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Points de torsion sur les courbes elliptiques Colin Audrey, sous la direction de Andreas Höring

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Points de torsion sur les courbes elliptiques

Colin Audrey, sous la direction de Andreas Höring

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Remerciements

Je tiens à remercier toutes les personnes qui m’ont aidé à rédiger ce mémoire ; en particulier mondirecteur Andreas Höring qui m’a épaulée tout au long de ce travail.

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Table des matières

Remerciements 1

1 Courbes planes 41.1 Anneaux de polynômes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41.2 Courbes planes affines . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41.3 Nombre d’intersection . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61.4 Résultants . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7

2 Courbes planes projectives 82.1 Plan projectif . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 82.2 La loi de groupe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 92.3 Points rationnels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 122.4 Une introduction aux nombres p-adiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13

3 Théorie des courbes elliptiques 163.1 Définition d’une courbe elliptique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163.2 L’équation de Weierstrass d’une courbe elliptique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 173.3 Réduction d’une courbe elliptique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 193.4 Courbes elliptiques surQp . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 203.5 Points de torsion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 22

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Introduction

L’objectif de ce stage de mémoire d’environ de deux mois était de me permettre de faire mes pre-mières armes dans la théorie des courbes elliptiques, et plus précisément d’étudier la structure de l’en-semble des points de torsion sur des courbes rationnelles. J’ai orienté mon mémoire sur la démonstrationd’un théorème fondamental : celui de LUTZ-NAGELL, qui permet de décrire l’ensemble des points detorsion d’une courbe elliptique à coefficients dansQ.Si à la base une mise à niveau en gémoétrie projective fut nécessaire, il s’est avéré que des pré requisd’algèbre générale, puis essentiellement de théorie algébrique des nombres, fut indispensable pour fairecomprendre, mieux que servilement, les propositions, théorèmes et les assertions logiques qui y sontassociés. Au-delà de rédiger un cours de mathématique, j’ai essayé de m’approprier les définitions etdémonstrations afférentes, afin d’éviter une formulation "elliptique" de mes raisonnements.Dans cette optique, en m’appuyant en paticulier sur le cours de la théorie des courbes elliptiques de J.SMILNE, abordée dans son livre en version anglaise "ELLIPTIC CURVES" et également sur d’autresouvrages cités en référence, j’ai essayé de traduire par ce qui suit, la "substantifique moelle" de mesrecherches.

Pré requics

Seront supposés connu les notions algébriques de bases, analyse et topologique.

Notations

On utilisera les notations standards ; Z l’anneau des entiers,Q le corps des nombres rationnels, etFp

le corps avec p premier. Tout au long du mémoire, k sera un corps et kal une clôture algébrique de k. Tousles anneaux seront supposés commutatifs avec 1 et pour un anneau A, A× sera le groupe des inversiblesde A; A× = {a ∈ A| il existe b ∈ A tel que ab = 1}.Pour k un coprs, on notera son caractéristique comme car(k).On notera le plan affine sur k commeA2(k) = k× k.

Xde f= Y X est définie par Y, ou égual à Y par définition ;

X ⊂ Y X est un sous ensemble de Y;X ' Y X et Y sont isomorphes.

On rappelle qu’un corps k est dit parfait si pour toute extension algébrique k ⊂ kp, p≥ 1, kp = k.

On rapelle de plus qu’une corde est un segment de droite joignant deux points d’une circonférence.

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Avant-propos

Nous allons énoncer la définition que nous utiliserons des courbes elliptiques, ainsi que le théorèmecentral du mémoire. Ceux-ci seront bien entendu justifiés dans la suite.

0.0.1. Définition: Une courbe elliptique E définie sur un corps k est le lieu de zéros d’une équationhomogène ; dite de Weierstrass, de la forme

E := {(x : y : z) ∈P2|Y 2Z = X3 +aXZ2 +bZ3,a,b ∈ k,4a3 +27b2 6= 0}

Dans la suite, il sera utile de considérer la courbe dans le plan affineA2, on utilisera alors l’équation :

E := {(x,y) ∈A2|Y 2 = X3 +aX +b}

On notera E(k) l’ensemble des zéros de cette équation dans P2, et on distinguera le point O = (0 : 1 :0) ∈ E(k) ; dit point à l’infini.La condition 4a3 +27b2 6= 0 assure que la courbe ne contient aucun point dit singulier.Les courbes elliptiques seront les objets principaux de ce mémoire, avec une attention particulière pourles courbes à coefficients dans Q. On verra que les courbes elliptiques ont des propriètés algébriques.L’un des faits les plus surprenants est que si E est une courbe elliptique définie sur un corps k, alors E(k)est munie d’une structure de groupe abélien.Par conséquent, on peut parler de points dit de torsion ; qui forment un sous-groupe de E(k) noté E(k)tors.

0.0.2. Définition: Un point P = (x : y : z) ∈ E(k) est dit de torsion, s’il est d’ordre fini ; i.e si il existem ∈ Z tel que mP = O.

Le but de tout ce qui suit sera de démontrer le théorème de LUTZ-NAGELL, qui propose un algo-rithme permettant de compter les points de torsion d’une telle courbe, dans le cas où k =Q.

0.0.3. Théorème:(LUTZ-NAGELL)Soit la courbe elliptique E : Y 2Z = X3 +aXZ2 +bZ3, avec a, b ∈ Z, ∆ = 4a3 +27b2 6= 0Si P = (x : y : 1) ∈ E(Q)tors, alors x,y ∈ Z et soit y = 0 soit y |∆.

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Chapitre 1

Courbes planes

Dans ce chapitre, nous verrons une partie de la théorie des courbes planes, en ometant des détailsmais qui peuvent être trouvés dans Fulton 1969 et Walker 1950.

1.1 Anneaux de polynômes

On rappelle que les anneaux de polynômes sur un corps k sont factoriels ; i.e. qu’ils sont un domainede factorisation unique. Donc dans k[X1, · · · ,Xn], tout polynôme f peut être écrit comme le produit

f = f m11 · · · f

mrr

de puissance de polynôme irréductibles fi avec les fi qui ne sont pas une constante multiplicative del’autre, et la factorisation est unique à une constante multiplicative d’un fi près.Les facteurs répétés de f sont ceux des fi avec mi > 1.On rappelle de plus que si f est irréductible, alors l’idéal ( f ) est premier.

1.2 Courbes planes affines

1.2.1. Définition: Soit f ∈ k[X ,Y ] un polynôme non constant qui n’a pas de facteurs répétés dans kal .On définit une courbe affine plane sur k comme le lieu de zéros de f :

C f (k) := {(x,y) ∈ k2| f (x,y) = 0}.

1.2.2. Remarque: Une courbe affine plane est une classe d’équivalence de polynômes non-constantdans k[X ,Y ] qui n’ont pas de facteurs répétés dans kal[X ,Y ] ; où deux polynômes sont dits équivalents sil’un est un multiple constant de l’autre.Alors C f dénote la classe d’équivalence qui contient f .

1.2.3. Définition: Une courbe affine plane est dite irréductible si son polynôme f l’est dans k[X ,Y ], etest dite géométriquement irréductible si le reste dans kal .Sinon, elle est dite réductible et on peut écrire

C f (k) =C f1(k)∪ . . .∪C fr(k),

où les f1, . . . , fr sont les polynômes irréductibles de f .On appelle les C fi , i∈ {1, . . . ,r} les composantes irréductibles de C f .

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1.2.4. Exemple: La courbe C f : X2 − 2Y 2 = 0 est irréductible sur Q, mais devient le produit (X −√2Y )(X +

√2Y ) dansQ[

√2], donc C f n’est pas géométriquement irréductible surQ.

1.2.5. Définition: Le degré de la courbe C f est égal au degré du polynôme la définissant ; i.e. au degréde f .

Nous définissons les dérivées partielles d’un polynôme par les formules usuelles.

1.2.6. Définition: Un point P = (a,b) ∈C f (k) est dit singulier si les deux dérivées partielles de f sontnulles ; i.e.

∂ f∂x

(a,b) = 0 et∂ f∂y

(a,b) = 0.

Un point P est dit non-singulier si au moins une des deux dérivées partielles est non nulle, et dans ce casla tangente à C f en P est définie par :

(∂ f∂x

)P(X−a)+(∂ f∂y

)P(Y −b) = 0

Une courbe C f est dite non-singulière ou lisse si elle n’a pas de point singulier dans k.

1.2.7. Remarque: Un point d’intersection de deux composantes irréductibles d’une courbe affine planeest toujours singulier.

1.2.8. Exemple: On considère la courbe C : Y 2 = X3+aX +b. On suppose avoir un point singulier de C ;i.e. un point (x,y) tel que ∂Y f (x,y) = 2y = 0 et ∂X f (x,y) = 3x2 +a = 0, où f (X ,Y ) = Y 2−X3−aX−b

1. On suppose car(k) 6= 2. Alors on a y = 0 et x est une racine de 3X2 +a et de X3 +aX +b.Il en suit que :

C est lisse ⇐⇒ X3 +aX +b n’a pas de racine dans kal

⇐⇒ son déterminant ∆ = 4a3 +27b2 6= 0

2. On suppose car(k) = 2. Alors l’égalité 2Y = 0 est toujours vraie, donc C a toujours un pointsingulier dans kal (α,β ) qui vérifie :

3α2 +a = 0 et β

2 = α3 +aα +b.

Dans la littérature, on définit les tangentes en des points non-singuliers. Cependant, nous aurons be-soin dans la suite de les définir en des points singuliers.Nous procéderons de la manière suivante.

Soit P = (a,b) ∈C f (k). On peut écrire f comme un polynôme en X−a et Y −b avec ses coefficientsdans k ; i.e.

f (X ,Y ) = f1(X−a,Y −b)+ . . .+ fn(X−a,Y −b),

où les fi sont homogènes de degré i en X−a et Y −b.Le point P est non-singulier si et seulement si f1 6= 0, et dans ce cas la droite tangente à C f en P est ladroite d’équation f1 = 0.

Supposons maintenant P singulier, alors on écrit

f (X ,Y ) = fm(X−a,Y −b)+ des termes de plus haut degré, avec fm 6= 0 , m≥ 2

On dira alors que P a multiplicité m sur C, qu’on notera mP(C).

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En particulier, si m = 2, alors P est appelé point double.Pour simplifier, supposons (a,b) = (0,0), alors sur kal on a,

fm(X ,Y ) = ∏Lrii ,

où chaque Li est un polynôme homogène ciX +diY de degré 1 avec ses coefficients dans kal . Les droitesLi = 0 ; supposées distinctes, sont appelées les droites tangentes de C f en P, et ri la multiplicité de Li.Le point P est dit avoir une singularité ordinaire si les droites tangentes sont distinctes, i.e. ri = 1 pourtout i.Un point double ordinaire est appelé un noeud.

1.2.9. Exemple: On considère la courbe Y 2 = X3 +aX2.On veut étudier les points singuliers de cette courbe. On pose f (X ,Y ) =Y 2−X3−aX2 et on cherche lespoints (x,y) qui annulent les deux dérivées partielles de f , ∂X f = 3X2 +2aX et ∂Y f = 2Y .

1. On suppose a = 0. Alors la courbe devient Y 2 = X3 et :

∂X f = ∂Y f = 0 ⇐⇒ (x,y) = (0,0).

On peut écrire alors f (X ,Y )= f2(X−0,Y−0)+ f3(X−0,Y−0)= f (X ,Y )= f2(X ,Y )+ f3(X ,Y ),où f2(X ,Y ) =Y 2 et f3(X ,Y ) = X3. Donc P = (0,0) est un point double et la droite tangente en Pa pour équation L : Y = 0.

2. On suppose a 6= 0. Il y a donc deux points singuliers (0,0) et (−23 a,0) ; or on remarque que le

dernier point n’apartient pas à la courbe. On s’intéressera donc au point P = (0,0).On peut écrire f (X ,Y ) = f2(X −0,Y −0)+ f3(X −0,Y −0) = (aX2−Y 2)+X3. Donc la multi-plicité du point P = (0,0) est 2. De plus, f2(X ,Y ) = aX2−Y 2 = (

√aX +Y )(

√aX−Y ) = L1.L2,

donc P est un point double ordinaire et donc un noeud. De plus les tangentes en P sont les droitesd’équations Y =±

√aX .

1.3 Nombre d’intersection

Soit F (k) l’ensemble des pairs de polynômes f ,g ∈ k[X ,Y ] qui n’ont pas de facteurs communs hdans k[X ,Y ] avec h(0,0) = 0.Pour ( f ,g) ∈F (k), nous voulons définir le nombre d’intersections en l’origine des courbes C f et Cg. Laproposition suivante montre qu’il existe qu’une unique manière raisonnable de le faire.

1.3.1. Proposition: Il existe une unique application I : F (k)→N telle que :

1. I (X ,Y ) = 1 ;

2. I ( f ,g) = I (g, f ) pour tout ( f ,g) ∈F ;

3. I ( f ,gh) = I ( f ,g)+I ( f ,h) pour tout ( f ,g),( f ,h) ∈F

4. I ( f ,g+h f ) = I ( f ,g) pour tout ( f ,g) ∈F , h ∈ k[X ,Y ] ;

5. I ( f ,g) = 0 si g(0,0) 6= 0 ;

Démonstration. Fulton 1969, III 3.

1.3.2. Définition: Soit deux courbes C f et Cg dansA2(k), et soit P ∈C f (k)∩Cg(k).On dit que P est un point isolé de C f ∩Cg si C f et Cg n’ont pas de composantes irréductibles passant parP en commun. Dans ce cas, f et g n’ont pas de facteur commun h tel que h(a,b) = 0 et par conséquenton peut définir la multiplicité d’intersection de C f et Cg en P par :

I (P,C f ∩Cg)de f= I

(f (X +a,Y +b),g(X +a,Y +b)

).

En particulier, si P = (0,0) alors I (P,C f ∩Cg)de f= I ( f ,g).

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1.3.3. Remarque: On remarque que, I (P,C∩D) = 1 si et seulement si P est un point non-singulier deC et D et que les droites tangentes en P sont distinctes.Plus généralement

I (P,C∩D)≥ mP(C).mP(D),

avec égalité si et seulement si elle n’ont pas de droites tangentes en P en communs.

1.3.4. Exemple: En appliquant la propriété 1.3.1, on trouve I (Y 2−X2(X + 1),X) = I (Y 2,X) = 2.Bien que l’axe des Y ne soit pas tangent à la courbe Y 2 = X2(X + 1), le nombre d’intersection est > 1car l’origine est un point singulier.

1.3.5. Définition: Un point P ∈C(k) est un point col si c’est un point double avec une seule tangente Let que I (P,L∩C) = 3.

1.3.6. Exemple: Soient la courbe affine C : Y 2 = X3 et la droite L : Y = 0 sa tangente en P = (0,0).On a, f (X ,Y ) = Y 2−X3 = f2(X ,Y )+ f3(X ,Y ), donc P est un point double ordinaire.De plus, I (P,L∩C) = I (Y 2−X3,Y ) = I (X3,Y ) = 3. Donc P est un point col.

1.3.7. Définition: En général, un point non-singulier P d’une courbe C est appelé point d’inflexion si lamultiplicité d’intersection de la droite tangente en P et C est ≥ 3.

1.4 Résultants

1.4.1. Définition: Soit A un anneau commutatif, P et Q deux polynômes non nuls de degrés respectifs n

et m à coefficients dans A. On pose P =n∑

i=0aiX i et Q =

m∑j=0

b jX j. Le résultant de P et Q; noté R(P,Q),

est le déterminant de leur matrice de Sylvester :

pn pn−1 · · · · · · p0 0 · · · 0

0 pn pn−1 · · · . . . . . . . . ....

. . . . . . . . . p0 00 · · · 0 pn pn−1 · · · · · · p0

qm · · · · · · q1 q0 0 · · · 0

0 qm. . . . . . . . .

......

. . . . . . · · · q1 q0 00 · · · 0 qm · · · · · · q1 q0

1.4.2. Proposition: Soient f (X ,Y ),g(X ,Y ) ∈ k[X ,Y ], et soit r(X) ∈ k[X ] leur résultant. Alors, il existea(X ,Y ),b(X ,Y ) ∈ k[X ,Y ] tels que a f +bg = r(X) ∈ k[X ], avec degY (a)< degY (g), degY (b)< degY ( f ).

Démonstration. J.S MILNE ELLIPTIC CURVES

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Chapitre 2

Courbes planes projectives

2.1 Plan projectif

2.1.1. Définition: Un polynôme P est dit homogène de degré n si la somme des degrés sur les différentesvariables est constante égale à n. On écrit :

P(X1, . . . ,Xk) = ∑i1+...+ik=n

αi1,...,ik Xi11 . . .X ik

k , où αi1,...,ik ∈ k.

2.1.2. Définition: On définit le plan projectif sur k comme

P2(k) = {(x,y,z) ∈ k3 |(x,y,z) 6= (0,0,0)}/∼,

où (x,y,z)∼ (x′,y′,z′) si et seulement si il existe c 6= 0 dans k tel que (x′,y′,z′) = (cx,cy,cz).On écrit (x : y : z) pour la classe d’équivalence de (x,y,z).

2.1.3. Définition: Une courbe projective CF sur k est un sous-ensemble de P2(k) tel qu’il existe unpolynôme F ∈ k[X ,Y,Z] de degré ≥ 1 qui n’a pas de facteurs répétés dans kal tel que :

CF = {(x : y : z) ∈P2(k) |F(x,y,z) = 0}

Le degré de CF est égal au degré de F, en tant que polynôme homogène.

2.1.4. Remarque: Soient

U0 = {(x : y : z) |x 6= 0} , U1 = {(x : y : z) |y 6= 0} et U2 = {(x : y : z) |z 6= 0}.

Alors U1, U2 et U0 sont de manière naturelle des cartes affines :

(x,y) 7→ (x : y : 1) :A2(k)→U2;

(x,z) 7→ (x : 1 : z) :A2(k)→U1;

(y,z) 7→ (1 : y : z) :A2(k)→U0,

puisque ce sont des bijections ; donc on peut identifier par exemple U1 avecA2(k) par (x : 1 : z)↔ (x,z).On identifie donc P2(k) =U0∪U1∪U2.Donc une courbe projective plane C :=C f est l’union de trois courbes affines planes, C =C0∪C1∪C2,avec Ci = C∩Ui où quand on identifie de manière naturelle chaque Ui avec A2(k), alors C0, C1 et C2sont identifiées avec les courbes affines définies par les polynômes F(1,X ,Z), F(X ,1,Z) et F(X ,Y,1)respectivement.

2.1.5. Remarque: On définit de la même manière les notions de droites tangentes, multiplicité, multi-plicité d’intersection, etc ... pour les courbes projectives en regardant cette dernière comme une courbeaffine dans une des trois cartes citées ci-dessus.

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2.1.6. Exemple: On considére la courbe C : Y 2Z = X3 + aXZ2 + bZ3. On peut la regarder dans troiscartes différentes et donc l’associer à trois courbes affines :

— C0 : Y 2Z = aZ2 +bZ3

— C1 : Z = X3 +aXZ2 +bZ3

— C2 : Y 2 = X3 +aX +b

2.1.7. Théorème:(BEZOUT)Soient C et D deux courbes projectives sur un corps k de degrés respectifs m et n, et qui n’ont pas decomposantes irréductibles en commun.Alors C et D s’interceptent sur kal en exactement mn points comptés avec multiplicités, i.e.

∑P∈C(kal)∩D(kal)

I (P,C∩D) = mn

.

Démonstration. Voir Fulton 1969, Chap. 5, ou Silverman and Tate 1992 , Appendix A.

2.1.8. Remarque: D’après le théorème de Bézout, deux composantes irréductibles d’une courbe pro-jective plane auront un point commun, qui sera singulier par la remarque 1.2.7.Donc, toute courbe projective lisse sera géométriquement irréductible.

2.1.9. Exemple: On considére la courbe C : Y 2Z = X3 + aXZ2 + bZ3 de degré 3. On la regarde dansla carte U1 = {(x : y : z)|y 6= 0}, et on l’associe à la courbe affine C1 : Z = X3 + aXZ2 + bZ3, avec(x : y : z)∼ ( x

y ,zy).

On pose f (X ,Z) = Z−X3−aXZ2−bZ3, on peut réécrire

f (X ,Z) = f1(X ,Z)+ f3(X ,Z) = Z +(−X3−aXZ2−Z3),

en regardant le point P = (0,0). Donc la tangente en (0,0)∼ (0 : 1 : 0) est la droite d’équation L∞ : Z = 0.De plus

I (P,C∩L∞) = I (Z−X3−aXZ2−bZ3,Z) = I (X3,Z) = 3.

Donc par le théorème de Bézout, le point (0 : 1 : 0) est le seul point où C et L∞ se rencontrent.

2.2 La loi de groupe

Soit C une courbe projective plane lisse de degré 3 sur un corps k, qui est supposé parfait. On s’inté-ressera en particulier au cas k =Q.Soit C(k) l’ensemble des points de C avec coordonnées dans k. Nous allons montrer qu’une fois un élé-mént neutre O ∈C(k) choisi, la courbe C(k) a une structure naturelle de groupe commutatif.On retourne donc à notre cubique lisse C. On choisi alors un point O∈C(k). De deux points P1, P2 ∈C(k),dont l’un n’appartient pas à la droite tangente de l’autre, on peut construire un troisième point d’intersec-tion de C avec les cordes passant par P1 et P2. Le théorème de Bézout, démontre que ce point est unique,mais avec une possibilité d’avoir des coordonnées dans une extension de Galois K de k, cependant unrésultat élémentaire décrit qu’un polynôme cubique h(X) ∈ k[X ] qui a déjà deux de ses racines dans k,aura toutes ses racines également dans k. En suivant le même raisonnement, la droite tangente en unpoint P ∈ C(k) rencontrera C en exactement en un autre point (sauf si P est un point d’inflexion), quiappartiendra encore à C(k).On écrira PQ pour le troisième point d’intersection de la droite passant par P,Q ∈ C(k) ; quand P = Qalors PQ sera le point d’intersection de la droite tangente en P avec C ; quand la droite passant par P etQ est tangente à C en Q alors PQ = Q ; et quand P est un point d’inflexion alors PP = P.Pour toute paire P,Q ∈C(k), on définie

P+Q = O(PQ),

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i.e., si la droite passant par P et Q intersecte C encore en PQ, alors P+Q est le troisième point d’inter-section de C avec la droite passant par O et PQ.

2.2.1. Théorème: La construction ci-dessus fait de (C(k),+) un groupe commutatif.

Par ce qui a été dit avant, on a que la loi est bien définie ou interne ; i.e. que si P,Q ∈ C(k), alorsP+Q ∈C(k).De plus, on remarque que la définition ne dépend pas de l’ordre de P et Q ; et donc P+Q = Q+P, alorsla loi est commutative.Pourquoi O est en effet l’élément neutre ?

O,P et PO sont alignés, donc P+O = O(OP) = P et O ∈C(k).Comment obtenir les points opposés ?La construction est la suivante : tracer la tangente en O, elle recoupe la cubique en S. La droite (PS)recoupe la cupique en un point, qui est -P.

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Vérifions que cette construction nous donne bien les opposés. Additionnons Q et −Q. Pour ce faire,prenons le troisième point d’intersection de la courbe avec la droite passant par Q et −Q : c’est S.Maintenant joignons S et O et prenons à nouveau le troisième point d’intersection SO : c’est O car ladroite passant par O et S est la tangente à la courbe en O (elle passe donc une fois par S et deux fois parO). Ainsi Q+(−Q) = O.

Il nous reste plus qu’à montrer l’associativité. Cependant ce n’est pas la moindre. Nous aurons doncbesoin de la proposition suivante.

2.2.2. Proposition:(Théorème des neufs points) Si deux courbes cubiques dans P2 se coupent en exac-tement neuf points, alors toute courbe cubique passant par huit de ses neuf points passe alors par leneuvième.

Démonstration. Un polynôme homogène cubique

F(X ,Y,Z) = a1X3 +a2X2Y + · · ·+a10Z3

a 10 coefficients a1, · · · ,a10.Ainsi l’ensemble de toutes les cubiques est de dimension 10 ; en tant qu’espace vectoriel. La conditionque CF passe par un point P = (x : y : z) est une condition linéaire sur a1, · · · ,a10 :

a1x3 +a2x2y+ · · ·+a10z3 = 0.

Par conséquent, l’ensemble des cubiques passant par un point donné est de dimension 9. De même, àchaque fois que l’on impose que la cubique passe par un point donné, on impose à chaque fois unecondition linéaire sur les coefficients. Ainsi, la famille des cubiques passant par huit points d’intersec-tion ; en supposant que P1 = (x1 : y1 : z1), · · · ,P8 sont en "‘position général"’ plus précisement si lesvecteurs (x3

i ,x2i yi, · · · ,z3

i ),i=1, · · · ,8 sont linéairement indépendants, de deux cubiques données est dedimension 2. Donc, il existe deux polynômes F et G tels que ces courbes peuvent s’écrire comme

λF +µG , λ ,µ ∈ k.

De plus par Bézout, on a ∑P∈C(kal)∩D(kal)

I (P,C∩D) = 3.3 = 9, et donc F et G ont un neuvième point en

commun, et chaque courbe de la forme λF +µG = 0 passe par ce neuvième point.Quand les Pi ne sont pas en "‘position général"’, la preuve est complétée par une étude cas par cas ; voirWalker 1950,III 6.2.

Maintenant nous allons faire la preuve de l’associativité, l’associativité. Nous allons utiliser la pro-position 2.2.2. On note maintenant L (P,Q) pour la droite dans P2 passant par P et Q.

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Soient P,Q,R ∈C(k), on pose :S = (P+Q)R et T = P(Q+R).

Alors (P+Q)+R = OS et P+(Q+R) = OT . Donc pour prouver (P+Q)+R = P+(Q+R), il suffitde prouver que S = T .On considère les courbes cubiques suivantes :C = 0 ;L (P,Q) . L (R,P+Q) . L (QR,O) = 0 ;L (P,QR) . L (Q,R . L (P,O)) = 0.

Toutes les trois passe par les huit points O,P,Q,R,PQ,QR,P+Q,Q+R, et les deux dernières passent

par le point Ude f= L (P,Q+R)∩L (P+Q,R). Donc, si les six droites L (P,Q), · · · ,L (P,O) sont dis-

tinctes, alors la proposition 2.2.2 montre que C passe aussi par U , et donc ceci implique que S =U = T .

2.2.3. Remarque: Dans la preuve du théorème 2.2.1, dans le dernier point, le cas où deux des six lignescoïncident, alors on utilisera une forme plus forte de la proposition 2.2.2, cependant nous ne le ferontpas ; mais nous pouvons retrouver ce cas dans FULTON 1969,p.124

2.3 Points rationnels

Pour une courbe projetive plane CF surQ, on peut se poser deux questions fondamentales :1. Est-ce que CF a des points à coordonnées dans Q ;i.e. est-ce-que F(X ,Y,Z) a des zéros non-

trivials dansQ? ;2. Si la réponse à la première question est oui, est-ce qu’on peut décrire ?On supose que CF est absolument irréductible, et on s’interréssera en particulier aux cubiques.

Soit C : F(X ,Y,Z) = 0 une courbe projective plane sur Q de degrée 3. Si elle a un point singulier, alorsle théorème de Bézout montre que c’est le seul, et que c’est un point double. A priori le point singulierP aura ses coordonnées dans une extension fini K de Q ; que nous pouvons prendre comme l’extensionde Galois sur Q, mais Gal(K/Q) stabilise l’ensemble des points singulier dans C(K), par conséquentP ∈C(Q).Maintenant une droite ; avec une pente rationnelle, passant par P rencontrera la courbe en exactementun autre point (à part si c’est une droite tangente), et donc on obtient une paramétrisation des pointssingulier de C surQ.

2.3.1. Théorème:(Base finie)Soit C une cubique non singulière sur Q. Alors il existe un ensemble fini de point de C a coordonnéesdansQ de qui n’importe quel autre point de ce type peut être obtenu par construction de tangentes et decordes successives.

Démonstration. published in 1922, Mordell

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2.4 Une introduction aux nombres p-adiques

2.4.1. Définition: Soit p un nombre premier. On appelle valuation p-adique l’application vp : Q→Z∪{+∞} définie comme suit :

1. vp(0) = +∞ ;

2. si n est un entier non nul, vp(n) = k si pk divise n et pk+1 ne divise pas n (pk est la "plus grandepuissance de p dans n") ;

3. si n = ab avec a et b des entiers non nuls, alors vp(n) = vp(a)− vp(b).

2.4.2. Remarque: On notera généralement ordp(.) pour vp(.).

2.4.3. Proposition: Soient a et b deux entiers strictement positifs. Alors on a :

1. vp(ab) = vp(a).vp(b), pour tout a,b ∈ Z ;

2. a|b si et seulement si pour tout p premier vp(a)≤ vp(b) ;

Démonstration. 1. Pour tout nombre premier p, on a

a = pvp(a)a′ et b = pvp(b)b′,

avec p - a′ et p - b′. Or on sait que si p|a′b′, alors p|a′ ou p|b′ donc ici on a la contraposée c’est-à-dire que p - a′b′. Et comme ab = pvp(a)+vp(b)a′b′, avec donc p - a′b′, alors par définition on avp(ab) = vp(a)+ vp(b) ;

2. Si a|b, alors pour tout nombre premier p, pvp(a)|b, car a = pvp(a)a′ avec p - a. Et comme b =pvp(b)b′ avec p - b′ alors on obtient pvp(a)|pvp(b)(par Gauss car pgcd(p,b’) = 1) et donc vp(a) ≤vp(b). Réciproquement, supposons que vp(a)< vp(b). Soit P une ensemble fini de nombres pre-miers contenant les diviseurs premiers de a et b. On a b= ∏

p∈Ppvp(b) = ∏

p∈Ppvp(b)−vp(a). ∏

p∈Ppvp(a) =

a. ∏p∈P

pvp(b)−vp(a) et donc a|b.

2.4.4. Définition: Soit p un nombre premier. On définit la valeur absolue p-adique comme l’application| . |p:Q→R+ vérifiant | 0 |p= 0, et | n |p= 1

pvp(n) si n est un rationnel non nul.

2.4.5. Remarque: Avec la définition, on voit que | xy |p=| x |p| y |p pour tous rationnels x et y, carvp(xy) = vp(x)vp(y). C’est, en fait, propre à ce qu’on appelle une valeur absolue, en toute généralité.Ainsi, si n s’écrit ∏

ipαi

i où les αi sont des entiers, alors

vp(n) = αi et | n |pi=1

pαii.

Notons que 1 = ∏i

p0i , donc vp(1) = 0 pour tout nombre premier p. Remarquons que | n |p< 1 si et

seulement si p divise le numérateur de n (supposé sous forme réduite), | n |p= 1 si p n’apparaît pas dansl’expression de n, et | n |p> 1 s’il est au dénominateur.

2.4.6. Exemple: Soit n = 315 = 32 ·5 ·7. On a alors :

v3(n) = 2 , v5(n) = 1 , v7(n) = 1 et vp(n) = 0 pour tout autre p premier différent de 5,3,7 .

2.4.7. Proposition: L’application | . |p définie une norme surQ.

Démonstration. Nous allons donc regarder si cette application vérifie les propriétés d’une norme :

1. Par la défnition de la valeur absolue p-adique on a bien | n |p= 0 si et seulement si n = 0 ;

2. De plus on a vu que | xy |p=| x |p| y |p ;

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3. Si x = 0 ou y = 0, ou si x+ y = 0, l’inégalité triangulaire est strictement vérifiée. On supposedonc que x,y et x+ y sont tous non nuls. Soit x = a/b et y = c/d. On a donc x+ y = ad+bc

bd , et

vp(x+ y) = vp(ad +bc)− vp(bd) = vp(ad +bc)− vp(b)− vp(d).

Maintenant la plus grande puissance de p divisant la somme des deux nombre est au moinsle minimum des plus hautes puissances divisant le premier et la plus haute puissance divisantle second. Donc vp(x+ y) ≥ min(vp(ad),vp(bc))− vp(b)− vp(d) = min(vp(a)+ vp(d),vp(b)+vp(c))− vp(b)− vp(d) = min(vp(a)− vp(b),vp(c)− vp(d)) = min(vp(x),vp(y)).Donc, | x+ y |p= p−vp(x+y) ≤ max(p−vp(x), p−vp(y)) = max(| x |p, | y |p)≤| x |p + | y |p.

2.4.8. Remarque: Ainsi Q muni de la topologie induite par la distance | . |p définit un espace topolo-gique métrique.On peut vérifier que pour deux valeurs absolues p-adiques différents, les topologies induites sont diffé-rentes : par exemple, la suite définie par (pn)n≥0 converge dans (Qp, | . |p) et sa limite est 0 en dehorsdes autres topologies.Deux valeurs absolues sont équivalentes si l’une s’écrit comme une puissance strictement positive del’autre. Deux valeurs absolues équivalentes définissent des topologies équivalentes, c’est pour ça qu’ons’intéresse à leur classe d’équivalence.

2.4.9. Proposition:(Théorème d’Ostrowski)Les seules valeurs absolues sur Q sont, à équivalence près, la valeur absolue archimédienne | . | et lesvaleurs absolues p-adiques | . |p. On note V l’ensemble des classes d’équivalence de valeurs absoluessurQ.

Démonstration. Neal Koblitz, p-adic numbers, p-adic analysis and Zeta-functions, seconde édition.

2.4.10. Définition: Pour chaque valeur absolue | . |p∈V , on note

Qp = { suites rationnelles de Cauchy pour | . |p}/{suites qui tendent vers 0 pour | . |p}.

2.4.11. Proposition: Pour tout p premier, il existe un coprs completQp, dont la valeur absolue prolongela valeur absolue p-adique deQ, et dans lequelQ est dense.

Démonstration. Neal Koblitz, p-adic numbers, p-adic analysis and Zeta-functions, seconde édition.

Dans le cas deR, l’opération de complétion permet d’obtenir des nombres avec des développementsdécimaux arbitraires après la virgule.Dans le cas p-adique, la complétion implique un phénomène proche et éloigné en même temps : on peutmontrer qu’un élément a deQp peut s’écrire

a =∞

∑n=m

an pn , où m ∈ Z

(la convergence est au sens de la valeur absolue p-adique), et an ∈ [0, p−1] pour tout n≥ m.Autrement dit, les nombres p-adiques sont des nombres écrits en base p, avec un nombre infini de chiffresavant la virgule ! On note vp(a) le plus petit entier relatif n tel que an 6= 0 (et vp(0) = ∞). Cette notion devaluation p-adique prolonge celle surQ, et encore une fois, on a | a |p= 1

pvp(a) .Alors, on note Zp = {a ∈Qp|vp(a) ≥ 0} l’anneau topologique (intègre) des entiers p-adiques, et il estaisé de vérifier que Qp est le corps de fractions de Zp. En particulier, un élément a de Zp peut s’écrire

comme a =∞

∑n=0

an pn, avec an ∈ [0, p−1] pour tout n≥ 0.

2.4.12. Proposition: L’anneau topologique Z est dense dans Zp.

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Démonstration. Bruno Winckler, introduction à l’analyse p-adique.

2.4.13. Proposition:1. Zp possède un unique idéal maximal, qui est pZp ;

2. Les inversibles de Zp sont les éléments qui ne sont pas divisibles par p.

Démonstration. Mickaël Latocca et Jules Lefrancq-Lumière, Formes modulaires : lien avec les courbeselliptiques.

2.4.14. Remarque: On a montré dans la preuve de la proposition 2.4.7 que vp(a+b)≥min(vp(a),vp(b)),avec égalité sauf si vp(a) = vp(b). De plus, on peut remarquer que pour un a ∈Qp, on a vp(a) = m sia ∈ pmZp \ pm+1Zp. Pour finir, Zp peut être vu comme un anneau formel de série, et donc a ∈ Zp estinversible si et seulement si a0 6= 0.

2.4.15. Théorème:(Lemme d’Hensel) Soient P un polynôme de Z[X ] et p un nombre premier. Soit n unentier supérieur ou égal à 1. On suppose que l’on dispose d’un entier x tel que

P(x)≡ 0 (mod pn) et P′(x) 6≡ 0 (mod p).

Alors il existe un entier y dans Z tel que y≡ x (mod pn) et P(y)≡ 0 (mod p2n).

Démonstration. Le but de cette preuve est de trouver un entier y qui vérifie les propriétes souhaitées.On va prendre un antécédent bien choisi de x par la surjection canonique Zp\p2nZp→ Zp\pn.On va poser y = x+ t pn, pour un certaint entier t, et on va vérifier si il fonctionne. Premièrement, on abien y≡ x (mod pn). Ensuite, on écrit la formule de Taylor à l’odre 1 :

P(x+ t pn) = P(x)+ t pnP′(x)+ t2 p2nR(x) , où R(x) ∈ Z[X ].

Ainsi P(x+ t pn)≡ P(x)+ t pnP′(x) (mod p2n). On pose P(x) = pnP0, où P0 ∈Z, car par hypothèse on aP(x)≡ 0 (mod pn). Alors on a :

P(x+ t pn)≡ 0 (mod p2n) ⇐⇒ t ≡−(P′(x))−1P0 (mod pn),

où (P′(x))−1 est l’inverse de P′(x) le tout mod pn (qui existe par hypothèse car P′(x) 6≡ 0 (mod p)).Donc si on prend ce t là pour y, alors on a bien P(y)≡ 0 (mod p2n).

Il existe une autre version du lemme d’Hensel, qui est plus générale que la précédente mais dont lapreuve est semblable.

2.4.16. Théorème: Soient F(X1, · · · ,Xn)∈Zp[X1, · · · ,Xn] un polynôme en n variables et soit a=(a1, · · · ,an)∈Zn

p tel que F(a)≡ 0 (mod p2k+1) et tel qu’il existe un i = 1, · · · ,n tel que ∂iF(a) 6= 0 (mod pk+1).Alors il existe α ∈ Zn

p tel que α = a (mod pk+1) et F(α) = 0.

Démonstration. p-adic numbers and Diophantine equations, Yuri Bilu

Plus de détails sur l’analyse p-adique peut être trouvé dans Koblitz 1977.

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Chapitre 3

Théorie des courbes elliptiques

Dans ce chapitre, on supposera k parfait tel que car(k) 6= 2,3.

3.1 Définition d’une courbe elliptique

3.1.1. Définition: Une courbe elliptique sur k peut être définie de manière équivalente comme :1. une courbe projective lisse E sur k de degrée 3 avec un point O ∈ E(k) ;2. comme avant mais avec la contrainte que O soit un point d’inflexion ;3. une courbe projective lisse sur k de la forme :

Y 2Z +a1XY Z +a3Y Z2 = X3 +a2X2Z +a4XZ2 +a6Z3; (3.1)

Soit (E,O) comme dans (2) ; on montre dans la proposition 3.1.2 qu’un changement linéaire devariables transformera E en la forme (3.1) et O en le point (0 :1 :0). Inversement, soit E comme dans(3) ; alors O = (0 : 1 : 0) ∈ E(k) et c’est un point d’inflexion (voir 2.1.9).En combinant les différents résultats, on voit qu’une courbe E comme dans (1) peut être intégré dans P2

de telle sorte que O devienne un point d’inflexion.On donne directement une preuve de ceci ci-dessous.

3.1.2. Proposition: Soit C une courbe projective plane lisse sur k, et soit O un point d’inflexion dansC(k).

1. Après un changement linéaire de variables à coefficients dans k, le point O aura pour coordon-nées (0 : 1 : 0) et la droite tangente à C en O sera L∞ : Z = 0.

2. Si (0 : 1 : 0) ∈C(k), et que la droite tangente à C en (0 : 1 : 0) est L∞ : Z = 0 alors l’équation deC a pour forme la relation (3.1).

Démonstration. Avançons la preuve :1. Soit (a : b : c) ∈P2(k), on suppose b 6= 0. Soit l’application régulière suivante :

(x : y : z) 7→ (bx−ay : by : bz− cy) :P2→P2

qui transpose (a : b : c) sur (0 : b2 : 0) = (0 : 1 : 0) et c’est un isomorphisme.Si b = 0, mais c 6= 0, alors premièrement on inverse y et z. Donc, on peut supposer O = (0 : 1 : 0).Soit

L : aX +bY + cZ = 0,

avec a,b,c ∈ k, et a,b,c pas tous nuls, la droite tangente en (0 : 1 : 0).Soit A = (ai j) une matrice carrée de taille 3 quelconque telle que les deux premières colonnessont orthogonales à (a : b : c), et on défini le changement de variables par :

A

X ′

Y ′

Z′

=

XYZ

.

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Avec les nouvelles variables, la droite L devient

0 = (a,b,c)

XYZ

= (a,b,c)A

X ′

Y ′

Z′

= (0,0,d)

X ′

Y ′

Z′

= dZ′.

Cependant d 6= 0, et donc on peut prendre pour équation de L la droite Z′ = 0.

2. La forme générale d’une cubique est :

F(X ,Y,Z) : c1X3+c2X2Y +c3X2Z+c4XY 2+c5XY Z+c6XZ2+c7Y 3+c8Y 2Z+c9Y Z2+c10Z3.

Soit F le polynôme qui défini la courbe C. Comme C est non-singulière, alors F est complètementirréductible (remarque 1.21). Comme O = (0 : 1 : 0) ∈C(k), alors c7 = 0 . On rappelle que

U1 = {(x : y : z)|y = 1}

et qu’on identifie U1 avecA2 par (x : 1 : z)↔ (x,z). Donc C∩U1 est la droite affine définie par

F(X : 1 : Z) : c1X3 + c2X2Y + c3X2Z + c4XY 2 + c5XY Z + c6XZ2 + c8Y 2Z + c9Y Z2 + c10Z3.

La droite tangente en (0 : 1 : 0)↔ (0,0) est c4X+c8Z = 0. Mais comme elle est égale à L∞ : Z = 0,alors c4 = 0 . Comme C est non singulière alors c8 6= 0 .De plus, le nombre d’intersections est

I (O,L∞∩C) = I (Z,F(X : 1 : Z)) = I (Z,c1X3 + c2X2).

Comme O est un point d’inflexion, I (O,L∞∩C)≥ 3, et donc c2 = 0 . En combinant les diffé-rentes lignes, on obtient donc la forme suivante :

c1X3 + c3X2Z + c5XY Z + c6XZ2 + c8Y 2Z + c9Y Z2 + c10Z3 , c8 6= 0.

De plus c1 6= 0 car autrement le polynôme serait divisible par Z. Donc après avoir divisé le toutpar c1 et remplacer Z par −c1Z

c8, on obtient bien l’équation voulue (3.1).

3.2 L’équation de Weierstrass d’une courbe elliptique

3.2.1. Définition: Soit E une courbe elliptique sur k. Toute équation de la forme :

Y 2Z +a1XY Z +a3Y Z2 = X3 +a2X2Z +a4XZ2 +a6Z3, (3.2)

se nomme équation de Weierstrass.

3.2.2. Théorème: Chaque courbe (E,O) est isomorphe à une courbe de la forme E(a,b) : Y 2Z = X3 +aXZ2 +bZ3, a,b ∈ k avec origine (0 : 1 : 0). Inversement une courbe E(a,b) est non singulière et doncavec le point (0 : 1 : 0) est une courbe elliptique si et seulement si 4a3 +27b2 6= 0.

Démonstration. On a vu que toute courbe elliptique a une équation dite de Weierstrass Y 2Z +a1XY Z +a3Y Z2 = X3 +a2X2Z +a4XZ2 +a6Z3.Quand k est un coprs tel que car(k) 6= 2,3, un changement de variables X ′ = X , Y ′ = Y + a1

2 X , Z′ = Zélimine le terme en XY Z et un autre changement de variables X ′ = X + a2

3 , Y ′ = Y + a32 , Z′ = Z élimine

les termes X2 et Y .Et donc on arrive à l’équation voulu Y 2Z = X3 +aXZ2 +bZ3. De plus on a vu dans l’exemple 1.2.8 queune courbe de cette forme est lisse si et seulement si ∆ = 27b2 +4a3 6= 0.

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3.2.3. Remarque: On revient sur la loi de groupe et nous allons faire quelques remarques dans le casd’une courbe elliptique sous la forme de Weierstrass :

Y 2Z = X3Z +aXZ2 +bZ3.

On se place dans le plan affine U1, pour plus de facilité et prend comme élément neutre de la loi le pointà l’infini (0 : 1 : 0).Comment construit-on P+Q sur une cubique sous la forme de Weierstrass?Il suffit de prendre le symétrique par rapport à l’axe des x du troisième point d’intersection de la courbeavec (PQ).

Ainsi, dans ce cas, l’opposé d’un point est son symétrique par rapport à l’axe des X. Et donc on aurax(−P) =−x(P).

3.2.4. Proposition: Soit E une courbe elliptique sous forme de Weierstrass. Alors :

P+Q+R = O ⇐⇒ P , Q , R appartiennent à une même droite

.

Démonstration. On rappelle que O est un point d’inflection dans la définition d’une courbe elliptique ;et que donc par Bézout nous avons bien le résultat recherché.

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Formule d’addition

Soit une courbe elliptique sour forme de Weierstrass et soit P = (x,y) la somme de P1 = (x1,y1) et deP2 = (x2,y2). Si P2 =−P1, alors P = 0. Sinon on a, x1 6= x2, et (x,y) peut être déterminé par les formulessuivantes :

x =x1x2

2 + x12x2−2y1y2 +a(x1 + x2)+2b

(x1− x2)2 ;

y =W2y2−W1y1

(x1− x2)3 ;

où W1 = 3x12x2 + x2

3 +a(x1 +3x2)+4b et W2 = 3x12x2 + x1

3 +a(3x1 + x2)+4b.

Formule de duplication

Soit une courbe elliptique sous forme de Weierstrass P=(x,y) et 2P=(x2,y2). Si y= 0, alors 2P= 0.Sinon, y 6= 0, et (x2,y2) est déterminé par les formules suivantes :

x2 =x4−2ax2−8bx+a2

4(x3 +ax+b);

y2 =x6 +5ax4 +20bx3−5a2x2−4abx−a3−8b2

8y3 .

3.3 Réduction d’une courbe elliptique

3.3.1. Définition: Soit E : Y 2Z = X3 +aXZ2 +bZ3, a,b ∈Q, ∆ = 4a3 +27b2 6= 0.Si c est le ppcm des dénominateurs de a et b, alors en multipliant par c6, on obtient

c6Y 2Z = c6X3 + c6aXZ2 + c6bZ3.

On peut alors effectuer un changement de variables ; Y ′ = c3Y , X ′ = c2X et Z′ = Z, et on a

Y ′2Z′ = X ′3 +ac4X ′Z′2 +ac6Z′3 où ac4 et bc6 sont des entiers ,

et on remarque que ∆′ = c12∆ 6= 0.On peut donc supposer sans perte de généralité que a,b ∈ Z, et donc on peut les regarder modulo p.Soit p ∈Z un nombre premier, on note a = a (mod p) et b = b (mod p), et on définit donc la courbe deréduction modulo p sur Fp comme

E : Y 2Z = X3 + aXZ2 + bZ3.

On définit la réduction d’un point P ∈ E(Q) dans E(Fp), que l’on notera P, comme suit : le point àl’infini O = (0 : 1 : 0) est envoyé sur le point à l’infini de la courbe de réduction modulo p et les autrespoints de la courbe ont une troisième coordonnée non nulle, et on pose

[uv

:u′

v′: 1]7→[ u

vk :

¯u′

v′k : k

], où k = ppcm(v,v′).

3.3.2. Remarque: Quand on considère la réduction modulo 2 et 3, il faut considérer l’équation complètede la courbe Y 2Z + a1XY Z + a3Y Z2 = X3 + a2X2Z + a4XZ2 + a6Z3, car il est possible de trouver uneéquation de cette forme qui est "plus minimal" pour 2 ou 3 que n’importe quelle équation de cette formeY 2Z = X3+aXZ2+bZ3. Par exemple, Y 2+Y = X3−X2 définie une courbe non singulière sur F2, alorsque toute équation de Weierstrass définie une courbe singulière sur F2 ; on rappelle que car(F2) =2.(cas(2) voir exemple 1.2.8)

19

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3.3.3. Définition: Soit la courbe E : Y 2Z = X3 +aXZ2 +bZ3, a,b ∈Qp, 4a3 +27b2 6= 0.Après le même type de changement de variable, on peut supposer que a,b ∈ Zp et par conséquent onobtient à partir de E une courbe E sur Fp et une application de réduction P 7→ P : E(Qp)→ E(Fp).L’équation E : Y 2Z = X3 + bXZ2 + aZ3 avec a, b les images de a et b dans Fp est appelée la courbe deréduction de E modulo p.

La réduction d’une courbe elliptique peut contenir des points singuliers ; or la loi de groupe n’est pasdéfinie en des points singuliers. C’est pour cela que nous avons besoin de construire une filtration surE(Qp) et d’identifier ses quotients.

3.4 Courbes elliptiques surQp

Dans cette section, on considère la courbe elliptique suivante :

E : Y 2Z = X3 +aXZ2 +bZ3 , a , b ∈Qp , 4a3 +27b2 6= 0.

3.4.1. Définition: On définit donc la filtration suivante

E(Qp)⊃ E0(Qp)⊃ E1(Qp)⊃ . . .⊃ En(Qp)⊃ . . .

On définit premièrement

E0(Qp) = {P ∈ E(Qp)|P est non singulier };

c’est un sous-groupe ; en effet (0 : 1 : 0) est toujours un point non-singulier et on sait que une droite pas-sant par deux points non-singuliers d’une cubique (ou une tangente d’un point non-singulier) rencontreraencore la cubique en un autre point non-singulier.On notera Ens pour E avec ses points singuliers enlevés.L’application de réduction

P 7→ P : E0(Qp)→ Ens(Fp)

est un morphisme de groupe ; en effet soient P1 = (x1,y1) et P2 = (x2,y2) alors par la formule d’additionde la proposition 5.2.5 on sait que P1 +P2 = ( f1(x1,y1,x2,y2,a,b), f2(x1,y1,x2,y2,a,b)). On se placemaintenant dans le corps Fp, alors :

P1 + P2 = ( f1(x1, y1, x2, y2, a, b), f2(x1, y1, x2, y2, a, b).

Or

P1 +P2 = ( f1(x1,y1,x2,y2,a,b), f2(x1,y1,x2,y2,a,b)

= ( f1(x1,y1,x2,y2,a,b), f2(x1,y1,x2,y2,a,b))

= ( f1(x1, y1, x2, y2, a, b), f2(x1, y1, x2, y2, a, b)

= P1 + P2.

On définit donc E1(Qp) comme son noyau.Donc E1(Qp) est constitué par les points P qui peuvent être représentés par (x : y : z) avec x, y, z ∈ Zp

tels que x et z divisibles par p mais avec y non divisible par p. En particulier, P ∈ E1(Qp) =⇒ y(P) 6= 0.Pour finir, on définit

En(Qp) = {P ∈ E1(Qp) |x(P)y(P)

∈ pnZp}.

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3.4.2. Théorème: La filtration définie juste avant a les propriétés suivantes :1. l’application P 7→ P définie un isomorphisme E0(Qp)/E1(Qp)→ Ens(Fp) ;

2. pour n≥ 1, l’application P 7→ p−n x(P)y(P) mod p est un isomorphisme de groupe En(Qp)/En+1(Qp)→

Fp ;3. la filtration est exhaustive, i.e.

⋂n

En(Qp) = O;

Démonstration. 1. Par le lemme d’Hensel, l’application réductive E0(Qp)→ Ens(Fp) est surjec-tive ; en effet on pose F(X ,Y,Z) = Y 2Z − X3− aXZ2− bZ3, soit P ∈ Ens(Fp), par définitionP≡ P (mod p), de plus F(P)≡ 0 (mod p) et comme P∈ Eens, alors pour au moins un i = 1,2,3∂XiF(P) 6≡ 0 (mod p), donc par le lemme d’Hensel il existe Q ∈ Zp tel que P ≡ Q (mod p) etF(Q) = 0 (mod p)2, donc Q ∈ E0(Qp).On a défini E1(Qp) comme son noyau. Donc par le premier théorème d’isomorphisme de groupeson obtient bien ce qu’on recherchait.

2. Si P = (x : y : 1) ∈ E1(Qp), alors y n’est pas divisible par p. Soit x = p−mx0 et y = p−m′y0 avecx0 et y0 inversible dans Zp et m′ ≥ 1. Alors on a

p−2m′y20 = p−3mx3

0 +ap−mx0 +b.

On prend la valuation des entiers p-adiques, et on trouve 2m′= 3m. Comme m,m′ sont des entiers,alors il existe un entier n≥ 1 tel que m= 2n et m′= 3n ; et on a n=m′−m. Donc maintenant si onprend P = (x : y : z)∈ En(Qp)\En+1(Qp), n≥ 1, alors on a ordp(x) = ordp(z)−2n et ordp(y) =ordp(z)− 3n. Donc P peut être exprimé comme P = (pnx0 : y0 : p3nz0) avec ordp(y0) = 0 etx0,z0 ∈ Zp ; en fait ceci est vrai pour P ∈ En(Qp). Comme P ∈ E,

p3ny20z0 = p3nx3

0 +ap7nx0z20 +bp9nz3

0

.On pose P0

de f= (x0 : y0 : z0) qui appartient à la courbe E0 : Y 2Z = X3. Comme y0 6= 0, alors P0

n’est pas un point singulier de E0. Par la description de la loi de groupe en termes de tangenteset cordes, on voit que l’application P 7→ P0 : En(Qp)→ E0(Fp) est un morphisme de groupe.Son noyau est En+1(Qp), qui est un sous-groupe, et il suit du lemme d’Hensel que son image estl’ensemble des points non-singuliers de E0(Fp). On admet que Q 7→ x(Q)

y(Q) est un isomorphismede E0(Fp)→ Fp (une preuve de ceci peut être trouvée dans l’ouvrage de J.S Milne ELLIPTICCURVES), et la composition P 7→ P0 7→ x(P0)

y(P0)est P 7→ p−nx(P)

y(P) (mod p).

3. Si P ∈⋂n

En(Qp), alors x(P) = 0, y(P) 6= 0. Ceci implique que soit z(P) = 0 soit y(P)2 = bz(P)3,

mais la seconde égalité contredit le fait que P ∈ E1(Qp).Alors, z(P) = 0 et donc P = (0 : 1 : 0).

3.4.3. Corollaire: Pour n’importe quel entier m non divisible par p premier, l’application

P 7→ mP : E1(Qp)→ E1(Qp)

est bijective.

Démonstration. Soit P∈E1(Qp) tel que mP= 0. Si P 6= 0, alors P∈En(Qp)\En+1(Qp) pour un certainn, mais En(Qp)/En+1(Qp) ' Z/pZ. Or l’image de P dans Z/pZ est non nulle, et donc elle l’est aussim fois. Ce qui contredit que mP = 0. Donc l’application est injective.Soit P ∈ E1(Qp). Comme E1(Qp)/E2(Qp)' Z/pZ, et p ne divise pas m, alors la multiplication par mest un isomorphisme de E1(Qp)/E2(Qp).Donc il existe Q1 ∈ E1(Qp) tel que P = mQ1 (mod E2(Qp)).De même, il existe Q2 ∈E2(Qp) tel que (P−mQ1) =Q2 (mod E3(Qp)). En continuant ainsi, on obtientune suite Q1,Q2, . . . de point de E(Qp) telle que :

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1. Qi ∈ E i(Qp) ;

2. P−mn∑

i=1Qi ∈ En+1(Qp).

La première condition implique que la série ∑Qi converge vers un point de E(Qp) (on admet que E(Qp)est compact), et la seconde condition implique que sa limite qu’on appellera Q a la propriété suivanteP = mQ. Donc l’application est surjective.

3.4.4. Proposition: Pour tout n≥ 1, En(Qp) est un sous-groupe de E(Qp).

Démonstration. Montrons par récurrence sur n≥ que En(Qp) est un sous-groupe de E(Qp).On a premièrement défini E1(Qp) comme le noyau d’un morphisme partant de E(Qp), donc c’est bienun sous-groupe.Supposons par récurrence que En(Qp) est un sous-groupe de E(Qp).On a vu dans la preuve du théorème 3.4.2, que En+1(Qp) est le noyau du morphisme P 7→ P0 : En(Qp)⊂E(Qp)→ E0(Qp) ; donc c’est un sous-groupe de E(Qp).Donc, par récurrrence sur n 6= 1, on a bien montré que En(Qp) est un sous-groupe de E(Qp).

3.5 Points de torsion

3.5.1. Définition: Soit une courbe E : Y 2Z = X3 +aXZ2 +bZ3, a,b ∈ Z, ∆ = 4a3 +27b2 6= 0.Un point P est dit de torsion s’il est d’ordre fini.On note l’ensemble des points de torsions de E, E(Q)tors.

3.5.2. Proposition: L’ensemble des points de torsion d’une courbe elliptique, E(Q)tors est un sous-groupe.

Démonstration. Premièrement on a bien E(Q)tors ⊂ E(Q).De plus, (0 : 1 : 0) est bien un point de torsion ; on peut vérifier avec les formules de duplication qu’il estde 2-torsion.Ensuite, soient P, Q ∈ E(Q)tors, alors il existe deux entiers m et n tels que mP = O et nQ = O.On a

(mn)(P−Q) = mnP−mnQ = n(mP)−m(nQ) = O−O = O,

par la construction de la loi de groupe.Donc E(Q)tors est un sous-groupe de E(Q).

3.5.3. Théorème:(LUTZ-NAGELL)Si P = (x : y : 1) ∈ E(Q)tors, alors x,y ∈ Z et soit y = 0 soit y |∆.

Le théorème est issu des deux résultats suivants : le premier dit que si P et 2P sont à coordonnéesentières (quand on prend z = 1), alors soit y = 0 soit y|∆ et le second implique que les points de torsionsont à coordonnées entières.

3.5.4. Proposition: Soit P = (x1 : y1 : 1) ∈ E(Q). Si P et 2P sont à coordonnées entières (quand onprend z = 1), alors soit y1 = 0 soit y1 |∆.

Démonstration. On suppose y1 6= 0, et soit 2P = (x2 : y2 : 1) le second point d’intersection de la droitetangente à P avec la courbe affine Y 2 = X3 + aX + b. On pose f (X) = X3 + aX + b et g(X ,Y ) = Y 2−X3−aX−b. On a alors

∇g = (−3x12−a,2y1) 6= (0,0),

puisqu’on a supposé y1 6= 0, alors la droite tangente en P à E est la droite d’équation

(∇g)P.(X− x1,Y − y1) = 0.

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On peut réécrire l’équation comme Y = αX + β où α = 3x12+a

2y1et β = 2y1

2−3x13−ax1

2y1. On a donc les

X-coordonnées qui satisfont

0 = (αX +β )2− (X3 +aX +b) =−X3 +α2X2 + . . .

Or P est un point double donc les X-coordonnées sont x1,x1 et x2 et par conséquent x1 est racine doublede g et x2 et racine simple de g. On a donc

0 = (X− x1)2(X− x2) =−X3 +(x1 + x1 + x2)X2 + . . .

Puis on obtient α2 = x1 + x1 + x2 ; par unicité du développement. Or, par hypothèse, x1,x2 ∈ Z, doncα2 ∈ Z et donc α ∈ Z. Et comme on a α = f ′(x1)

2y1, alors on a y1 | f ′(x1). De plus on a aussi y1 | f (x1), par

l’équation car P ∈ E(Q). On montre de plus que R( f , f ′) = ∆. En effet :∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣1 0 a b 00 1 0 a b3 0 a 0 00 3 0 a 00 0 3 0 a

∣∣∣∣∣∣∣∣∣∣= 3

∣∣∣∣∣∣∣∣1 0 b 00 1 a b3 0 0 00 3 a 0

∣∣∣∣∣∣∣∣+a

∣∣∣∣∣∣∣∣1 0 a b0 1 0 a3 0 a 00 3 0 a

∣∣∣∣∣∣∣∣= 9

∣∣∣∣∣∣0 b 01 a b3 a 0

∣∣∣∣∣∣+3a

∣∣∣∣∣∣0 a b1 0 a3 0 a

∣∣∣∣∣∣+a2

∣∣∣∣∣∣1 0 b0 1 a0 3 a

∣∣∣∣∣∣=−9b

∣∣∣∣1 b3 0

∣∣∣∣+a(6a2−2a2)

= 27b2 +4a3

= ∆.

Il suit de la proposition 1.4.2, qu’il existe r(X),s(X) ∈Z[X ] tels que ∆ = r(X) f (X)+ s(X) f ′(X), et donccomme y1 | f (x1) et y1 | f ′(x1), alors on a bien ce qu’on voulait c’est à dire y1 |∆.

3.5.5. Proposition: Le groupe E1(Qp) est sans-torsion.

Soit P ∈ E1(Qp), nous avons donc y(P) 6= 0, ce qui nous incite à observer la courbe dans le planaffine U1, i.e. la courbe affine

E1 : Z = X3 +aXZ2 +Z3.

On pose alors, x′(P) = x(P)y(P) , z′(P) = z(P)

y(P) pour les cordonnées de P dans E1.

Afin de prouver cette proposition, nous allons avoir besoin d’un lemme.

3.5.6. Lemme: Soit P1,P2,P3 ∈ E(Qp) tels que P1 +P2 +P3 = 0. Si P1,P2 ∈ En(Qp), alors P3 ∈ En(Qp)et

x′(P1)+ x′(P2)+ x′(P3) ∈ p5nZp.

Démonstration. On a vu dans le théorème 3.4.2 que si P = (x : y : 1) ∈ En(Qp)\En+1(Qp), alorsordp(x) =−2n et ordp(y) =−3n. En terme de coordonnées homogènes P = (x : y : z), cela veut dire :

P ∈ En(Qp)\En+1(Qp)⇒

ordp(

x(P)z(P)

) =−2n

ordp(y(P)z(P)

) =−3n

ordp(

x(P)y(P)

) = n

ordp(z(P)y(P)

) = 3n

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DoncP ∈ En(Qp)⇒ x′(P) ∈ pnZp,z′(P) ∈ p3nZp.

Soient x′i = x′(Pi) et z′i = z′(Pi) pour i=1,2,3. La doite passant par P1 et P2 (on les a supposés distincts) est

Z = αX +β ,

α =z′2− z′1x′2− x′1

=(x′2

3− x′13)+a(x′2− x′1)(z

′2

2− z′12)+b(z′2

3− z′13)

x′2− x′1= . . .

=x′2

2 + x′1x′2 + x′12 +az′2

2

1−ax′1(z′2 + z′1)−b(z′2

2 + z′1z′2 + z′12 .

La ligne du dessous est inversible dans Zp, et donc ordp(α) = 2n− 0 = 2n et donc par définition α ∈p2nZp. De plus, on a

β = z′1−αx′1 ∈ p3nZp,

car ordp(β ) = 3n.On remplace Z par αX +β dans l’équation de E1, et on obtient donc

αX +β = X3 +aX(αX +β )+b(αX +β )3.

Ce qui revient à l’équation :

0 =−(αX +β )+X3 +aX(αX +β )+b(αX +β )3

= (1+aα2 +bα

3)X3 +(2aαβ +3bα2β )X2 +(aβ

2 +3bαβ2−α)X +(β 3−β )

= X3 +2aαβ +3bα2β

1+aα2 +bα3 X2 + . . . .

Or, Par le théorème de Bézout on sait que les solutions de cette équation sont x′1,x′2,x′3, et donc on a bien

x′1 + x′2 + x′3 =2aαβ +3bα2β

1+aα2 +bα3 ∈ p5nZp,

car ordp(2aαβ+3bα2β

1+aα2+bα3 ) = 5n.De plus comme En(Qp) est un sous-groupe de E(Qp), et comme P1 +P2 +P3 = O, alors si P1, P2 ∈En(Qp), alors on a bien P3 ∈ En(Qp) ; car P3 =−(P1 +P2).Le cas où P1 =P2 est similaire il faut juste faire attention à l’équation de la droite car on aura un problèmeau dénominateur, en effet la droite passant par P1 et P2 devient donc la droite tangente à la courbe enP1. On pose f (X ,Z) = X3 + aXZ2 + bZ3− Z, et on a ∇( f )P1 = (3x′1

2 + az′1,2ax′1z′1 + 3bz′12− 1). Si la

deuxième coordonnée du gradient est non-nulle, alors la droite tangente en P1 aura pour équation

Z = (3x′12+az′1)(X− x′1)+(2ax′1z′1 +3bz′1

2−1)(Z− z′1) = 0

ou encore

Z = αX +β =3x′1

2 +az′11−2ax′1z′1−3bz′1

2 X +3x′1

3 +ax′1z′1 +2ax′1z′12 +3bz′1

3− z′11−2ax′1z′1−3bz′1

2 .

Avec le même raisonnement précédent on obtient bien toujours que α ∈ p2nZp et que β ∈ p3nZp. Et enremplaçant comme avant Z par αX +β dans l’équation de E1, on retrouve le même résultat.Cependant, si la deuxième coordonnée du gradient de f serait nulle, on aurait une tangente avec unepente infinie ; X = x′1 ; mais dans ce cas là le résultat est trivial.

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Nous allons maintenant prouver la proposition 5.5.7.

Démonstration. Dans la propositon 3.5.6, on montre que E1(Qp) ne contient pas de point P tel quePm = 0 et p - m pour un p premier. Donc il reste à montrer que E1(Qp) ne contient pas de point P 6= 0tel que pP = 0, pour un p premier.Dans le plan affine choisi, nous allons avoir donc que le point O= (0 : 1 : 0) devient l’origine de la courbeaffine E1 (0,0), et que P 7→ −P devient la réflexion à l’origine (x′,z′) 7→ (−x′,−z′) (voir construction del’inverse pour la loi de groupe). On peut donc écrire que

En(Qp) = {P ∈ E1(Qp)|x1(P) ∈ pnZp},

en terme de nous nouvelles coordonnées.On remarque que En(Qp) forme un système fondamental de voisinage à l’origine dans E1(Qp). Nousallons utiliser le lemme démontré juste avant.Soit P ∈ En(Qp), soit x(P) = x1(P) (mod p5nZp).Le lemme 5.5.8, montre que l’application

ϕ : P 7→ x(P);En(Qp)→ pnZp/p5nZp

a la propriété suivante :

P1 +P2 +P3 = 0 =⇒ x(P1)+ x(P2)+ x(P3) = 0.

Or comme x(−P) =−x(P), alors x(P3) = x(−(P1 +P2)) =−x(P1 +P2) et par la propriété respectée parϕ on a aussi que x(P3) =−(x(P1)+ x(P2)) et donc on a l’égalité suivante x(P1 +P2) = x(P1)+ x(P2). Cequi implique donc ϕ un morphisme de groupe abélien ; en effet

ϕ(P+Q) = x(P+Q) = x(P)+ x(Q),

par ce qu’on montré juste avant.Supposons, par l’absurde, que P est d’ordre p. Comme P est non nul, alors il appartient à En(Qp)\En+1(Qp)pour un certain entier n. Alors on a x(P) ∈ pnZp\pn+1Zp (mod p5nZp), et donc x(pP) = px(P) ∈pn+1Zp\pn+2Zp (mod p5nZp). De fait pP /∈ pn+2Zp qui est un idéal de Zp (i.e. en particulier 0 ∈pn+2Zp), donc ceci implique que pP 6= 0, ce qui contredit alors notre hypothèse : pP = 0. Par consé-quent, E1(Qp) qui est sans-torsion.

3.5.7. Corollaire: Si P = (x : y : 1) ∈ E(Qp)tors, alors x,y ∈ Zp.

Démonstration. On rappelle que P est issu de P en choisissant des coordonnées primitives ; i.e. descoordonnées telles que x,y,z ∈Zp à l’exception que pas tous les x,y,z ∈ pZp, ceci afin de pouvoir déduireune réduction modulo p.On rappelle aussi que E1(Qp) = {P ∈ E0(Qp)|P = (0 : 1 : 0)}. Si P = (x : y : 1) avec x ou y qui n’estpas dans Zp, alors il existe des coordonnées primitives (x′ : y′ : z′) pour P telles que z′ ∈ pZp (car cescoordonnées sont obtenue en multipliant par p les anciennes). Donc z(P) = 0, et donc ceci implique queP = (0 : 1 : 0), et donc P ∈ E1(Qp). Donc par contraposée si P = (x : y : 1) /∈ E1(Qp), alors x,y ∈ Zp.De plus, la proposition précédente montre que si P est un point non-nul de torsion, alors P /∈ E1(Qp). Cequi montre donc notre corollaire.

3.5.8. Corollaire: Si P = (x : y : 1) ∈ E(Q)tors, alors x,y ∈ Z.

Démonstration. Ceci est une conséquence du corollaire précedent.En effet, premièrement si on prend un nombre rationel r qui n’est pas entier ; i.e r = a

b , avec pgcd(a,b) =1, alors ordp(r) = ordp(a)− ordp(b) < 0(par la proprièté 2.4.3) pour un p premier bien choisi et doncpar définition de Zp, r /∈ Zp, pour ce même p. De plus, si P ∈ E(Q)tors, alors P ∈ E(Qp)tors et donc parle corollaire précédent x,y ∈Zp pour tout p premier. Or juste au dessus, on a montré que x ∈Q\Z=⇒∃p tel que x /∈ Zp.Donc par contraposée de cette implication, on obtient le résultat recherché.

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3.5.9. Exemple: Soit la courbe E : Y 2Z = X3−5XZ2 +Z3.On vérifie ∆ =−473 6= 0, donc E est une courbe elliptique. On suppose avoir (x : y : 1)∈ E(Q)tors. Alorspar le théorème de Lutz-Nagell soit y = 0 soit y|−473. Si y = 0, on aurait l’équation 0 = X3−5X +1,or cette équation n’a pas de racines entières et le théorème de Lutz-Nagell nous dit que x,y ∈ Z, doncy 6= 0. De plus on a que 473 est un nombre premier donc soit y = 1 soit y =−473. Si y =−473, alors onaurait

223729 = X3−5X +1 ⇐⇒ 0 = X3−5X−223728,

mais de même il n’existe pas de solution entière à cette équation. Donc y = 1, et l’unique x solutionentière de

0 = X3−5X ,

est x = 0. On peut vérifier grâce aux formules de duplications que le point P = (0 : 1 : 1) est bien un pointde torsion, il est même de 2-torsion.Donc

E(Q)tors ' Z/2Z.

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