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4/4 PÉRIODE «ULTIME» DE 2002 À NOS JOURS... RECUEIL DE PRESSE FRANCOPHONE DU GROUPE YES

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Période «Ultime»de 2002 à nos joUrs...

reCUeil de PresseFrAnCoPHone

dU groUPe Yes

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(par ordre alphabétique)

Jon ANDERSON (Chant)

Benoît DAVID (Chant)

Jon DAVISON (Chant)

Geoff DOWNES (Clavier)

Steve HOWE (Guitare)

Chris SQUIRE (Basse)

Oliver WAKEMAN (Clavier)

Rick WAKEMAN (Clavier)

Alan WHITE (Batterie)

LISTE DES MUSICIENS DE LA PÉRIODE «ULTIME» (à partir de 2002)

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Table des matières(cliquer sur l’article désiré)

2002 - Highlands Magazine n° 19 : Yes - Rétrospective des années 1970 «A Perpetual Change...» 42002 - Highlands Magazine n° 19 : Critique «In A Word» 102002 - Highlands Magazine n° 19 : Critique «Symphonic Live» 112002 - Highlands Magazine n° 19 : Entretien Rick Wakeman 112002 - Highlands Magazine n° 19 : Critiques CD/DVD de Rick Wakeman 152003.06.23 - Classic-Rock.be : Article concert Cirque Royal de Bruxelles 22 juin «La claque progressive...» 172003.09 - Rimshot n° 24 : Entretien Alan White «Les clefs de l’ascension» 182003.10 - Batteur Magazine : Actualités «White à l’école ATLA» 212003.12.17 - Télémoustique : Critique «Yesspeak» 212003 - Prog-résiste n° 34 (4ème trim.) : Publicité (n° 33) & Critique «The Unknown» 212003 - Batteur Magazine n° 165 : Entretien Alan White «White Spirit» 222003 - Jazz Festival de Montreux : Programme officiel «Pour ce combo-là, on dit oui !» 242004.02 - Crossroads n° 18 : Critique «Yesspeak» 252004 - Prog-résiste n° 35 (1er trim.) : Publicité (n° 34) & Critique Steve Howe’s Remedy «Elements» 252004 - Prog-résiste n° 35 (1er trim.) : Critique «Fish Out Of Water» 262004 - Prog-résiste n° 35 (1er trim.) : Critique «Out There» 262004 - Prog-résiste n° 35 (1er trim.) : Critique «Yesstory» 272004 - Prog-résiste n° 35 (1er trim.) : Critique «Drama» 272004 - Prog-résiste n° 35 (1er trim.) : Critique «90125» 282004 - Prog-résiste n° 35 (1er trim.) : Entretien Jon Anderson «The Jon AnderSONata» 292004 - Prog-résiste n° 35 (1er trim.) : Entretien Chris Squire «Conspirator Squire talks» 332004 - Prog-résiste n° 35 (1er trim.) : Entretien Rick Wakeman «Confessions d’un magicien» 352004.06 - Keyboard Magazine n° 187 : Entretien Rick Wakeman «La Quête Fabuleuse...» 412004.07 - Harmonie Magazine n° 51 : Critique «Out There» 432004.08 - Rock & Folk n° 444 : Photo S. Howe & reportage concert du 22 Juin au Zénith «La fête YES» 432004.09 - TéléCinéObs n° 2080 : Critique «In A Word», «L’antidote» 452004.10 - Crossroads : Entretien Rick Wakeman «Retour en force d’une légende» 462006.08 - Muziq n° 7 : Critique «Relayer (version Rhino)» 492008.06 - Muziq n° 14 : Reportage «Le rock progressif/Portrait» 502009 (?) - Crossroads : Critique «Close to the edge» 52

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Un suvol DiscographiqueDes années 70

Une évocation de Hubert ALLUSON, Stéphane BENON, OlivierBOLARD, Antoine CAVALIER, Didier GONZALEZ & Denis PERROT

Les parutions concomitantes du coffret rétrospective IN A WORD : YES (1969 - ) et du DVD YESSYMPHONIC, sans oublier le retour du fils prodigue, RICK WAKEMAN nous conduisent à vous proposer une rétrospective discographique du groupe dont vous trouverez la première partie, les années 70 dans ce numéro.

YES (1969)

Le premier album d’un groupe revêt toujours une importance particulière... mais pas dans le cas de YES ! En effet, les amateurs de rock progressif ont tendance à faire l’impasse sur ses 2 premiers disques, et à considérer YES ALBUM (1970) comme le véritable premier album de la formation anglaise. Quel dommage car les 2 premiers crus ont une saveur toute particulière ne pouvant laisser les mélomanes indifférents ! Dans le cas de l’album YES, STEVE HOWE n’a encore intégré le groupe, laissant le champs libre à son prédécesseur PETER BANKS, qui est également un excellent instrumentiste. Sinon, le trio JON ANDERSON (chant), CHRIS SQUIRE (basse et chœurs) et BILL BRUFORD (percussions) fonctionne à plein régime, augurant des splendeurs du YES ALBUM et de FRAGILE. TONY KAYE (orgue, piano) est quant à lui tout à fait convainquant dans son rôle

(bien plus, en tout cas, que sur 90125, BIG GENERATOR ou TALK), distillant des sonorités en phase avec l’époque, héritées du psychédélique et du rock baroque. Il faut dire qu’à l’époque, YES se réclame de VANILLA FUDGE et de IRON BUTTERFLY ; par conséquent ça aide ! L’album YES voit déjà les premières collaborations de SQUIRE et d’ANDERSON au niveau de l’écriture («Looking around», «Harold land» ou «Sweetness»), mais plusieurs compositions proviennent

des groupes précédents de CHRIS («Beyond and before») et de JON («Yesterday and today» et «Survival»), voire même sont des reprises («I see you» de DAVID CROSBY et «Every little thing» des BEATLES). La voix de JON est moins pure (plus «voilée») qu’elle le sera dans les années 70 et les harmonies vocales de CHRIS sont nettement moins heureuses que sur CLOSE TO THE EDGE ; bref «ça» chante un peu «faux» parfois...Au niveau de la guitare, PETER BANKS dispose d’un jeu beaucoup plus agressif que HOWE, pouvant évoquer le RITCHIE BLACKMORE des 3 premiers albums de DEEP PURPLE. D’ailleurs, son introduction «baroque» de la reprise de «Every little thing» rappelle tout à fait le traitement infligé par PURPLE (ou par VANILLA FUDGE) aux standards des BEATLES. L’album s’écoute globalement bien, même si «Survival» et les 2 reprises sont les seules compositions à véritablement sortir du lot. Il est intéressant de constater que ces 3 titres, les plus longs de l’album (6’01, 6’33 et 5’24), disposent déjà d’une construction «progressive» cohérente, s’exonérant du format «pop» des autres titres. «Survival» clot donc l’album en laissant une excellente impression à l’auditeur et augurant du meilleur pour YES... (**½)

Hubert ALLUSSON

TIME AND A WORD (1970)

Ce second album contient une musique plus conséquente (expérience oblige) que sur YES, bien que ce soit la même équipe qui officie aux commande. La pochette de la réédition CD pourrait nous induire en

erreur, mais c’est toujours PETER BANKS (et non STEVE HOWE !) qui tient la guitare, TIME AND A WORD contient 8 chansons exceptionnelles, soutenues par un orchestre. Comme THE MOODY BLUES ou THE NICE avant lui, YES a décidé d’enrichir sa musique qui s’approche progressivement de ce qu’elle deviendra plus tard («Then»). TIME AND A WORD anticipe MAGNIFICATION, non seulement par ses arrangements, mais également par l’alchimie ANDERSON/SQUIRE. Une seule chanson est signé en commun («The prophet», le plus long -et progressif- morceau du disque avec ses 6’32 ; quelle ouverture d’orgue !), mais les harmonies vocales coulent ici de source. Comme sur l’album précédent, nous découvrons 2 superbes reprises (accompagnées par l’orchestre) qui constituent les points d’orgue des prestations scéniques de l’époque : «No opportunity necessary, no experience needed» de RICHIE HAVENS et «Everydays» de STEPHEN STILLS. Avec «Sweet dreams» et «Clear days», nous découvrons le genre de petites ballades qu’affectionne JON ANDERSON et dont il nous fera partager les charmes pendant une trentaine d’années. «Astral traveller» est, avec bien entendu «The prophet», le titre progressif par excellence avec dissonances, cassures de rythmes, sonorités spécifiques (orgue et guitare) ; le meilleur morceau de l’album ! TIME AND A WORD se termine par le titre -le «tube» devrais-je même dire- «Time and a word» qui offre une superbe mélodie composée par ANDERSON avec son ami DAVID FOSTER. Cette jolie chanson est la seule de la période BANKS a avoir été jouée par les YES de la grande époque (celui de HOWE et WAKEMAN), ce qui prouve ses grandes qualités. Il est donc judicieux que TIME AND A WORD s’achève sur ce titre (comme YES se terminait par «Survival»). Un album des plus attachants... (***)

Hubert ALLUSSON

SOMETHING’S COMING (1969/70-97)

Heureux les fans de YES qui, en 1997, ont découvert ce double-album de vieilleries de la BBC ! Personne ne les attendaient et il aura fallu que l’ami PETER BANKS, guitariste originel malheureux du «Oui», les proposent à la vente pour que nous nous intéressions aux tous débuts d’ANDERSON & Co ! Parce qu’il faut bien l’avouer : tout le monde se contre-fiche des

2002 - Highlands Magazine n° 19 : Yes - Rétrospective des années 1970 «A Perpetual Change...»

A perpetual change...YES

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2 premiers albums de YES... Tout le monde sauf moi, archéologue du prog-rock qui aime savoir d’où viennent les artistes de légende. Qui aime les 3 premiers DEEP PURPLE, les 2 premiers JOURNEY les 4 premiers STYX... ?

S O M E T H I N G ’ S COMING dégage une saveur surannée qui ne peut laisser personne indifférent. «Ah, ce gros son de basse, cette voix aiguë (moins qu’après toutefois) et voilée (à l’époque), ce gros

orgue hammond, cette frappe jazzy et cette guitare acide... Mais oui, c’est bien sûr... YES ! Mais de quel album s’agit-il ?», s’exprimerait le béotien... Ce double est très élégant : le livret est bourré d’information relatées par BANKS et de coupures de journaux, tandis que les 2 CDs offre une musique encore plus passionnante (parce que «live», donc plus «vivante» !) que celle des 2 premiers albums. On regrette toutefois le format double-album : certains titres figurants plusieurs fois et chaque CD n’étant pas rempli à ras bord (43’ pour l’un, 51’ pour l’autre), un disque aurait amplement suffi... D’ailleurs depuis, SOMETHING’S COMING est sorti en collection(s) économique(s) : on ne compte plus le nombre d’éditions différentes (en double CD, comme en simple) ! Pour ceux qui considèrerait l’objet inutile par rapport au couplé YES - TIME AND A WORD, sachez que les morceaux gagnent en improvisation (c’est la force du live) et que 2 inédits figurent sur cette collection. Tout d’abord «Something’s coming», reprise d’un extrait de la comédie musicale WEST SIDE STORY à la sauce YES (c’est fou comme les groupes de l’époque aimaient BERNSTEIN : THE NICE reprenaient «America» et THE GODS «Maria» !!) et ensuite «For everyone», composition signée ANDERSON/SQUIRE (CHRIS chantant d’ailleurs une partie de la chanson). Un disque d’archives bien sympa que ce SOMETHING’S COMING, non ? (***)

Hubert ALLUSSON

THE YES ALBUM(1971)

Comme il existe de bonnes années pour le vin, il existe de bonnes années pour le rock. Assurément, 1971 est une bonne année. David BOWIE sort «Hunky Dory», T. REX «Electric Warrior», JETHRO TULL «Aqualung» et YES «THE YES ALBUM». Avec le recul, on peut considérer ce disque comme le premier grand album de YES (les deux premiers sont des tentatives plus ou moins convaincantes). On retrouve dans des morceaux comme «Yours is no disgrace» ou «Starship Trooper» une construction musicale

aérienne et labyrinthique qui deviendra peu à peu la marque de fabrique du groupe, les morceaux de l’album sont relativement longs (trois d’entre eux font pratiquement 10 minutes) et structurellement riches en breaks, solos et rebondissements ; et s’il n’a pas la cohérence artistique de «CLOSE TO THE EDGE» ou de «RELAYER», «THE YES ALBUM» a le mérite au moins de proposer un panel de chansons très agréables à l’écoute dans lesquelles la voix

de JON ANDERSON (si typique dans les aiguës) rivalise de beauté avec la guitare de STEVE HOWE et surtout l’orgue de TONY KAYE.

En effet, je dirais que ses 2 principaux atouts musicaux de l’album sont la guitare acoustique (voir le morceau nommé malheureusement «The clap» au lieu de «Clap») et l’orgue (le final de «Starship Trooper»), ce sont à la fois des instruments simples mais qui permettent également d’enrichir la texture musicale des morceaux composés, d’ailleurs, jamais plus YES ne retrouvera cette simplicité créative. L’année suivante, RICK WAKEMAN remplacera TONY KAYE et apportera en même temps cette grandiloquence si chère aux détracteurs du groupe, mais en 1971, nous ne sommes pas encore à l’époque de «TALES FROM TOPOGRAPHIC OCEANS» et «THE YES ALBUM» peut se prévaloir d’être tout implement un bon album de rock progressif tout à fait recommandable pour découvrir une des meilleures formations du genre avec KING CRIMSON et GENESIS. (***½)

Antoine CAVALIER

FRAGILE(1971)

Dynamisé par la notoriété naissante acquise avec YES ALBUM et le management efficace de BRIAN LANE, YES va poursuivre son incessante quête de la perfection, non sans poursuivre un certain «renouvellement des effectifs» déjà entrepris avec l’éviction de PETER BANKS et l’intégration de STEVE HOWE à la guitare pour l’album précedent. Cette fois, c’est TONY KAYE qui fait les frais de l’opération, peu après la tournée américaine de l’été 1971, dont le jeu de claviers est jugé trop restreint et peu ouvert aux nouvelles technologies (les synthétiseurs). JON ANDERSON et CHRIS SQUIRE, les 2 «patrons» du groupe sont impressionnés par un jeune claviériste du nom de RICK WAKEMAN lors d’un concert des STRAWBS. Ils décident promptement de lui proposer de rejoindre YES, ce que ce dernier accepte volontiers. La formation «classique» de YES est enfin au complet, et va durant les prochaines années accoucher de quelques uns des albums de rock progressif les plus novateurs de l’histoire.

Dès Septembre, le groupe au complet s’attelle à l’enregistrement du quatrième album, avec aux manettes l’ingénieur du son EDDIE OFFORD. Le disque paraît sous le nom de FRAGILE le 4 Janvier 1972 au Royaume-Uni. Comparativement à YES ALBUM, le groupe a considérablement enrichi sa palette sonore, grâce, bien entendu à l’apport conséquent de RICK WAKEMAN qui utilise une bien plus vaste gamme de claviers que son prédécesseur (Grand piano, Clavecin, orgue Hammond, Mellotron, piano électrique, Clavinet, Mini-Moog, Arp synthétiseur...). L’album débute sur le titre qui deviendra le rappel obligé de tous les concerts de YES durant plus de trente ans, le tumultueux «Roundabout», dont l’introduction fameuse combine cette sonorité spéciale obtenue par RICK WAKEMAN en effleurant les touches du piano à l’arrière de l’instrument, et la guitare cristalline de la guitare acoustique de STEVE HOWE. Une composition dont on admire encore aujourd’hui la fulgurante progression rythmique, la montée en puissance progressive et la dynamique prodigieuse... qui contraste à merveille avec le classicisme pompeux de «Cans and Brahms», un intermède pianistique proposé par RICK WAKEMAN et entièrement réalisé aux claviers.

Ce nouvel arrangement du 3ème mouvement de la 4ème symphonie de BRAHMS déconcerte il est vrai et en irritera plus d’un. Mais la composante WAKEMAN est désormais partie intégrante de YES, groupe qui se montrera souvent l’addition brillante de 5 individualités, parfois en conflit. La plage suivant, avec «We have heaven» n’est-elle pas une brillante démonstration du savoir-faire d’ANDERSON, avec l’exposition d’une série d’harmonies vocales savamment agencées, qui nous font volontiers tourner la tête ? Pas le temps de reprendre votre respiration, et vous voilà projeté au cœur de la tourmente, celle de l’ambitieux «South side of the Sky», au sein duquel les brisures électriques de STEVE HOWE insufflent énergie et tension, alternant avec les moments d’apaisements conférés par les interventions pianistiques de WAKEMAN. L’exaltation d’un classicisme

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qui met en valeur les harmonies vocales de ANDERSON, HOWE et SQUIRE. «Five per cent for nothing», courte œuvre de bravoure du batteur BIIL BRUFORD est certainement le morceau insignifiant de l’album, mais sa brièveté nous propulse sans coup férir au cœur du délicat «Long D i s t a n c e Runaround»,

servi par les prouesses de STEVE HOWE à la guitare, son merveilleux sens de la nuance, la fluidité et la volubilité de son jeu. La parfaite intelligence avec laquelle sont imbriquées parties de guitare et de piano témoignent de l’osmose musicale entre HOWE et WAKEMAN. Avec «The Fish» arrive le moment de bravoure de CHRIS SQUIRE, certainement l’œuvre soliste la plus originale et élaborée de l’album. Le solo de basse, tout en brisures et reliefs de SQUIRE est tout simplement monstrueux, et fera école. Lorsque vient le temps de «Mood for a day», pur exercice de guitare classique de STEVE HOWE, nous sommes confrontés à un maître de l’instrument. Les notes coulent, fluides et s’enchaînent miraculeusement, avec aisance et lyrisme. La fulgurante introduction de «Heart of the Sunrise» nous réveille bientôt de nos songes. Voici une composition dont l’aspect futuriste et les développements instrumentaux préfigurent les audaces musicales de «Close to the Edge». On assiste successivement à l’exposition de nappes de Mellotron, puis à de fulgurantes accélérations rythmiques au cours desquelles BRUFORD, SQUIRE et HOWE embrasent leurs instruments. Mais JON ANDERSON calme le jeu, apaise en offrant une partie chantée nouveau par la rythmique BRUFORD/SQUIRE qui s’emballe... avec FRAGILE, YES atteint des hauteurs qui le situe d’ores et déjà au niveau de la concurrence, et même si ses contemporains ne sont pas encore tous conscients de son potentiel, le groupe va partir incessamment à la conquête du monde. Ce sera chose faite avec l’avènement de CLOSE TO THE EDGE et la tournée YESSONGS. (****½)

Didier GONZALEZ

CLOSE TO THE EDGE(1972)

1972. Année fertile par excellence. D’un coté GENESIS qui, avec son FOXTROT et plus particulièrement le fameux «Supper’s Ready», nous gratifiait d’une des plus belles pages de l’histoire du progressif, de l’autre YES pour qui les pages immaculées du même livre vont enfin voir s’inscrire son nom en lettres d’or. Un passage à la postérité qui prit naissance le 2 septembre 1972 date de sortie officielle de l’album. Alors si la pochette de FOXTROT peut s’admirer et laisser notre imaginaire vagabonder, soyons honnête celle de CLOSE TO THE EDGE manque singulièrement de charme, voire d’élégance. Comme quoi il ne faut jamais se fier aux apparences. Le seul intérêt réside dans la présence, pour la première fois, du légendaire logo dessiné par ROGER DEAN. Fort heureusement

pour nous, ce dégradé de vert ne s’avèrera pas être l’arbre qui cache la forêt. Car si la pochette de ce disque n’est une franche réussite, on ne peut pas en dire autant du contenu. Le groupe est alors dans une de ses phases les plus créatives. Neuf mois seulement sépare ce nouvel opus du précédent FRAGILE (ce qui à l’époque constitue une véritable performance !). CLOSE TO THE EDGE ne comprend que trois titres. Mais ces mêmes trois titres resteront à tout jamais gravé dans les

mémoires. Bienvenue au Panthéon du progressif ! Et pourtant. Ce disque fut enfanté dans la douleur. Le groupe y laissa des «plumes».

BILL BRUFORD quittera le groupe pour rejoindre KING CRIMSON après l’enregistrement de l’album. BRUFORD est excédé par le perfectionnisme formel exigé, les frictions permanantes (déjà ?) et par le fait qu’ANDERSON

«déblatère» sans que personne ne puisse le comprendre (ce qui n’est pas fait pour arranger les choses !). Mais revenons en à la musique. Avec le morceau éponyme long de presque 19 minutes, YES composa une de ces plus belles pièces. 4 mouvements. D’ailleurs à ce propos, il faut savoir que le rôle d’EDDY OFFORD derrière les manettes n’est pas négligeable. EDDY seconde le groupe pour la mise en place des pièces du puzzle. Le morceau lyrique de sa voix haute, au timbre unique. Pendant que le Moog synthétiseur de WAKEMAN virevolte à une allure folle, propulsé à «Close to the edge» doit autant à YES qu’a EDDY OFFORD. Ce titre démarre sur un ton quasiment «free», expérimental, le gazouillement des oiseaux est vite rattrapé par la

guitare de STEVE HOWE qui laisse libre court à sa folie instinctive, épaulé par une section rythmique (BRUFORD-SQUIRE) qui bâtira une solide ossature sur laquelle les autres musiciens s’appuieront sans cesse tout au long de l’album. Puis viendra le chant majestueux et haut perché de JON ANDERSON pour nous ramener sur des bases plus conventionnelles (enfin façon de parler). Ce titre se conclura pompeusement sur les orgues de WAKEMAN, loin d’être en reste. Avec «Close to the edge» c’est tout le génie du groupe qui explose à la face du monde. Pour ce qui est des textes, évitons d’en appréhender le sens, nombreux sont ceux qui se sont cassé les dents pour tenter de décrypter les pensées profonde du doux rêveur qu’est ANDERSON. Le deuxième titre «And you and I» (10’) en majeur partie acoustique deviendra une pièce maîtresse du répertoire de YES. La mélodie est sublime et son impact direct. La troisième et dernière chanson «Siberian Khatru» fera exulter tous les fans de la première heure. Avec ce morceau (plus rock), la RICKENBAKER de CHRIS SQUIRE fera trembler les murs des salles de concert. Comment ne pas considérer CLOSE TO THE EDGE comme une œuvre maîtresse du rock progressif lorsque aujourd’hui encore ce disque est la démonstration de ce que peut être une musique intemporelle ? Elle y est sublimée par des musiciens en état de grâce. L’art côtoie la beauté en permanence. Un grand pas pour l’homme ! (*****)

Denis PERROT

YESSONGS(1973)

Le 4 Mai 1973, paraît le triple album YESSONGS, enregistré en public, lors de la dernière tournée américaine, qui a vu la passation des baguettes de BILL BRUFORD, parti tourner une nouvelle page d’histoire avec ROBERT FRIPP, et KING CRIMSON et ALAN WHITE, qui travailla

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précédemment avec JOHN LENNON. Ce disque témoigne de la fantastique vitalité de la musique de YES sur scène, les titres du YES ALBUM, en particulier prennent une nouvelle dimension. «Yours is no disgrace» est revisité, magnifié et orné d’un solo de guitare d’anthologie de STEVE HOWE - un monument pour l’éternité - tandis que l’interprétation de CHRIS SQUIRE à la basse dans «Long Distance Runaround - The Fish» est impressionnante. Ce triple-

album reprend presque intégralement les 3 disques studio précédents, en proposant en supplément un medley d’extraits du premier album solo de RICK WAKEMAN «THE SIX WIVES OF HENRY VIII». Ce triple-album sera véritablement fondateur du YES live act, le groupe ayant tendance à rejouer les compositions figurant sur ce triple-album durant 30 ans... et au delà ! (****)

Didier GONZALEZ

TALES FROMTOPOGRAPHIC OCEANS

(1973)

Entre Juin et Octobre 1973, YES enregistre aux MORGAN STUDIOS de Londres ce qui va devenir son aboutissement musical, son œuvre maîtresse : TALES FROM TOPOGRAPHIC OCEANS, paru en Novembre. Ce double album conceptuel se décompose en 4 fresques musicales majeures signées ANDERSON-HOWE et inspirées des mythiques légendes hindoues des Védas. L’album démarre avec «The Revealing Science of God». Dès les premières notes, les vocaux de JON ANDERSON semblent empreints de ferveur religieuse, tandis qu’imperceptiblement surviennent le Mellotron, puis la guitare électrique, avant que n’éclate le Moog synthétiseur de RICK WAKEMAN qui dessine un thème grandiose. La composition se poursuit sur un tempo médium, les voix entremêlées d’ANDERSON et SQUIRE véhiculant un magnifique lyrisme, tandis que la guitare de HOWE occupe le plus souvent un rôle central, emplissant l’espace sonore d’une structure harmonique des plus riches, utilisant pédale de volume, steel guitar et divers effets spéciaux. RICK WAKEMAN s’illustre par un accompagnement de claviers orchestraux, essentiellement figurés par le Mellotron, tandis qu’il illumine la composition par de fulgurantes interventions au piano au au Mini-Moog.

Imperceptiblement, le rythme s’accélère, l’instrumentation se fait plus dense, plus touffue, pour aboutir à une féérie de sons qui culminent une première fois en milieu de composition. Le tempo retrouve son rythme médium, avant que ne surgisse un fulgurant solo de Moog : RICK WAKEMAN nous transporte en quelques secondes dans un autre monde à la beauté futuriste. Après cette apothéose, la tension décroît. Les voix d’ANDERSON, HOWE et SQUIRE concluent les dernières mesures de ce morceau d’anthologie à capella.

«The Remembering - High the Memory» est encore une grande épopée occupant entièrement la seconde face de l’album. De fines notes de guitare électrique introduisent le morceau, se transformant en un leitmotiv lancinant, créant rapidement une ambiance irréelle, une atmosphère transparente évocatrice des moments les plus aériens de «Close to the Edge» ou de «And You and I». Les voix de ANDERSON et SQUIRE montent lentement, à l’unisson pour se fondre dans l’accompagnement musical des guitares de STEVE HOWE qui, passant d’une conception harmonique de

l’utilisation de la guitare s’illustre ensuite à la guitare acoustique rythmique. Le rythme s’accélère légèrement, tandis que les vocaux de JON ANDERSON et CHRIS SQUIRE se montrent d’une incroyable transparence et pureté. Imperceptiblement, l’ensemble des instrumentistes jouent à l’unisson, amplifiant chacun la puissance de leur intervention, concluant dans un océan d’hamonie.

«The Ancient - Giants under the sun», qui ouvre la troisième

face des TALES s’avère d’une toute autre inspiration ; cymbales, gong et percussions diverses introduisent la composition, avant que STEVE HOWE ne dévoile un jeu de guitare d’une surprenante dissonance, sans jamais perdre, toutefois cette fluidité légendaire qui le caractérise. Une digression guitaristique dont les dissonances évoquent le jeu de guitare de ROBERT FRIPP dans LARK’S TONGUE IN ASPIC de KING CRIMSON, paru quelques mois auparavant. Les interventions au Mellotron de WAKEMAN tempèrent un peu les stridences de la guitare, mais le foisonnement des percussions, les rythmes bancals et la tonalité dissonante d’ensemble dominent. Il semble que YES développe avec «The Ancient» les expériences musicales entreprises dans «Siberian Khatru». Un surprenant break de guitare classique introduit la partie conclusive de la composition, précédant la première intervention vocale de JON ANDERSON. C’est l’apaisement et le retour à une structure harmonique classique, RICK WAKEMAN n’offrant qu’un discret accompagnement au synthétiseur sur les broderies acoustique de HOWE et les vocaux de ANDERSON. «The Ancient» demeure la composition la plus novatrice, la plus futuriste de YES.

Avec «Ritual - Nous sommes du soleil», retour à l’inspiration musicale de «The Revealing Science of God», la pulsation rythmique se faisant ici plus pressante, plus présente, tandis que certains breaks et ciselures électriques de la guitare de STEVE HOWE font référence aux dissonances de «The Ancient», alors que la basse se SQUIRE atteint une dimension encore inédite. ALAN WHITE propose un solo de batterie à la teneur

avant-gardiste, quant à JON ANDERSON, il module mieux que jamais un timbre de voix d’une transparence diaphane. Oui, avec TALES FROM TOPOGRAPHIC OCEANS, YES nous offrait la quintessence de son art, la synthèse et l’aboutissement de ses expériences musicales. Une œuvre historique, fondamentale. (*****)

Didier GONZALEZ

RELAYER(1974)

Cet album marque le premier départ de RICK WAKEMAN, qui n’était pas satisfait de la tournure musicale que le groupe avait prise avec TALES FROM TOPOGRAPHIC OCEANS, alors que YES était pourtant en pleine gloire. Après une série d’albums mythique comme FRAGILE, CLOSE TO THE EDGE, TALES... en passant par le non moins mythique témoignage scénique YESSONGS, YES signait avec RELAYER l’un de ses derniers albums de grande envergure avant de subir un passage à vide, tout comme la plupart des groupes de cette génération, où il a bien failli y rester. Pour remplacer WAKEMAN le groupe fait appel au musicien suisse PATRICK MORAZ dont RELAYER sera d’ailleurs le seul album de YES auquel il participera. On aura aussi l’occasion de le retrouver sur des

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albums solo de certains membres du groupe et ultérieurement au sein des MOODY BLUES. Donc c’est une apparition très brève parmi YES mais celle-ci n’en sera pas moins remarquable. D’abord parce que PATRICK MORAZ est lui aussi un grand technicien, au même titre que WAKEMAN, et qui sait intégrer son style à la musique élaborée de YES. Ensuite parce qu’il participe, et beaucoup seront d’accord avec moi, à l’un des albums les plus singuliers et les plus réussis que YES ait jamais réalisé.

En effet, rarement YES ne s’était montré aussi fou, aussi expérimental et aussi osé, et tout particulièrement dans «The Gates Of Delirium», pièce majeure de 22 minutes, avec une première partie très touffue et très colorée où les instruments et le chant se mettent en place tranquillement et qui évolue entre symphonique, rock et folk avec des périodes plus ou moins tendues, le tout étant enrichi par de nouvelles sonorités surtout au niveau des claviers. Les quelques mouvements techniques exécutés çà et là nous donnent un avant goût de la partie suivante à laquelle personne ne pouvait franchement s’attendre. Effectivement après huit minutes que de ce que l’on pourrait considérer comme un échauffement, la cadence s’accélère subitement dans une séquence instrumentale complètement endiablée, avec parfois une agressivité étonnante de la part de YES, sur des rythmes décomposés et variant sans cesse si bien qu’il devient très difficile de battre la mesure. Dans cette partie conçue comme une musique de film à grand spectacle, toute la virtuosité des musiciens est sollicitée. Les guitares et claviers se passent le relais sur une rythmique des plus complexes. Tout cela est mis en place avec une précision déconcertante. Le folie atteint alors son paroxysme et fait place à un passage de transition vertigineux, plus sobre mais tout aussi intense et nous tenant en haleine jusqu’à l’arrivée de «Soon» sur lequel s’achève le morceau. Cette dernière partie figure incontestablement parmi ce que YES a composé de plus beau dans toute sa carrière. Le chant émouvant d’ANDERSON, la guitare on ne peut plus planante de STEVE HOWE, la basse mélodique de SQUIRE..., tout y est pour vous donner une bonne chair de poule.

On passe alors à «Soudchaser», plus court, mais aussi riche en évènements et aussi déjanté que le morceau précédent. Encore une fois YES mélange les styles et n’a pas peur des changements brutaux. Une intro très technique, assez proche du jazz rock cède la place au thème principal puis à un somptueux solo de guitare de HOWE façon flamenco comme il sait si bien le faire. Après une petite accalmie, on revient au thème principal qui sera tourné à presque toutes les sauces allant du blues rock à la funk ainsi que dans un style plus spatial. Les divers changements de vitesse nous donne encore une fois un aperçu de la précision des musiciens qui semblent bien s’amuser. Bref, «Soundchaser» est un morceau impressionnant et qui contient une bonne dose d’énergie. Avec le dernier morceau «To Be Over», YES fait dans un registre nettement moins tumultueux. Le démarrage se fait en douceur et dans un style très romantique appuyé par la voix tendre d’ANDERSON et par quelques sonorités agréables et dépaysantes. Mais il n’empêche que ce morceau contienne lui aussi son petit effet de surprise, une petite accélération qui en quelque sorte va venir nous «réveiller» pour nous plonger dans une ambiance plus épique et féerique. De nouveau la guitare de HOWE, qui dans cet album aura accompli une de ses plus belles performances, nous fait bien décoller tout en laissant la magie de MORAZ s’exprimer. C’est dans cet univers grandiose que s’achève RELAYER, résultat de l’inspiration et du travail titanesque d’un groupe pratiquement au sommet de sa forme. (****)

Stéphane BENON

GOING FOR THE ONE(1977)

En 1977, YES n’a plus rien à prouver à personne. Son statut de légende lui est d’ores et déjà acquis et nullement contesté. Pensez ! Dans les cinq années qui ont précédé, le groupe a sorti rien moins que CLOSE TO THE EDGE, TALES FROM TOPOGRAPHIC OCEANS et RELAYER, sans compter YESSONGS, un triple album live. Excusez du peu... YES se présente de plus ici sous sa forme canonique : ANDERSON/HOWE/SQUIRE/WAKEMAN/WHITE.

Pour moi, cet album revêt une importance toute particulière : c’est en effet avec GOING FOR THE ONE que, sur les conseils avisés d’un copain, j’ai

découvert YES (qu’il en soit 1000 fois remercié ici). À cette époque-là, j’étais plutôt branché AEROSMITH ou B.O.C avec un peu GENESIS tout de même, pour faire bonne mesure. Inutile de dire que la découverte de cet album fut l’une des plus grandes claques de ma vie. La pochette tout d’abord, ces immenses gratte-ciel zébrés de lignes géométriques colorées, avec ce pauvre type à poil là devant ! Tout un symbole... L’opposition entre l’humain et l’inhumain... En plus, elle se dépliait en 3 parties ; je n’en revenais pas, je n’avais jamais vu ça. Dès avant la 1ère note, j’étais impressionné. L’album commence de façon surprenante, s’agissant de YES : en effet, le titre qui donne son nom à l’album débute par un «One Two, One two three four», et vlan ! Un riff de guitare nous plonge dans une sorte de Rock’n’Roll endiablé à 100 lieues des stéréotypes du prog des seventies. Puis la voix «accrochée aux étoiles» de JON ANDERSON fait son entrée, en même temps que 1000 chamarrures de synthés et YES prend alors sa vitesse de croisière. Le morceau demeure alerte d’un bout à l’autre et déjà HOWE et WAKEMAN se tirent la bourre, chacun essayant pour notre plus grand plaisir de tirer la couverture à lui. 5’30 seulement et on reste déjà pantois !

Ensuite, on calme le jeu avec ce qui constitue à mon sens l’un des plus beaux morceaux de YES, la merveilleuse ballade «Turn of the Century». La mélodie d’ANDERSON est belle à pleurer, HOWE est souverain à la guitare acoustique, WAKEMAN, discret aux synthés dans un 1er temps, nous offre ensuite une délicate mais virtuose partie de piano avant que HOWE n’empoigne sa guitare électrique pour l’accompagner dans un long solo extatique. Le morceau se termine comme il avait commencé, avec HOWE seul à la guitare acoustique. ANDERSON au chant nous tire des larmes. 7’58 tout de même, mais chaque fois que j’écoute ce morceau, je voudrais qu’il dure éternellement.

Rude contraste avec «Parallels» signé CHRIS SQUIRE. L’intro fulgurante à l’orgue d’église vous cloue sur place et fait dresser les poils sur les avant-bras. Je n’avais entendu un orgue d’église sonner comme ça dans un disque de rock, et rarement depuis je n’ai retrouvé cette sensation. Il faut dire que cet orgue n’est pas samplé mais a réellement été enregistré dans une église (l’église St Martin de Vevey en Suisse, pas très loin de chez moi !) et retransmis au studio où enregistrait le groupe par câble téléphonique ! En tous cas, prouesse technologique ou non, le résultat est époustouflant ! La basse bien sûr est un vrai régal, SQUIRE ne s’est pas oublié au mixage ! Encore un grand morceau de YES. La 1ère face du vinyle s’achève, et on est déjà abasourdi devant tant de virtuosité, et allez disons-le, de génie.

Le 1er morceau de la 2ème face est une très jolie andersonerie, agréable et très mélodique bluette aux adorables synthés. Mais voici qu’arrive le grand, l’immense «Awaken», l’un des épiques les plus incontestables de YES. 15’38 de pur bonheur. ANDERSON/HOWE/SQUIRE/WAKEMAN/WHITE atteignent leurs sommets sur ce morceau. Piano acoustique virtuose en intro, puis ANDERSON, lointain, rêveur chante quelques vers sur fond de synthés planants et 11’30 après, c’est la plongée en apnée dans la musique du YES le plus inspiré. «Awaken» est scindé en deux parties distinctes. La 1ère est relativement rock, HOWE nous gratifiant de parties de guitares supersoniques et WAKEMAN n’étant pas en reste sur ses synthés avant de retrouver l’orgue d’église. La 2ème partie commence dans le calme absolu et recueilli de l’église St Martin ; WAKEMAN se réinstalle au poste de l’organiste titulaire et nous offre l’une des plus belles parties de claviers de toute la discographie de YES, accompagné de plus par des chœurs tout simplement majestueux (ceux de l’ARS LEATA de Lausanne).

Cette longue partie classisante se termine avec le retour progressif et merveilleusement enchaîné des instruments électriques, puis la voix d’ANDERSON, toujours doublée par ces chœurs grandioses, réapparaît et le morceau se dirige alors vers son épilogue dans un crescendo magnifique où WAKEMAN est une fois de plus le maître du monde. Ça y est, cette fois, le disque est terminé. Il faut redescendre sur Terre après 15’38 dans un autre monde. L’un des plus grands morceaux de

prog jamais écrit. Vous l’avez sans doute compris en lisant ces lignes, pour moi GOING FOR THE ONE est le meilleur album de YES, devant CLOSE TO THE EDGE et TALES... C’est même à mon sens l’un des plus grands albums de rock progressif de tous les temps, même si, évidemment pour certains en 1977 il représentait l’archétype du rock pompier et pompeux. Vous voyez de qui je veux parler ? (*****)

O. BOLARD- 8 -

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TORMATO(1978)

Beaucoup associent volontiers TORMATO et décadence du rock progressif. Cependant, ce n’est pas parce que ELP a sorti un piètre album cette année là (LOVE BEACH) et que GENESIS s’est séparé de son guitariste virtuose sur AND THEN THERE WERE THREE, qu’automatiquement YES est à mettre dans le même panier. Je l’affirme haut et fort : «TORMATO est un excellent album de YES et un jalon essentiel du rock progressif...». Ce n’est pas parce que YES a renoncé temporairement aux longues suites que TORMATO doit être automatiquement mauvais. En plus, YES ne fait pas si court que cela puisque «Future times/Rejoice» dure 6’46 et «On the silent wings of freedom», 7’45. Si ce n’est prog, je me pends ! Le premier titre est hyper dissonant, HOWE et WAKEMAN balançant des soli dans tous les coins, alors que le second est la gloire de CHRIS SQUIRE et d’ALAN WHITE. Je préfère d’ailleurs TORMATO à GOING FOR THE ONE : il me semble plus cohérent dans sa construction. Alors oui, il y a des «tubes»

dans ce disque... À commencer par «Don’t kill the whale», mais franchement, imaginez-vous à la radio ce morceau, avec les soli torturés et omniprésents de HOWE, les couinements dissonants des claviers suraigus de WAKEMAN ? Certainements pas... Vous êtes jaloux, parce que YES a enfin réussi à concentrer son propos progressif dans des morceaux de moins de 5’ (ce qu’il n’essayait ou n’arrivait pas à faire avant)... «Madrigal» est un tube certes... Mais quel «tube»

intègre du clavecin, de la guitare acoustique ? Et «Release, release» ? D’accord, c’est un peu rock’n’roll. Mais pas davantage que «Going for the one», et puis citez-moi un «rock’n’roll» qui change de rythme et de tonalité incessamment comme ce «Release, release» ? Pas la peine de chercher, seul GENTLE GIANT avait le culot de faire ça... Et la composition dissonante signée par les extra-terrestres WAKEMAN, ANDERSON et SQUIRE, «Arriving UFO» ? Ce n’est quand même pas de la soupe ? Non, il s’agit là d’un morceau bigrement inspiré... Et «Onward» ? Là on touche la grâce absolue avec cette petite perle d’émotion écrite par SQUIRE. La seule chanson énervante, c’est en définitive l’andersonerie «Circus of heaven», où le fils de JON (DAMION) parle à la fin. On peut trouver cela émouvant, remarquez... Alors je vous le dis : «mes amis, TORMATO est un album de génie qui ne mérite pas la réputation désastreuse qu’on lui a faite. Réhabilitons-le, que diable !». (****½)

Hubert ALLUSSON

DRAMA(1980)

Nous sommes en 1980 et la vague punk a fait beaucoup de ravages parmi les «vieux» groupes. La majeure partie du public est complètement désintéressée par le Prog dont les représentants se voient affublés de termes idiots du genre «groupes dinosaure», «stars prétentieuses et mégalos», etc... Bref, rien ne va plus. En ce qui concerne YES, deux membres ont déjà quitté le groupe : RICK WAKEMAN et JON ANDERSON. C’est dire si les choses allaient mal ! Cependant STEVE HOWE, CHRIS SQUIRE et ALAN WHITE tentent de faire durer l’aventure, et pour les remplacer, une étrange association va avoir lieu avec le groupe BUGGLES composé de TREVOR HORN (chant) et de GEOFF DOWNES (claviers) qui, par un curieux hasard, travaillent en même temps dans le studio voisin, et qui sont par dessus le marché des fans de YES. Oui, qui ne se souvient pas du célèbre «Video Killed The Radio Star» ?Pour en revenir à YES, c’est donc une lourde tâche qui incombe à GEOFF DOWNES mais surtout à TREVOR HORN car si le groupe a déjà prouvé qu’il était capable de s’en sortir haut la main sans WAKEMAN, il est beaucoup plus dur d’envisager YES sans ANDERSON et sa voix particulière. DOWNES est un musicien bien plus qu’honorable (les parcours de claviers qu’il effectue notamment sur «Machine Messiah» en disent long à son

sujet). Quant à HORN, il n’est pas un mauvais c h a n t e u r , loin de là, de plus son timbre de voix n’est pas trop écarté de celui d’ANDERSON. S e u l e m e n t , malgré toutes les qualités dont il dispose et tout le travail intense qu’il aura fourni, l ’ e n t e n d r e chanter dans YES revient un peu à goûter un vin de table après avoir connu les saveurs d’un grand cru. Pourtant la musique en elle-même est de très bonne qualité, souvent dynamique et entraînante, et encore une fois bien inspirée et originale. Ils ont su la rendre intéressante sans abuser de complexité. Même si certains passages peuvent laisser à désirer, d’autres sont là pour nous faire vibrer. Je prends pour exemple l’intro de SQUIRE dans «Does It Really Happen ?» (morceau assez mystique puisant un peu dans le disco en ce qui concerne le rythme), ainsi que son chorus dans la séquence finale que je ne me lasserai jamais d’écouter. Tout comme les sublimes phrasés de HOWE dans «Into The Lens» et «Tempus Fugit». La batterie de WHITE et les claviers de DOWNES ne sont pas non plus en reste. À vrai dire j’aurais pu citer tous les morceaux, chacun d’entre eux contient des plans saisissants où technique et feeling sont habilement conjugués. Mais j’attirerais quand même plus particulièrement sur «Machine Messiah» qui est je pense le morceau le plus complet et qui génère le plus de sensations. La musique oscille entre optimisme et ambiances tragiques voire sombre. La guitare de STEVE HOWE y est souvent agressive, et chacun des musiciens y réalise des prouesses.Malheureusement, tous ces efforts ne suffiront pas à maintenir le groupe en vie. De plus TREVOR HORN se sent très mal à l’aise dans le rôle du remplaçant d’ANDERSON et surtout lorsqu’il s’agit de reprendre les anciens titres en tournée. L’aventure YES s’arrêtera là momentanément. STEVE HOWE et GEOFF DOWNES s’en iront former ASIA avec CARL PALMER et JOHN WETTON. Quant à CHRIS SQUIRE et ALAN WHITE, ils se lanceront sur un projet musical en collaboration avec JIMMY PAGE de LED ZEPPELIN, qui finalement ne verra jamais le jour. Ceci est une autre histoire. (***)

Stéphane BENON

YESSHOWS(1980)

Alors que YES appartient désormais au passé, ATLANTIC met sur le marché, en Novembre 1980, à titre posthume ce nouveau double enregistrement public, compilé de manière artificielle, car provenant de diverses performances s’échelonnant entre Août 1976 (avec PATRICK MORAZ) et Octobre 1978 (avec RICK WAKEMAN). Même si ce double album n’a pas -loin s’en faut- eu le même retentissement que YESSONGS, il demeure totalement indispensable, car proposant un ensemble de compositions qu’on retrouvera rarement en public, ou bien plus tard, et dont aucune n’est commune avec YESSONGS. Ce sont TALES FROM TOPOGRAPHIC OCEANS, RELAYER et GOING FOR THE ONE qui sont ici représentés, avec en point d’orgue une version historique de «The Gates of Delirium» aux sonorités différentes de l’original studio, ainsi qu’une version dantesque de «Ritual». On notera aussi des versions intéressantes de «Parallels» et «Don’t Kill the Whale», morceau rarement repris en public depuis cette période. (****)

Didier GONZALEZ

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(Coffret 5 CD Rhino + 1 livre 100 pages)

11 ans après ATCO qui publiait en 1991 le coffret 4 CD YESYEARS, RHINO vient de frapper fort avec la parution en Août 2002 du coffret 5 CD : IN A WORD, destiné à récapituler la carrière musicale du groupe, depuis 1969, année de parution du 1er album : YES, jusqu’en 2001 (MAGNIFICATION). L’objet, présenté sous boîtier cartonné rigide, long format

se compose d’un livre, abondamment illustré, la plupart du temps en couleurs, retraçant les grandes étapes du parcours biographique de YES, notamment antérieurement à sa formation (ce qui présente un intérêt certain), ce que ne fait (malheureusement) pas la rétrospective discographique. La biographie présente un luxe de détails passionnants, complètant celle du livret YESYEARS. Le coffret justifierait presque son acquisition pour son livre ! Rassurez-vous, il y a aussi 5 CD, et c’est du consistant, car chacun dure entre 76 et 79’ ! On retrouve avec satisfaction «Dear Father» (inédit seulement disponible sur la compilation YESTERDAYS) sur le Disc 1 ; la version intégrale de «America» sur le Disc 2 (alors que la version du coffret YESYEARS était la version éditée) ; un inédit «Richard» figurant sur le Disc 3 ; trois inédits : «Tango», «Never Done Before» et «Crossfire» provenant des sessions avortées de 1979, qui aboutirent aux départs d’ANDERSON et WAKEMAN, et une version alternative de «Fist of Fire» figurant sur l’album ABWH, sur le Disc 4 ; un inédit, «Last Train» figurant sur le Disc 5. Cinq véritables inédits, et trois raretés, différant totalement des six inédits présentés sur YESYEARS. Le coffret est dans l’ensemble remarquablement équilibré entre les diverses périodes et les choix présentés sont

assez peu critiquables. Les oublis d’envergure, cependant : l’absence de «Awaken» ; l’omission également de «The Silent Wings of Freedom» et l’absence étonnante de «And You and I». Deuxième observation : aucun enregistrement live ne figure dans cette anthologie. Sans réclamer nécessairement du YESSONGS ou du YESSHOWS, il aurait été intéressant d’exhumer des enregistrements live inédits, à l’instar des choix qui avaient été opérés sur YESYEARS. Au rayon des satisfaction, la présence de «Mind Drive» que je considère comme l’une des meilleures compositions de YES, toutes périodes confondues...Au niveau son, celui-ci est tout à fait excellent, et on peut supposer que les enregistrements ont été remastérisés en 24 bits, même s’il n’en est curieusement nulle part fait mention. Pour terminer, je vous livre ici la liste intégrale des titres, en précisant qu’il s’agit ici des versions originales studio.

DISC 1 Every Litle Thing, Sweetness, Survival, Then, Sweet Dreams, Astral Traveller, Time and a word, Dear Father, Yours is no disgrace, Clap, Perpetual change, Starship Trooper, I’ve seen all good people

DISC 2 Roundabout, South Side of the sky, Heart of the sunrise, America, Close to the Edge, The Revealing Science of God

DISC 3 Siberian Khatru, Long Distance Runaround, The Gates of Delirium, To be over, Going for the One, Turn of the century, Wonderous stories, Don’t kill the whale, Release, Release, Arriving Ufo, Richard

DISC 4 Tango, Never done Before, Crossfire, Machine Messiah, Tempus Fugit, Owner of a lonely heart, It can happen, Leave it, Hold on, Rhythm of Love, Love will find a way, Holy Lamb, Brother of Mine, Fist of Fire, I would have waited forever

DISC 5 Lift me up, The Calling, I am waiting, Mind Drive, Open your Eyes, Universal Garden, Homeworld, The messenger, Last Train, In the Presence of.

Didier GONZALEZ

2002 - Highlands Magazine n° 19 : Critique «In A Word»

YESIN A WORD [1969- ]

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InterviewRICK WAKEMAN

Pour conclure la 1ère partie de ce dossier consacré à YES, il paraissait intéressant de l’assortir d’un entretien avec l’un de ses membres les plus prestigieux. Voici, à l’occasion de son grand retour dans le groupe les principaux extraits d’une Interview de RICK WAKEMAN réalisée le 14 Juillet 2002.

Chacun se souvient de l’éviction de RICK WAKEMAN de YES, en fin d’année 1997. Bien moins nombreux sont ceux qui en connaissent les péripéties exactes et les évènements succesifs qui l’on précédé...

Replongeons-nous un peu dans le passé récent. Vous veniez juste d’enregistrer KEYS TO ASCENSION. La formation du «Classic Yes» était à nouveau réunie, et une tournée était même prévue. Que s’est-il passé ?

RICK WAKEMAN : Et bien, il n’y avait aucune tournée de prévue. Voilà pourquoi les choses ont commencé à tourner mal. À ce moment-là, YES était managé par JOHN BREWER. Après que nous ayons réalisé KEYS TO ASCENSION, je suis rentré en Angleterre, et j’ai parlé au management car j’avais une tournée de prévue, et j’ai demandé le planning de YES. Ils m’ont répondu que la tournée du groupe aurait sûrement lieu un peu plus tard. Je leur ai dit qu’on venait de me proposer une tournée pour Juin/Juillet par l’agence de Londres, et ils m’ont répondu que ce serait bon. Je me suis donc engagé plus avant et ai réservé cette tournée. Je n’ai ensuite plus reçu aucune nouvelle d’aucun membre du groupe. Puis je suis revenu aux USA pour un gala de charité, dans lequel j’étais investi. Je m’apprêtais à donner 4 ou 5 galas dans des églises, avec des chœurs. Lors d’une séance de signature d’autographes, à Orange County, un fan s’approcha avec un billet de concert pour YES, disant : «Pouvez-vous signer ceci ? en attendant de vous revoir bientôt au Texas !». Je répondis : «Pardon ?» Et je regardais la date sur le billet, en me rendant compte que j’étais impliqué dans ma propre tournée à cette date précise. Et je lui répondis : «Ce n’est pas possible, je serai ailleurs»... Et ainsi, plusieurs autres spectateurs vinrent me voir, disant : «J’espère vous revoir bientôt». J’ai trouvé cette situation très étrange, car elle s’est reproduite. J’ai été aussi contacté par ALAN, qui m’a dit : «Nous avons obtenu une sorte de nouvel arrangement, et ils ont réservé une tournée». Je lui répondis que personne ne m’avais tenu au courant, et que j’avais maintenant ma propre tournée de prévue. ALAN me demenda si je ne pouvais pas l’annuler, et je lui répondis que maintenant, j’avais signé le contrat et que je serais assigné en justice si je ne tenais pas mes engagements.C’est ce qui s’est foncièrement passé. Je suis revenu en Angleterre, et j’ai réalisé ma tournée, tandis que YES réalisait la sienne. Sans entrer ici dans de longs détails, il est ensuite apparu que Left Bank (le manager américain actuel de YES, NDR) avait essayé de me contacter par le biais de l’ancien management, en Angleterre, et en avait été détourné par quelque histoire incroyable. Je ne savais rien de tout cela. C’est vraiment très triste, car je suis sûr que si Left Bank avait été capable d’entrer en contact avec moi, tout aurait été différent. Ceci aboutit à ce qu’à la fin de cette année-là, YES avait avancé dans une autre direction. Je n’eus plus de nouvelles du groupe, le JOHN BREWER’s management disparut entièrement de la scène, je n’ai pas pu le recontacter, et je suppose que par extension de cette situation, je me suis dit : «Bon, OK». Ainsi, j’ai poursuivi ma voie, et YES la sienne. C’était une sorte de situation étrange, crée par 3 parties, dont 2 connues, et l’autre inconnue. Car j’avais contacté le management à Londres, le seul

2002 - Highlands Magazine n° 19 : Entretien Rick Wakeman

2002 - Highlands Magazine n° 19 : Critique «Symphonic Live»

DVD

YESSYMPHONIC LIVE

La tournée YES SYMPHONIC LIVE (relatée

dans notre N°17) demeure à plus d’un titre un évènement. Les évictions successives de BILLY SHERWOOD et de IGOR KHOROSHEV en 2000 conduisirent les gardiens de la flamme à envisager une formation de YES qui substituerait un orchestre symphonique au rôle traditionnel du claviériste. Ainsi fut fait pour l’enregistrement du dernier album studio en date, MAGNIFICATION, paru en Octobre 2001. Mais cela ne suffisait pas, et pour faire bonne mesure, JON ANDERSON & Co prenaient promptement la route pour une tournée mondiale qui démarrait en Juillet 2001 aux USA, baptisée YESSYMPHONIC. Avec l’aide du claviériste TOM BRISLIN et d’un orchestre de chambre à dimension réduite, le EUROPEAN FESTIVAL ORCHESTRA dirigé par WILHELM KEITEL, tout de même fort performant, YES produisit un show d’une envergure inédite. Ce DVD présente le show enregistré à Amsterdam, durant 2H37 et c’est peu de dire que la réalisation technique est superbe ; l’image superbement filmée, avec de nombreux gros plans sur les membres du groupe et ceux de l’orchestre. On y voit même un JON ANDERSON et un CHRIS SQUIRE amaigris, et rajeunis par rapport à l’époque des KEYS TO ASCENSION tandis que notre ami STEVE HOWE accuse plus cette fois-ci le poids des ans. Les nouveaux arrangements orchestraux de «Close to the Edge» donnent un nouvel éclairage à la composition. Le track listing est de toute façon fabuleux : «Long Distance Runaround», «And You and I», «In the Presence Of», «Starship Trooper», «Magnification», «I’ve seen all good people», «Owner of a lonely heart», «Roundabout», «Don’t Go», «Steve Howe guitar solo». Les grandes pièces épiques, magnifiées par l’orchestre apparaissent ainsi sous un jour nouveau. «In the Presence Of» en possède la dimension, le souffle et on souhaite le voir figurer dorénavant au rang des futurs classiques de YES. Bien sûr, les tubes «Don’t Go» et «Owner of a lonely heart» font comme d’habitude un peu pâle figure, mais ils sont largement minoritaires dans une set-list dominée par les grandes suites ambitieuses. Voir jouer dans ces conditions «The Gates of Delirium» par exemple est tout à fait extraordinaire, cette composition possédant un potentiel assez unique de par sa complexité et ses variations. «And You and I» ou «Ritual» représentent des moments de grâce, d’extase difficilement surpassable tandis que le suprême «Roundabout» fait encore monter la tension d’un cran, pour un final endiablé. Oui, YES SYMPHONIC LIVE est un document définitif sur l’épopée yessienne. Historique. (*****)

Didier GONZALEZ

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que je connaissais, avant que je ne m’engage dans quoi que ce soit. Si celui-ci avait put tout clarifier, je ne me serai jamais engagé, si vous voyez ce que je veux dire. Mais à ce moment-là, il était trop tard. C’est vraiment étrange, car depuis l’époque d’ABWH, lorsque j’ai rejoint BILL, JON et STEVE, je ne les avais pas quitté, car à la fin d’ABWH, arriva l’époque du UNION YES tour. Puis à la fin de la tournée UNION, le management de YES de l’époque, le TONY DIMITRIADES’ décida que le groupe devrait continuer mais sans STEVE, ni moi-même à cause du fait que ce n’était pas nous qui avions les droits sur le nom du groupe, ou quelque choses de ce genre. C’était ridicule. Aussi, en ce qui concerne STEVE et moi-même, on nous avait toujours dit qu’il s’agissait des vues du management, ainsi que pour BILL...

Je fus ensuite de retour pour KEYS TO ASCENSION, puis juste à cause de circonstances bizarres et un ensemble de choses qui sont advenues, je me retrouvais pour la seconde fois dans une position que je n’avais pas choisie. Je ne suis jamais vraiment partie depuis que j’ai quitté YES en 1980, avec JON.

Vous avez juste pris du recul...

RICK WAKEMAN : D’une certaine façon, si toutes ces choses étranges ne s’étaient pas produites, je ne serais pas là, en train d’en disserter... Je pense que ce groupe est très fort. J’ai vraiment particulièrement apprécié les 10 jours qui viennent de s’écouler ; je veux dire que le groupe joue vraiment excellemment, et j’ai pu beaucoup apprécier de jouer avec eux, également aussi à cause de la technologie. Au fur et à mesure que les années passent, le claviériste est de mieux en mieux équipé pour jouer des compositions de YES, à cause de leur nature supérieure. Le point positif concernant le passé, c’est le fait que jouer avec d’autres gens, et de réaliser d’autres travaux vous permet de gagner de nouvelles expériences, ce qui fait que vous pouvez amener quelque chose de frais.Vous pourriez tout aussi bien regarder le côté sombre : «Oh, cela a mal tourné, cela n’aurait jamais dû arriver. C’est arrivé. Cela n’aurait jamais dû être dit, ni fait». Vous pouvez suivre cette voie, mais elle ne mène absolument nulle part. Parce que vous ne pouvez pas retourner en arrière, et changer aucune des mauvaises décisions prises, vous ne pouvez absolument rien changer.

Par exemple, lorsque je repense aux KEYS TO ASCENSION, c’était une grande idée. Mais, quand YES enregistre, vous devez avoir une vision prospective de ce que deviendra la création. Rétrospectivement, je pense que c’était une pierre angulaire, et j’ai toujours considéré de même l’album d’ABWH, mais je pense que les KEYS auraient pu le devenir encore davantage, si nous avions eu un management performant, et si nous avions pu enregistrer dans un studio qui ne nous aurait pas imposé de limitations...

... À la fin de la tournée UNION, le management pensait que YES avait beaucoup gagné en reconnaissance du public, et qu’ils avaient reconquis une bonne base de fans. Il pensait même «Qu’importe qui réalise l’album, qu’importe qui joue dessus, tout le monde l’achètera maintenant». Mais ceci n’est pas exact. Ce n’est pas comme cela que les choses fonctionnent.

Mais ne pensez-vous pas que c’était directement lié au succès commercial de 90125, qui a pu faire dire : remettons en selle cette version de YES pour qu’ils sortent un album, peut-être qu’on aura un nouveau 90125».

RICK WAKEMAN : Oui, c’est vrai 90125 fut un album très

important, il sauva le groupe. La tournée d’ABWH fut une grande tournée, et quand les 2 unités ont fusionné pour former la tournée UNION, probablement les éléments les plus puissants provenaient d’ABWH. Aussi, en substance, supprimer cette dernière unité au final, était une décision étrange. Évidemment, je pense qu’il n’était probablement pas possible d’enregistrer un album à 8, mais l’album UNION fut désastreux. Je ne le classe même pas parmi les albums de YES, parce que la seule personne, véritablement qui ne jouait pas dessus était BILL CLINTON et son saxophone (sic!). Le producteur avait invité tous ses amis à jouer sur l’album. Une plaisanterie ! Le problème est que j’ai joué des tas de thèmes qui étaient dans une base de données que nous utilisions à cette époque, puis nous nous sommes mis à répéter pour la tournée et nous avons commis l’erreur fatale de laisser les gens dans le studio, disant : «Je vais changer cela, je vais changer tous ces sons». Nous avons ensuite écouté, et STEVE disait : «Je n’ai pas joué cela». J’ai écouté le son global de l’album, me disant : où est passé cette pièce que jouait STEVE ? Et qu’est-ce que cela ? C’était une absolue plaisanterie, un gag. L’affaire fut sauvée par la tournée, qui fut une tournée fantastique et intéressante. Je ne sais pas quelle réponse studio on aurait pu après, lui apporter, mais la solution que le management a retenu était mauvaise.

... Vous avez mentionné tout à l’heure que 90125 était un moment capital de l’histoire de YES. Il est clair que si cet album n’avait pas vu le jour, il y aurait une bonne chance que YES ne soit pas là, aujourd’hui. Mais bizarrement, JON s’est senti frustré, et a formé ABWH. J’affirme qu’ABWH est un moment très important de l’histoire de YES.

Cela prouve un brin de continuité...

RICK WAKEMAN : Oui. J’ai beaucoup aimé 90125. J’aurais voulu jouer dessus, c’était un grand album. Un autre album dont je ne suis pas particulièrement friand, mais qui fut une autre pierre angulaire de l’histoire de YES a été DRAMA car si CHRIS n’avait pas été le gardien de la flamme à ce moment très particulier, il n’y aurait pas eu un YES pour s’incarner dans la version 90125. J’ai lu beaucoup de livres sur YES, mais il n’y en a pas un qui comprend vraiment quelques uns des éléments catalyseurs qui ont gardés YES vivant. L’un des éléments qui a toujours été difficile pour YES, est que le groupe est tellement tourné vers la création musicale, car son existence est seulement dédiée à la création et à la production musicale qu’il a été dans le passé très vulnérable à l’exploitation musicale du business, et qu’en fin de compte le groupe en a souffert. Il y a un vieil adage datant de quelques années, que pronoça un jour un idiot absolu : «Vous réalisez votre meilleure musique quand vous êtes brisé, et que vous n’êtes plus rien. C’est de cette façon que toutes les grandes chansons ont vu le jour». Quel tissu d’imbécilité que tout cela ! Vous créez votre meilleure musique quand vous n’avez pas à vous soucier de ce qui arrive avec le groupe, de ce qui se passe avec votre équipement,

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de ce qui se passe avec la musique, de ce qui arrive avec votre famille, de ce qu’il advient de votre vie, de ce qui se passe avec la banque. Voici comme cela peut vraiment bien fonctionner. «Je veux créer de la musique aujourd’hui» quand vous n’avez rien qui vous obscurcit la vue. Vous pouvez vous concentrer et entrer dans le monde de la fantaisie, c’est à ce moment que vous pouvez créer la meilleure musique, et YES n’a pas toujours eu les meilleures opportunités pour le réaliser. Mais le point intéressant, est que quand YES est parvenu à créer son matériel le plus abouti, il était dans cette position, ou proche, et je pense qu’il est important que YES se retrouve à nouveau dans cette position pour y parvenir. Il est maintenant prouvé que le rock’n’roll n’a rien à voir avec l’âge, c’est juste le résultat de ce que vous produisez.

Une question maintenant, concernant MAGNIFICATION et la rumeur disant qu’on vous aurait demandé d’orchestrer l’album...

RICK WAKEMAN : Non, on ne me l’a jamais demandé. J’aurais adoré cela. Je connaissais le projet MAGNIFICATION, et je pensais que c’était un grand projet, une nouvelle et logique étape de sa progression musicale, et j’ai toujours senti que j’étais la meilleure personne qualifiée pour réaliser les orchestrations de YES, parce que je sais comment fonctionne chaque musicien, et les spécificité du travail de STEVE, de même pour ALAN ou CHRIS, et ce ne peut pas être la même chose pour un orchestrateur venant de l’extérieur, qui observe simplement les notes jouées, mais sans connaître comment les gars pensent et comment ils travaillent. J’ai acheté l’album à sa sortie, et j’ai beaucoup aimé un grand nombre de chansons, parce qu’il y avait quelques très bonnes mélodies et quelques très bons arrangements. On peut le voir de 2 manières, je ne veux pas dire que les orchestrations réalisées ne sont pas réussies - j’aurais simplement orchestré beaucoup plus, bien davantage, plutôt que d’inclure des arrangements autour des chansons. J’aurais personnellement utilisé l’orchestre en imaginant que ses membres étaient partie intégrante du groupe. Je n’ai pas de critique à émettre sur ce qui a été réalisé, si ce n’est que j’aurais tellement aimé le faire moi-même ! Il y a de très bon matériel sur MAGNIFICATION, et je suppose que par extension... par exemple lorsque je repense au passé, lorsque je suis parti juste après TOPOGRAPHIC OCEANS et que j’ai entendu RELAYER, cela m’a vraiment plus qu’ils réalisent RELAYER et d’entendre l’orientation qu’ils avaient prise, car en écoutant cet album, je ne vois pas comment j’aurais pu y contribuer, parce que musicalement ce n’est pas du tout ma longueur d’onde. Cela me confortait dans la décision que j’avais prise, car je n’aurais pu en aucune façon contribuer à RELAYER. Si toutefois l’album suivant TOPOGRAPHIC OCEANS avait été GOING FOR THE ONE, j’en aurais été extrêmement ennuyé/chagriné, car je peux comprendre cette direction, vous voyez ce que je veux dire ?

Mais pour MAGNIFICATION, je comprenais exactement ce que le groupe avait réalisé, où ils allaient, mais sur certaines chansons, qu’est-ce que j’aurais pu réaliser ! Je ne sais pas comment l’album a été conçu, je suspecte que les chansons ont été écrites et enregistrées, et que les orchestrations ont été réalisées ensuite. En écoutant les chansons, j’aurais certainement recommandé certains changements, rallongeant certains passages, raccourcissant certaines autres sections afin de donner plus de relief, particulièrement avec certaines figures que STEVE joue avec l’orchestre. Mais vous pouvez trouver dix orchestrateurs différents,

tous exposant des arguments différents sur le même sujet. Je suppose que pour moi cet album est un sujet de frustration, un moment où YES a pu travailler avec un orchestre, et je n’étais pas là, et ce n’était pas faute !

Ne pensez-vous pas, maintenant que vous allez jouer quelques uns des morceaux de MAGNIFICATION lors de la prochaine tournée que vous pourrez réorchestrer à votre manière, ou pensez-vous que vous devrez vous conformer au plus près aux arrangements écrits ?

RICK WAKEMAN : Et bien, comme aucune partie de clavier n’était écrite, j’ai pris la partition orchestrale, et j’ai réalisé une partie de clavier selon cette partition, et autant que possible, j’ai basé ce que j’ai fait là-dessus, c’est mon point de départ. Au fur et à mesure que la tournée va prendre son essor et que je connaîtrai mieux la musique - car il y a une grande différence entre connaître la musique en l’entendant et la connaître en la jouant - je serai capable d’ajouter par ci, par là ma touche personnelle. Pour le moment, j’ai réalisé une partition de clavier vraiment complexe, basée sur l’orchestration, qui est un cauchemar à déchiffrer, mais c’est la seule possibilité pour garder l’essence de la musique.

Spécialement sur des titres comme «Magnification» et «Deeper».

Maintenant, pouvez-vous nous dire comment, et dans quelles circonstances votre retour dans YES s’est-il produit ?

RICK WAKEMAN : en 1999, nous avions un programme à la TV anglaise intitulé «THIS IS YOUR LIFE» où la programmation vous prend par surprise, en amenant des invités de dernière minute par exemple. Un soir, je faisais partie du spectacle, puis YES apparut par satellite depuis Los Angeles, ce qui était génial ! JON me souhaita une «adorable» journée et me félicita, ALAN fit de même, FISHY fit la même chose, ainsi que STEVE, qui ajouta, également : «Tu sais que nous avons réalisé de la grande musique dans le passé. Ce serait vraiment super si nous pouvions en faire de même dans le futur». Et je répliquais : «Oh oui cela le serait vraiment». Je me remémorais cela après, et presque sans y penser, je me disais : «Dieu, j’aimerais vraiment». Vous commencez à penser à tout cela en vous disant, «bon, voyons si je

recevrai un appel téléphonique». Mais rien n’arriva jamais à la suite de cette soirée, mais cela resta imprégné dans mon esprit. Vraiment. Puis deux autres situations survinrent. YES allait partir en tournée promotionnelle pour THE LADDER, et il y avait un problème potentiel avec IGOR, qui ne pouvait pas l’assumer, et à nouveau ALAN m’appela, parce qu’il était le premier à arriver en Angleterre, et il dit «Nous avons un problème, pourrais-tu nous rejoindre et assurer un ou deux shows ?». Je l’aurais vraiment fait, mais j’étais sous les caméras, participant à une comédie pour une série télévisée, aussi je n’ai pas pu y aller. J’ai branché mon fils ADAM, qui est allé jouer «Starship Trooper» avec eux, puis IGOR est finalement revenu, et ce fut la fin de ce petit intermède.

Puis l’an dernier, j’ai été contacté par EAGLE VISION m’informant que YES allait réaliser une vidéo, avec la tournée orchestrale MAGNIFICATION, et le film devait être réalisé à Amsterdam. Ils me proposaient de venir en tant qu’invité et de jouer avec eux. Bien sûr, ma réponse initiale a été : «Oui, j’aimerais beaucoup réaliser cela». Et je leur demandais la date. Ils me donnèrent la date, et à ce moment précis, je me trouvais au Costa Rica, en

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tournée. Je leur répondis qu’il n’y avait pas moyen. N’importe quel autre jour m’aurait convenu, mais pour des raisons contractuelles, Amsterdam était la seule date possible pour le film et une nouvelle fois, tout tourna court...

Puis j’ai été impliqué avec une compagnie CLASSIC PICTURES, pour la réalisation d’un DVD et dont les studios en Angleterre la place de fait comme la compagnie leader dans le monde, pour la fabrication des DVD, pour le moment. Ils sont excellents, et le big boss, ROBERT GAROFALO arriva de Californie pour arranger avec ALAN KOVAK de Left Bank un film en s’informant de ce que serait la prochaine tournée de YES, cela ne me concernait en rien. Pourtant ROBERT me téléphona, en me disant qu’il aimerait me parler. J’acceptais. Au cours de l’entretien, il me demanda si je pourrais un jour envisager mon retour dans YES.

Je répondis que oui, j’aimerais vraiment, spécialement en ce moment, car le groupe joue excellemment, et je pense que ce serait certainement un moyen pour que le groupe franchisse un nouveau palier, ce qu’il n’a finalement jamais cessé de faire. Mais je lui répondis que c’était incertain, car je ne savais pas ce que les autres voulaient faire ; et il me répondit : «Je pense qu’ils sont en train de réfléchir, le management aussi cherche une solution, et votre nom est revenu plusieurs fois, et je suppose qu’on m’a demandé de prendre la température». Je répondis que oui, de ma part les choses étaient possibles, expliquant les raisons des contre temps précédents... Il donna un simple coup de téléphone, et voici à la base comment les évènements se sont enchaînés... Puis j’ai réfléchis très méthodiquement à tout cela. Je ne suis pas de ceux qui reviennent sur le passé. Je suis toujours pour aller de l’avant, mais cette fois je couchais sur le papier les raisons et les situations qui avaient fait que les choses avaient tourné court dans le passé, et ce qui aurait du être fait. Et je me suis dit que je voudrais être sûr que cette mauvaise communication ne se reproduise, ce théâtre d’ombres, parce que si on n’y fait pas très attention ce genre de situation peut toujours se reproduire, encore et encore. Et c’est ce que je voulais surtout éviter. Je voulais vraiment connaître les plans du management, et considérer toutes choses, parce que j’avais un planning d’organisé jusqu’en 2003, et que cela me demandait de mettre beaucoup de choses en attente. J’avais toute une série d’enregistrements de prévus, et tout un tas de projets dans lesquels j’étais impliqué. Je m’étais impliqué dans un album avec DAVE COUSINS des STRAWBS, je réalisais un album avec le ENGLISH CHANNEL CHOIR, et j’avais mon propre album de progressive-rock en chantier avec l’ENGLISH ROCK ENSEMBLE, et tous ces projets auraient du se réaliser au cours des prochains 18 mois, nous avions du temps de studio de réservé pour tous ces projets, et je me suis dit que même s’ils devaient être réalisés en petits morceaux, dans des courtes périodes, je les mènerai tous à leur terme. Je dois tout mener de front, ou nous nous arrangerons pour repousser ou mettre en attente, ou annuler. Les seuls deux projets que j’étais incapable de décaler étaient un gala de charité dans lequel j’étais investi, avec mes enfants handicapés, ainsi que le mariage de mon fils OLIVER, le 6 Septembre. Aussi, avec précautions, je suis revenu vers le management de YES et je leur ai dit : «OK». Je leur ai donné initialement la liste de tout ce que j’avais à mener à bien, en leur disant, que je n’allais pas seulement essayer d’en déplacer quelques uns, mais de déplacer l’ensemble. Tous les autres promoteurs, et les gens avec lesquels je traite pour mon groupe ont été fair-play, il ne m’ont créé aucun problème, me demandant seulement quand les projets initiaux pourraient se réaliser.

Au niveau des enregistrements, ça été fou ! Nous avons brûlé la lampe de minuit dans le studio pour que tout soit prêt à temps, pour que tous ceux qui en avaient besoin puissent être servis en avance, aussi tout est terminé. Et à la base, la situation que j’avais négociée avec Left Bank et ALAN KOVAK était intéressante parce qu’il a accepté de se replonger dans le passé pour découvrir les erreurs grossières commises à l’époque de KEYS TO ASCENSION et qu’elles ne puissent pas se renouveler. Je lui réaffirmais que je

ne m’avancerai pas à réserver quoi que ce soit jusqu’à ce qu’il me dise ce qu’il y avait dans le planning ici et là. En lui précisant par exemple que s’il y avait quelque chose que je pouvais faire de mon côté, parce que j’aime travailler, s’il y a un mois de répit ou 6, je suis le même que JON, JON aime aller et venir, STEVE aime partir et réaliser ses projets, je lui ai dit que j’aimerais mettre ce temps à profit. J’aime créer et jouer de la musique, je veux jouer avec des musiciens. Mais la priorité est la situation de YES, aussi si le management me dit : «Nous avons 5 semaines ici», OK je veux le faire, et encore ceci. Je veux tout réaliser. Je lui ai dit que je serai toujours heureux de venir à son bureau s’il n’y avait à 100% aucune confusion au sujet de qui fait quoi, où, quand et comment. Il y a déjà un plan de travail de 3 ans sur la table, qui j’espère évoluera dans un plan de 5 ans puis continuera dans cette lignée ; c’est vraiment le première fois que je vois une stratégie à long terme de la part d’un management.

OK, je sais que les choses changeront ; nous allons nous produire en Asie du Sud Est, partout où nous pourrons aller, en même temps qu’à côté nous pourrons enregistrer. J’apprécie que les choses puissent bouger pour un mois, une semaine là. Mais vous devez partir de quelque part, et le fait qu’il y ait vraiment une stratégie à long terme est une grande chose, cela veut dire que vous pouvez avoir un œil sur l’objectif, et même si cela bouge ici et que des dates soient inversées, à l’origine devait démarrer en Europe. Cette année aurait due être à la base Européenne, puis nous devions venir en Amérique plus tard dans l’année. Maintenant, cela a changé. L’Europe sera visitée l’année prochaine. Ce n’est pas un problème du tout. Il est plus facile de démarrer avec un feuille de papier comportant beaucoup de repères que de démarrer avec une feuille blanche.

J’ai personnellement une vue très précise de comment je perçois YES en temps que fan ; je l’ai constamment dit quand j’étais dans le groupe, et quand je n’y étais pas. «J’aime davantage ceci que je n’aime cela», «j’aime davantage cette formation que celle-là». Et quand pour quelque merveilleuse raison, ce line-up particulier du groupe, cette addition de 5 personnes représente bien plus que la somme de 5 à l’arrivée. Ces 5 particuliers, si vous les additionnez, cela vous donne à la fin 8 ou 9, il y a très peu de groupes pour qui cela arrive si je me réfère au passé. Les BEATLES sont un exemple classique de cela. Vous mettez ensemble ces 4 en particulier, et la somme au total vous donne à nouveau 8, 8 ou 9, il y a une sorte de télépathie remarquable qui fonctionne pour cette formation particulière du groupe, qui est vraiment phénoménale, et je pense que beaucoup de fans de YES ont probablement reconnu cela avant que cela ne se réalise, d’une manière étrange. Je ne sais pas, peut-être pourrais-je me tromper...

(à suivre)

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DVD

RICK WAKEMANEn l’espace d’à peine 3 mois, rien de moins que 4 DVD (dont 3 sont livrés avec CD) et 3 CD (dont 2 doubles) ! Mais que se passe-t-il chez RICK WAKEMAN ? À priori rien de spécial, sauf que certains éditeurs viennent de se rendre compte qu’il y avait un vide au niveau des images concernant l’ex claviériste de YES et, coïncidence, ces 4 DVD sortent quasiment en même temps ! Quant aux 3 CD originaux, seul «OUT OF THE BLUE» est un nouvel album («TALES...» n’est qu’une compilation supplémentaire et «THE PIANO TOUR LIVE» une réédition de l’album paru en 1997 mais introuvable depuis).

JOURNEY TO THE CENTRE OF THE EARTHLIVE IN MELBOURNE 1975 DVD

(1h35, Classic Rock Legends, UK, 2001)JOURNEY TO THE CENTRE OF THE EARTH

LIVE IN MELBOURNE 1975 CD(69’01, Classic Rock Legends, UK, 2001)

Le premier DVD est un concert donné le 4 Février 1975 en Australie lorsque RICK avait quitté YES (pour la première fois) suite au succès rencontré par son second album solo. Les musiciens qui l’accompagnent sur scène sont les mêmes qui avaient enregistré l’album studio. Seul l’orchestre symphonique est différent puisque, compte tenu des frais forcément énormes de déplacement du London Symphonique Orchestra, il a fait appel au Melbourne Philarmonic Orchestra. RICK, très longs cheveux bonds et très longue cape blanche volant à tous les vents, commence le concert par un extrait des «SIX WIVE OF HENRY VIII» «Catherine Parr». Il est entouré de tous les côtés

par des claviers et c’est amusant de le voir jouer de l’un, tout en préparant les sons qu’il souhaite sur un autre (les samples et autres effets enregitrés sur les synthés ne viendront que bien plus tard !). Il faut attendre le 2ème morceau «Guinevere» pour enfin voir les autres musiciens. Bien sûr, c’est filmé comme on filmait il y a 27 ans, c’est à dire pratiquement intégralement en plans fixes (les caméras étant très lourdes et peu maniables car sur pied, ne permettaient pas les mouvements rapides habituels aujourd’hui) avec parfois quelques effets de zoom et de travelling.Après une courte coupure avec le logo de l’album (sans doute pour faire passer quelques pubs pendant la retransmission télévisuelle du concert), on a droit à l’intégralité de «Journey to the centre of the earth». Je ne vais pas vous parler de la musique de ce concept album basé sur le roman de JULES VERNE que tout le monde connaît, mais je préfère vous faire part d’une de mes surprises en voyant ces images : certes, on savait RICK extrêmement habile de ses doigts mais saviez-vous que ses solos étaient faits simultanément sur 2 mini-moog posés côte à côte (donc un solo effectué de la main gauche et l’autre de la main droite en même temps, car la polyphonie n’existait pas encore à l’époque) ? À nouveau le logo puis on repart pour deux extraits des six femmes («Catherine Howard» et «Anne Boleyn») dans lesquels se glisse un court aperçu de son futur album «Merlin». Enfin le concert s’achève par une rapide reprise de «The forest». Évidemment, il n’y a aucun bonus sur ce DVD si ce n’est le CD «offert» qui n’est que le même concert sous forme audio avec les titres dans un ordre différent. Le son n’est qu’un simple 2.0 mais sans doute remastérisé car de bonne qualité. Ce DVD est donc à conseiller à tous ceux qui aimaient RICK WAKEMAN en 1975 ou à tous ceux qui souhaitent découvrir les débuts d’un génie des claviers.

CLASSIC ROCK LEGENDS DVD(48’18, Classic Rock Legends, UK, 2001)

Faisons un saut dans la machine à explorer le temps, et retrouvons RICK en 1990 pour ce 2ème DVD édité dans un label spécialisé dans la réédition en DVD de concerts déjà parus sous d’autres formats et labels. Seulement 5 titres composent le menu de DVD pour un peu moins d’une heure. «Catherine Parr» ouvre le bal avec un RICK, cheveux blond mi-long, barbe

fine, blouson court, toujours aussi impérial devant ses (seulement !) 9 claviers. Seuls un batteur (TONY FERNANDEZ) et un bassiste (DAVID PATON) l’accompagnent. J’ai compté pas moins de 8 caméras haute technologie pour fimer RICK et ses musiciens sous toutes les coutures ! Évidemment les images sont somptueuses.

Le son n’est pas en reste non plus ; il n’y a aucune indication quant à sa qualité mais je suppose très fort un bon vieux 2.0 remastérisé. Le deuxième titres tombe fort à propos puisqu’il est extrat de l’album assez méconnu «Time machine» et c’est le vieux complice ASHLEY HOLT (le même que pour le DVD «Journey...» mais sans son frère de chant GARY PICKFORD HOPKINS) qui chante «Elizabeth Rock». «Make me a woman» et sa fantastique ligne de basse fretless suit. Si physiquement ASHLEY s’est beaucoup empâté et n’a pas vraiment une ligne de vêtement très rock, sa voix a encore gagné en émotion et en puissance. Sa tessiture très étendue, son coffre m’impressionne toujours autant. Puis apparaît le fantôme magnifique d’«Anne Boleyn» et voir les doigts de RICK se promener aussi facilement sur tous ces claviers nous font, à nous aussi, perdre la tête ! TONY en profite pour nous asséner un solo de batterie derrière les oreilles rejoint par ASHLEY aux toms électroniques (un peu dans l’esprit du solo de batterie du couple ALAN WHITE/BILL BRUFORD lors de la tournée «Union» de YES). Enfin c’est le dernier titre (déjà !) et c’est encore «Journey...» mais en version courte (en plus !) d’à peine un ¼ d’heure. Aucun bonus, aucun CD en cadeau mais seulement une présentation (rapide) des autres DVD disponibles chez Classic Rock Legends. En résumé : excellentes images, son quasi parfait, interprétation majestueuse, seule la durée du DVD est décevante mais son achat est néanmoins hautement recommandé.

TALES OF FUTURE AND PAST(2CD 70’18/71’55, Purple Pyramid, UK, 2001)

Que dire de pas trop méchant sur cette énième compilation ? Le packaging (euh, pardon Mr Toubon), l’emballage est superbe : ce double digipack (euh, excusez-moi encore Mr Toubon, mais quelle est la traduction française ? Ce double coffret cartonné ? Ce paquet digital ? Ah bon vous ne savez pas non plus ?! Bon alors je garde digipack !) est magnifiquement illustré par un dessin typique de ROGER DEAN (qui n’est pas crédité !?) et la pochette s’ouvre en quatre battants. Bon après le contenant, le contenu, et c’est là où le bât blesse : quel est l’intérêt musical de cette chose ? 5 albums sont compilés («CLASSIC TRACKS», «FIELDS OF GREEN», «ALMOST LIVE IN EUROPE», «WHITE ROCK II», «THE OFFICIAL BOOTLEG») et 3 parmi ces 5 comportaient déjà des versions soit réengistrées soit live ! C’est donc en quelque sorte une compile de compiles ! Et le pire c’est qu’on a encore droit au «Voyage au centre de la terre» au cours duquel on croise toujours différentes «Catherine» et autre «Jane Seymour», «Merlin», «Arthur» et «Lancelot» dansant le «Rock Elizabethan» sur un fond de «Paint it black» mêlé aux reprises de YES «Starship trooper/Wurm» ! Je veux bien croire que RICK WAKEMAN ne touche malheureusement aucun droit sur ses disques sortis avant 1995 mais nous refourguer toujours les mêmes titres sous différentes sauces, je frise l’écœurement ! Album à réserver soit aux fans les plus ultra de RW soit à ceux qui n’ont aucun de ces 5 albums. Voilà, ce n’est pas une critique trop méchante mais qui aime bien châtie bien.

THE PIANO TOUR LIVE(2CD 46’35/52’25, Hope Records, UK, 2001)

LIVE IN CONCERT 2000(DVD, 92’, Warner Vision, UK, 2001)

LIVE IN CONCERT 2000(CD, 73’36, Warner Vision, UK, 2001)

2002 - Highlands Magazine n° 19 : Critiques CD/DVD de Rick Wakeman

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Après les somptueux «KEYS TO ASCENSION», RICK eu une période mystique (1996). Une série de disques «semi-religieux» («THE NEW GOSPELS», «THE WORD AND MUSIC», «ORISONS», «CAN YOU HEAR ME ?») virent le jour et dans la même phase il participa à des émissions comiques de télévision anglaise. Quand il repris son bâton de pèlerin en effectuant une série de concert seul au piano, il eut l’idée de raconter entre 2 morceaux des anecdotes concernant sa musique. «THE PIANO TOUR LIVE» vît le jour en 1997 mais édité sur un label confidentiel, il devînt vite épuisé. C’est pourquoi il est réédité aujourd’hui. Cette ressortie coïncide (hasard du calendrier ?) avec la sortie du DVD «LIVE IN CONCERT 2000» qui fut enregistré lors de sa tournée en Angleterre. Les 2 set lists diffèrent sensiblement : 4 reprises sur le CD (DAVID BOWIE avec «Space Oddity/Life on Mars», YES avec «And you and I/Wonderous stories/The meeting», CATS STEVENS avec «Morning has broken» et enfin les BEATLES avec «Eleanor rigby») 4 reprises également sur le DVD (PACHEBEL avec le «Canon en Ré», CLAUDE DEBUSSY avec le «Clair de lune», YES avec «And you and I/Wonderous stories», et enfin les BEATLES avec «Help/Eleanor rigby»), des morceaux relativement rares sur le CD («Buy a broom/Elbin mansions», «A glimpse of heaven», «The nursery rhyme concerto», «Gone but not forgotten», «The lord’s prayer/The day thou gave»), des morceaux plus «classiques» sur le DVD (les «Catherine», «Jane Seymour», «Guinevere» et autre «Lancelot») parmi là aussi quelques raretés («Birdman of Alcatraz», «Seasons of change», «Children of Tchernobyl», «The recollection/Dance of a thousand lights» ). Le seul point commun sont les interludes racontés par RICK entre chaque titre ; l’inconvénient est que quand on ne domine pas tout à fait (loin s’en faut !) la langue de Shakespeare, ces histoires, sans doute fort drôles,

sont très longues (à peu près aussi longues que les morceaux musicaux !). Enfin si la musique est très belle, elle ne nécessitait pas forcément, à mon avis, l’image. Certes, RICK, les cheveux de plus en plus courts mais toujours blonds, habillé sobrement de noir, est toujours impressionnant devant ses claviers (plus que 6 et un piano) mais durant 1h30 ça fait peut-être un peu beaucoup ! Le son quant à lui est parfait en Dolby Digital 5.1 ! Mais franchement, je me contente du CD «donné» avec le DVD qui a pour moi l’avantage de ne reprendre que la musique et qui contient un titre supplémentaire «Merlin». Bref, encore un DVD/CD réservé aux fans les plus ultras !

AND THE ENGLISH ROCK ENSEMBLELIVE IN BUENOS AIRES 2001

(DVD 90’, Classic Rock Legends, UK, 2001)AND THE ENGLISH ROCK ENSEMBLE

THE OFFICIAL BOOTLEG 1997(CD 57’55’, Classic Rock Legends, UK, 2001)AND THE ENGLISH ROCK ENSEMBLE

OUT OF THE BLUE (Live 2001)(CD 74’19, Music fusion, UK, 2001)

Pour finir la série, retour au temps présent avec la «grande messe» donnée en début d’année 2001 par RICK WAKEMAN avec son nouvel ENGLISH ROCK ENSEMBLE en Amérique du Sud au Gran Rex Theatre de Buenos Aires très précisément. Encore une fois, la set list est différente selon le format. Le CD («OUT OF THE BLUE») est seul à contenir «Jane Seymour», «No earthly connection/The prisonner», «Return of the phantom» et «Wurm», tandis que le DVD inclut «Lancelot», «Merlin» et «1984».Commençons par découvrir le DVD. Cette fois sur scène, RICK, son fils ADAM, le fidèle TONY FERNANDEZ (à la batterie avec RICK depuis l’album «NO EARTHLY CONNECTION»), ANT GLYNNE à la guitare, LEE POMEROY à la basse et enfin DAMIAN WILSON (ex LANDMARQ) au chant. Par rapport au concert de 1975, une constatation : les cheveux

toujours blonds (presque blancs) nettement plus courts et la cape remplacée par une longue aube blanche avec capuchon offrent moins de prise au vent. Les spots ont fait place aux lasers, le son est nettement meilleur, les caméras virevoltent dans tous les sens (2 loumas sont employées), il y a moins de claviers sur scène, bref, la technique audio-visuelle a changé ! Musicalement par contre, le temps semble arrêté puisque le concert commence par «Lancelot», morceau sur lequel DAMIAN peine un peu, puis c’est l’enchaînement de 2 Catherine («Howard» et «D’Aragon») où la complémentarité (complicité ?) des 2 WAKEMAN est évidente. Sur «The visit», DAMIAN s’en sort un peu mieux et on a droit à un solo de ANT et un autre d’ADAM. Puis commence le voyage au centre de la terre en version plus concentrée (¼ heure) et plus rock. C’est aussi l’occasion pour RICK de faire chauffer son vieux mini-moog et de nous réchauffer le cœur. Il manquait une Catherine à l’appel : la voilà («Catherine Parr»), puis comme par enchantement voici «Merlin» lui aussi dans une version raccourcie (à peine un douzaine de minutes). DAMIAN intervient sur le tempo plus rock de «Buried alive» (extrait du superbe «RETURN TO THE CENTRE OF THE EARTH») et sa voix est souvent limite juste. Heureusement il se rattrape superbement bien lors du morceau suivant qui n’est autre que «1984» au cours duquel LEE se lance en slappe sur sa basse. Et c’est déjà le rappel avec «Starship trooper» de YES. Là, y a pas de doute, le timbre si particulier de JON ANDERSON fait cruellement défaut. Le final est un prétexte pour ADAM de sortir son synthé portable et de faire preuve de son talent. Après le concert, on peut regarder l’interview de RICK WAKEMAN qui revient sur sa carrière (14’10).

Bien qu’enregistré un autre jour (le 21 avril), dans une autre salle (le théâtre Colisée de Buenos Aires) l’interprétation des titres appartenant aux deux formats est parfaitement similaire et donc je ne peux faire que le même constat : la voix de DAMIAN pêche et est trop souvent approximative et limite juste. Le premier titre différent d’un format à l’autre est «Jane Seymour», et c’est un régal d’écouter le père et le fils se répondre par synthés interposés seuls sur scène. Rarement joué en live, «No earthly connection» est lui aussi une véritable fête auditive ; la tonalité de la ligne de chant plus basse à l’origine convient beaucoup mieux à DAMIAN qui en donne une interprétation sans faille. Remarque identique pour «The prisoner» qui est enchaîné. «The return of the phantom» est, quant à lui, prétexte à un long solo de guitare (2’20) durant lequel ANT se lâche complètement.

Enfin, comme pour YES, «Wurm» est le morceau qui donne l’occasion à chacun des solistes de se lancer sur ces 3 accords magiques (pendant 9’02 tout de même !). Pour finir, deux mots concernant de CD THE OFFICIAL BOOTLEG qui est «offert» avec le DVD. Attention à ne pas le confondre avec le double CD paru sous la même appellation mais avec les noms de «WAKEMAN WITH WAKEMAN» (autrement dit RICK & ADAM) et qui clôturait la série des 3 disques studio enregistré ensemble sous ce vocable. Il comporte «Lure of the wild», «Robot man/Paint it black», «Arthur», «After prayers», «Eleanor rigby», «Starship trooper/Wurm» et nous replonge en Juillet 1997 pour une première mouture de l’ENGLISH ROCK ENSEMBLE avec sans doute CHRISSIE HAMMOND aux vocaux. La qualité sonore confirme le nom de bootleg et me permet d’affirmer que ce concert a été enregistré au milieu des spectateurs. Bref un cadeau sympa, sans plus.En résumé, cette avalanche de produits datant d’époques diverses et sous des formats variés confirme bien la prolixité d’un des plus grands joueurs de clavier de tous les temps, et me permet d’attendre, les yeux et les oreilles rassasiés, le futur album studio de R.W. avec l’E.R.E. (qui s’intitulera sans doute «OUT THERE»), à moins que ne sorte avant son album pour piano et chœur, ou bien celui pour orgue, voire un autre composé d’inédits. En définitive, j’ai intérêt à faire de la place sur mes étagères pour ranger tous ces nouveaux CD et DVD !

Gilles MASSON

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LA CLAQUE PROGRESSIVE... Chris Squire, Steve Howe, Jon Anderson, Rick Wakeman, Alan White

En voilà enfin une véritable affiche alléchante exposée sur les murs du Cirque Royal de Bruxelles, en cette superbe soirée du 22 juin 2003. Yes, composé de Steve Howe à la guitare, Chris Squire à la basse, Jon Anderson au chant, Alan White à la batterie avec (quel bonheur !) le retour de Rick Wakeman aux claviers, en concert au Cirque Royal de Bruxelles.Welcome to the Full Circle Tour 2003 !Ce soir, il s’agit bien ici de Yes, d’un Yes cohérent et représentatif de la meilleure époque du groupe. On n’a pas ici à faire à un presque Yes, un «un peu» Yes : non, il s’agit bien de la formation identique à celle de l’album Tales From Topographic Oceans (1974), et pratiquement semblable à celle des deux immenses classiques «Fragile» et «Close To The Edge» (1972), mis à part le fait que la batterie est ici assurée par Alan White (ex John Lennon) et plus par Bill Bruford.Au programme de cette soirée fabuleuse, des extraits des plus grands classiques de ce line-up, extraits de Fragile et Close To The Edge bien entendu mais également les autres classiques que sont Going For The One et Tormato.Comment qualifier une telle perfection musicale ? Du premier titre au dernier Yes nous a emmenés dans un monde parallèle, sur ces mêmes planètes lointaines que dessinait (et dessine toujours) le célèbre illustrateur Roger Dean sur les pochettes des albums classiques des Yes depuis plus de 30 ans.Dans cet univers passionant, décrire mes impressions, mes émotions, releverait de l’abstraction la plus totale vous plongeant alors dans un délire lyrique complètement incompréhensible. Avoir la chance d’assister à un show si proche de la formation d’origine, que nous, jeune génération, n’avons jamais eu l’occasion de connaitre, était pratiquement aussi jouissif que si nous puissons voir un jour Peter Gabriel, Phil Collins, Mike Rutherford, Steve Hackett et Tony Banks nous rejouer Selling England By The Pound sur une scène en Belgique.

Petit zoom sur chaque musicien - Jon Anderson. Que dire, à 58 ans, comment est-il possible et même imaginable d’avoir conservé cette magnifique voix qu’il avait à 20 ans ? Doit-on parler de magie ? Ou plutôt peut être de foi... car Jon a toujours été très inspiré par tout ce qui concerne l’univers de la métaphysique et des forces du Bien... Quelle que soit la raison, sa voix est toujours d’une pureté étonnante et cela pour notre plus grand plaisir. Une grande carrière pour un Grand Monsieur (Grand au sens littéraire et non physiologique puisque Jon est plutôt petit, ce qui ne change rien à sa puissance scènique), ayant accompagné les meilleurs : Vangelis, Rick Wakeman en solo, Mike Oldfied, Tangerine Dream... - Steve Howe, toujours très concentré sur son jeu, ne développant pas une attitude

scènique très active, est le membre le plus discret mais le plus appliqué, celui qui assure le son signature Yes, que ce soit en excellant autant dans son jeu de guitare acoustique que de guitare électrique. Capable même de captiver le public, seul avec sa guitare sèche, l’espace de deux titres solo, moment très intime avec le public. - Chris Squire et Alan White : Chris Squire, premièrement, est certainement un des meilleurs bassistes de rock encore actifs, véritable modèle de groove impeccable, il emmène les titres de Yes dans une dimension supérieure grâce à un jeu de basse tout à fait hallucinant. Rarement peut-on entendre de solo de basse si bien mis en place dans le cadre d’un groupe de rock. Chris Squire donne le tempo sur scène, son attitude scènique très «groovy», propre aux meilleurs bassistes : elle me rappelait d’ailleurs celle de Tony Levin, célèbre bassiste de Peter Gabriel et de nombreux autres, ayant d’ailleurs pris la place de Squire l’espace de quelques temps lors du projet Anderson-Bruford-Wakeman-Howe en 1989. Squire donne vraiment un rythme et un punch incroyable à l’ensemble. De plus, aidé par son ami et collègue de longue date Alan White, ils arrivent à créer une section rythmique plus que solide et sont véritablement un modèle du genre. Petite preuve à l’appui, en 1980, à la suite de l’album Drama (avec Geoff Downes et Trevor Horn issu des Buggles), Alan White et Chris Squire devaient rejoindre un groupe avec Jimmy Page sous le nom de XYZ (Ex-Yes And Zeppelin). Est-il nécessaire d’en dire plus à propos de leur qualité de musiciens rock après ceci ? - Rick Wakeman, Monsieur Rick Wakeman ! Véritable virtuose des claviers à classer au même niveau qu’un Tony Banks ou Keith Emerson, Rick Wakeman, vêtu de sa longue veste noire brillante, ayant l’air de ne pas avoir été marqué par le temps, pareil à lui même et toujours entouré par son cercle de claviers, nous a donné une véritable leçon de musique lors de cette soirée. N’hésitant pas à resortir un vieux synthé analogique de façon à être fidèle aux sonorités de l’époque, Rick Wakeman est un musicien hors pair, entouré d’une aura toute particulière, ayant également accompagné les plus grands et ce dans tout les styles, on l’entendra notamment sur des albums de Black Sabbath et d’Ozzy Osbourne, un musicien polyvalent

et incroyablement talentueux.«What a Show !»Souffle coupé, dégoulinant de sueur (il faisait très chaud à l’extérieur et à l’intérieur du Cirque Royal lors de cette soirée «torride» musicalement) mais plus que satisfait et ravi d’avoir assité à un évènement de pareille envergure, le public du Cirque Royal s’en va retourner à ses occupations après un voyage surnaturel mêné par un groupe irréprochable, un moment que personne n’oubliera.Seule petite déception personnelle, je me suis encore retrouvé dans les benjamins de la salle. Un petit message aux plus jeunes d’entre nous : allez voir Yes sur scène, vous y découvrirez une ambiance hors du commun. Ce n’est pas un groupe reservé à une certaine tranche d’âge, leur musique est accessible à nous tous, prenez juste le temps de réécouter les vieux vinyles de Close To The Edge ou de Fragile qui trainent dans le grenier de vos parents et vous tomberez sous le charme à coup sûr, comme eux sont tombés amoureux de cette musique quand ils avaient votre âge...

Laurent RIEPPI

Setlist : - Siberian Khatru (extrait de Close To The Edge 1972)- Magnification (extrait de Magnification 2001)- Don’t Kill The Whale (extrait de Tormato 1978)- In The Presence Of (extrait de Magnification 2001)- We Have Heaven (extrait de Fragile 1972)- South Side Of The Sky (extrait de Fragile 1972)- And You And I (extrait de Close To The Edge 1972)- Solo Steve (deux titres)- Solo Jon (Show Me)- Solo Rick- Heart Of The Sunrise (extrait de Fragile 1972)- Long Distance Runaround (extrait de Fragile 1972)- The Fish, including Solo Alan and Chris- Awaken (extrait de Going For The One)Rappel

- Roundabout (extrait de Fragile 1972)- Yours Is No Disgrace (extrait de Yes Album 1971)

2003.06.23 - Classic-Rock.be : Article concert Cirque Royal de Bruxelles 22 juin «La claque progressive...»

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LES CLEFS DE L’ASCENSION

Dans la famille des légendes de la batterie, je voudrais Alan White ! Ce grand monsieur a passé sa vie à défricher de nouveaux territoires sonores. Nous l’avons rencontré à Rotterdam, lors du périple européen du Full Circle Tour, pèlerinage mondial de son groupe Yes.

Alan White est certainement avec John Bonam, Ian Paice et Bill Bruford, l’un des drummers

les plus millésimés d’Angleterre. Tout

le monde connaît son parcours au sein de Yes, prestigieuse formation multidimensionnelle, qui a donné au rock progressif anglais, ses lettres (ou bien ses notes ?) de noblesse. Mais son tableau de chasse ne se limite pas à cela. Dès ses débuts dans le métier, les plus grands se sont arrachés son groove unique (Eric Clapton, John Lennon et Yoko Ono, Phil Spector entre autres), car le jeu félin de White représente un carrefour musical idéal. Sa sensibilité rythmique englobe l’attitude du rock, le toucher subtil du jazz et la science métrique des compositeurs classiques.

Comment se déroule le Full Circle Tour ?Le groupe joue mieux que jamais, et les shows sont au top. De plus il s’agit du line-up de la grande époque, avec Steve Howe à la guitare, Rick Wakeman au claviers, Chris Squire à la basse, et Jon Anderson au chant. Nos performances sont, vraiment, au delà de celles que nous étions capables de faire il y a 25 ans.

Quelles chansons jouez vous sur ces concerts ? Nous jouons notre nouveau matériel, des chansons de notre dernier album

2003.09 - Rimshot n° 24 : Entretien Alan White «Les clefs de l’ascension»

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Magnification, mais évidement, les fans veulent entendre un échantillon de ce que nous avons fait dans notre carrière.

Je crois savoir que tu a rencontré la musique via le piano.Oui, c’est exact. Mon père était pianiste, et logiquement, je me suis mis à cet instrument à l’âge de six ans. Mais mon attirance pour la batterie a tout supplanté. L’année de mes 12 ans j’ai eu ma première batterie, un instrument de fortune que j’ai conservé deux mois. Ensuite mes parents m’ont offert une Ludwig. Mon oncle jouait de la batterie, nous étions une famille de musiciens.

Jouer du piano a-t-il été un plus pour toi ?Oui, complètement. Parce que dès

mes premiers pas vers l’instrument, j’ai essayé de développer mon jeu rythmiquement, mais aussi mélodiquement. C’est toute ma philosophie de la batterie. Mon but n’a jamais été de tenir le tempo pour les autres musiciens, mais d’apporter un maximum à la musique. La batterie est un outil subtil qui produit de véritables notes. C’est une approche qui me rapproche des batteurs de jazz.

Il parait que tu séchais les cours de batterie. C’est vrai ?

Oui (rires). J’ai pris quelques leçons au début. Je savais déjà lire la musique grâce au piano. J’ai très vite réalisé que le prof ne m’apprenait pas à jouer de la batterie, mais plutôt à jouer comme lui. Moi j’avais une idée très claire de ce que je voulais faire. J’ai eu la chance, sans prétention aucune, de posseder très jeune des signatures rythmiques assez personnelles, un jeu original.

Tu as donc trouvé ta voie dès le début.Tout à fait. J’apprenais différentes pièces de musique, de toutes sortes, et j’avais la démarche de les jouer à ma façon, en changeant les rythmes, voir le feeling. Cette ouverture musicale m’a prédisposée à jouer avec Yes, groupe dans lequel j’ai pu laisser exploser ma creativité.

Peux-tu me parler des Downbeats ? Oui, il s’agit de mon tout premier

groupe. Cela remonte à un bail. À vrai dire j’avais tellement envie de m’exprimer, que,

quelques mois à peine après avoir eu ma première batterie, je me suis retrouvé sur scène à jouer dans les clubs avec des musiciens locaux. Nous avons fini par monter ce band, qui jouait des compositions originales, mais aussi un paquet de reprises, du Beatles, entre autre. Une très bonne école ! Du haut de mes treize ans, j’étais le plus jeune de la troupe. Les gens étaient drôlement impressionnés. Mais parallelement, je m’intéressais aussi aux compositeurs classiques.

Et plus tard, tu as réalisé un rêve en devenant batteur de john Lennon.Exact, à vingt ans, j’ai joué avec Lennon à Toronto. L’album live qui a découlé de ce concert (le fameux Live Peace in Toronto, 1969) a considérablement boosté ma carrière. J’aimais beaucoup Ringo Starr, que j’ai d’ailleurs rencontré plusieurs fois. Lorsque j’écoutais les Beatles étant môme, je ne m’imaginais pas, qu’un jour je battrais derrière Lennon. Mes

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collaboration avec lui restent de très grands souvenirs (il a joué, entre autre, sur le légendaire Imagine NDLR).

L’histoire de Yes est une vraie épopée, avec différentes époques et de nombreux line-up.C’est le moins que l’on puisse dire. Cela nous a valu une réputation de groupe à géométrie variable. Beaucoup de musiciens sont venus, repartis, puis revenus. Il y a de quoi perdre son latin. Pour simplifier, on peut dire que Chris Squire et moi-même formons le noyau dur, étant donné que lui est là depuis la toute première heure et que je suis arrivé dans le groupe en 73 pour remplacer Bill Bruford. C’est nous qui avons toujours porté le groupe contre vent et marées.

Tu es pote avec Bruford ?Oui, je le connais même très bien. Je l’ai revu juste avant le Full Circle Tour. Il tourne avec son groupe Earthworks dans les club de jazz.

Parle moi de ta collaboration avec lui, lors de la tournée d’Union de 91, qui regroupait la plupart des musiciens ayant jalonné l’histoire de Yes ?Tout à fait. C’était vraiment intéressant. J’avais déjà joué auparavant dans des configurations à deux batteurs, et je dois dire que ce n’est pas un exercice facile. Il faut savoir être fair-play et laisser à l’autre suffisamment d’espace pour créer sa musique. Il faut que les deux musiciens soient très proches. Dans le cadre de Yes, c’était d’autant plus difficile, parce que la musique est sophistiquée. Avec Bill cela s’est toujours bien passé. Nous avons travaillé dur sur certaines pièces, afin de bien définir nos rôles. Je dirai que quand l’un de nous deux prenait le dessus, l’autre réagissait comme un percussionniste. Tu sais, je jouais déjà certains morceaux de cette tournée depuis quinze ans, et j’avais ma propre façon de les appréhender. J’ai du sacrifier cela pour les réarranger avec Bill. Pour jouer à deux batteries, il faut savoir pardonner.

Tu utilises l’électronique ?Oui, mais de façon assez sporadique.

J’ai des pads sur scène pour jouer des effets de cymbales inversées ou des gongs. Je lance aussi certaines s é q u e n c e s , comme sur l’intro

de «Owner Of A Lonely Heart». Mais je n’ai pas poussé ce délire aussi loin que Bruford, qui lui, est un maître en la matière.

Parallèlement au Full Circle Tour, tu profites de tes jours «off» pour animer de nombreuses master classes. C’est important pour toi ? Oui, cela me permet d’aller à la rencontre d’autres batteurs et de gamins qui ont soif d’apprendre et veulent comprendre mon parcours de musicien. Je leur parle de ma philosophie, de ma pensée et de mon attitude par rapport à l’instrument, de mon cheminement vers la découverte de mon style. C’est une quête infinie. La musique ne se résume pas à lire des partitions. C’est une chose organique, à la limite de l’expression corporelle. Avoir le feeling est essentiel pour un batteur qui a un rôle d’épine dorsale dans un groupe. Je leur parle aussi de la respiration et de l’hygiène de vie indispensable pour garder une bonne condition physique. Je suis dans la cinquantaine, et la vie en tournée est parfois très rude et agitée. Je dois être au top chaque soir, pour être «on the money» (éclats de rires).

Abordes-tu des questions de technique pure ?Oui, j’ai appris différentes techniques. En les mélangeant, j’ai

trouvé mon truc. La qualité première d’un batteur est d’être constant dans sa frappe. Il y a tellement de paramètres : la tenue des baguettes, la disposition du kit, la position de jeu. Par exemple j’utilise la double pédale de

grosse caisse depuis une quinzaine d’années, et là encore, j’en ai une approche perso, qui est à l’opposée des batteur de heavy-metal. Je m’en sers pour certains effets, par petites touches. Chacun doit essayer de trouver sa voie.

Tu dois savoir que tout le monde te confond avec Alan White, le batteur d’Oasis. Ce n’est pas trop difficile à vivre ?Cette histoire est complètement dingue. Je le répète encore : nous n’avons aucun lien de parenté. J’ai une histoire vraiment poilante à ce propos : j’étais en tournée au USA, et ma mère m’a appelée effondrée d’Angleterre. Ses amis avaient lu dans la presse que le batteur Alan White avait saccagé sa suite d’hôtel. J’ai du démentir cet acte terroriste (rires) !

Ton matériel ?J’utilise un nouveau kit Ludwig,

comprenant une grosse caisse de 22’’, des toms de 10’’,12’’,16’’ et 18’’, et une caisse claire de 6,5’’ en bronze. Mes cymbales sont toutes des Zildjan.

Propos recueillis par Ludovic EGRAZ

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Alan White à l’école ATLAL’école de musique parisienne ATLA accueillait pour un master class le 27 Juin dernier Alan White, batteur de Yes, et Pierre Moerlen, grande figure française de la batterie notamment batteur de Gong, de Mike Oldfield et même deuxième batteur de Magma aux côtés de Christian Vander durant une courte période.Après une courte présentation, Alan White a joué quelques-uns des rythmes qu’il emploie avec Yes, avec et sans séquences, il a sollicité le concours de Pierre Moerlen pour montrer tout l’intérêt qu’il porte à la superposition des métriques ; Pierre jouant un rythme en 4/4 sur la séquence impaire de «Changes» (90125) et Alan accompagnant le tout et improvisant à tour de rôle avec Pierre.

Frayeur garantie !Alan a également rendu hommage à une charmante dame, présente dans l’assistance, probablement la fan de Yes la plus âgée : 91 ans (oui, vous avez bien lu). Elle n’a évidemment pas raté le concert mémorable du lendemain, assise dans les 5 premiers rangs du Palais des Congrès ; je le sais, j’y étais et n’en suis pas encore remis à l’heure où cet article paraît ! Pierre Moerlen et Alan White ont parlé de leur philosophie de la batterie et ont répondu avec plaisir aux questions des Fans présents et chanceux d’avoir eu vent de l’évènement à temps.Il est vrai que ce genre de manifestation est difficile à prévoir suffisamment longtemps à l’avance pour que votre magazine préféré (Batteur, bien sûr) puisse en parler en temps et en heure !Saluons l’initiative de l’association «Nous sommes du soleil» (les initiés comprendront l’origine de ce nom), fan-club Francophone officiel du groupe, pour s’être lancé dans cette aventure avec l’aide de la Baguetterie et ATLA.

2003.10 - Batteur Magazine : Actualités «White à l’école ATLA»

CONSPIRACYThe UnknownINSIDE OUT - 53’38 - USA ‘03Style : progressifCotes : DP1 - DR2 - JLS3

Non ! Ce n’est pas Yes ! Oui ! Pour ceux qui hésiteraient,

CONSPIRACY est bien le nom de groupe ! Inconnu ? Pas du tout, The Unknown est le second opus de l’association maintenant mature de Chris Squire, (Yes), et de Billy Sherwood, ex-(Yes).Vous suivez, non ?... Si, j’en suis sûr !Ces deux excellents musiciens n’en sont pas à leur coup d’essai. Leur collaboration remonte de fait à 1989. Sherwood a participé aux projets du Chris Squire Experiment avant de rejoindre Yes au sein duquel il contribua à la sortie de deux disques.Ce nouvel opus débute en puissance par Conspiracy, où d’emblée, la sonorité de basse si spécifique et la structure musicale situent le cadre de cet album. Le morceau suivant, Confess a d’étranges relents de Open your eyes. Le fantastique et puissant

New World, mettant largement en évidence la merveilleuse Rickenbacker, semble, lui, sorti tout droit de The Ladder. Un peu de calme ensuite pour l’intro de Ω A World Away, superbe ballade qui a mon avis est un des titres les mieux produits de cette galette et démontre l’efficacité de l’union des voix de Chris et Billy. La plage éponyme de plus de 11 minutes est, elle, beaucoup plus progressive et sort un peu du canevas auquel on s’était habitué depuis le début de ce disque. Et le problème est peut-être là : l’habitude, voire la distraction ! Le reste de l’album, quoique très bon, n’accroche pas directement aux premières écoutes. Petit conseil : laissez reposer une quinzaine, ensuite programmez les titres à l’envers ou aléatoirement. Plaisir d’une nouvelle et belle découverte assuré !Ce très réussi deuxième CD plaira assurément aux fans de Yes des albums précités, mais on peut aisément faire une comparaison avec 90125 ou d’autres disques des eighties. Ceci dit, les sonorités et le mixage sont sans aucun doute de notre siècle.http://conspiracymusic.net

Jean-Luc Smets

17/12/2003 télé moustiqueDVD YES n’en fera ja- mais d’autres : son YESSPEAK de Robert Garofalo (2003) est un double DVD com- prenant un historique avec Roger Daltrey comme narrateur et de longues interviews de seulement cinq membres d’un groupe où ont dé- filé d’autres pointures dont les fans auraient sans doute bien ai- mé avoir les avis aussi. La mu- sique ? Des extraits et un enre- gistrement «live» illustré par des photos. - D.H. Classicpictures - 190’ - Vidéodis. ± 25 € « u 8

2003.12.17 - Télémoustique : Critique «Yesspeak»

2003 - Prog-résiste n° 34 (4ème trim.) : Publicité (n° 33) & Critique «The Unknown»

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Si Alan White a commencé par apprendre le piano à l’âge de 6 ans, son style percussif l’a finalement amené à la batterie vers 13 ans. Trois mois plus

tard il se produit sur scène ! Il dévit dans divers groupes du nord de l’Angleterre, d’où il est originaire, durant la fin des sixties. En 1968, il rejoint Airforce, le groupe de Ginger Baker (batteur de Cream) et de Steve Winwood (Trafic). L’année suivante, il reçoit un coup de fil mémorable : John Lennon l’invite à jouer dans le Plastic Ono Band, avec rien de moins que Eric Clapton, John Lennon himself, Yoko Ono et Klaus Woorman, excusez du peu ! Il enregistre des morceaux qui marqueront l’histoire de la pop : Imagine, Jealous Guy, Instant Karma. Lennon le présente à George Harrison qui l’engage pour l’album «All Things Must Pass» sur lequel on trouve le méga hit My Sweet Lord. En 1972, alors qu’il est en tournée avec Joe Cocker’s Mad Dogs and Englishman, le manager de Yes le contacte. Il apprend le répertoire en trois

2003 - Batteur Magazine n° 165 : Entretien Alan White «White Spirit»

jours (!) avant de se retrouver devant 15 000 fans à Dallas ! D’un commun accord, Yes et White se donnent une période d’essai de trois mois. Cette année 2003 voit la trente-cinquième année du groupe et la trente et unième d’Alan White comme batteur de Yes ! La liste des groupes dans lesquels Alan White a joué est longue ; citons Donavan, Manfred Mann’s Earth Band, Billy Preston, Harrison, Yes et ses membres dans leurs projets solos : Chirs Squire, Steve Howe, Rick Wakeman, Trevor Rabin.

Quels sont les batteurs qui t’ont influencé ?Quand j’ai commencé, les batteurs qui m’influençaient étaient Ringo, Buddy Rich, Jack De Johnette, Lenny White. J’ai vite apprécié les batteurs qui mélangeaient le jazz et le rock, et c’est dès cette période que je suis allé dans cette direction en m’inspirant de ce que j’entendais pour définir le style que j’aimerais développer en tant qu’individu.

Tu n’as pas cité Bill Bruford que tu as remplacé dans Yes ; pourtant, tu t’es inspiré de son jeu, en repiquant notamment son fill d’intro sur South Side Of The Sky.

ALAN WHITE YESPropos recueillis par : Patrick Buchmann

Photos : Laurent Thomas

Après l’Europe et les USA, Yes, groupe mythique de rocksymphonique (comme on disait à l’époque) était de passage

à Paris pour un concert mémorable. C’était l’occasion derencontrer son batteur, Alan White, qui s’est prêté au jeu

de l’interview avec un plaisir visible.

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Oui, tu connais bien les morceaux ! En fait, j’ai considéré cette intro comme faisant partie de la composition, et j’ai choisi de la garder. Nous avons collaboré sur le disque et la tournée «Union», et avons longuement discuté de la manière dont nous allions aborder chaque morceau à deux batteries et finalement, ça s’est bien passé. J’aime beaucoup Bill et je suis allé le voir en concert avec son groupe Earthworks ; c’est la direction qu’il a choisi de prendre, et je le respecte. Bill est pour moi un batteur de jazz aérien. Lorsque je suis arrivé dans Yes, j’ai amené une patte plus rock à l’ensemble, j’ai expliqué ma vision de la musique et de mon jeu au sein de Yes aux membres du groupe en leur proposant une période de trois mois d’essai pour voir si ça fonctionnerait. Ça fait plus de trente et un ans que je suis membre de Yes (rires). Je pense que le groupe recherchait cette patte rock’n’roll qui a fait évoluer sa musique vers ce qu’elle est depuis une bonne vingtaine d’années.

Tu as aussi fait partie du groupe d’un batteur, et pas le moindre : Ginger Baker et Airforce ; c’était un travail à deux batteries ?Oui, dans Airforce il y avait en fait quatre batteurs ! Remi Kabaka, un africain, Phil Seaman, un batteur plus jazz-orchestral-big band et qui faisait beaucoup de séances à Londres, Ginger et moi. Phil était le mentor de Ginger, c’est lui qui lui a appris à jouer de la batterie ! Je jouais différents instruments pendant le set : log drum, tubular bells, vibraphone, piano, batterie. Sur les petites scènes, j’étais obligé de ramper sous les instruments pour passer de l’un à l’autre ! Il y avait quatre ou cinq morceaux où Ginger et moi jouions ensemble de la batterie. C’était toujours très intéressant de jouer avec lui, mais c’était son groupe, et les quatorze autres membres étaient relégués au second plan !

Parlons matos : tu es toujours resté fidèle à Ludwig...Oui, je joue sur Ludwig depuis plus de trente ans, et j’ai de très bonnes relations avec les gens de la marque : alors, pourquoi changer ?

Fais-tu usage de l’électronique ?J’ai des pads, j’utilise des échantillons standards qui reproduisent mon son de batterie, ou bien des effets, gongs, crashes et même des guitares ou des voix, mais je n’utilise pas de capteurs sur le kit.

J’ai vu une photo de toi jouant sur un kit qui ressemble franchement à celui d’un certain Ringo Starr...J’ai enregistré Imagine avec ce kit, et je l’ai toujours. Je le garde chez moi et le prête pour des expos ; c’est un collector ! Des séances comme Imagine ou bien encore My Sweet Lord font partie de ces moments qu’on n’oublie pas : Eric Clapton, George Harrison, John Lennon qui n’a pas voulu être crédité sur l’album, et Ringo Starr qui jouait du tambourin à côté de moi ; il ne manquait que Paul Mc Cartney !

Dans le groupe, vous êtes tous entouré d’agents et d’avocats. Penses-tu qu’il soit nécessaire d’être assisté à ce point par ces personnages pas très «musicaux» ?C’est un bonne question ! On vient justement d’avoir une petite réunion de groupe au déjeuner, et c’est vrai que ça pourrait s’apparenter à une sorte de conseil d’administration (rires) ! Avoir un agent et un avocat est devenu incontournable et ça nous facilite la vie d’avoir quelqu’un qui s’occupe de la paperasse. Par contre, pour une maison de disques ou un producteur, il n’est pas facile de travailler avec Yes car nous sommes très bornés, nous avons des «règles» assez précises en ce qui concerne la musique que nous voulons créer. Nous avons toujours été libres de faire ce que nous voulions, sans avoir de considération du type : «Faites des morceaux de 2 minutes 30, il faut que ça passe en radio» ! On a toujours composé des morceaux plus ou moins longs. S’il s’avérait par la suite nécessaire d’en raccourcir pour la radio, ça s’est toujours fait au montage. Nos montages servent à réduire, pas l’inverse, comme c’est souvent le cas.

Tu as co-écrit certains titres de «Tales from Topographic Oceans» entre autres mais sans pour autant en être cosignataire sur le papier : les agents/avocats sont-ils derrière cela ?Non, Steve (Howe, guitariste) a écrit la plupart des harmonies, Jon (Anderson, chanteur) les lignes vocales, et c’est ce qui compte le plus. Vu la longueur des morceaux, j’ai écrit quelques parties rythmiques qui complétaient leur travail. Le fait de ne pas être crédité pour ça ne m’a jamais dérangé, et les avocats n’y sont pour rien (rires) !

La composition actuelle du groupe est celle du Yes des seventies, notamment le retour de Rick Wakeman. Est-ce une démarche

commerciale dictée par la production, par les sus-cités agents, ou bien tout simplement un calendrier propice à une telle réunion ?Quand Rick (Wakeman, claviers) est revenu, il nous a dit qu’il ne lui a jamais semblé avoir quitté le groupe, qu’il en faisait partie intégrante. Il avait tout simplement beaucoup de choses à dire artistiquement de son côté, et nous du nôtre continuions notre route quoi qu’il advienne. De là est né notre dernier album «Magnification», sans clavier mais avec orchestre symphonique. Après cela, Rick a proposé de revenir et nous voici de retour avec le groupe «classique». On est bien décidé à garder cette formule pendant un bon bout de temps avec des tournées et des albums.

Yes ne semble pas avoir été affecté par les carrières solo de chacun de ses musiciens, à l’intar d’un Phil Collins ou Peter Gabriel qui ont

plus ou moins contribué à la mise en quarantaine de Genesis. Comment expliques-tu cela ?Yes n’a jamais cessé d’exister ; Chris (Squire, bassiste) et moi-même avons contribué à maintenir la machine en route pendant les périodes d’absences des autres membres. Ça s’est toujours bien goupillé. Chris est un pilier du groupe, il est le seul à jouer sur tous les albums sans exception.

Quel est pour toi le morceau de Yes le plus difficile à jouer ?Certains passages de «Tales From Topographic Oceans» et Gates of Delirium («Relayer»). En fait, ça ne se voit pas de l’extérieur, mais il y a tout un code d’accents et de ponctuations qui nous aident à nous repérer les uns les autres. Tel accent à la batterie va lancer telle phrase de claviers qui va lancer tel riff de guitare, etc. C’est assez complexe, mais il faut que ça ait l’air simple, autant à la réalisation qu’à l’écoute.

Je me suis toujours demandé depuis que j’ai entendu «Going For The One» comment vous aviez pu enregistrer Rick Wakeman jouant de l’orgue dans une église à 10 kilomètres du studio où vous autres jouiez...C’était avant l’ère «Internet» mais on s’est débrouillé avec les moyens du bord pour être synchro. L’orgue de Rick était enregistré dans l’église et nous dans le studio. Pour nous synchroniser, nous avons utilisé ces vieux téléphones portables de l’armée qu’il faut remonter à la main, tu sais ceux qu’on voit dans ces vieux films de guerre ! Je sonnais le décompte et Rick se mettait à jouer avec nous à 10 km de là ! L’écoute au casque était rudimentaire, mais ça a fondtionné !

Quel conseils donnerais-tu à un jeune batteur, plus précisement, quel devrait être son objectif principal ?Écouter un maximum de styles différents et chiper des choses intéressantes dans chacune d’elles ; en jouant avec des musiciens et des groupes d’horizons divers, il pourra les appliquer tout en essayant de créer sa propre identité musicale.

Cela aurait pu aussi être qu’il faut toujours avoir une paire de baguettes sur soi, en référence à cette soirée chez Jimmy Page (guitariste de Led Zeppelin, ndj) !Ah oui, c’était quelque chose ; on était invités chez Jimmy avec tout un tas d’autres grands de la musique comme Clapton, et il avait installé une tente avec tout le matériel possible. Et pourtant, avec Keith Moon, on s’est retrouvés comme des... parce qu’aucun d’entre nous n’avait de baguettes ! Enfin, on s’est débrouillé comme on a pu !

Quel est ton doigté préféré ?Le frisé ! Ça me convient parfaitement pour ce que je fais avec Yes.

Cite-moi un album de Yes qui représente le plus Alan White.J’aime bien tous les albums car chacun d’eux a été propice à l’expérimentation, mais comme il faut choisir, je dirais «Relayer» car c’est très différent de ce qui se fait d’habitude, notamment au niveau de la basse et de la batterie.

Et un album pour découvrir Alan White en dehors de Yes.Eddy Harris, «E.H. in the UK» avec Steve Winwood, Tony Kaye et Chris Squire ; un album de jazz assez expérimental enregistré pendant la même période que «Relayer» (73). Il y a des trucs très bizarres sur ce disque, mais je l’écoute encore aujourd’hui.

BONUSTRACKS

MATERIEL :Batterie Ludwig Super Classic :

grosse caisse de 22’’, toms de 18,16, 14, 13, 12, 10, 8’’, caisse claire en

bronze martelée de 14x6’’. Doublepédale de grosse caisse Axis.

Rack Gibraltar, Baguettes ZildjianAlan White Signature (Z4A).

Cymbales Zildjian : jeu de crotales(octave grawel, HH 13, crash : 2x15’’,16’’, 17’’. Oriental crash 17’’, ride 20’’.Peaux Remo Ambassador transpa-rentes, sablée sur la caisse claire.

Électronique : D8 Roland avecsix pads et Octapad Roland.

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> ROCK

YES

Pour ce combo-là, on dit oui !

>>>Formé à Londres en 1968, ce combo est l’un des plus fameux représentants du rock progressif. Très vite leurs superbes mélodies, que rehaussent des arrangements sophistiqués, vont conquérir aussi bien l’Europe que les États-Unis. Nul autre groupe ne sait aussi bien que celui-là mêler rock, jazz et classique avec pareille énergie, si puissante majesté. Hélas, le groupe se sépare en 1981 et fait place à une nouvelle équipe qui ne craint pas les mélodies commerciales, genre «Owner Of A Lonely Heart». N’empêche que la venue à Montreux de Yes est un véritable évènement. Car avec Jon Anderson, Steve Howe, Rick Wakeman, Chris Squire et Alan White, c’est bien la formation d’origine qui arpentera la scène de l’Auditorium !

Ch. F.

2003 - Jazz Festival de Montreux : Programme officiel «Pour ce combo-là, on dit oui !»

(ci-dessous : pochette CD «Live At Montreux»)

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YESYesspeak(BMG)

Des géants de la progressive, Yes est incontestablement celui qui a jusqu’ici le mieux servi ses fans en concerts format DVD. Des Keys to Ascension de 96/97 à la tournée 2001, Yessymphonic, les vidéos live récentes du groupe abondent et il fallait forcément faire autrement pour marquer dignement le 35ème anniversaire de cette institution du prog’ qui a souvent cristallisé les passions autour de ce courant, qu’il s’agisse d’admiration ou de haine, et qui continue aujourd’hui de signer des concerts d’anthologie prouvant que la musique du Yes des seventies n’a pris aucune des rides qui marquent à présent les visages de ses serviteurs quinquagénaires. D’où ce double DVD de plus de trois heures où c’est d’abord l’histoire du groupe qui est contée à travers les témoignages des cinq membres actuels que sont Jon Anderson, Chris Squire, Steve Howe, Alan White et Rick Wakeman (chacun d’entre eux se voit d’ailleurs accorder un chapitre entier). Car depuis l’an passé, avec le énième retour de Wakeman au sein du groupe, c’est bien le line-up dit «classique» (ou du moins considéré comme tel par le plus grand nombre) qui s’est une fois de plus reconstitué. Anderson sur son hamac ou White sur son bateau, c’est dans des cadres privés paradisiaques que chaque musicien revient ici sur la longue et tumultueuse «Yesstory» dans une version de l’histoire quelque peu édulcorée (d’autant que Roger Daltrey -mais oui, celui des Who- promu narrateur en chef s’acquitte de sa tâche avec le zèle d’un représentant de commerce plus agaçant que convaincant). Pour autant, on aurait tort

de bouder le réel plaisir de partir à la (re)découverte de l’histoire de Yes au fil de ces trois heures de t é m o i g n a g e s en t recoupées d’extraits de concert de la dernière

tournée. En bonus, la version audio intégrale d’un concert en son Dolby 5.1 achève de faire de Yesspeak un objet indispensable pour tout admirateur de ce dinosaure hors norme, dont le sens de l’excès et du lyrisme n’a toujours pas fini d’enchanter les uns et d’agacer au plus haut point les esprits bas de plafond... Un programme idéal pour patienter jusqu’au prochain passage parisien du groupe, le 22 juin prochain.FRÉDÉRIC DELÂGE

STEVE HOWE’SREMEDYElementsINSIDE OUT - 61’37 - UK ‘03Style : jazz-rock, bluesCotes : DP1 - DR2 - JMR3

C’est d’une affaire de famille qu’il s’agit ici puisque Steve HOWE - que je n’aurai

pas l’outrecuidance de vous présenter - s’est associé à ses fils Virgil (claviers et backing vocals) et Dylan (batterie), ainsi qu’à Gilad Atzmon (sax et flûte) et Derrick Taylor (basse) pour son nouvel album. À voir les musiciens, mais surtout les instruments en lice, il ne faut pas être un grand devin pour sentir que nous aurons affaire à un album teinté jazz-rock, une musique qui a bercé le petit Steve depuis son adolescence. Et de fait, tout cela swing, jazz, blues et rock dans tous les sens, et est en final terriblement frais et enjoué, à l’instar de ce que nous trouvons chez Yes. Mais c’est peut-être là - avec la pochette signée Roger

Dean - le seul point commun, parce que pour le reste, il vous faudra faire abstraction à toute référence avec ce groupe mythique si vous voulez donner une chance à cet album qui le mérite. On retrouve bien ça et là le son de guitare caractéristique de Howe, tant électrique que acoustique, mais de manière plutôt anecdotique. Vous voilà donc prévenus. Comme je le disais, les 16 titres de l’album, dont la majorité titrent à moins de 5 minutes, alternent différents styles et différentes ambiances qui se succèdent sans heurt. Trois d’entre eux sont chantés par Steve himself, et à dire vrai c’est très bien ainsi, parce que même s’ils le sont de fort belle manière, l’originalité de cet album tient principalement dans les pièces instrumentales, un terrain plus approprié pour l’expérimentation et les épanchements artistiques. Voilà donc un album qui mérite une oreille attentive, même s’il s’écarte de notre style de prédilection, car au final, tout ceci est fort fort bien faitwww.stevehowe.com

Jean-Marc Roussel

2004.02 - Crossroads n° 18 : Critique «Yesspeak»

2004 - Prog-résiste n° 35 (1er trim.) : Publicité (n° 34) & Critique Steve Howe’s Remedy «Elements»

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TRÉSORS DE BRONCANTE70’s

La discussion fut plutôt animée lorsqu’il s’agit de choisir un trésor de brocante «seventies» dans la carrière de YES. Alors que les choix furent faciles et franchement logiques pour les deux rubriques qui suivent, ne pas prendre une des réussites majeures du groupe fut une décision dictée par la notion même de «trésor de brocante».

En 1975, le quintet sort d’une période faste ponctuée par un vinyle quintessenciel, le sublime

Relayer. La gigantesque tournée mondiale qui s’en suit est un succès planétaire. «Tout baignait» aurait pu commenter Chris SQUIRE, qui s’y connaît en liquides. Et pourtant, c’est le moment que le groupe choisit pour se «fractaliser» (Thanks, Bob) et travailler sur des projets en solitaire. Et cette démarche sera riche d’enseignements, YES est «déconstruit» et permet de mettre à plat les éléments qui le compose, d’en deviner l’alchimie. Tous ne réussiront pas d’égale manière. Le Beginnings de Steve Howe n’a jamais eu les faveurs du public et de la critique, et c’est justitié. Alan White et son Ramshackled étaient trop décalés («pas assez» prog). Patrick Moraz, par contre, avait surpris pas mal de monde. Bien qu’il soit encore un sujet de polémique, il faut reconnaître que Jon Anderson s’était révélé comme un musicien complet et un très habile compositeur tout au long des sillons de son très beau et très inattendu Olias of Sunhillow. Alors que ces opus ne proposaient que peu (voire pas du tout) de matériel d’essence «Yessienne», Chris Squire démontrait qu’il était bien plus qu’un grand bassiste. Que l’édifice YES lui devait bien plus que ses harmonies vocales et ses charpentes rythmiques titanesque. L’évidence était là : Squire était capable d’écrire et d’arranger une musique superbe. Chris s’est entouré pour l’occasion de peu de musiciens. Patrick Moraz à l’orgue et synthés, Bill Bruford aux drums, Jimmy Hastings à la flûte, Mel Collins aux sax, Andrew Pryce Jakcman aux pianos et Barry Rose, second organiste de la cathédrale St Paul de Londres à l’orgue d’église. Le tout étant serti dans

l’écrin symphonique d’un grand orchestre classique au complet (cordes, cuivres, bois, harpe). Chris voulait cela et non pas les sonorités des synthés, Moogs et autres Mellotrons. La première face est une longue pièce articulée en trois mouvements : Hold on your hand, You by

my side et Silently falling. Les différents thèmes s’imbriquent les uns dans les autres, l’orchestre ponctue sans flonfons inutiles et les protagonistes donnent le meilleur d’eux-mêmes. La basse de Chris vrombit comme à l’accoutumée pendant que ses prestations vocales renvoient au meilleur de YES. Superbe de bout en bout... La seconde face commence par une pièce emmenée par l’orgue de Moraz et sous-tendue par les sax de Mel Collins. La basse est énorme et Chris démontre ici que les fièvres jazzy de Relayer n’étaient pas imputables uniquement à son comparse helvétique. J’adore ce Lucky seven qui sonne comme une version jazz-rock de Camel. Le tout se termine par la composition la plus sujette à controverse, Safe. D’abord, parce que l’orchestre est moins bien utilisé et/ou mixé que précédemment : il est envahissant, trop grandiloquent. Et puis, l’ensemble manque de variations, de relance, et, semble s’éterniser. Lorsque les musiciens moins Moraz mais avec Wakeman recomposeront l’entité originelle pour Going for the one, on pourra alors mesurer toute l’importance de cet album solo : l’utilisation des grands orgues dans Parallels et Awaken, les constructions rythmiques et les harmonies vocales portaient l’estampille Schindleria Praematurus.

Alain Quaniers

RICK WAKEMANAnd the New EnglishRock EnsembleOut ThereMusic Fusion - 48’43 - UK ‘03Style : rock mélodique symphoniqueCotes : DR3

Difficile de faire un spécial «Yes» sans évoquer Rick WAKEMAN, leur

mytique joueur de claviers, récemment réintégré pour la 4e ou 5e fois au sein de la formation phare du rock progressif britannique. Il faut dire que Rick Wakeman sort un disque tous les 3 mois et cela ne pose donc aucun problème d’en trouver un à chroniquer dans l’actualité. D’ailleurs, soit dit en passant, sa

production prend des proportions telles que je songe sérieusement à établir une nomenclature de ses œuvres, comparable à celle qui existe pour celles de J.S. Bach (par exemple : RWW 126, Rick Wakeman’s Work, number 121 - ce dernier chiffre est véridique, j’ai compté !). Pourtants, il y a un ou deux ans, je vous avais juré qu’on ne m’y reprendrait plus, après la chronique d’un album parmi d’autres du sorcier des claviers, qui me semblait de plus en plus fatigué. Mais, attiré par l’adjonction du New English Rock Ensemble (qui évoque avec délices ses albums de la grande époque, dont No earthly connexion n’est pas le moindre) et pour quelques bonnes chroniques lues de-ci, de-là, j’ai fini par craquer... Et j’ai bien fait, d’ailleurs ! Car si l’on excepte le (relativement) récent Return to the center of the earth (très pompier, quand même), c’est la première fois depuis des années que Rick Wakeman semble faire un pas dans la bonne direction. Avec son NERE (quel raccourci, je m’épate), RW (ouf !, encore plus court) a trouvé la cohésion d’un véritable groupe, avec l’inévitable Tony Fernandez, mais aussi Damian Wilson (ex-Threshold, ex-Landmarq, Star One, etc.) ou le guitariste Ant Glynn (Asia, Mike Oldfield). Et musicalement, me direz-vous ? Bah ! N’attendez quand même pas du Yes (ils le font si bien eux-mêmes), n’attendez pas non plus les extravagances égocentriques et claviéristiques (c’est lassant à la longue), mais plutôt de l’excellent rock mélodique, symphonique, voire progressif. Rajoutez à cela la virtuosité de Rick (il n’allait pas se contenter de regarder, quand-même !)dans de très nombreux plans, la sonorité chaude et agréable, la palette de claviers, le moog, mellotron et autres grandes orgues, le grand chœur classique (bien pompeux, mais utilisé à bon escient, en finale), la divine voix de Damian Wilson, et vous conviendrez qu’à moins de rechercher un plan progressif toutes les 30 secondes, vous obtenez un excellent album de rock mélodique symphonique, bien fichu et méchamment agréable à se filer entre les pavillons auditifs. De toutes manières un des meilleurs albums de Rick Wakeman depuis des lustres. À écouter !www.rwcc.com

DrRWW 121

2004 - Prog-résiste n° 35 (1er trim.) : Critique «Fish Out Of Water»

CHRIS SQUIREFish Out Of WaterATLANTIC - 42’14 - UK ‘75 ‘ Style progressif

2004 - Prog-résiste n° 35 (1er trim.) : Critique «Out There»

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YES(et associés)The Yes StoryDejavu retro - 68’58 & 72’54 - UK ‘03Style : prog

Dans un spécial YES, nous ne pouvions pas vous parler

de leur prochain album puisqu’il n’est pas annoncé. De plus anciens vous avez eu un aperçu dans nos trésors de brocante. Heureusement, nous avons pu dénicher pour pas cher (moins de treize euros), chez un excellent disquaire liégeois (celui qui vend Prog-Résiste) ce double album. Il y a peu de détail sur les morceaux de cette compilation. Les morceaux du groupe proprement dit sont des versions live que je crois inédites d’Awaken, Yours is no disgrace, Roundabout et Your move. Les enregistrements sont bons. Malheureusement ils ne sont pas datés mais je pense qu’ils sont issus de la tournée de Going for the one. On trouve aussi des morceaux solos des différents membres du groupe, notamment un très long extrait live (plus de trente minutes) de Journey to the center of the Earth. Il y a aussi Squire et Sherwood, Anderson, Howe et Haslam. Des choix plus ou moins heureux mais jamais mauvais. De plus, il faut être un fan pur et dur pour posséder tout cela.Rien de révolutionnaire donc mais un achat sympatique pour les amateurs de ce grand groupe

Michel Nicolas

2004 - Prog-résiste n° 35 (1er trim.) : Critique «Yesstory»

TRÉSORS DE BRONCANTEOVNI

Il fallait l’écouter pour le croire, il fallait voir la photo à l’intérieur pour le réaliser : Yes avait fait un album avec les stars de la pop électro-sautillante, les «Buggles», qui éfrayaient la chronique de l’époque avec «Video killed the radio star», et ce, pour remplacer deux membres (et non des moindres) : Jon Anderson & Rick Wakeman !!!

Avant toute chose, replaçons les choses dans leur contexte d’origine : en 1980, le rock

progressif est égonisant, mourant et quasiment balayé. King Crimson & Van der Graaf Generator ne sont plus, Genesis reste sur un mitigé Duke, Emerson Lake & Palmer à sombré avec Love Beach et YES lui-même n’a pas à tirer gloire de son dernier LP, Tormato, qui date d’il y a deux ans, déjà. C’est dire si on n’attend plus grand chose de Yes. Pourtant, la pochette est signée, à nouveau, Roger Dean, mais que voulez-vous : un album sans Wakeman, éventuellement (il y avait eu Relayer, qui n’est pas des plus mauvais, vous en conviendrez), mais sans Jon Anderson, cela semble inconcevable ! Pire : remplacer le sorcier virtuose des claviers et le charismatique Jon par deux aphèbes qui sautillaient sur les clips télé, ne laissant strictement rien transparaître, l’un de sa technique claviéristique, l’autre de son timbre aigu, avait de quoi faire croire à une farce ; j’en connais qui ont refusé d’écouter l’album, à l’époque et qu’il a fallu surprendre par la bande. Car si on ne sait rien, si on ferme les yeux (sauf pour regarder la pochette et le logo) et si on écoute la musique, il faut se rendre à l’évidence absolue : c’est du pur Yes, quasiment un retour aux sources de la fin des années 70, loin de la médiocrité de Tormato, avec certes, une touche

plus moderne et clinquante (nous sommes en 1980, quoi de plus normal), mais qui dévoile une ambition musicale retrouvée. On a beau tendre l’oreille, se pincer pour voir si l’on rêve : Steve Howe est en pleine

forme, avec son jeu inimitable, refusant l’harmonie linéaire, défilant les notes virtuoses et osées, Chris Squire martèle sa basse, sa Rickenbacker, comme il le fait depuis les débuts et Alan White est égal à lui-même, martelant à son habitude, plus rock qu’à l’époque de Bruford. Les claviers, sans être envahissants sont virtuoses, sonnent en finesse, en sonorité «moog» et s’imposent tout en nappant des arrangements sophistiqués... Et pourtant c’est un certain Geoff Downes qui est derrière les touches ! Quant à la voix, c’est surprenant, sidérant et confondant de similitude... Et pourtant c’est Trevor Hornes qui officie aux vocaux. Le plus incroyable, c’est que même le premier effet de surprise passée, on se retrouve avec un album cohérent où aucune pièce n’est à jeter et qui s’écoute encore aujourd’hui avec énormément de plaisir ! Pour l’anecdote, sachez qu’après cette expérience et la désastreuse tournée qui suivit, le public se moquant régulièrement de Trevor Hornes, ce dernier quitta le groupe, suivi bientôt par White & Squire qui allèrent former Cinema avec Trevor Rabin. Howe & Downes restant seuls dans Yes. Mais le plus étrange est que Howe & Downes allaient appeler leur collaboration Asia, tandis que Squire, White & Rabin en rappelant Anderson, puis Kaye, allaient reprendre le nom de Yes !!! Quoiqu’il en soit, à l’époque du punk, de la new wave et du disco, Yes naviguait encore à contre-courant en produisant un bien bel album de progressif, que nous rappelons au bon souvenir de ceux qui l’auraient oublié ou qui ne le connaîtraient pas...

DrBuglYes

2004 - Prog-résiste n° 35 (1er trim.) : Critique «Drama»

YESDrama

ATLANTIC - 36’56 - UK ‘80 ‘ Style : progressif

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TRÉSORS DE BRONCANTE80’S

On dira ce qu’on veut des «Années Rabin», il est impossible de passer sous silence ce personnage dans l’histoire de Yes. Il faut le voir comme le fil conducteur de deux époques, le catalyseur de deux publics (seventies et eighties), et le mixeur de deux approches musicales de Yes. Ce «90125» en est la parfaite illustration.

C’est vrai. On peut apprécier beaucoup ou peu le YES des années 80, il n’en reste pas moins que le succès

planétaire est arrivé avec cet album. Et pourtant, rien ne laissait présager un tel succès. En fait, le line-up de Drama se sectionne méchamment avec d’une part le «départ» de Downes et Howe pour lancer Asia, et d’autre part les séances de travail de Squire et White avec Page (le projet sera finalement avorté). Finalement, nos deux comparses font la découverte du sud-africain Trevor Rabin dont ils ne savent pas encore qu’il sera finalement le moteur de Yes dans les eighties. Un Trevor en appelant un autre, c’est Horn, à qui on reprochait son chant trop peu «andersonien» sur Drama, qui produira 90125 (en fait le numéro de référence du disque chez Atlantic). Les fans le voulaient, le voilà revenu au sein du groupe : oui, Jon himself, l’irremplaçable. Et histoire de mêler un peu plus encore modernité et tradition (et en sachant aussi qu’on vendra plus d’album), c’est Tony Kaye qui reprend du service, lui qui n’avait plus joué dans le groupe depuis The Yes Album... D’abord appelé Cinéma, le groupe reviendra très naturellement et très rapidement vers le nom de Yes. L’album sort, Yes devient populaire. Owner

of a lonely heart cartonne. La chanson symbolise bien les années 80 : le clip vidéo passe tout le temps à la télévision et le single est une vraie folie dans les soirées dansantes. L’album se vend comme des petits pains. Que demander de plus ? Et bien, certains s’interrogent : est-ce toujours du Yes (essayez

de comprendre par exemple un fan qui ne pense que par Close to the Edge ou The Gates of Delirium) ? Pourquoi avoir engagé un artiste apportant une dimension bien plus pop rock que progressive ? Le côté FM de la musique est surprenant, c’est vrai. La très courte durée des compos peut surprendre. L’absence d’autres anciens membres peut décevoir. Mais la magie Yes opère. Prenez n’importe quelle plage de 90125 et vous trouverez un chœur, une mélodie, une syncope, une ligne de basse, un solo de guitare ou quelques vocaux de Jon qui certifieront que oui, ce qu’on entend est bien du pur Yes... Mais avec un son plus moderne et une approche plus simplifiée. Finalement, Yes tente l’expérience de vivre un peu avec son temps, non ? Le même line-up opérera encore par deux fois : sur Big Generator (87) et Talk (94). Entre les coups, «on» aura créé ABWH et réuni des anciens membres pour la tournée Union. Du coup, ces disques ont évidemment moins de poids. Moi, je les défends quand même, avec courage. Et même si Rabin a surpris, voire choqué certains, il a eu un grand mérite : celui d’écouter la voix des Anciens et de continuer de faire transparaître l’âme de Yes dans ses compos.

Fred

YES90125

ATLANTIC - 44’46 - UK ‘83 ‘ Style : progressif-FM

2004 - Prog-résiste n° 35 (1er trim.) : Critique «90125»

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Paul Silveira m’annonce que Jon a un petit souci de voix et qu’il préfère me voir après le show, si possible. Qui suis-je pour discuter ? Évidemment que je suis d’accord. Mais comme je m’y attendais un peu, Jon ne s’est pas présenté à l’after-party, où étaient seulement Chris, Alan et Rick. J’étais prêt à déclarer forfait quand Paul Silveira me glissa un petit papier jaune dans la main, avec le numéro de téléphone de l’hôtel où Jon serait le samedi suivant, à Paris. Je pourrais m’y rendre pour un face à face, ou bien le faire depuis chez moi, par téléphone. Cumulez mon incertitude de pouvoir enfin le rencontrer, et la crise familiale que cela risquait de m’occasionner, et vous comprendrez pourquoi j’ai choisi la seconde solution. Le plan était que j’appelle Jon dans l’après-midi, après avoir d’abord appelé Paul pour connaître sous quel pseudo il serait connu dans l’hôtel, parce que évidemment, Jon Anderson n’est jamais connu à la réception sous son vrai nom. Surprise, Paul m’appelle vers 11 heures pour me demander de joindre immédiatement Jon, et ... ouf, la communication est enfin établie !

J.B. : Tout qui s’intéresse à Yes en connaît certainement un bout sur l’histoire du groupe, et sur la carrière de chacun de ses membres. On sait par exemple que Jon Anderson avait sorti un single sous le nom de Hans Christian Anderson, et je me demandais si c’était son idée à

lui, de devenir réellement un chanteur solo, un peu à l’instar de David Bowie

à cette époque.J.A. : Non pas du tout ! J’ai fait

ce single avec la pure intention que ce

soit un one-shot .

Bien que j’aie rencontré Jon Anderson quelques fois au cours de ces 20 dernières années, nous n’avons jamais véritablement pris le temps pour une interview. Avec Rick Wakeman de retour dans Yes, quel meilleur

«organisateur» pouvais-je avoir pour arranger l’entrevue ?

Au départ, l’interview devait se passer à Bruxelles, après mon entretien avec Rick. Alors que je me préparais à l’évènement, Rick m’a prévenu que Chris Squire prendrait la place de Jon, et que je pourrais rencontrer ce dernier le lundi matin. Comme c’était impossible pour moi, nous avons convenu du mardi à Rotterdam, où je me suis rendu. À 14h30, prêt comme jamais, je reçois un appel sur mon mobile : le tourmanager

Jon AndersonThe Jon AnderSONata

By John «Bobo» Bollenberg - Photos : John «Bobo» Bollenberg - Traduction : Pierre Romainville

2004 - Prog-résiste n° 35 (1er trim.) : Entretien Jon Anderson «The Jon AnderSONata»

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J’avais répété et joué quelques concerts avec le groupe Gun, mais nous n’avons jamais rien enregistré ensemble. Je m’étais arrangé pour que le groupe partage l’affiche de The Who au célèbre Marquee Club de Londres. Nous ne serions pas payés, mais je pensais que c’était bon pour notre renommée. Le groupe ne l’a pas vu de cette façon et nous nous sommes séparés. Entretemps j’avais réalisé deux ou trois petites choses, et ce single est l’une d’entre elles. Cependant, j’ai toujours su que je voulais absolument faire partie d’un groupe, et que je ne deviendrais jamais un vrai artiste solo. En commençant à répéter avec Yes, j’ai compris en trois semaines que nous allions dans la bonne direction, et que ces intéressantes collaborations musicales étaient ce que je cherchais vraiment.

J.B. : Jon a réalisé une multitude d’albums solo, avec une importante diversité de styles, mais les fans continuent à voir dans le premier «Olias of sunhillow» leur favori définitif. Et étrangement, Jon n’est pas d’accord...J.A. : Bien six mois avant que ne soit prise la décision de sortir cet album, tout le matériel avait déjà été écrit. En fait c’était une décision du groupe de sortir nos cinq albums solo, contrairement à ce que peut en dire la presse. Nous avions décidé que Yes n’existerait plus pendant un an, que chacun d’entre nous allait se concentrer sur quelque chose de différent avant de se retrouver ensuite, plus forts de nos expériences personnelles. Une sorte d’année sabbatique destinée à enrichir le bagage de Yes. Nous en avons alors informé la compagnie de disques ; et quand ils ont appris qu’il n’y aurait pendant un an ni album ni tournée de Yes, ils ont accepté l’idée des albums solo, qu’ils allaient promouvoir comme les autres, sachant qu’il y avait suffisamment de fans capables d’acheter les cinq. Pour moi cependant, Toltec est aussi important que Olias, il est aussi basé sur l’extension des expériences à une culture différente. Le thème central est ici l’Amérique Centrale, et je suis toujours très fier de son contenu, tant de la musique que des paroles.

J.B. : Des rumeurs disent qu’entre autres choses, Jon travaille actuellement sur un projet appelé The big if qui pourrait être considéré comme la suite de Olias... ?J.A. : Cette idée m’a été proposée par quelqu’un en train de développer un jeu vidéo, et qui a vu dans le concept de jeunesse derrière Olias des relations avec son projet The big if. L’album sortira dans quelques mois, en combinaison avec un jeu vidéo, avec des chansons et des sections

instrumentales. Ce n’est pourtant pas pour autant que je désire retourner à mes débuts en tant qu’artiste solo, j’en reviens seulement à l’idée soutenue par Olias. Cela ne parle pas vraiment de mysticisme, mais plutôt de la réalité du surnaturel, d’éléments dont nous n’avons pas la moindre idée ou que nous avons tous oubliés. Les arbres, les oiseaux, les insectes : nous n’avons aucune idée de ce qu’ils font. L’être humain tend à négliger la nature. Je veux parler de toutes ces idées à travers ma musique, car s’il y a bien une chose que j’ai apprise, c’est que nous sommes ici pour la recherche de notre créateur. J’ai appelé ce projet «Le grand Si», mais en fait j’aurais pus l’intituler «Le grand Pourquoi» ! En regardant mon travail solo, je dois bien admettre qu’il renferme une grande diversité de choses très différentes ; mais je considère chacune d’entre elles comme importante, et ayant eu une utilité et une raison d’être. Même si la moitié peut être considérée comme bien, et l’autre plutôt moyenne, je crois que tout se justifie, et qu’il y a dans chaque choses une raison qui l’a fait avoir lieu.

J.B. : Bien qu’Igor Koroshev ne fut membre de Yes que pendant une courte période, on avait parlé d’un album commun avec Jon Anderson. On avait même évoqué le nom «True you true me» et l’utilisation d’un orchestre et de chœurs. Cela semblait être un projet prestigieux...J.A. : Igor est fou, c’est tout ce que je peux dire. Nous avons en effet travaillé un peu là-dessus, mais pour ce qui me concerne, je peux dire que ce projet est oublié. Heureusement la vie continue et je vois cela maintenant comme une sorte d’aventure momentanée. On ne sait jamais de quoi demain sera fait, et il nous faut profiter de chaque instant qui passe, et puis continuer à vivre. Comme tout le monde je vis avec un tas de rêves et j’essaie d’en réaliser quelques-uns, de les transformer en réalité, et cela ne me laisse pas de temps pour cultiver de la rancune contre quiconque. Le temps est trop précieux. Je voudrais pouvoir éditer dans le futur une sorte de «journalier» musical me concernant, pour que les gens puissent comprendre notre univers. Je veux parler de mon monde musical et pas de ma vie privée, évidemment. Je viens de terminer l’enregistrement voix-piano de 12 chansons, qui sonnent de façon formidable, très fraîche et directe. Tout ce qu’il y aura sur cet album me représentera, de la façon le plus personnelle qui soit !

J.B. : Pas de rancune... Cela me semble important. Est-ce que le fait d’avoir un jour dû

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quitter Yes a été un évènement pénible ?J.A. : Pas du tout. Si tu crois dans la puissance de chaque jour, et aux décisions de ton créateur, alors tu dois bénir chaque jour qu’il t’est donné de vivre. Je n’ai ressenti aucune haine contre le groupe, ni même contre la compagnie de disque qui fut en fait la principale fautive là-dedans. Tout d’abord ils ont voulu abuser du nom Yes. Ensuite ils ont voulu faire du groupe une machine à «hit». C’est pourquoi ils nous ont fait travailler avec le producteur Roy Thomas Baker, et tout a mal tourné. Baker avait fait des millions en transformant des Cars en monstrueuse machine à fric. Il est mieux connu et respecté pour son travail avec Queen, notamment dans le traitement multi-couches des voix, mais Yes avait déjà réalisé ce genre de travail avec Eddie Offord des années auparavant. On voulait juste faire de nous un groupe pop commercial. Cette idée ne pouvait pas porter le nom de Yes. Pas plus que Big Generator ne m’appartient. Tout sur l’album a été conçu et écrit par Rabin, Horn et Squire. Je n’ai pas du tout été impliqué dans le côté créatif des choses, c’est donc une toute petite partie de ma vie musicale. J’étais très occupé par autre chose : en Grèce avec Vangelis, en France sur une symphonie, sur le projet «Chagall»... Il me semble que j’avais vraiment besoin d’un break avec Yes, et j’avais l’impression que le groupe prenait une mauvaise direction. Il ont fait Drama, que je n’ai jamais eu le goût d’écouter. Nous avons souvent discuté pour en jouer un morceau live, mais cela ne s’est jamais produit. Depuis longtemps on se dit qu’on pourrait faire «Tempus fugit» mais le groupe ne l’a jamais vraiment répété. Ceux qui pensent que j’ai pu être amer de quitter Yes prouvent qu’ils ne me connaissent pas vraiment. J’ai quitté Yes simplement parce que je pensais devoir le faire, et que l’essprit de Yes n’était plus dans le groupe. Je veux dire les changements de rythmes, d’harmonies, les structures complexes, tout ce qui faisait Yes. Quand j’ai fait Anderson, Bruford, Wakeman et Howe, cela me semblait tout simplement logique. La compagnie a mis une pression énorme pour que nous conservions le nom de Yes à la place du groupe de Chris et Alan, mais finalement, c’était simplement un épisode au travers duquel nous devions passer pour être ce que nous sommes aujourd’hui.

J.B. : Ce qu’ils sont aujourd’hui... Comment Jon a-t-il accueilli le retour de Rick Wakeman dans le groupe ?J.A. : C’est évidemment super de retrouver Rick. Nos relations ont atteint un magnifique

niveau d’harmonie, tant musicalement que «politiquement». Nous avions déjà essayé durant la période Keys to ascension, mais la quantité de projets solo de Rick avait rendu la chose impossible. Nous avions aussi des managements différents ; ce qui finalement signifie que nous devons passer davantage de temps à discuter qu’à créer ! Cela épuise ta créativité et finalement rien ne se passe. Les choses sont différentes cette fois, c’est pourquoi je suis tellement ravie de retrouver Rick dans le groupe. Nous allons enregistrer un nouvel album avec ce line-up, car je pense que le meilleur est encore à venir ! Je pourrais regretter que Rick n’ait pas été impliqué dans le projet symphonique, mais là encore c’est la vie. Je pense que Rick le regrette lui-même plus que nous encore. Quand Rick a quitté le groupe la toute première fois, nous avons répété pendant 15 jours avec Vangelis, mais ça n’a pas fonctionné. Vangelis est un groupe à lui tout seul, et il n’est pas capable de se fondre dans un projet où chaque individualité a ses propres vues et idées sur la musique. Nous n’avons rien enregistré, seulement répété. Pour autant, cela ne voulait pas dire que nous ne pouvions pas travailler ensemble, et nous l’avons fait. Plus rien depuis 10 ans mais qui sait, on pourrait réenregistrer un jour ? Pour l’instant, Vangelis se concentre sur l’écriture de la musique destinée aux prochains Jeux Olympiques, qui auront lieu à Athènes.

J.B. : J’ai toujours été frappé par le nombre de projets signé Jon Anderson, qui n’ont finalement jamais vu le jour ; comme par exemple l’album The sky and his shadow.J.A. : Je ne sais même pas où sont les bandes ! Il y a un bootleg qui circule, mais qui provient d’une cassette non mixée et non terminée. C’était fait sur une base amicale entre André Verdet et moi, avec comme principale intention d’être artistique. André a utilisé la musique au cours de ses expositions de peinture, mais jusqu’ici rien n’est sorti en disque.

J.B. : Jon aura 60 ans l’année prochaine. Pas de doute que ses enfants sont en bonne position pour gagner leur place dans l’industrie musicale. Et le fait d’en parler rend Jon plutôt fier, et ému.J.A. : Pour mes enfants cela n’est pas très important. Ils font juste des chansons et attendent de voir comment ça se passe. Depuis qu’ils sont tout petits, il y a toujours eu de la musique à la maison. Cela a été depuis toujours une partie de leur vie, mais malgré tout le respect qu’ils me portent, ils n’utiliseront pas mon nom pour

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promouvoir leur propre carrière. Damien est un compositeur fantastique, plein d’émotion. Ma fille Jade a sorti son propre album et cela démarre pas mal pour elle. Elle aura sans doute son succès dans le domaine du R&B. Alors oui bien sûr je suis fier d’eux. Pour être honnête, je ne pense pas que l’industrie du disque ait changé tant que cela au fil des ans. On peut dire qu’il y a maintenant «Pop Idol» à la TV, ce qui n’existait pas à mon époque, mais finalement quand tu auditionnais pour devenir chanteur et qu’il y en avait 20 autres pour la même place, ils prenaient celui dont le look correspondait le mieux au produit qu’ils voulaient faire. Comme ce n’était pas vraiment mon cas j’avais rarement le job... Aujourd’hui, c’est vrai aussi, les émissions comme «Thank you lucky stars» et «Top of the pops» sont sponsorisées par les compagnies de disque. Alors je te le demande : qu’est-ce qui a changé ? Ce sont les Beatles qui ont fait changer cette idée qu’il fallait être londonien pour réussir dans le business de la musique. Ils ont changé la face de la pop music en une grande affaire industrielle.

J.B. : Les enfants n’imiteront peut-être pas leur père... Mais l’inverse !?! Comment expliquer autrement que Jon ait écrit un opéra «rap» ?

J.A. : Cela a été écrit il y a 10 ans ! Je vivais dans un motel près de l’océan, et je rencontrais sans arrêt de nouvelles personnes désireuses de travailler artistiquement avec moi. Ils m’ont persuadé de m’essayer au rap et au hiphop ; je composerais et eux chanteraient. L’album s’appellera rap opera, je viens d’en terminer le mixage et nous cherchons à le sortir. C’était amusant à faire et les gens l’aimeront.

J.B. : Jon Anderson ne semble pas prêt pour la retraite...J.A. : Je pense que mon meilleur travail reste encore à venir. Que j’atteindrai la perfection à 70 ans. C’est comme un rêve en marche. Je pense que Magnification est un album formidable avec quelques grandes chansons. Nous allons à nouveau être bientôt pris dans un processus d’écriture, et je suis convaincu que nous serons à nouveau capables de créer un album qui tiendra la comparaison avec Fragile, Close to the edge, ou The Yes album. Je pense que nous sommes arrivés à un stade de notre carrière où nous nous comprenons parfaitement les uns les autres, et que cela aura des répercussions musicales ; cela peut paraître un cliché, mais je répète que «le meilleur est à venir !».

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Serrer la main du puissant Chris Squire, c’est un peucomme saluer Hulk ! Avec des mains pareilles, riend’étonnant à ce qu’on lui ait proposé de jouer de la

basse. Plus je le connais, et plus je ressens de la com-passion et de la sympathie pour les cordes de sa

Rickenbacker. Cette fois, notre discussion va plutôt seconcentrer sur son projet Conspiracy et le nouvel

album The unknown.

J.B. : La plupart du travail sur l’album est à mettre au crédit de Billy Sherwood, qui fut également, mais brièvement, membre de Yes. Comment Squire l’a-t-il rencontré ?C.S. : C’est Derek Shulman qui me l’a présenté. Derek est un ex-Gentle Giant qui travaillait à l’époque pour Atlantic. Un jour il m’a dit qu’il avait signé le projet de Sherwood (World Trade) pour son label. Ensuite ils ont changé de compagnie, mais eux deux sont restés liés par des liens d’amitié. Billy savait que Derek et moi nous nous connaissions, et il demanda par son intermédiaire si je pouvais faire quelques backing vocals sur son album. J’étais à Los Angeles à ce moment, et j’ai accepté, bien que n’ayant jamais rien écouté de World Trade. C’est là au studio que j’ai entendu à quel point World Trade était proche du son de Yes. Évidemment j’ai été intéressé par ces gens, et plus particulièrement

par Billy, un superbe musicien et compositeur. On s’est assis pour discuter d’une possibilité de projet commun, et nous avons compris dès le départ que ce ne serait pas un one-shot. Je dois avoir rencontré Billy en ‘88, et ce que nous faisions était de nous rencontrer de temps en temps en studio, de faire un peu de musique ensemble et d’enregistrer, puis de laisser ça jusqu’à la prochaine fois. Nous avons fonctionné ainsi, de 6 mois en 6 mois, pendant quelques années. Quand le premier album est sorti, il contenait de la matière qui s’étendait sur 10 ans. Nous avons juste pensé que ce serait une bonne idée de sortir tout cela, et nous l’avons fait sans trop regarder au côté contractuel des choses. Ce qui nous importait était de sortir toute cette musique.J.B. : À la sortie du premier album de Conspiracy, des bruits circulaient comme quoi le groupe pourrait effectuer quelques concerts en compagnie d e Trevor Rabin.

C.S. : Je ne pense pas. J’ai souvent parlé à Trevor, et c’est vrai que la scène lui manque, tellement il est pris dans son travail

de studio, toujours occupé à ses musiques de film. Mais c’est là que se trouve l’argent !

Trevor a maintenant tellement de boulot que c’est plutôt Billy qui lui donne une coup de main

en studio. Ça fait boule de neige ! (rires)J.B. : Initialement, le nouveau Conspiracy devait s’appeler Don’t fear the unknown, et traiter des évènements du 11 septembre...C.S. : C’était l’idée de Billy. Effectivement nous voulions fixer ce jour historique dans une perspective musicale. Ce n’est pas notre propos d’insérer de la politique dans notre démarche musicale, mais ici c’était ok. Musicalement, si bien entendu mon jeu de basse évoque quelques influences de Yes, je pense

personnellement que nos morceaux ont plus à voir avec un groupe comme Garbage qu’avec n’importe qui d’autre. C’est du modern rock, avec quelques ingrédients pop. L’album a été écrit fifty-fifty par Billy et moi, bien qu’il ait eu l’avantage de l’enregistrer dans son propre studio. Les paroles ont été écrites ensemble. Et ce n’est pas parce que je suis le bassiste que Billy s’interdit de me proposer une ligne de basse à jouer. J’aime aussi cela chez lui. Si tu écoutes un morceau comme «New world», tu pourrais dire que toute la chanson est

basée sur la ligne de basse, mais en fait presque tous les arrangements sur ce morceau sont de Billy. Pour être honnête, il faut te dire que Billy essaie la moitié du temps d’être moi ! (gros rires). Il a d’abord été batteur, ce qui explique son aisance dans la

Chris SquireConspirator Squire talks

By John «Bobo» Bollenberg - Photos : John «Bobo» Bollenberg - Traduction : Pierre Romainville

2004 - Prog-résiste n° 35 (1er trim.) : Entretien Chris Squire «Conspirator Squire talks»

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programmation des rythmes. Jay Schellen travaille avec Billy sur divers projets, et il était le batteur tout désigné pour le groupe. Mais à vrai dire, je n’ai jamais joué simultanément avec lui, dans le même pièce. Nous avons enregistré nos parties séparément, et tout fut mixé ensuite en studio. Mais sur scène, Jay serait évidemment notre premier choix, il est très fort, et il connaît la musique !J.B. : La rumeur dit que le premier Conspiracy aurait été en fait un album solo de Sherwood. Et quand on le compare à The unknown, quelle différence !C.S. : Nous avons commencé à composer ensemble à Vancouver pendant l’enregistrement de The ladder. Dans une chambre d’hôtel avec des ordinateurs, des guitares, et des petits amplis. Les mystères de la technologie, si tu veux. «New world» a été écrit là, et «I confess» aussi. En rentrant de Vancouver nous avons écrit «Conspiracy». Donc contrairement à tout ce qu’on peut dire, c’était du matériel commun. Avec des harmonies vocales proches de la marque de fabrique Yes, puisque nous le faisions aussi dans Yes. Je pense que nos deux voix donnent un très beau «bruit» ensemble, et nous partageons les mêmes idées harmoniques. Billy a aussi une belle paire d’oreilles !J.B. : Considérons donc Conspiracy comme un autre projet de groupe, et non comme du travail solo de Chris Squire, lequel devrait d’ailleurs plutôt sonner comme Fish out of water. Ne dit-on pas depuis longtemps qu’une suite à cet album pourrait être enregistrée avec les mêmes musiciens que ceux de l’époque, pour en conserver l’esprit initial ?C.S. : Je suis un peu embarrassé, car effectivement cette idée semble vraiment prendre son temps. Je crois que je devrais vraiment le refaire avec Bill Bruford. Mais avant toute chose il faudrait d’abord que je l’écrive, cet album, car je dois confesser ne rien encore avoir composé. Prendre Patrick Moraz dans l’aventure semble aussi intéressant, mais je n’ai encore approché personne. J’ai vraiment été très occupé ces derniers temps et comme toujours, je traite mes affaires personnelles en dernier lieu. Je sais que mon ami Vincent Gallo veut le produire et me pousse constamment à le faire, surtout maintenant qu’il a terminé son film et qu’il a un peu de temps de libre.J.B. : Le film «Infidels» ou Chris Squire devait tenir un rôle ??C.S. : J’ai entendu parler de cela, mais pour être tout à fait honnête, je crois que ce n’est rien d’autre qu’une blague de Gallo !J.B. : Et écrire une musique de film, jamais tenté ?C.S. : C’est un secteur très spécialisé. Trevor est spécialement formé pour écrire, composer et arranger. Effectivement, la sonorité très sombre de mon jeu de basse pourrait apporter quelque chose à des musiques de film, mais bon, soyons honnête, j’ai tellement déménagé ces derniers temps que je n’ai même pas un petit studio à la maison. Être sans arrêt

sur les routes te transforme en une sorte de gitan. Je ne ressens pas le besoin de vivre en Angleterre comme certains, et je me sens très bien en Californie. Ma femme préfère New-York, et c’est un sujet de désaccord. Mais comme mon petit garçon de trois ans aura bientôt l’opportunité d’intégrer une excellente école de New-York, je ne pourrai peut-être pas rester plus longtemps sur la côte ouest. Mon épouse a joué dans l’opéra «The young and the restless» pendant 3 ou 4 ans, et maintenant ils lui ont demandé de revenir. Peut-être que tout ceci pourrait donner du plomb dans l’aile du projet Conspiracy, parce que je sais que Billy ne bougera pas de Los Angeles, mais cette école est très importante pour mon fils. Surtout que c’est gratuit pour nous, sa grand-mère y est institutrice en chef ! Mais si Melissa et moi devons continuer à travailler à Los Angeles, tout cela devra attendre aussi.J.B. : Puisqu’on en est à la vie privée, comment as-tu vécu le décès subit de John Entwistle, le bassiste des Who ?C.S. : Tristement. Je suis très triste. Je connaissais très bien John. S’il avait vécu aux États-Unis il ne serait pas mort. Ici on se soucie bien davantage de sa santé qu’en Angleterre. Moi je fais ici un check-up chaque année et lui l’aurait fait aussi, il en avait besoin. Je suis très triste car ce qui lui est arrivé était évitable. Je suis un grand fan des Who depuis l’âge de 15 ans, ils étaient un exemple pour moi, et John une sorte de guru. J’ai vu les Who sur scène peu de temps après la mort de John et ce n’était plus pareil : le volume de la basse a été baissé, et les soli de basse ont disparu. Finalement ça devient plutôt un show de Pete Townshend. Mais c’est toujours très bien, je l’aime beaucoup également.J.B. : Étant dans le business depuis longtemps, comment approches-tu des phénomènes comme le MP3 ?C.S. : Bon, on ne peut pas arrêter le progrès. Cela demande de grosses réorganisations aux labels, qui ont leurs belles années derrière eux je pense. Depuis le temps qu’ils font un tas de profits alors que les artistes en font peu... Avec le MP3, il est possible que les choses se renversent au profit des artistes. Puis finalement tout rentrera dans l’ordre, et les compagnies retrouveront leur utilité et leur place dans le marché. Je suis convaincu que les gens sont d’accord de payer le juste prix des choses. S’ils se sentent volés, alors c’est normal qu’ils se rebellent contre les compagnies. Avec Yes, nous étudions actuellement un business plan, où tout serait gratuit pour toi (album, t-shirt) à partir du moment où tu serais membre d’une sorte de club, pour un montant de, disons, environ 50 dollars par an. Et ceci donnerait également un accès à prix correct à nos concerts. Il y a des gens qui paient jusque 600 dollars pour venir nous voir à New-York. C’est scandaleux. Nous voudrions trouver un système pour rendre leur juste prix aux choses. C’est ainsi que Yes voit le futur, mais une chose ne changera jamais pour nous : faire de la «grande» musique de YES !!

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Rick Wakeman descend du tour-bus, et se metdirectement à me parler. Avec la sortie de son

album et son retour comme membre permanentdans Yes, il a évidemment beaucoup à raconter.

Cette interview a été fait en 2 parties, l’uneavant le concert, et l’autre, très longue, après l’af-tershow et s’éternisa jusque 2 heures et demi du

matin. Privilégiés nous sommes !

J.B. : Je me demandais si Yes faisait encore des soundchecks avant leurs concerts ?R.W. : Nous n’en faisons plus pour la simple raison que quand tout sonne bien pendant le souncheck, tout change complètement une fois que tu as des milliers de personnes dans la salle. Nous avons des professionnels avec nous qui savent exactement ce que nous voulons, et qui y arrivent 99% du temps. Parfois quand ils détectent un petit problème, ils peuvent faire appel à nous pour le solutionner, mais c’est extrêment rare. Le seul d’entre nous qui descent souvent dans la salle, c’est Steve, bien qu’il ait le plus extraordinaire des techniciens-guitare. Shooz a travaillé avec les meilleurs, il construit et répare des guitares, c’est un type très respecté dans le métier. Mais malgré tout, il y a certaines guitares que Steve tient à accorder lui-même, selon une certaine routine. Moi aussi, d’ailleurs, j’ai quelques habitudes. Mon technicien Stuart Sawney arrange toute mon installation, et accorde le mini-moog du mieux qu’il peut pour le premier morceau, mais ensuite je fais moi-même les réglages au fur et à mesure que le show avance. Mes mini-moogs ont tous

été adaptés, et ils ne se

comportent plus pendant les concerts de façon catastrophique, comme le faisaient les moogs et les mellotrons des années ‘70. À l’époque le Midi n’existait pas, et il me fallait un clavier différent pour chaque son désiré. Comme la musique exigeait pas moins de 36 sons différents, j’avais tout simplement 36 claviers sur scène, bien qu’aucun d’entre eux n’avait réellement été construit pour être transporté sur les routes. L’orgue d’Église était particulièrement hilarant. Je me souviens d’un jour à Chicago ; la moitié de notre matériel était équipé de prises anglaises, inadaptées aux installations américaines. En me promenant sur la scène, j’ai remarqué que beaucoup de lampes s’éteignaient de mon côté, et senti également une sérieuse odeur de brûlé... Tous mes instruments se détruisaient les uns après les autres, car notre équipe les avaient branchés directement sur les prises américaines. En dix minutes, il ne me restait plus que mon grand piano acoustique, et un tambourin. Et c’est avec cela que j’ai dû faire tout le concert ! J’ai lu le review de ce show ensuite qui disait que «Rick Wakeman paraissait sous-mixé...», mais je n’avais que mon piano pour jouer toutes ces partitions compliquées !! Si quelqu’un possédait un enregistrement de cette soirée particulière, cela me ferait plaisir d’en recevoir une copie ! Bah, c’était ainsi. Bien souvent à la moitié du concert, le Mellotron commençait à perdre ses bandes, et je ne savais pas trop quel son allait sortir quand je poussais sur une note. Et on trouvait ça normal... J’utilise maintenant des samplers de Mellotron, mais je les ai fabriqués moi-même. Par exemple dans «And you and I», j’utilisais jusqu’il y a peu ce qu’il y a de plus moderne en matière technologique de reproduction de cordes, mais récemment, nous avons passé des heures et des heures avec Stuart pour

trouver une

Rick WakemanConfessions d’un magicien

By John «Bobo» Bollenberg - Photos : John «Bobo» Bollenberg - Traduction : Pierre Romainville

2004 - Prog-résiste n° 35 (1er trim.) : Entretien Rick Wakeman «Confessions d’un magicien»

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mixture de sons (dont un clavier italien pro-mega) pour reporduire la section de cordes dans «And you and I». Cela sonne maintenant exactement de la façon dont nous avons toujours rêvé qu’un Mellotron devrait sonner.Le double Mellotron que j’avais construit dans les années ‘70 m’avait été volé et est réapparu quelques années plus tard. Un type m’a envoyé un e-mail avec une photo de l’instrument. Il me disait l’avoir acheté et dépensé des centaines de dollars pour le restaurer, et aurait voulu quelques informations complémentaires à son propos. Je lui ai répondu que cet instrument m’avait en fait été volé en ‘78 dans les studios Shepperton à Londres. Alors, paniqué, il m’a très vite répondu qu’il n’en savait rien. Évidemment il était de bonne foi, et finalement je suis content de savoir que cet instrument est toujours entier, et conservé dans une sorte de musée. On m’a volé plein de matériel à cette époque. J’avais beaucoup d’instruments en stock, dont s’occupaient certaines personne que je pensais de confiance. Mais ils louaient l’équipement quand je n’en avais pas besoin, et mettaient l’argent dans leurs poches. Certains équipements revenaient cassés, ou alors ne revenaient jamais. Il me reste aujourd’hui peu de choses de ce temps-là.J.B. : Revenons au présent... En travaillant sur Out there, tu savais déjà que tu allais devoir te contenter d’un budget restreint, et donc probablement te passer d’orchestre symphonique, contrairement au projet Return to the center of the earth sur lequel tu travaillais presque simultanément. N’était-ce pas frustrant ? R.W. : C’était deux projets complètement différents, l’un soutenu par un gros label, et l’autre produit par une bien plus petite compagnie. On n’a jamais imaginé la possibilité d’un orchestre sur Out There, nous savions que c’était impossible. Et pourtant cet album a fini par nous coûter 100.000 livres, ce qui est quand même diablement cher. Mais c’est triste, ce qui s’est passé avec Damian Wilson, juste avant de partir en tournée pour promouvoir cet album. Tu sais que Damian a déjà chanté quelques fois avec moi, et qu’il est lead vocalist sur Out there. Mais la veille du premier concert, celui qui devait servir de warm-up à la tournée, il est venu me trouver pour me dire : «je ne suis pas capable de chanter aussi haut aussi longtemps». Je dois admettre que certains passages sont très hauts, et je lui ai proposé d’en réarranger certains pour mieux coïncider avec sa voix. On le fait avec Yes, on le fait chaque fois que c’est nécessaire. Il savait depuis le début qu’on devait faire 45 shows en 45 jours sans le moindre jour de repos. Damian le savait et ne pouvait pas utiliser cet argument. Il l’a écrit sur son site web, mais chaque membre du groupe peut te dire que c’est un mensonge absolu ! Il a aussi écrit que j’avais refusé de réarranger la musique, ce qui est un autre mensonge, nous en avons discuté devant tout le groupe et même l’équipe

technique, et nous étions d’accord de réarranger tout ce qui devait l’être. Ce que je ne savais pas à l’époque et que j’ai appris depuis, c’est que Damian n’en était pas à son coup d’essai, de laisser ainsi tomber un groupe dans la m... à la veille du départ en tournée. Il l’aurait fait aussi avec Treschold et Jeronimo Road. Il y a là un manque de professionnalisme qui nuit à sa carrière. Cela nous a créé un énorme problème ; nous avions déjà investi un quart de million de livres dans cette tournée et nous nous sommes retrouvés sans chanteur deux jours avant de partir. Notre grand sauveur fut Ashley Holt. Il était libre pour tout le temps de la tournée, et il s’est adapté très rapidement. Pendant les 3-4 premiers jours, nous avons joué les premiers morceaux en instrumental, mais il a appris au fil du temps, et nous nous avons aussi adapté certains passages pour lui. Il chantait les vieux morceaux admirablement, le public a adoré et les comptes-rendus étaient élogieux. Finalement tout s’est bien passé. Je ne conserve pas d’animosité envers Damian, mais je me pose des questions sur son professionnalisme et sur la façon dont il a laissé tomber des gens qui comptaient sur lui. Quand il a fait partie des «Misérables», il y a trouvé un crédit énorme, mais faire du rock demande une autre attitude, il faut s’adapter. Si j’ai un conseil à lui donner, c’est de rester dans le domaine théâtral, ça lui convient mieux.J’aurais bien envie d’enregistrer quelque chose avec Ashley, mais je ne le ferai pas tant que je n’aurai pas les compositions idéales pour le faire. À la fin de la tournée, je n’ai même pas eu un jour pour y penser, je devais repartir avec Yes. Mais notre tournée a tellement bien fonctionné qu’on nous a même proposé quelques dates au Japon, entre les concerts de Yes. C’est quand même étrange de recevoir pareilles propositions : aller défendre un album dans un pays où il n’est même pas encore sorti, et avec un autre chanteur que celui qui chanter sur l’album. C’est dingue le nombre de gens qui nous ont écrit en nous demandant de ressortir l’album entièrement avec la voix d’Ashley ; mais pour être honnête, la voix de Damian est impeccable sur le disque, il y a

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fait de l’excellent travail et son chant est parfaitement en place. En bon chrétien, je pourrais dire : je peux lui pardonner, mais pourrais-je oublier jamais ?Chris Squire fait son apparition et déclare «c’est dingue comme la bouffe peut être meilleure ici en Belgique que partout dans le monde. Même un hamburger est meilleur ici qu’ailleurs !». «Et les frites, alors !!», renchérit Wakeman. Mais il est temps pour Rick d’aller se doucher et donner son concert, nous nous retrouverons ensuite à l’hôtel pour continuer à bavarder.

J.B. : Parlons un peu technique, et plus précisément des samplers de piano que tu utilises.R.W. : Je possède différents pianos, mais le GEM est absolument phénoménal. Ils ont samplé chaque note dans toutes ses résonances différentes, ce qui a donné un formidable son de piano. La plupart du temps, un sampler classique est fait sur base de notes jouées avec force ; par conséquent, lorsque tu joues une note avec douceur, le son qui en sort est simplement une note jouée forte, mais à bas volume. Le résultat n’est donc pas celui qu’on obtiendrait avec un vrai piano. Mais ce qu’a fait General Music (GEM), et ils ont dépensé des fortunes pour le faire, c’est de sampler chaque note avec toutes les façons de la jouer, depuis la plus douce jusque la plus forte. Évidemment en concert, ces nuances ne se remarquent guère ; mais en studio, ce piano est le meilleur que tu puisses imaginer.J.B. : Un ami professeur de violon me dit souvent à quel point il est catastrophé en voyant de bons élèves perdre tous leurs moyens une fois qu’ils doivent jouer sur une scène. Comment fais-tu pour dominer ce stress ?R.W. : J’ai réglé ce problème très jeune, car j’avais 5 ans le jour de mon premier «concert». Mon professeur de piano avait l’habitude d’organiser des auditions pour ses élèves, durant la période de Noël, pour leur permettre de jouer devant un petit public. Tout le monde devait jouer car elle se plaisait à répéter «la musique est faite pour être partagée !». J’étais très nerveux le jour de ma première audition, il devait bien y avoir une trentaine de papas et de mamans, et puis tous les élèves à l’arrière qui allaient devoir passer par ordre d’âge. J’étais le plus jeune et je devais commencer. J’ai dû jouer une petite pièce qui ne devait pas dépasser 20 secondes, mais c’était la première fois que j’avais le droit de poser les doigts sur le grand piano à queue. J’ai joué, je me suis levé et ils ont applaudi. J’ai tellement aimé cette sensation que je me suis rassis et que j’ai recommencé ! Tout le monde se marrait, sauf mon professeur qui m’a viré de la scène ! (rires). Elle m’a ensuite inscrit à toutes les représentations et les concours possibles, en répétant que la musique était une affaire à partager. C’est probablement pourquoi je n’ai plus jamais été

nerveux depuis, j’ai été éduqué avec cette idée que la principale raison de faire de la musique est de la jouer en public. J’en connais qui deviennent en effet carrément malades à l’idée de monter sur scène, mais je ne sais que dire pour les aider. Certains préfèrent aussi surtout ne connaître personne dans la salle, et refusent d’inviter les frères et sœurs ou oncles et tantes. Moi c’est plutôt l’inverse, je cherche souvent des têtes connues dans le public à qui me rattacher, mais j’aime aussi beaucoup jouer devant des milliers d’inconnus.J.B. : Alors, qu’en est-il de ce Xème retour dans Yes ?R.W. : En théorie, j’ai quitté Yes à deux reprises. Une fois après Tales from topographic oceans en 1974, j’ai rejoint le groupe en ‘76, pour le quitter à nouveau avec Jon en janvier ‘80. Bien sûr j’ai participé à la tourné Union, mais c’était surtout une idée du management américain qui voulait voir revenir Jon dans Yes. En fait ils ont mélangé le Yes de Chris avec ABWH. Sans chanteur ils n’avaient pas de groupe. Depuis le début de la tournée, les 3 autres de ABWH savaient très bien qu’ils ne seraient pas invités à rejoindre Yes ensuite. Le management US voulait seulement Jon, mais ils étaient obligés de tenir un peu compte des trois autres, Bill, Steve et moi. Donc on ne peut pas dire que nous ayons vraiment quitté le groupe à la fin de cette tournée. Mais finalement, on peut dire que le management s’est trompé, car ce n’était pas ce que voulaient les fans. C’est pourquoi durant Keys to ascension ce management a disparu, et le line-up actuel s’est reformé. Depuis je n’ai plus vraiment quitté. En fait il y avait tellement de managers différents engagés dans cette histoire que ça en devenait risible. Il y en avait partout qui s’occupaient de tout et de la même chose. Ils ont signé une tournée solo pour moi en même temps qu’un tournée avec Yes. Tu dois savoir que ce genre de managers ne discutent jamais entre eux. Je me suis donc retrouvé carrément obligé à partir en tournée, pendant que Yes partait dans une autre. Après cela j’ai fait Return to the center... et je me souviens t’avoir dit à l’époque que je ne voyais pas bien comment nos agendas me permettraient de rejoindre le groupe. Puis cet évènement eut lieu, un peu par accident, finalement : la BBC diffusa une émission sur moi, intitulée «This is your life». À un moment dans le reportage, les membres de Yes ont été invités à dire quelques mots, et j’ai vu Steve dire quelque chose comme «Salut Rick, bonsoir et bravo. Nous avons fait de grandes choses ensemble, et ce serait vraiment chouette de pouvoir en faire encore...». Et sans réfléchir je me suis dit «Ouais, ce serait bien !». Je me suis alors rendu compte à quel point Yes m’avait manqué. Je suis un fan de Yes, j’achète leurs albums même quand je n’y joue pas, et je me dis toujours «ici, j’aurais joué pareil», ou «là, j’aurais fait ça différemment». Et oui bien sûr j’aurais

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adoré participer au projet «symphonic». J’ai toujours voulu que Yes fasse un album symphonique, et j’avais des idées très précises sur la façon dont il fallait le faire. Non pas des chansons avec des arrangements d’orchestre, mais bien un orchestre symphonique jouant AVEC un groupe. J’aurais vraiment voulu participer à Magnification, dont j’aime beaucoup de morceaux, mais j’ai été déçu par les partitions d’orchestre. C’est comme s’il était là seulement pour les accompagnements, on ne l’entend pas vraiment. Alors quand j’ai rejoint le groupe, comme il n’y avait pas de parties de claviers écrites, j’ai repris toutes ces partitions et refait mes propres arrangements. Il n’y a rien de mauvais dans l’original, mais ce n’est simplement pas ce que j’aurais fait, et je regrette vraiment fort de ne pas avoir été là.Ce qui s’est passé ensuite est aussi assez étrange. Un jour, Robert demande pour me rencontrer aux studios Shepperton, et me demande si je suis intéressé pour rejouer dans Yes. Ce groupe est une grande partie de ma vie, et Yes m’a vraiment beaucoup manqué, c’est pourquoi je lui ai répondu oui. Mais en même temps je lui ai précisé que c’était impossible. «Pourquoi ?» demanda-t-il. Pour plusieurs raisons ; le première d’entre elles est que nous sommes vraiment très occupés. Nous travaillons eux et moi avec des agendas programmés sur un an à l’avance. Robert m’avoua que Yes disait exactement la même chose, que c’étaient des raisons de simple logistique qui rendaient la réunion très difficile. Il constata alors que eux et moi étions «bookés» effectivement pour une certaine période ; mais si nous acceptions de ne plus prendre d’engagements ensuite l’un sans l’autre, il n’y aurait plus de raisons pour ne pas se réunir à nouveau. Je n’étais pas vraiment convaincu. Qu’allait-il se passer pour moi si par exemple Yes ne tenait pas ses engagements, et que moi je me retrouve sans plus rien à l’agenda ? «Peu de chance que ça se passe ainsi», me répondit Robert. C’est alors que Chris m’a téléphoné ; de passage à Londres, il désirait me voir. Ça a été comme au bon vieux temps. On a passé quelques jours ensemble, on s’est amusés, nous sommes allés à l’anniversaire de son frère. J’ai eu Jon au téléphone, j’ai parlé à Alan, Steve et moi avons eu quelques discussions et il devenait évident que nous voulions tous que ça se passe. Mais alors ça a commencé ; les managers, les avocats, il y en avait partout. Les papiers s’amoncelaient comme des bottins de téléphone. J’ai dit à Robert que tout ce que je voulais, c’était seulement jouer. Toute cette matière juridique avait empoisonné Yes depuis des années, et Robert suggéra que je fasse comme si de rien n’était et que je classe tous ces papiers à la poubelle ! Pour te dire à quel point c’est dingue, j’ai reçu, il y a un mois un coup de fil d’un avocat me spécifiant qu’il avait enfin reçu un e-mail annonçant l’arrivée prochaine d’un contrat m’autorisant à participer à la tournée...

À quelle tournée ? Celle de l’année passée !! Si les choses fonctionnent si bien avec Yes aujourd’hui, c’est parce que nous avons appris du passé que ce sont toutes ces choses qui ont empoisonné la vie du groupe. C’est d’ailleurs le cas pour plein d’autres groupes. Quand le business commence à prendre le pas sur le reste, tout s’effondre. Je connais des groupes qui ont des rendez-vous avec des avocats et des comptables deux heures avant de monter sur scène... Comment veux-tu qu’ils se donnent ensuite à fond dans leur musique ? C’est aussi ce qui a tué mon projet avec Bill Bruford et John Wetton, qui devait s’appeler British Legion. Nous avions écrit quelques bonnes choses et nous étions excités par le projet. Mais le Melody Maker a eu vent de l’affaire et en a fait sa première page. Cela a ensuite été une pluie de coups de téléphone : managers, labels, avocats, etc... Émotionnellement, c’était insupportable pour moi. À l’époque je possédais une petite ferme à la campagne, j’ai pris ma voiture et je suis allé m’y isoler. Sans plus répondre à personne, juste manger et jouer de mon vieux piano debout.Encore une preuve que les journaux spécialisés ne font pas que du bien ! Si on avait dû les croire dans les années ‘70, Yes était en guerre avec Pink Floyd, Genesis ne parlait pas avec Jethro Tull, et Wakeman aurait bien tué Emerson...Keith et moi sommes bons amis, nous avons souvent mangé ensemble. Il n’y a pas si longtemps, j’avais même discuté avec lui de projets communs éventuels. Et là, encore une grosse surprise... Ce sont encore les managements qui ont tout foutu en l’air. Donc tant qu’il est avec son manager actuel, ce ne sera sûrement pas possible. Tout allait bien, et nous avions plein de bonnes idées musicales, et également ce projet de partir en tournée avec nos enfants respectifs. Une tournée «father and son» ; lui et Aaron, moi et Adam. Ce manager a toujours pensé que nous nous haïssions. Mais nous sommes amis depuis trente ans. À l’époque on s’appelait de temps en temps pour se demander «alors, que suis-je sensé avoir dit sur toi récemment ?» et inversement. Jamais ils n’ont écrit que nous étions de mauvais claviéristes, mais seulement que nous ne pouvions pas nous sentir.Depuis toujours nous jouons différemment, mais nous sommes arrivé à cette conclusion, concernant ce que pourrait bien être un claviériste idéal. Keith a une terrible main gauche, dont la technique est bien meilleure que la mienne. En revanche, ma main droite est incontestablement supérieure. Donc si on arrivait à cloner sa main gauche et ma main droite, je crois qu’on obtiendrait quelque chose d’idéal ! (rires)J.B. : Pour sûr, ce claviériste serait bien payé ! À ce sujet, on est loin aujourd’hui du jeune Rick Wakeman qui se promenait en Rolls et vivait dans de grandes villas équipées de tout le luxe imaginable. Il semble que tu n’aies jamais autant

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travaillé... Avec rien sur ton compte en banque !R.W. : Exact. Mais je suis toujours un type qui veut seulement jouer de la musique ; et de ce côté-là, je n’ai pas changé. Avec mon dernier divorce je suis à nouveau revenu à zéro. Je n’ai même pas de maison, je n’ai plus de «chez moi» depuis trois ans. J’ai juste un flat au-dessus de vieux bureaux mais je n’y suis jamais, je suis constamment sur la route. C’est dans ces moments-là, quand tu n’as plus rien où aller, que tu reconnais tes vrais amis. Mon comptable m’a dit clairement que j’avais maintenant une grande opportunité ! Mais je me demandais bien ce qu’il y avait de si excitant d’avoir plus de 50 ans, et d’être globalement dans la dette... Il me dit «Tes enfants ont grandi et tu ne dois plus t’en occuper !». Vrai. «Que préfères-tu faire dans la vie ?». De la musique, bien sûr, lui répondis-je. «Depuis des années tu as toujours tout fait en fonction des intérêts de ta famille, mais aujourd’hui, que tu le veuilles ou non, tu es libre. Si quelqu’un t’offre un million pour aller jouer en Afghanistan, tu n’as plus à vérifier si tout cela coïncide avec le planning de tes enfants, tu dois juste faire ta valise et prendre l’avion !». Depuis ce jour, j’ai reformé le English Rock Ensemble et je suis sur la route pour faire ce que je préfère : de la musique. Les seules fois où c’est un peu difficile à vivre, et là je vais être complètement honnête avec toi, c’est à la fin de longues tournées mondiales. Je me souviens par exemple, quelque part au Mexique, nous terminions cette tournée avec Yes et tout le monde était très excité à l’idée de rentrer à la maison. Steve m’a demandé quels étaient mes projets, et je suis resté sans voix. Bien sûr je comptais bien aller voir mon amie à Milan, et rencontrer aussi mes enfants, mais à part ça... Cela ressemblait bien au vieux syndrome de la valise : un hôtel pour chaque jour. Alina possède un petit appartement au-dessus de la galerie qu’elle gère, mais tout est tellement cher à Milan que c’est vraiment petit. Et il a fallu que Steve me pose cette question pour que je me rende compte que je n’avais même pas sur moi une clef pour ouvrir une porte de maison. C’est bien d’avoir cette liberté d’aller là où la musique te mène, mais c’est aussi très bien d’avoir quelque part un endroit qu’on peut appeler «chez soi». Je n’ai même plus de place où me reposer et jouer tranquillement du piano. J’ai bien un arrangement avec un studio à Londres, mais c’est pas pareil. Ceci dit, c’est très pratique pour planifier l’organisation des choses avec Yes. Nous avons eu une réunion de planning récemment, pour arranger les dates de travail en 2004, car nous voulons sortir cette année un nouvel album studio. Habituellement, je crie fort au cours de ces réunions, mais là, j’étais assis très tranquillement pendant que les autres s’arrachaient les cheveux pour arranger leurs agendas. C’est Alan ou Jon qui m’ont demandé : «et pour toi, Rick». Je leur ai répondu «C’est où vous voulez quand vous voulez, tout est bon pour moi !».

Ma valise est toujours faite, je suis devenu un vrai musicien gitan. Les autres ont plein de contraintes par rapport à moi. Bien sûr j’ai ma famille, et il m’arrive de voir débarquer mes enfants pour me dire qu’ils m’aiment beaucoup... Et qu’ils sont à court de fric ! C’est ce que font les enfants... Et c’est bien ainsi. Ce ne sont pas des anges, mais je les aime profondément, et tous de la même façon. Ils ont tous vraiment bon cœur, et je ne pourrais rien souhaiter de mieux. J’aime leur compagnie, et nous pouvons tout nous dire.J.B. : Au vu des réactions du public, quand tu exécutes ta partie solo au cours des concerts de Yes, il semble bien que beaucoup te considèrent comme le seul claviériste de Yes. Mais pour toi personnellement, quel aura été ton meilleur remplaçant ?R.W. : Bonne question. Si je devais y réfléchir plutôt en fonction de leurs contributions respectives, je te répondrais bizarrement Geoff Downes, pour ce qu’il a fait sur Drama. Parce qu’il a vraiment apporté un style distinctif à cet album, en l’absence de Jon et moi. Je ne les ai jamais regardés en fonction du fait qu’ils pouvaient jouer mes parties correctement au niveau technique, mais en fonction de la nouvelle dimension qu’ils pouvaient apporter à la musique de Yes. Pour être honnête, je pense qu’aucun n’y est vraiment arrivé. Et ce n’est pas de leur faute, ils ont fait de leur mieux, mais Yes n’est pas un groupe facile à intégrer pour un claviériste. Leur musique est à prendre ou à laisser, et c’est ce que je n’ai plus su faire après Topographic oceans. Et j’ai été heureux d’entendre Relayer ensuite. Je ne l’ai pas aimé, et je ne l’aime toujours pas, mais j’ai été heureux de l’entendre. Je l’ai acheté et écouté de bout en bout et je me suis dit «il n’y a rien que j’aurais pu apporter à cela». J’ai alors vraiment su que j’avais pris la bonne décision de ne pas les suivre dans cette direction, ne pouvant rien y apporter. Le style jazzy de Patrick Moraz y était parfait. Mais pour Yes, Relayer était une sorte d’impasse. Ils devaient ensuite faire demi-tour et revenir sur la route principale, ce que nous avons fait avec Going for the one, qui est en fait pour moi la suite logique de Close to the edge. Lors de la tournée de promotion de l’album jouer «Awaken» a été techniquement difficile. Mais maintenant je peux le jouer comme j’ai toujours pensé qu’il fallait le faire, et j’aime ce morceau profondément. «Awaken» a toujours été ma pièce favorite. C’est géant de le jouer encore, maintenant que nous en avons une excellente compréhension commune, ce qui n’a pas toujours été le cas.J.B. : Cette année, vous avez joué sur scène bon nombre de morceaux qui n’avaient plus été joués depuis longtemps. Et pourtant, il en reste plein qui n’ont jamais eu cet honneur !R.W. : On ne peut pas satisfaire tout le monde, on n’en a pas le temps ! Nous devons sans arrêt choisir

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de laisser des gens insatisfaits. Nous n’avons jamais rien joué de Drama parce que Jon et moi n’étions pas impliqués dans l’album, mais je crois que Chris inclut un peu de «Tempus Fugit» dans son solo. Je n’aurais pas de problème à jouer «Owner of a lonely heart» même si je n’étais pas sur l’album et qu’il n’y avait pas de clavier initialement, mais Steve n’est pas très chaud pour le jouer. Sur Union il sonnait bien, mais sur la tournée symphonique c’était plutôt horrible. Normalement, nous sommes tout de suite d’accord sur 70% de la matière à jouer, et pour le reste nous avions l’habitude de nous disputer longuement... Mais aujourd’hui tout cela se fait dans la douceur. Aux États-Unis, nous avons joué une des faces de Topographic pendant toute la première partie de la tournée. Pour la seconde, j’avais encore repris ce morceau sur ma liste, j’aimais la façon dont nous le jouions. À mon grand étonnement, les autres n’en ont plus voulu.J.B. : Rick n’est vraiment pas chaud sur l’idée de faire un concert «one-shot» avec tous les musiciens qui ont un jour fait partie de Yes...R.W. : Nan, ça n’irait pas ! Voilà ce qui avait été décidé pour la tournée Union : ceux qui voulaient en faire partie devaient avoir participé à au moins deux albums studio et deux tournées. C’était le critère de sélection. Mais concernant cette idée, que ferait-on de Alan, qui joue les morceaux de Fragile et Close to the edge depuis 1973 alors que Bill, qui a quitté le groupe dès la sortie du studio, n’a jamais joué Close en live ? Cela nous a toujours ennuyé ; Bill savait qu’il allait partir pour rejoindre Fripp mais il est resté pour terminer l’album. Et c’est Alan qui a sérieusement repris cette musique à son compte depuis. Alors lequel des deux devrait jouer «Close to the edge» ? En outre, si c’est vrai que beaucoup d’anciens membres sont restés amis avec la majorité du «clan» Yes, il en est d’autres qui feraient tout pour éviter de nous rencontrer !J.B. : Rick semble contrarié, quand on lui parle des journalistes... Pourquoi donc est-il si compliqué de trouver des interviews réellement intéressants de groupe comme Yes ?R.W. : Imagine : tu dois interviewer David Beckham et que ta première question est de savoir dans quel club de football il joue. Il va se lever et quitter la pièce immédiatement ! C’est pourtant à ce genre de question qu’on doit répondre 9 fois sur 10. Pas vraiment les tout jeunes, mais ceux dans la tranche 25-35 ; ils n’ont aucune idée de ce dont ils nous parlent. Des questions du genre «combien de personnes dans le groupe ?», «Comment écrit-on Squire ?», «Monsieur Wakeman, vous êtes guitariste ?»... Mais bon Dieu, avec internet ça te prendrait seulement 2 minutes de te renseigner un peu ! Les plus jeunes ont une approche un peu différente ; ils nous disent que leurs parents ont tous nos disques, mais que eux écoutent autre chose. Quoi qu’il en soit, il y a peu de questions

qui m’intéressent.Mais l’industrie musicale, du haut jusqu’en bas, est remplie soit d’amateurs, soit de gens qui ne devraient pas y être. Dans les ‘70, cette industrie était plus petite, plus compacte, bien qu’elle touchait davantage de gens. Les journalistes musicaux étaient correctement payés, écrivaient pour des journaux prestigieux, avec un lectorat large. Du moment où cette presse a commencé à devenir «bon marché», «people», ça a été fini. Par exemple le New Musical Express, qui n’avait jamais été que le second derrière le Melody Maker, s’est installé dans cette tendance «people» à la fin des ‘70, en même temps que le punk. Ils ont commencé à écrire des choses jamais vues avant. Ils pouvaient écrire à la une des trucs comme «Rod Steward est un branleur», ce qu’aucun autre média ne se permettait à l’époque. Melody Maker a fini par essayer de suivre cette tendance, mais un tirage est passé de 1 million d’exemplaires chaque semaine à 7 mille environ, quand ils ont fait faillite. J’ai commencé à acheter Melody Maker à 11 ans, en 1960. Jusqu’au milieu des ‘70, c’est un journal que tu pouvais acheter tous les mardis matins, et après l’avoir lu tu avais une sacrée bonne idée de ce qui se passait dans toutes les formes de musique partout dans le monde. Il y avait des pages folk, jazz, rock, pop, techniques, du courrier, des comptes-rendus de concerts et des tas d’articles très bien écrits. Aujourd’hui, il n’existe plus rien de similaire, quelque chose qui aborde la musique comme un phénomène global. Je suis convaincu qu’il y aurait un marché pour un pareil journal. Mes enfants ont entre 17 et 31 ans, ils ne sont pas différents des autres jeunes, sont intéressés par la musique, mais ne trouvent pas de magazine qui réponde à leurs attentes.

J.B. : Cette fois, il est vraiment très tard, et nous peinons à garder les yeux ouverts... Un dernier mot sur l’Italie où tu passes maintenant une partie de ton temps.R.W. : Ah l’Italie, il s’y passe des choses incroyables. Regarde Berlusconi, qui possède à peu près tout même une équipe de football. Il a été poursuivi au tribunal pour une chose ou l’autre, et hop il a rédigé une loi pour le prémunir de tout ! C’est tous les jours comme une pièce de théâtre, là-bas. Et tant que j’y pense, on avait aussi pensé faire quelque chose avec Pavarotti, mais là encore on a dû faire face à une armée d’avocats avant même de pouvoir lui adresser la parole ! Alors Basta !

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Rick Wakeman est venu à PaRisPRésenteR son nouveau DvD «outtheRe» enRegistRé avec l’englishRock ensemble. invité De nsDs(fan-club fRançais De Yes), il s’estPRêté au jeu De l’inteRvieW avec unRéel PlaisiR et un humouR bien bRitish,avant De RePaRtiR aux états-unisPouR la mise en Route De la tRounéemonDiale 2004 De Yes commémoRantles 35 ans Du gRouPe. tous au Zénithà PaRis le 22 juin PRochain !PatRick buchmann

année Mozart a écrit telle œuvre, si le jazz ou le folk sont passés aux oubliettes ; la musique parle d’elle-même. Elle surmontera l’épreuve du temps ou disparaîtra dans les abîmes de l’oubli... Nous, musiciens, ne saurons jamais quelles œuvres survivront, c’est triste...

As-tu pensé à faire une vidéo ou un DVD éducatifs ?On me l’a demandé plusieurs fois, mais j’ai toujours refusé. Si je délivre tous mes secrets, je perds ma personnalité ! Le business est suffisamment rude pour ne pas avoir à me battre contre des musiciens qui savent comment je «fonctionne»... Si l’on me proposait l’équivalent d’une super cagnotte du loto, je reviendrais sur ce que je viens de dire !

Utilises-tu le même matériel pour tes concerts solo que pour la tournée Yes ?Non, mais c’est quasiment le même pour Yes 35 que celui de la tournée précédente. J’ai toutefois reprogrammé beaucoup de sons et ajouté des mises à jour logicielles au Moog Voyager. J’ai ajouté un échantillonneur Akai S 3000 à mon rack d’effets et un Grand Piano Valdesta fabriqué en Italie pour la section acoustique qu’on inclura dans le set. Je programme chaque son moi-même avec l’aide de mon technicien ! Les sons et patchs sont créés pour chacun des morceaux du set. Les sons sont stockés sur l’ordinateur, mais il ne joue rien : je n’utilise jamais de séquences sur scènes... Eh oui, c’est bien moi qui joue !

As-tu toujours un vieux Mellotron dans ton

2004.06 - Keyboard Magazine n° 187 : Entretien Rick Wakeman «La Quête Fabuleuse...»

INTERVIEW

Rick Wakeman

Peux-tu nous décrire le concept que renferme le CD et DVD «Out There», et penses-tu que les concept-albums restent une manière viable de partager tes idées ?Je ne me soucie guère de ce que les gens pensent des concept-albums, de ma musique, ou de celle de Yes ; bien sûr, on est tous contents si les gens apprécient nos créations, mais nous ne sommes pas des machines qui crachent de la musique sur commande. Lorsque je nage dans une atmosphère de piano acoustique, je compose et enregistre en conséquence. Pour «Out There», j’étais vraiment dans une phase conceptuelle et j’aimais l’idée fabuleuse (au vrai sens du terme) d’aller dans l’espace pour y découvrir les origines de la musique. Personnellement, je suis très content du DVD, mais il a coûté très cher et ne sera sûrement jamais amorti !

Le concept du concept-album, justement, n’aurait donc rien de... dépassé ?«Dépassé» est un mot étrange... Je ne me pose jamais la question de savoir en quelle

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grenier, et peux-tu me dire la principale différence entre le Mellotron et le Birotron ?Le Mellotron était un instrument au son fabuleux, cauchemardesque à jouer, inaccordable, toujours en passe et dont la note tenait 8 secondes. Le Birotron était un instrument au son fabuleux, cauchemardesque à jouer, inaccordable,

toujours en passe et dont la note tenait 8 minutes !... Non, je n’en ai plus. La boîte qui les vend m’a proposé d’en acheter un... Je leur ai dit que si j’en utilisais un, cela influerait sur leurs ventes, et qu’il fallait donc qu’ils me l’offrent ! Voilà pourquoi je n’en ai pas !

J’ai lu sur ton site que tu ne touchais pas un centime sur tout ce que tu as fait avant 1994 !C’est une triste mésaventure fiscale qui m’a obligé à vendre tous mes droits (perso et Yes compris) avant cette date. C’est tragique, mais il ne sert à rien de s’apitoyer sur le passé... J’ai toujours préféré me tourner vers l’avenir.

Je pensais qu’un artiste de ta trempe était multimillionnaire... Comment gagnes-tu ta vie ?OK, parlons franchement... Premièrement, j’ai été marié et divorcé trois fois : je peux t’assurer que ce n’est pas un sport bon marché !... Au fait, qu’on ne me parle plus de mariage... Deuxièmement, j’ai toujours beaucoup investi dans ma musique, mon matos, mes tournées et mes projets : pas donné non plus ! Ensuite, j’ai eu un échantillon assez nul au niveau du management, des conseillers, et j’ai trop écouté des gens qu’il ne fallait pas ! J’ai maintenant la chance d’avoir un bon comptable, un bon avocat, un bon assistant et un très bon agent pour mon travail TV et médias. Je travaille avec une super maison de DVD, Classic Pictures, et j’ai ma propre maison de disques et d’édition. Je n’ai pas de management perso pour ma musique, car je n’en ai pas encore rencontré la personne qui avait la moindre idée de ce qu’elle faisait, ou devrait faire ! En gros, je

commence, malgré mon grand âge, à être entouré par une bonne équipe.

Ne nous privons pas de la question qui peut rapporter gros : quels conseils avisés peux-tu donner au jeune artiste/musicien/compositeur ?Trouver un bon avocat spécialisé dans le

business de la musique et ne rien signer sans qu’il ne le dise : ce n’est pas plus compliqué. Trop de jeunes groupes ont signé leur âme au diable pour quelques misérables euros et l’ont regretté amèrement peu de temps après !...

Préfères-tu un batteur ou une boîte à rythmes ? Et est-ce une décision musicale ou économique ?J’aime la combinaison des deux en studio, comme je l’ai fait dans «Return To The Center Of The Earth». En live, la question ne se pose même pas : un batteur !

Pratiques-tu des exercices pour garder

l’entraînement de tes doigts ?Lorsque je ne tourne pas, je me contente de jouer du piano 2 à 3 heures par jour. Je souffre de rhumatismes et je me dois de rester le plus souple possible : le jeu régulier est le meilleur remède.

Un petit scoop sur le look de la prochaine tournée de Yes ?Look très différent ! La scène dessinée par Roger Dean est magnifique. Le set est totalement différent de tout ce que j’ai fait avec Yes et je le trouve excellent ! C’est un grand pas en avant dans le potentiel du groupe et il y aura sûrement quelques belles surprises...

Le show est-il prédéfini pour la tournée ou s’agit-il

d’un noyau basique autour duquel gravitent les titres au fil des envies ou de l’ambiance ? C’est le même set chaque soir ; c’est trop compliqué de le changer, mais lors de certains festivals, nous sommes obligés de le réduire pour faire face aux contraintes de timing. Cela dit, chaque note n’est pas immuable et il y a plus de libertés au sein d’un set qu’on ne se l’imagine... Imagine une rivière sur un lit de galets : elle les touche tous, mais s’écoule différemment entre chacun d’eux... n

«La musique parle d’elle-même.Elle surmonte l’épreuve

du temps ou disparaît dansles abîmes de l’oubli...»

Le matérielde l’artiste� Deux racks contenant :1 sampleur E-mu E41 Korg Triton Rack1 Korg X5DR1 Korg MS2000R1 ART Studio FX1 Akai S 30001 Grand Piano Valdesta� ClaviersGEM Promega 3Korg 01W ProXKorg BX3Korg KARMAKorg ProphecyKorg Trinity ProMoog MinimoogMoog VoyagerRoland XV88Roland RD700 Piano

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2004.08 - Rock & Folk n° 444 : Photo S. Howe & reportage concert du 22 Juin au Zénith «La fête YES»

RICK WAKEMAN - OUT THEREClassic Pictures - 2004 - 100 min

Il était prévu, après la sortie de l’album du même nom, que Wakeman et son nouveau groupe, le New English Rock Ensemble, fasse paraître un DVD retraçant le concept de cet album. C’est chose faite avec cette superbe boîte à images qui suit un autre DVD, Live in Buenos Aires, où le N.E.R.E. renaissait de ses cendres sous une autre forme, celle qui a concocté Out There. Vingt-sept ans après No earthly Connection puis une reformation après l’album 1984, Wakeman a mis cinq ans pour rôder ce nouvel ensemble, s’occupant de la musique, des textes et de la production. Cette formation inédite ne manque pas de sel quant à sa composition, Damian Wilson (Landmarq et Threshold au chant), Lee Pomeroy (Archive !! basse), Ant Glynne (guitare) et Tony Fernandez (batterie), vieux complice de Wakeman et seul rescapé du mythique N.E.R.E. originel. Présenté comme la suite de No earthly Connection par Wakeman himself et bénéficiant de l’apport de l’English Chamber Choir, ensemble officiant déjà sur The Myth of King Arthur, Out There est un véritable album de rock progressif comme on l’attendait de la part de Wakeman depuis très longtemps ! Les six morceaux sont magnifiques chacun dans un style différent et le pompiérisme qui maquillait comme une vieille catin plus d’un opus du maître es-claviers disparaît pour ne laisser que la «substantifique moelle» de parties de claviers somptueuses qui n’en rajoutent guère dans l’esbroufe. À signaler que Wakeman accepte de partager l’espace sonore pour des interventions solistes qu’il occultait à son seul profit auparavant. Glynne a ainsi le droit de nous filer d’acérés soli, en particulier sur Universe of Sound où le mellotron fait surface et un final de toute beauté, quasiment «yessien» dans son entreprise ! Out There, le titre, se décompose en six mouvements où se mélange même un apport néo-progressif dû à la présence de Damian Wilson. Le DVD en lui-même bénéficie d’images de la NASA pour offrir ce que la jaquette précise et présente avec ostentation comme le tout premier «Progressive Rock DVD Album». Classic Pictures, le label de Wakeman n’a pas tort puisque outre le Brave de Marillion qui était plutôt un gigantesque film-clip reprenant l’album dans son intégralité, je ne connais pas beaucoup d’autres exemples d’album sorti sous deux formats, CD et DVD à l’identique. Cependant, ont été rajoutés le classique et indispensable making of du concept et

des images de la tournée. À signaler que Ashley Holt a remplacé Damian Wilson pour celle-ci, celui-ci refusant de partir sur la route trop longtemps ! Holt, autre ami de longue date de Rick Wakeman. Bruno VERSMISSE

2004.07 - Harmonie Magazine n° 51 : Critique «Out There»

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22 juin 2004, Zénith (Paris), 20 heures. Un défi. Un Challenge, comme on dit. Il faut dire que j’avais arrêté de fumer depuis trois jours. Je me disais : Si je peux aller à un concert du groupe les Yes sans fumer, c’est que je ne fumerai plus jamais. Manœuvre, magnanime et toujours optimiste, m’avait donné deux places. Mais j’avais beau supplier mes amis, leur promettre une invitation au restaurant après coup, même chez Bofinger, personne ne voulait venir voir mes copains les Yes avec moi... C’était du définitif...

Les thon mayonnaiseJ’arrivais donc seul ce soir sur ce sentier qui mène du métro au Zénith. Un endroit sacré ! Là, en 1982, j’avais vu les Jam et ma vie avait changé. Plus tard, Iggy Tournée Instinct, Dylan en quantité industrielle. Non pas que j’aime le Zénith, mais il est associé à plein de bons souvenirs. Et ce soir ensoleillé de juin 2004, seul infiltrant les lignes ennemies, ça commence mal : un petit garçon, avec ce qui doit être son oncle, dit : «Tu sais, j’ai jamais vu de concert...» Pauvre gosse... Même pas dix ans qu’on le traîne à un concert des Yes. Après, on s’étonnera, on dira qu’il est lent à l’école, qu’il a du vague à l’âme ou l’air brindezingue. Bon... J’ai ma seconde place, je compte l’offrir à qui en voudra. Je l’ai déjà fait, ça a le don de mettre en fureur les revendeurs de billets au marché noir. Le problème, c’est qu’il n’y a personne. Pas un chat, personne ne cherche de place. Au contrôle, trois personnes, le concert est censé commencer dans cinq minutes ! Je passe le portillon, rentre dans l’enceinte, et là, c’est le choc ! C’est vide... Parsemé de gars... Certains ont même des copines ! D’autres sont carrément en famille. Le père sans cou, la mère sans cou et les nains sans cous... Un individu arbore un T-shirt Dieu soit loué... Je suis perplexe. Un tour au bar révèle une caractéristique

rarement étudiée du Yesman. Le Yesman ne boit pas des bières comme n’importe quel amateur de rock à un concert... Non, il mange des sandwiches ! Avec une nette préférence pour les thon mayonnaise. Des thon mayonnaise partent par dizaines, les Yesmen sont tout contents avec leurs sachets pleins de mie... L’un d’eux a un T-shirt Quadrophenia, ce qui me conforte dans ma prime impression : cet album des Who a toujours été ignoble... Après une boisson enfilée pour mettre du cœur à l’ouvrage, il est temps de rentrer dans le ventre de la bête, et d’aller voir la fosse... Il faut se pincer pour le croire : jamais vu le Zénith aussi vide. Les gradins sont bâchés à partir du dixième rang et un tiers des places restantes est vide. La fosse idem. On peut aller toucher la scène en dix secondes, on peut se promener, on pourrait faire une partie d’échecs ! Seuls à gauche et à droite, deux types en chaises roulantes me sont immédiatement sympatiques... On sent qu’on les a invités, qu’ils ne sont pas là de leur plein gré. J’observe les Yesmen. Il y a du provicial en flight jacket cuir vieilli et jean neige ou pantalon imprimé à l’africaine. Il y a aussi de l’employé de banque en costume Monsieur De Fursac...

Ce soir, c’est ta fêteSoudain, une symphonie quelconque réveille cette masse et le voile se lève... Mince ! Quel décor ! Des anémones de mer en nylon jaune toutes gonflées sont là comme des gros champignons flottants tandis qu’une sorte de moule géante se lève et se transforme en crabe. Ces Yes doivent être des fans du commandant Cousteau ou de Thalassa... Et ils arrivent, terrifiants. Le guitariste qui avait joué avec Tomorrow ressemble au valet bossu de Dracula, celui qui ouvre la porte en courbant l’échine. Le clavier est un spectre blond coiffé à la Duguesclin et le chanteur a l’air directement sorti du groupe Toto avec un beau brushing et des mèches

impeccables. Le batteur est plus haut que les autres, dans les aires, comme dans Spinal Tap. Mais c’est le bassiste qui est le plus remarquable. Une sorte de vilain géant avec une phénoménale mulet. On dirait un ancien footballeur yougoslave de D2. Toute cette fine équipe salue la salle presque vide et attaque fissa un morceau ignoble. C’est parti ! À côté de moi, un aimable quinquagénaire se lance immédiatement dans un solo de guitare invisible tandis que sa femme au fort tonnage l’observe avec un sourire attendri façon vas-y chéri, ce soir c’est ta fête. Tout autour, ils sont plein à manger des sandwiches thon mayonnaise, les yeux écarquillés comme des lémuriens malgaches. Tout d’un coup, les anémones gonflantes se rapporchent de la batterie et font mine d’agiter des baguettes en rythme. Le public est médusé, n’en revient pas ; on dirait des pygmées qui découvrent le cinéma. Steve Howe, le guitariste qui fait peur, ose un truc rare ces jours-ci : pendant ses solos aigus, il incline le manche de sa guitare vers son visage et grimace en fermant les yeux comme un type chez le dentiste. Un effet pas vu depuis l’âge d’or des Scorpions ! Au bout de quelques morceaux de musique atroce, je me dirige vers la sortie. Je vois l’un des paralytiques, je lui fais un sourire, je compatis. Il a l’air furax en fumant sa clope. Complètement dégoûté. On voit bien qu’il aurait préféré être invité à un concert d’AC/DC au lieu de ce tragique concert du groupe les Yes. À deux mètres de lui, un type certainement célibataire tend solitairement l’unique briquet allumé de la salle. Il y croit à fond, avec son briquet Bic et sa petite flamme olympique à lui. Je lui payerais bien un thon mayonnaise pour le féliciter de son enthousiasme, mais on m’attend à la maison. Il est vingt et une heures passées, je sors d’un concert du groupe les Yes et je n’ai toujours pas fumé... À moi les économies et le souffle retrouvé. «

NICOLAS UNGEMUTH

La fête

YESprogressive Pour fêter ses trente-cinq ans d’existence, le groupe de Chris Squire illuminait

récemment le Zénith de Paris. Nicolas Ungemuth n’a surtout pas voulu manquer ça.

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Antidote de notre semaine TV. 1966. Le saut créatif des Beatles ouvre la voie à une nouvelle génération de jeunes musiciens anglais, ceux-là déterminés à ne plus pomper les bluesmen, il s’agit de se rapprocher encore du classique, d’élargir l’essence du rock. Au sein de ce rock progressif les virtuoses de Yes (dont Jon Anderson, The Voice) feront figures de coryphées, mal accueillis déjà (concerts houleux en Allemagne) puis imposés avec l’arrivée du claviériste flamboyant Rick Wakeman et «Close To The Edge» (sa plage de vingt minutes en quatre mouvements, 1972), on s’aperçoit que si le Floyd science-fictionne, eux, encore plus forts, œuvrent dans le cosmogonique, cet ambitieux cinquième album sera suivi par le triple live «Yessongs» (le posséder tenait de la dévotion, du culte). Yes, increvable, qui passe le cap de l’an 2000 en jouant enfin avec un grand orchestre, tourne plus que jamais, les solos sont toujours aussi longs, mais, innovation, un luxueux espace «tea» aménagé derrière leur scène permet à ceux qui attendent leur tour de patienter agréablement. Warner Strategic Marketing édite un box-set (durée : six heures, booklet : 98 pages) qui peut nous ouvrir à nouveau les arcanes de Yes, «In A Word» (1969 - ).

2004.09 - TéléCinéObs n° 2080 : Critique «In A Word», «L’antidote»

(ci-dessous : illustration NSDS)

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LE TEMPS DU DOUTEDepuis plus de dix ans, stakhanoviste et stoïque, j’ai assisté à la quasi-totalité des prestations scéniques du groupe Yes qui m’étaient accessibles. Et à chaque fois j’en suis sorti déçu. Déçu parce que par rapport aux prestations des années 70, auxquelles mon âge avancé m’a donné l’occasion d’assister, avec le line-up «classique» (Jon Anderson, Steve Howe, Rick Wakeman, Chris Squire & Alan White), elles étaient froides, fades, sans relief, dénuées de spectacle et de surprises (à l’exception notable, paraît-il, de la tournée «Magnification», au travers de laquelle je suis passé, et qui mettait en scène un orchestre symphonique). Et puis Yes n’est pas un groupe ; à l’instar d’un Dream Theater par exemple, il s’agit plus d’un rassemblement de virtuoses à la forte personnalité et à l’ego surdéveloppé que d’une véritable entité unie et cohérente agissant en unité cohérente. C’est ce qui conduisait chacun des membres à s’exprimer dans son coin, comme, par exemple Steve Howe à quitter la scène lorsque la set-list en arrivait à des morceaux

de «l’ère Trevor Rabin» comme le plus que galvaudé «Owner Of A Lonely Heart» ou «Rhythm Of Love», ou Chris Squire à imposé à ses collègues son protégé l’américain Billy Sherwood, dont l’apport à la musique de Yes reste aujourd’hui encore discutable. Que ces enfantillages pouvaient être agaçants !Et, depuis son départ en 1979, il faut bien reconnaître que jamais Rick Wakeman n’a trouvé remplaçant à sa hauteur. Le dernier en date, un certain Igor Khoroshev, jeune prodige russe émigré aux États-Unis et ayant suivi une formation classique, était certes un virtuose, mais ses excentricités

ont miné l’évolution de la formation, qui s’en est d’ailleurs séparé assez rapidement.Alors faut-il qualifier le retour - apparemment définitif cette fois - de Rick au sein de Yes en 2002, de salvateur ? Sincèrement, je

pensais Yes définitivement trop englué dans ses errements «virtuosiques» et égocentriques pour que cela ait une quelconque importance. Et ce n’est pas leur prestation dans le cadre du Arrow Rock Festival 2004 de Lichtenvoorde (Pays-Bas) dix jours avant leur concert au Zénith de Paris le 22 juin dernier, qui m’aura fait changer d’avis ; ce jour-là Chris Squire a par exemple profité d’un passage chanté a capela par Jon Anderson pour lui coller un grand «Boioioinggg» de sa basse dans les enceintes au moment le plus tendu, ce pour quoi Jon l’a ensuite remercié publiquement... Bref, ambiance au beau

fixe. Ajoutons à cela un set remanié et raccourci - festival oblige - ne comportant que des morceaux très formatés et dans leur version électrique. «Parfois la magie n’opère pas» nous expliquera Rick à

propos de cette prestation écourtée et plutôt brouillon en Hollande. «Lorsqu’on met cinq individus, ensemble, même si ce sont des génies, l’alchimie fait parfois son effet et parfois non. C’est un peu comme avec une équipe de football...» Il faut dire que justement, ce soir-là, l’Angleterre était en train de perdre contre la France en coupe d’Europe... et Rick, passionné de foot devant l’éternel, de passer des petits papiers annonçant les scores à ses collègues pendant le set. Tout cela faisait bien bordélique... «Notre manager est américain. Il n’y a vraiment qu’un américain pour organiser une tournée de Yes pendant la coupe d’Europe de foot. Ce n’est pas croyable ! Jamais un européen n’aurait fait ça. J’aurais préféré aller au Portugal !» nous confiera Rick par la suite.

MAGIC IS BACKLa prestation du groupe au Zénith de Paris m’a fait changer radicalement d’avis : ce

2004.10 - Crossroads : Entretien Rick Wakeman «Retour en force d’une légende»

. . . « le vrai proplème actuellement, c’est que le processusde création a changé de camp : dans les années 70 les

maisons de disques nous laissaient donner l ibre cours ànotre imagination. Aujourd’hui, pour des raisons

bassement marcanti les, ce sont eux qui veulent pi loter lacréation. Et i l faut bien constater que leur imagination est

extrêmement l imitée.. . »

EN PLUS DE SES 100 ET QUELQUES ALBUMS SOLO, DONT LE DERNIER, OUT THERE, DATE DE2003, RICK WAKEMAN A DÉFINITIVEMENT MARQUÉ DE SON EMPREINTE LA MUSIQUE DE YES ETLA MUSIQUE EN GÉNÉRAL, LE ROCK BIEN SûR, MAIS AUSSI LA MUSIQUE DE FILMS, CELLE DES

JEUX OLYMPIQUES D’HIVERS, LE NEW-AGE, L’AMBIENT, LE GOSPEL... DIFFICILE DE FAIRE LE TOURD’UN AUSSI GRAND BONHOMME EN UN SEUL - TROP BREF - ENTRETIEN... ESSAYONS-NOUS

MALGRÉ TOUT À L’EXERCICE, PARCE QUE LE JEU EN VAUT FRANCHEMENT LA CHANDELLE.texte : BENOÎT HERR � photos : SERGE LLORENTE

retour en force d’une légende

RICK WAKEMAN

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soir-là la magie était de retour, et Rick n’y était pas étranger, loin s’en faut, même s’il n’a pas pu s’empêcher de faire le pitre en feignant l’exhibitionnisme devant ses petits camarades, écartant par deux fois les pans de son cache-poussière lorsqu’il tournait le dos au public. «Oh, tu as remarqué cela ? S’étonnera-t-il le lendemain. Je croyais sincèrement que cela ne s’était pas vu...» mon œil, oui !Quant au concert en lui-même Rick dit «l’avoir apprécié. Nous avons concocté un mélange de choses que les gens voulaient entendre». Et c’était vrai ! Trois heures de rock symphonique entrecoupées d’une pause d’un quart d’heure à laquelle faisait suite un set acoustique. C’est là qu’ils ont placé le sempiternel et hélas inévitable tube planétaire «Owner Of A Lonely Heart», dans une version acoustique somme toute supportable, et l’incontournable «Roundabout», avec un Rick Wakeman impérial derrière son piano demi-queue. Le tout dans un décor à la Roger Dean. Du grand Yes, quoi, comme je l’ai toujours aimé.«Ritual n’a jamais été aussi bon, même si selon moi on pourrait facilement raccourcir ce morceau de 4 minutes, affirme Rick. Tout le double-album Tales from Topographic Oceans, dont il est issu, avait à l’époque été conçu pour que chacun des quatre morceaux qui le constituent remplisse une face de vinyle. Le CD n’existait pas à cette époque... Mais ce n’est pas la bonne façon de procéder». Pour la petite histoire, la version originale de «Ritual» fait près de 22 minutes et Rick Wakeman n’a jamais aimé ni cet album ni ce morceau. Apparemment, cela ne lui pose plus de problème de jouer Ritual, pas plus que cela n’en pose à Steve Howe de jouer Owner Of A Lonely Heart ou Rhytym Of Love. À 55 ans passés pour certains, à 60 ans aux fraises pour Jon Anderson, les papis-musiciens de Yes seraient-ils enfin devenus adultes ?

SOLITARY VIRTUOSOMais Rick Wakeman ne se contente pas d’être le claviériste de Yes. Il affiche surtout une impressionnante carrière solo : avec plus de 100 albums solo originaux (oui oui, vous avez bien lu, il n’y a pas d’erreur de frappe) sans compter les sessions, ni les lives, ni ses albums du temps des Strawbs, Rick Wakeman est sans conteste le champion toutes catégories de la prolixité, et a exploré de nombreux domaines musicaux. Le dernier album en date, Out There, propose un rock assez «classique» et rend hommage aux victimes de l’explosion de la navette Columbia. Il réunit le English Rock Ensemble, Damian Wilson au chant ainsi que le English Chamber Choir. Damian Wilson a d’ailleurs faussé compagnie à Rick pour la tournée qui devait suivre, effrayé qu’il était par la somme de travail que représentait une tournée de plusieurs mois.Mais ce sont ses six ou sept premiers albums (The Six Wives of Henry VIII, The Myths & Legends of King Arthur & The Knights of the Round Table, Journey to

the Centre of the Earth, Criminal Record, No Earthly Connection, White Rock...) qui demeurent les plus appréciés du public si l’on en croit les sondages. Tous ces albums sont dans le plus pur style progressif des années 70 - tant décrié par les apôtres soi-disant bien pensants du rock - et en constituent l’archétype même. Lorsqu’on demande à Rick s’il trouve ce genre de musique démodé, il explique «le progressif peut revêtir de nombreux aspects : il peut être comme la musique de Yes ou la mienne, comme celle de Marillon ou, plus près de nous, comme celle d’Air ou de Tool. Je ne crois pas qu’il faille raisonner en termes de modes. Pas plus tard que la semaine dernière j’ai rencontré un jeune homme d’une vingtaine d’années qui m’a dit : «Je trouve votre album The Six Wives of Henry VIII (le tout premier album solo de Rick, en 1973, si l’on excepte Piano Vibrations, qui n’est pas réellement un album solo NdR) absolument fabuleux.» - Hé, mais c’est vieux comme le monde, ça. ai-je répondu. «Oui mais pour moi c’est tout neuf puisque je l’ai découvert il y a quelques jours» a rétorqué le type... Comme quoi même si on est vieux pour plein de gens, on est toujours nouveau ou une découverte récente pour quelqu’un. Non, le vrai problème actuellement, c’est que le processus de création a changé de camp : dans les années 70 les maisons de disques nous laissaient donner libre cours à notre imagination. Aujourd’hui, pour des raisons bassement mercantiles, ce sont eux qui veulent piloter la création. Et il faut bien constater que leur imagination est extrêmement limitée... Alors tout est pauvre, tout se ressemble, Il y a fort peu de vrais artistes de nos jours. Matthew Bellamy (le claviériste, chanteur et compositeur de Muse NdR) en est un. Incubus est un autre de ces groupes qui savent rester authentiques. Mais ils sont tellement peu nombreux. Et des magazines comme le tien, qui nous ouvrent leurs colonnes, aident aussi à permettre à cette mouvance

musicale de survivre.»Chrétien pratiquant et très croyant, Rick (de son nom de baptême Richard Christopher Wakeman) a également un temps exploré les rivages du gospel. «Tu sais, lorsqu’on est jeune la route te semble toute tracée, explique-t-il. Mais lorsque j’ai eu 40 ans je me suis posé (il en a 55 aujourd’hui NdR) et ai listé les nombreuses choses que j’aurais encore aimé faire, comme écrire pour les chœurs ou de la musique pour piano seul ; Et je me suis demandé si parce que cela ne rapporterait a priori pas d’argent il fallait éviter de la faire. Je n’aime pas la manière dont l’argent vient tout régenter de nos jours. Et puis qui sait ce qui est réellement financièrement viable ou non ? D’ailleurs tous ces businessmen ne savent pas toujours où est leur intérêt.

Tu sais sans doute que je ne possède plus aucun droit sur toute la partie de mon œuvre datant d’avant 1994. Et bien pour Criminal Record, Lisztomania, No Earthly Connection et White Rock par exemple, la maison de disques a tout simplement déclaré ‘‘qu’il ne s’agissait pas d’œuvres majeures et qu’à ce titre il n’était pas opportun de les rééditer’’... et pendant ce temps là, les japonais en ont sorti une version remasterisée (sans doute à partir d’un vinyle) sous licence et les russes un bootleg. Il s’est vendu des milliers et des milliers d’exemplaires de ces deux rééditions d’œuvres soi-disant mineures... On se demande comment les majors prennent leurs décisions !»Dans le prolongement de sa foi, Rick a préféré l’ouvrage ‘‘From Tabloid to Truth’’ de son ami Dan Wooding. «Oh, tu es au courant de ça aussi, s’étonne-t-il. Dan est... Comment dire... un chic type. Tu sais, c’est un personnage extraortinaire. Il a fait des tas de choses, comme par exemple, petit comme il l’est il s’est posté devant le colossal Idi Amin Dada et lui a dit ‘‘ce que vous faites n’est pas bien’’... résultat : il s’est retrouvé en prison. Il a fait ça avec tous les dictateurs qu’il a pu rencontrer et à chaque fois il s’est retrouvé en prison. S’il y a une personne sur cette terre qui mérite de vivre dans un monde meilleur c’est bien Dan.»

En attendant le monde meilleur, Rick nous quitte pour aller prendre un avion qui le mènera à son concert du soir, à Francfort. À 55 ans passés, Rick et ses compères tournent encore dix mois par an. Après l’Europe ils sont retournés aux États-Unis (où ils tournaient déjà au printemps) en août et septembre, pour se produire avec Dream Theater en première partie de certains de leurs shows. Sacrés papis ! «

... « le progressif peut revêtir de nombreux aspects : il peutêtre comme la musique de Yes ou la mienne, comme celle deMarillon ou, plus près de nous, comme celle d’Air ou de Tool.Je ne crois pas qu’il faille raisonner en termes de modes... »

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RelayerATLANTIC 1974

L’album le plus sombre et le plus dense de Yes. Entrée magistrale avec «The Gates of Delirium», près de 22 minutes tendues durant lesquelles s’impose la cohésion du trio Steve Howe (guitare), Chris Squire (basse) et Alan White (batterie). Relance encore plus éloignée de l’aspect symphonico-rock qui colle à l’image du groupe avec Sound Chaser (aux claviers, le suisse Patrick Moraz se distingue) avant l’apparent apaisement de To Be Over qui permet à Jon Anderson de placer quelque-unes de ses plus belles vocalises. La réédition 2003 (special thanks aux experts de Rhino) a grandement amélioré les riches détails de cette complexe architecture. SSi

2006.08 - Muziq n° 7 : Critique «Relayer (version Rhino)»

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2008.06 - Muziq n° 14 : Reportage «Le rock progressif/Portrait»

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Pourquoi Yes entraîne-t-il une adhésion sans réserve dès qu’il est question d’évoquer les grands noms du prog ? C’est simple : ils cumulent les talents, se surpassent et entretiennent depuis bientôt quarante ans une signature inimitable. Yes s’inscrit d’abord comme l’un des grands maîtres en symphonisme des groupes de prog. Dans une période inscrite entre leurs débuts et le tournant des années 80, le groupe s’illustre dans une remarquable capacité à créer de longs morceaux en plusieurs parties, parfois sous-titrées, parfois aussi longues qu’une face de 33-tours entière. Avec ces formats, c’est tout un univers qui se déploie comme de longs voyages aux nombreuses péripéties. Yes partique avec enthousiasme l’art des ruptures de thèmes dans un même titre et de longs détours digressifs passionnants. Avec le risque de perdre ses voyageurs en cours de route, certes, mais pour la majorité des albums, l’aventure symphonique yessienne reste une expérience excitante.

MÉLODIEPériodiquement, le groupe compose et interprète des chansons. Ce qui est plus fréquent au début de sa carrière, notamment dans «Time And A Word», deviendra une étape fréquente dans les albums du groupe. Cette figure de balancier affirme chez Yes la volonté de revenir périodiquement au primat simple et lumineux de la mélodie, à la ballade acoustique limpide guitare-voix. Quand ce n’est pas une chanson littéralement transformée comme le feront des deux ex-Buggles Geoff Downes et Trevor Horn qui intégreront le groupe et réarrangeront I Am A Camera en un superbe Into The Lens. Chanson binaire et carrée, également, en 1983 avec le hit planétaire Owner Of A Lonely Heart, construit sur un riff de guitare aussi simple qu’efficace. Concession impardonnable aux sirènes de la pop ? Peut-être, mais dans un album bourré de titres intéressants.

PERSONNALITÉ(S)Tous les musicens de Yes ont enregistré des albums solos, sous la forme d’aventures

parallèles au groupe, le temps d’une pause durant laquelle ils se sont fait remplacer (Jon Anderson, Rick Wakeman) ou en même temps (Chris Squire, Steve Howe, Alan White). Il s’agit pour chacun d’exprimer un trop-plein-de-soi ou bien d’investir des voies inexplorées par le groupe. «The Steve Howe Album», en 1979, montre ainsi les facettes inédites d’un guitariste enclin à jouer aussi des morceaux de picking et de folk. Rick Wakeman, pour sa part, lève l’ancre et s’en va très loin dans des albums concepts grandiloquents au fil d’une discographie pléthorique. Chris Squire et Jon Anderson, quant à eux, montrent de curieuses figures d’alter ego dans leurs disques solos. Tout en conservant les traits musicaux du groupe, ils montrent quelque chose qui ressemble à un surcroît d’âme ou une porte entr’ouverte sur leurs jardins secrets. Ce qui rend «Fish Out Of Water» de Chris Squire attachant et «Olias of Sunhillow» de Jon Anderson indispensable.

LE PHÉNIXTel le Phénix qui renaît de ses cendres, Yes a trouvé le moyen de se régénérer tout au long de sa carrière. Question délicate et périlleuse pour tous les groupes : comment évoluer sans se dévoyer ?Comment rester le même sans stagner ? Alors que de nombreux groupes ne dépassent pas cette difficluté, Yes arrive à faire vivre sa musique un peu au gré de l’époque et de ses membres. À cet égard, la délicate jonction du tournant des années 80 est emblématique. «Going For The One», en 1977, illustre bien ce renoncement au style ampoulé du genre et à l’adhésion d’une forme nouvelle de sophistication où la technologie occupe une place de choix. Mais c’est toujours Yes. Le groupe renouera cependant avec un progressif plus classique durant la décennie des années 90. Et retrouvera un public qui répond toujours présent à ses concerts.

ANNE RAMADE

POUR COMMENCERFragile (Atlantic, 1971)

Close To The Edge (Atlantic, 1972)Tales From Topographic Oceans (Atlantic, 1973)

Relayer (Atlantic, 1974)Going For The One (Atlantic, 1977)

POUR CONTINUERDrama (Atlantic, 1980)

90125 (Atco, 1983)Keys To Ascension (Essential, 1997)

The Ladder ( Eagle, 1999)Live at Montreux (DVD Eagle Vision, 2003)

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YESClose to the edge(Atlantic)CHARTS : #3 (US) / #4 (UK)Prétentieux, ampoulé, complaisant... Tel est généralement le vocabulaire minimaliste employé par une bonne partie de la critique rock pour exécuter sans véritable jugement de fond les dinosaures de la musique progressive des seventies. Et si Emerson Lake & Palmer qui a, il est vrai, souvent tendu quelques bâtons pour se faire battre, reste l’incontestable numéro 1 au «hit-parade» des pestiférés, Yes se classe sans doute immédiatement derrière. Il y aurait beaucoup à dire et beaucoup à écrire sur les raisons profondes, beaucoup plus idéologiques que vraiment musicales, qui ont conduit les rockers punkolitiquement corrects à entretenir la flamme de leur mépris depuis environ trois décennies. Récemment, Nick Kent se vantait d’avoir, un jour de 74 ou 75, envoyé balader Jon Anderson lors d’une interview qui avait tourné court. Ce grand prophète de la cause rock & roll prédisait déjà au chanteur de Yes

des lendemains qui déchantent, et surtout lui refusait carrément le statut d’artiste, le taxant de simple entertainer (un amuseur...). Que l’intéressé rapporte trente ans plus tard cette navrante anecdote en dit long sur un certain trait d’esprit, et sur le fait que les prétentieux ne sont pas forcément dans le camp qu’on croit... Mais revenons à Yes, à ce groupe de virtuoses relativement vains lorsqu’ils sont livrés à eux-mêmes (hormis un ou deux albums de Anderson, et le premier Chirs Squire, aucun album solo sorti par un membre du groupe n’est arrivé à la cheville d’un disque du grand Yes) mais qui surent faire des miracles au feu d’une force collective génératrice d’une inspiration miraculeuse tout au long des années 70. Car Yes, contrairement à ce que ressassent certains plumitifs bas de plafond qui se recopient souvent les uns les autres en trempant leur plume dans l’encre dégoulinante de la mauvaise foi ou de la pure ignorance, n’a jamais utilisé la virtuosité gratuitement, ou pour le simple plaisir de jouer plus vite et plus fort que le voisin. La dextérité instrumentale de chaque musicien du groupe est restée, du moins entre The Yes Album (1971) et Going for the One (1977), au service

d’un propos musical cohérent, mélodique, certes incroyablement sophistiqué mais jamais froid ou hermétique. Il est à cet égard particulièrement révélateur que la réhabilitation d’un groupe comme Yes soit venue ces dernières années non seulement des travaux pointus de musicologues américains, mais aussi de «coming out» assez inattendus, tel celui du comédien/cinéaste Vincent Gallo ou du guitariste des Red Hot Chili Peppers John Frusciante. Impossible aujourd’hui de dresser une liste sérieuse des disques les plus marquants des années 70 sans citer Close to The Edge. En trois morceaux seulement, et moins de quarante minutes, «Près du précipice» pousse effectivement le groupe tout près d’un certain point de non-retour. Sorti neuf mois seulement après Fragile, déjà une merveille, ce cinquième album de Yes est pourtant le fruit d’un accouchement long et difficile, voire laborieux, dans ces studios Advision où le groupe a élu domicile de jour comme de nuit, Au point que le perfectionnisme parfois outrancier de ses acolytes finira par lasser le batteur Bill Bruford, qui s’en ira bientôt rejoindre King Crimson, groupe qui laisse plus d’espace à l’improvisation. Seulement, le résultat est à la hauteur des efforts gigantesques fournis par les musiciens et par l’essentiel co-producteur Eddie Offord (au niveau sonore, Yes a, en 1972, un train d’avance sur la quasi-totalité de ses contemporains anglais). Le morceau titre, déployant ses dix-neuf minutes sur la totalité de la première face, reste évidemment un «classique» du genre progressif : au-delà des changements de rythmes, de tempos ou d’atmosphères, «Close to the edge» est d’abord une pièce à la cohérence magistrale, certes particulièrement dense et ambitieuse, mais surtout superbement construite autour d’une sorte d’incessant balancement, d’une respiration quasi-mystique («I get up, I get down») et bien sûr d’un déferlement inouï de chaude virtuosité (cette incroyable

introduction qui jaillit d’un bruit de cascades et de chants d’oiseaux, avec la guitare folle, presque épileptique, de Steve Howe et les puissants coups de boutoir de la basse gigantesque de Chris Squire, l’éblouissant solo d’orgue central de Rick Wakeman...) Pour l’anecdote, Eddie Offord avait malencontreusement effacé la dernière partie du morceau (après le fameux solo d’orgue) et c’est la «mauvaise» version, entachée d’écho, que le groupe fut contraint d’utiliser dans le collage définitif. Or, loin de pâtir d’un sens du détail quasi obsessionnel, et des artifices d’une écriture et d’une production maintes et maintes fois retravaillées, «Close to the edge» s’en nourrit au contraire pour répandre une formidable énergie. Rien à voir, donc, avec un vain exercice de style qui sentirait le renfermé ; de bout en bout, cette musique-là brille, bouge, vibre, toujours vivante, toujours en mouvement, foncièrement généreuse. La même inspiration de très haute voltige traverse les deux autres morceaux, construits chacun autour d’un thème de départ, une mélodie majestueuse pour le premier («And you and I»), un riff rageur et répétitif pour le second («Siberian Kahtru»). Les accents lyriques et foncièrement positifs de la musique de Yes, ce singulier vertige qu’elle fait jaillir, ne seront certes jamais compris par les tristes sires qui, en 2009, peuvent plus facilement reconnaître, fut-ce du bout du stylo, les mérites de leurs collègues plus sombres, type King Crimson ou Van der Graaf Generator. Reste que Close to the Edge, disque traversé par un sens de l’excès qui touche à la grâce, album pénétré d’une intensité presque spirituelle, s’impose plus de trente-cinq ans plus tard comme un authentique chef d’œuvre. N’en déplaise à ceux qui n’en finissent pas de réécrire l’histoire du rock avec des certitudes et une justesse de pensée à rapprocher de ceux de l’ex-administration Bush en matière de géopolitique mondiale...

Frédéric Delâge

2009 (?) - Crossroads : Critique «Close to the edge»

Page 53: reCUeil de Presse - Nous Sommes Du Soleilnsds.fr/Yespress_4.pdf · YES, STEVE HOWE n’a encore intégré le groupe, laissant le champs libre à son prédécesseur PETER BANKS, qui

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Document réalisé en 2012 par Yves Moreaux pour l’associationNous Sommes Du Soleil - Fan-Club de YES - France - http://nsds.fr