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  • LESPACE DANS NOTRE-DAME DE PARIS DE VICTOR HUGO

    Ana Mara Rodrguez Seara

    RESUMEN

    Si alguna obra de la literatura francesa est ntimamente asociada a su au-tor, sa es Notre Dame de Paris de Victor Hugo. Esta novela sigue fasci-nando, generacin tras generacin, a los lectores que deciden asomarse a sus pginas a pesar de lo trillada que puede resultar hoy en da su historia por la explotacin a la que la expuso su propio xito. El tratamiento que Victor Hugo hace del espacio en su obra es sin duda un elemento clave pa-ra que esta narracin capte la atencin del lector. El espacio narrativo es aqu el marco histrico minuciosamente tejido como un escenario cuyo de-corado se hubiese cuidado hasta el ms mnimo detalle permitiendo la evo-lucin de los personajes envolvindoles y condicionndoles, aprisionndoles con su oscurantismo y finalmente arropndoles hasta el desenlace de su trgico destino. Notre Dame, la majestuosa catedral parisina, en ocasiones maternal y en otras monstruosa e impasible espectadora de la tragedia, se convierte en un personaje omnipresente dando nombre a esta obra maes-tra de la literatura francesa del siglo XIX.

    ABSTRACT

    No other French Literature work is closely related to its author, as it is Vic-tor Hugos Notre Dame de Paris. This novel still fascinates, generation after generation, those readers who decide to look into its pages despite the fact that nowadays it is a hackneyed story due to its own success exploitation. The space in Victor Hugos work is dealt with in a way that it is a narrative key factor to draw the readers attention. The narrative space is here the historical framework, thoroughly woven as if it was a stage whose decora-tion had been cared in great detail, allowing the evolution of characters, shrouding ,conditioning, trapping them with his obscurantism and finally, protecting them until their final tragic destiny. Notre Dame, the magnificent Paris cathedral, sometimes maternal, other times, atrocious and impassive witness of the tragedy, becomes an omnipresent character naming this masterpiece of the French Literature.

    RSUM

    Sil est une uvre littraire que lon associe troitement son auteur, il sagit bien sr de Notre Dame de Paris de Victor Hugo. Ce roman a fascin, au cours des gnrations, les lecteurs qui dcident un jour de plonger dans un univers narratif familier, victime de son propre succs. La faon dont Victor Hugo manie lespace dans cette uvre est sans aucun doute un lment cl qui permet dattirer lattention du lecteur. Lespace narratif est le cadre historique reconstruit dans les moindres dtails la manire dun dcor o les personnages voluent encadrs, emprisonns par les ombres

  • LESPACE DANS NOTRE-DAME DE PARIS DE VICTOR HUGO du monde mdival, puis bercs jusqu laccomplissement de leur destin si tragique. Notre Dame, limposante cathdrale parisienne, parfois tendre et maternelle, parfois impassible et monstrueuse spectatrice de la tragdie qui se droule ses pieds, devient un personnage part entire, omniprsent, donnant son nom ce chef duvre de la littrature franaise du XIXme sicle.

    I. INTRODUCTION

    Si nous avons dcid dtudier ici le roman Notre-Dame de Paris de Victor Hugo ce nest videmment pas parce quil raconte un fait historique rel plus ou moins romanc mais parce que la rcration de toute une poque historique, le quinzime sicle en France, apporte ce roman une dimension historique qui donne au lecteur une sensation de ralit.

    Etant donn quil ne raconte pas une histoire vraie, ce roman ne

    met pas en scne des personnages historiques ayant rellement exist, Notre-Dame de Paris ne peut pas tre considr un roman historique part entire, cependant, on peut dire quil sagit dun roman de fiction qui recre une poque historique comme cadre rel o se dveloppera laction fictive. Lespace et le temps historiques vont constituer les piliers solides sur les-quels repose le rcit de fiction. En effet, le temps dans Notre-Dame de Paris correspond une poque concrte, le quinzime sicle et lespace repr-sente toute une ville, Paris et plus particulirement son centre, son cur, sa cathdrale.

    Si lon cite luvre de Victor Hugo dans les ouvrages de critique lit-

    traire portant sur le roman historique du dix-neuvime sicle, hritier de luvre de Walter Scott, cest grce son singulier traitement des espaces physiques et symboliques. Ce nest pas en vain que le titre mme de luvre glorifie lespace emblmatique du roman, la cathdrale de Notre-Dame de Paris, espace centralisateur de lhistoire de Quasimodo et dEsmralda, es-pace vivant, dans un Paris o fourmille la population du quinzime sicle. Tout au long de ce travail, nous visiterons les diffrents espaces o se dve-loppe laction narrative et nous pourrons voir comment se mlent les descrip-tions de lespace physique et les dtails valeur symbolique.

    Si Victor Hugo ncrit pas avec la rigueur dun historien qui mani-pule un matriau historique, tout du moins il garde la rigueur de lexpert en art et lenthousiasme de lamateur de lpoque mdivale dans sa manire de recrer un microcosme o le destin fera bouger les personnages comme sil sagissait de marionnettes guides par des fils invisibles:

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    Hugo donnait les rles les plus importants, non des personnages historiques, mais aux hros ns de son imagination. Encore ces der-niers tendent-ils seffacer devant la grandeur de Notre-Dame (...) Ici, cest la cathdrale qui rsume le Moyen Age (...) Le roman histo-rique, avec Notre-Dame de Paris devient une pope mdivale.1

    Grce des descriptions minutieuses et pleines de pittoresque, V.

    Hugo entraine ses lecteurs, auxquels il demande constamment de faire un effort dimagination, vers un pass rvolu mais dont le prsent garde encore quelques traces qui constituent pour le lecteur un point de dpart dans la reconstruction mentale du Paris du XVme sicle. Hugo profite souvent de ces rfrences pour dnoncer les restaurations quil considre une profana-tion des lieux gothiques qui furent lemblme de lpoque la plus glorieuse de lart franais.

    Le fait dencadrer son roman cette poque, ne reprsente pas pour lauteur la soumission la mode littraire romantique qui a augment lintrt de ses contemporains pour lencadrement mdival des romans, sinon le moyen de partager avec ses lecteurs sa passion pour larchitecture et lart et dexprimer ouvertement ses critiques.

    Cest galement un bel hommage sa ville, Paris, que de la dcrire au moment o elle prsente toute sa splendeur gothique.

    Lambiance mdivale de V. Hugo, si dpaysante par son effet de rel, est pleine de topiques sur lobscurantisme et la superstition de cette poque et met en scne des personnages galement mystrieux: Esmralda, danseuse gyptienne dont lorigine est douteux; Quasimodo, crature mi-homme, mi-monstre; Frollo, prtre plus satanique que chrtien:

    El pasado ureo, la poca de oro en la que los romnticos pretenden refugiarse es la de los siglos medievales, la edad oscura tan despre-ciada por los pensadores ilustrados inmediatamente anteriores por considerarla como el momento del apogeo de la supersticin y del dominio desptico de los poderes irracionales, la poca de la noche de la razn. Todas estas connotaciones, que pretendan tener un carcter peyorativo, era lo que les pareca a los romnticos su mayor atractivo.2

    1Raimond, M. (1967): Le roman depuis la rvolution, Collin, p.24 2Santamarta, J.M.; Atienza, J.L. y otros (1987): En torno a Vctor Hugo, Servicio de publicaciones de la Universidad de Len, p.45

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    La prsentation des espaces du roman est conue comme une vi-site touristique travers les quartiers populaires du Paris du XVme sicle, elle foisonne de dtails encyclopdiques que lauteur offre au lecteur non pour le drouter sinon pour laider dans sa tentative de dpaysement mais conscient que certains dentre eux viteront de sattarder sur ces digressions sans trop dintrt pour le droulement de laction.

    Lespace chez Hugo nest pas un lieu immobile et froid, il influence les hommes, devient un personnage de premier rang et contribue la mise en place des lments que le destin manipulera pour en arriver ce d-nouement dramatique mais librateur pour des personnages attraps dans la toile tisse par le destin entre les tours de la cathdrale.

    II. UN RECIT FICTIF EMPREINT DHISTORICITE.

    Comme nous venons de le dire dans lIntroduction, Notre-Dame de Paris ne peut pas tre considr comme un roman historique proprement parler car il ne met pas en scne des personnages historiques ayant relle-ment exist ni des vnements suffisamment documents. Cependant, mme si ce roman nest pas historique dans un sens stricte, les ouvrages de critique littraire le placent dans le mme domaine que dautres uvres qui, dune faon plus ou moins romance mettent en scne des personnages et des vnements historiques rels, comme cest le cas de certains romans de Balzac ou de Dumas.

    On peut dire, sans grand risque de se tromper, que V. Hugo a vou-lu dans ce roman recrer toute une poque de lHistoire de France le plus prcisment possible afin de donner ses lecteurs une impression de vraci-t. Pour ce faire il en appelle limagination et lintuition des lecteurs et les fait participer son rcit comme sil sagissait dun personnage de plus.

    Nous essaierons de montrer dans ce chapitre tous les mcanismes utiliss par lauteur pour rendre son histoire acceptable du point de vue de la vracit et non seulement du point de vue narratif.

    Victor Hugo commence son rcit sur un ton de confidence pour ex-pliquer au lecteur lorigine de cette histoire quil situe lors de la mystrieuse dcouverte dune inscription sur un mur de Notre-Dame quil assure tre le seul avoir vu et qui a excit sa curiosit.

    Il sagit dune histoire fictive mettant en scne des personnages imaginaires, mais ce stratagme permet V. Hugo de tisser un lien tout au

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    long du roman entre la cathdrale, lespace physique o se droule laction, et les personnages eux-mmes dont le destin est grav sur la pierre qui en a t le tmoin silencieux:

    Lhomme qui a crit ce mot sur ce mur sest effac, il y a plusieurs sicles, du milieu des gnrations, le mot sest son tour effac du mur de lglise, lglise elle-mme seffacera bientt peut-tre de la terre.3

    Cest par cette manuvre narrative quil va sefforcer de rendre son

    rcit vridique pour le lecteur:

    En fait le romancier tente de remplacer lhistorien prcisment l o lhistorien fait dfaut: dans le roman historique, lhistoire est raconte et explique travers le destin individuel des personnages, alors que dans un ouvrage historique lhistoire semble se drouler elle-mme, en dehors des individus qui lon faite.4

    V. Hugo insiste sur ces inscriptions qui frapprent vivement lauteur, sur leur origine ancienne: noires de vtust ainsi que sur leur mystrieux auteur: (...) Comme pour rvler que ctait une main du moyen ge qui les avait crites l mais disparu jamais comme linscription:

    Il ne reste plus rien aujourdhui du mot mystrieux grav dans la sombre tour de Notre-Dame, rien de la destine inconnue quil rsu-mait si mlancoliquement.5

    Tous les lments romantiques qui pouvaient veiller la curiosit du

    lecteur sont ici prsents depuis le dbut du roman et tendent nous faire croire que lhistoire a rellement exist et que lauteur va nous la rvler dun moment lautre. Pour faire partager son enthousiasme par ses lec-teurs, V. Hugo se dit captiv par cette mystrieuse inscription et prt en dcouvrir lhistoire:

    Il se demanda, il chercha deviner quelle pouvait tre lme en peine qui navait pas voulu quitter ce monde sans laisser ce stigmate de crime ou de malheur au front de la vieille glise.6

    3Hugo, V. (1988): Op.cit., p.30 4Daspre, A. (Avril-Juin 1975): Roman historique et histoire, Revue dhistoire littraire de la France, n2-3. 5Hugo, V. (1988): Op.cit., p.30

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    Victor Hugo est parfaitement conscient que ce qui intresse princi-

    palement la plupart des lecteurs cest lhistoire de ses personnages et non ses digressions artistiques:

    Car ce qui compte, ce nest pas la reproduction dvnements rels, historiques, mais celle des passions humaines lmentaires, la peur, le courage, la volont de puissance, labngation, linstinct de mort, lamour.7

    En parlant des chapitres ajouts ldition de 1832, V. Hugo ne se

    fait pas dillusions:

    Lauteur considra que les deux seuls de ces chapitres qui eussent quelque importance par leur tendue, taient des chapitres dart et dhistoire qui nentamaient en rien le fond du drame et du roman, que le public ne sapercevrait pas de leur disparition (...) sans doute ces chapitres retrouvs auront peu de valeur aux yeux des personnes, dailleurs fort judicieuses, qui nont cherch dans Notre-Dame de Paris que le drame, que le roman.8

    Cependant il se rsiste croire que personne ne verra autre chose

    que de la fiction dans ce roman, cest pourquoi il se dirige au lecteur ama-teur dart et dhistoire pour lui donner la piste dune valeur plus profonde qui requiert une lecture plus savante, moins superficielle que celle des amateurs de simples histoires daventures:

    Mais il est peut-tre dautres lecteurs qui nont pas trouv inutile dtudier la pense desthtique et de philosophie cache dans ce livre, qui ont bien voulu, en lisant Notre-Dame de Paris, se plaire dmler sous le roman autre chose que le roman, et suivre, quon nous passe ces expressions un peu ambitieuses, le systme de lhistorien et le but de lartiste travers la cration telle quelle du pote.9

    6Hugo, V. (1988): Op.cit., p.29 7Tadi, J.Y. (1982): Le roman daventures, Paris, PUF, p.9 8Hugo, V. (1988): Op.cit., p.32 9Hugo, V. (1988): Op.cit., pp.32-33

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    Tout comme Balzac dans Les chouans, V. Hugo se considre ici un peu historien par son effort de rcration dune poque: quon arrange ces choses comme on pourra. Je ne suis quhistorien.10

    Il revendique galement pour lui le rle denseignant:

    Tous ces dtails que nous mettons ici nu pour ldification du lec-teur...11

    Et de rcuprateur de lesthtique mdivale:

    Notre-Dame de Paris a peut-tre ouvert quelques perspectives vraies sur lart du moyen ge.12

    Hugo date son rcit rebours, en partant du prsent et en invitant

    ses lecteurs faire avec lui un voyage dans le pass:

    Il y a aujourdhui trois cent quarante huit ans six mois et dix-neuf jours que les parisiens sveillrent au bruit de toutes les cloches...13

    Le choix de cette date ne correspond pas un vnement histo-

    rique important, connu de tous et qui aiderait le lecteur sintroduire dans lpoque sinon quil rpond la volont dentrer dans une ambiance pitto-resque, populaire, gaie et extraordinairement moyengeuse:

    Le 6 janvier, ce qui mettait en motion tout le populaire de Paris (...) ctait la double solennit runie depuis un temps immmorial, du jour des Rois et de la Fte des Fous.14 Ce nest cependant pas un jour dont lhistoire ait gard souvenir que le 6 janvier 1482. Rien de notable dans lvnement qui mettait ainsi en branle, ds le matin, les cloches et les bourgeois de Paris.15

    Soucieux de lexactitude des espaces, V. Hugo se fait un devoir de

    situer prcisment les lieux o se droule laction et den faire une descrip-

    10Hugo, V. (1988): Op.cit., p.315 11Hugo, v: (1988): Op.cit., p.77 12Hugo, V. (1988): Op.cit., p.34 13Hugo, V. (1988): Op.cit., p.37 14Hugo, V. (1988): Op.cit., p.38 15Hugo, V. (1988): Op.cit., p.37

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    tion minutieuse pour former un microcosme mdival plein de pittoresque. Pour cela, il nhsite pas citer ses sources: Sauval, de Breul, etc. et faire appel la collaboration de ses lecteurs travers leur imagination:

    Maintenant, que ceux de nos lecteurs qui ont la puissance de gnra-liser une image et une ide (...) nous permettent de leur demander sils se figurent bien nettement le spectacle...16

    leur culture gnrale ou leurs voyages:

    (...) un spectacle sui generis, dont peuvent aisment se faire une ide ceux de nos lecteurs qui ont eu le bonheur de voir une ville gothique entire, complte, homogne, comme il en reste encore quelques unes...17

    III. LESPACE A TRAVERS LES TITRES

    Limportance de la cathdrale comme espace physique est avance ds le titre de luvre qui porte son nom, elle est le centre, le cur de lhistoire. Ds les premires lignes de son roman, V. Hugo dlimite le cadre de son rcit: le lieu, Paris et lpoque, 1482. De cette manire, il situe trs vite le lecteur en excitant sa curiosit et son got romantique pour les ro-mans historiques situs en particulier lpoque mdivale.

    Notre-Dame nest pas un simple espace physique, cest le cur de

    lhistoire, un personnage part entire, actif parfois, observateur du drame qui se droule devant elle et en son sein. Cest le seul personnage qui survit au drame, lhistoire, au temps qui ravage tout; cest lil, le tmoin qui garde jamais dans sa mmoire de pierre le souvenir de ces histoires hu-maines fugaces mais intenses, passionnes et tragiques.

    Dans le livre I, le chapitre 1 porte le titre La grand salle ce qui prouve limportance que V. Hugo accorde lespace pour planter le dcor de la scne. De fait, Hugo accorde plus dimportance la situation gogra-phique de cette scne (la grand salle, la place) qu son contenu (la morali-t qui sy joue). Il sagit dune scne colore, pittoresque, prsentant au lecteur des personnages populaires qui laident rentrer dans lpoque tra-vers un bain de foule plein de couleur locale et de gaiet: la clbration de la fte des fous et dune moralit.

    16Hugo, V. (1988): Op.cit., p.77 17Hugo, V. (1988): Op.cit., p.165

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    V. Hugo en profite galement pour faire passer ses critiques sur la

    mauvaise conservation des monuments historiques et sur la perte de patri-moine que cela reprsente. En homme de compromis politique, Victor Hugo ne perd pas une occasion de transmettre ses opinions dans un message clair et direct aux lecteurs de son temps et surtout aux passionns de sa ville, Paris, envers laquelle on sent bien quil prouve une attraction toute particu-lire et quil ne se lasse pas de louer. En effet, les critiques de V. Hugo ne sont pas diriges la ville elle-mme ni ses concitoyens mais aux hommes politiques de son poque et aux professionnels dont il remet en cause le savoir-faire et le bon got. Les chapitres suivants de ce premier livre portent le nom de certains personnages principaux ou secondaires mais qui inter-viennent directement dans les premiers pas de lintrigue.

    Dans le livre II, au chapitre 2, V. Hugo nous prsente un autre lieu cl, la place de Grve, axe o se mlent la vie et la mort, symbole du fana-tisme et de la cruaut dune poque, lieu de fte et dattroupement popu-laire o auront lieu les ftes, les jugements et excutions, les spectacles de rues, etc.

    Dans les autres chapitres de ce livre, Hugo nous prsente dautres

    lieux cls pour le dveloppement de lintrigue mais il ne les lve pas au rang de titre du chapitre car ce qui lintresse outre manire cest le pitto-resque des vnements qui sy droulent: le mariage la cruche casse par exemple. En effet, lambiance de la cour des Miracles ne dpend pas du cadre physique, la description du lieu ne prend pas ici le dessus de la narra-tion, il sagit dun lment de plus, ce qui attire le lecteur dans ce chapitre cest le mouvement de personnages curieux, toute cette faune bizarre qui peuple la Cour des Miracles et qui constitue une ville lintrieur de la ville.

    Par contre le livre III est entirement consacr Paris et sa ca-thdrale. Il sagit dun livre charnire entre la prsentation de lpoque, la cration dun microcosme mdival qui cre lambiance ncessaire pour que le lecteur rentre dans le rcit, la prsentation des personnages qui volue-ront dans cet espace ferm quest la ville et dun autre ct le dveloppe-ment mme du drame qui dbouchera sur la fin tragique des personnages et sur lassaut de la cathdrale. Il sagit dun livre charnire car il reprsente une pause narrative, une digression de lauteur qui se fait plaisir lui-mme en se rcrant dans la description de ce qui lintresse: larchitecture go-thique du XVme sicle.

    Le chapitre 1 Notre-Dame est entirement consacr la cath-

    drale en tant que monument historique dune incalculable beaut et dune

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    valeur artistique sans gal alors que le chapitre 2, Paris vol doiseau est un circuit touristique peu conventionnel qui nous dcouvre une nouvelle perspective, un Paris insolite, celui des flches et des toits. Cest la vision dominatrice et perante des oiseaux, de ceux qui voient sans tre vus, qui lve lesprit au-dessus de la banalit quotidienne, au dessus du dtail, vers la vision panoramique, libre et globale qui dpasse les limites des murs de fortification de la Ville et stend sur la campagne environnante.

    Dans le livre V, sous le mystrieux titre Ceci tuera cela, on d-couvre un chapitre revendicatif et consacr la vision pessimiste de lauteur sur lavenir de larchitecture, sur le temps qui passe inexorablement, sur laction destructrice des hommes sur les monuments et sur lenvironnement, ce qui constitue un aspect trs moderne de la pense de Victor Hugo. Cest la vision dun amateur dart, dune personne implique dans la vie politique, dun citoyen au profond sens civique qui respecte le patrimoine culturel collectif.

    Dans le livre VI, Le Trou aux Rats mrite dtre le titre du cha-pitre 2 par laspect insolite et symbolique de lendroit et parce que la trag-die tourne autour de ce trou, tombeau vivant, dont les autres chapitres de ce livre nous font peu peu dcouvrir le mystre.

    Dans le livre VII, le chapitre 3 les cloches est consacr non seu-lement un objet, les cloches, sinon un lieu, le clocher de Notre-Dame perch en haut des tours, endroit minemment symbolique. Les cloches, reprsentation mdivale de notre contemporaine radio, transmettent par leur son les messages religieux qui ponctuent la vie quotidienne de la popu-lation: langlus, la messe, les funrailles, les mariages, les jours de fte, mais aussi les vnements civils importants, et lhabituel couvre-feu. Elles scandent le rythme de vie mdival.

    Cependant, pour Quasimodo, les cloches sont autre chose, elles lui

    sont plus proches car ce sont ses seules amies, il soccupe delles, les fait sonner avec amour et dlicatesse en dgageant leur me chaque caresse, en un mot, de les faire vivre. Il existe une relation interdpendante, mys-tique, entre Quasimodo et ses cloches, ils ne pourraient exister lun sans lautre.

    Dans le livre X, le titre du chapitre V le retrait o dit ses heures Monsieur Louis de France est un euphmisme pour dsigner la prison de la Bastille qui rappelle Victor Hugo tous les souvenirs des pisodes relative-ment rcents de la rvolution.

    Lespace chez Victor Hugo est protagoniste au mme titre que les personnages. Dailleurs, on ne peut nier que Paris et sa cathdrale ne soient

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    connus dans le monde entier grce, entre autre, ce roman et aux diff-rentes adaptations cinmatographiques qui en ont t ralises. Les espaces sont prsents partout, ce sont eux qui contiennent les personnages et in-fluencent leur caractre et leurs actions, et contribuent laccomplissement de leur destin. Ce ne sont pas de simples lieux physiques, ils ont toujours un sens allgorique, mystique qui se fait sentir comme une prsence myst-rieuse. De plus, Victor Hugo, en connaisseur de Paris et en amateur dart se fait plaisir avec ces descriptions minutieuses et ses discours dmolisseurs dhomme politique mcontent des agissements de ceux qui gouvernent.

    La cathdrale, en tant que lieu de culte religieux est un cadre peu

    typique pour abriter une histoire damour comme celle-ci, et Quasimodo est un hros bien peu conventionnel, cest peut-tre l et dans le gnie narratif de Victor Hugo que rside la singularit et le charme de ce roman. IV. VISITE PANORAMIQUE DU PARIS DU XVIEME SIECLE.

    Cest par un bref rappel historique de la naissance de la ville et de son dveloppement gographique que Victor Hugo commence son circuit touristique dans le Paris du XVme sicle.

    Tout dabord, il faut dire quil sagit dune ville de grande dimension qui crot sans cesse:

    Mais une ville comme Paris est dans une crue perptuelle. Il ny a que ces villes-l qui deviennent capitales.18

    Le narrateur commence sa rvision historique de la naissance de

    Paris sur lle de la Cit quil compare un berceau rattach par ses ponts la terre et protg par un foss naturel, la Seine. Il rappelle ensuite le pas-sage sur lautre rive avec la construction dune premire enceinte, puis un nouvel largissement pour rsoudre lamoncellement des constructions qui envahissent tous les creux. Aprs avoir franchi lenceinte, les maisons sparpillent sans ordre en stendant leur aise dans la campagne. De fait, Paris est en croissance perptuelle dont on peut voir les diffrentes phases si lon observe le type de rues et de constructions: entasses et superposes les unes sur les autres, sans places, compos de ruelles troites dans les vieux quartiers, plus larges et avec jardin plus on sloigne du centre:

    18Hugo, V. (1988): Op.cit., p.167

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    La puissante ville avait fait craquer successivement ses quatre cein-tures de murs, comme un enfant qui grandit et qui crve ses vte-ments de lan pass.19

    Victor Hugo continue son parcours par la description des trois par-

    ties de la ville mdivale: la Cit qui en constitue le cur, lUniversit se trouvant sur la rive gauche de la Seine, alors que la Ville en occupe la rive droite.

    Dans la Cit, on pouvait surtout trouver des glises places sous lautorit de lEvque alors que la Ville tait constitue de palais et apparte-nait au Prvt des marchands et que lUniversit tait compose de collges, aux mains du Recteur; tous trois sous les ordres du Prvt de Paris.

    Lauteur prend la peine de nommer les monuments importants de chacune des parties de la ville, cite les les qui ont t unies pour former lactuelle le Saint-Louis, parle des diffrents ponts en bois ou en pierre, chargs de maisons, numre les portes dentre de la ville qui permettaient le soir venu de fermer la cit pour la protger.

    Les descriptions de Hugo sont prcises, pleines de dtails qui nous

    permettent de nous reprsenter la situation gographique de Paris au XVme sicle comme si nous regardions un plan de lpoque:

    En fait, la conscience de Hugo a toujours eu, en face du monde, au moins deux registres: celui de la fascination pour les immensits apaisantes ou exaltantes, foisonnements dapparences dans la lu-mire, fuites dapparitions dans les tnbres; et celui dune attention curieuse, minutieuse, aux dtails de ralits familires, naturelles ou humaines.20

    Les trois bourgs de la ville prsentaient chacun lil un tricot

    inextricable de rues bizarrement brouilles21 et se communiquaient entre eux par trois grandes artres: la rue Saint-Jacques, la rue de la Juiverie et la rue Saint-Martin. Il sagit de rues mres, gnratrices qui formaient le canevas sur lequel reposait, nou et serr en tous sens, le rseau ddalen des rues de Paris.22

    19Hugo, V. (1988): Op.cit., p.167 20Gohin, Y. (1987): Victor Hugo, Paris, PUF, col. Que sais-je?, pp. 85-86 21Hugo, V. (1988): Op.cit., p.170 22Hugo, V. (1988): Op.cit., p.171

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    Vue du haut des tours de Notre-Dame, la ville tait un blouisse-ment de toits, de chemines, de rues, de ponts, de places, de flches, de clochers23.

    On ne peut pas dire que V. Hugo soit objectif en faisant ces des-criptions dans lesquelles tout parat merveilleux depuis les grands monu-ments jusqu la devanture peinte dune modeste maison:

    (...) il ny avait rien qui net son originalit, sa raison, son gnie, sa beaut, rien qui ne vnt de lart.24

    Hugo fait des descriptions si minutieuses, monument par monu-

    ment, quartier par quartier, en donnant tellement de dtails que lon pourrait parfois croire quils sont superflus:

    Rault, le sculpteur ne les posa quen 1526, et il eut vingt francs pour sa peine.25

    Cependant, conscient de la difficult que suppose recrer une

    poque si lointaine, il confie ses lecteurs quil ne leur donne que quelque ide et quils nauront quune image confuse de ce qutait en 1482 le trapze central de la ville.26

    Sa description part du centre de la ville, se dirige en cercles con-centriques vers la campagne environnante et englobe tous les aspects de la vie de la capitale: les bruits des rues commerciales, les conversations popu-laires et mme le chant des cloches :

    Dordinaire, la rumeur qui schappe de Paris le jour, cest la ville qui parle; la nuit, cest la ville qui respire: ici, cest la ville qui chante.27

    La sensation visuelle produite sur le lecteur par cette description

    est celle dune ville monumentale, mlange de styles roman et gothique qui ce moment se trouve son apoge de beaut et dharmonie, puisque

    23Hugo, V. (1988): Op.cit., p.171 24Hugo, V. (1988): Op.cit., p.172 25Hugo, V. (1988): Op.cit., p.182 26Hugo, V. (1988): Op.cit., p.183 27Hugo, V. (1988): Op.cit., p.192

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    selon lauteur depuis le XVme sicle on a chang la pierre pour le pltre, ce qui prive les monuments de leur caractre artistique.

    V. Hugo veut faire participer ses lecteurs dune vue privilgie de-puis le meilleur promontoire naturel de la ville:

    Voil le Paris que voyaient du haut des tours de Notre-Dame les cor-beaux qui vivaient en 1482.28

    Cependant tout nest pas que merveille dans ce Paris mdival, en

    effet la cruaut et laspect primitif de ses gens se cachent dans les caves et les sous-sols o rgne lhorreur.

    Il dsire nous transmettre la vision dantesque de cet univers grce

    la scne de torture dEsmralda puisque la visite panoramique savre trop superficielle pour capter les profondeurs de la ville:

    Au moyen ge, quand un difice tait complet, il y en avait presque autant dans la terre que dehors.29

    Tous les btiments ou presque ont des double-fonds: les cath-

    drales, les spulcres, les palais et principalement les prisons. Sous terre, tout est sombre, lugubre, mystrieux, aveugle et sourd et Hugo compare ces endroits aux racines souterraines dun arbre que personne ne voit mais qui sont toujours prsentes.

    Entrer dans cet univers souterrain constitue un prlude la mort, pour Esmralda il sagit dun lieu sinistre o elle ne peut ressentir que la peur et le pressentiment de sa fin tragique:

    Une fois une misrable existence enterre l, adieu le jour, lair, la vie, ogni speranza. Elle nen sortait que pour le gibet ou le bcher. Quelquefois elle y pourrissait. La justice humaine appelait cela ou-blier.30

    28Hugo, V. (1988): Op.cit., p.186 29Hugo, V. (1988): Op.cit., p.410 30Hugo, V. (1988): Op.cit., p.411

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    V. LES RUES DE PARIS

    V. Hugo situe toujours les vnements quil raconte dans un endroit bien prcis de Paris: une rue, une place, une fontaine, un pont, etc. La pr-cision spatiale est gnralement pousse au maximum.

    Entre les innombrables noms de rues quil utilise nous pouvons ta-blir trois grands groupes:

    o Les rues dont le nom correspond un mtier comme la rue de la Savaterie, la rue de la Vieille-Draperie, la rue de la Coutelle-rie, la rue des Ecrivains, rue de lEcorcherie, la rue des Bouche-ries, la rue du Btonnier, la rue de la Verrerie et la rue de la Tixeranderie, gnralement situes dans les vieux quartiers.

    o Les rues dont le nom a une connotation religieuse comme la rue de la Juiverie, la rue Neuve-Sainte-Genevive, la rue Saint-Andr-des-Arcs et la rue Saint-Pierre-aux-Boeufs.

    o Et enfin, les rues correspondant des noms propres comme la rue Jean-de-Beauvais, la rue de Glatigny, la rue des Lombards, la rue Marivaulx, la rue Clopin et la rue Galiache.

    Grce cette toponymie rigoureuse V. Hugo apporte un effet de

    pittoresque et de ralisme ses descriptions.

    La rue dans Notre-Dame de Paris peut avoir des connotations plus ou moins positives.

    Elle peut tre accueillante et offrir un lit qui ne possde rien comme Pierre Gringoire qui voyant un marchepied monter sur mule se dit que:

    (...) cette pierre serait, dans loccasion, un fort excellent oreiller pour un mendiant ou pour un pote.31

    Cependant le couvre-feu rend les rues sombres et dsertes, ce qui

    produit un effet de malaise chez qui sy aventure la nuit:

    31Hugo, V. (1988): Op.cit., p.95

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    Un ddale inextricable de ruelles, de carrefours et de culs-de-sac (...) qui ressemble un cheveau de fil brouill par un chat.32

    Le nom dune rue peut avoir galement une influence ngative sur

    le destin dun personnage, de fait le nom de la rue o vit Paquette la Chan-tefleurie lui porte malheur et marque sa destine:

    Rue de Folle-Peine. Notez ceci; je crois que cest l ce qui porta mal-heur Paquette.33

    Le quartier populaire de la cit est souvent prsent comme

    sombre, tortueux, solitaire et sinistre, couvert de boue et travers par un ruisseau deau nausabonde: la boue de Paris est particulirement puante,34 description faisant rfrence au clich mdival des villes popu-leuses o les ordures et les mauvaises odeurs taient prsentes tous mo-ments dans les rues.

    Laspect dangereux des rues troites et sombres o personne ne

    sattarde certaines heures de la nuit est galement prsent:

    On les laissa senfoncer tous deux dans une rue troite et tnbreuse, o nul nosa se risquer aprs eux.35

    Laspect nocturne de ces rues diffre profondment de celui

    quelles prsentent en plein jour. Nimporte qui pourrait sy perdre sil nest pas habitu les frquenter des heures intempestives, car elles se res-semblent toutes et sentrecoupent incessamment. Maudits soient les carre-fours! Cest le diable qui les a faits limage de sa fourche crie Gringoire lorsquil se perd dans le ddale de rues qui le conduiront la Cour des Mi-racles.

    La religion a galement sa place dans les rues sous la forme dune cage de fer contenant limage de la Vierge auprs de laquelle brle une toupe imbibe dhuile, ou dans le Trou aux Rats, lieu de pnitence expos aux regards curieux du public.

    32Hugo, V. (1988): Op.cit., p.115 33Hugo, V. (1988): Op.cit., p.278 34Hugo, V. (1988): Op.cit., p.119 35Hugo, V. (1988): Op.cit., p.112

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    Pour V. Hugo, la population parisienne joue un rle important dans la description de lespace, elle apporte tout le pittoresque des conversations de rues entre commres penches la fentre, des commentaires dcoliers dvergonds, des cris de joie lors des clbrations festives et des injures lors des excutions. Il transcrit des conversations prises sur le vif au dtour dune ruelle entre voisines, tudiants ou commerants sur des questions quotidiennes de la vie dans la ville, sur le fonctionnement de lUniversit ou sur la situation politique et sociale. De fait, lauteur parvient faire passer un message politique travers le pittoresque dune conversation innocente. Les rues deviennent ainsi des lieux privilgis pour recevoir des informations transmises de bouche oreille et le passant na qu tendre loreille et cou-ter au passage:

    Si le lecteur dsire savoir par qui, il na qu couter la conversation de trois braves commres qui (...) se dirigeaient prcisment du mme ct...36

    Linfluence de cette population primitive et cruelle parvient trans-

    former la clbration dun mystre religieux sur la vie de la Vierge en un acte paen o se dchanent les instincts primitifs des gens dans des diver-tissements quHugo qualifie de Sabbat.

    Le spectacle religieux, clbration du mystre dans le palais de Jus-tice, entre en contact avec le spectacle de la rue, la danse dEsmralda, par lintermdiaire de quelques coliers curieux posts sur les fentres et regar-dant les deux spectacles la fois. Cependant le triomphe des spectacles profanes est absolu et Pierre Gringoire doit se rendre lvidence que son mystre est dlaiss en faveur de la fte des grimaces et de la danse dEsmralda: cest le triomphe du profane sur le religieux, de la rue sur le palais, du peuple sur les autorits:

    LEsmralda dans la place! Ce mot produisit un effet magique. Tout ce qui restait dans la salle se prcipita aux fentres, grimpant aux murailles pour voir et rptant: La Esmralda! LEsmralda!37

    Gringoire se sent poursuivi, nargu par cette fte qui a fait chouer

    son mystre, mais il ne peut en chapper car Paris et la fte ne font quun. Elle est partout, le traque jusquaux rives, o il se sent pour un instant la campagne: ta cabane repose ma vue, et me fait oublier Paris! pense-t-il en regardant llot du Passeur-aux-Vaches, mais il fuit en vain: Maudite fte!

    36Hugo, V. (1988): Op.cit., p. 273 37Hugo, V. (1988): Op.cit., p.93

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    scria-t-il, me poursuivras-tu partout? Oh! Mon Dieu! Jusque chez le Pas-seur-aux-Vaches!38

    La ville et son ambiance simposent tous sans concession au mal-

    heur individuel.

    La description des rues commerciales pleines dactivit transporte le lecteur dans un espace o tournent des broches de viande, o circulent des pots de vin et de bire, o slvent des jurements et des rires caractris-tiques des endroits mal fams comme lillustre cabaret de la Pomme dEve ou la maison de la Falourdel o lon peut louer une chambre pour des ren-dez-vous amoureux.

    VI. NOTRE-DAME DE PARIS, ESPACE PHYSIQUE ET SYMBOLIQUE

    La cathdrale de Notre-Dame de paris est lautre espace central, principal de ce roman et que Victor Hugo nous prsente comme un monu-ment majestueux et sublime, mais ravag par le temps et par les hommes;

    Si nous avions le loisir dexaminer une une avec le lecteur les di-verses traces de destruction imprimes lantique glise, la part du temps serait la moindre, la pire celle des hommes, surtout des hommes de lart.39

    La destruction cause par le temps est irrmdiable et naturelle,

    mais celle que produit la main de lhomme ne peut tre que vaine et inutile, cest le fruit de lignorance.

    Quand il dcrit le monument, Victor Hugo insiste sur les votes, sur la structure gnrale et plus prcisment sur le portail central. Sil parle des autres parties de Notre-Dame cest essentiellement pour les citer comme exemple de la destruction du temps ou des ravages causs par les archi-tectes et restaurateurs mais non pour en faire une description dtaille.

    De lintrieur de la cathdrale, Hugo ne fait quune description as-sez sommaire: il fait rfrence aux nombreuses statues dtruites, il fait allusion la substitution du vieil autel gothique encombr de chsses et de reliquaires40 par un autel de marbre, au changement des vitraux par des 38Hugo, V. (1988): Op.cit., p.97 39Hugo, V. (1988): Op.cit., p.155 40Hugo, V. (1988): Op.cit., p.157

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    vitres blanches et critique la peinture jaune dont on a barbouill les murs. Pour une description hugolienne, cest bien bref. Cependant, il consacre plusieurs descriptions la faade tout au long du roman: dabord lorsque Frollo lobserve dans sa qute de la pierre philosophale et ensuite dans le chapitre 1 du livre III consacr entirement la cathdrale:

    (...) il est, coup sr, peu de plus belles pages architecturales que cette faade ...41

    Ses descriptions ne sont jamais exhaustives, elles sont gnrale-

    ment slectives pour ne pas alourdir le roman. En effet, lauteur est cons-cient que ses lecteurs peuvent ne pas trouver ces chapitres descriptifs tout fait intressants et sen excuse ds la prface.

    En dcrivant la faade, Hugo prsente les lments disposs sur cinq tages superposs: les trois portails, les vingt-huit niches royales, la rosace centrale avec ses deux fentres latrales, la galerie darcades, la plate-forme et les tours. Puis Hugo sattache aux dtails des statues et aux lments mdivaux qui nexistent plus aujourdhui sur la faade.

    Il utilise des adjectifs montrant la grandiosit, lharmonie, la ma-gnificence de cette vaste symphonie de pierre, de cette uvre colossale dun homme et dun peuple42

    Quant au style architectural auquel appartient Notre-Dame, lauteur

    nous explique, avec bon nombre de dtails montrant son ample connais-sance de lart gothique, que Notre-Dame nest pas une cathdrale de style pur, l ne rside ni son charme ni sa valeur. Il sagit dun difice de transi-tion du plein cintre logive, elle constitue un chantillon des diverses fa-cettes artistiques qui ont marqu la longue priode de sa construction. Il sagit dune composition hybride, htroclite qui parat avoir rcupr des lments dautres glises pour les agglutiner en une:

    Tout est fondu, combin, amalgam dans Notre-Dame. Cette glise centrale et gnratrice est parmi les vieilles glises de Paris une sorte de chimre; elle a la tte de lune, les membres de celle-l, la croupe de lautre; quelque chose de toutes.43

    41Hugo, V. (1988): Op.cit., p.155 42Hugo, V. (1988): Op.cit., p.156 43Hugo, V. (1988): Op.cit., p.162

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    Malgr ce mlange apparent Notre-Dame suit les prceptes qui r-gissent les constructions religieuses base romaine:

    Ce sont imperturbablement deux nefs qui sentrecoupent en croix, et dont lextrmit suprieure arrondie en abside forme le chur.44

    Autre lment indispensable: les bas-cts pour les chapelles lat-

    rales, en nombre plus ou moins important suivant les glises. Sur cette base commune se greffent les ornements qui distingueront les monuments selon leur valeur artistique: le tronc de larbre est immuable, la vgtation est capricieuse, en effet le service du culte une fois pourvu et assur, larchitecture fait ce que bon lui semble. 45

    Se superposant la valeur artistique, Hugo introduit la valeur sym-bolique de Notre-Dame qui varie selon le regard de chacun des person-nages.

    Pour Quasimodo la cathdrale est un refuge, un foyer, le lieu o il se sent protg du rejet des hommes:

    Notre-Dame avait t successivement pour lui, selon quil grandissait et se dveloppait, luf, le nid, la maison, la patrie, lunivers. (...) Il est sr quil y avait une sorte dharmonie mystrieuse et prexistante entre cette crature et cet difice.46

    Depuis lenfance, Quasimodo sidentifiait dune faon si parfaite

    lglise quil en paraissait une des statues. Ses formes bizarres sadaptaient parfaitement celles de la cathdrale o il a appris parler en faisant son-ner les cloches:

    (...) il arriva lui ressembler, sy incruster, pour ainsi dire, en faire partie intgrante (...) la rugueuse cathdrale tait sa carapace.47

    Les tours, hostiles lhomme de par leur dimension et leurs

    formes, ne constituent pas un obstacle pour Quasimodo qui en a pous les formes, qui en connat les secrets:

    44Hugo, V. (1988): Op.cit., p.164 45Hugo, V. (1988): Op.cit., p.164 46Hugo, V. (1988): Op.cit., p.204 47Hugo, V. (1988): Op.cit., p.205

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    A les voir si douces sous sa main, si faciles escalader, on et dit quil les avait apprivoises48

    Cette assimilation du corps de lhomme la cathdrale nest pas

    superficielle, son influence en arrive mme changer lme de Quasimodo:

    (...) non seulement son corps semblait stre faonn selon la cath-drale, mais encore son esprit.49

    Quasimodo vit isol dans son monde de pierre o il se sent protg

    parce que la cathdrale ne se moque pas de lui, elle lui offre son amiti, sa protection et son rconfort, alors que le monde des hommes, sous ses pieds, est cruel et superficiel:

    Il ne tournait qu regret sa face du ct des hommes. Sa cathdrale lui suffisait.50

    En retour Quasimodo offre la cathdrale sa protection, il en est le fidle gardien:

    Aussi se tenait-il sur son clocher, aux aguets, (...) lil tour tour sur la cellule et sur Paris, faisant sre garde, comme un bon chien, avec mille dfiances dans lesprit.51

    Il ressemble aux monstres de pierre, aux gorgones, leur parle

    mme, mais tant sourd, il nen attend aucune rponse. On comprend ainsi que lors de lassaut des truands la cathdrale, personne nait distingu sa silhouette parmi les statues de pierre:

    Avec une telle impassibilit, avec un cou si tendu, avec un visage si difforme, que, sans son accoutrement mi-parti rouge et violet, on et pu le prendre pour un de ces monstres de pierre par la gueule des-quels se dgorgent depuis six cents ans les longues gouttires de la cathdrale. 52

    48Hugo, V. (1988): Op.cit., p. 206 49Hugo, V. (1988): Op.cit., p. 206 50Hugo, V. (1988): Op.cit., p.208 51Hugo, V. (1988): Op.cit., p.519 52Hugo, V. (1988): Op.cit., p.447

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    Quasimodo lui-mme voudrait tre un de ces monstres de pierre quand il se sent repouss par Esmralda cause de sa laideur, ce qui lui permettrait de ne ressentir aucune motion. Sil leur ressemble par la lai-deur, il possde nanmoins un cur dhomme capable de souffrir.

    Quasimodo maintient une relation toute spciale avec les cloches. Comme sil sagissait dune femme, il les aime, les caresse, leur parle sans leur garde la moindre rancune davoir provoqu sa surdit:

    (...) les mres aiment souvent le mieux lenfant qui les a fait le plus souffrir.53

    Ces quinze cloches composent son srail, mais cest la grosse

    cloche appele Marie qui est sa favorite. Pourtant il la dlaissera pour porter ses soins une autre, une rivale, la belle Esmralda, ce qui ne lempche pas de revenir vers ses fidles cloches en qute de rconfort lorsquil se sent rejet par lEgyptienne.

    Quasimodo parat entrer en transe lorsquil fait sonner ses cloches

    en les chevauchant et parat donner vie la cathdrale en lui apportant la voix. Cependant la superstition populaire ne conoit pas cette intime relation entre Quasimodo et lglise et y voit quelque chose de fantastique ou de dmoniaque:

    LEgypte let pris pour le dieu de ce temple; le moyen ge len croyait le dmon; il en tait lme.54

    Tant que Quasimodo reste dans les tours, au-dessus du monde, il

    est en scurit, les passions humaines se tranent sous ses pieds, mais ne latteignent pas. Cependant ds quil pose son regard sur la place de Grve et sintresse lEgyptienne Esmralda, son destin se prcipite du haut des tours et la protection de la cathdrale savre insuffisante.

    Pour Claude Frollo la cathdrale est autre chose. Cest un lieu de

    culte pour le prtre quil est, le lieu o il exerce son sacerdoce et par exten-sion son pouvoir. Son influence dans la hirarchie ecclsiastique et son pres-tige scientifique lui permettent dutiliser la cathdrale selon sa volont dans sa recherche de la pierre philosophale. Lui seul a les cls daccs certains lieux cachs dans la cathdrale.

    53Hugo, V. (1988): Op.cit., p.209 54Hugo, V. (1988): Op.cit., p. 212

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    Tout jeune encore il prend Quasimodo sous sa protection, le loge dans les tours, le nomme sonneur de cloches et gardien de la cellule secrte o il fait ses expriences scientifiques. Pour lui la cathdrale est un grand livre symbolique do tirer un savoir qui lui donnera le pouvoir absolu, cest un sphinx qui cache une nigme quil ne parvient pas dchiffrer.

    Quasimodo aime la cathdrale pour sa beaut, alors que Frollo le fait pour lnigme quelle propose ternellement lintelligence.55 Lamour de Quasimodo est simple, pur, contemplatif, tandis que celui de Frollo est exigent, intress, vampire qui prtend tirer les secrets les plus cachs de la faade symbolique de la cathdrale, expoliateur de ses nigmes.

    La cellule mystrieuse o Frollo cherche la pierre philosophale est une petite chambre bien cache en haut dune tour, ferme cl et entou-re de symboles ngatifs: les corbeaux, oiseaux de malheur et la vue directe sur la Grve et son gibet. La fin tragique de Frollo se voit donc anticipe par les mauvais augures qui lentourent. Son refuge est un symbole contradic-toire, cest lenfer dans les hauteurs:

    Voil larchidiacre qui souffle, lenfer ptille l-haut.56

    Cette ambiance bizarre, mystrieuse, veille la curiosit des voisins et attise la superstition populaire.

    Son propre frre Jehan lappelle la fameuse logette aux sorcelle-ries.57 On y accde aprs une longue et dangereuse ascension la tour, ce qui augmente son mystre mais aussi sa confidentialit. Hugo compare cette cellule celle de Faust peinte par Rembrandt.

    On peut y voir de vieux parchemins, de nombreuses fioles, des

    produits chimiques, un fourneau et divers objets inconnus, des inscriptions grecques sur les murs; le dlabrement de la pice contribue galement crer une ambiance mystrieuse et sotrique.

    Par contre, la cellule canonicale de Frollo est un endroit austre comme la cellule de tout prtre, ce qui contraste vivement avec lsotrisme de la cellule de la tour. On peut dire que la premire reprsente limage de

    55Hugo, V. (1988): Op.cit., p.219 56Hugo, V. (1988): Op.cit., p.220 57Hugo, V. (1988): Op.cit., p.342

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    la vie publique du prtre et la seconde laspect sombre et mystrieux de sa double vie.

    Les tours de la cathdrale offrent aussi Frollo un balcon privilgi

    do regarder ce qui se passe sur la place du Parvis sans tre vu.

    Cependant, en revenant vers Paris, croyant Esmralda morte, Frollo souffre dhallucinations et la ville devient pour lui un cauchemar infernal. Elle est le reflet de son me torture par les remords:

    Il crut voir, voir de ses yeux vivants, le clocher de lenfer; les mille lumires rpandues sur toute la hauteur de lpouvantable tour lui pa-rurent autant de torches de limmense fournaise intrieure; les voix et les rumeurs qui sen chappaient, autant de cris, autant de rles. 58

    Alors il court vers Notre-Dame dont il voit les tours slever au-dessus des maisons comme des lanternes qui lui montrent le chemin du foyer rassurant. Mais, arriv sur le parvis il recula et nosa lever les yeux sur le funeste difice59 qui, comme lil de sa conscience, lui rappelle son comportement indigne.

    Pour la premire fois Frollo a peur dans une cathdrale quil connat

    sur le bout des doigts, mais qui ne le protge plus. Pour Esmralda la cathdrale est galement un espace protecteur

    et rassurant. Dans les hauteurs de la tour elle se sent soulage et com-mence sourire nouveau la vie.

    Notre-Dame constitue un baume apaisant qui calme la douleur dEsmralda, latmosphre pieuse qui sy respire lentoure et le son des cloches la berce rpandant tout le magntisme de la cathdrale sur elle.

    Quand Esmralda se promne dans les rues de Paris elle est active,

    gaie, elle participe aux vnements, alors que, niche en haut des tours, elle se trouve au-dessus du bien et du mal, de lamour de Phoebus et du danger de lchafaud. Cependant elle se sent isole, simple observatrice dune vie laquelle elle ne participe plus:

    58Hugo, V. (1988): Op.cit., p.457 59Hugo, V. (1988): Op.cit., p. 460

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    Elle tait hors de la socit, hors de la vie, mais elle sentait vague-ment quil ne serait peut-tre pas impossible dy rentrer.60

    Malgr elle, elle devient spectatrice impuissante, isole, objet de

    convoitise de Frollo, de Quasimodo et du peuple parisien. Notre-Dame de-viendra alors sa prison.

    Pour les truands, Notre-Dame nest quun espace plein de ri-chesses, destin tre pill, cest une opulente cathdrale, vaste rservoir o taient venues samonceler les richesses de trois sicles.61

    Notre-Dame, assaillie par les truands, se rveille comme un

    monstre et ses gorgones crachent du feu, les monstres semblent rveills de leur sommeil de pierre62pour dfendre leur glise.

    Sattaquer Notre-Dame ce nest pas seulement sattaquer une

    glise, cest une rbellion contre le Roi qui en est le protecteur. Elle est le symbole de lautorit royale:

    Ah! Messieurs les manants de Paris, vous vous jetez ainsi tout au tra-vers de la couronne de France, de la saintet de Notre-Dame et de la paix de cette rpublique!63

    Mais le roi lui-mme soppose la cathdrale en violant le privilge

    dasile de Notre-Dame et en ordonnant larrestation dEsmralda au nom du royaume. Il monnaie ensuite sa faute en promettant une nouvelle statue pour attnuer son sacrilge.

    VII. LA PLACE DE GREVE: CROISEE VITALE

    Victor Hugo consacre tout un chapitre la description de la place de Grve. Il commence par dcrire ltat de la place son poque, au XIXme sicle en se lamentant de la disparition de plus en plus acclre de ses vestiges gothiques:

    60Hugo, V. (1988): Op.cit., p.473 61Hugo, V. (1988): Op.cit., p.531 62Hugo, V. (1988): Op.cit., p.532 63Hugo, V. (1988): Op.cit., p.574

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    Il ne reste aujourdhui quun bien imperceptible vestige de la place de grve telle quelle existait alors64.

    V. Hugo y admire principalement la varit architecturale:

    Le jour, on pouvait admirer la varit de ses difices, tous sculpts en pierre ou en bois, et prsentant dj de complets chantillons des di-verses architectures domestiques du moyen ge, en remontant du quinzime au onzime sicle...65

    Laspect de la place est sinistre, lugubre par la prsence de sym-

    boles qui rappellent constamment son but essentiel, les excutions pu-bliques. En effet, un norme gibet se dresse au milieu de la place avec son pilori comme pour dissuader les passants de commettre un acte punible mais fois appartenant au dcor quotidien de la place comme un lment de plus de sa dcoration. La place sidentifie son gibet et existe grce lui, en effet cest le gibet qui attire le public qui remplit la place de vie.

    Pour V. Hugo, il sagit dune place fatale o bon nombre dinnocents

    ont pri et qui rappelle les monstruosits commises lors de la Rvolution lpoque de la Terreur. Il se situe clairement contre la peine de mort et une fois de plus expose ouvertement ses convictions personnelles et ses ides politiques:

    Cette maladie de la terreur de lchafaud, la plus monstrueuse de toutes les maladies, parce quelle ne vient pas de Dieu, mais de lhomme.66

    Cependant, Hugo se console en pensant que la peine de mort nest

    plus aussi prsente que par le pass ce qui ne lempche pas dtre une honte pour le peuple qui la tolre et se considre civilis. V. Hugo lui-mme a lutt activement pour labolition de la peine de mort en France et pour son limination du code pnal. Selon lui, la place est une honte nationale, non par son architecture mais parce quelle symbolise la cruaut humaine et le manque de civilisation:

    Cest une ide consolante (...) de songer que la peine de mort (...), cette vieille suzeraine de la socit fodale, presque mise hors de nos lois et de nos villes, traque de code en code, chasse de place en

    64Hugo, V. (1988): Op.cit., p.99 65Hugo, V. (1988): Op.cit., p.99 66Hugo, V. (1988): Op.cit., p.101

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    place, nait plus dans notre immense Paris quun coin dshonor de la Grve, quune misrable guillotine, furtive, inquite, honteuse, qui semble toujours craindre dtre prise en flagrant dlit, tant elle dispa-rat vite aprs avoir fait son coup!67

    Sur la place de Grve saccomplira le destin tragique dEsmralda

    sous les yeux de la population. La vie dEsmralda est intimement lie la place: le feu de joie projette sa silhouette sur le gibet alors quelle danse avec sa chvre Djali comme un signe prmonitoire de sa fin prochaine; sa mre, la recluse du Trou aux Rats situ sur la place, lui jette de terribles imprcations chaque fois quelle laperoit. Mais la Grve est aussi le cadre qui permet les retrouvailles entre mre et fille et lui apporte le public nces-saire pour exercer son gagne-pain.

    La place est galement le lieu o dbouchent la plupart des mou-vements de foule: la procession de la fte des fous qui porte Quasimodo en triomphe, les badauds qui, fuyant la reprsentation du Miracle de Gringoire, se prcipitent sur la place pour voir Esmralda danser, le public qui vient assister au jugement et lexcution dEsmralda ou au chtiment de Qua-simodo. La grve est:

    (...) Une place publique, la plus populeuse et la plus bruyante de Pa-ris.68

    Cest une place contradictoire o lon passe de lacclamation la

    rpudiation en un clin dil: Quasimodo, couronn roi des fous un jour est condamn au pilori le jour suivant et Esmralda, applaudie tantt pour ses danses et les tours de sa chvre, est hue et condamne par ceux-l mme qui ly avaient acclame un peu plus tt. La grve est la croise symbolique du bien et du mal, de la vie et de la mort, cest la reprsentation de la soci-t mdivale dans ses contradictions. VIII. LA COUR DES MIRACLES: UNE TOUR DE BABEL MEDIEVALE

    Il sagit dabord dun endroit clos, spar du reste de Paris par un

    labyrinthe de ruelles o personne nose saventurer et protg par la mu-raille denceinte de la ville.

    67Hugo, V. (1988): Op.cit., p.101 68Hugo, V. (1988): Op.cit., p.298

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    Pour Pierre Gringoire, cest laboutissement dun long tunnel sombre et dangereux dans lequel il sengouffre pour une apparente des-cente aux enfers et qui finalement deviendra pour lui la dcouverte dun nouveau monde o lui aussi aura une chance de russir, cest une boue de sauvetage un moment dlicat de sa vie.

    Dans la Cour des Miracles, on peut couter toutes les varits de langues, cest pour Gringoire une tour de Babel, cependant il existe une unit entre ces personnes qui parlent des langues si diffrentes, leur condi-tion de manants, de dshrits, de rejets par la socit qui les rend soli-daires les uns avec les autres.

    Au premier abord, on se trouve dans un milieu hostile, inconnu, dangereux mais il sagit en fait dune communaut qui vit en harmonie avec ses semblables:

    Hommes, femmes, btes, ge, sexe, sant, maladie, tout semblait tre en commun parmi ce peuple; tout allait ensemble, ml, confon-du, superpos; chacun y participait de tout.69

    La Cour des Miracles est une ville dans la ville avec ses lois, ses

    traditions, sa propre justice:

    Tu es rentr dans le royaume dargot sans tre argotier, tu as viol les privilges de notre ville. Tu dois tre puni (...) Comme vous traitez les ntres chez vous, nous traitons les vtres chez nous.70

    En entrant dans la Cour des Miracles ce qui paraissait tre rel ne

    lest plus, la ralit change de visage, le boiteux marche parfaitement, lclop se trouve tre bien portant:

    (...) Le perclus jetant l ses bquilles et courant aprs lui avec les deux meilleures jambes qui eussent jamais trac un pas gomtrique sur le pav de Paris.71

    La description quHugo nous fait de la Cour des Miracles prsente

    tout dabord la rputation publique de ce lieu et lambiance qui sy respire puis sa description physique: il sagit dune grande place, bien illumine par

    69Hugo, V. (1988): Opcit., p.127 70Hugo, V. (1988): Op.cit., p.132 71Hugo, V. (1988): Op.cit., p.126

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    un norme feu, ce qui contraste avec le reste de Paris o le couvre-feu a t annonc et qui est dans la pnombre:

    Cest la redoutable cour des Miracles, o jamais honnte homme navait pntr pareille heure.72

    Cest galement un lieu magique daprs la superstition populaire

    o les paens clbraient le rituel profane et diabolique du sabbat et selon P. Gringoire, un cercle magique o disparaissent les officiers qui veulent y mettre de lordre, une hideuse verrue qui enlaidit Paris, un gout do schappent chaque jour les bas-fonds de la socit pour les rcuprer chaque soir, une ruche monstrueuse o les voleurs et mendiants entassent leur butin, un hpital menteur o les handicaps ne sont pas ce quils disent tre et enfin un immense vestiaire o se dguisent et se posent de fausses plaies tous les voleurs et assassins de la ville. 73

    Larchitecture de la place na rien de particulier, il sagit dune place comme toute autre, rien dans son aspect externe ne laisse prsager la singularit du lieu:

    Ctait une vaste place, irrgulire et mal pave, comme toutes les places de Paris alors.74

    Cependant les maisons sont lugubres, lambiance y est taciturne, et

    cest prcisment le grouillement de vie, de gens qui intresse Victor Hugo dans cette place, et non larchitecture, ni les monuments, ni les dtails artis-tiques, ce quil sefforce de dcrire ici cest le monde des dshrits du XVme sicle.

    Pierre Gringoire change sa vision prconue de la Cour ds quil re-

    tire le bandeau de la superstition et de la peur qui couvre ses yeux et trans-forme la ralit:

    Ctait comme un nouveau monde, inconnu, inou, difforme, reptile, fourmillant, fantastique (...) Il fallut bien sapercevoir quil ne marchait pas dans le Styx, mais dans la boue, quil ntait pas coudoy par des dmons, mais par des voleurs.75

    72Hugo, V. (1988): Op.cit., p.126 73Hugo, V. (1988): Op.cit., p.126-127 74Hugo, V. (1988): Op.cit., p.127 75Hugo, V. (1988): Op.cit., pp.128-129

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    Lenfer devient en ralit une sorte de cabaret et non un sabbat o

    il jouerait le rle de sacrifi. Cest une ambiance de pots de vin, de rires, de cris, dhommes assis sur des tonneaux, tout ici respire le danger, la violence mais aussi plus tard la solidarit et lentraide. Ce sont ces voleurs qui vont accueillir Gringoire parmi eux et sacrifieront leur vie pour sauver leur amie Esmralda.

    Gringoire finira par y trouver sa place, il sy sentira chez lui, protg, en scurit et enfin heureux, il se sentait transport du tartare au paradis.76

    IX. HUGO ET LART, UNE PASSION DE TOUS LES INSTANTS

    Dans les chapitres o Victor Hugo fait des digressions sur larchitecture, il fait volontiers talage de sa culture encyclopdique sur la question, numrant dinfinis dtails et curiosits comme sil sagissait dun professeur prsentant ses connaissances ses lves-lecteurs:

    On sait quil lut beaucoup douvrages sur le Paris du XVme sicle la bibliothque de lArchevch. Sa connaissance minutieuse et passion-ne de la cathdrale rejoignait ses lectures rudites. Il procdait, comme le Scott de Quentin Durward, la rsurrection dune poque. Il se dfendait pourtant dcrire une uvre historique.77

    Cependant, Hugo ne craint pas de citer ses sources ce qui rappelle

    ses lectures des uvres de Sauval, de Du Breul, de Faryn et Pasquier, et de documents anciens comme les vieux papiers terriers dont il aime tirer les informations qui donnent du ralisme ses descriptions:

    Il est vrai que Sauval navait pas encore mesur la grande salle du chteau de Montargis.78 (...) En lan de grce 1549, o Du Breul ladmirait encore79

    76Hugo, V. (1988): Op.cit., p.143 77Raimond, M. (1967): Op.cit., p.23 78Hugo, V. (1988): Op.cit., p.38 79Hugo, V. (1988): Op.cit., p.41

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    (...) La fameuse table de marbre, si longue, si large et si paisse que jamais on ne vit, disent les vieux papiers terriers, (...) pareille tranche de marbre au monde.80

    En fait, le premier souci de Victor Hugo, ds le dbut du roman est de dnoncer le vandalisme qui sattaque aux monuments:

    Depuis, on a badigeonn ou gratt (je ne sais plus lequel) le mur (...) Cest ainsi quon agit depuis tantt deux cents ans avec les merveil-leuses glises du moyen ge. Les mutilations leur viennent de toutes parts, du dedans comme du dehors.81

    En effet, ce vandalisme nest pas seulement anonyme:

    Le prtre les badigeonne, larchitecte les gratte, puis le peuple sur-vient, qui les dmolit.82

    Les rfrences aux faits politiques contemporains ou assez rcents

    du moins pour V. Hugo sont constants, principalement ceux qui rappellent la rvolution franaise et laction porte par le peuple sur les monuments qui est compare une avalanche qui dtruit tout sur son passage.

    Pour Victor Hugo, larchitecture du XIXme sicle est en pleine d-cadence, il sagit dune opinion malheureusement bien enracine chez lui et bien rflchie, non quil considre les artistes actuels sans valeur et sans talent sinon quil craint que la sve ne se soit retire de ce vieux sol de larchitecture qui a t pendant tant de sicles le meilleur terrain de lart83.

    V. Hugo ne cesse dinsister sur le besoin de conserver le patri-moine, srige en dfenseur de la vieille architecture, exige la conservation du patrimoine historique et dnonce haute voix bien des profanations, bien des dmolissions, bien des impits84:

    (...) conservons les monuments anciens. Inspirons, sil est possible, la nation lamour de larchitecture nationale. Cest l, lauteur le d-

    80Hugo, V. (1988): Op.cit., p.43 81Hugo, V. (1988): Op.cit., p. 29 82Hugo, V. (1988): Op.cit., p.29 83Hugo, V. (1988): Op.cit., p.33 84Hugo, V. (1988): Op.cit., p.34

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    clare, un des buts principaux de ce livre; cest l un des buts princi-paux de sa vie.85

    Dailleurs, en homme daction quil est, il considre bien peu de

    chose que de se contenter de dnoncer:

    Cest mme une honte pour nous autres, hommes intelligents, qui les voyons faire et qui nous contentons de les huer.86

    Paris aussi, son Paris ador, la ville lettre, la cit de la presse, de

    la parole et de la pense est mis en danger par les gcheurs de pltre et le tout sous les yeux du public artiste de Paris.87

    V. Hugo ne lsine pas sur les listes de monuments disparus par les

    effets du temps et de lhomme. Ce que nous pouvons apprcier aujourdhui nest que lombre de ce qui fut autrefois, la richesse architecturale du pays disparat grands pas, ce qui nous reste de cet ge dor nest pas grand chose dit Hugo avec un mlange de piti et de colre.

    Dans ces chapitres, il ne peut cacher son penchant, son faible pour lart gothique, pour sa finesse, sa dlicatesse, son raffinement:

    (...) Ce got charmant darchitecture dlicate, de sculpture merveil-leuse, de fine et profonde ciselure qui marque chez nous la fin de lre gothique et se perptue jusque vers le milieu du seizime sicle dans les fantaisies feriques de la Renaissance.88

    Dans un chapitre essentiel pour comprendre les opinions artistiques

    de V. Hugo, Ceci tuera cela, il prsente larchitecture comme la langue des hommes depuis des temps immmoriaux.

    En retraant les tapes successives de la construction humaine en

    pierre depuis le menhir, le dolmen et les groupes de pierres les plus simples et primitifs jusquaux cathdrales, V. Hugo nous explique comment lhomme a forg et dvelopp un alphabet de pierre pour terminer par la composition dun message complet pouvant tre transmis aux gnrations futures. Larchitecture et la pense humaine taient alors troitement lies et chaque

    85Hugo, V. (1988): Op.cit., pp.33-34 86Hugo, V. (1988): Op.cit., p.34 87Hugo, V. (1988): Op.cit., p.34 88Hugo, V. (1988): Op.cit., p.43

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    monument reprsente la pense, le sentiment dun peuple et dune poque et transmet un message que les gnrations suivantes devront tre capables de dchiffrer.

    Selon V. Hugo ni larchitecture ni lglise nont plus les mmes int-rts prsent do la perte de symbolisme des monuments actuels et leur manque dme. Les temps modernes ont remplac la spiritualit, le dogme, le mystre, le mythe par lesthtique, la beaut superficielle, la fantaisie et le caprice:

    Le livre architectural nappartient plus au sacerdoce, la religion, Rome; il est limagination, la posie, au peuple.89

    Daprs lui, larchitecture est au moyen ge ce que la libert de la

    presse au XIXme sicle et peut mme en arriver transmettre des ides anticlricales comme lglise de Saint-Jacques-de-la-Boucherie:

    La pense alors ntait libre que de cette faon, aussi ne scrivait-elle tout entire que sur ces livres quon appelait difices.90 Si les glises se sont multiplies au moyen ge cest, daprs Hugo, par un besoin de libert dexpression. Cependant, les monuments re-ligieux sont des livres tnbreux que les initis seuls savent dchif-frer alors que larchitecture populaire prsente des difices pn-trables toute me, toute intelligence, toute imagination, symboliques encore, mais faciles comprendre comme la nature.91

    Pourquoi les hommes ont-ils crit sur la pierre, parce quil sagit du matriau le plus rsistant aux ravages du temps, celui qui permet de trans-mettre un lgat aux gnrations venir, celui qui immortalise un artiste et son message:

    Cest que toute pense, soit religieuse, soit philosophique, est intres-se se perptuer, cest que lide qui a remu une gnration veut en remuer dautres, et laisser trace. (...) Quun difice est un livre bien autrement solide, durable, et rsistant!92

    89Hugo,V. (1988): Op.cit., p.242 90Hugo, V. (1988): Op.cit., p.243 91Hugo, V. (1988): Op.cit., p.245 92Hugo, V. (1988): Op.cit., p. 246

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    Pour ce faire, larchitecture doit tre lart total, intgrateur des

    autres arts qui devront tre son service, sinon elle ne peut que mourir. Lart serait aujourdhui en vidente dcadence:

    Lart na que la peau sur les os. Il agonise misrablement.93

    X. CONCLUSION

    Comme nous lavons constat tout au long de ce travail, Notre-Dame de Paris nest pas un vritable roman historique parce quil ne raconte pas des vnements rels, cependant ne peut-on pas dire que:

    El poeta no canta la poca o el pas que existe sino que re-

    crea el pas o el momento como l lo siente o desea. El artista no pre-tende ser el testigo de su tiempo, sino la divinidad caprichosa y libre que crea el mundo a su antojo.94

    Sil en est ainsi, Victor Hugo a rellement eu le bonheur davoir in-

    vent cette trs vridique histoire95; pleine de splendeur gothique mais charge des topiques mdivaux sur lobscurantisme et la superstition de ses gens.

    Nous pouvons galement considrer avec Ann Rigney que:

    Le caractre historique des vnements raconts par lhistorien rside non seulement dans le fait quils sont rels plutt quinvents, mais aussi dans le fait quils sont passs: si les vnements fictifs com-mencent leur existence au moment dtre raconts, les vnements historiques ont, par dfinition, une existence antrieure au rcit dans lequel ils sont reprsents.96

    Dans son roman Victor Hugo mlange des lments emprunts la

    ralit: le cadre physique, certaines anecdotes historiques, etc. avec des lments de fiction: les personnages et les situations. Tout ceci constitue sans doute la richesse de luvre: 93Hugo, V. (1988): Op.cit., p. 250 94Santamarta, J.M.; Atienza, J.L. (1987): Op.cit., pp.45-46 95Hugo, V. (1988): Op.cit., p.53 96Rigney, A. (Sept. 1988): Du rcit historique, prise de la Bastille selon Michelet (1847), Potique 75, Seuil, p.269

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    Le discours de fiction est en fait un patchwork, ou un amalgame plus ou moins homognis, dlments htroclites emprunts pour la plupart la ralit (...) la fiction nest gure que du rel fictionalis (...) ses assertions ne sont clairement pas toutes galement feintes, et aucune delles peut-tre ne lest rigoureusement et intgralement (...) le tout y est plus fictif que chacune de ses parties.97

    Notre-Dame de Paris est entr dans lhistoire de la littrature fran-

    aise et universelle non seulement pour la rcration dune poque sinon pour sa valeur littraire qui dpasse la simple description des lieux et des vnements et qui apporte une dimension connotative au roman. En effet:

    La valeur esthtique (...) dun rcit, ou dun drame, relve toujours de fiction, de diction, ou (le plus souvent) de quelque coopration des deux, dont le rle densemble et la rpartition ne sont gure mesu-rables.98

    La dimension symbolique des espaces et leur rle dans le droule-

    ment tragique de laction contribuent sa richesse et le talent de narrateur de Victor Hugo pare le rcit de ses meilleurs atours sans dlaisser pour autant le message politique, moral et esthtique quil se propose de faire passer travers le rcit.

    Victor Hugo apparat ici comme un homme sensible, amateur dart, aimant sa ville par dessus tout et la connaissant dans ses moindres dtails, il nest donc pas tonnant qu:

    A travers luvre entire de Hugo tout un rseau dimages -mtaphores et dessins- associe la silhouette de la guillotine celle de la faade de Notre-Dame de Paris, perturbant un signe que son ro-man de 1831 donne lire couramment comme la fait en 1845 Au-guste Vacquerie: les tours de Notre-Dame taient lH de son nom!99

    En effet, Victor Hugo sera toujours associ Notre-Dame et vice-

    versa dans lesprit de la plupart des amateurs de livres.

    97Genette, G. (1991): Fiction et diction, Paris, Seuil, p.60 98Genette; G: (1991): Op.cit., p.38 99Gohin, Y. (1987): Op.cit., p.21

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