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Pensée sociale, maladie et risques sanitaires : l’approche des représentations sociales Thémis Apostolidis Année universitaire 2006-2007 Université de Provence, Master de Psychologie, Spécialité Psychologie Sociale, PSYQ02B « Psychologie Sociale de la Santé »

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Pensée sociale, maladie et risques sanitaires :

l’approche des représentations sociales

Thémis Apostolidis

Année universitaire 2006-2007

Université de Provence,

Master de Psychologie, Spécialité Psychologie Sociale,

PSYQ02B « Psychologie Sociale de la Santé »

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Quelle place d’observateur ? Une approche de Psychologie Sociale de la

Santé

La Psychologie Sociale de la Santé propose un ensemble de savoirs dans le domaine de la santé et de la maladie s’appuyant à

la fois sur les outils théoriques et méthodologiques de la Psychologie (Psychologie Sociale, Psychologie de la Santé,

Psychologie Clinique) et sur les approches des Sciences Sociales (Épidémiologie, Sociologie, Économie, Anthropologie, ...).

Elle est centrée sur l’étude et la résolution des problèmes de santé dans les différents contextes sociaux et culturels dans

lesquels ils se manifestent.

Morin & Apostolidis (2002)

In : Fischer G-N. (ed.). Traité de Psychologie de la Santé, Paris : Dunod.

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Santé et maladie : des lieux d’interaction entre l’individu et la société

• Dans de nombreuses cultures, la question de la santé apparaît au premier plan des interactions sociales : saluer quelqu’un (salut --> salus = santé; salam, shalom, …).

• La maladie : une forme élémentaire d’événement, c’est à dire : « une forme simultanément individuelle et sociale, un événement biologique individuel, dont l’interprétation, imposée par le modèle culturel, est immédiatement sociale » (Augé, 1984).

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Sentir et interpréter les indices corporels : le groupe, l’environnement social en tant que

vecteurs de décodage

• Les sensations sont-elles des données objectives ?

• L’expérience de Schachter et Singer (1962) : activation physiologique et émergence des états émotionnels.

• La mise en scène expérimentale : les sujets, des étudiants masculins, sont invités à participer à une étude concernant les effets des vitamines sur la vision. Ils donnent leur accord pour recevoir une injection de vitamines. En réalité, ils reçoivent une injection d’adrénaline.

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Trois variables sont manipulés : 1) la nature de l’injection (2 conditions : ADR, PLACEBO) 2) l’information sur les effets de l’injection (3 conditions : BI, MI, IGN) 3) le climat émotionnel (2 conditions : Euphorie, Colère).

• Principaux résultats pour euphorie : ADR-MI >= ADR-IGN > PLACEBO > ADR-BI.

0123456789

1011121314151617181920212223

Auto-évaluation (échellesd'interprétation)

Observation (indiced'activité)

BIPlaceboIGNMI

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Deux préalables :

• Le regard psychosocial (Moscovici, 1984)

• Les quatre niveaux d’analyse en psychologie sociale : individuel, inter-individuel, positionnel, idéologique et culturel (Doise 1982).

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Appartenance socioculturelleRelations interpersonnelles et sociales

Relation A/0 (modèles culturels, normes, conditions d’existence, …)

OBJET (réel ou imaginaire, physique ou social)

EGOSujet individuel

Agent

Acteur

ALTERAutruiPairs

FamilleGroupeAutorité

Le regard psychosocial comme mode de lecture

Relation S/O (aspects cognitifs, psychologiques et comportementaux).

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Le décodage culturel des symptômes• Une étude menée par Zola I. (1952) : il compare des patients

d ’origine irlandaise ou italienne lors de consultations hospitalières (échantillons appareillés selon le diagnostic primaire, le sexe et l ’origine).

Diagnostic : myopie

Patient Irlandais

« Je ne peux pas voir de l ’autre côté de la rue »

Question enquêteur : De quoi souffrez-vous ?

Patient Italien« Je me sens les yeux tout brûlants, surtout le droit. Il y a deux ou trois

mois, je me suis réveillé avec les yeux gonflés, je les ai baignés et c’est parti mais je sentais toujours la brûlure »

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Le concept de représentation sociale (Moscovici, 1961)

• Représentations collectives et représentations individuelles (Durkheim, 1898).

• Moscovici a repris le concept de Durkheim dans son étude de la diffusion d’une théorie scientifique, la psychanalyse, dans la société française.

• La notion a engendré un courant de recherches depuis 30 ans dans différents domaines thématiques : la santé (Herzlich, 1969), la folie (Jodelet, 1989), les droits de l’homme (Doise, 2001), ...

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Les représentations sociales de la maladie (Herzlich, 1969)

• Une étude qualitative de la construction de la maladie en tant que réalité sociale a permis de distinguer trois conceptions de la maladie en tant que relation de l ’individu à la société.

• La maladie destructrice (inactivité sociale, stigmatisation, désocialisation).

• La maladie libératrice (dépassement de soi, restauration de l’identité, changement des valeurs).

• La maladie métier (installation dans la maladie, concentrer ses efforts sur la perspective de la guérison).

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Représentations sociales et folie (Jodelet, 1989)• Une étude monographique du rapport à la

maladie mentale dans un contexte particulier : celui d’un village du centre de la France hébergeant une colonie de placement familial de malades mentaux (dispositif ouvert) .

• Un régime de ségrégation aux niveaux spatial, matériel, social, symbolique.

• La folie : une maladie contagieuse (système des humeurs : les nerfs, le sang « tranché », le cerveau).

• Une conduite défensive, basée sur un double sentiment de menace : au niveau organique (contracter la folie par le contact avec les fous) et au niveau identitaire (être vu comme des fous par l’extérieur).

• « Vivre des fous, vivre avec des fous ».

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La représentation sociale : une définition (Jodelet, 1991)

• Forme de connaissance courante, dite de sens commun, caractérisée par les propriétés suivantes :

• elle est socialement élaborée et partagée.

• elle a une visée pratique d'organisation, de maîtrise de l'environnement (matériel, social, idéel) et d'orientation des conduites et communications.

• elle concourt à l'établissement d'une vision de la réalité commune à un ensemble social (groupe, classe, etc.) ou culturel donné.

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Les représentations sociales

• Les représentations sociales sont des “programmes de perception et d’action”.

• Elles sont forgées dans et par les interactions sociales et

les communications.

• Elles expriment le rapport que les individus et les groupes entretiennent avec le monde et les autres et sont inscrites dans le champ du social et de la culture.

• Des systèmes de significations permettant d’interpréter le cours des événements et des relations sociales, d’orienter et

de légitimer les comportements.

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• "Les représentations sociales décrivent, expliquent et prescrivent. elles fournissent un mode d'emploi pour interpréter la réalité, maîtriser notre environnement et nous conduire en société" (Jodelet, 1993)

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Les quatre fonctions des représentations sociales (Abric, 1994)

• Fonctions de savoir : elles permettent de comprendre et d'expliquer la réalité.

• Fonctions justificatrices : elles permettent a posteriori de justifier les prises de position et le comportement.

• Fonctions d'orientations : elles guident les comportements et les pratiques.

• Fonctions identitaires : elles définissent l'identité et permettent la sauvegarde de la spécificité des groupes.

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Un regard en termes de représentations sociales des relations que les individus et les groupes

entretiennent avec les objets sociaux.

• L’élaboration des savoirs et des significations concernant les objets (informations, motivations, fonctions, repères normatifs).

• Les rapports entre représentations (images, significations, opinions) et pratiques.

• La construction de ces objets en fonction des appartenances et des insertions sociales.

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Trois orientations principales de travail

• Celle qui étudie l’incidence de la structure sociale dans l’élaboration d’une représentation (Doise, 1990).

• Celle qui analyse la dynamique représentationnelle et ses caractéristiques structurales, notamment en relation avec les pratiques sociales (Abric, 1987). 

• Celle qui examine le rôle régulateur des représentations sur les interactions sociales où elles interviennent en milieu réel (Jodelet, 1989).

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En psychologie sociale de la santé :

• Une approche pour mettre en place un travail de contextualisation et d’analyse de la pensée sociale dans le domaine de la santé et de la maladie (Morin & Apostolidis, 2002).

• Une lecture “ multi-niveaux ” qui fonde son regard sur le questionnement "quelles régulations sociales actualisent quels fonctionnements cognitifs dans quels contextes spécifiques ?" (Doise, 1990, p. 115) en articulant les différents niveaux d'explication psychosociale : individuel, inter-individuel, positionnel, idéologique et culturel (Doise 1982).

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• Un cadre théorique et épistémologique pour analyser la pensée sociale selon un “ modèle qui dégage les mécanismes psychologiques et sociaux de sa production, ses opérations et ses fonctions ” (Jodelet, 1984).

• Il pose une conception de l’individu comme sujet-acteur, socialement et culturellement situé, dont la pensée n'aurait pas comme seule finalité la “ curiosité intellectuelle ” (Heider, 1958) mais aussi une logique de maîtrise des situations (Jodelet, 1989).

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Le regard des représentations sociales de la santé et de la maladie (Herzlich, 2001)

• Elles constituent une mise en relation de l’ordre biologique et de l’ordre social et participent de visions du monde plus larges ainsi que de logiques plurielles.

• Nos « représentations » ne nous renseignent pas seulement sur la relation que nous entretenons avec les phénomènes corporels et notre propre état de santé, mais sur les relations qu’à travers eux, nous entretenons avec les autres, avec le monde et l’ordre social.

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COMMISSION AMERICAINE DE PRESERVATION

CONTRE LA TUBERCULOSE

EN FRANCE1917

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Deux notions clefs :

• La notion de sens : elle renvoie à la signification attribuée à un objet donné, à la fois au niveau individuel et au niveau social.

• La notion de filtre : elle renvoie au cadre interprétatif constitué par les réseaux d'ancrage des informations et des significations concernant l'objet.

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Les différents sens du cannabis dans l’espace social

Le cannabis : un objet polysémique dans la communication sociale.Un exemple : La diffusion de l’information concernant l’expertise de

l’INSERM sur le cannabis (22/11/2001) par quatre quotidiens français.

TitrePrinc.

Une étude de l’Inserm relativise les dangers de laconsommation du cannabis

LE MONDE(23/11/01)

TitreSec.

Tout en soulignant les risques de cancer liés à u ne consommationrégulière, l’expertise rendue publique jeudi affirme que ce produitprésente des dangers somatiques et psychologiques mineurs. 55% desfilles et 60% des garçons de 18-19 ans en ont déjà consommé.

TitrePrinc.

Les dangers du cannabis reconnusLE FIGARO(23/11/01)

TitreSec.

Drogue, une expertise de l’Inserm déplore la banalisation de cettesubstance, en détaillant ses conséquences sur l’organisme.

TitrePrinc.

Drogue douce, effets qui durentLIBERATION(22/11/01)

TitreSec.

L’Inserm évoque les risques de cancers liés à u ne consommationrégulière de cannabis.

TitrePrinc.

Le cannabis favorise le cancerLEPARISIEN(22/11/01) Titre Sec.

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Variations du sensen fonction des appartenances sociales.

Régulations psychosociales et représentations (1)

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Représentations sociales et sida

• Deux modèles interprétatifs et prescriptifs à l’égard du sida : le modèle « corporatiste » (contagion, groupes à risque, distance) et le modèle « libéral-individualiste » (transmission, comportements à risque, pas de distance) : Paez & Paicheler, 1990; Deschamps & all., 1993; ...

• L’adhésion à ces systèmes de représentations varie en fonction des caractéristiques sociodémographiques des individus (âge), de l’adhésion religieuse, du niveau d’études, du degré d’intégration sociale, ...

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Représentations de la santé et niveau de précarité(Population : usagers du CES DORIA ; Corpus : Association des

mots; Analyse ALCESTE; Olivetto & Apostolidis, 2003)

Deux univers cognitifs distincts

Satisfaction et réseau social

- Bonne qualité de vie (vivre pleinement, bonheur, détente, plaisir, joie)- Entourage social (famille, amis)

Condition physique et dynamisme

- Corps à entretenir (besoins primaires, hygiène de vie, forme physique, endurance)- Vitalité et pouvoir d’action(énergie, dynamisme, action, bouger)

LES NON-PRECAIRES LES PRECAIRES

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Variations du sens en fonction des pratiques.

Régulations psychosociales et représentations (2)

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Représentations de la drogue et du cannabis (Dany & Apostolidis, 2002)Technique : associations spontanées (N=300, inducteurs : cannabis, drogue)

Le lexique associé varie fortement en fonction de l’usage de cannabis

1 Facteur (30,460 %)Mots associés à

drogueMots associés à

cannabisMots associés à

drogueMots associés à

cannabisAccoutumance

DéchéanceDépendance

MaladieMort

PoudreSida

AccoutumanceDépendance

DroguePlanerTrafic

AlcoolCher

CocaïneDéfonceDélireEcstasy

FêteMauvaisPlaisirRisque

Bien-êtreDélire

DétenteFête

FumetteGraine

MarijuanaPartagePlaisirPollen

Shit

ABSTINENTS - USAGE ACTUEL- USAGE RÉGULIER

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Les représentations comme filtres (1)

En situation de jeu (dilemme des prisonniers), la représentation de l’autre agit comme filtre interprétatif et conducteur dans l’interaction (Abric, 1987)

Comportement dupartenaire

Adaptatif RigideHumain 58 % 51 % 54 %Représentation

partenaire Machine 41 % 30 % 35 %49 % 44 %

* les pourcentages expriment la proportion des choix coopératifs sur l'ensemble du jeu.

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Les représentations comme filtres (2)

L’intégration des nouvelles informations concernant le sida en fonction des représentations pré-existantes des sujets (Echebarria Echabe & Paez Rovira, 1989)

0

5

10

15

20

25

30

35

La transimission dusida est impossibledans les relationshétérosexuelles

Les caresses sontsans risques

ConservateursLibéraux

* En pourcentage des réponses erronées (comparaisons à l’aide duchi2, p < .001).

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Quelle conception de la pensée sociale ?

• Sujet “ optimal ” vs. Sujet “ social ” (Rouquette, 1994; Guimelli, 1999).

• Une conception “ informationnelle ” de la représentation (Jodelet, 1985) : la logique du paradigme du “ traitement de l'information ”, réduit les opérations mentales “ aux données objectives de l'informatique ” (Bruner, 1990, p. 23), et ne conceptualise pas ce qu'il y a d'affectif et de subjectif (Jodelet, 1985; Bruner, 1990).

• Exemple : Biais cognitifs (une conception « déficitaire » de l’activité cognitive; Joffe, 2003) .

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Comment analyser la pensée sociale dans le domaine de la santé et de la maladie ?

«Représentations sociales» versus «Cognition sociale» :

« Considérer les deux processus de construction d’une représentation dans le sens commun, l’objectivation et

l’ancrage » versus

« Evaluer le sens commun sur la base des standards du raisonnement rationnel et à partir d’une conception

déficitaire de l’activité cognitive » (Joffe, 2003)

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1er exemple :Représentations des relations intimes

sexuelles et perceptions des risques liés au sida (Apostolidis, 2003)

- Le sida en tant qu’objet médical (e.g. une maladie sexuellement transmissible).

- Le sida en tant qu’objet de sens commun (e.g. une maladie transmisse par certaines formes de sexualités dévalorisées socialement).

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Changements déclarés depuis l’épidémie de sida(Source : ACSF, 1993)

102030405060708090

100

Rapports sexuelsuniquement avec

des personnes dontje suis amoureux

Rapports sexuelsqu'avec des

personnes que jeconnais

% d'accord

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Le « potentiel amoureux » d’une relation sexuelle est fonction d’un certain nombre de paramètres

socialement marqués (rapports sociaux, culture).

• La typologie de partenaire (Avec qui ?).

• Le lieu de la rencontre (Où ?).

• Les modalités de la relation (Comment ?).

• L’objectif recherché (Dans quel but ?).

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Le délai d’attente séparant la première rencontre et l’aboutissement à une relation sexuelle

• “Ce genre de rencontres qui se font lors d'une soirée, tout de suite ça se termine au lit et le lendemain plus personne n'en entend parler quoi, je veux dire que c'est le genre de choses qui arrivent, c'est un peu banal quoi, et c'est ça qui tue le reste, qui tue l'amour, qui tue les vrais sentiments, qui tue plein de choses ” (Femme 23 ans)

• “Connaître quelqu’un d’une certaine manière, un certain temps, même une semaine, je crois que tu peux comprendre à peu près qui est la personne” (Homme 22 ans)

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Recherches quasi-expérimentales avec la variable « délai » (populations estudiantines)

Recherche N Pays mage

1 482 France, Grèce 23.2

2 660 France, Portugal, Suisse 21.6

3 220 France 22.4

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Scénarii expérimentaux

Rapport « sans délai »

• Paul est en vacances pour quelques temps dans un village près de la mer. Marie passe ses vacances d'été dans les environs. Un matin Paul et Marie se rencontrent au moment du petit déjeuner dans un café à côté de la plage. Ils font connaissance et après avoir bavardé un peu, ils décident d'aller se baigner ensemble. Ils passent le reste de la journée l'un avec l'autre à la plage. Le soir, ils vont manger dans un petit restaurant. Ils passent la soirée dans les bras l'un de l'autre. Ils finissent la nuit en faisant l'amour.

Rapport « avec délai »

• Paul est en vacances pour quelques temps dans un village près de la mer. Marie passe ses vacances d'été dans les environs. Un matin Paul et Marie se rencontrent au moment du petit déjeuner dans un café à côté de la plage. Ils font connaissance et après avoir bavardé un peu, ils décident d'aller se baigner ensemble. Ils passent le reste de la journée l'un avec l'autre à la plage. Le soir, ils vont manger dans un petit restaurant. Le lendemain, ils se rencontrent à nouveau et ils ne se quittent plus. Quelques jours après, ils passent la soirée dans les bras l'un de l'autre. Ils finissent la nuit en faisant l'amour.

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Perception de la valence sentimentale et du risque VIH dans le cadre d ’une relation sexuelle

• 482 étudiant(e)s en France et en Grèce.

• Les participants étaient invités à qualifier la relation induite par les scénarios.

• Questions : Relation qui vous plaît; sans avenir; sexuelle; sentimentale; pour le plaisir; pour construire quelque chose; de communication; superficielle; à risque.

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3 ACP sur 9 traits décrivant la relation. Échelle utilisée : 1 = pas du tout d’accord / 10 = tout à fait d’accord.

Global (KMO =.838)N=482

Grèce (KMO =.842)N=242

France (KMO =.836)N=240

ACPSOL.

VARIMAX

F1 F2 F1 F2 F1 F2% variance

Relation36,98 22,29 M SD 31,96 27,40 M SD 39,65 20,02 M SD

Qui plait ,752 6,1 2,9 ,829 5,9 2,9 ,725 6 2,9

Superficielle -,726 ,390 6,6 2,7 -,637 ,513 6,4 2,6 -,768 ,315 5,6 2,7

Construire ,713 -,310 3,6 2,3 ,560 -,496 3,2 2,1 ,759 4 2,4

Communication ,708 6,1 2,5 ,667 5,5 2,5 ,696 6,6 2,4

Sentimentale ,700 5,4 2,5 ,633 4,9 2,5 ,703 6 2,4

Sans avenir -,590 ,399 5,7 2,5 -,486 ,402 5,7 2,5 -,705 ,378 5,7 2,5

Plaisir ,815 7,8 2,3 ,773 7,4 2,5 ,789 8,3 1,9

Sexuelle ,814 8,1 2 ,755 8 2 ,764 8,3 2

Saturations supérieures à .30.

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La valence sentimentale perçue (sentimentale versus superficielle, VD) varie en fonction du « délai » (VI)

Valence sentimentale perçue

Sans délaiAvec délai

Échelle : 1 = pas du tout d’accord / 10 = tout à fait d’accord.

*(ANOVA, p =. 002)

*

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Valence sentimentale perçue (VI) et perception du risque VIH (VD)

Relation à risque par rapport au sida

Forte valenceSentimentaleFaible valencesentimentale

Échelle : 1 = pas du tout d’accord / 10 = tout à fait d’accord.

*(ANOVA : F(1,480) = 21,21, p =. 000)

*

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F 1 (26.34 %)Valorisation

Relation

F 2 (19.20 %)Valence

sentimentale

F 3 (9.62 %)Multi-

partenariatMoyennes

Image Stéphane positive .789 6.192Image Isabelle positive .780 6.103

Relation qui plait .709 .367 5.642Respect commun .688 5.823

De communication .686 6.309Partenaires sincères .673 5.750

Mature .566 .363 5.365Confiance mutuelle .565 5.057

Enrichissante .563 .488 6.407Fait l’un pour l’autre .539 . 5.097

Sexuelle -.742 4.730Superficielle -.301 -.663 4.886

Pour construire .367 .643 5.379Pour le plaisir -.625 6.758Sentimentale .422 .605 5.826Sans avenir -.600 4.375

D’amour .423 .502 5.446Epanouissante .432 .462 6.313

Stéphane partenaires .893 6.233Isabelle partenaires .886 6.078

Saturations supérieures à .30.

2e recherche (N=660, Apostolidis & Deschamps 2003) ACP (solution varimax) à 3 facteurs (55,16% VE ; KMO=.906).

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VAL. SENTIMENTALE

DELAI

(VI)

RISQUE

SIDA

(VD)

La Valence sentimentale : une variable médiationnelle

bêta = .314(p. < .001)

bêta = -.129(p. < .001)

bêta = -.300(p. < .001)

bêta = -.035(ns)

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Deux enjeux pour la psychologie sociale de la santé ...

• Logique du sens et construction des risques (le risque perçu varie en fonction de la valence sentimentale attribuée).

• Les construction des risques puise dans la « boite à outils » (Bruner, 1989) qu’offre la culture (e.g. la distinction entre une sexualité valorisée et une sexualité dévalorisée).

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2e exemple :Représentations sociales et cannabis :

perspectives socio-cognitivesPourquoi le cannabis ?

(Dany & Apostolidis, 2002)

•Un objet polémique (drogue / pas drogue; légaliser ou pas).

•Un objet de tension normative (législation versus loi des pairs).

•Un objet - enjeu pour la santé publique (conséquences aux niveaux physique, psychologique et social).

•Un objet idéo-logique (construction de la jeunesse en tant catégorie sociale en danger ou dangereuse).

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La consommation de cannabis est-elle perçuecomme une « conduite de drogué » ?

(Source : entretiens de recherche sur le thème de cannabis auprès de jeunes adultes, N=36)

Des logiques conditionnelles pour évaluer la d angerosité de la substance(dépendance, conséquences sanitaires et sociales) et pour percevoir leconsommateur comme un drogué, en fonction des modes(occasionnel/quotidien) et des contextes (seul/en groupe) d’usage.

Deux modes d’usage contrastés :

‡ Un usage « hédoniste » (occasionnel et collectif).

‡ Un usage « problématique » (quotidien et solitaire).

Le cannabis occupe, à l’instar de l’alcool (Cerclé, 1998), une « placesingulière » dans l’univers des drogues chez les jeunes : registre dejugement « usage vs. modalités d’usage ».

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Opinions sur le cannabis et perception de la dépendance d’un fumeur régulier dans des conditions socialement normées

(Apostolidis & Roche, 2002)

• Population : 320 étudiant(e)s en sciences humaines à l’Université de Provence, 160 hommes et 160 femmes ; Age moyen : 21 ans (18-25).

• 232 déclarent avoir consommé du cannabis et 87 le contraire.

• Un rapport à l’usage déclaré qui varie en fonction du sexe (p < .001)

Sexe Abstinents Expérimentateurs Occasionnels Réguliers TotalHomme 28 16 56 60 160Femme 59 18 52 30 159

Total 87 34 108 90 319

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QUESTIONNAIRED’OPINIONS

SUR LE CANNABIS

20 questions :Effets

FonctionsImagesStatut

VARIABLESDÉPENDANTES

17 traits de personnalité.

13 questions sur les raisons et les conséquences de l’usage.

15 indicateurs sur le caractère addictif de l’usage.

SCÉNARIO D’INDUCTION

EXPÉRIMENTALE

<SP2*C2*F2>

SP (Sexe acteur) : - Homme - Femme

C (Contexte) : - Groupe - Seul

F (Fréquence) : - Occasionnel - Quotidien

IDENTIFICATIONDES SUJETS

SexeAge

Usage et modes d’usage du cannabis

Usages d’autres produits

psychoactifs.Orientation religieuse et pratiques.

DISPOSITIF QUASI-EXPÉRIMENTAL (N=320)(Apostolidis & Roche, 2002)

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Nous vous présentons, ici, un court extrait d’entretien réalisé auprès d’une personne consommatrice de cannabis, dans le cadre d’une recherche sociologique : Les consommateurs de cannabis en France. (Département de sociologie. Université de Provence, 1998-1999). Nous vous demandons de bien vouloir lire cet extrait d’entretien de façon attentive.

Vincent (Julie) est âgé(e) de 25 ans, il(elle) vit seul(e) et travaille depuis six mois.

• INTERVIEWER : Dans quel contexte avez-vous consommé du cannabis pour la première fois ?

• VINCENT (JULIE) : Euh… il me semble que c’était dans une fête… oui, c’est ça, c’était avec des copains plus âgés que moi… j’avais 18 ans… je me demandais ce que ça allait me faire, mais finalement, il n’y a pas eu trop d’effets…

• INTERVIEWER : Pouvez-vous me parler de votre consommation, actuelle de cannabis ?• VINCENT (JULIE)  : …Euh… moi j’aime bien fumer, tranquille avec des copains (tout

seul )…En fait, ce qui me plaît, c’est d’aller chez les uns ou chez les autres et de fumer … (c’est d’être chez moi et de fumer)

• INTERVIEWER : Quelle est votre fréquence de consommation ?• VINCENT (JULIE) : …Oh, de temps en temps, mais en fait, c’est jamais plus d’une fois

par semaine … (Oh, assez souvent, en fait, c’est tous les jours)• INTERVIEWER : Quels sont les effets du cannabis sur vous ?• VINCENT (JULIE)  : …Ben…euh…je sais pas…ça me procure une sensation agréable.

HUIT SCÉNARIOS PRÉSENTANT UN « FUMEUR REGULIER »

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ACP SUR LES OPINIONS CONCERNANT LE CANNABIS(SOL. VARIMAX ; 58,09 % DE LA VAR IANCE EXPLIQUEE ; KMO = ,882)

F1 F2 F3 F4 F524,71

%11,1%

8,08%

7,23%

6,96%

Moyenne SD

Le consommateur est un drogué ,773 -,72 1,96Ils souffrent de problèmes psychologiques ,751 -,54 1,87Entraîne une dépendance psychologique ,742 ,77 1,88Entraîne une dépendance physique ,716 -,59 2,03Entraîne des problèmes de santé ,669 ,373 ,27 1,69Consommer nuit à l'ordre public ,656 -1,17 1,85Entraîne la prise d'autres drogues ,620 -1,81 1,63Le gouvernement devrait légaliser la consommation -,563 ,32 2,14Empêche la communication ,507 -,26 2,05Consommation plus dangereuse que celle d’alcool ,365 -,324 -1,65 1,56Favorise l'échange de secrets entre amis ,796 -,35 1,82Consommation permet d'oublier les problèmes ,633 ,411 -,66 1,90Favorise la créativité ,513 -,03 1,87Après une journée difficile aide à se détendre ,512 ,403 ,93 1,68Consommer permet de prendre un certain plaisir -,436 ,502 ,359 1,53 1,4Consommation banalisée chez les jeunes ,803 1,58 1,46Difficile de consommer du cannabis sans amis ,811 -,81 1,88Consommation affaiblit la capacité à travailler ,481 1,16 1,68L'entourage de la personne l'amène à consommer ,750 1,04 1,64L'attirance pour l'interdit pousse à consommer -,365 ,565 ,17 1,78

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L’addiction perçue de ce « fumeur régulier » varie significativement en fonction des modalités d’usage induites par les différentes versions du scénario :

SEUL > GROUPE (ANOVA, p<.003)

Cette norme de jugement est fortement liée aux représentations antérieures des participants à propos du cannabis (attitude normative permissive, vision hédoniste) et à leurs usages déclarés.

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F(1,281) = 16,073p=.000

-0,7

-0,5

-0,3

-0,1

0,1

0,3

0,5

0,7

EN GROUPE SEUL

DROGUE

PAS DROGUE

Représentations du cannabis et perception de la dépendance du fumeur en fonction du contexte d’usage

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Deux remarques• L’information sociale est traitée à partir des

représentations préexistantes des sujets (l’induction expérimentale n’a pas les mêmes effets en fonction du positionnement des sujets sur le principe qui organise la représentation du cannabis : c’est une drogue versus ce n’est pas une drogue).

• Les perceptions « conditionnelles » de la dépendance montrent que le cannabis commence à occuper chez les jeunes cette même place « ambiguë » qu’occupe depuis longtemps l’alcool dans la société française (e.g. le « bien-boire » et le « boire-alcoolique »).

L’évolution des représentations : une facette du phénomène de banalisation du cannabis chez les jeunes ?

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Pensée sociale et modes de pensée (Bruner, 2000)

• Deux modes de pensée qui coexistent : « pensée paradigmatique » et « pensée narrative ».

• La « pensée paradigmatique » ou « logico-scientifique » : elle s ’efforce d’atteindre l ’idéal d ’un système formel et causaliste.

• La « pensée narrative » : elle est centrée sur l’intention et l’action, aux conséquences de leur accomplissement ; l’argumentation n’obéit pas aux règles de la logique formelle.

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La pensée narrative : elle puise dans le réservoir culturel

L’intention (Le personnage, le cadre et l’action)

• La présupposition : la création d’une signification implicite qui sert de cadre pour l’interprétation.

• La subjectivation : la description de la réalité au travers du filtre de la conscience des protagonistes.

• La perspective multiple : la présence de plusieurs prismes possibles pour penser et pour agir face à la réalité.

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Représentations du sida dans des situations de précarité

(Apostolidis & Eisenlohr, soumis).

• Une démarche de type « grounded theory » (Strauss & Corbin, 1990) : trois opérations de recherche articulées par entretien et/ou questionnaire sur la base d’une procédure d’échantillonnage sur place entre 1999-2003.

• Un programme de recherches sur la construction du rapport à la santé chez des jeunes vivant dans des conditions de précarité économique et sociale à Marseille.

• Les inégalités sociales de santé : un enjeu de santé publique en France.

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Une co-existence entre le « vrai » et le « faux » au niveau des opinions concernant la transmission du sida

Le sida s’attrape par : Pas d’accord

(1+2)*

Sans opinion

(3)*

D’accord

(4+5)*

Total

Sang 3 2 94 99 Sperme 4 4 85 99 Seringues 1 1 97 99 Lames de rasoir 14 4 81 99 Brosses à dents 40 11 48 99 Salive 55 7 37 99 Sueur, transpiration 69 14 15 98 Piqûres d’insectes 59 12 28 99 Microbes 59 10 29 98 WC publics malpropres 36 19 43 98 Fréquentation des Hôpitaux 38 18 42 98 Négligence des autres 23 7 68 98 Suffisamment informé ? 19 7 72 98

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MÉFIANCE, SENTIMENT DE NON-MAÎTRISE,HÔPITAL ET RISQUE DE CONTAMINATION

« Parce qu’y pas de médicaments, y a rien que la mort. Ça me fait trop peur, le sida et le cancer, ça me fait trop peur. Surtout le sida, je me méfie de ça. À prendre mes précautions. Et c’est pas seulement pour coucher avec quelqu’un, paraît qu’on peut attraper le sida là où il y a des microbes, que je peux attraper sans faire quelque chose. C’est pas seulement parce que tu as couché avec quelqu’un, que t’as pris tes précautions. Ça peut arriver comme ça le sida, tu peux aller à l’hôpital et y a quelqu’un qui s’est trompé, il va prendre une aiguille que quelqu’un il a oubliée, il m’a piqué et puis ça y est ! Il avait le sida. Je suis contaminée directement ! Et ça fait tellement peur … si j’attrape le sida, je préfère mourir d’un coup. Les gens vont parler du mal de moi. Ils vont pas chercher pourquoi j’ai le sida, mais vont dire directement que j’ai couché avec n’importe qui. Je préfère mourir directement qu’être là, que les gens regardent … là, je sais déjà qu’un jour, je vais mourir, ça va me faire souffrir, je préfère mourir directement.» (F, 25 ans)

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Quelle interprétation ? Le sida : une thématique narrative (Bruner, 2000) : le sujet, les autres, le monde et l’action sont les éléments inséparables dans la construction de la réalité.

Des scènes narratives qui objectivent le rapport entre les sujets et les risques de contamination dans des perspectives multiples d’événements possibles, selon des modes de raisonnement qui n’obéissent pas aux « lois des probabilités » (« logique du si »).

-->Risque « probabilité »/ Risque « possibilité »

Les représentations des risques (le système de soins en tant que situation à risque) en tant que constructions d’une forme de rapports sociaux et symboliques (expression d’une méfiance à l’égard du système de prise en charge et de ses acteurs).

-->Une facette révélatrice de la « désaffiliation » (Castel, 1991)

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Trois remarques générales pour la discussion

• Le regard des représentations sociales : l’articulation système / métasystème (Doise, 1990).

• La double nature de la cognition (produits, processus (Jodelet, 1984).

• Deux modes de pensée : pensée paradigmatique et pensée narrative (administration de la preuve / présupposition; Bruner, 2000).