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© Masson, Paris, 2006. Gastroenterol Clin Biol 2006;30:598-603 598 MISE AU POINT Pronostic des cancers colorectaux et inégalités socio-économiques Emmanuel MITRY (1), Bernard RACHET (2) (1) Service d’Hépato-Gastroentérologie et Oncologie Digestive, CHU Ambroise Paré, AP-HP et UFR de Médecine Paris- Ile de France Ouest, Boulogne ; (2) Cancer and Public Health Unit, London School of Hygiene and Tropical Medicine, Keppel Street, London, UK. RÉSUMÉ Il est bien établi que le niveau socio-économique est un facteur pronostique important de nombreux cancers, dont le cancer colorectal. Les objectifs de cette mise au point sont de présenter les données épidémiologiques démontrant l’association entre statut socio-économique et pronostic des cancers colorectaux, de tenter d’en décrire les mécanismes sous-jacents et d’évaluer leur impact réel sur la survie de ces cancers. SUMMARY Emmanuel MITRY, Bernard RACHET It is well established that socio-economic status is a major prognostic factor for many cancers, including colorectal cancer. The aims of this review are (i) to report epidemiological data showing how socio- economic status influences colorectal cancer survival, (ii) to attempt to describe the mechanisms underlying these survival inequalities, and (iii) to assess their impact on survival of colorectal cancer. Introduction Le niveau socio-économique est un facteur majeur d’inégalités face à la santé [1]. La réduction de ces importantes inégalités et l’amélioration de la santé des pauvres sont des objectifs majeurs de plusieurs organisations internationales comme l’OMS, et de nombreux gouvernements. De telles différences de morbidité et mortalité ont été observées pour de nombreuses pathologies [2-5] mais sont particulièrement marquées pour les cancers [6]. De très nombreuses études ont en effet démontré l’influence du statut socio-économique sur la survie des cancers, les groupes socio- économiques défavorisés ayant un moins bon pronostic [8-12]. Les localisations tumorales pour lesquelles les disparités en fonc- tion du statut socio-économique sont les plus importantes sont les cancers bronchiques, colorectaux, du sein, de la prostate, du col utérin, de l’estomac et du foie. Aux Etats-Unis, où ces sites repré- sentent environ 60 % des cas incidents et plus de la moitié des cas de décès par cancers, la différence de survie à 5 ans entre les personnes du groupe socio-économique le plus aisé et ceux du groupe le plus défavorisé était supérieure à 10 % (hommes = 61 vs 49 %, femmes = 63,4 vs 53,1 %) [13]. Les cancers colorectaux représentent la 3 e cause de cancer en France, après les cancers du poumon et du sein et leur inci- dence est en augmentation [14]. Une amélioration du pronostic a récemment été rapportée, liée essentiellement à l’amélioration du stade de diagnostic permettant une exérèse chirurgicale à visée curative plus fréquente, à une diminution de la mortalité péri-opératoire et à l’utilisation de la chimiothérapie adjuvante pour les tumeurs avec envahissement ganglionnaire [15]. Tous les malades n’ont cependant pas bénéficié de façon comparable de ces progrès diagnostiques et thérapeutiques. C’est le cas des malades âgés dont la survie ne s’est pas améliorée [15] mais probablement également des malades des groupes socio-écono- miques les plus défavorisés. L’objectif de cette mise au point est de rapporter les données épidémiologiques mettant en évidence l’influence du statut socio- économique sur le pronostic des cancers colorectaux, de tenter d’en expliquer les causes et de mesurer en quoi la différence de survie entre les différents groupes sociaux peut être expliquée par une telle influence. Données épidémiologiques Etats-Unis L’influence du statut socio-économique et du groupe ethnique sur le pronostic des cancers a été rapportée aux Etats Unis à la fin des années 1980 [16, 17]. En 1989, l’American Cancer Society publiait un rapport [18], dont les points les plus significatifs étaient les suivants 1) les malades défavorisés n’ont pas accès aux soins de qualité et ont plus de risque de mourir du cancer que les autres malades, 2) les malades défavorisés souffrent plus de leur cancer, 3) les malades défavorisés ont plus de difficultés à obtenir et à bénéficier d’une assurance maladie et parfois ne cherchent pas à obtenir des soins qu’ils ne pourraient pas payer, 4) les mala- des défavorisés et leur famille doivent faire d’importants sacrifices personnels pour payer leurs soins, 5) l’éducation et l’information concernant les cancers sont insuffisantes et non adaptées à la plu- part des malades défavorisés, 6) il existe un fatalisme face au can- cer chez ces malades défavorisés qui limite leur demande de soins de qualité. Une étude avait montré que les noirs de Harlem avaient près de 3 fois plus de risque de mourir avant l’âge de 65 ans que les blancs et que leur chance de vivre jusqu’à 65 ans était inférieure à celle des hommes au Bangladesh [19] ! En 1991, le directeur du National Cancer Institut américain déclarait que la « pauvreté est un carcinogène » [20]. En 1996 et 1998, l’Ameri- can Cancer Society s’était fixé comme objectif une réduction de 50 % de la mortalité par cancer et de 25 % de l’incidence des cancers avec disparition des inégalités socio-économiques en 2015. Ces objectifs ambitieux ne seront probablement qu’en partie atteints puisque deux rapports récents montrent la persis- tance d’une plus grande incidence et d’un moins bon pronostic dans les populations défavorisées [21, 22]. Prognosis of colorectal cancer and socio-economic inequalities (Gastroenterol Clin Biol 2006;30:598-603) Tirés à part : E. MITRY, Service d’Hépato-Gastroentérologie et Oncologie Digestive, CHU Ambroise Paré, 9 avenue Charles de Gaulle, 92100 Boulogne. E-mail : [email protected]

Pronostic des cancers colorectaux et inégalités socio-économiques

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Page 1: Pronostic des cancers colorectaux et inégalités socio-économiques

© Masson, Paris, 2006. Gastroenterol Clin Biol 2006;30:598-603

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MISE AU POINT

Pronostic des cancers colorectaux et inégalités socio-économiques

Emmanuel MITRY (1), Bernard RACHET (2)

(1) Service d’Hépato-Gastroentérologie et Oncologie Digestive, CHU Ambroise Paré, AP-HP et UFR de Médecine Paris- Ile de France Ouest, Boulogne ;(2) Cancer and Public Health Unit, London School of Hygiene and Tropical Medicine, Keppel Street, London, UK.

RÉSUMÉIl est bien établi que le niveau socio-économique est un facteurpronostique important de nombreux cancers, dont le cancercolorectal. Les objectifs de cette mise au point sont de présenter lesdonnées épidémiologiques démontrant l’association entre statutsocio-économique et pronostic des cancers colorectaux, de tenterd’en décrire les mécanismes sous-jacents et d’évaluer leur impactréel sur la survie de ces cancers.

SUMMARY

Emmanuel MITRY, Bernard RACHET

It is well established that socio-economic status is a major prognosticfactor for many cancers, including colorectal cancer. The aims of thisreview are (i) to report epidemiological data showing how socio-economic status influences colorectal cancer survival, (ii) to attemptto describe the mechanisms underlying these survival inequalities,and (iii) to assess their impact on survival of colorectal cancer.

Introduction

Le niveau socio-économique est un facteur majeur d’inégalitésface à la santé [1]. La réduction de ces importantes inégalités etl’amélioration de la santé des pauvres sont des objectifs majeursde plusieurs organisations internationales comme l’OMS, et denombreux gouvernements. De telles différences de morbidité etmortalité ont été observées pour de nombreuses pathologies [2-5]mais sont particulièrement marquées pour les cancers [6]. De trèsnombreuses études ont en effet démontré l’influence du statutsocio-économique sur la survie des cancers, les groupes socio-économiques défavorisés ayant un moins bon pronostic [8-12].Les localisations tumorales pour lesquelles les disparités en fonc-tion du statut socio-économique sont les plus importantes sont lescancers bronchiques, colorectaux, du sein, de la prostate, du colutérin, de l’estomac et du foie. Aux Etats-Unis, où ces sites repré-sentent environ 60 % des cas incidents et plus de la moitié des casde décès par cancers, la différence de survie à 5 ans entre lespersonnes du groupe socio-économique le plus aisé et ceux dugroupe le plus défavorisé était supérieure à 10 % (hommes = 61vs 49 %, femmes = 63,4 vs 53,1 %) [13].

Les cancers colorectaux représentent la 3e cause de canceren France, après les cancers du poumon et du sein et leur inci-dence est en augmentation [14]. Une amélioration du pronostica récemment été rapportée, liée essentiellement à l’améliorationdu stade de diagnostic permettant une exérèse chirurgicale àvisée curative plus fréquente, à une diminution de la mortalitépéri-opératoire et à l’utilisation de la chimiothérapie adjuvantepour les tumeurs avec envahissement ganglionnaire [15]. Tousles malades n’ont cependant pas bénéficié de façon comparablede ces progrès diagnostiques et thérapeutiques. C’est le cas desmalades âgés dont la survie ne s’est pas améliorée [15] maisprobablement également des malades des groupes socio-écono-miques les plus défavorisés.

L’objectif de cette mise au point est de rapporter les donnéesépidémiologiques mettant en évidence l’influence du statut socio-économique sur le pronostic des cancers colorectaux, de tenterd’en expliquer les causes et de mesurer en quoi la différence desurvie entre les différents groupes sociaux peut être expliquéepar une telle influence.

Données épidémiologiques

Etats-Unis

L’influence du statut socio-économique et du groupe ethniquesur le pronostic des cancers a été rapportée aux Etats Unis à la findes années 1980 [16, 17]. En 1989, l’American Cancer Societypubliait un rapport [18], dont les points les plus significatifs étaientles suivants 1) les malades défavorisés n’ont pas accès aux soinsde qualité et ont plus de risque de mourir du cancer que les autresmalades, 2) les malades défavorisés souffrent plus de leurcancer, 3) les malades défavorisés ont plus de difficultés à obteniret à bénéficier d’une assurance maladie et parfois ne cherchentpas à obtenir des soins qu’ils ne pourraient pas payer, 4) les mala-des défavorisés et leur famille doivent faire d’importants sacrificespersonnels pour payer leurs soins, 5) l’éducation et l’informationconcernant les cancers sont insuffisantes et non adaptées à la plu-part des malades défavorisés, 6) il existe un fatalisme face au can-cer chez ces malades défavorisés qui limite leur demande de soinsde qualité. Une étude avait montré que les noirs de Harlemavaient près de 3 fois plus de risque de mourir avant l’âge de65 ans que les blancs et que leur chance de vivre jusqu’à 65 ansétait inférieure à celle des hommes au Bangladesh [19] ! En 1991,le directeur du National Cancer Institut américain déclarait que la« pauvreté est un carcinogène » [20]. En 1996 et 1998, l’Ameri-can Cancer Society s’était fixé comme objectif une réduction de50 % de la mortalité par cancer et de 25 % de l’incidence descancers avec disparition des inégalités socio-économiques en2015. Ces objectifs ambitieux ne seront probablement qu’enpartie atteints puisque deux rapports récents montrent la persis-tance d’une plus grande incidence et d’un moins bon pronosticdans les populations défavorisées [21, 22].

Prognosis of colorectal cancer and socio-economic inequalities

(Gastroenterol Clin Biol 2006;30:598-603)

Tirés à part : E. MITRY, Service d’Hépato-Gastroentérologie et Oncologie Digestive, CHU Ambroise Paré, 9 avenue Charles de Gaulle, 92100 Boulogne.E-mail : [email protected]

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Cancer colorectal et inégalités socio-économiques

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L’analyse des tendances évolutives de la mortalité par cancercolorectal chez les hommes de 25 à 64 ans aux Etats Unis entre1950 et 1998 montre que le taux de mortalité a régulièrementdiminué pour les malades de niveau socio-économique le plusfavorisé, passant d’environ 22 cas pour 100 000 en 1950 à13 cas pour 100 000 en 1998 [23]. La tendance est inversepour les malades des groupes socio-économiques les plus défa-vorisés, passant d’environ 10 cas pour 100 000 en 1950 à envi-ron 16 cas pour 100 000 en 1998, les deux courbes se croisantau début des années 90. L’analyse des courbes de décès parcancer colorectal chez les hommes âgés de 65 ans et plus mon-tre des tendances globalement comparables, avec des taux demortalité décroissant régulièrement dans les populations les plusfavorisées, et une augmentation régulière pour les populationsles plus défavorisées, avec pour l’année 1998 des taux de mor-talité assez proches entre ces différentes populations de l’ordrede 144/100 000 habitants. L’analyse des courbes pour les fem-mes montre que, quel que soit le groupe d’âge, la mortalité dansla population la plus aisée a régulièrement et fortement diminuéau cours des 50 dernières années, alors qu’elle est restée globa-lement stable pour les malades du groupe socio-économique leplus défavorisé. Il existe un excès de mortalité pour ce derniergroupe depuis les années 90 chez les malades âgées de moinsde 65 ans, alors que les taux sont globalement comparablesaprès 65 ans.

Angleterre et Pays de Galles

Contrairement aux Etats-Unis, le système de santé auRoyaume-Uni est essentiellement public avec un accès aux soinsuniversel et gratuit, le système privé étant quasiment inexistant.Une monographie regroupant l’estimation des tendances évoluti-ves de 2,9 millions de malades adultes atteints d’un cancer dia-gnostiqué en Angleterre et au Pays de Galles au cours de lapériode 1971-1990 et suivis jusqu’en 1995 a été publiée en1999 [8]. L’impact de cette publication a été important car lesrésultats montraient l’existence de fortes inégalités en fonction ducontexte socio-économique et suggéraient que plusieurs milliersde décès prématurés pourraient être évités chaque année parune réduction de l’écart de survie entre catégories socio-écono-miques (deprivation gap). Les résultats ont également confirméque, pour la majorité des cancers, les taux de survie observésdans ces deux pays étaient inférieurs à ceux des autres pays del’Europe de l’Ouest ou des Etats Unis. Suite à la publication decette monographie, un « Sommet du Cancer » a été organisé enmai 1999 par le Premier Ministre anglais pour réorganiser lastratégie nationale de prise en charge des cancers. L’objectif ques’est fixé le gouvernement anglais est de réduire, d’ici à 2010, de100 000 le nombre de décès liés au cancer avant l’âge de75 ans. Pour atteindre cet objectif, des mesures ont été prisespour réduire le délai d’attente entre la consultation du médecingénéraliste et du spécialiste, puis le délai entre la consultation duspécialiste et la mise en route du traitement afin de permettre undiagnostic plus précoce et un accès plus équitable au traitementdu cancer. Cette décision politique permet d’espérer une amélio-ration de la survie avec, si les tendances de survie observéesjusqu’en 1995 restent similaires jusqu’en 2010, une réductiond’environ 24 000 décès à 5 ans avant l’âge de 75 ans [24]. Uneétude épidémiologique récemment publiée avait pour objectifd’analyser les tendances évolutives de la survie et les différencesde survie liées au niveau socio-économique pour les 20 cancersles plus fréquents en Angleterre et au Pays de Galles chez environ2,2 millions malades adultes diagnostiqués entre 1986 et 1999et suivis jusqu’en 2001 [25]. Un indicateur du niveau socio-éco-nomique (5 catégories allant de « favorisé » à « défavorisé »)était attribué à chaque malade en fonction de son lieu d’habita-tion (par niveau géographique correspondant au canton électo-ral) au moment du diagnostic. L’analyse de la survie relative à

5 ans, ajustée individuellement pour chaque niveau socio-écono-mique sur la mortalité attendue par sexe, groupe d’age etpériode de diagnostic et la comparaison des périodes 1986-90,1991-95 et 1996-99 a montré que la survie avait augmentéepour la plupart des cancers dans les deux sexes au cours de lapériode d’étude. L’évaluation de la survie relative et l’utilisationde tables de mortalité spécifiques par niveau socio-économiquepermettent une estimation non biaisée de la mortalité véritable-ment liée à la tumeur étudiée : les différences de survie observéessont effectivement liées à une différence de pronostic tumoral etnon à une différence du risque de mortalité de fond. Cette aug-mentation était cependant plus importante pour les malades lesplus favorisés avec une majoration de la différence de survieentre les malades favorisés et les malades défavorisés pour laplupart des cancers. Ces résultats suggèrent une aggravation desinégalités socio-économiques en terme de survie au cours desannées 1990 [25]. Ceci est particulièrement vrai pour les cancerscolorectaux avec une majoration significative de l’écart de survieentre les malades favorisés et défavorisés dans les 2 sexes. Aucours de toute la période d’étude, la survie était significativementmoins bonne pour les malades les plus défavorisés, de façon plusmarquée pour les femmes, avec une aggravation progressive desdisparités en raison d’une amélioration plus marquée pour lesmalades favorisés. Entre 1986-90 et 1996-99, la différence desurvie à 5 ans entre les malades les plus favorisés et les plus défa-vorisés est passée de 2,2 % à 5,7 % chez les hommes et de 3,3 %à 7,3 % chez les femmes. Les malades les plus défavorisés ontdonc un moins bon pronostic que les malades plus aisés et leursurvie s’est moins améliorée au cours des dernières années avecune majoration du « deprivation gap ».

France

En France, les données épidémiologiques concernant le pro-nostic des cancers en fonction du statut socio-économique sontrares. En effet, les informations concernant le statut socio-écono-mique des malades sont rarement ou incomplètement enregis-trées par les registres des tumeurs. De plus, contrairement àl’Angleterre, il n’est pas possible d’établir des index socio-écono-miques par zones géographiques.

Une étude du registre de Côte-d’Or portant sur 1 060 casdiagnostiqués entre 1976 et 1980 a évalué l’importance du sta-tut socio-économique sur le pronostic des cancers colorectaux[9]. L’indicateur utilisé dans cette étude pour juger du niveausocio-économique était le type de logement avec trois catégoriesdifférentes : « sans confort » correspondant aux malades dont lelogement ne comprenait ni toilettes ni salle de bains, « confortintermédiaire » : logement ayant des toilettes mais pas de sallede bains, « bon confort ou confortable » : logement avec toiletteset salle de bains. Les données socio-économiques étaient obte-nues à partir des informations du recensement de l’année 1975.En analyse univariée, la survie à un et surtout à cinq ans étaitfortement corrélée à la nature du logement. La survie à un anpassait de 44 % à 76 % entre les malades du groupe « sansconfort » et ceux du groupe « bon confort ». Les taux de survie àcinq ans étaient respectivement de 12 % et 39 % pour ces mêmesgroupes. L’âge de diagnostic, le lieu de résidence, le stade dediagnostic et la nature curative ou palliative du traitement étaientfortement corrélés au type de logement. En analyse multivariée,le type de logement était très significativement associé à la survieles malades du groupe « sans confort » ayant un risque relatif dedécès de 2,3 par rapport à ceux du groupe « bon confort ». Lefacteur pronostic essentiel restait le stade de diagnostic et la pos-sibilité d’une chirurgie à visée curative mais le statut socio-écono-mique était également associé de façon significative à la survie

Une étude récente du registre des tumeurs digestives duCalvados a analysé l’influence de l’environnement social (groupesocio-professionnel, lieu de résidence) sur la prise en charge et la

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E. Mitry, B. Rachet

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survie des cancers digestifs [12]. Selon l’hypothèse de Herbert etal., malgré l’apparente égalité de choix et de traitement entre lesmalades liée au système de soins français, il existe en fait desdisparités de prise en charge selon l’environnement social de lapersonne. Le choix du type de prise en charge (niveaux de spé-cialisation variables) et du lieu de prise en charge (privé oupublic) seraient en fait fortement dépendants du niveau social, duréseau social et des habitudes médicales. Les données de2 394 malades enregistrés entre 1978 et 1990 par le registredes tumeurs digestives du Calvados ont été analysées. Les indica-teurs sociodémographiques utilisés ont été 1) le lieu de rési-dence, codé en zone rurale, zone intermédiaire et zone urbaine,2) la profession, codée en quatre catégories issues de la classifi-cation de l’INSEE (classe A : cadres et chefs d’entreprise incluantles professions intellectuelles supérieures, les artisans et les com-merçants, classe B : employés ou ouvriers, classe C : agriculteurs,classe D : inactifs) et 3) le type de prise en charge (spécialisée,non spécialisée, privée non spécialisée, mixte). La professionétait inconnue pour un tiers des malades et l’analyse était strati-fiée sur le sexe et réalisée séparément pour les hommes et lesfemmes, la catégorie sans emploi ne correspondant pas auxmêmes catégories sociales dans les deux sexes. Les principauxrésultats de l’étude sont les suivants : le recours à un gastro-entérologue avant traitement d’un cancer digestif était influencépar la profession et le lieu de résidence, avec un moindre recoursau spécialiste chez les malades des deux sexes vivant en milieurural et chez les agricultrices. Une prise en charge thérapeutiqueen filière spécialisée était significativement moins fréquente encas de tumeur colorectale qu’en cas de tumeur gastrique, et encas d’habitat rural. Les hommes sans profession étaient deux foismoins traités dans les centres de soins spécialisés que les cadreset les chefs d’entreprise et les employés et ouvriers, et plus sou-vent pris en charge dans les structures de soins publiques. Pourles deux sexes, mais de façon plus marquée chez les femmes, lesagriculteurs étaient moins souvent traités dans les centres desoins spécialisés que les cadres et chefs d’entreprises ou lesemployés et ouvriers.

Les limites de ce type d’étude sont essentiellement liées auxindicateurs utilisés. Ici, la profession était méconnue pour envi-ron 1/3 des malades et le groupe des personnes sans profes-sion regroupe sans distinction des personnes de formations oude professions antérieures très différentes. Le lieu de résidencen’est pas une variable sociale très discriminante. L’utilisation deces indicateurs imparfaits est cependant rendue nécessaire parla difficulté d’obtenir des indicateurs plus fiables tel que, parexemple, le niveau d’imposition. L’utilisation d’indicateurs socio-économiques différents (revenu annuel moyen aux Etats-Unis,score de Carstairs au Royaume-Uni [26], …) rend par ailleursdifficile la comparaison des résultats d’un pays à l’autre.

Comment expliquer ces inégalités ?

Une différence d’exposition aux facteurs de risque (en parti-culier alimentaires), une inégalité d’accès aux soins ou auxmesures de prévention ou un vécu différent de la maladie liés àdifférents facteurs économiques, sociaux et culturels, qui peuventse conjuguer, sont les explications principales à la différence depronostic entre les différents groupes socio-économiques(figure 1) [13]. Certains ont également suggéré que des caracté-ristiques tumorales pourraient également jouer un rôle.

Exposition aux facteurs de risque

Une différence d’exposition aux facteurs de risque pourraitexpliquer une plus forte incidence chez les malades défavorisés.Cette majoration du risque n’explique cependant pas le moins

bon pronostic. Il n’y a en effet pas d’arguments épidémiologi-ques en faveur d’une différence des caractéristiques tumoralesentre groupes socio-économiques.

La sédentarité, l’obésité, les habitudes alimentaires ou encorele tabagisme et l’alcoolisme sont des facteurs de risque modifia-bles dont l’exposition varie avec le niveau socio-économique etle niveau d’études.

Des études ont montré une consommation plus élevée degraisses et viande et une moindre consommation de légumes etfruits parmi les malades des groupes socio-économiques défavo-risés [27]. Cette différence de régime s’expliquerait par unemoindre disponibilité des aliments frais et de qualité ainsi quepar un manque d’informations et de recommandations diététi-ques pour les malades des groupes défavorisés [28].

Le manque d’activité physique et un mode de vie sédentairesont également plus fréquents parmi les malades défavorisés[23].

Prise en charge diagnostique et thérapeutique

Le revenu, le niveau d’études et la couverture sociale vontinfluencer l’accès à une prévention et à une prise en charge dia-gnostique et thérapeutique adaptée.

PRÉVENTION, DÉPISTAGE, DIAGNOSTIC

Le stade tumoral au moment du diagnostic est le principalfacteur associé à la survie. Un moindre recours aux tests dedépistage et aux méthodes de diagnostic explique probablementle fait que les malades de groupes socio-économiques défavori-sés présentent plus fréquemment une tumeur à un stade évoluéau moment du diagnostic que ceux des groupes plus favorisés[29]. La proportion de cancers colorectaux diagnostiqués à unstade d’emblée métastatique était supérieure chez les maladesles plus défavorisés (24 % des cas chez les hommes, 22 % chezles femmes) par rapport aux malades les plus aisés (19 % chezles hommes, 18,5 % chez les femmes) [29].

Une analyse des données de l’essai de Nottingham a montréque les malades des niveaux socio-économiques défavorisésétaient les moins enclins à participer à une campagne de dépis-tage [30]. Des résultats comparables ont été observés dansl’étude évaluant un dépistage par recto-sigmoïdoscopie : leniveau socio-économique était fortement prédictif de l’intérêtporté au dépistage et à sa réalisation [31]. Ces disparités sontégalement observées dans les études de populations [32]. En casde prédisposition génétique au cancer colorectal (syndromeHNPCC, polypose adénomateuse familiale), la volonté de réali-ser un test de dépistage génétique serait indirectement lié auniveau socio-économique [33].

Facteurs culturels

Facteurs économiques

Facteurs sociaux

Prévention - Dépistage Diagnostic Traitement

Fig. 1 – Facteurs influençant les disparités socio-économiques (d’aprèsWard et al. [13]).Factors that influence socioeconomic disparities (based on Ward,et al. [13]).

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Cancer colorectal et inégalités socio-économiques

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En plus des facteurs socio-économiques et démographiques,les facteurs culturels jouent très probablement un rôle importantdans les possibilités d’accès au dépistage ou le souhait de réali-ser les examens de dépistage ou de diagnostic. Ceci a été claire-ment démontré pour le dépistage des cancers du col de l’utérus :à niveau socio-économique égal, la réalisation d’un frottis dedépistage était significativement moins fréquente chez les immi-grées latino-américaines que chez les non-immigrées [34]. Desdifférences culturelles portant sur les connaissances et croyancessur les cancers expliquaient, au moins en partie, la différence deréalisation des examens de dépistage. Dans le cas des cancerscolorectaux, la réalisation d’une endoscopie ou la recherched’un saignement occulte dans les selles seraient aussi liées àl’ethnie d’origine, le niveau d’études, la présence d’une couver-ture médicale et une émigration récente [29].

TRAITEMENT

Le statut socio-économique influencerait de façon majeure lemode, le lieu et le type d’admission des malades présentant uncancer colorectal. Dans une étude [35], les admissions enurgence étaient significativement plus fréquentes chez les mala-des les plus défavorisés (56 % vs 35 %, odds ratio = 2,29), leshospitalisations de jour significativement moins fréquentes (34 %vs 41 %, odds ratio = 0,66) ; les malades les plus défavorisésétaient significativement moins souvent hospitalisés dans des uni-tés spécialisées prenant en charge plus de 100 cancers colorec-taux par an (79 % vs 92 %, odds ratio = 0,38).

L’analyse de la survie spécifique par stade montre qu’il existeégalement des inégalités dans la prise en charge. En effet, unedifférence de survie entre deux groupes de malades ayant destumeurs de même stade suggère une différence de pronostic liéeau traitement. Une telle différence peut-être liée à : 1) une réelledifférence d’efficacité d’un même traitement liée à des facteurspropres au malade ou à la tumeur, 2) une différence dans laprise en charge thérapeutique, les malades défavorisés ne bénéfi-ciant pas d’un traitement optimal aussi souvent que les maladesaisés. Cette seconde hypothèse est certainement la plus probablepuisque plusieurs études ont montré que lorsque les malades desdifférents groupes bénéficiaient d’un même traitement, par exem-ple dans le cadre d’un essai thérapeutique, les taux de survieétaient comparables quel que soit le niveau socio-économique[36, 37]. Ces résultats sont primordiaux, puisqu’ils suggèrent queles différences de survie observées sont essentiellement liées à desdifférences de prise en charge et vont à l’encontre d’une diffé-rence d’efficacité des traitements liée à des facteurs individuels outumoraux. A prise en charge et traitement égaux, pronostic égal.

Aux Etats-Unis, l’accès à un traitement anticancéreux dehaute qualité varie en fonction de la race et du niveau socio-éco-nomique. C’est en particulier le cas pour les cancers colorectauxet notamment pour la réalisation d’un traitement adjuvant et lesmodalités de surveillance après chirurgie à visée curative [38].Dans une étude conduite par le Washington State Cancer Regis-try et ayant inclus environ 1 000 malades dont 93 % étaientblancs et 80 % habitaient dans une zone urbaine, une chimiothé-rapie adjuvante était prescrite plus de deux fois moins souventchez les malades aux revenus les plus bas et chez les maladescouverts par le système Medicare par rapport à ceux ayant uneassurance privée [11].

Le niveau d’études parait également important dans la com-préhension des objectifs thérapeutiques et pourrait être associé àl’adhésion au traitement.

FACTEURS TUMORAUX

Une des hypothèses évoquées pour expliquer le moins bonpronostic des tumeurs colorectales était l’existence plus fréquentede critères d’agressivité chez les malades défavorisés [39],

comme cela a été observé pour les tumeurs du sein ou du col uté-rin. Ceci n’a pas été confirmé dans deux études britanniques où nila présence de formes colloïdes muqueuses, de tumeurs peu diffé-renciées ou localisées au côlon droit [40] ni le pronostic aprèsexérèse [41] n’étaient différents selon le statut socio-économique.

FACTEURS CULTURELS

Comme évoqué précédemment, la perception du risque, lanotion de maladie et le souhait d’une prise en charge peuventégalement être influencés par les facteurs socio-culturels. A l’ins-tar de ce qui a été démontré dans le cadre de la prise en chargedu SIDA ou de la prévention des maladies cardio-vasculaires, levécu de la maladie, son acceptation par le malade ou son entou-rage ainsi que la compréhension de l’importance de la préven-tion pourraient également varier selon la communauté, l’originegéographique et ethnique des malades dans le cas des patholo-gies tumorales et du cancer colorectal en particulier. Cependant,plusieurs études suggèrent qu’aux Etats-Unis une « injusticesociale », favorisée par le racisme, limiterait l’accès aux soins debonne qualité des américains d’origine africaine ou indienne,même lorsque ces malades bénéficient de la même couverturesociale ou niveau socio-économique que les malades blancs[42]. Une tendance à l’injustice sociale a également été rappor-tée au Royaume-Uni : l’attitude du système de soin NHS (Natio-nal Heath System), bien qu’universel et gratuit, serait variable enfonction du statut socio-économique, en particulier en ce quiconcerne le dépistage et la prise en charge des cancers [43]. Demême, une étude a montré qu’après contrôle des inégalitéssocio-économiques, le pronostic du cancer du sein était meilleurau sein de la communauté indo-pakistanaise [44].

Conclusions

Les données épidémiologiques suggèrent que le niveausocio-économique est un facteur pronostique des cancers colo-rectaux et qu’il existe une inégalité de chance entre les maladesfavorisés et les malades défavorisés. Une comparaison directeentre les différents pays est difficile, mais les différences pronosti-ques paraissent particulièrement marquées aux Etats-Unis oùl’organisation du système de soin est différente avec l’absencede couverture sociale pour tous. Ces différences sont cependantretrouvées dans des pays avec système de soins unique et accèsuniversel aux soins (Canada, Royaume-Uni). Les donnéesanglaises et galloises montrent aussi que ces inégalités de survieont augmenté au cours des dernières années et que les maladesles plus pauvres n’ont que peu bénéficié des progrès diagnosti-ques et thérapeutiques.

Les mécanismes aboutissant aux disparités observées sontcomplexes et font intervenir des facteurs sociaux, économiques,culturels et politiques [45]. Ces facteurs sont corrélés et parfoissuperposés [13, 45]. La pauvreté est la principale cause des dis-parités en terme de santé car liée à l’absence d’information, deconnaissance et de ressources, aux conditions de vie et modes devie à risque. L’accès aux soins et leur qualité dépendent de troisfacteurs : les barrières structurelles, les facteurs qui peuventmodifier les recommandations médicales et la perception qu’a lemalade de sa maladie et son libre choix vis-à-vis du traitement.Les barrières structurelles sont liées à l’existence d’une couverturesociale, aux possibilités de prise en charge financière et d’accèsaux structures de soins. Les médecins peuvent être, sciemment ounon, influencés par l’ethnie, le statut socio-économique des mala-des et peuvent parfois prendre des décisions différentes dans dessituations comparables. Le vécu de la maladie, l’attitude vis-à-visdu personnel médical ou des traitements pourront être variablesen fonction du statut socio-économique et favorisés par une mau-

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vaise compréhension de la maladie et des options thérapeutiquesliée à une sous-information dans certains groupes.

Des actions peuvent être entreprises à différents niveaux pourespérer réduire les différences observées et des programmes depolitique de santé publique ayant pour objectifs de diminuer lesdisparités ont été mis en place dans différents pays.

Une prise en charge plus précoce favorisée par une meilleureinformation et une amélioration de l’accès aux filières de soinspermettrait probablement de réduire notablement les différencesd’origine socio-économique et d’améliorer le diagnostic desmalades. Un accès aux soins égal pour tous doit être un objectifprioritaire des pouvoirs publics.

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