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PROFACILITY MAGAZINE SEPTEMBRE 2010 13 Insourcing: à contre-courant L’Hôpital Universitaire d’Anvers (UZA) a opté dès son ouverture - il y a maintenant un peu plus de 30 ans - pour l’outsourcing des services de nettoyage. Cette piste était alors avant-gardiste dans le secteur des soins de santé. La toute nouvelle directrice du service facilitaire a reçu comme ‘mission de bienvenue’ celle d’évaluer en profondeur la situation existante par rapport à la création d’une société (ASBL par ex.) ou à l’insourcing n Eduard CODDé E n 2007, le comité d’audit de l’UZA a formulé une demande d’analyse approfondie des services de net- toyage et ceci en lien avec l’aspect TVA. Chaque année, ce sont quelque 800.000 euros de TVA qui étaient payés sur les activités de nettoyage effectuées par des tiers. Pour Sylvie Vercammen, qui a endossé sa fonction de Directrice du Service Facilitaire en avril 2008, ce fut un sacré défi. Après 3 mois de familia- risation au fonctionnement de l’UZA, son objectif était que l’étude pour le co- mité d’audit soit prête pour novembre 2008. Ainsi, le Comité de Direction et le Conseil d’Administration pouvaient valider la décision finale pour décembre 2008 au plus tard. Un regard ouvert sur les choses Pour réaliser l’étude, un groupe d’orien- tation a tout d’abord été composé. Le ser- vice du personnel y était représenté dans la mesure où un choix éventuel pour l’insourcing irait de pair avec la gestion de 150 membres du personnel. Le groupe comptait aussi un économiste ‘business intelligence’, un administrateur délégué, un consultant externe avec une grande expertise sur le plan de la réglementation TVA dans le secteur des soins et Sylvie Vercammen elle-même. Evidemment, ce qui se passait en dehors de l’UZA a fait l’objet d’un benchmarking pratiqué avec des collègues dans des éta- blissements comparables à Bruxelles, Louvain, etc. « Il était important dans la réalisation du case study que l’on travaille sans préju- gés et avec un regard aussi ouvert que possible sur les choses », souligne Syl- vie Vercammen. « C’est pourquoi nous avons exploré toutes les alternatives pos- sibles. » Une première alternative consistait à conclure une joint-venture avec une société externe. L’inconvénient dans ce cas est la dépendance à cette société. La loi sur les marchés publics qui s’im- pose à l’UZA – toutes les x années, un nouvel appel d’offres doit être lancé – rend aussi cette piste moins intéressante. De plus, les contrats évoluent, ce qui s’accompagne presque toujours d’extras et donc de suppléments de prix. Dans la mesure où l’UZA construit et transforme constamment, il était prévisible que des coûts de régie supplémentaires allaient devoir être comptés. La question de la contrôlabilité et de la gérabilité d’une joint venture n’a pas trouvé de réponse concrète. Parmi les pistes alternatives, il y avait aussi la création d’une ASBL, d’une coo- PRO-FM I FM EN MILIEU HOSPITALIER I Des lignes de communication directes et une plus grande implication du personnel d’entretien constituent les grands atouts de l’insourcing. photo: Eric De Mildt

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Page 1: PRO-FM I FM EN MILIEU HOSPITALIER I insourcing: à contre

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insourcing: à contre-courantl’Hôpital Universitaire d’anvers (UZa) a opté dès son ouverture - il y a maintenant un peu plus de 30 ans - pour l’outsourcing des services de nettoyage. cette piste était alors avant-gardiste dans le secteur des soins de santé. la toute nouvelle directrice du service facilitaire a reçu comme ‘mission de bienvenue’ celle d’évaluer en profondeur la situation existante par rapport à la création d’une société (aSBl par ex.) ou à l’insourcing

n Eduard Coddé

En 2007, le comité d’audit de l’UZA a formulé une demande d’analyse approfondie des services de net-

toyage et ceci en lien avec l’aspect TVA. Chaque année, ce sont quelque 800.000 euros de TVA qui étaient payés sur les activités de nettoyage effectuées par des tiers. Pour Sylvie Vercammen, qui a endossé sa fonction de Directrice du Service Facilitaire en avril 2008, ce fut un sacré défi. Après 3 mois de familia-risation au fonctionnement de l’UZA, son objectif était que l’étude pour le co-mité d’audit soit prête pour novembre 2008. Ainsi, le Comité de Direction et le Conseil d’Administration pouvaient valider la décision finale pour décembre 2008 au plus tard.

Un regard ouvert sur les chosesPour réaliser l’étude, un groupe d’orien-tation a tout d’abord été composé. Le ser-vice du personnel y était représenté dans la mesure où un choix éventuel pour l’insourcing irait de pair avec la gestion de 150 membres du personnel. Le groupe comptait aussi un économiste ‘business intelligence’, un administrateur délégué, un consultant externe avec une grande expertise sur le plan de la réglementation TVA dans le secteur des soins et Sylvie Vercammen elle-même.

Evidemment, ce qui se passait en dehors de l’UZA a fait l’objet d’un benchmarking pratiqué avec des collègues dans des éta-blissements comparables à Bruxelles, Louvain, etc.« Il était important dans la réalisation du case study que l’on travaille sans préju-gés et avec un regard aussi ouvert que possible sur les choses », souligne Syl-vie Vercammen. « C’est pourquoi nous avons exploré toutes les alternatives pos-sibles. »Une première alternative consistait à conclure une joint-venture avec une société externe. L’inconvénient dans ce cas est la dépendance à cette société. La loi sur les marchés publics qui s’im-pose à l’UZA – toutes les x années, un nouvel appel d’offres doit être lancé – rend aussi cette piste moins intéressante. De plus, les contrats évoluent, ce qui s’accompagne presque toujours d’extras et donc de suppléments de prix. Dans la mesure où l’UZA construit et transforme constamment, il était prévisible que des coûts de régie supplémentaires allaient devoir être comptés. La question de la contrôlabilité et de la gérabilité d’une joint venture n’a pas trouvé de réponse concrète.Parmi les pistes alternatives, il y avait aussi la création d’une ASBL, d’une coo-

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Des lignes de communication directes et une plus grande implication du personnel d’entretien constituent les grands atouts de l’insourcing.

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changement de cap

Sylvie Vercammen a achevé, il y a en-viron deux ans, une carrière de 16 ans en tant que manager projectenginee-ring au sein de la célèbre entreprise Janssen Pharmaceutica pour intégrer le monde du facility management. depuis avril 2008, elle est directrice du service facilitaire à l’hôpital univer-sitaire d’Anvers où, outre le nettoyage, le catering et le linge, elle s’occupe aussi du service achat, du magasin, de la logistique et de l’environnement. L’UZA recense 573 lits agréés et 25.000 admissions par an, en plus de 530.000 consultations. 2.700 personnes y travaillent.L’UZA est né de la création de la Facul-té de Médecine à la RUCA en 1965. Il a fallu attendre 1971 avant qu’un hôpital universitaire soit créé en plus de l’offre académique. En 1979, le bloc médical technique et quelque 300 lits étaient prêts. deux ans plus tard, le nombre de lits avait quasiment doublé.

pérative ou d’une association de partage de frais. Quelle que soit la manière dont on voit les choses, la création d’une nou-velle société de nettoyage serait toujours confrontée à la loi sur les marchés publics et n’aurait aucune chance de s’impo-ser en raison du manque de références (dans le secteur des soins, il faut toujours présenter des références comparables et pertinentes). En outre, il apparaissait que les économies réalisables par le biais de telles formules alternatives étaient nette-ment en retrait de ce qui serait possible via l’insourcing.Et quid de l’outsourcing si longtemps

pratiqué ? Il n’y a qu’une influence indirecte sur les résultats car le donneur d’ordres ne peut directement diriger le personnel de nettoyage. Les lignes de communication passent par le manage-ment du partenaire externe et sont de ce fait moins transparentes et traçables. Pas moins de 96 % du coût de nettoyage se rapporte au personnel, ce qui correspond à un montant énorme en TVA non récu-pérable !

avantages et conditionsPour l’inévitable calcul de l’occupation du personnel, il a été fait appel, pendant le processus d’étude, à Advibel Schoon-maakconsulting. Ce bureau a calculé l’occupation nécessaire par service et par type de local : urgence, bloc opéra-toire, soins intensifs, salles de consulta-tion, bureaux. Par ailleurs, il a établi les dossiers de travail pour chaque poste de nettoyage.L’insourcing semblait être, après étude approfondie et calcul, le choix le plus ju-dicieux, pour autant que la propre équipe de nettoyage puisse être employée sous

le statut d’ouvrier. « Le statut d’ouvrier n’existait plus au sein de l’UZA. Sa réin-troduction exigeait une préparation soignée et allait de pair avec une vaste concertation, e.a. avec les représentants des travailleurs », se souvient Sylvie Vercammen. « De plus, il était important d’introduire ce statut de manière aussi uniforme que possible, aussi bien pour les agents d’entretien proprement dits

que pour les chefs d’équipe. »En soi, rien d’inhabituel, car même dans le secteur privé, les sociétés de nettoyage travaillent avec des contrats d’ouvrier. « Si nous devions travailler sous statut d’employé, l’insourcing ne serait évi-demment plus une option », reconnaît franchement Sylvie Vercammen.La plus grosse pression vient indénia-blement de toute cette problématique du personnel inhérente au choix de l’insour-cing du service de nettoyage. « Un pro-cessus de recrutement permanent est en cours, admet Sylvie Vercammen. « Trou-ver des gens et les garder n’est certaine-ment pas simple et le service facilitaire apporte son soutien pour le recrutement. Heureusement, pour ce qui est de l’as-pect juridique et administratif, nous pou-vons compter sur un soutien énorme de la part du département du personnel ! »

lancer et relancerAprès que, fin 2008, le choix pour l’in-sourcing ait été opéré, la totalité du ser-vice de nettoyage interne devait être lancé. La concertation nécessaire avec

les syndicats n’a été qu’un des nombreux aspects à prendre en considération pen-dant la phase de lancement. Le recrute-ment pour les différents niveaux de qua-lification, et ceci en fonction de la date de lancement prévue, constituait une tâche énorme. Ce processus s’est déroulé pendant neuf mois de façon très inten-sive, mais dans la pratique, il semble ne jamais s’arrêter complètement. Donnée

chaque année, l’UZa réalise 25.000 admissions et 530.000 consultations

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« l’insourcing avec du personnel sous statut ouvrier est le choix le plus judicieux. »

Sylvie Vercammen, Directrice du service facilitaire de l’hôpital universitaire d’anvers (UZa).

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spécifique à l’UZA : les transformations incessantes qui nécessitent de garder une équipe de nettoyage de réserve (ap-pelée équipe papillon) sous la main. Cependant, lorsque les personnes en réserve doivent intervenir trop souvent pour compléter les autres équipes, une contrainte organisationnelle supplémen-taire apparaît.Outre l’engagement de personnel, il a fal-lu investir dans des appareils, machines, vêtements de travail pour les équipes de nettoyage et négocier un contrat pour les biens de consommation. Les packages IT ont aussi été adaptés pour permettre un traitement rapide des questions liées aux vacances et au calcul des salaires. « Mal-gré le grand investissement unique, une sérieuse économie a quand même été réalisée », remarque Sylvie Vercammen. Le service interne de nettoyage a été offi-ciellement lancé le 1er octobre 2009 à 6h.

contrôle de qualitéPasser à l’insourcing nécessite de tenir compte de tous les aspects de l’opéra-tion, y compris donc le contrôle de qua-lité. Il est indispensable de s’imposer des SLA.« Les lignes directes avec le personnel de nettoyage et une plus grande impli-

administration du personnel

17 nationalités travaillent ensemble, ce qui exige une organisation spécifique. Pendant les mois de juillet et d’août, il faut tenir compte d’un effectif réduit, compensé par la mobilisation de 70 à 80 étudiants. Comme le montre l’expérience après presqu’un an de fonctionnement effectif, l’égalité stricte de traitement est très importante.L’UZA travaille en trois équipes : service matinal, service de jour et service tardif. Une femme de ménage est présente 8h/jour par département hospitalier. Il y a aussi une permanence de nuit au cas où ont lieu des opérations urgentes ou des accouchements. Le besoin d’un service de nuit dépend de l’offre médicale de l’hôpital.L’enlèvement des déchets est aussi assuré en interne par des gens qui font partie de l’équipe de nettoyage.

cation dans le job constituent un pre-mier avantage », constate Sylvie Ver-cammen. « Le but de l’UZA n’est pas non plus de faire des bénéfices avec ce service, donc il n’est absolument pas question d’économiser sur la qualité. »Le suivi et le traçage des plaintes s’ef-fectuent entièrement en régie propre via le service facilitaire. « Le fait qu’il ne faille pas lancer tous les 5 ans un nouvel appel d’offres est un avantage en termes de continuité dans la poli-tique de qualité », ajoute notre interlocutrice.Les chefs d’équipe ont une tâche impor-tante. Le contrôle sur le lieu du travail est essentiel pour atteindre la qualité visée.« Le contrôle de qualité est une priorité permanente », insiste Sylvie Vercam-

men. Pour cela, elle peut notamment compter sur le soutien de Hilde Jans-sen, experte dans le domaine de l’hy-giène en milieu hospitalier. Ensemble, elles effectuent des rondes de contrôle débouchant sur de nouvelles priorités qui sont alors communiquées au res-ponsable de l’entretien.Malgré un grand nombre d’obstacles et une charge de travail à ne pas sous-es-timer, le bilan est positif. Concernant l’économie réalisable en 2010 grâce à l’insourcing, les prévisions tablent sur 470.000 euros environ. Un objectif réa-liste apparemment car au cours de la période septembre – décembre 2009, l’épargne était, proportionnellement, supérieure. n

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25/11/2010

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