparfaitd’unmètreenviron,s’affaisseetcoulissesurnotredroite.—Tutesouviendrasducode?—Oui.C’estunedate,non?—C’estcelledelanaissancedelapetite.Je me demande ce que Gaby en penserait. Nous descendons à l’aide de

l’échellemétalliquefixéeàlaparoi.Albertopresseuninterrupteuretlalumièreéclaireunepièceassezexiguë.Jepromènemonregardsurcequejevoisetsuisquelque peu surpris. Il s’agit bien d’un laboratoire clandestin, mais pas celuiauqueljem’attendais.—Elleestroseetnonblanche.Jefeinslasurprise,maissaistrèsbiendequoiils’agit.— Les plants de coca sont trop repérables depuis le ciel et sont

systématiquement détruits. Juan a toujours fabriqué de la drogue de synthèse,mais elle n’a jamais été aussi puissante que celle-ci. Il a fait ses études enEurope,tulesavais?Jeluiadresseunsignededénégationdelatête.—C’esttrèsrarepourunfilsdeproducteurdecafé,maisCarloss’estsaignéà

blanc pour offrir cette possibilité à son garçon, lui offrir une autre vie, enquelque sorte.Quand je vois ce que ce dernier en a fait, jeme demande si levieuxn’auraitpasdûs’abstenir.—Iln’yajamaiseudecontrôle?— Si, bien sûr. On a eu quatre ou cinq visites des autorités, mais Juan n’a

jamaisétésoupçonnédequoiquecesoit,doncpersonnen’ajamaisrientrouvé.La piste d’atterrissage qu’il a faite construire est légale, il a obtenu lesautorisations en prétextant qu’il était plus simple d’en avoir une à disposition,pour permettre le ravitaillement alimentaire, que de nous rendre àCaruru.Deplus, le patron paie grassement des militaires ainsi que des personnes desdouanesetpuis,nousne transportons jamaisplusdequatrekilos tous les troismois.C’est tout ? J’admets qu’un kilo de cocaïne de synthèse se vend jusqu’à

cinquantemilleeurosenEurope,elleestplusnociveetdemandéequelaformuletraditionnelle,maisletraindeviedeJuanetdeseshommesdépassentlargementce gain annuel. Alors, s’il n’est pas un si gros poisson, comment gagne-t-il

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autantdefric?Quelque chose cloche.Pourquoi seulement quatre kilos tous les troismois ?

Celasembletoutdemêmeprécisetréglécommedupapieràmusique,non?J’ail’impression que la cocaïne sert plus demonnaie qu’autre chose,mais contrequoi?Jen’ensaisfoutrerien,maisçam’intrigue,j’aimesavoiroùjemets lespieds.Unbruitdemoteurmesortdemespensées.Albertos’emparedespaquetsde

cocaïneetm’enfourredeuxdanslesmainstandisqu’ilinsèrelesautresdanslaceinturedesonpantalon,soussachemise.Jel’imiteet,avantdelesuivrehorsdubâtiment,cetteimpressiond’êtresurveillémegagnedenouveau.— Je deviens probablement dingue, mais je sens ta présence partout, bébé.

J’aimeraispouvoirm’expliqueravantmondépart,malheureusement,onnem’enlaissepasl’occasion.Jesuisdésoléquetuaiesdûl’apprendredecettefaçon,jenevoulaispasquecelasepasseainsi.Jemetais,maisseullesilencemerépond.—Faisattentionàtoipendantmonabsence,ajouté-jeavantdesortir.JerattrapeAlbertoetnousrejoignonsleDC3surlapiste,oùcinqdesgarsde

Juans’activentdéjàaudéchargementdesdenréesalimentaires.JesuispersuadéqueGabyétaitprésenteetqu’ellem’aentendu.Mêmesielle

saitmaintenantenpartiequijesuis,Démon,elleneconnaîtpasmonidentité,lesmembres du gang ne s’interpellaient que par leur surnom, par mesure desécurité.

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Ice

Jesoupiredesoulagement,alorsquenoussommesenfinderetour.Aucunproblèmen’estsurvenuàl’aéroportdeBogotaoùnousavonsreprisun

autrevolàdestinationdeCúcuta,villeà la frontièreduVenezuela.Làencore,hormis quelques signes discrets échangés avec du personnel grassementrémunéré,aucunsouci.Jesaisquel’argentdonnelepouvoir,maisc’esttoutdemêmeeffarantdeconstateràquelpoint.Nous avons remis notre chargement à un certain José qui, lui, se charge de

l’acheminerjusqu’enEuropeet,plusprécisément,auprèsd’uncertainVito.Cedernierestnonseulementunhautmembredelamafiaitalienne,maiségalementunamideJuandepuislesbancsdel’université.Pratique.Albertos’estmontré trèsprolixe,mais il fautbienqu’ilm’informede toutes

les ficelles du métier, non ? Seulement, concernant la zone ombragée quim’intrigue,pasunmot.Jemedemandes’ilmetaitleschosesparprudence,ous’ilignorecomplètementcequisepasse.Dansl’immédiat,toutcequimepréoccupeestderetrouverGabyetdepouvoir

m’expliquer. Je ne peux pas tout lui dire, car si elle aime son père, ce que jecrois,ellemehaïraprobablement.

****

Vingt-septputainsdejoursqueGabym’évite!Jedeviensfou.J’envoiechiertout lemonde, je rumine. Je laguette aupetitmatin, attendant commeunconqu’ellepointeleboutdesonnezpoursonescapadequotidienne,maislabelleachangésonhoraireets’échappeprobablementenfindejournéequandjeprendsmadouche.Ellemerépondparungrondementlorsquejelasalueetj’aienviedeluitordre

lecouchaquefoisqu’ellelefait,cequiestassezironique,non?A-t-elleressentilamêmechose,ilyahuitans,quandj’agissaisdelamêmefaçon?Elle rejoint la plantation sans m’adresser un regard ni répondre à mes

questions,alorsje luicoursaprèscommeuncaniche, la languependante.Ilnememanquequelepomponauboutdelaqueuepourêtreparfait.Touslescueilleursont,chaquejour,droitàunmotgentildesapart,unsourire,

maismoi,quedalle.Toutcelaest ridicule,mais soncomportementme faitun

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maldechien,putain!Lepire,c’estqu’ellemelorgneetbavecommeunelimacedevantunefeuille

desalade,quandellepensequejenelavoispas.Elleestentraindemetueràpetitfeutantmaqueueetmescouillessontaussiduresquedubois.—Quesepasse-t-ilentrelapetiteet toi?s’enquiertAlbertotandisquenous

longeonsunealléedeplantsdecafé.—Rien!C’est bien tout le problème. Je passe l’entrée de la plantation etmemets à

courir à grandes foulées jusqu’à l’orée de la forêt. J’ai beau être en nage,macoursen’atténuepaslemoinsdumondemafrustration.Nepouvantcognersurpersonne,jeretiremont-shirtetpassemesnerfsenlançanthargneusementmoncouteaudechassecontreunarbre.Jenesaisdepuiscombiendetempsjesuislà,àmassacrercepauvretronc,quandunevoixdouces’adresseàmoi.—Salut,Ice.Enfin!Monsoulagementesttelquej’ail’impressiond’êtrelibéréd’unpoids

incommensurable, mais je sais que je ne dois pas me précipiter, ne pas labrusquer.—Salut,bébé.Elleposesaguitareausol,puisadresseunsignedetêteendirectiondemon

couteau.—Tupeuxm’apprendre?Hein ? Je m’attendais à ce qu’elle me demande des explications, mais

certainementpasàça.—Situveux,maisçaprenddutempsavantd’attraperlecoupdemain.Je luimontrecomment tenir la lameet lemouvementquedoit effectuer son

poignet.Ellem’écouteattentivement,lanceetratelacibleplusieursfois,cequiestnormal,maisGabypersévère.—Jecomprendspourquelleraisontunem’aspaslaisséentrevoirtonvisageà

l’époque,maispaspourquoitunem’asjamaisadressélaparole.—Je…—Laisse-moi,terminer,Ice,mecoupe-t-elle.Son tondouxmesurprend.Elleestd’uncalmeolympien,concentréesurses

lancés.—QuandPim’sm’ainforméquetuétaispartietm’aremiscetteguitaredeta

part,jenesavaispascommentinterprétertongeste.Aujourd’hui,jesais.

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J’endoutefortement.—Savais-tudéjàquij’étaisavantquelebarmant’eninforme?—Non. J’ai eu un doute quand j’ai entrevu la couleur de tes yeux,mais je

n’étaissûrderien.Ellepivotepourmefairefaceetmedarded’unregardperçant.— Pourquoi avoir posé cette question déplacée au guitariste qui

m’accompagnait?Elleécarquillelesyeux,stupéfaite,alorsquejeluiendonnelemotif.—Tuauraisput’yprendreautrement,non?Ouais,ellen’apastort.Jeluiexpliquequejen’aijamaisabordédefemmesde

ma vie, que je ne connais que le langage châtié pratiqué au sein des gangs.Mêmelepèredelafamilled’accueilchezquinousavonsétéplacés,s’exprimaitdecettefaçon.Cenesontpasdesexcuses,certes,maisc’estlavérité.Jebaisselesyeux,confus.—Jesuisdésolé.Je le suis vraiment. Elle neme crie pas dessus,mais jeme sens comme un

mômequisefaitréprimander.—Tu nem’as pas dit qui tu étais ensuite. Quand je l’ai découvert, j’ai été

submergéepartantd’émotionsqu’ilmefallaitêtreseulepourpouvoirfaireletri.Ellemerendlecouteau,puisreprend:—Tum’as offert cet instrument demusique pourme signifier que je ferais

mieuxdem’intéresseràautrechosequ’àtoi,alors j’aiuneseulequestion,Ice.Qu’ai-jedoncfaitpourquetumeméprisesautantetce,depuisquej’aidébarquéàMarseille?Quoi ? Je suis bouche bée. C’est ce qu’elle pense ? Ses prunelles, emplies

d’incompréhension,me leconfirment. Je tardeprobablement tropà répondreàsongoût,carellesoupire,puistournelestalons.—Gaby,attends!Elles’arrête,maisneseretournepas.Jem’approchedoucementderrièreelleet

n’osepaslatoucher.—Jenet’aijamaisdédaignée,bébé,bienaucontraire.Jet’aidésiréecomme

un malade dès l’instant où tu as posé un pied dans ce garage, mais j’avaistellementpeur,murmuré-je.Jeluidistout,d’oùvientmonsurnom,luiavouem’êtremasturbétouslesjours

danslebureauenlaregardant, l’avoirsuivieàmoto,pourquoij’aiachetécette

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guitare,m’être souvent demandé ce qu’elle était devenue au cours de ces huitdernièresannées.Jesaisqu’ellepartagecedernierpointàmonsujet,ellem’enaparléilyadeuxmois,quandnousétionsdansl’avionquinousamenaitici.—J’aitoujourscruquetuavaisquittéMarseilleàcausedemoi,dit-elle.Jedémensetluidonnelavéritableraison.Elleseretourneenfinetplanteson

regardturquoisedanslemien.—Pourquoim’avoircachéquitues,alors?—Tonpère et seshommesne savent riendemonpassé. Jene souhaitepas

qu’ils apprennent que nous nous sommes déjà croisés, toi et moi, et qu’ilsdéterrenttoutça.Ce n’est pas tout à fait vrai, ni faux non plus. Elle scrute mon regard si

longtempsquejemesensdemoinsenmoinsserein.—Jecomprends,Ice.Jenedirairien,promis.Commentt’appelles-tu?J’ouvre laboucheet la refermeaussitôt. Jen’aipas enviede luimentir à ce

sujet,jerêvedel’entendrecriermonprénomquandjelaferaijouirànouveau,maisjenepeuxpasluidévoilermavéritableidentité,alorsjedéclare:—Jecroisquej’aimebienIce,finalement.Ellesourit,amusée.—Jepeuxmerenseignerauprèsd’Alberto,tusais.Merde ! Il est vrai qu’elle converse pas mal avec lui depuis notre retour

d’expéditionetj’aiconsciencedejoueraveclefeu.—William,mens-je.Sonregardrivéaumienmefaitdouter.Sait-elle?Albertoluia-t-ilrévéléd’où

jevenais?Jeseraisdéjàmortsic’était lecas,carma joliebrune,quiest loind’êtreidiote,auraitcomprisquejenesuisqu’unimposteur.— Je trouve que Ice te convient mieux, je vais donc m’en tenir à celui-là,

lâche-t-elle,moqueuse.

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Gaby

Icevientdemementir,maisjeneluientienspasrigueur,jesaispourquoiill’afait.Jerécupèremaguitareetvaism’asseoiraupieddel’arbrequinousaservide cible un peu plus tôt. Ice m’observe gratter distraitement mon instrument,puismerejoint.Ilestsursesgardes,malgrésonairimpassible.Çafaitplusdetroissemainesquej’essaiededémêler lebordelque j’aidans

matête.Moncerveauenregistredesinformationsqui,àpremièrevue,semblentanodines,maisquandony regardedeplusprès, elles s’avèrentbeaucoupplusimportantes.Icen’estpas celuiqu’il prétendêtre. J’hésite à le confondreparceque jene

veuxpasqu’ilsesenteprisaupiègeetpuis,ilpeutpeut-êtrem’aideràdécouvrirce qui se trame ici. Il y a plus qu’un trafic de drogue si j’analyse ce que j’aientenduquandj’étaisplanquéedanslebâtimentàcafé.Commentai-jedémasqué,Ice?C’estsimple:1-Sontatouage,principalement.C’estpourcetteraisonqu’ilmecachaitquiil

était,d’ailleurs.2-Desconversationsquej’aieuesavecGrincheuxmesontrevenuesàl’esprit.

Je lui aidemandés’il étaitpossiblede retrouverunepersonne, ilm’a réponduquec’étaitdanssescordes,àconditiondedisposerd’unpeuplusd’élémentsquelesurnomdeDémon.3-Albertom’arévéléqu’IcesenommaitWilliamSmith,qu’ilétaitaméricain,

serait un ancien membre d’un gang de motard basé à New-York depuis sesquatorzeansetqu’ilauraitrejointunefilièreparisienneilyaunpeuplusd’unan,avantdevenirfairedutourismeenColombie.Jesuiscertainequ’aumoinsunepartiedetoutçaesterronée.Jeneremetsaucunementendoutecequ’ilm’arelatésursonenfance,ilyavaitbientropdechagrinetdesouffranceautantdanssonregardquedanssavoix.Ice aurait pu me considérer comme une gamine insignifiante quand j’avais

seizeans,ilfallaitdoncquejeluiposelaquestionavantd’assemblerlespiècesdupuzzle,carenquoicelaaurait-ilposéproblèmequejesachequiilest?Ehbien,çaluiencréeunénormeencequiconcernesacouverture.Ilfallaitsansdoutejustifierlefaitqu’ilparlecourammentlalanguedeMolière

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etpuis,lafilledutrafiquantquirentreaubercailquelquesmoisaprèsqu’untypearéussiàs’infiltreretqui,deplus,leconnaît,enfin,sionveut,çaauraitfaittropde coïncidences pour paraître crédible. Par contre, il faut que je pense à nedévoilermondosàpersonnepourprotégerIce.Combien de chances y avait-il pour que Démon, alias Ice, et moi, nous

revoyionsunjour?Hasard?Peut-être,maisici,enColombie,chezmonpèredesurcroît?Jen’ycroispasuneseuleseconde.JeprésumequeGrincheuxestderrièretoutçaetquelquepart, jeluienveux.

Pourquoi, Ice ? Justement le gars au dos sublime que j’ai toujours espérérecroiser,maiscertainementpasdanscescirconstances.Ice est soit policier, soit il exerce le même métier que moi : récolter des

informationspour démanteler les réseaux français.Je ne suis pas flic, ce n’estpasmoiquiarrête lesmalfrats,mais j’aiacceptéce travailparceque j’yaivuuneoccasiondemeformerpourfairetombermonpaternel.Mais,plutôtquederapportercequej’auraidécouvertàlaFrance,commeprévu,c’estauxautoritésdecepaysquejevaism’adresser,seulement,ilmefautdespreuves.Quand Grincheux m’a proposé ce boulot, il m’a déclaré que mon profil

l’intéressaitparcequej’avaisfréquentélerepaired’ungangmarseillais,mêmesiçan’a étéque surunecourtedurée.Aujourd’hui, contrairement à l’époque, jeprendsconsciencequ’ilsavaitquiétaitDémonetçamefoutenrogne.Lesagentsde renseignementsneseconnaissentpasentreeux, jenesaispas

pourquoi,maisc’estlarègle.Ilmeresteencorepasmaldepointsàéclaircir.—Commentas-tusauvélaviedemonpère?m’enquiers-je.— Manuel et lui étaient près d’un bordel de Bogota quand des hommes

cagoulésontouvertlefeusureux.J’aiplongésurtonpèrepourleprotéger,l’aitraînéàl’intérieuretilm’ademandédel’aideràsortirdelà,cequej’aifait.Ilmedécritlecoupclassiqued’uneembuscademontéedetoutespiècespour

parveniràuneinfiltrationensuite.Ilsontprobablementdûtireràballesréellespourquecelaparaisseplusvrai,maisl’idéequeIceauraitpusefairedescendre,mefaitfroiddansledos.—Gaby,pourquoit’êtrefaitgraverlemêmedessinquelemien?Jefermelesyeux.Ilvasefoutredemoisijeluidis,non?—Tun’étaisplus là, tum’avais laissécetteguitareet je…J’avaisseizeans,

Ice, à cet âge-là, on fonde des espoirs complètement loufoques sur n’importequi,jesuppose.Jel’aperçoisarquerunsourcil,surpris.

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—Qu’espérais-tudemoi?—Beaucoupdechoses.—Teparler?Jepivotesurmonpostérieuretplantemesprunellesdanslessiennes.—Passeulement.Promets-moidenepasrire.Ilacquiesce.— Je n’avais jamais vu ton visage, je ne te connaissais pas et pourtant,

j’espéraisquetuseraismonpremier.Jecroisquej’étaisamoureusedetondos.Ileststupéfait,puissoncorpsestprisdespasmesqu’iltentederéprimer.Tant

qu’àfaire,autantqu’ils’endonneàcœurjoie.— J’ai attendu d’avoir vingt ans avant de sauter le pas et en plus, je suis

tombéesurunnaze.Il écarquille les yeux, puis éclate de rire à s’en rouler par terre. C’est la

premièrefoisquejelevoiscommeça.Jenelecôtoievéritablementquedepuisdeuxmois,maisjedoutequ’Icesoitunhommegaidenature,quecesoitàcausedesonpasséoudesonmétier,peut-êtremêmedesdeux.Sonexpressionrieusechangeradicalementsestraitsetjedoisbienadmettrequ’ilmeplaîtdeplusenplus.Jemeredresseetpassemoninstrumentdansmondos,uneidéeentête.Ilse

metdeboutetmefaitface,l’airsoudaingrave.—Bébé,jesuisdésolé.Tumefaisprendreconscienceàquelpointj’aiétécon

d’avoireuaussipeuràl’époque,dit-ilavecamertume.—Monegod’adolescente s’enest remis,mais j’aimeraisque tum’accordes

unechose.—Toutcequetuveux.—Tourne-toi.Il s’exécute immédiatement.Unedéchargeélectriquemeparcourt l’échine et

unedoucechaleurserépanddansmonbas-ventrelorsquejepromènedoucementleboutdemesdoigtssurlapeaudoucedesondos.Icefrémit,puissonsouffledevientdeplusenpluscourt.—Bébé,j’aienviedetebaiserdèsquejetevois,maischaquefoisquetume

touches, ma queue est prête à exploser, murmure-t-il, d’une voix chargée dedésir.—Tais-toietlaisse-moiréaliserunepartiedecefantasmequim’obsèdedepuis

huitans.

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Ilobtempère.Jepassemesbrasautourdeluietposematempeaucreuxdesesomoplates.C’estétrange,jemesensbien,là,ensécurité.— Je vais te prendre contre cet arbre, grogne-t-il, avant de se retourner

brusquement.Sonregardardentm’embrasecommeunfétudepaille.Ilexhaleunesortede

râlecaverneuxquirésonnedanstoutmoncorps.—Gaby,vousêteslà?appellelavoixdePaco.Retourbrutalàlaréalité.—Faitchier!grondeIce.Ils’emparedesont-shirtetlerenfileprestement.—Ici,Paco!crie-t-il.Quelquessecondesplustard,legamindéboule,échevelé.—Ah,vousvoilà.Lepatronestrentré,ilveutvousvoirtouslesdeux.J’aibienentenduunbruitdemoteurunpeuplustôt,maisn’yaipasprêtéplus

attentionqueça.—Parsdevantetinforme-lequenousarrivons,luiordonneIce.Le gamin obtempère, puis Ice se place devant moi, m’empêchant de lui

emboîterlepas.—Neleprovoquepas,bébé.Jeplongemonregarddanslesien.— Ice, je t’aimebien, alorsne temets jamais entremonpère etmoi, s’il te

plaît,dis-jeavantdelecontourneretmemettreenroute.

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23

Ice

Gaby me précède lorsque nous entrons dans la cuisine et dépose soninstrument au coin de la porte. J’ai unmauvais pressentiment tant l’ambiancesemble soudain s’alourdir. Juan ne salue pas sa fille, elle non plus. Il se tientdeboutavecsonfidèleserviteur,del’autrecôtédelatable,etnousdétailledelatêteauxpiedstandisqueManuelaboie:—Oùétiez-vous?—Ons’entraînait,réponds-je.—Enquoi,est-cequeçateregarde?crachemajoliebrune.Manuelplissesesyeuxporcins,serrelespoingsets’apprêteàrépliquer,mais

Juanintervient.—Calmez-vous,touslesdeux!Juanreportesonattentionsurmoi.—Comments’est-ellecomportée?—Trèsbien.Gabymefoudroiebrièvementduregard,puiss’adresseàsonpère.—Pourquoinepasmeposerdirectementlaquestion?Jesuislà,aprèstout.Il

yaeuunincidentetj’aiblesséundeteshommes.SiJuanestsurpris, iln’enmontreabsolumentrien,alorsqueManuel, lui,est

unlivreouvert.—Ques’est-ilpassé?medemandeJuan.Gaby ouvre la bouche, mais je la devance et résume les faits. Manuel est

furibond.SipourGabyjesuisunglaçon,jemedemandecommentellequalifiesonpère,ilestaussigeléquelabanquise.—Tul’asprovoqué,donc,gronde-t-il,àl’intentiondesafille.—Sipeu.Gabyestcommeunvolcanprêtàentrerenéruption.Jeposemamainsurson

épauleet lapressedoucement.Mongestesemblel’apaiserquelquepeu,cequin’estpaslecasdeManuel,maisJuanattisedenouveaulefeuquicouvechezmajoliebrune.— Si tu veux rester ici, tu devras te plier à mes règles et respecter mes

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hommes.— Sinon quoi ? Tu vas me coller un flingue dans la bouche et me faire

exploserlecrâne,àmoiaussi?demande-t-elled’untonfielleux.Manuel est bouche bée, Juan semble un instant déstabilisé,mais se reprend

aussitôt. Le père et la fille s’affrontent du regard, froid sibérien contre soleilbrûlantdudésert.—Qu’est-cequetuveux?—Tulesaistrèsbien,alorsnefaispasl’innocent!hurle-t-elle,dégageantma

maindesonépaule.Ilssefixentdenouveau,puisJuanlâche:—C’étaitunaccident.Toutel’acrimoniedemajoliebrunesembleretombercommeunsoufflé.—Maisencore?demande-t-elle,d’untondoucereux.Juanme fait signede sortir,mais j’hésite, je neveuxpas laisserGaby seule

aveccesdeuxhommes.—SiManuelreste,Iceaussi.Aprèstout,situl’asengagé,c’estqu’ildoitêtre

dumêmeacabitquetoi.Contrairementàcequejepensais,Juancèdeàlarequêtedesafille.—J’aiétéinfidèle.—Et?—Tamèrel’adécouvertetuneviolentedisputeàéclater.Gabyn’encroitpasunmot,jelevoisbien,maisellemesurprendenabrégeant

l’interrogatoire.—Jevois.J’imaginequ’elleamenacédetequitter,tunel’aspassupportéet

tuétaissiencolèrequetuasagisouslecoupdel’émotion.Juanacquiesce. Ilmedonneenviedevomir.Jenesupportepascesgensqui

n’assument pas leurs actes, pourquoi ment-il à sa fille ? Qu’a-t-il donc de siterribleàcacher?—Ehbientuvois,cen’étaitpassidifficileàdire,onvadoncpouvoirrepartir

surdebonnesbasesmaintenantquelevoileestlevé.—C’estcequetuveux?—Oui.Juanestsatisfait.Moi,jevaisêtremalade.— Je considère Manuel comme un fils, alors quand tu m’as appelé pour

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m’annoncertonarrivée,ilm’ademandétamainetj’aiaccepté.Jecroisquej’aisubitementattrapéunegastroentérite,j’aimalaubideetvais

gerber.Manueljubileetdétaillelecorpsdemabelledesonairvicieux.JechiedansmonfroclorsqueGabysouritlargementàsonpaternel.—Jenepeuxpasl’épouser,jesuisenceinte.Hein?Manuellaregardesoudainaveccolèretandisquesonpèrelatoiseavec

mépris.—Mesconditionspourtonretourétaientpourtantclaires.Tum’asjurén’avoir

personnedanstavie.—J’aichangéd’avisencoursderoute.—Jeveuxunhéritieretque lepèrede tonenfantsoit l’undemeshommes,

pasunfrançaispourlequeltuasécartéeslescuissescommeuneputejusteavantderevenir!Etlà,touts’enchaîne.Gabysoulèvelatableetlarenverseviolemment,cequi

faitsursauterlesdeuxhommes.—Mamèrelesabienécartéespourtoi!hurle-t-elle.—C’estcefilsdeputequit’asautée?s’écrieManuel,portantunregardplein

dehainesurmoi.—C’estmoiquil’aibaisé,ilmerespecte,lui,aumoins!Putain,elleveutmamortouquoi?—Jevaistecrever,salefilsdepute!Nousdégainonsnosflinguesenmêmetemps,maisGaby,carçanepeut-être

qu’elle,estplusrapide.—Çasuffit!rugitJuan.Je vois un objet argenté volé en direction deManuel et se planter dans son

poignet.Sonarmetombeausoletilsemetàcouinercommeungoret.Juan regarde sa fille avec autant d’incrédulité quedeméfiance tandis que je

suissurlecul.Ellem’ademandédeluiapprendreàlancermoncouteauiln’yapasuneheure.Chancedudébutant?—C’esttoiquiluiaapprisàfaireça?medemande-t-il.—Oui.Vucequis’estpasséavecMiguel,j’aipenséqu’ilseraitutilequ’elle

sachesedéfendre.Quepuis-jerépondred’autre?—Jecroyaisquetuvoulaisqueleschosess’arrangent?grondeJuan.

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—Certes,maisjenelaisseraipersonnefairedumalaupèredemonfils,alorsgardetonchienenlaisse!s’écrie-t-elle.— Cesse de me provoquer, Gabriela ! Si tu la veux, elle est à toi, mais

apprends-luilesbonnesmanières,dit-il.Gabys’apprêteàrépliquer,jeposeunemainsursabouche,ceinssataillede

mon bras droit, la soulève, plaque son dos contre mon torse et l’emporte àl’extérieur.Elle sedébat commeune furie, coupde coudes, de talons, de tête,ellenem’épargnerien.J’arrive devantma bicoque, essoufflé et furieux. J’ouvre la porte, la pousse

brusquementà l’intérieur,entreet refermederrièremoi.Ellese retourneetmefusilleduregard.—Tuveuxquetonpèremebute?!C’esttafaçondetevengerparcequejene

t’aipasditquij’étais,c’estça?!—J’aipassél’âged’êtreaussipuérile,Ice!—Ahoui?Quecherches-tuàfaire,alors?Tusaistrèsbienquejenet’aipas

miseenceinte!hurlé-je.—Jet’aiditdenepastemettreentremonpèreetmoi!—Etmoi,jet’aiprévenuedenepasleprovoquer!Ilvatedescendrecomme

ilatuétamère,c’estcequetusouhaites?!Tuveuxlarejoindredanslatombe,c’estça?!Loindesecalmer,majoliebruneesttelunmurdebriqueinébranlable.—Qu’est-cequeçapeuttefoutre,Ice?!Horsdemoi,jesorsmonflingue,ôtelecrandesureté,attrapelabelleparles

cheveuxàl’arrièredesoncrâne,tirebrusquementpourluifaireredresserlatêteetplantel’armesoussamâchoire.—Decettefaçon,tuescertainedenepasterater.Tun’asplusqu’àappuyer

surladétente,alorsvas-y,fais-ledonctoi-même!Jeluiabandonnemonflinguequandsamains’enempare,relâchesescheveux

et recule d’un pas sans la quitter du regard. Le sien est dur, déterminé.J’écarquillelesyeuxd’effroilorsquej’aperçoissonindexbougersurladétente.—Tucroisqueçamefaitpeur,Ice?Elle ne craint pas demourir, je le vois dans son regard et ça me fiche une

trouilledetouslesdiables.—Bébé,jenetelaisseraipastefairetuer.Jesoupire,soulagé,alorsqu’elleretireleflinguedesoussonmenton.

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—Riennipersonnenem’arrêtera,Ice,alorsn’entravepasmonchemin.Jenerenonceraijamais.Monsoufflesecoupeetmonrythmecardiaques’accélère,alorsqu’ellebraque

l’armesurmoi…ettire.

Àsuivre…

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