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Presses Universitaires du Mirail Le Venezuela indépendant, une nation par le discours, (1808-1830). (Recherches et Documents, Amériques latines) by Véronique HEBRARD Review by: Michel BERTRAND Caravelle (1988-), No. 69, PORTS D'AMÉRIQUE LATINE (Décembre 1997), pp. 282-286 Published by: Presses Universitaires du Mirail Stable URL: http://www.jstor.org/stable/40853478 . Accessed: 14/06/2014 13:56 Your use of the JSTOR archive indicates your acceptance of the Terms & Conditions of Use, available at . http://www.jstor.org/page/info/about/policies/terms.jsp . JSTOR is a not-for-profit service that helps scholars, researchers, and students discover, use, and build upon a wide range of content in a trusted digital archive. We use information technology and tools to increase productivity and facilitate new forms of scholarship. For more information about JSTOR, please contact [email protected]. . Presses Universitaires du Mirail is collaborating with JSTOR to digitize, preserve and extend access to Caravelle (1988-). http://www.jstor.org This content downloaded from 185.2.32.90 on Sat, 14 Jun 2014 13:56:59 PM All use subject to JSTOR Terms and Conditions

PORTS D'AMÉRIQUE LATINE || Le Venezuela indépendant, une nation par le discours, (1808-1830). (Recherches et Documents, Amériques latines)by Véronique HEBRARD

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Le Venezuela indépendant, une nation par le discours, (1808-1830). (Recherches et Documents,Amériques latines) by Véronique HEBRARDReview by: Michel BERTRANDCaravelle (1988-), No. 69, PORTS D'AMÉRIQUE LATINE (Décembre 1997), pp. 282-286Published by: Presses Universitaires du MirailStable URL: http://www.jstor.org/stable/40853478 .

Accessed: 14/06/2014 13:56

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continentale et de ses différentes composantes géopolitiques et culturelles ne sont plus à souligner.

Frédérique LANGUE

Historiographie et Nation

Véronique HEBRARD.- Le Venezuela indépendant, une nation par le discours, (1808-1830).' Paris, L'Harmattan, 1996.- 464 p. (Recherches et Documents, Amériques latines). Préface de F.X. Guerra.

Parmi les mythes fondateurs des nations latino-américaines, s'il en est un qui a la vie dure c'est bien l'interprétation des crises d'Indépendances comme

expression ou comme témoignage de leur indiscutable existence. Depuis le XIXème siècle, une certaine historiographie ne cesse de répéter à l'envi cet axiome dont nul ne saurait remettre en doute la validité. Or c'est précisément à cette interrogation sur le contenu du concept de nation que se livre Véronique Hébrard à propos du Venezuela. C'est dire d'entrée de jeu l'originalité de sa

problématique qui, par-delà les mythologies nationales, tente de retrouver, à travers les discours des acteurs politiques qui firent l'Indépendance, les fondements du sentiment ou de l'identité nationale vénézuélienne.

Choisissant une structure calquée sur la chronologie politique, l'auteur identifie quatre phases clairement différenciées entre 1810 et 1830. Dans ce

découpage chronologique, le rôle joué par la guerre apparaît immédiatement essentiel, allant de pair avec l'importance des acteurs militaires dans l'élaboration du sentiment national, c'est-à-dire du citoyen en armes. Les vingt années étudiées ici avec une grande attention par V. Hébrard lui permettent ainsi de suivre «l'accession d'une communauté ancienne au rang de nation civilisée». Sur cette affirmation qui sert en quelque sorte de point de départ à sa réflexion, il lui

apparaît d'emblée nécessaire d'identifier les contours de cette communauté dessinée par les acteurs politiques. S'agit-il réellement d'une communauté nationale ? Est-ce qu'elle-même s'identifie comme telle ? Répondant à ces

questions essentielles V. Hébrard montre, en s'appuyant sur sa grande maîtrise de sources très diverses - proclamations et avis officiels, appels et réflexions de

personnalités politiques et intellectuelles, presse - et grâce à une grande finesse

d'analyse, comment cette difficile opération d'identification se construit peu à

peu et s'adapte au gré de la conjoncture politique et militaire.

Dans les premiers temps de l'Indépendance, c'est-à-dire dans les années 1810-181 1, la tradition hispanique d'autonomie des cités coloniales ainsi que les réformes du XVIIIe siècle vont immédiatement circonscrire cette communauté à celle de l'espace communal. Ce repliement au niveau local amène ses

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responsables à distinguer au sein de la collectivité entre une partie «saine» et une multitude dangereuse. En d'autres termes, la première affirmation de la communauté nationale au Venezuela se manifeste d'emblée par un double éclatement du corps social et se traduit par la mise en place de systèmes d'exclusions de la famille des patriotes de tous ceux qui, à divers titres, sont

perçus comme des ennemis de l'intérieur ou de l'extérieur. Si ceux de l'extérieur sont plus facilement identifiables, les exclus de l'intérieur sont assimilés à tous les perturbateurs de l'ordre public en cours d'établissement, c'est-à-dire à ceux

qui d'une manière ou d'une autre excluent d'y adhérer. Dans ce lot des ennemis de l'intérieur se retrouvent associés et assimilés l'ignorant, le traître ou encore celui qui refuse l'engagement. Une fois dessinés, les contours de cette communauté permettent à ses leaders d'envisager son auto-affirmation à travers les élections qui, en invitant le peuple des citoyens à y participer, marquent en

quelque sorte sa naissance. Cependant, «la participation politique à l'épreuve des faits» confirme bien l'absence de ce dernier et l'accaparement de la légitimité par une fraction de celui-ci. Le système politique mis en place, par le biais de tout un système de filtres constitutionnels, permet aussi d'écarter une part importante des citoyens eux-mêmes, objectif dont la difficile intégration des mulâtres à la citoyenneté apparaît comme une parfaite illustration. A l'inverse, le contexte d'instabilité et d'agitation facilite l'entrée de l'homme en armes dans la

citoyenneté dont il devient en quelque sorte l'une des premières références. Enfin, les formes et les conditions mêmes de l'émergence de la communauté nationale ainsi que celles de ses délimitations amènent les responsables politiques à traiter de l'organisation de la nouvelle souveraineté, à savoir de sa structure fédérale. Cependant, ce qui aurait pu permettre l'affirmation d'une communauté nationale englobant des collectivités locales fortement individualisées va devenir au contraire une des causes de ses divisions en exacerbant les rivalités internes. C'est dire que cette première phase d'affirmation de la nation au Venezuela est avant tout marquée par les divisions et les évictions. Seule la religion opère ici comme un élément cristallisateur de la nation, loin devant des références aux Lumières qui, paradoxalement, servent

plutôt ici à justifier les exclusions. Les années de guerre 1812-1820 signifient la mise à l'épreuve du système

construit précédemment et contribuent surtout à forger l'identité nationale. C'est en ce sens que Ton peut parler d'une primauté de la guerre dans cette

émergence. Toutes les images de la patrie en danger vont y concourir activement, qu'il s'agisse de la défense d'un territoire par ailleurs défini sans

grande précision ou du rejet de l'Espagnol. De cette primauté du militaire

surgissent finalement une patrie et une identité nationale dont le soldat devient non seulement le défenseur mais surtout le restaurateur et l'incarnation. Ce

primat du militaire contribue par ailleurs à renforcer à l'intérieur de la communauté les pratiques d'exclusion mises en place auparavant. En ce sens, l'épisode militaire signifie le renforcement de la captation de la nation au profit

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d'une minorité constituée par la fraction supérieure de la société et confirmée

par la proclamation de la constitution d'Angostura dont V. Hébrard réalise une étude attentive et rigoureuse.

Un fois acquise et surmontée la rupture avec l'Espagne et alors que ce long épisode militaire a servi à donner à la patrie un contenu plus précis, l'intégration du Venezuela dans l'ensemble colombien va, en quelque sorte, remettre la construction de la nation en chantier. Alors que la guerre avait, par la force des choses, contribué à la validation d'un discours patriote, unificateur et

intégrateur sous la houlette des héros militaires, l'épisode colombien marque au contraire le retour à un discours qui s'inspire de la période antérieure. La nation redevient alors un regroupement de communautés, une alliance de provinces, voire de cités, un véritable artefact surimposé à des territoires dont la seule unité

reposait sur l'ennemi commun. C'est donc à un transfert complet que procède la constitution de 1821 par rapport à celle de 1819, le maintien de l'unité devenant l'impératif principal. La facilité de cet abandon confirme aux yeux de V. Hébrard l'instrumentalisation de la nation au profit de la minorité qui contrôle le processus et au détriment d'une véritable volonté nationale, expression d'une conscience du même ordre. La nation vénézuélienne garde donc encore à cette date son caractère abstrait, facilitant d'autant l'oubli ou l'occultation des épisodes militaires qui avaient au contraire servi à affirmer son

émergence et à l'ancrer dans les coeurs.

Pourtant et a contrario, l'expérience colombienne constitue pour le Venezuela un apprentissage de la nation. Durant cette période, les opposants à la Grande Colombie vont intensifier leur discours national et, ce faisant,

légitimer le processus de séparation d'où émergera la nation vénézuélienne. C'est donc à nouveau dans l'opposition et le rejet que se forge la nation à laquelle il faut impérativement donner forme constitutionnelle pour confirmer son existence. Contre le modèle centraliste, c'est le retour de l'affirmation de la

patrie-cité qui est mis en avant. Contre l'autoritarisme des héros de

l'Indépendance et de Bolivar lui-même en particulier, c'est la forme constitutionnelle fédérale qui apparaît comme la plus à même de respecter la

spécificité et la diversité de ces micro et nombreuses patries. En ce sens c'est par et sur la reconnaissance du rôle politique de ces cités que se construit une nation dont le premier caractère reste bien celui d'être encore et toujours une abstraction aux contours flous et fluctuants. Pour les opposants à la Grande Colombie, la nation vénézuélienne n'affirmera son existence qu'à partir du moment où elle aura pris forme constitutionnelle. En d'autres termes, c'est bien l'étroite association patrie-nation-constitution qu'ils poursuivent de leurs voeux et que sanctionnent la proclamation et la constitution de 1 830, pour la première fois depuis 1810. Pour parvenir à la concrétisation de cette aspiration, la nation vénézuélienne se doit alors d'affirmer sa spécificité dans l'ensemble colombien. Dans cette perspective, la défense d'un territoire et donc l'établissement de

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frontières, la prise de conscience des richesses locales, l'exaltation du rôle

historique du Venezuela dans l'Indépendance de la Colombie deviennent des

arguments légitimant l'aspiration à l'affirmation nationale. Enfin, dans un tel contexte de luttes et d'affrontements, la première place parmi les citoyens ne

peut que revenir à l'homme en armes qui reste encore et toujours la référence en terme de citoyenneté. Pourtant, au vu des dérives centralistes dont les

responsables militaires ont été les principaux animateurs, on aspire dans cette nation en construction à une progressive «civilisation» de l'homme en armes par le biais de mesures restreignant sa participation à la vie politique.

En centrant son attention sur les périodes cruciales de la genèse nationale vénézuélienne, V. Hébrard montre combien lente et difficile a été l'affirmation de la nation du pays qui pourtant le premier proclama son Indépendance dans l'ensemble ibérique. Prise dans les tourbillons du temps court, la nation en construction change alors ici successivement de contenu et sert à légitimer des

projets très différents. Par ailleurs, cette nation se voit obligée de cohabiter avec des patries avec lesquelles elle ne s'identifie pas encore, ces dernières restant

plutôt imprégnées de leur caractère traditionnel hispanique qui les assimile aux

provinces, voire à de simples cités. Enfin, les conditions propres dans lesquelles se déroula cette progressive affirmation de la nation éclairent l'importance prise par l'homme d'armes. Ce dernier réalise une entrée en force sur la scène nationale dès les premiers moments du processus pour ne plus la quitter malgré la volonté d'en réguler et d'en contrôler une présence par trop pressante.

On peut bien sûr s'interroger sur la représentativité sociale des discours

politiques tenus par et pour les élites. On peut éventuellement regretter aussi la faible place accordée aux éléments historiques - l'économique, le social, le culturel - autres que strictement politiques ou militaires, qui pourtant conditionnent et forgent eux aussi les discours et les représentations de la nation. Mais il faut bien reconnaître que ce n'était pas là le véritable projet de l'auteur

qui, par le titre donné à l'ouvrage, en circonscrit parfaitement l'objet. En s'attachant à une analyse très fine des discours des élites vénézuéliennes dans leur volonté de donner un contenu à la nation, la recherche de V. Hébrard marque incontestablement une étape importante dans l'historiographie de

l'Indépendance. Loin de se contenter des affirmations répétées à l'envi depuis trop longtemps, V. Hébrard montre avec efficacité l'intérêt qu'il peut y avoir à mettre en cause ce que l'on considère trop souvent comme des évidences

historiques et à renverser les idoles. N'est-ce pas là l'une des premières missions de la recherche historique que d'aller précisément à l'encontre de ces mythes quels qu'ils soient et, ce faisant, de remettre en chantier la réflexion sur les idées reçues ? En interrogeant la nation et son contenu au Venezuela, V. Hébrard

souligne avec force et dans le droit fil des recherches menées depuis plusieurs années par son maître F.X. Guerra, par-delà les proclamations les plus

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volontaristes, le difficile cheminement de la modernité politique dans les débris de l'Ancien Régime colonial aux Amériques.

Michel BERTRAND

Juan A. ORTEGA y MEDINA, Rosa CAMELO (Coord.).- Historiografia Mexicana, Volumen IV. En busca de un discurso integrador de la nación 1848- 1884-. México, Universidad Nacional Autónoma de México, 1996 .-588 p.

La parution récente de ce volume consacré aux discours et principes fondateurs de la nation mexicaine est l'occasion pour nous de signaler cette collection consacrée aux principaux textes de l'historiographie mexicaine à travers le temps. Mis en oeuvre sous la direction de Juan Antonio Ortega, sous les auspices également de l'Instituto de Investigaciones Históricas de la UNAM, bénéficiant par ailleurs de la collaboration de spécialistes des questions abordées dans les différents volumes (vol. I ; La creación de una imagen propia. La tradición indígena, coord. C. Martínez Marín et J.R. Romero Galván ; II : La creación de una imagen propia. La tradición española, coord. R. Camelo ; III : El

surgimiento de la historiografía nacional, coord. V. Guedea ; IV : En busca de un discurso integrador de la nación, coord. A. Pi-Suñer ; V : La etapa fundacional de la escuela histórica mexicana, coord. G. Villegas), ce projet ambitieux vise à rendre accessibles à un plus vaste public les réflexions menées du XVe siècle au début du XXe siècle par les grands historiens.

Conférer un sens au passé, participer à la définition du «métier d'historien», préserver la mémoire nationale, tels sont quelques-uns des présupposés qui ont

inspiré cette série de publications ainsi d'ailleurs que les analyses qui nous sont

proposées à cette occasion. Soulignons à cet égard que le projet d'une «histoire

générale» du Mexique n'est pas chose nouvelle, contrairement à ce que laisseraient entendre des analyses récentes au titre accrocheur. Ses concepts, l'intérêt que revêt sa connaissance dans le cadre de l'édification politique du

citoyen, avaient été soulignés à maintes reprises par les tenants de

l'historiographie nationale, comme le fait Antonia Pi-Suñer Llorens dans son étude introductive, en se référant plus particulièrement aux écrits de Manuel Larrainzar. La période qui va de 1848 àl884 marque à cet égard une étape décisive dans l'élaboration de discours d'inspiration intégratrice, mais aux fondements nationalistes avoués. Ce n'est pas un hasard en effet s'il est revenu aux deux générations d'historiens concernés par cette période d'initier, sous la

pression des événements - la guerre avec les Etats-Unis d'Amérique et la perte en 1848 d'une grande partie du territoire mexicain - la première réflexion

d'ampleur sur cette question. Une réflexion qui s'appuie certes sur des considérations de type révisionniste, voire critique, en ce qui concerne la révolution d'Indépendance (se reporter aux considérations de Lucas Alamán ou de Luis Cuevas) et trouve des prolongements hautement circonstanciels dans les

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