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Origine et développement de sens de cimier ‘croupe du cerf et du bœuf’

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This article was downloaded by: [McGill University Library]On: 16 October 2014, At: 09:05Publisher: RoutledgeInforma Ltd Registered in England and Wales Registered Number: 1072954Registered office: Mortimer House, 37-41 Mortimer Street, London W1T 3JH,UK

Studia NeophilologicaPublication details, including instructions for authorsand subscription information:http://www.tandfonline.com/loi/snec20

Origine et développement desens de cimier ‘croupe du cerfet du bœuf’Gunnar TilanderPublished online: 21 Jul 2008.

To cite this article: Gunnar Tilander (1940) Origine et développement de sensde cimier ‘croupe du cerf et du bœuf’, Studia Neophilologica, 13:1, 1-10, DOI:10.1080/00393274008586852

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Origine et développement de sens de cimier'croupe du cerf et du bœuf'.

L'auteur de la Chace don cerf, le plus ancien traité de chasseautochtone écrit en français, enseigne la façon dont le cerf doitêtre découpe après avoir ete chasse et tué. Il faut avoir soin,dit-il, en coupant les cuisses et l'échine, de laisser deux vertè-bres de l'épine dorsale près de la queue, pour que celle-ci,qu'on coupe ensuite, soit plus belle:

Puis en dois les nombles lever,Les cuisses n'i dois oublier.De Feschine deus neus i ait,La queue plus bêle s'en fait,

fol. 170 a (de la fin du XIIIe siècle).

Quand on coupait la queue du cerf, on faisait joindre les deuxvertèbres à la queue, qui devenait ainsi plus ferme et plusriche en chair.

L'auteur de Modus enseigne de même à joindre à la queue,en la coupant, une partie des cuisses, parfois un morceau mêmede l'os pelvien:

Or te faut lever la queue . . . met ton coutel au bout de la cuisseet enchise, en venant droit a toy et en prenant sus les cuisses, envenant par dessouz le cul; et fai d'un costé comme d'autre. Et seil a bonne veneson, si la coupe plus large et la fai espesse de charsouz la gresse, et lesse un poi de l'os corbin ovec, si sera plus ferme,Modus, 28, 96—105.

Cette regle s'appliquait aussi au sanglier, car dans le chapitrequi enseigne la façon dont on découpe cet animal on lit: « a laguisse franchoise l'en lieve la queue comme d'un cerf >.ySiodus,48, 90—91.

Dans ces deux endroits, Phébus suit fidèlement le texte deModus, qu'il n'a fait que copier (chap. 40 et 43 de Ted. J. La-vallee, Paris, 1854).

I—40468. Studia mopkilologica igjo—1941.

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2 G. TILANDER

II -est du plus haut intérêt d'étudier la partie du Trésor devénerie qui traite de la façon dont on découpe le cerf. C'estun traité en vers, composé en 1394 par Hardouin de FontainesGuérin, dont la Chace dou cerf est la source principale. On y lit:

Les cuisses après lèverés,Et les costés, et tant ferésQue de Teschine resteraDeux neuz, quant on la lèvera,Qui desouz le cimier seront,Et trop plus bel l'en lèverontCeulz qui s'en voudront entrametre,Mais qu'il y vueillent paine mettre;Car un veneur doit, par droiture,Au cimier lever mestre cureDe le lever plus bel qu'i[i] puet,r

p. 55 de l'éd. J. Pichón, Paris, 1855.

Ce qui frappe ici notre attention et notre intérêt, c'est que laqueue porte le nom de cimier, synonymie constatée aussi parle Ménagier de Paris:

En un cerf sont les espaules, la hampe, les cuisses, le foie, lesnomblès, les lardés, la queue scilicet le semier", les deux costés, etc'est tout, éd. J. Pichón, Paris, 1846, II, 156.

Le Trésor de vénerie de Hardouin de Fontaines Guérin offred'autres exemples de cimier au sens 'queue'. Quand, aprèsavoir découpé le cerf, on se met à charger les différents membresde l'animal sur un cheval pour les transporter à la maison,

La teste et le col trouser fautCouplés ensemble, sens défaut:Puis est droit qu'ensemble mettesLes espaules et les costésEt les trousés de l'autre part.Puis trouserés, pour le tiers quart,La hanpe ensemble et le cimier,

p. 56 de l'éd. J. Pichón.

La Chace dou cerf, la source du Trésor de vénerie, offre dansle passage correspondant:

1 Le manuscrit et l'édition portent qui puet.2 Pour la forme semier, voir p. 6.

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ORIGINE ET DÉVELOPPEMENT DE SENS DE CIMIER 3

Lors. dois ta venoison trousser,La teste et le col acoplerEmsamble, pour voir le te di,Et les deus espaules ausiEmsamble, et puis les deus costezSus un autre cheval troussez.La hampe et la queue seraEmsamble bien i avenra,

fol. 170 b.

Le Trésor de vénerie enseigne encore à saler la viande ducerf:

Mais qui bien saler la voudraDe l'iauve prendre li faudraTant que toute sa venoisonY puisse baignier à foison;Puis, doit grant foison de sel mettreDedans l'iauve et laissier remettreTant que comme saumeure soit;Et quant l'iauve telle aparsoit,Dedans doit mettre, sens attente,Le cimier, les costes, la hempeDu cerf, se tant en vuest saler,

p. 61—62 de l'éd. J. Pichón.

Dans la table analytique qui précède les Cent nouvelles nou-velles, cimier est employé une fois dans une expression quiatteste le sens antérieur 'queue'. C'est dans la cinquante-hui-tième nouvelle. Deux jeunes gentilshommes s'étaient épris d'a-mour pour deux jeunes filles très gentilles, qui ne semblaientcependant faire aucun cas d'eux, malgré les efforts qu'ils fai-saient pour leur plaire. Ils se décidèrent donc à négliger com-plètement les jeunes filles, croyant attiser de cette façon leurintérêt et leur amour, et, se rappelant le précepte d'Ovide que« beaucoup et souvent faire la chose que savez fait oublyer etpou tenir compte de celle qu'on ayme», ils passèrent la nuitdans la débauche. A l'occasion d'une fête qui eut lieu la journéesuivante, ils montrèrent ouvertement aux jeunes filles qu'ils nefaisaient plus aucun cas d'elles. Mais les jeunes filles restèrenttout aussi froides qu'auparavant envers eux, d'où ils conclurentqu'elles avaient comme eux passé la nuit à faire la noce. Voicil'analyse du cinquante-huitième conte dans la table:

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4 G. TILANDER

La LVIIIe nouvelle, par monseigneur le duc, de deux compaig-nons qui cuidoient trouver leurs dames plus courtoises vers eulx; etjouèrent tant du bas mestier que plus ne povoient; et puis dirent,pource qu'elles ne tenoient compte d'eulz, qu'elles avoient commeeulz joué du cymler, comme vous orrez cy après.

Il est tout évident que jouer du cymier signifie 'faire le jeud'amour' et que cimier, au sens de 'queue', se rapporte aumembre viril. Le substantif queue s'emploie souvent, on le sait,dans le même sens obscene.1

Encore de nos jours cimier conserve le sens 'queue' avecrapport au cochon dans le dialecte du Bas-Maine:

Simye 'queue du cochon', G. Dottin, Glossaire des parlers duBas-Maine, Paris, 1899.

Comment le mot cimier en est-il venu a signifier 'queue'?C'est peut-être un emploi secondaire, se basant sur une com-paraison humoristique entre la queue d'un animal et le cimierdu heaume d'un chevalier, étant tous les deux des objets quisurmontent. Mais, la cime étant le bout d'un objet, il se peutaussi que cimier 'queue' soit a comprendre simplement 'le bout'avec rapport à la queue.

Il importe que nous nous rappelions que, dans le Trésor devénerie, cimier ne se rapportait pas seulement a la queue ducerf mais aussi à une petite partie de la croupe du cerf qu'oncoupait avec la queue, comme dans Modus, Phébus et La chacedou cerf. Dans la Vénerie de du Fouilloux, cimier a un sensplus large encore, se rapportant en même temps a la queue età toute la croupe du cerf:

Puis doit leuer les cuisses: et après faut leuer le cymier depuisle commancemtnt des casiez, et de longueur iusques au bout de la queue,en eslargissant sur les cuisses iusques aux ioints, laissant l'os corbintout franc, en luy donnant deux coups de cousteau sur le haut desdeux costez, pour monstrer la venaison, fol. 54V0 de l'éd. impriméeà Angers en 1844.

Les costés du cerf sont les côtes et la chair qui les couvre.Le passage cité montre donc que du temps de du Fouilloux2

1 Voir Louis de Landes, Glossaire érotique de la langue française de-puis son origine jusqu'à nos jours, Bruxelles, 1861, Alfred Delvau, Diction-naire érotique moderne, Bâle, 1891, Vocabula Amatoria, London, 1896, art.queue.

2 La première édition de sa Vénerie est de 1561.

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ORIGINE ET DEVELOPPEMENT DE SENS DE CIMIER 5

le cimier comprenait tout le train de derrière du cerf depuis ladernière côte, y compris la queue. ,, On ne coupait plus séparé-ment la queue, qui faisait partie du train de derrière du cerf.Mais cet usage est plus ancien encore. On en trouve unexemple dans U Hystoyre et plaisante cronicque du petit Jehande Saintré:

Quant damp Abbez sceut la venue de ma dame, il fut tresjoyeulz; lors fist ung de ses chars charger de cymiers de cerfs, dehures, de costes1 de sangliers, de lièvres, de connins, de faisans,de perdriz, de gras chappons, de poullailles et de pigeons, et unequeue de vin de Beaulne; et tout envoya presenter à madicte dame,luy supplyant qu'elle print en gré. Ma dame, qui vit ce beau pre-sent, ne demandez mye se elle fut joyeuse, et commanda festoyerle presenteur, et à damp Abbez remercyer, chap. LXIX (p. 226 del'éd. J.-M. Guichard, Paris, 1843), du milieu du XVe siècle.

Le même emploi de cimier avec rapport à un cerf s'observedans les vers suivants de Perceval le Gallois de Chrestien deTroyes, que je cite d'après Tobler-Lommatzsch, art.&mier:

Ains point ne vot o soi porterFors les costes et Vescimer, l

éd. Ch. Potyin, v. 18720 (écrit 1179—87,voir l'éd. Hilka, p. xxiv).

Lescimer dans le manuscrit a toute apparence d'être unemauvaise graphie pour le cimer. La graphie se pour c et ssest fréquente dans le nord-est, d'où provient le ms. de Mons2,qu'a copié Potvin pour son édition; cf. dans l'éd. Potvin grascepour grace v. 3919, 5050, puisce pour puisse 6572, 7080, etc.

Le plus ancien exemple de cimier avec rapport à la croupedu cerf que je connaisse se trouve dans le Roman de Troie:

Sovent alot chacier ParisEn la forest de Beletis;E cil qui aler i voleientSauvagine moût i preneient,Quar tote en ert la forest pleine.Sovent en aveit dame Heleine

1 A interpréter costés de sangliers; cf. costés du cerf, p. 4, en bas.2 Voir A. Hilka, Der Percevalroman von Christian von Troyes, Halle,

1932, p. v.

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Longes, lardez o les daintiez,Cimiers e hanches e forchiez,1

v. 14970 de l'éd. L. Constans (écrit entre1155 — 60, ib., VI, p. 190).

Malheureusement cet exemple, pas plus que celui du PetitJehan de Saintré et de Perceval le Gallois, ne nous dit pas sile cimier contenait la croupe entière ou seulement une partiede la croupe, mais le Ménagier de Paris, écrit vers 1393, offredes définitions claires et nettes du mot avec rapport au cerf:

Item, la queue est dicte le seymier: et qui la veult saler, il con-vient oster tous les os ce que l'en puet, car il contient une grantpartie du dos, II, p. 157 de l'éd. Pichón.

Venoison de cerf ou autre. — Qui la veult saler en esté, laconvient saler en cuvier ou baignoire, gros sel broie, et après séchierau soleil. Seimier id est le coyer, qui est salé, l'en le doit cuire enla première eaue et vin pour le premier boullon pour oster sonsel: et puis getter eaue et vin, et après mettre parcuire en boullonde char et des navès, et servir par lesches avec de l'eaue en unplat et venoison, II, p. 129 de l'éd. J. Pichón.

Nota que le seymier d'un cerf, c'est le quoier et la queue ; et quantil est frais, il est cuit à l'eaue et au vin, aux espices et saffran etsoupes en esté : et en yver au poivre ; et ainsi-est il du sanglier frais,II, p. 264—5 d e 1>éd- J- Pichón.

Coyer, qui suppose un *codarius, dérivé de cauda, dé-signe la croupe de l'animal, et le dernier exemple cité dit ex-pressément que le cimier comprend la croupe et la queue. Pource qui est de la forme, le Diet. gin. (art. cimier) et Meyer-Lübke {Rom. etym. Wörterbuch, art. 9618 a) ont déjà supposéà juste titre que seimier des trois exemples du Ménagier deParis cités ci-dessus et semier de l'exemple du Ménagier citéà la page 2 sont dus à une contamination entre cimier et saint(de *saginum pour sagina, Meyer-Lübke, art. 7506). Lecimier est un morceau gras; cf. Bruch, Z. rom. Phil., XL, 324—5.

Dans la langue moderne, cimier se rapporte à la chair quiest sur la croupe du bœuf et à la croupe du cerf (Littré; Diet.

1 Forchié, traduit à tort par L. Constans 'cuisse d'une grosse pièce degibier', est le mot fourchié du glossaire de mon édition de Modus 'branchefourchue à laquelle on pendait les plus précieux morceaux qu'on retiraitdu cerf.

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ORIGINE ET DÉVELOPPEMENT DE SENS DE CIMIER 7

gén). Le mot est aussi enregistré dans quelques dictionnairesde patois:

Chimitr 'cimier, morceau de la croupe d'un animal'. Syn. deCouard*, A.-J. Verrier, R. Onillon, Glossaire étymologique et historiquedes patois et des parler s de l'Anjou, Angers, 1908.

Simye 'cimier du cochon', G. Dottin, Glossaire des parlers duBas-Maine, Paris, 1899.

Chimier 'morceau de viande pris dans la cuisse de la vache',J. Corblet, Glossaire ¿tymol. et comparatif du patois picard, Paris, 1851.

Cimî 'pièce de bœuf charnue enlevée sur le quartier de derrière',L. Remacle, Dictionnaire wallon-français, Liège et Leipsig, s. a.

Cimier a toujours appartenu surtout à la langue des chas-seurs. A partir du XVIIe siècle le mot est ainsi défini dansles dictionnaires de chasse:

Cimier 'croupe du cerf, du dain et du chevreuil', Robert de Sal-nove, La vénerie royale, Paris, 1655, L'Art de toute sorte de chasseet de pèche, Lyon, 1730, [Delisle de Sales,] Dictionnaire de chasse etde pêche, Paris, 1769, E. Blaze, Le chasseur au chien courant, Paris,1838, Adolphe d'Houdetot, La petite vénerie, Paris, 1855, E. Parent,Le livre de toutes les chasses, Paris, 1865.

Cimier 'croupe du cerf, du dain et du chevreuil, qui dans lacurée se donne au maître de l'équipage', J.-J. Langlois, Dictionnairedes chasses, Paris, 1739, [Fr. Lacombe,] Dictionnaire de toutes lesespèces de chasses, Paris, L'an III, L. Bertrand, Dictionnaire des forêtset des chasses, Paris, 1846, A. Pairault, Nouveau dictionnaire deschasses, Paris, 1885.

Cimier 'croupe ou reins des bêtes fauves', [Goury de Champgrand,]Traité de vénerie et de chasses, Paris, 1769; 'train de derrière desgros animaux. On ne dit pas la croupe du cerf mais bien soncimier', [J. La Vallée,] Technologie cynégétique, Paris, [1863].

Cimier 'croupe du cerf, Le Verrier de la Conterie, L'école de lachasse aux chiens courans, Rouen, 1763, La chasse moderne, Encyclo-pédie du chasseur, Larousse, Paris, [1900].

Cimier 'la Croupe du Cerf, qui dans la Curée se donne au Maîtrede l'Équipage', [J. de Seré des Rieux,] Les dons des enfans de Latone,Paris, 1734.

Cimier 'croupe du cerf. Les cimiers sont aussi deux morceauxde chair que l'on coupe sur le cimier de l'animal', Leconte Des-

1 Couard, qui dérive de cauda (cf. coyer, page 6), y est expliqué'cimier'. Le mot se trouve déjà dans le Ménagier de Paris: L'en dit lecouart d'un cerf, II, p. 87 de l'éd. Pichon, cité par Tobler-Lommatzsch, art.coart, et traduit 'Schwanzstück des Hirsches'. Couart y est sans doutesynonyme de cimier.

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graviers, Essai de vénerie ou l'art du valet de limier, Paris, 1810,même définition, sauf le mot aussi, dans d'Yauville, Traité de vé-nerie, Paris, 1788.

Cimier. 'Ne dites pas la croupe, mais dites le cimier d'une bêtefauve. Les cimiers sont deux morceaux de. venaison qu'on lève dela partie supérieure des cuissots d'une bête fauve', Ernest et LéonBellier de Villiers, Le langage de la vénerie, Paris, 1904.

Cimier 'croupe du cerf; on le dit aussi par extension du daimet du chevreuil', E. Le Masson, Nouvelle vénerie normande, Avranches,1841.

On peut donc suivre aisément le développement sémantiquede cimier du sens primitif 'queue' à travers le sens 'la queueet la partie la plus proche du train de derrière de l'animal' pourarriver à celui de 'croupe de l'animal'.

La recommandation des vieux chasseurs de couper le cimier« plus bel qu'il puet », comme dit Hardouin de FontainesGuérin (voir ci-dessus p. 2), a eu pour consequence au coursdes siècles qu'on coupait le cimier de plus en plus grand.

Littre a cherche A mettre cimier en rapport avec cime, sup-posant que le cimier est la partie la meilleure, c'est-à-dire lacime, du cerf. Meyer-Lübke1, Gamillscheg" et F. Kluge3 dériventcimier 'croupe' du moyen haut allemand zimere, qui a le mêmesens. Il faut renoncer définitivement à cette étymologie. C'estau contraire zimere, allemand moderne Ziemer, qui vient du fr.cimier.

Les plus anciens exemples du mot zimere en moyen hautallemand se trouvent dans la traduction d'une œuvre française,Gottfried's von Strassburg Tristan* (vers 1210), qui offre unedéfinition excellente du mot:

den braten, dâ der rucke stiezüber lánken gein dem endewol anderhalber hende,daz die dâ zimere nennent,die den bastlist erkennent,

v. 2900—2904.

1 Rom. etymol. Wörterbuch, art. 9618 a.2 Etymol. Wörterbuch der frans. Sprache.3 Etymologisches Wörterbuch der deutschen Sprache, art. Ziemer.4 Edition R. Bechstein, Leipzig, 1869, Deutsche Classiker des Mittel-

alters, VII—VIII.

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M. Lexer1 traduit cet exemple 'rückenstück des hirsches,ziemer'. *"

Le mot se rencontre une seconde fois dans Gottfried's vonStrassburg Tristan :

die lebere sneit er sunder abe,netz' unde lumbele schiet er dan.die zlmerén er abe gewanvon dem lide, an dem sie was,

v. 2940—43.

Lexer1 traduit ici 'zeugungsglied des hirsches'2, dérivant lemot dans les deux sens du fr. cimier. Wilhelm Hertz3 rend dela même façon le second exemple du mot dans Tristan, rappe-lant que dans la langue des chasseurs allemands Zem'mel, Zäm-mer signifie 'membre du cerf'.4 Nous retrouvons donc pour lemot cimier, comme mot d'emprunt en allemand, le sens 'membreviril' que nous avons constaté en français et qui dérive du sensantérieur 'queue'.

En allemand moderne Ziemer conserve toujours les deuxsens relevés par Lexer:

Ziemer 'hinteres Rückenstück eines Tieres, auch für das Schwanz-stück', 'männliches Glied', H. Paul, Deutsches Wörterbuch; 'Hirsch-oder Rehrücken ohne Keulen; bei Ochsen Schwanzstück', 'Zeugungs-glied des Ochsen oder Hirsches', M. Heyne, Deutsches Wörterbuch;'bei Zerlegung zahmer und wilder Thiere: der Rücken, besondersdes Hinterviertels', 'das männliche Glied grösserer Thiere, besondersdas des Rindes', D. Sanders, Wörterbuch der deutschen Sprache.

Le parallélisme entre fr. cimier et all. Ziemer est donc com-plet, et l'origine française du mot allemand Ziemer est évidente.

1 Mittelhochdeutsches Handwörterbuch, Leipzig, 1878.2 Avant Lexer, Hermann Paul avait dit vaguement [Germania, XVII,

1872, p. 398) que sintere se rapporte à une partie des entrailles.3 Tristan und Isolde von Gottfried vori Strassburg, neu bearbeitet von

Wilhelm Hertz, 6. Auflage, Stuttgart und Berlin, 1911, p. 509.4 La tentative dé Hertz, qui s'appuie sur Zarncke [Germania, XVII,

398, note), de dériver zimere dans ce sens du bas latin cymbalum 'testicule'est vaine. Hertz semble en effet hésiter entre la traduction 'membre' et'testicule', car il rappelle que dans Modus (27, 11) la coulle 'les testicules',de même que zimere dans Tristan, compte parmi les morceaux les- plusfriands du cerf, qui sont mis sur le fourchié (voir p. 6, note 1). Le membreappartenait cependant aussi aux mêmes morceaux. Il était coupé avec lesnombles (Modus, 28, 47—49). Aussi, dans Tristan, lumbele et zimere sont-ils mentionnés en même temps. L'ail, mod. atteste seulement du reste lesens 'membre' de Ziemer.

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10 G. TILANDER

Le mot fr. cimier a été emprunté par la langue allemande commemot de chasse et comme terme de cuisine.

Résumons enfin les données de notre étude. De l'emploide cimier avec rapport à la queue sont sortis deux sens nou-veaux du mot: un.sens erotique 'membre viril' et un sens cyné-gétique et culinaire 'la queue et la partie la plus proche de lacroupe'. Ce dernier sens s'est élargi à celui de 'train de der-rière'. Tous ces différents sens et emplois sont attestés dansles textes.

Gunnar Tilander.

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