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Plan : Introduction : qu’est ce que la sociologie ? Chap. 1 : la construction d’une science nouvelle. Chap. 2 : la sociologie, science de la société ou science de l’action sociale ? Chap. 3 : la régulation sociale. 1) Une discipline difficile à définir. Il est difficile de donner une définition précise de la sociologie qui puisse être accepté par tous les sociologues pour plusieurs raisons : A) La sociologie ne s’occupe pas d’un domaine bien limité. Elle s’intéresse aux phénomènes sociaux et non pas aux facteurs psychologique individuel de nos comportement. D’autre discipline s’intéresse aussi aux phénomènes sociaux (par exemple comme l’histoire, l’économie, la démographie ou encore la linguistique) et du coup, les frontières entre disciplines sont ténus (ou minces, délicates) et plusieurs regards peuvent expliquer le même phénomène. B) 2 ème idée fausse de la sociologie. La notion de phénomène social qu’on peut considérer comme étant l’objet de la sociologie s’applique à des phénomènes très divers : il y a presque autant de sociologie spécialisé qu’il y a d’objet à étudier (exemple : la sociologie du sport, la sociologie du travail, la sociologie de la famille,…), presque tout est sociologique. Cette diversité des objets entraine une véritable variété de méthode e recherche utilisé par les sociologues (comme les sondages, les enquêtes,…) C) 3 ème idée fausse de la sociologie. 1

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Plan :

Introduction : qu’est ce que la sociologie ?

Chap. 1 : la construction d’une science nouvelle.

Chap. 2 : la sociologie, science de la société ou science de l’action sociale ?

Chap. 3 : la régulation sociale.

1) Une discipline difficile à définir.

Il est difficile de donner une définition précise de la sociologie qui puisse être accepté par tous lessociologues pour plusieurs raisons :

A) La sociologie ne s’occupe pas d’un domaine bien limité.

Elle s’intéresse aux phénomènes sociaux et non pas aux facteurs psychologique individuel de noscomportement.

D’autre discipline s’intéresse aussi aux phénomènes sociaux (par exemple comme l’histoire, l’économie,la démographie ou encore la linguistique) et du coup, les frontières entre disciplines sont ténus (ou minces,délicates) et plusieurs regards peuvent expliquer le même phénomène.

B) 2 ème idée fausse de la sociologie.

La notion de phénomène social qu’on peut considérer comme étant l’objet de la sociologie s’applique àdes phénomènes très divers : il y a presque autant de sociologie spécialisé qu’il y a d’objet à étudier(exemple : la sociologie du sport, la sociologie du travail, la sociologie de la famille,…), presque tout estsociologique.

Cette diversité des objets entraine une véritable variété de méthode e recherche utilisé par les sociologues(comme les sondages, les enquêtes,…)

C) 3 ème idée fausse de la sociologie.

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La sociologie se laisse difficilement cerner par des limites d’une définition claire car tous les sociologuesn’ont pas la même conception de la connaissance sociologique. Des dispositions théoriques les séparent ;il existe différent courant de la sociologie.

Le célèbre et la plus importante est celle qui sépare ceux qui pense et ceux qui ne pense pas que lasociologie peut se passer de prendre en considération les actions sociales et faits individuels pourcomprendre les faits sociaux.

C’est sur cette opposition que se sont construit les deux principaux paradigmes sociologiques (paradigmesociologiques : système d’explication qui donne la clé pour comprendre la réalité sociale sans en avoir faitla démonstration). :

- Le premier courant est l’Holisme

- Le deuxième courant est la sociologie individualiste.

On ne peut donc définir la sociologie, c’est donc une science sociale méconnue ou mal connue.

P. Berger est un sociologue qui, en 1973 à écrit un ouvrage pour essayer définir la sociologie en rappelantce qu’elle n’était pas : comprendre la sociologie (1973).

- Les sociologues ne sont pas des travailleurs sociaux car la sociologie n’est pas orientée vers un but précismais vers la compréhension.

- les sociologues ne sont pas des réformateurs de la société. On reconnait que la sociologie est à l’originede mainte réforme et l’origine de certain progrès sociaux ou autres mais la compréhension est une chose,l’application de la compréhension en est une autres. La difficulté est que les sociologues font souvent eux-mêmes la confusion.

Exemple : pour A. Compte, la sociologie devait être une science du progrès ; E. Lucain ne faisait pas desociologie si elle ne pouvait pas servir à réformer la société. Ils pensaient même que faire de la sociologie,c’était formuler une nouvelle morale.

- Les sociologues ne sont pas des statisticiens du social. Cette image vient des pays Anglo-saxons et desEtats-Unis au début du XXème siècle. Les chiffres et les données statistiques ne font pas de la sociologie,elles deviennent une sociologie qu’à condition qu’elles soient interprété c'est-à-dire inséré une théoriesociologique.

2) La sociologie comme la science des faits sociaux.

La sociologie, c’est la science des faits sociaux ou la science de la société. Le dictionnaire Petit Robertdéfini la sociologie comme étant l’étude des faits sociaux humains comme appartenant à un ordreparticulier et étudier dans leur ensemble ou à un haut degré de généralité.

Cette définition a un double avantage : non seulement elle situe la sociologie du coté des disciplinesscientifiques, mais elle délimite son objet de celui de la réalité sociale (ou des faits sociaux ou de lasociété).

Avant de réussir ce projet scientifique, la pensée politique a cherché à donner un sens à la société.

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3) Retour aux sources.

Pour F. János qui a écrit une histoire de la société (édité par Larousse en 1991), l’émancipation est lacondition de la société c'est-à-dire que dans les sociétés traditionnelles ou totalitaires, il n’y a pas de placepour la sociologie car la pensée ou l’action sont soumises entièrement à l’autorité du dictateur ou dusouverain. Dans de tel système, la réflexion sur la constitution de la société, les rapports entre lesindividus et les autorités, les réflexions sur les institutions,… tout cet ensemble de réflexions ne peut avoirpour but que de légitimer le droit de cette société. Hors, la sociologie ne peut naître que si les conditionssont réunies pour qu’elle puisse examiner librement la société.

La critique de l’absolutisme, la substitution de la pensée des lumières au droit divin vont participer àl’avènement de la sociologie. Si les grands penseurs des lumières (Rousseau, Lockes et Hobbes) peuventêtre présentés comme des précurseurs à la réflexion sociologique, c’est en fait dans les traits nouveaux dela civilisation qui se développe à partir de la fin du XVIIIème siècle que s’enracine la sociologie moderne.

La sociologie est la fille de deux révolutions : la révolution démocratique (de 1789) et la révolutionindustrielle.

Formes traditionnels de régime politique. La révolution industrielle, elle, transforme les conditions de vieet de travail des ouvriers en ce sens qu’elle bouleverse le rapport entre les villes et les campagnes. Cesdeux révolutions vont donc stimuler la réflexion sociale.

En réaction à ce sentiment de rupture engendré par les deux révolutions, la pensée sociale du XIX ème siècleva non seulement chercher à saisir le changement social qui s’opère et chercher à évaluer (ou quantifier)les conséquences de celui-ci. C’est pourquoi le XIXème siècle voit se développer les 1ères enquêtes de terrainqui permettent un puissant appareil du social.

En France, les études démographiques de F. Leplay (1806-1882) sur les familles ouvrières ou le rapport deL. Villermé (1782-1863) qui s’intitule l’état physique et moral des employé dans les manufacture decoton, de laine et de soie. Ces deux auteurs participent à cette logique de production de connaissance surle nouveau monde industriel en train d’émerger. Ces enquêtes empiriques tout comme les recensementsanticipent très clairement les méthodes de la sociologie empirique du XXème siècle.

Néanmoins, si les connaissances qu’on pu apporter de l’aide à l’action, à l’émergence de nouvelles lois,pour autant, ces travaux ne permettent pas l’émergence d’une nouvelle science car elles ne définissent pasla sociologie.

Il faudra donc attendre la 2ème partie du XIXème siècle pour voir émerger la sociologie moderne.

Malgré tout, la 1ère moitié du XIXème siècle a produit quelque grands classique de la pensée sociologiquec'est-à-dire des penseurs qui ont participés à l’élaboration d’une future sociologie en tant que scienceconsciente d’elle-même, en tant que science qui se distingue de la nature (la sociologie n’est pas unescience naturelle).

Les premiers penseurs ont tentés d’apporter des théories générales pour changer les sociétés humaines. Ilsconstituent donc un certain socle de la sociologie moderne et autant E. Durkheim que Max Weber, qui sontles fondateurs de la sociologie, n’ont pas oubliés de puiser chez les précurseurs.

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Trois auteurs du XIXème siècle occupent une place privilégiée dans le patrimoine de la culturesociologique. Leurs œuvres balisent le terrain pour la fondation d’une science autonome de la société :Alexis de Tocqueville (1805-1859), Auguste Comte (1798-1857) et Karl Marx (1818-1883) assisté de F.Engels (1820-1895)

I) -Alexis de Tocqueville : le penseur de la démocratie.En quoi Alexis de Tocqueville est-il un inspirateur de la pensée sociologique ? Tocqueville a parlé sur

des sujets qui sont aujourd’hui d’actualité, Il a en son temps analysé les phénomènes d’institutionspolitique. On dit de lui qu’il a établi le fait démocratique.

Bien sûr, il n’est pas un théoricien à l’image d’Auguste Comte (qui a établi le fait industriel) ou de KarlMarx (qui a établi le fait capitaliste), mais on ne peut pas pour autant ignorer la contribution deTocqueville car il a permit de comprendre la société dans laquelle il vivait et il a contribué à l’émergencede la pensée sociologique.

C’est un auteur qui a été oublié et on doit sa réhabilitation à Raymond Aron qui en a fait un des maîtresde la sociologie du XIXème siècle. Ce dernier le range même dans la lignée d’un auteur commeMontesquieu.

§1/ La démocratie en Amérique.

Tocqueville va profiter d’un séjour au Etats-Unis (1831-1832) dont la mission était de rapporter sur lesystème des Etats-Unis pour étudier les contours généraux de la société américaine qui constitue pou lui lemodèle même de la démocratie.

Il en tire un ouvrage capital : La démocratie en Amérique. On dit que c’est devenu la bible dessociologues. Il par de l’hypothèse suivante : Celle de l’avènement prochain irrésistible/universel de ladémocratie dans le monde. La marche de la démocratie est inéluctable (ou inévitable). Il écrira :

« Le développement graduel de l’égalité est un fait providentiel (ou heureux/chanceux), il en a lesprincipaux caractères : il est universel, il est durable, il échappe chaque jour à la puissance humaine, tousles évènements comme tous les hommes ont servis à son développement. Serait-il sage de croire qu’unmouvement social qui vient de si loin puisse être suspendu par une génération ? Pense-t-on qu’après avoirdétruit la féodalité et vaincu le roi, la démocratie reculera devant les bourgeois et les riches ? S’arrêtera-t-elle maintenant qu’elle est devenu si forte et ses adversaires si faible ? »

L’intention de Tocqueville est de décrire la transformation générale générée par la démocratisation dessociétés modernes c'est-à-dire par l’égalisation des conditions. Contrairement au régime aristocratique, ladémocratie ne reproduit pas un ordre social qui opposerai les dominants et les dominés, il n’y a pas en

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démocratie de différence héréditaires de condition, chaque citoyen pouvant accéder à différentes positionssociales.

Pour Tocqueville, une grande révolution démocratique est en cour, donc dans l’égalité des conditionsmais l’uniformité des conditions de vie inquiète Tocqueville, il dit :

« À quelle condition une société ou le sort des individus tend à devenir uniforme ? Peut-elle ne passombrer dans le despotisme (ou la dictature) ? » En d’autre terme, comment favoriser l’égalité desconditions sans perdre le gout de la liberté ? Comment combiner institutions démocratique et institutionslibre ?

L’échec de la révolution de 1789 qui n’a pas su préserver ‘‘l’union admirable du gout de la liberté et del’égalité’’ mais aussi les dangers auxquels est exposés la société américaine amène Tocqueville à soulignerla difficulté à amener la liberté et une égalité. Ainsi Tocqueville voit les dangers qui peuvent à toutmoment rompre le fragile équilibre entre liberté et égalité pendant son séjour aux Etats-Unis.

Il s’inquiète du développement de l’individualisme qu’il voit comme la maladie infantile de ladémocratie et qu’il définit comme une forme de repli sur soit, chaque citoyen s’isolant de la masse pour seretirer à l’écart avec sa famille et ses amis et ainsi crée une petite société à son usage.

Il craindra surtout la tentation à la centralisation, à la constitution d’un pouvoir unique centralisé,omnipotent (ou tout puissant) qui dispense le citoyen de participer à la vie de la cité et qui en fait ‘‘unmouton’’ qui se pli aux idées et aux opinions de la majorité de tel sorte qu’il n’ait besoin de s’en formésqui lui soit propre.

Par le simple fait qu’il ait pensé la société démocratique qui était en train de se faire, on peut considérerTocqueville comme un sociologue mais plus encore par la démarche sociologique et les méthodes utiliséespour déterminer ses idées. Ça fait de lui un véritable démocratique comme on peut le voir dans sonouvrage l’ancien régime et la révolution (1856).

§2/ L’ancien régime et la révolution.

Tocqueville fait le constat d’une répétition du sicle révolution et despotisme (oudictature/absolutarisme). En effet, le sicle historique 1848-1851 semble répéter le sicle 1789-1799. En1848, il y a la révolution ouvrière puis en 1851, il y eu le coup d’état de Napoléon III : c’est identique à larévolution française de 1789 et au coup d’état de Bonaparte.

Ce constat renvoie Tocqueville à une question fondamentale : pourquoi est-il si difficile d’établir enFrance des institutions libre ? Pour Tocqueville, ce qui rend difficile la vie des institutions libre en France,c’est la force des administrations centrale hérité de l’ancien régime. Si la révolution française a permit derenverser les institutions aristocratiques au profit des institutions démocratiques, elle n’en a pas pourautant rejeter tout les caractères singuliers de l’ancien régime. Ainsi, la centralisation administrative estune institution d’ancien régime qui va être perfectionné par la révolution française.

Pour Tocqueville, la démocratisation en France s’est toujours accompagnée d’une centralisationcomprise comme une limitation les libertés individuelles. Si la révolution française a satisfait au doubleimpératif de la liberté et de l’égalité dans un premier temps, elle est vite retombée dans le travers del’égalité sans liberté.

La pensée de Tocqueville peut se résumer de la manière suivante : les individus et les groupes ont unetendance à rechercher leurs intérêts et seule la participation à la vie publique peut les amener à considérer

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l’intérêt général. Dès que la participation politique diminue, la recherche de biens particuliers prime. Ducoup, la société se divise en fractions d’abord indifférents puis rivales. La décision ne peut plus alorsnaître en son sein et il devient presque inévitable qu’elle lui soit imposé du dehors et que renaisse unpouvoir central incarné par un nouveau maître.

Tocqueville voit l’avenir sous le signe de la décadence : pour lui, la raison n’investi pas l’histoire, ce nesont pas des institutions nouvelles et meilleur qui naîtront à partir des anciennes.

Outre cette thèse sur les institutions politiques française, Tocqueville incarne aussi ‘‘l’espritsociologique’’ par la démarche et les méthodes utilisées. Tocqueville nous propose un essaied’interprétation socio-historique de la révolution, il ne réduit pas la crise révolutionnaire à un accidentmais il veut en comprendre les causes et les évènements qui ont appelé à dissoudre l’ancien régime. Pourcela, il développera un traitement important de recherche comme le traitement d’archive et la comparaison(futur méthodes sociologiques).

De plus, Tocqueville nous invite à une sociologie lucide, il sait que l’analyse qu’il propose au publicn’est pas sa relation au type idéal qu’il se fait de la société démocratique et il le dit ouvertement enexplicitant ses choix qui sont effectivement influencé par ces préjugés aristocratiques. Il renvoie toussociologue à une interrogation plus générale sur leur approche : comment peut-on observer une sociétédans laquelle on vit ?

Enfin, le résonnement de Tocqueville esquisse un mode d’interprétation du social qui sera celui de lasociologie représentative.

II) Auguste Comte : de la physique sociale à la sociologie.On le considère parfois comme le père fondateur de la sociologie moderne car il est le premier à avoir

énoncé clairement la nécessité d’élaborer une science de la société qu’il nommera dans un premier tempsphysique sociale puis qu’il désignera sociologie par la suite, la sociologie étant l’étude positive del’ensemble des lois fondamentales propre au phénomène sociaux. Auguste Comte défini la physiquesociale de la manière suivante :

« J’entends par physique sociale la science qui a pour objet propre l’étude des phénomènes sociauxconsidérés dans le même esprit que les phénomènes astronomique, physique, chimique ou encorephysiologique c'est-à-dire assujetti à des lois naturels et invariables dont la découverte est le but spécial deses recherche » (c’est sa définition qu’il fait en 1825 et qui évoluera).

Dans cet extrait, il y a trois critères de la sociologie :

- On constate que la physique sociale vise à savoir positif puisqu’elle cherche des loisnaturelles invariables.

- On apprend que cette recherche doit se faire dans le même esprit et dans la continuité desciences naturelles déjà établies.

- De plus, une classe de phénomène est identifiée : les phénomènes sociaux.

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La cour de philosophie positive qu’il donne chez lui à partir de 1826 (car il a été exclu de l’écolepolytechnique) a pour objectif la construction d’une science positive des phénomènes sociaux : lasociologie.

Le système qu’il y développe rejette la métaphysique et les valeurs pour ne reconnaître quel’empirisme des faits scientifiquement établis. Dans la science, chaque affirmation doit pouvoir êtreramenée à des observations et ce retour aux observations implique que la science doit se fonder sur desfaits et non sur des opinions ; il faut observer les faits et énoncer les lois ensuite. Comme les autresphénomènes, les phénomènes sociaux sont observables et explicable scientifiquement.

A. Comte situe donc la sociologie du côté des disciplines scientifiques. Il lui attribut aussi un objetprécis : l’histoire de l’espèce humaine. Il privilégie l’espèce de l’individu, cette décision n’allait pas desoit, en effet, à la suite des philosophes, on aurait put concevoir que l’atome de base de la société étaitl’individu et que les faits sociaux était la composition des actions, des pensées et des sentimentsindividuels ainsi que les résultats produits par cette composition.

A. Comte refusa cette perspective. Pour lui, décomposer la vie sociale en individu aurait abouti àperdre la vie sociale elle-même. Considéré en lui-même, séparé des autres, l’individu n’est qu’uneabstraction qui n’a aucune réalité sociale. C’est une fiction à partir duquel on ne peut aboutir qu’à desdéductions fausses sur l’espèce humaine. Si l’on recherche l’atome élémentaire de la vie sociale, ce n’estdonc pas dans l’individu qu’on peut le trouver mais dans la plus petite association que se composel’humanité : la famille.

Pour comprendre, il va découvrir des lois historiques de l’humanité qu’il appelle la loi des trois états.Pour A. Comte, l’humanité passe par trois états, trois stades :

- Le stade théologique : la société est théologique car les croyances qui ont cour sont descroyances surnaturelles. Les monarques qui règnent à dans ce stade sont les représentants de cescroyances surnaturels. Leurs principes ou activités dominantes est la guerre.

- Le stade métaphysique : la société européenne du XVIIIème siècle correspond à ce stade : cetteépoque transitoire montre au fond une théologie masquée car les être surnaturels sont remplacéspar des entités abstraites comme la nature ou la raison. C’est un stade de développement oùl’industrie émerge et où société n’est plus franchement militaire mais n’est pas franchementindustrielle (c’est un stade transitoire).

- Le stade positif : c’est un stade où la méthode scientifique a prit le dessus sur les autresméthodes de connaissance. Les idées sont devenues positive c'est-à-dire que l’espèce humaine secontente de découvrir les lois effectives qui régissent les faits par l’observation et le raisonnement.L’industrie devient prépondérante (ou supérieur/incomparable) et toutes les relations particulièress’établissent peu à peu par l’industrie.

La société tend à s’organiser de la même manière en se donnant pour but d’activité unique estpermanente : la production.

Au XIXème siècle, la société positive remplace la société guerrière, elle est administrée par lesintellectuels dont les sociologues ont la responsabilité du contrôle social.

A Comte quitte le registre de la connaissance scientifique et échoue dans le programme du positivismeconsistant à enregistrer les faits pour eux-mêmes comme le font les sciences de la nature.

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Le véritable objet d’étude de la sociologie pour A. Comte est dans les lois du développementhistorique. La sociologie n’a pas atteint le niveau d’une science positive, il faut donc la développée dansce sens afin que les conditions de vie sociales puissent être améliorées grâce à une prévision fiable dudéveloppement sociaux. Mais son système sera plus ou moins à son image radicale, dogmatique etsuffisante.

Si A. Comte a été effectivement d’un apport indéniable pour la sociologie en cherchant à lui donné uneincise scientifique par la mise en forme d’un projet résolument scientifique mais aussi porteur d’un projetde réforme de la société et en tentant de faire reconnaître sa spécificité (c'est-à-dire l’existence d’uneclasse de phénomène spécifique). Son système sera évolutionniste, téléologique et patroholiste.

_ Évolutionniste car l’histoire universelle obéi à une loi de développement qui connait seulementtrois stades. Hors, il y a une erreur logique : il n’y a pas de linéarité dans l’histoire sociale humaine.

_ Téléologique (c'est-à-dire qu’il y a une fin dans l’histoire) : l’état positif sera l’état vers lequel toutel’humanité se dirigerait. Hors, de la même manière qu’il existe plusieurs sociétés, il existe plusieurstrajectoires possible.

Vouloir ramener toutes les trajectoires à celle des civilisations occidentales, c’est digne d’un espritmétaphysique plutôt que positif.

_ Patroholiste : car Comte a accorder à l’humanité une réalité sociologique alors qu’elle n’a qu’uneréalité biologique. Considéré l’humanité comme une vaste société reviendrait à prendre le mite pour laréalité la société humaine n’existe pas mais des sociétés humaines existent.

III) Karl Marx&Friedrich Engels : la pensée marxienne.

Introduction :

D’un point de vue sociologique : avec l’industrialisation et en réaction au problème que cette penséegénère, le socialisme va se développer tout au long du XVIIIème siècle. On a à faire à un socialismecommunautaire qui cherche à rompre avec l’individualisme de la société bourgeoise capitaliste. L’objectifde ce socialisme n’est pas la connaissance du social mais la mise au point de modèle alternatif, Marxqualifiera ce socialisme d’utopique car il vise la transformation de la nature de l’homme en agissant sur lesformes d’organisations de la vie sociale.

En France, le modèle du phalanstère (ou de la collectivité) de Charles Fourier, l’association communisted’Etienne Cabet ou encore le fédéralisme de Pierre-Joseph Proudhon sont autant d’exemple de systèmesalternatifs au capitalisme naissant. Leurs réflexions alimenteront la pensée sociale et la science sociale toutcomme l’œuvre de Marx qui est à la fois une théorie scientifique et théorie politique. Du coup, s’il estdifficile de discerner l’apport de construction à la sociologie de Marx, car on ne peut pas séparer le projetscientifique du projet politique. Néanmoins, l’étude de l’œuvre de Marx est arrangé parmi les œuvresclassique et on doit l’étudier comme on étudie les œuvres de Weber ou encore Durkin.

A) MARX : LE SOCIOLOGUE DU REGIME CAPITALISTE.

Marx est né en 1818 à Trèves en Allemagne et décède en 1883 à Londres. Il est issu d’une famille aisée

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(son père était avocat), il étudia à l’université de Boone et de Berlin, puis il va suivre Engel et Feuerbach.

Le marxisme est la rencontre entre la philosophie allemande, l’économie politique anglaise et lasociologie française, c’est de cet ensemble qu’est née la pensée de Marx.

Il est de d’origine allemande c’est de la qu’il ca développer sa conception matérialiste et elliptique del’histoire. Il finira le reste de ses jours exilé de France en Angleterre où il développera sa théorieéconomique. Il vivra aussi à Paris où il développera le socialisme utopique et sa théorie du socialismescientifique.

Il quitte l’Allemagne en 1843 et part à Paris de 1843 à 1849, il produit des écrits majeurs concernant laphilosophie en produisant un essaie sur Feuerbach, puis il va répondre à la question de Proudhon (questionde la misère) puis son célèbre ouvrage du parti capitaliste, puis, En 1849, il exile à Londres. Dans cettepériode anglaise, il va écrire « Capital », c’est Friedrich Engels qui assurera la publication des livres (4ouvrages), puis, en 1883, il décède. Sa vie est, selon le philosophe Althusser, composée de trois grandesépoques :

- L’époque des œuvres de jeunesse (1840-1844)

- L’époque des œuvres de la maturation (1845-1857)

- L’époque des œuvres de la maturité (1857-1883)

On dit que Marx est le sociologue du capitalisme.

B) MATERIALISME HISTORIQUE ET THEORIE DEL’EXPLOITATION ET DE LA PLUS VALUE.

1- Le matérialisme historique.

En tant que sociologie scientifique, le marxisme porte le nom de matérialisme historique, on dit souventque la pensée de Marx équivaux à un déterminisme stricte et très étroit ou l’individu ne pourrait pas êtreacteur de l’histoire puisqu’il entre dans des rapports déterminés qu’on nomme ‘‘rapports sociaux deproduction’’.

On pourrait définir la sociologie marxienne comme la science des rapports de production dans la mesureoù il pose que les relations fondamentales de toutes sociétés humaine sont des rapports de productionc'est-à-dire les rapports fondamentaux des hommes avec la nature et des hommes entre eux dans leurtravail.

Pour Marx, le fondement de la société réside dans la production (ou le travail) : l’homme se produit lui-même et produit la société.

Dans sa thèse matérialiste, il y a deux temps : les individus font leur vie sociale, font leur histoire etdonc participe à l’histoire générale mais ils ne font pas l’histoire dans les conditions choisis par eux-mêmes mais dans des conditions données, héritées du passé.

Avec cette première idée qu’il existe deux temps, pour comprendre ce mouvement de l’histoire, il nefaut pas partir de la façon dont les hommes pensent mais dans les conditions matérielles de fondement de

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la société. Engels disait : « avant de pouvoir s’occuper de politique, de science, d’art, de religion,… leshommes doivent tout d’abord manger, boire, se loger, se vêtir,… » Les phénomènes sociaux sont bien lefait de l’homme mais ils ne sont pas compréhensible par rapport au système économique ou au mode deproduction.

Le mode de production (appelé aussi infrastructure) est formé des moyens de production (appelé aussiforce productive) et des relations qui s’instaure autour du travail (appelé aussi les rapports de production).

Le mode de production détermine la superstructure qui regroupe les différentes institutions socialesd’une société (la religion, l’idéologie, le droit, les institutions publiques,…). La fonction de lasuperstructure est de reproduire les rapports sociaux existant c'est-à-dire de défendre la classe desexploitant contre celle des exploités.

On peut donc penser que la réflexion de Marx est complexe, mais voici son analyse : les forcesproductives sont marquées par de nombreuses innovations techniques (la machine à vapeur, le début de lamécanisation,…), de plus, les rapports de production mettent en relation des ouvriers qui se voit obligés devendre leur force de travail au capitaliste. Ces deux éléments produisent le mode de production capitaliste.

L’organisation économique de ce mode de production conditionne les institutions sociales(superstructure) afin de préserver le statuquo et prévenir les transformations sociales. Cette grilled’analyse est donc utile pour comprendre par exemple le phénomène de la mondialisation, des institutionscomme l’OMC, la banque mondiale,… qui sont des superstructures, elles ne sont finalement que desinstitutions qui ont pour objectifs de développer le mode de production capitaliste et le régime libéral quilui est libérant.

2- Une philosophie de l’histoire.

Le développement historique est régit par des lois économiques et notamment par la lutte des classes.

La lutte des classes antagonistes (ou rivales) est le moteur de l’histoire. Marx écrit dans ‘‘le manifeste duparti capitaliste’’ : « l’histoire de toute société jusqu’à nos jours n’a été que l’histoire de la lutte desclasses ». Marx distingue trois périodes de lutte des classes en Occident :

- Le mode de production antique : c'est-à-dire l’esclavage, c’est une lutte entre esclave etmaitre.

- Le mode de production féodale : c'est-à-dire le servage, c’est une lutte entre le serf et lebourgeois.

- Le mode de production capitaliste : c'est-à-dire le salariat, c’est une lutte entre l’ouvrier etle capitaliste.

Dans cette conception de l’histoire, le prolétariat (ou le travailleur, l’ouvrier) a une place particulière caril s’agit de la seule classe sociale qui prend le pouvoir non pour exploiter une classe sociale mais pourlibérer l’humanité de l’exploitation et la conduire vers une société sans classe sociale et sans étapes.

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3- La théorie économique.

Le travail de théorie économique de Marx énonce les antagonistes (ou adversaires) du mode deproduction capitaliste. Cette théorie fait de la plus value l’élément clé de l’économie capitaliste.

L’essence du capitaliste, c’est la recherche du profit. Le but du mode de production capitaliste estl’extraction de la plus value par l’exploitation de la force de travail.

Dans tout processus de production, il y a du capital constant (des outils, de la matière première,…) et ducapital variable (c’est la force de travail). Alors que le capital constant ne produit pas d’accroissement dela valeur, c’est le capitaliste variable qui produit de l’excédent : la plus value. Le capital se décompose endeux parties : une somme d’argent C (qui correspond au capital constant et qui est dépensée pour lesmoyens de production), et une somme d’argent V (qui correspond au capital variable et qui est dépenséeen force de travail).

Donc, on peut dire que le Capital = C+V. quand l’opération productive a eu lieu, on peut dire que :

Capital ’ = C+V+P (p étant la plus value). La plus value est une simple conséquence du changement devaleur qui affecte V. le capitaliste pourra donc par simple prolongation de journée de travail, augmenter laplus value ou par abréviation de la journée de travail nécessaire faire de la plus value relative (ouproportionnel) ; c’est le temps nécessaire pour l’ouvrier de produire la valeur nécessaire à la reproductionde sa force de travail. Marx observe que l’ouvrier gagne juste ce qu’il lui est nécessaire pour reproduire saforce de travail (il ne fait pas de plus value, lui).

Marx observe une dégradation de la situation sociales des ouvriers : c’est un phénomène dePaupérisation (ou d’affaiblissement).

C) La division du travail.

A coté de la théorie, l’analyse de la division du travail tient une place particulière dans l’œuvre deMarx : la division du travail est un moyen de développer du profit. De plus, elle sert le projet politique dela classe sociale et donc aux conflits entre les classes sociales. Pour Marx, il n’y a pas de classe socialenaturelle mais elles sont faites par le travail (on est quelqu’un uniquement par le travail).

Marx retrace (au travers de son ouvrage ‘‘le capital’’) l’histoire de la division capitaliste du travail. Dansson œuvre, Marx part de la période manufacturière (moitié XVIème jusqu’à fin XVIIIème siècle). Pour Marx,la manufacture est le véritable point de départ de la production capitaliste car elle va réunir en un mêmelieu de travail des ouvriers, et c’est la 1ère condition de développement du capitaliste.

L’ouvrier dans la manufacture a une fonction parcellaire (ou divisé) alors que jusque là, la logique étaitune logique de métier. La manufacture introduit la division du travail, la manufacture va diviser etsubdiviser les opérations de production à un ouvrier donnée et à une tache donnée.

Pour augmenter la puissance productive du travail, la manufacture va chercher à spécialiser le talent dechaque ouvrier de manière à en faire un organe infaillible mais dépendant du travail collectif en figeantl’ouvrier à une opération répétitive et en lui attribuant une tache de plus en plus simple à effectuer.

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De plus, la division du travail entraine une perte relative de la valeur du travail. En effet, contrairement àl’ouvrier de métier, le l’ouvrier parcellaire ne produit plus de marchandise mais il n’est plus qu’une forcede travail au service de la marchandise.

À cette évolution, la concentration des moyens des capitalistes consacrera la division de la société endeux classes antagoniste (ou opposant) : les possédants (les capitalistes) et les non possédants (lesouvriers). Pour Marx, les conséquences de cette évolution sont immédiates : l’ouvrier qui n’a plu demoyen de production n’a plu que sa force du travail qu’il est obligé de vendre au capitaliste : il devientdonc la propriété du capitaliste.

La division du travail créé donc des circonstances qui assure la domination du capital sur le travail.L’étape suivante sera la séparation entre la séparation et l’exécutif, entre les puissances intellectuelles etles puissances manuelles/corporelles. Cette étape n’est que l’étape suivante de l’assujettissement du travailau capital.

L’étape suivante vient de la transformation de la manufacture vers la fabrique grâce à l’introduction dela machine. Dans la manufacture, l’ouvrier se sert de l’outil pour produire, mais dans la fabrique, il sert lamachine. Il y a donc dévalorisation du travail.

Une autre étape et la scission (ou division) entre propriétaire et gérant des moyens de production :maintenant, il ya ceux qui possède et ceux qui gère les moyens de production : on les appelle actionnaireet président ou directeur.

Marx dira que la classe capitaliste se forme dès que celle-ci va employer des personnes à la surveillanceet à la gestion des moyens de production. La division du travail crée donc une hiérarchie des forces detravail, avec une échelle de salaires. Pour Marx, la grande industrie est créée. On peut donc dire que Marxa anticiper Taylor.

D) Une sociologie des classes sociales.

L’analyse des classes est au cœur de la sociologie Marxienne, on croit d’ailleurs que Marx et Engel sontles créateurs du concept des classes sociales. Hors, c’est faux : ce concept est déjà utilisé par lesphilosophes, les historiens,… Marx et Engel n’ont fait que systémier son usage en précisant et en luidonnant une définition qu’ils suggèrent scientifique.

On ne trouve pas chez Marx une définition précise de la classe sociale mais il en énonce de multiplesselon qu’il rédige un texte politique comme le manifeste du parti communiste ou là il dénombre deuxclasses sociales, un texte sociologique come le capitalisme ou là il dénombre trois classes sociales, ouencore un texte à visée historique comme le 18 brumaire de louis Bonaparte ou là il dénombre sept classessociales.

Mais ça ne veut pas dire que sa démarche n’est pas rigoureuse : c’est les degrés de précision qu’ilrecherche qui va lui faire dénombrer le nombre de classe sociale. Mais le dénombrement ne veut pas direqu’il n’y a pas de définition : « le grand principe marxien est qu’on ne peut pas définir une classe socialeen dehors des rapports qu’elle entretient avec une ou plusieurs autre classe(s) » de Jean-Pierre Durand.Autrement dit, ce qui défini les classes sociales, c’est qu’elles sont en lutte, c’est à partir des rapports de

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production que les classes sociales se définissent.

Marx et Engel présente dans le manifeste du parti communiste l’histoire des hommes par cette oppositionconstante entre deux classes sociales dont l’une domine sur l’autre. Le capital met en évidence cetantagonisme (ou opposition) de classe en le simplifiant certes mais c’est cet antagonisme qui lui permet demontrer une société polarisée. La société se divise de plus en plus en deux grands camps ennemis, il estquestion d’affrontement direct :

Entre la bourgeoisie capitaliste qui a tendance à diminuer parce qu’il y a une concentration de plus en plusimportante. Et entre le prolétariat qui a une tendance de logique d’accroissement avec le phénomène deprolétarisation (ou d’appauvrissement) qui est un phénomène corollaire.

Dans le capital, on distingue trois classes sociales de la propriété :

- Les salariés : propriétaires de leur force de travail,

- Les capitalistes : propriétaires du capital

- Les propriétaires fonciers : propriétaires des terres et qui vivent de la rente que leur verse lescapitalistes exploitant agricoles.

Dans cette conception, pour Marx, c’est l’identité des revenus ou des sources de revenus qui constituentles classes sociales. Ce critère renvoi à la place occupé dans le système de production. Si la position dansles rapports de production suffit à déterminer l’appartenance de classes, c’est bien la lutte qui est menécommunément contre une classe qui permet la formation d’une classe sociale.

Dans l’ouvrage la misère, Marx distingue la classe en soi et la classe pour soi : une masse d’individu quis’identifie par des intérêts commun n’est pas encore une classe constituer en classe pour elle-même (c’estplutôt la classe pour soi), les individus doivent avoir conscience d’appartenance à une classe où lesindividus doivent comprendre la nécessité de la lutte pour qu’une classe se constitue pour elle-même.

Alain Touraine dit : « pour qu’il y aie une classe, il faut qu’il avoir une opposition, il faut avoir uneidentité commune et il faut avoir une globalité ».

En conclusion, l’apport de Marx est essentiel pour les sciences humaines car Marx n’a pas seulement étésociologue mais aussi économiste, historien et philosophe. Son apport réside dans la construction d’uncadre et d’une méthode d’analyse du social sans équivalent.

Contrairement à Durkheim ou autre, Marx n’a pas eu d’ambition de fonder une science nouvelle, ilpropose une théorie globale du régime capitaliste, autrement dit, il nous propose un regard synthétique dela société moderne et ça le place au rang d’auteur classique de la sociologie.

IV) La double fondation de la sociologie comme discipline scientifique : l’école française etallemande de sociologie.

A- Introduction :

Ni Tocqueville, ni Marx n’ont énoncé le souhait et l’ambition de délimiter une nouvelle discipline et

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d’en définir l’objet d’étude. Si l’on trouve dans leurs œuvres de remarquable analyse concrète préfigurantle travail de connaissance de la sociologie ultérieure, celle-ci ne sont pas mise en rapport avec le projet deconstitution d’une discipline nouvelle visant à la définition critique de son objet et de sa méthode.

Si auguste Comte, a contrario, tentera de formuler explicitement le projet de fonder une scienceautonome des faits sociaux, il faillira dans son entreprise de définition et de légitimation par un système depensée trop rigide. La reconnaissance de la spécificité des phénomènes sociaux par Durkheim peut êtreconsidérée comme le véritable acte de naissance de la sociologie, comme une discipline institutionnellereconnu par le champ scientifique et universitaire.

Si Durkheim est effectivement représenté comme le père de la sociologie, c’est parce qu’il va lui donnerune incise institutionnelle.

B- L’école française de sociologie.

Reprenant l’idée d’auguste Comte de fonder une science autonome : la sociologie, Durkheim va occuperle champ intellectuel et universitaire en fondant une véritable école de pensée. Il va créer en 1896 unerevue : « l’année sociologique ». Qui sera la mise en forme de débat avec un groupe intellectuel qu’ilappellera le groupe de l’année sociologique.

Un peu avant cette date, en 1887, Durkheim est nommé à Bordeaux à la chaire de pédagogie et descience sociale, et même en 1902, quand Durkheim arrive à la Sorbonne, il va occuper la chaire de sciencede l’éducation. Mais Durkheim utilise ces différents postes pour travailler à la reconnaissance de lasociologie en la spécifiant par rapport aux autres sciences (tel que la philosophie, l’histoire, lapsychologie,…). C’est pourquoi il combattra la conception de Gabriel Tarde (1843-1904) qui voulait fairede a sociologie de l’interpsychologie.

Finalement, la sociologie de Tarde est aujourd’hui la psychologie sociale et Durkheim va réussir àimposer à la fois le terme de sociologie et sa position comme chef de l’école sociologique. Il réussiramieux que d’autre à présenter la sociologie comme une théorie englobante susceptible d’intégrer et desystématiser l’ensemble des faits sociaux. Pour se faire, il s’appuiera sur le fameux « groupe de l’annéesociologique » et en 1913, le projet institutionnel aboutira car, à cette date, il obtient la possibilité de créerune chaire de sociologie : c’est un combat de 26 ans pour une théorie.

Reconnaissons à Durkheim les efforts pour constituer la discipline sociologique, ceux d’autant que lui-même apporte une œuvre originale et importante en particulier : en 1993 les règles de la méthodesociologique, en 1895 de la division du travail social et en 1897 le suicide.

L’œuvre de Durkheim a l’emprunte du cadre socio-historique qu’il a vu naitre c'est-à-dire celui d’une3ème république qui évolue dans une incertitude politique, économique et sociale. Beaucoup d’intellectuelspartage le sentiment d’être plongé dans une grave crise morale (comme par exemple l’affaire Dreyfus).

La préoccupation majeure de Durkheim s’inscrit dans ce contexte instable et donc la sociologie queDurkheim essaye de fonder doit être une science qui permettra de remédier à la crise morale et destabiliser la société.

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La pensée centrale de Durkheim est celui de la relation entre les individus et la collectivité, la questionmajeure est : « comment des apparences dissemblables occupant des fonctions différentes vivent-ilsensemble pour former une société ? » dit autrement, par quel mécanisme les individus sont-ils intégré à lasociété ? Sous quelles conditions leurs activités sont-elles compatible avec le maintien d’un cadre socialcohérent ?

Pourtant, pour Durkheim, seul la sociologie est en mesure de répondre à ces questions. S’inspirant d’A.Comte qui voulait déloger toutes pensées non scientifique de la considération des faits sociaux au profitd’une analyse objective et rigoureuse, Durkheim montra dans les règles de la méthode sociologique laspécificité de la rigueur scientifique e sociologie.

Pour distinguer les phénomènes sociaux des phénomènes organiques ou psychiques, il définit les faitssociaux comme « des manières d’agir, de penser, de sentir extérieur à l’individu et qui sont doués d’unpouvoir de cohéritions en vertu duquel il s’impose à lui. »

C- L’école allemande de sociologie.

Le contexte universitaire allemand est tout à fait différent du contexte universitaire français, en effet, iln’y a pas chez les chercheurs allemands une obsession à faire reconnaître la sociologie comme unediscipline à part entière. Ceux-ci ne voient en la sociologie qu’une science parmi tant d’autre et ilprivilégie avant tout les recherches interdisciplinaires. On ne peut donc pas parler comme la France d’uneécole allemande de sociologie ne serait-ce parce qu’en Allemagne, on peut considérer qu’il y a euplusieurs fondateur même si Max Weber fait figure comme Durkheim en France de chef de file (quelqueauteurs allemand important : Tönnies et Simmel).

Ferdinand Tönnies est connu pour un ouvrage de jeunesse (édité en 1887) : « Gemeinsschaftgesellscharft » : il a essayé de conceptualiser un état de la communauté et un état de la société. L’état decommunauté caractérise les relations sociales fondées sur l’effectivité et l’esprit de groupe tandis quel’état de société caractérise des relations formelles artificielles basées sur l’intérêt individuel.

Pour Tönnies, les sociétés humaines tendraient à accorder une place privilégiée à l’état de société oùprimerai de plus en plus les rapports de compétition et les intérêts individuels. Ce modèle bipotèreinspirera de nombreux auteurs dont Durkheim qui quant à lui distinguera 2 types de solidarité : la sociétémécanique et la société organique.

Simmel lui, part d’une conception de la société différente de Durkheim et qui va marquer la sociétéallemande : « la société existe là où plusieurs personnes entre en action réciproque, c'est-à-dire soit qu’ellecollabore, soit qu’elle s’oppose ». Simmel ne s’intéresse pas à la société ni à l’individu mais à un niveauintermédiaire qui résulte de leur interactions : c’est la forme sociale. La forme sociale est le produit desactions réciproque des individus, il privilégie une approche individualiste et il ne considère pas la sociétécomme un tout et sa démarche tant à expliquer la société par les individus. Mais le débat qui va surtoutmarquer la science sociale allemande est un débat autour des méthodes (distinction entre science humaineet science de la nature). La question qu’ils vont se poser est une question complexe : « y a-t-il unedifférence entre les sciences de la nature et les sciences humaines ? Et si oui laquelle ? ».

Les termes du débat sont les suivants : les sciences de la nature cherchent à formuler des lois générales :

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elles sont nomothétique alors que les sciences de l’esprit sont idiographique c'est-à-dire qu’elle cherchedes faits particuliers et avant tout des faits historiques.

Une partie des chercheurs allemands dans la même logique d’A. Comte à travailler à la fondationautonome systématique et méthodique des sciences humaines face à la science de la nature. Les scienceshumaines se distinguent dans la mesure où elle se rapporte à une réalité produite par l’homme. Au plancognitif les processus sont différents ; on explique la nature et on comprend l’esprit : on explique lesphénomènes de la nature par la mesure, par l’expérimentation, on comprend les phénomènes sociales parl’interprétation. On ne peut comprendre les réalisations sociales et créatrices de l’homme qu’en seprojetant au cœur même de la vie de l’âme.

De ce débat sur les méthodes, Max Weber n’en est pas à part mais la réponse qu’il apporte est uneréponse beaucoup plus nuancée, en effet, pour lui qui pense qu’une science particulière n’est pas enmesure de saisir par ces concepts et méthodes la réalité empirique de la société, il n’y a pas de différentprincipe entre la possibilité de prévoir des phénomènes de la nature e l’attente des conséquence de l’actionhumaine ; il ne faut pas attribuer à l’action humaine une irrationalité plus grande qu’au phénomènesingulier de la nature. La différence entre les deux types de science concerne essentiellement la notiond’interprétation. Weber dit que le comportement motivé est davantage accessible à l’évaluation nationaleet au calcul que le phénomène singulier de la nature. Nous comprenons mieux l’attitude de Napoléon en1799 (le coup d’état) que les variations météorologiques, nous comprenons mieux l’appel du 18 juin 1940du général de Gaule que les tremblements de terre.

En conséquence, il est faux d’identifier liberté de la volonté et irrationalité : au contraire, lecomportement libre à la différence de celui du fou ou celui de la nature est davantage accessible àl’interprétation car il obéi à la rationalité déterminé par la relation d’une fin. Le sociologue peut interpréterles phénomènes en prenant mentalement la place des sujets, en s’associant socialement ou en adoptant leurreprésentation. On parlera de tradition compréhensible.

Weber cherche à comprendre la réalité sociale de l’intérieur de l’agir humain. Pour Weber, la définitionde l’action sociale est la suivante : « l’action humaine est sociale dans la mesure du fait de la significationsubjective que l’individu y agisse et y attache, elle tient compte du comportement des autres et en estaffectée dans son cour.

Conclusion générale :

Ce détour par l’histoire de la discipline montre l’ambition commune des sociologues de construire unmode d’intelligibilité du social mais la discipline est en essence, elle ne propose pas de définition unitaire.On a à faire à deux écoles différentes, deux traditions sociologiques différentes qui témoignentd’opposition théorique et méthodologique.

La sociologie française équivaux à la sociologie de Durkheim, c’est une sociologie objective et Holiste(elle veut que la société soit supérieure à l’agrégation des actions individuelles).

La sociologie allemande équivaux à la sociologie de Weber, c’est une sociologie compréhensive etindividualiste (la société est le résultat de l’action des individus).

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Chap.2 : la sociologie : science de la société ou science de l’actionsociale ?

I- L’approche sociologique.

Par commodité, on définit la sociologie comme la science des faits sociaux ou de la société. Si ces deuxdéfinitions désigne un objet d’étude particulier, elle renvoie néanmoins toute les deux à un vaste ensemblede fait. Les faits sociaux selon tel ou tel auteurs ne définissent pas exactement la même chose. La sociétéquant à elle se présente à l’observation sous des formes variés, on parle de la société quand par exempleon parle de civilisation occidentale (comme la France) ou on parle de classe ouvrière (comme le grandNancy) ou on parle de classe (comme un amphithéâtre) ou on parle de deux personne qui joue aux échecs.

La spécialisation de la sociologie participe à cette difficulté à délimiter le champ d’étude du sociologue,d’où la question : quelle est le champ d’étude du sociologue ?

§1/ Les objets d’étude du sociologue.

On peut affirmer que le sociologue étudie l’homme dans son milieu social ou encore qu’il étudiel’individu en société. Si on part de cette définition, on peut dégager trois objets d’étude différents : Lestermes même de la relation, La relation elle-même.

Si on considère que ces trois objets son trois objets d’étude pour le sociologue, il est intéressant dedéfinir ce qu’il recouvre :

- La société,

- L’individu,

- L’interaction.

1) La société.

L’objet société est difficile à définir dans la mesure où son contenu varie suivant l’unité observée etsuivant le point de vue adopté.

L’unité observée : la sociologie observe et étudie différent niveau de la réalité sociale. Une recherchesociologique peut s’intéresser aussi bien à de vaste ensemble qu’elle peut s’intéresser à de petite taille(ex : tout un pays ou une petite entreprise). On dit que la sociologie si interesse à l’étude par palier.

A première vue, la société c’est l’ensemble des individus vivant ensemble et comme le dit N. Elias :« lorsqu’un tel dit société et qu’un tel autre l’entend le dire, les deux se comprennent sans difficulté. Pourautant, on peut donner plusieurs définitions au terme société. Est-ce une unité réelle réduite aux élémentsqui la compose ou est-ce une réalité qui ne peut être réduite aux éléments qui la compose : on est devantdeux camps qui la composent : les uns pensent que la société humaine contraint l’action humaine et qu’ilfaut considérer la société : c’est une entité supérieure à l’ensemble des membres qui la compose. Pour lesautres, les individus produisent la société par agrégation de leur action c'est-à-dire que la société n’est ni

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plus ni moins que la réunion des individus qui la compose et ainsi des idées comme l’Etat, la nation, lesclasses sociales,… ne sont donc à tort qu’on peut en faire des sujets historiques. La seules sujettehistorique réelle étant les individus.

Ces deux conceptions de la société tendent à opposer la société à l’individu. Hors, N. Elias nous rappelque la société n’est pas extérieur à l’individu, qu’il ne peut pas y avoir de société sans individu et quel’individu n’existe que par et dans la société.

La sociologie doit en finir avec cette opposition stérile et combler le gouffre entre l’individu et lasociété. Elias dit : « la société qu’on oppose si souvent à l’individu est entièrement composé d’individu etl’on est soit même l’un d’entre eux » mais par nos modes de pensée, on construit les institutions situéeshors de nous et Elias nous invite à rompre avec une représentation égocentrique de la société que desexpressions comme ma famille, mon université, ma femme,… trahissent.

Pour Elias, il faut donc voir la société comme un ensemble d’individu interdépendant qui appartienne àplusieurs réseaux humain, à plusieurs lieux d’échange qui donne sens à la structure de la société.

2) L’individu.

L’individu seul ne peut pas être l’objet de la sociologie, c’est la psychologie qui étudie la conscienceindividuelle, le comportement et la conduite d’où la question suivante : l’individu peut-il être le produit dedépart de l’analyse sociologique. A cette question, un auteur comme Raymond Boudon dit que l’individuest la seule unité dont se compose la société, l’individu est l’atome logique de l’analyse sociologique.

En opposition, Guy Rocher indique que le produit de départ de la sociologie ne peut résider dans lapersonne individuelle, la plus petite unité concrète de l’observation étant la relation entre deux personnesou plus exactement l’interaction qui résulte de leur relation.

3) L’interaction sociale.

Il y a interaction sociale quand deux individu entre dans une relation qui affecte leur comportementrespectif (ex : les promeneurs à vélo qui se percute). L’interaction suppose donc que le comportement del’un affecte celui de l’autre et réciproquement.

C’est chez Simmel qu’on trouve une véritable sociologie des interactions qui pose comme la trame desliens de la vie en société, la société existe là ou plusieurs personnes entre en réaction réciproque : soitqu’elle collabore, soit qu’elle s’affronte. L’action réciproque est forcément celle qu’engage un échangeentre deux personnes ou deux groupes. La question est : « en quoi l’action réciproque est si importantepour la sociologie ?

Dans la mesure où la société existe, la sociologie s’impose comme la science de la société, elle ne peutpas ne peut étudier les différent types de degrés. Mais si l’action réciproque est une condition nécessairede toutes socialisation, elle n’est pas suffisante, il faut qu’elle s’inscrive dans ce que Simmel appelle uneforme. Qu’entend t-il par cette notion ? La famille ? Le parti politique ? L’emploi ?... en définitif, toutesunités est réuni animé par une intention commune est d’après Simmel une forme de socialisation. Lesindividus se socialisent en s’associant, la socialisation va recouvrir le caractère éphémère d’unepromenade… elle pourra ailleurs avoir un caractère plus durable comme la famille ou d’autre durée.

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Pour Simmel, la mission de la sociologie consiste à examiner les formes de socialisations, ou ditautrement, ce qui fait que la société est société. Pour lui, c’est l’ensemble des rapports entre les hommes,et on peut donc considérer la sociologie comme une science des relations qui décrivent les formes del’action sociale et leurs présupposés.

§2/ Les niveaux d’analyse sociologique.

Les niveaux d’analyse de la réalité sociale sont en fonction de l’objet étudié. Georg Gurvitch, sociologuefrançais distingue 3 plans horizontaux d’observations qu’il désigne sous la notion de genre, de typesociaux. Il y a :

- Le niveau des sociétés globales (ou le plan macrosociologique) : ce niveau comprend les ensemblessociaux suffisamment au complet pour sufire à tous les besoins de leurs membres (totalisé).

- Le niveau des groupements partiels : il est composé de la famille, des classes sociales, desassociations,… on dit qu’on est dans un niveau mézosociologique.

- Le niveau microsociologique : c'est-à-dire les différents types de rapports sociaux qui s’établissententre les membres d’une collectivité et les différentes manières dans ces membres sont liées au toutsocial et pour le tout social

Gurvitch les appellent les formes de la sociabilité. On distingue habituellement deux niveaux d’analysede la réalité sociale : le niveau microsociologique basé sur des unités d’observations restreintes et leniveau macrosociologique fondé sur l’étude des sociétés globales.

Dans la réalité, les niveaux s’interpénètre et se conjugue. Les sociétés globales se constituant à partir desdifférents types de liaison sociale. On peut dire qu’il y a une complémentarité des deux plans de la réalitésociale et des deux niveaux d’analyses. On ne peut donc ni faire de la microsociologie sans tenir comptede la typologie des sociétés globales ni faire de la macrosociologie en négligeant la microsociologie. Il y adonc un va et vient entre les deux niveaux d’analyse microsociologique et macrosociologique même s’ilfaut retenir que tout sociologue qui se respecte ne peut s’en tenir à de simple fait microsociologique.

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CHAPITRE III : LA REGULATION SOCIALE

1. Les valeurs 2. Les règles et le contrôle social 3. Anomie et déviance

Nous avons vu avec Durkheim que l’action humaine obéit à des règles extérieures, communes, collectives, que cette action est sociale parce qu’une contrainte s’exerce sur l’individu. Mais par ailleurs la réalité sociale (pourrait-on dire avec Weber) ne se résume pas à la présence des règles, autrement dit à l’existence d’une contrainte dont les termes sont définitivement fixés. C’est dire que l’activité de régulation sociale qu’il faut entendre comme l’ensemble des moyens par lesquels la société fait respecter ses normes est aussi un enjeu social comme le précise Jean-Daniel Reynaud1. Nous verrons que les règles d’une société ne sont pas immuables, qu’elles peuvent être transformées (même si elles ne sont pas transformables à merci). S’interroger sur le processus de régulation sociale, c’est s’interroger sur les moyens utilisés par la société pour faire respecter les normes, pour maintenir les règles, c’est se poser la question centrale en sociologie de l’intégration de l’individu à la société, qui renvoie à la question de la socialisation par laquelle les individus apprennent les modèles de leur société, se les assimilent et s’en font leurs règles de vie personnelles, mais c’est aussi analyser la manière dont se créent, se transforment ou se suppriment les règles.

1. Les valeurs Il n’y a pas de société sans valeurs. Toute société a besoin de définir ce qui est bien et mal, beau et laid, ce qui est honorable et ce qui ne l’est pas… Toute société pour vivre doit fournir des repères à ces membres et transmettre des normes, des valeurs et des croyances, et cela dès la prime enfance. Lorsque l’on dit à un enfant qu’il s’est mal conduit en agissant de la sorte, on lui inculque les valeurs et les normes de sa société et on l’habitue à en respecter les moeurs. En sociologie, une valeur est avant tout l’objet du jugement qu’on porte sur les choses, c’est selon la définition de Guy Rocher2 « une manière d’être ou d’agir qu’une personne ou une collectivité reconnaissent comme idéale et qui rend désirables ou estimables les êtres ou les

1 J-D. Reynaud, Les règles du jeu, Armand Colin, 1989. 2 G. Rocher, 1968, op. cit.

conduites auxquels elle est attribuée ». Les valeurs se situent donc dans l’ordre idéal et non dans celui des objets concrets ou des événements, autrement dit elles sont inspiratrices des jugements (chez les protestants, on l’a vu avec Weber, celui qui vit dans l’oisiveté ne peut trouver grâce aux yeux de Dieu). Les valeurs sont donc inspiratrices des jugements, elles le sont au moins autant des conduites (les protestants vont travailler sans relâche parce qu’il croit que le salut viendra de leur travail, le catholique lui fera régulièrement pénitence afin de rejoindre le royaume de Dieu, le musulman cherchera à communier avec Dieu par le pèlerinage – le Hadj). Les valeurs

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orientent l’action des individus sans que ceux-ci en aient forcément conscience puisque s’imposant comme une évidence et un absolu. Les individus ont nécessairement des croyances qu’ils tiennent pour vraies, sinon ils ne les adopteraient pas, et ils agissent en fonction de ces croyances qui renvoient nécessairement à des normes permettant de garantir leur véracité». Les valeurs se situent donc dans l’ordre idéal et non dans celui des objets concrets ou des événements, autrement dit elles sont inspiratrices des jugements (chez les protestants, on l’a vu avec Weber, celui qui vit dans l’oisiveté ne peut trouver grâce aux yeux de Dieu). Les valeurs sont donc inspiratrices des jugements, elles le sont au moins autant des conduites (les protestants vont travailler sans relâche parce qu’il croit que le salut viendra de leur travail, le catholique lui fera régulièrement pénitence afin de rejoindre le royaume de Dieu, le musulman cherchera à communier avec Dieu par le pèlerinage – le Hadj). Les valeurs orientent l’action des individus sans que ceux-ci en aient forcément conscience puisque s’imposant comme une évidence et un absolu. Les individus ont nécessairement des croyances qu’ils tiennent pour vraies, sinon ils ne les adopteraient pas, et ils agissent en fonction de ces croyances qui renvoient nécessairement à des normes permettant de garantir leur véracité3. Les valeurs – troisième caractéristique – sont relatives. D’une société à l’autre, elles varient – elles sont non seulement spécifiques à une société, elles le sont aussi à un temps historique. Alors que les américains sont fondamentalement individualistes, les mexicains sont plus centrés sur la famille étendue – on les dit « familialismes » ; de même, pour les américains, l’homme ne s’accomplit qu’en se faisant (ils sont donc tournés vers l’avenir), alors que les mexicains, au contraire, sont tournés vers le passé et cherchent des modèles à imiter. Mais ces valeurs peuvent évoluer dans le temps. Ainsi les valeurs des indiens de l’Ouest américain se sont transformées à la suite de contacts directs et prolongés avec les valeurs américaines dominantes. On parle d’acculturation pour désigner cette modification des valeurs d’un groupe résultant de l’assimilation de traits d’un groupe différent4. Les valeurs peuvent également varier à l’intérieur d’une même société, avec les groupes et catégories sociales. Les études de Bourdieu sur les pratiques de consommation, telles les manières de table, illustrent l’importance de l’appartenance de classe dans la formation et la transformation des goûts et des valeurs. Bourdieu, dans La distinction (1979), oppose le repas des classes populaires à celui des « bourgeois » : « On pourrait, à propos des classes populaires, parler de franc-manger comme on parle de franc-parler. Le repas est placé sous le signe de l’abondance (qui n’exclut pas les restrictions et les limites) et surtout de la liberté : on fait des plats ‘élastiques’, qui ‘abondent’, comme les

3 P. Demeulenaere, Les normes sociales, entre accords et désaccords, PUF, 2003. 4 Les valeurs culturelles dominantes peuvent aussi s’imposer par la force : Léonard Peltier,membre de la tribu Sioux est emprisonné au Kansas depuis 1977. soupes ou les sauces, les pâtes ou les pommes de terre (presque toujours associées aux légumes) et qui, servies à la louche ou à la cuillère, évitent d’avoir à trop mesurer et compterlégumes) et qui, servies à la louche ou à la cuillère, évitent d’avoir à trop mesurer et compter

– à l’opposé de tout ce qui se découpe, comme les rôtis. [...] Au ‘franc-manger’ populaire, la bourgeoisie oppose le souci de manger dans les formes. Les

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formes, ce sont d’abord des rythmes, qui impliquent des attentes, des retards, des retenues ; on n’a jamais l’air de se précipiter sur les plats, on attend que le dernier à se servir ait commencé à manger, on se sert et ressert discrètement. On mange dans l’ordre et toute coexistence de mets que l’ordre sépare, rôti et poisson, fromage et dessert est exclue : par exemple, avant de servir le dessert, on enlève tout ce qui reste sur la table, jusqu’à la salière, et on balaie les miettes. Cette manière d’introduire la rigueur de la règle jusque dans le quotidien est l’expression d’un habitus d’ordre, de tenue et de retenue qui ne saurait être abdiqué. [...] La manière de présenter la nourriture et de la consommer, l’ordonnance du repas et la disposition de couverts, [...] tout ce parti de stylisation tend à déplacer l’accent de la substance et la fonction vers la forme et la manière, et, par là, à nier, ou mieux, à dénier la réalité grossièrement matérielle de l’acte de consommation et des choses consommées ou, ce qui revient au même la grossièreté bassement matérielle de ceux qui s’abandonnent aux satisfactions immédiates de la consommation alimentaire ». Enfin – dernière caractéristique que l’on peut noter – le système des valeurs est hiérarchisé. On parle de « l’échelle des valeurs » pour désigner l’ordre hiérarchique suivant lequel une personne ou une collectivité apprécie ou estime les idéaux auxquels elle adhère. La question des valeurs est centrale pour le sociologue car les valeurs assurent deux grandes fonctions sociales. Première fonction : elles contribuent à donner une certaine cohérence à l’ensemble des règles dans une société donnée. C’est par référence à des valeurs que les règles se construisent, que sont érigées les normes sociales. Deuxième fonction : elles assurent une fonction d’intégration sociale. En partageant les valeurs d’une société, chaque membre participe au consensus social, à la stabilité et la cohésion de la société. Mais ces valeurs ne peuvent réellement assurer la régulation de la vie des individus et des groupes dans une société qu’en se transformant ou se traduisant en normes ou règles. 2. Les règles et le contrôle social Les règles (les normes ou « institutions » pour Durkheim) sont à la base de tout système social ; nous savons bien qu’il n’y a pas d’actions collectives possibles si chaque acteur ne suit que son bon plaisir ou son seul intérêt ; nous savons aussi qu’une collectivité sans aucun système de régulation des comportements ne serait pas plus vivable qu’une société totalitaire. Toute société pose des normes, les transmet par différents canaux et entend qu’on les respecte, mais la réalité sociale ne se réduit pas à la présence de règles, de normes qui sont fixées d’une manière immuable. Les règles comportent bien une contrainte qui oriente, voire détermine les décisions individuelles, mais les règles elles-mêmes sont objet de négociation. Pour Jean-Daniel Reynaud, les règles ne sont pas données une fois pour toutes et ne sont pas transcendantes à l’activité humaine. Elles ont le double aspect contradictoire d’être le produit de l’activité humaine et d’exercer une contrainte. Tout d’abord, les règles sont très diverses, leur nature est très différente, des règles de droit (le code civil) aux règles religieuses (la vocation à gagner de l’argent du protestant, les 10 commandements du chrétien, les 5 piliers de l’Islam). Dans une société, il existe plusieurs systèmes sociaux qui produisent leurs propres règles, lesquelles viennent se greffer aux règles générales de la société (la famille, l’école et toutes les institutions produisent des règles qui doivent être en conformité avec les règles générales – les règles ou normes religieuses doivent être en accord avec les règles de la laïcité). P. Demeulenaereinstitutions » pour Durkheim) sont àla base de tout système social ; nous savons bien qu’il n’y a pas d’actions collectives possibles si chaque acteur ne

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suit que son bon plaisir ou son seul intérêt ; nous savons aussi qu’une collectivité sans aucun système de régulation des comportements ne serait pas plus vivable qu’une société totalitaire. Toute société pose des normes, les transmet par différents canaux et entend qu’on les respecte, mais la réalité sociale ne se réduit pas à la présence de règles, de normes qui sont fixées d’une manière immuable. Les règles comportent bien une contrainte qui oriente, voire détermine les décisions individuelles, mais les règles elles-mêmes sont objet de négociation. Pour Jean-Daniel Reynaud, les règles ne sont pas données une fois pour toutes et ne sont pas transcendantes à l’activité humaine. Elles ont le double aspect contradictoire d’être le produit de l’activité humaine et d’exercer une contrainte. Tout d’abord, les règles sont très diverses, leur nature est très différente, des règles de droit (le code civil) aux règles religieuses (la vocation à gagner de l’argent du protestant, les 10 commandements du chrétien, les 5 piliers de l’Islam). Dans une société, il existe plusieurs systèmes sociaux qui produisent leurs propres règles, lesquelles viennent se greffer aux règles générales de la société (la famille, l’école et toutes les institutions produisent des règles qui doivent être en conformité avec les règles générales – les règles ou normes religieuses doivent être en accord avec les règles de la laïcité). P. Demeulenaere5 propose ainsi une classification des normes qui montre leur diversité : les normes relatives au corps et à la vie (définition de l’intégrité personnelle avec laquelle peuvent interférer les actions d’autrui) ; les normes sexuelles et familiales (portant sur les modalités de l’interaction sexuelle et la répartition des rôles au sein des groupements liés à elle) ; les normes économiques (relatives à l’organisation du travail, à la production et à la répartition des ressources), les normes de la civilité (régissant les relations des personnes à l’intérieur de la société en général) ; les normes politiques (définissant les modalités de l’organisation collective des groupes) ; les normes relatives au traitement des éléments non humains (traitement de la nature, des animaux et des objets) ; les normes culturelles ; les normes religieuses ; etc. Ensuite, il existe différents types de règles : les règles que l’on peut nommer « rationnelles » et celles que l’on peut nommer « coutumières ». Ces deux genres de règles sont en concurrence : le taylorisme est un bon exemple pour illustrer cette concurrence. Le taylorisme

– est-il besoin de le rappeler – est un mode d’organisation du travail qui a consacré la séparation entre la conception et l’exécution (la division verticale du travail) : aux bureaux 5 P. Demeulenaere, 2003, op. cit.

des méthodes de penser et concevoir le travail, aux ouvriers de l’exécuter. Il y avait donc d’un côté des concepteurs qui établissaient les règles pour exécuter le travail et qui prescrivaient les tâches et des exécutants qui devaient se contenter de suivre les procédures écrites. Or, dans la réalité, les salariés usaient de leur savoir-faire, de leurs connaissances tacites pour exécuter le travail. Les sociologues ont pointé cet écart entre le travail prescrit par la direction et le travail réalisé par les ouvriers (si le taylorisme a fonctionné, c’est parce que dans la réalité, il a toléré cet écart entre organisation prescrite et organisation réelle du travail). G. Friedmann, le père de la sociologie du travail, avait déjà montré que l’homme est plus grand que sa tâche ; l’introduction du « scientific management » ne pouvait complètement supplanter le savoir empirique des salariés. Il y a donc des règles officielles ou des règles affichées (celles qui déterminent les normes d’une société ou d’un groupe), mais il y a aussi des règles effectives, les règles telles qu’elles sont appliquées et pratiquées. Ainsi notre sociologue du travail devra faire l’étude des règles

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prescrites par la direction, mais il doit également voir ce que les ouvriers font des règles. Autre exemple : celui de l’automobiliste. Sur voie rapide, la règle du code de la route nous impose de ne pas rouler au-dessus de 110 km/h. En roulant à 120, la grande majorité des automobilistes savent qu’ils ne seront pas sanctionnés, qu’ils ne seront verbalisés qu’auoncevoirle travail, aux ouvriers de l’exécuter. Il y avait donc d’un côté des concepteurs qui établissaient les règles pour exécuter le travail et qui prescrivaient les tâches et des exécutants qui devaient se contenter de suivre les procédures écrites. Or, dans la réalité, les salariés usaient de leur savoir-faire, de leurs connaissances tacites pour exécuter le travail. Les sociologues ont pointé cet écart entre le travail prescrit par la direction et le travail réalisé par les ouvriers (si le taylorisme a fonctionné, c’est parce que dans la réalité, il a toléré cet écart entre organisation prescrite et organisation réelle du travail). G. Friedmann, le père de la sociologie du travail, avait déjà montré que l’homme est plus grand que sa tâche ; l’introduction du « scientific management » ne pouvait complètement supplanter le savoir empirique des salariés. Il y a donc des règles officielles ou des règles affichées (celles qui déterminent les normes d’une société ou d’un groupe), mais il y a aussi des règles effectives, les règles telles qu’elles sont appliquées et pratiquées. Ainsi notre sociologue du travail devra faire l’étude des règles prescrites par la direction, mais il doit également voir ce que les ouvriers font des règles. Autre exemple : celui de l’automobiliste. Sur voie rapide, la règle du code de la route nous impose de ne pas rouler au-dessus de 110 km/h. En roulant à 120, la grande majorité des automobilistes savent qu’ils ne seront pas sanctionnés, qu’ils ne seront verbalisés qu’audessus de 130 km/h ; ils intègrent l’interprétation qu’ils font de la règle comme la règle officielle. Ils ne transgressent pas pour autant la règle, mais se l’approprient. Ils utilisent la marge d’autonomie, la latitude que laisse la règle. Lorsque la règle se resserre, les agents changent leurs pratiques. C’est le pari fait par les gouvernements qui misent sur la répression et le durcissement des normes de sécurité routière pour diminuer les accidents de la route. En fait, la règle résulte d’un compromis ; les règles ne sont pas totalement rigides, elles restent incertaines, révisables, pouvant s’ajuster aux expériences vécues, aux pratiques réelles. La règle en vigueur est le résultat d’une négociation, elle peut donc changer demain (prenons l’exemple des drogues douces : la règle officielle sanctionne la consommation des drogues douces ; or, elle la tolère plus ou moins, et les fumeurs de marijuana ne sont pas réellement inquiétés. On peut à plus ou moins long terme avoir une loi sur la dépénalisation des drogues douces, les règles seront changées. A contrario, pour lutter contre l’alcoolisme, on peut pénaliser la consommation d’alcool, mais « le ballon de rouge » est une règle trop coutumière en France pour l’interdire). Donc, la règle – retenons-le – est le produit d’un compromis entre des règles qui ont forme et valeur juridique, et les règles nées de la pratique.

La nature de la règle peut donc changer. Elle s’adapte comme s’adapte la sanction en rapport avec le degré de transgression de la règle. Le « petit délinquant » se verra rappeler les règles de la société pour prévenir leur non-respect. La sanction ne l’exclura pas de la société, mais devra s’acquitter d’une peine plus ou moins importante selon le délit. Au « délinquant endurci », qui récidive contre la règle, on l’exclura par une peine de prison [une société qui ne ferait qu’exclure par une peine de prison témoignerait de ses dysfonctionnements et de règles arbitraires. En 1997, aux Etats-Unis le taux d’incarcération est de 645 détenus pour 100.000 habitants, soit 5 fois le chiffre de 1973 – il est 6 à 10 fois supérieur à ceux des pays de l’Union Européenne. Sans parler du nombre de peines capitales dans certains états

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américains. Il semblerait que l’Etat social se voit de plus en plus remplacer par un Etat sécuritaire]. Enfin, la règle est le produit de différentes sources [Cf. le texte du fascicule]. Première source : la sanction. L’infraction suscite la sanction. Le rôle de la sanction est de renforcer la règle. Deuxième source : l’accord. Chacun respecte la règle parce qu’il a objectivement intérêt à respecter la règle [On peut ici renvoyer à la théorie du contrat social de J-J. Rousseau. Le philosophe imagine au début de la deuxième partie du discours de 1755 : avec le degré de transgression de la règle. Le « petit délinquant » se verra rappeler les règles de la société pour prévenir leur non-respect. La sanction ne l’exclura pas de la société, mais devra s’acquitter d’une peine plus ou moins importante selon le délit. Au « délinquant endurci », qui récidive contre la règle, on l’exclura par une peine de prison [une société qui ne ferait qu’exclure par une peine de prison témoignerait de ses dysfonctionnements et de règles arbitraires. En 1997, aux Etats-Unis le taux d’incarcération est de 645 détenus pour 100.000 habitants, soit 5 fois le chiffre de 1973 – il est 6 à 10 fois supérieur à ceux des pays de l’Union Européenne. Sans parler du nombre de peines capitales dans certains états américains. Il semblerait que l’Etat social se voit de plus en plus remplacer par un Etat sécuritaire]. Enfin, la règle est le produit de différentes sources [Cf. le texte du fascicule]. Première source : la sanction. L’infraction suscite la sanction. Le rôle de la sanction est de renforcer la règle. Deuxième source : l’accord. Chacun respecte la règle parce qu’il a objectivement intérêt à respecter la règle [On peut ici renvoyer à la théorie du contrat social de J-J. Rousseau. Le philosophe imagine au début de la deuxième partie du discours de 1755 : L’inégalité parmi les hommes, 2 chasseurs à l’état de nature, c’est-à-dire 2 individus libres de n’obéir qu’à leur intérêt particulier, parce qu’ils n’ont encore qu’une idée grossière des engagements mutuels et de l’avantage de les remplir. Il suppose les 2 chasseurs partis dans l’intention de capturer un cerf. Chacun guette sa proie dans des conditions telles qu’ils ne se voient pas l’un et l’autre. En restant à leur guet respectif, leur chance de capturer le cerf est forte. Il suppose alors qu’un lièvre vienne à passer par là. La possibilité qu’ils quittent leur poste de guet respectif pour capturer le lièvre est importante, mais il rompt du coup l’accord et laisse filer le cerf. Les personnages n’ont pas encore forcément conscience qu’en respectant une règle de conduite qui leur commande de ne pas suivre séparément leurs intérêts particuliers, leur bénéfice sera plus grand. C’est toute la différence entre l’état de nature et l’état de société]. Troisième source : la légitimité. La société ne peut se passer de pouvoir légitime et d’instances qui le régissent. Pour vivre en société comme pour participer à un jeu, il faut en connaître les règles. Les règles d’un jeu le définissent, mais elles le constituent aussi, puisqu’elles disent à quoi on joue, et comment on y joue ; elles le constituent en ce sens qu’elles fixent les sanctions qui doivent frapper les tricheries qui défigurent le jeu : elles sont donc contraignantes mais elles sont aussi du même coup habilitantes. La règle est ce qui permet de jouer, elle rend le jeu possible, c’est ce qui la rend légitime.

Par la sanction, l’accord et la légitimité, on se conforme donc aux règles établies, mais pourquoi se conforme-t-on aussi aux règles non strictement obligatoires ? En s’y conformant, notre légitimité vis-à-vis du groupe est renforcée, autrement dit on gagne en reconnaissance, en centralité. (Exemple : l’Université est marquée par un fort pouvoir mandarinal ; la plupart des universitaires dénoncent ce système mandarinal tout en le reproduisant – celui qui

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s’attaquerait trop violemment à ce pouvoir subirait un isolement tel qu’il ne serait plus entendu). On peut aussi choisir volontairement de sortir du groupe car on refuse les règles en vigueur (le jeune docteur qui refuse de cautionner le système en place). Sortir du groupe a un prix (ne pas faire une carrière universitaire). Il n’est pas permis de quitter certains groupes comme la nation. La conséquence de la marginalité vis-à-vis de tels groupes est la création de contre-groupes (les terroristes basques ou corses vis-à-vis de leur Etat respectif). Le non-respect de la règle conduit donc à la sanction, variable en fonction du crime. On appelle contrôle social les moyens utilisés par la société pour prévenir et contrecarrer les conduites déviantes et maintenir la stabilité sociale. Autrement dit le contrôle social est selon J-D. Reynaud « cette part de l’activité de la société qui consiste à assurer le maintien des règles et à lutter contre la déviance, que ce soit par les appareils institutionnels (police, école, tribunaux...) ou par la pression diffuse qu’exerce la réprobation ou les sanctions spontanées qu’elles provoquent ». Le contrôle social peut revêtir deux formes : -le contrôle social formel décrit le processus par lequel des groupes sociaux particuliers ou les instances officielles contrôlent la société globale et régulent les activités déviantes par l’application de sanctions de différentes natures : sanctions morales (réprobations, blâmes...), sanctions religieuses (excommunication), sanctions pénales (amendes, peine de prison...) ; -le contrôle social informel s’exerce lui de manière continue à travers les interactions quotidiennes qui rythment la vie des différents groupes sociaux. C’est par lui que s’effectue l’intériorisation des normes et des valeurs d’un groupe particulier dans la société globale. La régulation des comportements prend alors des formes plus subtiles et plus diffuses. Un sourire, un signe d’approbation suffiront à encourager le comportement souhaité tandis qu’un simple froncement de sourcils, un silence découragera toute velléité de déviance. L’efficacité de ce contrôle informel est d’autant plus forte que l’individu reconnaît une forte légitimité à ceux qui l’exercent (parents, amis, groupes de référence...). Le contrôle social informel prédomine au sein des groupes primaires comme la famille, le groupe des amis ou le voisinage. L’opinion publique est une autre forme de contrôle social informel. pourquoi se conforme-t-on aussi aux règles non strictement obligatoires ? En s’y conformant, notre légitimité vis-à-vis du groupe est renforcée, autrement dit on gagne en reconnaissance, en centralité. (Exemple : l’Université est marquée par un fort pouvoir mandarinal ; la plupart des universitaires dénoncent ce système mandarinal tout en le reproduisant – celui qui s’attaquerait trop violemment à ce pouvoir subirait un isolement tel qu’il ne serait plus entendu). On peut aussi choisir volontairement de sortir du groupe car on refuse les règles en vigueur (le jeune docteur qui refuse de cautionner le système en place). Sortir du groupe a un prix (ne pas faire une carrière universitaire). Il n’est pas permis de quitter certains groupes comme la nation. La conséquence de la marginalité vis-à-vis de tels groupes est la création de contre-groupes (les terroristes basques ou corses vis-à-vis de leur Etat respectif). Le non-respect de la règle conduit donc à la sanction, variable en fonction du crime. On appelle contrôle social les moyens utilisés par la société pour prévenir et contrecarrer les conduites déviantes et maintenir la stabilité sociale. Autrement dit le contrôle social est selon J-D. Reynaud « cette part de l’activité de la société qui consiste à assurer le maintien des règles et à lutter contre la déviance, que ce soit par les appareils institutionnels (police, école, tribunaux...) ou par la pression diffuse qu’exerce la réprobation ou les sanctions spontanées qu’elles provoquent ».

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Le contrôle social peut revêtir deux formes : -le contrôle social formel décrit le processus par lequel des groupes sociaux particuliers ou les instances officielles contrôlent la société globale et régulent les activités déviantes par l’application de sanctions de différentes natures : sanctions morales (réprobations, blâmes...), sanctions religieuses (excommunication), sanctions pénales (amendes, peine de prison...) ; -le contrôle social informel s’exerce lui de manière continue à travers les interactions quotidiennes qui rythment la vie des différents groupes sociaux. C’est par lui que s’effectue l’intériorisation des normes et des valeurs d’un groupe particulier dans la société globale. La régulation des comportements prend alors des formes plus subtiles et plus diffuses. Un sourire, un signe d’approbation suffiront à encourager le comportement souhaité tandis qu’un simple froncement de sourcils, un silence découragera toute velléité de déviance. L’efficacité de ce contrôle informel est d’autant plus forte que l’individu reconnaît une forte légitimité à ceux qui l’exercent (parents, amis, groupes de référence...). Le contrôle social informel prédomine au sein des groupes primaires comme la famille, le groupe des amis ou le voisinage. L’opinion publique est une autre forme de contrôle social informel.

Cette distinction entre contrôle social formel et contrôle social informel renvoie à la catégorisation de Weber qui distinguait les sanctions « physiques » ou « externes » des sanctions « psychiques » ou « internes ». « On peut parler de sanctions physiques lorsqu’il y a possibilité d’une contrainte pratique imposée par une personne ou un groupe de personnes sur une autre personne ou un autre groupe de personnes. Cette contrainte physique peut elle-même être plus ou moins forte, et plus ou moins expressément « physique » : de la sanction de la mort ou de la prison à une sanction sous la forme d’une amende monétaire (…). Les sanctions psychiques ou internes correspondent à des contraintes qui ne s’exercent que sur l’esprit des personnes. Il s’agit alors soit de l’autodésapprobation interne, soit de la désapprobation de l’entourage (les deux pouvant aller ensemble) »catégorisation de Weber qui distinguait les sanctions « physiques » ou « externes » des sanctions « psychiques » ou « internes ». « On peut parler de sanctions physiques lorsqu’il y a possibilité d’une contrainte pratique imposée par une personne ou un groupe de personnes sur une autre personne ou un autre groupe de personnes. Cette contrainte physique peut elle-même être plus ou moins forte, et plus ou moins expressément « physique » : de la sanction de la mort ou de la prison à une sanction sous la forme d’une amende monétaire (…). Les sanctions psychiques ou internes correspondent à des contraintes qui ne s’exercent que sur l’esprit des personnes. Il s’agit alors soit de l’autodésapprobation interne, soit de la désapprobation de l’entourage (les deux pouvant aller ensemble) »6. Le contrôle social – quel que soit le type – ne peut totalement empêcher les situations d’anomie ou de déviance.

3. Anomie et déviance 3.1. De la déviance à l’anomie L’existence de règles, de normes sociales ne préjugent pas de leur respect. Il existe des normes auxquelles presque personne ne se conforme, bien que tout le monde les accepte (le piéton traversera hors des passages cloutés, l’élève ne respectera pas tel point du règlement intérieur du lycée, le salarié ne suivra pas telle consigne de sécurité, etc.). Il n’y a jamais une totale conformité à l’ensemble des règles qu’une société développe. On peut dire qu’il y a toujours une tolérance entre ce qui est prescrit par les normes, les règles, et ce que l’on fait en considération de ces normes, ces règles. On peut donc admettre un certain

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degré d’écart à la norme, un certain degré de déviance (de non-conformité) mais on admet difficilement que la déviance augmente. Par déviance, on entend donc l’ensemble des conduites variées ayant en commun le non-respect de normes généralement acceptées. Il y a donc des degrés de gravité dans les actes déviants puisqu’ils recouvrent aussi bien la corruption, le crime que les comportements jugés atypiques de ceux qui vivent en marge des normes reconnues. 6 P. Demeulenaere, 2003, op. cit., p. 20.

Menace pour la société, la déviance limitée peut aussi contribuer à resserrer les liens entre les membres du groupe, à préciser les normes et à mesurer le degré d’adhésion à celles-ci (la pratique clandestine de l’avortement a participé à sa légalisation, le fumeur de marijuana banalise l’usage de drogues douces). On peut distinguer la notion de déviance de celle de variance, qui est un comportement atypique mais toutefois toléré par la société. Dans cette optique, la déviance se caractérisera avant tout par la sanction sociale qu’elle peut entraîner : il y a déviance chaque fois qu’un comportement est susceptible d’être sanctionné. La régulation sociale – dont le rôle est de maintenir la règle tant que faire se peut – ne peut exclure totalement la déviance, elle assure un équilibre mais un équilibre instable. Il est donc toujours possible, dans toute société, à tout moment, de trouver des points d’anomie, c’est à iancelimitée peut aussi contribuer à resserrer les liens entre les membres du groupe, à préciser les normes et à mesurer le degré d’adhésion à celles-ci (la pratique clandestine de l’avortement a participé à sa légalisation, le fumeur de marijuana banalise l’usage de drogues douces). On peut distinguer la notion de déviance de celle de variance, qui est un comportement atypique mais toutefois toléré par la société. Dans cette optique, la déviance se caractérisera avant tout par la sanction sociale qu’elle peut entraîner : il y a déviance chaque fois qu’un comportement est susceptible d’être sanctionné. La régulation sociale – dont le rôle est de maintenir la règle tant que faire se peut – ne peut exclure totalement la déviance, elle assure un équilibre mais un équilibre instable. Il est donc toujours possible, dans toute société, à tout moment, de trouver des points d’anomie, c’est à dire de voir des règles s’ébranler ou disparaître. Pour J-D. Reynaud (1989), l’anomie n’est pas une situation anormale ou exceptionnelle : « Il est courant que d’autres règles se créent, il est exceptionnel que le remplacement de l’ancien par le nouveau se fasse sans discontinuité et même sans crise. Une anomie partielle caractérise tout système social. Elle est synonyme de changement ou d’apprentissage ». Là où la situation anomique peut devenir dangereuse pour le système social c’est lorsque les individus ne savent plus quelles normes ils doivent suivre, lorsque l’affaiblissement et l’indétermination des règles rendent impossible l’accord avec autrui. Ce qui menace un système social, c’est bien la guerre, toujours possible, de tous contre tous, c’est l’anomie en tant que déficit de régulation. On est proche ici de la définition durkheimienne qui utilisait la notion d’anomie pour désigner la situation désastreuse dans laquelle la société industrielle moderne et les individus se trouvaient plongés au tournant du siècle par l’absence ou la faiblesse des règles morales. Or, Durkheim pensait qu’il n’y a pas de vie sociale possible pour les êtres humains sans règles morales, mais aussi juridiques, capables de contenir leurs ambitions, leurs intérêts, leurs désirs individuels. De nombreux actes déviants peuvent être la conséquence d’une situation anomique, mais l’écart à la norme ne peut être réduit à un dysfonctionnement de la société. Nous avons dit que

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l’idée de norme était associée à la possibilité d’une déviance (non respect de la norme). Ainsi d’un point de vue formel, les déviants sont ceux qui s’écartent d’une norme imposée par un groupe, l’acte criminel est selon la définition durkheimienne l’acte qui s’écarte des normes communément admises par tous. Cette définition générique de la déviance est utile, mais uniformise la catégorie de déviance et minore les motifs qui peuvent conduire à un non-respect de la norme. Il y a donc une pluralité de types de déviance : la déviance comme

variance (comportement atypique), la déviance comme situation anomique (déficit de régulation), la déviance comme tricherie (refus de respecter les règles), la déviance comme contestation des valeurs et des normes (désaccord sur les normes en vigueur qui paraissent aux acteurs concernés illégitimes et injustifiées), la déviance comme innovation (anticipation sur de nouvelles règles en train d’émerger)… De plus, les interprétations diffèrent [comme nous allons le voir à travers l’exemple de la délinquance juvénile]. régulation), la déviance comme tricherie (refus de respecter les règles), la déviance comme contestation des valeurs et des normes (désaccord sur les normes en vigueur qui paraissent aux acteurs concernés illégitimes et injustifiées), la déviance comme innovation (anticipation sur de nouvelles règles en train d’émerger)… De plus, les interprétations diffèrent [comme nous allons le voir à travers l’exemple de la délinquance juvénile].

3.2. Les différentes déterminations sociologiques de la déviance : l’exemple de la délinquance juvénile7 On peut schématiquement distinguer deux grandes interprétations pour expliquer la délinquance juvénile. -Première interprétation : La délinquance juvénile résulterait d’un défaut du processus de socialisation. On expliquerait donc la délinquance des jeunes par les « ratés » de socialisation qui ne sont pas dissociables des conditions de socialisation qu’offrent les différentes classes sociales. Ainsi, on observe une différence quantitative et qualitative du phénomène de la délinquance juvénile selon l’appartenance de classe. Répartition des jeunes délinquants par CSP

Manoeuvres O.S. et O.P. Employés Cadres Moyens Artisans Cadres sup. Professions libérales Répartition jeunes de 10 à 18 ans, par CSP du chef de ménage 5,5 41 12,4 24,5 16,7 Répartition jeunes délinquants par CSP du chef de ménage 12 41 23 11 11

On remarque une surreprésentation de la délinquance juvénile dans les classes « défavorisées » (manoeuvres, ouvriers, employés). Chamboredon observe aussi que la délinquance des jeunes de classe populaire et celle des jeunes des classes moyennes et

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7 sur la base d’un article de J-C. Chamboredon : « La délinquance juvénile, essai de constructiond’objet », Revue Française de Sociologie, 1971, XII, pp. 337-377.

supérieures se distinguent l’une et l’autre par un ensemble de traits systématiques (par exemple, les âges des délinquants de classe populaire sont plus étalés, alors qu’ils sont, chez les délinquants des classes moyennes et supérieures plus resserrés autour du temps de la « crise d’adolescence »). L’auteur parle d’une délinquance « anomique » chez les jeunes des classes favorisées, symptôme et conséquence d’une crise d’éducation, qu’il distingue d’une délinquance « endémique » qui touche les jeunes des classes populaires. La délinquance anomique renvoie à la révolte contre les parents et les valeurs qu’ils transmettent, elle se caractérise par une faible différenciation selon le sexe, l’absence de récidives, l’augmentation des délits autre que le vol. Par rapport à la délinquance anomique des adolescentes des classes favorisées, la délinquance des enfants issus des catégories les plus défavorisées apparaît comme une délinquance endémique (qui sévit de façon permanente). Elle n’est pas la conséquence d’une crise d’éducation, mais plutôt une conséquence possible des conditions de vie. La délinquance juvénile au sein des classes défavorisées peut varier en nature : la délinquance des sujets de la classe ouvrière se distingue nettement de celle des enfants d’employés : plus précoces, plus souvent récidivistes, presque exclusivement garçons, agissant plus souvent en bande, coupables plus souvent de vols caractérisés. Les actes déviants à répétition peuvent les conduire à une carrière criminelle. A cette variable « classe sociale », on pourrait ajouter l’effet du contexte social comme facteur explicatif de la délinquance juvénile (ex. : la violence des grands ensembles). -Deuxième interprétation : Howard S. Becker (1928 -), sociologue américain, dans exemple, les âges des délinquants de classe populaire sont plus étalés, alors qu’ils sont, chez les délinquants des classes moyennes et supérieures plus resserrés autour du temps de la « crise d’adolescence »). L’auteur parle d’une délinquance « anomique » chez les jeunes des classes favorisées, symptôme et conséquence d’une crise d’éducation, qu’il distingue d’une délinquance « endémique » qui touche les jeunes des classes populaires. La délinquance anomique renvoie à la révolte contre les parents et les valeurs qu’ils transmettent, elle se caractérise par une faible différenciation selon le sexe, l’absence de récidives, l’augmentation des délits autre que le vol. Par rapport à la délinquance anomique des adolescentes des classes favorisées, la délinquance des enfants issus des catégories les plus défavorisées apparaît comme une délinquance endémique (qui sévit de façon permanente). Elle n’est pas la conséquence d’une crise d’éducation, mais plutôt une conséquence possible des conditions de vie. La délinquance juvénile au sein des classes défavorisées peut varier en nature : la délinquance des sujets de la classe ouvrière se distingue nettement de celle des enfants d’employés : plus précoces, plus souvent récidivistes, presque exclusivement garçons, agissant plus souvent en bande, coupables plus souvent de vols caractérisés. Les actes déviants à répétition peuvent les

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conduire à une carrière criminelle. A cette variable « classe sociale », on pourrait ajouter l’effet du contexte social comme facteur explicatif de la délinquance juvénile (ex. : la violence des grands ensembles). -Deuxième interprétation : Howard S. Becker (1928 -), sociologue américain, dans Outsiders (1963), part d’une critique des sociologues qui voient dans la déviance soit une manifestation pathologique et le produit d’une maladie mentale, soit le symptôme d’une dysfonction ou d’une désorganisation sociale. La thèse de Becker est que la déviance n’est pas une donnée substantielle de l’individu dit « déviant », elle est moins un état de fait, qu’une forme de jugement sur les actes d’un individu, un label, une qualification. « Les groupes sociaux créent la déviance en instituant des normes dont la transgression constitue la déviance, en appliquant ces normes à certains individus et en les étiquetant comme des déviants ». D’ailleurs tous les comportements qui contreviennent à la loi ne sont pas enregistrés comme délits, soit qu’ils ne sont pas signalés (on n’ira pas signaler le tapage nocturne de ses voisins, on ne dénoncerons pas quelques tagueurs pris sur le fait...), soit parce qu’ils sont tolérés pour certains sous-groupes privilégiés (le dopage d’un athlète de renom, les pratiques de cooptation

ou de malversation dans certains milieux...) ou, au contraire, particulièrement défavorisées (dans certains quartiers dits « sensibles », on ne traite plus les petits délits, et on intervient que lorsqu’il y a une grosse affaire). On se comporte en déviant dès lors que l’on est reconnu comme tel nous dit Becker. Antérieurement à tout délit, c’est l’ensemble du comportement de certains individus ou de certains sous-groupes qui est, progressivement, soupçonné ou condamné. Le mécanisme de « marquage » ou « d’étiquetage » prépare à la carrière de déviant. Certains adolescents sont repérés comme des déviants potentiels ; la surveillance dont ils sont l’objet ne fait que s’accroître ; les chances que leurs comportements illicites soient repérés et qualifiés comme délits s’amplifient (exemple : le programme de surveillance des jeunes délinquants en Angleterre). Etiqueter comme « délinquants », les adolescents ou groupes d’adolescents, sentant l’ensemble de leur conduite réprouvé, ne font dès lors pas de différence entre des comportements réprouvés par l’entourage et des actes explicitement interdits par la communauté. Ils vont passer d’une situation de prédélinquants à la situation de délinquants confirmés. [Le « tout répressif » incarné par la politique de la « tolérance zéro » participe à un important mouvement d’étiquetage des exclus ; aux Etats-Unis, on est ainsi pour certains auteurs passé d’un Etat providence à un Etat pénitence. On peut aussi interroger les lois françaises sur la mendicité ou la prostitution]. (dans certains quartiers dits « sensibles », on ne traite plus les petits délits, et on intervient que lorsqu’il y a une grosse affaire). On se comporte en déviant dès lors que l’on est reconnu comme tel nous dit Becker. Antérieurement à tout délit, c’est l’ensemble du comportement de certains individus ou de certains sous-groupes qui est, progressivement, soupçonné ou condamné. Le mécanisme de « marquage » ou « d’étiquetage » prépare à la carrière de déviant. Certains adolescents sont repérés comme des déviants potentiels ; la surveillance dont ils sont l’objet ne fait que s’accroître ; les chances que leurs comportements illicites soient repérés et qualifiés comme délits s’amplifient (exemple : le programme de surveillance des jeunes délinquants en Angleterre). Etiqueter comme « délinquants », les adolescents ou groupes d’adolescents, sentant

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l’ensemble de leur conduite réprouvé, ne font dès lors pas de différence entre des comportements réprouvés par l’entourage et des actes explicitement interdits par la communauté. Ils vont passer d’une situation de prédélinquants à la situation de délinquants confirmés. [Le « tout répressif » incarné par la politique de la « tolérance zéro » participe à un important mouvement d’étiquetage des exclus ; aux Etats-Unis, on est ainsi pour certains auteurs passé d’un Etat providence à un Etat pénitence. On peut aussi interroger les lois françaises sur la mendicité ou la prostitution].

Becker distingue différents types de comportements déviants :

Obéissant à la norme Transgressant la norme Perçu comme déviant Accusé à tort Pleinement déviant Non perçu comme déviant conforme secrètement déviant

H. S. Becker, Outsiders, Métailié,1963. Il faut – pour réfléchir objectivement sur la notion de délinquance juvénile – tenir les deux bouts de la chaîne et concilier les deux interprétations. On ne peut donc ignorer l’influence propre à l’appareil de traitement de la délinquance, c’est-à-dire le système des agents de régression, de détection et de traitement chargé de détecter, de juger, de punir et d’amender les jeunes délinquants. D’un autre côté, on ne peut pas minimiser, encore moins occulter le caractère explicatif des déterminations sociales du comportement des adolescents qui transgressent les normes. La déviance – et en particulier la délinquance juvénile – est

effectivement une construction sociale : la société définit le comportement qui est déviant, elle le fait en rapport avec le type de régulation qu’elle développe. elle le fait en rapport avec letype de régulation qu’elle développe.

En guise de conclusion, nous dirons que l’efficacité du processus de régulation sociale se mesure à sa capacité à contenir, prévenir, gérer et traiter les situations déviantes et anomiques.

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