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DU Criminalistique – Toxicologie Judiciaire Pharmacien en Chef Olivier ROUSSEL – département TOXICOLOGIE Toxicologie judiciaire Le pharmacien en chef ROUSSEL Olivier, Pharm.D., Ph.D. Expert inscrit près la Cour d'Appel de Versailles Chef du département TOXICOLOGIE Institut de Recherche Criminelle de la Gendarmerie Nationale

Plan - Informations et Actualités en Sécurité Physiquefrenchkey.fr/DUCRIM2017/SEMAINE02/Toxicologie_2017.pdf · –Analyses • Des produits : présence et dose • Des prélèvements

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DU Criminalistique – Toxicologie Judiciaire

Pharmacien en Chef Olivier ROUSSEL – département TOXICOLOGIE

Toxicologie judiciaireLe pharmacien en chef ROUSSEL Olivier, Pharm.D., Ph.D.

Expert inscrit près la Cour d'Appel de Versailles

Chef du département TOXICOLOGIE

Institut de Recherche Criminelle de la Gendarmerie Nationale

Plan

1. Généralités

2. La toxicologie judiciaire

3. Caractérisation d’un toxique

4. Les stupéfiants, une classe particulière

5. Caractérisation d’un effet toxique

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DU Criminalistique – Toxicologie Judiciaire

Pharmacien en Chef Olivier ROUSSEL – département TOXICOLOGIE

Généralités

Toxicologie

• Définition : (Le Robert)

Science qui étudie les poisons (détection,

effets, remèdes)

• Terme largement employé :

– toxicologie clinique, toxicologie

expérimentale, toxicologie alimentaire, etc.

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Poison

• Définition : (Le Robert)

Substance capable de troubler gravement ou d’interrompre les fonctions vitales d’un organisme, utilisée pour donner la mort

• Dans Le Robert :

toxique = poison

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Pour tout un chacun

• Un toxique provoque des effets à faible

dose

• Les aliments non corrompus ne sont pas

considérés comme des toxiques

• Or, en grande quantité, même l’eau est

mortelle par voie digestive

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Paracelse (1493-1541):

Alchimiste, astrologue, médecin suisse

Alle Dinge sind Gift, und

nichts ohne Gift; allein die

Dosis macht das ein Ding

kein Gift ist.

Toutes les choses sont

poison, et rien n’est sans

poison ; seule la dose fait

qu’une chose n’est pas un

poison.

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Classification de HODGE et STERNER

DL50 orale (rat) Indice de toxicité Exemple

Jusqu'à 1 mg/kg 1 = extrêmement toxique Toxine botulinique, dioxine

De 1 à 50 mg/kg 2 = hautement toxique Cyanure, digitaline,

amphétamine

De 50 à 500 mg/kg 3 = modérément toxique Caféine, héroïne, cocaïne

De 500 à 5 000 mg/kg 4 = légèrement toxique Tétrahydrocannabinol, sel de

table (NaCl), bisphénol A,

éthanol, aspirine

De 5 000 à 15 000 mg/kg 5 = presque pas toxique Vitamine C

Plus de 15 000 mg/kg 6 = relativement inoffensif Eau

Toxicité

• Phénomène toxique apparait si le toxique

est présent :

– En quantité suffisante

• Attention aux susceptibilités individuelles

– Sur le site d’action

• Certaines substances ne sont toxiques que sur

des organes cibles

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Mécanismes d’action des toxiques

• Action directe en raison de propriété physicochimique (sans organe cible)– Caustique et corrosif destruction des tissus,

ex. : soude caustique

• Action par le biais d’un mécanisme physiologique (avec organe cible)– Exagération d’une activité pharmacodynamique,

ex. : opiacés– Formation d’un composé toxique in situ,

ex. : paracétamol (benzoquinone imine)– Altération d’une fonction physiologique,

ex. : eau, azote

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Pharmacien en Chef Olivier ROUSSEL – département TOXICOLOGIE

Toxicologie judiciaire

La toxicologie judiciaire

• Discipline ancienne

– Mathieu Orfila

(1787-1853),

médecin et chimiste

• Affaire Mercier (1839)

• Affaire Lafarge (1840)

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Toxicologie judiciaire

Extraits du traité de toxicologie et de chimie judiciaire(1868, Alphonse Chevallier [1793-1879])

« La toxicologie est la partie dogmatique de la chimie et de la médecine qui traite des poisons … »

« La médecine légale tire de la toxicologie de vives lumières … »

L’analyse toxicologique est le principal examen post-autopsique

« … la démarcation entre les médicaments et les poisons n’est donc ni précise ni même possible, la dose, l’idiosyncrasie, la progression due à l’habitude de l’usage décident de l’action médicamenteuse ou toxique d’un même corps … »

Dualité d’expertises

• Toxicologie analytique (=dosage) [~chimie]– Analyses

• Des produits : présence et dose

• Des prélèvements humains : devenir du toxique dans l’organisme

• Toxicologie médicolégale (=interprétation) [~médecine]– Étude des résultats

• Des produits : dangerosité

• Des prélèvements humains : effet du toxique sur l’organisme

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Illustration de la dualité

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Dosage d’héroïne

– Poudre saisie

– Résidu dans la seringue

– Prélèvements

autopsiques

Interprétation

– Dangerosité de la poudre

– Usage de la seringue

– Implication de l’héroïne

dans le décès

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• L’analyse de produits de

saisie, d’aliments, de

boissons, etc.

caractérisation des

toxiques voire d’un usage

• L’analyse des matrices

biologiques

caractérisation d’une

exposition voire d’un effet

Répartition des missions

• Au sein du département toxicologie de

l’IRCGN (à titre d’exemple) :

– Une unité d’expertise (UE) « stupéfiants »

pour les produits de saisie caractérisation des toxiques

– Une UE « matrices biologiques »

caractérisation d’une exposition, d’un effet toxique voire

caractérisation des toxiques

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Les analyses de toxicologie judiciaire

sont des compromis entre :

• Les besoins de la justice

– Enquêteurs et magistrats

– Contraintes légales

• Les possibilités de la

science

– Limites analytiques

– Limites liées à

l’échantillonnage

– Limites physiologiques

Nous ne trouvons que ce que nous cherchons !

Préambule

• Dans les parties qui suivent :

– Caractérisation d’un toxique

– Caractérisation d’un effet toxique

• Illustrations des principales missions et

possibilités d’analyse d’un laboratoire de

toxicologie (stupéfiants et matrices

biologiques)

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Pharmacien en Chef Olivier ROUSSEL – département TOXICOLOGIE

Caractérisation d’un toxique

Missions (1/7)

• Rechercher les substances

stupéfiantes/toxiques dans

– Une poudre (pulvérulente ou comprimée)

– Des débris végétaux ou résines

– Des champignons

– Un liquide, etc.

Caractérisation de la nature du produit

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Missions (2/7)

• Doser les substances stupéfiantes et

rechercher les produits de coupage dans

une poudre (pulvérulente ou comprimée)

Niveau du trafic

– Si concentrée : tête

– Si diluée : usager

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Missions (3/7)

• Comparer les compositions chimiques

– De deux produits stupéfiants

Rapprochement de scellés

– D’un produit stupéfiant avec les profils

enregistrés dans une base de donnée

Profilage et recherche d’une filière

d’approvisionnement

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Missions (4/7)

• Rechercher toute trace de substances stupéfiantes/toxiques sur– Des seringues usagées

– Des cupules usagées

– Des pailles, etc.

• Mettre en évidence un usage de stupéfiants/toxiques et des objets appartenant à de potentiels consommateurs

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Missions (5/7)

• Rechercher toute

trace de substances

stupéfiantes sur

– Des billets de banque,

une trieuse de billet,

une balance, un

couteau, etc.

– Un véhicule, des

contenants de

transport (sacs,

valises, etc.)

• Mettre en évidence un

lien entre un trafic de

stupéfiants et des objets

appartenant à des

inculpés

Missions (6/7)

Identifier la forme médicamenteuse saisie

– Exercice illégal de la médecine ou de la pharmacie

– Incitation à la consommation de stupéfiant

– Trafic de produits dopants ou de faux médicaments

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Missions (7/7)

• Rechercher la présence de toxiques dans une boisson, un aliment, un verre ou une assiette, etc.

• Déceler un empoisonnement, une soumission chimique ou leur tentative

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Caractéristiques

• Substance en quantité « importante »

– Analyse facilitée

– Quelques milligrammes ou microgrammes

suffisent (invisibles à l’œil nu)

• Emploi de techniques analytiques

« classiques »

– Chromatographie en phase gazeuse

– Chromatographie en phase liquide

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DU Criminalistique – Toxicologie Judiciaire

Pharmacien en Chef Olivier ROUSSEL – département TOXICOLOGIE

Les stupéfiants,une classe particulière

Les stupéfiants

• Pourquoi une classe à part ?

– Fréquence des analyses :

• Recherche d’infractions à la législation sur les

stupéfiants : trafic, vente, usage, etc.

• Confirmation de conduite automobile après usage

de stupéfiants

• Recherche des causes de la mort : overdose

– Statut spécifique

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Les stupéfiants

• Stupéfiants (issue des 4 catégories CSP)

– Substances listées par arrêté (22 février 1990)

– Liste issue (en partie) de conventions internationales

– Inscription dans la liste = seul point commun

– Pas de définition

– Substances de propriétés diverses

– Classement en raison de leur potentiel toxique et/ou

addictif

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Les stupéfiants

• Plusieurs millions de français (4-6) ont

expérimenté ces substances

• Usage avec conséquences en raison :

– Effets psychiques et somatiques, toxicité

– Dépendance

– Tolérance

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Classification des psychotropes selon

Pelicier & Thuillier (1991)

• Les dépresseurs du système nerveux central :

– Ralentissent le fonctionnement du système nerveux

– Provoquent souvent une dépendance physique

– Peuvent provoquer une dépression respiratoire

Les opiacés (morphine, héroïne…), le GHB

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Classification des psychotropes selon

Pelicier & Thuillier (1991)

• Les stimulants :

– Stimulent le fonctionnement du système nerveux

– Provoquent souvent une dépendance– Peuvent provoquer, à long terme, la paranoïa

ou des dépressions graves

Amphétamines, cocaïne, ecstasies, cathinones

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Classification des psychotropes selon

Pelicier & Thuillier (1991)

• Les hallucinogènes ou perturbateurs :

– Perturbent le fonctionnement du système nerveux et la perception de la réalité

– Peuvent, à long terme, modifier durablement la personnalité du consommateur (syndrome post hallucinatoire persistant, etc.)

Cannabis et les cannabinoïdes de synthèse, les solvants, le LSD, la psilocybine, la kétamine, etc.

Les dépresseurs du SNC

• Héroïne

– Issue de l’acétylation

de l’opium (morphine)

• Héroïne consommée

– Coupée (5 à 15%

d’héroïne)

– Injectée voire sniffée

ou inhalée

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Héroïne

• Effet de flash puis léthargie

• Intense dépendance

manque

• Tolérance

augmentation des doses

• Surdosage

dépression respiratoire

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Les dépresseurs du SNC

• Autres opiacés ou morphinomimétiques consommés :

– Buprénorphine et méthadone• Traitement de substitution de l’héroïne

• Détournement d’emploi voire initiation

– Morphine• Plus rare : soit médicament, soit opium ou

rachacha

– Codéine • Détournement d’emploi

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Les dépresseurs du SNC

• GHB (acide Gamma HydroxyButyrique)

– Utilisé en médecine : anesthésique ou traitement de

la narcolepsie

– Dopant, drogue récréative, drogue de soumission

• Usage de ses précurseurs non stupéfiants :

– GBL (Gamma ButyroLactone)

– 1,4 BD (1,4 ButaneDiol)

• Nombreux surdosages hospitalisation, décès

Les stimulants

• Cocaïne– Extraite des feuilles de

cocaïer

– Poudre (sel)

– Rocher : « crack »(base)

• Consommée– Machée

– Prisée

– Injectée

– Inhalée

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Les stimulants

• Cocaïne :

– Processus idéique accéléré, euphorie,

sentiment de puissance (intellectuelle et

physique)

• Mais :

– Troubles psychiques, levées des inhibitions

avec mise en danger

– Perforation nasale, neurotoxicité

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Les stimulants

• Amphétaminiques :

– Stimulants et/ou entactogènes (voire certains

hallucinogènes)

– En France, consommation d’ectasies plus

importante qu’amphétamine ou

méthamphétamine

– Nombreux « NPS » :

• Méphédrone et autres cathinones (~cocaïne-like)

• Benzylpipérazine et autres pipérazines

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Les stimulants

• Amphétaminiques

– Substances synthétiques

• Consommé en poudre

– Ingérée, sniffée, inhalée

• Risques :

– Hyperthermie même avec un comprimé

– Déshydratation sévère

– Mise en danger

– Troubles de la personnalité

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Les hallucinogènes

• Cannabis sativa– Δ-9-tétrahydrocannabinol

– Herbe (~ 15%)

– Résine (~ 22%)

– Huile (40 à 80%)

• Altérations somatiques & psychiques(psychomotricité, sens, éveil)

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Les hallucinogènes

• Cannabis

– Pas de décès brutal

direct (peut être

cardiopathie ?)

– Décès indirects

• Défenestrations

• Accidents de la route

– De nombreux effets

chroniques

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Les hallucinogènes

• LSD 25

– Hémisynthétique à partir ergot

de seigle

– Très actif, dose en µg

– Ingéré voire prisé ou fumé

• Hallucinations puissantes

– Synesthésie

• Accident psychiatrique

• Décès indirect

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Les hallucinogènes

• Autres hallucinogènes

– Champignons (psilocybine)

– Cactus (mescaline)

– Nombreuses plantes

exotiques

– Kétamine

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