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Droit Déontologie & Soin 12 (2012) 70–77 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Jurisprudence Omnivalence du diplôme : le titre et les compétences Stéphanie Ariès (Avocat au Barreau de Lyon) 1 148, rue de Créqui, 69003 Lyon, France Disponible sur Internet le 22 f´ evrier 2012 Résumé L’omnivalence du diplôme de médecin reste une donnée juridique, mais de plus en plus limitée, dès lors que s’il existe un titre unique – Docteur en médecine – la pratique doit être liée à la compétence effective. Le cas de la chirurgie esthétique illustre ces questions. © 2012 Publié par Elsevier Masson SAS. Dans un arrêt du 15 novembre 2011, la chambre criminelle de la Cour de cassation, chambre criminelle (n o 10-88316), réforme un arrêt de cour d’appel qui avait sanctionné pour usurpation du titre un praticien faisant état de la spécialité de chirurgien esthétique alors qu’il n’avait pas le titre. Pour ce faire, la Cour de cassation en rappelle à la rigueur de la loi pénale, qui ne protège par l’infraction d’usurpation que le titre de médecin. Mais cet arrêt ne remet en cause que la qualification des pratiques en chirurgie esthétique, désormais bien définies par la loi, et la lourde responsabilité que prend un médecin en exerc ¸ant hors de son domaine de compétence, quand bien même il ne serait pas ipso facto en illégalité. 1. L’arrêt du 15 novembre 2011 et le titre 1.1. Les faits M. X..., docteur en médecine, chirurgien spécialisé en chirurgie thoracique et vasculaire, a proposé à Mme Saïda Y... une abdominoplastie associée à une liposuccion. À l’issue de la consultation, il lui a remis un devis comportant, sous l’indication de son nom, les mentions « chirurgie vasculaire et thoracique, chirurgie endocrinienne, chirurgie esthétique ». À la suite de la plainte de Mme Y..., reprochant à M. X... d’avoir fait état de la qualification de chirurgien esthétique qu’il ne possédait pas, celui-ci a été cité à comparaître devant le tribunal Adresse e-mail : [email protected] 1 www.aries-avocat.com. 1629-6583/$ – see front matter © 2012 Publié par Elsevier Masson SAS. doi:10.1016/j.ddes.2012.01.022

Omnivalence du diplôme : le titre et les compétences

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Droit Déontologie & Soin 12 (2012) 70–77

Disponible en ligne surwww.sciencedirect.com

Jurisprudence

Omnivalence du diplôme : le titre et les compétences

Stéphanie Ariès (Avocat au Barreau de Lyon) 1

148, rue de Créqui, 69003 Lyon, France

Disponible sur Internet le 22 fevrier 2012

Résumé

L’omnivalence du diplôme de médecin reste une donnée juridique, mais de plus en plus limitée, dès lorsque s’il existe un titre unique – Docteur en médecine – la pratique doit être liée à la compétence effective. Lecas de la chirurgie esthétique illustre ces questions.© 2012 Publié par Elsevier Masson SAS.

Dans un arrêt du 15 novembre 2011, la chambre criminelle de la Cour de cassation, chambrecriminelle (no 10-88316), réforme un arrêt de cour d’appel qui avait sanctionné pour usurpationdu titre un praticien faisant état de la spécialité de chirurgien esthétique alors qu’il n’avait pas letitre. Pour ce faire, la Cour de cassation en rappelle à la rigueur de la loi pénale, qui ne protègepar l’infraction d’usurpation que le titre de médecin. Mais cet arrêt ne remet en cause que laqualification des pratiques en chirurgie esthétique, désormais bien définies par la loi, et la lourderesponsabilité que prend un médecin en exercant hors de son domaine de compétence, quand bienmême il ne serait pas ipso facto en illégalité.

1. L’arrêt du 15 novembre 2011 et le titre

1.1. Les faits

M. X. . ., docteur en médecine, chirurgien spécialisé en chirurgie thoracique et vasculaire, aproposé à Mme Saïda Y. . . une abdominoplastie associée à une liposuccion. À l’issue de laconsultation, il lui a remis un devis comportant, sous l’indication de son nom, les mentions« chirurgie vasculaire et thoracique, chirurgie endocrinienne, chirurgie esthétique ».

À la suite de la plainte de Mme Y. . ., reprochant à M. X. . . d’avoir fait état de la qualificationde chirurgien esthétique qu’il ne possédait pas, celui-ci a été cité à comparaître devant le tribunal

Adresse e-mail : [email protected] www.aries-avocat.com.

1629-6583/$ – see front matter © 2012 Publié par Elsevier Masson SAS.doi:10.1016/j.ddes.2012.01.022

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du chef d’usurpation de titre, de diplôme ou de qualité. Le tribunal correctionnel a déclaré M. X. . .

coupable du délit d’usurpation de titre, l’a condamné à une amende de 10 000 euros et la courd’appel (Bordeaux, 15 octobre 2010) a confirmé ce jugement.

1.2. Le point de vue du médecin

Le Docteur X. . . fait valoir en premier lieu l’omnivalence du diplôme de médecin en faisantréférence à la qualification établie par le Conseil national de l’Ordre, permettant à des chirurgiensgénéralistes l’exercice de la chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique. Dans ces conditions,il considère qu’étant chirurgien généraliste, il peut pratiquer des actes de chirurgie reconstructrice,esthétique et plastique sur tout le corps.

1.3. L’analyse de la cour d’appel

1.3.1. Élément matériel de l’infractionSans remettre en cause cette notion d’omnivalence, il convient de constater que le texte de

référence (décret de novembre 1955 faisant lui-même référence à un texte de 1947) est ancien etqu’il convient donc de le manier avec prudence face aux progrès de la médecine et en particulierde la chirurgie.

D’ailleurs, l’article L. 4127-70 du code de la santé publique, s’il maintient le principed’omnivalence, le limite très clairement en rappelant que « si tout médecin est, en principe,habilité à pratiquer tous les actes de diagnostic, de prévention et de traitement, il ne doit pas, saufcirconstances exceptionnelles, entreprendre ou poursuivre des soins ni formuler des prescriptionsdans des domaines qui dépassent ses compétences, son expérience et les moyens dont il dispose ».Le docteur X. . . peut donc, en principe, pratiquer des actes de chirurgie reconstructrice, esthé-tique et plastique, mais ce domaine n’est pas de sa spécialité. En outre, il doit disposer, pour leseffectuer, d’un plateau opérationnel et de locaux adaptés. Or, il résulte des pièces comme de sespropres déclarations qu’il n’est pas titulaire du diplôme de chirurgien esthétique ou plasticien,mais du diplôme de chirurgien « spécialisé en chirurgie thoracique et vasculaire ».

Dans le cadre du litige ayant opposé le docteur X. . . à Mme Y. . ., c’est pour l’essentiel le devisde l’opération qui pose problème. L’intitulé du document, par lui-même ne fait pas de difficulté.Il s’agit bien d’un devis de chirurgie esthétique et le docteur X. . . reste apte à pratiquer une telleopération, sous réserve des dispositions de l’article L. 4127-70 du code de santé publique.

En revanche, les mentions portées sous son nom sont d’une autre nature. Disposées de faconénumérative, elles indiquent : chirurgie vasculaire et thoracique, chirurgie endocrinienne, chirur-gie esthétique. Aucune différence n’apparaît, dans cette simple énumération entre la « vraie »spécialité du docteur X. . . (chirurgien vasculaire et thoracique) et les deux autres mentions.

D’ailleurs, il n’existe pas de « chirurgie endocrinienne », ce que semblait ignorer le docteurX. . . Le docteur X. . ., après consultation du Conseil de l’Ordre des médecins, a donc retiré cettemention de l’ensemble de ses documents. Pour autant, il n’établit nullement qu’il ait souhaitéfaire une différence ou établir une hiérarchie entre cette mention et les deux autres figurant sur ledevis.

Le médecin soutient que le seul fait de faire figurer la mention de « chirurgie esthétique » surun devis ne caractériserait ni l’appropriation d’une spécialité ni surtout l’usage d’un titre protégé,contrairement à ce qui aurait été le cas si le docteur X. . . s’était attribué le titre de « chirurgienesthétique ». Pour la cour, cette subtilité est d’autant moins évidente que le Docteur X. . . se définit

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lui-même comme médecin disposant du diplôme de chirurgie générale, spécialisé en chirurgievasculaire et thoracique, ce qui caractérise tout autant un titre qu’une spécialité.

Le docteur X. . . est effectivement qualifié en chirurgie vasculaire et thoracique, ce qui rendlogique et compréhensible pour tous la mention de cette « spécialité » dans le document soumis àMme Y. . . En revanche, rien, dans l’intitulé de ce même devis, ne permet de comprendre que ledocteur X. . . n’est pas un spécialiste de la « chirurgie esthétique » alors que cette mention n’estnullement différenciée des précédentes.

Aussi, pour la cour d’appel, l’élément matériel de l’infraction d’usurpation de titre est dès lorsconstitué.

1.3.2. Élément intentionnel de l’infractionL’aspect intentionnel d’un délit se déduit, en l’espèce, du but recherché par le docteur X. . .

lorsqu’il a décidé de faire figurer les mentions qui lui sont reprochées sur le devis soumis à MmeY. . .

Pour la cour d’appel, il est clair que cette énumération accrédite l’idée que le praticien quisoumet ce document à sa patiente dispose, dans les spécialités qu’il mentionne, d’une véritablecompétence. Dès lors, elle est de nature à influer sur le choix que pourront être amenés à faire despatients susceptibles de se faire opérer, et qui préféreront naturellement l’être par un chirurgienspécialement qualifié dans le traitement de la pathologie dont ils souffrent, plutôt que par unconfrère mentionnant « seulement » une pratique de chirurgie générale.

À ce titre, il suffit de reprendre le témoignage de Mme Y. . ., domiciliée près de Sainte-Foix-la-Grande. Elle indique s’être adressée au docteur X. . . sur les conseils d’une amie qui s’est faitopérer, par ce chirurgien, pour la pose d’implants mammaires. Sa préoccupation personnelle étaitde perdre du poids et d’obtenir une silhouette plus affinée. Pour partie, l’opération effectuée par ledocteur X. . . consistait en une séance de liposuccion, opération à visée essentiellement esthétique.

Dans ce contexte, parfaitement ciblé, le choix de faire figurer sur le devis, sous le nom duchirurgien, la mention « chirurgie esthétique » n’était pas anodine, mais était, au contraire, denature à conforter l’idée d’une particulière compétence du docteur X. . . dans cette spécialité alorsmême que le titre de « chirurgien esthétique » n’était pas explicitement employé.

Au surplus, ce dernier ayant omis, dans ce document, de mentionner sa seule spécialité (chi-rurgie thoracique et vasculaire), cet oubli entretenait volontairement la confusion avec les autres« spécialités » énumérées, dont celle de chirurgie esthétique, parfaitement adaptée à l’interventionenvisagée, mais dont le docteur X. . . savait pertinemment qu’il ne détenait ni la qualification nile titre.

De telle sorte, l’élément intentionnel de l’infraction est caractérisé.

1.4. La Cour de cassation

Selon l’article 433-17 du code pénal, ne peut constituer le délit d’usurpation de titre prévu parle premier de ces textes que l’usage, sans droit, d’un titre attaché à une profession réglementéepar l’autorité publique ou d’un diplôme officiel ou d’une qualité dont les conditions d’attributionsont fixées par l’autorité publique.

Par ailleurs, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ;que l’insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence.

Pour déclarer le prévenu coupable de ce délit, l’arrêt attaqué retient, notamment, que le choixde faire figurer dans le devis, sous le nom du chirurgien, la mention « chirurgie esthétique » était

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de nature à conforter l’idée d’une particulière compétence du docteur X. . . dans cette spécialitéalors même que le titre « chirurgien esthétique » n’était pas explicitement employé.

Or, en prononcant ainsi, sans caractériser l’usage, sans droit, d’un titre, d’un diplôme ou d’unequalité protégés par des dispositions répressives, la cour d’appel n’a pas justifié sa décision.

1.5. Le point de vue de l’Ordre des médecins

Le commentaire du code de déontologie, disponible sur le site de l’Ordre national, se situedans cette lecture stricte du droit.

Le droit reconnu à tout médecin d’exécuter tout acte de diagnostic, de prévention ou detraitement est fort justement maintenu dans le code de déontologie.

Cette affirmation vaut certainement vis-à-vis de la notion pénale d’exercice illégal de la méde-cine, le médecin étant ainsi protégé. Elle doit toutefois être reconsidérée à la lumière de certainscritères plus actuels que l’on peut qualifier de restrictifs1.

À l’ancien article qui évoquait les domaines dépassant la compétence ou les possibilités dumédecin, le rédacteur a souhaité substituer les connaissances, l’expérience et les moyens dont lemédecin dispose.

Les connaissances doivent être prises ici au sens large (on a préféré ce terme à celui decompétence, plus équivoque, plus réducteur). Celles acquises pendant la formation universitairedoivent être entretenues, mises à jour, complétées (art. 11).

L’expérience évoque à la fois celle relevant d’une formation précédemment recue et celleacquise dans la pratique quotidienne ; un bon exemple pourrait en être, pour un chirurgien spé-cialisé, la qualité de ses connaissances anatomiques, comme celles d’un passé chirurgical plusgénéral, tout cela lui laissant en cas de nécessité, en dehors de sa stricte qualification, le droitet le devoir d’intervenir d’urgence, comme cela se fait parfois dans les établissements de soinsd’importance modeste.

Les moyens dont dispose le médecin ne peuvent pas ne pas être évoqués devant l’explosion detechnicité de la médecine moderne. L’accès à l’imagerie sous tous ses aspects conditionne, parexemple, des indications thérapeutiques qui ne peuvent être prises sans elle.

L’ensemble détermine les possibilités du médecin qu’évoquait le précédent code. Celaconcerne, outre son environnement, sa culture propre, sa capacité à répondre à l’urgence.Il appartient au médecin de décider, souvent seul, en conscience, du rôle qu’il peutjouer. La formation nouvelle de certains confrères généralistes, formés dans les servicesappropriés, confrontés régulièrement avec la médecine de catastrophe leur donne incontes-tablement toute aptitude à intervenir dans ce cadre et y exercer une large autonomie dedécision.

Le code de déontologie, à l’évocation de ces exemples, montre bien où se situent réellementles inévitables limites de la règle de l’omnivalence du diplôme de docteur en médecine. Cene sont pas toujours celles du découpage administratif de la profession médicale, mais plutôtcelles de la réelle expérience du praticien, en tenant compte aussi des circonstances particulièresdu moment. En cas de doute, le médecin doit penser qu’il aura à se justifier s’il y a litige oucontestation.

1 http://www.conseil-national.medecin.fr/article/article-70-omnivalence-du-diplome-et-limites-294#1.

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2. L’arrêt du 25 novembre 2010 et la responsabilité

La Cour de cassation (1◦ chambre civile 1, 25 novembre 2010, no 09-68631) limite considéra-blement la portée pratique de l’omnivalence du diplôme, en analysant les faits sous l’angle de laresponsabilité.

Un enfant avait subi un traumatisme du bras, consécutif à une chute de vélo, et ses parentsl’avaient conduit au service des urgences de la clinique Sainte-Thérèse à Sète. Le médecin géné-raliste en charge de ce service n’avait décelé au vu d’un bilan radiographique qu’une simplefracture du cubitus droit, alors qu’il s’agissait en réalité d’une fracture plus complexe et plus rareappelée « fracture de Monteggia », associant une fracture cubitale à une luxation de la tête radiale.Cette erreur de diagnostic étant à l’origine d’un traitement inadapté et d’un retard dans la priseen charge de l’état de leur enfant, les parents ont recherché la responsabilité du médecin.

La cour d’appel avait rejeté leurs demandes, en énoncant que :

• l’enfant avait été victime d’une fracture complexe et peu courante ;• elle avait été prise en charge par un médecin généraliste qui n’avait pas la qualité de médecin

urgentiste ;• un non-spécialiste en traumatologie ignore souvent ce que représente une fracture de Monteggia.

Pour la cour d’appel, il ne pouvait être reproché au médecin de n’avoir pas diagnostiqué ce typede fracture, à la lecture des clichés radiographiques du 11 mars 2000, aucune faute du praticienn’était établie.

Or, répond la Cour de cassation, en se fondant sur la circonstance que M. Y. . ., médecingénéraliste, n’avait pas la qualité de médecin urgentiste pour l’exonérer de sa responsabilitéquand il est fait déontologiquement obligation à tout praticien de s’abstenir, sauf circonstancesexceptionnelles, d’entreprendre ou de poursuivre des soins, ou de formuler des prescriptions dansdes domaines qui dépassent ses connaissances, son expérience et les moyens dont il dispose, lacour d’appel a violé l’article 1147 du code civil et l’article R. 4127-70 du code de la santé publique.

C’est toute la différence entre la légalité et la responsabilité.

3. La réglementation de la chirurgie esthétique

Bien avisé des abus dans le domaine de la chirurgie esthétique, le gouvernement a choisid’encadrer la pratique des actes (Annexe).

La loi no 2002-303 du 4 mars 2002, relative aux droits des malades et à la qualité du systèmede santé, procède à l’encadrement de l’exercice de la chirurgie esthétique dans des établissementsaccrédités, et ses dispositions on été mises en œuvre par le décret no 2005-776 du 11 juillet 2005,et explicitées par la circulaire no DGS/SD2B/DHOS/04/2005-576 du 23 décembre 2005 précisantle décret précité.

Les interventions les plus fréquemment pratiquées en chirurgie esthétique, désormais listées,doivent être obligatoirement réalisées dans le respect des règles, et notamment ne peuvent êtrepratiquées que par des chirurgiens qualifiés car ce sont des actes de chirurgie esthétique :

• toutes les techniques de liposuccion ou lipo-aspiration, de lipostructure, concernant l’ensembledu corps ;

• les traitements de la calvitie par simple suppression de la tonsure ou prélèvements de lambeaux ;

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• la dermabrasion mécanique dans l’indication de l’effacement des ridules de la lèvre supérieureet de la lèvre inférieure (acte qui consiste à enlever la couche superficielle de la peau avec unemeule à rotation très rapide) ;

• les injections de matériaux non résorbables. Seuls la toxine botulique ou l’injection de matériauxou substances résorbables n’entrent pas dans le champ de la chirurgie esthétique.

Ces actes chirurgicaux réalisés dans les installations autorisées ne doivent être faits que pardes chirurgiens possédant une spécialité ou une compétence dont l’omnivalence du diplôme demédecin, ni l’expérience ne sauraient tenir lieu.

Sont ainsi habilités à réaliser tous les actes de chirurgie esthétique, les praticiens spécialistesou compétents (ancien régime) en chirurgie plastique reconstructrice et esthétique.

Sont habilités à réaliser des actes de chirurgie esthétique limités au cadre anatomique de laspécialité dans laquelle ils sont inscrits au tableau de l’ordre les spécialistes :

• en chirurgie maxillo-faciale ;• en chirurgie maxillo-faciale et stomatologie ;• en chirurgie de la face et du cou ;• en stomatologie ;• en oto-rhino-laryngologie ;• en oto-rhino-laryngologie et chirurgie cervicofaciale ;• en ophtalmologie ;• en gynéco-obstétrique ;• en chirurgie urologique.

Annexe.

Circulaire DGS/SD 2B/DHOS/O4 no 2005-576 du 23 décembre 2005relative à l’autorisation et au fonctionnement des installations dechirurgie esthétique (Extraits)

- Loi no 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualitédu système de soins, article 52-II ;

- Décret no 2005-776 du 11 juillet 2005 relatif aux conditions d’autorisation desinstallations de chirurgie esthétique et modifiant le code de la santé publique,articles 2, 3 et 4 (JO du 12 juillet).

1. Les bases du droit applicable à la chirurgie esthétiqueLe code de la santé publique détermine, au livre premier de la sixième partielégislative, que les établissements de santé ont pour mission d’assurer le trai-tement des malades, des blessés et des femmes enceintes en dispensant : dessoins de courte durée ou concernant des affections graves, des soins de suiteou de réadaptation à des malades requérant des soins continus, ou des soinsde longue durée à des personnes n’ayant pas leur autonomie de vie (art. L.6111-1 et L. 6111-2).

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Les installations dans lesquelles est pratiquée la chirurgie esthétique, viséespar la loi no 2002-303 du 4 mars 2002, recoivent des personnes non malades,non blessées pour des interventions qui n’ont pas de motif curatif, quel quesoit le bien-être qu’elles entendent procurer aux personnes intéressées. Cesinstallations ne sont pas comprises dans la définition de l’établissement desanté. Les interventions dont il s’agit sont distinctes des actes de chirurgieplastique ou reconstructrice, réalisés à la suite d’un accident ou d’un traite-ment, ou pour la correction d’une malformation ou d’un déficit fonctionnel,qui s’inscrivent, au contraire, dans une nécessité thérapeutique.Ces installations ne sont donc pas soumises pour leur création à l’autorisationprévue à l’article L. 6122-1 de ce même code ni encadrées par le schémad’organisation sanitaire, institué à l’article L. 6121-1, relatif à l’offre de soinsvenant satisfaire la demande de santé.C’est pourquoi les articles L. 6322-1 à L. 6322-3, insérés au code de la santépublique par la loi du 4 mars 2002, soumettent ces installations à une autori-sation spécifique préalable à leur mise en service, ainsi qu’à des conditionsde fonctionnement. Ils rendent obligatoire une information complète de lapersonne concernée, la remise d’un devis détaillé et le respect d’un délaide réflexion avant l’intervention. Des inspections et des sanctions en casd’infraction aux obligations précitées sont prévues par les articles L. 6324-1 etL. 6324-2.La loi a fixé, enfin, les conditions dans lesquelles, à titre transitoire, cetteautorisation peut être délivrée aux installations existantes.2. La caractérisation de la chirurgie esthétique et la protectiondes personnesLa loi et le règlement n’ont pas prévu l’énumération dans le code des actesqui seraient qualifiés comme relevant de cette pratique. L’annexe II, ci-jointe,rappelle à titre purement indicatif les actes les plus courants.Les actes chirurgicaux qui ont pour finalité explicite la « modification del’apparence corporelle d’une personne, à sa demande, sans visée thérapeu-tique ou reconstructrice » relèvent de la chirurgie esthétique.La réglementation issue de cette loi ne tend qu’à encadrer les installations oùcette chirurgie est exercée et fixer les conditions de cette pratique, afin d’yassurer aux usagers la compétence des chirurgiens et la sécurité sanitaire duepour toute intervention chirurgicale.Elle prévoit que cette chirurgie ne peut être exercée que par des chirurgiensqualifiés ou compétents.Elle a aussi pour objet de compléter les obligations déontologiques du pra-ticien envers les personnes concernées, notamment l’obligation de donnerune information préalable et complète sur le coût et sur les conditions de réa-lisation de l’intervention, comme l’a établi la jurisprudence (cours d’appel,Cour de cassation), soumettant l’exercice de cette chirurgie à des obliga-tions d’information et de moyens renforcées. La remise d’un devis détailléet le respect d’un délai de réflexion obligatoire de quinze jours assurent àla personne concernée la garantie de prendre une décision éclairée. Cette

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protection est d’autant plus attendue que les risques encourus, éventuel-lement, par la personne concernée ne sont pas la contrepartie d’un gestenécessaire à sa santé.Il en résulte que ces actes ne peuvent désormais être réalisés horsd’installations autorisées en vertu de l’article L. 6322-1 et ayant fait l’objet dela visite de conformité. Ils y seront alors explicitement enregistrés et facturéscomme tels, ainsi que toutes les prestations de soins ou de services dont ilssont accompagnés.Les actes de chirurgie esthétique ne sont pas couverts par l’assurance maladieen application de l’article L. 321-1, 1o, du code de la sécurité sociale et auxtermes de l’article L. 6322-1 du code de la santé publique.Ne sont pas concernées les pratiques dites de « médecine esthétique », tellesque l’utilisation de la toxine botulique ou l’injection de matériaux résorbablesou de substances, notamment pour le comblement des rides.3. Les principales dispositions du régime d’autorisationLes installations, même lorsqu’elles sont exploitées dans ou par un établisse-ment de santé, sont soumises à une autorisation du préfet du département oùelles se situent. Le titulaire de l’autorisation peut être une personne morale,ce sera le cas quand il s’agira d’un établissement de santé, ou une personnephysique, ce qui peut se présenter pour certaines installations privées.Cette autorisation est obligatoire et préalable. L’exercice sans autorisation estsanctionné par l’article L. 6324-2.Elle est valable pour une durée d’exploitation de cinq ans. La mise en servicedes installations autorisées ne peut avoir lieu qu’après constatation de leurconformité. Si l’autorisation n’a pas, dans les trois ans suivant sa notification,donné lieu à un commencement de fonctionnement, précédé de la visite deconformité, le préfet en constate la caducité.4. Les principales conditions d’autorisation et de fonctionnementLes conditions auxquelles les installations sont soumises ont trait àl’organisation matérielle et technique et à la prise en charge des personnesaccueillies. Elles peuvent varier selon que les installations sont ou non situéesdans un établissement de santé. L’annexe IV, ci-jointe, commente plus préci-sément certaines de ces dispositions.Certaines conditions peuvent être remplies dès le moment de la demanded’autorisation. D’autres, notamment celles qui touchent à la situation et àl’organisation des locaux, peuvent n’être effectives qu’après des travaux réa-lisés une fois l’autorisation accordée, mais avant toute mise en service. Ilen va de même de la convention éventuelle avec un laboratoire d’analysesde biologie médicale, ou de la mise en place du comité des relations avecles usagers. Dans tous les cas, le promoteur devra, dans sa demande, faireapparaître comment toutes ces conditions seront respectées. L’exploitation nepeut commencer qu’après une visite de conformité au résultat en tout pointsatisfaisant.