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M~d Mal Infect. 1991 ; 21 : 562-6 Physiopathologie des colites bact riennes * J.J. BAUDON'" RESUME Les bact~ries peuvent d~terminer une colite par deux m~canismes diff~rents, run toxinique, rautre ent~ro-invasif. La grande majorit~ des colites est due ~ un m~canisme invasif. Le caract~re entb.ro-invasif d'une bact~rie paraIt sous la d~pendance de facteurs g~n~tiques d'origine plasmidique, pour les Shigelles et les Colibacilles ent~ro-invasifs. Les Salmonelles p~n~trent dans les ent~rocytes du colon et de l'il~on, of~ elles d(~terminent un infiltrat inflammatoire. A partir de I/~ elles peuvent diss~miner clans rorganisme. Une diarrh~e s~cr~toire est associ~e ~ rinvasion. Les Shigelles et les Colibacilles ent~ro-invasifs se multiplient/~ l'int~rieur des cellules ~pith~liales du colon d~terminant des ulcerations et des abc~s cryptiques. Ils ~laborent une ou plusieurs toxines. Invasion et ent~rotoxicit~ sont la cause d'un syndrome dysent~rique et d'une diarrh~e s~cr~toire d'origine j~junale. Les Campylobacter peuvent d~terminer une diarrh~e sanglante, avec ulcerations aigu~s. Cependant, cette constatation est loin d'~.tre la r~gle. Ces germes agissent par l'interm~diaire d'une ent~rotoxine cholera-like et d'une cytotoxine. Yersinia enterocolitica provoque une diarrh~e ent~ro-invasive mais les donn~es exp~rimentales manquent pour le d~montrer. La physiopathologie explique aussi les ~checs du traitement antibiotique qui agit alors m~me que les destructions ~pithb.liales, les formes intra-cellulaires, raction des toxines, ont d~j~ pris place. Mots-cl~s :Colite - Diarrh~e bact~rienne - Physiopathologie - P~diatrie. Les bact~ries susceptibles de d~terminer une colite peuvent agir par deux processus diff~rents ne s'excluant pas run l'autre : toxinique et ent~ro- invasif. Le premier est bien document~ pour certaines bact~ries dont la toxine est isol~e, seulement suspect~ pour d'autres. Le second est d~montr~ du point de rue anatomopathologique et expb~rimental mais les m~canismes de l'ent~ro- invasion sont encore peu connus. La physio- pathologie des colites bact~riennes explique les manifestations cliniques et permet de comprendre les alias du traitement antibiotique. Tousles germes provoquant une diarrh~e chez renfant n'ont pas un p01e d'action colique ; seuls ceux d'entre eux qui agissent ~ ce niveau de fat;on indiscutable seront envisages. INFECTIONS A CLOSTRIDIUM DIFFICILE Ce sont les plus rares en p~diatrie mais les particularit~s de ce germe et leur rarefY, m~.me chez * Communication pr~sent~e Iors de la 8 ~mejoum&e de Pathologie Infectieuse P~diatrique, Groupe de Pathologie Infectieuse de l'Enfant, tenue le 24 mai 1991 ~, Paris, sous le patronage de la Soci~t& Frangaise de P~diatrie et de la Soci~t~ de Pathologie Infectieuse de Langue Fran~.aise. ** Centre de P~diatrie Edmond Lesn&. H6pital Trousseau, 26 av. du Dr Arnold-Netter, 1:-75571 Paris cedex 12. renfant, suscitent actuellement beaucoup d'int~r~t. Clostridium difficile est une bact~rie ana~robie non invasive qui synth~tise 2 toxines: A ou ent~rotoxine, B ou cytotoxine. La d~monstration de son rble clans les colites repose sur risolement du germe et l'~tude de reffet cytopathog~ne de sa toxine B en culture cellulaire (26). Chez radulte, le C. dlfficile est l'agent de la colite pseudo- membraneuse associ~e ~ l'antibiothb~rapie ou survenant sur les terrains immuno-d~prim~s et des diarrhb~es associ~es aux antibiotiques, avec ou sans colite non sp(~cifique. Chez renfant, il existe un contraste frappant entre le taux de colonisation important par le Clostridium avant 18 mois et la tr~s grande raret~ des manifestations cliniques lib~es ce germe. Durant les premieres semaines de vie, certaines ~tudes ont montr~ un taux d'infestation qui peut atteindre 63 % (9). Tullus et al (28) font ~tat d'un taux de 25 % entre 6 semaines et 6 mois contre 3 % seulement ~ 18 mois. Cependant les souches productives de cytotoxine sont tr~s rares 6 semaines et 6 mois, alors que plus de la moiti~ d'entre elles le deviennent apr~s 6 mois. L'allaite- ment maternel diminue de fa~on significative le taux de colonisation (9). En contraste les colites pseudo- membraneuses sont exceptionnelles. Cooperstock (9) n'en trouve que 53 cas document,s dans la littb~rature anglaise et seulement 19 cas apr~s 2 ans, excluant une co'fncidence avec un portage courant. N~anmoins des colites pseudo-membra- 562

Physiopathologie des colites bactériennes

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Page 1: Physiopathologie des colites bactériennes

M~d Mal Infect. 1991 ; 21 : 562-6

Physiopathologie des colites bact riennes *

J.J. BAUDON'"

RESUME Les bact~ries peuvent d~terminer une colite par deux m~canismes diff~rents, run toxinique, rautre ent~ro-invasif. La grande majorit~ des colites est due ~ un

m~canisme invasif. Le caract~re entb.ro-invasif d'une bact~rie paraIt sous la d~pendance de facteurs g~n~tiques d'origine plasmidique, pour les Shigelles et les Colibacilles ent~ro-invasifs. Les Salmonelles p~n~trent dans les ent~rocytes du colon et de l'il~on, of~ elles d(~terminent un infiltrat inflammatoire. A partir de I/~ elles peuvent diss~miner clans rorganisme. Une diarrh~e s~cr~toire est associ~e ~ rinvasion. Les Shigelles et les Colibacilles ent~ro-invasifs se multiplient/~ l'int~rieur des cellules ~pith~liales du colon d~terminant des ulcerations et des abc~s cryptiques. Ils ~laborent une ou plusieurs toxines. Invasion et ent~rotoxicit~ sont la cause d'un syndrome dysent~rique et d'une diarrh~e s~cr~toire d'origine j~junale. Les Campylobacter peuvent d~terminer une diarrh~e sanglante, avec ulcerations aigu~s. Cependant, cette constatation est loin d'~.tre la r~gle. Ces germes agissent par l'interm~diaire d'une ent~rotoxine cholera-like et d'une cytotoxine. Yersinia enterocolitica provoque une diarrh~e ent~ro-invasive mais les donn~es exp~rimentales manquent pour le d~montrer. La physiopathologie explique aussi les ~checs du traitement antibiotique qui agit alors m~me que les destructions ~pithb.liales, les formes intra-cellulaires, raction des toxines, ont d~j~ pris place.

Mots-cl~s :Colite - Diarrh~e bact~rienne - Physiopathologie - P~diatrie.

Les bact~ries susceptibles de d~terminer une colite peuvent agir par deux processus diff~rents ne s'excluant pas run l'autre : toxinique et ent~ro- invasif. Le premier est bien document~ pour certaines bact~ries dont la toxine est isol~e, seulement suspect~ pour d'autres. Le second est d~montr~ du point de rue anatomopathologique et expb~rimental mais les m~canismes de l'ent~ro- invasion sont encore peu connus. La physio- pathologie des colites bact~riennes explique les manifestations cliniques et permet de comprendre les alias du traitement antibiotique.

T o u s l e s germes provoquant une diarrh~e chez renfant n'ont pas un p01e d'action colique ; seuls ceux d'entre eux qui agissent ~ ce niveau de fat;on indiscutable seront envisages.

INFECTIONS A CLOSTRIDIUM DIFFICILE

Ce sont les plus rares en p~diatrie mais les particularit~s de ce germe et leur rarefY, m~.me chez

* Communication pr~sent~e Iors de la 8 ~me joum&e de Pathologie Infectieuse P~diatrique, Groupe de Pathologie Infectieuse de l'Enfant, tenue le 24 mai 1991 ~, Paris, sous le patronage de la Soci~t& Frangaise de P~diatrie et de la Soci~t~ de Pathologie Infectieuse de Langue Fran~.aise. ** Centre de P~diatrie Edmond Lesn&. H6pital Trousseau, 26 av. du Dr Arnold-Netter, 1:-75571 Paris cedex 12.

renfant, suscitent actuellement beaucoup d'int~r~t. Clostridium difficile est une bact~rie ana~robie non invasive qui synth~tise 2 toxines : A ou ent~rotoxine, B ou cytotoxine. La d~monstration de son rble clans les colites repose sur risolement du germe et l'~tude de reffet cytopathog~ne de sa toxine B en culture cellulaire (26). Chez radulte, le C. dl f f ic i le est l 'agent de la colite pseudo- membraneuse associ~e ~ l'antibiothb~rapie ou survenant sur les terrains immuno-d~prim~s et des diarrhb~es associ~es aux antibiotiques, avec ou sans colite non sp(~cifique. Chez renfant, il existe un contraste frappant entre le taux de colonisation important par le Clostridium avant 18 mois et la tr~s grande raret~ des manifestations cliniques lib~es

ce germe. Durant les premieres semaines de vie, certaines ~tudes ont montr~ un taux d'infestation qui peut atteindre 63 % (9). Tullus et al (28) font ~tat d'un taux de 25 % entre 6 semaines et 6 mois contre 3 % seulement ~ 18 mois. Cependant les souches productives de cytotoxine sont tr~s rares

6 semaines et 6 mois, alors que plus de la moiti~ d'entre elles le deviennent apr~s 6 mois. L'allaite- ment maternel diminue de fa~on significative le taux de colonisation (9). En contraste les colites pseudo- membraneuses sont exceptionnelles. Cooperstock (9) n'en trouve que 53 cas document ,s dans la littb~rature anglaise et seulement 19 cas apr~s 2 ans, excluant une co'fncidence avec un portage courant. N~anmoins des colites pseudo-membra-

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neuses ont ~t~ d~crites au cours de la maladie de Hirschsprung en dehors de toute antibioth~rapie avant l'intervention et meme Iongtemps apr~s (6) et d'autre part chez le pr~matur~ (25). En dehors de la colite pseudo-membraneuse, la colonisation par C. difficile et sa toxine ne paraissent pas associ~es

une plus grande fr~quence de diarrh~es (9) sauf dans une ~tude entre 6 et 11 mois (28). Son r61e possible a ~galement ~t~ ~voqu~ au cours des diarrh~es chroniques (9) et des diarrh~es survenant en oncologie p~diatrique, bien que certains malades non diarrh~'iques excr~tent la toxine (7).

prostaglandines, activateurs de rAMP cyclique, pourraient Jouer un r61e. Certaines souches produisent une ent~rotoxine cholera-like (24) mais la cause essentielle de la perte hydro~lectrolytique est probablement le d~faut d'absorption (3).

Au total, les Salmonelles provoquent surtout une diarrh~e aqueuse et la presence ~ventuelle de sang dans les selles est li~e ~ une colite non ulc~reuse comme il a ~t~ constat~ en sigmo'fdoscopie (23).

INFECTIONS A SHIGELLES

INFECTIONS A SALMONELLES

Les salmonelles animales appar t iennent aux groupes B, C, D et E. Elles sont plus fr~quentes avant 5 arts et surtout avant 12 mois. La source de contamination essentielle provlent des aliments contamin~s, viandes et surtout volailles, qui constituent le plus vaste r~servoir, rinfestation ~tant favoris~e par l'antibioth~rapie (15). La quantit~ de germes n(~cessaire pour d~terminer une diarrh(~e est importante de 10 s ~ 109.

Les salmonelles envahissent l'il~on et le colon (13, 23). Initialement, les bact(~ries adherent ~ l'~pi- thulium et endommagent la bordure en brosse puis p~n~trent clans les ent~rocytes par un m~canisme de pinocytose. Exp~rimentalement, sur anse il~ale isol~e de lapin (13), rinvasion survient /~ la partie sup~rieure des villosit~s sans destruction b.pith~liale. Tr~s rapidement, des areas de bact~ries sont observes dans le chorion, accompagn~s d'un infiltrat inflammatoire. Les bact~ries se multiplient l'int~rieur des cellules et clans le tissus interstitiel et d~terminent une transformation blastique des lymphocytes. On les trouve ~galement dans les polynucl~aires, dans la lumi~re de l'intestin, r~pith~lium et le chorion, r~parties de fa~on diffuse. La plupart des villosit~s sont ~mouss~es, gonfl~es et le chorion est oed~mateux et massivement infiltr~ de polynucl~aires. L'~pith~lium villositaire est cubo'Ide mais les ulcerations sont rares. Au total, /~ l'inverse des Shigelles, les Salmonelles ne se multiplient pas dans les cellules ~pith~liales mais dans le chorion (13). Les formes intra-cellulaires pourraient jouer un r61e dans la dissemination des salmonelles expliquant la relative fr~quence des bact~ri~mies, de l'orclre de 6,5 % (27), et la possibilit~ de Iocalisations secondaires . La p~n~tration dans la muqueuse est une condition pr~alable pour d~terminer une s~cr~tion de fluide mais toutes les souches invasives ne d~terminent pas une s~cr~tion (13). La stimulation de la s~cr~tion active de chlore combin~e ~ une inhibition de rabsorption du sodium pourrait rendre compte de la diarrh~e (12). Cependant, le m~canisme de cette s~cr~tion n'est pas c la i rement ~tabli ; les

Les Shigelles sont divis~es en 4 groupes. S. sonneL et S./lexneri rendent compte de la majorit~ des infections clans les pays d~velopp~s. S. dysenteriae et S. boydii sont rares. Dans les pays d~velopp~s. S. dysenteriae et S. boydii sont rares. Dans les pays en voie de d~veloppement S. flexnerl est resp~ce dominante avec des ~pid~mies de S. dysenterlae type l (14). Les Shigelles sont g~n~tiquement identiques aux colibacilles. Ces germes sont une cause importante de diarrh~e ~ l'~chelon mondial, en particulier chez les enfants d'age pr~scolaire. La maladie est diss~minb.e par la voie f~cale-orale, habituellement par contact direct avec un sujet infectS. La transmission peut ~galement provenir des aliments ou de l'eau et, dans les pays industrialisb.s, de petites ~pid~mies sont possibles par contamination de cuisines collectives (14). Les Shigelles sont hautement infectieuses : 10 ~ 100 germes peuvent d~terminer une diarrh~e (16). La reconnaissance et le contr61e des infections /~ Shigelles peuvent ~.tre renclus difficiles en raison de ce faible inoculum, d'infections occultes, du temps de portage prolong~ et ~ rinverse de leur survie br~ve dans les selles.

Uinvasion est le m~canisme essentiel de leur processus pathog~nique. II peut ~tre d~montr~ par la production d'une k~rato-conjonctivite chez le cobaye (test de S~r~ny) et sur cultures cellulaires Hela. II existe au moins 3 facteurs n~cessaires pour d~terminer la maladie. Uadh~sion/~ l'ent~rocyte est la premiere ~tape qui n~cesslte un antigone lipopolysaccharide de paroi (3). L'envahissement des ent~rocytes du colon et parfois de ril~on terminal par un ph~nom~ne comparable ~ la phagocytose est le second. Cette propri~t~ est sous la d~pendance d'un g~ne plasmidal (3). Les Shigelles p~n~trent rarement dans le chorion sous- jacent et leur proliferation ~ l'int~rieur des cellules est la 3 ~me ~tape. Parmi celles-ci la toxine de Shiga ou Verotoxine est ragent biologique connu le plus toxique (8), responsable indirectement du syndrome h~molytique et ur~mique. Neurotoxique par voie IV elle d~termine une paralysie par atteinte m~dullaire secondaire /~ des h~morragies microvasculaires et au niveau de l'intestin un oed~me, des h~morragies

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et ulcerations alors que ses effets sont moins nets par voie locale sur anse il~ale isol~e de lapin. Elle est cytotoxique pour certaines lign~es cellulaires (cellules KB, HeLa, Vero) reals non pour toutes. Enfin, elle est entb~rotoxique, d~terminant une s~cr~tion hydro~lectrolytique au niveau du j~junum chez le singe contamin~ par voie orale (22) possi- blement par activation de l'ad~nylcyclase (8). Ces 3 activit~s sont dues ~ une seule prot~ine. Ce- pendant, chez le singe Rhesus, ringestion de S. flexneri (22) a des effets variables, provoquant un syndrome dysent~rique, ou une diarrh~e secr~- toire ou les deux ~ la fois. Seule rinjection intra- coecale d~termine r~guli~rement une dysenterie (8). Histologiquement, les animaux dysent~riques ont une colite aigu~ avec de nombreuses Shigelles dans les cellules ~pith~liales et une r~action inflammatoire du chorion alors qu'il n'existe que des l~sions histologiques minimes au niveau du gr~.le of~ les germes sont Iocalis~s dans la lumi~re (22).

Ces donn~es exp~rimentales rendent compte des sympt0mes cliniques observes : syndrome dysent~rique non seulement dQ i~ S. dysenteriae mais ~galement ,9. f lexneri (11) of~ la diarrh~e constante est accompagn~e de sang dans les selles une fois sur deux, douleurs abdominales, tenesme, fi~vre et vomissements. En endoscopie la muqueuse est n~cros~e par endroits, la rupture des abc~s d~termine des ulcerations (14). Certaines formes ~voquent une recto-collie h~morragique, d'autres ont plus une diarrh~e aqueuse abondante qu'une dysenterie. Enfin, les convulsions sont relativement fr~quentes au cours des infections ~ ShigeUes (2). Souvent, elles ~voquent une crise hyperpyr~tique banale, parfois une v~ritable enc~phalite faisant discuter le r01e de la neurotoxine.

I N F E C T I O N S A COLIBACILLES

Parmi les diff~rents types de Colibacilles diarrh~i- g~nes (18, 19) deux ont un p61e d'action colique : - L e s colibacilles ent~ro-invasifs (EIEC) sont pratiquement identiques aux Shigelles par leurs caract~res g~n~tiques, leur pouvoir invasif, leur absence de mobilitY, leur toxine et leur clinique (18, 19). - Les colibacilles ent~roh~morragiques sont de s~rotype O 157 H7 et plus rarement 026 : HI i (19). lls synth~tisent des cytotoxines actives sur ce]]ules HeLa et Vero. L'une d'elles est apparem- ment identique ~ la toxine de Shiga (Shiga-like toxine 1 ou Verotoxine 1). Beaucoup de souches ~laborent une seconde cytotoxine ou Verotoxine 2) qui n'est pas neutra]is~e par un antiserum antitoxine de Shiga. A l'inverse des EIEC, la plupart des souches ont des fimbriae, dont la synth~se est command~e par un plasmide, qui permettent leur attachement aux ent~rocytes. La diarrh~e provo-

qu~e par ces colibacilles est aqueuse puis sanglante mais sans leucocytes (19) n'~voquant pas la presence d'ulc~rations.

I N F E C T I O N S A CAMPYLOBACTER

Les diarrhb~es /~ Campylobacter sont dues aux esp~ces C. jejuni et C. coll. Dans les pays occi- dentaux, elles arrivent en 2~me position apr~s les Salmonelles, avant les autres germes. La preva- lence semble plus ~lev~e dans les pays en vole de d~veloppement (5). Le r~servoir est constitub~ par les animaux. La contamination se fait par vole di- gestive par rinterm~diaire de reau ou des aliments mais la transmission interhumaine est ~galement possible (4). Les sujtes diarrh~iques h~bergent 106 109 germes par gramme de selle (5). Les l~sions intestinales int~ressent non seulement le colon mais rilb.on et le j(~junum. Macroscopiquement, la muqueuse est oed~mateuse et h~morragique de fagon diffuse et rhistologie r~v~le une colite non sp~cifique avec un infiltrat inflammatoire de poly- nucl~aires neutrophiles et ~osinophiles et de cellules mononucl~es dans le chorion. Dans l'~pith~lium, il existe une perte de mucus, des abc~s cryptiques et des ulcerations (5). Ces aspects peuvent ~voquer une colite ulc~reuse ou une maladie de Crohn, mais dans d'autres cas, raspect histologique est identique

celui des colites ~ Salmonelles ou Shigelles.

L'affinit~ des Carnpylobacter pour le mucus explique que ces bact~ries colonisent rintestin de nombreux animaux et de l'homme (10). Certaines souches plus volontiers pathog~nes pour rhomme se fixent sur les ent~rocytes bien que d~pourvues de pill, proba- blement grace ~ une adh~sine. Pour expliquer leur pouvoir pathog~ne, un m~canisme d'invasivit~ a ~t~ ~voqu~ mais le test de S~r~ny est n~gatif et dans les cultures cellulaires infect~es les bact~ries intra- cellulaires sont rares et incapables de se multiplier. La cause des l~sions de la muqueuse n'est donc pas encore ~lucid~e. Des cytotoxines ou ent~rotoxines pourraient jouer un role (10). Une ent~rotoxine, cholera-like en particulier a ~t~ raise en ~vidence chez certaines souches (4).

I N F E C T I O N S A YERSINIA

Les diarrh~es ~ Yersinia sont dues habituellement/~ '11. enterocolitica. Ce germe pourrait ~.tre en cause dans environ 3 % des diarrh~es (21). Bien que les Yersinia puissent ~.tre cultiv~es ~ partir de reau ou des aliments, la source de la contamination est loin d'etre toujours prouv~e (21). Une contagion inter- humaine est ~galement possible. Les caract~res cliniques de la diarrh~e avec du pus, du mucus et du sang sugg~rent une diarrh~e de cause invasive et peuvent ~voquer aussi une maladie inflammatoire du

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tube digestif. Chez certains pat ients les manifes- tat ions cliniques d 'une ad~nite m~sent~rique en imposent pour une appendicite. Enfin, des manifes- rations teUes que arthrite, myocardi te , conjonc- tivite, ~ ry th~me noueux, plus f r~quentes chez radulte que chez renfant , sugg~rent une maladie auto immune (17). Dans toutes les formes cliniques, le s~rodiagnostic consti tue une aide majeure au diagnostic si la coproculture est n~gative.

La maladie peut ~.tre reproduite de fagon exp~ri- menta le chez la souris et le caract~re invasif est

• d~montr~ sur cellules HEp-2 et HeLa in vitro bien que le test de S~r~ny salt n~gatif (20). Certaines souches ~laborent une entb~rotoxine qui ressemble la toxine ST d'E. call (20).

COLITES BACTERIENNES El" ANTIBIOTHERAPIE

Le t r a i t ement des colites bac t~r iennes devrait , en toute logique, ~.tre rant ibioth~rapie syst~ma-

tlque. Cependant , il existe de nombreux ~cueils ce t ra i tement . Le p remie r est rex ls tence d 'une r~sistance acquise d'origine plasmidiale d'un nora- bre cro issant de bact~ries , en par t icul ier de Salmonelles. Le second est que la sensibilita d'un ge rme in vitro ne signifie pas obl iga to l rement efficacit~ clinique. La physiopathologie explique en par t i e les ~checs du traitement. En premier lieu, les l~sions sont d~j~ const i tu tes Iorsque le t rai tement est institu~. D'autre part , les antibiotiques n'agis- sent pas toujours de fac;on efficace sur les formes intracellulaires. En d~primant la f lare intestinale normale , ils abaissent son effet de barri~re et p e u v e n t s~ lec t ionne r d a v a n t a g e les souches r~sistantes. Ce t effet est par t icu l i~rement da- montr~ pour les Salmonelles pour lesqueUes on a pu sugg~rer, dans certains cas, un effet n~faste des antibiotiques (1).

Enfin, la plupart de ces diarrh~es ~voluent vers la gu~rison sous t ra i tement symptomat ique seul. Ces cons t a t a t i ons m o n t r e n t la n~cessi t~ d '~tudes randomis~es dont on conna~t la difficultY.

SUMMARY : PHYSIOPATHOLOGY OF BACTERIAL COLITIS

Bacteria may cause a colitis by two different mechanisms ; by elaboration of enterotoxin or by invasiveness. The mos t of bacterial colitis is due to invasion. The responsiveness of this mechanism could be plasrnid mediated. Salmonella enter the enterocytes of colon and ileum ; they cause an inf lammatory cel lular multipl ication. They can spreed through the body. A secretory diarrhea is associated to this invasiveness. Sh ige l l a and entero invasive E. c a l l grow inside epithel ial cells of the colon. They produce ulcerative lesion and abscesses. One or more t o x i n s are produced. Invasiveness and entero toxins are responsive of the dysenteric syndrome. C a m p y l o b a c t e r may cause a bloody diarrhea and acute ulcers. They act by a cholera-like toxin and cytotoxine. Yersinia enterocoli t ica is a cause o f acute en tero lnvasive diarrhea, but exper imen ta l data lack. The antibiot ic fai lure is exp la ined by these di f ferent mechanisms which are still in progress.

K e y - w o r d s : Colitis - Bacterial diarrhea - pathogenesis - Pediatrics.

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k. 3 CONFERENCE EUROPEENNE SUR

ET LE TRAITEMENT DE L'INFECTION A VlH

[ LES ASPECTS CLINIQUES [

PARIS - 12, 13 m a r s 1 9 9 2

9 '~ 9,9~9 0

T H E M E S SCIENTIFIQUES

I. CYTOMEGALOVIRU5 2. AUTRES INFECTIONS VIRALES

3. AFFECTIONS DU TUBE DIGESTIF 4. INFECTIONS FUNCIQUES

5. INFECTIONS A MYCOBACTERIES ET AUTRES BACTERIES 6. ATTEINTES NEUROLOCIQUES ET NEUROMUSCULAIRES

7. PNEUMOCYSTIS CARINII 8. TOXOPLASMA GONDII

9. TUMEURS I O. PROPHYLAXIE DES INFECTIONS OPPORTUNISTES

I 1. INFECTION A WH : HISTOIRE NATURELLE ET MARQUEURS BIOLOCIQUES

12. TRAITEMENT DE L 'INFECTION A VIH : ANTIRETROVIRA UX ET IMMUNOTHERAPIE

SECRETARIAT ADMINISTRATIF A.I.R.M.E.C. - 2, boulevard du Montparnasse 75015 Paris

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