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Remarques sur le texte proposé sur l'égalite réelle

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Convention nationale sur l’égalité réelle

Remarques sur le texte proposé sur l’égalité réelle

Plan du texte

1) Un calendrier précipité, une concertation en amont insuffisante .................................... 3

L’égalité réelle, cœur du projet socialiste ........................................................................... 3

2) Pour une politique du réel ................................................................................................... 4

3) Concentrer les moyens sur ceux qui en ont le plus besoin ............................................... 6

4) Pour un nouveau paradigme : vers une prise en compte de l’individu ........................... 8

L’école des chances, pour tous ............................................................................................ 9

Flexi-sécurité et formation professionnelle ...................................................................... 10

5) Pousser à l’autonomie des acteurs institutionnels ........................................................... 11

Démocratie sociale et gouvernance de l’entreprise ......................................................... 11

Pour un nouveau partenariat entre l’Etat et la société civile ......................................... 12

Une nouvelle ère de la décentralisation ............................................................................ 12

Conclusion : ............................................................................................................................ 13

***

Texte proposé par Pierre Moscovici

Liste des signataires : http://besoindegauche.fr/blog/2010/11/17/signataires-du-texte-sur-legalite-reelle/

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Le Parti socialiste doit se donner tous les moyens pour remporter la prochaine élection présidentielle. Les Français perçoivent au quotidien les défaillances du pouvoir actuel et paient l’addition de l’échec économique et social de l’action gouvernementale. Nous sommes donc très attendus. Mais il faut constater avec réalisme que nos concitoyens ne nous font pas encore confiance pour gouverner le pays : trop nombreux sont ceux qui pensent que nous ne ferions pas mieux au pouvoir que la droite. Nous devons entendre ce message, autant que les encouragements qui se manifestent. Dans les six mois qui viennent, il nous faut donc travailler et travailler encore pour fixer les grandes lignes de notre projet, déterminer nos priorités, puis exposer par quels moyens nous pensons pouvoir les mettre en œuvre et les financer.

Dans ce contexte, le texte qui nous est proposé ne nous convainc pas à ce stade.

Il rassemble, il est vrai, un certain nombre d’éléments convaincants, une analyse juste et de bonnes idées. Nous ne pouvons que souscrire à certaines propositions : ce texte rappelle utilement l’objectif de transformation sociale qui est le nôtre, et se montre à juste titre volontaire sur nombre de thèmes, de l’école à l’égalité homme-femme en passant par les discriminations. Dans les derniers jours précédant le Conseil national, certaines améliorations ont été apportées, notamment dans l’introduction, concernant particulièrement la définition même de l’égalité réelle et la nécessaire prise en compte du temps de la mise en œuvre de ces propositions.

Il bute cependant sur trois écueils :

� Celui de la méthode, d’abord : le temps de la réflexion, de la discussion collective, de la négociation entre sensibilités n’a pas été suffisant.

� Celui de la crédibilité, ensuite : nos priorités doivent être claires et hiérarchisées, les Français doivent connaitre la base sur laquelle ils s’engageront en 2012 en votant pour le parti socialiste.

� Celui de la ligne directrice, enfin : il s’appuie sur une vision encore trop étatiste, prenant insuffisamment en compte tout l’apport de la démocratie sociale, de la société civile, mais également des collectivités territoriales dans la lutte contre les inégalités.

Un effort de réécriture conséquent est donc indispensable. Il est d’autant plus impératif que l’on aurait tort de sous-estimer l’intelligence de nos concitoyens et leur compréhension de la gravité de la situation que la France traverse. Depuis que l’UMP est au pouvoir, la dette publique a augmenté de 27 000 euros par ménage. Chaque Français comprend ce que représente cet argent, pour son ménage comme pour notre pays : c’est l’obligation d’être désormais sélectifs dans nos dépenses et efficaces dans nos investissements.

Ce travail s’impose également pour que nous expliquions ce qu’est notre conception de la réduction des inégalités, comment elle s’inscrit dans la société contemporaine, si différente de celle des Trente glorieuses. Force est de constater que le texte tend à empiler les propositions sans donner la direction. Sur ce sujet, nous appelons à un aggiornamento de notre rapport à la puissance publique et à l’individu.

Toute notre réflexion collective doit donc être tournée vers l’objectif de bâtir un projet à la fois ambitieux et crédible. Si nous voulons y parvenir, il ne faudra à aucune étape confondre rapidité et précipitation. Nous avons une conviction forte : les Français ne nous

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feront pas un chèque en blanc et nous devrons mériter leur confiance. L’alternance ne sera pas automatique et un président sortant est toujours difficile à battre. Nicolas Sarkozy n’échappera pas à la règle. C’est un mauvais président, mais il peut encore être un bon candidat.

1) Un calendrier précipité, une concertation en amont insuffisante

Ces lacunes, le processus d’élaboration du texte aurait dû permettre de les identifier et de les combler. « Aurait dû », car il eut pour cela fallu que l’ensemble des forces vives du parti aient été associées, ce qui fut loin d’être le cas. Si nous avons décidé de nous abstenir sur ce texte à ce stade, c’est certes parce que son contenu actuel ne nous semble pas satisfaisant, mais également pour que le travail d’amendement et de débat ne soit pas escamoté.

Lors de la convention nationale sur le nouveau modèle de développement, treize rapports, dont la rédaction avait été confiée à toutes les sensibilités du parti, avaient été discutés, mis en ligne, débattus sur la Coopol. Le texte de synthèse avait donné lieu à un intense débat interne, avec de multiples réunions du bureau national, du conseil national, plusieurs commissions des résolutions. Les efforts n’avaient pas, alors, été ménagés pour faire des pas en direction de l’ensemble des camarades de toutes sensibilités. Nous avons cherché à bâtir un projet commun, en dépit de conceptions parfois différentes sur le rôle et le développement nécessaire des entreprises, sur la manière dont il fallait intégrer les impératifs sociaux et environnementaux dans les discussions commerciales et sur bien d’autres points encore. L’unité finale avait été le résultat d’un travail de longue haleine, fruit d’une certaine conception du travail en commun.

Depuis cette étape, on ne peut que regretter l’opacité croissante dans laquelle les textes ont été élaborés, les délais toujours plus courts laissés aux secrétaires de section pour organiser le débat, aux militants pour débattre et amender les textes. Il s’agit là d’un recul : la créativité naît de la confrontation des points de vue. Débat ne veut pas dire affrontement : nous concevons que la direction du parti ait cherché et cherche encore l’adoption unanime des textes de base. Sur l’international, comment ne pas rappeler que nous avons, au nom de l’unité, repoussé à plus tard une clarification de nos positions sur le retrait, pourtant nécessaire, des forces militaires d’Afghanistan, sur l’adhésion de la Turquie, sur l’ambition du projet européen ou encore sur la reconnaissance des pages noires de la colonisation ?

Mais nous connaissons aussi notre véritable pluralisme intellectuel et politique, et sommes persuadés de la nécessité absolue de clarifier certaines questions, d’opérer certains choix par des votes.

Il n’est du reste pas étonnant, dans ces conditions, que l’intérêt pour ces discussions et la participation aux votes des précédentes conventions aient été globalement faibles, plus que cela n’aurait dû être le cas. Nous souhaitons que, pour les deux conventions restantes, les débats s’ouvrent et s’animent davantage. C’est, à notre sens, une condition indispensable à la réussite du processus.

L’égalité réelle, cœur du projet socialiste

Ce défaut de méthode est d’autant plus regrettable que l’égalité est au cœur de la devise républicaine et du projet des socialistes. Au cours des derniers siècles, la gauche a lutté pour l’abolition des privilèges et la réduction des inégalités, consciente qu’égalité et progrès se nourrissent mutuellement.

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Pourtant, lorsque cette idée d’égalité réelle a été réintroduite avec force dans nos débats en 2004, ce fut d’abord à partir d’un constat d’échec : celui des politiques d’égalité formelle, affirmation nécessaire des principes, mais affirmation vaine si ne sont pas mis en place les moyens financiers ou légaux pour y parvenir. Il ne suffit en effet pas de promettre l’égalité pour qu’elle apparaisse par enchantement : 221 ans se sont écoulés depuis la Révolution française et l’égalité, si souvent promise, reste un horizon lointain.

Derrière l’idée d’égalité réelle, il y a donc l’histoire de cette lutte de très longue durée, permanente et impitoyable, contre les inégalités. Celles-ci sont puissantes et nombreuses, et l’Histoire doit nous conduire à beaucoup de modestie et de réalisme : nous, socialistes, sommes les premiers défenseurs et acteurs de la transformation sociale, mais il n’y aura pas de « grand soir de l’égalité ». Les promesses enflammées de lendemains qui chantent sont souvent suivies de matinées de déception.

Le deuxième trait caractéristique de cette notion d’égalité réelle, c’est l’ancrage nécessaire dans la vie elle aussi «réelle ». Le gouvernement actuel peut continuer à voter des lois sur le droit au logement opposable, elles n’auront aucune conséquence concrète si la construction de logements sociaux ne repart pas et si leur attribution ne se fait pas dans de meilleures conditions : l’ambition égalitaire nécessite des moyens importants et des lois adaptées.

C’est donc à une double exigence que nous sommes appelés, à la fois dans notre discours, qui doit être de vérité, et dans notre pratique, qui doit être ancrée dans le monde tel qu’il est et dans une France qui connaît une crise sans précédent depuis la seconde guerre mondiale. Si nous devons revenir au pouvoir en 2012, ce sera en effet dans un contexte où les inégalités et les injustices n’auront jamais été aussi grandes, aggravées par une dette aussi importante que le revenu national, une dette sociale catastrophique et plus de quatre millions de chômeurs. Cette situation, disons-le, nous obligera à être sélectifs dans nos propositions : nous sommes et devons rester le parti de la transformation.

Que dire, dès lors, sur le contenu du texte lui-même ?

2) Pour une politique du réel

La plupart des propositions qu’il contient sont bien évidemment souhaitables. Mais, hors de toute contrainte, l’exercice est aisé. Or, nous avons trop souvent dénoncé les effets d’annonce de Nicolas Sarkozy pour jouer le jeu d’un catalogue de promesses que nous auront du mal à tenir. Il ne s’agit pas là de céder à l’impasse économique de la rigueur, mais bien de proposer un projet crédible, qui privilégie une voie réaliste à celle d’un grand bond en avant. Nous redoutons que nombre des idées que ce texte lance dans le débat ne nous reviennent telles des boomerangs :

� « Tripler le nombre d’enfants accueillis dans des structures collectives en 10 ans ». Nous savons les difficultés de la petite enfance, leurs conséquences sur l’emploi, sur le développement des enfants. Pour autant, aurons-nous le personnel d’une telle ambition, la capacité et le budget pour trouver et acquérir les espaces nécessaires à la construction d’équipements en centre-ville, au plus près des familles ? Nous gérons avec d’autres formations de gauche de très nombreuses collectivités locales et nos élus abattent déjà un travail considérable. Chacun de nous a en tête la difficulté qu’il y a à trouver les emplacements et le personnel nécessaire. Beaucoup d’entre nous font déjà, au niveau local, des efforts budgétaires très importants pour prendre en charge l’accueil des très jeunes enfants, permettre à leurs mères de reprendre une activité

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professionnelle afin de ne pas subir de préjudice de carrière et, enfin, créer des emplois de proximité. Prenons sur ce point essentiel le temps pour déterminer de quelle manière l’Etat pourrait accompagner plus efficacement les collectivités et ce qui serait réalisable en cinq ans.

� Primaire : pourquoi vouloir plonger les enfants dans le monde du travail dès 6 ans en leur faisant «découvrir les métiers» ? il faut au contraire leur faire découvrir des loisirs collectifs, autre mode de vie en commun, qui fait sortir de la simple compétition scolaire; nous pensons ici à l’importance du théâtre, de la musique, du sport.

� « La scolarité jusqu’à 18 ans ». La France se révèle aujourd’hui incapable d’assurer une scolarité obligatoire convenable à ses enfants, présentant des résultats déplorables aux tests internationaux PISA et laissant chaque année 160 000 jeunes sortir sans qualification : avant de repousser l’âge de la scolarité obligatoire, ne devrait-on pas commencer par investir dans un système scolaire et une pédagogie renouvelés ? A l’inverse, il nous semble que ces deux ans de capital formation supplémentaires pourraient s’inscrire dans le cadre d’un capital individuel que chacun pourrait ensuite mobiliser au cours de sa vie pour compléter ses compétences, dans une logique de formation tout au long de la vie.

� Sur l’enseignement supérieur : l’objectif de 50% d’une génération diplômée de l’enseignement supérieur est certes souhaitable, mais combien de jeunes passent directement d’une licence universitaire au chômage? L’alignement des moyens de l’université sur ceux des classes préparatoires nous parait par ailleurs budgétairement irréalisable. Améliorer l’université est une nécessité, mais les déclarations de bonnes intentions n’y suffiront pas.

L’impasse budgétaire qui se profile est d’autant plus grande que le texte se distingue par une attention insuffisante à l’égard des acteurs privés, entrainant toujours plus d’investissement public. S’il ne faut pas faire preuve d’angélisme et s’il faudra poser un cadre contraignant et conditionnel à de tels partenariats, il nous semble nécessaire, dans un but de réalisme, de favoriser la synergie public / privé et d’inciter l’action sociale de l’économie marchande. Nous en voulons pour preuve :

� La volonté de démantèlement des zones franches urbaines (ZFU) dans les quartiers concernés par la politique de la ville, alors même que le dernier rapport de l’observatoire national des zones urbaines sensibles montre de vrais résultats en termes d'implantation d'entreprises et d'emplois créés.

� La formation des enseignants : le retour aux IUFM ne pourra se faire en l’état. Il devra être discuté et analysé. En ce domaine comme dans d’autres, le retour des vieilles recettes ne suffira pas. Il faudra innover.

� La position sur les services publics : attention à ne pas confondre universalité des obligations de service public (tout opérateur internet, téléphonique ou postal doit desservir tout le territoire) et statut public des personnes qui y travaillent. Nous devons ici ne pas nous figer sur les moyens pour nous concentrer sur les fins.

� La question de l’eau : le choix de la délégation de service public ou du retour en régie relève évidemment de la responsabilité de chaque collectivité. Il ne s’agit donc pas tant d’agir comme prescripteurs d’un retour généralisé en régie – sans aucun doute conforme à nos valeurs - que de garantir cette liberté de choix en armant nos élus

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locaux des outils et analyses nécessaires pour maîtriser les enjeux et appréhender le problème dans sa globalité : prix et qualité de l’eau, sûreté des installations, emplois créés.

� La question des salaires enfin : si l’objectif d’une réduction des écarts salariaux à moyen terme nous semble nécessaire – notamment au sein des entreprises détenues par des capitaux publics, si le souhait d’une amélioration des salaires est partagé, l’annonce d’une hausse généralisée est un terrain hasardeux. Le sujet mérite une discussion plus large, qui intègre à la fois le partage de la valeur entre capital et travail, mais aussi la compétitivité ou encore les cotisations sociales.

La tentation peut être grande, en ces temps de crise, de revenir à un compromis daté, comme si seuls l’approfondissement et le durcissement des sécurités existantes pouvait protéger la population des risques nouveaux qu’elle rencontre. Ce serait une erreur grave. Qu’il s’agisse de retraites, d’assurance maladie ou de chômage, l’accroissement des dépenses ne suffira pas à fournir des garanties sociales meilleures. En outre, cette approche revient à privilégier le statut sur la personne. Les effets pervers de ce type de protections sont désormais bien connus : les perdants du système, et en premier lieu les chômeurs, qui sont aujourd’hui plus de 4 millions, mais aussi les précaires, les jeunes, les seniors paient pour la protection des autres.

On ne peut qui plus est constamment relever l’individualisation des rapports sociaux et continuer à promulguer des solutions qui existaient déjà dans les années 70. L’égalité réelle réclame de nouveaux paradigmes d’action et de réflexion – à la fois dans notre rapport au marché et à la société civile. Nous voulons ici nous faire les avocats d’une politique de l’émancipation, qui se fonde sur la capacité des individus à choisir leur propre mode de vie et qui s’appuie sur l’autonomie des acteurs institutionnels.

3) Concentrer les moyens sur ceux qui en ont le plus besoin

Ce devoir de réalisme nous oblige à un choix, à un arbitrage dans l’allocation des moyens. Or, l'égalité réelle, c'est renforcer nos politiques publiques et nos financements à destination des personnes qui en ont le plus besoin. Dans le contexte de rigueur budgétaire actuel, la politique du réel impose de manière encore plus pressante cette concentration des moyens dans les territoires qui accueillent les populations les plus en difficulté et qui subissent plus qu'ailleurs les conséquences de la crise.

Notre méthode doit être celle d’une politique d’équité des moyens, notre objectif celui de l’égalité des possibles. Car il y a, aujourd’hui, dans notre République, des territoires marginalisés qui abritent des populations en très grande difficulté (6 millions d’habitants dans les 752 quartiers dits sensibles) : un habitant sur trois et un mineur sur deux y vivent en-dessous du seuil de pauvreté. En concentrant les symptômes qui ébrèchent notre cohésion nationale, ces quartiers relégués cristallisent des inégalités sociales et territoriales insupportables, qu‘aucun gouvernement, de droite comme de gauche, n’a réussi à enrayer depuis 40 ans. Il nous faut à l'évidence revoir entièrement notre manière de concevoir l'aide à ces quartiers défavorisés. Cette politique ne sera ambitieuse que si elle est effectivement élevée au rang de priorité nationale et si l'ensemble des ministères renforcent leurs politiques de droit commun dans ces quartiers, complétés par les crédits spécifiques de la politique de la ville.

En premier lieu, nous devons réinventer la gouvernance de la politique menée en direction de ces quartiers. Car la politique de la ville, insuffisamment dotée, marginalisée,

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impuissante à mettre en mouvement les vrais leviers de l’efficacité politique, économique et sociale, n’a jamais pu devenir une véritable politique d’envergure. Nous proposons donc qu’elle soit directement rattachée et pilotée par le Premier Ministre. Au pilotage transversal assuré par le chef du gouvernement au niveau national, répondra un pilotage contractualisé entre le préfet et le maire au niveau local. Le maire doit en effet être conforté dans son rôle de cheville ouvrière des politiques publiques nationales dans ces quartiers.

Encore faut-il que les communes qui en ont le plus besoin en aient véritablement les moyens. C'est, nous semble-t-il, le deuxième axe fondamental d'une nouvelle vision de la politique de la ville. Si nous souscrivons à l’objectif général de justice territoriale affiché dans le texte de Benoit Hamon, nous voulons afficher clairement la priorité de la péréquation financière dans le cadre budgétaire que nous connaissons, afin que les égoïsmes locaux ne prennent pas le dessus sur cette volonté d’égalisation. Aujourd'hui, les 1% des communes les plus riches disposent de 45 fois plus de pouvoir d’achat que les 1% des communes les plus pauvres. Or, ces dernières doivent, elles, quotidiennement faire face aux besoins croissants de populations défavorisées. La péréquation financière est un objectif constitutionnel qui doit permettre de soutenir les collectivités en incapacité budgétaire structurelle : celles qui ont peu de ressources et beaucoup de charges. Il nous faut ici différencier les villes « qui ont des quartiers » de celles « qui sont des quartiers ». Ce sont ces dernières qui doivent constituer notre priorité. Pour permettre à ces communes d'avoir un pouvoir d'achat minimal, il nous faut aujourd'hui doubler le montant global de la péréquation. Cela nécessite d'une part de renforcer les dotations de péréquation de l'Etat, en les abondant d'1 milliard d’euros supplémentaires et en les concentrant sur un nombre plus restreint de bénéficiaires. Cela demande d'autre part la création d’un fonds national de solidarité de 3 milliards d’euros, alimenté par les collectivités les plus aisées au profit des collectivités les plus défavorisées.

Cette volonté de mieux cibler nos moyens publics doit se retrouver dans toutes nos politiques, et notamment celle de l'emploi, pierre angulaire du développement de ces territoires où le chômage est trois fois supérieur à la moyenne, spécifiquement chez les jeunes, alors qu'il n’existe pas de politique spécifique de Pôle emploi en direction de ces quartiers. Sur ce point, la fin du dispositif des zones franches urbaines est une erreur. Car, et c’est une divergence avec le texte proposé, ce dispositif a montré des résultats probants dans les quartiers en termes d'implantation d'entreprises (les ZFU rattrapent leur retard sur l'unité urbaine dans laquelle elle se situe) et d'emplois créés (baisse du chômage plus marquée dans les ZFU que dans les ZUS notamment). S'il n'est pas complètement satisfaisant (avec une sur-représentation des entreprises du bâtiment, et une sous-représentation des activités tertiaires, notamment des services aux particuliers et aux entreprises), et s'il a parfois pu constituer un effet d’aubaine, son principe d’exonération ne saurait être remis en cause par simple posture dogmatique. Pour désenclaver ces territoires et que les emplois créés soient en priorité destinés aux habitants de ces quartiers, il nous semble nécessaire de développer un dispositif d’emplois francs qui attache l’exonération à la personne du demandeur d’emploi – sur un critère d’adresse – plutôt qu’à l’entreprise.

Le programme national de rénovation urbaine (PNRU) participe lui aussi d'un renouvellement en profondeur de ces quartiers. Là dessus, l'Etat doit pleinement se réinvestir, lui qui s'est désengagé totalement, aux dépens de nos partenaires traditionnels (Action Logement et organismes HLM). C'est une nécessité non seulement pour la réussite de ce PNRU, mais également pour le lancement d'un PNRU 2 pour les quartiers qui n'ont pas bénéficié du premier programme et pour certains quartiers mitoyens de ceux actuellement en cours de transformation. Un tel projet nécessiterait un investissement minimal de l’ordre de 4 milliards d'euros, servant de levier à une opération de près de 12 milliards d’euros.

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Conjointement à ces projets, l'ACSé doit avoir les moyens d'une véritable politique d'animation sociale de ces quartiers. Il faut donc inverser la tendance car les crédits qui lui sont effectivement accordés dans le cadre des CUCS (contrats urbains de cohésion sociale) et à destination des associations sont depuis plusieurs années en nette diminution.

Enfin, mais de manière non exhaustive sur un sujet aussi important, nous souhaitons que soit abordée la question centrale de la ghettoïsation et de la mixité sociale. Là encore, l'égalité réelle appelle de nouvelles postures et de nouvelles solutions:

� il y a bien entendu la question du désenclavement physique de ces quartiers par les transports en commun, vecteurs territoriaux d'un désenclavement psychologique de leurs populations;

� mais la ghettoïsation, c'est aussi la constitution dans notre pays de ghettos de riches, qui refusent la solidarité nationale, en ne participant notamment pas à l'effort de construction de logements sociaux. On peut bien sûr vouloir 25% de logements sociaux, mais pour quelle efficience quand l'objectif des 20% n'est déjà lui-même pas atteint? On peut quintupler les amendes, mais on laisse toujours la possibilité par ce biais aux communes de choisir entre accueillir des populations plus pauvres et payer des amendes pour financer l'entre-soi. Il nous semble que d'autres solutions, plus coercitives, doivent être trouvées. Ainsi, les préfets doivent imposer la construction de logements sociaux dans les territoires qui ne respectent pas la loi SRU. Cette obligation permettra conjointement l'interdiction du DALO dans les ZUS, qui a eu l'effet pervers de concentrer encore un peu plus les populations les plus précaires dans ces quartiers.

� la ghettoïsation, c'est enfin la question du développement du communautarisme et du fait religieux dans ces quartiers. L'actualité vient nous le rappeler régulièrement: port du voile intégral, quick halal, port du foulard pour les agents territoriaux, accessibilité à certains équipements ou services publics (piscines, gymnases, hôpitaux...). Face à ces réalités, et parce que notre République est en partie responsable de la montée de certains extrémismes dans ces quartiers, nous avons le devoir d'ouvrir un grand débat national sur la laïcité dans notre pays. Ce débat doit être la réponse positive, constructive et dépassionnée au débat sur l'identité nationale. Il doit nous permettre d'actualiser notre vision d'une société qui a profondément évolué depuis le début du XXème siècle, sans laisser à penser que nous devrions en avoir peur.

4) Pour un nouveau paradigme : vers une prise en compte de l’individu

Il nous faut reconnaitre qu’en tant que socialistes, nous nous sommes souvent trouvés embarrassés par l’individualisation de nos sociétés. Certes, des notions telles que la flexi-sécurité – évoquée mais jamais mise en œuvre – ont pu se faire jour, accréditant une évolution à la marge, mais nous tendons en général à préférer le seul collectif, laissant l’individuel aux sirènes du libéralisme capitaliste ou politique.

Nous oublions là Jaurès : « Rien n’est au-dessus de l’individu. Le socialisme est l’individualisme logique et complet… L’individu est la fin suprême ». Il nous faut dépasser cette incapacité si nous voulons penser le monde moderne, rappeler que notre horizon est celui de l’émancipation des individus, de la maîtrise par chacun de son destin individuel. Suivre ce chemin, c’est d’abord insister sur des politiques que nous pourrions appeler de « capacités » ou d’émancipation et ne pas opposer égalité des statuts (celle des places) et égalité des chances.

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L’école des chances, pour tous

C’est notamment dans ce cadre que nous souhaitons que soit abordée la question de l’école. Ici plus encore qu’ailleurs, la réforme est difficile. Ici plus encore qu’ailleurs, elle est indispensable ; parce que, pour n’avoir jamais pu adapter son fonctionnement à la massification scolaire, elle a perdu de vue l’objectif de promotion sociale qui était le sien ; parce que les performances moyennes des élèves français sur la scène internationale sont en chute libre, comme le confirment régulièrement les tests PISA; parce que, surtout, nombre d’enfants sortent du système scolaire sans savoir lire et écrire, conditions premières d’une vie professionnelle choisie.

A cette situation, la droite oppose un discours dont il nous faut reconnaitre l’efficacité politique. Elle s’est ainsi fait le chantre de l’égalité des chances et de la méritocratie, promettant à ceux « qui le méritent » un avenir meilleur : c’est le sens des internats d’excellence ou de la libéralisation de la carte scolaire, qui permet aux meilleurs de s’extraire de leurs établissements condamnés. Cette politique rencontre un écho certain, car elle s’adresse aux ressorts individuels de la promotion sociale. Mais elle oublie les autres, l’immense majorité qui ne s’en sortira pas, rompant par là avec l’idée même d’une école facteur de progrès général et de cohésion sociale. Ce système encourage toutes les formes de compétition et d’exclusion scolaires et se fait au détriment des dimensions culturelles et émancipatrices de l’éducation. Elle engendre manque de confiance chez les élèves, culpabilisation, décrochage et échec scolaire.

Pour y répondre, il nous faut réussir à convaincre qu’émancipation et accomplissement individuel ne sont pas l’apanage des plus aisés, que l’école est le lieu où chacun peut se forger un destin. Chacun, c’est-à-dire tous. Pour cela, nous devons appréhender le parcours scolaire dans son ensemble et donner un cadre général à ce que nous pensons être une évolution juste. A ce titre, il nous semble primordial de différencier la scolarité obligatoire de l’enseignement supérieur pour :

� Accorder la priorité à un enseignement obligatoire (primaire + collège) dramatiquement sous-doté – y compris au regard des standards de l’OCDE – pour en faire le temps de l’émancipation, à travers l’accompagnement réel de tous les enfants vers l’acquisition du socle commun de compétences. Cela suppose de promouvoir le collège unique – et donc de ne pas « assouplir les parcours ». Les différentes études internationales montrent que le collège unique reste le meilleur vecteur pour assurer la promotion sociale et l’élévation du niveau moyen des élèves. Il faudra réformer la notation, diminuer drastiquement les redoublements, créer des temps de suivi individualisé systématisés et insérés dans le temps principal d’enseignement, arrêter l’orientation par l’échec dès la fin de la cinquième. Pourquoi d’ailleurs ne pas inverser le système de décompte des classes à rebours jusqu’au bac, qui symbolise un système peu cohérent et stigmatise ceux qui sortent du système avant d’arriver en «première» puis en «terminale»?

� Réserver au lycée et à l’enseignement supérieur une dynamique plus compétitive et plus autonome, en assurant l’équilibre général du système et la promotion d’écoles et d’universités à même de rivaliser avec les meilleures universités étrangères. Il convient ici de reconnaître que la réforme de l’organisation des lycées semble aller dans le bon sens, même si elle peut parfois susciter des réticences au vu de la nouvelle répartition des pouvoirs qu’elle organise.

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Cette dynamique émancipatrice, qui vise à donner à chacun – et pas seulement aux plus aisés - les clefs de la construction de son parcours, c’est également l’enjeu de la flexi-sécurité et de la formation professionnelle.

Flexi-sécurité et formation professionnelle

Dès lors que les parcours professionnels se diversifient, la prise en charge des accidents particuliers et des singularités individuelles est décisive. En France, elle est insuffisante. Les politiques réparatrices méritent d’abord d’être ciblées et d’assurer la continuité des droits par-delà la diversité des situations dans lesquelles se trouve un individu. Cela aboutit notamment à faire en sorte que les droits liés au travail ne relèvent plus de l’emploi occupé mais du salarié : ainsi, celui-ci pourrait conserver avec lui les droits accumulés, par exemple en matière de formation ou d’ancienneté. C’est tout l’enjeu pour les socialistes français d’une sécurité sociale professionnelle.

Les débats se focalisent sur le modèle danois où le licenciement est très facile. Mais en contrepartie, les chômeurs y sont beaucoup mieux et beaucoup plus longtemps indemnisés qu’en France (jusqu’à quatre ans), notamment les chômeurs les moins qualifiés. Pour les travailleurs à bas salaires, les indemnités de chômage peuvent atteindre jusqu’à 90% du revenu d’activité. Un modèle combinant une mobilité plus grande des travailleurs et une forte indemnisation des chômeurs permettrait de réduire les inégalités entre chômeurs et salariés. Le modèle danois n’est évidemment pas importable en France mais, à une époque où le travail salarié est de moins en moins au centre de l’organisation sociale, les périodes de non-travail doivent apparaître comme des moments de transition, non comme la sortie du système. La France est, soyons-en conscients, le pays où la protection juridique des salariés est théoriquement la plus forte mais c’est également celui où le sentiment d’insécurité économique est le plus prononcé. Ce paradoxe doit nous inciter à inventer de vraies protections, à la fois sécurisante et adaptées au monde d’aujourd’hui.

Une telle réorganisation doit nécessairement s’articuler avec une refonte de la formation professionnelle, afin de permettre aux salariés de suivre le rythme des changements imposé par l’innovation technologique et la mondialisation. C’est pourquoi nous souhaitons être très offensifs sur ce sujet.

De manière schématique, les individus ont vocation à avoir deux ou trois vies professionnelles dans une même vie d’homme ou de femme, ce qui suppose de mettre en place une véritable fonction d’ « aiguillage » pour accompagner les individus dans leurs besoins d’adaptation, de formation et de mobilité tout au long de la vie. Cette question n’est pas nouvelle et la formation continue est l’objet d’un effort soutenu des entreprises, de l’Etat, des régions et des associations. Mais les observateurs et les rapports convergent depuis plusieurs années pour dénoncer les failles du système actuel, peu adapté à l’ampleur des défis et mal ciblé – les catégories les plus exposées au changement étant celles qui bénéficient le moins des formations. Pour faire fonctionner de nouveau l’ascenseur social et donner à chacun les moyens de son autonomie, il convient de remettre à plat le système de formation continue et de l’articuler avec les politiques d’emploi et l’enseignement professionnel :

� revoir la gouvernance du dispositif (optimiser la rencontre de l’offre et de la demande, réguler les prestataires, améliorer le rôle des GRETA - groupements d’établissements publics en charge de l’organisation d’actions de formation continue pour adultes, etc.) et son financement (sortir du dispositif les besoins de formation que les entreprises ont spontanément intérêt à donner à leurs salariés, réviser en profondeur le rôle des organismes collecteurs) ;

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� sanctuariser le droit individuel à la formation et la reconnaissance des acquis professionnels ;

� renforcer considérablement les moyens de Pôle emploi, en particulier pour que priorité soit donnée au conseil aux demandeurs et que soit mise en place une offre de formation personnalisée et réactive.

Pour donner à chacun plus de liberté et d’autonomie, il nous faudra aussi repenser la protection sociale et son financement. Nous pensons par exemple à la possibilité pour les actifs de choisir le moment de leur départ en retraite via un système de comptes notionnels, système qui permet de maintenir le principe de répartition tout en reliant plus directement les prestations reçues aux cotisations versées par chacun tout au long de sa vie. Il permet de concilier solidarité, équité et préférence individuelle.

5) Pousser à l’autonomie des acteurs institutionnels

Cette « politique des capacités » doit également infuser notre rapport aux acteurs de la société civile, et guider notre philosophie de l’action publique. Il nous faut avoir le courage de proposer un compromis social fondé sur la négociation et dépasser ainsi les réponses classiques qui, à l’illusion libérale de la construction d’un bien commun par la somme des intérêts individuels, répondent par la définition coercitive d’un avenir collectif pensé au niveau central. Nous devons avoir l’ambition de bâtir un nouveau compromis social d’émancipation à la française:

� dans le champ économique, cela passe par le développement de la démocratie sociale ;

� dans le champ social, cela passe en particulier par un partenariat renouvelé entre collectivités publiques et associations ;

� au niveau institutionnel, cela suppose de décentraliser davantage et de mener une politique de péréquation ambitieuse.

Démocratie sociale et gouvernance de l’entreprise

Trop souvent, l’entreprise reste le parent pauvre de notre réflexion sur les relations entre marchés et inégalités. C’est encore le cas dans le texte qui nous est proposé. Cette situation, fruit de la singularité des relations entre parti et syndicats au sein du socialisme français, est une carence majeure. Il nous faut y remédier, tant il s’agit là d’un levier puissant vers plus d’égalité. C’est à notre sens un chantier essentiel dans le projet d’une gauche réformiste moderne. Il permettra de replacer l’équilibre entre capital et travail au cœur de l’entreprise, plutôt que de le laisser à la seule médiation de la puissance publique.

Redonner de la voix aux salariés, c’est d’abord leur donner accès aux grandes instances de décision. Il nous faut ainsi aller vers la généralisation de la présence des représentants des salariés dans les instances de décision des entreprises. Nous sommes favorables à un modèle qui rendrait systématique la coexistence d’un conseil de surveillance à côté du conseil d’administration. Pour certaines décisions touchant à la vie sociale de l’entreprise, des votes à majorité qualifiée des deux conseils seraient requis.

Il nous faut également renforcer le rôle des instances représentatives du personnel (CE) pour qu’elles aient enfin accès à une information loyale régulière sur la situation, les grandes politiques ou les projets de leur entreprise dans les délais nécessaires. Pour cela, comme le préconisent les organisations syndicales, nous devons changer le moment de l'information-

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consultation pour créer une véritable confrontation avant que le conseil d’administration ou d’autres instances de décision ne puissent prendre les décisions stratégiques. Le périmètre doit porter sur la stratégie économique de l'entreprise, le partage de la valeur ajoutée, la gestion de l'emploi, la formation, l'impact environnemental de l'activité de l'entreprise, l'organisation du travail et la rémunération des managers. Ce processus doit aussi inclure le comportement de l'entreprise vis-à-vis de ses sous-traitants. Il nous faut également réfléchir au meilleur moyen d’associer des représentants des intérêts territoriaux et environnementaux. Nous sommes convaincus que la meilleure prise en compte des différentes parties prenantes des entreprises permettra à terme une compétitivité renforcée.

Ces évolutions doivent s’accompagner d’une poursuite de la réflexion sur la représentativité syndicale qui, dans le cas des TPE, doit être renforcée par la mutualisation des structures au niveau du bassin d’emploi et des filières professionnelles.

Pour un nouveau partenariat entre l’Etat et la société civile

En quelques années, les occasions ont été nombreuses de rappeler la place des associations pour inventer les réponses sociales et inspirer les politiques publiques dont notre société a tant besoin. Mais nous devons pourtant constater combien les progrès du partenariat entre associations et pouvoir publics sont minces depuis trente ans. Il s’agit pourtant là d’un impératif : l’ « utilité associative » est évidente pour recueillir la parole des personnes les plus marginalisées que notre système de protection sociale n’arrive plus à atteindre, pour pacifier les relations avec des jeunes et des moins jeunes que le désespoir conduit à une violence dont ils sont les premières victimes, pour explorer des nouveaux enjeux sociétaux et défricher de nouveaux chantiers de politiques publiques.

Les conservatismes et préventions passées doivent être abandonnés pour mettre fin aux paradoxes suivants : jamais les individus n’ont été si conscients des enjeux sociaux et jamais pourtant ils n’ont été si démunis pour inscrire leur réponse dans un cadre collectif. Jamais la créativité de nos concitoyens et leur attachement à la solidarité et à la démocratie n’ont été aussi forts, et pourtant nous constatons un éclatement des initiatives limitant leur portée et leur efficacité, ce qui s’accompagne d’une remise en cause des institutions y compris associatives. Il est inimaginable de changer de société sans la société elle-même.

Il nous faut donc dessiner un nouveau pacte associatif, rationnaliser les structures et chercher l’efficacité dans les rapports entre les associations et les pouvoirs publics. Il convient là de développer une philosophie « d’Etat-socle», qui favorise, garantisse et évalue l’exercice des compétences de la société civile. Définition de cadres partenariaux négociés mais sécurisés, mise en place de structures de collaboration inter-associations, création de dispositifs temporaires de financement pour permettre des expérimentations, augmentation de la transparence sur l’attribution des subventions, évaluation des politiques menées, ... les pistes sont nombreuses, nous devons y travailler.

Une nouvelle ère de la décentralisation

Une telle politique d’autonomisation doit enfin nous amener à envisager un nouvel âge de la décentralisation. Chaque jour, au plus près du terrain, les exécutifs locaux mènent le combat contre les inégalités et pour un développement juste des territoires, avec la proximité et la réactivité nécessaire. Il convient que l’Etat reconnaisse cette compétence et agisse à leur côté. Cela passera certes par des délégations de compétences plus importantes encore, mais également par les moyens inhérents à ces nouvelles responsabilité.

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Conclusion :

Le conseil national passé, la balle est dans le camp des militants, et ce jusqu’au 11 décembre, jour de la convention. Avant cette échéance, nous exprimons plusieurs remarques sur le texte, que nous n’avons pas approuvé à ce stade.

� Son élaboration, entachée de trop d’opacité et d’un calendrier irréaliste, n’a pas permis la construction d’une vision collective.

� Il ne nous semble pas qu’ait été suffisamment fait ce travail minutieux de sélection, d’élimination de toutes les propositions qui pourraient nuire à la crédibilité du projet du parti. Gouverner, c’est choisir. Et il est indispensable que nous soyons prêts, dès aujourd’hui à gouverner.

� Il nous faut encore donner notre vision de l’égalité, sans quoi nous serons condamnés à empiler des propositions sans fil directeur. Nous appelons dans ce cadre à un aggiornamento de notre philosophie d’action autour d’une politique qui mette l’accent sur l’émancipation individuelle et l’autonomie des acteurs institutionnels.

Ce texte est-il amendable ? Ne nous voilons pas la face : les délais sont très courts et les divergences réelles. Il reste toutefois quelques courtes semaines pour faire en sorte que les préoccupations et les propositions ici exprimées soient prises en compte. Au-delà, la définition d’un programme crédible de propositions reviendra à la « convention des conventions » qui doit définir le projet des socialistes. Faisons des mois qui viennent des mois de débat fécond, menons un travail de sélection parmi toutes les propositions qui sont mises sur la table, avançons de nouvelles idées, bref, travaillons encore pour être utiles à notre parti, à la gauche et, demain, aux Français.