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Ann Urol 2001 ; 35 : 101-3 2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés S0003-4401(01)00003-1/SCO Rein Polykystose rénale siège d’aspergillose traitée par néphrectomie rétropéritonéale laparoscopique R. Rabii , A. Hoznek, L. Salomon, S. Bourg, D.K. Chopin, C.C. Abbou Service d’urologie, hôpital Henri Mondor, 51, avenue du maréchal de Lattre de Tassigny, 94010 Créteil, France RÉSUMÉ Nous rapportons le cas inhabituel d’un patient âgé de 40 ans greffé cardiaque, porteur d’une polykystose ré- nale au stade d’insuffisance rénale chronique, suivi en hémodialyse et qui consulte pour infection sur son rein gauche polykystique. La créatinémie sanguine était de 750 mmol/L. L’examen bactériologique des urines a isolé un germe : Escherichia coli. La tomodensitométrie abdo- minopelvienne montre une polykystose rénale bilatérale avec de gros reins, à index cortical laminé et la suspi- cion d’un kyste rénal infecté siégeant au pôle inférieur du rein gauche. Une néphrectomie rétropéritonéale laparo- scopique confirme I’atteinte invasive du rein par une as- pergillose. Dans un tel cas, devant l’infection d’un rein po- lykystique chez un transplanté, l’étiologie d’une infection fongique doit être évoquée, et la prise en charge de ces reins détruits polykystiques peut comporter une néphrec- tomie laparoscopique par voie rétropéritonéale. Cette ap- proche semble offrir moins de morbidité et c’est une alter- native à la chirurgie ouverte. 2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS aspergillus / kyste / laparoscopie / polykystose / rein / rétropéritonéoscopie ABSTRACT Polycystic kidney with aspergillosa treated by retroperi- toneal laparoscopic nephrectomy. We reported an uncommun case of 40 years old man, cardiac transplant recipient with chronic renal faillure who consulted for infected left polykystic renal. The serum cre- atinine level was 750 mmol/L, and urine culture isolated a E. Ecol germe. The abdominopelvic computed tomog- raphy showed a billateral large polykystic renal cortex and (Reçu le 2 octobre 2000 ; accepté le 30 octobre 2000) Correspondance et tirés à part. suspected the infected cyst in lower pole of left kidney. The retroperitoneal laparoscopic nephrectomy was performed confirming a renal invasive aspergillosa. About this case we should have a high index of suspicion for fungal ae- tiology in kidney infection in transplant patients and the management of non functioning infected polykystic kidney can use laparoscopic retroperitoneal nephrectomy. This approach can offers a minimal morbidity and alternative to open surgery. 2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS aspergillosa / cyst / kidney / laparoscopy / polycystic / retroperitoneoscopy L’infection fongique invasive accompagne 5 à 20% des patients transplantés [1]. L’atteinte aspergillaire limitée aux seules voies urinaires est rare, son diag- nostic reste difficile et n’est souvent retrouvé qu’à l’histologie. La survenue de complication sur kyste chez un patient porteur de polykystose et greffé car- diaque sous traitement immunosuppresseur doit faire penser à ce diagnostic. L’approche chirurgicale de ces reins quand ils sont détruits doit être la moins invasive possible. Le progrès réalisé actuellement en laparoscopie permet de réduire cette morbidité. Nous rapportons le cas inhabituel d’un patient greffé cardiaque, et porteur d’une polykystose rénale au stade d’insuffisance rénale présentant une aspergil- lose rénale, traitée par néphrectomie laparoscopique rétropéritonéale.

Polykystose rénale siège d'aspergillose traitée par néphrectomie rétropéritonéale laparoscopique

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Page 1: Polykystose rénale siège d'aspergillose traitée par néphrectomie rétropéritonéale laparoscopique

Ann Urol 2001 ; 35 : 101-3 2001 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservésS0003-4401(01)00003-1/SCO

Rein

Polykystose rénale siège d’aspergillose traitée par néphrectomierétropéritonéale laparoscopique

R. Rabii∗, A. Hoznek, L. Salomon, S. Bourg, D.K. Chopin, C.C. Abbou

Service d’urologie, hôpital Henri Mondor, 51, avenue du maréchal de Lattre de Tassigny, 94010 Créteil, France

RÉSUMÉNous rapportons le cas inhabituel d’un patient âgé de40 ans greffé cardiaque, porteur d’une polykystose ré-nale au stade d’insuffisance rénale chronique, suivi enhémodialyse et qui consulte pour infection sur son reingauche polykystique. La créatinémie sanguine était de750 mmol/L. L’examen bactériologique des urines a isoléun germe : Escherichia coli. La tomodensitométrie abdo-minopelvienne montre une polykystose rénale bilatéraleavec de gros reins, à index cortical laminé et la suspi-cion d’un kyste rénal infecté siégeant au pôle inférieur durein gauche. Une néphrectomie rétropéritonéale laparo-scopique confirme I’atteinte invasive du rein par une as-pergillose. Dans un tel cas, devant l’infection d’un rein po-lykystique chez un transplanté, l’étiologie d’une infectionfongique doit être évoquée, et la prise en charge de cesreins détruits polykystiques peut comporter une néphrec-tomie laparoscopique par voie rétropéritonéale. Cette ap-proche semble offrir moins de morbidité et c’est une alter-native à la chirurgie ouverte. 2001 Éditions scientifiqueset médicales Elsevier SAS

aspergillus / kyste / laparoscopie / polykystose / rein /rétropéritonéoscopie

ABSTRACTPolycystic kidney with aspergillosa treated by retroperi-toneal laparoscopic nephrectomy.We reported an uncommun case of 40 years old man,cardiac transplant recipient with chronic renal faillure whoconsulted for infected left polykystic renal. The serum cre-atinine level was 750 mmol/L, and urine culture isolateda E. Ecol germe. The abdominopelvic computed tomog-raphy showed a billateral large polykystic renal cortex and

(Reçu le 2 octobre 2000 ; accepté le 30 octobre 2000)∗ Correspondance et tirés à part.

suspected the infected cyst in lower pole of left kidney. Theretroperitoneal laparoscopic nephrectomy was performedconfirming a renal invasive aspergillosa. About this casewe should have a high index of suspicion for fungal ae-tiology in kidney infection in transplant patients and themanagement of non functioning infected polykystic kidneycan use laparoscopic retroperitoneal nephrectomy. Thisapproach can offers a minimal morbidity and alternative toopen surgery. 2001 Éditions scientifiques et médicalesElsevier SAS

aspergillosa / cyst / kidney / laparoscopy /polycystic / retroperitoneoscopy

L’infection fongique invasive accompagne 5 à 20 %des patients transplantés [1]. L’atteinte aspergillairelimitée aux seules voies urinaires est rare, son diag-nostic reste difficile et n’est souvent retrouvé qu’àl’histologie. La survenue de complication sur kystechez un patient porteur de polykystose et greffé car-diaque sous traitement immunosuppresseur doit fairepenser à ce diagnostic. L’approche chirurgicale deces reins quand ils sont détruits doit être la moinsinvasive possible. Le progrès réalisé actuellementen laparoscopie permet de réduire cette morbidité.Nous rapportons le cas inhabituel d’un patient greffécardiaque, et porteur d’une polykystose rénale austade d’insuffisance rénale présentant une aspergil-lose rénale, traitée par néphrectomie laparoscopiquerétropéritonéale.

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Figure 1. Vue laparoscopique de rein polykystique.

OBSERVATION

Mr J.D., âgé de 40 ans, transplanté cardiaque, suivien hémodialyse pour insuffisance rénale chroniquesur polykystose rénale autosomique dominante, con-sulte pour une douleur lombaire gauche, fébrile avecune infection urinaire à E. coli. La créatinémie estde 750 mmol/L. La tomodensitométrie abdomino-pelvienne montre une polykystose rénale bilatéraleavec de gros kystes et une réduction de l’index cor-tical avec un kyste hétérogène d’allure infectée aupole inférieur du rein gauche. Avant une éventuelletransplantation rénale une néphrectomie gauche futréalisée. La néphrectomie a été effectuée par voie la-paroscopique rétropéritonéale selon notre techniquehabituelle de néphrectomie [3].

Le patient est placé en position de lombotomie.Une incision de 15 mm a été effectuée sous la dou-zième côte au-dessus des muscles dorsaux, puis l’es-pace rétropéritonéal est abordé au doigt à travers lemuscle oblique. Le doigt repoussant le péritoine demanière à introduire un trocart de 10 mm et un de5 mm, l’un à la partie supérieure, l’autre à la partieinférieure sur la ligne axillaire antérieure, un trocartde 10 mm est placé sur la ligne axillaire moyennejuste au dessus de la crête iliaque, un trocart de 5 mmest placé sur la ligne axillaire postérieure sous l’in-cision initiale et un trocart de 12 mm est inséré dansl’incision initiale suit au total six trocarts. L’explora-tion retrouve de multiples kystes avec un gros kysteau pôle inférieur du rein gauche(figure 1). Après li-gature section du pédicule rénal et de l’uretère, le

Figure 2. Liquide du kyste : imprégnation argentique deGonnoria Grocott : montrant de nombreux filaments branchésévoquant une aspergillose.

rein est mis dans le sac puis ponctionné et mor-cellé avant son extraction. L’examen anatomopatho-logique retrouve un rein polykystique détruit pesant1100 g siège de lésions de pyélonéphrite chronique,avec un granulome interstitiel au sein duquel se trou-vent des filaments d’aspergillus(figure 2). Le patienta été mis sous antifongique. Il est sorti en bonnesanté ; reprise d’alimentation à J1 et reprise précoced’activité.

DISCUSSION

Le patient transplanté est le premier candidat à uneinfection fongique invasive [4]. Le patient trans-planté cardiaque peut développer sur une patholo-gie rénale kystique une infection à aspergillus fu-migatus [5]. La combinaison d’un traitement sys-témique antifungique et d’un traitement chirurgicalsemble être nécessaire, car le traitement antifungiqueseul jusqu’à maintenant a un rôle limité dans la cured’une aspergillose invasive rénale [2, 6]. Ainsi, letraitement d’une aspergillose rénale invasive sur reinpolykystique avec destruction du rein est la néphrec-tomie [7]. Durant ces dernières années, l’approchechirurgicale par des techniques mini-invasives pourla pathologie kystique rénale a confirmé plusieursavantages par rapport à la chirurgie conventionnelleà ciel ouvert [8].

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Polykystose rénale surinfectée 103

Ainsi, la néphrectomie laparoscopique pour reinpolykystique est effectivement moins agressive pourdes patients au stade d’insuffisance rénale, permet-tant des suites simples et une faible morbidité [9]. Lerein polykystique peut être le siège de kyste géant,il est possible dans ces cas lá, avant l’extraction durein de procéder à un morcellement des kystes per-mettant ainsi de faire entrer la totalité de la massedans le sac [9].

Cette approche offre une alternative à la chirur-gie ouverte classique avec moins de douleurs post-opératoires, un retour à l’alimentation précoce, unecourte durée d’hospitalisation, avec une reprise ra-pide d’activité et une faible morbidité [10].

La voie rétropéritonéale laparoscopique présentel’avantage de respecter la cavité péritonéale et donc,en cas de kyste infecté, d’éviter de la contaminer [7].

RÉFÉRENCES

1 Denning DW, Evans EG, Kibbler CC, Richardson MD, Ro-berts MA, Rogiers TR, Warnock DW, Warron RE. Guid-lines for the investigation of invasive fungal infections inhaematological malignancy and solid organ transplantation.British Society of Medical Mycology. Eur J Clin MicrobiolInfect Dis 1997 ; 16 : 24-36.

2 Flochner SM, Mc Aninch JW. Aspergillosis of the urinarytract ascending route of infection and evolving patterns ofdisease. J Urol 1981 ; 125 : 598-601.

3 Abbou CC, Cicco A, Gasman D, Hoznek A, Antiphon P,Chopin DK, Salomon L. Retroperitoneal laparoscopic ver-sus open radical nephrectomy. J Urol 1999 ; 161 : 1776-80.

4 Wise GJ, Talluri GS, Marella VK. Fungal infections ofthe genitourinary system: manifestations, diagnosis andtreatment. Urol Clin North Am 1999 ; 26 : 701-18.

5 Boriani G, Mirri A, Lacobitti P, Magneni G, Ferreti RA,Gamba A, et al. Cerebral and renal aspergillosis in a patientwith orthotopic heart transplant: dispriori treatment andfollowen. Cardiologia 1989 ; 34 : 807-11.

6 Nise GJ, Goldberg PE, Rozinn PJ. Do the imidazole, have arole in the management of genitourinary fungal infection? JUrol 1985 ; 133 : 61-4.

7 Fiteni I, Crussells MJ, Cuesta J, Le Tona S. Renal invasiveaspergilloma unusual infection in AIDS. J Infect 1996 ; 33 :61-3.

8 Lifson BJ, Teichman JM, Halbert JC. Role and long-term results of laparoscopic decortication in solitary cysticand autosomal dominant polycystic kidney disease. J Urol1998 ; 159 : 702-5. Discussion 705-6.

9 Elashry OM, Nakada SY, Wolf JS, Mc Dougol Clay-man RV. Laparoscopy for dults polycystic kidney diseasea promissing alternative. Am J Kidney Dis 1996 ; 27 : 224-33.

10 Teichman JM, Hulbert JC. Laparoscopic marsupialisationof the painful polycystic kidney. J Urol 1995 ; 153 : 1105-7.