Rapport Apteis DTELP Paris Sud Avril 2013

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  • ANALYSE PLURIDISCIPLINAIRE DU TRAVAIL, ETUDES ET INTERVENTIONS SOCIALES

    Expertise portant sur le

    projet de rorganisation des

    bureaux de poste dAlsia et de Denfert-Rochereau de la

    DTELP de Paris sud

    Expertise demande par le CHSCT de la Direction Territoriale de

    lEnseigne La Poste de Paris Sud selon les dispositions de larticle L. 4614-12 du Code du travail

    Rapport remis le 9 avril 2013

    Expertise ralise par :

    Valrie SARA

    Nicolas SPIRE

    Aptis est un organisme agr par le Ministre du Travail pour les expertises auprs des CHSCT

    Adresse : 56, rue du Faubourg Poissonnire 75010 Paris Tl. 01 82 09 89 64 Fax. 01 82 09 89 65 [email protected] www.apteis.fr

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    Avant-propos

    Ce rapport dexpertise a t transmis le 9 avril 2013 au Prsident et

    au Secrtaire des CHSCT de la DTELP de Paris Sud.

    Il sera prsent ultrieurement en sance lensemble des membres

    du CHSCT de la DTELP de Paris Sud.

    Il concerne lexpertise portant sur le projet de rorganisation des

    bureaux de poste dAlsia et de Denfert-Rochereau pour la

    ralisation de laquelle le cabinet Aptis a t dsign.

    Les intervenants dAptis remercient lensemble des personnels, le

    Prsident, le Secrtaire et les membres du CHSCT pour leur

    contribution la bonne ralisation de cette expertise.

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    Sommaire

    SOMMAIRE ............................................................................................................................................................ 3 INTRODUCTION ....................................................................................................................................................... 4

    La demande du CHSCT ................................................................................................................................... 4 La mthodologie ............................................................................................................................................ 5 Problmatique ............................................................................................................................................... 8

    CHAPITRE 1 LES BUREAUX DALESIA ET DE DENFERT-ROCHEREAU ........................................................................... 11 1.1. Le groupe La Poste ........................................................................................................................ 11 1.2. La modernisation au guichet ......................................................................................................... 16 1.3. Alsia et Denfert, deux bureaux proches, mais diffrents ............................................................. 19

    CHAPITRE 2 DES PROJETS DE REDIMENSIONNEMENT DES EFFECTIFS ......................................................................... 23 2.1. Morg@ne : un outil national de dcompte analytique des activits ............................................. 23 2.2. Modalits et mise en uvre de loutil ........................................................................................... 25 2.3. Dultimes ajustements sur le terrain ............................................................................................. 41

    CHAPITRE 3 DES CONSEQUENCES LOURDES SUR LE TRAVAIL .................................................................................... 47 3.1. Un outil qui masque le travail rel................................................................................................. 47 3.2. Des rorganisations successives qui crent un sous-effectif chronique au guichet ....................... 50 3.3. Le back-office comme variable dajustement ................................................................................ 56 3.4. Une pnibilit accrue de la relation client ..................................................................................... 60

    CHAPITRE 4 SYNTHESE ET RECOMMANDATIONS .................................................................................................... 70 4.1. Assurer au CHSCT un fonctionnement conforme ses prrogatives et ses missions ................. 70 4.2. Un outil peu fiable, des projets repenser .................................................................................... 73

    ANNEXES ............................................................................................................................................................. 77 1. Les rsolutions du CHSCT.................................................................................................................... 77 2. Tableau complet des observations ralises au guichet SF ................................................................ 81

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    Introduction

    La demande du CHSCT

    Le CHSCT de la Direction Territoriale de lEnseigne La Poste (DTELP) de Paris Sud a t consult le 17 dcembre 2012 sur deux projets importants modifiant les conditions de

    travail au sens de larticle L. 4612-8 du Code du travail. Il sagit des projets dits de rorganisation du terrain de Paris Denfert-Rochereau et du terrain de Paris Alsia . Sur

    ce dernier, un projet de Bureau Express Urbain est galement prsent.

    Ces projets de rorganisation comportent deux dimensions principales :

    - Lune concerne lajustement des effectifs sur chacun des deux terrains, ralis sur la base dun outil daide au dimensionnement des moyens baptis morg@ne V7.2 ;

    - Lautre concerne la rorganisation du temps de travail qui dcoule de ce nouveau dimensionnement : elle comprend, dune part, un ramnagement des horaires et des positions de travail attribues aux agents et, dautre part, des changements dhoraires douverture des bureaux.

    Le projet de Bureau Express Urbain ne concerne que le bureau dAlsia ; il y est en fait dj mis en uvre, mais ne fonctionne que partiellement en raison des dispositions relatives au plan Vigipirate.

    Dans la mesure notamment o ils touchent potentiellement les horaires du bureau, ces

    projets seraient susceptibles davoir des consquences sur lensemble des mtiers de lenseigne : la ligne financire, le Front Office Bureau (FOB), le Back-Office Bureau (BOB), lexcution comme lencadrement. Cependant, du point de vue de lorganisation du travail, seuls les mtiers du guichet sont directement concerns par le redimensionnement des

    effectifs induits par les projets.

    Or, cest prcisment ce redimensionnement qui a, pour le CHSCT, justifi le recours un expert agr. En effet, les reprsentants du personnel ont indiqu ne pas avoir eu accs aux

    bilans, analyses ou aux lments qui permettraient dexpliquer la diminution envisage des effectifs dans le cadre des projets de rorganisation (-2 Alsia et -1 Denfert-Rochereau).

    Lun des documents de rfrence utilis et cit plusieurs reprises dans le document Projet est le document morg@ne V7.2 qui nest, par exemple, pas joint au document de consultation. La rsolution vote en CHSCT le 17 dcembre 2012 prcise ainsi que les

    reprsentants du personnel nont pas eu une information suffisante sur la dclinaison du projet .

    Cependant, outre labsence dlments prcis et accessibles concernant lanalyse de la charge de travail actuelle et sa rpartition future effectif rduit, les reprsentants du personnel

    soulignent galement que les modifications inhrentes au projet Bureaux Express Urbain

    ne sont pas explicites : le document prsente uniquement la future configuration spatiale de

    lespace de services ainsi que le parcours client .

    Devant labsence de rponse complmentaire ou dclaircissements relatifs ces projets, les reprsentants du personnel au CHSCT ont donc dcid, conformment lart. L.4614-12 du

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    Code du travail de recourir un expert agr, afin comme le prcise la Rsolution du 17 dcembre de disposer dune tude complte sur les impacts et les enjeux de la rorganisation du bureau de poste de Paris Alsia et de Denfert-Rochereau. La mission

    dexpertise tait confie Aptis et se trouvait dfinie comme suit : Le cabinet dexpertise devra clairer les lus du CHSCT sur :

    Les conditions de prparation et de gestion de ce projet

    Les impacts possibles du projet sur : - Lorganisation du travail - Les conditions de travail et demploi des personnels - Lvolution de la charge de travail - Les risques pour la sant et la scurit - Les modalits daccompagnement du projet prvues .

    A la suite dune rencontre entre des reprsentants du personnel au CHSCT, des reprsentants de la Direction et le cabinet Aptis, il a t convenu de fusionner les deux

    demandes dexpertise, dans la mesure o les axes des projets de rorganisation taient communs aux deux terrains (couverts par le mme CHSCT et la mme Direction

    Territoriale) et o les deux projets suscitaient les mmes interrogations.

    La mthodologie

    La mthodologie mise en uvre dans le cadre de cette expertise est de la seule responsabilit de lexpert. Elle est dicte par les mthodes denqutes reconnues et valides en sociologie du travail1 et en ergonomie2.

    En outre, elle correspond aux principes de travail et dintervention prsents et dfendus par Aptis lors de linstruction de son agrment auprs du Ministre du travail.

    Aptis a mobilis une quipe pluridisciplinaire de deux intervenants : un psychologue du

    travail et un sociologue du travail.

    Aptis adapte sa mthodologie la nature et au contexte de chaque demande dexpertise qui lui est faite. Pour rpondre la demande du CHSCT de la DTELP de Paris Sud et

    compte tenu des lments ports sa connaissance, Aptis a mis en uvre la mthode suivante :

    1 Voir notamment : S. Beaud et F. Weber, Guide de lenqute de terrain, Paris, La Dcouverte, 1997 ; ou encore, C. Avril, M. Cartier et D. Serre, Enquter sur le travail, Paris, La Dcouverte, 2010. 2 Voir notamment : F. Gurin, A. Laville, F. Daniellou, J. Duraffourg, A. Kerguelen, Comprendre le travail pour le

    transformer : la pratique de lergonomie, Paris, Anact (coll. Outils et Mthodes),1997 ; ou encore P. Rabardel, N. Carlin, M. Chesnais, N. Lang, G. Le Joliff, M Pascal, Ergonomie, concepts et mthodes, Octars, Toulouse, 2002.

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    UNE ETUDE DOCUMENTAIRE

    Il sest agi de prendre connaissance ou danalyser les divers documents internes ltablissement et susceptibles dclairer les intervenants sur les situations de travail vises par lexpertise :

    Les organigrammes des deux bureaux dAlsia et de Denfert-Rochereau ;

    Les donnes relatives lge et lanciennet des agents concerns par lexpertise (malgr notre demande, seules des donnes moyennes peu exploitables nous ont t communiques) ;

    Les divers documents relatifs aux deux projets : - Dossiers de prsentation au CHSCT ; - Documents de prsentation de la mthode de dimensionnement (V7, octobre 2010

    et et V8, ) ;

    - Relev des oprations postales (ROP) : Prsentation (version du 10/10/2012) ; - ROP ayant servi au dimensionnement (annes 2011 et 2012 pour les deux bureaux

    dAlsia et de Denfert-Rochereau ainsi que le ROP gnral pour 2013) ; - Documents dtaills relatifs au dimensionnement en positions de travail (FOB, BOB

    et Encadrement) des bureaux dAlsia et de Denfert-Rochereau ; - Documents de synthse relatifs au dimensionnement des deux bureaux ; - Documents prsentant la classification des deux bureaux dans leur famille

    respective ;

    - Diagnostic RH des deux bureaux ; - Document prsentant le cadrage ultime du dimensionnement des deux bureaux ;

    Les PV de CHSCT ayant trait des deux projets de rorganisation (12/10/2012, 13/11/2012 et 17/12/2012) ;

    Les bilans des exprimentations ventuelles concernant le projet Bureaux Express Urbains (aucun document de ce type na pu nous tre fourni) ;

    Les documents relatifs lorganisation des services et en particulier la relation clientle ;

    Les fiches de poste des diffrentes positions de travail ;

    Lvolution des effectifs des deux bureaux sur les 5 dernires annes ;

    Laccord RTT et les documents prsentant les modalits dorganisation du temps de travail (plannings rcents des deux bureaux) ;

    Le Document unique dvaluation des risques professionnels (et les ventuels documents de travail qui ont permis son laboration) ;

    Les Bilans hygine et scurit (2011 et 2012) et les Plans de prvention (2011 et 2012) ;

    Les rapports annuels du mdecin du travail (2011 et 2012) ;

    La fiche dentreprise rdige par le mdecin du travail ;

    Le rglement intrieur de La Poste ;

    Il nous parat important de faire remarquer ici les difficults que nous avons eues obtenir

    certains des documents lists ci-dessus. En effet, les documents qui nous ont dabord t communiqus au titre de la prsentation du projet taient ceux prsents au CHSCT lors de

    sa consultation ; or ceux-ci se sont rvls trs lacunaires : ils ne permettaient en aucune

    faon de prendre la mesure des motifs de la rorganisation ni surtout dexpliquer ou de comprendre le redimensionnement des effectifs quelle induit. Malgr deux entretiens raliss avec la direction des projets et des demandes de complments dinformation trs claires, nous navons pu obtenir les documents complmentaires que plusieurs semaines

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    aprs le dbut de nos travaux, et en tout tat de cause aprs le droulement de nos

    entretiens et observations sur le terrain.

    Ce sont ces documents complmentaires qui nous ont finalement permis de procder

    lanalyse du projet ; mais ce dcalage nous a nanmoins empchs de croiser les donnes retenues pour le dimensionnement du projet avec celles recueillies sur le terrain.

    UNE SERIE DENTRETIENS INDIVIDUELS OU COLLECTIFS

    Sur le terrain, nous avons men deux types dentretiens semi-directifs : - Des entretiens individuels (dune dure denviron 1h30) auprs de salaris occupant

    des postes de responsabilit ou dinterlocuteurs susceptibles dclairer les intervenants dAptis sur la situation des tablissements en matire de risques professionnels et de conditions de travail. Le mme type dentretien individuel a galement t men, titre exploratoire, avec les salaris des diffrents mtiers sur les deux sites afin de permettre

    aux intervenants dAptis de prendre la mesure des spcificits et contraintes de chacun deux en rapport avec le projet de rorganisation.

    - Des entretiens collectifs auprs des guichetiers dans la mesure o il sagissait de salaris exerant des fonctions ou des mtiers similaires : cette mthode a permis notamment de

    mettre en vidence lexistence ou labsence de pratiques partages et de profiter des effets de la dynamique de groupe dans le recueil dinformations sur les conditions concrtes de ralisation du travail. Ces entretiens ont rassembl trois quatre salaris, sur la base du

    volontariat et sans lien hirarchique entre eux ; ils ont t anims par les deux intervenants

    et ont dur 2 3 heures environ.

    Deux entretiens collectifs dune dure de 3 heures ont enfin t raliss avec la dlgation du personnel au CHSCT.

    Entretiens concernant des interlocuteurs spcifiques :

    Le Prsident du CHSCT (avec la Directrice des Ressources Humaines) ;

    La Directrice des projets Paris-Sud et une organisatrice de la DAS (2 entretiens) ;

    Le Directeur des ventes du secteur ;

    Le Mdecin du travail (entretien tlphonique) ;

    Les reprsentants du personnel au CHSCT (2 entretiens collectifs).

    Entretiens sur le terrain de Denfert-Rochereau :

    Le Directeur dtablissement (DET) ;

    Le DET adjoint (entretien ralis sur un autre site parisien o lagent a t mut) ;

    Lancien Chef dquipe (agent mut sur un autre site) ;

    Un Guichetier animateur (entretien exploratoire) ;

    La Gestionnaire clientle pro (entretien exploratoire) ;

    Un Caissier-comptable (entretien exploratoire) ;

    Un Gestionnaire clientle SF (entretien exploratoire) ;

    Un Conseiller bancaire (entretien exploratoire) ;

    4 Guichetiers (entretien collectif).

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    Entretiens sur le terrain dAlsia

    Le DET adjoint ;

    La Gestionnaire clientle pro (entretien exploratoire) ;

    Un Caissier-comptable (entretien exploratoire) ;

    Un Conseiller bancaire (entretien exploratoire) ;

    3 Guichetiers (entretien collectif).

    Au total, ont ainsi t raliss 17 entretiens individuels et 4 entretiens collectifs.

    DES OBSERVATIONS DE LACTIVITE DE TRAVAIL

    Les observations de situations de travail nous ont permis de valider (ou dinvalider) et de complter les donnes recueillies durant les entretiens. Elles ont aussi t loccasion daffiner lanalyse de situations de travail particulires.

    Pour mener bien notre analyse, nous avons ainsi ralis 4 journes dobservations. Ces squences ont eu lieu par demi-journes et ont t ralises sur les deux bureaux dAlsia et de Denfert-Rochereau.

    Remarque : les citations retranscrites dans ce rapport sont extraites des entretiens lists ci-dessus, mais

    galement des changes que nous avons eus lors de nos observations de situations de travail. Pour des

    raisons de confidentialit, les citations seront toutes formules au masculin.

    Lors de la retranscription de citations, nous utiliserons dans ce rapport la terminologie suivante :

    Agents pour les citations concernant les guichetiers, les caissiers-comptables, les gestionnaires de clientle

    (Pro et SF) ou les conseillers bancaires ;

    Encadrement pour les citations concernant les DET ou leurs adjoints ;

    Direction pour les citations concernant les membres de la direction de la DETLP de Paris Sud (directeur,

    DRH, directrice des projets ou directeur des ventes).

    Problmatique

    Les projets de rorganisation qui concernent ici les bureaux dAlsia et de Denfert-Rochereau prennent en fait place dans une logique de redimensionnement dploye en

    continu sur lensemble des bureaux de lEnseigne : chaque bureau de poste voit ainsi son organisation rexamine tous les 18 mois environ. Grce un outil daide au dimensionnement propre lEnseigne (loutil morg@ne, sur lequel nous reviendrons), chaque rorganisation se conoit comme une occasion pour ajuster leffectif aux besoins de lactivit sur le terrain.

    Deux raisons sont avances pour justifier un tel rythme : dune part, les progrs rguliers de lautomatisation des oprations et, dautre part, le souci constant damliorer les services proposs aux clients dans les bureaux. Au fil des annes, deux grandes tendances semblent

    ainsi se dessiner :

    le niveau des effectifs des agents prsents au guichet est en rgulire diminution ;

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    le mtier de guichetier sest peu peu transform, passant dune position de travail assise, poste derrire un guichet et polyvalente une position de travail en lot o le

    guichetier, debout, va au-devant du client et laccompagne dans ses diffrentes oprations.

    Cette logique de rorganisation se double sur le bureau dAlsia dun projet de mise en place dun nouvel espace dnomm Bureau Express Urbain : outre les habituels automates destins laffranchissement, au retrait despce ou au dpt de chques, cet espace permet de dposer et de retirer des colis aux heures de fermeture du bureau ; il constitue un sas

    positionn avant lentre effective du bureau et est ouvert au public de 6h minuit. Cependant, nous avons dabord pu constater que cet espace tait en fait dj en service1 au moment de notre intervention ce qui, formellement, revient ignorer le principe de consultation du CHSCT. En outre, aucun document relatif aux activits de ce dispositif na pu nous tre transmis, ni dlments de type prvisionnels (ayant ventuellement justifi sa mise en place) ni dlments relevant dventuels retours dexprience. Ce nouveau dispositif ne fait donc pas lobjet dune analyse spare dans le prsent rapport : son dploiement a nanmoins autant que possible ( raison des lments dont nous disposions)

    t pris en compte dans lanalyse des deux projets de rorganisation.

    Les deux rorganisations pour lesquelles le CHSCT de la DTELP de Paris-Sud est ici

    consult concernent deux bureaux parisiens, celui dAlsia et de Denfert-Rochereau ; pour le premier il est prvu une rduction de deux ETP (quivalent temps plein) sur 13 existants,

    soit une rduction de 15% ; pour le second, une rduction dun ETP sur 18, soit un peu plus de 5% de leffectif existant. Ces deux ajustements dcoulent dabord dune application de donnes tires de loutil daide au dimensionnement ; celui-ci a connu ce jour 9 versions : cest la septime (V7) qui a t utilise dans le cadre du bureau de Denfert-Rochereau, la huitime (V8) dans le cas du bureau dAlsia. Selon le principe dun dcompte analytique des activits ralises (en fonction dun temps de ralisation de rfrence), loutil procde dabord quantification (en minutes) du temps de travail ncessaire avant de lui faire correspondre un nombre dagents ncessaires cette ralisation. Loutil est nanmoins prsent comme un simple outil daide dans la mesure o les arbitrages ultimes sont raliss en concertation avec le directeur de lEtablissement concern ; cependant, du moins en ce qui concerne les dimensionnements des deux bureaux ici abords, le

    dimensionnement propos par loutil sest avr dterminant (il prconisait -2,06 ETP sur Alsia et -1,49 ETP sur Denfert-Rochereau).

    Lanalyse des modes de calcul et de dimensionnement de cet outil occupera donc une place centrale dans notre analyse ; non seulement dans ses dimensions gnrales et

    principielles, mais galement dans son application singulire sur les deux terrains concerns.

    En effet, il sagira ici dabord dvaluer la pertinence des hypothses et des logiques mises en uvre par loutil, mais galement et surtout de rapprocher ses attendus ou ses rsultats de lanalyse du travail rel qua permis notre intervention. Ce nest qu partir de ces analyses quil sera possible dvaluer les effets que seraient susceptibles dengendrer ces projets sur les contions de travail des guichetiers et, plus gnralement, sur lensemble des personnels des bureaux concerns.

    1 Le service de dpt de colis se trouvait nanmoins en partie suspendu en raison des contraintes du plan

    Vigipirate .

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    Aprs une prsentation gnrale de lentreprise, des mtiers du guichet et des deux bureaux concerns par les rorganisations (Chapitre 1), notre analyse portera en premier lieu sur

    loutil daide au dimensionnement et sur les rsultats de son application sur les terrains dAlsia et de Denfert-Rochereau (Chapitre 2). Notre expos se proposera ensuite dinterroger, la lumire des donnes recueillies les consquences des rorganisations projetes sur le travail rel (Chapitre 3). Aprs quelques remarques relatives au rle et aux

    prrogatives du CHSCT (Chapitre 4), notre propos sachvera sur une srie de recommandations (Chapitre 5).

  • CHSCT DTELP de Paris Sud Projet de rorganisation des bureaux dAlsia et de Denfert-Rochereau Aptis 09/04/13 11

    Chapitre 1 Les bureaux dAlsia

    et de Denfert-Rochereau

    1.1. Le groupe La Poste

    1.1.1. UNE ENTREPRISE CONFRONTEE A DE PROFONDES MUTATIONS

    Du changement de statut

    Cest partir de 19871 que sest engag en France un mouvement de drglementation des services postaux : sous limpulsion de politiques et de logiques prconises au niveau de lUnion Europenne, leur ambition principale tait dimposer puis de dvelopper louverture la concurrence du secteur.

    La loi du 2 juillet 19902 entrine la sparation de France Tlcom et La Poste en deux

    entits distinctes. La Poste acquiert alors en janvier 1991 une personnalit juridique et une

    autonomie financire ; elle passe du statut dadministration dtat celui dEtablissement Public caractre Industriel et Commercial (EPIC). Ce statut dentreprise publique ne permet cependant ni de cder des parts de son capital, ni de laugmenter. Les deux dcennies suivantes sont marques par des tapes successives poursuivant la libralisation

    progressive des services postaux3 au sein des diffrents pays de lUnion Europenne.

    Plus rcemment, le 1er mars 2010, La Poste est transforme en Socit Anonyme capitaux

    publics ; ce statut permettant louverture du capital de lentreprise. Dans ce cadre, la majorit des parts continuent dappartenir ltat afin, notamment, de respecter le prambule de la Constitution du 27 octobre 1946 qui stipule que tout bien, toute entreprise,

    dont lexploitation a, ou acquiert, les caractres dun service public national ou dun monopole de fait, doit devenir la proprit de la collectivit 4.

    Ce changement de statut se traduit par un apport en fonds propres de 2,7 milliards deuros, dont 1,5 milliard provenant de la Caisse des Dpts et 1,2 milliard de ltat, ce dernier restant lactionnaire majoritaire dune entreprise devenue un Groupe. Ds lors, on assiste ltablissement dune complmentarit financire au sein du Goupe.

    La dernire tape de ce processus est intervenue le 1er janvier 2011 puisque depuis cette

    date, les activits de courrier sont leur tour totalement ouvertes la concurrence. Cette

    1 Date des premiers dcrets introduisant la concurrence dans certains domaines des tlcommunications

    (dcrets pris sous lintitul des Chantiers de la libert par le ministre de lpoque, Grard Longuet, Ministre dlgu charg des postes et tlcommunications du gouvernement Chirac). Cette mme anne, une premire

    tentative de sparation des deux entits (La Poste et les Tlcoms) nest pas mene son terme. 2 Sous le ministre de Paul Quils, ministre des PTT du gouvernement Rocard. 3 A ce sujet, voir notamment : La mort lente dune entreprise nationale , Le Monde diplomatique, 2002 ; De la Burgade E., Roblain O. (2005), Bouger avec la Poste. Les coulisses dune modernisation, dition La Dispute. 4 La Constitution du 4 octobre 1958 renvoie, elle aussi dans son prambule, celui de la Constitution de 1946.

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    dcision marque la fin du monopole de lentreprise sur la distribution des plis de correspondance1.

    lvolution des activits de La Poste

    Ces diffrentes volutions, la fois du statut de La Poste, mais galement du contexte

    conomique dans lequel sinscrivent dornavant les services postaux, ont entran de profondes mutations au sein lentreprise.

    En effet, La Poste a connu une diversification de ses activits, notamment avec le

    dveloppement de la commercialisation de biens et de services et celui de lactivit bancaire (La Banque Postale est cre en 2006).

    Les diffrentes activits du groupe La Poste

    Dans le mme temps et comme dans dautres anciens services publics, la notion de client finit par tre impose au dtriment de celle dusager , non seulement dans lensemble des documents et discours de lentreprise, mais aussi dans les tablissements. Cette volution, nous y reviendrons dans ce rapport2, est loin dtre anodine, car elle signifie pour les personnels un changement dans la nature de leur travail. Ainsi, ce sont dsormais deux

    logiques qui cohabitent au sein de lentreprise : le prescrit public renvoyant la notion de service public et lintrt de lusager et le prescrit priv renvoyant aux notions de rentabilit et de performance de lentreprise.

    La confrontation des agents ces logiques qui savrent le plus souvent contradictoires est frquente dans la ralisation de leur travail quotidien. Sur cet aspect, les travaux mens

    par la sociologue Fabienne Hanique voquent ainsi des salaris confronts des exigences

    dont ils ne peroivent pas toujours le sens 3.

    En parallle, lentreprise connat des transformations organisationnelles de grande ampleur qui se traduisent notamment par une redfinition des modes dencadrement des personnels, le dveloppement des tches commerciales ou par la restructuration du maillage des

    bureaux de poste. Le rythme de ces rorganisations est intense et implique, pour les salaris,

    des changements frquents de poste, de site et dorganisation du travail.

    Enfin, lentreprise est marque par une reconfiguration de la taille et de la typologie de ses effectifs. Ainsi, alors que La Poste comptait environ 280 000 salaris en 2004, leur nombre est

    1 Jusqualors, louverture la concurrence des activits de courrier ne concernait que les plis suprieurs 50 grammes. 2 Voir ci-dessous notre Chapitre 4. 3 Hanique F. (2004), Le sens du travail, Chronique de la modernisation au guichet, ditions Ers, p.17.

    Groupe

    La Poste

    Courrier Colis-ExpressLa Banque

    postaleL'enseigne La

    PosteLa Poste Mobile

  • CHSCT DTELP de Paris Sud Projet de rorganisation des bureaux dAlsia et de Denfert-Rochereau Aptis 09/04/13 13

    pass 261 236 en 2009 et 246 057 en 20111 (soit une baisse de 12% des effectifs entre

    2004 et 2011). Cette baisse se poursuit et devrait continuer jusquen 2015. Elle ne saccompagne pas pour autant de plans sociaux puisque la direction gre cette diminution en choisissant de ne remplacer quun postier sur trois ou quatre partis la retraite.

    Cette volution saccompagne mcaniquement dune diminution progressive de la proportion des fonctionnaires par rapport aux salaris dits contractuels . Tandis que les

    fonctionnaires de La Poste reprsentaient plus des deux tiers des effectifs en 2004 (67,7%), ils

    ne reprsentent aujourdhui plus que la moiti des effectifs (51,9% daprs le Bilan Social 2011). Cette tendance illustre la recherche dune flexibilit plus forte au sein de lentreprise, particulirement lorsque les contractuels occupent des emplois prcaires. A ce sujet, le Bilan Social 2011 de lentreprise montre une augmentation du recours aux CDD et aux intrimaires comparativement aux annes prcdentes :

    Annes 2009 2010 2011

    Recours des CDD 11290 13700 15770

    Recours des intrimaires 2917 3094 3230

    Lensemble de ces lments place les personnels de La Poste dans un contexte particulier du point de vue de leur exposition des risques psychosociaux.

    1.1.2. CONTEXTE DE LENTREPRISE ET RISQUES PSYCHOSOCIAUX

    Pour aborder cette problmatique, nous retiendrons la dfinition des risques psychosociaux

    propose par le Collge dexpertise sur le suivi des risques psychosociaux au travail prsid par Michel Gollac. Les travaux mens par ce Collge sont prsents dans le rapport Mesurer

    les facteurs psychosociaux de risque au travail pour les maitriser datant de novembre 2007 et

    faisant suite une demande manant du Ministre du travail, de lemploi et de la sant2.

    Le rapport du Collge dexpertise prcise que ce qui fait quun risque pour la sant au travail est psychosocial, ce nest pas sa manifestation, mais son origine : les risques psychosociaux seront dfinis comme les risques pour la sant mentale, physique et sociale, engendrs

    par les conditions demploi et les facteurs organisationnels et relationnels susceptibles dinteragir avec le fonctionnement mental . Les suicides de salaris, dont on suppose quils ont un lien avec le travail, sont une consquence dramatique et extrme dune exposition accrue aux risques psychosociaux. La prsomption, surtout lorsquelle est le fait des collgues de travail, est une raison suffisante pour vouloir instruire la relation entre

    lacte de celui qui met fin sa vie et les dterminants de ses conditions de travail.

    Philippe Davezies3 considre ainsi que quoi que lon puisse penser des motifs du suicide, ds lors que certains salaris soutiennent quil est li au travail, cela constitue en soi un signal dalerte. Cela montre quils considrent que le travail au sein de lentreprise comporte des motifs de

    1 Effectif au 31/12/2011, donnes extraites du Bilan social 2011 de La Poste. 2 Rapport consultable sur le site du Ministre :

    http://www.travailler-mieux.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_SRPST_definitif_rectifie_11_05_10.pdf 3 Enseignant-chercheur en mdecine et sant au travail lUniversit de Lyon I.

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    souffrance tels quils pourraient, dans certaines circonstances, pousser au dsespoir. La question se dplace alors vers la souffrance de ceux qui restent. 1.

    La srie de suicides survenus depuis trois ans La Poste a entran lmergence dun dbat qui a largement dpass les frontires du groupe pour occuper le champ mdiatique.

    Plusieurs suicides de postiers ont ainsi t rendus publics sur les trois dernires annes,

    dont le premier sest produit le 27 juillet 2010 Marseille. Dernirement, deux autres suicides ont t recenss : celui dun cadre parisien en charge des publications internes (le 25 fvrier 2013) et celui dune factrice travaillant Monistrol-sur-Loire (le 15 fvrier 2013). Un certain nombre dentre eux ont donn lieu des procdures judiciaires et, pour lune dentre elles, le Tribunal des affaires de la Scurit Sociale a confirm le lien de causalit entre le suicide et les conditions de travail de lagent qui avait mis fin ses jours.

    Dans une lettre au Prsident de La Poste, rendue publique le 20 mai 2010, le Docteur

    Kaufmant2 attirait lattention sur des suicides ou des tentatives de suicide, dont on peut penser quils sont exclusivement lis des situations de vie professionnelle, [qui] surviennent dans toutes les rgions, dans tous les mtiers et aux diffrents niveaux de lentreprise . Suite cette lettre, le Dr Kaufmant et lun de ses collgues, mdecin de prvention La Poste, ont t auditionns le 30 juin 2010 dans le cadre de la mission dinformation sur le mal-tre au travail conduite par le Snat.

    Sur ces questions, la similitude de certaines caractristiques de La Poste et de France-Tlcom

    est notable. La majorit de leurs salaris ont une histoire commune dans laquelle ils ont

    construit une culture professionnelle profondment bouleverse par les mutations qui

    soprent (ou se sont opres) dans chacun des deux groupes. Dans les deux cas, des rorganisations successives se mettent en place dans un contexte de rduction consquente

    deffectifs avec en raison du statut spcifique dont bnficient les salaris un recours des mobilits forces.

    Les reclassements venaient en tte de la liste des faits significatifs lorigine de la dgradation de la vie au travail dnonce par le Dr Kaufmant dans son courrier Jean-Paul

    Bailly. Instruite des consquences que les mobilits subies ont pu avoir France-Telecom en

    matire dexposition aux risques psychosociaux3, la direction de La Poste a, suite la survenue du suicide dun cadre le 11 mars 2012 en Bretagne, pris immdiatement deux dispositions.

    Elle a dabord, ds le 19 mars 2012, mis en place une commission du Grand Dialogue Social de La Poste , dont elle a confi la prsidence Jean Kaspar4. Avec lappui des membres de cette Commission, au sein de laquelle les organisations syndicales taient reprsentes, Jean

    Kaspar avait pour mission danalyser la situation de lentreprise et de ses salaris en matire

    1 Citation tire de larticle Suicides, de mauvaises rponses une vraie question , Revue Sant & Travail, n60, octobre 2007, p. 29-31. 2 Du syndicat professionnel des mdecins de prvention de La Poste. 3 Cette relation est confirme par de nombreux travaux notamment ceux de Danile Linhart, Dominique

    Lhuilier et Jean-Luc Metzger. 4 Ancien secrtaire gnral de la CFDT.

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    de vie au travail. Pour mener bien cette analyse, un examen complet de la vie au travail [] avec les syndicats et les postiers , tait prvu dans chaque tablissement de La Poste .1

    La direction a, dans le mme temps, pris dix mesures effet immdiat vis--vis des postiers :

    Un budget exceptionnel de 20 millions deuros est consacr aux mesures damlioration de la vie au travail prises lissue du dialogue local.

    1000 recrutements supplmentaires sont raliss en 2012.

    Un cadre en charge des Ressources Humaines est affect dans tout tablissement de plus de

    100 personnes afin que chacun puisse avoir accs un responsable RH de proximit identifi

    et form.

    Aucune mobilit au-del de 30 km nintervient si elle nest pas souhaite. Un dlai dau moins deux ans est respect entre deux rorganisations pour mieux prendre en

    compte les enjeux de chacun.

    Aucune nouvelle rorganisation nest mise en uvre jusqu ce que le protocole de conduite du changement que La Poste souhaite partager avec les syndicats soit finalis ; les adaptations

    qui recueillent ladhsion des postiers sont naturellement menes leur terme. En cas de mobilit suite une rorganisation, la rmunration fixe et le dispositif de

    rmunration variable sont garantis.

    Tout appel candidatures sur son propre poste est proscrit.

    Tout(e) postier(e) qui sestime en situation de difficult ou de fragilit bnficie dun suivi spcifique prsent priodiquement aux syndicats.

    Tout(e) postier(e) en absence longue pour maladie bnficie dun suivi managrial continu et personnalis notamment pour accompagner son retour au travail.

    Parmi ces mesures, cinq concernent prcisment les rorganisations. Parmi elles, lune prvoit de rduire le rythme de ces projets en les espaant au moins de deux annes et une

    autre de limiter 30 km les mobilits subies. Rpondant six organisations syndicales qui

    rclamaient une pause dans les rorganisations jusquau mois de septembre, Jean-Paul Bailly sy est refus, mais a voqu de possibles ajustements et soulign que certains projets pourraient adopter un calendrier plus dtendu .

    Concernant la mesure prcisant que tout collaborateur qui sestime en situation de difficult ou de fragilit fait lobjet dun suivi spcifique prsent priodiquement aux syndicats , remarquons quune telle disposition rvle lapproche individualisante qui prvaut dans lentreprise en matire de risques psychosociaux. Une approche qui met en avant une logique rparatrice

    en contrevenant aux principes gnraux de prvention du Code du travail qui prcise quil convient dviter les risques ou, dfaut, de les combattre la source 2.

    Le Plan de Scurit au Travail 2010-2013 de La Poste dveloppe en matire de prvention des

    risques psychosociaux trois orientations. La premire dentre elles est nouveau laccompagnement des personnes victimes de harclement et de violence ; les deux autres sont la responsabilisation des managers et la mise en place de dispositifs ayant vocation

    identifier et valuer stress, harclement et violence pour construire des actions de

    prvention.

    1 http://www.laposte.fr/legroupe/Espace-Presse/Communiques-dossiers-de-presse/Groupe/Qualite-de-vie-au-

    travail-Jean-Kaspar-nomme-President-de-la-Commission-du-grand-Dialogue-de-La-Poste 2 Art. L4612-1 -5 du Code du Travail.

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    Le travail men par la commission du Grand Dialogue de La Poste sest dploy sur le terrain au cours de lt 2012. Le dispositif mis en place tait destin faire remonter des synthses dateliers ouverts aux agents qui devaient rpondre une srie de questions structures autour de six thmes : le contenu du travail, les conditions de travail, la sant au

    travail et la prvention, lvolution professionnelle, la gestion du changement et, pour finir, les relations avec les collgues et la hirarchie.

    Le rapport de cette Commission, publi en septembre 2012, rend compte de la ralit

    effective du malaise gnral qui rgne La Poste. Il identifie par ailleurs 8 chantiers sur

    lesquels il invite la direction de La Poste agir :

    - Le dialogue social et la rgulation sociale ; - Le management ; - Les organisations de travail et la scurit au travail ; - Le modle social ; - Le reclassement ; - La fonction RH ; - La gestion prvisionnelle des emplois et des comptences.

    A la suite de la publication de ce rapport, la direction de La Poste a annonc, dans un

    communiqu, un allgement de la pression sur les effectifs et la mise en uvre de l'ensemble des prconisations du rapport Kaspar . Elle prvoit de recruter quinze-mille personnes sur la

    priode 2012-2014, au lieu des dix-mille initialement prvus , soit 5 000 emplois

    supplmentaires.

    Pour autant, malgr la volont affiche de la direction de mener des actions afin de rsoudre

    les difficults dnonces dans le rapport Kaspar, les rcents suicides laissent prsager de la

    permanence de situations de mal-tre et de souffrance chez les salaris de La Poste. Dans ce

    contexte, on peut craindre labsence de mise en uvre de transformations majeures susceptibles dinterroger vritablement et en profondeur les facteurs organisationnels pouvant tre lorigine de la dgradation de la sant au travail des salaris.

    De nouvelles prrogatives pour les CHSCT

    Dans ce mme contexte, il est important de noter que depuis 20111, les Comits dhygine, de scurit et des conditions de travail de La Poste sont dots de nouvelles prrogatives,

    dont celle du recours lexpertise. Cette volution correspond lalignement de lentreprise sur le rgime de droit commun.

    1.2. La modernisation au guichet

    1.2.1. DE LUSAGER AU CLIENT

    Nous lavons vu, derrire les mutations conomiques, lune des volutions les plus marquantes de ces dernires annes pour les agents des bureaux a consist voir

    progressivement ( partir des annes 1990) la notion de client supplanter celle dusager. La satisfaction du client est ainsi devenue un enjeu majeur.

    1 Dcret du 31 mai 2011, relatif la sant et la scurit au travail La Poste.

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    Les plans dinformatisation, de rnovation des bureaux se succdent et visent faciliter la communication et la convivialit avec la clientle. Les bureaux de poste, organiss en

    guichets linaires, file dattente unique et vitres anti-franchissement qui spare le client de lagent sont reconfigurs. Les vitres sont dans un premier temps supprimes, mais le principe de la file unique demeure. De nouveaux projets damnagements des bureaux voient le jour en 19921. Les bureaux se dotent dun point daccueil et dinformation qui oriente les clients vers trois espaces spcifiques : les automates, les guichets, ou les boxes des conseillers

    financiers. Ds 1994, limplantation des automates MONA (monnayeur) et LISA (libre-service affranchissement) se gnralise.

    A partir de 1996, des normes daccueil sont dfinies et donneront lieu linstauration de nouvelles prescriptions pour les guichetiers parmi lesquelles on peut retenir le BRASMA

    (Bonjour, Regard, Attention, Sourire, Merci, Au revoir), et la mise en place des

    accompagnements la vente2. La mise en place dindicateurs de performance et de suivi de la qualit de laccueil se dveloppe adosse une recherche de dveloppement de la performance commerciale. Le plan stratgique 1998-2002 affirme quil faut mettre le client au cur de nos organisations et proccupations, parce que cest lui qui nous fait vivre . En 2001, une procdure de formation laccueil en situation de travail est dfinie pour les guichetiers.

    Les annes 2005-2007 avec le bureau de poste du futur 3 sont marques par :

    - la diversification du service avec la mise en place dune boutique pour la vente des produits postaux Courrier-Colis ainsi que dautres produits : cartes tlphoniques, chques cadeaux) ;

    - la spcialisation des guichets ; - la personnalisation du service et laccueil lentre du bureau qui a pour mission

    dorienter le client vers le service adapt son besoin 4.

    Le programme de modernisation et damlioration de la qualit de service des bureaux de poste lanc en 2008 dans le cadre du plan stratgique Cap Relations Clients 2012 sinscrit dans cette continuit.

    Ce programme sest traduit notamment par : - la reconfiguration spatiale progressive des bureaux de poste en Espace Service Client

    (ESC) dans le but de supprimer la file dattente unique et de la remplacer par un service personnalis en proposant aux clients un ensemble de solutions et de services pour

    satisfaire rapidement leurs attentes et leurs besoins ;

    - Llargissement des horaires douverture des bureaux jusqu 20h les soirs de semaine et jusqu 13h le samedi jusqu 17h le samedi dans certains bureaux titre dexprimentation partir de 2009 ;

    - Lengagement de la poste dans une dmarche de certification de la qualit de service de ses bureaux.

    1 Pour un dveloppement plus complet de ces grandes volutions et des projets voqus ici : Cf. De la Burgade

    E., Roblain O. (2005), Bouger avec la Poste. Les coulisses dune modernisation, dition La Dispute. 2 Nous reviendrons sur ces modalits de prescriptions des comportements au chapitre 4. 3 Extrait du communiqu du groupe La Poste du 16 nov. 2009, intitul : Paris modernis en un temps record ;

    Un temps dattente rduit de moiti dans 1 000 bureaux franais : La Poste tient ses engagements ! 4 Idem

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    1.2.2. LESC : UN CHANGEMENT DE METIER POUR LE GUICHETIER

    La transformation des guichets en lots spcialiss et identifis vise proposer au client qui

    entre dans un bureau de poste une offre de service personnalise : Personnaliser le service

    client devient le mot cl pour lEnseigne. Toutes les communications du Groupe insistent sur ce point et affichent cette ambition pour 2015.

    La personnalisation du service client est le secret de la russite .

    Particulier, professionnel, entreprise ou collectivit territoriale, plus aucun client ne veut tre trait

    comme nimporte qui . Chacun aspire tre reconnu dans sa personnalit, et surtout dans son besoin spcifique. Toutes les

    innovations de lEnseigne se concentrent sur la qualit et la personnalisation du service client 1.

    La gnralisation des automates installs dans des espaces ddis vise diminuer le temps

    dattente des clients pour toutes les oprations simples et rapides, de manire ddier lintervention des guichetiers aux oprations plus complexes ncessitant conseil et expertise.

    Ces changements majeurs sincarnent non seulement dans le dploiement de nouveaux espaces daccueil, conseil et vente, mais aussi par la mobilisation des quipes, qui dsormais accueillent et orientent le client en fonction de son besoin. La personnalisation du service rendu au client a ncessit

    la mise en place dun plan daccompagnement au changement. Ainsi quelque 14 000 guichetiers ont t forms dans les 1 000 plus importants bureaux. Plus polyvalents, les postiers ont ainsi une plus

    grande possibilit de monter en comptence. Etroitement impliqus dans le projet de lentreprise, les postiers de lEnseigne ont la possibilit de faire partager leurs ides afin de poursuivre lamlioration de la qualit de service. 2

    Les bureaux dAlsia et Denfert-Rochereau sont organiss en ESC et, depuis deux ans, sont ouverts de 8h 20h en semaine et de 9h 17h le samedi. Dans le cadre du projet, ces

    horaires seraient restreints sur le bureau dAlsia : de 8h30 19h en semaine et de 9h 13h le samedi.

    1.2.3. LES TACHES DES GUICHETIERS

    Le mtier de guichetier, et avec lui les tches dont il a la charge, se sont modifis au fil de

    ces volutions. Si la sparation entre activits de back-office et de front-office sest maintenue, ce sont surtout ces dernires qui se sont trouves modifies :

    Les activits dites de back-office sont de fait plutt rserves des guichetiers confirms qui, tout le moins, dtiennent les comptences ncessaires leur ralisation :

    il sagit pour lessentiel, partir des outils informatiques mis disposition de la gestion des stocks, de la gestion (et de lapprovisionnement) des automates, de la gestion des oprations de caisse et des contrles ou relevs relatifs la production.

    Les activits dites de front-office dsignent toutes les activits ralises au service du client sur les diffrentes positions de travail (ou lots ). Les guichetiers eux-mmes

    sont polyvalents, mais au sein du bureau, les positions de travail sont ddies des

    groupes doprations distincts ; on trouve ainsi le plus souvent : - Une position daccueil : place lentre du bureau, son rle est la fois daccueillir les

    clients leur entre pour les orienter et ventuellement de les accompagner aux

    automates.

    1 Cf. Site internet du Groupe La Poste ainsi que des supports de communication en ligne tels que : Ce sont les

    clients du Groupe La Poste , Ce sont les ides du Groupe La Poste , Le Groupe La Poste, un modle davenir . 2 Extrait du communiqu du groupe La Poste du 16 nov. 2009, intitul : Paris modernis en un temps record ;

    Un temps dattente rduit de moiti dans 1 000 bureaux franais : La Poste tient ses engagements !

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    - Une (ou plusieurs) position(s) dite Boutique (ou Courrier-Colis) ddie(s) au traitement des oprations de courrier et aux ventuelles ventes qui y sont lies

    (timbres, enveloppes, colis). - Une (ou plusieurs) position(s) ddie(s) aux services financiers de la Banque Postale

    dnomme guichet SF dont les horaires douverture ne recoupent pas ncessairement ceux du bureau de poste ( Alsia et Denfert, ces guichets ne sont

    ouverts que de 9h 18h).

    - Une position ddie (quand elle existe ou quand elle peut tre tenue) laccueil des clients professionnels et aux services spcifiques dont ils peuvent tre demandeurs

    (envoi en nombre, achats groups). Cette position spcifique inclut galement des activits de back-office relatives la gestion du fichier clients correspondant ainsi qu des dmarches commerciales (squences de phoning une demi-journe par

    semaine) portant notamment sur les produits de tlphonie mobile.

    Ajoutons enfin que dans certains bureaux (dont ceux dAlsia et de Denfert), lESC comprend galement une position de travail occupe par le gestionnaire clientle des

    services financiers : quoique relevant strictement de la banque postale, cette position de

    travail, qui consiste proposer un accueil sans rendez-vous aux clients de la Banque Postale,

    se matrialise alors par un bureau ouvert au sein mme de lespace daccueil du bureau.

    1.3. Alsia et Denfert, deux bureaux proches, mais diffrents

    1.3.1. CARACTERISTIQUES GENERALES

    Les deux bureaux sur lesquels portent les projets de rorganisation pour lesquels le CHSCT

    est consult se situent tous deux dans le XIVme arrondissement de Paris ; proches

    gographiquement, ils sont pourtant diffrents du point de vue de leur taille, de leur

    configuration interne ainsi que de leur volume dactivits.

    Plus grand que celui dAlsia et surtout plac sur une avenue trs passante, le bureau de Denfert-Rochereau est situ face lentre de la rue Daguerre et proximit de la place Denfert-Rochereau. Par comparaison, le bureau dAlsia se prsente plutt comme un bureau de quartier : beaucoup plus petit en surface, plus modeste en volume dactivits (565 clients en moyenne par jour contre 751 Denfert-Rochereau), il a rcemment t

    totalement ramnag, notamment en raison de linstallation dun sas Bureau Express Urbain dont les horaires douverture, plus larges, permettent aux clients daccder des services de retrait et de dpt dinstances entre 6h et minuit.

    1.3.2. DES POPULATIONS HOMOGENES, DES EFFECTIFS EN BAISSE

    Du point de vue de la population des agents des deux bureaux, nous navons pu malgr nos demandes disposer que de moyennes sur chacun des deux bureaux :

  • CHSCT DTELP de Paris Sud Projet de rorganisation des bureaux dAlsia et de Denfert-Rochereau Aptis 09/04/13 20

    Age Anciennet

    la Poste

    Anciennet

    dans la fonction

    Alsia Encadrement 48,5 27,6 1,3

    Guichet 45,7 23 13,5

    Denfert-

    Rochereau

    Encadrement 56 36,8 2,1

    Guichet 46 23 6,4

    Caractristiques socio-dmographiques des deux bureaux

    Le tableau ci-dessus permet nanmoins de constater deux rsultats trs manifestes sur

    chacun des deux bureaux : le premier dentre eux concerne lge moyen de la population des agents guichetiers ; ces derniers prsentent en effet une moyenne dge leve (elle est situe entre 40 et 41 ans pour la population active franaise). Le second est plus marqu

    encore et concerne lanciennet : suprieur 20 annes en moyenne, le chiffre dmontre que la plupart des agents guichetiers ont fait la quasi-totalit de leur carrire La Poste. On

    peut en outre noter que lanciennet dans la fonction y tant nettement plus faible, le turn-over semble tre plus important Denfert qu Alsia.

    Ajoutons pour finir que, bien que nous nayons pu disposer de donnes compltes sur ce sujet, les entretiens que nous y avons mens laissaient penser que les agents fonctionnaires

    taient, pour ces deux bureaux, assez nettement plus nombreux que les agents contractuels

    (conjecture que vient en quelque sorte confirmer le niveau lev de lanciennet).

    Enfin du point de vue des effectifs, il est notable que les bureaux ont, ces dernires annes,

    connu une baisse rgulire et continue, notamment en raison de la place croissante prise par

    les activits ralises sur les automates (et conformment aux volutions dcrites ci-dessus).

    De ce point de vue, les projets sur lesquels le CHSCT est consult ne font que poursuivre

    une tendance dj trs nette ; dans un tel contexte, la question qui se trouve alors pose est

    celle de savoir si la baisse envisage est effectivement lgitime, ou si une telle baisse peut

    tre poursuivie sans dgrader trop les conditions de travail effectives au guichet.

    Le tableau ci-contre

    donne un aperu de la

    tendance indique.

    NB : La dernire partie des

    courbes reprsente en pointills figure les niveaux des effectifs tels

    quenvisags par le projet. 0

    5

    10

    15

    20

    25

    2008 2009 2010 2011 2012 2013

    Denfert-Rochereau

    Alsia

    1.3.3. LE BUREAU DE DENFERT-ROCHEREAU

    En termes dorganisation, le bureau de Denfert-Rochereau est, comme tous les bureaux parisiens, clairement scind en deux : on y trouve positionns dun ct les conseillers

  • CHSCT DTELP de Paris Sud Projet de rorganisation des bureaux dAlsia et de Denfert-Rochereau Aptis 09/04/13 21

    bancaires (identifis comme force de vente et rassembls dans une ligne conseil sous

    la responsabilit directe du DET), de lautre les guichetiers (activits de back- et de front-office ensemble) rassembls dans une ligne guichet sous la responsabilit du DET adjoint.

    Directeur

    dtablissement Directeur

    dtablissement adjoint Conseiller

    Financier (1)

    Gestionnaire de

    clientle SF (2)

    Ligne conseil

    Conseillers

    Clientle (3)

    Ligne guichet

    Gestionnaire de

    clientle pro (1)

    Caissiers

    Comptables (5) Guichetiers (7)

    Guichetiers

    animateurs (2)

    Chef dquipe (1)

    Lorganigramme ci-dessus reproduit celui que nous a fourni la direction et quoique nayant pu disposer de registre ou de liste du personnel, il paraissait conforme la situation

    rencontre par nous sur le terrain. Il convient nanmoins de remarquer que le poste de chef

    dquipe ny figurait dj plus (cest nous qui ly avons ajout), lagent qui occupait ce poste ayant t mut il y a plusieurs mois.

    Ajoutons, que le poste de DET adjoint ntait pas non plus couvert au moment de notre intervention. En revanche, le bureau bnficiait de la prsence dun agent en stage en attente dun premier poste de DET adjoint et dun DET lui aussi en attente dun futur poste.

    La ligne conseil nest pas directement concerne par le projet de rorganisation. Quant la ligne guichet, en dehors de lencadrant intermdiaire (le chef dquipe) que nous venons dvoquer, lorganigramme demeurerait identique ; on y dnombre ainsi : - 4 caissiers-comptables organiss en brigades : ils tournent par quipe de deux (chaque

    agent enchaine une aprs-midi et une matine, puis lquivalent en repos pendant que son collgue a pris le relai1) et alternent une semaine de travail en back-office, et une semaine

    de travail au guichet, en front-office. Notons que lun des guichetiers, form aux activits de back-office, assure le remplacement de ses collgues caissiers lorsque ceux-ci sont en

    congs.

    - 1 gestionnaire de clientle professionnelle. - 2 guichetiers animateurs qui, plus anciens ou plus expriments, ont en grande partie

    repris la charge de travail quassumait le chef dquipe. - 7 guichetiers qui, au fil des rotations, tournent sur les diffrents lots : accueil, guichet SF

    (services financiers), boutique et courrier.

    1.3.4. LE BUREAU DALESIA

    Le bureau dAlsia est formellement organis de la mme faon que celui de Denfert : les deux lignes dactivit y sont clairement spares, chacune sous la responsabilit de lun

    1 Ce mode dorganisation permet ainsi dassurer un suivi de la caisse en limitant les alternances.

  • CHSCT DTELP de Paris Sud Projet de rorganisation des bureaux dAlsia et de Denfert-Rochereau Aptis 09/04/13 22

    des encadrants (le DET a en charge le management des conseillers bancaires, tandis que le

    DET adjoint est plutt en charge des guichetiers).

    Directeur

    dtablissement Directeur

    dtablissement adjoint Conseiller

    Financier (1)

    Gestionnaire de

    clientle SF (1)

    Ligne conseil

    Conseillers

    Clientle (2)

    Ligne guichet

    Gestionnaire de

    clientle pro (1)

    Caissiers

    Comptables (2)

    Guichetiers (9)

    Lorganigramme ci-dessous reproduit celui qui nous a t transmis par la direction, mais il ne correspond en fait pas tout fait ce que lon dcouvre sur le terrain.

    En effet, paradoxalement, il nous a t difficile davoir une ide prcise du nombre de salaris exerant effectivement sur le bureau dAlsia : aucun registre, ni aucune liste du personnel ne nous ont t transmis ; ce nest donc quau cours de nos entretiens que nous avons pu essayer de recouper les informations qui nous avaient t donnes. Nos investigations rvlent ainsi que, loin de fonctionner 9 guichetiers, le bureau semble plutt fonctionner

    en fait avec 6 guichetiers. Prcisons nanmoins que 2 intrimaires avaient depuis quelques

    semaines t recruts en plus : lun deux remplaait un des agents, absent pour cause de longue maladie1, lautre compensait une situation de surcharge que nul se songeait dissimuler.

    Au total, le bureau dnombrait ainsi :

    - 2 caissiers-comptables organiss en brigade, comme Denfert-Rochereau (mais sans alterner avec des activits de front-office) :

    - Et seulement 5 guichetiers titulaires effectivement prsents sur le site lorsque sest droule notre intervention.

    Remarquons ainsi que, comme Denfert, dans cette situation, le bureau fonctionnait en

    quelque sorte dj dans la configuration prvue par le projet2 : tout se passe comme si, ayant

    anticip le cadrage projet, la direction avait en quelque sorte dj redimensionn les deux

    bureaux selon les donnes du projet.

    1 On peut noter ici que les moyens thoriquement prvus pour assurer ce type de remplacement (effectif en

    interne ou brigade de remplaants type EAR) semblaient ici faire dfaut. 2 Du moins en termes dorganigramme

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    Chapitre 2 Des projets de redimensionnement

    des effectifs

    Nous lavons vu, les deux projets de rorganisation se prsentent dabord comme des perspectives de redimensionnement des effectifs. Comme chacune des rorganisations de ce

    type lEnseigne depuis quelques annes, ces redimensionnements sont issus de lvaluation pralablement tablie par un outil, loutil morg@ne : valuer lesdits projets suppose avant tout donc danalyser la logique et les modalits de ce dernier.

    2.1. Morg@ne : un outil national de dcompte analytique des activits

    2.1.1. UNE LOGIQUE ISSUE DU TAYLORISME

    Loutil morg@ne rpond un souci classique en organisation du travail, celui de lvaluation de la charge de travail. Confie aux ingnieurs des bureaux des mthodes dans les

    organisations tayloriennes, cette tche consiste simplement valuer (essentiellement sur un

    mode quantitatif) le volume de travail effectu par les salaris de lentreprise, de ltablissement ou de lquipe en le rapportant aux volumes produits. De la sorte, on peut la fois comparer les entits entre elles et anticiper les variations deffectifs en fonction des variations de la production. Toujours soucieuses de plus de prcisions, les organisations

    industrielles ont ainsi au fil du temps labor des outils de plus en plus pointus, dcomposant

    les diffrentes phases de la production en tches lmentaires : chacune des tches tant

    facilement identifie grce la division du travail (notamment dans les organisations de

    production en chanes ), on procde des chronomtrages permettant de lui faire

    correspondre une valeur en temps de travail (cest--dire en fait un cot). Le dispositif permet ainsi de porter la connaissance des dcideurs un dcompte analytique des activits,

    partir duquel pourront tre tudies les diffrentes perspectives : externaliser une activit,

    augmenter la productivit dune autre (par un investissement ou par une rorganisation).

    Commun dans les organisations industrielles, ces outils sont cependant beaucoup plus rares

    dans le secteur des services dans la mesure o leur pertinence suppose lexistence de tches lmentaires que lon puisse effectivement dcompter, soit des tches hautement rptitives (des tches quasi-similaires ralises un grand nombre de fois) et peu dpendantes de

    lindividu qui les ralise. Il nest de ce point de vue pas anodin de constater que la complexification des process de production (et avec elle leur plus grande variabilit) a

    conduit beaucoup dorganisations industrielles abandonner ce type doutils.

    En effet, comme nous lindiquions, la pertinence de tels outils suppose des activits la fois facilement dcoupables en tches lmentaires et susceptibles dtre considres comme identiques (du moins en temps de travail) mesure quelles sont rptes. Les activits impliquant des interactions interindividuelles semblent ainsi se prter particulirement mal

    la mise en place de ce type doutil.

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    Cest pourtant bien ce type de mission, celle dun dcompte analytique des activits, quest consacr loutil morg@ne mis en place La Poste pour piloter les activits du guichet de lEnseigne. Ni nos entretiens ni les documents transmis nont pu nous permettre de prciser depuis quand loutil y a t mis en place. Celui-ci a connu ce jour 9 versions : chacune delles tant cense amliorer les prcdentes. Ainsi, si comme nous lont indiqu nos interlocuteurs la dernire version, la V9, comporte des amliorations importantes et

    significatives , il ny a en revanche que peu de diffrences entre la V7 et la V8, les deux versions qui ont respectivement t appliques Denfert-Rochereau et Alsia. Notre

    analyse portera donc sur ces deux versions sans quelles soient formellement distingues.

    2.1.2. UN REDIMENSIONNEMENT QUASI-CONTINU, UN SOUCI DE REFACTURATION INTERNE

    Loutil morg@ne permet pour lessentiel de quantifier le volume de travail ncessaire la ralisation des diffrentes activits du guichet. Ce faisant, il a, pour la direction, une double

    utilit : il permet, dune part, de raliser des refacturations internes entre le guichet et les autres activits et, dautre part, de suivre au fil du temps lvolution des moyens humains ncessaires la ralisation des activits de ces mmes guichets.

    Du point de vue de la refacturation interne, il permet en effet didentifier et de dnombrer les activits qui, ralises au guichet par des salaris de lEnseigne, sont en fait imputables lune des autres branches du Groupe ; chacune delle se voyant correspondre un temps de travail, elle est traduite en cot transfr de lEnseigne vers la branche concerne. Un exemple : lactivit de vente dun Chronopost au guichet est identifie, elle se voit correspondre un temps de ralisation lui-mme traduit en cot transfr de lEnseigne vers la filiale Chronopost ; de mme pour les activits imputables au courrier ou pour celles

    imputables La Banque Postale.

    Du point de vue du suivi des ressources humaines , loutil se veut un moyen de quantifier pour chaque bureau lvolution de la charge de travail et avec elle, celle des effectifs ncessaires pour la raliser.

    Le but cest de mettre des moyens en face de lactivit faire (Direction).

    Le principe est donc simple : le dcompte analytique des activits permet, pour chaque

    bureau, de quantifier le volume dactivits (en minutes) ralises lanne N ; ce volume dterminera alors presque immdiatement ( quelques corrections prs, nous y

    reviendrons) le nombre doprateurs ncessaires lanne N+1 pour absorber ce volume. Loutil permet donc, si cela est jug ncessaire, de rajuster chaque anne les effectifs des bureaux de poste de lEnseigne.

    Ajoutons que ce recours loutil se rvle dautant plus crucial dans le contexte dvolutions rapides du mtier impos ces dernires annes : la stratgie dentreprise visant notamment maximiser lusage par les clients des automates passe galement par la volont dajuster les effectifs au fur et mesure que lusage de ces automates se gnralise. Cest pour ces raisons dailleurs que la direction affiche ouvertement lobjectif de redimensionnements en quasi-continu : tous les 18 mois environ1, chaque bureau voit ses effectifs rvalus grce

    aux donnes issues de morg@ne.

    1 Depuis ladoption des 10 mesures immdiates en mars 2012 en mme temps que la mise en place du Grand Dialogue, la direction sest engage ne procder des rorganisations quau maximum tous les 2 ans.

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    2.2. Modalits et mise en uvre de loutil

    La premire grande tape du dispositif mis en uvre par morg@ne est celle de lidentification des diffrentes tches ou oprations lmentaires : le ROP ou Relev des Oprations Postales.

    2.2.1. LE ROP : UNE LISTE RAISONNEE ET EXHAUSTIVE ?

    Prsent sous la forme dune liste ordonne, le ROP consiste dabord en un dcoupage des activits du guichet en diffrents groupes (Affranchissement objets ordinaires, Chronopost,

    Paiement des mandats) ; au sein de chaque groupe se trouvent listes et identifies les diffrentes tches possibles dun guichetier. Le groupe Affranchissement objets ordinaires comprend ainsi 17 tches possibles parmi lesquelles, par exemple, Affranchir au micro une

    lettre prioritaire du RI ou Affranchir au micro une lettre verte .

    Le ROP est ainsi prsent comme un catalogue de toutes les oprations possibles . En effet,

    le systme repose, pour lessentiel, sur le fait que toute opration ralise au guichet face un client suppose une action du conseiller sur lordinateur : la machine1 enregistre ainsi automatiquement lopration et limpute dans le trafic ce terme dsignant simplement le nombre doprations dun certain type ralises sur une priode donne.

    Dans le tableau ainsi constitu, chaque opration se voit correspondre un code ; elle est

    rapporte un domaine (ou mtier) dans notre exemple le Courrier, aux fins de refacturation interne. Enfin, elle se voit surtout attribuer un coefficient , qui nest autre que le temps unitaire de ralisation suppos de la tche. Celui-ci est exprim en minutes et

    en centiminutes (un centime de minute correspond 6 diximes de secondes). Pour

    reprendre lun de nos exemples, la tche Affranchir au micro une lettre prioritaire du RI correspond un coefficient de 0,942, soit 56,4 secondes.

    Pour obtenir la charge de travail appele par une opration donne, on multiplie le nombre

    doprations ralises (son trafic, T) par le temps standard correspondant cette opration (son coefficient, C). Ainsi sur lanne 2012 Alsia, il a t dnombr 11.557 oprations du type Affranchir au micro une lettre prioritaire du RI , ce qui correspond une charge de

    10.863,58 minutes (11.557 x 0,94).

    Le dcompte du ROP permet donc de quantifier pour chaque bureau une situation de

    charge de travail couler (en minutes) ; la charge dun bureau donn se calcule par simple addition des charges de lensemble des oprations du bureau :

    Activit dun bureau (en minutes) = Somme des charges de toutes les oprations (C x T)

    Derrire son apparente simplicit, une telle formule repose en fait sur lhypothse de labsolue exhaustivit du recensement des oprations : aucune activit nchappe ce

    1 Selon quil sagit doprations postales ou bancaires, les guichetiers passent par deux logiciels distincts, tous deux mme dimputer les oprations ralises dans le ROP : SIVP pour les oprations postales et CHEOPS pour les oprations bancaires. 2 Les chiffres sont ceux du ROP 2012 pour les bureaux dAlsia et de Denfert : nous reviendrons un peu plus loin sur les ventuelles variations de ces temps selon les sources ainsi que sur leur tonnante prcision.

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    dcompte nous a ainsi assur la direction. Il parat pourtant difficile dtre aussi catgorique :

    En effet, si la plupart des oprations sont automatises, il convient tout dabord de remarquer que certaines font cependant lobjet dune saisie manuelle. Quoiquil semble sagir doprations peu frquentes (sur les relevs des oprations des bureaux dAlsia et de Denfert, la plupart des oprations concernes ont vu leur trafic rester nul), il convient cependant de faire remarquer

    quaucun des agents interrogs ne connaissait lexistence de ce dispositif de saisie manuelle. Il nest donc pas impossible que certaines oprations naient simplement pas t saisies.

    De mme lorsquun client renonce une opration en cours de route , suite un change avec le guichetier (par exemple, lorsquun client dcouvre les frais attachs son opration et que ceux-ci lui paraissent trop importants), celle-ci ne peut tre prise en compte.

    Lexhaustivit est en outre mise en question lors de lapparition de nouvelles tches ou oprations. Plusieurs de nos interlocuteurs ont ainsi attir notre attention sur les

    oprations lies lactivit de tlphonie mobile et le risque de voir celles-ci non prises en compte. Ces oprations sont pourtant listes et values dans le ROP ; il aurait t

    facile de les prendre en compte. Or, interroge en sance de CHSCT sur ce point, la

    direction des projets a pourtant indiqu que sur cette rorganisation lactivit La Poste Mobile ntait pas value ce jour 1. Au-del du risque de large sous-dimensionnement que pourrait avoir induit une telle dcision, cest lensemble de loutil qui risque ici de se voir mis en cause : si certaines oprations prsentes dans le ROP ne sont en fait pas

    prises en compte dans le dcompte final, quelle fiabilit loutil peut-il avoir ?

    2.2.2. UN PROBLEME DE MESURE

    La seconde grande difficult classique pour ce type doutil concerne la fiabilit du temps standard retenu pour les calculs. En effet, un tel outil na de sens et mme de valeur que dans la mesure o lvaluation laquelle il parvient peut tre considre comme suffisamment proche de la ralit. Ceci suppose alors un double examen : il sagit, dune part, dinterroger les conditions concrtes dans lesquelles sont raliss les mesures ou ici les chronomtrages ; et, dautre part, dinterroger les conditions dans lesquelles il est pertinent de considrer le temps standard comme un temps moyen.

    La premire de ces interrogations concerne donc les chronomtrages.

    Dans le souci de procder lvaluation de cet outil, ce fut lune de nos premires demandes dinformation : qui ralise les chronomtrages ? Comment sont-ils raliss, dans quels bureaux, dans quelles conditions ? Combien ralise-t-on de mesures, selon quelles

    rgles statistiques sont-elles juges significatives ? Quelle est leur marge dincertitude ? A quelle frquence et selon quels critres sont-elles rvises ?

    Malgr plusieurs relances, aucune de ces demandes na pu tre satisfaite : aucun document concernant ces questions na pu nous tre fourni et aucun de nos interlocuteurs na pu nous clairer sur ces diverses interrogations. Les temps sont fiables, ils sont rviss rgulirement

    nous a simplement assur la direction. La lgret de la rponse ne peut manquer dtonner, car les enjeux sont ici cruciaux : la fiabilit des temps retenus est la garantie de la fiabilit de

    loutil dans son ensemble et avec lui de tous les redimensionnements proposs aux diffrents bureaux.

    1 PV du CHSCT du 13 dcembre 2012, p. 5.

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    Lexamen des documents dont nous disposions permet cependant de faire un certain nombre de remarques quant la fiabilit des mesures ralises.

    a) La division des oprations en tches lmentaires

    Le document de prsentation du ROP expose la lumire dun unique exemple la faon dont sont dtermins les coefficients des oprations identifies : chaque opration est

    dcompose en tches lmentaires (TE) ; dans un tableau, chacune de ces tches se voit

    alors correspondre un degr de complexit, un temps standard et une frquence. Il semble

    donc quoique la chose ne soit pas prcise que ce sont ces tches qui ont fait lobjet de chronomtrages.

    La tche dcompose dans lexemple est celle du Dpt des nouveaux emballages avec liasse intgre et sans signature sans vignette dassurance ; celle-ci nexistait pas en 2011-2012. Le principe dtablissement du coefficient est nanmoins clairant :

    La premire des tches lmentaires est identifie comme Accueillir le client ; celle-ci est

    considre comme simple et affecte dun temps standard de 5 centiminutes (soit 3 secondes) le temps dun change de salutations, on imagine. Cependant, la colonne suivante (Frquence) prcise que la tche na lieu que 3 fois sur 4 (75%), car si lon comprend bien le document une fois sur 4, laccueil a dj eu lieu pour la vente dun produit au mme client ( 1 fois sur 4 accueil + vente ). Le temps rel affect cet accueil

    est donc pondr par cette frquence (pour ne pas risquer de compter deux fois les 5

    centiminutes affectes la tche daccueil), ce qui le rduit 3,75 centiminutes (soit 2,25 secondes).

    Le tableau ne comporte pas moins de 13 tches lmentaires, toutes dcoupes et traites

    selon la mme mthode . Celle-ci est en fait relativement simple : elle consiste

    considrer que toute opration nest que la somme de micro-tches isolables et identifiables de telle sorte quon peut se contenter dadditionner les temps dfinis pour raliser ces micro-tches pour obtenir un temps de ralisation de lopration complte. Reconnaissons que, de la sorte, on sconomise la ralisation de trop nombreux chronomtrages : les micro-tches sont si simples quelles sont toutes considres comme identiques ; elles ne ncessitent alors sans doute plus que soit mis en uvre un dispositif validant leur reprsentativit.

    Seq. Tche Complexit Commentaire Tps Std.Freq. Tps calculTps cumul

    1 TE0001 - Accueillir le client CX0001 - Simple 1fois sur 4 accueil + vente 5 75 3,75 3,75

    2 TE0002 - Se faire remettre l'objet/le document CX0002 - 1 document ou 1 objetColissimo pr affranchi 2 100 2 5,75

    3 TE0002 - Se faire remettre l'objet/le document CX0003 - > 1 document ou un objetVigipirate: PI 5 35 1,75 7,5

    4 TE0004 - Vrifier/Contrler/pointer CX0006 - 1 information Vigipirate : mention Exp 6 35 2,1 9,6

    5 TE0004 - Vrifier/Contrler/pointer CX0007 - de 2 5 informations Vigipirate : identit 13 35 4,55 14,15

    6 TE0004 - Vrifier/Contrler/pointer CX0006 - 1 information 6 100 6 20,15

    7 TE0015 - Se positionner/Ouvrir l'application CX0332 - simple GDR 3 100 3 23,15

    8 TE0016 - Saisir CX0030 - Mot simple 2 100 2 25,15

    9 TE0069 - Flasher un objet CX0747 - CAB/GDR 8 100 8 33,15

    10 TE0016 - Saisir CX0030 - Mot simple format sur liasse 2 100 2 35,15

    11 TE0050 - Dtacher/ sparer / couper l'imprim CX0095 - 1 feuillet/ partie 5 100 5 40,15

    12 TE0042 - Remettre au client objet/imprim CX0076 - Document- Simple Preuve de dpt 5 100 5 45,15

    13 TE0036 - Placer l'objet CX0067 - Colis/ou Intl 8 100 8 53,15

    En centimin En sec

    BL01 - Accueil 20,15 12,09

    TOTAL 53,15 31,89

    DEVIS - Dpt des nouveaux emballages avec liasse intgre et sans signature

    sans vignettes d'assurance (Avant circuit de validation officielle)

    BL02 - Enregistrer l'opration dans l'application 15 9

    BL04 - Cloture 18 10,8

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    Cependant, un tel parti-pris mthodologique na scientifiquement aucune valeur1 ; il na surtout notamment dans le cas dinteractions entre tres humains littralement aucun sens : linteraction entre le guichetier et son client est dans la ralit bien plus complexe et surtout beaucoup trop susceptible de variations pour supporter dtre rduite la somme de ses supposes parties.

    Dans les faits, au niveau du travail rel, la vente dun objet ne se rduit jamais cette somme de micro-tches : si le client pose une question, sil ne comprend pas le franais, sil demande un conseil, sil souhaite tre accompagn sur les automates, sil demande au guichetier de lui crire ladresse, sil est en colre parce quil a attendu plus que les 5 minutes sur lesquelles la Poste sengage Les cas de drives et de variations sont quasi-infinis.

    Ainsi, ce qui est mesur par le coefficient semble bien navoir quasiment aucun rapport avec ce qui est effectivement ralis par les agents au guichet. Ajoutons quavec le mode de calcul prcdemment expos (laddition de micro-tches pondres par des frquences) on obtient des niveaux de prcision qui, du point de vue de ce qui est mesur, nont plus aucun sens.

    b) Sur la prcision des mesures

    Le ROP prsente, nous lavons vu, les coefficients des oprations en minutes et en centiminutes, ce qui correspond un degr de prcision de lordre de la demi-seconde (1/100me de minute quivaut 6 diximes de seconde). Or, pour des tches durant plusieurs

    minutes et soumises de trs grands facteurs de variabilit, une telle prcision na gure de sens.

    Sur certains coefficients, le temps indiqu prsente une prcision allant jusqu 5 chiffres aprs la virgule, ce qui correspondrait une prcision de lordre du 1/100.000me de minutes ! Il faut ici faire remarquer quen ce qui concerne des grandeurs que lon va comparer puis additionner, il ny a scientifiquement aucun sens conserver un niveau de prcision de 4 ou 5 dcimales pour certaines quand on les limite 2 pour la plupart des

    autres.

    Mais cest surtout en soi quun tel niveau de prcision se rvle drisoire. Ainsi par exemple de la tche Traiter dpt LR MA affranchissement industriel : son coefficient dans le ROP est

    de 0,33237, soit 19,9422 secondes ; il na pas sembl utile ou pertinent aux chronomtreurs ou aux concepteurs de loutil darrondir ce temps 20 secondes Lopration en question a t ralise 104 fois sur lanne 2012 Alsia, 275 fois Denfert-Rochereau. Sur lensemble des deux bureaux, la tche a ainsi t comptabilise comme ayant reprsent 7558,0938 minutes, soit en conservant le mme niveau de prcision 2h 5min et 58,0938

    secondes (soit une prcision de lordre du dix-millime de seconde). Tout semble ici se passer comme si, derrire de tels niveaux de prcision, loutil cherchait prsenter un caractre de scientificit quil est par ailleurs incapable de justifier.

    1 Comme nous lavons dj fait remarquer, mme dans le cas dune production de type industriel, ces mthodes seraient hautement contestables : les oprations ne peuvent tre dcoupes et donc chronomtres que dans la mesure o elles correspondent effectivement un geste ou une squence sparable du point de vue de loprateur. Il convient alors de raliser un nombre significatif de chronomtrages pour ne pas risquer une trop grande variabilit lie loprateur (sa dextrit, son exprience, sa fatigue).

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    Le caractre drisoire de ce niveau de prcision est sans doute plus troublant encore

    lorsquil sagit doprations trs courantes. Ainsi, par exemple, la tche identifie comme Envoyer de largent par Western Union : le coefficient correspondant cette opration est 2,636 soit 2 min 38 sec et 16 centimes. La prcision est ici dautant plus drisoire que, comme nous le verrons, les chronomtrages raliss lors de nos observations donnent des

    rsultats qui pour cette opration dpassent tous les 5 minutes.

    c) Le problme de loprateur moyen : la variabilit

    La troisime remarque porte sur une autre hypothse sous-jacente la mthode choisie

    pour laborer les coefficients : celle de loprateur moyen. Les documents ne prcisent rien sur les conditions de chronomtrage ; il est cependant patent que lapplication des calculs prsents considre que tout oprateur mettra le mme temps pour raliser les oprations

    ou tches considres ; cest lhypothse, classique en organisation du travail, dite de loprateur moyen . En effet, comme souvent lorsquil sagit dvaluer la charge de travail, les outils de dcompte supposent, implicitement au moins, linterchangeabilit des oprateurs : les temps sont considrs comme standards (pour que des calculs soient

    possibles) et avec eux, les oprateurs qui les ralisent sont eux-mmes supposs

    standards ou moyens . Or, nouveau, lorsquon se penche sur le travail rel, une telle hypothse ne tient pas.

    Comme le montrent en effet les diverses sciences du travail et notamment lergonomie , si le travail tel quil est prescrit doit tre distingu du travail tel quil se droule effectivement, cest dabord parce que les situations de travail ne sont jamais stables ou uniformes : il existe de multiples variations ou alas qui modifient constamment la nature de

    la tche accomplir, variabilit de lenvironnement et des situations, mais galement diversit et variabilit des personnes :

    Le mme poste de travail, occup par deux personnes, va reprsenter deux situations de travail

    spcifiques : les oprateurs de grande taille ou de petite taille nadopteront pas les mmes postures, le plus expriment dveloppera des stratgies diffrentes de celui qui lest moins. Les efforts, les raisonnements mis en uvre, et la fatigue rsultante ne seront pas quivalents pour lun et lautre, mme si le rsultat produit semble identique 1.

    Il faut le rappeler avec force : loprateur moyen nexiste pas. Et au-del des diffrences interindividuelles, un mme individu connat des variations de son tat propre. Lopration, ralise en un certain temps le matin avec les premiers clients, pourra se rvler bien plus

    pnible et parfois bien plus longue en fin de cycle de travail. Ajoutons que cette variabilit de

    loprateur vient sadjoindre celle des clients eux-mmes qui dans une relation de service participent pleinement au droulement de linteraction.

    d) Des coefficients variables dune anne sur lautre

    La dernire remarque ne concerne pas directement loutil utilis dans sa version V7 ou V8, mais plutt les conditions dans lesquelles celui-ci volue au fil du temps. Ayant pu consulter

    le ROP dans sa version 2013 (coefficients utiliss pour les futurs dimensionnements V9),

    nous nous sommes proposs de comparer les coefficients qui y taient prsents avec ceux

    1 F. Gurin, A. Laville, F. Daniellou, J. Duraffourg, A. Kerguelen, Comprendre le Travail pour le transformer,

    ANACT, 1997.

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    des annes 2011 et 2012. Or, non sans un certain tonnement, nous avons pu constater que

    plusieurs dentre eux avaient connu une volution notable.

    Notre attention a en fait dabord t attire par le coefficient attribu lopration dj voque plus haut, savoir Envoyer de largent par Western Union : son coefficient en 2012 tait de 2,636. En 2013, le degr de prcision est toujours aussi inappropri, mais le

    coefficient double quasiment et devient 4,213. Aucune explication ni aucun document ne

    permettent dexpliquer cette soudaine volution : lopration a-t-elle change ? Les concepteurs de loutil ont-ils pris la mesure du caractre aberrant de leur valuation initiale ? Selon quelles nouvelles mesures ou nouveaux calculs la modification a-t-elle t dcide ?

    De la mme manire, en prolongeant nos investigations, nous avons alors constat que

    dautres coefficients avaient eux aussi chang ; mais cette fois dans le sens dune baisse notable ; la chose est dautant plus significative quil sagit doprations relativement courantes. Ici encore, aucun document ni aucune explication ne permet de comprendre

    cette volution.

    A la lumire de 3 exemples qui nous ont paru significatifs (tous 3 ont t pris dans la

    rubrique Chques postaux ), le tableau ci-dessous permet de prendre la mesure de cette

    volution qui, pour les oprations considres reprsente un gain de productivit allant de

    9% plus de 30% ce qui sur une anne est trs consquent. Le tableau permet en outre dvaluer les effets de cette nouvelle valuation en termes de dimensionnement ; afin de ne pas nuire sa lisibilit, nous navons cependant prsent ces lments que pour le bureau de Denfert-Rochereau partir des donnes 2012 :

    Oprations 2012

    (V7-8)

    2013

    (V9)

    cart

    V8 V9 volution

    V8 V9 Nbre dop (DR-2012)

    Gain possible

    (en min)

    Traiter sur micro retrait despces ordinaire

    1,96 1,785 -0,175 -8,93% 11 115 1 945,1

    Traiter sur micro versement

    despces sur son propre compte 1,85 1,594 -0,256 -13,84% 7 680 1 966,1

    Traiter sur micro notification

    davoir 1,75