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Étude réalisée pour le compte de l’ADEME par Tech2Market, FRD et CVG Coordination technique : Virginie LE RAVALEC – Service Bioressources – Direction Productions et Energies Durables – ADEME Angers PANORAMA DES COPRODUITS ET RESIDUS BIOMASSE A USAGE DES FILIERES CHIMIE ET MATERIAUX BIOSOURCES EN FRANCE Septembre 2015 ANNEXES DU RAPPORT FINAL

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Étude réalisée pour le compte de l’ADEME par Tech2Market, FRD et CVG

Coordination technique : Virginie LE RAVALEC – Service Bioressources – Direction Productions et Energies Durables – ADEME Angers

PANORAMA DES COPRODUITS ET RESIDUS BIOMASSE A USAGE DES FILIERES CHIMIE ET

MATERIAUX BIOSOURCES EN FRANCE

Septembre 2015

ANNEXES DU RAPPORT FINAL

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SOMMAIRE TABLE DES ILLUSTRATIONS ........................... ........................................................................................... 4

CARACTERISATION DES 10 GISEMENTS A PLUS FORT POTENT IEL ................................................... 7

I. Les résidus de cultures agricoles .............. ........................................................................................... 7

II. Les sous-produits viti-vinicoles et coproduits de distillation ................................... ...................... 25

III. Les issues de silos .......................... ................................................................................................... 37

IV. Filière de l’industrie du bois : matières secon daires de l’industrie papetière ................... .......... 46

V. Matières secondaires de la sucrerie : la pulpe d e betterave ....................................... .................... 65

VI. Matières secondaires de la filière corps gras : les coques de tournesol .......................... ........... 80

VII. Matières secondaires animales : sous-produits animaux des catégories 1 et 2 issus de la découpe-abattage et de l'élevage .................. ......................................................................................... 85

VIII. Matières secondaires de la filière éthanol et des autres industries de la fermentation: les vinasses .......................................... ........................................................................................................ 100

IX. Un coproduit de l’estérification des huiles : l e glycérol ........................................ ....................... 113

X. Les déchets bois ............................... ................................................................................................. 120

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TABLE DES ILLUSTRATIONS

Figure 1: Répartition de la biomasse au sein des différents compartiments – Cas des céréales ...................................... 8 Figure 2 : Evaluation des gisements de résidus de culture................................................................................................ 9 Figure 3 : Evaluation des voies de valorisation des résidus de cultures annuelles (Données en Milliers tMS/an)........... 10 Figure 4 : Pouvoir méthanogène des résidus de culture agricoles ................................................................................. 12 Figure 5 : Gisement théorique mobilisable par la méthanisation à l’horizon 2030 .......................................................... 13 Figure 6 : Schéma de la voie thermochimique (Source : Projet BioTfueL) ...................................................................... 14 Figure 7 : Schéma du Procédé Futurol (Source : Projet Futurol) ..................................................................................... 15 Figure 8 : Exemple de projection des besoins en ressource liés au développement de la filière éthanol lignocellulosique en France (Source : Futurol/IFP Energie nouvelle) ......................................................................................................... 16 Figure 9 : Principales valeurs nutritives des pailles (/kg de MS) (sources INRA 2007) ................................................... 17 Figure 10 : Principaux matériaux isolants biosourcés mis en marché ............................................................................. 17 Figure 11 : Schéma de principe de valorisation des cannes de tournesol (Source : Esitpa). .......................................... 19 Figure 12 : Technologie CIMV de séparation et valorisation des biopolymères de la biomasse lignocellulosique (Source : CIMV). .............................................................................................................................................................. 20 Figure 13 : Projet Biocore ................................................................................................................................................ 21 Figure 14 : Procédés de traitement de la filière des distilleries vinicoles et coproduits obtenus ...................................... 26 Figure 15 : Productivité des bois issus de l’entretien et du renouvellement des vignes en France ................................. 27 Figure 16 : Quantités de marcs de raisin et de lies de vin obtenues dans 1 hl de vin (source IFV) ................................. 27 Figure 17 : Proportions de coproduits obtenus à partir des marcs de raisin et des lies de vin (source IFV) .................... 28 Figure 18 : Evaluation de la ressource des coproduits de la distillation ........................................................................... 28 Figure 19 : Répartition du chiffre d’affaires de la filière des distilleries vinicoles françaises en 2012 (hors aides publiques) selon source IFV ............................................................................................................................................ 29 Figure 20 : Marcs de raisin et lies de vin : statut de sous-produits ou déchets ? (source IFV) ........................................ 30 Figure 21 : Valorisation des coproduits de la distillation .................................................................................................. 31 Figure 22 : Pouvoir méthanogène des coproduits viti-vinicoles ....................................................................................... 32 Figure 23 : Schéma d’économie circulaire : Les distilleries vinicoles en tant que bioraffineries (source UNDV) ............. 34 Figure 24 : Evaluation des gisements de coproduits viti-vinicoles ................................................................................... 35 Figure 25 : Comporte Champenoise développée par la société Ecocep à partir de ceps de vigne ................................. 36 Figure 26 : Principaux ratios de production d’issues de silos identifiés ........................................................................... 39 Figure 27 : Evaluation des gisements d’issues de silos ................................................................................................... 39 Figure 28 : Principales caractéristiques des issues de silos ............................................................................................ 40 Figure 29 : Évaluation des voies de valorisation des issues de silos ............................................................................... 40 Figure 30 : Estimation des gisements potentiels de substrats utilisables en méthanisation ............................................ 42 Figure 31 : Concept du projet Funkifibre.......................................................................................................................... 44 Figure 32 : Procédé Kraft et matières secondaires associées. Ratios de pâte et de matières secondaires générées à partir de 1 tonne de bois et composition chimique (schéma adapté d’après le cours « Bioproduits » de l’INP Pagora, 2012) ............................................................................................................................................................................... 48 Figure 33 : Procédé Bisulfite et coproduits associés. Ratios de pâte et de matières secondaires générées à partir d’1 tonne de bois (source TEMBEC). .............................................................................................................................. 49 Figure 34 : Matières secondaires générées en fonction du procédé de fabrication des pâtes de cellulose Nota : Seules les boues d’épuration ont été considérées dans ce rapport et non les boues de désencrage issues du recyclage du papier ......................................................................................................................................................... 50 Figure 35 : Localisation des usines produisant des pâtes de cellulose en France .......................................................... 51 Figure 36 : Production française de pâte de cellulose en 2014 (Source : FRD / COPACEL, entretiens et analyse bibliographique) ................................................................................................ 51 Figure 37 : Production annuelle française en matières secondaires de l’industrie papetière (unité en tonnes) ............... 52 Figure 38 : Répartition de la production annuelle française de coproduits de l’industrie papetière en volume en tMB (2014) .............................................................................................................................................................................. 53 Figure 39 : Schéma de synthèse des matières secondairesde l’industrie papetières et de leurs principales voies de valorisation actuelles ....................................................................................................................................................... 58 Figure 40 : Synthèse chiffrée des valorisations des matières secondaires de l’industrie papetière (unités en tonne) ..... 59 Figure 41 : L’industrie papetière comme bioraffinerie. Diversité des applications possibles à partir des composés du bois séparés ............................................................................................................................................................................ 63 Figure 42 : Evaluation des différents gisements de déchets de bois en 2012 (en millions de tonnes) .......................... 122 Figure 43: Représentation schématique des différentes typologies d'installations classées ......................................... 124 Figure 44: Répartition des flux entre gisement disponible et voies de valorisations/traitements/stockages .................. 126

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GLOSSAIRE ACV : Analyse de Cycle de Vie ADEPALE : Association Des Entreprises de Produits ALimentaires Elaborés AOC : Appellation d’Origine Contrôlée ATLA : Association de la Transformation Laitière Française ATM : Animaux Trouvés Morts (avant abattage) BIBE : Bois d’Industrie et Bois Energie BIP : Bioressources Industries et Performance BO : Bois d’Œuvre BtL : Biomass to Liquid BPV : Boulangerie, Pâtisserie et Viennoiserie CNC : Comité National de la Conchyliculture CNIEL : Centre National Interprofessionnel de l'Economie Laitière CNP : Comité National de la Pêche CNPMEM : Comité national des pêches maritimes et des élevages marins CRE : Commission de Régulation de l’Energie CSR : Combustibles Solides de récupération CUMA : Coopératives d'utilisation de matériels agricoles DD(ec)PP : Direction départementale en charge de la protection de la population DCO : Demande Chimique en Oxygène DCT : Déchets de Cuisine et de Table DIB : Déchets industriels Banals DLC : Dates Limites de Consommation EHA : Esters d’Huiles Animales EHV : Esters d’Huiles Végétales ENIL : Ecole Nationale d'Industrie Laitière ENSAIA : Ecole Nationale Supérieure d'Agronomie et des Industries Alimentaires ESB : Encéphalopathie Spongiforme Bovine ESST : Encéphalopathie Spongiforme Subaigüe Transmissible EST : Encéphalopathie Spongiforme Transmissible FCR : Fibres Cellulosiques de Recyclage FIAC : Fédération française des Industries d’Aliments conservés FRCA : Fédération Régionale des Coopératives Agricoles FUI : Fond Unique Interministériel FFOM : Fraction Fermentescible des Ordures Ménagères GIPT : Groupement Interprofessionnel pour la Valorisation de la Pomme de Terre GMS : Grande et Moyenne Surface GNS : Gaz Naturel de Synthèse HACCP: Hazard Analysis Critical Control Point HAU : Huiles Alimentaires Usagées HCU : Huiles de Cuisson Usagées HT : Hors Taxes IAA : Industrie Agro-Alimentaire ICPE : Installations Classées pour la Protection de l’Environnement IFN : Inventaire Forestier National IFP : Institut Français du Pétrole IFVV : Institut Français de la Vigne et du Vin IGP : Indication Géographique Protégée ISDND : Installation de Stockage de Déchets Non Dangereux LMR : Limites Maximales des Résidus MAAF : Ministère français de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt MAI : Matières Animales Infectieuses MB : Menu Bois MDF : Medium Density Fiberboard MP : Matière première MPR : Matières Premières Recyclées MRS : Matières à Risque Spécifié MS : Matières sèches

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MTD : Meilleures Technologies Disponibles NFM : Normandie Fraîcheur Mer ND : Non Déterminé NRS : Non RenSeigné OCM : Organisation Commune de Marché OD : Obligation de débarquement OFIMER : Office national Interprofessionnel des produits de la MER et de l’aquaculture OMR : Ordures ménagères résiduelles ONF : Office National des Forêts ONRB : Observatoire National des Ressources en Biomasse PAT : Protéines Animales Transformées (qualifiées couramment de « Farines animales ») PAV : Point d’Apport Volontaire PCI : Pouvoir Calorifique Inférieur PCP : Politique Commune de la Pêche PCS : Produits Connexes de Scierie PSDR : Programme de recherche pour et Sur le Développement Régional PIPAME : Pôle Interministériel de Prospective et d’Anticipation des mutations économiques REP : Responsabilité Elargie du Producteur RMT : Réseaux Mixtes Technologiques SBP : Sirops de Basse Pureté de cristallisation, coproduits de sucrerie liquides riches en saccharose. SBP2 : Il s’agit des sirops de basse pureté de deuxième jet de cristallisation. SBP3 : Il s’agit des sirops de basse pureté de troisième jet de cristallisation. Sous forme concentrée, ils sont aussi dénommés mélasses. SIFCO : Syndicat des Industries Françaises des Coproduits animaux SIVU DECOMY : Syndicat Intercommunal à Vocation Unique des Déchets Conchylicoles et Mytilicoles SPA : Sous-Produits Animaux au sens de la règlementation (règlement 1069/2009) SSD : Sortie de statut de déchet STEP : Station d’épuration TDU : Terres de Décoloration Usagées TGAP : Taxe générale sur les activités polluantes TIAC : Toxi-Infections Alimentaires Collectives TMB : Tri mécano-biologique TWU : Terres de Wintérisation Usagées UE : Union Européenne UIOM : Unité d’Incinération d’Ordures Ménagères UNIP : Union Nationale Interprofessionnelle des plantes riches en Protéines ZES : Zone d’Excédent Structurel

ABREVIATIONS GWh : GigaWatt heure HA/ha : Hectare(s) KT/kt : Kilotonne(s) soit 1 000 tonnes MB : Matière Brute M€ : Millions d’euros Mha : Million d’hectares Mhl : Million d’hectolitres Mm3 : Million de mètre cube MO : Matière Organique MS: Matière Sèche Mtep : Million de tonnes équivalent pétrole MT/Mt : Million de tonnes soit 1 000 000 tonnes MWh : Méga Watt heure tec : tonnes d’équivalents carcasse TEP : Tonne Equivalent Pétrole T/t : Tonne(s) tMB : tonne de Matière Brute tMO : tonne de Matière Organique tMS : tonne de Matière Sèche

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CARACTERISATION DES 10 GISEMENTS A PLUS FORT POTENT IEL

I. Les résidus de cultures agricoles

Contexte et chiffres clés - Définition du gisement

Cette ressource est constituée des parties résiduelles des plantes après récolte des grains. En croisant les différentes études analysées elle recouvre1 2 :

o Les pailles 3 de céréales (hors maïs) : blé, orge, avoine, riz, triticale… Ces résidus sont en général soit broyés et laissés au sol, soit exportés des parcelles pour servir de litière aux animaux ou plus occasionnellement d’alimentation animale, de combustible ou de matériaux.

o Les menues pailles qui sont composées des débris des céréales à paille formés lors de la récolte (paille hachée, balles, barbes) ainsi que des adventices présentes dans le champ. Elles sont laissées au champ lors de la récolte, mais peuvent être ramassées avec un outil adapté.

o Les cannes de maïs . Les cannes de maïs grain sont généralement broyées et enfouies à la parcelle.

o Les pailles d’oléagineux : colza, tournesol, soja, lin oléagineux… Ces résidus sont généralement broyés et laissés au sol, mais ils pourraient être exportés après fauchage pour les mêmes valorisations que les pailles de céréales.

o les pailles de protéagineux (pois, féverole…) qui sont très rarement prises en compte dans l’évaluation de cette ressource, alors même qu’elles sont considérées et préconisées comme un bon aliment du bétail en substitution des fourrages en période de pénurie, selon l’Institut de l’élevage ou l’UNIP 4 .

o Les fanes de betteraves sucrières . Elles correspondent aux feuilles, généralement laissées au champ lors de la récolte des racines.

- Acteurs et chaîne de valeur associée

Les acteurs concernés sont :

o les agriculteurs producteurs de paille et coopératives (CUMA,…). o les entrepreneurs de travaux agricoles ou négociants qui récoltent, pressent, stockent et

transportent la paille. Sachant que ces opérations peuvent également être assurées par des agriculteurs (producteurs ou acheteurs de paille).

o les utilisateurs que sont les éleveurs à des fins de paillage des litières ou d’alimentation animale, les exploitants de chaufferie à des fins de combustion et/ou cogénération ou les industriels de la production de matériaux (fabricants d’isolants, producteurs de panneaux de particules, producteurs de liants pour bétons, préfabriquants, industriels de la plasturgie…).

Selon Coopénergie, une fois la moisson réalisée et le grain récolté, la paille est soit directement broyée et ré-enfouie, soit laissée au champ, mise en andains (petits amas de paille), pour être ensuite travaillée par pressage pour former des balles de paille (surpressées rectangulaires ou rondes). Suite au pressage, une fraction non mobilisable (les menues pailles - débris de paille et enveloppes des

1 « L’observatoire national des ressources en biomasse. Evaluation des ressources disponibles en France », FranceAgriMer, 2012. 2 « Estimation des gisements potentiels de substrats utilisables en méthanisation », Etude réalisée par Solagro et Inddigo pour le compte de l’ADEME, 2013. 3 La menue paille est produite lors de la moisson. A la récolte des céréales, les glumes, petites pailles et autres menus déchets sont renvoyés sur les côtés de la moissonneuse et dispersés dans le champ. Elle est généralement laissée au sol après la moisson. Grâce à la technologie développée par les établissements Thierart depuis une dizaine d’année, la menue paille peut être sortie des champs aujourd’hui, ce qui ouvre de nouveaux débouchés à cette biomasse issue des grandes cultures. 4 Source : http://www.unip.fr/qualite-et-utilisation/utilisation-en-elevage/pailles-de-proteagineux.html

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grains - et les chaumes - partie basse de la tige de paille, non coupée) soit reste sur place pour contribuer au retour nécessaire de matières organiques aux sols, soit est exportée. Les balles de paille sont stockées pour être commercialisées. Les filières de mobilisation de cette ressource sont aujourd’hui organisées pour les 2 principales voies de valorisation que sont le retour au sol et la satisfaction des besoins de l’élevage. Faute de marché organisé durablement dans le temps, elles sont considérées par les experts interrogés comme non structurées pour faire face à une mobilisation significative en réponse à une demande industrielle d’envergure dans le domaine des biocarburants de 2ème génération ou des matériaux par exemple. S’il existe de fait une chaîne logistique de collecte de paille de céréales qui reste à organiser / optimiser, force est de constater qu’elle est aujourd’hui balbutiante pour le colza ou le lin oléagineux, en phase de création pour la menue paille suite à l’innovation mise en place il y a une dizaine d’années par la société Thierart et reprise par d’autres opérateurs depuis, et est à créer dans le cadre des cannes de tournesol ou de maïs.

- Chiffres clés et volumes générés Ces pailles sont produites sur des surfaces conséquentes. Selon les déclarations PAC pour la campagne 2013 « les céréales couvrent 18 % de la surface agricole utile française. La céréale la plus cultivée est le blé tendre (5 millions d’hectares), suivie du maïs (3,3 millions d’hectares), de l’orge (1,6 millions d’hectares) et du blé dur (0,3 millions d’hectares). Les oléagineux (colza, tournesol, soja, lin) couvrent 2,2 millions d’hectares. Le colza est l’oléagineux le plus cultivé suivi par le tournesol »5.

o Pour les céréales , selon l’ONRB, « le volume de pailles est estimé entre 8 et 10 tMS/ha selon l’espèce. Il est considéré qu’un peu plus de la moitié des pailles est récoltable et que le retour au sol minimum permettant le maintien du potentiel agronomique est de 40 % du volume récoltable ». Pour Solagro/Inddigo, il est préconisé un retour au sol de 50 % de la matière organique produite par l’ensemble de la plante (de la racine aux graines) afin de préserver l’activité biologique du sol, en tenant compte du retour au sol des litières animales.

Compartiment Tonnage produit (tMS/ha) Devenir

Grain 7 Exportation systématique Menue paille 1,5 Retour au sol (majoritaire) Paille 4 Utilisation partielle Chaume 2

Retour au sol systématique Racines 2 Total 16,5

Figure 1: Répartition de la biomasse au sein des différents compartiments – Cas des céréales6

o Pour les menues paille de céréales , le volume de biomasse potentiellement récoltable est compris selon les sources entre 1,5 (Solagro) et 1,8 tMS/ha (Coopénergie)7. La technologie développée par les établissements Thiérart, datant de moins de 10 ans est actuellement en plein essor, mais de fait les volumes exportés sont à ce jour très faibles et peuvent être considérés méthodologiquement comme non significatifs.

o Pour le maïs , le volume de cannes est estimé à 3 tMS/ha, selon l’ONRB. Seules les surfaces implantées en maïs doux ou en maïs destiné à être récolté comme maïs grain sont pris en compte dans le calcul. Le taux de retour au sol est estimé à 50 %.

o Pour les oléagineux , le volume de paille varie entre 0,6 et 1,2 tMS/ha selon l’ONRB. Cette

estimation tient compte des importantes pertes de matière qui ont lieu lors des opérations de fauchage. Il correspond donc au volume de paille récoltable par hectare, une fois le retour au sol déduit.

5 « L’observatoire national des ressources en biomasse. Evaluation des ressources disponibles en France », FranceAgriMer, 2012. 6 « Estimation des gisements potentiels de substrats utilisables en méthanisation », Etude réalisée par Solagro et Inddigo pour le compte de l’ADEME, 2013. 7 Source Coopénergie : 2 tMB/ha, à 8 à 12 % d’humidité, soit 1,8 tMS/ha.

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o Pour les protéagineux , le volume de paille varie entre 1,5 à 3 tMS de paille récoltables selon

l’UNIP 8. FranceAgriMer est en train de faire évoluer l’ONRB pour prendre en compte cette ressource et retient un rendement hectare de 2,8 tMS.

o D’après l’étude Solagro/Inddigo 2013, le volume de fanes de betteraves sucrières peut être

estimé à 4,8 tMS/ha (30 tMB à 16 % d’humidité), pour une surface totale de 400 000 ha d’après le Recensement Agricole 2010. Elles sont généralement laissées au champ lors de la récolte des racines. Etant la seule source de matière organique, le taux de mobilisation de cette ressource est de fait fortement conditionné par le maintien de l’état organique des sols.

Sur la base de ces hypothèses, le Volume Total Produit de résidus de cultures annuelles est évalué de la manière suivante :

Ressources Unité Volume

Total Produit

Source des données Période de référence

Pailles de céréales

Milliers tMS/an

73 407 ONRB, 2015 2013

Menues Pailles de céréales 12 9609 Calculé d’après Solagro/Inddigo 2013

2010

Canne de maïs 10 832 ONRB, 2015 2013 Pailles d’oléagineux 2 794 ONRB, 2015 2013 Pailles de protéagineux 340 ONRB, 2015 2013

Fanes de betteraves sucrières 1 92010 Calculé d’après Solagro/Inddigo 2013

2010

Total 100 253

Figure 2 : Evaluation des gisements de résidus de culture

- Réglementation et impacts sur la filière Les réglementations identifiées portent principalement sur les conditions de :

o brûlage des pailles au champ, o transport des pailles, o stockage des pailles, o et de combustion dans des installations de type chaudière/cogénération.

Les bonnes conditions agricoles et environnementale s (BCAE) imposent le non-brûlage des résidus de culture pour préserver la matière organique des sols et éviter leur appauvrissement . Ainsi les agriculteurs qui demandent les aides de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune sont tenus, au titre de la conditionnalité des aides, de ne pas brûler les résidus de paille ainsi que les résidus des cultures d'oléagineux, de protéagineux et de céréales. Le brûlage des résidus de paille ou de cultures est autorisé uniquement par dérogation préfectorale, lorsque ce dernier s'avère nécessaire pour des motifs agronomiques ou sanitaires. Le transport des pailles est réglementé que ce soit au niveau des agriculteurs ou des transporteurs routiers. Par exemple, la réglementation encadrant le transport de pailles au moyen de véhicules agricoles ne diffère pas fondamentalement des règles de circulation routière s'appliquant en général aux véhicules agricoles. Mais ces règles sont nombreuses : définition des remorques et semi-remorques agricoles, exigences de permis de conduire, règles de conduite d'un convoi, dimension du convoi, poids total roulant autorisé, éclairage et signalisation, qualité des pneumatiques, distances entre les trains de convois, limites géographiques de circulation… Le stockage des pailles est également réglementé à chacune de ces étapes clés (confection de meule au champ, stockage intermédiaire et stockage final) et est soumis à la réglementation des Installations Classées pour la Protection de l’Environnement

8 Source : http://www.unip.fr/qualite-et-utilisation/utilisation-en-elevage/pailles-de-proteagineux.html 9 1,6 tMB/ha à 10 % d’humidité sur une surface de 9 000 000 ha d’après le Recensement Agricole 2000 10 30 tMB/ha à 16 % d’humidité sur une surface de 400 000 ha d’après le Recensement Agricole 2000

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Enfin, il existe une réglementation relative aux émissions atmosphériques liées à la combustion de céréales, fonction de la capacité nominale des inst allations 11 : Conclusions et enseignements : Les résidus de cultures agricoles sont les parties résiduelles des plantes après récolte du produit principal (graine, racine). Les principaux résidus sont les pailles de céréales et oléagineux, les cannes de maïs et les fanes de betteraves sucrières.

Selon les études exploitées, le volume total produit est de l’ordre de 100 millions de tMS/an, très majoritairement issu des pailles de céréales (à 73 %) et des menues pailles de céréales (à 13 %).

La structuration des filières de récolte de ces matières secondaires si elles sont suffisantes pour les principales valorisations que sont le retour au sol où les besoins de l’élevage, sont jugées par les experts de la filière « déficientes » pour des besoins industriels d’envergure dans le domaine des biocarburants de 2ème génération ou des matériaux notamment. Caractérisation des différentes voies de valorisati ons 5 voies de valorisation sont identifiées à ce jour, par ordre décroissant d’importance en volume :

o Valorisation agronomique : retour au sol / maintien de la fertilité des sols, o Besoins de l’élevage : (1) Litières à destination de l’élevage bovin, porcin, ovin, caprin et

avicole et (2) alimentation animale, o Valorisation énergétique : combustion/cogénération, méthanisation, biocarburant 2ème

génération (2G), o Valorisation matériaux : isolant vrac et assimilé, isolant souple.

A noter qu’il existe un marché ponctuel valorisant les pailles des céréales dans le domaine des champignonnières, qui ne sera pas abordé dans la présente étude, faute de données disponibles. La valorisation de ces résidus est répartie différemment suivant la ressource concernée :

Ressources

Volume Total Produi

t

Valorisation agronomiqu

e

Usage élevag

e

Valorisation

énergétique

Valorisation matériau

Volume supplémentaire disponible

Source des

données

Période de

référence

Pailles de céréales 73 407 49 183 22 724 nrs 3 1 497 1 2013

Dont Menues

pailles 12 960 12 960 ε ε - nrs 2 2010

Canne de maïs 10 832 5 416 - ε - 5 416 1 2013

Pailles d’oléagineux

2 794 1 397 - ε ε 1 397 1 2013

Pailles de protéagineux

340 340 ε - - - 1 2013

Fanes de betteraves sucrières

1 920 1 920 - - - - 2 2010

Total 100 253 58 256 77

5294 nrs 3 8 310

Sources: 1 = ONRB, 2015 ; 2 = Calculé d’après Solagro/Inddigo 2013 Figure 3 : Evaluation des voies de valorisation des résidus de cultures annuelles (Données en Milliers

tMS/an) 11 « Etude bibliographique sur la combustion de produits issus de cultures annuelles (blé, paille, maïs) », ADEME.

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Septembre 2015

Panorama des coproduits et résidus biomasse à usage des filières chimie et matériaux biosourcés en France 11

- Valorisation agronomique (58 %). o Une partie significative de la ressource n’est physiquement pas accessible pour être récoltée

et reste de fait au champ (45 % dans le cas des pailles de céréales, selon l’ONRB). o En complément, une partie significative des pailles récoltées retournent au sol afin de

maintenir leur fertilité et en particulier le taux de matière organique. Le taux de retour au sol retenu par l’ONRB est de 40 % pour les pailles de céréales et 50 % pour les cannes de maïs. Sur les pailles de protéagineux qui sont en train d’être intégrées dans l’ONRB, le taux de retour au sol retenu est de 100 %. En effet, l’un des intérêts majeurs des protéagineux est leur teneur en azote intéressante valorisée tout particulièrement dans le cadre de l’enfouissement des pailles.

o Ce sont ainsi 58 256 milliers tMS/an qui sont valorisées, soit 58 % du volume total produit.

- Besoin de l’élevage (22 %). o Le 2ème mode de valorisation par ordre d’importance est la fourniture de paille pour les besoins

de l’élevage en France (litière + alimentation du bétail), pour un total de 22 724 tMS/an, soit 22 % du volume total produit. Il s’agit quasi exclusivement de pailles de céréales, les pailles de colza ou de protéagineux étant utilisées très ponctuellement sans que la réalité des volumes concernés puisse être évaluée

- Valorisation énergétique (volumes faibles non estimés > 1 % ?). 3 types de valorisations énergétiques sont envisageables en matière de combustion/cogénération, de méthanisation et de biocarburant de 2ème Génération (2G)

Combustion/cogénération. o Avec un PCI moyen de 4 MWh/tonne12 , les pailles peuvent être utilisées directement en

combustion ou servir à la fabrication de granulés de chauffage. Elles sont valorisées seules ou dans le cadre de mix de ressource (avec du bois par exemple) ou de chaudières à foyers polycombustibles afin de « lisser » les problèmes généralement induits (mâchefer, taux de cendres, corrosion des fumées…).

o De très nombreuses études ont été réalisées afin d’estimer le gisement disponible de paille de céréales pour des usages énergétiques tout particulièrement à un niveau national (cf. projets Regix, Lidea, Cartofa) ou régional (cf. projet Cartopaille13).

o Des projets de recherche comme le projet Bran Blending14 ont permis d’identifier les matières secondaires les plus pertinentes pour une valorisation énergétique en granulés (pellets), dont les granulés issus de pailles (céréales, riz, colza...) et travaillent à la réalisation de mix permettant d’optimiser les performances des différentes ressources disponibles. La normalisation récente de ces « agro pellets » (EN 14961-6 et ISO 17225-6) permet de disposer de seuils pertinents selon l’ADEME de combustion efficiente et de seuils acceptable en azote et chlore, notamment.

o Des initiatives ponctuelles ont permis de commencer à structurer la production de paille de céréales pour la combustion. On peut par exemple citer les cas d’école de :

� Coopenergie15 (Picardie), qui est une union de coopératives dédiée à la fourniture de biomasse agricole et forestière à destination des projets Energie / Chimie / Matériaux, créée en 2006 à l’initiative de la Fédération Régionale des Coopératives Agricoles de Picardie (FRCA). Elle contribue ainsi à l’émergence de projets de valorisation non alimentaire de la biomasse sur le territoire couvert par ses coopératives et à construire l’approvisionnement durable de ces projets.

� AgroEnergie16 (21), qui est une Sarl, créée en 2002, dont l'activité est de produire et de vendre de l'énergie à partir de pailles de céréales. Cette société a construit une

12 Source Coopénergie 13 Source : http://coopenergie.com/fichescoop/Le_disponible_paille_en_Picardie.pdf 14 « Bran Blending : Développement de biocombustibles standardisés à base de matières premières agricoles et à faible taux d’émissions – Rapport final », ADEME, 2013. 15 http://coopenergie.com/ 16 http://www.bourgogne.ademe.fr/sites/default/files/files/M%C3%A9diath%C3%A8que/Publications/Mati%C3%A8res%20et%20%C3%A9nergies%20renouvelables/pub_chaufferie_paille_bois.pdf

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usine et un réseau de production de chaleur à destination du CEA Valduc. La chaufferie de 5 MW, mobilise un approvisionnement annuel de 6 000 tonnes de paille et 4 000 tonnes de bois. AgroEnergie a signé un contrat de 12 ans, par lequel le CEA s'engage à acheter 20 400 MWh par an minimum à un prix défini et révisable en fonction de différents paramètres. Pour assurer une partie de l’approvisionnement, AgroEnergie a passé des contrats de fourniture sur trois années avec sept exploitations locales, ce qui correspond à l’équivalent de 2 000 ha de blé et d’orge.

� SEM Energie (10), dont la vocation depuis 1989 est de produire et de distribuer de l’énergie sous forme de chaleur et d’électricité sur l’agglomération Troyenne. En 2013, la Sem Energie a inaugurée une chaufferie biomasse ayant pour combustibles le bois et la paille. D’un coût de 7 M€, cette installation est équipée d’une chaudière paille de 3,3 MW et d’une chaudière bois de 4,5 MW qui permet de produire 65 % de l’énergie totale du réseau de chaleur couvrant les besoins de l’équivalent de 4 500 logements. Elle devrait consommer à terme 5 700 tonnes de paille par an.

o Il n’existe pas d’estimation des volumes de pailles et menues pailles valorisées en

combustion/cogénération. Il existe un très fort consensus des Experts pour considérer que les volumes de paille valorisés dans cette voie sont faibles et non significatifs comparé à l’ensemble des volumes de pailles produites. On peut sans doute avancer que le total de paille consommé est > 1 % du volume total produit.

o A noter, qu’aucun des projets de cogénérations d’envergure déposés successivement dans le

cadre des appels d’offre de la Commission de Régulation de l’Energie (CRE), ne se sont concrétisés à ce jour, alors qu’ils portaient pour la plupart sur des besoins unitaires compris globalement entre 50 et 100 000 tMB de paille annuellement. Les producteurs d’énergie ont été globalement échaudés par leur difficulté à accéder à cette ressource (les prix augmentant au fur et à mesure de l’élaboration des projets ou les intentions de cession de paille étant significativement inférieures aux montants annoncés…). Ils ont préféré se concentrer sur des projets à base de bois énergie, jugés « moins complexes » à appréhender.

Méthanisation. o Au vu des travaux et études réalisés, ces résidus de cultures sont également potentiellement

valorisables en méthanisation. Ils sont néanmoins dotés d’un pouvoir méthanogène très variable d’un type de résidu à l’autre, oscillant entre 117 m3 CH4/tMS pour la paille de colza et 275 m3 CH4/tMS pour les fanes de betterave.

Ressources %MS/MB %MO/MS m3 CH4/tMB m3 CH4/tMS

Pailles de céréales 88 % / 194 221 Menues pailles 88 % / / 210 Cannes de maïs 88 % / 214 243 Pailles de colza 88 % / 103 117 Cannes de Tournesol 88 % / 223 253 Fanes de betteraves sucrières 16 % 78 % 45 275

Figure 4 : Pouvoir méthanogène des résidus de culture agricoles 17

o Ce mode de valorisation est encore balbutiant en France (90 unités de méthanisation agricole en fonctionnement fin 2012), mais bénéficie du fort soutien des pouvoirs publics dans le cadre du plan EMAA (Energie Méthanisation Autonomie Azote) de mars 2013 qui rappelle l’objectif ambitieux de 1 000 installations en 2020.

17 « Estimation des gisements potentiels de substrats utilisables en méthanisation », Etude réalisée par Solagro et Inddigo pour le compte de l’ADEME, 2013.

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© Arvalis-Institut du Végétal

o Sous réserve que ce plan d’action se concrétise et se poursuive dans la durée, selon l’étude

Solagro/Inddigo à l’horizon 2030 : � Une fois la paille valorisée en litière animale, 30 % du gisement net disponible de

pailles de céréales serait potentiellement mobilisable pour la méthanisation � 10 % du gisement des autres résidus de culture, serait également mobilisables pour

cet usage. Cette ressource est en effet limitée de fait, la structuration des filières de collecte liées nécessitant des efforts très importants que ce soit en matière d’organisation ou d’investissement.

Les projections d’utilisation de pailles de céréales, reposent sur une utilisation des litières animales, incorporées avec les déjections dans les flux à destination de la méthanisation. Il ne s’agirait donc pas d’un nouveau besoin, mais d’une nouvelle utilisation en « fin de vie » d’un gisement existant (« besoin de l’élevage ») compatible macroéconomiquement avec les flux actuels (22 millions tMS). Les projections d’utilisation des autres résidus de culture reposent sur de nouveaux besoins de prélèvement sur la ressource. Ils sont globalement cohérents avec les volumes supplémentaires disponibles, sauf pour les menues pailles retournant actuellement au sol très majoritairement, faute de disposer de filières organisées de collecte.

Ressources Taux de mobilisation

Gisement théorique mobilisable en 2030

Milliers tMB/an Milliers tMS/an

Pailles de céréales 1 30 % 8 900 7 830 Menues pailles 1 10 % 1 440 1 260 Cannes de maïs 1 10 % 530 460 Pailles de colza 1 15 % 470 415 Cannes de Tournesol 1 5 % 100 90 Fanes de betteraves sucrières 2 15 % 1 800 290 Total 13 240 10 345

Taux d’humidité : 1 = 12 % ; 2 = 84 %

Figure 5 : Gisement théorique mobilisable par la méthanisation à l’horizon 2030 18

Biocarburant 2G. o Ils font l’objet en France (et au niveau mondial) de plusieurs projets préindustriels dans le

cadre de programmes de R&D, et des premiers pilotes sont en phase de construction. Les technologies privilégiées en France portent tout particulièrement sur :

� Le BtL (Biomass to-Liquids) : biocarburant lignocellulosique le plus couramment envisagé pour les véhicules diesel. C’est un gazole de de synthèse de très bonne qualité pouvant être incorporé à des taux élevés dans un réservoir classique. Le procédé utilisé permet également la production de kérosène de synthèse pour l’aviation.

18 « Estimation des gisements potentiels de substrats utilisables en méthanisation », Etude réalisée par Solagro et Inddigo pour le compte de l’ADEME, 2013.

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En France, cette technologie est développée dans le cadre du projet BioTfueL associant 6 partenaires au sein de Bionext SAS (Axens, IFP Energies nouvelles, Avril, ThyssenKrupp Industrial Solutions et Total).

Le process repose sur les principes suivants : après avoir été torréfiée, la biomasse est gazéifiée. Les gaz de synthèse produits sont purifiés, puis transformés en mélange d’hydrocarbures, prêts à devenir du carburant. Le procédé BioTfuel mis en œuvre se décompose en quatre étapes :

1. La biomasse subit d’abord un prétraitement (séchage, broyage et torréfaction) sur le site Avril à Compiègne. La torréfaction constitue l'un des verrous technologiques du programme, car peu d'applications industrielles de grande capacité existent à l'heure actuelle et aucune pour alimenter un gazéifieur.

2. La poudre obtenue est transportée sur le site de Total, près de Dunkerque. Elle y est transformée en gaz de synthèse dans un gazéifieur. Pour cela, elle est portée à très haute température (entre 1 200 et 1 600 °C), en présence d'une faible quantité d’oxygène.

3. Il est ensuite nécessaire de purifier le gaz obtenu. Une autre étape qui n’a encore jamais été mise à l’œuvre à l’échelle industrielle, en vue de la pureté requise en conversion Fischer-Tropsch.

4. La conversion finale en biocarburant se fait par un procédé bien maîtrisé, la synthèse de Fischer-Tropsch.

Figure 6 : Schéma de la voie thermochimique (Source : Projet BioTfueL)

L’objectif est d’optimiser ces procédés déjà utilisés pendant la Seconde Guerre mondiale, de les adapter à une plus grande échelle industrielle, de rechercher des technologies flexibles adaptées à toutes sortes de biomasse, de mettre au point une chaîne logistique dédiée, de fiabiliser / rentabiliser l’ensemble du concept et d’en améliorer le bilan environnemental. La phase de développement est d’achèvement des tests des procédés est annoncée pour fin 2019, pour une commercialisation de biogazole et de biokérosène à l’horizon 2025.

� Le bioéthanol est le principal substitut à l’essence. C’est de l’éthanol lignocellulosique produit par la voie biochimique. Il s’agit du même produit que l’éthanol actuellement commercialisé, seule la ressource et les premières étapes de traitement de celle-ci diffèrent.

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En France, cette technologie est développée dans le cadre du projet Futurol associant 11 partenaires : ARD, la CGB, Vivescia, le Crédit Agricole du Nord-Est, l’IFP Energie Nouvelle, l’INRA, Lesaffre, l’ONF, Tereos, Total et Unigrains. Le projet est porté par la SAS Procéthol 2G.

La lignocellulose subit d’abord un prétraitement physico-chimique, puis une suite de traitements biologiques utilisant des enzymes et des microorganismes : hydrolyse de la lignocellulose en sucres simples (hexoses et pentoses) par des enzymes de champignons, fermentation des sucres en éthanol par des levures.

Figure 7 : Schéma du Procédé Futurol (Source : Projet Futurol)

L’objectif est de développer puis valider un procédé « éco-efficient » permettant de produire du bioéthanol à partir de la biomasse lignocellulosique, ce qui demande de produire de l’éthanol à un prix compétitif grâce à une matière première diversifiée (résidus et coproduits agricoles, biomasse forestière, cultures dédiées …) , de développer des technologies d’extraction de la cellulose, de mettre au point des procédés les mieux adaptés à chaque configuration de matières premières et d’obtenir les meilleurs bilans environnementaux sur l'ensemble de la filière de production.

Le pilote de Pomacle-Bazancourt a permis au projet de valider en situation réelle les résultats développés en laboratoire et de définir les conditions d'extrapolation à échelle industrielle. En jeu notamment : un prétraitement adapté à une grande variété de biomasses afin de rendre le procédé utilisable dans le maximum de pays, la production intégrée d'enzymes et de levures à même de transformer tous les sucres fermentescibles de ces biomasses lignocellulosiques en éthanol, et le recyclage de la lignine comme source d'énergie de l'usine. Futurol entre désormais dans sa phase d'essais industriels, avec le début de la construction d'une unité de prétraitement de la biomasse sur le site de la distillerie Tereos de Bucy (Aisne), qui doit être mise en service début 2016. Elle permettra de traiter de la paille, du bois et du miscanthus.

o Au niveau de la biomasse, le développement de la Biomasse 2G pose selon l’INRA la question

de : � La création de valeur pour l’agriculture et la forêt, � La mobilisation de biomasses adaptées à chaque usage et bien insérées dans les

systèmes de production, � La mobilisation de ressources nouvelles, avec une efficacité élevée par unité de sol

mobilisée, face à une ressource limitée, � L’optimisation des flux logistiques (prétraitement, densification, localisation) permettant

l’approvisionnement opérationnel de sites industriels, de l’ordre de 160 000

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tonnes/usine/an pour le bioéthanol et de l’ordre 1 000 000 tonnes/an sur le site de Dunkerque pour le biodiesel.

Des programmes de recherche conséquents ont été engagés en France sur ce sujet dans le cadre des projets BioTfueL ou Futurol tout particulièrement. En conclusions des premiers travaux conduits par l’INRA dans le cadre du projet Futurol :

� Le prix des ressources et la concurrence entre filières apparaissent comme des facteurs majeurs de décision,

� Les pailles sont une ressource incontournable des approvisionnements des unités de biocarburant 2G, mais leur disponibilité n’apparaît pas suffisante pour approvisionner seules les projets à venir,

� Le développement des cultures dédiées de type miscanthus est fonction de sa compétivité vis-à-vis des résidus de cultures et cultures à valeurs ajoutées (pommes de terre, betteraves, légumes) notamment, qui est variable selon les régions étudiées (Bourgogne, Picardie).

Dans le cadre de nos travaux, aucune étude détaillée précisant les perspectives d’utilisation des volumes et des mix de biomasse (dont les résidus de culture) au niveau national n’a pu être identifié. Les paramètres à l’œuvre (économie des procédés, mix de biomasse optimisés, localisation des sites industriels…) étant sans doute encore trop nombreux à l’heure actuelle. Les besoins d’investissements (presse, stockage, broyage, granulation,… équipements de manutention et transport) mériteraient également d’être examinés en détail, ainsi que l’identification des acteurs économiques, fonds d’investissements,… capables d’assurer une structuration en filière pour répondre aux divers usages. Futurol vient de rendre publiques des travaux préliminaires portant sur la modélisation de la localisation et du dimensionnement d’unités d’éthanol 2 G en France, réalisés par IFP Energie nouvelle en 2013. Leurs travaux se sont appuyés sur une approche économique avec couplage de modèles agricoles (STICS et Aropaj) et énergétique (TIMES-GéoMIRET).

Scénario Ressources mobilisées en 2030

Surfaces mobilisées en

priorité

Implantation des usines

Localisation des unités

Scénario « haut »

7 200 milliers t (en premier paille et miscanthus)

Terres marginales 6 unités de 160 kt et 6 unités de 40 kt

Peu affectée

Scénario « bas »

6 400 milliers t (en premier paille et miscanthus

Céréales : - 2 % Oléagineux : - 1 % Fourrages : - 1 %

5 unités de 160 kt et unités de 40 kt

Peu affecté

Figure 8 : Exemple de projection des besoins en ressource liés au développement de la filière éthanol

lignocellulosique en France (Source : Futurol/IFP Energie nouvelle) o Au-delà de la mise aux points des procédés, et de la capacité à mobiliser des ressources

conséquentes de l’ordre de 160 000 à 1 000 000 tonnes de biomasse / usine, le développement des biocarburants nécessite de disposer d’un cadre réglementaire stable pour passer le stade de l’apprentissage industriel qui leur permettra de devenir pleinement compétitives. C’est pourquoi les incertitudes réglementaires actuelles en Europe pourraient ralentir leur déploiement, selon IFP Energies nouvelles.

- Alimentation animale (volumes variables méthodologiquement considérés comme non significatifs) o Si les résidus de cultures telles que les pailles de céréales, de colza ou de protéagineux sont

utilisés en alimentation animale, c’est essentiellement en période de sécheresse où les fourrages, par essence de bien meilleures qualités nutritionnelles, viennent à manquer comme en 2003, 2009 ou 2015. Faute de données fiables, cette valorisation n’est ainsi pas prise en compte dans les études recensées et est systématiquement considérée comme nulle.

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o A noter des initiatives telles que celles menées par la société SODEM (28) 19 qui a mis en place une filière complète de pressage / ramassage / défibrage / granulation de pailles de céréales. Cette société produit annuellement 10 000 tonnes de granulés de paille à destination de l’alimentation animale. Plus récemment elle a mis en place une production de paille défibrée (brins de 2 à 4 cm) dépoussiérée en balle de 16 kg, offrant une digestibilité améliorée et une teneur en fer réduite.

Ressources UFL PDIN PDIE MAT Cellulose brute

Paille de blé 0,42 22 44 35 420 Paille d'orge 0,44 24 46 38 420 Paille d'avoine 0,5 20 48 32 420 Paille de pois 0,53 42 60 66 413 Paille de soja 0,4 30 50 50 425 Paille de féverole 0,45 31 51 49 479

Figure 9 : Principales valeurs nutritives des pailles (/kg de MS) (sources INRA 2007)20

- Valorisation matériau et chimie (volumes très faibles > 0,01 %).

L’utilisation des résidus de culture comme matériaux reste encore marginale. Ils sont actuellement valorisés sur le marché de l’isolation thermique du bâtiment principalement sous la forme de bottes de pailles de céréales ou d’isolants souples. Ils rentrent ainsi dans la grande famille des isolants biosourcés, tels que résumé ci-après :

Figure 10 : Principaux matériaux isolants biosourcés mis en marché21

o Les bottes de pailles de céréales sont utilisées comme isolant de remplissage de murs à ossature bois. Elles sont assemblées sur chantier généralement dans une logique d’autoconstruction. Des procédés de construction en usine visent à industrialiser ce mode de production, les murs en bois isolés en paille étant préfabriqués en atelier avant d’être assemblés sur chantier.

Les acteurs de la construction paille (agriculteurs, artisans, architectes…) sont organisés en réseau au travers du Réseau Français de la Construction en Paille (RFCP).

19 http://www.sodem-marchais.fr/ 20 http://www.gds38.asso.fr/web/gds.nsf/recup/A73BCEFB1362E8D3C12578AB00763F24?OpenDocument 21 « Le marché des isolants végétaux en France », FRD 2013

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La construction en paille est encadrée par des règles professionnelles applicables depuis le 1er janvier 2012, qui permettent de rendre assurable ces constructions en fournissant la garantie décennale. Ce cadre normatif reconnu permet de réaliser tous types de bâtiments : tertiaires, Établissement Recevant du Public (ERP), logements individuels et collectifs, locaux industriels… Des formations « Pro-paille » réalisées sous l’égide du RFCP permet d’accompagner cette démarche. Les volumes de pailles de céréales utilisées ne sont pas connus avec précision. Selon FranceAgriMer22, en 2011, de 2 000 à 3 000 tonnes de paille ont été utilisées en botte pour la construction en France. Un doublement de cette utilisation (4 500 à 5 500 tonnes) était envisagé pour l’année 2012 sans que ce chiffre ait pu être vérifié à ce jour23. Ceci étant, l’obtention des règles professionnelles et le développement des systèmes constructifs préfabriqués semblent être en train de dynamiser, voire de révolutionner ce marché. On peut noter tout particulièrement :

� La construction en 2013 du groupe scolaire d’Issy les Moulineaux (92)24 présenté comme le 1Er ERP isolé en paille, comprenant 14 classes sur 5 000 m² et 2 étages. Ce chantier a permis de confirmer par des tests réalisés en grandeur réelle validés par le CSTB une tenue au feu supérieure au minimum de 30 minutes demandée par la réglementation pour ce type de bâtiment.

� La construction également en 2013 du 1er immeuble de 8 étages, la résidence Jules Ferry située à proximité du centre-ville de Saint Dié des Vosges (88) 25. Cet immeuble commandé par le bailleur social « Le Toit Vosgien », comprend une vingtaine de logements. Il a mobilisé l’équivalent de 10 ha de pailles répartis dans 700 caissons de préfabrications assemblés sur chantier. Associé à une pompe à chaleur géothermique, une ventilation double flux et des capteurs solaires thermiques, ce bâtiment a été certifié PassivHaus (15 kWh/m2).

© RFCP © Batinature © Batinature © Détailsdarchitecture.com

o Les isolants souples à base de fibre issue de paille de lin oléagineux . La Cavac

biomatériaux a créé une filière originale de production de lin oléagineux, dont la paille est défibrée, puis transformée en isolant souple par mélange de fibre avec des fibres de chanvre, de lin fibre et d’une « colle » constituée de fibres de polyester. Selon FranceAgriMer, ce sont ainsi 0,7 milliers tMS/an qui seraient valorisées.

© Cavac Biomatériaux

22 « ONRB : enjeux de la valorisation de la biomasse en matériaux biosourcés », Etude réalisée par Bio by Deloitte et FRD pour le compte de FranceAgriMer, 2015. 23 « Etude sur le secteur et les filières de production des matériaux et produits biosourcés utilisés dans la construction (à l'exception du bois) », Étude réalisée par Nomadeis pour le MEDDE, 2012. 24 http://www.actu-environnement.com/ae/news/maturite-construction-paille-17481.php4 25 http://www.actu-environnement.com/ae/news/construction-immeuble-bois-paille-18315.php4

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De manière complémentaire à ces valorisations dans le domaine de l’isolation, un certain nombre de travaux sont actuellement engagés afin de trouver des nouveaux débouchés dans les domaines de la chimie et des matériaux biosourcés (béton, panneaux de particules, plasturgie).

o Création de valeur dans le domaine des matériaux : � En panneaux de particules : PANOVEGE est un projet financé dans le cadre du BIP

ADEME, associant l’Esitpa, qui a pour but de développer des panneaux à base de canne de tournesol à destination des marchés du bâtiment et de l’emballage. Un des objectifs est de valoriser distinctement les propriétés respectives des écorces et de la moelle issues des cannes de Tournesol.

Figure 11 : Schéma de principe de valorisation des cannes de tournesol (Source : Esitpa).

� En béton isolant thermique : un certain nombre de projets ont été engagés afin d’investiguer le potentiel de valorisation des résidus de culture dans le domaine des bétons isolants thermiques.

• Le projet IBIS, porté par Parex Group a pour objectifs de développer à l’échelle industrielle et jusqu’à son application sur chantier, une filière pérenne de mortiers composites isolants bio-sourcés, en garantissant leurs performances énergétiques et acoustiques. Il vise tout particulièrement le bâti ancien pour la rénovation des constructions antérieures à 1950. IBIS devrait permettre à la profession des artisans façadiers, qui appliquent aujourd’hui en rénovation les seuls enduits de protection/finition, de proposer en plus la projection de l’isolant. Ce projet investissement d’avenir associe sur la période 2013- 2016 Chanvra, l’ENTPE, l’Esitpa et C&B. Les ressources abordées concernent les granulats de cannes de tournesol, de paille de colza, d’anas de lin….

© Projet IBIS

• L’union de Coopérative Coopénergie a pour objectifs le développement de bétons isolants thermiques à partir de granulats de paille de colza. Des partenariats avec les CoDEM et le Lycée Arago de Reims ont permis de mettre au point des solutions opérationnelles, de les valider selon les Règles professionnelles des bétons végétaux existants et de réaliser des premiers chantiers témoins de réalisation concluants.

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� En plasturgie : exemple du lin oléagineux avec le projet CELASTOFIB dédié à la conception d’une nouvelle gamme d’élastomères souples incluant des fibres naturelles, et ayant des propriétés acoustiques inédites pour produire des joints d’étanchéité pour véhicules automobiles. Projet piloté par l’équipementier Cooper Standard, en lien avec le Limatb financé par le FUI.

o Création de valeur dans le domaine des produits bio sourcés : � La société CIMV26 créée en 2006 a développé un procédé permettant de valoriser les

trois principaux composants de la plante (lignocellulose), après les avoir séparés proprement et sans les dégrader, en trois produits intermédiaires destinés à l’Industrie chimique et biotechnologique : la cellulose à destination de la production de glucose ou de pâte à papier, la biolignine source de phénol ou de polyol et les sirops de sucres permettant la production de xylose et autres sucres en C5. Le procédé permettrait également la production de 2 à 15% de silice nanométrique, selon la biomasse utilisée (paille de riz, de blé ou bois). Des travaux en cours visent également à extraire les protéines résiduelles. CIMV s’appuie sur toute source de biomasse : pailles de céréales (blé, orge, maïs, riz…), de plantes à fibres (lin, chanvre), rémanents forestiers…

Figure 12 : Technologie CIMV de séparation et valorisation des biopolymères de la biomasse lignocellulosique (Source : CIMV).

Le procédé mis au point s’inscrit dans une logique de raffinerie végétale valorisant l’ensemble des constituants de la plante dans un souci d’économie circulaire et de rentabilité. A partir des molécules produites par le procédé CIMV, l’équipe R&D de la société développe dans le cadre d’un certain nombre de projets de recherche avec ses clients les usages potentiels (éthanol, résines phénoliques, résines époxy, PVC, élastomères, charges pour pneumatiques…). Le projet européen Biocore avait notamment pour objectif de concevoir et tester la faisabilité d’un concept de bioraffinerie valorisant les coproduits agricoles, agroalimentaires et forestiers dans le domaine des biocarburants 2G, des intermédiaires chimiques et des matériaux polymères.

26 CIMV : Compagnie Industrielle de la Matière Végétale

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Figure 13 : Projet Biocore27

En 2007 CIMV a conçu un pilote de démonstration sur le site de Pomacle-Bazancourt. La compagnie vient d’annoncer, le lancement du projet européen 2G Biopic qui va permettre l’installation en 2016 d’un laboratoire de recherche et d’une unité de démonstration industrielle sur le parc d’activités des « Portes du Tarn » à proximité de Toulouse, pour un budget prévisionnel de 50 M€. Ce projet coordonné par CIMV associe 6 autres partenaires : Dyadic, Taurus Energy, le CRITT Bio-Industries, Rolkem, Toulouse White Biotechnologies (TWB), Bio Base Europe Pilot Plant.

� La société Eco-Ethanol 28, filiale de Valagro Carbone Renouvelable a égaleme nt développé un procédé innovant de transformation de la biomasse lignocellulosique en biocarburants et en molécules chimiques de deuxième génération. Elle utilise comme matières premières des coproduits agricoles et des déchets industriels contenant de la lignocellulose. Le procédé permet d’obtenir des sucres en C5 et C6, molécules plateformes vers la synthèse de nombreux composés chimiques issus du végétal (acide lactique, xylitol, xanthanes, etc.) ou vers la production de biocarburants de deuxième génération (éthanol). Il permet également d’obtenir de la lignine de haute qualité et des composés aromatiques offrant de nombreuses voies de valorisation comme la production de polymères de spécialité dans l’industrie.

� A noter que de nombreux projets ont été conduits af in d’essayer de valoriser certaines molécules présentes significativement dan s les fanes de betteraves (stérol, bétaïne…), sans être concluants au final. Les matériels de récolte de ces fanes ne sont pas disponibles (le retour au sol étant privilégié), la teneur en molécule relativement limitée par rapport à d’autres sources de biomasse… Les conditions d’accès étaient ainsi relativement élevées.

Conclusions et enseignements : En synthèse la ressource de résidus de cultures agricoles est destinée actuellement en volume : - A 58 % au domaine de la valorisation agronomique par retour au sol, - A 22 % à un usage d’élevage pour les litières animales et l’alimentation du bétail, - A moins de 1 % (à dire d’expert faute de données disponibles) à un usage énergétique

(combustion/cogénération principalement) - A moins de 0,1 % (à dire d’expert faute de données disponibles) à un usage matériaux (isolation

27 http://www.biocore-europe.org/ 28 http://www.ecoethanol.fr

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principalement). Ainsi 8 % du volume total de résidus de cultures agricoles produit resterait disponible pour de nouveaux usages. La R&D et les procédés développés dans le domaine de l’énergie et des matériaux biosourcés présentés précédemment témoignent de l’intérêt suscité qui restent encore largement à concrétiser. De nombreuses études de gisement ou ressources ont été réalisées ces dernières années dans ce cadre, comme en témoigne le recensement réalisé par le RMT Biomasse29. Tendances et perspectives de développement Tendances et évolutions à venir Au vu des échanges avec les experts interrogés, la valorisation des résidus de cultures agricoles va être durablement dominée par des problématiques bien naturelles de retour au sol et de couverture des besoins de l’élevage. A 5 - 10 ans, la dynamique de valorisation de ces matières va être dominée par le développement de la méthanisation, qui pourrait représenter à terme plus de 10 000 milliers de tMS/an et l’émergence progressivement de solutions de valorisation de ces matières dans le domaine des matériaux (isolants, panneaux, bétons, plasturgie) à destination du marché du bâtiment principalement, et des applications plasturgies dans tous les autres secteurs secondairement. Attention au vu de la normalisation des solutions dans le bâtiment, la réalité des délais de développement de ces nouveaux matériaux pourrait être plus longue qu’envisagée. A 10 – 15 ans, la valorisation de cette ressource devrait être impactée par les projets de biocarburants 2G / bioraffinerie du végétal sous réserve que les procédés soient mis au point, que les projets trouvent leur industrialisation en France et que les réglementations soient suffisamment stables et claires pour accompagner leur développement. Les enjeux en volumes sont potentiellement plus importants les formats d’usines évoqués étant dans la fourchette 160 à 1 000 000 tonnes de biomasse / an (cultures dédiées et coproduits agricoles et forestiers). Ceci étant à ce stade de réalisation des travaux aucune étude prospective n’a été identifiée, permettant d’appréhender la réalité des potentiels de biomasse qui pourraient être amenées à être mobilisées. Par ailleurs certains experts interrogés sont prudents sur la réalité des développements à venir en France, les modèles économiques des projets développés reposant aussi bien sur des projets d’industrialisation en France que sur la commercialisation de licences de productions à l’international. Leur prudence est due notamment à la localisation des projets industriels de production d’acide succinique au niveau mondial, alors que 2 des principaux pilotes industriels étaient localisés en France. Evaluation du volume disponible et supplémentaire pour valorisation La problématique de la valorisation des résidus de culture est conditionnée par : - La nécessité de maintenir la fertilité des sols et tout particulièrement les taux de matière organique,

fonction notamment du type de sol. - La réalité des filières économiques de valorisation, qui doivent amener un niveau de rémunération

supérieur à la valeur fertilisante des biomasses exportées. Par le passé, de très nombreux projets de valorisation énergétique (combustion/cogénération) et matériaux (pâte à papier, bioraffinerie, panneaux de particules, plasturgie…30) ont été conduits sans pouvoir se traduire opérationnellement de manière significative sur le plan industriel et en matière de volumes de biomasse mobilisées.

- La capacité à structurer des filières d’approvisionnement au regard des dynamiques locales et à la hauteur des marchés qui se feraient jour sur la base de volumes et de qualités régulières 365 jours par an.

Par définition l’ensemble du gisement de résidus de cultures annuelles est exploité au sens où toutes les matières produites trouvent aujourd’hui une utilisation qui satisfait tous les acteurs. La gestion des résidus de culture s’inscrit ainsi dans une logique d’économie circulaire sans émission de déchets. L’ONRB notamment a intégré la notion de Volume Supplémentaire Disponible (VSD), qui représente les volumes

29 http://www.gisement-biomasse.fr/resultat.php 30 Cf. projets détaillés pages précédentes : CELASTOFIB, CIMV, PANOVEGE…

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théoriquement disponibles une fois que l’on a déduit le retour au sol, les besoins de l’élevage et les principaux usages existants. Sur la base de cette définition, les volumes potentiellement disponibles pour de nouveaux usages sont évalués à 11 737 milliers tMS/ha, hors menues pailles et fanes de betteraves sucrières pour lesquelles une telle évaluation n’est pas connue. Perspectives de développement

Accompagner les développements des usages des résidus de cultures agricoles demande tout particulièrement : - D’investiguer sérieusement les conditions de création de valeur pour de nouveaux usages, sachant

que le retour au sol constitue à ce jour la meilleure solution sur le plan agronomique, économique, culturel et de préservation de l’environnement et constitue de fait la valorisation de référence.

- De définir les conditions de mobilisation des ressources en objectivant leurs impacts économiques, sociétaux et environnementaux.

- Pour chaque projet de mener une étude de la disponibilité des matières secondaires réellement mobilisables afin de ne pas déstabiliser les filières en place et de sécuriser l’approvisionnement.

- De promouvoir la structuration des acteurs et interlocuteurs économiques dans une stratégie d’engagement de long terme et de retour réaliste d’investissements.

En matière de création de valeur pour de nouveaux usages : - Au vu des actions déjà engagées sur les projets de biocarburant 2G, les experts interrogés soulignent

l’importance de mieux appréhender le potentiel de valorisation de cette ressource tout particulièrement dans le domaine de la méthanisation de la chimie verte et des matériaux biosourcés.

- Malgré les difficultés liées à la mobilisation de la ressource, ils sont unanimement confiants sur les perspectives de développement sur ces marchés. L’évolution de la place des tourteaux dans l’économie de la filière de trituration et de biocarburant de 1ère génération illustre cet « optimisme ». A l’origine, avant l’émergence du biodiesel les tourteaux étaient considérés comme des déchets. Ce sont les travaux sur la valeur alimentaire de ces tourteaux qui ont permis leur utilisation en aliment du bétail. Ce qui a contribué à l’amélioration de l’équilibre économique des projets de biodiesel et favorisé leur développement.

En matière de mobilisation de la ressource : - Il existe un consensus fort pour mettre en avant la base de données Cartofa développées par le GIE

Arvalis-Onidol comme étant le meilleur outil d’appréhension des gisements de biomasse réellement disponibles au vu de la réalité des usages actuels. Cet outil mériterait d’être mieux connu, et d’être aidé afin de continuer à affiner ses bases de données tout particulièrement en matière de prédiction de l’impact des exportations de biomasse sur la teneur organique des sols, en matière de précision des pailles exportées (ratio graine/paille), en matière de besoins de l’élevage…

- Les acteurs de la mobilisation de la ressource soulignent la nécessité unanimement de structurer les filières d’approvisionnement en résidus de culture en général et en paille de céréales en particulier. L’enjeu est de donner confiance aux industriels d’aval, les producteurs de chaleur (chauffage, vapeur, électricité) ayant été majoritairement échaudés par les projets de combustion/cogénération à base de paille dans le cadre des appels d’offre de la CRE. Contractualisation des échanges, création de stocks tampons, lissage des incidents climatiques (sécheresse, sans doute renforcés à terme par le réchauffement climatique ?) qui influent sur la disponibilité de ces pailles une année sur 6, création/amélioration des matériels de récolte, optimisation des débits de chantier, densification de la ressource, structuration d’une interprofession forte… sont des enjeux collectifs même au vu des marchés actuels. Ils soulignent tous la nécessité de sortir de l’effet « serpent de mer » où ce sujet revient sur la table à chaque sécheresse. Un expert rappelle que lors de la sècheresse de 2003, 100 M€ de fonds publics auraient été mobilisés pour transporter les pailles des zones excédentaires vers les zones déficitaires, montant qui aurait permis de créer les unités de stockage nécessaire à la couverture des besoins de l’élevage en cas de renouvellement de ce type d’épisode climatique.

- La récupération de la menue paille, que ce soit sur céréales ou colza apparaît également comme une clé du développement des usages des résidus de culture au vu de ses effets bénéfiques : récupération d’une matière d’intérêt en quantité hectare significative, à des prix de revient compétitifs car récoltée en même temps que la graine, réduction du stock d’adventices jusqu’à 97 % dans le cadre du colza… Un outil à mieux appréhender dans sa gestion globale ne pouvant sans doute pas imaginer d’exporter simultanément la même année les pailles et les menues pailles.

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- Par rapport aux questions d’impact des projets sur la matière organique des sols, un fort consensus a été identifié pour souligner que le bilan carbone devait se raisonner de plus en plus sur des rotations longues de l’ordre de 5 ans, en intégrant des compensations liées notamment à l’introduction de cultures intermédiaires qui pourraient permettre de compenser significativement les exports.

- La concurrence entre usage apparaît également un point majeur. Le projet Optabiom de cartographie et de pilotage de la concomitance de projets mobilisant de la biomasse sur la Région Picardie a été mis en avant comme une méthodologie de projet à approfondir et déployer au niveau national.

- Les fonds publics étant préférentiellement orientés vers la concrétisation de projets d’aval (= mise au point de produits), les experts interrogés soulignent l’importance de débloquer des moyens sur la structuration de l’amont (= mobilisation de la biomasse), ce qu’a commencé à faire le fond chaleur de l’Ademe.

Conclusions et enseignements :

Les résidus de cultures agricoles constituent une r essource majeure de 100 millions tMS . La réalité du volume disponible pour de nouveaux us ages fait l’objet de nombreux projets de recherche et de débats méthodologiques . Elle est estimée actuellement au niveau national à 8,3 millions tMS, soit 8 % du volume total produit. Et ce sans tenir compte du consentement à offrir cette ressource à minima.

Les usages majeurs de cette ressource vont rester d urablement le retour au sol (58 %) et les besoins de l’élevage principalement en litière (22 %). Selon les experts interrogés :

• A 5 - 10 ans , la dynamique de valorisation de ces matières devrait être dominée par le développement de la méthanisation, qui pourrait représenter à terme plus de 10 millions de tMS/an. 78 % de ce besoin serait couvert par la valorisation des litières animales ce qui n’aurait pas d’impact sur la ressource actuelle, mais un impact sur les volumes d’effluents restitués au sol dont les conséquences restent à évaluer. Par ailleurs, on devrait assister à l’émergence progressive de solutions de valorisation de ces matières dans le domaine des matériaux (isolants, panneaux, bétons, plasturgie) à destination du marché du bâtiment principalement, et des applications plasturgies dans tous les autres secteurs secondairement.

• A 10 – 15 ans, la valorisation de cette ressource devrait être impactée par les projets de biocarburants 2G / bioraffinerie du végétal sous réserve que les procédés soient mis au point, que les projets trouvent leur industrialisation en France et que les réglementations soient suffisamment stables et claires pour accompagner leur développement. Les enjeux en volumes sont potentiellement plus importants les formats d’usines évoqués étant dans la fourchette 160 à 1 000 milliers tonnes de biomasse / an, ce qui représente des volumes significatifs par rapport aux volumes supplémentaires disponibles pour de nouveaux usages, en particulier pour les pailles de céréales. Ceci étant à ce stade de réalisation des travaux aucune étude prospective n’a été identifiée, permettant d’appréhender la réalité des potentiels de biomasse qui pourraient être amenées à être mobilisées.

Les pistes identifiées visent tout particulièrement à continuer à mieux :

• investiguer les conditions de création de valeur po ur de nouveaux usages , sachant que le retour au sol constitue à ce jour la meilleure solution sur le plan agronomique, économique, culturel et de préservation de l’environnement et constitue de fait la valorisation de référence. Au vu des actions déjà engagées sur les projets de biocarburant 2G, les experts interrogés soulignent l’importance de mieux appréhender le potentiel de valorisation de cette ressource tout particulièrement dans le domaine de la méthanisation de la chimie verte et des matériaux biosourcés.

• définir les conditions de mobilisation des ressourc es en objectivant leur impact économique, sociétal et environnemental.

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II. Les sous-produits viti-vinicoles et coproduits de distillation

Contexte et chiffres clés - Définition du gisement

Les sous-produits viti-vinicoles recouvrent l’ensemble des sous-produits issus de la conduite de la vigne et des opérations de vinification et assimilés. Ils sont secs, humides ou liquides. A l'échelle du vignoble, ce sont :

• Les bois issus de la vigne : sarments et charpentes (bois de plus de 2 ans, localisés essentiellement en Champagne Ardennes) provenant de l’entretien courant ; ceps provenant des arrachages liés au renouvellement ou à la diminution des surfaces.

A l’échelle de la vinification, ce sont :

• Les marcs de raisin : sont les sous-produits solides issus du pressurage des raisins (alcool, peaux, pulpes, pépins, rafles). Les jus d’égouttage des marcs de raisin sont également présents dans les marcs de raisin. Leurs proportions varient en fonction du mode de vinification, du temps de stockage.

• Les bourbes : elles sont issues des matières solides en suspension (phase liquide) obtenues par décantation du moût en fond de cuve (avant la fermentation du raisin). Les bourbes contiennent donc des particules solides comme des peaux, des morceaux de pulpe, des débris végétaux de la vendange, du limon, des pépins, des rafles… Les bourbes liquides sont récupérées par sédimentation naturelle lors de l’opération de débourbage (aussi appelée soutirage). Nota : usuellement, les bourbes sont considérées comme des lies de vin avant fermentation issues du stockage des moûts de raisin. Dans la suite de l’étude, nous ne parlerons plus que de lies de vin.

• Les lies de vin : ce sont les sous-produits de la vinification obtenus après décantation des moûts et des vins. Elles se composent essentiellement de levures et de bactéries.

• Les vins « excédentaires » : ils sont issus du dépassement quantitatif de production au sein des AOC.

Jusqu’au changement de la réglementation courant 20 14 (cf. partie « réglementation et impacts sur la filière »), l’ensemble des sous-produits vinicol es était collecté par les distilleries vinicoles qu i les valorisaient. Actuellement, la distillerie reste la voie principale d’utilisation du fait de la struct uration de la filière de distillation, et de son intérêt su r le plan économique et environnemental notamment 31. A l’échelle de la distillation, si l’on considère que l’alcool brut et l’alcool de bouche sont les principaux produits, l’ensemble des coproduits liés à cette activité regroupe :

• Les coproduits issus de la distillation des lies de vin : o Les vinasses viticoles sont la partie sans alcool issues de la colonne de distillation. Une fois

ces vinasses détartrées et concentrées, elles sont destinées principalement aux engrais organiques normés.

o Le biogaz est formé par la méthanisation des vinasses viticoles détartrées. Le biogaz est à destination de la production d’électricité ou de chaleur.

o Le tartrate de chaux provient de l’extraction tartrique de la vinasse viticole. Il sert à l’acidification des vins, à l’industrie alimentaire (conservateurs naturels) ou est utilisé en tant que retardateur dans le plâtre.

• Les coproduits provenant de la distillation des mar cs de raisin (et de son jus d’égouttage) : o Les polyphénols comprennent les anthocyanes, les tanins et les pépins polyphénoliques. Ils

sont destinés à l’industrie cosmétique et alimentaire et peuvent servir de colorants naturels. o Les pépins de raisin à destination de l’huilerie. o Les pulpes déshydratées sont obtenues par séchage des marcs distillés humides (ne

contenant plus d’alcool). Comme les vinasses, les pulpes sont utilisées comme engrais

31 « Marcs de raisins, lies de vin et bourbes : quelle gestion des sous-produits vinicoles », Institut Français de la Vigne et du Vin, 2013.

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organiques normés. Elles peuvent être aussi valorisées en tant que biocombustible ou pour l’alimentation animale.

o Les amendements organiques normés proviennent des rafles et des marcs distillés. o Les vinasses viticoles (engrais organiques normés), le tartrate de chaux et le biogaz provenant

des vinasses issues de la distillation.

Les modes de production des coproduits de la distillerie, ainsi que leurs principales utilisations sont décrites sur la Figure 14.

Figure 14 : Procédés de traitement de la filière des distilleries vinicoles et coproduits obtenus32

- Acteurs et chaîne de valeur associée

La filière viti-vinicole repose sur les acteurs suivants :

• Les viticulteurs qui cultivent et entretiennent les vignes, et réalisent dans certains cas les opérations de vinification.

• Les coopératives viticoles, négociants ou viticulteurs qui réalisent les opérations de vinification. • Les distillateurs vinicoles qui collectent et recyclent les sous-produits vinicoles (marcs…) en les

valorisant en alcool, aliment du bétail… Ce sont les acteurs clés de la valorisation des sous-produits vinicoles. A noter que depuis fin 2014, les marcs de raisin peuvent également être compostés, épandus ou méthanisés (cf. partie réglementation et impacts sur la filière). En revanche, l’interdiction de non-surpressurage et de la traçabilité de l’alcool sont toujours en vigueur et le producteur de vin doit respecter toutes les réglementations en vigueur, ce qui représente des contraintes importantes qui sont aujourd’hui réalisées par les distilleries pour le compte du viticulteur.

• Les instituts techniques et interprofessions nationales et locales qui maillent l’ensemble des vignobles, tels que l’Institut Français de la Vigne et du Vin (IFV), l’Union Nationale de Groupements de Distillateurs d’Alcool (UNGDA) ou l’Union Nationale des Distilleries Vinicoles (UNDV) ….

32 « Marcs de raisins, lies de vin et bourbes : quelle gestion des sous-produits vinicoles », Institut Français de la Vigne et du Vin, 2013.

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• L’unique huilerie de pépins de raisins française, Grandes Huilerie de Mediaco (GHM) située à Béziers (34).

- Chiffres clés et volumes générés Chiffre clés (2010) :

o 800 000 hectares de vignoble répartis sur 85 000 exploitations viticoles. o 50 distilleries vinicoles, collectant les sous-produits dans un rayon moyen de 50 km autour de

leur site. La ressource totale produite en bois issus de l’ent retien et du renouvellement des vignes a été évaluée à 1,75 million de tonnes de matière sèche pour l’année 2006 33. Elle est constituée à 79 % par des sarments. Cette ressource a été évaluée à partir des données de surfaces en production par région, pour les régions où ces productions sont considérées comme significatives (c’est-à-dire ayant une surface en production supérieure à 1 500 ha pour les vignes). La productivité des sarments et des ceps a été évaluée dans cette source à partir de données bibliographiques et d’entretiens d’experts.

Productivité annuelle de sarments (tMS/ha/an)

Tonnages de souches en renouvellement et arrachage

(tMS/ha) Estimations Etude IFN/FCBA/SOLAGRO 2009 1,2 à 2,13

7,7 à 13,6 pour un rythme de renouvellement de 40 ans

Figure 15 : Productivité des bois issus de l’entretien et du renouvellement des vignes en France

Les 50 distilleries vinicoles collectent et valoris ent en moyenne chaque année d’après l’IFV 34, environ 850 000 tonnes de marcs de raisin (dont leu r jus d’égouttage), 1,4 million d’hectolitres de lies de vin et en 2012-2013, 500 000 hectolitres de vins excédentaires. Ces chiffres ont légèrement baissé par rapport aux campagnes précédentes (2008-2011 = 900 000 à 1 000 000 tonnes de marcs de raisin et environ 1,5 million d’hectolitres de lies de vin).

Les quantités de marcs de raisin et lies de vin obtenues à partir d’1 hl de vin sont données dans le tableau ci-dessous :

Sous-produits de la vinification Quantités dans 1 hl de vin

Marcs de raisin 18 à 20 kg

Lies de vin 2 à 4 % soit 4 kg

Figure 16 : Quantités de marcs de raisin et de lies de vin obtenues dans 1 hl de vin (source IFV) Les distilleries produisent à l’issue de leurs procédés de transformation différents coproduits (pépins de raisin, engrais et amendements organiques normés, tartrate de chaux…), qui servent de matières premières dans différents secteurs : l’agriculture et la viticulture, l’agroalimentaire, l’alimentation animale, l’industrie cosmétique, l’industrie chimique et l’énergie. Les proportions des coproduits obtenus à partir des marcs de raisin et des lies de vin sont données sur la Figure 17.

33 « Biomasse forestière, populicole et bocagère disponible pour l’énergie à l’horizon 2020 », Etude réalisée par l’IFN, FCBA et SOLAGRO pour le compte de l’ADEME, 2009. 34 « Marcs de raisins, lies de vin et bourbes : quelle gestion des sous-produits vinicoles », Institut Français de la Vigne et du Vin, 2013.

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Coproduits de la distillation Quantités dans 100 kg de marcs de raisin

Alcool 2 à 5 L

Tartrates 1 à 6 kg

Pépins 20 à 30 kg

Rafles 3 à 20 kg

Peaux, pulpes et débris fins 40 à 50 kg

Coproduits de la distillation Proportions dans les lies de vin

Alcool 6 à 8 %

Levures 4 à 6 %

Tartrates 3 à 4 %

Figure 17 : Proportions de coproduits obtenus à partir des marcs de raisin et des lies de vin (source IFV)

Selon les dernières données nationales disponibles (campagne 2009/2010), les plus forts tonnages concernent les amendements et les engrais organiques normés (220 000 t/an), les pulpes déshydratées à destination des engrais pour la viticulture (52 000 t/an), de l’alimentation animale (22 000 t/an) et des chaudières biomasse (24 000 t/an), et les pépins de raisin destinés à l’huilerie (55 000 t/an). A noter que toutes les distilleries produisent des amendements et des engrais organiques normés et que la plupart valorise les marcs de raisin en pulpes déshydratées. En revanche, toutes les distilleries n’extraient pas le tartrate de chaux, les pépins de raisin et le biogaz. Les tonnages des utilisations de ces coproduits seront détaillés dans la partie « caractérisation des différentes voies de valorisations ».

Coproduits Quantités (tMB) Pépins 68 700 Anthocyanes 9 300 000 UC Huile essentielle de lies 3 Tartrate de chaux 13 000 Amendements et engrais organiques normés 220 000 Pulpes déshydratées 98 000 Biogaz 3 150 000 Nm3 Total > 399 700 t : tonne UC : Unités Colorantes Nm 3: Normal mètre cube

Figure 18 : Evaluation de la ressource des coproduits de la distillation35 Rm : L’alcool étant le produit principal issu de la distillation, il n’est pas considéré dans ce tableau

Les coproduits de la distillation sont déterminants pour l’équilibre financier de la filière de distillation vinicole en assurant 41 % du chiffre d ’affaires (hors aide publique) de cette filière en 2012 (source IFV). Les 59 % restant sont générés par l’alcool brut et l’alcool de bouche.

35 « Marcs de raisins, lies de vin et bourbes : quelle gestion des sous-produits vinicoles », Institut Français de la Vigne et du Vin, 2013.

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Figure 19 : Répartition du chiffre d’affaires de la filière des distilleries vinicoles françaises en 2012

(hors aides publiques) selon source IFV

- Réglementation et impacts sur la filière

• Le règlement (UE) 1308/2013 (annexe VIII, partie II, D) du Parlement européen et du Conseil établissant l'Organisation Commune de Marché vitivinicole et le règlement d'application (CE) 555/2008 du 27 juin 2008 de la Commission prévoie l'obligation d'élimination des sous-produits ou résidus de la vinification (marcs de raisins issus du pressurage de la vendange et lies de vins).

• Les articles D665-31 à D665-36 du code rural et de la pêche maritime et l’arrêté relatif aux modalités de déclaration et de contrôle de la valorisation des résidus de la vinification fixent les conditions d'élimination ou valorisation des résidus de la vinification, applicables pour les producteurs français.

• Conformément à la réglementation européenne en vigueur, les sous-produits vinicoles doivent être éliminés dans le respect de la réglementation environnementale.

• La réglementation française relative à la valorisation des sous-produits vinicoles a évolué en 2008 dans le cadre de la réforme de l’Organisation Commune du Marché « Vins »

• En 2010, une expérimentation nationale a été mise en place par FranceAgriMer et coordonnées par l’IFV. Durant 3 ans, elle a consisté à étudier la distillation des marcs de raisin et lies de vin, ainsi que l’épandage, le compostage et la méthanisation des marcs de raisin.

• Jusqu’en 2014 l’ensemble des acteurs de la filière avaient obligation de livraison de la totalité des sous-produits en distillerie vinicole. Cette obligation de distillation destinée à garantir le non surpressurage de ces sous-produits et la traçabilité de l’alcool, a été aujourd’hui levée pour les marcs de raisin qui peuvent être aussi compostées, épandus ou méthanisés. En revanche, l’interdiction de non-surpressurage et de la traçabilité de l’alcool sont toujours en vigueur et le producteur de vin doit respecter toutes les réglementations en vigueur, ce qui représente des contraintes importantes qui sont aujourd’hui réalisées par les distilleries pour le compte du viticulteur.

• A noter que lorsqu’ils sont distillés, épandus, compostés ou méthanisés, les marcs de raisins, lies de vin et bourbes n’ont pas le même statut (cf. Figure 20). Par exemple, lorsqu’il est épandu, composté ou méthanisé, le marc de raisins (et les jus d’égouttage) a le statut de déchet, il doit donc être éliminé dans une logique de traitement de déchet.

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Panorama des coproduits et résidus biomasse à usage des filières chimie et matériaux biosourcés en France 30

Figure 20 : Marcs de raisin et lies de vin : statut de sous-produits ou déchets ? (source IFV) Conclusions et enseignements : Il existe 3 sources de matières secondaires viti-v inicoles :

• Les bois issus de l’entretien et du renouvellement de la vigne dont le gisement a été évalué à 1,75 millions de tMS/an.

• Les sous-produits de la vinification (marcs de rais in, lies et bourbes) dont le gisement a été évalué à environ 850 000 tonnes de marc de raisin e t 1,4 million d’hectolitres de lies

• Les principaux coproduits de la distillation, sont d’après l’IFV les amendements et engrais organiques normés (220 000 tonnes), les pulpes désh ydratées (100 000 tonnes), les pépins de raisin pour l’huilerie (55 000 tonnes), les pépi ns à usage polyphénols (4 700 tonnes), les pépins à usage énergie (9 000 tonnes), le tartrate de chaux (13 000 tonnes) et l’huile essentielle de lies (3 tonnes).

Caractérisation des différentes voies de valorisati ons 5 voies de valorisation sont identifiées à ce jour :

• Alimentation humaine et animale : huile alimentaire, alimentation du bétail • Valorisation agronomique : retour au sol afin de maintenir la matière organique des sols • Valorisation énergétique : combustion/ cogénération, méthanisation • Chimie : cosmétique • Matériaux : plasturgie

Les sous-produits de la vinification étant jusqu’à fin 2014 intégralement valorisés par l’industrie de la distillerie vinicole, nous nous sommes centrés u niquement sur les coproduits de la distillation. Les usages de ces coproduits ont été évalués de la manière suivante par l’IFV pour la campagne 2009/2010 :

Valorisation des matières secondaires

Quantités (tMB) Principaux usages Quantités

(tMB)

Coût unitaire moyen

Pépins 68 700

A usage huile 55 000 140 €/t A usage polyphénols (cosmétique, alimentation humaine)

4 700 nrs

A usage énergie : pépins + tourteaux de pépins issus de l’extraction de l’huile (combustion)

9 000*

nrs

Anthocyanes 9 300 000 UC Cosmétique, alimentation humaine

9 300 000 UC

0,7 €/UC

Huile essentielle de lies 3 Cosmétique 3 nrs

Tartrate de chaux 13 000

Viticulture (acidification des vins), agro-alimentaire (conservateur), industrie (retardateur de plâtre)

13 000

485 €/t

Amendements et engrais organiques 220 000

Viticulture 150 000 14 €/t Viticulture et agriculture 70 000 14 €/t

Pulpes déshydratées 98 000

Engrais organiques pour viticulture

52 000 70 €/t

Alimentation animale 22 000 85 €/t Chaudière biomasse 24 000 nrs

Biogaz 3 150 000Nm3 Energie nrs Total > 399 700 t : tonne UC : Unités Colorantes * La quantité de tourte aux n’est pas AP : Alcool Pur Nm 3: Normal mètre cube renseign ée

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Figure 21 : Valorisation des coproduits de la distillation36

Les matières secondaires à haute valeur ajoutée sont :

• Les tartrates de chaux pour les applications en viticulture, en agroalimentaire et en industrie (comme retardateur de plâtre), avec une production évaluée à 13 000 tonnes par an pour un prix unitaire moyen de 485 €/t.

• Les polyphénols (pépins à usages polyphénols, anthocyanes) concernent eux des marchés de niche à très forte valeur ajoutée également.

• Les pépins à usage huile sont également bien valorisés (55 000 tonnes pour un prix moyen de 140 €/t) ainsi que les pulpes déshydratées à usage d’engrais organiques normés pour la viticulture et pour l’alimentation animale (respectivement 52 000 tonnes à 70 €/t et 22 000 tonnes à 85 €/t).

• Les valorisations pour les usages d’amendements et d’engrais organiques normés sont à plus faible valeur ajoutée (coût unitaire moyen autour de 14 €/t).

A noter, que les prix de ces valorisations sont très volatils.

De manière détaillée. Valorisation agronomique.

• Le maintien du taux de matière organique est un véritable enjeu pour le vignoble français, le taux de matière organique des sols viticoles étant généralement plus faible que celui des autres sols agricoles37. C’est pourquoi les sarments sont broyés à 90 % en France selon le CIVC avec retour au sol, ce qui permettrait de compenser 30 à 50 % des pertes annuelles de matière organique. Il est généralement conseillé de brûler les charpentes (bois de plus de 2 ans) et les ceps pour des questions de prophylaxie.

• Par ailleurs, 220 000 tonnes des coproduits de distillerie sont valorisés dans le domaine des amendements et engrais organiques normés. Il s’agit amendements organiques normés (à base de marcs distillés) et des engrais organiques normés (à base de vinasses viticoles) et il y a également 52 000 tonnes de pulpes de raisin qui sont valorisés en engrais organiques). Ce débouché représente 9 % du chiffre d’affaires national des distilleries vinicoles.

Alimentation humaine et animale.

• 52 000 tonnes des coproduits de distillerie sont valorisés dans le domaine de l’alimentation humaine avec l’huile de pépin de raisin, riche en acides gras polyinsaturés, avec principalement de l’acide gras linoléique. Ce débouché représente 11 % du chiffre d’affaires national des distilleries vinicoles.

• 22 000 tonnes des coproduits de distillerie sont valorisés dans le domaine de l’alimentation animale au travers principalement de pulpes déshydratées. Ce débouché représente 3 % du chiffre d’affaires national des distilleries vinicoles.

Valorisation énergétique.

• Depuis quelques années des premières filières de collecte des sarments et des ceps ont été créées à des fins de valorisation énergétique pour le marché de la combustion (chaudière) ou du charbon de bois pour barbecue pour les particuliers (sarments). Des sociétés comme RAGT Energie ont développé un concept de granulé pour l’énergie issue de différentes biomasses dont les sarments, sous marque chapeau Calys. Enfin des projets de recherche, tels que le projet Bran Blending38 ont permis d’identifier les matières secondaires les plus pertinentes pour une valorisation énergétique en granulés (pellets), dont les sarments de vigne. Faute de données fiables, cette voie de valorisation n’est pas chiffrée.

• 33 000 tonnes des coproduits de distillerie sont valorisés dans le domaine de la combustion au travers de pulpes déshydratées, de pépins ou de tourteaux de trituration.

36 « Marcs de raisins, lies de vin et bourbes : quelle gestion des sous-produits vinicoles », Institut Français de la Vigne et du Vin, 2013. 37 « Biomasse forestière, populicole et bocagère disponible pour l’énergie à l’horizon 2020 », Etude réalisée par l’IFN, FCBA et SOLAGRO pour le compte de l’ADEME, 2009 38 « Bran Blending : Développement de biocombustibles standardisés à base de matières premières agricoles et à faible taux d’émissions – Rapport final », ADEME, 2013.

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A noter qu’avec un pouvoir méthanogène de 350 m3 de CH4/tonne matière organique, les matières secondaires viti-vinicoles possèdent un pouvoir méthanogène intéressant, qui en font une ressource potentielle pertinente pour le développement de la méthanisation seule, ou en complément de la distillation en France à l’horizon 2030, selon l’étude Solagro/Inddigo de 2013. D’après l’IFV, plusieurs distilleries ont déjà développé la méthanisation après distillation des coproduits et des productions de biogaz sont déjà effectives.

Ressources % MO/MB % MS m3 CH4/tMO % MO/MS

Marcs de raisin 38 % 45 % 350 84 % Résidus de vinification 20 % 75 % 350 27 %

Figure 22 : Pouvoir méthanogène des coproduits viti-vinicoles39

Chimie.

• 4 700 tonnes de pépins sont à usage polyphénols et 9 300 000 unités colorantes d’anthocyanes sont produites à partir de la pellicule des grains de raisin. Ces polyphénols et anthocyanes sont valorisés dans le domaine de la cosmétique ou en tant que colorant alimentaire. A noter que 3 tonnes d’huile essentielle de lies sont également produites. Le marché des polyphénols représente 9 % du chiffre d’affaires national des distilleries vinicoles.

• Des polyphénols peuvent être également extraits à partir de sarments de vigne. La société ACTICHEM (Midi-Pyrénées) produit des principes actifs à partir de composés Resvératrol (polyphénol de la classe des stilbènes) extraits des pellicules de grains de raisin, mais également des sarments de vigne pour la nutraceutique et la cosmétique. Ces composés ont notamment des actions anti-oxydantes, anti-inflammatoires, antifongiques ou antimicrobiennes.

Conclusions et enseignements : Les bois issus de vigne retournent essentiellement au sol afin de maintenir leur taux de matière organique, ou sont brûlés pour des raisons de proph ylaxie. Les sous-produits vinicoles sont historiquement int égralement valorisés par la distillation. Une modification de la réglementation courant 2014, aut orise désormais une valorisation par méthanisation, épandage ou compostage. L’ensemble des coproduits de distillerie est valori sé principalement dans le domaine alimentaire (huile de pépins de raisin, alcool de bouche,…), ag ronomique (amendements et engrais normés), de la cosmétique et de l’alimentation animale. Plus ma rginalement des valorisations énergétiques en combustion ou méthanisation ont été mises en place. Tendances et perspectives de développement Tendances et évolutions à venir Les bois de la vigne (sarments, charpentes, ceps de vigne) sont actuellement brulés ou retournent essentiellement au sol. Depuis quelques années, des premières filières de collecte des sarments et des ceps ont été créées à des fins de valorisation énergétique pour le marché de la combustion (chaudière) ou du charbon de bois pour barbecue pour les particuliers (sarments). Les tendances actuelles concernent également les valorisations chimiques des sarments (extraction de molécules d’intérêt à haute valeur ajoutée pour la nutraceutique et la cosmétique) et les valorisations dans la plasturgie (sarments et ceps broyés et utilisés en tant que charges des polymères thermoplastiques pour l’injection). Les sous-produits vinicoles étant historiquement destinés à être livrés en distillerie, il est possible que le changement de la réglementation d’août 2014 ait un impact sur les évolutions des utilisations des marcs de raisin. Une expérimentation nationale lancée ces dernières années a conclu que les distilleries restaient les filières de valorisation les plus adaptées d’un point de vue technique, économique, environnemental et 39 « Estimation des gisements potentiels de substrats utilisables en méthanisation », Etude réalisée par Solagro et Inddigo pour le compte de l’ADEME, 2013.

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réglementaire. Cette étude résumée dans le document « Marcs de raisins, lies de vin et bourbes : quelle gestion des sous-produits vinicoles », coordonnée par l’IFV en 2013, conclut sur les voies préférentielles de valorisation des sous-produits vinicoles en les classant de la manière suivante : distillation > méthanisation > compostage > épandage, sur la base notamment d’ACV comparative.

• La distillation s’inscrit dans une logique de bioraffinerie et de valorisation de la totalité des coproduits de distillation avec l’objectif de valoriser l’intégralité des biomasses utilisées et générées.

• La méthanisation pourrait être une alternative. Elle nécessite la mise en place de stocks annuels de marcs de raisin dans des silos pour pouvoir alimenter le méthaniseur de façon continue avec des rations journalières identiques. En outre, la technique de méthanisation des marcs de raisin (et de leur jus d’égouttage) n’est pas au point et se heurte à des difficultés liées à la présence d’alcool et des pépins dont l’enveloppe gène l’action des bactéries.

• Si l’on excepte la valeur agronomique des épandages, l’épandage des marcs alcoolisés provoquerait l’émission de COV et les jus d’égouttage encore alcoolisés pourraient migrer dans la nappe phréatique.

Pour permettre la pérennité de leur activité, les d istilleries cherchent à maximiser la valorisation d e tous leurs coproduits. Elles s’intéressent depuis quelques années à la valorisation par méthanisation des vinasses viticoles et de leurs marcs distillés. Une distillerie du Sancerrois s’est associée à une société qui collecte et méthanise ses marcs de raisin distillés épépinés avec d’autres coproduits agricoles (plus d’alcool ni de pépins pour gêner le procédé de méthanisation). Ce type de méthanisation a l’avantage de compléter la valorisation déjà effectuée par la phase de distillation. Cette nouvelle voie vient en synergie des autres valorisations déjà existantes. D’autres projets de ce type sont actuellement en cours dans les Pyrénées Orientales et en Champagne-Ardenne. Pour ce qui concerne les autres coproduits de la distillation, les experts interrogés soulignent l’intérêt de mieux valoriser les pulpes, car elles sont encore riches en tannins et polyphénols. Actuellement, les secteurs de la pharmacie et de la cosmétique utilisent ces molécules extraites directement des marcs de raisin distillés (pellicules des raisins…), mais il en reste dans les pulpes. Ces deux molécules constituent des marchés à forte valeur ajoutée pour lesquels de faibles volumes sont nécessaires. Une autre voie de valorisation envisageable des marcs distillés serait d’en extraire la cellulose, les hémicelluloses pour en faire du bioéthanol. Mais les tannins sont des inhibiteurs de la fermentation ce qui représente un verrou majeur actuellement. En conclusion de cette partie, on peut dire que les distilleries vinicoles se sont progressivement diversifiées et s’inscrivent aujourd’hui pleinement dans une logique d’économie circulaire. Les distilleries sont devenues de véritables bioraffineries en collectant les marcs de raisin et les lies de vin, et en extrayant les matières premières permettant d’approvisionner d’autres filières agroalimentaires, agronomiques et énergétiques. Les marcs distillés sont très riches en molécules biosourcées qui promettent de nombreux nouveaux débouchés à haute valeur ajoutée.

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Figure 23 : Schéma d’économie circulaire : Les distilleries vinicoles en tant que bioraffineries (source UNDV)

Evaluation du volume disponible et supplémentaire pour valorisation La structuration de la filière avec un passage obligé jusqu’en 2014 par les distilleries vinicoles font que l’ensemble des études exploitées considèrent de fait qu’aucun volume n’est « disponible » pour de nouveaux usages. En conclusion les gisements de coproduits viti-vinicoles constitués de biomasse peuvent être résumés de la manière suivante :

Ressources

Unité

Volume Total Produi

t

Valorisation

agronomique

Alimentation

humaine et

animale

Valorisation

énergétique

Chimie

Volume supplémen

taire disponible

Source des données

Période de

référence

Bois issues des vignes

Milliers

tMS/an

1 750 nrs

ONRB, 2012

IFVV, 2013

2006

Pépins

Milliers

t/an

69 55 9 5 0

2009/2010

Pulpes de raisins déshydratées

98 – 100

53 - 57 22 - 25 18 - 24 - 0

Amendements organiques normés

170 170 - - - 0

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Engrais organiques normés

50 50 - - - 0

Figure 24 : Evaluation des gisements de coproduits viti-vinicoles

Perspectives de développement Les perspectives de développement portent principal ement sur :

• Le fait que davantage de distilleries s’équipent pour extraire les pépins, le tartrate de chaux et les pulpes afin d’améliorer la valorisation des sous-produits de la vinification dans une logique de bioraffinerie, et par là-même leur rentabilité.

• La poursuite de la recherche de nouvelles voies de valorisation dans les domaines de l’énergie, de la chimie verte et des matériaux biosourcés via des programmes R&D

Valorisation énergétique :

• Des projets d’ampleur comme le projet Biovive au sein du vignoble de la Champagne cherchent actuellement à créer des filières d’approvisionnement de combustibles issues des bois de la vigne pour approvisionner des cogénérations industrielles, en l’occurrence celles du site Verallia de production de bouteilles de champagne sur son site de Oiry près d’Epernay.

• Lors du dernier concours Lépine 2015, c’est une invention de production de granulés pour chaudières à base de sarments de vignes qui a été primée. Il s’agit d’un dispositif mobile permettant de transformer des déchets agricoles (pailles de maïs et sarments de vigne), à l'échelle industrielle, en granulés pour les chaudières bois. Le procédé est directement embarqué sur un camion de 42 tonnes.

• De nouveaux projets d’industrialisation sont également en cours pour méthaniser des marcs de raisin distillés et des vinasses viticoles.

Chimie verte.

De premiers projets de recherche ont été conduits afin de trouver de nouvelles voies de valorisation des coproduits viti-vinicoles dans le domaine de la chimie :

• Projet « Marcsif » (2009-2014). Ce projet mené par l’UNGDA et le LERMAB, visait à extraire les tanins des marcs distillés (pulpes) pour produire d es colles vertes destinées à l’industrie du bois, du béton, et autres. Les pulpes sont riches en tannins et en polysaccharides. L’extraction de tannins a été mise au point à l’échelle laboratoire, puis à l’échelle industrielle (sur plusieurs dizaines de tonnes de pulpes) et réalisée dans différentes distilleries françaises. L’extrait isolé (mélange de tannins et sucres polysaccharides baptisé VITITAN) a été obtenu par hydrolyse basique à chaud après extraction de l’éthanol et des tartrates. Ce produit a gagné le prix innovation lors du salon SINAL en 2014 (salon dédié aux valorisations non alimentaires des ressources agricoles). Le VITITAN trouve des applications :

o comme colle complète structurante de panneaux de particules, de fibres pour isolants, o au niveau intermédiaire des panneaux de contreplaqué, o en complément de colles synthétiques (20 %), o en antioxydant dans les matériaux.

• Projet ANR « VALUXTRACT » (débuté en 2013). Ce projet porté par l’Université de Bordeaux

Segalen (Unité de Recherche Œnologie EA 4577 - USC 1366 INRA) associe SOFRALAB situé à Epernay et un certain nombre de partenaires académiques. Le but du projet est la valorisation des résidus de vinification (marcs distillés et résidus de bois mis dans les cuves pour simuler le goût du vin en barrique) par l'emploi de procédés d'extraction innovants et écologiques (sans solvants) permettant la production de composés à haute valeur ajoutée pour différentes applications : nouvelles molécules pour l’œnologie (économie circulaire), polyphénols pour l’industrie cosmétique, pharmaceutique et agro-alimentaire. Des procédés innovants tels que les champs électriques pulsés, les décharges électriques hautes tensions et l'eau sous-critique pourraient augmenter l'extraction des produits à forte valeur ajoutée sans employer de solvant organique.

• Projet FUI « Green Epoxy » (2014-2016 ). Ce projet est porté par la filiale de PCAS, Protéus, société de biotechnologie spécialisée dans la production d’enzymes et de souches microbiennes. Il

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rassemble entre autre des partenaires industriels spécialisés dans la gestion du patrimoine forestier, dans les additifs biosourcés pour l’industrie du caoutchouc, dans les revêtements de sol à base de résines thermodurcissables, et dans les peintures. Ce projet vise à extraire des dérivés de polyphénols non toxiques, issus de biomasse sylv icole (dont des marcs distillés) en vue de substituer le bisphénol A pour la fabrication de résines époxydes biosourcées. Les principaux livrables du projet sont le développement d’une gamme de résines époxy biosourcées et d’un procédé pilote d’extraction et de fonctionnalisation des polyphénols du bois. Au-delà, le consortium vise la création d’une filière locale de production, allant de l’approvisionnement en biomasse jusqu’à la mise sur le marché de résines époxy 100% biosourcées.

• Projet ACTRAFERM (débuté en 2013). Ce projet BIP Ademe est piloté par l’Union Nationale des Groupements de distillateurs d’alcool (UNGDA) en association l’INRA-FARE (Reims). Ce projet a pour objectif principal de produire des nutriments et des enzymes destinés aux levures, permettant d’activer la fermentation alcoolique par un procédé de fermentation en milieu solide (FMS). Cette production sera réalisée en milieu solide avec l’utilisation de marcs de raisin distillés en tant que substrat.

• Un nouveau produit est également en phase de R&D, le biochar VITICHAR ®. Ce biochar, est produit à partir de pulpes de raisins issues de marcs distillés. Ce biochar permettrait de retenir l’eau dans les parcelles de vigne lorsqu’elle est en excès et de la restituer en conditions sèches. L’intérêt de VITICHAR® est qu’il devrait également permettre de restituer les éléments minéraux N, P, K qu’il a captés. Les dernières expérimentations sont en cours actuellement.

Matériaux.

Les perspectives de développement dans le domaine des matériaux s’orientent pour l’instant principalement vers des applications dans la plasturgie. Des premiers travaux visent à remplacer les matériaux utilisés dans le vignoble par des produits plastiques incorporant des bois issus de la vigne.

• La société Vitis-Valorem en Bourgogne a par exemple développé un procédé de production de piquets de vigne pour le palissage issus de sarments. L’objectif est de remplacer les piquets en bois (acacia, pin), par ces piquets biosourcés plus légers, plus rigides, plus résistants (10 à 15 ans en moyenne contre 5 à 10 ans pour ceux en bois). Un autre avantage est que ces piquets sont moulables à différentes dimensions après avoir été chauffé dans une presse. Le produit sera commercialisé au même prix que les piquets en bois d’acacia actuellement utilisés par les viticulteurs. Vitis-Valorem est sur le point d’inaugurer son installation de production industrielle.

• La société Ecocep a développé en Champagne-Ardenne un prototype de comporte champenoise (caisse de vendanges) à partir de polyéthylène recyclé et de 30 % de ceps de vigne. Cette comporte a gagné le prix de l’Innovation lors du salon SINAL 2015. Ecocep a pour objectif de commercialiser ces premières comportes champenoises courant 2016.

Figure 25 : Comporte Champenoise développée par la société Ecocep à partir de ceps de vigne40

• Un autre projet lancé par la Coopérative des Matières Viticoles à Valoriser (CMVV) vise à révéler les potentiels techniques et plastiques du sarment, du marc de raisin distillés, de la bourbe et de la lie de vin distillés. Dans ce cadre, des étiquettes pour bouteilles produites à partir de lies de vin ont été présentées dans la revue des œnologues. Une entreprise est actuellement en train de se créer sur ce sujet.

40 « Estimation des gisements potentiels de substrats utilisables en méthanisation », Etude réalisée par Solagro et Inddigo pour le compte de l’ADEME, 2013.

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Conclusions et enseignements : Les distilleries vinicoles se sont progressivement diversifiées et elles s’inscrivent aujourd’hui pleinement dans une logique d’économie circulaire. Elles sont devenues de véritables bioraffineries et extraient de nombreuses matières premières perme ttant d’approvisionner d’autres filières agroalimentaires, agronomiques et énergétiques. Les tendances d’évolutions concernent plutôt les va lorisations dans le domaine de la chimie avec l’extraction de molécules à forte valeur ajoutée po ur les secteurs de la nutrition, de la pharmacie et de la cosmétique. Les projets de recherche se conce ntrent actuellement ainsi davantage sur les valorisations dans le domaine de la chimie verte (d érivés de polyphénols, tannins) que dans le domaine des matériaux biosourcés. A noter que ces e xtractions peuvent également s’effectuer à partir des sarments pour certains types de molécule s. Les tendances pour valoriser les sous-produits de l a vigne s’orientent aussi vers les utilisations énergétiques et vers le secteur de la plasturgie. De nombreuses innovations restent à faire dans ce secteur pour permettre de mieux valoriser les sous-produits de la vigne (sarments, ceps), et les coproduits de distillation. Etant donné que peu de gisements sont disponibles, les valorisations de fa ible tonnage à forte valeur ajoutée sont recherchées en priorité. Les pulpes déshydratées pour leur part constituent une ressource dont le potentiel à exploiter semblerait encore étendu, ouvrant de nouvelles pers pectives pour la filière des distilleries vinicoles (de nouvelles boucles d’économie circulaire)

III. Les issues de silos

Contexte et chiffres clés - Définition du gisement

Les issues de silos sont les coproduits du travail du grain . La majeure partie de ce gisement se trouve au niveau des plateformes de stockage des coopératives et négociants agricoles qui, pour assurer la fourniture d’un grain propre et de bonne qualité, effectuent plusieurs tris afin de séparer les grains cassés, les poussières et les lots défectueux. C’est ce qu’on appelle les issues de silos41. Il en existe trois types :

o Les issues dites « sèches » : produites lors du mouvement des grains de blé dans les cellules tout au long de l’année. Il s’agit essentiellement de blé, d’orge et de colza. Elles sont généralement vendues pour l’alimentation animale.

o Les issues dites « humides » : produites lors du nettoyage des grains avant séchage, il s’agit essentiellement de maïs. Ce sont des déchets saisonniers puisqu’ils sont produits après la récolte.

o Les fonds de cellules qui se sont mal conservés, mais cela arrive rarement et les quantités sont donc marginales.

Elles présentent l’avantage d’être produites toute l’année sur les plateformes de stockage des grains. C’est une source d’approvisionnement pérenne, liée à la présence des silos des organismes stockeurs selon Coopenergie. Du fait de leur composition et de leur bon pouvoir calorifique, elles sont valorisées principalement dans le domaine de l’alimentation animale, et dans une moindre mesure dans le domaine de l’énergie (combustion, méthanisation).

41 « Les issues de silos, une solution énergétique durable locale renouvelable », Coopénergie, 2011

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Elles sont globalement considérées par tous les marchés d’application de qualité variables, ce qui nécessite une étape d’homogénéisation ou de mix avec d’autres ressources, ce qui peut être un frein à leur valorisation dans de nouveaux marchés. Il faut distinguer les issues de silos générées par la collecte qui présentent des impuretés liées à la récolte (terre, cailloux…), des issues de silos générées par le stockage des grains après la phase de tri des grains, des issues de meunerie ou de malterie liées à la 2ème transformation des grains. Par définition plus on avance dans la chaîne de transformation, plus les issues sont pures et homogènes. Ces issues sont abordées au chapitre III.2.3., dans le cadre des coproduits des Industries Agro-Alimentaires. - Acteurs et chaîne de valeur associée

Les acteurs concernés sont les organismes stockeurs de grains, que ce soient des coopératives agricoles ou des négociants, dotés de plateformes de stockage, les issues de silos étant par définition obtenues lors du nettoyage des grains. A noter, que dans toutes les études exploitées par construction méthodologique le stockage à la ferme n’est pas pris en compte. Ces issues de silos sont commercialisées brutes en vrac ou conditionnées sous forme de granulés (ou pellets) à destination de l’alimentation animale ou de la combustion ce qui permet de densifier cette matière relativement légère (densité de 0,1 à 0,23 selon les sources). Les issues étant de qualités variables, il est souvent nécessaire de les mixer avec d’autres matières. Cette étape est réalisée soit au sein des organismes stockeurs en jouant sur les complémentarités de composition des différentes issues, soit chez le client utilisateur final. Elle permet ainsi d’optimiser et/ou d’homogénéiser leur valeur alimentaire ou énergétique.

- Chiffres clés et volumes générés

Les volumes d’issues de silos générées sont appréhendés systématiquement dans le cadre d’enquêtes réalisées auprès des organismes stockeurs. Cette ressource est souvent difficile à quantifier, car d’un organisme stockeur à l’autre les définitions peuvent changer, et d’un marché à l’autre les niveaux de qualités demandées peuvent influer sur le taux d’issues, notamment pour les issues de grain destinés à la meunerie qui sont généralement plus importants. Selon les sources disponibles, les issues de silos générées sont évaluées entre 395 000 et 440 000 tMS/an.

o Pour l’ONRB, le volume des issues est estimé à 1 % de la collecte de grains de blé et de maïs. Lors de la campagne 2010/11, 35,5 millions de tonnes de grains blé et 8,3 millions de tonnes de grains de maïs ont été récoltées et stockées (hors stockage à la ferme), générant 439 000 tonnes d’issues. Ces issues ayant un taux d’humidité compris entre 8 et 12 % selon les sources, on peut estimer le volume total produit à 395 000 tMS. L’ONRB s’appuie sur les ratios définis dans le cadre de l’étude du « stockage des céréales et meunerie » réalisée par l’ADEME en 1993.

o Pour Solagro/Inddigo, les grains récoltés en céréales/colza et tournesol sur une surface de 12 500 000 ha en 2010, ont généré en moyenne 0,04 tMB/ha d’issues de silos, soit un total de 500 000 tonnes d’issues. Ces issues ayant un taux d’humidité de 12 %, on peut estimer le volume total produit à 440 000 tMS. Solagro/Inddigo s’appuie sur les ratios définis dans le cadre de la « Cartographie et de la quantification des agro-ressources en Île de France », réalisée par la FRCA et la Chambre Régionale d’Agriculture d’île de France en 2007.

Dans le cadre des entretiens réalisés, les travaux de la FRCA/Chambre Régionale d’Agriculture d’Île de France ont été considérés comme les plus représentatifs de par son périmètre et ses estimations de ratios de production d’issues.

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Issues de silos produites (en % des tMB de grains)

Source : ONRB42

Source : FRCA Île de France 43

Source : FRCA Nord Pas de Calais 44

Blé 1 % 0,35 %

0,6 % Orge 1,10 % Maïs 1 % 0,80 % Autres céréales 0,50 % Colza 1,70 % Tournesol 1,70 % nrs

Figure 26 : Principaux ratios de production d’issues de silos identifiés Sur la base de ces hypothèses, le Volume Total Produit d’issues de silos est évalué de la manière suivante :

Ressources Unité Volume

Total Produit

Source des données Période de référence

Issues de silos Milliers tMS/an

440 Solagro/Inddigo, 2013 2010

Figure 27 : Evaluation des gisements d’issues de silos

Si ce gisement est significatif à l’échelle macroéconomique, les issues de silos sont généralement considérées comme une ressource constituée de petit s gisements, diffus sur le territoire et difficiles à mobiliser. Les coûts de mobilisation de cette ressource sont relativement importants sur le plan logistique. Dans un certain nombre de cas ces issues doivent être densifiées afin de gérer leur légèreté (100 à 230 kg/m3). - Réglementation et impacts sur la filière Sur la base des entretiens réalisés quelques réglementations sembleraient pouvoir jouer à la marge sur le potentiel de valorisation de ces issues sans que l’on puisse réellement en mesurer l’impact, ni les conséquences. On peut ainsi noter l’influence potentielle de :

o La réglementation sur les mycotoxines, qui dans certains cas bien précis peut interdire l’utilisation de ces issues en alimentation du bétail (Exemple de la Coopérative Île de France Sud).

o Du différentiel de taux de TVA pour des usages énergétiques (10 %) et non énergétique. Conclusions et enseignements : Les issues de silos sont les coproduits du nettoyage des grains, liés à la collecte, au stockage et aux tris successifs de nettoyage/criblage réalisés. Selon l’étude Solagro/Inddigo réalisée pour le compte de l’ADEME, le volume total produit d’issues de silos est évalué à 440 000 tMS/an, les céréales étant la principale source d’issues de silos. Produites toute l’année, elles ont l’avantage de fournir un gisement stable dans le temps, mais diffus géographiquement ce qui demande de gérer les coûts logistiques liés au transport et à la densification sous forme de granulés de ces matières légères (100 à 230 kg/m3). De qualité jugée hétérogène, elles demandent souvent à être mélangées chez les organismes stockeurs ou chez les clients, afin de fournir des matières aussi homogènes que possibles respectant les cahiers des charges d’utilisation.

42 « L’observatoire national des ressources en biomasse. Evaluation des ressources disponibles en France », FranceAgriMer, 2012. 43 D’après FRCA et Chambre Régionale d’Agriculture d’Ile de France. 44 « Inventaire du gisement « biomasse » en région Nord-Pas de Calais », Fédération Régionale des Coopératives de la Région Nord, 2010

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Caractérisation des différentes voies de valorisati ons Les issues de silos sont principalement destinées à être valorisées dans le domaine de l’alimentation animale et de l’énergie (combustion ou méthanisation). Plus marginalement une valorisation agronomique est envisageable par compostage, dans le cas des issues « humides ». Des projets de recherche sont régulièrement conduits afin d’extraire des molécules à haute valeur ajoutée sans concrétisation industrielle à ce jour. Les voies de valorisation cherchent à valoriser les propriétés de ces issues tout en devant gérer les coûts logistiques liés à leur légèreté et à l’atomicité de leur localisation.

Caractéristiques Taux d’humidité 8 - 12 % PCI 4 – 5 MWh/tonne Pouvoir méthanogène 150 - 250 m3 CH4/tMS Densité 100 – 230 kg/m3

Figure 28 : Principales caractéristiques des issues de silos45 La valorisation des gisements d’issues de silos peut être synthétisée ainsi :

Valorisation Unité Volume

Total Produit

Alimentation animale

Valorisation énergétique

Volume supplémentaire

disponible

Source des données

Période de

référence

Issues de silos Milliers tMS/an 440 > 418 < 22 0

Entretiens réalisés, Solagro/Inddigo 2013

2010 - 2011

Figure 29 : Évaluation des voies de valorisation des issues de silos Selon Coopénergie les issues de silos sèches se négocieraient actuellement entre 20 et 60 € / tonne départ silo. Ce prix est variable dans le temps, dépend des marchés visés, des accords commerciaux passés et des coûts de transport notamment. Alimentation animale.

o C’est actuellement la voie privilégiée de valorisation des issues de silos par les organismes stockeurs du fait de sa souplesse de mise en œuvre et de sa robustesse. C’est ce marché qui fixe le niveau de valorisation à atteindre pour tout autre marché d’application. La satisfaction globale de cette voie de valorisation limite, de fait, la recherche de nouveaux débouchés et freine à la signature de contrat d’approvisionnement dans la durée au cas où l’alimentation du bétail redeviendrait plus attractive.

o En effet : � Elles sont directement vendues brutes en vrac aux éleveurs adhérents des

coopératives agricoles, dans une logique de circuits courts (± 28 € / tonne en 2007 selon l’Agence Locale de l’Energie des Ardennes46). Dans certains cas, les issues de silos sont gérées directement par les chefs de silos, ce qui permet de gérer l’atomicité de localisation de ce gisement.

� Ou destinées aux industriels de la fabrication d’aliment du bétail. Les variations de composition peuvent être compensées au sein des organismes stockeurs qui réalisent des mélanges de matières afin de fournir des issues conformes aux cahiers des charges, dans le cadre d’opérations de granulations par exemple. Ces mélanges peuvent être également réalisés directement par les fabricants d’aliments du bétail.

� L’alimentation du bétail reste toujours la voie de recours en cas de problème de préparation de batch d’issues de silos pour d’autres marchés (exemple de l’éthanol sur le site de Pomacle-Bazancourt), du fait de sa facilité de mise en œuvre.

45 « Les issues de silos, une solution énergétique durable locale renouvelable », Coopénergie, 2011 46 « Etude du gisement des matières fermentescibles et du potentiel de développement de la méthanisation agricole dans le département des Ardennes », ALE 08, 2007

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o S’il n’existe pas de données officielles, les entretiens réalisés et les données confidentielles fournies dans certains cas laissent à penser que ce débouché valorise à minima 95 % des issues de silos au niveau national.

o Il n’existe pas de cotation au sens stricte pour les issues de silos (contrairement aux sons de blé, dont les cotations sont reprises dans la « Dépêche agricole »). Il s’agit de marchés de gré à gré, fonction du cours des céréales et des prix de transport tout particulièrement.

Depuis plusieurs années, de nouvelles voies de valorisation sont recherchées dans le domaine de l’énergie (combustion, puis méthanisation), du compostage ou de la chimie. Valorisation énergétique.

o Avec un PCI de 4 à 5 MWh / tonne selon Coopénergie, les issues de silos peuvent être utilisées directement comme combustible dans des chaudières à foyer polycombustibles, qui peuvent accueillir différents types de biomasses agricoles. Elles peuvent également être granulées seules ou en mélange avec d'autres coproduits agricoles, ce qui permet de densifier la matière. Cette ressource est soit valorisée sur sites industriels pour produire de l’énergie, voire de la vapeur, nécessaires aux process industriels présents dans une logique d’économie circulaire, soit destinée à être commercialisée à destination du marché des agro-pellets, dans le cadre de la recherche de nouvelle voie de valorisation. Dans une logique d’économie circulaire et de la recherche d’autonomie énergétique :

� Limagrain a mis en place une chaufferie de 3,5 tonnes de vapeur/heure de puissance alimentée en rafles de maïs sur son site d’Ennezat (63), permettant ainsi de valoriser 4 000 tMB/an de matières issues de son processus de production de semences, et de réduire son empreinte carbone de plus de 2 600 tonnes de CO2 par an47.

� Boortmalt, malteur filiale d’Axéréal, a investi en 2013 à Issoudun (36) dans une chaudière biomasse de 4 MW permettant de valoriser 8 types de coproduits présents sur le site (orgettes, poussières d’orge et de malt, issues de silos…), pour un volume annuel de 5 000 tonnes. La malterie est en effet une activité très énergivore, car elle demande une phase importante de séchage de l’orge trempé et germé, appelée touraillage, qui doit faire passer l’humidité du malt vert de 45 à 4 % en le ventilant à l’air chaud48.

Dans une logique de recherche de nouvelles voies de valorisation : � La coopérative Ile-de-France Sud, basée à Etampes (91) collecte chaque année

600 000 tonnes de céréales et génère 3 000 à 5 000 tonnes d’issues de silos. Historiquement la coopérative valorisait ces issues en alimentation du bétail, auprès d’un opérateur de Châtellerault (86). A l’origine ces issues étaient vendues 50 €/tonne puis ont été données, avant que leur client ne demande la prise en charge financière des coûts de transport en 2007 suite à l’augmentation du prix de l’énergie. Face à cette situation et à la problématique des mycotoxines, Ile-de-France Sud a alors été amenée à rechercher de nouvelles voies de valorisation, ce qui a débouché sur la mise en place en 2009 d’une petite unité de production d’agro-pellets d’une capacité nominale de 2 500 tonnes. Ces développements sont issus d’un partenariat avec RAGT énergie qui a mis au point une formulation de combustible adaptée à la nature des issues de la coopérative et franchisé la coopérative, lui permettant ainsi de produire des agro-pellets certifiés sous marque CALYS49. Le prix de vente de ces agro-pellets est de 195 €/tonne H.T., fixe pour une période triennale. 500 tonnes d’issues sont ainsi valorisées actuellement. Ces pellets servent actuellement à chauffer des bâtiments sur le territoire de l’intercommunalité d’Etampes, dans une logique de circuits courts50.

� Plus largement, RAGT Energie a développé un concept de production de pellets adapté à toute sorte de ressources pouvant être mobilisées localement (rafle de maïs,

47 http://www.bioenergie-promotion.fr/29607/limagrain-chauffe-a-la-rafle-de-mais-a-ennezat-dans-le-puy-de-dome/ 48 http://www.bioenergie-promotion.fr/39302/valorisation-energetique-de-dechets-de-cereales-a-la-malterie-dissoudun/ 49 http://www.ragt-energie.fr/fr/biocombustibles/technologies-calys.php 50 « Des sous-produits de céréales transformés en granulés pour la chaudière communale : un partenariat doublement gagnant », Gamai, 2013.

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issues de silos, coproduits de la vigne…), déployé sous forme de franchise et d’appui au conseil des opérateurs qui souhaiteraient développer ce type d’activité.

Avec un pouvoir méthanogène de 250 m3 de CH4/tonne matière sèche, les issues de silos possèdent l’un des pouvoirs méthanogènes les plus élevés. Pour être utilisées en méthanisation, elles doivent être mélangées à d’autres matières secondaires plus liquides telles que les lisiers ou certains déchets des IAA, du fait de taux d’humidité trop faible (8 à 10 %), dans le cas majoritaire des issues sèches. Selon Coopénergie, de plus en plus de de projets de méthanisation prennent en compte cette ressource. Mais, actuellement les quantités d’issues réellement valorisées en méthanisation ne sont pas évaluées à l’échelle nationale. A noter que dans les régions limitrophes de la Belgique il existe des flux d’exportation d’issues de silos à des prix qualifiés de très intéressants. Il y a un très fort consensus pour souligner le fait que ces matières présentent de fortes perspectives de développement dans ce domaine au vue de leur pouvoir méthanogène. Solagro/Inddigo prévoient ainsi à l’horizon 2030 un potentiel de valorisation de 30 % de ces issues dans le domaine de la méthanisation, soit 150 000 tMB (ou 132 000 tMS). Ce qui représente un transfert d’usage conséquent au vu du poids de l’aliment du bétail dans les débouchés actuels.

Ressources Gisement Brut Produit (ktMB)

Gisement Méthanisable

en 2030 (ktMB)

Gisement Méthanisable

en 2030 (GWh)

Autres résidus de culture : menues pailles, issues de silos, fanes de betterave

36 000 4 500 5 600

Dont issues de silos 500 150 600 à 750

Figure 30 : Estimation des gisements potentiels de substrats utilisables en méthanisation Ce développement pourrait se concrétiser sous réserve de disposer d’un nombre de projets suffisants de méthanisation opérationnels intégrant des issues de silos à un prix acceptable. Tous les adhérents de coopératives qui veulent monter des projets de méthanisation sollicitent actuellement leurs organismes stockeurs afin de pouvoir récupérer des issues sur la base d’une négociation au cas par cas. La question de la valorisation économique de ces issues par rapport au standard constitué par l’alimentation du bétail et de son évolution dans le temps sont des facteurs clés. Actuellement, ces issues peuvent être cédées gratuitement, vendues au prix du transport ou au-delà. A l’avenir, la demande croissante pour ces matières risque d’en modifier le coût à court ou moyen terme, selon l’ALE 08. Par ailleurs, selon les retours d’expérience des personnes interrogées, la contractualisation de l’approvisionnement des projets de méthanisation est loin d’être évidente. Certains organismes stockeurs peuvent hésiter à contractualiser dans la durée pour se garder des marges de manœuvre destinées à honorer d’autres marchés. Plus largement, c’est un marché spéculatif où les opérateurs sont sûrs dans le pire des cas de pouvoir se retourner vers l’aliment du bétail. La question de la qualité des issues destinée à la méthanisation est également posée, au vu des gradients d’issues au fond des silos. Certains experts s’interrogent sur l’évolution des pratiques qui pourraient viser à segmenter ces issues entre les plus intéressantes pour l’alimentaire qui partiraient en aliment du bétail, et les moins pertinentes pour l’alimentaire qui partiraient en méthanisation.

Valorisation agronomique.

o Les issues humides (généralement du maïs), ont plusieurs destinations dont le compostage (± 5 € / tonne en 2007 selon l’Agence Locale de l’Energie des Ardennes51). Certains experts

51 « Etude du gisement des matières fermentescibles et du potentiel de développement de la méthanisation agricole dans le département des Ardennes », ALE 08, 2007

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interrogés mentionnent à ce titre des flux d’issues de silos à destination de la Belgique pour les régions frontalières.

Valorisation en chimie et matériaux biosourcés. Ces valorisations sont ponctuelles, fruits d’un savoir-faire spécifique et sont encore majoritairement à l’état de projets de recherche, sauf cas particuliers.

o Depuis plus de 30 ans, Eurocob basé à Maubourguet (65) est le leader européen de la transformation industrielle de rafles de maïs. Un processus de séparation, broyage et tamisage permet de séparer la partie :

� légère (le cœur et la périphérie), dotée notamment d’une capacité d’absorption jusqu’à 5 fois son poids en eau.

� de la partie dure (partie ligneuse située entre le cœur et la périphérie), qui a notamment une dureté équivalente à celle du fer.

La gamme de poudre et farine à granulométrie maîtrisée mise au point permet de répondre aux cahiers des charges de marchés tels que la nutrition et la santé animale, la cosmétique, la chimie, les polymères et l'industrie52, en étant des supports d’additifs ou des excipients 100 % d’origine végétale (choline, vitamines, arômes, enzymes, médicaments, prémix). Eurocob travaille ainsi avec 2/3 des plus gros fabricants d’additifs en Europe. Selon Eurocob, 2/3 de sa production était destinée en 2010 au secteur de la nutrition animale. Par ailleurs, avec une dureté supérieure à celle du métal, certaines matières produites permettent des applications dans le traitement de surface industriel. Fort de ce savoir-faire Eurocob, historiquement filiale d’Euralis, a été rachetée par la société JRS Rettenmaïer groupe Allemand familial dédié à la production de fibres de bois de spécialité pour les marchés de la pharmacie, de l’alimentation… Cette entreprise de 8,5 M€ de chiffre d’affaires transforme annuellement 30 000 tonnes de rafles de maïs. Elle dispose de deux usines en France (Maubourguet et Aïcirits dans les Pyrénées- Atlantiques) et d’une troisième en Hongrie (Cobex Hungaria KFP) à proximité des bassins de production de maïs semence. A noter que fin 2013 – début 2014 des projets de valorisation de rafles de maïs à des fins énergétiques sur leur zone de production a posé la question de la concurrence d’usages.

o Il existe de manière exploratoire quelques projets visant à valoriser les issues de silos dans ce

domaine. On peut noter le projet européen FUNKIFIBRE MFC53, qui sur la période 2013 -2016 vise à extraire d’issues de silos tels que les sons d’avoine, des celluloses microfibrillées (MFC), qui sont un nouveau type de celluloses nanométriques, afin de valoriser leur légèreté et leur capacité à améliorer les propriétés barrières dans le domaine de l’emballage. Ce projet européen associe le CTP, Almuplas, Artic Fiber Company, Flahavans, Elastopoly Oil.

52 Source : http://www.eurocob.com/ 53 Source : http://www.funkifibre.eu/

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Figure 31 : Concept du projet Funkifibre.

o La difficulté de la valorisation des issues de silos dans le domaine de la chimie est liée à la nécessité de régler simultanément les questions :

� De la concentration d’un gisement diffus et léger répartis entre plusieurs sites, sur un site de transformation unique, permettant de bénéficier d’économie d’échelle.

� De la capacité à extraire l’ensemble des constituants à haute valeur ajoutée de ces issues tout en gérant l’ensemble des sous-produits générés.

� De la modification du coût d’accès à ces matières à court ou moyen terme, lié à la mise en place d’un tel projet du fait de la déstabilisation induite sur les usages existants qui génère une tension sur les prix.

� Du différentiel de valeur créé par rapport aux usages classiques tels que l’alimentation du bétail afin d’être suffisamment incitatif, et de la capacité à tenir ce différentiel dans le temps.

Face à l’ensemble de ces contraintes, ARD par exemple a conclu à la suite d’un travail de fond, à la non faisabilité d’un projet d’unité de cracking de 150 000 tonnes de son de blé, la taille de ce projet devant lui permettre de bénéficier d’économie d’échelle. Technologiquement les procédés de production de xylose ont été mises au point, mais le projet ne pouvait espérer être rentable dans la durée face au risque de concurrence par les prix de 20-30 % de certains acteurs asiatiques intervenant au niveau mondial. En conclusion des entretiens, une approche de type bioraffinerie apparaît utopique dans le domaine des issues de silos. Soit on trouve une molécule à haute valeur ajoutée qui rend économiquement intéressante son extraction et l’enlèvement de l’ensemble des autres sous-produits. Soit l’atomicité des volumes et les coûts logistiques ou de densification vont de fait fortement limiter leur possibilité de valorisation, bien qu’elles contiennent potentiellement des molécules à valeur ajoutée. Selon les acteurs interrogés, il faudrait ainsi sortir de l’image d’Epinal, selon laquelle « il faut aider l’agriculture qui croule sous les matières à les valoriser ». A noter que des issues de silos seraient mixées avec les grains de blé à destination de la production d’éthanol sur le site de Pomacle-Bazancourt, les issues servant de matière tampon. Mais ce serait plus un marché d’opportunité lié à la proximité qu’une réelle création de valeur, les performances hétérogènes de ces issues étant plus ou moins lissées par dilution lors des mélanges réalisés. L’hétérogénéité de ces issues limiterait ainsi leur utilisation.

Conclusions et enseignements : L’alimentation du bétail est de très loin le 1er débouché des issues de silos, avec une part de marché

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estimée à plus de 95 % au niveau national en l’absence de données statistiques fiables et opposables. La valorisation énergétique est une réalité dans le domaine de la combustion et plus récemment de la méthanisation et valorise moins de 5 % de la ressource en corollaire. Les issues servent ainsi principalement à produire de l’énergie ou de la vapeur sur les sites industriels où elles sont présentes à l’image des exemples des chaufferies de Limagrain (63) et de Boortmalt (36). Une première d’activité de commercialisation d’agro-pellets a été initiée en 2009 par la coopérative Île de France Sud, sur la base d’un concept de formulation et d’une marque chapeau (Calys) développée par RAGT Energie. Tendances et perspectives de développement Evaluation du volume disponible et supplémentaire pour valorisation L’ensemble de la ressource est actuellement valorisée. Tout nouveau projet devra se développer par réallocation des ressources existantes. Tout changement d’allocation du marché aura de fait un impact significatif sur la ressource et son prix d’accès. Avec 30 % de parts de marché annoncées potentiellement pour 2030, la méthanisation devrait ainsi avoir un impact conséquent sur le marché des issues de silos, à moins que des contractualisations en longue durée puissent être envisagées. Mais rien n’est moins sûr au vu des pratiques actuelles, qui semblent privilégier les marchés d’opportunité. Tendances et perspectives de développement L’évolution de l’utilisation des issues de silos sera conditionnée vraisemblablement par 2 facteurs clés :

o L’évolution de la réglementation relative aux mycotoxines, qui pourraient rendre impropre à l’alimentation animale les issues de silos, et les orienter (quand elles seraient impropres) vers les marchés de l’énergie.

o L’attractivité économique des nouvelles voies de valorisation, qui seront mises en balance avec les valorisations dans le domaine de l’aliment du bétail.

o La dynamique de développement des projets de méthanisation, les issues de silos étant considérées comme une des ressources ayant le meilleur pouvoir méthanogène. S’il y a un consensus sur l’attractivité du marché de la méthanisation, le rythme de développement n’est pas connu et les objectifs de 30 % de la ressource valorisée à l’horizon 2030 donnés dans le cadre de l’étude Solagro/Inddigo sont à ce jour indicatifs.

Les valorisations dans le domaine de la combustion semblent plus relever d’opportunités entre la rencontre d’un besoin industriel et d’une ressource locale. L’exemple du fonds chaleur qui a soutenu des projets industriels de chaufferie l’illustre bien. Le concept d’agro-pellets Calys porté RAGT Energie et illustré par la coopérative Île de France Sud est une démarche très intéressante, qui demande à se généraliser. Les perspectives de développement dans le domaine de la chimie ou des matériaux apparaissent faibles à l’heure actuelle au vu des actions passées, ou du nombre restreint des projets en cours, même s’il y a de très belles réalisations comme en témoigne la société Eurocob. En activité depuis plus de 30 ans cette société élabore par transformation des rafles de maïs une gamme de produits techniques (poudres, farines…) à destination de la santé animale, des cosmétiques, de la chimie, des polymères et de l'industrie. Conclusions et enseignements : Avec un gisement de 440 000 tMS les issues de silos constituent un gisement significatif au niveau national. S’il est concentré au niveau des organismes stockeurs, il est néanmoins considéré comme diffus et atomisé au niveau de l’ensemble des silos et plateformes de stockage. Ces issues sont durablement destinées au marché de l’alimentation du bétail. Même si ce marché est globalement organisé, pour un nombre d’acteurs significatifs il est considéré comme un marché de repli et d’opportunité permettant dans la pire des situations d’écouler cette ressource soit directement en brut auprès des éleveurs soit auprès des fabricants d’aliments du bétail. La méthanisation fait consensus actuellement, comme étant le secteur offrant le plus d’intérêt en matière de développement marché, sous réserve d’un déploiement réel de cette technologie au niveau national. Les valorisations en combustion semblent plus relever d’opportunités entre la rencontre d’un besoin

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industriel et d’une ressource locale. Au vu des très belles réalisations industrielles identifiées elles devraient continuer à se développer mais peut-être de manière moindre que les usages en méthanisation. Le postulat d’une valorisation de ces issues dans le domaine de la chimie n’a pas été vérifié à ce stade de réalisation des travaux au vu des coûts d’accès aux molécules à haute valeur ajoutée (taux de présence des molécules, coûts d’extraction, coûts logistiques liés au transport de matières peu denses). A noter les développements remarquables de la société Eurocob depuis 30 ans à partir du fractionnement des constituants des rafles de maïs dans le domaine du traitement de surface, des adjuvants pour la chimie ou l’agriculture…

IV. Filière de l’industrie du bois : matières secon daires de l’industrie papetière

Contexte et chiffres clés - Définition du gisement

Les matières secondaires de l’industrie papetière dépendent des procédés papetiers utilisés pour produire la pâte à papier. Un tronc commun à tous les procédés recouvre toutefois :

• Les écorces et assimilés (nœuds du bois…), qui sont issus des opérations de transformation du bois utilisées par les papetiers (écorçage, transformation en copeaux).

• Les chutes de production (papiers ou cartons), qui sont généralement réintégrées directement sur site.

• Les boues de papeterie (boues d’épuration, boues de désencrage), qui sont issues du traitement des effluents des papeteries. Elles présentent une siccité comprise entre 20 et 50 % de matière sèche et peuvent présenter un intérêt agronomique en raison de leur teneur en matière organique et minérale. On distingue généralement les boues primaires et secondaires.

� Boues primaires : l’épuration des effluents chargés en matière organique (fibres cellulosiques) et en charges minérales par traitement physique (sans ajout de réactif) ou physico-chimique génère des boues dites primaires.

� Boues secondaires : l'épuration des effluents par traitement biologique (ou traitement secondaire) consiste à dégrader les matières dissoutes à l'aide de micro-organismes qui se développent naturellement. Les boues résultant de cette épuration sont souvent mélangées aux boues primaires avant leur traitement ultérieur.

• Les cendres de papeterie 54, qui sont issues principalement de la combustion d'écorces et d'éclats de bois.

• Les déchets papetiers ultimes , qui peuvent être envoyés en centres d’enfouissement technique selon COPACEL.

• La vapeur. Les procédés mécaniques génèrent de la vapeur, qui est nettoyée puis utilisée dans la sècherie des machines à papier, car généralement, une unité de production de pâte est connectée à une machine à papier. Pour les procédés chimiques, la vapeur générée par la chaudière de régénération est utilisée pour produire de l’électricité. Du dioxyde de carbone non valorisé, est produit par toutes les usines équipées d’une chaudière biomasse.

3 grandes familles de procédés de fabrication des pâtes papetières se distinguent en France : • Le procédé de fabrication de la pâte mécanique • Le procédé Kraft (base alcaline au sulfate) de fabr ication de la pâte chimique • Le procédé au Bisulfite de fabrication de la pâte c himique

La pâte à papier mécanique est obtenue par désintégration du bois en présence d’eau, à l’aide de disques ou de meules cylindriques : les défibreurs. Dans ce type de pâte, la lignine demeure attachée à la fibre. Le papier fabriqué à partir de cette pâte est dit « avec bois » et est utilisé pour la fabrication de papiers nécessitant peu de résistance (papier journal, papier hygiénique…). Pour plus d’efficacité, des traitements thermiques et/ou chimiques peuvent être utilisés.

54 « Informations-Forêt n°2-2000 Fiche n°607 », AFOCEL, 2000.

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La pâte à papier chimique (procédés Kraft et Bisulf ite) est obtenue en cuisant le bois à haute température dans des « lessiveurs », en présence de produits chimiques (qui diffèrent selon que cela soit un procédé Kraft ou Bisulfite - soude, sulfure de sodium, bisulfite…). Cette « lessive » permet de libérer les longues fibres de bois sans les briser et d’isoler la cellulose des fibres en la séparant de la lignine. Le papier fabriqué à partir de cette pâte est dit « sans bois » et est utilisé pour des produits qui demandent une plus grande résistance (papiers d’impression et d’écriture, papier et carton d’emballage, papiers spéciaux…). Description des procédés mécaniques (dits aussi the rmomécaniques, chimicomécaniques et chimicothermomécaniques) Ces procédés permettent l’obtention de pâtes moins pures en cellulose que les procédés chimiques, mais avec de plus hauts rendements puisque près de 950 kg de pâtes peuvent être produites à partir d’1 tonne de bois. Il existe trois grandes catégories de procédés mécaniques55 :

• Les procédés mécaniques utilisant une meule abrasive en rotation pour transformer des rondins de bois en fibres (soit à pression atmosphérique (SGW), soit sous pression (PGW))

• Les procédés mécaniques sur des copeaux de bois utilisant des raffineurs à disques, sans traitement thermique (RMP) ou avec (TMP). Le traitement thermique (> 100°C) permet d’améliorer les propriétés mécaniques des pâtes.

• Les procédés mécaniques sur des copeaux utilisant des raffineurs avec un traitement chimique préalable du bois (CTMP et CMP). Le traitement chimique (produits soufrés, soude, peroxyde d’hydrogène…) permet d’améliorer le défibrage et de rendre la lignine plus hydrophile. Après traitement, les fibres sont ainsi plus longues avec de meilleures caractéristiques.

• Le procédé bivis permettant de défibrer les copeaux par malaxage. Ce procédé est intéressant pour la production de pâtes à partir de plantes annuelles (blé, lin, chanvre, sorgho…). Il est également utilisé pour la fabrication des papiers fiduciaires.

Ces procédés ont des rendements entre 80 et 90 % pour les CMP, et plus de 90 % pour les autres. Ces procédés génèrent uniquement les coproduits cités précédemment en introduction de la présentation du gisement. Description du procédé Kraft Le procédé Kraft est le procédé le plus courant dans la fabrication des pâtes chimiques (85 à 90 % de la production en France selon COPACEL). Il consiste à mener une hydrolyse alcaline contrôlée à chaud. Le procédé Kraft et les principaux coproduits générés sont résumés sur la Figure 32 ci-dessous. Les ratios en matière principale et coproduits sont indiqués sur ce schéma. On obtient environ 450 à 500 kg de pâte à papier à partir d’une tonne de bois. Les principales étapes du procédé Kraft sont :

• L’étuvage des copeaux de bois. Pour les bois résineux, l’essence de papeterie , composé volatil, est récupérée lors de cette étape.

• L’étape de cuisson chimique avec la liqueur blanche (soude caustique et sulfure de sodium), la cuisson dans le « lessiveur » est effectuée à une température autour de 160 - 175°C pendant des durées de 2 à 8 h : la liqueur noire est obtenue suite à cette étape. Elle se compose principalement de dérivés de la lignine sous forme de sulfures (thiolignine ou sulfate lignine), de lignines dissoutes et d’hémicelluloses dégradées. Cette liqueur noire (contenant 14 à 18 % de matière sèche) est ensuite concentrée (jusqu’à une teneur de matière sèche de 65 à 75 %), acidifié et désulfuré. Le « tall oil » qui est la phase surnageante de la liqueur noire en est ensuite extrait (seulement pour le procédé Kraft appliqué à du bois résineux). Ce tall oil est riche en acides résiniques, en acides gras et en stérols.

• Le résidu de liqueur noir est alors séché et brûlé à 1 200°C. Cette dernière opération permet de produire l’énergie nécessaire à alimenter le procédé Kraft. Elle permet aussi de recycler la grande majorité des réactifs qui sont réincorporés dans le process telle que la soude.

• Une étape de blanchiment est possible et donnera une pâte plus riche en cellulose avec moins de lignine.

55 Techniques de l’Ingénieur : « Procédés papetiers. Fabrication des pâtes », Michel PETIT-CONIL (1999)

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NB : Une variante du procédé Kraft (pas effectuée en France) consiste à pré-hydrolyser la matière à haute température pour séparer les hémicelluloses et obtenir une meilleure pureté en cellulose. Cette cellulose possède toutefois un plus faible degré de polymérisation.

Figure 32 : Procédé Kraft et matières secondaires associées. Ratios de pâte et de matières secondaires générées à partir de 1 tonne de bois et composition chimique

(schéma adapté d’après le cours « Bioproduits » de l’INP Pagora, 2012) Nota : le ratio de 100 kg de liqueur noire obtenu pour la production de 50 kg de pâte à papier se base sur les gisements de pâtes chimiques et de résidus de liqueur noire (à destination énergie) produits en France et estimés par COPACEL.

Ce chiffre désigne la liqueur noire concentrée, soit le résidu prêt à être brûlé. Description du procédé au bisulfite Ce procédé est beaucoup moins répandu que le Kraft et ne peut s’utiliser que pour un approvisionnement en résineux56. A l’échelle de la France, il représente 10 à 15 % des pâtes chimiques selon COPACEL. Il permet l’obtention de cellulose plus pure, utilisable en tant que cellulose de spécialité. Le traitement chimique du bois est acide, contrairement au procédé Kraft. Il en résulte des fibres de cellulose plus dégradées que pour le procédé Kraft, mais la qualité des pâtes issues du bisulfite reste nettement supérieure à celles des pâtes mécaniques. Les pâtes issues du procédé au bisulfite se blanchissent plus facilement que les pâtes au sulfate (procédé Kraft) qui ont un caractère opacifiant beaucoup plus faible. Concernant le procédé Bisulfite, les principaux coproduits générés et les ratios liés sont résumés dans le schéma de la Figure 33. On obtient un peu moins de 400 kg de cellulose de spécialité par tonne de bois utilisée. Les principales étapes de ce procédé sont :

56 Techniques de l’Ingénieur : « Procédés papetiers. Fabrication des pâtes », Michel PETIT-CONIL (1999)

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• La préparation de l’agent de cuisson. L’agent bisulfite est obtenu à partir d’acide sulfureux provenant de la réaction entre le dioxyde de soufre et l’eau. Le dioxyde de soufre provient quant à lui de la combustion de souffre dans un excès d’air. L’agent de cuisson, le bisulfite d’ammonium, est préférentiellement utilisé pour les bois résineux avec une forte teneur en résine. Le bisulfite de sodium est également intéressant alors que le bisulfite de calcium est évité, car des résines insolubles peuvent se former dans les pâtes.

• L’étape de cuisson chimique. La cuisson s’effectue à 120 – 150°C pour une durée de 8 à 12 h. Cela entraîne une hydrolyse partielle de la lignine et des hémicelluloses qui se retrouvent sous la forme de lignosulfonates et de liqueur noire acide contenant de la lignine sulfonée. Cette liqueur noire est brulée et le soufre est régénéré pour la cuisson bisulfite.

• L’étape de purification de la pâte écrue. La pâte est purifiée en cellulose par une extraction à chaud dans la soude qui permet d’éliminer de nouveau un peu des hémicelluloses et de la lignine restant. De la lignine alcaline est ainsi générée. Dans le cas de l’usine Tartas du groupe TEMBEC, cette liqueur noire alcaline (concentrée à 50 – 60 % de matière sèche) est vendue aux industriels du procédé Kraft qui sont équipés pour la brûler et pour régénérer la soude dans leur procédé. Des savons de tall oil sont également extraits lors de cette étape et commercialisés pour être raffinées par la société DRT (les Dérivés Résiniques et Terpéniques) par exemple.

Figure 33 : Procédé Bisulfite et coproduits associés. Ratios de pâte et de matières secondaires générées

à partir d’1 tonne de bois (source TEMBEC). En résumé, les matières secondaires suivantes sont générées par grande famille de procédé de fabrication de pâte de cellulose :

Procédé thermomécanique Procédé Kraft Procédé bisulfite Ecorces et assimilés Ecorces et assimilés Ecorces et assimilés Chutes de production Chutes de production Chutes de production Boues de papeterie Liqueur noire alcaline Liqueur noire (acide et alcaline) Cendres Tall Oil Lignosulfonates Essence de papeterie Savons de tall oil Boues de papeterie Boues de papeterie

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Cendres Cendres

Figure 34 : Matières secondaires générées en fonction du procédé de fabrication des pâtes de cellulose Nota : Seules les boues d’épuration ont été considérées dans ce rapport et non les boues de désencrage

issues du recyclage du papier A noter que les « déchets » issus seulement du recyclage du papier (boues de désencrage, refus de recyclage..) n’ont pas été considérés dans cette étude. Seules les boues d’épuration ont donc été prises en compte pour les boues de papeterie.

- Acteurs et chaîne de valeur associée

En France, l’industrie papetière et de la valorisation de ces coproduits repose principalement sur :

• Les fabricants de pâtes à papier

Procédés Acteurs

Pâtes mécaniques et thermomécaniques

Cascades (groupe Cascades, Canada), à La Rochette (73). UPM-Kymenne France (Groupe UPM, Finlande) à Stracel (67). Norske Skog (groupe Norske Skog industrier, Norvège) à Golbey (88), produit chaque année 600 000 t de papier journal Stora Enso (groupe finno-suédois) à Corbehem (62).

Pâtes chimiques

Fibre Excellence (Société Paper Excellence BV (Pays Bas), groupe Asia Pulp and Paper - Sinar Mas, Indonésie). Deux usines (rachetées en 2010 à TEMBEC) : à Saint-Gaudens (31) utilisant le procédé kraft sur bois de feuillus et Tarascon (13) utilisant le procédé kraft sur bois de résineux. Saint Gaudens produit 270 000 de pâtes et Tarascon 250 000 t. Gascogne Paper (kraft), Mimizan, (40). International Paper Celimo (groupe International Paper, USA) à Saillat (87) avec une production de 250 000 tonnes de pâtes. Smurfit Kappa Cellulose du Pin (groupe Smurfit Kappa, Irlande). Procédé kraft sur bois de résineux, Facture, (33).

Celluloses de spécialité

TEMBEC (groupe canadien), Tartas (40), seule site utilisant le procédé bisulfite sur du bois de résineux ; avec une production annuelle de 150 000 t de cellulose

• Des acteurs du raffinage des coproduits de fabrication de pâtes (peu nombreux en France) : � La société DRT (les Dérivés Résiniques et Terpéniques) située dans les Landes (40),

est la seule au monde à raffiner tant les produits terpéniques issus de l’essence de papeterie que ceux issus du tall oil.

• Des acteurs commercialisant des extraits d’écorce : � DRT (40) � Berkem (24) � Biolandes (40) � Naturex (84)

• D’autres entreprises commercialisent des tannins végétaux, mais ne sont pas localisées en France,

comme Omnichem (groupe Ajinomoto ) en Belgique et Silvachimica en Italie.

• Des centres techniques comme le centre technique du papier (CTP) ou l’Institut technologique

Forêt Cellulose Bois Construction (FCBA)

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Figure 35 : Localisation des usines produisant des pâtes de cellulose en France57

Nota : depuis l’édition de cette carte, l’usine de STORA ENSO a fermé son unité en 2014 - Chiffres clés et volumes générés Selon COPACEL en 2014, l’industrie des pâtes à papiers a produit 1 518 000 tonnes de pâte de cellulose. En 2013, la production française était concentrée sur 91 sites industriels pour un chiffre d’affaires de 736 millions d’euros. Elle a mobilisé près de 7 millions de tonnes de bois (à 95 % français) et majoritairement des résineux à près de 80 %. C'est une industrie qui a dû s’adapter ces dernières années en matière de maîtrise de ses prix de revient, d’atteinte de son autonomie énergétique, de réduction de ces flux de coproduits et d’optimisation de leur valorisation, et de réponses aux exigences environnementales.

Les volumes de pâtes de cellulose produits sont dét aillés ci-dessous par type de procédés

Procédés Produit obtenu Rendement de

production (kg/tonne de bois utilisée)

Production Française en 2014 (tonne)

Procédé s mécanique s Pâte à papier 950 kg* 284 000 Procédé Kraft Pâte à papier 450 à 550 kg 1 084 000 Procédé bisulfite Cellulose de spécialité 350 kg 150 000 Total 1 518 000

* Procédé thermomécanique Figure 36 : Production française de pâte de cellulose en 2014

(Source : FRD / COPACEL, entretiens et analyse bibliographique)

57 « Memento 2014 », FCBA 2014.

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Il n’existe quasiment aucune donnée officielle ou é tude quantifiant les coproduits et déchets de l’industrie papetière. Les informations collectées ont été élaborées à partir d’entretiens d’experts (COPACEL, TEMBEC, NORSKE SKOG, INTECH’FIBRES, CENTRE TECHNIQUE DU PAPIER CTP…) et à partir de l’étude « Bioraffineries : panorama et développement » menée par Hugues De Cherisey en 2010 pour l’ADEME. Les gisements en coproduits de l’industrie papetière en 2014 peuvent être résumés de la façon suivante :

Matières secondaires

générées (tonne)

Procédé mécanique

Procédé Kraft

Procédé bisulfite Total Prix

Ecorces et assimilées nrs nrs nrs 500 000 (3) Prix énergie

Liqueur noire 0 2 130 000 (4) 270 000 (2) 2 400 000 (4) Prix énergie ou prix transport

Tall Oil 0 20 - 30 000 (1) 0 20 - 30 000 (1) 0,5 €/kg (5)

Essence de papeterie 0 7- 8 000 (1) 0 7- 8 000 (1) 1,4 €/kg (5)

Lignosulfonates 0 0 100 000 (2) 100 000 (2) < 0,5 €/kg (2)

Savons de tall oil 0 0 4 500 (2) 4 500 (2) < 0,5 €/kg (7)

Boues de papeterie primaires

nrs nrs nrs 450 000 (6)

Prix compostage,

épandage, briqueterie ou prix énergie

Boues de papeteries secondaires

nrs nrs nrs 35 - 40 000 (6) Prix compostage ou épandage

Cendres de papeterie nrs nrs nrs 200 000 (4) Prix énergie

Figure 37 : Production annuelle française en matières secondaires de l’industrie papetière (unité en tonnes)

(1) Source étude Ademe 2010 « Bioraffineries : panorama et développement » (2) Source TEMBEC TARTAS 2014 (3) Hypothèse : une moyenne de 10 % d’écorce massique par bois a été considérée. Selon COPACEL, en

2013, environ 5 millions de tonnes de bois français (hors plaquettes connexes de scieries PCS) ont été utilisés

(4) Source COPACEL 2014 (5) Site internet https://commoprices.com/, prix datant de février 2015 (6) Source CTP pour l’année 2012. Ces quantités de boues primaires et secondaires sont confirmées par

COPACEL qui a estimé à 520 000 tonnes le gisement global en 2014. (7) Source DRT 2015

COPACEL évalue la ressource de liqueur noire actuellement à environ 2,4 millions de tMB/an (chiffre 2014), soit deux fois la quantité de pâte à papier/celluloses de spécialité produite en France. C’est le coproduit majoritaire. Les gisements les plus importants concernent ensuite les boues de papeterie et les écorces qui représentent chacun environ 500 000 tonnes (2014). Les boues de papeterie peuvent être soit primaires (obtention par traitement physico-chimique ou physique), soit secondaires (obtention par traitement biologique). Les boues primaires sont majoritaires avec un gisement de 450 000 tonnes en 2012 pour 35 à 40 000 tonnes de boues secondaires produites d’après le CTP. A noter que le choix de la station d’épuration conditionne significativement les volumes générés des boues de papeterie. D’après COPACEL, les cendres de papeteries issues de la combustion des écorces, boues de papeterie… correspondent à un volume global estimé à 200 000 tonnes en 2014. Les coproduits à destination de la chimie représentent eux de plus petits volumes, 100 000 tonnes de lignosulfonates (à 50

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% de matière sèche) et 4 500 tonnes de savons de tall oil, tous deux issus du procédé bisulfite (source TEMBEC 2014), 20 à 30 000 tonnes de tall oil et 7 à 8000 tonnes d’essence de papeterie en 201058. A noter que les lignosulfonates sont considérées actuellement comme des produits à part entière et non comme des coproduits, puisque les industriels mettent en place une politique complète de commercialisation de ces produits. Le prix de l'essence de papeterie se situait en février 2015 autour de 1400 €/t, mais il est déjà passé sous la barre des 500 €/t par le passé. Ce produit qu'il faut désulfuriser a un prix de marché un peu inférieur à l’essence de térébenthine issue du gemmage, qui se situe plutôt autour de 1500 à 2500 €/t. Le tall oil pour sa part, s'est vendu ces dernières années entre 300 et 600 €/t59.

Figure 38 : Répartition de la production annuelle française de coproduits de l’industrie papetière en volume en tMB (2014)

- Réglementation et impacts sur la filière

Les valorisations des matières secondaires issues de la filière de l’industrie du bois sont soumises aux réglementations en vigueur relatives à l’utilisation de combustibles solides et DIB en combustion, aux émissions de fumées associées, aux traitements des effluents et réalisation des épandages liés au champ. A noter que l’industrie papetière dispose d’un arrêté propre « Arrêté relatif à l’industrie papetière » du 3 avril 2000, qui fixe notamment les conditions d’épandage, les valeurs seuils en éléments traces métalliques et en substances organiques, et les éléments de caractérisation de la valeur agronomique. Conclusions et enseignements : Les matières secondaires de l’industrie papetière, dont les gisements ne sont pas quantifiés officiellement ont demandé des investigations préci ses. Selon COPACEL en 2014, l’industrie des pâtes à papi ers en France a produit 1,52 millions de tMS de pâte de cellulose avec 19 % de pâte mécanique, 71 % de pâte Kraft, et 10 % de pâte bisulfite. Plus de 3,7 millions de tMS de matières secondaires ont ainsi été générées, près des 2/3 en volume étant constitués par la liqueur noire qui se compos e de résidus de lignine, hémicellulose et d’autres composés organiques. Viennent ensuite les boues de papeterie, les écorces et les cendres avec un gisement de plus de 1 millions de tMS et des applic ations majoritairement énergétiques et agronomiques. Les coproduits lignosulfonates, tall oil, essence de papeterie, savons de tall oil représentent respectivement 2,7, 0,8, 0,2 et 0,1 % parts du marché en volume et sont commercialisés avec un prix de vente autour de 0,5 à 1,5 €/kg pour des applications en chimie.

58 Source : Etude « Bioraffineries : panorama et développement » menée par Hugues De Cherisey en 2010 pour l’ADEME. 59 Source : Etat de l’art sur la production de molécules chimiques issues du bois en France », menée par Hugues De Cherisey, pour le compte de l’ADEME, 2015.

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Caractérisation des différentes voies de valorisati ons 4 voies de valorisation sont identifiées à ce jour, par ordre décroissant d’importance :

• Valorisation énergétique : combustion/ cogénération • Valorisation agronomique : épandage, compostage et paillage • Valorisation en chimie : chimie du bois • Valorisation matériaux : briqueterie

Valorisation énergétique

• Les matières secondaires de l’industrie papetière sont généralement valorisées bruts directement sur site. Ils peuvent dans certains cas être destinés à la vente.

• Ce type de valorisation est accessible à une grande majorité de matières secondaires de l’industrie du bois : écorces et assimilés, liqueurs noires, boues de papeterie. Les écorces et les boues peuvent être mélangées pour être brûlées. Ainsi, la quasi-totalité de la liqueur noire serait utilisée pour cette voie (soit 2 400 000 tonnes), alors que 12 % des boues de papeterie seraient transformées en énergie (soit près de 60 000 tonnes).

• La valorisation directe est privilégiée chez les papetiers. Ainsi, les industriels sont amenés simultanément à produire leur propre énergie, à améliorer leur autonomie énergétique et à réduire leurs émissions de CO2. Des investissements significatifs ont ainsi été réalisés ces dernières années, tous les sites étant équipés en chaudière et/ou cogénération aujourd’hui. Cette régénération en interne est le cas pour les liqueurs noires alcalines (lignine sous forme de sulfure) réinjectées dans le procédé Kraft, et les liqueurs noires acides (lignine sulfonée) réinjectées dans le procédé Bisulfite. En revanche, les liqueurs noires alcalines générées lors du procédé bisulfite sont dans le cas du site Tartas de Tembec, vendues aux industriels spécialisés dans le procédé Kraft.

• Fort de cette dynamique, l’industrie papetière selon COPACEL60 : � Représente aujourd’hui 17 % de l’énergie renouvelable européenne et 28 % de

l’énergie renouvelable générée par la biomasse en Europe. � Aurait diminué ses émissions de CO2 de 35 % entre 2005 et 2012.

Valorisation agronomique

• Seules les boues de papeterie et les cendres de combustion sont concernées par cette valorisation par épandage au champ ou valorisation en compost en mélange avec d’autres sources de matières organiques afin de satisfaire la norme NF U44 095 de mai 200261.

• Plus de la moitié des boues de papeterie sont éliminés par épandage (environ 260 000 tonnes) et plus d’un quart sont éliminés par compostage (environ 75-80 000 tonnes). Les boues de papeterie sont riches en carbonate de calcium ce qui leur confère les propriétés d’un amendement basique et permet d’éviter l’ajout de chaux en terrain acide. La cellulose contenue dans les boues constitue un apport en humus, une tonne de boue de papeterie apportant environ 100 kg d’humus. A noter que les boues biologiques secondaires peuvent être utilisées seules pour cette application, mais elles sont la plupart du temps utilisées en mélange avec les boues primaires. Pour les autres applications, les boues secondaires sont moins intéressantes du fait de leur faible stabilité, de leur fort taux d’humidité et de leur plus faible teneur en fibres.

• Les cendres de papeterie62 constituent également une forme d'amendement agricole intéressant compte tenu de leur richesse en éléments minéraux. Ces cendres présentent le gros avantage de ne pas provoquer de nuisances olfactives et de ne pas apporter d'azote. Leur potentiel en matière d'amendement est réel puisque 1 tMS apporte environ 200 kg de chaux. Mais c'est aussi un fertilisant potassique de premier ordre (1 tMS = 30 kg de K2O), élément reconnu comme un facteur de qualité, cher, et peu présent dans les amendements traditionnels. En France, des expériences pilotes d'épandage ont été conduites dans les domaines agricoles et forestiers. L'épandage se fait à des doses variant entre 5 et 10 tMS/ha (doses équivalentes à des fertilisations de référence) avec des épandeurs à fumier classiques (hérissons verticaux + table d'épandage).

• Les écorces peuvent avoir également un débouché agronomique avec une utilisation en tant que paillage pour la jardinerie.

60 Source : www.copacel.fr/fr 61 Norme NF U44 095 de mai 2002 : Amendements organiques - Composts contenant des matières d'intérêt agronomique, issues du traitement des eaux 62 « Informations-Forêt n°2-2000 Fiche n°607 », AFOCEL, 2000.

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Valorisation chimique (En phase d’émergence) • La chimie du bois trouve son origine dans l’industr ie papetière et la valorisation de la

cellulose , qui a favorisé celle des autres composantes du bois : � La cellulose, matière principale des pâtes à papier est en effet aujourd’hui

essentiellement valorisée à travers les usages papier carton, une minorité étant consacrée à des usages chimiques/textiles : adhésif, cosmétique (vernis à ongle…), textiles (viscose…).

� Les hémicelluloses ont des potentiels de valorisation dans des domaines aussi variés que l’industrie papetière ou l’industrie pharmaceutique : collage des étiquettes, liants de gouaches et aquarelles, cosmétiques… mais elles ne sont actuellement pas séparées des coproduits papetiers et se retrouvent sous forme dégradés dans la liqueur noire par exemple

� La lignine est, quant à elle, extraite du bois pour former la liqueur noire, principalement brûlée pour fournir de l’énergie nécessaire à la confection du papier. D’autres voies de valorisation sont actuellement investiguées et certaines développées hors France : arômes (vanilline…), fibres de carbone, résines (charge ou liants), adhésifs, émulsification des ciments, production de charbon actif, biocarburants de 2ème génération (méthanol…).

� Les matières extractibles ont potentiellement un champ nouveau de valorisation dans le domaine de l’industrie pharmaceutique et chimique.

• La chimie du bois est encore émergente à l’échelle nationale et mondiale , et est entrain de

structurer par rapport à la chimie des agroressources dynamisée par des grands groupes agro-industriels tels que Roquette, Avril (ex. Sofiprotéol), Tereos ou Vivescia.

Toutefois, pour les matières secondaires de l’industrie papetière telles que le tall oil, l’essence de papeterie et les lignosulfonates, c’est une chimie déjà très bien organisée que l’on rencontre, comme décrit ci-dessous.

• Applications chimiques à partir de coproduits issus du procédé KRAFT

� Liqueur noire : la lignine présente dans la liqueur noire a subi une forte décomposition due aux chaleurs endurées lors du procédé et aux produits chimiques utilisés. Son utilisation industrielle est quelque peu problématique à cause de la présence de soufre et d’une masse moléculaire élevée (entre 600 et 200 000 g/mole). De plus, les liqueurs noires ne sont pas identiques selon qu'elles proviennent de bois de résineux ou de feuillus, ce qui peut compliquer le développement d'applications de masse de cette lignine. Ces liqueurs noires sont aujourd’hui essentiellement valorisées sur site dans des chaudières dédiées avec les écorces. D’autres voies de valorisation sont possibles, mais non exploitées actuellement à l’échelle nationale. On peut citer par exemple la lignine Kraft solide (extraite de la liqueur noire par la technologie LignoBoost) qui reste à ce jour majoritairement granulée pour être brulée dans le four à chaux du même site industriel. 2 entreprises valorisent actuellement le procédé LignoBoost : DOMTAR dans son usine de Plymouth aux USA, et STORA ENSO dans son usine de Sunila en Finlande63.

� Tall oil (chimie des extractibles du bois) : en France, 20 à 30 000 tonnes de tall oil ont été générés en 201064. Ce tall oil est raffiné par DRT (société française), DRT se basant sur un approvisionnement international (France, Péninsule ibérique…). Sa capacité actuelle de transformation de 45 000 tonnes/an devrait doubler pour s’établir à 100 000 tonnes. Le fractionnement du tall oil en agents chimiques et en autres molécules, s’effectue par distillation à haute température et donne les produits suivants :

� Les acides gras (« tall oil fatty acids » = TOFA) : ce sont des acides oléiques et linoléiques par exemple et des esters d’acides gras. Ils sont utilisés pour les huiles, lubrifiants, encres.

63 Source : Etat de l’art sur la production de molécules chimiques issues du bois en France », menée par Hugues De Cherisey, pour le compte de l’ADEME, 2015. 64 Etude « Bioraffineries : panorama et développement » menée par Hugues De Cherisey en 2010 pour l’ADEME. Annexe page 197.

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Septembre 2015

Panorama des coproduits et résidus biomasse à usage des filières chimie et matériaux biosourcés en France 56

� Le tall oil distillée (« distilled tall oil » = DTO) : il s’agit d’un mélange d’acides gras et d’acides résiniques. Ils sont utilisés pour les huiles industrielles, lubrifiants, encres, savons, émulsifiants, bitumes. Ces acides peuvent aussi être utilisés comme résines tackifiantes pour polyuréthane.

� Les colophanes de tall oil (« tall oil rosin » = TOR) : les colophanes sont un mélange d’acides résiniques. Ils sont présents sur les marchés des pigments, caoutchoucs, encres, colles, adhésifs, chewing-gums, cosmétique, vernis, marquage routier, peintures, polyuréthanes et pour les synthèses polymériques en émulsion (ABS…). Dans les peintures, ils permettent par exemple de remplacer l’anhydride phtalique et de rendre la peinture 100 % végétale.

� Le poix de tall oil (« tall oil pitch » = TOP) : il s’agit des produits les plus lourds présents dans le fond de distillation. Les phytostanols en sont extraits et sont utilisés dans la pharmacie, la diététique, la nutraceutique mais aussi pour les bitumes.

Les matières les plus nobles sont le TOFA et le TOR. Le TOR (collophane de tall oil) se valorise toutefois moins bien que le collophane de gemme (vendu avec un prix fluctuant autour de 2000 €/t), mais se valorise mieux que l’énergie. DRT produit 15 000 tonnes de colophane par an et achète de la colophane de gemme et de la colophane scandinave pour compléter ses approvisionnements65.

Source DRT

� L’essence de papeterie (chimie des extractibles du bo is) : en France, 7 à 8 000

tonnes ont été produites en 201066. Cette essence se rapproche de l’essence de térébenthine provenant du gemmage. L’essence de papeterie contient un mélange de terpènes soufrés (fort odorant), qui nécessite un pré-traitement de désulfurisation avant fractionnement. La distillation est elle aussi une opération délicate, car les écarts de température d’ébullition des molécules à séparer sont très faibles. Cette technologie demande un savoir-faire important et des investissements coûteux, ce qui limite le nombre d’industriels présents sur ce secteur. En France, l’essence de papeterie est valorisée intégralement par DRT, leader mondial avec un volume de 47 000 tonnes par an. Elle complète son approvisionnement en Europe, mais aussi aux USA. A noter que DRT ne traite presque plus d'essence de gemmage. Trois grandes familles de terpènes peuvent être extraites de l’essence de papeterie :

� L’α pinène � Le β pinène � Le δ,3-carène

65 Source : Etat de l’art sur la production de molécules chimiques issues du bois en France », menée par Hugues De Cherisey, pour le compte de l’ADEME, 2015. 66 Etude « Bioraffineries : panorama et développement » menée par Hugues De Cherisey en 2010 pour l’ADEME. Annexe page 197.

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Panorama des coproduits et résidus biomasse à usage des filières chimie et matériaux biosourcés en France 57

Ces terpènes étaient utilisés historiquement comme solvants, mais ils trouvent aujourd’hui de nouvelles applications dans la parfumerie, dans le domaine des adhésifs et pour la réalisation des chewing-gums. Les dérivés de terpènes peuvent être utilisés sous une forme alcool, ester, hydrocarbonées ou encore être polymérisés pour devenir des résines tackifiantes67. En plus de la parfumerie et des adhésifs, les terpènes trouvent donc de nombreuses applications industrielles en tant que :

� Précurseurs pour de nombreuses synthèses chimiques � Réactifs et agents moussants pour la flottation des minerais � Produits détergents � Produits pour les peintures et les vernis

Source DRT

DRT est actuellement en phase de lancement d’une nouvelle unité de distillation d’une capacité de 45 000 tonnes pour traiter l’essence de papeterie.

• Applications chimiques à partir de coproduits issus du procédé Bisulfite

� Lignosulfonates 68 : En France, 100 000 tonnes ont été commercialisées par l’usine Tartas de TEMBEC en 2014. Sous forme liquide à 50 % de matière sèche, ils ont des usages variés pour les applications suivantes : � Béton (agents dispersants, plastifiants, retardateurs de prise) � Nutrition animale (cohésion des aliments granulés), � Industries du cuir et de la tannerie (agents tannants), � Papeterie (en compétition avec l'amidon, dans ses fonctions de liant), � Industrie des panneaux de bois (liant non toxique), � Divers (agent d'agglomération d'engrais, dispersant, émulsifiants et mouillants pour

produits phytosanitaires, …). Les lignosulfonates peuvent également être des précurseurs de la vanilline (cf. entreprise Borregaard en Norvège) et de l’éthanol de haute pureté peut être obtenu à partir de la liqueur noire acide sulfonée (cf. entreprise TEMBEC dans l’une de ses usines au Québec).

Valorisation matériau

• Seules les boues de papeterie ont une application actuellement en matériau. Environ 19 % des boues d’épuration (soit environ 90 à 95 000 tonnes de boues) sont aujourd’hui transformées pour le secteur de la briqueterie d’après le CTP, en étant incorporées à hauteur de 15 à 20 % en volume (ou 2 à 5 % en masse). La siccité des boues (initialement de 30 à 45 %) doit être portée au minimum à 50 %, ce qui permet de réduire leurs odeurs. Ce secteur valorise leur teneur importante en alumines et carbonates. Les fibres de cellulose encore présentes dans les boues primaires apportent de la porosité aux briques et ainsi des propriétés d’isolation phonique et thermique. Cependant, l'introduction des boues dans le procédé de fabrication peut provoquer des tâches noires sur les briques, ce qui rendrait plus difficile leur commercialisation. Les débouchés en cimenterie ont quant à eux été abandonnés depuis quelques années du fait d’un prix de traitement

67 Dans le domaine des adhésifs, désigne des résines thermoplastiques, de faibles masses moléculaires, entrant dans la composition des colles. 68 Etude « Bioraffineries : panorama et développement » menée par Hugues De Cherisey en 2010 pour l’ADEME. Annexe page 197.

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Septembre 2015

Panorama des coproduits et résidus biomasse à usage des filières chimie et matériaux biosourcés en France 58

des boues plus élevé, avec une obligation de réduire leur humidité et leur taux de matières organiques.

• A noter que par le passé (années 2000), une étude recensait la valorisation en Aquitaine de 10 500 tonnes de boues primaires dans de le domaine des panneaux isolants69 et des brevets existent sur ce sujet70.

L’ensemble des matières secondaires papetières et d e leurs valorisations actuelles détaillées ci-dessus sont présentées dans le schéma de synthèse s uivant :

Figure 39 : Schéma de synthèse des matières secondairesde l’industrie papetières

et de leurs principales voies de valorisation actuelles A noter que les savons de tall oil sont commercialisés à DRT pour être hydrolysés en tall oil et distillés

Sur la base de l’ensemble de ces éléments, les valorisations des matières secondaires de l’industrie papetière peuvent être synthétisées de la façon suivante :

Ressources (tonne)

Volume

Total Produit

Valorisation matériau

Valorisation

énergétique

Valorisation agronomiqu

e

Valorisation

en chimie

Volume supplémentaire disponible

Source

Ecorces et 500 0 Forts Forts Faibles nrs FRD/

69 Etude Ademe « Industrie papetière française, gestion et traitement des déchets », 2001 70 Procédés et installation de fabrication de panneaux isolants et autres éléments rigides utilisant des sous-produits de l'industrie papetière. EP 0429735 A1 (1991).

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Panorama des coproduits et résidus biomasse à usage des filières chimie et matériaux biosourcés en France 59

assimilés 000 volumes volumes? volumes COPACEL

Liqueur noire

2 400 000 0 2 400 000 0 0 nrs COPACE

L

Tall Oil 20 - 30 000 0 0 0 20 - 30 000 nrs ADEME

Essence de papeterie

7- 8 000 0 0 0 7- 8 000 nrs ADEME

Lignosul fonates

100 000 0 0 0 100 000 nrs TEMBEC

Savons de tall oil 4 500 0 0 0 4 500 nrs TEMBEC

Boues de papeterie

490 - 520 000

90 - 95 000 55 - 60 000 30 - 35 000 0 nrs CTP /

COPACEL

Cendres de papeterie

200 000 0 nrs nrs 0 nrs COPACE

L

TOTAL 3,7 – 3,8

millions 90 - 95 000 > 2,5

millions > 100 000 nrs

Figure 40 : Synthèse chiffrée des valorisations des matières secondaires de l’industrie papetière (unités en tonne)

Conclusions et enseignements : En synthèse, toutes les matières secondaires de l’i ndustrie papetière et leurs principales applications (énergie, agronomie, chimie, matériaux ) sont résumés dans le schéma de la Figure 40. La valorisation énergétique représente ainsi le plu s fort tonnage avec plus de 2,5 millions de tonnes d’écorces, de liqueur noire et de boues d’épuration principalement brûlées. Les applications en agronomie concernent les écorce s (paillage), les cendres de papeterie et les boues de papeterie (épandage et compostage).

La valorisation par la voie chimique est quant à el le déjà très bien organisée. Cela concerne de plus petits volumes inférieurs à 150 000 tonnes, mais qu i peuvent mener à des molécules à haute valeur ajoutée. Ainsi à partir de lignosulfonates, de tall oil (dérivés de lignines), d’essence de papeterie (extractibles terpènes) et d’écorces (extractibles) , de nombreux composés et précurseurs de synthèse peuvent être obtenus. Les applications de ces nouveaux produits formés couvrent un périmètre très large dans le monde de la chimie (ph armacie, diététique, parfumerie, adhésifs, produits détergents,….). Enfin, la valorisation matériau est celle actuellem ent la moins importante avec principalement une application recensée, avec l’utilisation d’environ 90 000 tonnes de boues de papeterie (boues d’épuration) pour la réalisation de briquettes.

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Panorama des coproduits et résidus biomasse à usage des filières chimie et matériaux biosourcés en France 60

Tendances et perspectives de développement Tendances et évolutions à venir

• La tendance structurelle constatée ces dernières années est une baisse tendancielle de l’activité française de production papetière : - 31 % entre 2003 et 2013. Les pâtes mécaniques sont davantage concernées (- 41 %), que les pâtes chimiques (- 28%). Cette dynamique devrait significativement impacter les volumes de coproduits générés par ces industries.

• Ind icateurs d’activités 2 003 2 013 Tendances

Pâtes à papier totale 2 471 000 t 1 699 000 t - 31 % Pâtes mécaniques 630 500 t 371 600 t - 41 % Pâtes chimique 1 840 900 t 1 327 400 t - 28 % Bois français 7 998 100 t 6 664 300 t - 17 % Bois étranger 520 500 t 328 600 t - 37 %

Figure 58 : Indicateurs d’évolution de l’industrie papetière71

• A contrario, depuis une dizaine d’années on assiste à une dynamique de fonds ayant permis

d’améliorer très fortement la valorisation effective de l’ensemble des coproduits de l’industrie du bois en général et de l’industrie papetière en particulier.

• Les perspectives de développement se situent principalement dans le domaine de la chimie, puis des matériaux et enfin dans le secteur de l’énergie. Les travaux actuels consistent à extraire les molécules chimiques des matières secondaires valorisées en énergie (écorces, liqueur noire, boues d’épuration). Et une fois les molécules à haute valeur ajoutée extraites des écorces par exemple, celles-ci conservent leurs propriétés calorifiques et peuvent être brûlées de la même façon pour alimenter les chaudières.

Evaluation du volume supplémentaire disponible pour de nouvelles valorisations

• L’ensemble des études analysées et des entretiens réalisés tendent à conclure que la très grande majorité, pour ne pas dire la totalité des matières secondaires de l’industrie papetière sont valorisés actuellement.

• Ces travaux ont également montré que des études sont en cours afin de trouver de nouvelles voies de valorisation à plus forte valeur ajoutée pour l’ensemble des matières secondaires générées par l’industrie papetière.

• L’idée est ainsi de voir comment récupérer certaines molécules à plus haute valeur ajoutée sans briser les chaînes de valorisation actuelle.

Perspectives de développement Valorisation chimique (En phase d’émergence) La chimie du bois ouvre de nombreuses opportunités, tant en termes de croissance que de marché potentiel dans plusieurs secteurs : les produits de la chimie biosourcée, les alcools, les résines et plastiques biosourcés, les molécules plateformes… Chacun de ces usages connaît des taux annuels de croissance élevés, de 5 %/an pour les produits issues de la chimie biosourcée, à jusqu’à près de 24 %/an pour les résines biosourcées72. L’usine du groupe TEMBEC localisé sur le site de Ta rtas fait partie des pionniers dans ce domaine au niveau mondial et fonctionne sur un modèle de bioraffinerie. A partir de pin maritime, TEMBEC produit des celluloses de haute pureté destinées au marché des éthers cellulosiques, celluloses microcristallines, nitrocellulose. Elles sont utilisées pour réaliser des produits à destination de l'industrie alimentaire (épaississants et gélifiants), de l'industrie pharmaceutique (pelliculage des comprimés), de l'industrie des cosmétiques (fluidifiant pour les crèmes), vernis, peintures… Le site de Tartas a ainsi radicalement changé de modèle économique en passant de la production de celluloses de commodités à la production de celluloses de spécialités. Cette mutation a nécessité un investissement de l’ordre de 100 M€ depuis 2000.

71 « Rapport annuel statistique 2013 », COPACEL 72 « Marché actuel des nouveaux produits issus du bois et évolutions à échéance 2020 », Etude réalisée par Alcimed pour le compte du PIPAME, 2012

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Panorama des coproduits et résidus biomasse à usage des filières chimie et matériaux biosourcés en France 61

Cette chimie du bois et des matières secondaires de l’industrie papetière s’articule autour de l’extraction des composés du bois, cellulose, hémicelluloses, lignine et extractibles. Comme les usines papetières modernes sont excédentaires en énergie (les capacités de la chaudière de combustion de la liqueur noire limitent généralement la production d'une usine kraft), l'idée a germé de valoriser autrement ces coproduits (liqueur noire, écorce), et notamment les hémicelluloses qui pourraient être utilisées pour produire de l'éthanol, des agents chimiques, des polymères… Les hémicelluloses se présentent actuellement sous des formes plus ou moins hydrolysées, en partie dans la pâte purifiée elle-même et en partie dans les liqueurs noires avec lesquelles elles sont brûlées. Les pâtes mécaniques renferment en revanche toutes les hémicelluloses du bois. Les hémicelluloses constituent une plateforme très intéressante pour former des sucres (en C5 avec le xylose ou l’arabinose, en C6 avec le glucose, mannose ou le galactose) et leur récupération/séparation est un enjeu économique fort pour la filière papetière française et européenne et pour la chimie durable. A noter que le marché du xylose et de ses dérivés est actuellement sous-approvisionné et qu’une production nationale de xylose de bois pourrait intéresser des acteurs de la cosmétique et de l'agroalimentaire. Les usines de pâtes traitant du bois de feuillus (riches en C5) sont des sites industriels privilégiés pour de telles fabrications73.

Cette recherche sur les hémicelluloses s’organise autour de projets collaboratifs. On peut citer par exemple :

• Le projet HEMIVALO/BIOPRODUITS . L’objectif de ce projet est de développer un procédé pour

extraire les hémicelluloses des bois feuillu, et principalement les pentoses. Contrairement aux hexoses, les pentoses ne sont pas facilement fermentables en éthanol. Le projet vise donc plutôt ici à produire des surfactants verts à partir de ces pentoses.

• Le projet ANR PENTOVAL (2008 - 2011). Ce projet financé par l’ANR est porté par le groupe coopératif sucrier Tereos. Il vise la production par voie biotechnologique d’acides pentanoiques à partir de coproduits de bioraffineries. Il porte opérationnellement sur la mise au point de biotechnologies qui permettront, d’une part, l’extraction à partir de coproduits agro-industriels des hémicelluloses et la production de sirops de pentoses et, d’autre part, la transformation par voie fermentaire de ces sucres pour fabriquer des produits chimiques à fort potentiel industriel74.

• Le projet FUI POLYWOOD (2012 - 2016). Ce projet est porté par Solvay. Il a pour objectif de mettre au point des polyamides bio-sourcés à partir de coproduits de l’industrie papetière. Les différentes phases du projet seront: (i) l’extraction des sucres en C6 (glucose, mannose) à partir de l’hémicellulose, (ii) la valorisation de ces sucres C6 par synthèse innovante des monomères diacides et diamines, (iii) la mise au point d’une voie synthèse industrielle des polyamides à partir des monomères bio-sourcés.

• Le projet FUI BIO 3 (2015 – 2019). Ce projet est porté par l’usine Fibre Excellence (procédé Kraft). Le projet BIO3 a pour objectif de valoriser les hémicelluloses dans la production de composés biosourcés destinés aux industries de l’alimentaire et de la chimie, tout en maintenant la valorisation énergétique des coproduits pour alimenter l’usine.

La lignine quant à elle est la fraction pariétale du bois la moins oxygénée avec le meilleur pouvoir calorifique ce qui justifie qu’elle soit essentiellement valorisée comme source d'énergie et brulée. Une valorisation pour la chimie doit donc être plus attractive. A l'échelle mondiale, on peut estimer que moins de 2 % de la lignine issue des procédés papetiers est valorisée en dehors du domaine de l’énergie, et ce presqu'exclusivement sous forme de lignosulfonates.

Deux stratégies de valorisation sont à considérer dans ce cadre:

• La fonctionnalisation sélective du polymère pour améliorer sa compatibilité et ses performances dans des composites et des copolymères (utilisation en tant que polyol et substitut du phénol, adhésifs, résines-époxy, polyuréthanes résines phénol-formaldéhyde, thermoplastique biodégradable…).

• La production de monomères polyfonctionnels pouvant être utilisés comme des molécules plateformes (production de vanilline, benzène, toluène…)

73 Source : Etat de l’art sur la production de molécules chimiques issues du bois en France », menée par Hugues De Cherisey, pour le compte de l’ADEME, 2015. 74 Source : http://www.agence-nationale-recherche.fr/projet-anr/?tx_lwmsuivibilan_pi2%5BCODE%5D=ANR-08-CP2D-0017

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Panorama des coproduits et résidus biomasse à usage des filières chimie et matériaux biosourcés en France 62

A noter que du fait de sa forte teneur en carbone, la lignine est également pressentie pour servir de base à la production de fibres de carbone.

La recherche autour des lignines vise à extraire, isoler et purifier la lignine et faire émerger de nouvelles applications chimiques en complément de sa valorisation énergétique. On peut citer à titre d’exemple :

• Le projet NEOLIGNOCOLL (2012 - 2015). Ce projet porté par RESCOLL poursuit l’objectif de préparer la substitution des colles issues de la chimie du formaldéhyde par des résines à base de lignines issues des matières extractibles de la biomasse (bois, pailles,…) et des coproduits de l’industrie papetière, tout en maintenant les propriétés requises pour les panneaux de particules.

• Le projet ANR CHEMLIVAL (2012 – 2015). Ce projet est porté par l’Institut de Recherches sur la Catalyse et l’Environnement à Lyon. L'objectif de ce projet est de développer de nouvelles voies de production de molécules aromatiques par catalyse hétérogène sélective à partir de lignines (provenant des industries du papier et des filières "bioéthanol") avec comme applications à long terme la synthèse de molécules bioactives et de polymères aromatiques techniques.

• A noter que Tembec dans son usine bisulfite de Tartas recherche de nouvelles valorisations de sa liqueur noire alcaline afin d’être moins dépendante des usines Kraft qui lui rachètent pour la recycler en énergie. Ces recherches sont conduites de manière confidentielle en interne.

Le développement à moyen/long terme de la chimie du bois à usage non énergétique repose également selon PIPAME 2012 sur la chimie des matières extractibles . Elle représente un domaine en pleine expansion embrassant potentiellement un champ très large de molécules et de secteurs d’application :

• Les terpènes possèdent des propriétés valorisables dans des applications antiseptique, bactéricide et fongicide.

• Les polyphénols ont par exemple une forte capacité antioxydante et peuvent aider en prévention de plusieurs maladies dégénératives liées au stress oxydatif, telles qu’Alzheimer. Les tanins (font partie de la famille des polyphénols) sont utilisés par exemple dans la production d’essence de térébenthine et de colophane, dans la constitution de caoutchouc de synthèse ou naturel, dans la maturation du vin, la coloration de peaux, la préparation de résines et d’adhésifs, la production de mousses rigides (transport, emballage, construction…) ou des gels solides (catalyse, isolation thermique, stockage électrochimique par absorption d’ions…).

• Les phytostanols empêchent l’absorption du cholestérol Très abondante par le passé, la recherche semble aujourd'hui moins active sur les terpènes (qui représentent une filière plus mature) que sur les autres catégories d'extractibles. Elle est donc en revanche très active sur les tanins techniques. Les ressources en tannins présents dans les écorces et autres connexes du bois, seraient en effet très abondantes en France et pourraient permettre des applications à grande échelles. De plus, une fois les tannins extraits, le résidu d’extraction pourraitêtre utilisé pour les applications énergétiques habituelles. Sur le sujet des tannins et autres extractibles (hors terpènes), on peut citer à titre d’exemple :

• Le projet FUI BIOEXTRA (2010 - 2013). Ce projet est coordonné par la société Biolandes. Il vise à analyser le potentiel d’extraction de molécules à partir de connexes de scierie et de papeterie (écorces…) pour des usages cosmétique, pharmacologique, nutraceutique, antifongique et insecticide à partir de sous-produits (souches, écorces…) générés par la production de pâte à papier sur le site de Tartas du groupe Tembec.

• Le projet FUI LBS (Le Bois Santé). Ce projet est piloté par la société Harmonic Pharma. Son objectif est de développer l’utilisation de molécules d’intérêt thérapeutique issues de composants du bois, pour les marchés de la pharmacie et de la nutrition. Il s’inscrit dans une démarche d’économie circulaire permettant de valoriser les coproduits de la papeterie de Norske Skog située à proximité (Golbey).

• Le projet FUI GREEN EPOXY (2014-2017). Ce projet est porté par la filiale de PCAS, Protéus, société de biotechnologie spécialisée dans la production d’enzymes et de souches microbiennes. Ce projet vise à extraire des dérivés de polyphénols non toxiques, issus de biomasse sylvicole en vue de substituer le bisphénol A pour la fabrication de résines époxydes biosourcées. A terme, le consortium vise la création d’une filière locale de production, allant de l’approvisionnement en biomasse jusqu’à la mise sur le marché de résines époxy 100% biosourcées.

• Le projet FUI LFP-tannins . Ce projet a émergé de l’action collective LignoCellMarket et a pour but l’extraction et la valorisation des tannins des écorces du bois résineux dans les colles amylacées. Le projet Ademe REVA COPPA , réunissant le papetier Noske Skog et la société DRT. L’originalité

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Panorama des coproduits et résidus biomasse à usage des filières chimie et matériaux biosourcés en France 63

de ce projet est de s’intéresser aux coproduits (les effluents) générés par la fabrication de pâte à papier thermomécanique (TMP). Ces effluents n’auraient encore jamais été étudiés en raison de la complexité et de la diversité des produits qui les composent. Ainsi, le projet vise à isoler les composés phénoliques de ces effluents pour les transformer en molécules à haute valeur ajoutée. Ces composés phénoliques sont en effet des précurseurs d’arômes par bioconversion fongique, et la production de vanilline sera particulièrement étudiée dans ce projet.

• Le projet FUI BRIIO (2015 - 2017). Ce projet est porté par la société CONDAT spécialisée en lubrification. Il vise à développer à partir des connexes du bois, des produits bio-sourcés performants pour l’isolation thermique des bâtiments.

Ces nouvelles voies de valorisation des matières secondaires en cours de recherche vont permettre aux filières papetières historiques d’adopter une stratégie de diversification produit selon le concept de bioraffinerie, leur permettant de se tourner vers des business modèles mixtes : bois – chimie –de base, fine, de spécialité) – énergie («électricité, carburant), incluant des produits à très forte valeur ajoutée (cf. Figure 41).

Figure 41 : L’industrie papetière comme bioraffinerie. Diversité des applications possibles à partir des composés du bois séparés

Valorisation matériau

• Si actuellement ces marchés sont principalement développés au niveau de la production de briquettes à partir de boues de papeterie, il faut noter qu’un certain nombre de projets ont été conduits où sont conduits actuellement par des acteurs comme le Centre Technique du Papier, le Pôle Européen de Plasturgie ou l’INSA de Lyon afin d’essayer de valoriser les boues de papeterie dans le domaine des bétons, de la plastur gie et de l’isolation et les cendres dans le domaine des bétons et de la plasturgie.

• Pour les boues de papeterie, on peut citer à titre d’exemple les travaux suivants : o Le projet MATREC coordonné par le CTP a ainsi consisté à démontrer la faisabilité

technique et économique de l’utilisation des boues de papeterie dans le domaine de la plasturgie et les matériaux de construction.

o Des travaux sont en cours à l’INSA de Lyon sur la valorisation des boues de papeterie dans les mortiers de ciment Portland.

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Juin 2015

Panorama des coproduits et résidus biomasse à usage des filières chimie et matériaux biosourcés en France 64

A noter que les boues primaires, fibreuses, auraient un bon potentiel pour la réalisation de matériaux isolants.

• Pour les cendres de papeterie, on peut citer à titre d’exemple les travaux suivants : o Le projet BIP Ademe VALOCENDRES (2014), porté par la société Noske Skog a pour

objectif la valorisation des cendres volantes papetières dans le béton après différents prétraitements. Il associe tout particulièrement la société HEINRICH ET BOCK, le CTP, le CERIB, et l’IMERYS.

o Le projet PLASTICENDRES a réuni trois entreprises vosgiennes (Norske Skog la société de plasturgie MilPlast, et la PME de Saint-Amé spécialiste du pot biodégradable 100 % naturel). L’ajout des cendres de papeterie dans un plastique a permis d’améliorer sa fluidité et sa rigidité. Des pièces plus fines ont pu ainsi être injectées. Ce projet a abouti au dépôt d’un brevet et à la commercialisation d’un produit sous la marque Norfill (source : Pôle Fibres).

o Des travaux menés en 2007 par l’INSA de Strasbourg ont porté sur la valorisation des cendres volantes de papeterie (provenant de Norske Skog) en techniques routières. Cette étude a permis d’établir un traitement efficace de sol à base de cendre volante. Elle a aussi démontré le potentiel de valorisation de la cendre volante en tant que granulat pour une application remblai, ou comme liant d’un matériau autocompactant.

o D’autres travaux sont également menés actuellement par l’ESITPA en Normandie et portent sur les propriétés hydrauliques et pouzzolaniques des cendres de papeterie et leur intérêt pour les matériaux de construction.

Valorisation énergétique • L’utilisation des matières secondaires de l’industrie du bois en biocarburant de 2ème

génération , est actuellement au stade de la recherche. • On peut citer dans ce cadre tout particulièrement le projet investissement d’avenir GAYA financé

par l’ADEME et piloté par GDF-Suez. Ce projet de recherche et de développement vise à valider les choix technologiques innovants et les applications du biométhane dit de 2ème génération, biométhane en traitant les matières lignocellulosiques (bois, paille, boues d’épuration…) par un procédé thermochimique. Il existe d’autres projets de valorisation sous forme de bioéthanol par une déconstruction biochimique de la lignocellulose, avec des dépolymérisations partielles (BIOMETHODES, CIMV) et des dépolymérisations totales (ECOETHANOL, FUTUROL ).

• On peut également citer le projet HEMIVALO/BIOETHANOL (Institut Carnot, énergies du futur) qui a pour objectif de développer un procédé d’extraction des hémicelluloses de bois résineux, et principalement les hexoses. Plus précisément, ce projet vise à optimiser le procédé d’extraction du bois avant même la cuisson du bois et avant que celui-ci ne soit transformé en pâte à papier par le procédé Kraft. L’objectif est ainsi de recueillir une fraction d’hémicellulose relativement pure qui puisse être fermentée en bioéthanol qualifié de 2nde génération.

Conclusions et enseignements : Au vu des données disponibles, la ressource générée en matières secondaires de l’industrie papetière est supérieure à 3,7 millions de tonnes p ar an. Ce gisement dispose de 4 voies de valorisation, par ordre décroissant d’importance en volume :

• Valorisation énergétique • Valorisation agronomique : épandage, compostage et paillage • Valorisation en chimie : chimie du bois • Valorisation matériaux : briquettes

L’ensemble des études analysées et des entretiens r éalisés tendent à conclure que la très grande majorité des matières secondaires de l’industrie pa petière sont actuellement valorisés. Cette filière a fait des efforts conséquents depuis plus de 10 ans afin d’optimiser la valorisation de s matières secondaires qui en sont issues et se posit ionne ainsi durablement dans une logique d’économie circulaire, voire dans certains cas de b ioraffinerie. En effet, la transformation chimique et biochimique du bois, représente une véritable op portunité de diversification voire de reconversion pour une industrie papetière française qui a vu sa production de pâte chuter ces dernières années. L’usine Tartas du groupe TEMBEC e st le principal exemple en France de ce

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repositionnement d’une industrie papetière de commo dités vers une industrie papetière de haute technicité cherchant à valoriser l’ensemble de ses matières secondaires. Ainsi de nombreuses études sont actuellement en cou rs afin de trouver de nouvelles voies de valorisation à plus forte valeur ajoutée pour l’ens emble des matières secondaires générées par l’industrie papetière. Les perspectives de développ ement se situent principalement dans le domaine de la chimie, puis des matériaux et enfin dans le s ecteur de l’énergie. Dans le domaine de la chimie, l’idée est ainsi de v oir comment récupérer certaines molécules à haute valeur ajoutée en cours de process de fabrica tion des pâtes de cellulose, sans briser les chaînes de valorisation actuelles. La recherche s’o rganise par le biais de projets collaboratifs autour de la chimie des hémicelluloses, de la ligni ne et des extractibles du bois. Les évolutions et les développements des marchés co rrespondants sont toutefois lents et ne sont pas simples à mettre en place. Par exemple, l’extra ction même partielle des hémicelluloses, modifie les flux de matières dans l'usine, l'efficacité des procédés et la qualité des fibres obtenues. Cette extraction ne se résume donc pas à l'ajout d'une se ule étape, mais est plus complexe et nécessite une modification globale du procédé papetier. De mê me pour les lignines, malgré des procédés déjà développés et de nombreuses applications potentiell es, les nouveaux développements tardent à percer. Les lignines purifiées ne sont pas des prod uits standardisés et homogènes, et leur qualité dépend grandement de la matière première (feuillus, résineux…) et du procédé d’obtention. Pour ce qui est des extractibles et particulièrement des te rpènes, notre pays dispose d’un fort savoir-faire dans ce domaine, et de telles applications utilisen t peu de volumes et sont très créatrices de valeur. De nombreux projets sont en cours sur les tannins n otamment et sur la valorisation des écorces en plus de leur utilisation actuelle en énergie et en jardinerie.

V. Matières secondaires de la sucrerie : la pulpe d e betterave

Contexte et chiffres clés - Définition du gisement

L’extraction et purification du sucre à partir des betteraves sucrières conduit à divers coproduits et autres matières secondaires. La pulpe de betterave est le résidu de l'extraction du saccharose à partir de la racine de betterave à sucre (diffusion). Nous ne traiterons pas ici la production à partir de canne à sucre présente dans les DROM (Guadeloupe, Martinique et Réunion). Dans ces territoires, le principal coproduit est la bagasse, qui est brûlée (cogénération) et permet aux sucreries d’être autonomes en énergie et même de revendre de l’énergie aux localités voisines76. D’autres coproduits sucriers de canne sont utilisés pour la fabrication de boissons alcoolisées (rhum). Le sucre issu de la betterave représente au niveau mondial 19,4 % de la production totale, estimée en 2013-2014 à 181,2 millions de tonnes d’équivalent sucre brut77. Cette répartition est à peu près constante depuis 2006-2007. Le quota national, déclinaison des quotas sucriers européens) est réparti de la manière suivante :

• 75,3% pour 2 groupes coopératifs, Tereos (9 usines) et Cristal Union (10 usines), à part à peu près égales.

• 24,7% pour 3 groupes privés, Saint-Louis Sucre (4 usines), Lesaffre Frères SA (1 usine) et Sucrerie et Distillerie de Souppes Ouvré & Fils (1 usine). Saint-Louis Sucre représente à lui seul 20,5 % de ce quota national.

Si on raisonne au niveau des 10 premiers groupes sucriers de l’UE à 27, y compris les DROM, en raisonnant par quotas globaux en 2013-2014, Tereos (présent en France, République Tchèque et Roumanie) est le 4éme acteur avec 13,2 % du quota européen et Cristal Union (avec la Vermandoise d’Industrie présente uniquement en France) numéro 5 avec 7,9 % du quota.

76 D’après certains, cette valorisation énergétique pourrait même être optimisée, notamment au Brésil. 77 Source F.O. Licht – World Sugar Balances 2013-2014 (3rd estimate). 1 tonne de sucre brut correspond à 0,92 t de sucre blanc.

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A partir de la betterave, les principales matières secondaires du secteur sont : o Les verts de betterave o La mélasse et les sirops de basse pureté (SBP) (voir partie vinasse) o Les écumes de décarbonatation o Les effluents (voir partie vinasse) o La pulpe La pulpe de betterave est le résidu fatal de l’extraction du sucre (saccharose) à partir de la racine de betterave découpée en cossettes et ayant subi une extraction liquide-solide à contre-courant avec de l’eau (diffusion). Des agents78 comme le sulfate de calcium79 peuvent être ajoutés pour favoriser l’égouttage de l’eau. Une tonne de betteraves donne environ 500 kg de pulpe (humide), soit environ 50 kg de matière sèche. La pulpe fraîche est issue directement de la sucrerie. La pulpe peut faire l’objet d’un pressage (pulpe surpressée). Elle peut ensuite le cas échéant être séchée dans un sécheur rotatif équipé d’un cyclone (système de séparation solide/gaz) puis envoyée dans une presse à granuler, les granulés étant ensuite refroidis avant stockage en silos (pulpe sèche). En amont, la culture de la betterave est bien contrôlée, avec des espèces agrées par le CTPS (Comité Technique Permanent de la Sélection des plantes cultivées) et non-OGM. L’ITB (Institut Technique de la Betterave) promeut la culture raisonnée. L’épandage des boues de station d’épuration urbaines, possiblement riches en métaux lourds, est officiellement rejeté par les planteurs de betteraves. La majorité des entreprises de la filière sont certifiées GMP pour sécuriser la production de la pulpe. La pulpe de betterave, issue de l’extraction du saccharose des cossettes, est la propriété des agriculteurs qui sont généralement les adhérents des coopératives et leurs fournisseurs. Le Règlement (CEE) nº206/68 du Conseil a stipulé que "tout planteur a droit à la restitution gratuite, départ usine, de la totalité des pulpes fraîches ou de la pulpe surpressée provenant du tonnage de betteraves mis en œuvre par l'usine". La pulpe reste donc la propriété du producteur de betteraves (le plus souvent l’adhérent d’une coopérative sucrière), et même si dans la pratique l’agriculteur délègue le traitement et la commercialisation de la pulpe dans le cadre de ses relations avec la coopérative ou la structure privée, les planteurs restent souvent très impliqués dans la valorisation de la pulpe. Si les agriculteurs font de l’élevage, ils la récupèrent donc, moyennant un prix de surpressage/ séchage à façon. Dans le cas contraire, ils la cèdent au sucrier moyennant finance, à charge pour ce dernier de les vendre. La teneur en éléments nutritif (protéines, minéraux,…) des pulpes est élevée, ainsi que sa richesse en énergie, et l’appétence élevée. Elles sont donc essentiellement destinées aux animaux de rente, ruminants en particulier (cf. infra). En 2014-2015 (données provisoires), 38,877 Mt de betteraves étaient récoltées (richesse en sucre 16°) en France, à partir de 404 967 000 ha cultivés et avec un rendement de 96,0 t (à 16°)/ha80. En 2013-2014, 1,578 Mt de pulpe étaient produites81. Ce coproduit (en sec) représente donc environ 5 % en poids de la betterave traitée. On présente la pulpe sous différentes formes :

� Pulpe fraîche (ou pulpe humide)

� Pulpe surpressée : le pressage conduit à une humidité résiduelle encore importante

� Pulpe déshydratée : après séchage industriel poussé, la pulpe est cette fois présentée sèche sous forme de granulés ce qui permet son stockage et un transport sur grandes distances.

- Acteurs et chaîne de valeur associée 78 Sources : Comité National des coproduits, Fiche N°9 sur la pulpe surpressée, site internet FeedBase.com de l’INRA. 79 Le sulfate d’alumine était auparavant également utilisé, mais il ne l’est plus depuis plusieurs années. 80 Source GGB. 81 Source : USICA, ARTB

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Les 25 sucreries et sucreries-distilleries métropolitaines82 reçoivent des betteraves, en grande majorité déterrées en bout de champ, dans leurs installations. Celles-ci intègrent souvent des activités de fermentation des coproduits riches en sucres, pour produire de l’éthanol. Les ateliers de déshydratation des pulpes de betteraves sont soit intégrés soit indépendants de la sucrerie. A noter que, du fait de sa richesse en eau et en sucre et de la période hivernale, la betterave a une durée de conservation limitée et doit être traitée sur une période très courte après récolte. La campagne sucrière est à l’heure actuelle concentrée sur environ 110 jours, contre 70 jours dans les années 1982 à 1989. La production de pulpe fraîche est bien sûr le fait des seuls sucriers, dans un secteur très concentré. La pulpe surpressée et surtout le séchage des pulpes fait intervenir plus d’acteurs, en fonction des spécificités locales : sucriers eux-mêmes ayant un outil de séchage, S.I.C.A. et coopératives de déshydratation,…Pour ce qui concerne les pulpes, à côté des sucreries (coopératives ou non), on compte des coopératives de déshydratation et des SICA (généralement membres de l’USICA : Union des Sociétés d’Intérêt Collectif Agricole de Transformation des Pulpes de Betteraves). Certaines de ces SICA sèchent et/ou transforment aussi la luzerne ou d’autres plantes. En France, l’activité sucrière est présente essentiellement dans le Nord de la France, la Région Ile-de-France au sens très large incluant la Champagne-Ardenne, la Picardie, la Normandie et le Nord de la Région Centre. On compte : 9 usines appartenant au groupe TEREOS, 10 usines appartenant au groupe Cristal Union, 4 usines et 1 raffinerie appartenant au groupe Saint Louis sucre, 1 usine appartenant à la société Lesaffre Frères et 1 usine appartenant à l’entreprise Ouvré et Fils SA. Il existe également une production nettement moins importante en Alsace (une sucrerie) et dans le Massif Central (une sucrerie). Ces deux sucreries ne déshydratent pas leur pulpe qui est surpressée pour les éleveurs locaux. Les ventes de pulpe de betterave déshydratée s’effectuent soit en direct du producteur au fabricant d’aliments, à l’éleveur ou à des revendeurs locaux (courtiers, petit négoce), soit par l’intermédiaire de négociants nationaux, voire internationaux. Les entreprises ayant une position importante sur ce marché sont notamment 83: • Désialis qui commercialise la production de pulpe de 22 usines de déshydratation (sucreries, SICA et coopératives) qui participent à son capital. • Tereos Coproduits qui commercialise la production de pulpe des 9 usines du groupe. On notera également l’existence d’autres distributeurs, qui collectent des coproduits et les redistribuent, éventuellement après mélanges ou transformations plus poussées. C’est par exemple le cas de Distrijem (Brionne (27)) ou de la société Ovalia Hannibal (Auchy-les-Mines (62)), ou de la Société Deleplanque & Cie (Maisons-Laffitte (78)) pour le volet valorisation agricole des produits. Certaines de ces structures sont représentées au sein de la structure Valoria (Lille (59)). - Chiffres clés et volumes générés84

En France, le bilan prévisionnel fait apparaitre des utilisations de sucre à hauteur de 3Mt, dont plus des 2/3 sont destinés directement ou indirectement à la consommation humaine. Les débouchés de sucre en France sont ainsi estimés à 58,1% pour l’industrie alimentaire et la restauration hors foyer, 19,7% pour le secteur alcool et éthanol, 13,1 % pour le sucre de bouche et 9,1% pour l’industrie chimique et pharmaceutique. Au niveau mondial, 76 % du sucre proviennent de la canne, et le coût de production est inférieur. La betterave reste néanmoins compétitive en Europe de par les coûts de transport et permet aux sucriers de pallier aux éventuels aléas climatiques auxquels sont particulièrement soumis la canne à sucre dans différentes régions du monde, même si elle est récoltée deux fois par an. Leurs impacts, ainsi que celui des stocks identifiés, sur le prix mondial du sucre peut être très important.

82 Il n’existe en France métropolitaine qu’une raffinerie de sucre, qui traite du sucre brut d’importation. 83 http://www.la-pulpe.com/ site internet de l’USICA consulté le 16/02/2015. 84 « Sucre et autres débouchés », mémo statistique, mai 2014.

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La France est 1er producteur européen de sucre et le 1er producteur mondial de sucre de betterave. Depuis la campagne 2006-2007, la définition de la production de sucre (Règlement (CE) n°952/2006 du 29 juin 2006) comptabilise les quantités produites au stade sirop quel qu’en soit l’usage ultérieur (alimentaire, non alimentaire, alcool/éthanol). En 2013-2014, la production française serait (données provisoires) de 4,58 Mt, dont 3,3 Mt vendues en France et dans l’Union Européenne, 682 000 t équivalent sucre seraient dédiés à l’alcool-éthanol, 270 000 t de sucre auraient pour débouchés les industries chimiques et pharmaceutiques et 323 000 t de sucre hors quota seraient exportées vers les pays tiers. De son côté La CGB estime la production de sucre en France (sans doute partie betterave et donc en métropole) à environ 3 Mt85 . Les rendements betteraviers se sont nettement améliorés en plus de 50 ans (48,3 t de betteraves à 16° par hectare en 1960-61 contre 85,3 t par hectare en 2013-14). Grâce à l’amélioration variétale et aux progrès techniques, les rendements sont passés de 8 t de sucre à l’hectare à la fin des années 70 à 14,0 t/ha à l’heure actuelle. En moyenne, une tonne de betterave donne 160 kg de sucre, 500 kg de pulpes humides (à 10 % de MS) et 38 kg de mélasse. Les quantités produites de pulpe de betterave 86, totalisant 1,577 Mt de matière sèche en 2013-2014 et sous la forme de 3,040 Mt de pulpes brutes87. Les formes de présentation sont multiples :

� Pulpe humide (fraîche) (10% de MS) : 64 kt produites (soit 6 kt de MS). Ce qui représente 0,4 % de la production globale de pulpes exprimée en matière sèche. Elle est gérée par les Commissions mixtes d’usines et est produite par les groupes sucriers (Cristal Union : 55% du total national), Tereos (32%), Saint-Louis Sucre (12 %)

� Pulpe surpressée (27,0 % de MS en moyenne) : 1, 857 M t de pulpes surpressées produites (soit 501 kt de MS). Ce qui représente 31,8 % de la matière sèche pulpe. La pulpe surpressée et la pulpe déshydratée sont fréquemment produites par des sociétés différentes des groupes sucriers (SICA, coopératives de déshydratation). En 2013-2014, les principaux producteurs de pulpe surpressée pour ensilage étaient les sucreries coopératives (Tereos et Cristal Union) pour 1,410 Mt, les SICA pour 244 kt, les sucreries non coopératives (Saint-Louis Sucre et Lesaffre) pour 164 kt et les coopératives de déshydratation pour 40 kt. Ce tonnage de pulpe surpressée a augmenté de 6,3 % par rapport à la campagne 2012-2013. � Pulpe déshydratée (à 88,0 % de MS). Volume produit en France:1 ,216 Mt88 soit (1 070 kt de MS). TEREOS produit par exemple environ 400 kt de pulpes déshydratées. . Les pulpes déshydratées représentent, en sec, 67,8% de la matière sèche de pulpe produite. En 2013-2014, les principaux producteurs de pulpe déshydratée étaient les sucreries coopératives (Tereos et Cristal Union) pour 555 kt, les coopératives de déshydratation pour 356 kt, les SICA pour 186 kt et les sucreries non coopératives (Saint-Louis Sucre et Lesaffre) pour 119 kt. Ce tonnage de pulpe déshydratée a diminué de 5,4% par rapport à 2012-2013.

Selon une autre source, concordante, en France, de 1,4 à 1,7 Mt de matière sèche de pulpe sont générés dont environ 25 % sont commercialisés sous forme de pulpe surpressée 89 et environ 75 % sont commercialisés sous forme de pulpe sèche90 . En 2013-14, la production de matière sèche pulpe a été légèrement inférieure à la campagne précédente (- 2,5 %), la baisse de la restitution pulpe n’ayant pas été compensée par la hausse des rendements en betteraves. De par son mode de production (extraction aqueuse), la pulpe est un produit humide à la sortie de la sucrerie. Sa conservation en l’état pose donc problème si elle doit être stockée sur de longues durées, d’où la nécessité du surpressage ou de la déshydratation (forcément plus coûteuse car la quantité d’eau à évaporer est importante) si l’utilisation est plus lointaine ou si un stockage doit être considéré. Ce qui est

85 Source : www.cgb-france.fr consulté le 16/02/2015. 86 « Sucre et autres débouchés », mémo statistique, mai 2014 et communications de sucriers. 87 Sources : USICA, ARTB 88 1,285 Mt de pulpe déshydratée brutes produites par la France en 2012-2013 selon les estimations du CIBE, ce qui en fait le premier producteur européen, juste devant l'Allemagne avec 1,212 Mt. A eux seuls, ces deux pays représentent 63,5 % de la production de l’UE, le troisième pays étant le Royaume-Uni, avec seulement 7,9% de la production 89 www.lapulpe.com

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souvent le cas compte tenu de la courte période de production dans l’année (de l’ordre d’une centaine de jours). La principale option de conservation est l’ensilage pour faire du fourrage. A noter que la production de pulpes surpressées et déshydratées est assez stable depuis plusieurs années. On commercialise aussi la pulpe additionnée de mélasses. C’est un produit assez standardisé, on ne note que de faibles variations intrinsèques liée aux espèces cultivées et à la météorologie (qui influe sur l’aptitude au traitement). Des ordres de prix de 150 à 200 €/ t sont évoqués pour la pulpe sèche. Les mélasses sont par ailleurs vendues de l’ordre de 150 à 170 €/t. - Réglementation et impacts sur la filière

D’après les professionnels du secteur, les coproduits étant valorisés on ne peut parler de déchets, ni de même de « sous-produits » (terme réglementairement le seul accepté). On parle dans le secteur de coproduits et on évite systématiquement ces termes. De même les « Egouts Pauvres de sucrerie, EP » ont été remplacés par l’appellation « Sirops de Basse Pureté », ou SBP. Concernant les textes, une référence est la directive cadre déchets de 200891 (Directive n° 2008/98/CE du 19/11/08 relative aux déchets et abrogeant certaines directives). Son article 5 précise ce qu’est un « sous-produit : une substance ou un objet issu d'un processus de production dont le but premier n'est pas la production dudit bien ne peut être considéré comme un sous-produit et non comme un déchet (…), que si les conditions suivantes sont remplies : a) l'utilisation ultérieure de la substance ou de l'objet est certaine; b) la substance ou l'objet peut être utilisé directement sans traitement supplémentaire autre que les pratiques industrielles courantes ; c) la substance ou l'objet est produit en faisant partie intégrante d'un processus de production ; et d) l'utilisation ultérieure est légale, c'est-à-dire que la substance ou l'objet répond à toutes les prescriptions pertinentes relatives au produit, à l'environnement et à la protection de la santé prévues pour l'utilisation spécifique et n'aura pas d'incidences globales nocives pour l'environnement ou la santé humaine. Des mesures peuvent être adoptées en vue de déterminer les critères à respecter pour que des substances ou objets spécifiques soient considérés comme des sous-produits et non comme des déchets (…). Ces mesures, qui ont pour objet de modifier des éléments non essentiels de la présente directive en la complétant, sont arrêtées conformément à la procédure de réglementation avec contrôle visée à l'article 39 (…)» (procédure de comitologie).

L’article 6 de cette directive, traite de la fin du statut de déchet : « 1. Certains déchets cessent d'être des déchets (…), lorsqu'ils ont subi une opération de valorisation ou de recyclage et répondent à des critères spécifiques à définir dans le respect des conditions suivantes : a) la substance ou l'objet est couramment utilisé à des fins spécifiques ; b) il existe un marché ou une demande pour une telle substance ou un tel objet ; c) la substance ou l'objet remplit les exigences techniques aux fins spécifiques et respecte la législation et les normes applicables aux produits ; et d) l'utilisation de la substance ou de l'objet n'aura pas d'effets globaux nocifs pour l'environnement ou la santé humaine. Les critères comprennent des valeurs limites pour les polluants, si nécessaire, et tiennent compte de tout effet environnemental préjudiciable éventuel de la substance ou de l'objet. ».

Il semble en fait que l’application de cet article 6 soit délicate et que le statut administratif de déchet soit dans la pratique irréversible.

La Directive n° 2008/98/CE a été transposée en droit français par l’Ordonnance du 17 décembre 2010 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union Européenne dans le domaine des déchets (n°2010-1579), qui modifie le Code de l’environnement. « Un objectif de la directive cadre est de préciser la distinction entre ce qui est déchet et ce qui ne l’est pas et de prévoir la possibilité de sortir du statut de

91 http://www.ineris.fr/aida/consultation_document/837

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déchet. L’article 5 de la directive définit le sous-produit. Le nouvel article L 541-4-2 reprend les conditions qui caractérisent un sous-produit, étant entendu qu’un sous-produit ne prend pas le statut de déchet. L’article 6 de la directive définit des conditions permettant à un déchet de devenir produit, lorsqu’il a subi une opération de valorisation ou de recyclage. Le nouvel article L 541-4-3 répond à cet objectif. »92.

La rédaction de l’Ordonnance était la suivante :

« Une substance ou un objet issu d'un processus de production dont le but premier n'est pas la production de cette substance ou cet objet ne peut être considéré comme un sous-produit et non comme un déchet, au sens de l'article L. 541-1-1, que si l'ensemble des conditions suivantes est rempli: - l'utilisation ultérieure de la substance ou de l'objet est certaine ; - la substance ou l'objet peut être utilisé directement sans traitement supplémentaire autre que les pratiques industrielles courantes ; - la substance ou l'objet est produit en faisant partie intégrante d'un processus de production ; - la substance ou l'objet répond à toutes les prescriptions relatives aux produits, à l'environnement et à la protection de la santé prévues pour l'utilisation ultérieure ; - la substance ou l'objet n'aura pas d'incidences globales nocives pour l'environnement ou la santé humaine. Les opérations de traitement de déchets ne constituent pas un processus de production au sens du présent article. Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret. »

Un amendement N° COM-26 au Code de l’environnement du 16 janvier 2015 proposait des modifications du Code de l’Environnement afin de « …mettre à jour, de simplifier et de clarifier le code de l’environnement. Pour cela, il simplifie tout d’abord le droit de l’environnement en clarifiant le fait que la notion de sous-produit est définie au niveau européen par la directive cadre sur les déchets et via la jurisprudence. Le fait qu’un décret soit prévu dans la loi française apporte un élément de confusion pour les acteurs. Il s’agit donc d’une mesure de simplification et d’harmonisation européenne au profit des acteurs français. ». A cette date le décret n’était pas paru. Cet amendement aurait été adopté par l’Assemblée nationale le mercredi 15 avril 201593. Il prévoit, pour la partie qui nous concerne que le dernier alinéa de l’article L. 541-4-2, c’est-à-dire la publication d’un décret, est supprimé.

La nomenclature des déchets (Liste de codification des déchets (Annexe II de l'article R. 541-8 du Code de l’Environnement)) prévoit par ailleurs les rubriques suivantes : 02 04 Déchets de la transformation du sucre. 02 04 01 Terre provenant du lavage et du nettoyage des betteraves. 02 04 02 Carbonate de calcium déclassé. 02 04 03 Boues provenant du traitement in situ des effluents. 02 04 99 Déchets non spécifiés ailleurs.

Cette nomenclature fait référence à l’article L. 541-1 du code de l'environnement pour la définition du déchet : « toute substance ou tout objet, ou plus généralement tout bien meuble, dont le détenteur se défait ou dont il a l'intention ou l'obligation de se défaire ».

L’ensemble crée un certain nombre de difficultés d’interprétation entre cette nomenclature et l’Ordonnance du 17 décembre 2010 (transposition de la Directive n° 2008/98/CE) plus récente et rend le classement des produits parfois sujet à interprétation. Les professionnels de nombreux secteurs souhaiteraient voir le statut

92 Site web du Ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie http://www.developpement-durable.gouv.fr/L-ordonnance-du-17-decembre-2010.html 93 Site de l’Assemblée Nationale http://www.assemblee-nationale.fr/14/cr-cstransenerg/14-15/c1415009.asp

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des coproduits (sous-produits selon la réglementation) de leur industrie confirmé, par une harmonisation entre les différents textes réglementaires, pour éviter toute difficulté d’interprétation.

Par exemple, les terres le lavage de betterave sont d’après la liste de codification un déchet, alors que c’est par ailleurs une terre végétale normalisée comme support de culture. La différence est de taille car dans le premier cas une sucrerie devient un centre de stockage des déchets. En fonction du débouché (feed ou méthanisation), au Royaume-Uni, un professionnel rapporte par exemple que le statut pourrait changer, entre déchet et coproduit. Le règlement REACH peut donner des indications précieuses pour ce type de classement.

Au-delà des aspects réglementaires, du côté de l’élevage également, les professionnels utilisent le terme de coproduit dès lors qu’un produit trouve des débouchés en alimentation animale. Pour des produits répandus et avec une très bonne image comme les tourteaux de colza ou de soja, ou les pulpes, les éleveurs parlent même de produits.

C’est même la position du CEFS, Comité Européen des Fabricants de Sucre, dont le SNFS (Syndicat National des Fabricants de Sucre, pour la France) est adhérent. En s’appuyant sur la Directive 2008/98/CE du 19 novembre 2008 relative aux déchets et abrogeant certaines directives, en particulier son article 5, le CEFS préconise pour la pulpe de betterave, sous toutes ses formes, l’appellation de « produit » (non-déchet) ou à défaut de produit intermédiaire, coproduit, sous-produit, matière première secondaire, résidu, ou un autre terme selon l’utilisation (par exemple amendement, fertilisant…). La profession insiste sur le fait que la pulpe est bien un sous-produit au sens de la législation et non un déchet :

a) L’utilisation est certaine : l’alimentation animale.

b) La pulpe peut être utilisée directement sans traitement complémentaire autre que les pratiques industrielles courantes : pressage et séchage sont les seules opérations.

c) La pulpe fait partie intégrante d’un processus de production, l’extraction du sucre

d) L’utilisation ultérieure en alimentation animale est légale : la pulpe répond à toutes les prescriptions relatives au produit, à l’environnement et à la protection de la santé.

Le cas échéant, les termes de résidu d’extraction, produit intermédiaire, engrais (pour les produits concernés), coproduit, matière première secondaire et d’autres paraissent aussi acceptable par ces professionnels, à partir du moment où le terme déchet est banni. Le terme de sous-produit paraît trop assimilé à la notion de déchet. Le terme coproduit reflète mieux le volet valorisation des produits.

Le développement de la filière bioéthanol carburant est un moteur important pour la transformation de betterave et donc la production de coproduits. Ce développement dépend beaucoup des choix politiques faits au niveau français et européen et des réglementations qui en découlent. L’annexe VI.2 intitulée Réglementation concernant les biocarburants et perspectives d’évolution de la filière bioéthanol y est consacrée.

D’après les professionnels, l’abrogation complète des quotas sucriers en 2017, signifiant la libéralisation du prix du sucre, devrait provoquer au niveau européen une réorganisation du secteur. Certains pays dont le rendement de production et la productivité industrielle sont assez faibles (certains pays du Nord et Sud de l’Europe) devrait voir leur production diminuer par manque de rentabilité alors que la France pourrait tirer son épingle du jeu et voir sa production et donc la production de coproduits augmenter. D’autant plus que les sucriers français travaillent pour étendre la campagne sucrière à 130 jours à terme. Conclusions et enseigneme nts : L’industrie sucrière betteravière génère des quantités très importantes de pulpe sur actuellement environ 110 jours de campagne sucrière. Avec l’objectif des industriels sucriers de passer à 130 jours de campagne, les volumes de pulpes surpressées et séchées devront augmenter proportionnellement. Les rendements betteraviers pourraient aussi augmenter.

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Il serait souhaitable de sécuriser le statut de certain des coproduits de l’industrie sucrière, la réglementation étant complexe et parfois sujette à interprétation. La tendance pour la production de pulpe pourrait être à la hausse dans les années à venir, d’autant plus que la réorganisation du secteur suite à la suppression des quotas devrait profiter à la betterave française. Caractérisation des différentes voies de valorisati ons La pulpe contient environ 20% de cellulose, de l’hémicellulose et des pectines, 6 à 9 % de matières minérales (larges variations en fonction des années et des sucreries de 6,5 à 13,5 %), pas d’amidon et est assez riche en calcium (15 g/kg de MS). Les matières azotées sont assez riches en acides aminés essentiels comme la lysine et la méthionine. La pulpe contient encore 2 à 4% de saccharose/ kg de MS Même si elle connait aujourd’hui d’autres débouchés, la pulpe reste majoritairement destinée à l’alimentation animale, en élevage comme fourrage o u par le biais de l’industrie . Il s’agit à ce jour d’une très bonne valorisation au plan économique. Pendant sa période de production, a pulpe humide, à environ 90 % d’eau peut être utilisée par des planteurs-éleveurs, en marché local en élevage, mais le cas devient rare et les quantités sont marginales (Limagne, Normandie ou Alsace par exemple)94,95 . Elle fermente très vite en posant des problèmes d’odeur. En Champagne, il y a peu d’élevage mais la déshydratation permet de transporter les produits granulés vers les zones de consommation, bien au-delà de la zone d’approvisionnement en betteraves des sucreries, cette zone ayant un rayon moyen proche de 40 km en France. On peut considérer qu’il s’agit d’un marché très important et assez captif, la pulpe déshydratée étant expédiée vers les fabricants d’aliment et les utilisations en pulpe surpressée se faisant plutôt auprès d’utilisateurs historiques et proches des sites de production. La pulpe fraîche doit être consommée dans les 48 heures, elle est donc souvent ensilée, ce qui lui assure une conservation de plusieurs mois. L’ensilage est le développent d’une flore de bactéries lactiques à l’abri de l’air, qui stabilise par acidification le produit. Elle a une excellente valeur alimentaire. Toutefois, elle présente trois inconvénients majeurs : • les pertes en cours de conservation sont abondantes par écoulement, de jus et particulièrement lorsque l'ensilage n'est pas réalisé avec un très grand soin ; cela nécessite des investissements coûteux de mise aux normes des silos afin de maîtriser le écoulement de ce jus. • La pulpe fraîche ensilée dégage une odeur désagréable, qui constitue une gêne pour l'environnement et rend pénible la tâche de l'éleveur. • Le produit, très pondéreux, ne peut être utilisé que localement. Or, au cours des années passées, l'élevage a eu tendance à régresser dans les zones de culture betteravière. D’une manière générale l’ensilage de pulpe de betterave fraîche (et de pulpe de betterave surpressée) doit être mené avec beaucoup de précaution, peu de temps après la production et avec des silos adaptés. Un des risques est le développement de Clostridium (on parle de contamination butyrique). La contamination butyrique peut toucher ensuite le lait. Dans certains cas (diffusion à température élevée), il peut être nécessaire en amont d’ajouter des antiseptiques qui peuvent à haute dose perturber la conservation des pulpes surpressées en silo. La pulpe de betterave surpressée 96 (à 25-35 % de MS)97 est fréquemment utilisée en alimentation des ruminants où l’on apprécie son grand intérêt alimentaire, sa bonne conservation par ensilage et son

94 En particulier Fiche Pulpe de betterave surpressée du Comité National des Coproduits disponible en suivant le lien http://idele.fr/no_cache/recherche/publication/idelesolr/recommends/pulpes-de-betterave-surpressee.html 95 www.lapulpe.com 96 Fiche du Comité National des Coproduits. 97 Le taux de matière sèche des pulpes surpressées est passé de 20 % dans les années 1980 à 26 - 27 % en 2003, certaines usines atteignant 30 % de matière sèche (www.labetterave.com). Suivant les années 22 à 23 % mais valeurs

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appétence. La pulpe de betterave surpressée est le premier coproduit disponible en France en termes de quantités en brut pour l’alimentation. . On est face à un marché régional en élevage, autour des sucreries et donc surtout dans les régions Nord-Picardie, Champagne-Ardenne, Ile-de-France, Normandie et Beauce et dans une moindre mesure Alsace, Bourgogne et Auvergne. Cette pulpe est ensilée à la ferme. Une partie des inconvénients inhérents à la pulpe fraîche ensilée a disparu: il n'y a plus de mauvaises odeurs et les pertes durant la conservation sont négligeables, mais l'ensilage est une opération délicate, qui requiert beaucoup de soins de la part du producteur et de l'agriculteur, et ce produit ne peut, compte tenu des coûts, être transporté sur de longues distances. Elle se conserve donc bien après un ensilage adéquat, est appétente et a bon effet galactogène. Elle a été très étudiée chez les ruminants. Sa teneur en cellulose brute est importante, la teneur en lignine est quant à elle relativement faible et varie entre 1,5 et 2,5%. Malgré la forte teneur en cellulose brute de la pulpe de betterave surpressée, la digestibilité de la matière organique chez les ruminants est relativement élevée. L’intérêt de la pulpe réside dans sa teneur en protéines digestibles (PDI) et surtout en énergie digestible (PDIE). Les fibres y représentent jusqu’à 25 % de la MS et la pulpe peut remplacer une part importante des céréales dans les concentrés pour vaches laitières. Il est possible d’incorporer jusqu’à 30 % de matière sèche dans les rations de vaches laitières et 50 % pour les bovins élevés pour leur viande98. La pulpe de betterave surpressée est de qualité assez constante depuis plusieurs années et présente peu de variations de composition chimique. Sa teneur en MAT (matières azotées totales) à 100 g/kg de MS est intéressante sans être extraordinaire (environ 370 g/kg de MS pour les drêches de blé, de l’ordre de 200 g/kg de MS pour le corn gluten feed mais il s’agit de produits très riches en protéines). Une bonne partie des protéines n’est pas digestible dans le rumen et est donc directement absorbé par l’intestin. La pulpe est riche en lysine et thréonine. Elle s’associe donc bien à des rations riches en azote soluble comme l’urée ou l’herbe jeune. Chez la vache allaitante, c’est un bon complément à l’herbe ou au foin. Sa faible teneur en lignine (1,5 à 2,5% de la MS) lui assure une bonne digestibilité. La pulpe est riche en calcium, potassium, sodium et magnésium mais dépourvue de carotène et de vitamine A. Les précautions d’usages sont les suivantes : - Prévoir une transition d’une dizaine de jours pour l’alimentation. Une ingestion forte et brutale peut conduire à de l’acidose. - Prévoir des compléments apportés par le reste de la ration ou des compléments : aliments à fibres longues (ensilage d’herbes, de maïs, foin ou paille), protéines (azote non protéique comme l’urée), compléments en carotène et vitamine A, phosphore, cuivre, manganèse et zinc. - Dans le cas où la pulpe constitue une partie importante de la ration : apport de matières grasses, de tampon type bicarbonate de soude et de magnésie. Il existe des limitations de la pulpe en alimentation animale : - L’existence de risques de contamination butyrique (liés à une teneur en terre excessive des betteraves ou à une mauvaise conduite de l’ensilage) : la contamination butyrique des silos de la pulpe de betteraves surpressée lorsqu’elle est mal conduite en amont ou en aval est une réalité. C’est le principal inconvénient de ce type de coproduits humides. Des précautions doivent être prises pour l’ensilage (étanchéité du silo, température de la pulpe qui doit être assez basse au moment de la mise en silo). Dans le cas contraire, on peut avoir affaire à des pulpes grasses qui posent des problèmes de conservation - Dans le cas où des additifs de pressage sont utilisés en quantités excessive : teneur en soufre excessive (3 à 5 g/ kg de MS) ou en sulfates négatives sur les troubles digestifs et pouvant mener à des carences secondaires en minéraux dont le phosphore, le magnésium, le cuivre et le zinc ou en vitamine B1.

en sortie de presse variant de 19 à 32 % suite à des accidents de fabrication, des problèmes de qualité ou de maladies des betteraves (fiche Pulpe de betterave surpressée du Comité National des Coproduits). 98 Informations de Feedimpex

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-Possible effet laxatif (Comité National des Coproduits), qui lui-même peut conduire à une limitation de la digestibilité des aliments (à une valeur de 0,62 UFL / kg MS selon une étude citée par le Comité national des Coproduits). Ce qui conduit ce dernier à recommander un contenu dans la ration quotidienne de 1,5 kg de MS / 100 kg de poids vif (ration 8-10 kg de MS/jour chez un bovin adulte, ration au total de 20 kg de MS / jour) et sous forme fractionnée. Pour la vache allaitante, une quantité de 5 kg de MS par jour est même recommandée. Concernant les brebis allaitantes un apport de pulpe surpressée de 1 kg de MS/ jour/ animal est conseillé, avec une complémentation minérale et vitaminique et du foin de luzerne. Chez l’agneau sevré une ration de 3,5-4 kg de pulpe surpressée par jour est possible. Chez des chèvres, la pulpe surpressée ensilée peut représenter jusqu’à 30 % de la MS totale ingérée. La pulpe peut utilement complémenter les rations de vaches laitières, d’ovins et de caprins. Les facteurs limitants sont la faiblesse en protéines et la teneur élevée en fibres, connues pour limiter l’utilisation d’énergie chez les monogastriques par exemple. La concentration élevée en substances fermentescibles peut affecter négativement la fermentation dans le rumen. Très appétente, la pulpe surpressée peut être consommée en grande quantité par les animaux mais il est vivement recommandé de la distribuer en quantités limitées. II est recommandé de ne pas dépasser 1,5 kg de MS/100 kg de poids vif/j. Si la pulpe sur pressée doit être consommée en l'état, impérativement dans les 48 heures. Ensilée, elle se conserve très bien durant plusieurs mois, à condition de respecter certaines règles comme nous l’avons vu. La pulpe déshydratée se présente généralement sous forme de granulés (89 % de MS). Le marché est alors national, voire international, surtout en formulation d’aliments composés. Elle est disponible toute l’année et peut être conservée intacte pendant de très longues périodes. La pulpe ainsi déshydratée possède une excellente valeur nutritive, et facilite le travail de l'éleveur au niveau de la distribution des aliments (elle est consommée par le bétail en l'état). Les espèces concernées : la pulpe de betteraves est un excellent aliment pour les ruminants (vaches laitières, bovins dont les taurillons, ovins, caprins) ; elle est également utilisée avec succès en alimentation porcine ainsi que pour les chevaux et pour les lapins. Citons également les faons d’élevage, après sevrages, en substitution des aliments concentrés. D’après le Comité national des Coproduits, son intérêt alimentaire pour les bovins (lait et viande) est qualifié de très intéressant, d’intéressant pour les ovins et caprins et de peu intéressant pour les équins. On notera aussi que Désialis a, dans sa gamme de trois pulpes déshydratées, deux qui sont destinées aux lapins. Pour ce qui est de la pulpe séchée, il existe des sociétés qui opèrent au niveau international (Europe, Etats-Unis et Moyen-Orient en particulier), comme Désialis, certifié GMP (Good Manufacturing Practices), et comme Feedimpex BV (siège au Pays-Bas), qui est un des leaders mondiaux sur ce marché. Il est également agréé GMP pour la fourniture d’aliments pour animaux et livre ses produits sous système HACCP. Ces produits sont principalement destinés aux ruminants (vaches laitières, bovins à viande, ovins, caprins) mais aussi à certains non-ruminants (truies, et pet-food). Chez ces derniers, monogastriques, elle présente néanmoins des difficultés zootechniques. Elle est souvent granulée. La pulpe séchée (ou surpressée comme nous l’avons vu) est utilisée directement en alimentation animale (ou éventuellement en mélange avec la mélasse en tant qu’aliment en direct), ou bien en tant qu’ingrédient dans les aliments composés. Avant granulation, la pulpe peut être additionnée de mélasse (facilite la manutention et le stockage – évite la formation de fines), mais cette pratique est rare voire inexistante en France. On distingue schématiquement dans ce cas, pour les produits de marchés internationaux99 : - Les pulpes non mélassées en granulés (teneur en sucre < 10 %). Les granulés, généralement de plus

petit diamètre (6 et 8 mm en France et de l’ordre de 8-10 mm dans d’autres pays) sont moins durs et ont d’excellentes capacités de gonflement.

99 Informations de Feedimpex.

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- Les pulpes légèrement mélassées (10-15 % de sucre et fortement à mélassées à 15-20 % et plus de 20%). Elles ont en général un diamètre de granulés supérieur (environ 12 mm) et sont donc moins bien adaptées aux distributeurs automatiques d’aliments. Elles ont aussi une moins bonne capacité de gonflement car elles sont plus comprimées et plus difficiles à mastiquer. Ces paramètres sont sans importance dans les usines d’aliments où toutes les matières premières sont systématiquement rebroyées avant mélange et re-granulation.

Cette différence n’a d’importance que si l’on utilise la pulpe en tant qu’aliment simple. Globalement, la mélasse est principalement utilisée en alimentation animale (environ 60 % du total des mélasses en tant qu’ingrédient, adjuvant de granulation ou comme agent d’ensilage) ou en fermentation industrielle. On cite également des applications dans le caoutchouc, la chimie et l’industrie du bâtiment. En alimentation animale, l’énergie est habituellement apportée par l’amidon ou le sucre. La pulpe est riche en glucides hautement digestible . Elle contient en effet 81 % de glucides, dont 5 à 10 % de saccharose, 23 % de cellulose, 24 % d’hémicellulose et 23 % de pectines (ainsi que peu de lignine : 1 à 2%). Les glucides de la pulpe sont donc très bien digérés par les micro-organismes du rumen, la digestibilité des fibres brutes est supérieure à 80 % et la digestibilité NFE (Nitro-Free Extract – Extractif non-azoté) au-delà de 90 %. Pour la pulpe, la valeur énergétique en tant que fourrage est dans la bonne moyenne: UFL= 1,01 et UFV= 0,99 par kilo de matière sèche100. Elle bénéficie d’une bonne digestibilité globale (environ 85 %) liée à la faible lignification des parois cellulaires. Elle a une forte valeur énergétique (cellulose, hémicellulose et pectines) et un encombrement du rumen faible (facteur favorable) chez les ruminants. La pulpe contribue à augmenter la quantité de lait produite et le taux de protéines, grâce à une production accrue d’acide propionique dans le rumen. L’apport direct en protéine de la pulpe est assez faible mais les acides aminés sont intéressants et digestibles. Elle assure un bon équilibre entre une énergie rapidement assimilable pour le rumen, permettant aux vaches laitières de produire suffisamment de protéines digestibles dans l’intestin et des glucides non dégradés dans le rumen et nécessaires à l’assimilation des protéines au niveau du petit intestin. La digestion de la cellulose est plus lente que celle de l’amidon contenu dans certains aliments concentrés (par exemple maïs ensilé), d’où un risque d’acidose réduit chez la vache, la chèvre ou la brebis. La pulpe apporte de la cellulose et régule le taux de matières sèches, ce qui est intéressant pour la vache laitière consommant de l’herbe jeune, plus pauvre en cellulose et plus humide. Plus généralement c’est un complément intéressant des rations de base (avec un tourteau), augmentant la production laitière (également chez les chèvres et brebis) et consommable dès le sevrage pour assurer une croissance élevée sans engraissement excessif. Elle ferait également baisser le taux butyreux et augmenter le taux protéique (à la dose élevée de 6 kg de MS/ jour/vache)101. C’est donc un produit recherché pour son apport d’énergie sous forme glucidique dans les rations bovines, spécialement pour les vaches laitières à haut rendement et les bovins à viande. Elle contient peu de matières minérales. Le Règlement (UE) n° 575/2011 de la Commission du 16 juin 2011 relatif au catalogue des matières premières pour aliments des animaux spécifie, pour la qualité de ces matières :

• Pulpe de betterave (sucrière) humide (article 4.1.7 du Règlement) : Produit de la fabrication de sucre constitué de cossettes de betteraves sucrières ayant subi une extraction hydrique. Teneur en eau minimale: 82 %. La teneur en sucre est faible et tend vers zéro en raison de la fermentation (acide lactique). Doivent faire l’objet d’une déclaration obligatoire : . Les cendres insolubles dans l’acide chlorhydrique, si leur valeur dépasse 5 % de la matière sèche. . La teneur en eau, si celle-ci est inférieure à 82 % ou supérieure à 92 %.

• Pulpe de betterave (sucrière) pressée (article 4.1.8 du Règlement) :

100 Unités fourragères pour le lait et la viande respectivement. Ces unités sont utilisées par l’INRA pour calculer la valeur énergétique d’un fourrage. 101 www.lapulpe.com

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Produit de la fabrication de sucre constitué de cossettes de betteraves sucrières ayant subi une extraction hydrique et pressées mécaniquement. Teneur en eau maximale: 82 %. La teneur en sucre est faible et tend vers zéro en raison de la fermentation (acide lactique). Doivent faire l’objet d’une déclaration obligatoire : . Les cendres insolubles dans l’acide chlorhydrique, si leur valeur dépasse 5 % de la matière sèche. . La teneur en eau, si celle-ci est inférieure à 65 % ou supérieure à 82 %.

• Pulpe de betterave (sucrière) séchée (article 4.1.10 du Règlement) : Produit de la fabrication de sucre constitué de cossettes de betteraves sucrières ayant subi une extraction hydrique et un séchage. Doivent faire l’objet d’une déclaration obligatoire : . Les cendres insolubles dans l’acide chlorhydrique, si leur valeur dépasse 3,5 % de la matière sèche. . La teneur en sucres totaux calculés en saccharose, si cette teneur dépasse 10,5 %. . Les cendres insolubles dans l’acide chlorhydrique, si leur valeur dépasse 5 % de la matière sèche. . La teneur en eau, si celle-ci est inférieure à 82 % ou supérieure à 92 %. Par ailleurs, la pulpe apporte également une saveur sucrée appréciée dans les aliments composés, très importante pendant la période de lactation où les vaches doivent consommer des rations importantes. Ce n’est pas le cas par exemple avec des pulpes d’agrumes amères, qui limitent la prise d’aliments. Cette bonne appétence est liée aux glucides. Dans le cas des chèvres c’est d’ailleurs le seul aliment riche en cellulose qui n’entraîne pas de refus. La pulpe a des fonctions anti-diarrhéiques et améliore ou sécurise les taux de protéines et de butyrate du lait (chèvres et brebis). Elle est bien consommée par les ruminants, y compris jeunes. La pulpe a une influence positive pour les rejets azotés des monogastriques. Elle augmente la fertilité et la prolificité des truies, régule le transit intestinal, augmente le gain moyen quotidien du porcelet en post-sevrage et durant le premier âge. Chez le porc, elle amélioration la qualité de la viande : meilleur taux de viande maigre et meilleure conformation, et donc meilleur classement EUROP de la carcasse. En fonction des prix et des disponibilités, un formule pour vache laitière contient au moins 5 % de pulpe de betterave mais la proportion meut monter jusqu’à 30 ou 40 %. Un ordre d’idée des prix pour les concentrés à additionner aux fourrages102: des aliments énergétiques peuvent coûter de l’ordre de 200 à 250 €/t, alors que des tourteaux riches en protéines comme le tourteau de soja être vendus à plus de 400 €/t. Les prix de vente de la pulpe sont de l’ordre de 150 €/t en alimentation animale. La pulpe de betterave déshydratée fait d’ailleurs l’objet d’une cotation. Sa valeur au 27 mai 2015 (pulpe disponible en cours spot) était par exemple de 150 €/t au départ de la Marne (en mai 2009 elle était à moins de 100 €/t mais en juillet 2011 à 250 €/t). Pour l’alimentation animale, des essais de 1991 cités par le Comité National des Coproduits montraient un prix de revient inférieur par unité de fourrage comparé à du maïs ensilé. Des utilisations de la pulpe sont citées en filtration industrielle d’effluents. De nouvelles approches testent l’utilisation de systèmes microbiens complexes, proches du biotope du rumen, pour dégrader la pulpe en acide gras volatils. Des projets de R&D ont été conduits sans qu’ils n’aient donné lieu à des développements significatifs d’après les professionnels du secteur : utilisation de la pulpe pour produire l’équivalent d’une cellulose microcristalline (plusieurs projets depuis plusieurs décennies), béton lignocellulosique (amélioration de l’isolation thermique et phonique, allègement). L’USICA avait, il y a une vingtaine d’années, diligenté des études, notamment sur l’utilisation de coproduits en isolation pour la construction, amélioration des caractéristiques mécaniques et visuelles (blancheur et opacité) du papier. Un projet européen (Beet-Pulp) avait été lancé en 2006 et était coordonné par l’INP de Grenoble - Pagora. Il a étudié l’incorporation de fibres de betteraves micronisées à 100-150 µm dans

102 Le fourrage, riche en cellulose, constitue de l’ordre de 70 à 75 % du poids de la ration pour une vache laitière. Il est constitué d’ensilage de maïs, d’herbe, de foin ou de pâture, produit à le plus souvent sur l’exploitation, auquel on ajoute un concentré riche en énergie et en protéines.

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certaines pâtes à papier, pour cartons ou emballages, à hauteur de 5 à 10 %. L’idée était de substituer certaines charges minérales comme le talc ou le kaolin, par une charge organique, rendant les produits plus résistants. Cette approche nécessite l’investissement dans des équipements complémentaires, et l’ajout d’agents de blanchiment. Parmi les équipements nécessaires: un sécheur à basse température et un broyeur-microniseur. Des essais ont été réalisés en utilisant des pulpes déshydratées compte tenu principalement des contraintes de stockage et de process (opérations de micronisation). D’autres utilisations étudiées ou faisant l’objet de marchés marginaux concernent le ciment ou son utilisation comme support de fermentation, l’extraction de polysaccharides ou d’acide mucique, de la famille des alpha-hydroxy acides et utilisé en cosmétique. Les pulpes sont des produits saisonniers (campagnes de 110 jours actuellement), pour lesquels la déshydratation et le stockage sont très couteux par rapport au prix du produit. A noter que la conservation par congélation a été étudiée et aurait été estimée à 70 €/t dans certains cas. L’idéal pour les projets de valorisation est donc de traiter des pulpes fraîches. Des incorporations sont possibles dans les panneaux de fibres, les panneaux de bois (dans lesquels il est possible, si la colle est d’origine végétale également, d’avoir un produit à 100 % d’origine naturelle) et le papier. Des installations de méthanisation utilisant de la pulpe ont été réalisées, principalement à la ferme. Compte tenu du caractère saisonnier de sa production la pulpe surpressée doit être stockée ensilée, qui alimentent ensuite les unités de méthanisation. D’autres reportent par contre une mauvaise aptitude à la méthanisation des pulpes. La pulpe n’est quasiment jamais épandue. Il en va de même de la combustion, qui nécessiterait un séchage préalable de la matière. D’autres voies, comme la thermochimie (gazéification à l’eau), permettraient peut-être de travailler avec un produit humide mais ces approches sont pour l’instant à trop long terme et avec des données technico-économiques à valider. Son contenu en pectines peut être exploité pour la cosmétique ou le traitement des effluents. Il existe un petit volume qui est dirigé vers les fibres alimentaires insolubles (production et commercialisation identifiées en Suède). Ces fibres, non digestibles par l'homme, incorporées aux aliments, favorisent le transit intestinal et pourraient avoir divers autres avantages pour la santé humaine. Elle peut servir à la production d’enzymes (pectinases). Les différents acides (acides uroniques) et sucres constitutifs des pectines peuvent constituer des réactifs pour la synthèse de tensio-actifs biodégradables. On peut extraire de la pulpe (et des sons de maïs) de l’acide férulique. Ce dernier peut être transformé par des champignons filamenteux en vanilline qui bénéficie du label d’arôme naturel. A titre d’exemple de valorisation de coproduits, l’extraction de polyphénols à partir de salades (produits de 4éme gamme) a été étudiée. La quantité extraite est par contre très faible, ce qui pose des problèmes de valorisation du reste du coproduit, très majoritaire. Des extractions, du type extraction de protéines ou autres, pourraient entre envisagées sur les coproduits, plus que sur les écarts de production, qui sont par définition hétérogènes et aléatoires et représentent individuellement des tonnages plus faibles. Sur des coproduits comme l’eau de pressage des pulpes, actuellement recyclée en diffusion de sucrerie, certains indiquent qu’il serait intéressant de s’intéresser à la composition du produit pour en extraire de potentiels composés à plus haute valeur ajoutée. Conclus ions et enseignements : A l’heure actuelle le débouché repose quasi-exclusivement sur l’alimentation animale (en direct dans les élevages mais surtout en formulation en alimentation animale). D’où de possibles interrogations ; même si cette valorisation est jusqu’à ce jour identifiée comme la plus intéressante économiquement. Tendances et perspectives de développement Tendances et évolutions à venir Globalement, compte tenu de la croissance possible du secteur, la filière sucrière se pose la question de la pérennité du débouché en alimentation animale. Le débouché dépend par exemple souvent de la présence de laiterie ou fromagerie relativement locales de manière assez exclusive. Ceci l’incite à rechercher des voies alternatives de valorisation des coproduits, qui reposent en très grande partie sur l’alimentation

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animale. Ceci est vrai particulièrement pour les pulpes. Des projets concernant ces filières seraient donc les bienvenus. La filière a pour atout des productions importantes en volume et des compositions relativement stables. La production est saisonnière mais la pulpe, si elle est surpressée et correctement ensilée se conserve plus d’un an et, si elle est déshydratée, est stable au stockage plusieurs années. D’une manière plus générale, la filière est intéressée par le secteur non-food et l’utilisation des biotechnologies, par exemple des technologies qui permettraient d’hydrolyser la cellulose à moindre coût, disposant d’un gisement important et d’une pureté raisonnable, la pulpe. Néanmoins, force est de constater que le débouché en alimentation animale, bien qu’en partie incertain, donne une bonne valeur ajoutée à ces coproduits, qui bride fortement les innovations qui n’apporteraient pas une valeur économique au moins égale. A noter aussi qu’une partie du sucre cristallisé, voire en sirop, est déjà utilisée en tant qu’intermédiaire chimique (fabrication d’esters gras tensio-actifs par exemple). De fait, parmi les 34 Mt de betteraves à 16° transformées, 2 Mt sont déjà consacrés aux usages non-alimentaires et à l’industrie chimique. La filière de production est solide et bien structurée et trouve pour l’instant dans l’alimentation animale (élevages et aliments composés) la quasi-totalité de ses débouchés. Evaluation du volume disponible et supplémentaire pour valorisation Le volume de pulpe disponible pourrait augmenter dans les années à venir, ce qui favoriserait le développement de nouvelles filières. A l’heure actuelle, il pourrait plutôt s’agir de déplacement de valorisations de l’alimentation animale vers d’autres débouchés au moins aussi rémunérateurs. Perspectives de développement

La croissance en volume devrait être très significative avec la fin des quotas en 2017. Le débouché en alimentation animale étant assez exclusif, les voies de diversification apparaissaient comme nécessaires. L’extraction de pectine pourrait être considérée. A noter par exemple plusieurs projets visant à valoriser la dimension cellulosique de la pulpe, mais sans pour autant aller jusqu’à une purification ni une hydrolyse. Des projets ont toutefois été initiés en ce sens : c’est le cas notamment du projet EMERAUDE porté par Rhodia Food et Saint Louis Sucre en 2002 et qui avait pour objectif de développer un nouvel agent texturant naturel à base de cellulose issue de pulpe de betterave. Cet agent texturant devait posséder non seulement des propriétés nutritionnelles en tant que fibre mais présenter également l’avantage d’être utilisable en conditions extrêmes (milieux acides, riches en sucres, en sel…), tout en pouvant être intégré dans des procédés industriels sévères tels que l’UHT ou l’extrusion. Malgré des résultats prometteurs, ce projet n’a cependant pas abouti pour des raisons stratégiques. Plus récemment, la société écossaise Cellucomp a proposé la fabrication de fibres de nanocellulose sous une forme assez cristalline (nanowhiskers de cellulose) à partir de pulpe de betterave, sous le nom de marque Curran. Ces produits pourraient par exemple être utilisés comme épaississants dans des produits industriels. L’idée est d’utiliser une fraction des fibres de cellulose, en fait riche en cellulose, hémicellulose et pectine, sous forme de micro/nano fibres (en réalité sous formes de disques plats). A partir de pulpe de betterave103 (à partir de pellets dans un premier temps pour des questions pratiques de stockage), environ 50 % de la matière sèche est utilisée. Les premiers marchés visés sont les peintures sur base aqueuse, les autres revêtements (notamment anti-corrosion), les panneaux en béton structuré ou autres produits en béton, les fluides de forage, les cosmétiques et produits de soin, comme épaississant pseudo-plastique, pour améliorer certaines propriétés mécaniques (résistance flexibilité et dureté du film, résistance à l’eau) ou régulateur d’humidité et effet anti-redéposition dans une large gamme de pH. Et ce à des doses d’utilisation assez faibles, souvent inférieures à 1 %. Un premier pilote, en Ecosse, peut produire jusqu’à 50 tonnes de matière sèche par an, un second est à l’étude. Le produit se présente sous forme de poudre ou de suspension. En fonction des secteurs d’application, les prix de vente peuvent être de l’ordre de 5 à 15 €/kg.

103 Cellucomp a aussi testé avec succès d’autres matières premières, comme les carottes, mais l’approvisionnement était beaucoup plus problématique.

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Conclusions et enseignements : Les coproduits de la sucrerie présentent un potentiel de valorisation important, de par les volumes en jeu et la forte concentration de la production. Ils souffrent par contre d’une forte saisonnalité et, concernant la pulpe de betterave, un séchage est indispensable si la valorisation est éloignée dans le temps ou géographiquement. Si une utilisation en alimentation animale est considérée, l’ensilage est une option de conservation intéressante si elle est bien conduite. Même si le débouché ultra-dominant est l’alimentation animale (qui reste donc à privilégier à ce titre), dans le cadre d’une filière très structurée, il reste prudent d’étudier des voies alternatives de valorisation, l’avenir des filières d’alimentation animale dépendant du contexte de production française mais aussi de l’évolution d’autres coproduits qui peuvent venir perturber le marché. D’autant plus qu’on anticipe une augmentation de la production.

Parmi les pistes sans doute à creuser, le contenu en cellulose assez accessible ou d’autres polysaccharides comme les pectines. Cette cellulose pourrait être valorisée à la fois pour son potentiel d’hydrolyse pour produire du glucose (substrat de fermentation), sachant qu’elle est peu lignifiée, mais aussi en tant que fibre de cellulose ou d’associations plus ou moins cristallines et à l’échelle nanométrique, à l’origine de matériaux ou de propriétés fonctionnelles originales. On citera par exemple la technologie développée par Cellucomp, avec des applications comme épaississant. Il faut malgré tout relativiser ces approches car, si le gisement est potentiellement important, la cellulose ne représente finalement que 20 % de la MS et il faut aussi envisager un débouché pour les 80 % restant… Si de grands projets sont en cours concernant l’hydrolyse de la cellulose pour produire du glucose fermentaire, la rentabilité globale des opérations reste à démontrer à l’échelle industrielle (comparée à la filière classique du glucose ex-amidon ou ex-sucrerie avec les sirops de basse pureté ou les mélasses). Par contre dans un cas comme celui-ci, on part d’un coproduit, et non d’un produit principal comme dans le cas de l’amidon hydrolysé, en compétition avec des usages alimentaires. De plus, le fractionnement lignocellulosique est réduit à son minimum. Un autre atout de la pulpe est son contenu en biopolymères autres que la cellulose. Des développement ont été ou sont tentés au travers de la société DF3 et Olygose pour fabriquer par hydrolyse des fibres solubles (oligosaccharides prébiotiques) destinées au marché de l’alimentation humaine, à partir de fibres de blé ou de pois. La transposition de ce type d’approche à la pulpe de betterave mériterait sans doute d’être approfondie, même si les quantités en jeux seraient faibles. Le contenu en pectines pourrait aussi être exploité. D’autres applications un peu anecdotiques pourraient aussi concerner des tensio-actifs. La présence de d’acide férulique peut aussi être exploitée (sachant qu’il existe des concurrents plus avancés : les sons de céréales et de riz). D'autres valorisations ont été étudiées dans le papier, la filtration ou la cellulose microcristalline sont à l'étude. Dans le domaine des matériaux, la structure fibreuse de la pulpe peut présenter un intérêt, que ce soit dans des matériaux compacts ou expansés, en plasturgie ou en papeterie. Dans toutes les valorisations de la pulpe, la dimension produit humide de la pulpe surpressée doit être prise en compte. Les développements qui privilégieraient la transformation sur place en évitant toute étape de séchage, dans le cadre d’une économie circulaire, seraient particulièrement bienvenus. Même dans le cadre de l’utilisation de la pulpe en alimentation animale, l’installation d’élevage d’animaux intégrés comme cela est pratiqué dans certains pays, pourrait être une piste de réflexion (avec néanmoins des difficultés liées à des implantations déjà existantes et à une résistance française à l’idée d’élevages avec un nombre importants d’animaux). Le développement d’activités complémentaires nouvelles au sein des sucreries ou juste à côté pourrait constituer un atout, le séchage d’un produit puis son transport et sa remise en suspension dans l’eau, comme cela est nécessaire pour certains procédés, constituant un non-sens.

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VI. Matières secondaires de la filière corps gras : les coques de tournesol

Contexte et chiffres clés - Définition du gisement

Les coques de tournesol sont générées lors du décorticage (éventuel) des graines de tournesol avant pression pour en extraire l'huile (trituration). S’il n’y a pas de décorticage, les coques font partie du tourteau. La trituration industrielle des graines oléagineuses est basée sur deux techniques majeures qui sont la pression et l’extraction au solvant . Les technologies correspondantes mises en œuvre sont traditionnelles et ont peu évolué : les graines dites “riches” en huile (> 35%) sont triturées par pression puis extraction ; les graines classées “pauvres” en huile (< 35% comme le soja par exemple) subissent généralement une extraction directe à l’hexane après préparation 104 . Contrairement aux autres pays européens, la trituration française concerne essentiellement les graines de colza, tournesol et soja, et le lin dans une moindre mesure. L’huile d’olive suit un schéma particulier. Dans le cas du colza, on procède à une première extraction de l’huile sous pression, puis à une seconde avec solvant (l’hexane), ce qui oblige ensuite à désolvanter le tourteau résiduel. L’étape de la trituration génère des coques et pellicules issues du dépelliculage avant pression (pas toujours pratiqué ceci dépendant des pratiques et équipements ou des demandes du marché à propos des tourteaux). Mais le principal coproduit du procédé de trituration des graines est le tourteau, résidu d’extraction des graines, qui doit dans certains cas être séché et désolvanté les cas échéant. Les coproduits de la trituration qui nous intéressent ici sont :

� Les tourteaux de tournesol , qui sont le coproduit principal du procédé de trituration des graines. Le tourteau après séchage contient entre 10 et 12% d’humidité et est riche en protéines à 34%.

� Les coques et pellicules issues du dépelliculage avant pression105 . Il s’agit des coques de

tournesol 106 : elles représentent environ 25 % du poids total de la graine et au moins un site français pratique ce décorticage. Les autres unités de production triturent la graine avec sa coque.

Les coproduits des corps gras végétaux contenant peu d’eau et ayant une faible activité microbienne,

se conservent à température ambiante beaucoup mieux que la grande majorité des coproduits des industries agro-alimentaires.

. - Acteurs et chaîne de valeur associée :

La filière de production et transformation des corps gras végétaux et animaux comprend les triturateurs, les raffineurs, les entreprises de conditionnement, la margarinerie, les industries des coproduits animaux et les premiers transformateurs de la lipochimie industrielle. Ce secteur des corps gras représente un chiffre d’affaires d’environ 7 Mds d’euros, avec une dizaine d’entreprises industrielles majeures.

Les entreprises conduisant une activité de trituration sur le territoire français sont en nombre limité, avec une prédominance de Saipol, filiale d’Avril (ex- Sofiprotéol), avec 70 % de la capacité, suivie par Cargill107. L’industrie française de la trituration est principalement située dans les ports (Rouen, Dieppe, Brest, Saint-Nazaire, Bordeaux et Sète), mais également dans les zones situées dans les zones de production des

104 Source : http://iterg.com/ consulté le 09/02/2015. 105 Etude ADEME-RESEDA sur les coproduits de 2008 et site internet http://www.lgseeds.fr/lg_tournesol_dossier_05.php 106 Pour ce qui est du soja, ces graines subissent un dépelliculage systématique. Les pellicules représentent environ 10 % du poids de la graine. Celles-ci sont généralement réintroduites dans les tourteaux de soja pour ajuster la teneur en protéines, mais on estime que 7 % des coques ne sont pas réincorporées dans les tourteaux (7 000 t/an ce qui est faible). 107 Source : Panorama des IAA – Sous classe 10.41, http://agriculture.gouv.fr/IMG/pdf/10-4_Fabrication_d_huiles_et_graisses_vegetales_et_animales_2014_cle86c83c.pdf

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graines oléagineuses : Compiègne, Le Mériot, Lezoux et Lapalisse108. On peut considérer que le secteur est très concentré, avec une saisonnalité quasi-inexistante (la production est continue toute l’année, les graines étant stockées ou importée109). Historiquement le tournesol est décortiqué dans certains pays producteurs majeurs, comme la Russie, l’Ukraine, la Roumanie ou l’Argentine par exemple. Les coques sont alors brûlées dans des chaudières à mauvais rendement (chaudières à grilles) mais qui permettent d’alimenter en vapeur les sites de trituration à bas prix. En France, d’une manière générale ce n’est pas la tradition et le tournesol est trituré graine entière, ce qui conduit à un tourteau dit pailleux, riche en fibres (les coques) et donc à seulement 28 à 30 % de protéines. La coque de tournesol représente 25 % du poids de la graine mais le décorticage ne peut techniquement permettre, au maximum, que d’extraire 18 % des coques. Lorsque les tourteaux sont décortiqués, le tourteau peut être qualifié de Hi-Pro et atteindre des taux de protéines jusqu’à 35 à 36%110. Les avantages du décorticage portent à la fois sur les produits et les coproduits: - Meilleure qualité du tourteau, c’est-à-dire riche en protéines pour l’alimentation animale. Contrairement

aux tourteaux de soja américain (à 48-50 % de protéines), ces protéines sont d’origine non-OGM, ce qui correspond à la demande en France. De plus, les tourteaux deviennent plus digestibles.

- Meilleure aptitude à l’extraction de l’huile.

- Génération de coques dont le pouvoir calorifique est proche de celui du bois et qui constituent donc un

bon combustible renouvelable et économique qui peut être brûlé sur place pour générer de la chaleur et /ou de l’électricité.

- Avec le même équipement de trituration, la capacité de l’installation augmente puisque les amandes contiennent bien moins de coques.

Jusqu’à il y a peu, seule l’usine de Lezoux (SAIPOL) décortiquait partiellement le tournesol, en conduisant à un tourteau amélioré intermédiaire « Mid-Pro » à 31-32 % de protéines. Depuis 2013, un autre site qui traite du tournesol, l’usine SAIPOL de Bassens (Bordeaux), décortique plus complétement les graines de tournesol. Moyennant l’investissement dans une chaudière et un équipement de décoquage en amont du procédé existant, les coques sont brûlées sur place dans une chaudière à biomasse de dernière génération à chambre cyclonique111 (qui a bénéficié d’un soutien du Fonds Chaleur –BCIA géré par l’ADEME). L’objectif est de générer de la vapeur utilisée sur le site de trituration. Environ 80 000 t de coques sont générées. Elles sont soit brûlées sur place, soit stockées sous forme de granulés en attendant leur valorisation. En effet, le site génère plus de coques qu’il ne peut en consommer sous forme de vapeur (environ 50%). Les débouchés actuels des coques sont donc : - La combustion différée dans la chaudière à biomasse sur le site (lors de la trituration d’autres graines

sans coques) et à terme sur le site de Sète, qui a un projet d’équipement dans une chaudière à biomasse. Dès lors, la valorisation énergétique pourrait concerner l’ensemble de la production. Des coques en granulés sont également vendues à des distillateurs régionaux, à des fours à chaux et à des clients dans le nord de l’Europe. C’est à l’heure actuelle, et malgré le prix conjoncturellement bas de l’énergie, le débouché le plus pratiqué.

- En nutrition animale à petits volume, pour l’apport de fibres cellulosiques dans des aliments pour lapins ou pour ruminants dans une moindre mesure. Sur ce marché, les coques sont en concurrence frontale avec les sons de blé, le choix dépendant des évolutions de prix de ces derniers.

108 Source : http://www.fncg.fr/ consulté le 05/02/2015. 109 Source : Données (ITERG) issues du rapport VAMACOPIA, 2012. 110 Les teneurs en protéines des graines sont variables en fonction des années, généralement vers 33-34 % mais à seulement 31 % en 2014. 111 Les coques y sont brûlées en suspension dans le courant de gaz et le résidu exempt de carbone, ce qui permet de le valoriser en tant qu’intrant d’agriculture.

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- Dans le domaine de des briques et tuiles, suite aux travaux coordonnés par l’ITERG. Après broyage, les coques sont mélangées à la pâte avant cuisson. Ils servent d’agent porosant.

- Dans des volumes anecdotiques pour la fabrication de récipients biodégradables pour l’horticulture.

Par contre le produit se prête mal à au compostage (essais réalisés avec des fabricants d’engrais) ou à la méthanisation. Des essais sont en cours pour d’autres types de valorisation à l’échelle du groupe Avril, par exemple l’extraction de composés à haute valeur ajoutée. Si des débouchés permettaient une meilleure valorisation, le cas échéant d’autres coproduits pourraient alors être brûlés dans la chaudière à biomasse. Dans le cadre du Projet Vamacopia112, des analyses et essais d’extraction de cires à partir des coques avaient été réalisés sur quelques variétés de tournesol. Cargill serait en réflexion pour ce qui est de son site de Saint-Nazaire. Ce système n’est cependant pas transposable à tous les sites car certains sites sont multi-graines et l’investissement ne serait donc pas rentable. Les usines du Nord de la France sont plus orientées vers le colza, d’autres vers le colza et le tournesol.

- Chiffres clés et volumes générés

A l’inverse de la plupart de nos voisins européens, la trituration française est principalement tournée vers la transformation de graines de soja, de colza et de tournesol. En 2013, 6,2 Mt de graines de soja (8%), de colza (72%) et de tournesol (20%, soit 1,240 Mt) ont été triturées en France et plus 2,5 Mt d’huiles brutes ont été produites essentiellement à partir de ces 3 matières premières113. Concernant les coques de tournesol 114, on peut théoriquement considérer que, si toutes unités passaient au décorticage, pratiquement 25 % en poids des graines115, soit entre 310 000 t et 370 000 t de coques seraient produites, mais sa capacité d’extraction étant limitée à 18 % nous l’estimerons à environ 240 000 t de coques de tournesol potentielles en France. En réalité cette valeur serait à minorer, les sites multi-graines n’ayant pas forcément vocation à passer au décorticage. Un site comme celui de Cargill à Saint-Nazaire le pourrait par contre. La production actuelle serait de l’ordre de seulement 100 000 t 116 , principalement à Bordeaux. Selon une étude de PROLEA de 2012-2013117, plus de 3,3 Mt de tourteaux (soja, colza et tournesol) ont été produits sur cette période, avec pour répartition : les tourteaux de colza pour 2,3 Mt, les tourteaux de soja pour 439 000 t et les tourteaux de tournesol pour 665 000 t . - Réglementation et impacts sur la filière

L’huile, principalement alimentaire, obéit donc aux prescriptions de ce secteur, y compris une grande traçabilité des matières et la mise en place de systèmes d’HACCP (Hazard Analysis and Critical Control Points- Système de maîtrise du risque et d’analyse des points critiques). La filière dispose également d’un guide de bonnes pratiques d’hygiène et d’application des principes HACCP de la trituration et raffinage des graines et fruits oléagineux. Ce guide couvre le secteur depuis la

112 Projet VAMACOPIA, Aquimer, Casimir, CÉVA, CTCPA, CVG, ÉNIL de Mamirolle, Haliomer, IFV, ITERG, UNGDA, cofinancé par l’ACTIA et l’ADEME (VAlorisation MAtière des COProduits de l’Industrie Agro-alimentaire). Projet démarré en 2010. 113 Source : Panorama des IAA – Sous classe 10.41, http://agriculture.gouv.fr/IMG/pdf/10-4_Fabrication_d_huiles_et_graisses_vegetales_et_animales_2014_cle86c83c.pdf 114 L’article Borredon, M. E. ; Berger, M. ; Dauguet, S. ; Labalette, F. ; Merrien, A. ; Mouloungui, Z. ; Raoul, Y., 2011. Débouchés actuels et futurs du tournesol produit en France - Critères de qualité. Innovations Agronomiques, 14: 19-38 indique, pour 2010 une production de 1,634 Mt de graines de tournesol, dont 90% est trituré, ce qui donne une valeur de 1,470 Mt triturées. 115 D’après Isobe, S., Zuber, F., Uemura K., Noguchi, A., 1992, A new twin-screw press design for oil extraction of dehulled sunflower seeds, J. Am. Oil Chem. Soc., 69 : 884-889, le poids de la coque représente 20 à 30 % du poids de la graine, nous avons donc pris 25%. 116 Source : Données (ITERG) issues du rapport VAMACOPIA, 2012. 117 PROLEA « De la production à la consommation. Statistiques des oléagineux et protéagineux : France, Europe, Monde», Edition 2012-2013.

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réception des graines et fruits oléagineux à l’expédition des produits finis, et contribuent à la sécurité et la salubrité des marchandises. Elles concernent l’ensemble des produits destinés à l’alimentation humaine et animale issus des activités de trituration de graines oléagineuses (tournesol, colza, soja, etc.) et des fruits oléagineux (noix, noisettes...), et des activités de raffinage. Il s’agit notamment des tourteaux, des huiles brutes et raffinées, des coques, etc118. Conclusions et enseignements : Les coques de tournesol sont en France la plupart du temps intégrées aux tourteaux. Si elles étaient séparées, un excédent maximal de 140 000 t (par rapport à la situation actuelle) serait généré. Caractérisation des différentes voies de valorisati ons Si les graines sont triturées avec les coques, elles partent vers l’alimentation animale, débouché majoritaire des tourteaux. Ce qui diminue la valeur du tourteau de tournesol en alimentaire mais permet de les écouler au prix du tourteau. Si les coques sont séparées, la valorisation majoritaire se fait en combustion avec récupération d'énergie sur site.

Les valorisations des coques de tournesol peuvent être envisagées en alimentation animale, valorisation énergétique et dans les agromatériaux. Alimentation animale 119 Même si elles sont une faible valeur nutritive, les coques de tournesol peuvent être utilisées pour l’alimentation animale, qui reste de débouché usuel 120 . Les coques de soja restantes sont généralement valorisées en alimentation animale109. Il peut exister un débouché limité pour l’alimentation des lapins par exemple. Globalement, c’est un produit peu intéressant en alimentation animale, très riche en fibres, avec notamment 46% de cellulose brute (pas forcément bien digérée ici) et seulement 7,5 % de protéines (on vise 12 à 15 % dans l’ensemble de la ration alimentaire). Le fait qu’il soit brûlé semble indiquer pour le site considéré il n’y avait pas de solution proches géographiquement de valorisation en alimentation animale. Le tourteau de tournesol avec coques est trop riche en cellulose, ce qui limite son utilisation aux ruminants. Si le taux de cellulose est trop important, la seule valorisation possible est le lapin, avec de petits cheptels. Par ailleurs, la teneur en protéines des tourteaux (tournesol, colza et soja) en fait une bonne matière première pour l’alimentation animale et 80% de la production des tourteaux y est donc destinée109,121.

Valorisations énergétique et agronomique 122 Les coques de tournesol peuvent être utilisées pour la production d’énergie (les coques ont un pouvoir calorifique de 4 200 kcal/kg), comme c’est le cas pour une entreprise de SAIPOL, ou pour la production de biogaz puisque les coques peuvent être méthanisées. Dans le cas de SAIPOL, sur le site près de Bordeaux, il y a cogénération de chaleur utilisée sur site (notamment pour chauffer les produits lors du raffinage) et d’électricité. Le programme de recherche VECIR, piloté par l’ITERG, avait pour objectif d’évaluer aptitude à la méthanisation des coproduits d’huilerie et du raffinage, y compris les tourteaux, au cours de différents essais de co-méthanisation. Les tourteaux déclassés sont envoyés en compostage. Agromatériaux La fraction lignocellulosique des coques de tournesol peut servir à la fabrication de différents de panneau de particules ou pour la formulation de bétons allégés, etc… Théoriquement, le produit étant riche en

118 « Guides de bonnes pratiques d’hygiène dans le secteur des oléagineux », OCL, S.Dauguet, M.Saillard, K. Crépon, 20(2), 124–130, 2013.

119 Source : Données (ITERG) issues du rapport VAMACOPIA, 2012. 120 « Valorisation des coques de tournesol : bilan et perspectives », Revue française des corps gras, A. BAZUS, L. RIGAL, A. GASET, 11/12, 345-350, 1992. 121 « Valoriser les coproduits avec précaution », Agrodistribution, Y. BOLOH, 42-43, 2002. 122 Source : Données (ITERG) issues du rapport VAMACOPIA, 2012.

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cellulose, il pourrait présenter un intérêt dans le papier. Le Centre Technique du Papier ne semble pas s’y être intéressé. Sa mauvaise aptitude au compostage pourrait par contre laisser supposer que la cellulose n’est pas très accessible. Par ailleurs la qualité de la fibre de cellulose qui pourrait être extraite serait à examiner. Conclusions et enseignements : Lorsqu’ils ne sont pas un composant du tourteau et donc valorisés en alimentation animale, les coques de tournesol peuvent être brûlées dans des chaudières à biomasse sur site ou bien être valorisées en alimentation animale. Tendances et perspectives de développement Tendances et évolutions à venir Les enjeux sont les suivants concernant l’option entre séparer les coques de tournesol (décorticage) dans le tourteau ou non : - En cas de rétention des coques dans le tourteau , comme cela est pratiqué en majorité à l’heure

actuelle en France : la trituration est moins efficace et le tourteau d’un peu moindre valeur marchande, la coque « diluant » la protéine dans le tourteau. Les installations actuelles ont été prévues pour et les coques sont alors valorisées au prix du tourteau, même de moindre qualité.

- En cas de décorticage, avec séparation des coques , la trituration est plus efficace (les coques absorbent de manière irréversible une partie de l’huile) et le tourteau d’un peu meilleure qualité, un peu plus riche en protéine et moins en cellulose, ce qui correspond mieux à ce qu’on attend d’un tourteau en alimentation animale. Les coques sont la plupart du temps brûlées sur place pour produire de l’énergie et ainsi diminuer la dépendance du site de trituration aux énergies fossiles. Par contre cette application demande des investissements en équipements de décorticage, tri et pour une chaudière à biomasse.

Evaluation du volume disponible et supplémentaire pour valorisation La Production actuelle de coques de tournesol avoisine les 100 000 t et le potentiel maximal en France est estimé à 240 000 t (voir rubrique Chiffres clés et volumes générés). Perspectives de développement

La production de coques de tournesol pourrait augmenter dans des proportions importantes si les usines françaises faisaient le choix d’un décorticage. Les pellicules de graines de lin et de colza sont dans une situation comparable mais cet horizon paraît plus lointain. Ces produits bénéficient d’une production concentrée entre les mains de peu d’acteurs et le gisement pourrait augmenter si l’option de décortiquer les graines était prise. Les principaux débouchés à l’heure actuelle concernent la combustion de granulés de coques et l’alimentation animale, même si ça n’est pas un aliment de premier ordre. De nouveaux débouchés seraient intéressants. Conclusions et enseignements : Les coques de tournesol: il s’agit d’un coproduit disponible pour l’instant en assez faible quantité. Ces quantités pourraient le cas échéant être doublées si d’autres sites de trituration spécialisés en trituration du tournesol prenaient l’option du décorticage, ce qui présente de nombreux avantages (qualité du tourteau, augmentation de capacité du site à usine égale, accès à de la vapeur sur site à bas coût et à partir d’énergie renouvelable), moyennant un investissement en décorticage et chaudière à biomasse. La quantité de coques générée est même supérieure à la consommation des sites, des coques sous forme de granulés peuvent donc être valorisées en plus. La disponibilité sur toute l’année est assurée.

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Par contre, si l’on se fie à ce qui a été fait jusqu’alors, il est probable que de tels projets seraient basés sur une combustion sur site des coques, et moins a priori sur d’autres débouchés. De tels projets pourraient d’ailleurs être favorisés lorsque le prix de l’énergie augmentera à nouveau. D’autres options, y compris dans les matériaux, ou l’extraction de molécules à partir des coques, ne sont pas à écarter mais ces débouchés devraient garantir un revenu au moins équivalent, prix du transport compris. De plus, la granulation présente un surcoût et n’est pas forcément compatible avec certaines applications.

VII. Matières secondaires animales : sous-produits animaux des catégories 1 et 2 issus de la découpe-abattage et de l'élevage 123

Contexte et chiffres clés - Définition du gisement

Secteur : il recouvre réglementairement l’abattage et la découpe des carcasses d’animaux d’élevage, la collecte des animaux trouvés morts avant abattage, et les activités aval de transformation du poisson générant des sous-produits animaux et leurs dérivés (au sens de la réglementation). Le terme « sous-produits animaux » (SPA) est défini explicitement dans le Règlement (CE) n°1069/2009 établissant des règles sanitaires applicables aux sous-produits animaux non destinés à la consommation humaine, c’est-à-dire l’essentiel des coproduits de la filière. Le terme de produits dérivés des SPA désigne les farines et huiles/graisses qui en sont issues. Contrairement produits de catégorie 3, on devrait pour les PAT (protéines alimentaires transformées) de catégories 1 et 2 utiliser le terme de « farine de viande et d’os » (FVO) et non « farine ». Les sous-produits des catégories 1 et 2 présentent le plus grand risque sanitaire. Le classement dépend de l'espèce, de l'état sanitaire de l'animal et de la partie de l'animal concernée. Les sous-produits de catégories 1 et 2 de découpe-battage désignent les animaux trouvés morts avant abattage (cadavres d’animaux morts de façon suspecte -vieillesse, maladie, accident), des bovins ayant côtoyé une bête atteinte d’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB), des matériels à risques spécifiés (MRS, certaines parties des carcasses et notamment certains abats et du système nerveux : cervelle, œil, moelle épinière, intestins…) des abattoirs et salles de découpe, ainsi que les saisies et certains déchets de dégrillage. On peut y ajouter les sous-produits de ces catégories issus de boucherie. Le terme de coproduit est utilisé, en particulier pour les SPA C3. Le terme déchet pose parfois des problèmes d’interprétation vis-à-vis du Ministère de l’Ecologie, du développement durable et de l’énergie. D’après les professionnels, la réglementation de 2008 et sa transposition dans le Code de l’environnement définissent clairement la distinction entre tous les SPA (dont le débouché est certain et les produits bien caractérisés et parfaitement traçables) et les déchets. Les professionnels considèrent que ce dernier terme ne peut être employé que dans quelques cas très particuliers : - Fonctionnement en mode dégradé comme en 2003 avec une surmortalité en élevage qui a obligé à

enfouir certains cadavres de porcs et volaille.

- Cas accidentels comme l’incendie d’un élevage avec la production de déchets mélangés, y compris des cadavres d’animaux.

- Assimilation à un déchet pour les farines C1 traitées en co-incinération, cet équipement étant considéré comme un outil de traitement des déchets.

Certains acteurs proposent la hiérarchie suivante dans les valorisations : alimentation humaine > alimentation animale > agronomie > énergie > décharge (C.E.T.). Aucun produit de la filière viande allant en C.E.T. (même les mâchefers cimentiers, résidus de l’incinération, sont intégrés aux ciments, on peut considérer que tous les produits sont valorisés et donc qu’aucuns ne peut être qualifié de déchet. On note aussi qu’il n’y a pas de volonté de se défaire des produits mais au contraire de les valoriser.

123 Il s’agit ici d’un terme imposé par la réglementation.

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Beaucoup utilisent le terme de coproduits pour désigner l’ensemble des produits suivants : les SPA mais aussi les produits à statut alimentaire (exemples couennes de porc ou os de bovins destinés à la gélatine ou les graisses qui conduisent au saindoux ou au suif alimentaires) - Acteurs et chaîne de valeur associée

Pour la production des sous-produits : abattoirs, entreprises de découpe de la viande, souvent intégrées. Pour le traitement des sous-produits : sociétés historiquement de collecte des animaux trouvés morts et d’équarrissage et plus généralement les sociétés habilitées à collecter, stocker et transformer des sous-produits de catégorie 1 et 2 (équarrissage) ou 3. Concernant les sociétés d’équarrissage, historiques, l’activité s’est élargie à bien d’autres secteurs et les entreprises concernées traitent désormais de nombreux coproduits, y compris d’origine végétale. On distingue principalement l’équarrissage qui concerne les produits de catégorie 1 et 2 des autres transformations. Concernant les SPA C3, une recherche de meilleure valeur ajoutée, en exploitant mieux les propriétés physico-chimiques et mécaniques des produits, est toujours d’actualité. L’équarrissage124 est l’ensemble du processus de transformation industrielle des déchets animaux, c’est-à-dire de tout ce qui est impropre à la consommation humaine (produits de catégories 1 et 2), pour en extraire les graisses et les protéines (ou farines animales). Plus précisément,125 l’équarrissage est défini comme étant une ou plusieurs des activités suivantes : - La collecte au point de départ et le transport de cadavres d’animaux relevant de l’équarrissage. - Leur traitement (y compris transformation), élimination ou valorisation.

Ces activités sont encadrées par le règlement (CE) n° 1069/2009. Elles sont opérées dans le cadre d’associations ATM auxquelles les sociétés d’élevage adhèrent (« service privé de l’équarrissage ») suivies par FranceAgrimer en métropole, ou contractées avec une entreprise agréée pour le traitement des sous-produits de catégorie 2 (voire 1). L’activité de collecte d’ATM liée au service public est devenue très minoritaire. Au niveau départemental des « ATM », à l’initiative des éleveurs, sont mises sur pied pour assurer la collecte des animaux trouvés morts. Ces « ATM » passent ensuite des marchés avec les entreprises citées précédemment. L’équarrissage concerne une partie des sous-produits animaux (24% du total), considérées comme rentrant dans les catégories 1 et 2, dont les Matières Animales Infectieuses (MAI).124 Il s’agit de tous les cadavres d’animaux morts de façon suspecte (vieillesse, maladie, accident), des Matières à Risque Spécifié (MRS) issues des abattoirs (cervelle, œil, moelle épinière, intestins…) et des bovins ayant côtoyé une bête atteinte d’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB). Plus généralement, on parle d’EST ou ESST, pour les infections par une Encéphalopathie Spongiforme (Subaigüe) Transmissible. Après collecte, les cadavres sont acheminés soit directement vers une usine d'incinération pour y être incinérés comme déchet soit vers une usine de transformation agréée pour le traitement des catégories 1 et 2, soit vers un établissement intermédiaire. L’équarrissage est l’ensemble du processus de transformation industrielle des déchets animaux, c’est-à-dire de tout ce qui est impropre à la consommation humaine, pour en extraire les graisses et les protéines ou farines animales. Ce n’est que dans le stade ultime que ces farines sont incinérées ou valorisées selon leur classement. Il s’agit ici plutôt d’une filière de traitement des coproduits d’autres industries, en particulier celle d’abattage-découpe avec laquelle elle est très imbriquée. On peut considérer qu’elle se situe en bout de chaîne pour les produits puis qu’elle les contrôle jusqu’à leur élimination ou jusqu’à la valorisation (alimentation, énergie, agronomique).

124 Site internet http://www.cheval-respect.com/equarrissage.php consulté le 4 février 2015. 125 « Guide de classification des sous-produits animaux et de leurs devenirs », version révisée au 30 avril 2014, édité par le MAAF, Direction Générale de l’Alimentation, Sous-direction de la Santé et de la Protection Animales, Bureau des Intrants et de la Santé Publique en Elevage.

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En France, on peut citer des entreprises comme Akiolis (et sa filiale Atemax) qui compte 4 sites de transformation répartis en France. Chaque centre est approvisionné par 5 à 6 centres de collectes intermédiaires, situés à 50 – 150 km du centre de transformation. Ces derniers n’opèrent pas de traitement thermique. Ils dépouillent juste la peau des veaux et font procéder à de analyses vétérinaires (test de l’ESB pour les bovins de plus de 4 ans et tests de la tremblante du mouton pour les ovins de plus de 18 mois).un autre acteur bien implanté en France est la société SARIA, dont la maison-mère est située en Allemagne. Pour garantir la séparation des flux, il y a séparation physique lors des transports et au stockage au niveau des centres de collecte et de transformation. Dans ces derniers, les lignes de production et les bâtiments sont distincts ou séparés, le mode séquentiel (succession de matières premières sur une même chaîne) est interdit. Ce type de site de transformation des SPA utilise des procédés thermiques, et donc, pour beaucoup d’entre eux, sont gourmands en énergie. Il peut donc y avoir des synergies locales en matière d’énergie avec des producteurs de chaleur, comme par exemple des usines d’incinération. Globalement, l’industrie des coproduits animaux transforme les flux connexes des abattoirs et autres établissements traitant des viandes (découpe des porcs, ruminants, volailles, poissons) mais aussi de l’élevage, principalement en farines ou graisses, qui sont ensuite valorisées ou incinérées. Elle traite donc les produits avec et sans risque. L’industrie de la gélatine, qui utilise des coproduits animaux est incluse dans ce périmètre. L’équarrissage est une activité dont la rentabilité dépend en grande partie du taux de remplissage de ses installations, le prix de vente des produits n’est donc pas toujours le moteur de l’activité. La rentabilité dépend également de nombreuses contraintes logistiques (transport pour le ramassage et la valorisation ou l’élimination, collecte). Les matières crues sont périssables alors que les formes farine et graisse sont, elles, stables à température ambiante. Dans ces entreprises, la moitié des personnels est par exemple affecté à la collecte des sous-produits. Divers coproduits de la filière abattage dans la filière viande sont traités dans des industries spécialisées et répondant à un cadre réglementaire très précis, qui impose un tri minutieux des coproduits au niveau de la production. Leur transport et leur transformation sont également très encadrés. Concernant les textes, une référence est la directive cadre déchets de 2008 (Directive n° 2008/98/CE du 19/11/08 relative aux déchets et abrogeant certaines directives). Elle précise dans son article 2, point 2 que sont exclus du champ d'application de la présente directive, dans la mesure où ils sont déjà couverts par d'autres dispositions communautaires les sous-produits animaux, y compris les produits transformés couverts par le règlement (CE) n° 1774/2002, à l'exception de ceux qui sont destinés à l'incinération, la mise en décharge ou l'utilisation dans une usine de biogaz ou de compostage. Le règlement (CE) n°1069/2009 s’applique aux différentes catégories de sous-produits animaux, et de leurs dérivés, non destinés à la consommation humaine (règlementairement ou par choix du producteur) et qui peuvent faire l’objet de valorisation ou d’élimination. Il précise aussi les destinations spécifiques en relation avec le règlement (UE) N° 142/2011. Ce règlement sanitaire couvre toutes les étapes de la transformation : collecte, transport, entreposage, manipulation, traitement, transformation, mais aussi l’utilisation et l’élimination des sous-produits. Il couvre aussi certains mélanges qui contiennent des sous-produits animaux (voir126). Il ne s’applique pas aux matières animales qui font moins de 6 mm. Il définit les matières rentrant dans chaque catégorie, cette classification des matières (identification et tri) étant effectuée dès le point de départ (à la production) sous la responsabilité du producteur.

On distingue d’après ce règlement (CE) n° 1069/2009, selon la nature du risque représenté pour la santé humaine (voir pour plus de détail le « Guide de classification des sous-produits animaux et de leurs devenirs»127) :

126 « Guide de classification des sous-produits animaux et de leurs devenirs », version révisée au 30 avril 2014, édité par le MAAF, Direction Générale de l’Alimentation, Sous-direction de la Santé et de la Protection Animales, Bureau des Intrants et de la Santé Publique en Elevage. 127 « Guide de classification des sous-produits animaux et de leurs devenirs », version révisée au 30 avril 2014, édité par le MAAF, Direction Générale de l’Alimentation, Sous-direction de la Santé et de la Protection Animales, Bureau des Intrants et de la Santé Publique en Elevage.

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■ Catégorie 1 (article 8): matières présentant un risque vis-à-vis des EST (Encéphalopathies Spongiformes Transmissibles). Ceci concerne en particulier les MRS 128 et les animaux suspectés ou déclarés atteints d’EST (un test douteux ou non effectué est considéré comme un test positif à la maladie). Le risque peut aussi être lié à la présence de substances interdites (ex : hormones) ou dangereuses pour l’environnement (ex : dioxines). Tout lot de sous-produits non tracés individuellement tombe dans cette catégorie. Par contre, si un lot de peaux contient une peau de catégorie 1 (peau d’un animal atteint ou suspecté d’EST), les autres peaux peuvent être de catégorie 3. Et, de même, un lot de cadavres bovins contenant un cadavre de bovin suspecté ou atteint d’EST pourra faire l’objet de certaines valorisations en catégorie 3. Les matières de catégorie 1 comprennent les sous-produits animaux suivants129 : - toutes les parties du corps, y compris les peaux, des animaux suspectés ou atteints d'infection par une

EST, des animaux abattus dans le cadre de mesures d'éradication d'une EST, des animaux familiers, des animaux de zoo et de cirque, des animaux utilisés à des fins expérimentales, des animaux sauvages suspectés d'infection par une maladie transmissible ;

- les MRS (matériels à risque spécifiés) en tant que tissus susceptibles de véhiculer un agent infectieux ;

- les produits dérivés d'animaux ayant absorbé des substances interdites ou contenant des produits dangereux pour l'environnement ;

- toutes les matières animales recueillies lors du traitement des eaux résiduaires des usines de transformation de catégorie 1 et des locaux où sont enlevés les matériels à risque spécifiés ;

- les déchets de cuisine et de table provenant de moyens de transport opérant au niveau international ;

- les mélanges de matières de catégorie 1 et de catégorie(s) 2 et/ou 3.

■ Catégorie 2 (article 9): matières présentant un risque sanitaire vis-à-vis des maladies animales autre que les ESST, notamment les denrées saisies pour raisons sanitaires et les animaux trouvés morts, ou vis-à-vis de résidus de médicaments. Certaines matières sont explicitement citées mais c’est aussi une catégorie par défaut qui recouvre les produits non classés en catégorie 1 ou 3. Elle vaut en particulier pour les mélanges de sous-produits animaux de catégorie 3 avec d’autres produits (corps étrangers, effluents, déchets). La catégorie comprend (à l’exception des produits qui seraient classés en catégorie 1 bien sûr) :

. Les lisiers et contenus de l’appareil digesti f130 (hors poisson, invertébrés et volailles). Ces produits, contrairement à ceux de catégorie 1, font régulièrement l’objet de valorisations au titre de article 13 du règlement (CE) n° 1069/2009, en particulier en tant que fertilisants, voire par usage direct au sol. Par dérogation la valorisation en compost ou biogaz est possible en unité agrée, après hygiénisation du tube digestif et de son contenu et d’autres dispositions. . Les matières issues des eaux résiduaires d’abattoirs de non ruminants et d’usines de transformation de catégorie 2, susceptibles de présenter un risque sanitaire autre que l’EST. Il s’agit donc de toutes les matières animales recueillies lors du traitement des eaux résiduaires des abattoirs . Les matières contenant des résidus de médicaments vétér inaires au-delà de certaines LMR (concerne en particulier certains laits et viandes), ou quelle que soit la concentration pour d’autres produits (antibiotiques). . Les matières (produits d’origine animale) contenant des corps étrangers (verre, métal,…). . Les produits importés ou échangés ne satisfaisant pas a ux exigences sanitaires (quelques exceptions prévues en catégorie 3). . Les cadavres d’animaux autres que ceux d’animaux familiers, d’animaux suspectés ou atteints d’EST, de ruminants contenant des MRS au moment de leur élimination (et quelques autres exceptions marginales). Les cadavres d’animaux d’élevage monogastriques (dont animaux aquatiques et équidés) et 128 Matériaux à risques spécifiés. Définition règlementaire : règlement (CE) n° 999/2001. Elle comprend une liste règlementaire, en fonction de l’espèce et de l’âge du ruminant visé. 129 Site internet http://www.cheval-respect.com/equarrissage.php consulté le 4 février 2015. 130 Règlement (UE) n° 142/2011.

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ceux de ruminants non suspectés ou atteints d’EST, et non contaminés par des substances interdites ou dangereuses (article 8 du règlement) sont donc classés en catégorie 2. . Les mélanges de matière de catégories 2 et 3, ou tout l ot des sous-produits non-tracés individuellement. . Les sous-produits animaux autres que ceux de la cat égorie 1 ou 3 . C’est une liste ouverte mais on peut citer les saisies et retraits sanitaires des abattoirs ou d’autres lieux, les saisies et retraits techniques, des produits de catégorie 3 décomposés. Les SPA de catégorie 2 sont par définition « non destinés à l’alimentation animale », sauf dérogations pour les seules verminières (c’est encore plus vrai pour les produits de catégorie 1, sauf cas très particulier du nourrissage d’espèces protégées). Beaucoup d’autres produits de catégorie 2 sont éliminés comme du C1 en mélange avec ces dernières à des fins énergétique (co-incinération, combustion…). Il existe aussi une filière régionale de valorisation après transformation (stérilisation par la Méthode 1) dans les applications suivantes : . EOA (Engrais Ou Amendements) . En oléochimie (échanges dans l’UE) . Pour la production de biodiesel, à partir de graisses fondues de catégorie 2131. Les deux derniers débouchés, ainsi que l’usage à l’état cru (non transformé d’après le règlement (CE) n° 1069/2009) sont plus anecdotiques par rapport aux valorisations énergétique et comme EOA.

■ Catégorie 3 (article 10) : matières premières provenant de carcasses déclarées propres à la consommation par l’inspection sanitaire. 43 % de ces matières de catégorie 3 (auxquels on ajoute souvent les sous-produits issus de la boucherie, charcuterie et salaison, ainsi que ceux issu de la GMS). Hors cas d’EST ou de contamination avérée par des substances interdites ou des contaminants environnementaux, les parties du cadavre d’un ruminant qui ne contiennent pas de MRS peuvent être de catégorie 2 voire 3. D’une manière générale, il s’agit d’une liste positive, donc exhaustive. Y figurent des sous-produits d’animaux issus d’animaux sains, ou des sous-produits animaux ne pouvant véhiculer de maladies transmises à l’homme ou à l’animal. C’est dans cette catégorie qu’on trouvera donc les matières à destination de l’alimentation animale. Le tri et la conservation des produits (utilisation du froid en particulier, notion d’absence de « retard injustifié », qu’on peut estimer à un maximum de 4 à 7 jours dans certains cas par exemple) est de la responsabilité des détenteurs des produits. En cas de d’altération grave, celui-ci doit déclasser le produit en catégorie 2. Des mesures règlementaires devraient être prises pour les sous-produits animaux destinés aux marchés de l’alimentation animale et des EOA. A noter par exemple qu’un mélange d’engrais organique produit à partir de matières premières de catégorie 2 et de farine de plume de catégorie 3 reste un produit dérivé de catégorie 2. Tous ces sous-produits doivent rentrer dans l’une des catégories et aucun retour au milieu naturel (sol, effluents rentrant en station d’épuration) n’est possible hors du cadre règlementaire. Dans les sous-produits de catégories 3, on compte certains sous-produits animaux d’abattoirs : l’essentiel des SPA issus de l’abattage (hors MRS, lisier, contenu de l’appareil digestif) s’ils sont issus d’animaux sains ayant été jugés aptes à l’abattage ante mortem. Ceci inclut les SPA écartés de la consommation humaine pour des raisons autres que sanitaires (sinon cat. 1 ou 2). Pour les SPA de ruminants, éligibles au test EST, l’orientation ne peut être faite qu’après le résultat des tests. Bien que de catégorie 3, les produits ne peuvent être cédés à un utilisateur final non autorisé, ni revenir au sol (quelques exceptions). La définition inclut d’autres SPA générés par la découpe ou destinés à la transformation mais hors abattoirs (industries des viandes, produits à base de viande, viande fraîche à transformer ou fraîche). La catégorie 3 comprend aussi des produits crus de retrait à la vente, certains sous-produits animaux issus de l’abattage hors abattoir agréé, pratiqué en annexe d’une exploitation agricole (EANA), les sous-produits animaux issus de la production agroalimentaire132 : ils sont issus de la fabrication des DAOA (denrées alimentaires animales

131 En usine agréée pour la transformation par une méthode non normalisée. 132 Ces matières sont considérées comme « crues », c’est-à-dire n’ayant pas subi le traitement ou la transformation préalable obligatoire avant toute utilisation (alimentation animale, EOA dont la production de compost ou de biogaz). Et ce même si elles peuvent avoir subi une transformation au titre du règlement (CE) n° 852/2004, article 2. C’est le cas par exemple des cretons pourtant issus de fondoirs à chaud, qui, s’ils sont déclassés de la consommation humaine,

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ou d’origine animale), quel que soit le stade de production (hors abattoirs et remise directe) sous conditions : récolte et stockage corrects133, absence de souillure (corps étrangers, produits chimiques, déchets ou SPA de catégories 1 ou 2), non altérés ou putréfiés. Les matières contenues dans les eaux résiduaires ne sont pas classées ici. Pour la fabrication d’aliments pour animaux familiers (unité agrée), les SPA doivent avoir subi un traitement à plus de 90°C134. A défaut, c’est cette unité qui devra procéder à ce traitement thermique ou à un des autres traitements autorisés. Les huiles usagées végétales provenant d’ateliers autres que les cuisines (ateliers d’IAA : poissons, viandes ou légumes) ne sont pas des SPA au sens réglementaire. Les anciennes denrées alimentaires sont aussi classées en catégorie 3: matières issues de la production agroalimentaire, constitués de ou contenants des produits d’origine animale et propres à la consommation humaine mais qui ne peuvent être vendus (mauvaise présentation, saturation du marché, de DLC trop courte, de défaut d’emballage ou d’étiquetage…). Mais elles ne doivent pas être avariées ou avoir fait l’objet d’un rappel sanitaire, sinon elles rentrent en catégorie 2. Pour limiter le gaspillage alimentaire, les DAOA reste dans le cadre de l’alimentation humaine, sauf si le choix est fait de les destiner à l’alimentation animale, dans ce cas, ils deviennent des SPA de catégorie 3. Certaines transformations réalisées sur l’aliment peuvent être considérées comme des traitements assainissant avant utilisation en alimentation animale au titre du présent règlement. La catégorie 3 compte des anciens aliments pour animaux : concerne les produits dérivés de la fabrication d’aliments pour animaux familiers ou pour animaux d’élevage. En catégorie 3 également : lait cru, colostrum et autres matières collectées sur animaux vivants. Suivant l’état de santé des animaux, ils peuvent en réalité être de catégories 3 ou 2. Le retour au sol de certaines matières laitières sans traitement préalable est possible dans certains cas. Le sang peut être classé en catégorie 3 (sous conditions) et être valorisé en pharmacie ou diagnostique (dispositions spécifiques pour les sérums d’équidés), en alimentation animale y compris pour les animaux d’élevage135, voire en filière EOA, après méthode normalisée de transformation. Des dispositions pour les placentas sont également prévues. La laine d’animaux vivants sans signe de maladie transmissible à l’homme ou à l’animal est de catégorie 3. Le lavage de la laine doit être réalisé par un établissement agréé. Des plumes (interdit en France), des poils et des cornes récupérés sur animaux vivants et en bonne santé peuvent être transformées en PAT en mélange ou traitées dans des applications hors EOA et alimentation animale, ou en vue d’usage énergétique. Des poils de bovins ou des crins d’équidés peuvent aussi être utilisés en passementerie136. Beaucoup de sous-produits issus d’animaux aquatiques et d’invertébrés aquatiques et terrestres sont de catégorie 3, les sous-produits issus de rongeurs (Rodentia) ou de lagomorphes : catégorie très particulière, pour l’alimentation des animaux familiers de cirque ou zoo (reptiles), certains sous-produits animaux issus de la filière « œufs », la plupart des cuirs, peaux et phanères (hors maladies). - Chiffres clés et volumes générés137

Les sous-produits animaux des catégories 1 et 2 issus de la découpe-abattage et de l'élevage représentent 312 000 t (tonnage brut de sous-produits animaux traitées par les adhérents du SIFCO). En 2007, sur les 985 420 t de produits traités, tout était transformé d’une part en PAT de cat. 1 et 2, soit une production de 251 251 t, soit en graisses pour 110 870 t produites. Cette transformation génère aussi 623 299 t d’effluents (estimations d’après l’étude ADEME-RESEDA). Les chiffres disponibles (en particulier au niveau du SIFCO) y ajoutent les valeurs correspondant à des activités périphériques, différentes réglementairement des produits de catégorie C1, C2 ou C3, et généralement indiquées par la rubrique « alimentaire » : huiles alimentaires usagées et autres. Quantités de viandes produites en France: 3,64 Mt équivalents carcasse de viande de bétails (porcins, bovins, ovins/caprins) et 1,9 Mt de viandes de volailles et lapins (source138).

sont considérés comme « crus » au titre du présent règlement et donc inutilisables en l’état pour comme fertilisants ou comme matières premières pour les aliments utilisés en élevage. 125 Leurs cuissons à 90 °C ou leur transformation en farine sont considérées comme un traitement. 133 Règlements (CE) n° 852/2004 et 853/2004. Pour les autres utilisations (alimentation animale des animaux d’élevage, EOA dont compost ou biogaz) une transformation (méthodes 1 à 7), une hygiénisation (active durant le compostage pour le compost ou préalable à la digestion pour le biogaz) ou a minima un traitement conservatoire (technique autre que le retour au sol) sont requis125. 134 D’autres caractéristiques des matières animales sont spécifiées par le Règlement (UE) n° 142/2011. Le règlement prévoit aussi des SPA qui ne nécessitent pas de traitement préalable. 135 Si d’autres réglementations comme le Règlement (CE) n° 999/2001 ne s’y opposent pas par ailleurs. 136 Conditions définies dans le règlement (UE) n° 142/2011. 137 Etude coproduits ADEME-RESEDA 2008 et autres sources

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Sous-produits générés : 1,8 Mt de produits de catégorie 3 et près de 1 Mt équivalents carcasses (ruminants, porcins et volailles) de ces sous-produits des catégories 1 et 2 en 2007139. Ces derniers avaient été traités, pour 931 000 t en 2013, et se répartissent de la manière suivante (étude ADEME-RESEDA 140 et le SIFCO141):

. Les animaux trouvés morts : environ 420 000 t . . Matériel à risque spécifié (MRS) des catégories 1 et 2: environ 336 000 t. . Les déchets de dégrillage des catégories 1 et 2 : environ 224 000 t. En 2007, d’après le SIFCO (syndicat professionnel qui représente la totalité des équarisseurs et 90% des transformateurs, de catégorie 3 et alimentaire), l’industrie française des coproduits animaux traitait 2,815 Mt de sous-produits répartis en 0,985 Mt de matières premières des catégories 1 et 2 et 1,830 Mt de matières premières de catégorie 3 (à risque limité).

En 2007142, suite à leur interdiction des produits pour les animaux de rente, beaucoup de PAT issus des produits de catégorie 3 ont trouvé un débouché dans l’aquaculture, avec au passage une augmentation de 4 % des matières traitées. De 2003 à 2007, l’incinération de ces PAT a été divisée par 5 au profit du pet-food et de la fertilisation. L’explication est réglementaire : ré-autorisation des PAT multi-espèces dans ces deux secteurs. Les débouchés majoritaires des graisses issus des matières premières de catégorie 3, souvent exportées, sont l’oléochimie (légère remontée en 2007 après un déclin de 2003 à 2006), l’alimentation animale (animaux de rente, en légère croissance en 2007) et le secteur des pet-foods (stable sur la période). La combustion était faible et en baisse de 2005 à 2007. La répartition entre les origines des sous-produits de catégories 1 et 2 destinés à cette industrie était la suivante (Etude Réséda 2, données de 2007 et SIFCO 2013) sur, en 2007, 985 kt soit 34 % des approvisionnements de la filière, en 2013143 au total 931 kt de produits C1 et C2 traités par l’équarrissage): - ATM d’élevage des catégories 1 et 2144 : 428 kt (15 %) en 2007

418 kt en 2013

- MRS et saisies : 323 kt (12%) en 2007 321 kt en 2013145

- Dégrillages146 de catégorie 1 et 2 (service privé classique): 225 kt (8%) en 2007 192 kt en 2013

- Sous-produits des catégories 1 et 2 issus de boucheries: 10 kt (0,3 %)

138 Enquête Agreste 2006 « Production des IAA en 2006 ». 139 Statistiques du SIFCO. 140 Enquête Agreste 2006 « Production des IAA en 2006 » 141 Rapport d’activité du SIFCO (Syndicat des Industries Françaises des Coproduits animaux) pour 2013, partie Indicateurs. 142 Etude ADEME-RESEDA de 2008 143 Rapport d’activité du SIFCO (Syndicat des Industries Françaises des Coproduits animaux) pour 2013, partie Indicateurs. 144 Services privé et public de l’équarrissage 145 Surtout à partir d’abattoirs et d’ateliers de découpe et dans une bien moindre mesure à partir de boucheries 146 Les déchets de dégrillage correspondent à des matières animales collectées dans les eaux résiduaires en vertu du règlement (CE) n°1069/2009. Ces matières animales ont été considérées à risque de présence de MRS ou à risque sanitaire élevé pour certains établissements qui pourtant ne traitent pas de MRS. Les règles techniques sont fixées par le règlement d’application (UE) n° 142/2011, qui impose en particulier une limite de la maille du filtre à 6 mm au maximum. L'ensemble des matières recueillies dans l'ensemble du dispositif à taille définie est considéré sous-produit animal dans les établissements concernés par ces dispositions. Les matières animales recueillies sont constituées de matières solides, de graisses, de sables mélangés à des matières animales, récupérées dans les égouts ou en d’autres endroits du système de prétraitement, situés en amont du système de filtration (puisards ou cribles) de 6 mm de calibre. Par commodité, ces matières seront appelées « dégrillage » ou « résidus de dégrillage ».

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L’activité de transformation de viande est présente dans beaucoup de régions de France mais avec une prédominance de l’Ouest de la France, Bretagne au sens large. Autres pôles : Centre de la France, extrême Sud-Ouest et extrême Nord. Historiquement, les sociétés d’équarrissage étaient bien sûrs localisées près des abattoirs et des ateliers de découpe. Mais avec le développement de nouvelles activités, le maillage est devenu plus homogène, en particulier pour ce qui est de la collecte. - Réglementation et impacts sur la filière

Tout est soumis à la réglementation dans ce secteur : le classement des sous-produits, les modes de traitements, les établissements autorisés à effectuer ces traitements et les usages autorisés. Le secteur a été très perturbé par les crises de l’ESB de 1996 et 2000. Il s’agit donc désormais d’un secteur extrêmement encadré d’un point de vue réglementaire pour ce qui concerne les sous-produits, qui doivent obligatoirement être triés (catégories 1 à 3) et selon la catégorie, ne peuvent être dirigés que vers certaines applications, avec une forte traçabilité et l’obligation de passer par des transformateurs agréés. Ces derniers, en fonction des applications, procèdent souvent à une étape de stérilisation (selon des modes de traitement bien spécifiques). Le développement de nouveaux usages doit nécessairement s’inscrire dans ce cadre réglementaire. Cette réglementation a un fort impact sur les débouchés, y compris donc en alimentation animale (animaux de rente et de compagnie). Concernant les SPA, il s’agit en particulier d’un règlement européen qui s’applique dans les 28 Etats-Membres, il n’y a pas de spécificité française. Si le produit est exporté (comme par exemple c’était le cas de certaines graisses avant la mise en place des filières biodiesel qui étaient envoyées aux Pays-Bas), il existe des procédures de traçabilité spécifiques. Si de nouveaux débouchés sont créés, ils doivent être admis à la majorité qualifiée des Etats-Membres. L’alimentation animale est interdite pour les C1 et C2. Il existe juste à la marge quelques cas particuliers de consommation en alimentation animale de produits C1 et C2 concernant le nourrissage d’animaux de meute, de zoo, les animaux à fourrure comme les visons, ou concernant des animaux sauvages (« culs-de-sac alimentaires » car les viandes qui en dérivent ne sont pas consommée par l’homme). Il s’agit de volumes très faibles, avec des collecteurs indépendants. L’enfouissement C1 et C2 de ces produits est interdit dans tous les cas. Si le cadre est rigide, des évolutions ont néanmoins eu lieu avec notamment : - La possibilité d’utiliser des graisses C1 et C2 pour la fabrication de biodiesel (comme à l’usine Estener

au Havre), non prévue dans le règlement à l’origine, ou l’utilisation en substitution du fioul lourd pour (production fixe de chaleur ou d’électricité). Ces procédures datent de 2004 ou 2005. On notera au passage que ce procédé peut générer une glycérine C2.

- Plus récemment (2015) un traitement alternatif au passage par le stade farine/graisse de « maturation aérobie » des cadavres de porcs C2 (sorte de compostage) a été autorisé comme préalable à l’incinération. Ce projet visait à composter ces SPA C2 avec de la sciure localement comme cela est pratiqué au Canada147 (Dynaporc), pour produire un compost (et des os). Au niveau européen, la solution n’a été retenue que comme un préalable à l’incinération, ce qui permet déjà de stabiliser le produit et donc d’allonger le délai de collecte, mais en limite l’intérêt.

Avec 100 kg de SPA C2, on peut produire environ 30 kg de farine, utilisée idéalement dans les engrais, et 12 kg de graisses (le reste étant de l’eau) qui peut par exemple servir à faire des biocarburants. On peut donc estimer qu’environ 110 000 t de graisses C1 et C2 sont générées en France (avec peut-être une perte de 20 000 t dans ce circuit suite aux changements réglementaires en cours). L’usine d’Estener à elle seule peut consommer 75 000 t de graisse. Un projet de SOFIPROTEOL sur des esters à partir de graisses (restauration, graisses de cuisson industrielles,…) n’a pas été poursuivi. La quantité de graisse d’origine animale disponible reste faible si on la compare aux huiles végétales. Ces dernières ont par contre d’autres valorisations à bien plus forte valeur ajoutée ;

147 Pour des raisons hygiéniques assez particulières.

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Ceci pose le problème plus large, de la pérennité des approvisionnements dans les unités de traitement. C’est le cas en particulier pour la méthanisation, où les produits doivent idéalement être toujours les mêmes et en volume constant. Certains défendent l’idée de systèmes moins centralisés, avec des installations locales peut-être plus à même de garantir un approvisionnement dans la durée, basé sur une meilleure confiance entre les acteurs. A titre d’exemple, un projet avec Olva Technologie (Tarbes) visait à associer localement des producteurs de dérivés de SPA sous forme de graisse (abattoir, autres industries agroalimentaires et restauration), à les estérifier dans une petite unité locale et à alimenter ainsi une flotte de transports en commun. Le surcoût lié au manque d’économie d’échelle pourrait être au moins en partie compensé par les faibles coûts de transport et une garantie d’approvisionnement. Ce type d’approche pourrait être particulièrement pertinent avec les SPA et leurs dérivés C2. On peut imaginer d’autres débouchés en oléochimie, la contrainte principale étant par contre l’analyse des risques pour l’homme, qui dépendra bien sûr du type de chimie mis en œuvre. D’une manière générale on parle d’usages techniques (hors alimentaires et fertilisation). L’initiative de démarches de ce type peut venir d’industriels, de syndicats nationaux ou de fédérations européennes. Le processus est bien défini d’un point de vue administratif et doit être européen. Pour ce qui concerne l’alimentation, l’Union Européenne étend les prescriptions générales sur l’hygiène et la sécurité alimentaire à tous les niveaux de la chaine de l’alimentation animale, y compris la production primaire, en établissant un système de responsabilité et d’obligations pour les exploitants de ce secteur. Ce système comprend notamment des exigences relatives à l’enregistrement ou à l’agrément des entreprises, et à la production des aliments pour animaux (Règlement (CE) n° 183/2005 du Parlement européen et du Conseil du 12 janvier 2005 établissant des exigences en matière d'hygiène des aliments pour animaux).

La réglementation en ce qui concerne la mise sur le marché des aliments pour animaux et l’utilisation des aliments pour animaux est régie par le décret européen n° 2011-708 du 21 juin 2011, modifiant le Décret n°86-1037 du 15 septembre 1986.

Les déclarations obligatoires pour ces matières sont listées au catalogue des matières premières pour aliments des animaux, issu du règlement n° 575/2011 de la Commission européenne, daté du 16 juin 2011. Par ailleurs, les produits dérivés du secteur de la viande obéissent aux règlements (UE) N° 142/2011 et (CE) N°1069/2009. A ce titre, les SPA de la filière de catégorie 3 sont en général utilisables dans tous les usages (y compris la fabrication de PAT) mais pas en retour direct au sol. Concernant les SPA C1 et C2, nous sommes à un moment charnière des évolutions réglementaires. En effet, le 29 mai 2015, l’OIE148 a classé la France dans les pays à risque négligeable d’ESB. C’est en quelques sortes la fin officielle de la crise de la vache folle. L’UE va en prendre acte, ce qui va entraîner des conséquences importantes au niveau de la classification des produits, en particulier en allégeant la liste des produits classés MRS149 : - Déclassement de nombreux produits qui étaient auparavant en catégorie 1. Certains de ces produits

pourraient même retrouver le statut de denrées alimentaires. C’est le cas par exemple pour les intestins. Seuls la moelle épinière et quelques autres organes resteront dans la liste des MRS, et ce pour les animaux de plus de un an. La liste des produits en C2 devrait aussi logiquement s’allonger.

- Certains autres SPA vont passer de la catégorie 2 (farines C2) à la catégorie 3 et donc pouvoir

rejoindre les engrais (passage d’une valorisation à 0-10 €/t à 150-200 €/t !).

Les produits bovins resteront bannis pour l’alimentation animale, pour des raisons de risque sanitaire (risque de contamination fortuite) et des raisons psychologiques suite au traumatisme causé par l’ESB. Concernant par exemple les graisses, la France avait déclaré momentanément l’interdiction des protéines et des graisses en 2000 en alimentation. Concernant les graisses, seule la France a adopté cette position dans le monde. L’interdiction a été levée en 2003 pour la volaille et en 2004 pour le porc. Pour autant ces produits ne sont dans la pratique plus utilisés en alimentation animale par réticence des acheteurs. La réutilisation des produits en aquaculture semble poser moins de problèmes. Par contre l’utilisation de PAT

148 Organisation Mondiale de la Santé Animale (OIE), organisation intergouvernementale chargée d'améliorer la santé animale dans le monde. 149 Les textes réglementaires sont attendus pour l’été 2015.

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de porcs et de volailles en valorisation croisée (du porc vers la volaille et vice-versa) pourrait être autorisé à terme.

Les impacts sur les équilibres des marchés vont être forts et pour certains imprévisibles à ce stade, d’autant plus que la réglementation n’est pas encore changée à ce jour. La vitesse des phénomènes de déplacements de marché est également difficile à prédire. On s’attend une augmentation des capacités de traitement en C2 (probablement une multiplication par deux ou trois des capacités en C2 et peut-être l’apparition d’unités plus décentralisées de traitement) et à une baisse en C1. Ceci serait peut-être l’occasion de créer des initiatives locales, basées sur la notion d’économie circulaire. Au moins deux sociétés ont déjà annoncé la fermeture de sites C1. Une reconversion en C2 n’est pas exclue. Concernant les MRS qui vont redevenir alimentaire, on peut par exemple citer la fraise de veau (intestin). Elle a été interdite à la consommation pendant 15 ans mais était auparavant consommée dans les tripes, andouillettes ou en vinaigrette. On ignore quelle seront les réactions des consommateurs et des fabricants face à ces changements. Environ 40 000 t de produits pourraient être concernées par ce retour vers l’alimentaire. Rappelons que le compostage et l’épandage sont interdits pour les produits C1 et C2. Seules les matières stercoraires (contenus de l’estomac et de l’intestin) et les déjections sont autorisées pour ce débouché. Pour les C3 ceci est autorisé car le compostage en andain avec aération forcé permet de garantir le barème de 70 °C pendant au moins une heure. Ceci se pratique par exemple sur du sang C3, sur support carboné. Des expérimentations de compostage avaient par exemple été menées sur des mélanges de sang (C2 à l’époque et désormais C3) avec des déchets verts urbains et du marc de raisin. Sur les produits C2, le compostage et la méthanisation ne sont possibles que si le produit a été stérilisé avant (133 °C, sous 2 bars de pression et pendant au moins 20 minutes). Il s’agit par contre d’ajout à des unités traitant du lisier ou des boues et les volumes concernés seraient donc faibles. Pour le compostage, il n’y a pas a priori de projets en cours. Les réticences sont déjà fortes avec les SPA C3. Sur les environ 900 000 t de C1 et C2, sont souvent mélangés dans la pratique en l’absence d’un nombre suffisant de centres agréés C2 spécifiquement (2 en France), certains ont estimé qu’il ne devrait plus rester dans ces catégories, en 2016, que 200 à 300 000 t de SPA C1 et environ 400 000 t de SPA C2. Concernant les biocarburants, les graisses C1 et C2 bénéficient du double comptage, contrairement aux graisses C3. Par ailleurs, l’arrêté biodéchet devrait orienter une partie de ces déchets vers des valorisations agronomiques. Les structures concernées incluent de nombreux petits établissements (à partir de 10 t/an), y compris certaines installations de restauration collective ou des petits supermarchés. Les produits pourraient être orientés vers la méthanisation, mais aussi rejoindre certains circuits du type C2 ou C3, comme le démontre déjà les initiatives d’au moins un acteur du secteur qui juge cette option plus rentable. Conclusions et enseignements :

o Les quantités de sous-produits animaux sont assez importantes mais de natures diverses, la collecte et le tri sont obligatoires, les circuits logistiques sont en place et leur traçabilité très bien contrôlée.

o Les débouchés sont par contre particulièrement bien définis et très liés à un cadre législatif très rigide qui a totalement façonné la filière avec comme objectif la sécurité sanitaire.

Caractérisation des différentes voies de valorisati ons

D’une manière générale, les SPA sont majoritairement destinés aux industries de transformation des sous-produits animaux . IIs sont alors souvent (systématiquement pour les produits de catégorie 1 et 2) transformés en :

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. PAT (Protéines Alimentaires Transformées), farines, peaux et os destinés à la fabrication de gélatine et autres. A noter l’interdiction en novembre 2000 (règlement (CE) 999/2001) de l’utilisation des PAT dans l’alimentation des animaux de rente (« feed-ban »). Les autres débouchés sont les aliments pour les animaux de compagnie, voire la destruction par incinération.

. Corps gras.

Parmi les autres débouchés de ces dérivés (étude ADEME-RESEDA) :

. Compostage (par exemple pour les soies de porc)

. Industrie du cuir (tannerie, mégisserie et pelleterie) pour certaines peaux, notamment bovines . Autres voies de valorisation: oléochimie, valorisations énergétiques ou autre.

Le traitement des matières premières des catégories 1 et 2 s’appelle l’équarrissage . L’équarrissage comprend des étapes de broyage, cuisson, déshydratation et incinération. Les cadavres et MRS sont stockés dans le clos d’équarrissage. Dépouillés ou non, ces cadavres sont ensuite mis dans une trémie pour être broyés. La bouillie de viandes, d’abats et d’os ainsi obtenue subit ensuite une cuisson sous certaines conditions de température, de pression et de durée. Le procédé de transformation dans les cuiseurs aboutit à la production de farines grasses de viandes et d’os, farines dites « à haut risque ». Ces farines sont susceptibles de contenir le prion (de la maladie de la vache folle) car les conditions de cuisson ne permettent pas de le détruire. Les farines sont ensuite pressées pour en extraire les graisses des catégories 1 et 2 et les déshydrater. Une fois les farines sèches de viande et d’os de catégorie 1 et 2 (FVO) et les graisses séparées, celles-ci sont stockées (généralement en silos ou sous hangar). À l'exception du lisier, la manipulation et l'entreposage temporaires des matières de catégorie 2 ont obligatoirement lieu dans des établissements intermédiaires agréés et de même catégorie. Collectées, transportées et identifiées sans retard, ces matières sont150:

- 1) directement incinérées comme déchets dans une usine d'incinération agréée ;

- 2) transformées dans une usine agréée selon une méthode spécifique, auquel cas le produit de

cette transformation est marqué et finalement élimi né comme déchet ;

- 3) ensilées ou compostées s'il s'agit de matières issues de poissons ;

- 4) dans le cas du lisier et du contenu de l'appareil digestif, du lait et du colostrum ne présentant aucun risque de propagation de maladie transmissible, soit :

a) utilisées sans transformation comme matières premières dans une usine de production de biogaz ou de compostage ou traitées dans une usine de produits techniques, soit,

b) appliquées directement aux sols .

Les SPA de catégorie 1 offrent le moins de possibilités légales, ils doivent nécessairement être transformés et (en farine et graisse) puis être incinérés ou traités en oléochimie. Par contre, l’autorisation des farines C1 n’est pas autorisée en tant que combustible. La raison est que personne n’en a fait la demande, l’application n’est pas permise. D’une manière générale, tout nouveau projet doit démontrer un niveau de sécurité comparable à celui de l’incinération ou de la co-incinération. Concernant l’industrie cimentière, qui est donc le principal débouché, on remarquera que les cimenteries n’opèrent que lorsqu’il y a demande de ciment et que cette demande est faible en ce moment. Par ailleurs, les cimenteries ne brûlent pas que des farines animales mais aussi des produits chimiques, des résidus de pneus ou des déchets issus de collectivité. On remarquera aussi l’arrivée dans ces cimenteries de matériaux issus de tri (plastiques et tissus). Par ailleurs il existe un arrêt annuel pour maintenance, souvent supérieur à un mois. Les équarrisseurs gèrent ces périodes en jouant sur les stocks mais aussi en développant l’incinération dans le

150 Site internet http://www.cheval-respect.com/equarrissage.php consulté le 4 février 2015.

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contexte de chauffage de villes par exemple (c’est le cas à Grenoble où l’installation est assimilée à une unité de traitement de déchets).

Il existe 87 unités de compostage agrées (utilisant surtout des produits de catégorie 2) et 30 unités agréées de production de biogaz. Seules 23 unités ne fabriquent d’EOA qu’à partir de produits de catégorie 3. La mise sur le marché des fertilisants nécessite une « transformation » préalable (stérilisation sous pression ou autre méthode normalisée de 1 à 7, pasteurisation normalisée,…). Les produits doivent contenir des substances qui interdisent leur consommation par les animaux. On compte 40 entrepôts agréés. Le retour au sol direct n’est pas prévu, sauf pour certains produits du lait et du colostrum. On notera que les mélanges de SPA des catégories 2 et 3 deviennent des produits de catégorie 2 selon la réglementation et sont par exemple méthanisés. Il est certain qu’un meilleur tri en amont permettrait de mieux valoriser les produits C3. Aucun SPA C1, C2 ou C3 n’est admis en alimentation des ruminants.

- 5) utilisées dans une usine de produits techniques pour la confection de trophées de chasse .

Un établissement intermédiaire des catégories 1 et 2 assure « la manipulation et l’entreposage temporaires de matières non transformées des catégories 1 et 2 en vue de leur transport vers une destination finale et dans lequel certaines activités préliminaires de transformation telles que le prélèvement des peaux ou la réalisation d’inspections post-mortem peuvent être menées » (règlement 1774/2002 du Parlement Européen et du Conseil abrogée depuis et remplacé par le règlement n° 1069/2009). Le passage par un établissement intermédiaire allonge considérablement le délai qui sépare la mort de l’animal de son traitement industriel. La dépouille, après avoir souvent transitée par un établissement intermédiaire, est traitée en usine de transformation. Il s’agit là d’un « établissement assurant le traitement des matières de catégorie 2 avant leur élimination finale ou une nouvelle transformation ». Le règlement (CE) n° 1069/2009 précise quels débouchés sont possibles pour les produits de la catégorie 3 (art. 14). Il s’agit bien sûr de la catégorie ou les débouchés sont les plus divers et importants en volume. Les principaux : - l’alimentation des animaux d’élevage et familiers . Si la valorisation en alimentation animale reste possible, l’absence fréquente de tri, collecte et compte tenu des faibles proportions de chaque PAT, fait que seule la valorisation de PAT multi-espèces est souvent pratiquée. Ce secteur fournit donc rarement des PAT spécifiques (produits sanguins, ovoproduits, PAT de sang, PAT de poisson, PAT de volaille et autres, dérivés du lait). Certaines régions ont cependant organisé une filière de collecte pour valorisations spécifiques. La collecte peut aussi être compliquée par les emballages et les délais contraignants de collecte…

- la fertilisation des sols après « transformation » ou la production de biogaz et de compost en filière agréée. Les DCT et les coquilles d’œuf devraient faire l’objet d’arrêtés. La difficulté de valorisation en alimentaire explique que le principal débouché du secteur soit la fertilisation, après compostage ou production de biogaz. La filière de collecte/ traitement se développe en France. Une hygiénisation par pasteurisation est par contre nécessaire (dérogation pour les anciennes denrées, réputées transformées).

- incinération ou co-incinération directe en tant que déchet, voire l’enfouissement en décharge autorisée d’anciennes denrées alimentaires ou de aliments pour animaux « transformés ». Peu d’éléments réglementaires existent sur leur usage en tant que combustibles. A l’heure actuelle seules les graisses de catégorie 3 sont acceptables comme combustible. Ces SPA cat. 3 peuvent aussi suivre la voie de l’incinération des ordures ménagères, sous réserve de traçabilité et d’assurance de bonne incinération.

- d’autres filières techniques. Sur les 985 000 t de matières de catégories 1 et 2 , 251 000 t sont transformées en PAT (25 % du gisement), incinérées, et 111 000 t (11 % du gisement) sont transformées en graisses, brûlés en chaudières en substitution des carburants fossiles et de l’électricité. Les 63 % restant, soit 623 000 t correspondent à des effluents issus du procédé de traitement.

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Les farines sèches des catégories 1 et 2 (FVO) sont acheminées la plupart du temps vers les cimenteries industrielles qui les éliminent par incinération ou vers les usines d’incinération où elles subissent un traitement thermique et dont les substances qui en résultent sont incinérées. Les graisses, elles, peuvent être valorisées en combustible dans l’unité même.

En 2013151, les produits transformés dérivant des produits C1 et C2 pesaient pour 312 038 t (soit au passage une génération de coproduits/effluents de 418 095 t – 312 038 t = 106 057 t). Les débouchés de ces dérivés de sous-produits des catégories 1 et 2 se décomposaient de la manière suivante :

. 1.1) Des PAT de catégories 1 et 2 à hauteur de 251 251 t en 2007 et de 219 151 t en 2013 , soit 70 % des débouchés (à partir de données du SIFCO en 2007), dont, en 2007, 119 814 t à partir d’ATM et 131 437 t issues de MRS ou autres (saisies d’abattoirs, ateliers de découpe, boucheries, dégrillage…). Ces PAT étaient incinérées en totalité en 2007. En 2013, elles sont incinérées pour 189 920 t (87 % de ces farines C1 et C2) et utilisées comme fertilisant C2 pour 29 231 t (13 % de ces farines).

- . 1.2) Des graisses de catégories 1 et 2 pour 110 870 t , en 2007, dont 43 434 t sont issues d’ATM et 67 436 t issues de MRS ou autres. Ces graisses faisaient en 2007 en totalité l’objet d’une combustion (utilisation comme combustible liquide en substitution des carburants fossiles ou de l’électricité). En 2013, pour les 92 887 t de graisses animales C1 et C2 traitées (30% des débouchés) : combustion pour 44 446 t (48% de ces graisses) et fabrication de biodiesel pour 48 441 t (52 %). En général, les graisses C2 n’ont pas de marché spécifique, elles sont donc souvent mélangées avec des graisses C1. Dans l’absolu, il pourrait y avoir des demandes d’applications nouvelles en chimie et dans d’autres secteurs industriels, si un acteur est moteur (et donc avec un marché identifié) et si le produit est conforme au cahier des charges. De ce point de vue, le gisement est subi (par exemple il n’y a souvent pas de tri entre les espèces), avec par exemple ses caractéristiques d’acidité, de degré d’insaturation (indice d’iode) et d’autres paramètres qui ne peuvent souvent pas être maîtrisés. Fabriquer une farine C2 issue uniquement de volaille peut s’avérer par exemple économiquement impossible, ce qui peut freiner des débouchés. Contrairement aux SPA C3 pour lesquels des filières dédiées peuvent exister, beaucoup de SPA C2 ne sont pas valorisés spécifiquement, même s’il s’agit d’animaux morts non ruminants (volailles, porcs), car trop éparpillés, comme ça peut être le cas en dehors de régions comme la Bretagne ou les Pays-de-la-Loire. Les prix de vente des produits dérivés de SPA sont en baisse, y compris pour l’application biodiesel. Le développement d’une nouvelle filière devrait donc créer une valeur ajoutée très importante (prix élevé et volume suffisant). La voie thermochimique de cette filière a été considérée puis abandonnée (sans doute par rapport à des questions de rentabilité et de cadrage réglementaire).

Si on résume les débouchés de ces PAT et graisses de catégorie 1 et 2 en 2013, traitées par cette industrie des coproduits, soit au total 312 038 t, on a la répartition suivante: . 234 366 t (75,1 %) destinées à une valorisation énergétique . Les farines C1 et C2 sont incinérées pour 189 920 t et les graisses C1 et C2 font l’objet d’une combustion pour 44 446 t. . 48 441 t (15,5 %) de graisse C1 et C2 sont destinées à la fabrication de biodiesel .

. 29 231 t (9,4 %) qui sont utilisés comme fertilisants. Il s’agit de PAT C2 uniquement.

Le cas le plus courant concerne les SPA C2 (animaux autres que les ruminants trouvés morts en élevage non contaminés et morts sans raison identifiée). Les produits dérivés, stérilisés sous pression sont admis en fertilisation (fabrication d’engrais organiques et organo-minéraux), contrairement aux SPA C1. Ce débouché est plus rentable que la co-incinération en cimenterie. En effet, celle-ci valorise le SPA entre zéro et 10 €/t environ.

Les SPA C1 sont destinés à l’incinération (en particulier une tonne de graisse = 820 kg de pétrole). Des incinérateurs in situ ont été étudiés par la filière. Les SPA C2 ont en théorie des débouchés plus larges (oléochimie, compostage ou méthanisation) après pasteurisation… mais la filière de valorisation n’existe

151 Rapport d’activité du SIFCO (Syndicat des Industries Françaises des Coproduits animaux) pour 2013, partie Indicateurs.

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pas… Ils sont donc traités avec les SPA C1. Ceci s’explique par un caractère très disséminé et des coûts de collecte très importants, sans parler des débouchés. Les sociétés d’équarrissage, dans le cadre de leur activité principale, la collecte des produits C1 et C2, servent également de point de collecte pour d’autres produits en C3. Il existe également quelques pools de méthanisation, la technologie n’étant rentable qu’au-delà de certaines capacités. Par contre la méthanisation ne semble pas appliquée en France sur les SPA C2 (animaux trouvés morts en abattage, SPA d’abattoirs C2). La réglementation devrait évoluer, suite à la fin des tests ESB, considérée comme éradiquée, et permettre plus de liberté pour valoriser les produits C2 et de valoriser certains C3 comme les coproduits porcins en alimentation de rente (autorisé dans d’autres pays européens) en plus des pet-foods. Du point de vue du vocabulaire, bien que la réglementation parle de SPA, l’usage est à l’utilisation du terme coproduit (jusqu’au nom du SIFCO). Ceci est en particulier vrai pour les produits de catégorie 3. Il existe par ailleurs de très nombreuses valorisations de faible volume mais à forte valeur ajoutée à destination du secteur médical ou de la chimie fine. Ces produits sont extraits par exemple des muqueuses d’intestin (héparine), du pancréas (insuline, pancréatine), du sang, de la caillette (estomac, comme la présure), des cartilages et tissus conjonctifs (chondroïtine sulfate, acide hyaluronique), etc… On dérive aussi de ces produits des hydrolysats comme facteurs d’appétence. Des circuits de collecte spécifiques existent comme par exemple celui de Proco (Prodia). Pour plus de détails, on consultera par exemple l’étude sur le 5éme quartier de FranceAgriMer152. Conclusions et enseignements : Les usages autorisés actuellement pour ces produits sont l’incinération/combustion surtout pour l'ensemble des produits, minoritaire en amendements (farines de catégorie 2) et en biodiesel /oléochimie (graisses de catégorie 2). Tendances et perspectives de développement Tendances et évolutions à venir Le secteur, considéré comme sensible au niveau sanitaire, est extrêmement encadré du point de vue législatif et règlementaire. Aucun nouveau développement ne peut s’imaginer sans prendre en compte ce cadre, offrir des garanties sanitaires et faire ensuite évoluer ce cadre réglementaire très lourd et dont le niveau de décision est à l’échelle européenne… Entre 2007 et 2013, le gisement de coproduits est apparu assez constant. Le système de valorisation est à la fois très contraint par les règlementations mais aussi très réactif, comme en témoignent les évolutions très rapides liées aux changements de réglementation Pour certaines graisses, on assiste à l’émergence d’une filière biodiesel à base de graisses animales, mais ce secteur ne pourrait croître de manière importante que si la réglementation évoluait (taux d’incorporation). L’incinération n’est réservée qu’à certains produits de catégorie 1 (et 2 dans une moindre mesure), et la priorité entre les filières est donnée à l’alimentation animale, pet-food en particulier, qui doit représenter le meilleur débouché économique. De ce fait l’utilisation en agronomie n’est pas non plus privilégiée lorsque d’autres valorisations existent, sauf pour des produits de catégorie 2 qui y trouvent un débouché plus intéressant que la valorisation énergétique. Il faut par contre rappeler la sensibilité particulière des acteurs français qui évitent dans certains cas des produits d’origine animale, alors même que la réglementation l’autorise. D’où des exportations massives de certains produits vers d’autres pays de l’UE comme l’Espagne.

152 Etude de Blézat Consulting pour le compte de FranceAgriMer intitulée « Etude sur la valorisation de 5éme quartier des filières bovine, ovine et porcine en France », mai 2013.

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Si le gisement est globalement stable, on ne peut pas en dire autant des débouchés, le secteur a été fortement impacté par les crises de l’ESB de 1996 et de 2000153 avec en particulier la mise en place rapide d’un « feed ban » interdisant l’utilisation des PAT en alimentation animale. La filière s’est fortement mobilisée pour lutter contre les ESST en améliorant les opérations de tri, en durcissant les conditions de traitement et de tests, en assurant une meilleure traçabilité et en réorganisant la filière dans son ensemble (spécialisation de sites, amélioration des collectes…). L’Union Européenne, a donc progressivement ré-autorisé certaines application de ces coproduits, ce qui a permis de récupérer une partie de ses débouchés historiques. Des évolutions prochaines sont attendues sur les sous-produits des catégories 1 à 3. Les graisses sont autorisées pour l’alimentation des monogastriques (porcs et volailles) mais cette possibilité reste peu exploitée en France, compte tenu d’une grande sensibilité nationale vis-à-vis de problématiques de danger sanitaire. Si la défiscalisation est suffisamment attractive, la valorisation en biocarburants pourrait changer la donne. Pour l’instant, le taux d’incorporation autorisé reste faible (et le potentiel en volume inférieur à celui des huiles végétales). Des essais ont été réalisés avec l’ADIV pour prétraiter par hydrolyse alcaline des SPA 1 et 2 (pasteurisation à des températures inférieures) au barème réglementaire (133 °C, 3 bars à 20 minutes) et les liquéfier pour les stabiliser avant méthanisation. Cette technologie est plus développée outre-Rhin, où le prix de rachat de l’électricité est ou était plus intéressant qu’en France, et où les installations d’abattage sont de plus grande dimension. Le produit est traité sur site puis transporté stabilisé vers un centre de méthanisation. Il faut également tenir compte dans ce secteur, de la complexité des dossiers d’agrément et plans de maîtrise sanitaires propres à la filière des SPA. Evaluation du volume disponible et supplémentaire pour valorisation Par définition, l’ensemble des sous-produits est valorisé dans différentes filières de valorisation/élimination (essentiellement en valorisation agronomique ou énergétique et en oléochimie-savonnerie). Les entreprises d’équarrissage sont tenues de collecter tous les SPA (1 et 2 en particulier) des abattoirs et des élevages, services d’enlèvement payés par ces derniers. Les entreprises en question doivent donc traiter l’ensemble des produits collectés, en essayant de jouer sur les possibilités de marché et dans le respect de la réglementation ? Certains des sous-produits de ces catégories pourraient, sur décision réglementaire, voir leurs usages considérablement élargis (changer de catégorie en fait). Perspectives de développement

Dans l’absolu, tous les sous-produits animaux sont disponibles. Mais offrir une meilleure valorisation n’est pas forcément chose facile. Le produit auquel on peut penser serait bien sûr les farines C1 et C2, pour l’instant incinérées. Par contre, un développement alternatif supposerait des garanties sanitaires solides, la séparation complète du traitement des produits C2 et un parcours du combattant législatif au niveau européen.

Conclusions et enseignements pour les sous -produits animaux des catégories 1 et 2 (produits à risques) issus de la découpe-abattage et de l'éleva ge :

Deux évolutions ont eu lieu récemment, pour compenser cette perte de marché du côté des animaux de rente (SPA catégorie 3): - La vente dans le domaine du pet-food surtout et de l’aquaculture (plus limitée), qui a atteint ses limites.

- Le développement de la filière biodiesel, qui profite en particulier aux graisses C1 et C2. Par contre le

développement de cette filière n’est pas garanti et la concurrence avec la combustion peut se poser (sans parler d’ACV comparées dont le résultat recèle une part importante d’incertitudes).

ce sont des produits très encadrés réglementairement, ce qui a eu pour effet de créer une filière de récupération des produits extrêmement structurée, avec une grande concentration des acteurs de la transformation et d’une grande traçabilité. Les débouchés sont donc pour l’instant limités (combustion/incinération, valorisation agronomique ou en oléochimie pour certains). Le développement

153 Etude RÉSÉDA-ADEME de 2008.

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de nouvelles valorisations suppose : - d’avoir des garanties sanitaires très élevées, comparables à la combustion/incinération (produits de catégorie 1 et 2). - de garantir des niveaux de valorisation au moins égaux à ceux du secteur. - de modifier la législation européenne en conséquence, ce qui s’est déjà fait. Avec le danger lié à l’ESB qui s’éloigne, et sa traduction réglementaire à venir sous forme d’assouplissements, certains de ces produits pourraient changer totalement de classification et certains devenir des produits utilisables en alimentation animale ou même humaine, ou en amendements. Beaucoup de produits pourraient quitter la catégorie de C1 et venir enrichir pour partie la catégorie C2. Des inconnues concernent la liste définitive des produits concernés (probablement cet été 2015) et les réactions des acteurs de la filière, ainsi que les réactions des consommateurs et des acheteurs des SPA et de leurs dérivés, mais on peut s’attendre au moins à une forte impulsion donnée aux SPA C2 traités spécifiquement. Pour les produits qui ne changeront pas de catégorie, la voie thermochimique, susceptible de garantir un niveau de sécurité très élevé (presque autant que la combustion en fonction des températures de gazéification) pourrait a priori s’y appliquer, même pour les sous-produits de catégorie 1. Malheureusement cette technologie, susceptible d’ouvrir des possibilités plus larges que l’incinération, n’est pas encore opérationnelle.

VIII. Matières secondaires de la filière éthanol et des autres industries de la fermentation: les vinasses

Contexte et chiffres clés - Définition du gisement :

Coproduits de la filière éthanol, les vinasses, sont produites et collectées à grande échelle en particulier par les fabricants d’éthanol et d’alcool à base de betteraves et d’origine vinicole ou les levuriers et autres industriels de la fermentation. La vinasse est le coproduit de la filière bioéthanol (et d’alcool de bouche) et des autres industries de la fermentation. La vinasse de betteraves est le résidu de la distillation du bioéthanol produit par fermentation de sirops de basse pureté de sucrerie (SBP). Il faut y ajouter les résidus de moûts de fermentation pour faire de l’éthanol à partir d’autres matières premières mais aussi par exemple issus de la production d’acides aminés (dont la lysine ou la thréonine), d’acides organiques (dont l’acide citrique) ou d’antibiotiques produits par fermentation (pénicillines, céphalosporines…), polysaccharides (xanthane)... Et ce, à partir de SBP ou d’autres substrats de fermentation (hydrolysats d’amidon issu du blé ou du maïs notamment, produits vinicoles…). Ajinomoto produit par exemple, à partir de mélasses de betterave ou de canne, des vinasses tout au long de l’année. L’industrie sucrière à partir de betterave a deux coproduits qui nous concernent ici en tant que matières premières carbonées pour la fermentation:

o La mélasse , qui est un coproduit sirupeux riche en saccharose (environ 60% de la MS), obtenue par cristallisation (purification) de la liqueur résultant de la concentration des sirops de basse pureté issus de la cristallisation de troisième jet (EP3, désormais SBP3). Les industries de transformation de la canne à sucre et la raffinerie du sucre brut produisent aussi des mélasses. Ce produit est en voie de disparition au profit des SBP2154.

o les sirops de basse pureté (SBP), mais à haut taux de saccharose (55-65 % de la MS), nouveau

nom des égouts pauvres, depuis à peu près 2010 et pour des raisons d’image, résidus sirupeux

154 Il existe aussi, mais cela est marginal, une technique de récupération du sucre, basée sur des résines échangeuses d’ions en particulier et la formation d’un précipité de calcium saccharaté. Il s’agit en particulier du procédé Steffen utilisé dans certaines zones des Etats-Unis.

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obtenus après cristallisation de deuxième jet, sont devenus des produits à part entière. En effet dans certains cas, en particulier lorsqu’il s’agit de les utiliser en tant que substrats carbonés pour la fermentation industrielle, la dernière purification à partir des SBP2 (à 70 % de MS) ne se justifie pas et les sucreries arrêtent donc souvent la purification au stade de ce qu’il était convenu d’appeler EP2 , pour égouts pauvres de deuxième jet. Ils sont plus riches en saccharose que la mélasse155 : 55-65 % contre 45-50 % respectivement. Il est très important de noter que les SBP2 peuvent également être recyclés en amont du procédé (dans la liqueur standard), le sucrier, en fonction des débouchés du moment (sucre cristallisé/ substrat carboné en fermentation), pouvant choisir de produire ces SBP2, ou de les recycler pour produire davantage de sucre.

Pour le bioéthanol, il s’agit ici de produire un alcool destiné à l’incorporation de biocarburant, en direct ou au travers de la transformation en ETBE (éthyl tertio-butyl éther), ou autre dérivé oxygéné dérivé de la molécule de bioéthanol. L’alcool peut être intégré dans les carburants SP95 et SP95-E10 (jusqu'à 10 % d'alcool par litre d'essence), ou en plus forte concentration (65 % à 85 %) dans le nouveau carburant Superéthanol-E85, qui se développe en France, avec de belles perspectives de croissance. Le terme éthanol sera utilisé pour désigner ces applications. Pour l’alcool, le produit fabriqué n’est pas destiné à la carburation et peut être alimentaire ou non. Il peut trouver des débouchés en pharmacie, soin du corps, dans les spiritueux ou des secteurs techniques (produits ménagers, etc.…). Nous parlerons alors d’alcool même s’il s’agit de la même molécule, comme dans l’industrie.

Pour mémoire, pour produire de l’alcool/éthanol à partir du moût de fermentation/vins, on procède en général à deux distillations successives : la « distillation » primaire qui conduit à l’alcool brut ou flegme, puis à une seconde distillation appelée « rectification » qui conduit à l’alcool surfin. Lors de ces distillations, en plus de la vinasse, sont générés divers coproduits de distillation minoritaires en quantité comme les huiles de fusel, les flegmasses et les « mauvais goûts ». On génère aussi des condensats lors de la distillation, et du gaz carbonique pendant la phase de fermentation. - Acteurs et chaîne de valeur associée

On peut distinguer :

1) Les producteurs de matières premières pour la fer mentation , avec principalement : - Les sucriers, qui ont comme coproduit des SBP2 (ou des mélasses), riches en saccharose.

- Les amidonniers qui utilisent une partie de l’amidon qu’ils extraient (surtout à partir de blé et maïs en

France) pour produire des hydrolysats d’amidon (glucose et oligomères de glucose) aptes à la fermentation. Ils utilisent aussi comme matière première des amidons ou matières amylacées riches en amidon qui ne peuvent pas être utilisées techniquement pour la production d’amidon, dans ce cas on peut considérer qu’ils partent de coproduits.

- Les coopératives ou structures qui opèrent dans le domaine vinicole et coproduisent des marcs, riches en fructose (disaccharide glucose-fructose).

2) Les utilisateurs de ces matières premières pour faire de la fermentation :

- Les fabricants d’éthanol de bouche et de bioéthanol . Il s’agit bien souvent de groupes qui ont une

activité sucrerie. On peut estimer que 90 % des SBP2 sont utilisés en interne par ce type de sociétés intégrées. Exemple de structures de ce type : Tereos, Cristal-Union,… Certaines amidonneries intègrent aussi une activité de fermentation.

- Les fabricants de levures de boulangerie ou dérivés (levures industrielles utilisées dans d’autres industries de fermentation comme la boulangerie ou la production d’éthanol, levains et autres ingrédients de panification, extraits de levures et arômes naturels, en nutrition animale, et humaine…),

155 Source : http://www.tereos-coproduits.com/sites/default/files/uploads/Sirop-basse-purete-FR.pdf consulté le 17/02/2015.

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ou l’extraction de composés à partir de levures, comme Lesaffre156. Ceux-ci achètent typiquement des SBP de sucrerie ou des mélasses de canne pour produire des levures et gèrent donc le devenir des moûts de fermentation après récupération des levures. On parle également de vinasses dans ce cas bien que la composition soit un peu différente. Les levuriers gèrent une partie de la vente de ces vinasses en direct et une partie via des agents commerciaux dans les différents pays où ils sont implantés. Lesaffre compte par exemple 49 sites de production dans plus de 40 pays (dont l’Egypte, la Russie, la Turquie, la Pologne, la Hongrie, l’Argentine, le Mexique, l’Espagne et l’Italie parmi les principaux) et gère en direct une moitié des débouchés des coproduits. On notera que cette industrie peut utiliser des coproduits sucriers de betterave, mais aussi de canne à sucre.

- Les fabricants d’acides citriques ou autres acides organiques par fermentation comme Syral.

- Les fabricants d’acides aminés par fermentation comme Ajinomoto-Eurolysine (lysine, valine, etc.).

- Les groupes pharmaceutiques produisant des antibiotiques ou autres molécules (enzymes, arômes, vitamines, ferments alimentaires) par fermentation, comme Novozyme.

- L’activité de « Distillerie » des coproduits vinicoles. Ce terme recouvre dans cette industrie une réalité assez large puisque les marcs (qui contiennent les rafles de grappes de raisin, les pépins, la pulpe et la peau de raisin) sont fermentés (« ensilés ») pour produire l’alcool, extraits à contre-courant pour en soustraire l’alcool, qui est distillés en produisant donc une vinasse. Après dés alcoolisation des marcs par extraction liquide/solide, les marcs épuisés sont déshydratés et fractionnés (le stade de fractionnement dépend des sites des distilleries) en rafles, pépins de raisin (et le cas échéant, si l’huile est extraite : tourteaux de pépins de raisin), pulpe/marc de raisin traités et séchés, marc de raisin déshydraté et/ou font également l’objet d’extractions complémentaires (tartrates, colorants/ antioxydants,…). Une partie des résidus des extractions est fermentée et distillée pour produire de l’alcool. D’une manière plus générale, la « distillerie vinicole » traite les marcs et les autres coproduits de la filière vinicole. Les distilleries traitent aussi d’autres coproduits vinicoles : les lies et les vins, qui sont d’abord désalcoolisés. Le résidu, vinasses obtenu après distillation est alors détartré, puis concentré. Il reste alors, en plus du produit principal l’acide tartrique, des vinasses détartrées et concentrées, ou concentrât (vinasses de raisin 2000 t). L’approche se rapproche du concept de bioraffinerie, où l’on cherche à valoriser au mieux tous les composants des produits (coproduits vinicoles ici). En général ces activités ne sont pas intégrées à l’amont vinicole et on y produit de l’alcool de bouche. Cette activité historique est liée à des contraintes réglementaires qui obligeaient les producteurs de produits vinicoles à leur céder leur coproduits pour traitement.

Certaines de ces filières pourraient tout aussi bien être classées dans la catégorie des industries de traitement des coproduits. En effet, ces industries basées sur la fermentation alcoolique ou d’autres types de fermentation industrielle (d’acides organiques ou aminés ou la levurerie), qui génèrent des coproduits, utilisent elles-mêmes des coproduits d’autres industries, dont les substrats de fermentation carbonés : sirops de basse pureté de betteraves, marcs vinicoles… Toutes ces activités génèrent donc des moûts de fermentation extraits, qui pour certains (dans le cas de l’éthanol), ont subi une distillation. La nature des vinasses produites par ces acteurs est différente dans la mesure où elles n’ont pas subi le traitement thermique lié à la distillation et que les souches de micro-organismes sont différentes. Par contre il existe de nombreuses similitudes de composition puisque les matières premières sont les mêmes. Les débouchés sont donc souvent comparables. Il faut cependant noter une exception d’importance : les vinasses de blé et de maïs sont généralement concentrées puis mélangées aux drêches de blé, et ne constituent donc pas un coproduit distinct. L’ensemble est alors valorisé en alimentation animale. Pour revenir à l’alcool, et à sa production à partir de blé, quelques unités ont fait le choix de circuits technologiques simplifiés pour privilégier la production d’un substrat de fermentation impur mais bien adapté à la production d’éthanol. Les deux acteurs principaux du secteur sont Tereos et Blétanol (à Bazancourt). A priori 2 usines sont encore concernées (depuis la reconversion de l’unité de Lillebonne en amidonnerie).

156 Leader mondial dans le domaine de la levure et de la panification.

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La Production d’éthanol à partir de maïs compte une seule usine, de conception récente en France : Abengoa Bioenergy (usine d’Aquitaine). Elle utilise néanmoins également des résidus viniques. Pour ce qui concerne les sites de production d’éthanol ou d’alcool à partir de sirops de basse pureté (ou de mélasse de sucrerie de betterave), les nombreux sites sont le plus souvent intégrés aux sucreries, mais on compte néanmoins deux distilleries distinctes. Le circuit commercial des vinasses est décrit dans la rubrique « Description des différentes voies de valorisation et ordre d’importance ». - Chiffres clés et volumes générés

Nous nous sommes ici focalisés sur la vinasse de betterave pour faire de l’éthanol, mais si l’on y ajoute l’éthanol issu d’hydrolysats d’amidon il faudrait théoriquement comptabiliser également les vinasses ce cette origine. Néanmoins, pour le blé et le maïs, les vinasses sont intégrées aux drêches, Les autres industries de fermentation, pour produire des acides organiques et des acides aminés, ou de la levure, sont beaucoup plus difficiles à évaluer car le faible nombre d’acteur implique un secret statistique sur les productions. Les volumes concernés sont néanmoins plus faibles.

Concernant les matières premières, les industries de fermentation, et en particulier la levurerie, utilisaient traditionnellement le coproduit mélasse de betterave. L’évolution du secteur sucrier, sous le poids de la modification des régimes de quotas sucriers européens en 2017 liés aux réformes de l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce) et l’émergence de la filière bioéthanol carburant a fait disparaitre en grande partie ce coproduit en tant que matière première pour ces industries. D’après la COFALEC (Confédération Européenne des Fabricants de Levure de l'Union Européenne, information reprise dans 157 ) les conséquences de la réforme de 2006 estimées en janvier 2008 étaient la suivante : disparition de 1Mt de mélasses du marché (passant de 5 à 4 Mt disponible pour les biocarburants et autres fermentations au niveau de l’UE), ce qui correspond à la consommation du secteur avant la réforme… Elles se sont donc adaptées à l’utilisation d’autres substrats de fermentation, notamment d’autres coproduits betteraviers comme les sirops de basse pureté. La transition n’est pas négligeable puisque cette partie non-sucre différente de celle des mélasses a nécessité des adaptations significatives des procédés. D’une manière générale, ces industries sont bien sûr très tributaires de la disponibilité et du prix des matières premières, notamment pour ce qui concerne la principale matière première, le substrat carboné. De nouveaux projets visant à fournir ce type de sucres en quantité et à bas prix sont donc vitaux pour ces industries, d’autant plus qu’elles sont concurrencées par des sociétés hors UE qui ont dans certains cas accès à des matières premières plus économiques (prix des matières premières végétales inférieur ou systèmes moins encadrés réglementairement ou autres formes de soutien au secteur). La production d’éthanol et alcool est en forte croissance: de 8,1 M d’hl en 2000 à 17,7 M d’hl en 2012-2013 en France158 , premier producteur européen159.

En 2012-2013, sur les 17,7 Mhl au total produits en France (alcool et éthanol), 50,9% sont d’origine betteravière, 46,2% d’origine céréalière, 2,7% d’origine vinique (issus des marcs et lies) et 0,2% d’autres origines. Ce volume d’alcool et éthanol est à peu près stable depuis 2009. Sur ces 17,7 Mhl, 11,5 Mhl sont du bioéthanol dont 4,4 Mhl sont d’origine betteravière26, 160 Un hectare de betterave, s’il est destiné uniquement à la production d’éthanol, produit environ 8 950 litres d’éthanol. On peut distinguer la production d’alcool et d’éthanol à partir de ses différentes matières premières :

o Production d’éthanol à partir de blé (procédés à mouture simplifiée et orientés vers la production

de bioéthanol). 2,18 Mt de céréales de la récolte 2011 ont été transformées en bioéthanol, soit la mobilisation de 3,4 % de la production de céréales. La France produit environ 25 % de l’éthanol

157 Etude RÉSÉDA-ADEME de 2008. 158 « Sucre et autres débouchés », Mémo statistique, Mai 2014. 159 La production européenne (UE à 27) d’éthanol et alcool était en 2013 de 67,51 Mhl, et estimée en 2014 à 70,97 Mhl (source : F.O. Licht) 160 « La betterave en 2010 », document édité à l’occasion de l’Assemblée générale de la CGB (Confédération Générale des planteurs de Betteraves), décembre 2009.

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carburant européen, soit 12 Mhl en 2011. Le bioéthanol représentait 5,6 % de l’énergie consommée dans la filière essence en 2011161. La vinasse produite est mélangée aux drêches.

o Production d’éthanol à partir de maïs : Abengoa Bioenergy (usine d’Aquitaine) a une capacité de production de 250 000 t/ an (soit 3,125 M hl162de bioéthanol par an), à partir de 525 000 t de maïs. L’usine d’Abengoa Bioenergy produit 150 000 t par an de drêches. Ces industries, ainsi que d’autres utilisant la fermentation, coproduisent également du gaz carbonique et bien sûr des vinasses de blé/ maïs.

o Ethanol ou alcool à partir de sirops de basse puret é ou de mélasse de sucrerie de betterave . Historiquement, les mélasses étaient très utilisées dans les industries de la fermentation, particulièrement des levures. Moyennant des adaptations des procédés, les SBP ont pris le relais et sont aussi de bons substrats. En 2012-2013, la production d’alcool et éthanol à partir de ces produits betteraviers en France était de 9,2 M d’hl. Le principal coproduit est la vinasse, résidu de distillation d’alcool/éthanol à partir du moût de fermentation. Un groupe comme Tereos coproduit environ 200 000 t de vinasses. Lors de la phase de fermentation alcoolique, on utilise des levures (en particulier de type Saccharomyces cerevisiae, proches de la levure de boulangerie). Ces levures peuvent être séparées (valorisation en alimentation animale ou agronomique) ou rester dans les vinasses.

o L’activité de « Distillerie » des coproduits vinicoles . En 2012-2013, la production d’alcool (voire

éthanol) à partir de ces produits viniques, en France était de 500 000 hl. De plus, comme en 2006-2007, en cas de surplus de vins, une partie de la production de vin doit être dirigée vers la distillation, ce qui perturbe le marché.

Au total, les coproduits de la filière éthanol/alcool représenteraient163 1,3 Mt/ an de coproduits, 16 % d’origine céréalière (208 000 t), 70 % d’origine betteravière (910 000 t) et 14 % d’origine viticole (182 000 t). En France, en 2012-213, 10 % de l’alcool d’origine betteravière est issu du pôle privé et 90 % du pôle planteur (coopératives). Si l’on considère, toujours d’après les mêmes données, que 70 % des 1,3 Mt/ an des coproduits de la distillerie sont constituées essentiellement de vinasses (vinasses concentrées issues de betteraves pour 67 % du gisement et d’origine vinicole pour 3 %), elles représenteraient 910 000 t, dont environ 870 000 t de vinasses de betterave . Les autres vinasses étant soit intégrées aux drêches pour le blé et le maïs, soit comparativement négligeables. A ce chiffre, il faudrait ajouter également les vinasses concentrées issues de production de levures, d’acides organiques (dont l’acide citrique) et d’acides aminés (dont la lysine), de volumes inférieurs. Les autres principaux coproduits sont les rafles (15% soit 195 000 t) et les drêches de blé (8% soit 104 000 t). Pour la betterave, les chiffres et estimations retenus pour la mélasse et les SBP sont les suivants :

o La mélasse : En 2012-2013, 240 000 t de mélasses ont été produites en France164. Comme indiqué précédemment, les procédés de sucrerie moderne sont beaucoup plus orientés vers la production de SBP. L’augmentation de la consommation de sucre de canne non raffiné contribue aussi à une raréfaction des mélasses sur le marché.

o les sirops de basse pureté (SBP), estimations CVG165, 166: 1,8 Mt /an en France (à environ 70 % de MS). Comme indiqué précédemment, les volumes de SBP2 (en fermentation) peuvent être

161 Source : http://www.passioncereales.fr/dossier-thematique/la-fili%C3%A8re-bio%C3%A9thanol consulté le 17/02/2015 162 Hypothèse de masse volumique : 800 kg/m3. 163 Etude ADEME- RESEDA de 2008 « Enquête sur les gisements et la valorisation des coproduits issus de l’agro-industrie ». 164 « Sucre et autres débouchés », Mémo statistique, Mai 2014. 165 Pour la campagne 2009, la sucrerie de Corbeilles (Etude d’Agro-Bio Sucres Engineering dans le cadre d’une demande d’autorisation d’extension et de mise à jour pour la poursuite de l’exploitation de l’établissement de Corbeilles du Groupe Cristal Union, 2010) avait traité 660 000 t de betteraves et produit 110 000 t de sucre blanc cristallisé pour 49 000 t de SBP2. Ce qui est équivalent à dire que 1 t de betterave produit 167 kg de sucre et 70 kg de SBP2. D’autre part, sur la base de données de 2013, Tereos16 indiquait qu’il produisait 105 kg de sucre pour 95 kg de SBP2. En

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extrêmement variables en fonction des débouchés comparés du sucre blanc et des SBP2. Au pire, le sucrier peut choisir de produire le plus possible de sucre, comme cela était fait avant, ce qui aurait comme conséquence de totalement éliminer les SBP2 mais aussi de générer dans une moindre proportion des SBP3 (les mélasses dans leur forme concentrée).

On notera que, si la fermentation est le principal débouché pour ces produits, la mélasse et les SBP peuvent également avoir d’autres utilisations concurrentes parmi lesquelles :

- L’alimentation animale : La mélasse en alimentation animale est utilisée son pouvoir liant et son caractère appétant. En 2006/2007167 la consommation de mélasse française en alimentation animale était de 1 000 t. Par contre, si l’on tient compte des échanges commerciaux (import et export), la consommation française de mélasse en nutrition animale seule était de 143 000 t. Mais sa grande viscosité, surtout à froid, impose des mesures particulières168. Les sirops de basse pureté y sont également utilisés pour leur pouvoir liant et leur caractère appétant.

- L’alimentation humaine : utilisation marginale des mélasses en alimentation.

Concl usions et enseignements :

Forte concentration des gisements et prédominance des vinasses de betteraves. - Réglementation et impacts sur la filière

L’impact a été fort au niveau de l’approvisionnement (dans le passé obligation d’apporter les coproduits aux distilleries) et il l’est possiblement aussi au niveau des débouchés (alcool, alimentation,…). D’une manière générale, les industries de la fermentation sont toujours à la recherche de produits en volume et à bas prix et cette équation peut guider les choix des fermenteurs vers tel ou tel substrat de fermentation. Or, les prix de ces substrats, ou les volumes de production, sont eux-mêmes souvent encore encadrés par des contraintes réglementaires, souvent communautaires. L’évolution du cadre réglementaire vers une libéralisation peut donc entraîner des changements brutaux dans ce marché par l’intermédiaire du prix et de la disponibilité des substrats de fermentation. Suivant les conditions offertes par le marché (prix des matières premières qui est fondamental dans ces industries mais aussi prix des produits finis), la production de produits de fermentation peut être plus ou moins favorable et donc varier sur le long terme, entrainant des variations dans les volumes de coproduits. Qui sont eux-mêmes souvent en compétition sur des marchés comme l’alimentation animale ou comme amendements. Si l’on raisonne au niveau de la vinasse elle-même, la profession voudrait sécuriser l’appellation de coproduit (sous-produit selon la réglementation), le risque étant que, face à une réglementation diversifiée en fonction des secteurs, du niveau de réglementation français et européens, des administration de tutelles, pouvant le cas échéant prêter à des interprétations différentes même localement, on ne catalogue ces produits de grande traçabilité et aux débouchés bien encadrés de déchets, ce qui aurait des conséquences extrêmement lourdes sur l’avenir des filières considérées. La vinasse dérivée de la production d’éthanol est enregistrée dans le cadre de REACH. De plus, elle est normalisée, avec une possible extension à l’échelle européenne avec le CEN. Les levuriers parlent en interne de produits dérivés , qui leur paraît plus cohérent avec les soins apportés à la gestion de ces produits, contrôle qualité y compris. Même le terme de vinasse, à connotation péjorative dans l’inconscient collectif (sens de mauvais vin), est remplacé par marc . L’idée de nom de marque, comme cela est pratiqué dans d’autres secteurs, n’est pas à l’ordre du jour dans le domaine de la fertilisation par exemple. Les contraintes réglementaires liées à l’épandage sont traitées dans le chapitre suivant.

faisant la moyenne de ces valeurs et en considérant que 136 kg de sucre blanc génèrent 82 kg de SBP2, et une production française de sucre de betterave de 3 Mt, on aurait donc une production annuelle de 1,8 Mt de SBP. 166 Source : www.cgb-France.fr , consulté le 17/02/2015. 167 Etude ADEME-RESEDA de 2008 168 Données issues de la Fiche « Mélasse de betterave et de canne », Comité National des coproduits, Institut de l’Elevage.

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Conclusions et enseignements : Forte dépendance du secteur aux évolutions réglementaires touchant la filière, ou des filières en interaction (au travers du prix des matières premières et coproduits). Le statut de coproduit devrait faire l’objet d’un consensus uniforme auprès des administrations françaises et européennes et dans les textes réglementaires. Caractérisation des différentes voies de valorisati ons - Description des différentes voies de valorisation et ordre d’importance

Les débouchés naturels de ces coproduits des industries de l’alcool/ éthanol seraient169 la valorisation agronomique (engrais ou amendement) à 77 %, en particulier pour les rafles et une partie des vinasses de raisin et betterave et l’industrie de l’alimentation animale à 17 % (drêches de blé et une partie des vinasses/mélasses). Valorisation agronomique 170 La vinasse de betterave (ou « vinasse de mélasse de betterave ») usuelle, coproduit de l’activité distillerie, la plupart du temps associée aux sucreries, est généralement épandue directement dans les champs. Une fraction de vinasse de betterave concentrée serait utilisée en industrie de la fertilisation (42 660 t). Pour ces vinasses (betterave + dérivés vinicoles) 77 %, soit environ 700 000 t, seraient dévolues à une valorisation en agronomie , le reste étant utilisé en alimentation animale. Une spécificité de ces vinasses concentrées est leur viscosité élevée, qui rend impossible leur épandage par des moyens de pulvérisation usuels, des engins agricoles spéciaux doivent être mis en œuvre (du type Terra-Gator engins avec des pneus basse pression pour respecter la structure des sols humides - ou autres). De plus, des stockages intermédiaires doivent être mis en place. Le stockage principal est assuré par les producteurs de vinasses, les sucriers. On peut considérer que cet aspect logistique est maintenant maîtrisé, qu’il y a beaucoup de matériel disponible, et le savoir-faire est répandu, et qu’il n’y a plus de difficultés majeures. Le seul problème est lié à des distances très éloignées des zones de production de vinasse (régions viticoles, fruitières, maraîchères), avec des petites demandes en quantité et pour lesquelles il n’existe pas de stockages intermédiaires. Les sucriers coopératifs (Tereos et Cristal Union en particulier) distribuent désormais eux-mêmes leurs vinasses, en particulier auprès de leurs adhérents planteurs. D’autres sucriers, comme Saint-Louis Sucre, distribuent les vinasses en direct et au travers de structures de distribution, comme la société Deleplanque 171 , qui utilisent elles-mêmes des relais équipés de stockages, pour approvisionner les agriculteurs (livraison rendue racine avec les équipements adéquats). La vinasse de betterave a une forte valeur fertilisante. La vinasse de sucrerie est recommandée pour la fertilisation des cultures exigeantes en potasse, betteraves et du colza en application d’été ou d’automne, des pommes de terre, du maïs en application de printemps, luzerne avant implantation. Ce fertilisant apporte essentiellement du potassium et de l’azote associés à de la matière organique. Il est proposé en « rendu racine » appliqué le plus souvent en période estivale. Son efficacité en termes de fertilisation potassique est équivalente à celle d’un engrais minéral. Elle apporte également des doses de phosphore et d’azote non négligeables et est une source importante en oligo-éléments comme le bore, le manganèse et le fer. Il s’agit d’un produit normalisé pour cette application (conforme à la norme NF U 42-001) et conforme au cahier des charges de l’agriculture biologique (règlement européen n° 2092/91). Les variations de composition restent assez faibles et dans les fourchettes définies par la norme.

169 Etude ADEME- RESEDA de 2008 170 Chiffres essentiellement issus de l’étude ADEME- RESEDA de 2008 pour la valorisation agronomique et l’alimentation animale, ou de calculs qui en découlent. 171 Qui distribue environ 20 000 t de vinasses, ainsi que d’autres coproduits de la filière sucrerie (sulfate d’ammoniac ou de potassium solides) ou d’autres origines (composts issus des filières animales, notamment des élevages de porcs et de volailles) riches en azote, phosphore, potasse et matière organique.

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Sur les cultures du type betterave, pomme de terre, luzerne, l’apport recommandé est de 3 à 3,5 t/ha, couvrant en grande partie les besoins en potassium de ces cultures. Sur les cultures moyennement exigeantes en potasse (colza, maïs, céréales, luzerne en exploitation), l’apport recommandé est de 2,5 à 3 t/ha selon les ressources du sol. Pour la partie oligo-éléments aucun ajustement de la fertilisation habituelle ne doit être fait. La demande de vinasses est maximale après la moisson : 80 % de la vinasse est consommée de juillet jusqu’à novembre (limite légale imposée par la directive nitrate). Les vinasses concentrées sont particulièrement intéressantes en épandage sur les chaumes car elles permettent une biodégradation plus rapide de ces dernières. Les 20 % restant sont épandus au printemps. Les délais de stockage sont donc souvent très importants. Les niveaux de prix sont variables en fonction des contextes agronomiques et des niveaux de transformation des vinasses concentrées de levurerie. Dans ce domaine des engrais, les prix restent fortement corrélés à aux produits de référence riches en azote et potasse. L’ensemble de la production est vendue. Les protéines de ces vinasses sont très intéressantes et disponibles. Les vinasses de levurerie, comme celles de sucrerie, doivent être appliquées avec du matériel spécifique, ce qui passe donc par des entreprises de travaux agricoles. Elles répondent également à la même norme de fertilisant. Un ordre idée de la quantité épandu est de 3 tonnes/ha (soit 10 fois moins qu’un épandage de lisier par exemple). La quantité est ajustée en fonction du minéral le plus important, la potasse. Les vinasses de sucrerie et de levurerie sont en concurrence frontale. Les cultures visées sont principalement celles qui sont donc gourmandes en potassium : la betterave et les têtes d’assolement comme la pomme de terre, le colza, ou le maïs en Alsace. Pour la betterave, il y a une certaine logique de retour à la terre des fertilisants qui en sont issus (mélasses et SBP de sucrerie de betterave comme substrats de fermentation). Dans la pratique, le rayon moyen pour l’épandage est de 100 km (200 km au maximum et bien sûr avec une recherche du coût de transport le plus faible possible). Contrairement aux sucriers, l’activité est par contre continue dans l’année. La demande d’épandage étant plus saisonnière, les capacités de stockage doivent là aussi être importantes. Le produit concentré suffisamment ne montre pas de dégradation au stockage sur de très longues durées et n’a pas tendance à décanter (boues de fond de bac) ou à cristalliser. L’origine de la matière première a une importance, les mélasses de canne (40 % de non sucre) conduisent par exemple à des viscosités différentes des vinasses, par rapport à des SBP (5% de non sucre). Les mélasses génèrent de ce fait également bien plus de vinasses proportionnellement. Le stockage des vinasses de sucrerie semble un peu plus délicat que celui des vinasses de levurerie, avec des possibilités d’hétérogénéité ou de cristallisation. Les variations de matière première betterave et récemment l’extraction de bétaïne des vinasses peuvent impacter les conditions de stockage des vinasses. Par ailleurs, l’extraction de bétaïne s’accompagne de celle d’acides aminés, qui pourraient rendre le produit moins attractif dans certaines applications. En France, pour pouvoir utiliser un produit comme amendement, il existe 3 voies, dont la normalisation et l’homologation. La vinasse de betteraves est des produits normalisés selon la norme NF U 42-001. Du fait de cette normalisation, on voit mal comment ces produits pourraient être qualifiés de déchets. Ce produit étant considéré comme à faible risque, il y a peu de contraintes analytiques (métaux lourds et quelques résidus). C’est un engrais naturel composé des éléments extraits du sol par la betterave. La teneur en azote des vinasses est de l’ordre de 1,5 à 2,5 %, soit 25 u/t, soit par exemple à 2 t/ha, soit 50 unités d’azote/ha, ce qui reste acceptable si un engrais vert est ensuite utilisé. Une teneur légèrement inférieure en azote (extraction) pourrait également alléger cette contrainte. Les acheteurs de vinasse recherchent dans ce produit soit la potasse, élément le plus important majoritairement sous forme sulfate, soit la matière organique (fumure). S’ils n’ont pas les quantités suffisantes de vinasse, ils font appel à des composts organiques solides. Les produits concurrents, que l’on peut aussi considérer comme des produits complémentaires, sont donc les engrais organiques sous forme de composts solides (type terreau). Les autres intérêts agronomiques172 incluent l’azote organique simple, facilement minéralisable (50 % à 80 % sont disponibles dès la première année, selon la date d’apport, il accélère la décomposition des pailles,

172 Source UNGDA.

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active la vie microbienne des sols, et est particulièrement intéressant en sol calcaire). Le sodium est un autre atout, c’est un fertilisant de substitution du K2O et il améliore la résistance à la sécheresse. Le soufre compenses des pertes, les cultures régionales sont exigeantes en soufre. Les oligo-éléments comme le bore, le zinc, le cuivre et le fer ont aussi un intérêt. La vinasse ne contient ni métaux lourds, ni agents pathogènes. Le concentrât d’origine vinicole peut être (co-)composté ou bien être classé comme amendement répondant à la norme NFU 42-001173. Les vinasses (1 000 t de vinasse concentrée vinicoles) sont utilisées en industrie de la fertilisation. Il existe aussi d’autres structures qui collectent, transforment et vendent ce genre de coproduits, à l’image de Distrijem (Brionne, 27). Dans ce cas, les produits collectés peuvent être des coproduits alimentaires ou de distillerie, organiques ou minéraux, mais aussi des digestats de station d’épuration et les débouchés peuvent être divers, souvent après reformulation et/ou transformation et viser des marchés diversifiés tels l’alimentation animale, la valorisation agricole mais aussi des secteurs variés comme la papeterie ou l’industrie de la fabrication des panneaux de particules. Pour les vinasses, la société traite plusieurs dizaines de milliers de tonnes. Certains de ces projets font d’ailleurs l’objet de projets de recherche et développement, en s’appuyant sur une structure jumelle, Biojem, qui gère des projets faisant intervenir des biotechnologies. Pour les panneaux de particules, la société à partir de vinasses a développé un produit qui peut venir substituer partiellement les colles urée-formol à raison de 5 à 10 %, ce qui pourrait représenter un marché de l’ordre de 40 000- 50 000 t en France (marché de cette colle de l’ordre de 4 à 5 Mt). Cette application est commerciale. Le produit est foncé mais ceci ne constitue pas un obstacle majeur dans la mesure où les panneaux sont souvent stratifiés. L’odeur caractéristique des vinasses n’est pas perçue négativement en soi (mais peut poser des questions initialement lors du changement de produit sur site de fabrication même si les colles urée-formol, mélamine-formol ou phénol-formol ont aussi une odeur caractéristique, mais différente, et si l’odeur peut le cas échéant être masquée). Un autre projet de Distrijem, concerne un procédé de traitement biologique. Les produits organiques traités peuvent être variés et possiblement en mélange, le procédé étant présenté comme très robuste : produits cellulosiques ou non, déchets de l’agro-alimentaire d’origine végétale ou animale, boues de station d’épuration, digestats de méthanisation en mélange… Le point de départ pourrait être comparé à de la méthanisation mais le procédé arrête les transformations aérobies au stade des acides gras. Des acides aminés sont aussi produits. La cellulose mais aussi la lignine sont dégradés. Le procédé utilise pour cela un cocktail très complexe de bactéries issu du rumen des ruminants (plus de 3 000 espèces bactériennes impliquées), à une température voisine de 37-40 °C. Les débouchés pourraient concerner l’alimentation animale mais aussi la pharmacie et la cosmétique (avec des interrogations quant au statut des produits qui pourraient être issus de coproduits ou de déchets…). Le procédé peut être orienté vers une plus grande production de lipides. Dans le cas des digestats de méthanisation, le volume résiduel pourrait être divisé par quatre et le produit final est stabilisé. Le projet a fait l’objet d’un pilote à 50 l et la société travaille sur l’ingénierie d’un pilote de 1 000 l. A terme, ce type de procédé serait aussi valable pour des petites unités pouvant traiter de l’ordre de 300 l/ jour de produits. A noter que le procédé nécessite la collecte de contenus de rumen, sous-produits animaux pour lequel il n’existe pas a priori de valorisation spécifique Pour l’ensemble du secteur alcool/éthanol, les condensats (environ 800 000 t) sont épandus ou recyclés dans le procédé, ou traités en station d’épuration. Les condensats ne sont pas méthanisés (charge organique insuffisante) et sont généralement utilisés comme eaux de procédé, seuls ou en mélange, ou épandus. Les effluents sont souvent traités en station d’épuration, avec épandage des boues résiduaires, ou en fertirrigation dans certains cas (deux sites de Tereos concernés par exemple). Plus en amont, au niveau de la sucrerie, d’autres effluents sont aussi générés. L’industrie sucrière a pour spécificité d’être une industrie saisonnière fortement excédentaire en eau. La betterave est très riche en eau (environ 73 à 77 %)174 et malgré une optimisation des recyclages de flux d’eau dans les procédés et une partie évaporation d’eau (liée à la concentration des sirops et au séchage du sucre), l’industrie sucrière

173 Norme NF U 42-001-2; classe II Engrais organique NPK, NP, NK: N°8b: Vinasse viticole (1% N; 4,5% K2O), Azote total : 1,3 %, Azote NH4 : 0,23 %, Azote organique : 1,07 %, rapport C/N = 10, Phosphore : 1,08 % Potassium : 5,98 %, Magnésium : 0,28 %. 174 Source : www.sucre-info.com consulté le 02/02/2015.

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génère des quantités importantes d’effluents avec une charge organique et minérale non négligeable mais très diluée. Ces flux polluants générés sont très élevés, mais également facilement biodégradables175. Si on considère que 37 Mt de betteraves (équivalent 16°) sont traitées et que la teneur en eau de ces betteraves est de 75 %, on peut estimer que 28 Mt d’eau sont introduites en sucrerie. Même si une partie de cette eau est évaporée (masse cuites pour cristallisation, évaporation des sirops,…), on imagine bien que les quantités d’eau à traiter sont considérables. La vinasse durant les 15 dernières années et plus était quasi-uniquement utilisée en tant qu’amendement, par épandage des vinasses concentrées (visqueuses), et avec un niveau de valorisation économique faible. Par contre si de nouvelles applications significatives en volumes voyaient le jour dans d’autres domaines, les conséquences pour les sols pourraient être très négatives ou devraient être compensées par l’apport d’autres matières organiques. Une autre alternative serait bien sûr l’apport d’engrais dits chimiques mais leur bilan environnemental est négatif et techniquement ils ne sont pas équivalents pour ce qui est du taux de matière organique des sols. Cette prise de conscience de l’importance des matières organiques est assez récente. Les fertilisants composés ont en effet eu leur heure de gloire. Il faudrait aussi parler des oligo-éléments. Les coproduits peuvent apporter à la fois de la matière organique et des minéraux. Un retour au sol des coproduits est de ce point de vue particulièrement justifié dans un cas comme les vinasses. La tendance actuelle serait plutôt vers une utilisation des coproduits avec des complémentations par des engrais dits chimiques. Les procédés industriels s’améliorant, il faut noter en tendance un relatif appauvrissement des coproduits. Ces questions de concurrence entre filières sont importantes. On peut par exemple citer l’exemple des projets de chaufferie au bois qui ont entrainé une augmentation des prix et même une raréfaction des produits à base de bois qui étaient auparavant utilisés en partie par les fabricants de panneaux de particules. Avec des conséquences lourdes puisque ces sociétés ont perdu en compétitivité et sont maintenant dans une situation difficile, et que les panneaux sont maintenant fabriqués avec des produits de recyclage, souvent de qualité moins adaptée, qui doit être compensée au niveau des quantités de colles ou conduit à de moindres propriétés mécaniques des panneaux. Connaissant l’impact du prix de la colle dans un panneau de particules, cette tendance, s’ajoutant à des prix de matières premières plus coûteuses contribuent à rendre la fabrication moins rentable. Tout comme la concurrence alimentaire/ non-alimentaire a été discutée à propos des biocarburants dans certains contextes, on pourrait dans ce cas parler de concurrence matière/ énergie. D’une manière générale, dans des systèmes où l’on déplace des équilibres entre des valorisations, Dans certains cas, il peut être fait appel à la méthanisation (dépend de la dilution et de la charge organique et de la composition, notamment du ratio carbone/ azote, du pouvoir méthanogène). L’investissement dans l’équipement de méthanisation est considéré comme « conséquent »176. Il existe des contraintes réglementaires fortes sur l’épandage (directive nitrate en particulier qui impose de fait une limite pour leur utilisation à l’hectare mais aussi un décalage dans le temps entre production et consommation des vinasses qui nécessite des stockages importants), qui, couplées à la viscosité des vinasses, implique une logistique lourde. Ce débouché agronomique, majoritaire, même si le produit est normalisé et très bien établi, reste lourd en termes de logistique et grève la rentabilité du débouché. L’augmentation des surfaces qui devront être concernées, suite à la disparition des quotas sucriers en 2017, devrait encore alourdir le système. D’où l’intérêt pour d’autres valorisations ou même pour des procédés qui permettraient de réduire cette teneur en azote. Alimentation animale Les vinasses sont utilisées à faible dose (typiquement 3 à 5 %) en tant qu’aide à la granulation (effet anti-poussière et liant), agent d’appétence (lié en partie à la teneur en sodium) et pour leur valeur nutritionnelle (teneur en azote). Bien que les dosages soient faibles, les quantités en jeu peuvent être importantes. Les vinasses utilisées sont en partie « dépotassifiées » et sont utilisées surtout chez le ruminant. La vinasse peut être intégrée granulés ou faire partie de la ration. Comme les pulpes, les vinasses sont dans ce secteur, soit orientées vers des fabricants d’aliment du bétail, soit utilisées directement en élevage.

175 Source : http://www.eau-seine-normandie.fr/ , Bilans eau, rejets polluants et techniques d’épuration des sucreries. 176 Source : Entretien avec un industriel du secteur sucrier.

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Environ 210 000 t des vinasses (betterave + dérivés vinicoles), soit 13 %, seraient utilisées en alimentation animale, en direct ou en formulation. D’après le Comité National des Coproduits, les quantités disponibles de vinasse de mélasse destinées à l'alimentation animale seraient mêmes d'environ 310 000 tonnes par an.

Les drêches sont des produits très appréciés en alimentation animale. On y ajoute souvent les vinasses de blé/maïs concentrées. Le mélange des drêches de blé avec les vinasses concentrées de blé seraient utilisées en alimentation animale à 100%. Les vinasses concentrées de mélasse seraient utilisées à hauteur de 4 740 t en alimentation animale (animaux de rente). Les principales caractéristiques de la vinasse de mélasse de betterave en alimentation des ruminants (vaches laitières, taurillons et génisses) sont les suivantes177 : elle présente un grand Intérêt zootechnique avec de bonnes caractéristiques de composition chimique et de qualité des constituants de la matière organique, un apport d’énergie. La vinasse de mélasse offre aussi la possibilité de valoriser des fourrages pauvres (paille, foin de qualité médiocre,…). Un des atouts de la vinasse est l’appétence qu’elle apporte aux aliments, ainsi qu’une teneur en azote plutôt élevée. Cette teneur tend d’ailleurs à diminuer, comme conséquence des pratiques culturales dans les régions comme la Beauce ou la Picardie. Par contre la vinasse de mélasse semble appétente mais moins que la mélasse et il faut prendre des précautions d'emploi par rapport à sa teneur en potassium, sodium et soufre178. La composition chimique de la vinasse de mélasse présente des variations dans la teneur des principaux composants et il existe donc des différences importantes de digestibilité de la matière sèche entre vinasse puisqu'elle varie entre 65,2 et 81. La digestibilité de la matière organique varie de 70,6 à 84 et la digestibilité de l'énergie de 65,4 à 78,6, celle des matières azotées varie de 74 à 88,5. En tant que liquide, son incorporation est par ailleurs forcément limitée. La bétaïne n’est pas a priori un composé particulièrement recherché en alimentation, des vinasses sans bétaïne ne sont donc pas un obstacle à sa valorisation en alimentation animale, si la composition n’est pas modifiée par ailleurs. Si elle est stockée dans de bonne conditions, il n'y pas de modification de composition, d'aspect ou de qualité de la vinasse pendant son stockage. Dans le cas contraire, on peut observer des dégradations au stockage, décantation de minéraux cristallisés par exemple. L'approvisionnement peut se faire à la ferme par camion-citerne (sans réchauffage) de 10 à 22 m3 en vrac. Le stockage est donc à prévoir en conséquence. Et la cuve doit être conçue avec un point de dépotage ou vidange au plus bas de la citerne. La vinasse est disponible toute l'année, le prix dépend des quantités livrées, de la qualité de la vinasse et de la région. Un des inconvénients de la vinasse en alimentation animale est la présence de taux élevés de potassium (recherché en agronomie par ailleurs), est ici un frein à l’incorporation des vinasses en quantité importante dans les rations alimentaires. Par contre, les vinasses « dépotassifiées », qui faisaient l’objet d’un traitement assez complexe, sont plutôt en perte de vitesse. Si elles ont un meilleur profil nutritionnel, elles sont par contre bien plus couteuses à produire. Compte tenu de leur taux d’incorporation relativement faible dans les rations alimentaires, et des valeurs ajoutées et volumes traités, la tendance est à un retour vers les vinasses plus classiques en agro-alimentaire. Elles sont simplement décantées et clarifiées, ce qui permet déjà d’éliminer une partie du potassium (résiduel à 4-5 % de potasse). La vinasse est souvent incorporée en assez faible proportion dans des produits complémentaires. La vinasse souffre par ailleurs d’un nom qui suggère l’idée d’un produit raté, déclassé et mal défini. En alimentation animale, des complexes mélasses/vinasses ont été commercialisés, jouant sur la bonne complémentarité entre les mélasses à plus de 50 % de sucres et les vinasses assez riches en protéines et en oligoéléments. Chimie Seul le gaz carbonique est utilisé pour des applications dans les gaz industriels (soudure, inertage, réactifs dans quelques réactions chimiques…).

177 Comité National des Coproduits, informations sur vinasse de mélasse de betterave. 178 La teneur par kilo de matière sèche de la ration ne devrait pas excéder 20-30 g de potassium, 3 g de soufre et 1,5-2 g de sodium.

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Valorisation énergétique La vinasse peut également être valorisée :

o Par combustion du biogaz issu de la méthanisation , également utilisée dans une des 9 sucreries françaises de Tereos, à Artenay (et à Dobrovice en République Tchèque). Elle utilise des vinasses diluées et génère un digestat en plus bien sûr du biogaz combustible. Il s’agit d’une première mondiale. Le gaz généré est brûlé à l’aide de brûleurs spécifiques en mélange avec du gaz naturel. Le digestat de méthanisation doit subir un stripping de l’azote ammoniacal effectué après méthanisation, ce qui est à prendre en compte dans la rentabilité des opérations. L’objectif est de traiter les 300 000 t de vinasses. Ce digestat est par contre 3 fois plus riche en potasse que les vinasses habituelles. La validation économique reste à approfondir. L’investissement est de 6,7 M €179 mais permettra d’économiser 50 % des besoins en gaz naturel du site, l’économie dépendant du prix de l’énergie. Pour l’instant, les digestats de méthanisation de ces produits ne sont pas encore normalisés. L’épandage doit donc avoir lieu autour de l’usine, avec des plans d’épandage.

o Plus anciennement des opérations de méthanisation de vinasses ont eu lieu en Guadeloupe,

et dans la région de Cognac sur des vinasses un peu différentes (unité Revico de 1980 toujours en fonctionnement dans ce dernier cas).

o Par la pyro-gazéification à haute température des v inasses (a fait l’objet d’un programme cofinancé par le F.U.I. : Pyrobio Energy+ basé sur la technologie de Finaxo et avec Tereos et le CVG pour partenaires). Dans l’idéal elle produirait, sans passer par une phase de séchage, un gaz combustible riche en gaz de synthèse (monoxyde de carbone et hydrogène) et en d’autres molécules gazeuses, ainsi qu’un résidu riche en minéraux. Cette technologie, bien que prometteuse et pouvant conduire à la chimie via l’hydrogène et le méthane (et même rejoindre la voie fermentaire), est en phase de développement et est difficile à mettre en œuvre.

Des essais avaient aussi été réalisés en combustion (après concentration à 50%). Cette application posait des problèmes techniques (vitrification de la partie minérale). Des débouchés sont évoqués par la profession dans le domaine des liants pour matériaux de construction, des matériaux biosourcés.

Alimentation humaine / Pharmacie L’extraction de bétaïne contenue dans la vinasse de betterave (un médicament pour la digestion sous la forme de citrate de bétaïne, avec d’autres usages pharmaceutiques et comme complément alimentaire), est une réalité industrielle dans une usine de Tereos (première mondiale mais il existe des unités l’extrayant de la mélasse).Par contre cette extraction, où le produit extrait ne représente qu’une partie très faible (quelques pourcents tout au plus et souvent moins de 1 %), ne résout qu’en partie le problème de la valorisation globale du coproduit : le reste du coproduit doit être traité comme auparavant ; ou pire, compte tenu des opérations d’extraction, des traitements complémentaires (du type séchage ou concentration énergivores) sont nécessaires, ou même une valorisation différente doit être envisagée. Se pose le problème plus vaste des de la valorisation d’ensemble du coproduit. Une autre question posée par ce type d’approche, est le risque de déstabiliser un marché étroit, si l’apport est massif. De ce fait, cette première n’est sans doute pas généralisable, de par la taille du marché. Autres De faibles quantités de vinasses de levurerie sont utilisées en co-compostage, comme activateurs.

179 D’après un professionnel du traitement, l’investissement dans un méthaniseur pèse 1 à 1,5 M€, pour des projets à plus de 8 à 10 000 t.

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Conclusions et enseignements : En résumé, l’utilisation majoritaire est en agronomie (la vinasse de betterave est un produit normalisé) et pour le reste essentiellement en alimentation animale. A côté de l’extraction de bétaïne, ou de la méthanisation dont les développements sont incertains, et peut-être de la gazéification à plus long terme, le développement d’autres débouchés pourraient donc présenter un intérêt. Tendances et perspectives de développement Tendances et évolutions à venir La filière est tributaire des aléas climatiques, qui ont un impact en particulier via la distillation des vins, et le développement de projets récents autour du bioéthanol (Tereos sur base betterave et blé, Abengoa Bioenergy sur base maïs par exemple), qui ont entrainé une augmentation mécanique de l’offre de coproduits. La rentabilité de la filière blé-éthanol fait par ailleurs débat. Si les projets d’éthanol de seconde génération (utilisation de la lignocellulose pour produire des substrats de fermentation, par exemple du type projet Futurol, avec utilisation des plantes entières et une utilisation des sucres en C5) aboutissent dans des conditions économiques assurant leur viabilité, le paysage pourrait être encore plus bouleversé, les prix des coproduits baisseraient, ouvrant ainsi de nouvelles voies de valorisation. Le changement toucherait aussi bien sûr les autres industries de la fermentation qui sont bridées par le coût de la matière première carbonée fermentescible. Concernant les autres vinasses, de levurerie par exemple, les industries de fermentation ont dû faire face à un défi important dans leur approvisionnement et passer de la mélasse à des sirops. La conséquence, compte tenu du taux de non-sucre bien plus faible de ces derniers, est une coproduction inférieure de vinasses à quantité de levure égale produite. Par contre (en raisonnant au niveau mondial), la production de levure augmente, et donc celle de vinasses. On notera que pour des sociétés internationales comme Lesaffre situées dans le nord de la France, le territoire le plus pertinent à considérer inclurait le Benelux et l’Allemagne. Le marché de production de vinasse de betterave est tributaire de la production de cette culture, qui dépend des surfaces emblavées et du rendement agronomique de l’année, selon la météorologie. A plus long terme, les volumes de vinasse de betterave devraient augmenter progressivement avec la fin des quotas sucriers, ce qui pourrait obliger à augmenter les capacités de stockage et compliquer le débouché épandage. A l’heure actuelle, la vinasse est recherchée. Jusqu’en 2015, la demande des agriculteurs a été supérieure à l’offre de vinasses. Tout dépendra donc de la capacité des marchés agronomiques à absorber cet excédent probable de vinasses. La France reste une excellente terre pour produire de la betterave (météorologie humide, pratiques culturales…) et devrait tirer son épingle du jeu suite à la fin des quotas. Il est donc probable que les quantités de SBP /mélasses augmente, ce qui devrait induire un renforcement de la production des vinasses qui en dériveront. Evaluation du volume disponible et supplémentaire pour valorisation

L’ensemble des coproduits semble bien exploité. Les effluents sont souvent envoyés en station d’épuration. Ils pourraient potentiellement contenir des molécules avec une certaine valeur ajoutée. Mais l’expérience montre que les taux de dilution importants ne permettent généralement pas des extractions dans des conditions économiquement acceptables.

Les vinasses, en particulier de betterave restent des produits pour lesquels une meilleure valorisation est recherchée. Nous ne pouvons pas ici à proprement parler d’un volume supplémentaire disponible à l’heure actuelle, mais, avec l’augmentation des productions à venir et d’une certaine saturation du système actuel, de nouvelles vinasses pourraient être disponibles pour de nouvelles applications.

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Perspectives de développement (voir également la partie « Caractérisation des différentes voies de valorisations ») : A côté des débouchés traditionnels, on a pu constater l’apparition de nouveaux procédés ou pistes de développement, comme l’extraction de molécules à valeur ajoutée (pour l’instant bétaïne mais d’autres composés pourraient être considérés), la méthanisation, l’utilisation en tant que liant ou bien à plus long terme, la gazéification pour produire un gaz à vocation énergétique, voire de matière première carbonée pour la chimie, couplée à une valorisation du résidu minéral en agronomie. Une autre solution thermochimique consisterait à produire un carburant liquide mais ces technologies méritent confirmation et devraient solutionner la question de la présence de taux de minéraux et d’autres éléments chimiques dans les vinasses. Des solutions pour réduire la teneur en azote des vinasses par des moyens économiquement réalistes permettraient d’augmenter les possibilités d’utilisation de la vinasse en épandage, et d’offrir également une valorisation des protéines en alimentaire. Le fractionnement de la lignocellulose (cette dernière étant économique) et l’hydrolyse de la cellulose, s’ils débouchent d’un point de vue technique et dans de bonnes conditions de rentabilité, pourrait offrir un nouveau souffle aux industries de la fermentation, et donc augmenter la production de son coproduit, la vinasse.

Conclusions et enseignements : Le débouché des vinasses en épandage est solide et bénéficie d’une grande traçabilité, n’est probablement pas optimal. En effet, la valorisation économique en tant qu’amendement est très faible, voire négative compte-tenu de la lourde logistique d’épandage. Dans l’immédiat et pour ce qui concerne l’éthanol, Il s’agit d’une industrie plutôt à maturité en France, le moteur de la croissance dans les biocarburants s’étant ralenti pour l’instant. Peut-être en espérant l’arrivée des carburants 2G. Néanmoins compte tenu des objectifs de réduction de gaz à effet de serre impliquent à moyen terme, les biocarburants seront une nécessité. Par contre, l’augmentation organique du secteur de la sucrerie, lié à la fin des quotas sucriers en 2017 et au progrès technique, pourrait augmenter la quantité de SBP2 disponible et de leur débouché naturel, la fermentation, ce qui conduirait à une augmentation des vinasses disponibles. Avec à la clé des valorisations peut-être proches de la saturation à conforter ou de nouvelles à inventer. L’accès à des matières premières plus économiques pourrait le cas échéant augmenter ces productions fermentaires. Les volumes en jeu sont importants et l’approvisionnement en sucres fermentescible de composition suffisamment constante et économique crucial. De ce fait, il existe un potentiel de croissance à partir de la lignocellulose de certains coproduits qui pourrait servir de matière première fermentescible à terme, lorsque les technologies seront disponibles et si elles démontrent leur rentabilité. On notera aussi que le sucrier a une grande latitude de réglage de ses installations, il peut soit privilégier le saccharose extrait sous forme cristallisée, soit produire davantage de substrat de fermentation (SBP), en fonction des demandes du marché. Les quantités de SBP et donc ultérieurement de vinasses peuvent donc varier fortement en fonction de l’intérêt respectif des deux marchés.

IX. Un coproduit de l’estérification des huiles : l e glycérol

Contexte et chiffres clés - Définition du gisement

Le glycérol est le coproduit de la transestérification d'huiles ou corps gras (huiles végétales comme le colza ou de corps gras animaux issus des filières viande ou restauration) par le méthanol (ou l’éthanol) pour faire

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des esters, principalement utilisés comme carburants. Le glycérol est à 80-85 %180. D'autres procédés comme la fabrication d'acides gras (splitting, savons) ou d'alcools gras à partir corps gras naturels, végétaux ou animaux, génèrent aussi du glycérol de saponification à 99% (marchés de la pharmacie et des cosmétiques).

Après la trituration, l’étape de raffinage a pour objectif d’améliorer la qualité organoleptique de l’huile et sa stabilité. Pour les huiles alimentaires, le raffinage doit être mené avec une grande maitrise pour éviter la formation de composés indésirables, ou la dégradation de constituants d’intérêt nutritionnel (on parle alors d’huile raffinée)181. Par contre l’huile réservée au biodiesel n’a besoin que d’un raffinage partiel sans désodorisation (on parle alors d’huile semi-raffinée). L’estérification des huiles dans le but d’obtenir un carburant automobile consiste à transformer une huile (végétale ou animale) en la faisant réagir avec un alcool (méthylique ou éthylique) afin d’obtenir un ester appelé biodiesel (ou Diester, nom de marque). Ceux-ci ne sont actuellement pas utilisés purs, mais en mélange avec des carburants classiques (gas-oil). Les esters (méthyliques) d’huile végétale sont nommés EHV (ou EMHV), ceux issus de graisses animales EHA (ou EMHA).

Les procédés de raffinage et l’estérification182,183génèrent des fonds de bacs, des pâtes de neutralisation, des gommes, des eaux de lavage des huiles après neutralisation, des terres de décoloration usagées (TDU). Pour certaines huiles contenant des cires (tournesol, maïs, etc.), un décirage est nécessaire, d’où la génération de terres de wintérisation usagées (TWU). Les condensats de désodorisation ou distillats d’acide gras sont aussi produits lors du raffinage des huiles. Classiquement, les usines de raffinage d’huile disposent généralement d’une station d’épuration pour le traitement des effluents aqueux du site. Un traitement physico-chimique, de type aéroflottateur, est généralement installé en amont de cette station. Deux coproduits sont alors générés : les graisses d’aéroflottation et les boues de station d’épuration. L’estérification des huiles (transestérification de triesters, les triglycérides par un monoalcool, généralement le méthanol) coproduit le glycérol (ou glycérine). Le produit est l’ester méthylique d’huile avec comme principal débouché l’incorporation au gas-oil. Le glycérol sera plus ou moins pur suivant le procédé employé. Sa pureté initiale avant purification est généralement comprise entre 80 et 85 %, l’impureté principale étant le méthanol en excès dans la réaction d’estérification, et des traces de catalyseur selon les procédés. Le glycérol purifié se présente sous la forme d’un liquide relativement visqueux, incolore, inodore, non-toxique et très peu inflammable. N’étant pas totalement miscible à l’ester, le glycérol est séparé du flux des EHV ou EHA par décantation, centrifuge ou non. Il doit ensuite être purifié en plusieurs étapes: déshuilage par acidification, puis dessalage par précipitation (si le couple acide-base est correctement choisi, le précipité peut être valorisé en amendement), puis évaporation pour éliminer les alcools et les recycler dans le procédé (après séchage). Il faut également noter l’existence d’autres activités de l’oléochimie, qui génèrent aussi du glycérol comme coproduit : la fabrication d’acides gras ou d’alcools gras par exemple. Des eaux d’estérification peuvent également être rejetées (si la production d’ester est réalisée en catalyse hétérogène). Ces eaux sont riches en méthanol. - Acteurs et chaîne de valeur associée :

Pour l’activité de raffinage des huiles, le nombre d’intervenants est restreint, comme dans le domaine de la trituration, avec essentiellement les sociétés Cargill et Saipol. Ce dernier est là-aussi l’acteur principal puisqu’il produit à la fois des huiles raffinées pour l’alimentaire (huiles végétales et condiments, Lesieur) et des huiles semi-raffinées à destination de la fabrication d’esters pour le biodiesel. Enfin, le conditionnement

180 Les impuretés possibles : eau (jusqu’à 26,8 %) méthanol, sels dont chlorure de potassium (jusqu’à 23 % de potassium) 181 « De la production à la consommation. Statistiques des oléagineux et protéagineux : France, Europe, Monde», Edition 2012-2013. 182 « Huiles végétales : Guide d’aide à l’application des meilleures technologies disponibles (MTD) », RMT ECOVAL, Septembre 2010. 183 Données de l’ITERG issues du rapport VAMACOPIA, 2012.

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et la commercialisation sont principalement assurés par les Sociétés Lesieur et Cargill, ainsi que les huileries de Lapalisse de façon plus marginale184.

Pour l’étape de d’estérification , les acteurs centraux sont l’industrie chimique et la filiale Diester Industries (filiale d’Avril, leader français dans le domaine des oléagineux). Plus de la moitié des sites de production français, basés sur des huiles végétales, sont détenus par Diester Industrie. Ces acteurs sont approvisionnés en huile végétale par l’industrie oléagineuse, ou en graisse animale par le réseau de collecte associé, et en méthanol issu de la pétrochimie (ou en éthanol, généralement du bioéthanol fermentaire produit en particulier par les sucreries-distilleries). La distribution du produit est ensuite assurée par le réseau pétrolier classique. En France, la très grande majorité du biodiesel est issue des ressources végétales, mais celui d’origine animale est en expansion (mais avec un taux d’incorporation fixé à un faible niveau). Le secteur de la collecte des huiles usagées peut faire partie intégrante des fournisseurs de matières premières. Les esters méthyliques d’huiles végétales (ou d’autre corps gras) sont actuellement principalement additionnés au gas-oil, à hauteur de 7%, mais il existe d’autres débouchés techniques (comme solvants, pour la lubrification, etc…). La glycérine brute (avec peu d’eau) produite par exemple chez INEOS à Baleycourt (Verdun) ou à Chalandray en Haute-Vienne (société C.O.C., Centre Ouest Céréales) est vendue à des sociétés qui la raffinent et la commercialisent. Les glycérines peuvent être issues de 3 (désormais 2) procédés d’estérification différents, certains avec catalyseurs et soude mais pas d’eau. Les secteurs utilisateurs des corps gras sous toutes leurs formes sont très diversifiés : il s’agit majoritairement des industries agroalimentaires, mais aussi de façon croissante les industries de la chimie verte. Si les usages cosmétiques des corps gras végétaux sont aujourd’hui assez répandus, le développement induit par la mise au point de produits biosourcés (issus d’une combinaison de synthons végétaux) représente un enjeu considérable. La profession insiste sur le statut équivalent de l’huile et du tourteau par exemple (deux produits ou deux coproduits car produits en même temps). Le terme de déchet est exclu à partir du moment où il y a valorisation. Le terme de sous-produit évoque un produit dont la valeur économique est moindre. - Chiffres clés et volumes générés

En 2013, 1,95 Mt d’huiles raffinées ont été produites dont 1,92 Mt issues du soja, du colza et du tournesol (source : Panorama des IAA 2014).

La production française d’EHV (esters d’huiles végétales) s’est élevée à 2,39 M litres pour l’année 2013, soit un quart de la production européenne185. Entre 2006 et 2010 la quantité de biodiesel a été multipliée par environ 3. Le marché des esters basés sur des huiles d’origine animale est beaucoup plus faible et est estimé à 140 000 t, avec une incorporation faible dans le gas-oil (0,1 % contre 7 % pour les EHV auparavant) 186 . Le volume total utilisé avait tendance à augmenter sous l’impulsion des objectifs d’incorporation croissant dans les carburants. Plus récemment, les objectifs d’utilisation des biocarburants ont été revus à la baisse au niveau européen. La capacité française pourrait reculer suite à la fermeture de 2 sites majeurs de production.

La réaction de transestérification générant 10 % en masse de glycérol, le volume annuel de celui-ci est donc estimé à environ 200 000 t (origine biodiesel uniquement). Les procédés modernes produisent un glycérol à faible teneur en eau. Aujourd’hui l’activité de raffinage est maintenant liée, au niveau des entreprises, à la trituration et est située dans des sites portuaires. Selon le Ministère de l’agriculture, la France compte 14 sites de production d’esters d’huile végétale, sans localisation spécifique marquée. - Réglementation et impacts sur la filière

184 Source : http://www.fncg.fr/ consulté le 05/02/2015. 185 Source : http://www.usda-france.fr/media/Biofuels%20Annual_The%20Hague_EU-27_6-25-2012.pdf consulté le 12/02/2015 186 Source : http://www.lafranceagricole.fr/actualite-agricole/biocarburants-sofiproteol-se-lance-dans-la-production-de-biodiesel-a-base-de-graisses-animales-et-d-huiles-usagees-78758.html consulté le 12/02/2015

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Lorsqu’il est destiné à l’alimentation humaine, le glycérol doit obéir à toutes les nombreuses prescriptions du secteur, notamment la mise en place d’un système d’HACCP, auxquelles s’ajoutent celles liées au statut d’additif alimentaire (E422). Il est autorisé, dans le respect des Bonnes Pratiques Professionnelles et dans de nombreuses applications, en tant qu’agent humectant et raffermissant (il est hygroscopique et diminue l’activité de l’eau). Pour l’alimentation animale, l’Union Européenne étend les prescriptions générales sur l’hygiène et la sécurité alimentaire à tous les niveaux de la chaine, y compris la production primaire, en établissant un système de responsabilités et d’obligations pour les exploitants de ce secteur. Ce système comprend notamment des exigences relatives à l’enregistrement ou à l’agrément des entreprises, et à la production des aliments pour animaux (Règlement (CE) n° 183/2005 du Parlement européen et du Conseil du 12 janvier 2005 établissant des exigences en matière d'hygiène des aliments pour animaux).

La réglementation en ce qui concerne la mise sur le marché des aliments pour animaux et l’utilisation des aliments pour animaux est régie par le décret européen n° 2011-708 du 21 juin 2011, modifiant le Décret n°86-1037 du 15 septembre 1986. Les déclarations obligatoires pour ces matières sont listées au catalogue des matières premières pour aliments des animaux, issu du règlement n° 575/2011 de la Commission européenne, daté du 16 juin 2011. L’industrie de l’estérification de l’huile est très sensible à la réglementation sur les biocarburants . Une très faible variation légale du taux d’incorporation dans le carburant final impacte fortement les volumes de production. Actuellement, les esters d’huiles peuvent être incorporés à hauteur de 7 % dans le carburant classique, sans étiquetage. La proportion peut cependant atteindre 30 % pour les flottes captives de véhicules. Il existe une limitation beaucoup plus faible pour les EMA, fixée à 0,1 %. Le glycérol est régit par la réglementation du secteur dans lequel il est employé, il ne fait pas l’objet de contrôle spécifique en tant que produit chimique. Il est par exemple étiqueté E422 dans l’industrie agro-alimentaire. S’il est peu purifié et contient encore une proportion importante d’alcool, a fortiori de méthanol, il peut par contre être classé comme produit toxique. Conclusions et enseignements : La filière oléagineux et corps gras représente une industrie concentrée avec très peu d’acteurs qui traitent de gros volumes. Si le glycérol est connu depuis longtemps, sa production a explosé dans les 20 dernières années. La filière des EHV est assez récente en France (et celle des EHA très récente) mais bien structurée car elle est en grande partie adossée à celle de la trituration et du raffinage des oléagineux.

La commercialisation du glycérol participe clairement à l’économie du biodiesel. Cependant, s’agissant d’un marché volatil, fluctuant entre marché saturé et forte demande, le prix du glycérol varie énormément. Malgré la maturité de la filière, celle-ci reste sensible à la réglementation et aux décisions politiques qui peuvent l’impacter, ainsi qu’aux tendances plus globales des marchés eux-mêmes tributaires de tendances, notamment liées à des considérations environnementales. Le cas des esters méthyliques carburant est un bon exemple : leur incorporation dans le gas-oil a été encouragée y compris via des incitations fiscales, sans parler du soutien à la filière des motorisations diesel en France. La tendance est maintenant à un coup d’arrêt, lié en partie à des considérations financières et à une perception qui a évolué au niveau de l’intérêt des agrocarburants, sans doute aussi suite à des débats sur les conclusions des analyses de cycle de vie des produits en fonction des règles d’affectation entre les produits et sur la concurrence entre les utilisations alimentaires et non-alimentaires des productions végétales. La notion de carburant d’origine renouvelable est maintenant obscurcie par des considérations sur le caractère plus dangereux du diesel, par l’émission de particules fines. Sachant que le parc automobile français est constitué aux ¾ de véhicules diesel, un retour probable vers les moteurs à essence pourrait avoir un impact considérable sur ce débouché esters d’huiles et donc sur le glycérol qui en est le coproduit. La glycérine brute bénéficie du double comptage dans le cadre de son utilisation comme biocarburant.

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Caractérisation des différentes voies de valorisati ons Les applications du glycérol sont très diversifiées. Il convient de séparer les applications directes, des indirectes (nécessitant une modification du glycérol). En application directe , il est utilisé majoritairement pour ses propriétés hydratantes, émollientes ou lubrifiantes. Peuvent être cités les domaines de l’alimentation animale et humaine (il possède un goût sucré), de la cosmétique, de la pharmacie, de la plasturgie (plastifiant), des résines et comme solvant. Les valorisations sont majoritaires en cosmétique, alimentaire et pharmacie en direct mais à des degrés de pureté élevés. En alimentation animale, le glycérol est utilisé principalement comme aide à la granulation (jusqu’à 8 voire 15% d’incorporation). Il possède une certaine valeur énergétique mais il ne peut être utilisé à des doses où cet apport deviendrait important. Le glycérol n’est pas encore très utilisé en alimentation animale187. Cela est en grande partie dû à une demande sur d’autres marchés. Le glycérol contient beaucoup d’énergie apportée rapidement qui peut être très bien valorisée par les ruminants ; et il a des propriétés proches de celles de la mélasse (solubilité, vitesse de dégradation,…). En lactation, le glycérol pur a une valeur nette d’énergie de 9,5 MJ, soit 1,35 UFL/ kg MS, le glycérol d’estérification (80% glycérol+) 1,10 à 1,15 UFL/kg de produit, des valeurs un peu supérieures à celles d la mélasse, c’est-à-dire très bonne. Les résultats sur les performances zootechniques doivent encore être précisés. De plus, il semble que l’apport de ce coproduit dans l’alimentation des vaches laitières pourrait permettre de diminuer les émissions de méthane par les animaux. Des essais ont été faits chez les bovins et les porcs pour en faire un composant majeur de la ration, comme source d’énergie. L’AFSSA en 2007 a émis un avis favorable pour l’utilisation de glycérine en alimentation animale, à condition qu’elle titre « au minimum à 80 % de glycérol et au maximum à 0,5% de méthanol » et dans la mesure où elle n’excède pas 10 % d’un aliment complémentaire standardisé à 88 % de matières sèches ». Seules les catégories de glycérine de moyenne à haute, à moins de 0,5 % en méthanol sont autorisées en alimentation animale. Dans la pratique, pour une ration à 50 % de concentré, 100 g/kg de concentré est la dose maximale recommandée, soit environ 1kg/VL/j. Le glycérol est déjà utilisé pour traiter les cétoses de la 3éme à la 6éme semaine de lactation de la vache. L’addition de 500 g/vache laitière/ j. Dans certaines études il augmente l’ingestion, la production de lait et son taux de protéines. Mais les résultats sont contradictoires et on peut retenir qu’il n’y a pas d’effet net sur ces paramètres. Il améliore par contre la conservation et l’appétence des produits. Les 260 000 tonnes de glycérol potentielles représentent 7 kg/vache/ an. De plus les volailles et les porcs pourraient l’utiliser. Les prix varient par contre énormément de 100 à 800 €/t en 2009 par exemple. Les applications indirectes sont issues de la transformation du glycérol par voie thermique, chimique ou biotechnologique (c’est un substrat de fermentation carboné au même titre que les sucres). En chimie, c'est également une molécule intéressante en synthèse organique (chimie des composés à 3 carbones et polyfonctionalisée). Il est considéré comme une « molécule plateforme » (intermédiaire-clé de la chimie verte) permettant de synthétiser un grand nombre de molécules commerciales, parmi lesquelles peuvent être citées l’acide acrylique, l’acroléine, l’épichlorhydrine, le carbonate de glycérol, le propanediol, le monopropylène glycol, la dihydroxyacétone, ou encore les polyesters de glycérol. Certaines de ces molécules sont déjà produites à l’échelle industrielle par ce biais. Il rentre déjà par ailleurs comme réactif dans la synthèse de molécules telles que des tensioactifs et notamment des émulsifiants (estérifié avec des acides gras et autres acides), le polyglycérol, des additifs alimentaires, etc… Des essais d’incinération ont été faits mais constitue une solution de secours pour un produit noble qui n’en a jamais eu besoin. Le glycérol a néanmoins connu de meilleures valorisations qu’à l’heure actuelle, l’offre ayant augmentée depuis 5 à 10 ans. La méthanisation du glycérol (à 98 %) avait été testée avec succès par l’APESA, dans le cadre d’un projet géré par l’ITERG et impliquant certains de ses adhérents producteurs de glycérine, y compris sur des durées longues (6 à 8 mois) et également à grande échelle (quelques dizaines de tonnes dans le Nord de la France), en co-méthanisation avec la fraction fermentescible des ordures ménagères, des déchets verts, des déchets de fruits et légumes. Il est actuellement utilisé par exemple dans l’unité de la SEVADEC

187 Le Glycérol, Comité national des coproduits, juillet 2010.

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(Syndicat qui gère le CVO – Centre de Valorisation Organique) à Calais. Le glycérol y est utilisé en particulier en période hivernale où il permet de compenser la perte des déchets verts estivaux. Le pouvoir méthanogène est dans la bonne moyenne avec des valeurs de l’ordre de 320 normo-litres de méthane 188 par kilo de matière organique traitée. Les exploitants achètent le produit, compte tenu de son impact positif sur la production de méthane, ce qui est rare dans le secteur. Des prix de l’ordre de 10 à 60 €/t sont évoqués. Le glycérol est utilisé en méthanisation également au moins en Belgique et au Danemark. D’un point de vue technique, d’après certains essais de l’APESA, la proportion totale dans le mélange doit par contre rester faible (de l’ordre de 5 % au maximum), ce qui implique un débouché dans des unités de grande dimension. A trop forte proportion, il est en effet constaté une dérive et l’accumulation d’acide propionique qui inhibe la fermentation. Les applications réelles et potentielles sont très variées. Ceci peut constituer un frein car, même si la croissance rapide du secteur des esters méthyliques d’huiles végétales comme biodiesel avait provoqué momentanément un excès de l’offre, celui-ci s’est désormais résorbé (ne serait-ce que parce que les polyols sont pour certaines applications substituables une variation de prix pouvant se traduire par des déplacements de ces marchés) et les quantités disponibles sont loin d’être inépuisables. Par contre, les filières de sa production sont concentrées et les sociétés possèdent également le savoir-faire en chimie pour de nouvelles valorisations. Conclusions et enseignements : Les applications actuelles du glycérol, historiques et récentes sont très variées, y compris pour ce qui concerne les débouchés directs (après purification) en alimentation humaine, en cosmétique et en pharmacie. En tant que réactif en chimie, il est déjà classiquement utilisé dans certains types de synthèses, comme celle de tensio-actifs. Et les débouchés potentiels sont très nombreux, y compris come substrat de fermentation. Tendances et perspectives de développement Tendances et évolutions à venir Au-delà de la réglementation, ce sont les subventions qui régulent ce marché. De fait, des effets de défiscalisation ont permis à une filière biocarburant sur la base de biodiesel dérivé d’huiles végétale, filière très bien organisée et dynamique de se développer en France et en Europe. Une réorientation récente semble mettre un coup de frein à ces aides et ralentir fortement cette croissance. Le glycérol, qui en est le coproduit fatal, en subit donc les conséquences. Le secteur des esters méthyliques de corps gras d’origine animale et récupéré auprès de la restauration fait lui désormais seul l’objet d’incitations fiscales, qui auraient pu prendre le relais. Mais le taux d’incorporation de 0,1 % contre 7 % pour les EMHV auparavant n’est pas un bon signal donné à la filière des carburants renouvelables. Deux usines basées sur des matières secondaires d’origine animale (industrie et restauration) viennent de démarrer en France. Mais l’avenir des esters méthyliques comme agro-carburant, quelle qu’en soit les origines, dépend d’une décision politique globale prise au niveau français mais surtout européen quant à l’avenir de cette filière biodiesel. Et le vent semble avoir tourné. De son côté, l’oléochimie produit aussi du glycérol par d’autres circuits, avec une croissance du secteur au niveau mondial mais une faible croissance en France. L’incertitude demeure donc et il est prudent de miser sur une stagnation des filières de production du glycérol, d’autant plus que deux sites de production pourraient fermer en France, notamment celui de Compiègne, suite à des réductions successives de défiscalisation. Des agréments d’usines vont tomber. Le système de « compte double » pour les biocarburants issus de biodéchets de restauration et résidus de produits animaux a également contribué à stabiliser la filière. La profession estime que 400 000 t ont ainsi été amputées de leur production. De plus la concurrence internationale augmente. Total projette de reconvertir la raffinerie de La Mède (Bouches-du-Rhône) en site majeur de production de biocarburants en France (500 000 tonnes de biocarburants par an), probablement à partir d’huile de palme importée. La technologie utilisée serait de l’hydrogénation et donc sans glycérine produite. La FOP affirme que la production nationale de colza pourrait être amputée de 27 %, soit 400 000 hectares.

188 Litre (dans les conditions dites normales de pression et de température) de méthane produit. Pour avoir la quantité de biogaz produit, il faut multiplier cette valeur par environ deux, le biogaz étant constitué à 50 % de méthane et à 50 % de gaz carbonique.

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Evaluation du volume disponible et supplémentaire pour valorisation Comme dans beaucoup de filières agro-alimentaires, il n’y a pas à proprement parler de volume disponible supplémentaire à valoriser. De nouveau débouchés ne peuvent être créés qu’en déplaçant des utilisations existantes ou en pariant sur la croissance organique du secteur. Cette dernière est assez incertaine car dépend d’options politiques qui sont par essence variables. Perspectives de développement

Le glycérol : la production de ce coproduit est sans doute à une relative maturité après des années de croissance liées en particulier au développement rapide de la production d’esters méthyliques d’huiles végétales, désormais freiné au niveau communautaire. Un relais récent a été pris avec le développement de productions d’esters basées sur des matières secondaires d’origine animale (industrie et restauration). Par contre le taux d’incorporation très faible imposé ne garantit pas une croissance importante du secteur. De nombreuses utilisations de la glycérine sont possibles, la principale étant en utilisation directe, après purification poussée, en alimentation humaine, cosmétique ou pharmacie. Mais c’est également un substrat de fermentation possible ou une molécule-plateforme à trois carbones recherchée. Par contre le volume disponible effectivement pour ces valorisations, à côté des valorisations en direct, dépendra étroitement, outre de la croissance globale possible du marché (par le biais d’incitations fiscales), de leurs niveaux de valorisation respectifs. Conclusions et enseignements sur le glycérol : La production de ce coproduit est sans doute à maturité après des années de croissance liées en particulier au développement rapide de la production d’esters méthyliques d’huiles végétales, désormais freiné au niveau communautaire. Un relais récent a été pris avec le développement de productions d’esters basées sur des matières secondaires d’origine animale (industrie et restauration) mais il est fortement bridé par un taux d’incorporation dans le diesel bien plus faible qu’il ne l’était pour les EMHV. Avec ce fort engouement pour les biocarburants dans les années 1990, le marché du glycérol s’était saturé, d’où le lancement de nombreux projets de recherche et développement. De nombreux efforts de valorisation, en direct et par la voie chimique, ont donc été réalisés. De nombreuses utilisations de la glycérine existent, la principale étant en utilisation directe, après purification poussée, en alimentation humaine, cosmétique ou pharmacie. Mais c’est également un substrat de fermentation possible ou une molécule-plateforme à trois carbones recherchée. Le marché est donc bien établi pour partie et les perspectives nombreuses sur le papier. Cependant, son volume de production finalement moyen, et son prix, extrêmement sensible à différent facteurs dont les volontés politiques diverses, fragilise le développement de nouvelles valorisations. La tendance de consommation d’agrocarburant devrait marquer le pas suite à l’évolution des réglementations récentes, sans parler d’une possible désaffection à terme pour les motorisations diesel. Dans tous les cas de figure, une bonne valorisation du glycérol est essentielle à la filière, qui recherche toujours des débouchés à haute valeur ajoutée. La filière oléo-protéagineux a mis en place des structures et des outils de R&D visant à assurer une meilleure valorisation de ces coproduits par exemple à travers la mise en place de la SAS PIVERT. Parmi les projets figure le glycérol comme substrat de fermentation pour produire des molécules à valeur ajoutée. Le volume disponible effectivement pour ces valorisations, à côté des valorisations en direct, dépendra étroitement, outre de la croissance globale possible du marché (dépendant de décisions politiques), de leurs niveaux de valorisation respectifs. D’autant plus que certaines applications, à haute valeur ajoutée mais sans transformation chimique ou biologique autre qu’une purification, seront difficiles à déplacer.

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X. Les déchets bois 189

Contexte et chiffres clés - Définition du gisement

Le gisement des déchets bois est composé de trois grandes catégories 190 de bois , historiquement dits de classe A, B, ou C : • Les déchets bois de classe A sont les déchets dits de bois propres, non souillés . Il s’agit d’un bois

brut, non traité, non peint, et non vernis (cagettes, palettes, caisses, chutes de production, …)191 ; • Les déchets bois de classe B sont eux considérés comme des déchets bois non-dangereux . Ce

sont des bois contenant des peintures, colle et vernis (issus généralement de la filière ameublement, ou des bois de démolition) ;

• Les déchets bois de classe C sont considérés comme des déchets bois dangereux , traités avec des produits spécifiques (créosotés ou avec des traces de métaux comme le cuivre, le chrome, l’arsenic ou autres). Ce gisement est avant tout constitué de traverses de chemin de fer et de poteaux électriques usagés.

Le gisement n’est pas réparti de manière homogène s ur le territoire , dans la mesure où les apports ne sont pas répartis de façon uniforme. La collecte auprès des collectivités et des industriels est essentiellement liée aux bassins de population. Le gisement est destiné à deux grandes voies de valorisation : la valorisation matière et la valorisation énergétique . - Acteurs et chaîne de valeur associée

La filière des déchets bois implique différentes ca tégories d’acteurs, selon le type de bois valorisés (de classe A, B ou C) et le mode de valorisation ci blé (matière ou énergétique, avec différentes catégories d’installations classées pour la valoris ation énergétique). Certains acteurs majeurs comme Véolia ou Suez Environnement (au travers de sa filiale SITA) sont impliqués sur l’ensemble des étapes de la chaîne de valeur du traitement des déchets bois, depuis la collecte des déchets, jusqu’à leur valorisation auprès des industries consommatrices . Les étapes clés sont situés tout d’abord sur la collecte des déchets bois qui peut i mpliquer différents moyens de collecte selon le gisement concerné (bois vierge, bois d’emballage, bois souillé non dangereux, bois pollués avec des produits dangereux, produits forestiers issus de l’exploitation et de l’entretien des forêts). Ils sont ensuite préparés, via un processus de tri et un contrôle de la qualité à la réception des lots , impliquant bien souvent des étapes de broyage primaire et secondaire. Un déferraillage est également effectué pour les bois qui le nécessite, avant que ces derniers ne soient triés en fonction de la granulométrie, afin de pouvoir être redirigé vers les processus de valorisation adaptés , qui se répartissent entre valorisation matière et valorisation énergétique. Le gisement des déchets bois est segmenté en différentes grandes provenances : - Les déchets bois de classe A sont majoritairement des déchets de bois d’emballage (palette issues de

tous secteurs d’activités), et des déchets de bois biomasse produits essentiellement par l’industrie forestière (et notamment les scieries) ;

- Les déchets bois de classe B eux sont davantage en provenance de l’industrie mais aussi du bâtiment, des ménages et des collectivités (les déchets d’ameublement en provenance des particuliers ou des professionnels s’inscrivent également dans ces catégories).

Concernant les bois d’emballage, à savoir les palettes, en fonction de la présence de colle et d’éventuel vernis ou non, le déchet bois sera de catégorie A (sans colle ni vernis), ou de catégorie B sinon. 189 Source : Environnement & Technique – Hors-série Octobre 2013 et Juillet 2014 – Les chiffres de l’industrie du recyclage 190 Source : http://www.paprec.com/fr/comprendre-recyclage-paprec/valorisation-matiere/recyclage-bois et http://www.biomasse-normandie.org/bois-fin-vie-bois-traites-souilles-ou-adjuvantes_352_fr.html 191 Sont notamment inclus dans les bois de classe A les connexes de seconde transformation (coproduits de l’industrie du bois)

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La filière de gestion des déchets bois est dans une phase de développement et de structuration. Le gisement des déchets bois reste en grande partie as socié au secteur du bâtiment et de la construction, avec de fortes problématiques de coll ecte qui restent à résoudre. En termes de structuration, on notera notamment la mise en place en 2012 de la filière REP Déchets d’éléments d’ameublement (DEA). En effet, d’après le Ministère de l’Ecologie, du Développement Durable et de l’Energie192, le gisement est estimé à plusieurs millions de tonnes et offre des perspectives de valorisation intéressantes, puisque jusqu’à lors, environ 55% des déchets d’ameublement produits étaient mis en décharge sans être valorisés. Cette filière représente ainsi un fort potentiel de développement économique et de création d’emplois, notamment pour la filière des déchets bois puisque les DEA sont composés de 50 à 60% de bois. Focus sur la struc turation récente de la filière REP DEA : Le développement de la filière REP DEA associé à la mise en place des éco-organisme Valdelia et Eco-Mobilier a permis de mieux structurer la filière de gestion de ces déchets. Ces éco-organismes gèrent désormais les mises en marché des déchets collectés, ce qui leur confèrent ainsi un rôle central dans l’organisation de la filière.

• L’éco-organisme Valdelia est exclusivement dédié au mobilier professionnel. Il organise la collecte et le traitement du mobilier professionnel détenu par les collectivités, écoles, cafés, hôtels, restaurants, hôpitaux, maisons de retraite, etc. En 2013, l’organisme a ainsi permis de collecter 5 800 tonnes de déchets bois et un peu pl us de 20 000 tonnes en 2014 (sur un gisement potentiel estimé à 600 000 tonnes 193 uniquement pour les DEA professionnels). L’éco-organisme a récolté pas moins de 15 M€ d’éco-contribution versés par les metteurs sur le marché.

• De la même manière, l’éco-organisme Eco-mobilier est positionné au nive au de la filière des déchets d’ameublement du côté des particuliers . En 2014, c’est près de 125 000 tonnes de déchets d’ameublement qui ont été collectés, contre uniquement 8 000 en 2013 194 . Le gisement de déchet en provenance des particuliers serait lui d’1,7 millions de tonnes195.

Les déchets d’ameublement (qui sont en grande major ité des déchets bois de classe B) sont principalement destinés à la filière de valorisatio n matière , au travers des acteurs des panneaux particules (la valorisation énergétique n’étant utilisé que ponctuellement). En effet les objectifs fixés par les pouvoirs publics (au travers des termes de l’agrément avec les éco-organismes) fixent un taux de réutilisation et de recyclage de 75% 196 pour Valdelia, et 45% pour Eco-mobilier . Concernant les autres catégories de déchets bois de classe B, on retrouve davantage des acteurs comme Veolia ou SITA (au travers de Suez Environnem ent), qui gèrent à la fois la collecte et la valorisation (principalement énergétique). En dehors de ces principaux acteurs qui sont majoritairement certifiés ISO pour ce type d’activité, il existe également de nombreuses petites structures en charge de la collecte et de la valorisation des déchets. Dans la catégorie des déchets de bois de classe A, et notamment du bois biomasse, les acteurs concernés sont des acteurs spécifiques, comme Dalki a ou Cofely GDF Suez, focalisés sur la valorisation énergétique du bois biomasse en chauff erie industrielle. Le bois biomasse utilisé est principalement sous-forme de plaquettes forestières, mais intègre également des déchets bois de classe A.

• Par exemple pour Cofely, sur les 1 million de tonnes de bois biomasse valorisés dans son parc de chaudières, 200 000 tonnes sont en provenance de déchets bois de classe A.

192 Source : http://www.developpement-durable.gouv.fr/Dechets-d-ameublement.html 193 Source : http://www.actu-environnement.com/ae/news/rep-dechets-elements-ameublement-professionnel-18432.php4 194 Source : http://www.actu-environnement.com/ae/news/eco-mobilier-organisme-bilan-2014-performances-24390.php4 195 Source : http://www.lefigaro.fr/emploi/2014/07/22/09005-20140722ARTFIG00055-eco-mobilier-ou-la-resurrection-des-meubles-et-matelas.php 196 Source : http://www.actu-environnement.com/ae/news/valdelia-collecte-mobiler-professionnel-2013-bilan-ecocontribution-21223.php4

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Lorsque l’on parle de bois B ou C, il faut se tourn er davantage vers des acteurs spécialisés dans le traitement des déchets et du recyclage , comme Véolia Propreté qui gère justement les aspects relatifs à l’incinération. Les déchets bois de classe A est très recherché par les acteurs exploitants des chaufferies biomasse, car ce dernier reste moins coûteux que le bois en provenance des forêts . Ces bois ont généralement un pouvoir calorifique très élevé et certaines chaufferies ne peuvent pas l’accepter en pur, ce qui les oblige à passer par une plateforme qui va permettre de mélanger ce bois avec d’autres formes de biomasse. Le gisement de déchets bois de classe A représente ainsi un intérêt stratégique pour les acteurs du bois énergie, qui recherchent de nouvelles quantité s disponibles et exploitables . D’un autre côté, les industriels du panneau particule sont également consommateurs et demandeurs de déchets bois de classe A, car ces derniers sont plus facile s à valoriser au travers du procédé de production des panneaux particules.

- Chiffres clés et volumes générés

D’après l’étude197 ADEME 2015 sur l’évaluation du gisement de déchets bois et son positionnement dans la filière bois/bois énergie, la production de déchets de bois est évaluée à 7,2 millions de tonnes en 2012, dont 1 million qui sont consommés directement sur les sites producteurs. Les secteurs du bâtiment, des ménages et collectivités sont les deux plus gros producteurs de déchets de bois et génèrent à eux-seuls 61% des tonnages générés. Ils sont suivis par l’industrie avec 1,2 millions de tonnes et les bois d’emballages (palettes) qui représentent 0,9 millions de tonnes, soit 13% du tonnage total collecté. Le reste du gisement est en provenance de la filière emballage, du secteur tertiaire ou de l’artisanat.

Figure 42 : Evaluation des différents gisements de déchets de bois en 2012 (en millions de tonnes)198

Sur ces tonnages globaux, on comptabilise donc 6,2 millions de tonnes de déchets bois qui circulent au travers différents sites de reconditionnement, centres de tri et de regroupement. La répartition du gisement collecté entre les différentes catégories de bois est alors la suivante :

• Bois A (bois d’emballage essentiellement) : 900 000 tonnes • Bois B (ou AB en mélange) : 5,3 millions de tonnes

Il est à noter qu’il n’existe pas d’études récentes permettant d’évaluer le gisement de bois C. Pour autant les professionnels approchés précisent que les volumes associés seraient relativement faibles.

197 Source : Synthèse publique de l’Evaluation du gisement de déchets bois et son positionnement dans la filière bois/bois énergie, ADEME - avril 2015 198 Source : Synthèse publique de l’Evaluation du gisement de déchets bois et son positionnement dans la filière bois/bois énergie, ADEME - avril 2015

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- Réglementation et impacts sur la filière Depuis le 26 août 2013 199, un arrêté est venu modifier la précédente régleme ntation (datant du 25 juillet 1997) concernant la nomenclature des installations classé es pour la protection de l’environnement (ICPE) dédiées à la combustion (rubrique 2910).

Ainsi, la nouvelle nomenclature des ICPE 2910 est venue renforcer la c atégorisation et les spécifications relatives aux différents combustible s à destination des installations de valorisation énergétique. Lorsque les déchets bois sont à destination d’une valorisation énergétique, ils peuvent donc être traités dans différents types d’installations classées (chaufferies industrielles ou collectives, incinérateurs), en fonction des caractéristiques des déchets et du processus de préparation qu’ils auront suivi. Ces installations sont classées selon les rubriques ICPE 2910 pour la combustion, et 2770/2771 200 pour l’incinération. Initialement, les installations brûlant des déchets sont donc des installations d’incinération classées au titre des rubriques 2770 ou 2771 de la nomenclature ICPE :

• Les déchets non dangereux sont incinérés dans des incinérateurs industriels classés 2771 ; • Les déchets dangereux (ou contenant des substances dangereuses) sont traités dans des

incinérateurs industriels spécifiques classés 2770. Ce sont généralement des déchets avec des traces de métaux toxiques ou des composés halogénés.

Les autres installations de combustion sont classées au titre de la rubrique 2910 de la nomenclature des ICPE, qui comporte 2 rubriques (2910 A ou 2910 B) compatibles avec le bois et la biomasse. Au sens de la rubrique 2910201, le terme biomasse peut inclure des déchets bois (à l’exception des déchets de bois susceptibles de contenir des composés organiques halogénés ou des métaux lourds à la suite d’un traitement avec des conservateurs du bois ou du placement d’un revêtement, y compris notamment les déchets de bois de ce type provenant de déchets de construction ou de démolition). Les deux catégories d’installations sont les suivantes :

• Les installations classées 2910 A visent les combustibles commerciaux aux cara ctéristiques connues (dont notamment le gaz naturel, le GPL, le fioul domestique, le charbon, la biomasse, les déchets végétaux et tout type de biomasse a l’état naturel) et déchets bois d’emballages faisant l’objet d’une SSD

• Les installations classées 2910 B peuvent intégrer des produits, et certains d échets de biomasse, à l’exclusion des combustibles commerciau x et du biogaz. Les déchets bois sont alors acceptés sous certaines conditions (cf. seuil arrêté), à l’exception des déchets bois pouvant contenir des composés organiques halogénés ou des métaux lourds.

Après la sortie de cet arrêté en 2013, de nombreux acteurs tels que la FEDENE, Dalkia, la FNB ou encore le FEDEREC se sont mobilisés pour déposer une demande de sort ie du statut de déchet (SSD) visant certaines catégories de bois : - Pour les déchets bois d’emballage en présence de colles, qui au travers de cette nouvelle

réglementation devraient être valorisés dans des installations classées 2910 B, afin de pouvoir les valoriser dans des installations classés 2910 A.

- Pour les déchets bois de la construction ou de la démolition, usuellement valorisés dans des installations classées 2770, afin de pouvoir les valoriser des installations classées 2910 B

Cette action a conduit à la mise en place d’une procédure de SSD pour les déchets bois fixée par l’arrêté du 29 juillet 2014202.

199 Source : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000027995928&dateTexte=&categorieLien=id 200 Source : http://www.installationsclassees.developpement-durable.gouv.fr/Installations-de-combustion.html 201 Source : http://www.ineris.fr/aida/consultation_document/10767 202 Source : http://www.bureauveritas.fr/wps/wcm/connect/bv_fr/local/services+sheet/certification-sortie-du-statut-du-bois-dechet-bois-energie-ssd

Focus sur la procédure de sortie de statut de déche t C’est une procédure qui permet à un déchet de deven ir un produit au sens de l’article L 541-4-3 :

• Si le déchet n’est pas de la biomasse, l’installation de combustion doit être classée en 2770/2771. Mais si le déchet est traité et trié avant combustion dans une plateforme respectant les conditions d’un arrêté SSD, l’installation de combustion peut être classée en 2910-B.

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La SSD requiert la mise en place d’un système de management de la qualité, ce qui peut dans certains cas engendrer de nouvelles problématiques :

• Les structures de petite taille peuvent rencontrer des difficultés au regard de la SSD. Plusieurs professionnels interrogés ont mis en avant le besoin d’accompagner de ces acteurs dans leur démarche de mise en œuvre d’un système de management de la qualité, leur permettant de valoriser en 2910 A des déchets bois sous-couvert de la SSD.

Par ailleurs, dans le cadre du développement des ac tions associées au Grenelle de l’environnement, il a été fixé un objectif de mobil isation de 20 millions de tonnes de bois supplémentaires. Cela ouvre de nouvelles perspectiv es d’utilisation pour les déchets bois. Pour des raisons essentiellement réglementaires, les acteurs s’attendent à observer une relocalisati on des voies de valorisation sur le territoire national, a u détriment de l’export des produits collectés. Cela permettrait ainsi d’avoir une certaine proximité avec les gisements concernés, qui se développent de manière pérenne. Il est également important de noter une concurrence d’usage potentielle à venir sur la valorisation énergétique. Le projet de définition réglementaire sur la combustion des CSR risque en effet d’impacter les différents appels d’offres sur la valorisation énergétique. Cela s’inscrit également dans la mouvance du Grenelle de l’environnement, en proposant un nouveau combustible pour les installations classées.

Conclusions et enseignements : Les déchets bois représentent un gisement de 6 mill ions de tonnes . Les principaux enjeux pour améliorer la valorisation de ces déchets sont assoc iés aux secteurs du bâtiment et de la construction, pour lequel la filière de collecte po ssède un fort potentiel de développement. La filière de gestion de ces déchets est actuelleme nt dans une phase de structuration nouvelle, avec notamment l’apparition de la REP DEA d’un côté, et l’évolution des réglementations relativement aux installations de combustion classées en 2910 d’un autre côté.

203 Source : http://boisenergieconferenceademelr.inscription-online.com/evenement/49/3--inddigo---support-ssd-colloque-10-avril.pdf

• Par ailleurs, si le déchet est de la biomasse, après SSD, ce dernier peut être traité dans une installation classée 2910-A.

N.B. : Des seuils sont imposés en 2910-B.

Figure 43: Représentation schématique des différentes typologies d'installations classées203

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Caractérisation des différentes voies de valorisati ons - Caractérisation des différentes voies de valorisation

Les déchets bois sont à destination de deux grands champs de valorisation : la valorisation matière (au sein de la filière des panneaux particules prin cipalement), et la valorisation énergétique (au sei n de la filière bois énergie pour le bois A et pour l e bois B soumis à la SSD, et en incinérateur industriel classé 2771 pour le bois B non soumis à la SSD). Dans une plus faible mesure, on note également la possibilité d’une valorisation matière de nature différente, par le biais d’une commercialisation ou d’échange locaux entre le producteur et son environnement proche à destination des filières d’élevage (litière) ou horticoles (paillages) par exemple. Sur les 6,2 millions de tonnes collectées :

• 1,4 millions de tonnes sont destinées à la valorisation énergétique • 3,5 millions de tonnes à la valorisation matière :

o 1,8 millions de tonnes au travers de la filière des panneaux particules (dont 1 million à l’export)

o 1,7 millions pour d’autres voies de valorisation • Les 1,3 millions de tonnes restants sont dirigés vers des installations de stockage pour les déchets

non dangereux, ou en très faible proportion à destination d’installation de traitement thermique. Ainsi, le taux de valorisation des déchets bois est de 79%, avec 57% de valorisation matière et 22% de valorisation énergétique. Le reste des bois en mélange (21%) n’est pas valorisé, principalement pour des raisons technico-économique associées au tri ou aux techniques de valorisation. Le gisement des déchets bois de classe A est distri bué entre une valorisation énergétique (33%) au sein de la filière bois énergie et une valorisation matière pour les industriels des panneaux (66%). Les déchets bois de classe B sont également destiné s en majorité à la filière de valorisation matière (55%) auprès des industriels des panneaux mais une partie du gisement est également valorisé en énergie (21%) dans des incinérateurs classés 2771 (ou en 2910 sous couvert d’une SSD). Les conditions locales sont, à ce niveau, généralement déterminantes dans le choix du type de valorisation afin de privilégier les circuits courts. Le reste du gisement est principalement dirigé vers des centres de stockage (24%). Enfin, les déchets bois de classe C est traité par des acteurs spécifiques, spécialisés dans l’incinération de déchets dangereux (installations classées 2770) :

• le gisement est valorisé dans des incinérateurs à haute-température, principalement au travers de four à cimenterie. Ce sont généralement des bois créosotés, ou en présence de CCA (chrome – cuivre – arsenic). Ces déchets dangereux sont pris en charge dans des fours d’incinération, après préparation (afin notamment de les déferrailler). Les bois CCA sont aujourd’hui interdits, et ont été remplacés par les bois CCB (chrome – cuivre – bore), qui sont également interdit à la vente au grand public, mais qui peuvent être utilisés pour le transport téléphonique par exemple.

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Figure 44: Répartition des flux entre gisement disponible et voies de valorisations/traitements/stockages204 Dans la hiérarchisation des modes de valorisation, la valorisation matière est actuellement mise en avant (notamment dans les termes de l’agrément entre les pouvoirs publics et les éco-organismes pour la mise en place de la filière REP DEA), derrière le réemploi et la réutilisation (princip alement appliqué aux palettes). La valorisation énergétique apparait davantage comme un choix secondaire pour le bois B. La SSD favorise le bois d’emballages à l’én ergie. En termes de valorisation matière, le débouché prin cipal se trouve dans la fabrication des panneaux particules (et on dénombre moins de 10 acteurs en F rance au travers de structures assez importantes). Les taux de valorisation matière de ces structures sont assez faibles, avec seulement 30 à 40% de matériaux recyclés dans le processus de fabrication, alors que les italiens sont à 100% par exemple et les belges entre 60 et 80%. Ces données sont principalement dues à l’historique de la filière française, qui s’est développée au sein des massifs forestiers en abondance sur notre territoire, ce qui permet de faciliter l’approvisionnement naturel en produit grâce à l’industrie de sciage du bois notamment. Il y a cependant concurrence d’usage puisque les produits connexes de scierie sont également utilisés comme matière première pour l’énergie. Les fabrications de panneaux doivent alors chercher à utiliser des matériaux moins chers, d’où un intérêt potentiel à se tourner vers les autres filières de déchets bois. Concernant les déchets de bois d’ameublement, il n’ est pas possible actuellement d’utiliser ces déchets comme combustible en dehors d’incinérateurs industriels, qui sont relativement rares sur le territoire. C’est pourquoi 98% des déchets conce rnés sont valorisés en matière, en France ou dans les pays limitrophes. D’un point de vue géographique, en fonction de la p roximité avec certains industriels de la filière, les valorisations ne seront pas les mêmes. La probl ématique de la répartition régionale du gisement n’impacte pas particulièrement l’émergence de nouve aux projets. Les projets de valorisation énergétique impliquent des plans d’approvisionnement qui sont soumis aux cellules biomasses, sous l’égide des préfectures qui vont alors veiller à ce qu’il n’y ait pas de concurrence

204 Source : Synthèse publique de l’Evaluation du gisement de déchets bois et son positionnement dans la filière bois/bois énergie, FCBA, avril 2015

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d’usage avec d’autres installations comme une usine de panneaux particules. Il existe ainsi une attention particulière qui vise à conserver un équilibre entre les différentes voies de valorisation et les acteurs impliqués. Les enjeux autour de la mobilisation de la ressourc e visent à empêcher l’apparition de tensions sur la ressource, ou de conflits d’usage e ntre la valorisation énergétique et la valorisation matière. Conclusions et enseignements : Les déchets bois, en fonction de leur provenance, s ont principalement destinés aux filières de valorisation matière ou énergétique : - Les déchets bois de classe A suivent une valorisation énergétique à 33%, et une valorisation matière à

66% ; - Les déchets bois de classe B sont utilisés par les industriels des panneaux de particules (55%), et

également valorisés énergétiquement (21%) en installations classé 2910 sous-couvert d’une SSD (73% de la part destinée à la valorisation énergétique), ou dans des incinérateurs industriels classés 2771 (27% de la part destinée à la valorisation énergétique). Une partie non négligeable du gisement reste inexploité et est à destination de centre de stockage.

- Les déchets bois de classe C sont valorisés principalement dans un nombre restreint de site sur le territoire national, classé en 2770 (souvent des fours à cimenterie).

Tendances et perspectives de développement - Tendances et évolutions à venir

Concernant les perspectives du marché à moyen terme 205, la montée en puissance lors de l’année 2013 des éco-organismes sur les déchets d’ameubleme nt promet aux professionnels du secteur de nouvelles ressources.

• La mise en place de la REP DEA va en effet permettre de mettre sur le marché des volumes supérieurs. Bien que les capacités de recyclage soient saturées, la filière possède des capacités de collecte et de transformation de qualité. Ainsi, le développement de nouvelles voies de valorisation apparait comme un enjeu important pour la filière.

En parallèle, la Sortie du Statut de Déchet206 a un impact fort pour la filière des déchets bois. Les différents acteurs impliqués actuellement dans la filière de valorisation des déchets bois de classe A s’intéressent progressivement à l’appariti on de nouveaux volumes de déchets bois de classe B, en provenance de la filière REP DEA. Cepe ndant, leur valorisation implique des procédés différents et certaines adaptations aussi bien au n iveau de la valorisation matière que de la valorisation énergétique. Plusieurs acteurs de la valorisation énergétique s’ interrogent quant aux objectifs de valorisation matière fixés pour les éco-organismes dans la mesure où la valorisation énergétique pourrait représenter un meilleur potentiel économique :

• Le marché des panneaux particules a en effet connu une baisse importante sur les années 2011 – 2012, en raison d’une surproduction par rapport à la consommation réelle.

On note cependant une prise en compte progressive des caractéristiques régionales, afin de privilégier les circuits courts et de pouvoir notamment faire de la valorisation énergétique lorsqu’il n’y a pas d’autres solutions en local. En conclusion, une meilleure structuration de la fi lière rendu possible par l’apparition d’éco-organismes doit permettre d’augmenter les quantités collectées, mais le marché de la valorisation matière est limité et les installations permettant une valorisation énergétique (pour les déchets bois de classe B non soumis à la SSD) demandent un certa in nombre de problématiques techniques, ce qui ne permet pas leur développement massif, car co mportant d’importants coûts d’infrastructure. Par ailleurs, les projets d’incinérateurs industriels sont souvent confrontés à des freins de la part des populations locales.

205 Données extraites du rapport final du contrat d’étude prospective du secteur des entreprises du recyclage – FEDEREC/Organisations syndicales/DGEFP – mars 2010 206 Source : http://www.actu-environnement.com/ae/news/yann-borrel-sortie-statut-dechet-broyats-emballages-bois-22524.php4

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- Evaluation du volume disponible et supplémentaire pour valorisation

Aujourd’hui, il existe un gisement potentiel de plu s d’1 million de tonnes de déchets bois qui n’est actuellement pas collecté, essentiellement faute de débouchés en termes de valorisation. Une utilisation grandissante des solutions de valorisation énergétique pourrait apporter des solutions à la filière de traitement des déchets bois, tout comme le développement de nouvelles voies de valorisation matière. - Perspectives de développement

Chez les éco-organismes comme Valdélia et Eco-mobil ier, résoudre les problématiques de collecte, de tri et de valorisation sont des axes clefs de dé veloppement afin d'améliorer la qualité du gisement, et potentiellement d’offrir de meilleures perspectives. Les deux éco-organismes, en partenariat avec l’ADEME, sont ainsi impliqués dans 3 projets 207 pour développer les techniques de tri et de recyclage des déchets d’éléments d’ameublement Bois et Rembourrés. Le volume budgétaire global pour ces 3 projets est de 8,8 M€. Financé à 50% par l’ADEME, 25% par Valdélia et 25% par Eco-mobilier, ces projets visent à répondre aux objectifs de taux de recyclage pour les déchets d’ameublement (objectif fixé dans les termes de l’agrément d’Eco-mobilier, Valdélia ayant un objectif de 75% à l’horizon 2015-2017208). Ces projets cherchent ainsi à développer de nouvelles voies de valorisation pour les DEA, en essayant par exemple d’en extraire les fibres par traitement thermique et mécanique (Profidéa), ou d’extraire des molécules à HVA par traitement biologique (Valdébio). L’ensemble des travaux a été initié début 2015. 2 autres projets de R&D labellisés à l’issu du Conseil de l’Innovation du pôle fibres (en septembre 2014) portent davantage sur des problématiques associés à la valorisation énergétique. Nom du projet Partenaires impliqués Description Recyfibre (2015)

Véolia Environnement Research and Innovation, en partenariat avec VPFR, FCBA et CTP

Etude de la valorisation matière des panneaux issus des DEA bois

Valdébio (2015)

Séché Environnement, en partenariat avec Protéus, Valagro et Eco-éthanol

Valorisation des DEA en molécules à HVA par traitement biologique

Profidéa (2015) Exergia, en partenariat avec Elbe Technologies et le LERMAB

Production de fibres de bois à partir de DEA bois traités par pyrolyse sélective – étude de faisabilité sur l’association de traitements thermiques et mécaniques pour le défibrage

Polybiom (2014)

Weiss France, en partenariat avec le LERMAB, le CRITT M2T, NOREMAT, ICAR et ATANOR

Développement d’une nouvelle génération de chaudières biomasse-énergie basée sur la technologie du lit fluidisé circulant (afin d’alimenter les chaudières par une gamme étendue de biomasses (bois très humides, bois adjuvantés, déchets de l’agriculture, coproduits alimentaires)

Valocendres (2014)

Norske Skog Golbey et 5 partenaires associés

Diversification et pérennisation de la valorisation des résidus de combustion des chaudières biomasse

Au regard de ces différents projets de R&D identifiés, et de par les retours de consultation obtenus lors des différents entretiens réalisés avec des professionnels, il est possible de mettre en valeur plusieurs grands axes de recherche stratégiques pour les acteurs afi n d’améliorer la valorisation des déchets bois. Tout d’abord, la chimie du bois constitue un axe clef de développ ement . Cela permettrait ainsi de traiter des déchets bois, même pollués, en offrant de nouveaux débouchés pour ce secteur et en permettant la production d’éthanol par exemple. Il s’agit dans ces cas de figure de mettre en œuvre de procédé de traitement chimique.

207 Source : http://www.eco-mobilier.fr/content/resultats-de-lappel-projets-de-recherche-et-developpement#top 208 Source : http://www.actu-environnement.com/ae/news/valdelia-collecte-mobiler-professionnel-2013-bilan-ecocontribution-21223.php4

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Les acteurs consultés reconnaissant un intérêt potentiel pour des projets sur la thermolyse ou l’extraction de la cellulose pour l’industrie chimi que ou cosmétique, provenant des futurs gisements disponibles de déchets bois de classe B . On voit ainsi apparaître des initiatives de R&D d’e xtraction de la cellulose ciblant spécifiquement certaines typologies de bois, comme les panneaux de fibre à densité moyenne (MDF), catégorisés en déchets bois de classe B. La possibilité de sépa rer et d’utiliser à posteriori les fibres sur ces types de panneaux représente une piste de développe ment intéressante.

• En effet, cela peut représenter une réponse à l’augmentation du gisement lié à la mise en place de la REP DEA, puisque les déchets d’ameublement ont une forte concentration en panneaux MDF. Le développement de ce type de projet est d’autant plus pertinent lorsque l’on prend en compte notamment le fait que les industriels du panneau particule ont des difficultés par rapport à la réintroduction du MDF dans les procédés de fabrication.

• Le gisement de MDF est un gisement récent, car ce sont des bois nouveaux qui ne sont à l’heure actuelle pas encore très présents dans les quantités collectés. Cependant, ils devraient augmenter dans les années à venir, et c’est dans ce contexte qu’on voit apparaître un projet comme Valdébio :

o Lancé début 2015, le projet Valdébio espère obtenir des sucres fermentescibles en tant que produits recyclés, après avoir pu contourn er les mécanismes d’inhibition pour l’extraction de la fibre des déchets bois de c lasse B.

o Une des problématiques clefs de ce projet est de développer un procédé d’extraction efficace avec des déchets bois de classe B dans lesquels on peut retrouver différentes typologies de colles, qui sont alors des molécules inhibitrices du processus d’extraction de la cellulose. En effet, les substances indésirables comme les colles ou les vernis peuvent affecter le processus de recyclage, ici par inhibition de l’hydrolyse enzymatique et de la fermentation.

o Différentes solutions sont ainsi à l’étude, afin d’enlever les colles par un solvant (intervention du partenaire Valagro), de s’affranchir de la présence des colles grâce à des enzymes spécifiques qui permettent d’hydrolyser la cellulose (intervention du partenaire Protéus), ou alors de détruire les colles par des micro-organismes, par des enzymes (également par Protéus). En étudiant ces trois voies en parallèle, le consortium espère ainsi identifier de nouvelles voies de valorisation intéressantes. Ce projet innovant permettrait d’augmenter la part valorisable des fra ctions ligno-cellulosiques des DEA qui ne peuvent pas tous être recyclés en panneaux d e particules.

On constate également d’autres initiatives du genre à des échelles régionales, impliquant également la transformation de déchets bois en molécules à HVA. L’antenne de la DREDE à La Rochelle est ainsi à l’initiative du financement de différents travaux de recherches sur le sujet, visant la valorisation des déchets de la filière bois. L’un d’entre eux porte notamment sur l’isolation des molécules extractibles suivi de la fabrication de charbon actif209. Les travaux cherchent à atteindre une double valorisation des déchets de la filière bois, par l’extraction de molécules extractibles présente dans les matériaux lignocellulosiques et à fortes valeurs ajoutées, couplée à une valorisation des résidus solides pour la production de charbon actif. Dans un second temps, d’autres pistes de développement apparaissent autou r de la valorisation matière afin de réutiliser les fibres du bois , pour produire des panneaux ou d’autres produits :

• Par exemple Veolia met en avant dans son projet de recherche Recyfibre une valorisation nouvelle des panneaux de fibres associés au gisement des déchets d’ameublement. Les pistes à l’étude sont la fabrication de pâte à papier ou la fabrication de panneaux isolants. Pour le traitement de la cellulose à destination de la filière papier, la rentabilité de ce type d’initiative reste difficile à obtenir, mais les travaux de recherche visent, dans le même temps, l’identification et la découverte de nouvelles caractéristiques prometteuses.

Certaines initiatives plus marginales cherchent également à développement des applications dans le domaine des bois composites, avec des procédés thermo-extrudés ou des mélanges plastiques-bois par exemple. Dans la catégorie des bois C, certains industriels mentionnent des initiatives menées par le passé pour obtenir par exemple du charbon actif à partir des déchets bois dangereux. Pour des raisons économiques, ce type de projet n’a pour le moment p as pu être concluant. Basé sur des techniques de pyrolyse à basse température censées concentrer les métaux en présence dans le gisement, il semble

209 Source : http://www.univ-larochelle.fr/IMG/pdf/20141106_annonce_these_d_alice_meullemiestre.pdf

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en effet très difficile d’assurer une absence totale de traces de métaux, ce qui rend réticent les industriels commercialisant le charbon actif produit à s’impliquer davantage dans cette nouvelle filière potentielle. D’autres difficultés techniques rencontrées sont inhérentes à la rétention des métaux lors du processus de combustion, qui ont tendance à partir sous forme gazeuse. La société Valagro a également étudiée un procédé d’extraction des substances polluantes organiques par l’utilisation de solvants afin de pouvoir valoriser la matière après extraction. La filière a été étudiée au stade pilote, mais les résultats n’ont pas non plus permis d’effectuer une mise à l’échelle industrielle, notamment pour des raisons économiques. En dehors de ces différentes initiatives, un autre axe de développement pourrait porter sur les opérations de collecte et de tri.

• Sur les déchets bois de classe B par exemple, les problématiques de tri et de collecte sont stratégiques car il y a une grande diversité de bois de différentes qualités. Pour la valorisation énergétique, les installations classées en 2771 peuvent prendre en charge les déchets bois de classe B sans besoin de tri spécifique. Mais en cas de valorisation matière, il est nécessaire de récupérer des lots de bonne qualité. Des techniques telles que le tri optique pourraient constituer des solutions potentielles, mais la filière ne permet pas pour le moment d’atteindre une rentabilité économique sur ce type de matériel d’après le témoigne de certains professionnels.

Conclusions et enseignements : Aujourd’hui, la filière associée au gisement des dé chets bois fait face à des enjeux importants. Face à la raréfaction du gisement propre aux déchets boi s de classe A, l’intérêt pour les déchets de bois B est grandissant. En effet, les quantités collectées sur ce gisement spécifique vont être amenées à croître durant les prochaines années, mais les techniques de valorisation ne sont à l’heure actuelle pas adaptées aux spécificités de ces déchets bois. Il existe ainsi actuellement différents travaux de recherche, qui peuvent viser aussi bien à une intégration facilitée des déchets bois de classe B dans des installations de combustion ou d’incinération ; ou à l’étude de nouvelles voies de valorisation pour ces déchets, notamment au travers de la filière de la chimie du bois, ou par le développement de nouveaux procédés de traitement thermique et mécanique pour l’extraction et l’utilisation des fibres de bois.

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L’ADEME EN BREF

L'Agence de l'Environnement et de la Maîtrise de

l'Energie (ADEME) participe à la mise en œuvre des

politiques publiques dans les domaines de

l'environnement, de l'énergie et du développement

durable. Afin de leur permettre de progresser dans

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capacités d'expertise et de conseil. Elle aide en outre

au financement de projets, de la recherche à la mise

en œuvre et ce, dans les domaines suivants : la

gestion des déchets, la préservation des sols,

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L’ADEME est un établissement public sous la tutelle

du ministère de l'écologie, du développement durable

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supérieur et de la recherche. www.ademe.fr

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