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Comité Consultatif National d’Ethique pour les sciences de la vie et de la santé Revue de presse du 24 décembre 2015 au 14 janvier 2016 N° 301 35, rue Saint-Dominique – 75700 Paris 01.42.75.66.44

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Comité Consultatif National d’Ethique pour les sciences de la vie et de la santé

Revue de presse

du 24 décembre 2015 au 14 janvier 2016

N° 301

35, rue Saint-Dominique – 75700 Paris

01.42.75.66.44

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SOMMAIRE n° 301 du 24 décembre 2015 au 14 janvier 2016

I- ÉTHIQUE Affaire Mennesson : vers une reconnaissance à l’état civil d’enfants nés par GPA 1/2 Le Figaro, 22/12/15 Grande-Bretagne : Un couple s’offre deux clones de son chien défunt 2 20 Minutes, 29/12/15 Violeur de l’Essonne : place aux gènes 2/4 Libération, 31/12/15 Faut-il rembourser les dons d’organe ? 4/5 Washington Post, 30/12/15 Un « expert en nutrition » a reçu 550 000 dollars de Coca-Cola pour faire des conférences 5/6 Slate, 31/12/15 La banque de sperme de Londres accusée d’eugénisme 6/7 Le Figaro, 30/12/15 Pourquoi demander un deuxième avis en médecine ? 7/8 Le Figaro, 04/01/16 Une institution de soins peut-elle refuser une euthanasie entre ses murs ? 8/9 La Libre Belgique, 03/01/16 Strasbourg : la sixième édition du Forum Européen de Bioéthique se déroulera du 25 au 30 janvier 2016 9/10 LibeStrasbourg, 06/01/16 Un couple fait cloner son chien mort 10/11 Ouest-France, 29/12/15 Fabriquer des organes humains dans des porcs ou des moutons, fiction ou réalité ? 12 MIT Technology Review, 06/01/16 A Strasbourg, le forum de bioéthique se penchera sur la frontière entre le « normal » et le « pathologique » 12/13 Dernières Nouvelles d’Alsace, 12/01/16 Les laboratoires jouent leurs gammes 13/15 Le Monde, 13/01/16

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II- SOCIÉTÉ Les « PMA clandestines », une réalité en France 16/18 Le Monde, 29/12/15 Michael Schumacher : deux ans après, il ne pourrait « ni marcher ni communiquer » 18/19 Le Blog de Jean-Yves Nau, 29/12/15 Les géants du Web à la chasse aux ADN 20/22 Libération, 03/01/16 Le Français Nanobiotix pousse ses pions aux Etats-Unis 22/23 Le Figaro, 05/01/16 Vaccin contre l’hépatite B, un non-lieu requis dans le dossier pénal 23/24 La Croix, 05/01/16 La fièvre de Zika s’empare du Brésil 24/25 Le Journal du Dimanche, 03/01/16 Le jour où mon fils autiste est entré dans une mosquée interdite d’accès à Jérusalem 25/27 Huffington Post, 04/01/16 Des banques de lait maternel pour réduire la mortalité infantile 27/28 Sciences et Avenir, 04/01/16 Le Japon met les exosquelettes au travail 28/30 Le Temps, 04/01/16 Transgene : nouveau plan de développement stratégique 30 Boursorama Cercle Finance, 07/01/16 L’augmentation des grossesses tardives inquiète les spécialistes 31 24 Matins, 07/01/16 Création du Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie 31/32 Le Quotidien du Médecin, 06/01/16 En Irlande du Nord, l’Eglise toujours opposée à la libéralisation de l’avortement 32 La Croix, 08/01/16 Avortement : un groupe veut amener l’Île-du-Prince-Edouard devant les tribunaux 32/33 La Presse Canadienne, 05/01/16 Etats-Unis : le casse-tête des mères porteuses qu’on veut faire avorter 33/34 Le Point, 07/01/16 Mères porteuses : un ministre italien dérape 34 Le Figaro, 07/01/16 23andMe m’a découvert le gène de la mucoviscidose et un demi-frère 35/37 Rue 89, 10/01/16 Faut-il supprimer la vaccination obligatoire en France ? 37/38 La Croix, 12/01/16

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« L’aventure extraordinaire » de Justine, qui a porté l’enfant de sa sœur Amélie 38/40 Le Monde, 24/12/15 Une « concertation citoyenne » pour rétablir la confiance sur les vaccins 41/42 La Croix, 13/01/16 Une première mastectomie sans cicatrice réalisée grâce à un robot 42/43 Aufeminin.com, 13/01/16 III – RECHERCHE Les spermatozoïdes sensibles à l’obésité 44/45 Le Figaro, 28/12/15 Les effets du stress transmissibles à la descendance 45/46 Le Figaro, 28/12/15 Le cerveau n’a pas de sexe 46/47 Le Figaro, 30/12/15 Myopathie : un nouvel espoir de guérison 47/48 Le Point, 04/01/16 Grippe : des marqueurs sanguins pour aider à détecter les réactions au vaccin 48 Le Parisien, 05/01/16 Les enfants nés par FIV n’ont pas plus de retard de développement 48/49 Pourquoi Docteurs ?, 05/01/16 Embryons défectueux : des chercheurs du CHUM font une découverte 49/50 La Presse Canadienne, 04/01/16 Des spermatozoïdes sous influence 50/52 Le Monde Sciences et Techno, 06/01/15 Cannabis et épilepsie, l’espoir à petits pas 52/54 Le Figaro, 09/01/16 Les MICI, un continuum avec 3 maladies et non 2 54/55 Le Quotidien du Médecin, 11/01/16 Anomalies chromosomiques : pourquoi dépister autrement 55/57 Le Figaro, 11/01/16 Un bébé naît après un exploit médical 58 La Provence, 12/01/16 Sanofi investit plus d’1 milliard d’euros dans le traitement du cancer 58/59 Le Figaro, 12/01/16

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IV - PERSONNALITÉS, FILMS ET OUVRAGES La fabrique des bébés 60/61 La Croix, 23/12/15 Josef Schovanec, saltimbanque de l’autisme 61/63 La Croix, 02/01/16 Ne risque-t-on pas de déshumaniser la médecine avec des patients virtuels ? 63/64 La Croix, 05/01/16 Assurance-maladie : changeons de logiciel ! 65/66 Le Monde Economie, 06/01/16 La nomination de Véronique Fournier inquiète les acteurs des soins palliatifs 66/67 La Croix, 11/01/16 Un récit d’humanisme médical et une leçon de modestie 67/68 Le Quotidien du Médecin, 11/01/16 Jenny Reardon, sociologue entre science et justice 68/70 Le Monde Sciences et Techno, 13/01/16 Fin de vie : une nomination crée la polémique 70/71 Le Figaro, 13/01/16

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ÉTHIQUE

Affaire Mennesson : vers une reconnaissance à l'état civil d'enfants nés par GPA Le Figaro du 22 décembre 2015 par Agnès Leclair

Le juge des référés du TGI de Nantes a contraint l'État à délivrer des documents d'état civil aux jumelles nées de mère porteuse aux États-Unis. Le parquet a fait appel

L'affaire Mennesson, saga juridique emblématique de la reconnaissance en France des enfants nés de mère porteuse à l'étranger, serait-elle en train de toucher à sa fin ? Alors que la gestation pour autrui (GPA) est interdite en France, Sylvie et Dominique Mennesson tentent depuis plus de dix ans de faire reconnaître à l'état civil français leurs jumelles, nées aux États-Unis d'une mère porteuse après un don d'ovocytes. Dans les prochains jours, les deux adolescentes devraient voir leurs actes de naissance américains transcrits sur les registres d'état civil français.

Le 3 décembre, le juge des référés du tribunal de grande instance de Nantes a en effet contraint l'État à délivrer des documents d'état civil aux filles Mennesson. Son ordonnance a un caractère exécutoire nonobstant l'appel du parquet. « Des instructions ont été données le 15 décembre pour la transcription au service central de l'état civil afin de mettre à jour les actes de naissance », précise l'avocate du couple, Me Laurence Roques. Cette décision reconnaît « la filiation avec la mère d'intention, Sylvie Mennesson, et non seulement la filiation avec le père biologique, Dominique Mennesson, poursuit l'avocate. Le juge ne s'est pas fondé sur la réalité biologique mais sur la réalité juridique ». Elle va donc plus loin que deux arrêts rendus par la Cour de cassation en juillet dernier. Ces derniers validaient la transcription en droit français de l'état civil de deux enfants nés à l'étranger par GPA mais ne tranchaient pas la question de la reconnaissance du parent d'intention n'ayant aucun lien biologique avec l'enfant.

Selon l'ordonnance, que Le Figaro a pu consulter, « le fait que la mère juridique ne soit pas la mère biologique ne caractérise pas une information fausse, dès lors qu'à l'instar d'une adoption, la légalité de cette substitution a été vérifiée par le tribunal compétent à savoir la Cour suprême de Californie ». Le juge des référés s'est appuyé sur l'arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) en juin 2014, rendu dans le cadre de l'affaire Mennesson. Les juges de Strasbourg avaient condamné la France au motif que la non-transcription des actes de naissance des jumelles dans le droit français portait atteinte à leur « identité ». « Nous sommes contents mais cet appel nous empêche de nous réjouir », commente Sylvie Mennesson.

« Cheval de Troie »

La cour d'appel peut en effet infirmer la décision du juge des référés du TGI de Nantes alors que le débat judiciaire sur les effets des contrats de mères porteuses en droit français est loin d'être clos. Plutôt que de commenter l'affaire Mennesson, qu'ils considèrent être un « cheval de Troie » à la légalisation des mères porteuses, les opposants à la GPA préfèrent évoquer la récente victoire qu'ils viennent d'obtenir au Parlement européen. Jeudi dernier, ce dernier a adopté une proposition de résolution condamnant la pratique de la GPA dans son rapport annuel sur les droits de l'homme. Une pratique qualifiée de contraire à « la dignité humaine de la femme, dont le corps et les fonctions reproductives sont utilisés comme des marchandises ».

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« C'est une très bonne nouvelle d'autant qu'il s'agit d'une condamnation de toutes les formes de GPA, celles qui sont rémunérées comme celles prétendument altruistes », commente Ludovine de La Rochère, présidente du mouvement qui participe au collectif No Maternity Traffic.

Grande Bretagne : Un couple s'offre deux clones de son chien défunt 20 Minutes du 29 décembre 2015 par Fabrice Pouliquen

Shadow et Chance, deux chiots boxers, sont parfaitement identiques. Et pour cause : ils sont les clones de Dylan, le premier chien, décédé, de Richard Remds et Laura Jacques...

Richard Remds et Laura Jacques ont dû débourser 67 000 £ (90 700 euros) pour s’offrir ce cadeau. Mais ce couple britannique du Yorkshire se dit comblé. Depuis quelques jours, ils sont les deux propriétaires de deux chiots boxer, parfaitement identiques. Et pour cause, Shadow et Chance sont les clones de Dylan, le premier chien de Richard Remds et Laura Jacques, mort d’une tumeur au cerveau en juin dernier.

Rongé par le chagrin, le couple n’avait pas hésité alors à casser sa tirelire et à expédier des échantillons de tissus, contenant l’ADN de leur chien défunt, à la controversée Sooam Biotech Reserch foundation, raconte le Telegraph. Un mois plus tard, le laboratoire apprenait au couple que deux chiennes porteuses avaient été engrossées. Nés à quelques jours d’intervalle, Shadow et Chance se portent bien. Richard Remds et Laura Jacques ont ouvert un compte Twitter, WelovedDylan, pour relater leurs premiers pas. Leur naissance tient du miracle, confie Richard Remds. Il y a en tout cas une prouesse scientifique. Les deux chiots n’ont été clonés que deux semaines après la mort de Dylan, alors que la limite pour entamer le processus de clonage était jusque-là de cinq jours après le décès.

L’opération n’est toutefois pas sans poser des questions éthiques. Si le clone d’être humain est interdit, il n’y a aucune loi qui régit encore le clone d’animaux, rappelle le Telegraph. La RSCPA, une association britannique de défense des animaux, fait part de ses craintes. « Cloner des animaux nécessite d’employer des procédures qui causent de la douleur et du stress aux animaux impliqués et ces opérations ont des taux d’échec et de mortalité importants », indique un porte-parole de la RSCPA. Sooam Biotech Reserch foundation a fait du clone de chien un commerce qu’il facture 100 000 $ aux couples désireux d’avoir la copie conforme de leur chien défunt. Le laboratoire a d’ores et déjà donné naissance à 700 chiens clonés.

De leur côté, Richard Remds et Laura Jacques espèrent pouvoir ramener ses deux chiots à la maison en juillet prochain, lorsque la période de quarantaine sera terminée. Ils ont aussi indiqué vouloir adopter les deux mères porteuses. Le laboratoire a fait du clone de chien un commerce qu’il facture 100 000 $ aux couples qui veulent la copie conforme de leur toutou décédé.

Violeur de l’Essonne : place aux gènes Libération du 31 décembre 2015 par Emmanuel Fansten et Sylvain Mouillard

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Un homme soupçonné de plusieurs viols entre 1995 et 2001, a été identifié grâce à l’utilisation d’une nouvelle méthode de recherche ADN, qui pose des questions déontologiques

Confondu par son ADN, vingt ans après les faits. Un homme de 40 ans soupçonné d’une trentaine de viols, tentatives de viols et agressions sexuelles dans la forêt de Sénart (Essonne), entre 1995 et 2001, vient d’être mis en examen. Les victimes, des femmes de tous âges, circulaient seules dans cette forêt de 3 000 hectares. A chaque fois, le même scénario : juché sur son deux-roues, casqué et cagoulé, leur agresseur les doublait, feignait une panne, puis s’arrêtait, avant de les entraîner à l’écart pour les violenter. Un mode opératoire qui lui vaut le surnom de « violeur à la mobylette ».

Une première enquête est ouverte en 1996. Dans 14 cas, le sperme retrouvé permet d’isoler un ADN. Mais le profil génétique établi - inconnu des fichiers de police - ne suffit pas à identifier l’agresseur. Après neuf ans, l’enquête est clôturée par un non-lieu, faute de preuves. Mais en 2009, le parquet d’Evry décide de la rouvrir en se basant sur de nouvelles techniques d’identification par ADN, relançant ainsi les investigations. Jusqu’à l’arrestation du suspect, lundi, à Roubaix (Nord). En garde à vue, l’homme a déclaré « ne pas nier les faits mais ne pas s’en rappeler ». Son arrestation, quinze ans après les viols de Sénart, met en lumière une technique d’identification très rarement utilisée.

Comment le suspect a-t-il été identifié ?

Le violeur présumé de Sénart n’aurait jamais été interpellé sans les progrès de la génétique. En théorie, le profil ADN d’une personne ne suffit pas à l’identifier : elle doit être au préalable répertoriée dans le Fichier national automatisé des empreintes génétiques (Fnaeg), qui comporte un peu plus de 3,3 millions de noms. Dans le cas contraire, les policiers ont désormais la possibilité d’exploiter seulement une partie du séquençage ADN, afin d’identifier des proches biologiques du suspect présents dans le fichier. Cette technique, dite de la « parentèle », est utilisée quand une trace ADN retrouvée sur la scène de crime n’est pas répertoriée au Fnaeg, mais que les enquêteurs l’attribuent de façon certaine à l’auteur des faits - une trace de sperme retrouvée sur la victime d’un viol par exemple. L’objectif est alors de vérifier, par recoupement, si des membres de sa famille figurent dans le Fnaeg.

Le principe est simple : chaque enfant dispose dans son identité génétique d’un marqueur du père et d’un de la mère. Les enquêteurs s’attachent donc à mettre en évidence des concordances entre le profil ADN du suspect et ceux qui s’en rapprochent dans la base. Cette recherche conduit alors à identifier une série de candidats potentiels, parents de l’ADN retrouvé. C’est ensuite à l’enquête policière d’élaguer cette liste et de cibler un nouveau suspect, dont l’ADN est à son tour prélevé pour être comparé au profil recherché. Saisie de l’enquête sur le « violeur à la mobylette », la PJ de Versailles (Yvelines) va travailler pendant plusieurs mois à partir des traces prélevées sur les scènes de viol. La technique de la parentèle permet aux enquêteurs d’identifier, dans le Fnaeg, 29 hommes dont le profil génétique est proche de celui du suspect. Mais seul un d’entre eux réside en Essonne à l’époque des faits. Il s’agit du frère du violeur présumé, dont la surveillance permettra de remonter jusqu’à lui. Aussi efficace soit-elle, cette technique est utilisée uniquement en dernier recours, « quand toutes les autres portes ont été fermées », explique Soizic Le Guiner, directrice générale déléguée de l’Institut génétique de Nantes Atlantique et experte en empreintes génétiques auprès de la Cour de cassation. Elle ne concerne que les dossiers les plus graves.

Cette technique a-t-elle déjà été utilisée ?

La recherche en parentèle a été employée pour la première fois dans une autre affaire qui a défrayé la chronique : le meurtre d’Elodie Kulik. En janvier 2002, le corps de cette femme de 24 ans est retrouvé sur un terrain vague, dans une petite commune de la Somme. Comme celle du violeur de l’Essonne, l’enquête va alors piétiner près de dix ans. Plus de 600 pistes sont explorées, 14 000 lignes téléphoniques passées au crible, plus de 5500 empreintes digitales et génétiques prélevées. En vain.

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Jusqu’en 2010, quand un gendarme de la section de recherche d’Amiens découvre qu’une technique de recherches ADN utilisée aux Etats-Unis a permis de confondre un tueur en série plusieurs années après. « Cette technique était détaillée dans une publication scientifique américaine, se souvient le commandant de gendarmerie Emmanuel Pham Hoai. J’ai essayé de voir si elle était adaptable scientifiquement en France, ce qui était le cas avec les fonctionnalités du Fnaeg. Mais, à ma grande surprise, elle n’avait encore jamais été utilisée. » A l’époque, cette méthode n’existe pas en France, mais aucun texte ne l’interdit. Il faudra toutefois un an avant que la chancellerie ne donne son feu vert. « On ne voulait pas prendre le risque de voir ces expertises annulées par la justice », poursuit Emmanuel Pham Hoai, promu depuis chef du département biologie de l’Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN). Dans l’affaire Kulik, la technique de la parentèle permet finalement de remonter jusqu’à un homme répertorié dans le Fnaeg. Rapidement, les enquêteurs suspectent un de ses fils, mort un an après le meurtre dans un accident de la route. Le juge de l’époque décide alors d’exhumer son cadavre afin de prélever son ADN. La comparaison avec celui trouvé sur la scène de crime prouvera qu’il s’agit bien du meurtrier. Le dispositif est-il bien encadré ?

Cette nouvelle technique de recoupement par l’ADN familial ouvre de nombreuses perspectives dans les dossiers criminels, notamment les cold cases, ces affaires non résolues. Mais elle soulève également certaines questions déontologiques. Plusieurs magistrats se sont élevés contre des atteintes à la vie privée de personnes qui ne sont pas concernées par un crime, mais peuvent s’y trouver mêlées en raison de leurs seuls liens génétiques avec un suspect.

Depuis 2012, un protocole est signé chaque année entre la chancellerie et les directions de la police et de la gendarmerie nationales. Tous les juges d’instructions qui veulent recourir à la technique de la parentèle doivent agir en parfaite conformité avec ce protocole. Le magistrat doit alors solliciter les experts de l’Identité judiciaire de la police scientifique. En cas de doutes sur l’opportunité des recherches génétiques, ces derniers peuvent saisir une commission ad hoc, le Comité technique interministériel pour la mise en œuvre du Fnaeg, qui regroupe des représentants des ministères de la Justice et de l’Intérieur. Mais en dehors de ce protocole, il n’existe aucun texte de loi encadrant cette procédure longue et fastidieuse. « Il ne suffit pas d’entrer une information dans la base informatique et de laisser mouliner, souligne Soizic Le Guiner. C’est une chose complexe qui prend du temps. » D’autant que les policiers et juges d’instruction sont nombreux à vouloir utiliser ce procédé pour tenter de réchauffer des cold cases. Pour mettre fin à ce flou juridique, le ministère de la Justice réfléchit actuellement à encadrer ce type d’expertise par le législateur.

Faut-il rembourser les dons d'organe ? Washington Post du 30 décembre 2015

En novembre 2015 dans l’American Journal of Transplantation, un groupe de chercheurs a publié une proposition pour un programme financé par le gouvernement qui offrirait 45 000 $ à des donneurs vivants de rein. « Ils ont calculé qu'une telle approche ne viserait pas seulement à remplir la liste d'attente ensemble, mais à économiser une somme exorbitante de 46 milliards $ par année - un montant qui a attiré l'attention d'une poignée d'économistes. » Francis L. Delmonico, professeur Harvard Medical School de la chirurgie à l'Hôpital général du Massachusetts et Alexander M. Capron, professeur à l'Université de Californie du Sud, reviennent sur cette proposition.

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Partant du constat que « les transplantations d'organes ont étendu et amélioré la vie de plus d'un million de patients au cours des 60 dernières années », ils regrettent que la hausse du taux de maladie rénale ait introduit une pénurie d’organes. Ce qui a développé un véritable trafic d’organes international au détriment des plus pauvres : « Au cours des dernières décennies, des milliers d'organes ont été achetés à des démunis dans le monde entier, pour l'élite sociale de leurs propres pays ou pour des "touristes de la transplantation" des autres nations. » Sur le plan politique, « cette pénurie d'organes a également conduit à des propositions visant à lever l'interdiction du paiement qui fait partie de la législation américaine relative au don d'organes depuis 1984. » Cependant, pour ces professeurs, permettre « l'achat d'organes serait faux. En plus d'être mauvais, il serait nuisible aux programmes de dons existants, qui sont volontaires, et il serait inefficace dans l'augmentation de l'offre d'organes. »

Cependant, les deux professeurs reconnaissent qu’« au cours de la récente récession, le taux de dons de rein a diminué aux États-Unis parce que certains donateurs potentiels ne pouvaient pas se permettre de supporter les frais liés au don d'organe. » Ils considèrent que puisque la législation internationale n’interdit pas le fait de rembourser les frais raisonnables et vérifiables liés au don d’organe, il est possible, pour le gouvernement américain, de rembourser une partie de ses frais. Ils rappellent que le remboursement est lié à une couverture des coûts sur la base du revenu du bénéficiaire ainsi que sur celui du donateur. Or pour eux, « Le traitement des coûts financiers ne devrait pas dépendre de la richesse du donateur, et encore moins celle du bénéficiaire. »

Un « expert en nutrition » a reçu 550 000 dollars de Coca-Cola pour faire des conférences Slate du 31 décembre 2015 par Lucie de la Héronnière

Un professeur de l'Université du Colorado a reçu beaucoup d'argent pour transmettre une certaine vision de la lutte contre l'obésité

En août, le New York Times dévoilait un lien financier entre Coca-Cola et Global Energy Balance Network (GEBN), une organisation à but non lucratif travaillant à la lutte contre l’obésité avec une approche un peu particulière, dénonçant surtout comme coupable le manque d’activité physique et minimisant le rôle de l’alimentation (et donc des boissons sucrées). Comme nous l’expliquions ici en novembre, des emails ont ensuite montré que la multinationale s’immisçait dans le travail de GEBN. Et ce n’est pas tout: James Hill, expert en nutrition, professeur à l’Université du Colorado et président de GEBN (organisation qui a entre-temps été dissoute, à cause de prétendues « ressources limitées »), a tranquillement reçu à titre personnel 550 000 dollars (503 000 euros) de Coca-Cola à partir de 2010, révèle cette semaine un long article du Denver Post. James Hill aurait reçu cette « aide » de l’entreprise pour mener des conférences visant à « équilibrer » le débat sur l’obésité, trop axé sur les boissons sucrées au goût de la multinationale...

Selon Ben Sheid, un porte-parole de Coca-Cola, ces 550 000 dollars « reflètent le travail réalisé avec le docteur Hill avant la mise en place de GEBN » et cette coquette somme aurait servi à financer « ses honoraires, ses voyages, des activités éducatives et des recherches sur la gestion du poids ». Il a par exemple voyagé au Mexique, en Angleterre, en Australie, en Nouvelle-Zélande. Son épouse a aussi voyagé aux frais de Coca-Cola pour ces deux dernières destinations. Le Denver Post ajoute qu’en 2013 James Hill aurait demandé à Rhona Applebaum, directrice de la santé et de la science chez Coca – qui a depuis quitté l’entreprise – de l’aider à trouver un job à son fils.

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Contacté par e-mail par le journal, James Hill déclare qu’il ne fait plus de présentations à la demande de Coca-Cola et que son fils n’a jamais eu d’emploi chez Coca. Il explique aussi que le soutien de l'entreprise lui a permis de « présenter des recherches à d’autres scientifiques et encourager l’activité physique et les habitudes alimentaires responsables ».

Luis Toro, directeur du Colorado Ethics Watch (une organisation qui promeut l’éthique et la responsabilité dans la vie publique), explique que tout cela pourrait entrer en conflit avec la loi de l’État limitant des « cadeaux » d’entreprises privées aux salariés du public, surtout pour le cas des voyages, jugé très « problématique ».

La banque du sperme de Londres accusée d'eugénisme Le Figaro du 30 décembre 2015 par Eugénie Bastié

L'établissement a refusé des donneurs atteints de dyslexie et d'autres troubles neurologiques. Une pratique de sélection qui fait polémique en Grande-Bretagne. Une enquête a été ouverte.

La plus grande banque de sperme britannique, qui pourvoit de la semence pour plus de 1000 fécondations in vitro par an, a refusé des donneurs souffrant de dyslexie, et ce afin de « minimiser le risque de transmission de maladies génétiques ou de malformations ». Une brochure distribuée aux donneurs potentiels, que s'est procuré The Guardian , liste une série de conditions pour pouvoir donner sa semence, parmi lesquelles : ne pas souffrir de déficit de l'attention, ni d'hyperactivité, ni d'autisme, ni du syndrome d'Asperger, mais aussi ne pas être dyslexique. C'est cette dernière condition qui choque : la haute autorité censée surveiller le don de sperme a déclaré que celle-ci était contraire à sa politique générale et a diligenté une enquête. En effet, si tout don de sperme est par essence eugéniste, puisqu'en sont exclus les donneurs en mauvaise santé ou souffrant de maladies transmissibles, cette exclusion choque car la dyslexie n'est pas considérée forcement comme un tare. La dyslexie (du grec dys - la difficulté et lexos - le mot) désigne un trouble cognitif qui rend plus difficile l'apprentissage de la lecture. De 1 à 10 % de la population souffrirait d'une forme de dyslexie à des degrés divers. Certains dyslexiques célèbres, comme le créateur d'Apple Steve Jobs, ont même décrit cette maladie comme un « don ».

Fred Fisher, un dyslexique de 30 ans diplômé d'Oxford, s'est vu refuser son sperme et a accusé la banque d'eugénisme. « J'ai été très surpris de voir la dyslexie considérée comme une maladie neurologique. Je leur ai dit qu'ils étaient eugénistes, mais même pas dans le bon sens. Auraient-ils dit non à Richard Branson ou Albert Einstein ? [NDLR: le créateur de Virgin et le célèbre physicien étaient tous deux dyslexiques]. Nous avons besoin de gens innovants qui pensent différemment. Les dyslexiques sont un atout pour la société », a déclaré le jeune homme dans The Guardian.

Steve O'Brien, l'un des dirigeants de l'Association internationale des dyslexiques, renchérit dans le même journal : « C'est de l'eugénisme. Cela envoie un message : les dyslexiques n'ont pas leur place dans la société. En suggérant que vous ne pouvez pas donner votre sperme parce que vous êtes dyslexique, vous heurtez la confiance des gens. Ce genre de pratique fait que les personnes sont ensuite intimidées et n'osent pas admettre qu'elles sont dyslexiques et demander de l'aide. » Vanessa Smith, la dirigeante de la banque de sperme de Londres, s'est défendue : « Nous ne sommes pas eugénistes. Quand nous recrutons un donneur, ce que nous recherchons c'est du bon sperme qui peut bien congeler et qui produira une grossesse. Nous recherchons des gens médicalement sans maladies infectieuses et problèmes génétiques qui pourraient être transmis à l'enfant. »

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Les problèmes éthiques que soulève la procréation médicalement assistée avec donneurs anonymes sont nombreux. Dès lors que l'on peut, contrairement à la fécondation naturelle, choisir à discrétion le donneur, la tentation est grande de sélectionner celui ayant les meilleures caractéristiques génétiques. Les pratiques eugénistes des banques de sperme sont régulièrement dénoncées. Une société américaine baptisée GenePeeks propose ainsi un système de dépistage de maladies génétiques à partir des ADN des deux géniteurs. Dans certaines banques de sperme aux États-Unis, les donneurs sont rémunérés en fonction de la « qualité » de leur semence. Dans les années 1990, l'affaire des « bébés Nobel » avait mis en lumière les potentielles dérives du don de sperme. Un millionnaire un peu excentrique, Robert Graham, avait décidé de solliciter des prix Nobel pour recueillir leur semence dans un laboratoire devant servir à la procréation d'enfants géniaux, censés sauver l'humanité.

Pourquoi demander un deuxième avis en médecine ? Le Figaro du 4 janvier 2016 par Anne Prigent

Un site Internet propose depuis peu d'obtenir un second avis d'experts pour des pathologies graves ou invalidantes. Tentant, mais à manier avec précaution.

« Il y a cinq ans, on m'a détecté un cancer de la prostate. Le premier chirurgien que j'ai vu me proposait soit une prostatectomie radicale, soit une radiothérapie… C'est un ami qui m'a conseillé de demander un deuxième avis médical. Il a été bien inspiré : le deuxième spécialiste, vu dans un hôpital parisien, a estimé après deux consultations et quelques examens complémentaires que dans mon cas, ces traitements lourds n'étaient pas nécessaires, une surveillance active était suffisante », raconte Bernard, qui a aujourd'hui 75 ans et ne regrette pas sa démarche.

Depuis quelques semaines, Bernard pourrait obtenir ce second avis par Internet, pour la somme rondelette de 295 euros. Le site deuxiemeavis.fr a été lancé début décembre. Il propose aux patients atteints d'une « maladie grave, rare ou invalidante » de remplir un questionnaire et de télécharger leurs examens de santé, pour obtenir « un deuxième avis médical, en moins de sept jours, auprès de médecins qui ont un très haut niveau d'expertise sur leur maladie ». Le site Internet, validé par la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil), a reçu la caution de quelques grands noms de la médecine et du Comité interassociatif sur la santé (Ciss), représentant les patients. Mais cette offre, en particulier à cause de son coût, a été vivement critiquée par certains syndicats de médecins libéraux et par le Conseil de l'ordre.

La polémique a cependant le mérite de soulever un certain nombre de questions. Existe-t-il un besoin ? Comment obtenir un second avis et à quel prix ? Dans quelles circonstances ?

En cas d'incertitude

Les données sur la question sont quasi inexistantes. Impossible de savoir combien de personnes sollicitent un deuxième avis médical. « Moins de 10 % de mes patients nécessitent un deuxième avis. Je le suggère pour des pathologies difficiles à prendre en charge ou en cas d'incertitude. Mais une personne sur deux préfère s'en tenir au premier avis », explique le Dr Claude Leicher, président de MG France. L'Institut Gustave-Roussy, centre de référence en cancérologie qui propose gratuitement une demande d'avis en ligne, reçoit pour sa part 4 000 à 5 000 demandes par an.

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Pour le Ciss, le deuxième avis devrait être systématique lorsque les personnes sont confrontées à des diagnostics et des choix thérapeutiques lourds, aux conséquences potentiellement invalidantes face à des maladies graves ou rares. « Tout bon médecin devrait proposer un deuxième avis », insiste Claude Rambaud, vice-présidente de l'association. Le Dr Suzette Delaloge, oncologue à l'Institut Gustave-Roussy, est plus nuancée : « Dans le cancer du sein par exemple, demander un second avis systématique ne se justifie pas. D'autant qu'il est parfois dangereux de retarder des opérations alors que le cancer progresse. Mais lorsque vous ne comprenez pas la décision du médecin ou que vous n'êtes pas d'accord avec lui, n'hésitez pas. » Représentants des patients et médecins s'accordent sur un point : le deuxième avis est un droit des patients. « Nous n'avons pas à nous y opposer. Au contraire, il nous arrive de le conseiller lorsque nous voyons le patient hésiter », affirme le Dr Christian Castagnola, vice-président de l'Association française d'urologie.

Réunions de concertation pluridisciplinaires

L'Institut Gustave-Roussy reçoit environ 1500 demandes par an pour le cancer du sein. Des dossiers très variés qui vont des situations les plus simples aux demandes d'avis sur des mastectomies, des chimiothérapies… « Nous ne sommes pas très souvent en désaccord avec nos confrères. La cancérologie est d'un bon niveau en France et les réunions de concertation pluridisciplinaires sont là pour protéger les patients. » Les établissements de santé sont en effet tenus de réunir un collège de médecins en amont de l'annonce du diagnostic au patient afin de lui proposer un plan de traitement. Ces réunions de concertation pluridisciplinaires permettent de confronter les points de vue et les avis sur la prise en charge. Mais le système n'est pas infaillible. Claude Rambaud évoque ainsi le cas récent d'une jeune femme traitée par chimiothérapie pour un cancer du col de l'utérus diagnostiqué à tort. « Il faut savoir que 5 à 15 % des événements indésirables liés à un traitement découlent d'une erreur de diagnostic. Et des études américaines ont montré que 5 % des patients étaient confrontés à des erreurs de diagnostic », souligne Claude Rambaud.

Repasser par la case médecin traitant

Lorsque le deuxième avis s'impose, la solution la plus simple, qui n'est cependant pas obligatoire, est de repasser par la case médecin traitant. « Sur le site de Gustave-Roussy, dans plus de la moitié des cas, c'est le patient qui fait la demande directement et qui reçoit notre avis. C'est important qu'il soit acteur de sa santé, mais je préfère avoir un intermédiaire médical qui pourra interpréter nos commentaires », explique le Dr Suzette Delaloge. Le médecin traitant se révèle aussi d'une aide précieuse dans le choix des décisions. Claude Leicher raconte ainsi le cas d'une patiente de 88 ans dont l'arthrose du dos menaçait de la rendre invalide. Fallait-il opérer ? Après trois avis et discussion avec la patiente et ses enfants, l'opération a eu lieu. « C'est toujours une codécision avec le patient, le médecin traitant et parfois l'entourage », souligne Claude Leicher.

Cela signifie-t-il que le site Internet deuxiemeavis.fr est inutile ? L'avenir nous le dira. Selon ses promoteurs, il a été conçu pour les personnes qui ont difficilement accès aux soins (patients handicapés, expatriés…). On peut imaginer qu'il séduise également les habitants des déserts médicaux. Obstacle principal : son prix. Car pour le moment, contrairement à une consultation « classique » pour deuxième avis qui fait partie du parcours de soins, le recours aux services du site Internet n'est pas remboursé par la Sécurité sociale.

Une institution de soins peut-elle refuser une euthanasie entre ses murs ? La Libre Belgique du 3 janvier 2016

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La direction d’une maison de repos catholique, située à Diest (Brabant flamand), devra bientôt comparaître devant un tribunal pour avoir refusé l’accès à un médecin venu pratiquer une euthanasie, rapportaient samedi "De Morgen" et "Het Laatste Nieuws". Mariette Buntjens, 74 ans, en phase terminale d’un cancer métastasique, était résidente de la maison de repos Sint-Augustinus. En 2011, elle avait formulé une demande d’euthanasie. Après 6 mois de procédure, la dame qui entrait parfaitement dans les conditions de la loi de 2002 pour bénéficier de la mort douce, avait obtenu l’accord de son médecin, contresigné par un spécialiste. La direction du home a cependant refusé que le médecin pratique l’acte entre ses murs. La septuagénaire a dès lors dû être transportée à domicile pour que sa volonté soit respectée. La famille a depuis lors attaqué en Justice l’établissement dont le refus a eu pour conséquence d’aggraver encore les souffrances physiques et psychiques de la patiente. Après deux reports, le dossier sera examiné en janvier par le tribunal civil de Louvain.

Selon les avocats de la famille, les médecins ont le droit d’invoquer l’objection de conscience contre l’euthanasie, à la différence des institutions de soins. C’est aussi l’avis de Wim Distelmans, professeur de médecine palliative et actuel président de la commission de contrôle de la loi euthanasie, qui estime que la maison de repos n’avait pas le droit de refuser l’accès au médecin. D’après le professeur Distelmans, c’est la première fois qu’un tel cas est examiné devant un tribunal. Selon les médecins du réseau flamand LEIF (qui milite pour une fin de vie digne), les maisons de repos et de soins montrent souvent des réticences par rapport à l’euthanasie, indique le professeur Distelmans. « Les proches s’en offusquent généralement, mais ne se tournent pas vers la Justice car ils pensent que c’est inutile. » Si le tribunal considère que la maison de repos Sint-Augustinus est dans son tort, ce cas pourrait faire jurisprudence, estime le professeur de médecine palliative.

De son côté, la direction du home catholique estime être dans son droit. C’est aussi la position du nouveau primat de Belgique, Jozef De Kesel, qui s’était confié au Belang van Limburg, le week-end dernier. Dans cet entretien qui avait provoqué de très vives réactions au nord du pays, l’archevêque avait notamment déclaré que les hôpitaux catholiques avaient le droit de refuser de pratiquer l’avortement ou l’euthanasie. Le site Kerknet s’appuie sur le rapport parlementaire sur le projet de loi relatif à l’euthanasie (datant d’avril 2002) où il est stipulé, à la page 178, que « le président (Fred Erdman, SP.A, NdlR) conclut que, selon l’interprétation correcte du projet à l’examen, les institutions ont le droit d’interdire la pratique de l’euthanasie dans leurs murs ». Le rapport précise : « Aucun membre ne conteste cette interprétation du président. » Le porte-parole de la conférence épiscopale, Tommy Scholtès y voit la preuve que même si les institutions catholiques ne permettent pas l’euthanasie en leurs murs, elles respectent pleinement la loi.

Deux thèses s’affrontent donc. On attend donc avec intérêt la décision du tribunal civil de Louvain.

Strasbourg: la sixième édition du Forum Européen de Bioéthique se déroulera du 25 au 30 janvier 2016 LibeStrasbourg du 6 janvier 2016 par Tony Lorient

La sixième édition du Forum Européen de Bioéthique a pour thème : « Le normal et le pathologique : où placer le seuil entre les deux ? ». Elle réunira des experts, mais aussi les simples gens qui s’intéressent au sujet.

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Le Forum Européen de Bioéthique a été fondé à Strasbourg. La première édition a eu lieu en 2011 sous le thème de « Fin de vie et vieillissement ». Plus de 9000 personnes étaient présentes pour écouter et débattre avec les 130 intervenants. Le nombre de participants au forum augmente à chaque édition, poussant ainsi les organisateurs à trouver un sujet intéressant et convainquant à chaque fois. Le forum se fonde sur l’idée que nous avons tous des valeurs et il n’y a pas de valeurs supérieures à d’autres. Pour l’édition 2016, le thème qui a été choisi s’intitule « Le normal et le pathologique : où placer le seuil entre les deux ? ». Plusieurs questions tournent autour de ce sujet dont il faut prendre la peine de parler et d’en discuter.

Prendre le temps de se poser

Au Forum Européen de Bioéthique, les participants prennent le temps d’écouter les chercheurs avant de débattre avec eux. Il n’y a pas d’urgence, il n’y a pas de précipitation. Chacun peut s’exprimer librement, puisque c’est la seule règle du jeu qui est imposée par les organisateurs : le dialogue ouvert. Pour cette édition 2016, les organisateurs veulent particulièrement mettre l’accent sur la nécessité de se poser pour trouver la solution. Le monde évolue trop vite et il semble que personne ne veuille se poser de questions sur les changements qui se profilent au loin pour la génération actuelle et la génération future.

Qui sont les participants ?

Les organisateurs du forum européen de Bioéthique ont convié 135 experts pour son édition 2016. Pendant une semaine (du 25 au 30 janvier) ils vont exposer leurs idées. En tout, 35 débats auront lieu et 40 grands-témoins du public et 370 scolaires seront sollicités. Des questions intéressantes, comme « Vieillir beau et belle », « Y a-t-il des normes pathologiques » et la « Fin de vie » vont être abordées.

Un couple fait cloner son chien mort Ouest France du 29 décembre 2015 par Tatiana Lissitzky

Un couple de Britanniques s’est offert pour 90 000 euros deux clones de leur boxer Dylan, mort d’une tumeur au cerveau en juin

Un animal de compagnie (presque) immortel ? C’est désormais possible… La naissance récente d’un chiot cloné dans un laboratoire de Corée du Sud, à partir des cellules d’un chien mort, repousse les limites de la science et pose de nombreuses questions éthiques. Explications.

Vivre sans leur chien leur était totalement insupportable… Un couple de Britanniques s’est offert pour 90 000 euros deux clones de son boxer Dylan, mort d’une tumeur au cerveau en juin. Les deux chiots sont nés le 26 décembre et le 28 décembre à la Sooam Biotech Research Foundation, un laboratoire sud-coréen basé à Séoul, rapporte le journal anglais The Guardian. Le premier chiot, nommé Chance, est né par césarienne samedi 26 décembre, alors que Shadow a, lui, vu le jour par voie naturelle, lundi 28.

Une première mondiale controversée

C’est la première fois que des scientifiques réussissent le processus de clonage d’un animal, si longtemps après la mort de l’original. Laura Jacques et Richard Remde, les anciens maîtres de Dylan, ont attendu près de douze jours après la mort de leur petit compagnon, pour prélever un échantillon de sa peau en envoyer les échantillons de tissus, contenant l’ADN, en Corée du Sud. En moyenne, les cellules devaient jusqu’à présent être prélevées dans les cinq jours maximum.

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Les scientifiques isolent le noyau de la cellule (noyau qui détient la majorité de l’ADN, donc l’essentiel de l’information génétique) puis le transfèrent dans une cellule receveuse, pour l’implanter dans une femelle. Pour les propriétaires, ces deux naissances sont donc inespérées : « C’est un miracle, a insisté Laura, auprès du journal britannique The Telegraph. C’est un sujet controversé et beaucoup de gens ne seront pas d’accord avec cela, mais il y a également beaucoup de personnes qui voudraient pouvoir faire la même chose ».

Le clonage se banalise ?

La fondation Sooam Biotech, le seul laboratoire au monde à vendre des clones d’animaux à des particuliers pour presque 100 000 dollars, n’en est pas à sa première. Les scientifiques du centre revendiquent déjà le clonage de plus de 700 chiens, la plupart pour des clients américains. Sur son site, le laboratoire explique même la démarche à suivre si l’on veut cloner son animal de compagnie : « Quand votre chien meurt, ne le placez pas dans un congélateur. Enveloppez le corps dans une serviette de bain humide. Placez-le dans un réfrigérateur pour le garder frais. Vous avez approximativement cinq jours pour prélever les cellules avant de les envoyer au laboratoire ».

Mais pour le professeur Patrick Gaudray, généticien, directeur de recherche au CNRS et membre du comité consultatif national d’éthique, les promesses de ce laboratoire sud-coréen sont mensongères : « Rien ne prouve que l’animal aura le même pelage, car il y a une part de hasard, le patrimoine génétique ne fait pas tout ». Et si le couple espère retrouver le même caractère que leur chien décédé à travers leurs deux chiots, ils se trompent doublement : « Les gens pensent à tort que tout est dû à la génétique, mais c’est faux, le caractère est aussi déterminé par la génitrice, par la façon dont se passe la gestation et aussi par l’environnement », explique le professeur Gaudray.

De nombreuses questions éthiques

Et les pratiques de ce laboratoire posent également de nombreuses questions éthiques. « Il y a le problème du bien-être animal, les taux de réussite sont faibles et les animaux souffrent. Beaucoup meurent dans les premiers jours », poursuit le chercheur. Mais c’est aussi un problème moral d’utilisation de l’animal à son propre profit. « Car lorsque l’on prend un animal, on sait qu’il n’est pas éternel, rappelle Patrick Gaudray. Nous assistons à une banalisation dangereuse des biotechnologies, qui donne l’impression que l’on peut faire tout et n’importe quoi… » Et le professeur Gaudray n’est pas le seul à remettre en cause les pratiques de ce laboratoire. De nombreuses voix se sont élevées pour dénoncer les dangers du clonage reproductif à grande échelle. Le dirigeant du laboratoire, le Dr Hwang Woo-Suk, est également loin de faire l’unanimité parmi la communauté scientifique. L’homme controversé, a ainsi écopé de deux ans de prison dans son pays après avoir prétendu être parvenu à cloner un embryon humain. Un mensonge qui lui a valu d’être renvoyé de l’université de Séoul.

Des clones à la chaîne

Mais Hwang Woo-Suk ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. Le marché est plutôt lucratif. En partenariat avec le groupe de biotechnologie chinois Boyalife, sa fondation va ouvrir en Chine en 2016 le plus grand site mondial de clonage d’animaux. Le but ? Produire en série des chiens, des chevaux mais aussi des vaches pour répondre à la demande mondiale du marché de la viande en dupliquant des animaux sélectionnés pour la qualité de leur viande. « Une idée absurde, pour Patrick Gaudray, car la qualité de la viande n’est pas déterminée par la génétique. N’importe quel éleveur vous dira que le mode d’élevage et le bien-être animal sont des facteurs plus importants que le patrimoine génétique. Si les vaches sont entassées en bétaillère, la viande ne sera de toute façon pas bonne », conclut le scientifique.

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Fabriquer des organes humains dans des porcs ou des moutons, fiction ou réalité ? MIT Technology Review du 6 janvier 2016

Les chimères animales-humaines pourraient devenir une alternative au don d’organes. Mais cette nouvelle approche suscite des inquiétudes et nécessite de la prudence. Une chimère animale-humaine est obtenue en injectant des cellules humaines dans des embryons d’animaux âgés de quelques jours. Ces embryons sont ensuite implantés dans une femelle d’animaux d’élevage. Ces expériences peuvent être menées grâce aux avancées dans la biologie des cellules souches et les techniques de modification génétique : « En modifiant les gènes, les scientifiques peuvent modifier facilement l’ADN dans des embryons de porcs ou de moutons pour qu’ils soient incapable de former un tissu spécifique. Ensuite, en ajoutant les cellules souches d’une personne*, les scientifiques espèrent que les cellules humaines prendront le relais pour former l’organe manquant ». On obtient ainsi une chimère qui a « le corps d’un animal mais un ou plusieurs organes humains ». Pour l’heure, ces expériences n’ont été menées à leur terme qu’entre animaux.

Aux Etats Unis, le National Institute of Health a pour sa part annoncé en septembre 2015 qu’« il ne financerait pas d’études impliquant des chimères animales-humaines à moins que ces études soient passées au crible pour leurs implications sociales et scientifiques ». Toutefois des centres américains de recherche ont soulevé d’autres financements pour développer des tissus humains à l’intérieur de porcs et de moutons « afin de créer des cœurs, des foies et d’autres organes pour la transplantation ». Le MIT technology review estime ainsi que « plus de 60 portées de chimères porc-humain ou mouton-humain ont été créées au cours des douze derniers mois aux Etats Unis ». Ces expériences « n’ont pas encore été décrites dans des travaux scientifiques et aucune des chimères n’est arrivée à terme ». « Nous ne voulons pas encore développer des chimères dans des stades avancés pour éviter la polémique », a déclaré Pablo Ross**, « mais il y a déjà des questions qu’on doit traiter. Pour le moment, la contribution des cellules humaines dans des animaux est de 3 à 5 %. Mais qu’est ce qui se passe si on implante 100 % du cerveau humain ? Qu’est ce qui se passe si l’embryon, qui se développe, est majoritairement humain ? » *Les chercheurs utilisent des cellules iPS, c'est-à-dire des cellules du patient reprogrammées, permettant ainsi d’éviter tout rejet de greffe.

**Vétérinaire et biologiste en développement de l’université de Californie.

A Strasbourg, le forum de bioéthique se penchera sur la frontière entre le "normal" et le "pathologique" Dernières Nouvelles d’Alsace du 12 janvier 2016 par Christian Bach

Le prochain Forum européen de bioéthique, sixième du nom, explorera du 25 au 30 janvier la frontière entre le "normal" et le "pathologique".

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Une trentaine de débats et de "vis à vis" confrontant des experts d'avis différents, donneront l'occasion au grand public de participer à la réflexion sur cette délicate question. Les rendez-vous du forum sont d'accès libre, ils peuvent aussi être suivis en ligne.

Après la fin de vie et le vieillissement, thème de la première édition en 2011, le cerveau, l'argent et la santé, le Forum européen de bioéthique de Strasbourg examine la question de la frontière entre le "normal" et le "pathologique". Une thématique qui, comme les précédentes, est au cœur de la question éthique et croise les champs médical, politique, moral.

Le professeur Israël Nisand, qui est avec Nadia Aubin à l'origine du forum, est venu redire ce mardi matin l'objectif de ce rendez-vous : « Nous invitons des scientifiques reconnus dans leur domaine, mais qui savent transmettre. Là, les experts ne sont pas entre eux, mais avec le public et avec la nécessité de transmettre des choses compliquées ». Nadia Aubin, la directrice, parle de la nécessité « d'échapper à la parole des experts, de ne pas proposer un congrès, mais un lieu où le public prend la parole et participe au débat ». Le généticien Jean-Louis Mandel énonce la complexité du sujet de cette année en une phrase : « La frontière entre le normal et le pathologique est mouvante dans le temps et pour chacun ». Autant dire qu'il n'y aura probablement pas de réponse définitive, voire pas de réponse du tout, aux questions posées pendant les six jours que dure le forum.

Lors des deux dernières éditions, quelque 20 000 personnes ont assisté aux débats à la salle de l'Aubette, où à la librairie Kléber, deux lieux situés place Kléber à Strasbourg. L'Aubette accueille les débats très grand public, la librairie se prête plutôt aux débats d'experts. Dans l'un et l'autre cas des retransmissions vidéo sont mises en place avec des partenaires. Les temps forts du forum génèrent aussi des dizaines de milliers de consultations en ligne. Comme par le passé, on retrouvera à la tribune des chercheurs, des médecins, des philosophes, des écrivains, mais aussi des grands témoins du monde associatif et des lycéens, souvent "ambassadeurs" de leur classe.

Cette dimension citoyenne du forum est assumée et revendiquée par ses organisateurs ; elle justifie aussi le soutien des collectivités. Sur un budget annuel de 230 000 euros ces dernières années, le conseil régional d'Alsace a versé 50 000 euros, Ville de Strasbourg et Eurométropole 180 000 euros. Un soutien public vital, mais qui n'a rien d'excessif ...si l'on en croit les organisateurs du forum qui sont contraints à limiter les sollicitations des intervenants à la France pour l'essentiel, à l'espace francophone plus exceptionnellement. Les déplacements et la traduction ont des coûts non négligeables.

La maladie mentale (« les statistiques de la bipolarité ont été multipliées par cinq ces dernières années »), la médecine prédictive et le diagnostic prénatal, la démence... figurent parmi les thèmes qui seront abordés. Le philosophe André Comte-Sponville traitera par exemple de la question suivante : « Le malheur est-il une maladie ? » ; lors de la conférence inaugurale Roger Pol-Droit interviendra sur le thème : « Y a-t-il des normes pathologiques » (25 janvier, 18h, salle de l'Aubette). La première matinée sera consacrée au philosophe et médecin Georges Canguilehm (1904-1995), auteur d'une thèse de doctorat en médecine intitulée "Le normal et le pathologique", présentée en 1943 à l'Université de Strasbourg réfugiée à Clermont-Ferrand.

Le Forum européen de bioéthique a un hashtag sur Twitter #FEBioethique, une page de fans sur Facebook (Forum européen de bioéthique), une chaîne sur Youtube FEBioethique et un site internet, www.forumeuropeendebioethique.eu/.

Les laboratoires jouent leurs gammes Le Monde du 13 janvier 2016 par Chloé Hecketsweiler

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Les fabricants misent sur la multiplication des dénominations pour doper l’automédication, au risque de tromper le consommateur

Un spot pour le Doliprane au milieu des jingles de Noël et des publicités pour les jouets. Voilà ce que les Français ont pu découvrir, fin 2015, sur leurs petits écrans – une première pour cet incontournable des pharmacies. Commercialisé depuis plus de cinquante ans, le Doliprane était jusque-là interdit de publicité, comme tous les médicaments disponibles sur prescription et remboursés par la Sécurité sociale. Afin de contourner cet obstacle, Sanofi, son fabricant, a eu recours à une astuce : il a lancé en octobre une nouvelle gamme d’antalgiques en accolant à qsa célèbre marque des suffixes tels que « tabs », « caps », « orodoz » ou « liquiz ».

Tous contiennent le même principe actif que le Doliprane – du paracétamol – mais ils sont vendus sans ordonnance et ne sont pas pris en charge par l’Assurance-maladie. Cela donne le droit à Sanofi d’en faire la promotion et d’en fixer librement le prix. La nuance est subtile, mais rien dans le code de la santé publique n’interdit ou n’encadre cette pratique. « Le développement des "marques ombrelles" va dans le sens de l’automédication responsable parce qu’elles permettent une identification rapide du produit et de l’aire thérapeutique par le patient. La marque est un gage de réassurance, assure le fabricant. Cette gamme vient compléter la gamme remboursable existante. L’idée n’est pas de substituer une offre à une autre, mais de compléter l’éventail de solutions contre la douleur ».

Tous les laboratoires se sont engouffrés dans la brèche, exploitant leurs médicaments les plus célèbres. Développant des gammes de plus en plus étendues, Urgo (avec Humex) et Johnson & Johnson (avec Actifed) se dispute le marché très lucratif du rhume. Le Britannique Reckitt Benckiser a, lui, développé le filon des pastilles Strepsils et l’Allemand Boehringer celui des comprimés Lysopaïne. A partir de sa pommade Bepanthen, souvent prescrite pour apaiser la peau des bébés, l’Allemand Bayer a lancé une série de crèmes cosmétiques. Une stratégie également suivie par Reckitt Benckiser avec sa Biafine, bien connue pour soulager ses coups de soleil.

Surdosage et effet cocktail

Le développement de ces marques ombrelles va de pair avec celui de la publicité auprès du grand public, à grand renfort de sites Internet et de spots télévisés. Afin d’éviter les dérapages, les campagnes font depuis 2011 l’objet d’un contrôle a priori par l’Agence de sécurité du médicament (ANSM), qui se traduit par l’attribution d’un visa délivré pour deux ans. En 2015, près de 1500 publicités destinées au grand public ont été examinées : les deux tiers ont été amendés et 6 % refusées. « Nous nous opposons aux campagnes qui assimilent le médicament à un produit de consommation courante. Ainsi, l’aspect visuel est un élément important : le fait de faire apparaître une fraise de taille importante dans une publicité n’est pas admis. En revanche, la mention de l’arôme "fraise" est acceptée », explique Carole Le Saulnier, directrice juridique de l’ANSM.

Le fabricant ne fait pas non plus ce qu’il veut avec le packaging. « L’étiquetage doit nous être soumis et refléter, pour les médicaments non soumis à prescription médicale, les indications figurant dans l’autorisation de mise sur le marché. Ils n’ont pas le droit de faire leur shopping en ne mentionnant par exemple que les maux de tête et pas la fièvre », ajoute Madame Le Saulnier. Et pas question d’orner la boîte de dessins de fruits pour séduire les enfants. Les industriels flirtent cependant souvent avec la ligne jaune. Ainsi UPSA, dont la campagne avait reçu le feu vert de l’ANSM, a passé les bornes. Diffusées à la rentrée 2015, ses affiches vantaient les atouts de l’Efferalgan goût « cappuccino » ou « vanille-fraise » et mettant en scène un enfant ont suscité un tollé. Placardées dans les couloirs du métro parisien, elles ont dû être retirées, et UPSA – qui n’a pas souhaité répondre aux questions du Monde – doit maintenant revoir sa copie.

Autre source d’inquiétude pour les autorités : le risque de surdosage et d’effet cocktail. Des molécules différentes étant commercialisées sous la même marque, il est plus difficile pour le patient de s’y retrouver ? Ainsi, Humex Rhume, Dolirhume et Actifed rhume contiennent tous les trois du paracétamol et de la pseudo-éphédrine.

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Cette molécule a un effet sur la sensation de nez bouché mais est déconseillée chez les personnes hypertendues ou ayant des antécédents cardiovasculaires. Celles-ci sont-elles suffisamment averties ? L’ANSM ne dispose pas de données de pharmacovigilance spécifiques pour les marques ombrelles, mais les pharmaciens s’en inquiètent. « Il faudrait un pictogramme sur l’emballage pour que le patient repère immédiatement les principes actifs notoires », insiste François-Loïc Pichard, pharmacien à Angers.

Le risque de confusion est d’autant plus important qu’on trouve sous une même marque des médicaments qui ont reçu une autorisation de mise sur le marché avec des indications précises et des produits considérés comme des « dispositifs médicaux », encadrés par une législation beaucoup plus souple. Si Bepanthen est un médicament, ses déclinaisons « Vergeture », « Sensicalm » (eczéma) ou « Cica » (cicatrisation) ne le sont pas.

Prêts pour les grandes surfaces

La gamme Biafine est encore plus étendue, avec des crèmes pour le visage, le corps, les bébés, bien loin de la pommade blanche et austère d’origine. Le sirop contre la toux Toplexil de Sanofi est un médicament, mais pas le Toplexil Phyto, à base de plantes et de miel. « Il y a clairement une surpromesse », s’agace François-Loïc Pichard. Le laboratoire français a aussi remis au goût du jour ses pastilles Solutricine : exit la formule avec antibiotiques soupçonnée de favoriser l’apparition de résistance. La version « médicament » contient désormais un simple anesthésique local, et la version « dispositif médical », baptisée Solutricine Acérola, seulement de la vitamine C. Est-ce trompeur pour le consommateur ? « Nous sommes très vigilants sur ce sujet et nous souhaitons le rappeler aux laboratoires », indique Carole Le Saulnier.

De leur côté, certains pharmaciens y voient un moyen pour les laboratoires de commencer à installer leurs marques dans les rayons des grandes surfaces. « Ils s’en défendent, mais il est évident que la création de ces gammes, dont le prix est libre, facilitera le passage en grande distribution », estime François-Loïc Pichard. Le potentiel en France est alléchant : la dépense moyenne par habitant pour les médicaments en vente libre est de 32,10 euros par habitant, contre 42,40 euros en Europe.

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SOCIÉTÉ

Les « PMA clandestines », une réalité en France Le Monde du 29 décembre 2015 par Julia Pascual

Des lesbiennes privilégient l’insémination artisanale, afin de pouvoir recourir à un donneur de sperme connu

La procréation médicalement assistée (PMA) n’est pas ouverte aux femmes célibataires ou en couple de même sexe en France, bien que la promesse figure dans le projet du PS pour 2012 et que François Hollande s’y soit déclaré favorable en février 2012 dans un entretien. Le gouvernement a renoncé à cette mesure après la mobilisation de la Manif pour tous contre le mariage gay en 2013. En Europe, la PMA est ouverte à toutes depuis 1988 en Espagne, 1994 aux Pays-Bas ou encore 2007 en Belgique. Sans que l’on puisse déterminer leur nombre, des couples de Françaises se déplacent donc à l’étranger pour concrétiser des projets de grossesse. Mais la démarche est coûteuse (quelques milliers d’euros) et nécessite souvent plusieurs voyages.

« On n’est pas des parias, on veut avoir des enfants en France ». Virginie et sa compagne qui ont requis l’anonymat – réfléchissent à leur projet de famille depuis plus d’un an. Les deux femmes se sont mariées il y a quelques mois mais n’ont pas le droit de recourir à une insémination artificielle avec don de sperme en France. Cette technique de procréation médicalement assistée (PMA) leur est en revanche ouverte en Belgique ou en Espagne, mais Virginie « ne se voit pas dire à [son] enfant qu’il n’a pas de papa. On veut qu’il puisse connaître son identité et le rencontrer s’il le souhaite ». Alors, avec sa compagne, elles ont entrepris de trouver un donneur pour réaliser une insémination artisanale. On est incapable de dire combien de personnes elle concerne, mais l’insémination artisanale est une réalité en France. Dans une enquête sur les familles homoparentales publiée en 2014 dans la revue Socio-Logos, 14 % (55 sur 405) des mères ont déclaré qu’elles y avaient eu recours. « Concevoir un enfant avec l’aide d’un donneur connu devient le deuxième choix derrière la PMA », relevait l’étude.

C’est ainsi qu’il y a près d’un an, Marie et sa compagne ont eu un garçon. Le couple a fait appel à un « ami proche » qu’elles continuent de voir « très régulièrement ». Marie justifie : « On souhaitait que l’enfant ait un père. Mais pas un père qui reconnaisse sa paternité. Ce n’est pas une famille à trois ». A son fils, Marie parle déjà de son « super-papa donneur ». « On lui dit aussi que le jour où il souhaitera passer du temps avec son papa, il pourra. C’est important qu’il sache qu’il a le choix ». De son côté, Virginie n’en est « qu’au tout début » de sa recherche de donneur. Elle a contacté l’association homoparentale Les enfants d’arc-en-ciel et se renseigne sur des sites en ligne : « On est tombé sur des rigolos : un homme qui voulait coucher avec un couple de lesbiennes par exemple. A chaque prise de contact, c’est beaucoup de discussions pour mettre les choses très au clair ». Virginie croit avoir le début d’un « contact sérieux » avec un homme en couple, déjà père de famille, qui agit en « soutien de la cause ». « Il va falloir se protéger mutuellement autant que possible, s’assurer qu’il renonce à ses droits en tant que père et lui assurer qu’on ne lui demandera pas de pension alimentaire ou que l’enfant ne prétendra pas à un héritage. Juridiquement, il n’y a pas de cadre. De toute façon, il n’y a rien de légal ».

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« Tout se passe sous le manteau », confirme l’avocate Caroline Mécary, spécialiste des droits des personnes homosexuelles. Ainsi, Stéphanie, qui vit en banlieue toulousaine, raconte avoir réservé une chambre d’hôtel dans laquelle elle et le donneur se croisaient. « Je laissais un gobelet dans la chambre et je m’inséminais toute seule avec une pipette de Doliprane, se souvient cette presque trentenaire. Pour ma première fille, j’y suis allée quatre ou cinq fois. Pour la deuxième, ça a marché du premier coup ».Stéphanie explique qu’elle et le donneur ont « signé un contrat, qui n’a qu’une valeur morale. Il a écrit un petit mot aux enfants, en leur expliquant pourquoi il avait fait ce choix ». Chaque année, au moment des fêtes, elle lui envoie un mail avec « des nouvelles des enfants ». Lui se « dévoile peu. J’aurais voulu qu’il me donne une photo mais il n’a pas voulu ».

Derrière le refus du don de sperme anonyme, la psychanalyste Geneviève Delaisi de Parseval, auteur de famille à tout prix (Seuil, 2008), décèle un « souci de transparence d’historicité ». « Je sens cela comme une demande sociétale, ou en tout cas éthique, qui va de pair avec le refus de l’accouchement sous X et le fait que les enfants adoptés en sachent de plus en plus à propos de leurs origines ».

Cécilia et Marie, mères d’un garçon de six ans et de jumelles de quatre ans, ne parlent pas du donneur comme d’un « père » et ne souhaitent pas que leurs enfants puissent le contacter dans le futur. Lorsqu’il a été demandeur de photos, à Noël dernier, les deux femmes ont refusé : « On lui avait envoyé des photos des enfants bébés mais là, on n’a pas souhaité ». Si elles n’ont pas eu recours à un don de sperme anonyme à l’étranger, c’est par conviction : « Pourquoi faudrait-il suivre un parcours médicalisé, se cacher, aller à l’étranger, payer pour quelque chose de naturel et normal ? Ça nous paraissait plus sain ainsi ».

« Beaucoup de couples espéraient pouvoir avoir recours à la PMA en France, observe Geneviève Delaisi de Parseval. Et parmi les déçus, il y a ceux qui se sont mariés pour pouvoir avoir un enfant dans la légalité ». Aujourd’hui, le recours à l’insémination artisanale place les parents dans une insécurité juridique. « Un peu à l’image des couples divorcés, un paquet d’histoires finissent devant les tribunaux », observe Gwendoline Desarménien, de l’Association des familles homoparentales.

L’avocate Caroline Mécary a défendu plusieurs clients devant le juge aux affaires familiales. A l’image d’Erwan, un Parisien de 53 ans qui a dit « oui » à une amie et sa compagne en 2007. « Mon projet, c’était d’être le père de l’enfant, relate-t-il aujourd’hui. On a entendu ce qu’on voulait entendre chez l’autre. Moi, je l’ai fait à la confiance ». Erwan reconnaît l’enfant avant la naissance mais sa présence en tant que père a d’emblée relevé plus du « symbolique » qu’autre chose. « Jusqu’aux cinq ans de ma fille, je la voyais de temps en temps, dans un parc, de telle heure à telle heure ». En 2012, il part s’installer en province : « Je n’ai plus donné de nouvelles pendant quelques mois et, débit 2013, j’ai refait signe de vie ». Le contact se fait mal, il demande à voir sa fille mais essuie plusieurs refus… jusqu’au « coup de flip » : « Je me suis dit que je ne la reverrais plus ».

S’ensuit un long parcours judiciaire, jusqu’à l’obtention, en mai, « d’un droit de visite, d’hébergement et de l’autorité parentale conjointe ». Les rapports sont demeurés conflictuels avec les deux mères : « On passe par un espace de rencontre, ça donne lieu à des discussions avec des psychologues. Avec ma fille, ça se passe bien. Je la vois tous les quinze jours. Elle m’appelle par mon prénom. Sa mère ne m’a pas du tout identifié comme le père ». Erwan referait les choses différemment, tout comme Thomas et David. Ce couple d’hommes a eu un enfant il y a sept ans, Ruben, avec une amie célibataire « qui arrivait sur ses 40 ans », « Il y a des tas de choses qu’on n’avait pas anticipées », reconnaît David. Des degrés d’implication différents, des envies différentes… et ce jour où « elle n’a pas ramené l’enfant ». Après deux ans de bataille juridique, David et Thomas ont obtenu la résidence alternée. Ils ont lancé un projet de deuxième enfant. Mais cette fois, aux Etats-Unis, avec une mère porteuse et une donneuse d’ovules. Ils ne veulent pas reprendre de risque.

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Les médecins dans une position inconfortable

Cinq ans de prison et 75 000 euros d’amende. C’est la peine qu’encourt celui ou celle qui serait tenté « d’assister à des activités d’assistance médicale à la procréation » en dehors du cadre défini par la loi, c’est-à-dire un couple constitué d’un homme et d’une femme. En outre, le code de la santé stipule que « l’insémination artificielle par sperme frais provenant d’un don et le mélange de spermes sont interdits ».

Pourtant, dans le secret de leurs cabinets, il n’est pas rare que des médecins aient connaissance de projets d’homoparentalité qui ne cadre pas avec la législation française. La plupart du temps, des patientes leur demandent d’accompagner des parcours de PMA réalisée à l’étranger, à travers des prescriptions médicales, notamment d’examens ou de stimulation ovarienne. La plupart des professionnels assument ce rôle de coordination. Une étude publiée dans la revue d’épidémiologie et de santé publique, en août 2014, montrait aussi que parmi les médecins consultés par des couples homosexuels souhaitant devenir parents, 48,5 % l’avaient été, entre autres, « pour des conseils en vue d’inséminations réalisées par la femme elle-même ». L’échantillon de praticiens ayant répondu à l’étude est trop faible pour qu’il soit considéré comme représentatif, mais il pose une réalité.

Sonia Eguavoen, sage-femme libérale à Paris, a déjà été sollicitée dans le cadre de projets d’insémination artisanale : « Souvent, les femmes sont bien renseignées. Je leur explique comment calculer leur cycle, voir à quel moment elles ovulent. On aborde aussi la question des infections sexuellement transmissibles. Le matériel n’est pas technique, il suffit d’une seringue ou d’une pipette ».

« Un paradoxe qui confine à l’absurdité »

Une gynécologue parisienne, inscrite sur une liste de praticiens « gay friendly », a surtout été amenée à suivre des parcours de PMA à l’étranger, mais évoque un couple de femmes qui souhaitaient réaliser une insémination artisanale : « Elles avaient une réflexion tout à fait aboutie et avaient besoin d’un regard médical. Je me suis assurée qu’elles ne mettraient pas le sperme dans le cul-de-sac vaginal [fond du vagin qui entoure le col de l’utérus] ». Le médecin évoque toutefois une situation « compliquée ». Elle a demandé un avis au juriste de son assurance professionnelle, qui a estimé que la continuité des soins devant être assurée, le suivi gynécologique ou obstétrique de ces femmes ne la plaçait pas dans l’illégalité.

Le Dr Pierre Jouannet, membre de l’Académie nationale de médecine et rapporteur de l’étude publiée dans la Revue d’épidémiologie et de santé publique, parle d’un « paradoxe qui confine à l’absurdité » : « On a permis à ces couples de se marier, d’adopter, mais les femmes qui souhaitent procréer pour devenir mères vont à l’étranger ou font des inséminations artisanales en France, et pas dans les meilleures conditions éthiques et sanitaires ». Il poursuit : « Toutes proportions gardées, cette situation ressemble à celle de l’avortement il y a quarante ans. On interdit aux femmes d’accéder à un acte auquel elles ont recours de toute façon. De plus, elles demandent à leurs médecins de les aider ».

Michael Schumacher : deux ans après, il ne pourrait « ni marcher ni communiquer » Le blog de Jean-Yves Nau du 29 décembre 2015

Avec le temps, que reste-t-il du secret médical ?

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Mardi 29 décembre 2015 : Le Parisien/Aujourd’hui en France : « Schumacher, deux ans déjà… » L’état de santé de Michael Schumacher est stable depuis un an. Mais son état reste préoccupant. Le champion allemand est soigné dans sa résidence suisse, où une douzaine de médecins se relaient à ses côtés 24 heures sur 24 … ». On se souvient : Michael Schumacher, 45 ans, a violemment heurté un rocher de la tête, le 29 décembre 2013, en skiant en compagnie de son fils et d’un groupe d’amis à Méribel (Savoie). Lors de son admission au CHU de Grenoble, il souffre de lésions crâniennes « diffuses et sérieuses ».

4 avril 2014, communiqué de presse : « Michael fait des progrès sur son chemin. Il montre des moments de conscience et d’éveil. Nous sommes à ses côtés pendant ce long et difficile combat, avec l’équipe du CHU de Grenoble, et restons confiants » écrit Sabine Kehm, porte-parole de la famille. Pas plus de détails sur l’état de santé de l’ancienne star de la Formule 1. « C’est absolument nécessaire pour respecter l’intimité de Michael et de sa famille, et pour laisser travailler l’équipe médicale en toute sérénité ». Juin 2014 : On vient d’apprendre que le dossier médical du champion a été volé lors de son transfert de Grenoble au CHUV de Lausanne. Dès le premier jour de l’hospitalisation au CHU de Grenoble du champion allemand diverses tentatives de violation du droit à l’image ou du secret médical avaient été déjouées. La direction de l’établissement hospitalier et les membres des équipes soignantes avaient ensuite réussi à maintenir un secret absolu. Dès son transfert à Lausanne le service de presse du CHUV avait fait savoir que l’établissement observerait la même politique se refusant à tout commentaire qui pourrait donner le moindre indice sur l’état de santé du célèbre patient allemand, par ailleurs résident suisse.

Le journal suisse Blick, citant la société ambulancière qui a effectué le transport de Grenoble à Lausanne, assure que Michael Schumacher était conscient pendant le trajet et avait, la plupart du temps, les yeux ouverts. Ce transfert avait été organisé par la famille dans le plus grand secret, utilisant notamment un faux nom. Les ambulanciers avaient dû remettre leurs téléphones portables. Toujours selon Blick le visage de Schumacher aurait beaucoup maigri. Et s’il n’a pas parlé le malade aurait communiqué avec les ambulanciers par des hochements de tête. Une information qui avait aussitôt été abusivement interprétée comme une sortie du coma de l’ancien champion automobile allemand. Pour la BBC le nouveau combat du champion allemand est désormais le respect de sa privacy. La BBC ne nous dit pas combien de temps durera ce combat. 29 décembre 2015, Le Parisien . Le correspondant du quotidien en Allemagne (Alain Jouteau) nous dit que l’état de santé de l’ancien champion est stable depuis un an. Pour autant il reste préoccupant. Il ne peut ni marcher ni communiquer. Il est toujours dans sa résidence suisse située sur les bords du lac Léman. Il pèse à peine 45 kg « lui qui en pesait vingt-cinq de plus avant son terrible accident »). En mai dernier sa manageuse générale avait parlé d’une amélioration de l’état de santé. Depuis sept mois, aucun communiqué officiel.

« Une bonne douzaine de médecins et kinésithérapeutes se relaient pour prodiguer à Schumi les meilleurs soins possibles 24h sur 24, écrit Le Parisien. Corinna Schumacher doit ainsi payer 500 000 euros par mois pour permettre à son mari de survivre. S’il est vrai qu’une Ferrari FFX Evoluzione personnelle a été mise aux enchères à 11,2 millions d’euros la famille Schumacher possède encore un matelas financier confortable grâce aux quelques 715 millions d’euros de gains acquis au cours de la carrière de pilote de Michael ». Pour le reste la résignation gagne. L’ami Flavio Briatore « ne souhaite pas voir Michael pour le moment ». Il préfère garder « l’image qu’il avait de lui avant ». Le neurologue et consultant Peter Hamlyn « ne se montre pas plus optimiste ». « Peu à peu se pose la question de la survie, dit-il. Ce sont des montagnes russes. Le soutien des proches est très important. »

C’est très précisément le message tenu, en France dans l’affaire Vincent Lambert, par l’Union nationale des associations de famille de traumatisés crâniens et cérébro-lésés.

Avec le temps, reste le soutien des proches.

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Les géants du Web à la chasse aux ADN Libération du 3 janvier 2016 par Lucile Morin

Les avancées de la génétique conduisent les grandes sociétés comme Google à investir massivement. Objectif affiché : prévenir les maladies. Mais à quel prix ?

Pour la nouvelle année, offrez un test ADN ! 23andme, champion des ventes de tests ADN grand public, fait des prix de groupe ! En France, les analyses génétiques dépendent d’une prescription médicale. Mais sur Internet, on trouve des tests génétiques de salive censés exprimer en pourcentage notre prédisposition à développer un jour une maladie dégénérative. Depuis 2013, les informations liées aux cancers, aux maladies cardio-vasculaires, au diabète ou à Alzheimer, jugées trop sensibles par la Food and Drug Administration (FDA) américaine, n’étaient plus communiquées par 23andme, une filiale de Google, alors cantonnée aux recherches généalogiques. Mais c’était sans compter sur la pugnacité de sa directrice, Anne Wojcicki, l’ex-femme de Sergueï Brin, cofondateur du moteur de recherches. En octobre, elle a obtenu de la FDA l’autorisation de commercialiser de nouveaux tests capables d’identifier les porteurs d’une mutation génétique potentiellement transmissible à leur descendance, comme la mucoviscidose. Le service coûtera deux fois plus cher qu’avant, soit 180 euros. 36 pathologies figurent au catalogue. Mais les chercheurs pourront exécuter des requêtes sur plus de 1 000 maladies référencées dans cet immense magasin génomique déjà riche d’un million de profils. Et dans l’avenir, la généticienne ne désespère pas de faire plier la FDA sur la question des maladies qui fâchent.

Libéralisation

D’après Jay Flatley, patron d’Illumina, leader californien du séquençage et de la fabrication de matériel, ce marché émergent pourrait atteindre 20 milliards de dollars ces prochaines années. Un marché qui intéresse au plus haut point Google, Apple, Facebook ou Amazon (Gafa), qui ont fait de l’exploitation des données le cœur de leur activité. Comme Anne Wojcicki, dont il est partenaire, Jay Flatley milite pour la libéralisation des données génétiques. Il participe au financement de Helix, une sorte d’AppStore du séquençage low-cost, où l’exome (une partie du génome) de chaque client, séquencé par Illumina, sera « monétisé » auprès de ses partenaires : des développeurs d’applications liées au sport et au bien-être, comme les laboratoires américains Lab Corp ou la célèbre clinique Mayo, un réseau hospitalo-universitaire basé à Rochester dans le Minnesota et classé en 2015 meilleur établissement de santé américain par le magazine US News & World Report.

« Oligarchies »

Avec les progrès fulgurants des techniques de séquençage du génome, devenues plus rapides et infiniment moins coûteuses (1 000 euros environ), les données génomiques ont acquis une véritable valeur marchande, exploitée par les géants du numérique. « La recherche médicale dans ce domaine est porteuse d’avancées considérables et s’appuie sur la lecture du génome de millions de personnes, fait observer la juriste Isabelle Falque-Pierrotin, directrice de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil). Les données sont envoyées dans un "nuage" très opaque, vers les Gafa. Nous ne sommes pas en position de faire valoir nos droits. Qui aura réellement accès à l’information sur nos gènes ? » s’inquiète-t-elle. Quand on sait qu’un génome humain ne représente qu’une centaine de gigaoctets de données brutes (et 3 gigas une fois traité), on comprend mieux pourquoi les Gafa, devenus les « oligarques » du cloud computing, se sont imposés comme des partenaires incontournables de la médecine prédictive. L’Institut national du cancer américain va confier 2,6 pétaoctets de données de son « Atlas du génome du cancer » aux plateformes Amazon Web Service et Google Genomics, moyennant 18 millions d’euros. Les chercheurs trouveront sur ces sites dédiés une incomparable puissance de calcul et de stockage, un service d’analyse, de partage de données et d’expérimentations virtuelles.

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Mais les plateformes des Gafa n’entendent pas se limiter à ce rôle de simple hébergeur. Elles encouragent leurs utilisateurs à participer collectivement à la grande aventure de la science. En quelques semaines, Facebook a récolté 5 000 échantillons de salive dans le cadre de l’enquête « Gene for Good » menée depuis janvier 2015 par l’université du Michigan. Elle suivra aussi l’historique de santé et les habitudes de vie des participants à qui est promise une confidentialité totale. En échange, ceux-ci espèrent bénéficier des thérapies innovantes issues de ces recherches. Life Sciences et Calico, deux filiales biotech d’Alphabet (holding qui coiffe désormais l’ensemble des activités de Google), organisent un ratissage de gènes tous azimuts. Grâce au programme « Baseline Study », le géant d’Internet qui rêve de « tuer la mort » ou du moins de la faire reculer dans des proportions jamais vues dessine le profil génétique de l’humain en bonne santé grâce à des milliers de cobayes bénévoles connectés à un tracker médical, tandis que la société partenaire Ancestry DNA trace de tentaculaires arbres généalogiques à partir des gènes d’un million de clients. En rejoignant l’Alliance mondiale pour la génomique et la santé, un consortium d’institutions prestigieuses dédié au partage sécurisé des données génomiques, Google a assis sa légitimité dans ce secteur en pleine effervescence. Et son fonds de placements, Google Ventures, investit des millions dans les thérapies et dispositifs de santé innovants. La firme de Mountain View se rend également indispensable aux Big Pharma (« géants pharmaceutiques »), dont les recherches sur les nouvelles cibles médicamenteuses et de biomarqueurs de diagnostic nécessitent de larges panels.

Algorithme

Pour ses recherches sur les maladies inflammatoires, Pfizer, le numéro 1 mondial de la pharmacie qui vient de fusionner avec Allergan pour 150 milliards d’euros, sondera les gènes de 650 000 clients consentants de la filiale du moteur de recherches 23andme. Le labo compte également vendre les données génomiques de 3 000 personnes atteintes de la maladie de Parkinson à Genentech-Roche. « Pour entrer dans le numérique, les Big Pharma se prostituent ! » ironise Laurent Alexandre, patron de la société belge de séquençage DNA Vision. En médecine générale, la génomique pourrait à terme devenir un outil de diagnostic ordinaire. C’est sur l’algorithme moulinant des millions de données de santé que le médecin s’appuiera pour prédire la nôtre. Et c’est encore l’algorithme qui l’aidera à choisir le protocole thérapeutique le plus adapté. De nombreux pays, comme les Etats-Unis, la Chine, le Royaume-Uni, le Danemark ou l’Algérie, ont intégré le séquençage à l’échelle d’une population aux programmes de santé publique. On y organise la collecte et le stockage d’échantillons, prélevés sur plusieurs millions de volontaires. « Le séquençage de notre génome va se banaliser, annonce Laurent Alexandre. Il sera corrélé à notre dossier médical. Si l’on veut être soigné, il faudra passer par ces systèmes-là. Mais les gigantesques volumes d’informations générés vont induire une médecine industrialisée et un transfert de la valeur médicale vers la Californie. La puissance des "plateformistes" du Web est énorme… En médecine, elle sera de même nature. »

Conseils d’hygiène de vie

Dans le but avoué de nous responsabiliser face à notre santé prédictive, va-t-on bafouer le droit de ne pas savoir ? Le génome deviendra-t-il un gadget, un bien de consommation monnayable ? Au risque d’ouvrir la voie à la discrimination génétique ? La société d’assurance maladie sud-africaine Discovery, qui assure plus de 4 millions de personnes dans le monde, vient de signer une alliance avec Human Longevity Inc., l’un des plus importants laboratoires de séquençage au monde. A sa tête, Craig Venter, pionnier de l’ADN, qui veut séquencer le génome entier d’un million de personnes d’ici à 2020. Pour atteindre ce but, il fera une remise aux assurés du programme « Vitalité » de Discovery : 250 euros le génome ! Les analyses seront accompagnées de conseils d’hygiène de vie. La législation sur l’usage des informations génétiques dans les calculs de prime d’assurance varie d’un pays à l’autre. Autorisé au Canada, mais aussi en Angleterre ou aux Pays-Bas à partir d’un certain montant, il est interdit aux Etats-Unis, en France comme en Afrique du Sud… Mais pour combien de temps ? Le PDG de Discovery, Jonathan Broomberg, confiait récemment au Financial Times être conscient qu’en cas de modification de la loi, ces tests pourraient influer sur « l’assurabilité » de ses clients.

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Mais il est convaincu qu’une incitation financière serait de nature à les rendre plus vertueux, en pratiquant par exemple une activité sportive. Cette perspective fait bondir Patrick Gaudray, directeur de recherche au CNRS et membre du Comité consultatif national d’éthique : « Nous commençons à peine à comprendre le rôle des gènes dans les pathologies. La prédiction médicale est à mi-chemin entre le sérieux et la boule de cristal ! Si on nous découvre une prédisposition aux maladies cardio-vasculaires, va-t-on espionner le compartiment beurre de notre frigo connecté pour calculer notre prime d’assurance ? » De fait, les assureurs français Malakoff Médéric et Axa se renseignent déjà en temps réel sur l’état de santé et l’activité physique de leurs assurés volontaires au moyen d’objets connectés de quantified self (« mesure de soi »).

A l’échelle de la planète, Apple a lancé ResearchKit en mars, une nouvelle plateforme d’applis médicales, en collaboration avec les chercheurs de l’université de Californie et l’hôpital du Mont-Sinaï de New York. Elles recueillent des données auprès de volontaires via leur iPhone. Et d’après la revue MIT Technology, Apple pourrait prochainement inciter les utilisateurs d’iOS à communiquer leurs données génétiques aux scientifiques « dont certaines conclusions pourraient apparaître directement sur les iPhone ». L’évolution des biotechnologies met les éthiciens sur la brèche. « Pour prévenir les maladies, jusqu’où ira-t-on ? Voudra-t-on fabriquer des génomes exempts de tout problème ? Faudra-t-il répondre à un standard génétique ? Moi, ça me terrorise ! » dit Patrick Gaudray. Alors que penser des technologies de réécriture de l’ADN pour gommer les causes d’une maladie génétique, développées par une équipe d’éminents scientifiques américains, à l’origine d’Editas Medicine ? Un programme financé par des fonds privés, dont ceux de l’omniprésent Google, le plus « transhumaniste » des Gafa au cœur d’une Silicon Valley à laquelle Philosophie Magazine a accolé une devise toute trouvée : « Liberté, inégalité, immortalité. »

Le Français Nanobiotix pousse ses pions aux Etats-Unis Le Figaro du 5 janvier 2016 par Armelle Bohineust

La biotech, déjà très avancée en Europe lance une étude clinique pour le marché américain, où elle espère un agrément dès 2016.

Un an et demi après son installation près de Boston, aux États-Unis, Nanobiotix a obtenu un feu vert pour lancer sa première étude clinique outre-Atlantique. La biotech française qui développe la technologie NanoXray, une approche thérapeutique très innovante pour le traitement local du cancer, pourra tester son NBTXR3 dans le cancer de la prostate.

Ce produit de nanomédecine - comprenez l'exploitation, à des fins médicales, des propriétés physiques d'objets mesurant un milliardième de mètre - est testé également sur les cancers du foie, de la tête et du cou et sur le sarcome des tissus mous. « Notre technologie consiste, avec notre premier produit, à injecter directement dans la tumeur des nanoparticules qui vont absorber les rayons X et démultiplier localement leur puissance », résume Laurent Levy, président de Nanobiotix. Ce mécanisme permet d'être bien plus efficace dans la destruction des cellules cancéreuses sans changer la dose de radiothérapie donnée aux patients. En Europe, le NBTXR3 devrait être commercialisé contre le sarcome des tissus mous dès 2017. Il y est, en effet, traité comme un dispositif médical et non comme un médicament, ce qui lui octroie un mode de développement plus rapide.

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D'ici là, Nanobiotix (qui affiche une perte opérationnelle de 7,8 millions d'euros au premier semestre 2015) dispose d'une trésorerie suffisante pour poursuivre son développement. « Nous avons les fonds nécessaires pour 2016 et nous devrions recevoir encore 15 millions d'euros de PharmaEngine, notre partenaire chargé du déploiement du NBTXR3 en Asie », précise Laurent Levy.

Pionnier mondial

Alors que plusieurs dizaines de laboratoires développent des produits de nanomédecine de première génération, c'est-à-dire des produits qui facilitent l'ingestion des médicaments en les rendant moins toxiques, Nanobiotix est focalisé sur la nanomédecine de seconde génération. « C'est le laboratoire le plus avancé dans le recours aux nanoparticules en liaison avec la radiothérapie », affirme son président. Autre atout de cette société issue en 2003 de recherches réalisées à l'Université de Buffalo aux États-Unis : à l'heure où l'on ne parle plus que de médecine personnalisée, son approche est généralisable à tous les patients traités par radiothérapie (60 % des cancéreux). Ce qui n'empêchera pas ses traitements d'atteindre des prix élevés. Les analystes estiment leur coût entre 8 000 et 40 000 dollars par an. « Nous pouvons aider trois millions de patients souffrant d'un cancer à augmenter l'efficacité de la radiothérapie. Dans un second temps, nous pourrions viser les six millions de patients qui pourraient bénéficier d'une baisse des effets secondaires de la radiothérapie », détaille Laurent Levy.

Nanobiotix, qui cible les 60 % de patients atteints de cancers soignés par radiothérapie, vise un marché estimé à 5 ou 6 milliards de dollars. Le cours de l'action a été multiplié par 2,4 depuis sa cotation fin 2012.

Vaccin contre l’hépatite B, un non-lieu requis dans le dossier pénal La Croix du 5 janvier 2016 par Pierre Bienvault

Le Parquet de Paris a confirmé lundi 4 janvier avoir requis, fin juin, un non-lieu dans l’affaire de la vaccination de l’hépatite B, soupçonnée de provoquer des scléroses en plaques.

L’instruction, longue de 17 ans, n’a pas permis selon le parquet d’établir un lien de causalité entre le vaccin et cette affection neurologique. Est-ce bientôt la fin du long feuilleton pénal de la vaccination contre l’hépatite B ? En tout cas, le Parquet de Paris a discrètement requis, fin juin 2015, un non-lieu dans cet important dossier de santé publique, ayant donné lieu à une instruction de 17 ans. Révélée lundi 4 janvier par Le Parisien, cette information était ensuite confirmée au palais de justice. Le Parquet a choisi de demander un non-lieu, estimant qu’aucun lien n’a pas pu être formellement établi entre cette vaccination et la survenue de certaines affections neurologiques, en particulier des scléroses en plaque (SEP). Il reste maintenant à savoir ce que décideront les magistrats instructeurs : suivre le Parquet et clôturer le dossier, ou demander, malgré tout, le renvoi devant un tribunal.

En 1994, Philippe Douste-Blazy, alors ministre de la santé, avait lancé une campagne de vaccination ciblée sur les élèves de classe de 6ème. « Mais de manière assez scandaleuse, cette campagne a été étendue de manière massive sous l’impulsion des firmes qui, à l’époque, n’hésitaient pas à dire que l’hépatite B tuait plus de personnes en un jour en France que le sida en une année. Résultat, au lieu de vacciner 650 000 gamins de 10-11 ans, on a délivré le vaccin à 20 millions de personnes en quatre ans », explique le professeur Bernard Bégaud, épidémiologiste et responsable d’une unité Inserm à l’université de Bordeaux.

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« Et parmi ces vaccinés, il y avait beaucoup de jeunes adultes à un âge où se déclarent en général les scléroses en plaques », ajoute-il.

Les années suivantes, une polémique très vive s’est développée sur les possibles effets secondaires du vaccin. Malgré des études montrant a priori une absence de liens entre le vaccin et les SEP, Bernard Kouchner a suspendu la vaccination en milieu scolaire en 1998. En parallèle, la justice a ouvert une enquête dans ce dossier impliquant une soixantaine de victimes, dont huit décédées. En 1998, une mise en examen pour « tromperie aggravée » a même été prononcée contre trois responsables des laboratoires SmithKline Beecham (aujourd’hui GSK) et Sanofi Pasteur MSD. Des poursuites qui seront donc abandonnées si le non-lieu est confirmé, comme cela paraît probable.

La fièvre de Zika s'empare du Brésil Le Journal du Dimanche du 3 janvier 2016 par Anne-Laure Barret

Alors que les cas de malformation cérébrale se multiplient chez les bébés, le virus de Zika est montré du doigt. La Martinique et la Guyane sont touchées. Pas de panique, estiment des spécialistes…

L'alerte est venue du Brésil le 12 novembre. À cette date, le gouvernement a annoncé qu'il suspectait l'épidémie de fièvre de Zika, qui frappe une partie de ce pays depuis mai, d'être responsable de microcéphalies chez des bébés dont les mères avaient été affectées en début de grossesse. Les chiffres sont inquiétants : 1 248 cas de cette malformation du cerveau, caractérisée par une taille de la tête anormalement petite, avaient été enregistrés au 30 novembre, contre 147 en 2014.

Déjà présent dans neuf pays d'Amérique latine, le virus Zika, de la famille des flavivirus (comme la dengue et la fièvre jaune), vient de faire son apparition à la Martinique et en Guyane. Ce dernier département a été placé en phase de "pré-épidémie" car, outre des cas importés du Suriname voisin, deux contaminations autochtones ont été confirmées. Faut-il redouter une épidémie? « La Guyane entre en saison des pluies, ce qui favorise la prolifération des vecteurs de ce virus », explique Christian Meurin, le directeur de l'agence régionale de santé. Comme la dengue et le chikungunya, la fièvre de Zika, le plus souvent bénigne et qui passe inaperçue dans 60 à 80 % des cas, est transmise par les piqûres de moustique du genre Aedes : Aedes aegypti mais aussi Aedes albopictus, le redoutable moustique-tigre originaire d'Asie qui colonise le monde.

Le professeur Xavier de Lamballerie, virologue au CHU de Marseille, est un des meilleurs spécialistes français du Zika, isolé pour la première fois sur un singe en Ouganda en 1947. « Au départ, ce virus essentiellement responsable d'une éruption cutanée et de fièvre me semblait plutôt anodin », raconte-t-il. Son intérêt s'est accru il y a deux ans au moment où le virus a frappé la Polynésie, entre octobre 2013 et avril 2014, touchant environ 32 000 des 270 000 habitants de l'archipel. Cette épidémie faisait suite à la première jamais enregistrée dans le monde, dans l'archipel de Yap, en Micronésie, en 2007. « L'épisode polynésien a commencé à nous inquiéter, précise le chercheur. Il y a eu plusieurs cas de syndrome de Guillain-Barré, une complication neurologique qui peut être très grave. Des patients ont été placés en réanimation. On a soupçonné des problèmes chez des nouveau-nés. »

Au total, selon la direction de la santé en Polynésie française, 18 anomalies congénitales, sans doute en lien avec l'épidémie, ont été détectées sur des fœtus ou des enfants polynésiens. Sur ces 18 cas, 10 interruptions de grossesse ont été réalisées et 2 enfants sont décédés après leur naissance. Parmi les 6 qui ont survécu, 3 souffrent d'une microcéphalie et sont dans un état végétatif. Les 3 autres souffrent d'anomalies du tronc cérébral qui provoquent des troubles de la déglutition.

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« Il n'est pas établi de lien absolument formel entre les malformations des bébés au Brésil et en Polynésie et Zika, mais il est fort probable que cette relation de cause à effet soit mise en évidence ces prochains mois », assène Xavier de Lamballerie.

S'il juge cette complication « inquiétante », le virologue marseillais appelle néanmoins à la prudence : « On est incapables de dire quel est le pourcentage de parturientes touchées. Sans oublier que plus l'épidémie progresse dans une population, plus le nombre de femmes déjà atteintes, et donc immunisées avant d'entamer une grossesse, va augmenter. » Un calme partagé par le virologue Éric Leroy, chercheur à l'Institut de recherche pour le développement : « Ce virus est loin d'être plus dangereux que ceux qui causent le chikungunya ou la dengue. Chaque fois qu'un nouveau virus arrive, la panique s'installe. Qui dit nouveau dit inconnu… » Un inconnu qui inquiète les autorités.

Importée par des voyageurs venus d'Amérique ou des Antilles, la fièvre gagnera-t-elle la France cet été, saison préférée des moustiques ? Dès juillet, le Haut Conseil de la santé publique (HCSP), qui conseille la ministre de la Santé, a jugé ce risque « réel » : « Les conditions pour une transmission du virus sont réunies dans les départements où le moustique vecteur est présent », une vingtaine situés dans le sud de la France. Le pays est-il prêt à faire face à une éventuelle épidémie ? Le rapport du HCSP pointe certaines difficultés, notamment celle du diagnostic. Le virologue Xavier de Lamballerie, lui, se veut rassurant : « Tout le monde est mobilisé. Si Zika se diffuse en Guyane et aux Antilles, les messages de prévention y seront renforcés. Pour l'instant, en l'absence de traitement ou de vaccin, la seule précaution à prendre est de porter des vêtements longs et de mettre du répulsif. »

Le jour où mon fils autiste est entré dans une mosquée interdite d'accès à Jérusalem Huffington Post du 4 janvier 2016 par Henri de Foucauld*

Des gardes armés font les cent pas devant la mosquée interdite d'Al Aqsa. Nous sommes à Jérusalem mais Pierre ne le sait pas. Il est autiste et ignore l'existence du conflit israélo-palestinien et les interdits qu'il engendre. Mon regard est rivé sur lui, j'ai allumé tous les warnings car dans ce lieu de tensions, Pierre peut s'enfuir de la zone de sécurité paternelle et commettre le pire, ici comme ailleurs. Et le pire est arrivé. Déjouant la vigilance des gardes, il est entré dans la mosquée. Panique. L'attente est insupportable. Puis Pierre surgit juché sur les épaules d'un garde qui rigole. Nous remercions cet homme. Il sourit, veut savoir. Le ton est bienveillant. Commence un long échange fraternel, on ne veut plus quitter l'esplanade. Pierre vient de réconcilier deux mondes en guerre.

Un miracle que seules les personnes handicapées peuvent accomplir en raison de leur potentiel d'amour supérieur à la moyenne. Et particulièrement chez les autistes dont les qualités d'accueil, d'émerveillement, de simplicité, de vérité sont illimitées. Innocents, fragiles, indemnes de toute malveillance, et de tout calcul, ils éveillent le don de l'autre et l'envie de les protéger. Mais quelle place leur accordons-nous ? En effet la prise en charge des autistes est actuellement réduite à l'accueil de ceux-ci dans des lieux où des éducateurs d'un dévouement et d'une attention remarquables, tentent de les aider par un apprentissage de l'autonomie. Malgré de grands progrès sur le plan de l'équipement, des aides financières, de l'intégration dans le monde scolaire et celui du travail, on constate une grande ambivalence sur le plan humain. Socialement, le handicap reste synonyme d'échec, et non simplement d'une différence.

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Il importe de corriger cette approche afin de mesurer la valeur intrinsèque des handicapés au sein de notre société car il se pourrait bien que l'autisme soit une chance pour nous tous.

L'autisme est reconnu comme handicap depuis seulement 1996. Depuis, trois plans se sont succédé, le troisième, lancé en 2013, doit s'achever en 2017. On ne peut que se féliciter de l'ensemble des chantiers même s'ils semblent encore bien insuffisants face à ce trouble qui touche aujourd'hui en France un nouveau-né sur 150. Le 3ème plan est articulé uniquement autour de cinq axes que sont le diagnostic, l'accompagnement, le soutien des familles, la recherche et la formation mais sans s'interroger sur leur capacité à nous élever. Au final, les autistes sont mis à l'écart dans un monde à part. Un monde à eux. A l'instar des personnes âgées considérées comme inutiles, on cherche à leur construire un univers où ils pourront vivre sans déranger ni la société ni leur famille. Ne nous leurrons pas, et je sais de quoi je parle : vivre avec un enfant autiste n'est pas simple. C'est parfois l'équilibre familial qui est en péril et nombreux sont les couples qui se sont déchirés, épuisés, à force de vivre dans un quotidien sans pause et sans répit. C'est l'état d'urgence en permanence entre le white spirit ingurgité, les débordements d'humeur, les angoisses ingérables.

Avec notre fils Pierre, nous avons vite compris que nous ne pourrions pas nous en sortir seuls. Son handicap, le syndrome Phelan Mac Dermid - 22q13, lié à une micro délétion sur un chromosome, se traduit par "un trouble de la sphère autistique sévère", comme disent les spécialistes. Cela signifie qu'il ne dort pas, ou très peu, qu'il ne parle pas, qu'il est imprévisible, qu'il n'a aucune notion du temps et de l'espace, et qu'il peut partir de la maison sans raison pour aller droit devant lui, sans aucune conscience du danger ou de l'angoisse de ses parents qui le cherchent. Il y a quelques années, un enfant comme Pierre aurait été "placé", dans un établissement psychiatrique où un traitement "adapté" aurait annihilé toute volonté pour le rendre inoffensif.

Que de progrès accomplis ! Mais que de chemin encore à parcourir... Désemparés, mais pas pour autant résignés, nous avons alors créé un réseau de bénévoles afin d'aider Pierre à sortir de sa bulle en appliquant une méthode d'éducation développementale, la méthode des 3I, dont le principe repose sur des séances en tête-à-tête durant lesquelles l'enfant et l'adulte jouent ensemble. Outre les résultats sensibles permettant à Pierre de mieux appréhender son environnement, la richesse de ces échanges entre Pierre et ses "Pierrots" fut une grande surprise. Les qualités de Pierre, communes aux enfants, et particulièrement aux autistes, ont permis d'établir une communication, essentiellement affective, d'une rare intensité. Pierre n'était pas le seul à progresser... Pierre nous ouvrait les yeux, nous ramenait à l'essentiel. Les artifices relationnels n'avaient plus cours, les codes avaient changé. Pierre ne nous critiquait pas, ne portait aucun jugement et se moquait bien de nos promotions professionnelles. En revanche, si nous arrivions en retard, si nous étions tristes, il le remarquait tout de suite, et, à sa façon nous le reprochait ou nous consolait. Il y avait quelque chose du Petit Prince face au renard.

Comprenant la richesse de ces relations, nous avons alors imaginé un lieu de vie dans lequel les résidents, salariés et bénévoles pourraient s'épanouir dans la découverte des uns et des autres. Notre association Le chemin de Pierre, consciente qu'elle n'avait aucune chance de porter seule un tel projet s'est alors rapproché de la "Société Philanthropique", pour se lancer avec "Maisons pour la Vie", une autre association partageant les mêmes valeurs, dans la création d'une structure d'accueil pour sept jeunes adultes autistes à Levallois Perret. Ce projet baptisé "Maison Harmonia" ne peut cependant aboutir qu'avec une farouche volonté d'y arriver, et des fonds conséquents. En effet, cela nécessite un investissement de l'ordre du million d'euros et un coût de fonctionnement annuel de l'ordre de plusieurs centaines de milliers d'euros. Sans financements privés, sans dons, Maison Harmonia ne verra pas le jour. Plusieurs actions ont donc été imaginées par l'équipe du Chemin de Pierre, dont le "Pierrothon", course à pied suivi d'un pique-nique, qui a rassemblé en novembre environ 200 participants dans les jardins du Luxembourg. Le réseau faisant son œuvre, plusieurs manifestations artistiques telles que pièces de théâtres ou encore concerts, assurent à l'association des revenus prometteurs, mais encore insuffisants. Malgré les difficultés, et confiants dans la Providence, les travaux commenceront en janvier prochain, et Maison Harmonia devrait ouvrir ses portes à l'automne 2016.

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Si vous aussi, vous souhaitez prendre part à ce projet en rejoignant les bénévoles, en contribuant financièrement, ou simplement en nous faisant part de votre soutien, nous vous invitons à nous contacter sur le site de l'association. *Ancien officier de marine, actuellement directeur de la stratégie de TELESPAZIO, filiale "Espace" de Thalès, père de 4 enfants, dont Pierre, autiste.

Des banques de lait maternel pour réduire la mortalité infantile Sciences et Avenir du 4 janvier 2016

Le lait maternel est indispensable aux enfants nés grands prématurés. En Afrique du Sud, le développement de banques de lait permet de réduire la mortalité infantile.

Grand prématuré, Patrick pesait 1,2 kg à sa naissance. C'est la banque de lait maternel qui « l'a sauvé », affirme sa mère. Ce système basé sur la générosité de mères qui donnent leur lait est utilisé comme un outil de lutte contre la mortalité infantile encore élevée en Afrique du Sud. « C'était une question de vie ou de mort » que Patrick boive du lait maternel, raconte sa mère Annerleigh Bartlett. À la naissance du petit garçon à moins de sept mois de grossesse, « je n'avais pas de montée de lait et le lait infantile était exclu ». Car dans certains cas, celui-ci peut endommager les intestins des prématurés. Ainsi, pendant les deux premières semaines de sa vie, Patrick a bu du lait donné gratuitement par des mères anonymes, via des lactariums ou banques de lait maternel.

Le principe des lactariums est simple : les femmes tirent du lait qui est ensuite redistribué, après avoir subi des tests et après pasteurisation, auprès des enfants qui en ont besoin. Un service de livraison rapide assure même le transport du précieux liquide. Avant de pouvoir être livré aux familles qui en ont besoin, le lait collecté subit de strictes analyses microbiologiques - les donneurs doivent notamment faire un test de dépistage du sida et de l'hépatite B. « Chaque goutte compte », peut-on lire au siège de la Réserve sud-africaine de lait maternel (SABR), un vaste réseau de lactariums qui approvisionne 87 hôpitaux et a nourri 2 845 enfants en 2015. Il faut couvrir sa tête d'une coiffe et enfiler un tablier avant d'entrer dans la salle où est entreposé le stock national, sept congélateurs renfermant des centaines de bouteilles de lait scellées. « Les lactariums doivent être encouragés pour réduire la mortalité (...) des bébés qui ne peuvent pas être allaités », reconnaît le ministère de la Santé, alors que l'Afrique du Sud, deuxième puissance économique du continent, se débat avec des taux de mortalité infantile encore élevé (32,8 pour 1 000 naissances en 2013) et des retards de croissance « bien plus élevés que des pays au niveau de développement comparable ».

Les obstacles à l'allaitement sont nombreux

Car le constat est sans appel : selon l'Unicef, un enfant exclusivement allaité a 14 fois plus de chances de survivre dans les six premiers mois de sa vie qu'un enfant nourri au lait maternisé. Or l'Afrique du Sud a un taux d'allaitement très faible (7,4 %). « Beaucoup de femmes pauvres sont convaincues que les riches donnent du lait infantile. Alors elles font pareil », regrette Stasha Jordan, directrice de SABR. Sans revenus, d'autres sont aussi contraintes, quelques semaines après avoir accouché, de chercher des petits boulots à la journée, et ne sont donc pas auprès de leur bébé pour le nourrir quand il réclame. Ces mères issues de milieux défavorisés « n'ont pas les moyens d'acheter assez de lait et ne nourrissent donc pas assez leurs enfants », explique Chantell Witten, chercheur nutritionniste à l'Université sud-africaine du Nord-Ouest.

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Il a également pâti de la distribution gratuite, jusqu'en 2011, de lait maternisé dans le cadre de la prévention contre le risque de transmission du virus VIH de la mère à l'enfant, un vaste programme dans un pays où environ un tiers des mères sont séropositives.

Evolution des mentalités soutenue par le gouvernement

Mais les mentalités évoluent, constatent les spécialistes. Depuis 2012, une législation interdit les publicités de lait maternisé dans les magazines et sur les panneaux publicitaires. Conformément aux directives de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), l'Afrique du Sud encourage désormais les mères séropositives sous antirétroviraux à l'allaitement exclusif. Et le gouvernement, conscient de l'utilité des lactariums, est en train de les réglementer. Mais les banques de lait comme les pédiatres se heurtent parfois à des réticences culturelles ou psychologiques. « On était mal à l'aise à l'idée de donner à nos jumelles un liquide provenant d'une autre personne », se rappelle Pradesh Mewalala, père d'Anya et Ariana nées prématurément. Le couple a finalement accepté. En ce qui concerne le petit Patrick, il est désormais âgé de 7 mois et se porte comme un charme. Sa mère a finalement réussi à l'allaiter. L'évidence s'est alors imposée : cette aide comptable de 39 ans est devenue à son tour donneuse pour la banque Milk Matters au Cap. « Je me suis sentie redevable vis-à-vis de l'institution qui a sauvé mon fils », explique-t-elle. Elle a pompé 3 litres de lait en quelques mois, de quoi nourrir « 20 bébés pendant 24 heures ».

Le Japon met les exosquelettes au travail Le Temps du 4 janvier 2016 par Jonas Pulver

L’Archipel mise sur les combinaisons robotiques pour répondre aux besoins d’une société vieillissante et en pénurie de main-d’œuvre. Plusieurs modèles ont été présentés à l’International Robot Exhibition de Tokyo.

Il faut environ deux minutes pour que l’ingénieur ajuste l’exosquelette, que l’on revêt comme un sac à dos. De larges lanières se rejoignent sur la poitrine, enserrant fermement le torse. Depuis les deux disques situés au niveau des hanches, à hauteur de l’axe de rotation du corps, de fines tiges rejoignent les coussins appliqués sur le dessus des cuisses. L’ensemble pèse un peu plus de six kilos, répartis entre les épaules et les jambes. Devant soi, au sol, une caisse est remplie de bouteilles d’eau, 30 kilos environ qu’il s’agit de soulever. Au premier essai, sans l’aide de l’exosquelette, la tension au niveau du bas du dos est immédiate, la fatigue présente au bout de deux mouvements. Deuxième essai, l’ingénieur active la combinaison. Surprise : la caisse se laisse hisser sans effort, cinq, six, sept fois successivement. La poussée intervient au niveau des cuisses et du haut du tronc. Le mouvement est rapide, presque brusque, mais demeure contrôlable.

La combinaison AWN-03 est le premier produit commercialisé par la société japonaise ActiveLink, une filiale du groupe Panasonic. ActiveLink était présent il y a quelques semaines à l’International Robot Exhibition de Tokyo (IREX), la plus grande foire commerciale du monde en matière d’automation. Dans l’aile dédiée à la robotique dite « sociale » et « de service », outre des prototypes humanoïdes destinés à l’intervention en cas de catastrophe naturelle, ce sont les exosquelettes qui ont retenu l’attention.

« Robot hub »

Au Japon, leur mise au point et leur implémentation s’inscrivent dans un contexte particulier. Un faible taux de natalité et une politique stricte en matière d’immigration ont pour conséquence un vieillissement particulièrement rapide de la population. De 127 millions en 2014, le nombre d’habitants de l’Archipel devrait passer sous la barre des 100 millions d’ici 2050.

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Parmi les effets collatéraux, l’importante diminution de la force de travail et la demande accrue dans le domaine de la prise en charge des aînés appellent à des mesures nouvelles.

Le gouvernement de Shinzo Abe veut tabler sur l’innovation pour booster les performances de la population active. L’automation intensive en est l’une des mesures-clé, à commencer par le secteur des services et des petites et moyennes entreprises (les grands groupes de l’automobile et de l’électronique étant déjà massivement robotisés). Le rapport « New Robot Strategy », émis par le gouvernement début 2015, appelle à faire du Japon un vaste « robot hub », en tablant sur la conjugaison entre l’Internet des Objets et une présence robotique quotidienne. Selon une étude du Mitsubishi Research Institute, le secteur de la robotique de service au Japon passera de quelque 500 millions de francs (460,2 millions d’euros) en 2014 à plusieurs dizaines de milliards d’ici 2035.

Détection du mouvement

Soins, assistance aux tâches pénibles et maintien de la productivité malgré une main d’œuvre déclinante : les exosquelettes se situent à l’intersection de ces trois axes. « La satisfaction de travailler, pour toutes et tous », « Devenir la force de travail du Japon » peut-on lire sur le site d’ActiveLink, où un homme aux cheveux grisonnants soulève sans effort un petit container rempli de quincaillerie, et une jeune femme transporte aisément un lourd colis. « Notre produit a été lancé en novembre, explique Yasunori Nishi, ingénieur chez Fukunishi, la société qui commercialise ActiveLink. La combinaison détecte les mouvements de l’utilisateur, et l’assiste en conséquence grâce à un moteur électrique alimenté par une batterie lithium-ion. Le prix ? Un peu plus de 10 000 francs (9 207 euros). » La promesse d’ActiveLink : diviser par deux les coûts liés aux problèmes de dos dans les industries concernées.

Les Japonais ne sont pas les seuls à travailler sur des exosquelettes. En Europe et aux Etats-Unis, plusieurs projets devraient voir le jour dans les domaines de la défense, de l’industrie et de la rééducation. Robo-Mate, une combinaison incluant l’avant-bras, bénéficie de l’appui de l’Union Européenne, et a attiré l’intérêt de Fiat. Fortis est une tenue robotique non motorisée de l’Américain Lockheed Martin, qui répartit les charges subies par les mains au niveau des hanches et des pieds. La start-up suisse Noonee, elle, peaufine sa « Chairless Chair », un système portable permettant de se tenir sans effort en position assise – argument auquel plusieurs constructeurs automobiles se montrent sensibles. En matière de sécurité militaire, les armures KOS et TALOS promettent de transformer l’équipement et les performances des soldats.

Au Japon, la commercialisation des exosquelettes de service est déjà en marche. Innophys, start-up fondée en 2013 à la Tokyo University of Science, a déjà déployé quelque 1000 unités dans tout le pays, notamment auprès d’Asahi-Sun, un fournisseur de soin aux personnes âgées. Plus léger que l’AWN-03 d’ActiveLink, l’Exo-Muscle d’Innophys est un peu moins rapide mais plus flexible, pour une capacité de traction équivalente (entre 22 et 30 kg). Exo-Muscle fonctionne selon une technologie différente : de l’air comprimé est injecté dans des valves de caoutchouc qui se gonflent et se contractent. Une bonbonne ou un tube connecté à un compresseur alimentent le système.

Capteur d’expiration

« Le point décisif avec les exosquelettes, c’est la commande : il faut que le dispositif comprenne quand initier le mouvement », explique sur le stand d’Innophys Takashi Fujimoto, président de la compagnie. « Nous, nous misons sur un interrupteur sensible à l’intensité du souffle. » Placé dans la bouche, un capteur détecte l’expiration du porteur. On peut ainsi contrôler Exo-Muscle sans les mains, et sans risque que la combinaison se déclenche par inadvertance. La gamme de prix débute à 6000 francs (5 525 euros) par pièce environ. Cyberdyne, l’un des leaders mondiaux des exosquelettes médicaux, a résolu ce problème de commande d’une manière plus ambitieuse. Rattachée à l’important pôle robotique de l’Université de Tsukuba, Cyberdyne met en œuvre des capteurs apposés sur la peau à l’aide de patchs. Ceux-ci captent les résidus des signaux électriques émis par le système nerveux. Ainsi, les tenues robotiques Cyberdyne réagissent directement aux intentions de mouvement de l’utilisateur.

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Fluidité et légèreté

La série d’exosquelettes HAL commercialisée par Cyberdyne compte un modèle médical (récemment avalisé par le Ministère de la Santé japonais), et plusieurs modèles de service, respectivement pour les bras, les jambes ou le bas du dos. Ce dernier, en démonstration à IREX, impressionne de fluidité. Plus léger que tous ses concurrents, moins encombrants également, HAL- CB01 gaine les cuisses et les hanches, tandis que les senseurs sont appliqués au niveau des lombaires. L’assistance est moins puissante, mais plus précise, et plus progressive. Surtout, il est envisageable de fonctionner toute une journée en portant HAL-CB01, dans un hôpital par exemple. Les coûts, néanmoins, sont conséquents. A l’heure actuelle, 300 pièces sont disponibles en location pour des tarifs mensuels dégressifs allant de 2000 à 800 francs (1 842 à 737 euros). Cyberdyne travaille d’ores et déjà sur des prototypes d’exosquelettes intégrant les quatre membres, le tronc et même la tête, toujours selon le principe de réponse au flux électrique nerveux. La combinaison « Disaster-Recovery », qui recouvre la totalité du corps d’une armure en titane et en fibre de carbone ainsi que d’une veste anti-radiation, est au stade R&D. L’été dernier, Cyberdyne et l’Aéroport Haneda de Tokyo ont annoncé un accord pour l’introduction progressive de matériel robotique portable et mobile. A terme, les deux structures souhaitent développer ensemble une nouvelle génération de robots conçus pour les besoins spécifiques de l’aviation civile.

Transgene : nouveau plan de développement stratégique. Boursorama Cercle Finance du 7 janvier 2016

Transgene annonce un nouveau plan de développement stratégique et l'obtention de nouveaux financements ainsi que l'achèvement de son projet de réorganisation.

La société biopharmaceutique mettra prioritairement en œuvre des approches combinant ses produits avec d'autres produits d'immunothérapie parmi lesquels les inhibiteurs des points de contrôle immunitaire (ICIs), une nouvelle classe thérapeutique particulièrement prometteuse pour la prise en charge des cancers et de certaines maladies infectieuses. Transgene a d'ores et déjà engagé des discussions avec des partenaires pour initier cinq essais cliniques de phase 2 en combinaison avec des ICIs sur ses deux produits les plus avancés. Les premiers patients devraient être traités dès mi-2016.

Les principaux programmes envisagés de combinaison sont TG4010 avec un ICI, en première et en seconde lignes dans le traitement du cancer bronchique non à petites cellules (NSCLC), et Pexa-Vec avec un ICI en première ligne de traitement de l'hépato-carcinome cellulaire (HCC), ainsi que dans le traitement d'autres tumeurs solides. En amont de ces développements cliniques, Transgene renforce également ses capacités de recherche translationnelle au travers de partenariats scientifiques avec la recherche académique et hospitalière.

Pour mener ce nouveau plan stratégique, Transgene bénéficiera d'un prêt de 20 millions d'euros obtenu auprès de la Banque Européenne d'Investissement (BEI) dans le cadre du programme IDFF (Infectious Diseases Finance Facility) et d'un engagement de l'Institut Mérieux d'apporter un financement de l'ordre de 10 millions. Le plan de réorganisation annoncé en juin 2015 est en voie d'achèvement. Il se traduira par une réduction des effectifs de l'ordre de 50 % par rapport à fin 2014. Son coût est estimé à environ 7,5 millions d'euros et la réduction des coûts de fonctionnement générée à plus de 15 millions par an dès cette année.

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L'augmentation des grossesses tardives inquiète les spécialistes 24 Matins du 7 janvier 2016 par Sebastien Veyrier

Rendues possibles grâce aux différentes techniques de la procréation médicalement assistée, les grossesses tardives inquiètent les médecins.

Les grossesses tardives sont-elles en train de devenir une nouvelle mode ? Sous le feu des projecteurs avec les cas de stars comme Monica Bellucci ou la propriétaire de l’Olympique de Marseille Margarita Louis-Dreyfus (qui a annoncé attendre des jumelles), les grossesses après 50 ans sont de plus en plus nombreuses en France et dans le monde. Une situation qui inquiète le corps médical.

Selon une étude relayée par l’AFP et le site Pourquoidocteur, 98 naissances de mères de 50 ans et plus ont été enregistrées en France en 2014 sur les 800 000 bébés nés cette année-là. Si le chiffre semble marginal, le nombre de grossesses tardives a plus que triplé en France en moins de 15 ans malgré des restrictions d’âge pour recourir à la PMA. Car c’est en effet avec la démocratisation de la procréation médicale assistée que de plus en plus de femmes d’un certain âge peuvent franchir le cap. La technique est en effet autorisée jusqu’à 50 ans en Espagne, en Belgique ou en Grèce. La situation inquiète les maternités françaises, car ce type de grossesses n’est pas sans risque pour la future maman.

Joëlle Belaïsch-Allart, gynécologue spécialiste des grossesses tardives, déplore que les risques de ces grossesses « créées à l’étranger soient assumés dans les maternités françaises ». Les complications peuvent en effet être nombreuses en cas de grossesse tardive. Les futures mamans s’exposent à des risques d’hypertension, de diabète, d’hémorragie de la délivrance et même de décès. Pour l’enfant, s’il n’y a pas de risque d’anomalie chromosomique puisque la plupart du temps l’ovocyte provient d’une femme jeune, il réside un fort risque de prématurité et un risque de mort in utero. Les spécialistes tiennent à mettre en garde les femmes de 50 ans et plus qui cherchent à avoir un enfant qui ignorent pour la plupart les dangers inhérents à une grossesse tardive et pointent du doigt la déviance qui consisterait à être mère pour se conforter dans la question de l’éternelle jeunesse.

Création du Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie Le Quotidien du Médecin du 6 janvier 2016 par Damien Coulomb

Le décret portant création du Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie a été publié ce matin au Journal officiel.

La création de ce centre fait partie du Plan national 2015-2018 pour le développement des soins palliatifs et l’accompagnement en fin de vie présenté le 3 décembre dernier à la Fondation Œuvre Croix Saint-Simon (FOCSS, 19ème arrondissement de Paris). Le centre résulte de la fusion (à moyen constant) de deux grandes structures hébergées par la FOCSS : le Centre national de ressources en soins palliatifs et l’Observatoire national de fin de vie.

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Mieux communiquer

Le centre doit contribuer à une meilleure connaissance des conditions de la fin de vie et des soins palliatifs, à travers les dispositifs de collecte et de suivi des données et des enquêtes et études thématiques. Il doit également participer au suivi des politiques publiques relatives aux soins palliatifs et à la fin de vie et diffuser les connaissances sur ces sujets. Le Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie est doté d’un conseil d’orientation stratégique qui comprend, outre son président, quatorze membres dont le directeur général de la santé, le directeur général de l’offre de soins le directeur général de la fondation Œuvre de la Croix Saint-Simon des représentants d’usagers et plusieurs sociétés savantes et du Comité national consultatif d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé.

La nomination du président de ce centre et l’appel à candidatures pour constituer son conseil d’orientation stratégique devraient intervenir dans les prochains jours. « Les soins palliatifs permettent d’apaiser les souffrances des personnes en fin de vie. Mais les Français sont très peu nombreux à être informés sur les soins palliatifs, a indiqué la ministre de la Santé Marisol Touraine. Chacun doit connaître ses droits et être au cœur des décisions qui le concernent ».

En Irlande du Nord, l'Eglise toujours opposée à la libéralisation de l'avortement La Croix du 8 janvier 2016

Depuis le 30 novembre, l’Eglise catholique d’Irlande du Nord tente de faire annuler un jugement de la Haute Cour de Belfast. Saisie par la Commission nord-irlandaise des droits de l’homme, cette juridiction avait déclaré que l’interdiction d’avorter pour les femmes victimes de viol, d’inceste ou dont le fœtus est atteint d’une malformation létale, constituait une atteinte aux droits des femmes, citant l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, relatif au respect de la vie privée et familiale. Depuis, l’Eglise catholique presse le procureur général de faire appel de cette décision. Secrétaire du Conseil catholique pour les affaires sociales, cité par le Guardian, Tim Bartlett, met ainsi en question « l’avis du juge selon lequel il n’y a aucune vie à protéger dans les cas de malformation létale du fœtus ».

L’Eglise préfère parler de « conditions qui limitent la vie », poursuit-il : « Nous travaillons avec des femmes dont les enfants ont une durée de vie limitée (…). Ils sont vivants et méritent d’être protégés ». En Irlande du Nord, l’avortement est autorisé jusqu’à neuf semaines de grossesse, et seulement dans le cas où la grossesse présente un danger pour la vie de la mère ou sa santé physique ou mentale. Les femmes qui avortent en dehors des conditions prévues par la loi risquent la perpétuité.

Avortement : un groupe veut amener l’Île-du-Prince-Édouard devant les tribunaux La Presse Canadienne du 5 janvier 2016

Un groupe pro-avortement de l’Île-du-Prince-Édouard affirme avoir l’intention de traîner la province devant les tribunaux en raison de son refus d’offrir cette procédure médicale sur l’île.

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Le groupe Abortion Acess Now PEI a écrit dans une déclaration qu’il avait avisé le procureur général adjoint de la province qu’il entendait déposer une requête devant la Cour supérieure de l’Île-du-Prince-Édouard. Le groupe récemment formé soutient que la province a l’obligation d’offrir des avortements sécuritaires sur l’île en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés.

Colleen MacQuarrie, la coprésidente du groupe, affirme vouloir se battre pour que le gouvernement provincial paie pour les services d’avortement sur l’île. Les femmes de cette province doivent se rendre au Nouveau-Brunswick ou en Nouvelle-Écosse pour obtenir des avortements chirurgicaux payés par l’Île-du-Prince-Édouard. Le premier ministre Wade MacLauchlan a promis d’enlever les barrières à l’avortement, mais les critiques affirment qu’il n’est pas allé assez loin.

États-Unis : le casse-tête des mères porteuses qu'on veut faire avorter Le Point du 7 janvier 2016 par Hélène Vissière

Deux mères porteuses enceintes de triplés sont engagées dans une bataille judiciaire contre les parents biologiques qui veulent qu'elles avortent de l'un des fœtus.

L'une s'appelle Melissa Cook. L'autre Brittanyrose Torres. Elles habitent toutes les deux la Californie, sont toutes deux mères porteuses enceintes de triplés. Et sont engagées dans une bataille judiciaire contre les parents biologiques qui veulent qu'elles avortent de l'un des fœtus. Melissa Cook, 47 ans, s'est fait implanter trois embryons conçus in vitro avec le sperme du père, un habitant de l'État de Géorgie, et les ovocytes d'une donneuse. Les trois embryons se sont développés normalement, phénomène assez rare. Lorsque le père a appris qu'il allait avoir des triplés, il a fait pression sur Melissa Cook, dit-elle, lui demandant d'avoir recours à une « réduction sélective », selon le terme du contrat, autrement dit un avortement de l'un des fœtus, et la menaçant de représailles financières. Cook doit toucher 33 000 dollars pour un bébé, plus 6 000 dollars par enfant supplémentaire.

« Ce sont des êtres humains. J'ai des liens avec ces enfants », a déclaré au New York Post cette mère de quatre enfants, dont des triplés. Dans une lettre au père biologique rendue publique, elle écrivait : « Le médecin a transféré trois embryons sains. Il y avait de grandes chances qu'ils se développent… Si vous saviez que vous vouliez seulement deux enfants, pourquoi transférer trois embryons ? » La requête pour un avortement sélectif « a été faite pour sa protection et pour éviter des complications majeures », a affirmé l'avocat du père au Daily Beast. « Dans un sens, en refusant l'avortement, elle risque la vie des trois enfants et peut-être la sienne. » Une très grosse majorité des triplés naissent prématurément.

Brittanyrose Torres, 26 ans, a accepté de devenir mère porteuse pour un couple dont elle a lu l'histoire émouvante sur Facebook. On lui a implanté plusieurs embryons et elle porte aujourd'hui deux garçons et une fille. Le couple lui a demandé d'avorter de l'un des fœtus pour réduire les complications médicales et le risque de malformation. Brittanyrose Torres, elle aussi, a refusé. Les parents biologiques « savaient depuis le début que je ne voudrais pas d'avortement, sauf dans le cas d'une question de vie ou de mort », a-t-elle dit dans une interview. Elle aurait signé un contrat qui lui donnerait 25 000 dollars pour un bébé, plus une prime de 5 000 dollars par bébé supplémentaire. Elle a proposé au couple d'en adopter un.

Casse-tête juridique et moral

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Ces deux affaires posent un casse-tête juridique et moral. En Californie, toute mère porteuse doit signer en présence d'avocats un contrat qui en général comporte une clause prévoyant la possibilité d'un avortement en cas de grossesse multiple. Mais aucun juge ne va obliger une mère à avorter et le couple biologique n'a pas les moyens de la forcer, sauf en la menaçant de poursuites judiciaires et en arrêtant de payer les frais. La loi ne dit pas non plus ce qui se passerait si les bébés naissaient prématurément ou avec un handicap. Qui devient responsable si les parents refusent de les prendre arguant du fait qu'ils avaient mis en garde la mère porteuse ? Sans parler de l'impact psychologique sur les enfants, surtout si les parents biologiques décident de n'en choisir que deux et d'abandonner le troisième en adoption.

Ce n'est pas la première fois que la justice doit statuer sur ce sujet. En 2013, une mère porteuse dans le Connecticut a refusé d'accepter les 10 000 dollars que lui offrait le couple pour avorter lorsqu'il a appris que le fœtus était anormal. Les parents biologiques ont finalement abandonné leurs droits parentaux et le bébé a été adopté par une autre famille. Ce qui complique la situation aux États-Unis, c'est que la loi varie d'un État à l'autre, ou même d'un comté à l'autre. Dans le Michigan ou à New York, il est interdit de payer une mère porteuse. En Californie ou dans le Maine, c'est autorisé, même si les détracteurs dénoncent ce qu'ils assimilent à du trafic de bébés. Il n'y a pas de statistiques sur le nombre de mères porteuses américaines, mais, selon le Daily Beast, les chiffres montrent que 1 939 bébés sont nés de cette manière en 2013, une hausse de 160 % depuis 2004.

De son côté, Melissa Cook vient d'intenter une action en justice, attaquant la loi californienne comme inconstitutionnelle, et cherche à obtenir la garde de l'un des enfants au moins. Quant au père biologique, selon son avocat, il respecte la volonté de Cook, continue à payer les frais médicaux et compte bien obtenir la garde des trois enfants.

Mères porteuses : un ministre italien dérape Le Figaro du 7 janvier 2016 « Le recours aux mères porteuses est un crime qui devrait être puni au même titre que les crimes sexuels ». Par ces propos, le ministre de l'Intérieur italien, Angelino Alfano, a provoqué la polémique, mais obtenu la bénédiction de l'Eglise catholique. La loi italienne considère le recours aux mères porteuses comme un délit passible de deux ans de prison et d'une amende allant de 300 000 à un million d'euros. « Nous voulons que le recours aux mères porteuses devienne un crime universel. Et qu'il soit puni par de la prison. Comme le sont les crimes sexuels », passibles de cinq à 14 ans de détention, a affirmé le ministre dans un entretien à l'hebdomadaire catholique Avvenire publié hier. Le ministre s'exprimait sur le projet de loi créant une union civile pour les couples homosexuel, promis par Matteo Renzi à son arrivée à la tête du gouvernement en février 2014 et qui doit être examiné dans les prochaines semaines par le Sénat.

Ancien proche de Silvio Berlusconi, désormais à la tête d'un petit parti de centre-droit allié au centre-gauche de M. Renzi, Angelino Alfano s'est dit favorable aux unions civiles mais rejette deux dispositions du projet : l'accès à la pension de réversion et surtout la possibilité d'adopter l'enfant du conjoint. Cette disposition « risque de conduire le pays vers le recours aux mères porteuses, c'est-à-dire vers le marché le plus répugnant que l'homme ait inventé », a insisté le ministre.

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23andMe m’a découvert le gène de la mucoviscidose et un demi-frère Rue 89 du 10 janvier 2016 par Nolwenn Le Blevennec Depuis octobre 2015, la société 23andMe a de nouveau l’autorisation de commercialiser des tests génétiques à visée médicale, après deux ans de suspension.

En plein milieu des vacances de Noël, je reçois un e-mail de la société de biotechnologie 23andMe : mes résultats sont là, je peux y accéder en cliquant sur un gros bouton vert. J’expédie ma famille très loin (zoo de Vincennes) pour explorer mon génome dans un silence religieux. Cela fait deux mois que je l’attends. Le 20 octobre, j’ai lu ceci sur le site du Monde : « Deux ans après avoir été forcée par l’agence américaine des médicaments à cesser la commercialisation de kits d’analyse d’ADN pour déterminer des risques de maladies, la société 23andMe a obtenu le feu vert pour vendre de nouveaux tests au public. » La société californienne, fondée par l’ex-épouse du cofondateur de Google Sergey Brin (qui a investi dedans), relance son activité controversée. Grâce aux échantillons de salive qui lui sont envoyés, elle délivre des bilans médicaux remaniés. Je veux tester, mes collègues sont sceptiques : « T’es sûre que toi, qui es complètement hypocondriaque, tu es la bonne personne pour faire ce test ? » Oui, justement, sachez-le : l’hypocondriaque n’a pas peur de la vérité (mais d’un poing qui tape dans sa cage thoracique).

Une fois sur le site de 23andMe, je découvre que les tests ne sont pas livrés en France où les analyses du génome pour convenance personnelle sont interdites. J’envoie un message à ma petite cousine qui vit à Londres, mais elle ne me répond pas immédiatement. J’entre finalement l’adresse d’un parent éloigné qui habite aux Pays-Bas. Un mois plus tard, mi-novembre, j’ai le colis dans un tiroir de mon bureau. A Rue89, nous ne travaillons que sur les attentats qui ont eu lieu une semaine plus tôt. Je ne ressors la petite boîte que le 24 novembre. Je crache dans une éprouvette en plastique (nous avons une photo non publiable de ce moment). J’envoie l’échantillon de France. Et le mardi 29 décembre, donc, je reçois mes résultats par e-mail.

Je commence par regarder le volet géographique, parce que je trouve que c’est sans conséquence. Je découvre que je suis 99,7 % européenne (ennui). Près de 30 % de mes gènes proviennent des îles anglo-irlandaises. Je relis quelques articles sur les grandes migrations du Vème siècle des Bretons en Armorique et j’appelle mon père pour débriefer. C’est en lui parlant que je me rends compte que ces informations ne sont pas si anodines : des gens comprennent peut-être, à ce stade, que leurs parents ne sont pas leurs géniteurs. « Hmmm. D’où viennent ces gènes espagnols ? » Dans cette partie, j’apprends également que 3,2 % de mes gènes sont attribués à l’homme de Néanderthal, soit un peu plus que la moyenne des gens qui ont été testés – déjà un sujet de blague chez mes proches. Mon haplogroupe (famille d’ADN) est U5, soit européen : c’est cohérent.

Dans la partie médicale, le premier onglet est consacré aux risques génétiques. La société 23andMe est allée regarder si mon ADN contenait des caractéristiques génétiques connues pour favoriser certaines maladies. Pour trois d’entre elles – Alzheimer, Parkinson, cancer du sein (non hormonal), les résultats sont verrouillés. Il faut lire un petit texte d’alerte. « Alzheimer est une maladie grave sans traitement connu ». La société explique aussi la simple portée statistique de ces résultats : avoir ces caractéristiques ne veut pas dire que la maladie va être développée automatiquement. Veut-on vraiment déverrouiller ? C’est stressant. Je clique. Tout est bon. J’ai un risque « normal » de contracter ces maladies. Pas non plus de prédisposition aux thromboses (utile quand on prend une pilule troisième génération) ou à l’hémochromatose. C’est cette partie « risques génétiques » ou « prédispositions » qui a été beaucoup réduite dans la nouvelle version du test.

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Jean-Louis Mandel, professeur au Collège de France, un des seuls biologistes français à plaider pour la liberté individuelle de connaître ses données génétiques, nous a envoyé ses résultats 23andMe datant de 2010. A l’époque, le risque génétique était étudié pour de nombreuses maladies, comme le cancer du côlon ou l’anévrisme cérébral. Séduisant, mais beaucoup plus anxiogène. Et l’intérêt médical, pour la plupart des maladies étudiées, était nul (parce que le facteur génétique peu significatif ou mal connu). Que faire d’une minuscule prédisposition à l’anévrisme ? Jean-Louis Mandel regrette seulement que le risque lié à la dégénérescence maculaire ne soit plus calculé : « La littérature était forte et la personne testée peut changer son mode de vie pour réduire ses risques, en arrêtant de fumer par exemple. »

Dans l’onglet « réaction aux médicaments », la société 23andMe me déconseille un médicament contre le cholestérol qui pourrait provoquer chez moi une maladie des muscles, « myopathie nécrosante immuno-médiée ». C’est noté. Enfin, dans la partie « mutations héritées », je découvre que je suis porteuse de deux mutations liées à des maladies graves : la mucoviscidose ; le déficit en acyl-CoA déshydrogénase des acides gras à chaîne moyenne (MCAD).

Dans mon cas, il n’aurait donc pas été sérieux de faire des enfants avec le biologiste Jean-Louis Mandel, qui possède une autre mutation liée à la mucoviscidose. En France, environ une personne sur 30 est porteuse d’une mutation sur ce gène. Le biologiste m’explique : « Si votre conjoint est également porteur sain, vous avez une chance sur quatre de faire un enfant atteint de mucoviscidose. Mais en France, sans malade déclaré dans votre famille, vous n’avez pas été testée avant de faire des enfants. Aux Etats-Unis ou en Israël, vous auriez pu l’être. » Le dépistage préconceptionnel encadré, pour lequel milite le médecin, pose des questions éthiques difficiles. Jean-Louis Mandel regrette que la France soit effrayée par l’idée de se les poser. Inutile de dire que j’ai littéralement passé des heures à lire des choses sur ces deux maladies. A propos de la mucoviscidose : « La protéine CFTR est une protéine présente dans la membrane des cellules de différents muqueuses : respiratoire, digestive… Lorsque son gène est muté, [...], il en résulte [...] une inflammation et un épaississement du mucus qui le recouvre. Ce phénomène entraîne l’apparition des symptômes habituels de la mucoviscidose. »

A chaque mutation, 23andMe associe des forums pour se faire des amis... Je lis tout. Et sur l’un d’eux, ouvert par des porteurs sains de la maladie, je découvre des gens qui ont le même genre de problèmes que ma mère. Ils parlent du mucus qui s’accumule dans les voies respiratoires provoquant des sinusites chroniques et douloureuses – plusieurs d’entre eux ont choisi de se faire opérer. Ils discutent de leurs polypes nasaux. Je vois les maux de tête de ma mère différemment. Est-ce que c’est elle qui m’a transmis cette mutation typique ? Possède-t-elle une autre mutation plus légère sur ce gène qui l’a fait basculer dans une forme atténuée de la maladie ? Je l’appelle pour lui annoncer solennellement qu’elle a probablement une demi-mucoviscidose. Sur le moment, elle s’en fiche un peu. Deux jours plus tard, elle me rappelle pour me demander des informations.

Je prends aussi contact avec une généticienne rencontrée quand j’étais enceinte, pour en discuter. Je lui donne mes codes d’accès 23andMe. Elle commence par me dire qu’elle trouve la présentation des résultats super bien faite, très efficace. Puis, elle prend un ton très sérieux auquel je ne m’attendais pas pour parler de la mucoviscidose. Elle me demande si j’ai encore des projets d’enfant (si c’est le cas, il faudrait faire tester mon conjoint, cette fois). Puis, elle me fait une ordonnance pour « confirmer la mutation » avec les « techniques habituelles ». Dans les prochains jours, je dois donc faire un prélèvement sanguin qui me sera entièrement remboursé. Si cette mutation est confirmée, elle souhaite entamer « une enquête familiale ». « Je suis médecin et je ne peux pas ne rien faire des résultats que vous m’avez communiqués. Vous comprenez, si on ne le fait pas, à un moment ou un autre, on ne sait pas quand, il y aura une personne malade dans la descendance de votre famille. »

Dans le dernier volet médical, 23andMe décrit les « traits physiques » qu’on peut lire dans mon ADN.

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C’est la partie la moins intéressante, où l’on parle type de cérumen et prédisposition à la couperose. Enfin, dans un onglet consacré à « la famille et les amis », 23andMe devient réseau social. La société me propose de découvrir les gens inscrits sur son site qui partagent des séquences de leur ADN avec moi. Le plus souvent, des cousins éloignés, au cinquième degré ou plus – 23andMe détient un nombre limité de génomes (environ 900 000), donc il n’est pas probable d’y trouver des proches. C’est la partie la plus ludique et la plus effrayante. Dans mon cas, le premier profil qui sort est très proche de moi. C’est celui d’un homme quadra, qui partage 23 % de ses gènes avec moi. 23andMe me dit qu’il s’agit sûrement d’un demi-frère et me demande si j’apprends son existence par elle... Non, heureusement. Cela fait un drôle d’effet de retrouver son demi-frère ici, comme par magie (eh, dis donc, tu fais des tests génétiques dans ton coin ?) Si mon frère est visible sur cette page, c’est parce qu’il a accepté, comme moi, de participer au programme « DNA relatives ». Dans les jours qui ont suivi, mon frère et moi avons partagé nos génomes. C’est ainsi que j’ai appris que nous avions un chromosome 12 tout à fait similaire – c’est vrai qu’on peut vivre très bien sans le savoir.

Cela a fait rire ma généticienne : « Non, ce n’est pas très intéressant... Cela veut juste dire que vous avez une homologie du chromosome 12 paternel. » Oui, voilà. Ce mardi, en fin de journée, quand tout le monde est rentré, j’étais encore sur la carte mondiale de mes cousins éloignés et j’en étais à les facebooker un à un. Beaucoup se trouvent aux Etats-Unis, en Angleterre et en Bulgarie (j’ai un arrière-grand-père bulgare). J’ai hésité, et puis tout compte fait non : je n’ai pas envoyé de message. Partager 0,10 % de séquence ADN, c’est finalement assez peu de choses pour démarrer une conversation.

Ces tests constituent aussi une menace

Dans une interview au Monde, donnée au printemps dernier, Patrick Gaudray, directeur de recherche au CNRS et membre du Comité consultatif national d'éthique, explique les raisons pour lesquelles la généralisation de ces tests génétiques n'est pas souhaitable en France : il y a le problème du business des données génétiques, de la revente et de l'exploitation de ces données par des entreprises ou des assurances, de la valeur prédictive surestimée, de l'absence de communication intelligente des résultats et de la pression à la normalité... Il dit : « Je reste émerveillé par ces extraordinaires progrès de connaissances et techniques. Mais je refuse de me laisser fasciner par cette lumière qui peut brûler. »

Faut-il supprimer la vaccination obligatoire en France ? La Croix du 12 janvier 2016 par Pierre Bienvault

Marisol Touraine doit présenter mardi 12 janvier matin un plan de « rénovation de la politique vaccinale ». La ministre de la santé va notamment évoquer un débat qui agite le monde de la santé depuis plusieurs mois : celui du maintien ou non du caractère obligatoire du vaccin DT-polio, imposé aujourd’hui à tout enfant entrant en collectivité. En 2014, le Haut conseil de la santé publique (HCSP) avait estimé qu’il s’agissait d’un « choix sociétal » sur lequel les autorités devaient se prononcer. Les explications de Daniel Floret, président du Comité technique des vaccinations.

« En dehors de quelques pays d’Europe de l’Est et de l’Italie, la France reste, parmi les nations industrialisées, la seule qui garde une vaccination obligatoire avec le DT-polio, injection contre la diphtérie, le tétanos et la poliomyélite.

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Grâce au vaccin, ces trois maladies sont devenues rares. Mais il nous a semblé nécessaire, au sein du HCSP, que notre société s’interroge collectivement sur cette obligation. Notamment en raison de l’existence d’une certaine confusion dans une partie du public entre vaccins obligatoires et vaccins recommandés.

Certains estiment que seuls les vaccins obligatoires sont vraiment importants et qu’on peut donc se passer de ceux qui sont juste recommandés. Or parmi ces derniers, on trouve par exemple les vaccins contre l’hépatite B (1 300 décès par an, par cirrhose ou cancer) ou contre le cancer du col de l’utérus (1 000 morts par an) qui, en termes de santé publique, ont un impact plus important que les pathologies à vaccination obligatoire. L’autre problème est qu’il est aujourd’hui très difficile de n’administrer à ses enfants que les vaccins obligatoires. En raison des contraintes des fabricants, le DT-polio est associé avec d’autres vaccins. Résultat, certains parents n’y comprennent plus rien et ont l’impression qu’on veut leur forcer la main. Or dans ce domaine sensible, il faut favoriser la clarté, la pédagogie et un choix éclairé.

Alors bien sûr, si on devait supprimer l’obligation pour le DT-polio, l’enjeu serait de se mobiliser pour ne pas faire chuter la couverture vaccinale en France. Mais personnellement, je n’ai pas trop d’inquiétudes. Il y a quelques années, la Vénétie a pris cette mesure et la vaccination ne s’est pas effondrée. En France, quand on a supprimé l’obligation du BCG (contre la tuberculose) en 2007, la couverture vaccinale n’a pas vraiment bougé. En fait, c’est avant, quand le vaccin était encore obligatoire, qu’elle avait fortement chuté, en 2006, au moment où l’on a instauré le vaccin par voie intradermique ».

L’« aventure extraordinaire » de Justine, qui a porté l’enfant de sa sœur Amélie Le Monde du 24 décembre 2015 par Patrick Roger

Adrien, 4 mois, s’étire en sortant de son sommeil. Il sourit à sa maman, qui le tient dans ses bras, puis à sa tante, qui lui fait face. Sa tante qui l’a porté pendant neuf mois dans son ventre. Par cette froide matinée de novembre, le soleil baigne d’une douce lumière le salon où Amélie, 36 ans, et Justine, 33 ans (les prénoms ont été modifiés), confient leur témoignage. L’histoire d’un lien puissant entre deux sœurs, d’« une aventure extraordinaire », jalonnée de moments d’angoisse, de doute, de joie…

Amélie souffre d’un grave problème immunitaire qui provoque des retards de croissance du fœtus. Elle a eu une fille, Léa, aujourd’hui âgée de 10 ans, qu’elle a réussi à porter elle-même mais qui, née à terme, pesait à peine 1,7 kg. Depuis, son corps rejette les grossesses de plus en plus tôt. Après un divorce, elle a refait sa vie avec Fabien, qui n’avait pas d’enfants et à qui elle voulait « faire connaître le bonheur de la paternité ». Toutes les tentatives, malgré des batteries de traitements lourds, se sont soldées par des échecs. Avec, à chaque fois, « ce sentiment d’avoir un bébé mort à l’intérieur » et une insupportable culpabilité. « Je voyais ma sœur souffrir, se détruire avec tous ces médicaments, l’angoisse de chaque grossesse prenait le pas sur le plaisir d’être enceinte, poursuit Justine. Surtout quand, en 2012, elle s’est trouvée une nouvelle fois enceinte et moi aussi, deux semaines plus tard. » Justine attend alors son deuxième enfant. Elles partagent le début de leur grossesse et l’espoir que, cette fois, tout ira bien, mais Amélie perd une nouvelle fois son bébé. Une triste période où sa sœur se sent à son tour coupable de mener à bien sa propre grossesse.

« C’était presque euphorique »

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C’est à ce moment que vient à Justine l’idée de porter l’enfant de sa sœur, approuvée sans réserve par son mari, Martin. « On était d’accord sans avoir peut-être bien mesuré tous les tenants et les aboutissants. » Puis elle l’expose à Amélie. « Je me suis dit qu’il était hors de question que ma sœur fasse ce sacrifice pour moi, réagit l’aînée. J’étais très touchée mais je ne me sentais pas le droit de lui faire vivre ça. » Amélie se rappelle la déception de sa sœur, son désir de faire « quelque chose de beau » et comprend que c’est aussi « une façon pour Justine de se réaliser ». Elle commence alors à apprivoiser cette idée, à se renseigner, même si cela lui paraît encore « irréel, infaisable ». Une énième tentative de grossesse se solde par un nouvel échec. Le choix s’impose alors à elle.

Mais comment faire puisque la gestation pour autrui (GPA) est interdite en France ? Elles se tournent d’abord vers l’Espagne, puis apprennent que ce pays n’autorise la GPA qu’avec un donneur anonyme. Ne restent, dans l’Union européenne, que deux pays qui autorisent et encadrent la GPA : le Royaume-Uni et la Roumanie. Elles optent pour l’Angleterre, consultent les sites d’information qui répertorient les cliniques en fonction du type d’opération et arrêtent leur choix sur Londres. Le premier rendez-vous avec le médecin a lieu en avril 2014, par téléphone, pour que chacune fournisse les éléments permettant d’établir la légitimité de la demande. Le comité d’éthique accepte le dossier, mais elles doivent préalablement rencontrer une psychologue, avec leurs maris. En juillet, Amélie et Fabien, Justine et Martin se rendent tous les quatre à Londres. Les deux couples sont reçus séparément puis le directeur de la clinique leur annonce son accord. « Vous voulez le faire quand  ? » « On s’est tous regardés, on ignorait les délais. Il nous a dit que ça pouvait se passer dès le mois suivant si on voulait. Du coup, tout est devenu réel, accessible… » Elles décident de se caler sur les vacances de la Toussaint car le protocole médical oblige, les quinze derniers jours, à être sur place. Entre-temps, il leur a fallu effectuer plusieurs déplacements pour les prises de sang, les échographies, les analyses, les dosages de médicament… « Ils mettent vraiment toutes les chances de leur côté, enfin de notre côté, pour leur taux de réussite et leur réputation aussi », observe Justine.

Injections d’œstrogènes et de progestérones

La future mère porteuse doit aussi prendre des médicaments afin que les cycles des deux jeunes femmes soient synchronisés, de sorte que, au moment où l’ovule est prélevé, l’implantation puisse avoir lieu tout de suite. Elle est « gavée » d’œstrogènes, puis de progestérone, pour que la paroi utérine soit préparée à l’accueillir. Amélie, de son côté, doit recevoir des injections pour produire plus de follicules afin que l’« egg collection » soit la plus abondante possible. Le dernier séjour commence le 18 octobre. Le prélèvement des ovules est effectué le 22, sous anesthésie générale : dix-neuf sont récoltés. Après la fécondation in vitro, neuf étaient fécondés. « On avait demandé de n’en avoir qu’un implanté. On préférait une grossesse unique, pour Justine surtout. Ils nous avaient dit que ça dépendrait de la qualité de mes œufs. Ils nous appelaient tous les jours pour nous dire s’ils se développaient bien. Jusqu’au cinquième jour, ce qui permettait d’attendre qu’ils arrivent au stade du blastocyste et de se donner ainsi plus de chances de réussite. »

Le 27 octobre est le jour de l’implantation chez Justine. « Le médecin nous montre avec la sonde ce qui se passe à l’intérieur. On a l’impression de voir dès le début la vie du bébé, de vivre quelque chose d’extraordinaire. On était super-excitées, c’était presque euphorique. On était là en train d’encourager notre petit “winner” : “Vas-y, vas-y, tu vas rester accroché…” Ça a duré peut-être cinq minutes puis le docteur nous a dit qu’on pouvait rentrer chez nous. On est sorties, il faisait un soleil magnifique. On s’est dit que c’était un signe. » Le soir même, elles étaient à Paris. Commence alors une période très tendue, dans l’attente du 15ème jour, pour savoir si Justine est bien enceinte. « Je ressentais des symptômes mais je me demandais tout le temps si je les imaginais ou si c’était la réalité. » « Moi, j’avais en fait plus peur du test, intervient Amélie. C’est là que j’ai compris qu’elle allait être ma place pendant neuf mois, à savoir que je ne maîtriserais rien. » N’y tenant plus, Justine achète un test de grossesse qui affiche… enceinte. « J’ai éclaté en sanglots. Martin est arrivé en courant, se demandant ce qui se passait. En fait, je pleurais de soulagement, de joie, c’était une explosion d’émotions. »

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Elle envoie un texto à sa sœur, lui envoie la photo du test, ne reçoit aucune réaction. « Je ne réalisais pas. J’étais sonnée. Je n’osais pas espérer », se rappelle Amélie.

« C’est génial mais c’est long ! »

Après ? « C’est génial mais c’est long ! », s’exclament-elles en chœur. La clinique, de son côté, attendait la prise de sang pour déclencher le protocole. Une fois connu le résultat, c’est un suivi permanent et lourd. Justine est obligée de prendre des doses de progestérone pour « faire croire » à son corps qu’elle est enceinte. Les suppositoires sont insuffisants, il faut passer aux piqûres. Mais, sans ordonnance, Justine doit se les faire elle-même. « Je suis allée sur Internet pour suivre des tutos, en suivant les instructions pour me la faire dans la cuisse. Toute la nuit, j’ai eu des douleurs pas possibles. Le lendemain matin, je n’arrivais plus à marcher. » Il n’est pourtant pas question d’abandonner. Elle découvre que les injections doivent être moins douloureuses dans la fesse. Martin lui fera les piqûres : une tous les trois jours jusqu’à treize semaines de grossesse. Retour à Londres pour la première échographie, à sept semaines : « Johnny », le nom de code que les deux sœurs ont donné au bébé, se développe à merveille.

Dès lors, Justine sera suivie en France, jusqu’à l’accouchement. Elles se rendent toutes les deux aux examens mensuels, sans cacher la situation et ont affaire à un personnel médical extrêmement bienveillant. Elles voient aussi une avocate afin de s’informer sur la meilleure façon de procéder. « Elle était contre la GPA et, du coup, nous a exposé tous les écueils. » L’avocate conseille que le mari d’Amélie reconnaisse l’enfant, en attendant que, deux ou trois ans plus tard, Justine fasse une déclaration d’abandon et Amélie une demande d’adoption. Mais Justine craint une enquête judiciaire sur les raisons de l’abandon, alors qu’elle a deux autres enfants. « Ma plus grande peur, c’était qu’on me retire mes enfants », avoue-t-elle. Une autre avocate leur recommande de ne pas essayer de contourner la justice. « En fait, demander à adopter mon propre fils constitue un mensonge par rapport à sa filiation », souligne Amélie. Ils laisseront donc les choses en l’état : Justine est la mère, le mari d’Amélie reconnaît l’enfant, ils ont un livret de famille en attendant que la loi évolue, « parce qu’elle évoluera forcément ». « Quand ce sera le cas, ce sera rétroactif, alors que, si on ment, on ne pourra pas revenir en arrière », a raisonné Amélie.

« Il nous a regardées toutes les deux »

Vient le jour tant attendu où l’enfant arrive au monde, le 22 juillet. Depuis quinze jours, Amélie dort chez Justine pour pouvoir l’accompagner. Elles sont toutes les deux dans la salle d’accouchement : l’une souffre, l’autre piaffe et adjure le personnel médical de la soulager, jusqu’au moment magique où apparaît la tête du bébé. « Je le vois, je le vois, s’exclame Amélie. On l’a sorti toutes les deux, avec l’obstétricienne. J’avais l’impression de le mettre au monde. J’ai vu naître mon enfant, vraiment. » Amélie l’a pris dans ses bras, l’a déposé sur le ventre de sa sœur, « il nous a regardées toutes les deux… ». A la clinique, le personnel se montre à l’écoute. Les deux jeunes femmes vivent dans la même chambre. C’est Amélie – qui a suivi un traitement à cet effet – qui allaite Adrien. « Je ne donne pas un bébé à Amélie. C’est le sien. Mes enfants, j’avais besoin de les sentir contre moi. Là, c’était le bébé d’une autre, même si je n’aurais jamais fait ça avec quelqu’un d’autre que ma sœur. » Et réciproquement. « C’est là qu’on voit la puissance du cerveau. J’avais accouché mais je n’avais pas de bébé et il ne me manquait pas. C’était hyperbizarre », se rappelle Justine, qui part en vacances avec sa famille en sortant de la maternité. Pour Maxence et Tom, ses deux enfants de 6 et 2 ans, elle avait trouvé des petits livres, en anglais, qui transposaient la GPA dans l’univers de la BD, avec une famille koala. L’aîné avait commenté sans hésiter : « C’est bon, j’ai compris. » Et il a observé scrupuleusement les consignes de discrétion à l’école. « Le plus pénible, c’est de devoir mentir », confessent les deux sœurs. Les voisins et collègues qui ont vu Justine enceinte s’étonnent de ne pas la voir avec son enfant. Ceux d’Amélie paraissent stupéfaits de n’avoir rien remarqué avant, même si elle prenait soin de porter des vêtements amples. Mais cela n’est rien au regard du parcours qu’elles auront effectué ensemble et de l’indicible joie à l’arrivée d’Adrien.

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Une « concertation citoyenne » pour rétablir la confiance sur les vaccins La Croix du 13 janvier 2016 par Pierre Bienvault

Selon Marisol Touraine, supprimer dès aujourd’hui la vaccination obligatoire en France pourrait faire chuter la couverture vaccinale en raison du climat de défiance autour de ce sujet sensible. Mardi 12 janvier, la ministre de la santé a annoncé une large consultation via le Web et un jury citoyen. Et des décisions qui seront annoncées en décembre 2016.

« Mais où est passée la ministre ? » Ces derniers mois, plusieurs experts du vaccin s’agaçaient à mots plus ou moins couverts de la discrétion de Marisol Touraine face au succès (plus de 700 000 signatures) d’une pétition lancée sur Internet à propos de la vaccination DT-polio (diphtérie, tétanos et poliomyélite). Une pétition polémique mais révélant un vrai sujet d’interrogation pour certains parents : le fait que ce DT-polio, le seul vaccin obligatoire en France, soit désormais quasi uniquement accessible dans des vaccins combinés protégeant aussi contre la coqueluche, les infections à haemophilus (responsables de méningites) et surtout l’hépatite B, dont le vaccin suscite une certaine méfiance en France. Mardi 12 janvier, Marisol Touraine a repris la parole sur ce sujet sensible. Un exercice difficile. En effet, le mouvement actuel de défiance à l’égard de la vaccination prospère volontiers sur un discrédit de la parole publique et l’idée que tout discours « officiel » est mensonger ou influencé par l’industrie pharmaceutique.

La question sensible du DT-polio

« La vaccination est l’un des acquis fondamentaux du XXème siècle en matière de santé, sans aucun doute l’un des plus importants. Elle a permis de faire reculer, voire d’éradiquer, des maladies dramatiques », a insisté la ministre en rappelant que la diphtérie faisait 3 000 morts par an en France avant l’introduction du vaccin en 1945. Et le tétanos environ 1 000 décès annuels. « La vaccination symbolise aussi l’appartenance à une communauté, a-t-elle indiqué. Parce que se vacciner, c’est se protéger, mais c’est aussi protéger les autres et en particulier les plus fragiles. Se vacciner, c’est un droit individuel, mais c’est aussi un devoir collectif. » Faut-il lever l’obligation du DT-polio ? Bien que les experts y soient plutôt favorables, Marisol Touraine veut se donner encore du temps pour trancher cette question sensible. « Il y a un consensus assez large pour estimer que la double catégorie vaccins obligatoires/recommandés est une source de confusion, a-t-elle expliqué. Mais j’ai une conviction : si je vous annonçais aujourd’hui, toute seule, parce que je suis ministre, la suppression de l’obligation vaccinale, je suis certaine que le taux de couverture vaccinale s’effondrerait ou tout au moins diminuerait de manière significative. Parce que dans le contexte actuel de doutes et d’inquiétude, cette mesure serait interprétée comme la possibilité de ne pas se faire vacciner. »

Une « grande concertation citoyenne »

Dans l’immédiat, Marisol Touraine a donc choisi de lancer une « grande concertation citoyenne » sur la vaccination, son caractère obligatoire mais aussi ses bénéfices et ses risques. Cette concertation sera mise en œuvre par un comité indépendant présidé par Alain Fischer, professeur renommé d’immunologie pédiatrique. En mars, une plate-forme Web sera mise en place pour recueillir des contributions citoyennes, professionnelles, associatives, institutionnelles. En mai, ces contributions seront analysées par trois jurys différents composés de citoyens, de professionnels de santé et d’experts scientifiques. En octobre, les avis des jurys et le contenu des contributions citoyennes seront rendus publics. Enfin en décembre, le comité Fischer fera ses propositions au gouvernement qui, alors, devra trancher.

Quelle place pour le mouvement anti-vaccinal ?

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Bref, une petite dose de « démocratie sanitaire » pour déminer un sujet politiquement sensible. Avec quand même une question : quelle place le mouvement anti-vaccinal, qui sait en général se faire entendre, occupera-t-il dans cette conférence citoyenne ? « Il y aura un espace pour que ces expressions soient entendues (…) Je ne veux pas faire comme si ce mouvement n’existait pas », a répondu la ministre, convaincue que sur un « tel sujet de société, seuls des échanges sereins et transparents ainsi qu’une réflexion approfondie permettront d’avancer et de renforcer la confiance des Français ». En attendant, pour contrer le discours anti-vaccin très présent sur Internet et les réseaux sociaux, le site Web consacré à cette question sera lancé dès le mois de mars pour le public et les professionnels de santé.

Ce que font les autres pays

« Peu de pays ont maintenu des obligations vaccinales au niveau national », relève le rapport sur la politique vaccinale de l’ex députée Sandrine Hurel. Et quand ces obligations existent, que ce soit au niveau national ou des autorités locales, elles sont souvent relatives.

Les pays avec obligation : - En Belgique, un calendrier vaccinal de base est établi chaque année par les autorités fédérales. À ce jour, seul le vaccin contre la poliomyélite est obligatoire. - En Italie, l’obligation concerne la diphtérie, le tétanos, la polio et l’hépatite B. Elle est d’application variable selon les provinces. - En Suisse, cette obligation « n’existe que dans quelques cantons » et son non-respect n’entraîne pas de sanctions. - Aux États-Unis, la réglementation sur les obligations est arrêtée au niveau de chacun des États.

Les pays sans obligation - En Allemagne, il n’existe aucune obligation vaccinale. Idem au Royaume-Uni. - En Espagne, pas d’obligation non plus, mais « dans des cas concrets de risque pour la santé publique », une vaccination peut devenir obligatoire. - Dans les pays nordiques, pas d’obligation vaccinale et « aucune vaccination n’est exigée pour les admissions en collectivités ».

Une première mastectomie sans cicatrice réalisée grâce à un robot Aufeminin.com du 13 janvier 2016 par Laure Gautherin

Une ablation totale du sein avec reconstruction mammaire simultanée par prothèse a été effectuée avec succès à l’Institut parisien Gustave Roussy grâce à une technique et un robot qui laissent la poitrine sans cicatrice.

C'est une première mondiale et un véritable espoir pour toutes les femmes souffrant d'un cancer du sein et devant subir une ablation du sein. Dans le cadre d’une étude clinique nommée "MARCI", la clinique Gustave Roussy est parvenue à réaliser une mastectomie avec reconstruction mammaire simultanée par prothèse sans laisser de cicatrice ou de marque sur le sein. Cette prouesse a été rendue possible grâce à l'intervention du robot Da Vinci XI qui permet des opérations plus précises mais aussi de limiter les risques infectieux, de nécrose ou de réouverture de la plaie.

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Tandis que la chirurgie classique passe par une incision sur le flanc du sein, celle-ci se fait via trois petites ouvertures sous l'aisselle puis une plus grande pour insérer la prothèse, ne laissant qu'une marque discrète de 4 à 5 cm sous le bras et non plus sur la poitrine, là où elle peut s'avérer traumatisante pour les patientes. « L’objectif est de proposer, dans le cadre réglementé et sécuritaire d’un essai clinique, une alternative chirurgicale, plus esthétique et moins traumatisante psychologiquement, aux femmes qui doivent subir une ablation du sein suivie d’une reconstruction immédiate », explique le Dr Benjamin Sarfati, chirurgien plasticien oncologue à Gustave Roussy à qui l'on doit cette réussite de taille. Cette intervention ne se fera toutefois que lorsqu'il sera possible de conserver le mamelon et l'aréole du sein ainsi que dans les cas de chirurgie préventive.

Lancé en octobre dernier, cet essai clinique doit être mené sur 35 patientes mais a déjà été un succès sur les deux pionnières. « Le diagnostic de mon cancer du sein est tombé il y a un an, témoigne l’une d’elles. Six mois après, j’ai dû subir l’ablation du premier sein avec une technique classique de chirurgie. On a découvert que j’avais une anomalie génétique prédisposante et j’ai donc décidé de faire une chirurgie préventive de mon second sein. Cette fois, j’ai eu la chance de pouvoir bénéficier de cette nouvelle technique assistée par le robot. J’ai eu beaucoup moins mal et je ne porte pas de marque visible sur la poitrine. Il n’y a aucune comparaison avec le premier sein. Ce nouveau type d’intervention va changer l’image du cancer du sein chez les femmes. »

Chaque année, 50 000 nouveaux cas de cancer du sein sont diagnostiqués et 20 000 mastectomies et 5 000 à 7 000 reconstructions mammaires sont réalisées. Cette révolution chirurgicale pourrait donc changer la vie et la guérison physique autant que psychologique de milliers de femmes en France mais aussi dans le monde entier.

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RECHERCHE

Les spermatozoïdes sensibles à l'obésité Le Figaro du 28 décembre 2015 par Jean-Luc Nothias

Une chirurgie bariatrique (anneau gastrique, bypass, gastrectomie, etc.) entraîne au niveau des spermatozoïdes des changements dans le fonctionnement de certains gènes, dont ceux liés au contrôle de l'appétit.

On sait aujourd'hui « reconnaître » les spermatozoïdes d'un homme obèse de ceux d'un homme non obèse. Et il est maintenant démontré qu'une chirurgie bariatrique entraîne au niveau des spermatozoïdes des changements dans le fonctionnement de certains gènes, dont ceux liés au contrôle de l'appétit, d'après une récente étude danoise menée par Ida Donkin, de l'université de Copenhague, parue dans la revue Cell Metabolism. On soupçonne donc que certains facteurs de risque de l'obésité, non strictement génétiques, pourraient être transmis à la descendance par ce biais. Ce qui expliquerait en partie que les enfants d'obèses ont un risque accru d'être en surpoids. Et d'une façon plus générale, cette transmission de caractère acquis pourrait être l'un des éléments impliqués dans certaines prédispositions et refléter la résistance au stress ou aux allergies.

Modifications réversibles

Ces travaux étonnants ont été rendus possibles grâce au développement d'une discipline assez récente, l'épigénétique. Elle s'attache à étudier des changements dans l'activité des gènes, liés à l'environnement, au sens large, des cellules. Ces modifications n'impliquent pas de modification de la séquence d'ADN (mutation) mais peuvent être transmises lors des divisions cellulaires. Contrairement aux mutations, les modifications épigénétiques sont éventuellement naturellement réversibles. Ces phénomènes sont bien connus chez les plantes, les insectes et maintenant certains animaux. Les gènes (entre 20 000 et 25 000 chez l'homme) ne fonctionnent pas tous en même temps. De plus, une cellule de peau n'a pas les mêmes besoins qu'une cellule musculaire ou qu'un neurone. Certains gènes sont « allumés », d'autres « éteints » ou en veille ; et le niveau d'activité du gène peut être fort ou faible. Cette régulation des gènes est assumée par des signaux biochimiques (comme la méthylation), à, la façon d'étiquettes indiquant quel gène doit s'exprimer, lequel doit se taire. « Si le chromosome est la bande magnétique d'une cassette et que chaque gène correspond à une piste enregistrée sur la bande, les modifications épigénétiques sont des morceaux de ruban adhésif repositionnables qui vont masquer ou démasquer certaines pistes, les rendant illisibles ou lisibles », explique-t-on à l'Inserm.

Le spermatozoïde est un bon sujet d'étude puisqu'il s'agit d'une cellule isolée, porteuse de la moitié du patrimoine génétique de l'individu. Les chercheurs peuvent établir un profil épigénétique de cette cellule, c'est-à-dire un portrait-robot très détaillé. « Nous avons montré que les hommes obèses sont porteurs de marques épigénétiques spécifiques sur des gènes essentiels à la régulation de l'appétit », explique Romain Barrès, de l'université de Copenhague, sous la responsabilité duquel ont été menés ces travaux. « Dans une cohorte de sujets massivement obèses à qui l'on fait subir une chirurgie dite bariatrique, et qui ont perdu en moyenne 30 kg en un an, nous observons que ces mêmes marques sont drastiquement remodelées après la perte de poids. Nos résultats impliquent que nous pourrions changer de façon très dynamique ce que nous transmettons via nos cellules sexuelles à nos enfants, ce qui ouvre, notamment, de nouvelles perspectives en termes de comportement “préconceptionnel” et plus spécifiquement dans la lutte contre l'épidémie d'obésité.»

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Mais beaucoup de questions restent encore sans réponse et le lien entre spermatozoïdes « obèses » et risque d'obésité de la descendance reste à prouver formellement. De nouvelles études sont en cours à partir de matériel (spermatozoïdes de donneurs, cellules de cordon ombilical des enfants, embryons non utilisés des mêmes donneurs) d'une clinique danoise de procréation médicalement assistée. Une étude de longue haleine qui prendra quelques années.

Les effets du stress transmissibles à la descendance Le Figaro du 28 décembre 2015 par Pierre Kaldy

Plusieurs équipes de chercheurs ont détecté dans les spermatozoïdes de souris soumises à un stress répété la présence d'ARN non codants qui rendraient leur descendance moins sensible au stress.

Le stress vécu par une génération peut aussi passer par les spermatozoïdes. Plusieurs équipes de recherche explorent une nouvelle forme d'hérédité qui explique pourquoi la descendance de souris mâles stressées continue d'être affectée par un traitement qu'elle n'a jamais connu. Cette transmission, dite épigénétique, s'effectue par l'ADN mais aussi d'autres fragments d'information génétique appelés ARN non codants. De tels ARN ont été identifiés dans les spermatozoïdes de souris mâles qui avaient été stressés de manière chronique des mois auparavant, annoncent des chercheurs américains dans les Comptes rendus de l'Académie des sciences américaine. Preuve de leur rôle, l'injection de ces petits ARN à la cellule issue d'une fécondation in vitro induit chez les souris produites une moindre réaction hormonale au stress. « Si vous naissez dans un environnement quelque peu stressant, il vaut peut-être mieux pour votre cerveau et votre utilisation d'énergie ne pas répondre autant à chaque perturbation », précise au Figaro la chercheuse Tracy Bale, de l'université de Pennsylvanie, qui a dirigé ce travail. L'équipe montre aussi que l'expression de nombreux gènes semble modifiée chez l'animal adulte après l'injection des ARN liés au stress.

Ce rôle d'ARN non codants dans la transmission du stress chez les mammifères a été montré pour la première fois l'an passé par la Française Isabelle Mansuy et son équipe de l'université de Zurich et de l'École polytechnique fédérale de Zurich en Suisse. Dans leur étude pionnière, les chercheurs ont utilisé les ARN des spermatozoïdes prélevés chez des mâles ayant subi un stress différent, des séparations aléatoires de leur mère après la naissance. En injectant ces ARN à des ovocytes fécondés naturellement et prélevés par chirurgie, ils ont pu conférer aux souris issues de cette fécondation plusieurs symptômes de dépression et de moindre réaction au stress.

Plus surprenant encore, la progéniture de ces souris a aussi présenté ces caractères. « Dans certains cas, cela peut être un avantage, remarque Isabelle Mansuy. Dans notre modèle de stress postnatal, des souris issues de mâles stressés présentent des troubles de la mémoire à long terme mais aussi une plus grande souplesse d'adaptation face à de nouvelles conditions d'apprentissage. Nous avons montré récemment que ces caractères passent par des modifications de l'ADN qui sont transmissibles et réversibles. » Des études antérieures ont déjà montré que des symptômes de dépression chez des souris mâles adultes induits par un fort stress social peuvent se transmettre par les spermatozoïdes, même après fécondation in vitro. De tels résultats restent à confirmer chez l'homme mais laissent déjà penser qu'un type de déterminisme peut exister dans les spermatozoïdes et se mettre en place bien avant la conception d'un enfant.

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« Plusieurs mécanismes semblent à l'œuvre pour transmettre à la descendance du père des caractères acquis au cours de sa vie, précise Isabelle Mansuy. Et nous commençons à peine à les déchiffrer. Les modifications des spermatozoïdes chez une souris traumatisée semblent néanmoins réversibles si l'animal est placé dans un milieu enrichi qui le stimule mentalement. » Contre toute attente, une mémoire du comportement acquis au cours de la vie, et probablement aussi du métabolisme, semble se transmettre par les spermatozoïdes.

Le cerveau n'a pas de sexe Le Figaro du 30 décembre 2015 par Jean-Luc Nothias

L’encéphale d’un homme et celui d’une femme ne peuvent être distingués à l’IRM. Selon une étude récemment publiée, l'imagerie médicale ne permet pas de distinguer les cerveaux humains des hommes et des femmes.

Certain(e)s seront ravi(e)s. D'autres plutôt déçu(e)s. Une nouvelle étude indique que, du point de vue cérébral, les hommes ne viennent pas de Mars ni les femmes de Vénus. Mais plutôt d'une planète intermédiaire, hybride entre les deux, et encore inconnue. Longtemps on a cru que le cerveau des hommes était en moyenne plus gros que celui des femmes. On sait aujourd'hui que cela est faux. Ou du moins, que le rapport entre le poids du corps et celui du cerveau est exactement le même pour les deux sexes. On sait également que ce n'est pas le nombre de neurones qui importe, mais le nombre et la nature des connexions qu'ils établissent. Et que cette architecture en toile d'araignée à trois dimensions est plastique et susceptible d'évolution.

L'étude publiée dans les PNAS* par Daphna Joël, de l'École des sciences psychologiques de l'université de Tel-Aviv, et ses collègues montre que « les cerveaux humains ne peuvent être rangés en deux types distincts, le cerveau féminin et le cerveau masculin ». Ce n'est pas pour cela qu'il n'y a pas de différences. Il existe des traits plus « féminins », d'autres plus « masculins » et enfin d'autres « neutres ». Chaque cerveau est anatomiquement légèrement différent, son fonctionnement également, induisant des comportements différents. La plasticité fait qu'il se façonne en fonction de tous les éléments de notre histoire personnelle. Il est comme une mosaïque reflet du parcours de chacun.

Des “mosaïques” de caractéristiques

« Ici, nous montrons que, bien qu'il y ait des différences entre masculin et féminin dans le cerveau et dans les comportements, les humains et leurs cerveaux sont formés de “mosaïques” de caractéristiques, certaines plus présentes chez les femmes comparées aux hommes, certaines à l'inverse, et d'autres présentes chez les deux, écrit Daphna Joël. Nos résultats démontrent (…) que les cerveaux humains ne peuvent être classés en deux classes distinctes, mâle ou femelle. » Les chercheurs ont passé au crible des enregistrements de différents types d'imageries médicales réalisés sur plus de 1400 personnes. Ils ont analysé la matière blanche, la matière grise et leurs connexions (par les techniques de « connectome », qui visent à l'établissement d'un plan complet des connexions neuronales dans un cerveau). Il s'agissait de repérer des zones plutôt « féminines » ou plutôt « masculines ». Que le cerveau féminin soit plus « verbal » ou légèrement moins performant pour tout ce qui relève de la visualisation et de la rotation mentale en trois dimensions, qu'il ait quelques glandes légèrement plus développées sous l'action des hormones, cela ne change pas fondamentalement la donne…

Catherine Vidal, neurobiologiste et membre du comité d'éthique de l'Inserm, se plaît à le répéter :

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« Il est impossible de deviner, en regardant un cerveau adulte, s'il appartient à un homme ou à une femme. » Si les cerveaux présentent de grandes différences anatomiques d'un individu à l'autre, « les différences observées entre les cerveaux de personnes d'un même sexe sont bien plus importantes que les différences éventuelles entre les deux sexes ». *Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America (qui peut être traduit par « Actes (ou comptes-rendus) de l'Académie américaine des sciences »), abrégé en Proc. Natl. Acad. Sci. USA ou PNAS, est une revue scientifique américaine à comité de lecture, publiant les comptes-rendus de l'Académie américaine des sciences.

Myopathie : un nouvel espoir de guérison Le Point du 4 janvier 2016 par Anne Jeanblanc

Une nouvelle technique de thérapie génique permet d'éliminer précisément les portions d'ADN responsables de certaines maladies, voire de les réparer.

Les résultats annoncés en décembre dernier dans la prestigieuse revue Science montrent que 2016 sera – encore – une grande année pour la génétique. Et d'espoir pour les enfants souffrant de myopathie. Car un outil très performant, un « ciseau à ADN », mis au point en 2012 se révèle chaque jour plus intéressant. Certes, les principaux travaux actuels portent sur l'animal, mais l'éventail des possibilités – et le nombre d'articles publiés – justifie le titre de « percée de l'année » qui lui a été accordé par Science l'an dernier. En attendant des résultats chez l'homme, il faut savoir que cette technique a, par exemple, déjà permis de modifier le génome de moustiques pour qu'ils ne puissent plus transmettre le paludisme ou de produire des vaches laitières sans cornes. Elle a également permis de « débarrasser » des porcs de séquences virales dans leur génome, ce qui pourrait ouvrir la voie à une utilisation de leurs organes pour des greffes chez l'homme. La technique, connue par les scientifiques sous le sigle CRISPR-Cas9, utilise une enzyme capable de couper l'ADN, associée à un ARN ayant une séquence spécifique de la région du génome à modifier. Cela permet de « réparer » une portion d'ADN dans laquelle se trouve une mutation ou, comme dans les études sur la myopathie de Duchenne, de l'éliminer. Dans cette maladie, le gène de la dystrophine (une protéine présente notamment dans les fibres musculaires) est muté. Cette anomalie se trouve souvent dans une portion bien spécifique du gène, « l'exon 23 ».

Amélioration des capacités musculaires L'objectif des études publiées dans Science était justement d'introduire le système CRISPR-Cas9 dans les cellules musculaires afin qu'il modifie le gène muté de la dystrophine en enlevant l'exon 23. Les travaux ont été réalisés chez des souris myopathes adultes ou nouveau-nées. À chaque fois, il y a bien eu modification du gène muté dans des cellules musculaires, entraînant la production d'une dystrophine fonctionnelle, malgré l'élimination de l'exon 23. Conséquence : une amélioration des capacités musculaires des animaux traités. Bien que l'on n'en soit pas encore à envisager une application chez l'homme, ces résultats permettent d'envisager une nouvelle voie de traitement de cette maladie et probablement d'autres affections génétiques.

Ce formidable espoir est cependant obscurci par une crainte qui taraude certains chercheurs et, en premier lieu, Jennifer Doudna, biologiste de l'université de Berkeley, l'une des deux scientifiques à l'origine de la mise au point de cette technique. Dans Les Échos, Yann Verdo la compare au « Dr Frankenstein effrayé par sa propre créature ».

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Le risque de dérive éthique est d'autant plus important que la technique peut être facilement utilisée non seulement sur les cellules différenciées mais aussi sur les cellules reproductrices, transmises à la descendance. Des chercheurs l'ont déjà employée pour réaliser des modifications de génomes d'embryons humains (non viables). « Vouloir débarrasser son futur bébé d'une maladie génétique grave comme la myopathie semble parfaitement légitime, mais cela l'est déjà moins s'il s'agit, disons, d'un léger strabisme ; et que dire des parents qui désireront se servir de cet outil pour choisir la couleur des yeux de leur progéniture ? » se demande le journaliste. La question mérite effectivement d'être posée.

Grippe : des marqueurs sanguins pour aider à détecter les réactions au vaccin Le Parisien du 5 janvier 2016 avec AFP

Des particularités sanguines pourraient contribuer à identifier les personnes susceptibles de réagir négativement au vaccin contre la grippe, avec des effets indésirables passagers (douleurs, fièvre..), selon une étude publiée lundi.

Les chercheurs ont administré à 178 participants (18 à 65 ans) en bonne santé un vaccin contre la grippe A (H1N1) 2009, contenant un adjuvant, destiné à stimuler les réponses immunitaires. Ce vaccin, le Pandemrix du laboratoire britannique GSK, était destiné à prévenir l'infection par le virus de la pandémie 2009 surnommée "grippe porcine" chez les Anglo-saxons. Depuis des virus du même type (A/H1N1/2009) circulent régulièrement lors des épidémies saisonnières de grippe, aux côtés d'autres virus (A/H3N2, B). Les chercheurs ont mesuré des centaines de paramètres qui affectent la capacité de réponse du système immunitaire.

Dans les 24 heures suivant la vaccination, les chercheurs ont constaté chez tous les volontaires des changements profonds dans les fréquences de circulation des globules blancs, ainsi que dans les gènes et les protéines exprimés par ces cellules. Cette réponse immunitaire précoce présente des différences entre les participants d'environ 35 ans et les autres. « Nous étudions les mécanismes par lesquels les lymphocytes sont activés dans les 24 heures suivant la vaccination alors que ces cellules de défense immunitaire ne devraient l'être que cinq à sept jours après l'injection, d'après les manuels médicaux », commente Adrian Hayday (King's College London) responsable de l'étude. « Cela peut fournir des indices pour améliorer la formulation de vaccins », selon lui.

Parmi les 20 % des participants qui ont déclaré des réactions indésirables à la vaccination (fièvre, douleurs articulaires...) dont ils se remettent assez rapidement en un à sept jours, les auteurs ont détecté un profil atypique préexistant à la vaccination. Ce travail paru dans la revue Nature Immunology pourrait être utile pour d'autres formes d'intervention, comme par exemple pour l'immunothérapie du cancer afin de mieux comprendre ceux qui peuvent en bénéficier, ajoute Adrian Hayday.

Les enfants nés par FIV n'ont pas plus de retard de développement Pourquoi Docteur ? du 5 janvier 2016 par Anne-Laure Lebrun

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Les enfants nés grâce à la procréation médicalement assistée n'ont pas plus de risques de souffrir d'un retard de développement que ceux conçus naturellement.

Au cours des dernières décennies, les techniques de l’assistance médicale à la procréation (AMP) n’ont cessé de s’améliorer. Stimulation ovarienne, insémination artificielle, fécondation in vitro (FIV), transfert d’embryons congelés. Ces différentes techniques sont utilisées chaque jour par des centaines de centres spécialisés et permettent à des milliers de couples confrontés à l’infertilité d’avoir un enfant. En France, en 2013, 23 651 enfants sont nés grâce à l’AMP, selon l’Agence de la Biomédecine. Pourtant, la littérature scientifique offre peu d’informations sur le devenir de ces enfants, en particulier les effets éventuels des traitements de l’infertilité sur leur développement. C’est pourquoi des chercheurs américains se sont penchés sur cette question. Ils publient leurs résultats ce lundi dans la revue JAMA Pediatrics.

Aucune différence entre les enfants

Entre 2008 et 2014, l’équipe dirigée par le Dr Edwina Yeung* a suivi 1 800 enfants nés grâce à l’AMP et 4 000 enfants conçus naturellement. Jusqu’à leur 3 ans, les parents ont été invités à remplir des questionnaires portant sur le développement moteur, la capacité de communication, l’aptitude à résoudre des problèmes ainsi que le fonctionnement social de leur enfant. En parallèle, les mères devaient préciser le traitement auquel elles ont eu recours. Au terme de cette étude, les chercheurs n’ont observé aucune différence significative entre les enfants issus d’une AMP et les autres. Par ailleurs, parmi les enfants présentant un retard de développement à l’âge de 3 ou 4 ans, autant ont été conçus naturellement (18 %) et par AMP (13 %), ce qui suggère que ce déficit n’est pas associé au traitement de l’infertilité. Enfin, les scientifiques n’ont trouvé aucune différence significative entre les différentes techniques de procréation médicale assisté. Autrement dit, les enfants nés grâce à une insémination artificielle n’ont pas plus de risques que ceux issus d’une FIV. « A ma connaissance, aucune étude n’a mis en évidence de différence sur le plan psychique et psychomoteur entre les enfants nés grâce à une AMP et les autres, indique le Pr Jean-François Guérin, responsable du Centre d’Etude et de Conservation des Œufs et du Sperme (CECOS) de Lyon. Ces résultats sont rassurants et confirment tous les travaux conduits jusqu’à présent ».

Un risque accru d'autisme non écarté

Néanmoins, une étude précédente menée par les mêmes auteurs indique que les enfants nés d’une fécondation in vitro avec micro-injection (FIV-ICSI), la plus pratiquée aujourd’hui, ont un risque accru d’autisme dans les 5 premières années de vie. Aussi, les scientifiques ont décidé de poursuivre leur étude jusqu’au 8ème anniversaire des enfants. « Ceci nous permettra d’analyser de manière plus complète leur développement et noter l’apparition de troubles qui ne se manifestent que plus tard », concluent les auteurs. *Eunice Kennedy Shriver National Institute of Child Health and Human Development.

Embryons défectueux: des chercheurs du CHUM font une découverte La Presse Canadienne du 4 janvier 2016 par Lia Lévesque

Des chercheurs du CHUM viennent de découvrir comment se produit une anomalie dans le développement d'un embryon, ce qui peut nuire au succès des traitements de fertilité.

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L'équipe du docteur Greg FitzHarris, du Centre de recherche du Centre hospitalier de l'Université de Montréal (CRCHUM), a fait cette découverte chez la souris, mais estime fort probable que le mécanisme mis en cause se produit aussi chez l'humain.

Ainsi, grâce à des microscopes super puissants, l'équipe de chercheurs a détecté dans des cellules défectueuses un petit noyau satellite à côté du noyau principal. Ce petit noyau, appelé micronucleus, serait relié au phénomène d'un nombre anormal de chromosomes. Or, lors des traitements de fertilité, environ la moitié des embryons générés contiennent des cellules avec un nombre anormal de chromosomes. Les médecins considèrent ces embryons comme de mauvaise qualité et préfèrent ne pas les transférer chez la femme. « Le seul moyen classique de sélectionner un embryon - pour savoir lequel il faut transférer avec de bonnes chances -, c'est la morphologie embryonnaire, c'est-à-dire que sur le nombre des cellules, la régularité des cellules, la présence ou non de fragments cellulaires, on arrive à établir un score et choisir l'embryon qui a le score le plus élevé », a expliqué au cours d'une entrevue, lundi, le docteur Jacques Kadoch, directeur médical de la Clinique de procréation assistée du CHUM.

« Il existe des moyens de savoir si l'embryon est "chromosomiquement" normal ou pas, mais il faut faire une biopsie qui est très agressive » et faire analyser le tout en laboratoire. « Avec la découverte du docteur FitzHarris, sur la morphologie de l'embryon, si on met en évidence certains éléments structuraux autour du noyau, qu'on appelle des micronuclei, ces micronuclei seraient associés à plus d'anomalies chromosomiques », a-t-il expliqué. Si cette découverte chez la souris se confirme chez l'humain, cela pourrait être utile pour accroître les chances de succès dans les cliniques de fertilité. « C'est toujours d'affiner le choix de l'embryon, d'avoir un critère supplémentaire qui nous permettrait de dire "cet embryon est probablement porteur d'une mosaïque embryonnaire. L'autre à côté, même s'il paraît un peu moins beau, génétiquement il est parfait, donc autant le transférer avec plus de chances de succès" », a résumé le docteur Kadoch. Cela prendra toutefois un certain temps avant de valider les résultats chez l'humain, a-t-il pris soin de noter.

L'étude du docteur FitzHarris et de son équipe a paru lundi dans la revue spécialisée Proceedings of the National Academy of Sciences. La recherche a été financée par la Fondation J.-Louis Lévesque et le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada.

Des spermatozoïdes sous influence Le Monde Science et Techno du 6 janvier 2016 par Florence Rosier

Une série d’études suggère qu’un régime trop riche ou carencé, ou bien un traumatisme psychique, peut avoir un impact sur la descendance

Comment un traumatisme psychique ou un déséquilibre alimentaire d’un futur parent, avant même la conception, peut-il engendrer des effets sur plusieurs générations  ? Fin décembre, une série d’avancées a été accomplie sur cette voie explorant un mode d’hérédité « buissonnier  »  : l’épigénétique. L’épigénétique, ou comment chahuter les lois de l’hérédité classique   : ce mode de transmission, en effet, n’est plus exclusivement fondé sur la sacro-sainte séquence de l’ADN. Avec l’épigénétique, c’est un héritage plus subtil – plus fragile aussi – qui est transmis au fil des générations   : ce sont des «  marques  » qui jalonnent le génome, en des sites précis. Sensibles à des facteurs de l’environnement, ces marques «  allument  » ou «  éteignent  » nos gènes dans nos cellules. C’est ainsi qu’une cellule de notre cerveau est très différente d’une cellule de notre foie, de nos muscles, de nos os…

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Publiées le 31 décembre dans Science, deux études ont examiné l’impact d’une alimentation perturbée chez la souris. Dans la première, l’équipe de Qi Zhou (Institut de zoologie, Pékin) a soumis des souris mâles à un régime très gras. Avec le sperme de ces rongeurs, les chercheurs ont fécondé des femelles nourries normalement. Les souris issues de cette manipulation ont développé une intolérance au glucose et une résistance à l’insuline, deux signes de prédiabète. Elles présentaient aussi une moindre expression de gènes impliqués dans le métabolisme des sucres.

Des groupes apposés sur l’ADN

La plupart des marques épigénétiques connues sont des groupes biochimiques apposés sur l’ADN, ou des modifications des protéines liées à l’ADN. «  Les deux études de Science révèlent l’importance d’autres marques épigénétiques  : de petits ARN non codants [les ARN sont, comme l’ADN, des acides nucléiques]  », indique Emiliano Ricci, de l’Inserm (Ecole normale supérieure de Lyon), coauteur d’une de ces études. Les chercheurs chinois ont isolé les ARN des spermatozoïdes de souris soumises à ce régime gras. Puis ils ont injecté ces ARN à des ovocytes de souris juste fécondés. Les rongeurs nés de cette intervention ont développé une intolérance au glucose. Les ARN assurant cette transmission sont des fragments «  d’ARN de transfert  ». Leur principale fonction est de transporter les acides aminés lors de la fabrication des protéines. Mais, ici, leurs fragments semblent avoir été «  recyclés  » à des fins épigénétiques. Dans la seconde étude de Science, l’équipe d’Oliver Rando (université de médecine du Massachusetts) a analysé les effets, chez la souris, d’un régime pauvre en protéines. Ses résultats confortent l’idée d’un rôle de ces petits ARN en épigénétique. Un régime pauvre en protéines entraîne, chez la génération suivante, la dérégulation de tout un jeu de gènes, avait montré cette équipe en 2010.

Des troubles sur deux générations

Et chez l’homme ? «  Dans les spermatozoïdes de personnes obèses, nous trouvons une signature spécifique, constituée de petits ARN et de méthylations de l’ADN. Cette signature marque des gènes qui gouvernent l’appétit  », résume Romain Barrès, de l’université de Copenhague, principal auteur d’une étude publiée en décembre dans Cell Metabolism. Mieux  : «  Cette signature change drastiquement après une perte de poids massive induite par une chirurgie de l’obésité.  » Dans une autre étude à paraître dans Molecular Metabolism, cette équipe montre qu’un régime gras, suivi par un rat mâle, provoque des troubles métaboliques sur deux générations. Ces troubles seraient en partie transmis par de petits ARN du sperme. Est-ce à dire que seuls les mâles transmettent à leur descendance les effets de leurs modes de vie altérés ? Non. «  Les femelles aussi peuvent transmettre des changements épigénétiques. Mais les spermatozoïdes sont plus faciles à étudier que les ovocytes  », dit Isabelle Mansuy, de l’Ecole polytechnique fédérale et de l’université de Zurich.

Retrait social et désordres métaboliques

D’autres études ont révélé, chez l’animal, comment le traumatisme psychique d’un géniteur peut retentir sur les générations suivantes. En 2010, Isabelle Mansuy montrait les effets d’une séparation chronique et imprévisible de jeunes souris mâles d’avec leur mère. Leurs « enfants  » et «  petits-enfants  » souffraient de troubles dépressifs et cognitifs, d’un retrait social et de désordres métaboliques. En 2014, l’équipe de Zurich découvrait de petits ARN spécifiques altérés dans le sperme de ces souris traumatisées. En injectant l’ARN du sperme de ces animaux dans des ovocytes juste fécondés, elle reproduisait ces troubles sur deux générations. En octobre 2015, une étude publiée dans les PNAS confortait ces résultats. L’équipe de Tracy Bale, de l’université de Pennsylvanie, retrouvait de petits ARN spécifiques dans les spermatozoïdes de souris ayant subi un stress chronique précoce.

Quelle est la portée de cette hérédité épigénétique chez les mammifères  ? C’est un chantier qui s’ouvre. Car l’existence de ces processus reste à prouver chez l’homme, et leurs mécanismes à préciser. Reste aussi cette troublante question   : peut-on voir, dans cette transmission épigénétique, une forme d’hérédité des caractères acquis  ? «  Je ne pense pas que les caractères “obèse” ou “stressé”, en tant que tels, soient transmis, estime Romain Barrès.

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Ce qui se transmet est une adaptation, induite par l’environnement de nos ancêtres.  » Emiliano Ricci ajoute que «  les caractères transmis par épigénétique peuvent être labiles  ». Si de nouvelles marques épigénétiques sont facilement créées par des changements environnementaux, elles sont tout aussi aisément effacées par de nouveaux changements. L’épigénome offrirait aux individus un moyen d’explorer rapidement une adaptation à une variation de l’environnement, sans pour autant la graver dans le génome…

L’épigénétique façonne les fourmis

Et si l’épigénétique déterminait le statut social ? C’est ce qu’une équipe américaine vient de proposer dans la revue Science. Son sujet d’étude n’est pas l’humain, mais la fourmi, insecte social par excellence. Mais le résultat de ses recherches apporte des pistes prometteuses. Les fourmis charpentières de Floride sont composées de deux castes : les soldates et les ouvrières. Les deux disposent du même patrimoine génétique. Les secondes ont pourtant des têtes plus petites, des mandibules moins puissantes… et une surexpression des gènes impliqués dans le développement cérébral. A ce constat, les chercheurs en ont ajouté un autre, plus spectaculaire : en modifiant la composition chimique des histones – ces protéines autour desquelles s’enroule l’ADN –, ils sont parvenus à modifier le comportement des fourmis. Un simple changement d’alimentation a dopé l’activité des ouvrières fourrageuses. Pour les soldates, il a fallu en passer par l’injection directe de ces mêmes produits dans le cerveau de jeunes spécimens. Les combattantes ont alors aligné leur activité sur celle des ouvrières. Les auteurs parlent de « fenêtre épigénétique de vulnérabilité » et rêvent déjà d’application thérapeutique chez l’homme.

Cannabis et épilepsie, l'espoir à petits pas Le Figaro du 9 janvier 2016 par Soline Roy

Un essai clinique va vérifier l'efficacité d'un médicament contenant du cannabidiol contre des épilepsies très sévères.

« Je devrais prendre le temps d'expliquer à sa grande sœur que ce n'est pas la même chose que le cannabis que l'on fume… » Amateurs de volutes enivrantes, passez votre chemin : l'Epidiolex prescrit à la cadette de Claire est quasiment dépourvu de THC, principal responsable des effets psychoactifs du haschisch. La fillette participe à un essai financé par le laboratoire britannique GW Pharmaceuticals (également producteur du Sativex, premier médicament à base de cannabis autorisé en France contre la sclérose en plaques), qui teste l'efficacité du cannabidiol contre des épilepsies pharmacorésistantes. Ce composé du cannabis a été popularisé en 2013 par un reportage de CNN racontant l'histoire de Charlotte Figi dans le Colorado : de 300 crises par jour, l'enfant passe à une seule, reparle, marche, parvient même à faire du vélo… Le cannabis, produit miracle ? C'est aller un peu vite.

Pas de médicament miracle

« Toutes les semaines, des parents me posent la question, témoigne le Pr Stéphane Auvin, neuropédiatre à l'hôpital Robert-Debré. Mais ce n'est pas parce qu'une molécule a eu un effet sur un patient qu'elle marchera chez tout le monde. » D'autant qu'avec l'épilepsie, rien n'est simple. « Il n'existe pas et il n'existera probablement jamais de médicament miracle, explique Christophe Bernard, neurobiologiste à l'Inserm. L'épilepsie est une activité endogène du cerveau et une multitude de chemins peuvent mener à la crise. Un antiépileptique qui “bouche” l'une de ces routes ne bloquera pas les autres… »

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Plusieurs travaux plaident pour une bonne efficacité (fréquence des crises réduites d'au moins 50 % chez environ la moitié des patients) avec des effets secondaires comparables à ceux d'autres antiépileptiques (somnolence, diarrhées, fatigue, baisse de l'appétit…). Mais ces études pèchent par un manque de force statistique et méthodologique. « On a un signal qui permet de dire que potentiellement, ça marche, tempère le Pr Auvin. Il nous faut plus de preuves venant d'un essai clinique avant de conclure. »

Etude contre placebo

L'essai auquel participe la fille de Claire répond aux standards de la « bonne » science (randomisation, double aveugle contre placebo…). Atteinte du syndrome de Dravet, l'enfant a 9 ans et autant d'années de crises derrière elle malgré la prise de quatre antiépileptiques. « Quand on m'a parlé de l'étude, je n'ai pas hésité. Avec tous les médicaments qu'elle prend, les risques sont déjà là, alors autant tenter le coup. » Claire est convaincue que sa fille a reçu le produit actif, et non pas le placebo : « Elle a très vite cessé d'avoir des crises généralisées, elle est moins fatiguée, ses phrases sont mieux construites… » Il faudra pourtant quantifier l'effet placebo, tant il peut être important dans l'épilepsie, surtout chez les plus jeunes. Une étude menée au Colorado, où plusieurs familles ont emménagé pour soigner leurs enfants lorsque l'usage du cannabis thérapeutique y a été légalisé, a ainsi livré des chiffres étonnants : le produit s'est avéré efficace chez… 47 % des enfants des nouveaux venus, contre seulement 22 % de ceux qui avaient toujours vécu au Colorado ! « Plus forte est la croyance que le médicament aura un effet, et plus grand le sacrifice accepté pour l'obtenir, meilleure sera la réponse », suggérait en septembre un article de synthèse du New England Journal of Medicine (NEJM).

Quels effets à long terme ?

Autre mystère : le mode de fonctionnement du cannabidiol. Notre cerveau produit naturellement des cannabinoïdes qui modulent l'excitabilité neuronale, mais des défauts de ce système ont été identifiés chez des patients épileptiques, explique le même article du NEJM. Le cannabidiol fait aussi grimper la concentration sanguine de certains médicaments. « Fonctionne-t-il par lui-même ou en interaction avec les autres antiépileptiques ?, s'interroge donc Stéphane Auvin. Et dans ce cas, pourquoi ne pas simplement augmenter les doses de médicament ? » Quant aux possibles effets à long terme, ils restent mal connus. « Ce produit agit sur la sédation, la vigilance, la dépression… Ces effets psychoactifs existent donc », notait fin juin la commission des stupéfiants et psychotropes de l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). « Chez l'animal, on a montré que l'activation du système cannabinoïde ralentit l'activité du cerveau en développement », ajoute Christophe Bernard.

La science face au marketing

Conclusion du NEJM : « L'usage du cannabis médical comme traitement de l'épilepsie pourrait prendre le même chemin que les vitamines ou les suppléments nutritionnels, pour lesquels la science (…) a été noyée sous les affirmations non vérifiées, les témoignages sensationnels, et un marketing évident. » « Le cannabidiol a beaucoup amélioré la qualité de vie de ma fille, apprécie Claire. Mais je ne me fais pas trop d'illusions sur son évolution. L'objectif serait surtout de réduire les doses de ses autres médicaments. » Pas non plus d'espoir démesuré chez les médecins. « Le cannabidiol devrait aider certains patients, dans un groupe de pathologies très sévères. Mais s'il est efficace, ne serait-ce qu'un peu, ce sera clairement bienvenu ! », plaide le Pr Rima Nabbout, neuropédiatre à l'hôpital Necker où elle coordonne le centre de référence des épilepsies rares, et investigatrice principale du volet français de l'essai mené sur les syndromes de Dravet et de Lennox-Gastaut.

Les résultats sont attendus avant l'été 2016. Mais quels qu'ils soient, l'industriel a pris envers Claire un engagement : si le médicament fonctionne sur sa fille et tant que le laboratoire continuera à le produire, elle en bénéficiera. Sans attendre une éventuelle autorisation de mise sur le marché.

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Le cannabis à usage médical autorisé à la vente dans des dispensaires à New York

Le cannabis à usage médical est commercialisé depuis jeudi dans l'État de New York. Mais les 20 dispensaires prévus dans l'État ne sont pas encore tous ouverts. Le démarrage devrait de toute façon être progressif, car les patients ne peuvent s'inscrire que depuis le 23 décembre. Seules sont éligibles les personnes atteintes de maladies graves, notamment le cancer, Parkinson, la sclérose en plaques et certaines formes d'épilepsie. Elles ne pourront pas acheter du cannabis à fumer, mais uniquement des produits transformés, essentiellement des pilules, des huiles ou des gouttes. Vingt ans après la légalisation du cannabis à usage thérapeutique par la Californie, 23 États et la capitale fédérale Washington ont franchi le pas.

La génétique revisite la nosographie

Les MICI, un continuum avec 3 maladies et non 2 Le Quotidien du Médecin du 11 janvier 2016 par le Dr Irène Drogou

La plus grande étude génétique internationale menée jusqu’à présent dans les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI) donne un nouvel éclairage sur leur classification nosographique. La description binaire classique, avec maladie de Crohn (MC) et rectocolite hémorragique (RCH), ne serait pas tout à fait exacte. La génétique laisse apparaître un continuum, qui peut être regroupé en 3 catégories.

Il n’y aurait pas deux entités dans les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI), maladie de Crohn (MC) et recto-colite hémorragique (RCH) mais trois. C’est ce que suggère dans le « Lancet* » une étude génétique d’une ampleur inégalée chez près de 30 000 patients. Selon l’équipe internationale dirigée par Isabelle Cleynen, auprès de 49 centres dans 16 pays en Europe, Amérique du Nord et en Océanie (Australie, Nouvelle-Zélande), la génétique sur plus de 150 000 variants montre qu’il existe un continuum dans les MICI. Le modèle binaire MC et RCH céderait la place à trois groupes : la MC iléale, la MC colique et la RCH. Alors que la présentation des MICI est très hétérogène, la génétique et les facteurs environnementaux pourraient expliquer la variabilité clinique. Deux gènes de susceptibilité, NOD2 et HLA, ont focalisé l’attention dans les débuts. Le gène NOD2 semblait être associé à l’intestin grêle et les allèles HLA à la maladie colique. L’essor de la génétique a permis d’identifier 163 variants indépendants associés aux MICI. Et là surprise, la plupart d’entre eux confèrent un risque à la fois de MC et de RCH, mais semble-t-il avec des effets tailles différents dans les deux maladies.

La MC colique en position intermédiaire

Dans cette étude sans précédent, les chercheurs ont étudié plus précisément l’association génotype-phénotype. Pour cela, avant d’analyser individuellement les génotypes, ils ont détaillé les sous-phénotypes pour les (16 902 ayant une MC et 12  597 ayant une RCH) selon la classification de Montréal. Cette classification prend en compte les principaux facteurs influant sur les MICI : l’âge au diagnostic, la localisation, l’extension, l’évolution. Par exemple, un âge jeune au diagnostic est généralement associé à une forme plus agressive et plus étendue à la fois pour la MC et la RCH. Les atteintes iléales et iléo-coliques de la MC sont plus souvent associées aux sténoses, aux fistulisations et à un recours à la chirurgie par rapport à la MC colique.

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Premier résultat étonnant, contrairement à ce qui avait été suggéré précédemment, le gène NOD2 n’est pas associé à une maladie sténosante. Ce gène était en revanche associé à l’âge jeune au diagnostic et à la localisation iléale. De plus, la localisation colique était mieux annoncée par le gène de susceptibilité HLA de la RCH, plutôt que par les allèles de susceptibilité de la MC, et les chercheurs ont creusé cette piste. Il est apparu que, sur le plan génétique, la MC colique est en position intermédiaire entre la MC iléale et la RCH.

La question des facteurs épigénétiques

Les 163 variants indépendants étaient associés fortement aux principaux sous-phénotypes, ce qui suggère « qu’ils ont un effet faible, et que les facteurs environnementaux (tels que le régime, le microbiote et le tabagisme) contribuent fortement aux phénotypes ». Seuls trois principaux variants (NOD2, CMH, 3p21/MST1) étaient associés de façon significative aux phénotypes cliniques, mais sans expliquer la variance de la maladie. À côté de NOD2, l’âge au diagnostic et le tabagisme étaient les principaux déterminants de la localisation pour la MC, alors qu’il s’agissait de l’âge au diagnostic pour l’extension de la maladie pour la RCH.

Dans quelle mesure cette nouvelle classification va-t-elle modifier les choses ? Pour les auteurs, cette nouvelle nomenclature permettra d’éviter des erreurs de diagnostic et de proposer le traitement le plus adapté dans certains cas. « Le type de chirurgie proposé aux patients ayant une colite réfractaire dépend du fait qu’il s’agit d’une RCH ou d’une MC colique », indiquent-ils. Dans un commentaire associé, deux gastro-entérologues du Mount Sinaï à New York, Joana Torres et Jean-Frédéric Colombel, mettent l’accent sur l’importance des facteurs épigénétiques. « Les facteurs épigénétiques, qui médient les interactions entre la génétique et les expositions environnementales complexes, comme le microbiome, pourraient apporter de nouvelles clefs dans la pathogenèse dans les années à venir », concluent-ils.

*The Lancet, publié le 9 janvier 2016

Anomalies chromosomiques : pourquoi dépister autrement Le Figaro du 11 janvier 2016 par Pauline Léna

De nouveaux tests sanguins permettent, dès la 5ème semaine de grossesse, de dépister 99 % des cas de trisomie 21.

« Trisomie 21 : de nouveaux tests appellent la révision des modalités de dépistage actuelles ». Cette annonce, faite le 18 novembre dernier par la Haute Autorité de santé, fait suite à un premier volet d’évaluation des tests reposant sur l’analyse de l’ADN fœtal dans le sang de la mère et qui pourraient permettre, chez les femmes à risque, de dépister 99 % des cas de trisomie avec un taux de faux positifs de moins d’1 %. Ce dépistage prénatal non invasif (DPNI), déjà disponible en France sans être pris en charge par l’assurance-maladie, viendrait s’ajouter au dispositif actuel qui avait déjà permis, à partir de sa mise en place en 2009, de dépister plus de cas dès le premier trimestre de grossesse, de réduire de moitié le nombre de faux positifs et ainsi d’éviter entre 180 et 360 fausses couches.

« Le système actuel de dépistage de la trisomie 21 est très peu coûteux et particulièrement efficace : il est proposé à toutes les femmes enceintes et permet d’identifier près de 90 % des cas », rappelle le Dr François Jacquemard, gynécologue-obstétricien, coordonnateur du centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal (CPDPN) de l’Hôpital américain de Paris, l’un des 49 centres agréés en France.

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Il est possible, depuis les années 1970, de prélever des cellules fœtales dans l’utérus pour en analyser les chromosomes mais ce geste invasif comporte un risque de fausse couche pouvant aller aujourd’hui jusqu’à 1 %. Le dépistage organisé en France vise à identifier un maximum de cas de trisomie 21 en réduisant le nombre de fausses couches, en limitant le prélèvement utérin aux femmes pour lesquelles le risque est le plus élevé. Le premier facteur de risque étant l’âge, une amniocentèse était notamment proposée à toutes les femmes de plus de 38 ans et presque 10 % des grossesses la subissaient en 2009.

Le dépistage combiné désormais proposé à toutes les femmes enceintes comporte un dosage de marqueurs sanguins réalisé en fin de premier trimestre de grossesse. « Beaucoup de femmes enceintes se voient imposer cette prise de sang et reçoivent une information qu’elles ne voulaient pas », regrette le professeur Olivier Dupuis, responsable du service de gynécologie-obstétrique de l’hôpital Lyon-Sud. « Le dépistage doit être proposé clairement pour ne pas gâcher la grossesse des femmes qui préfèrent ne pas savoir ». La prise de sang se fait le même jour qu’une échographie qui permet de mesurer notamment la largeur de la nuque du fœtus.

Ces deux examens font l’objet d’un contrôle de qualité strict qui a permis, en quelques années, d’en garantir la fiabilité, en particulier pour les échographies qui donnent désormais des résultats exceptionnels tout au long de la grossesse. Les résultats de ces analyses, associés à d’autres critères comme l’âge de la patiente permettent d’évaluer le risque que le fœtus soit atteint de trisomie 21. Plus de 85 % des cas de trisomie 21 se retrouvent chez les femmes dont le risque est supérieur à 1/250. Ce risque élevé justifie donc un prélèvement invasif de liquide amniotique ou de cellules du futur placenta pour analyser directement les chromosomes du fœtus et déterminer, cette fois-ci et avec une certitude absolue, si le fœtus est atteint. La majorité des femmes est alors rassurée puisque le résultat est négatif dans 95 % des cas.

« Le dépistage actuel est efficace mais inquiète un grand nombre de femmes, ce que les nouveaux tests pourraient éviter », souligne le Pr Dupuis. Ils permettent en effet d’analyser avec précision l’ADN du fœtus circulant dans le sang maternel, dès la 5ème semaine de grossesse, avec une fiabilité très élevée. « Les études montrent aujourd’hui que le test est plus fiable chez les femmes présentant un risque accru », rappelle le Dr Jacquemard. « Moins le risque est élevé, plus le risque de faux positif est élevé ». La HAS devra déterminer si le DPNI, qui coûte environ 500 euros, pourrait être également proposé aux femmes dont le risque est intermédiaire, c’est-à-dire supérieur à 1/1000, ce qui englobe plus de 95 % des cas de trisomie 21. La HAS indique aujourd’hui un taux de faux positifs d’1 % pour les femmes ayant un taux de risque supérieur à 1/250 : le DPNI permettrait à la majorité d’entre elles de ne pas prendre le risque d’une fausse couche. « Aujourd’hui, la majorité des femmes présentant un risque de 1/250 choisissent le DPNI plutôt que le prélèvement si elles peuvent se le permettre », indique le Pr Alexandra Benachi, chef du service de gynécologie-obstétrique de l’hôpital Antoine-Béclère à Clamart.

Pour autant, ce test reste un outil de dépistage : le prélèvement direct reste nécessaire pour confirmer le diagnostic. La majorité des femmes (80 % en 2012) recevant ce diagnostic décident d’interrompre la grossesse. Le DPNI permettrait également de leur donner un réponse dans des délais parfois compatibles avec une IVG, moins traumatique.

Le sang fœtal présent dans celui de la mère

« L’ADN du fœtus circule dans le sang de sa mère dès les premières semaines de la grossesse et représente de 5 à 10 % de l’ADN total qui s’y trouve », rappelle le Dr François Jacquemard. « A partir de la 11ème semaine, il est possible d’analyser la quantité d’ADN attendue pour chaque chromosome et d’identifier ainsi certaines anomalies chromosomiques ». Des cellules fœtales peuvent se retrouver dans le sang de la mère et certains chercheurs avaient, dès la fin des années 1960, envisagé de les extraire pour les analyser. Déjà peu nombreuses, les cellules fœtales restent dans le sang de la mère après chaque grossesse, ce qui complique l’analyse de l’ADN de l’enfant à naître. Dans les années 1990, la piste de l’ADN fœtal fractionné libre est étudiée :

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pendant la grossesse, de l’ADN fœtal fractionné circule largement dans le sang de la mère et disparaît rapidement après l’accouchement : il n’appartient qu’à l’enfant présent dans l’utérus.

S’il est impossible alors de distinguer cet ADN fœtal de celui de sa mère, une analyse de la quantité d’ADN libre attendue pour chaque type de chromosome, mère + enfant, permet de savoir si l’ADN apporté par le fœtus est en quantité normale. « On cherche, par séquençage multiple et parallèle, la quantité d’ADN attendue pour chaque chromosome », explique le Dr Jacquemard. « Cette mesure se fait après la dixième semaine de grossesse, lorsque la proportion d’ADN fœtal atteint 10 % de l’ADN total, la quantité nécessaire pour une analyse fiable ». Si la quantité d’ADN provenant de séquences du chromosome 21 est supérieure à celle qu’on attend au total pour la mère et l’enfant, il est probable que l’enfant possède un chromosome 21 en trop. La même analyse peut être faite pour d’autres trisomies : 13 et 18 mais elle permet également de détecter d’autres anomalies qui affectent des portions de chromosomes supérieures à 7Mb. Des micro-délétions comme celle qui provoque le syndrome de DiGeorge peuvent ainsi être identifiées.

Si ces tests sont disponibles aux Etats-Unis notamment, la Haute Autorité de santé n’envisage aujourd’hui de recommander l’utilisation de ce type de test que pour le dépistage de la trisomie 21, afin d’éviter des prélèvements dans l’utérus qui posent un risque de fausse couche. Il n’est pas encore question d’étendre l’analyse du sang fœtal circulant à d’autres anomalies chromosomiques plus rares, notamment en raison de la possibilité de faux positifs qui feraient alors prendre un risque de fausse couche à un plus grand nombre de femmes. Le diagnostic doit en effet être confirmé par prélèvement direct dans tous les cas.

Des changements à l’échelle du chromosome, pas des gènes

Les anomalies chromosomiques ne sont pas des altérations de l’ADN lui-même mais de l’organisation dans l’espace de l’ADN au sein des chromosomes lorsque les gamètes, spermatozoïdes et ovules se forment. Ces réorganisations malencontreuses se produisent lorsque les chromosomes sont copiés puis divisés entre les cellules sexuelles pour que chacune dispose d’un demi-exemplaire (soit 23 chromosomes) du génome d’un parent qui viendra s’ajouter au demi-exemplaire apporté par le gamète de l’autre parent pour former un génome entier (46 chromosomes). L’un des gamètes aura parfois reçu un chromosome en trop, en moins ou encore un chromosome trop court, trop long. Parfois, enfin, un morceau de chromosome est déplacé sur le même chromosome ou bien accroché à autre chromosome.

Lorsque ces anomalies chromosomiques sont très importantes, elles provoquent le plus souvent une fausse couche. Dans certains cas, les enfants naissent avec des troubles complexes comme dans la trisomie 21, trois chromosomes 21 au lieu de deux, qui est la plus fréquente des anomalies ayant des conséquences cliniques. En France, ce syndrome de Down touche une grossesse sur 370 et une naissance sur 1 510, ce qui représente 540 enfants par an.

Les conséquences cliniques sont variables et touchent les caractéristiques physiques, le développement psychomoteur ainsi que certains organes, en particulier le cœur. D’autres trisomies, plus rares, provoquent un décès in utero ou dans les mois qui suivent la naissance : la trisomie 13 (15 enfants par an) et la trisomie 18 (35 naissances par an). Les erreurs d’arrangement et de copie des chromosomes sont fréquentes et en général accidentelles, mais elles sont favorisées par l’accroissement de l’âge maternel et par la présence de certaines anomalies chromosomiques chez l’un des parents. Elles n’ont le plus souvent pas de conséquences cliniques s’il n’y a ni perte ni gain du matériel génétique, lorsque les anomalies sont équilibrées, mais peuvent avoir des conséquences sur la fécondité des futurs adultes et, dans des cas extrêmement rares, augmenter le risque de certains cancers.

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Un bébé naît après un exploit médical La Provence du 12 janvier 2016

La plateforme pilote "Fertilité & Cancer" créée en 2012 à l'initiative du Réseau Régional de Cancérologie OncoPACA-Corse et des équipes des Centres d'Etudes et de Conservation des Œufs et du Sperme (CECOS) (AP-HM Marseille et CHU de Nice) ont annoncé la naissance d'Elise, le premier bébé issu d'une vitrification ovocytaire réalisée avant traitement anticancéreux en France.

En 2013, sa maman, atteinte d'un lymphome de Hodgkin, avait pu bénéficier avant le début d'une chimiothérapie très toxique pour les ovaires d'une stimulation ovarienne en vue d'une autoconservation ovocytaire par une technique autorisée en France depuis 2011 appelée vitrification. A ce jour, les publications ne rapportent que 6 enfants nés dans le monde grâce à cette technique dans le contexte de la préservation de la fertilité pour cancer.

Sanofi investit plus d’1 milliard d'euros dans le traitement du cancer Le Figaro du 12 janvier 2016 par Armelle Bohineust

Le groupe pharmaceutique français a conclu des accords avec le marseillais Innate Pharma et l'américain Warp Drive Bio.

Très vite après avoir pris la tête de Sanofi en avril 2015, Olivier Brandicourt a identifié l'aire thérapeutique du cancer comme l'une des faiblesses du laboratoire tricolore. « Nous devons rattraper notre retard en oncologie », a-t-il expliqué en 2015 au Figaro .Une analyse rapidement suivie d'actions. La dernière en date est l'annonce, lundi, de deux investissements, pour un montant total supérieur à 1,15 milliard d'euros. Le premier concerne un accord avec la société marseillaise Innate Pharma, spécialisée dans l'immuno-oncologie, la technologie considérée comme la plus prometteuse aujourd'hui pour traiter le cancer. Sanofi et Innate développeront ensemble de nouveaux anticorps bispécifiques, capables d'enclencher la destruction des cellules tumorales en « recrutant » des cellules immunitaires très présentes dans le corps humain, les cellules NK. Sanofi versera jusqu'à 400 millions d'euros à Innate pour le développement de ces nouveaux traitements, puis des redevances lors de leur commercialisation.

Des paiements d'étape

L'autre investissement concerne la biotech Warp Drive Bio. Sanofi avait participé en 2012 à la création de cette société américaine, aux côtés des financiers Third Rock Ventures et Greylock Partners. Mais, il a annoncé hier « l'extension et la refonte » de sa collaboration. Objectif : développer de nouveaux agents anticancéreux et antibiotiques dans le cadre d'un accord de recherche et de licence qui prévoit des paiements d'étape de plus de 750 millions de dollars (690 millions d'euros). « Il s'agit d'une collaboration très intéressante pour Sanofi, car elle pourrait donner naissance à des antibiotiques et à des traitements salvateurs en oncologie grâce à l'exploitation de plates-formes technologiques de pointe », explique Élias Zerhouni, président de la recherche et du développement de Sanofi. Le groupe français cherche à « développer des positions compétitives » dans la sclérose en plaques, l'immunologie, la santé grand public et le cancer, a précisé en novembre Olivier Brandicourt, en présentant le nouveau plan stratégique du groupe.

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Dans le cancer, la concurrence est de plus en plus forte entre les laboratoires. Le marché, qui ne cesse de se développer, avec des médicaments de plus en plus chers - souvent vendus plus de 50 000 euros pour un traitement annuel -, fait figure d'eldorado aux yeux des grands laboratoires. Plus de 6500 traitements sont aujourd'hui en développement dans ce domaine. Les ventes d'anticancéreux dépassent déjà 100 milliards d'euros.

Sanofi entend être en bonne position sur ce marché, même s'il n'espère pas y être leader. Pour cela, il lui faut multiplier les chances de mettre au point de nouveaux traitements et, surtout, de miser sur les médicaments les plus porteurs. En novembre, il a annoncé une collaboration en immunothérapie anticancéreuse avec l'allemand BioNTech. Dans le cancer, il compte aussi beaucoup sur son partenariat avec l'américain Regeneron. Cet été, il a déboursé 2,2 milliards de dollars avec le groupe, dont il détient 22 % du capital et avec lequel il a lancé en juillet son anticholestérol Praluent. Mais ce partenariat est « insuffisant pour nous donner un poids significatif dans le traitement de certains cancers, nous viserons des opérations de petite ou de moyenne taille », voire des opérations de taille similaire à celle du rachat de Genzyme (20 milliards de dollars en 2011), avait expliqué Olivier Brandicourt en novembre.

Shire-Baxalta : encore une OPA dans la pharmacie

Le laboratoire Shire s'apprête à racheter l'américain Baxalta pour 32,2 milliards de dollars. Cette acquisition en fait le numéro cinq mondial.

Aux États-Unis, le laboratoire Shire est connu pour son Vyvanse, une pilule controversée prescrite contre l'hyperactivité et, depuis peu, les binge eating disorders ou « désordres d'alimentation sans limite ». Mais Shire est aussi réputé pour son appétit, difficile à apaiser. Le laboratoire installé à Dublin se lance dans sa troisième acquisition depuis janvier 2015. Il va racheter l'américain Baxalta pour 32,2 milliards de dollars (29,35 milliards d'euros). L'opération n'a pas été simple : l'irlandais coté à Londres a dû batailler six mois et remonter son prix pour convaincre le conseil d'administration de Baxalta. Mais Shire y voit de nombreux avantages. En rachetant ce spécialiste des maladies rares du sang, des cancers et des troubles du système immunitaire, il deviendra l'un des leaders mondiaux - le numéro cinq, selon le cabinet EvaluatePharma - dans le traitement des maladies rares. Ensemble, les deux laboratoires figurent au 21ème rang mondial, avec un chiffre d'affaires de 12 milliards de dollars en 2015. Et ils pourraient générer en 2020 des ventes de 20 milliards de dollars, espère Shire.

Fusion ratée avec AbbVie

L'opération dégagera par ailleurs plus de 500 millions de dollars de synergies de coûts d'exploitation et de chiffre d'affaires. Mais ce n'est pas tout. S'y ajouteront les avantages fiscaux dégagés liés à la résidence fiscale de Shire en Irlande. La fusion permettra en effet à l'américain Baxalta, né d'une scission de Baxter en juillet, de bénéficier d'un taux d'imposition moins élevé, soit environ 17 %, au lieu de 24 %. Cette quête de gains fiscaux est l'un des principaux moteurs des fusions, très nombreuses dans la pharmacie depuis quelques mois. En 2015, le secteur a connu l'année la plus active de son histoire, avec des opérations représentant au total 673 milliards de dollars, selon Thomson Reuters.

Shire a d'ailleurs failli être racheté par l'américain AbbVie en 2014, au prix de 54 milliards de dollars, à des fins d'optimisation fiscale. Mais l'opération a été abandonnée après que l'administration Obama a changé la réglementation pour freiner ce type de fusion. Shire, décidé à changer de taille coûte que coûte, s'était consolé en rachetant début 2015 l'américain NPS Pharmaceuticals, spécialisé dans les traitements des maladies intestinales rares pour 5,2 milliards de dollars. En novembre, il a par ailleurs annoncé le rachat de la société de biotechnologie Dyax pour 5,9 milliards de dollars.

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PERSONNALITÉS, FILMS ET OUVRAGES

La fabrique des bébés La Croix du 23 décembre 2015 par Françoise Brulliard*, cadre supérieur de santé à l'AP-HP

Des techniques comme la PMA (procréation médicalement assistée) ou le DPI (diagnostic pré-implantatoire), dont le but est d'aider les femmes à avoir un enfant, ou à ne pas transmettre une maladie génétique invalidante souvent mortelle, se trouvent aujourd'hui projetées hors du monde médical soignant et sont sommées de répondre à des revendications sociétales de tous ordres. Ces demandes sont particulièrement entendues par des cliniques et des centres de fertilité qui, suivant les lois de leur pays d'appartenance, proposent leurs services: FIV (fécondation in vitro), FIV avec donneurs pour parents hétéro – ou homosexuels, DPI, choix du sexe de l'enfant, choix de donneurs et donneuses où se déploient les fantasmes de l'apparence, du niveau intellectuel, de critères religieux ou sociétaux.

Si ces situations paraissent éthiquement contestables, elles sont incontestablement lucratives. On estime le marché de la PMA à 12 milliards de dollars par an aux États-Unis, et à plusieurs centaines de millions en Inde, marché considéré comme la version « low cost » des pratiques américaines. L'homme n'a pas eu besoin de la technique pour alimenter sa tentation eugéniste. Platon, déjà, évoquait le choix des parents pour obtenir une heureuse progéniture. De l'Allemagne nazie aux manœuvres eugénistes des États-Unis, des pays nordiques au siècle dernier jusqu'à Singapour aujourd'hui (qui n'autorise que les femmes diplômées à avoir plus d'un enfant), nul besoin de recourir à la PMA pour nourrir les tentations eugénistes étatiques. Les centres de fertilité construisent un discours, à grand renfort de statistiques, qui permet la neutralisation de toute réflexion éthique.

La reproduction humaine « normale » est décrite comme un mécanisme au rendement décevant, aux résultats souvent imparfaits. Un discours techno-sophiste tend à discréditer la nature en comparant des phénomènes apparemment semblables. Confronter le taux de réussite de la fécondation naturelle qui porte, sauf exception, sur un embryon, avec celui de grossesses multiples à la suite de l'implantation de plusieurs embryons, obtenus après une « super ovulation », ne peut être que favorable statistiquement à la PMA. Enfin, afficher des résultats positifs pour des patientes qui n'ont pas de problème de fertilité ne relève peut-être pas de l'exploit. Ainsi des offres « gestation garantie en 24 mois » s'adressent à des femmes qui ont déjà un enfant, mais permettent le « family balancing » à savoir choisir le sexe de son enfant, pratique reconnue par les autorités américaines de l'American Society of Reproductive Medicine. De même sont validées les inséminations avec du sperme de donneurs décédés. Là aussi, les naissances post-mortem sont présentées comme ancestrales, existant depuis l'Antiquité, énonçant une fois de plus un sophisme, en comparant la naissance d'un enfant conçu par un père vivant, et né après sa mort, avec la naissance d'un enfant, conçu de son père mort. Ces établissements sont souvent adossés à des banques de gamètes, et recrutent des donneurs sur des critères de qualité biologiques et génétiques. Les pré-requis sont d'abord physiques : plutôt jeunes, grands et beaux. Viennent ensuite les performances intellectuelles : le niveau universitaire est obligatoire (les donneurs ou donneuses de niveau doctorat forment même une catégorie distincte, plus onéreuse).

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Cette fabrication d'embryons à partir de toutes sortes de gamètes – parents, donneurs de banques, techniques nouvelles à trois ADN (transplantation du noyau d'un ovocyte d'une femme dans un ovocyte énucléé d'une autre femme) –génèrent une multitude d'embryons dont un nombre important reste stocké dans l'azote liquide. Cette suspension du temps convoque une « éternité technique » inédite, qui n'est pas sans rappeler l'enfer de glace évoqué dans les textes sacrés indiens : les Upanishads. L'embryon et son destin ne relèvent plus automatiquement du même temps que celui de leurs géniteurs. L'azote liquide arrête le temps, et un jour, la technique et surtout la loi permettra certainement de faire naître un enfant hors de son temps de conception, une ou plusieurs générations après.

L'enfant devient le résultat d'un projet parental pensé, fabriqué, dont la réussite devra être évaluée. Ce que Philip Kitcher appelle « l'eugénisme du laisser-faire », un eugénisme libéral, individuel répondant à des impératifs de désirs fantasmatiques ou de situations sociétales. Une réification des enfants s'opère ainsi dans la réalité, mais surtout dans les esprits. Hans Jonas nous mettait pourtant en garde: « Le futur n'est représenté par aucun comité. L'inexistant n'a aucun lobby et les enfants non encore nés sont sans pouvoir. »** *Intervenante au séminaire de recherche Humanisme, transhumanisme, posthumanisme du Collège des Bernardins.

**Hans Jonas, Le Principe responsabilité, Paris, Cerf, 1 990 p., 44 €.

Josef Schovanec, saltimbanque de l’autisme La Croix du 2 janvier 2016 par Christine Legrand

Philosophe, écrivain, voyageur polyglotte… et autiste, Josef, 34 ans, parcourt inlassablement le monde pour parler de la différence et de l’indifférence

Pouvoir rencontrer Josef Schovanec entre ses multiples pérégrinations est une chance qui se mérite. Après un premier rendez-vous – reporté – entre deux avions dans un aéroport parisien, c’est sur le banc d’un square de la capitale, déserté à cause du froid glacial de ce jour de décembre, qu’il a préféré nous parler. La silhouette longiligne aux allures de séminariste (comme il le dit lui-même), timide et intimidant, mais toujours délicat et courtois, il se confond en excuses pour ses trois minutes de retard, et son humeur plus ténébreuse qu’à l’ordinaire. Il était la veille à Nice, l’avant-veille à Alger, le jour d’avant à Cayenne, et repart le lendemain au sultanat d’Oman. Cayenne, Alger, Nice, c’était « pour parler de l’autisme », précise-t-il. « Depuis une dizaine d’années, je fais office de saltimbanque. La tâche est immense et les forces sont très limitées. » Le sultanat d’Oman, c’est la parenthèse qu’il s’octroie pour souffler un peu, en suivant des cours d’arabe dans un institut. « J’ai attrapé le virus des langues orientales. Cela m’a porté pendant de longues années et beaucoup apporté. La première fois que j’ai eu des amis, c’était en cours d’hébreu. Pour une raison simple : ils avaient des difficultés avec la grammaire hébraïque ; je les aidais et, en retour, ils m’invitaient ! »

Féru de livres anciens et de bibliothèques, qui ont été longtemps sa « seule activité sociale accessible », il a voulu explorer d’innombrables langues, de l’amharique (l’une des langues modernes de l’Éthiopie) à l’azerbaïdjanais, en passant par le sanskrit classique. « S’il n’y avait pas eu ces petites choses comme l’autisme, dit-il, mon projet professionnel aurait été de devenir enseignant à la fac en philosophie orientale. » Il se dit fasciné aussi par les religions et leurs textes fondateurs, qu’il a lus dans leur langue originale.

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« Ce sont des moments jubilatoires quand on se met à décoder la Bible en hébreu, le Coran en arabe, car la traduction des textes religieux est très ingrate et leur fait perdre leur côté poétique. » Il scande ses phrases d’une voix lente, avec un accent indéfinissable. Mais il est difficile, en l’écoutant, d’imaginer qu’il soit resté « non verbal » jusqu’à l’âge de 6 ans, et qu’il n’aurait pu entrer en CP sans l’insistance de ses parents, car il n’avait pas « les compétences requises ». « Si on avait attendu que je les acquière, je serais sans doute encore en grande section ! » « Je suis né à une époque où l’autisme était tout à fait inconnu. J’ai fait partie d’une génération dont j’espère qu’elle sera la dernière… », dit-il simplement. Mais il ne veut pas « s’appesantir » sur son passé. Son parcours, il l’a raconté dans un livre que tous les adultes devraient lire : Je suis à l’Est ! On y découvre de l’intérieur l’histoire de cet enfant « bizarre » passionné d’Égypte ancienne et d’astronomie mais incapable de jouer au ballon. Le cauchemar de la « récré », avec sa sonnerie stridente, les coups reçus de « petits monstres tabasseurs » qui le traitaient de « débile » ou de « taré », ou encore « l’enfer » des sorties scolaires, qui le mettaient dans un état d’angoisse inimaginable. « Cancre avec de bonnes notes », il corrigeait ses enseignants, avec ce souci extrême qu’ont les autistes pour l’exactitude. Mais il restait incapable d’« apprendre les comédies sociales ». Avec ce franc-parler qu’il a conservé aujourd’hui. « La pire violence n’est pas de recevoir des coups de poing. C’est d’exclure définitivement un enfant, un jeune, un adulte… »

Plus angoissé par le métro que par les épreuves de maths, il obtient son bac S à 17 ans avec mention très bien, entre à Sciences-Po, un « curieux établissement » qu’il décrit avec un regard désopilant comme un « fabuleux miroir grossissant de la société ». Il prépare aussi un doctorat de philosophie. Il connaît parallèlement six années « de descente aux enfers » et d’« errance médicale effrayante ». Alors qu’aucun spécialiste n’avait su mettre de mots sur ses « bizarreries », il est diagnostiqué à 19 ans par erreur schizophrène, et mis sous haute dose de neuroleptiques, avant d’être reconnu à 22 ans autiste Asperger.

Avec le recul, il admet néanmoins « avoir eu la chance de pouvoir plus ou moins rester dans le système et de faire des études… » Mais il se considère comme un « anti-modèle de non-réussite ». « La plupart des parents espèrent que leurs enfants ne vivront plus chez eux, iront chez le coiffeur et sauront conduire une voiture. Malheureusement, je ne remplis aucun de ces critères ! » Il a eu aussi la chance, dit-il, de rencontrer plusieurs personnes qui ont cru en lui et l’ont aidé à s’en sortir. Sans elles, il serait resté « dans la poubelle de la société ». Il pense particulièrement à Hammou Boukkaz, un aveugle de naissance, adjoint au maire de Paris Bertrand Delanoë, qui lui a « offert » son premier emploi, en 2010, sans le « prendre en pitié ». Il écrira même des discours pour des hommes politiques… « Mais Anne Hidalgo, qui ne voulait pas de personne handicapée, m’a viré. » Il a aussi, depuis un an et demi, un « petit boulot » sur Europe 1, où il tient une chronique hebdomadaire dans l’émission « Carnets de voyage ».

La majeure partie de son temps, il la consacre à l’autisme, écrit et traduit des livres et est invité un peu partout pour donner des conférences aux parents et aux professionnels. « En France, nous ne sommes que deux ou trois à prendre la parole publiquement sur l’autisme. Alors qu’aux États-Unis ils sont des milliers. J’interviens là où on veut de moi. Des institutions aux petites associations, plus ou moins cachées au fond des bois. » Et il dresse un bilan terrible. « Il n’y a pas de pays parfait, mais en France le retard est particulièrement terrifiant. » « Comme je suis un représentant non officiel de l’autisme, raconte-t-il, cela m’a valu un privilège : celui d’être invité dans de “mauvais” établissements. Si j’avais une caméra cachée, vous vous croiriez dans des prisons centrales. J’ai connu des lieux où se pratiquaient des maltraitances graves. En Belgique, par exemple, où les petits autistes français sont récupérés par des marchands de sommeil qui en font leur business. »

À la question – qu’on lui pose souvent – « Quels points communs entre les autistes dits “haut niveau” comme lui et ceux qui continuent à rester murés dans le silence ? », il répond : « Si certains parlent, c’est simplement parce qu’on leur a permis d’apprendre à parler, répond-il. Pour le dire de façon encore plus cynique, j’ai l’impression que les familles riches ont des enfants de haut niveau – même s’il y a bien sûr des exceptions.

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C’est là tout le scandale. Il faut, aujourd’hui en France, payer pour avoir des méthodes qui fonctionnent, connues et appliquées dans les pays véritablement civilisés. » Et puis ces classifications n’ont plus cours, ajoute-t-il : « On est tous différents, heureusement ! » Il dit aussi peiner à nommer dans notre pays une personne autiste qui aurait « une carrière professionnelle habituelle ». Pourtant, ce ne sont pas les talents qui manquent. Parmi ses « camarades » célèbres, il cite volontiers Bill Gates qui, selon lui, ne s’en est jamais caché, mais aussi ces prix Nobel « qui ne sont pas allés à la cérémonie de remise des prix car ils n’ont pas les compétences sociales pour se montrer en public ». « Il existe aussi des personnes autistes pas connues, qui ont des compétences humaines, une sensibilité et une créativité tout à fait remarquables qui coexistent avec de grosses difficultés de compréhension des codes sociaux. » Ce sont ces personnes-là qu’il a voulu mettre en lumière dans son dernier livre, De l’Amour en Autistan, « qui n’est pas le nom d’une cellule terroriste », sourit-il.

Du combat qu’il mène depuis près de dix ans, il dresse un bilan modeste. « Je ne prétends pas avoir réussi ma mission, mais j’ai donné des petites impulsions dans la bonne direction. » Il souhaiterait que « l’action publique se recentre sur les personnes oubliées, c’est-à-dire la majorité ». Il rêve d’« une société inclusive qui commence par des politiques inclusives, des médias inclusifs » et déplore que le handicap soit considéré comme un « non-sujet ». « Combien d’hommes politiques prononcent le mot “autisme” autrement que comme une insulte ? » « Mes voyages me maintiennent à flot dans un univers où je n’ai pas ma place. Je suis poussé à aller ailleurs et c’est peut-être une chance », dit-il. Il affectionne particulièrement les contrées oubliées du bout du monde. Ces pays pauvres où on l’accueille avec le respect dû à tout « étranger ». Et d’ajouter : « Ce ne sont pas les pays qui ont le plus d’hydrocarbure qui sont le plus riches sur le plan humain. » À la fois apatride et citoyen du monde, il fait l’éloge du nomadisme, parle des migrants. « Ce que les Occidentaux ont gagné en confort matériel, ils l’ont perdu en capacité d’accueillir l’autre et à s’imaginer eux-mêmes devenir autre, à changer de pays, à apprendre d’autres langues. » Il parle aussi de ces attentats terroristes qu’il a frôlés dans diverses régions du monde et le font méditer sur « l’incroyable fragilité de l’existence humaine ». « Nous sommes tous de passage », insiste-t-il. Avant de repartir dans la grisaille parisienne, avec sa part de mystère, dont nous n’aurons pu saisir que quelques bribes… Bio express 2 décembre 1981. Naissance à Charenton-le-Pont (Val-de-Marne) de parents tchèques. 1999. Après une scolarité difficile, obtient son Bac S à 17 ans avec mention très bien. Entre à Sciences-Po Paris. 2001. Début de son « parcours psy ». Diagnostiqué par erreur schizophrène, placé sous psychotropes avant d’être, trois ans plus tard, reconnu autiste Asperger. Poursuit Sciences-Po et son doctorat de philosophie. 2012. Parution de Je suis à l’est !, son premier livre autobiographique (Plon). 2014. Parution d’Éloge du voyage à l’usage des autistes et de ceux qui ne le sont pas assez (Plon). Entame ses chroniques hebdomadaires dans l’émission « Les carnets du monde » (Europe 1). 2015. Adapte en français Comprendre l’autisme pour les nuls (First), d’après Stephen Shore. Novembre 2015. Parution de De l’Amour en Autistan (Plon).

Ne risque-t-on pas de déshumaniser la médecine avec des patients virtuels ? La Croix du 5 janvier 2016 par Pierre Bienvault

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« Avec la simulation, on peut apprendre l’écoute du patient » : Pierre Pottier, vice-doyen de la faculté de médecine de Nantes

« À Nantes, nous avons un laboratoire de simulation où sont utilisés des mannequins de haute- fidélité. Mais nous avons aussi recours à ce qu’on appelle les patients “standardisés”, des comédiens professionnels qui jouent le rôle des patients. Certes, dans leur cursus, nos étudiants ont des contacts avec les patients, notamment dans leurs stages hospitaliers. Nous avons en France une immersion clinique très précoce des étudiants dont la qualité est largement reconnue. Mais nous estimons aussi nécessaire qu’ils puissent être confrontés à des situations concrètes qui existent tous les jours dans des cabinets de ville. À partir de la 3ème année, sous la responsabilité d’un enseignant, nos étudiants sont d’abord invités à écrire eux-mêmes des scénarios de consultations qu’ils jouent ensuite entre eux.

C’est très intéressant car cela les oblige à se mettre dans la peau d’un patient. Ensuite, en 4ème et 5ème années, ce sont des comédiens qui endossent ce rôle du patient. Ils sont trois ou quatre dans une salle d’attente et l’étudiant va les recevoir les uns après les autres. On peut alors développer un grand nombre de scénarios : le patient stressé, tendu, celui qui est agressif parce qu’il a attendu deux heures. Parfois, il y a aussi le malade à qui l’étudiant devra faire l’annonce d’une maladie grave. Le but, c’est d’apprendre à ces futurs médecins l’importance de la relation avec le patient. C’est lui en effet qui connaît sa maladie, ses symptômes, son impact dans sa vie quotidienne. Et c’est en l’écoutant avec attention que le médecin pourra établir le diagnostic. Ce n’est pas via un entretien à sens unique en misant sur la toute-puissance de son savoir technique. Dans la mesure du possible, nous essayons aussi de faire jouer à ces comédiens l’entourage du patient, le conjoint, la fille, la mère. Car cet entourage est aussi un élément clé dans la relation médecin-malade. » « La médecine, c’est aussi savoir parler à une personne » : Clara de Bort, directrice d’hôpital et chef du pôle de réserve sanitaire à l’EPRUS (Etablissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires)

« Je partage cette volonté qu’un acte médical, un peu difficile ou risqué, ne soit jamais pratiqué pour la première fois sur un vrai patient. Et c’est très bien que des étudiants en médecine puissent s’exercer sur des mannequins si cela permet d’améliorer la qualité des soins. Mais dans le débat autour des touchers vaginaux, ce que nous avons voulu mettre en avant, c’est d’abord et avant tout la question de la relation à la patiente et l’absence de recueil de son consentement. Et je ne pense pas que la seule réponse à ce débat soit le recours à la simulation et l’apprentissage de ce geste sur des mannequins.

Aujourd’hui, c’est vrai qu’il existe des outils de simulation de plus en plus performants. Mais un mannequin ne remplacera jamais un patient âgé, polypathologique, qui se retrouve un soir aux urgences en situation de grande détresse sociale. Et c’est aussi cela la médecine. Savoir parler au patient, l’écouter, comprendre ses besoins, son environnement de vie. Aujourd’hui, on a l’impression que la formation des médecins est quasi exclusivement centrée sur l’apprentissage de la maîtrise technique du geste de soin. C’est important bien sûr d’avoir des médecins qui soient bons dans ce domaine. Mais l’apprentissage de la technique doit-il ou non précéder l’apprentissage de la relation médecin malade ? C’est un vrai débat éthique.

Aujourd’hui, il y a encore cette idée très ancrée que le bon médecin est celui qui maîtrise la technique. La relation au patient est jugée comme secondaire. "C’est la technique qui sauve des vies", nous disent ces médecins, en oubliant qu’une mauvaise relation avec le patient peut parfois détourner celui-ci de la médecine. Soigner, ce n’est pas seulement faire le bon geste opératoire ou prescrire le bon médicament. C’est aussi s’interroger sur tel ou tel soin qu’on va réaliser sur un patient en situation de vulnérabilité, la façon dont on va en parler avec lui. Et tout cela ne s’apprend pas sur un mannequin ».

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Assurance-maladie : changeons de logiciel ! Le Monde Economie du 6 janvier 2016 par Frédéric Bizard* et Luc Montagnier**

Malgré des dépenses sociales publiques les plus élevées au monde (32 % du PIB contre 22 % en moyenne dans l’OCDE), notre système de protection sociale a conduit notre pays au bord de la rupture sociale et au chômage de masse. Efficace pendant les « trente glorieuses », le système n’a pas été adapté au changement radical de l’environnement du début du XXIème siècle. Nos gouvernants enchaînent les réformes comme la souscription obligatoire, à partir du 1er janvier, de contrats collectifs d’assurance complémentaire santé pour tous les salariés. Mais ils utilisent un logiciel de l’ancien monde. Prenons le cas de la santé.

Notre système de santé installé en 1945 est fondé sur le modèle de l’État-providence, commun à l’ensemble de notre protection sociale. Ce modèle assure un revenu de remplacement en cas de maladie et le paiement des soins, à partir d’un financement principal assis sur des cotisations sociales. C’est ce même système qui garantit à l’assuré la prise en charge de son risque santé, la maladie. L’assuré est passif car justement protégé par un Etat… providence. L’autre dimension du modèle est la préoccupation du risque une fois celui-ci survenu. En amont du risque, l’assuré passif contribue au financement par ses revenus du travail, pour plus tard.

Triple transition

Ce système a été très efficace pendant la période après-guerre, en participant au développement économique et en améliorant les conditions morales et matérielles des assurés. Le changement de monde en mouvement depuis la fin du siècle dernier nécessite de dépasser l’État-providence pour protéger efficacement les générations actuelles et futures. Nous assistons à une triple transition démographique, épidémiologique et technologique en santé. Le vieillissement de la population dont les effets seront maxima jusque dans les années 2030 élève la demande potentielle de soins, même si la population rajeunit biologiquement. Le passage à l’état chronique des pathologies, issu des progrès médicaux et de l’évolution des comportements individuels, rallonge la durée du risque et en change le logiciel de gestion. Progrès pour l’humanité, ces deux phénomènes transforment le modèle médical de prise en charge et mettent sous pression la capacité de financement durable du système. D’ici à 2025, 80 % des dépenses d’assurance maladie seront concentrées uniquement sur moins de 20 % de la population, souffrant d’une affection de longue durée. Le financement de la santé des 80 % restants n’est pas repensé. C’est la transition technologique, dominée par les révolutions génomique et numérique, qui va apporter les outils nécessaires à la gestion des deux premières transitions. En précisant les prédispositions individuelles à la maladie (un séquençage génomique coûtera une centaine d’euros d’ici à 2020) et en apportant, à partir de diagnostics précoces, des solutions thérapeutiques pour réduire la chronicité des maladies, la génomique et ses nouveaux dérivés technologiques constitueront une des clés de l’efficience des systèmes de santé.

Sans vision d’ensemble

Le numérique favorise l’éducation à la santé et améliore l’efficience des fournisseurs de soins. Disposer d’un accès Internet à ses données de santé, comparer les offreurs de soins sur des critères objectifs de qualité et de performance n’est toujours pas possible en France. Pays d’innovation, la France a pris un retard conséquent dans l’intégration de ces technologies dans son système de santé. L’Etat tente de rattraper le retard, mais sans vision d’ensemble, ce qui pourrait apporter davantage de méfaits que de bienfaits. Permettre l’accès aux données de santé aux financeurs privés (loi santé 2015) alors que ni les assurés ni les médecins n’y ont un accès facile en est un des exemples. Le nouveau monde nous oblige à instaurer un système proactif et non plus réactif, agissant tout au long du cycle de vie, fondé sur l’autonomie et la solidarité. Rendre l’individu, y compris le plus défavorisé, capable de se prémunir face au risque social, est le moyen le plus efficace de le protéger.

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La nouvelle dépense sociale se transforme en partie en un investissement dans le capital humain (investissement social) pour rendre chaque individu libre, capable et autonome dans la gestion de son risque. Le succès de la réforme est donc suspendu à la démocratisation de la relation soignant-soigné et du système de santé en général. Cette démocratie sanitaire doit être une priorité dans la gouvernance du système par la création d’une agence nationale d’assurance-santé non étatique (incluant l’assurance maladie actuelle, la direction de l’offre de soins et des instances représentatives de la société civile) qui pilotera l’ensemble de l’offre de soins.

L’e-santé est à développer

En santé comme ailleurs, le paradigme doit changer tout en respectant les principes fondamentaux de liberté (de choix des patients et de prescription des médecins), d’égalité et de solidarité. Depuis 1945 et encore en 2015, la politique de santé se résume à l’accès aux soins. Pour les pays riches comme la France, c’est l’accès à la santé pour tous qu’il faut viser avec deux axes stratégiques : le maintien en bonne santé et l’accès aux meilleurs soins aux meilleurs coûts. Pour le premier axe, un comité opérationnel de gestion interministérielle de la santé permettrait de coordonner le suivi de l’impact sanitaire des politiques publiques agissant sur les déterminants non médicaux de santé (sport, nutrition, logement, écologie, transport…). Des programmes d’éducation sanitaire et de maintien en bonne santé en milieu scolaire et au sein des entreprises, utilisant largement l’e-santé, sont à développer. Une partie du paiement des 90 000 médecins généralistes doit être à la capitation ajustée et dédiée au maintien en bonne santé de leur patientèle.

Pour le deuxième axe, l’organisation des parcours de soins des patients atteints de cancer (centres de référence, programme personnalisé de soins) est à décliner sur les principales pathologies chroniques. Un contrat thérapeutique entre le médecin coordinateur et le patient chronique permettra de renforcer l’efficacité de la prise en charge sur la durée. Notre système de financement de la santé à deux étages doit évoluer vers un système de payeur unique en différenciant un panier de soins solidaire, à la charge de l’assurance publique, et un panier de soin individuel à la charge d’une assurance santé universelle privée obligatoire et régulée. Mais les politiques de tout bord appliquent depuis vingt ans le principe de Lampedusa (1896-1957) dans son roman Le Guépard « il faut que tout change pour que rien ne change ». Comprendre le nouveau monde, poser le bon diagnostic, établir la bonne stratégie et proposer un plan d’actions à la hauteur des enjeux sont autant de conditions indispensables que ces politiques ne remplissent pas. A ce stade, rien ne laisse présager que leur comportement changera d’ici à 2017 ! *Frédéric Bizard, économiste, enseignant à Sciences Po Paris et auteur de Politique de santé. Réussir le changement, Dunod, 2015)

**Luc Montagnier, Prix Nobel de médecine en 2008, cofondateur de la Fondation mondiale recherche et prévention sida, associée à l’Unesco

La nomination de Véronique Fournier inquiète les acteurs des soins palliatifs La Croix du 11 janvier 2016 par Marine Lamoureux Cardiologue, spécialiste d’éthique clinique, Véronique Fournier devrait prendre la tête du Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie. Une nomination qui suscite de fortes réticences compte tenu de ses positions en faveur de l’euthanasie.

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Depuis quelques jours, le monde des soins palliatifs est en ébullition. En cause ? La probable nomination de Véronique Fournier à la tête du Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie. Cette cardiologue, qui dirige le centre d’éthique clinique de l’hôpital Cochin, à Paris, ne cache pas ses positions en faveur de l’euthanasie. « Il est grand temps que la médecine assume l’intention de mort », confiait-elle au Monde en mars 2015. Dès le 8 janvier, avant même la confirmation officielle de l’information par le ministère de la santé, la Société française des soins palliatifs (Sfap) s’est dite « inquiète », s’étonnant de la nomination « d’une personnalité qui, d’une part, n’a pas l’expérience de la pratique des soins palliatifs et, d’autre part, tient des positions en faveur de la dépénalisation de l’euthanasie ».

Pour son président, Charles Joussellin, il était urgent d’intervenir pour tenter de dissuader le ministère d’aller dans ce sens. Il craint qu’à la tête de cette instance – issue de la fusion du Centre national de ressources des soins palliatifs et de l’Observatoire national de la fin de vie –, des orientations décisives ne puissent être impulsées en faveur d’une légalisation, à terme, de l’aide active à mourir. Il n’est pas le seul à le penser. « C’est un signe politique majeur et catastrophique », estime ainsi un bon connaisseur du secteur. Ce dernier souligne que « Véronique Fournier défend une éthique de l’autonomie à l’anglo-saxonne, libertarienne et individualiste, en rupture avec la conception des soins palliatifs, fondée sur une éthique de la bientraitance qui n’accélère, ni ne prolonge, la fin de vie du patient ».

Il redoute qu’on ne lui « donne les clés du camion », pour faire avancer ses thèses. À la Sfap, Charles Joussellin estime qu’« il faut résister à cette lame de fond utilitariste qui justifie l’aide active à mourir lorsqu’on ne “sert” plus à rien ou lorsqu’on se sent inutile parce que vieux et malade ». De fait, le signal politique interroge, alors même qu’une proposition de loi sur la fin de vie (PS-LR) est en passe d’être adoptée, qui écarte la légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté. Une commission mixte paritaire devrait se tenir le 19 janvier qui, si elle était conclusive, permettrait au vote définitif d’intervenir rapidement.

Certains redoutent que ce texte ne soit qu’une étape, comme l’avait d’ailleurs laissé entendre la ministre de la santé. « Le débat reste ouvert, avait déclaré Marisol Touraine, le 5 octobre 2015, devant les députés. Vous aurez, en tant que parlementaires, à juger de l’application de cette loi et dans le cas où une étape supplémentaire paraîtrait nécessaire, à réfléchir à la meilleure manière de l’engager. » Pour les opposants à l’euthanasie, l’éventuelle nomination de Véronique Fournier irait dans ce sens. Sollicitée, cette dernière ne souhaite pas réagir à ce stade, selon son entourage.

Le Pr Claude Matuchansky récompensé par le prix Wakley

Un récit d’humanisme médical et une leçon de modestie Le Quotidien du Médecin du 11 janvier 2016 par Coline Garré

Le Pr Claude Matuchansky, professeur émérite de l’université Paris VII, ancien chef de service des hôpitaux de Paris, ex-membre du Comité consultatif national d’éthique, a reçu le prix Wakley 2015, du nom du fondateur (Thomas Wakley, 1795-1862) du Lancet*, pour son récit « Lifelines ».

« Que sais-je ? » demandait cette année le Lancet aux candidats au Prix Wakley, convoquant la plume de Michel de Montaigne. « Soi-disant instruit de la médecine de l’homme, j’ai appris (...) qu’avant d’entrevoir une part de l’âme d’autrui, on ne sait jamais rien du vrai son, de la vraie couleur, et de la vraie nature des choses », répond le lauréat Claude Matuchansky, premier Français

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à remporter le prix, grâce à son essai intitulé « Lignes de vie ». L’ancien chef de service de gastro-entérologie et d’assistance nutritive y évoque un patient, rebaptisé Martin, 52 ans. La vie n’avait pas épargné cet « homme ordinaire » (divorce, chômage, isolement), qui subit une résection quasi complète de son intestin grêle. Le Pr Matuchansky le rencontre alors qu’il est totalement dépendant de la nutrition parentérale et contraint de rester à l’hôpital, tant il est pris par les difficultés sociales et administratives. « C’était un homme calme et humble (...) ; modeste et discret » ; « il se confondait en excuses et craignait d’occuper le lit d’une personne plus malade que lui », écrit-il. Martin appelle le cathéter de sa nutrition parentérale, qu’il avait appris à manier seul, « sa première ligne de vie ».

Malgré sa discrétion, les soignants finissent par remarquer que Martin se rend chaque vendredi après-midi auprès du téléphone public, à l’entrée du service, où il reçoit un appel. Jusqu’au jour où la machine dysfonctionne. Martin est perturbé, sans pour autant s’en ouvrir à l’équipe. Deux semaines plus tard, il est retrouvé au petit matin inconscient. Il avait arraché son cathéter. Les médecins le raniment, le téléphone est réparé, le rituel des appels reprend. Un soir, le Pr Matuchansky le questionne sur son acte qui aurait pu lui être fatal. Martin explique que sa « seconde ligne de vie » est un ami d’enfance à qui il cache son état de santé, célibataire, en attente d’une greffe rénale depuis un an, et qui n’a que lui pour se confier. « J’ai 40 ans de pratique hospitalière. Ce patient m’a donné une grande leçon d’humanisme médicale et de modestie. Il m’a appris à douter, à ne pas se laisser enfermer dans la pure technicité médicale, à remettre en cause les explications trop faciles, et à écouter le patient au chevet de son lit, avec tous les sens », confie le Pr Matuchansky au « Quotidien du médecin ». *Lancet vol 386, 19 et 19 décembre 2015.

Jenny Reardon, sociologue entre science et justice Le Monde Science et Techno du 13 janvier 2016 par Catherine Mary

Nous sommes en 1986, Jenny Reardon a 13 ans. Elle vit à Kansas City, dans le Missouri, un Etat du Midwest, aux Etats-Unis, lorsqu’un article de Newsweek attire son attention. Il décrit les conséquences pour la planète, selon les scientifiques, de l’altération de la couche d’ozone. Jenny Reardon entame une correspondance avec les experts, conçoit des expériences pour étudier l’effet des rayons ultraviolets sur les écosystèmes marins, les décrit dans un article scientifique. Ces expériences lui vaudront, l’année suivante, le Grand Prix pour les sciences environnementales du concours international des sciences et des techniques, qui vise à encourager les vocations scientifiques dès le lycée. «  Kansas City n’était pas l’endroit idéal pour étudier la biologie marine, mais mon père m’a aidée à installer un laboratoire dans le garage de notre maison. J’y réalisais des expériences en regardant l’“Oprah”, le talk-show à la mode, sur une télévision en noir et blanc  », se souvient-elle, avec des éclats de rire.

Malgré ce succès précoce, ce n’est pas dans les sciences que cette femme engagée de 43 ans excelle aujourd’hui, mais dans l’analyse des contextes dans lesquels elles se pratiquent. Professeure de sociologie, elle dirige le Centre de recherche science et justice, créé en 2010 à l’université de Californie à Santa Cruz, connue depuis les années 1960 pour ses positions avant-gardistes.

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L’idée ? Créer des forums innovants invitant scientifiques et non-scientifiques à penser ensemble au sens de concepts communément utilisés, tels que celui de «  race  », de «  gène  » ou d’«  écologie  ». «  Jenny a une capacité particulière à écouter. Cela a fortement contribué à son leadership  », explique l’historienne des sciences Donna Haraway, de la même université, qui a accompagné Jenny Reardon dans la création du groupe de recherche. «  Elle sait rassembler des spécialistes de différentes disciplines et les amener à réfléchir au sens profond des mots de jargon qu’ils utilisent  », poursuit-elle. «  Ce que j’admire dans son travail, c’est qu’elle ne se contente pas d’une analyse critique de ce que font les scientifiques. Elle cherche à ouvrir avec eux de nouvelles perspectives  », renchérit l’historienne des sciences Joanna Radin, de l’université Yale, dans le Connecticut. «  La génétique apporte un éclairage inédit sur ce qu’est l’être humain, mais nous ne pouvons pas laisser les scientifiques travailler seuls dans leur coin. Jenny Reardon est impressionnante par sa capacité à créer des ponts entre les sciences sociales et la biologie, afin d’amener les uns et les autres à avoir une vision plus large de ce qu’ils font  », complète le généticien David Haussler, de l’université de Californie à Santa Cruz.

Initiée à la théologie

Créer des ponts n’a pas toujours été simple pour Jenny Reardon. Elle est la fille d’un ancien père jésuite défroqué, qui était l’un des huit enfants d’un célèbre dessinateur de presse américain, Foxo Reardon. Homme charismatique, il l’initie à la théologie et lui enseigne la tolérance, sans pour autant déroger à ses principes. Sa mère, elle, la sensibilise à la politique, lors d’un voyage dans les pays de l’Est juste après la chute du mur de Berlin. Elle ne se contente donc pas de la biologie, et à la fin de ses études elle hésite entre deux directions. La biologie moléculaire, dans le laboratoire dirigé par la généticienne Mary-Claire King, à l’université de Californie à Berkeley, ou des études en sciences et technologies, discipline récente qui étudie les facteurs sociaux, politiques et culturels influençant le fonctionnement de la science, à l’université Cornell, à Ithaca, dans l’Etat de New York. Nous sommes au début des années 1990, et Mary-Claire King, dont la carrière sera récompensée en 2014 par le prix Lasker, jouit déjà d’une forte réputation. Elle vient de localiser la région du génome contenant le gène BRCA1, en cause dans certaines formes héréditaires du cancer du sein. C’est pourtant l’autre direction que Jenny Reardon choisira. «  Ç’a été un choix très difficile. Je délaissais des études prestigieuses dans un laboratoire situé dans un endroit de rêve pour des études qui n’intéressaient pas grand monde. J’avais l’impression de trahir ceux qui avaient cru en moi  », se souvient-elle.

Quelques années plus tard, elle revient à la génétique, forte de son nouveau bagage intellectuel. Un sujet l’intéresse tout particulièrement : le Human Genome Diversity Project (HGDP), un projet d’envergure lancé par d’éminents généticiens de l’époque, dont Mary-Claire King, soutenu par le gouvernement américain, puis abandonné dans les années 1990. Pour les généticiens, rien d’autre que de bonnes intentions : étudier la diversité génétique des peuples premiers, afin de mieux comprendre les origines et le brassage des populations. Mais les intéressés ne l’entendirent pas de cette manière. Accusant les généticiens de les considérer comme des objets d’étude et comme une «  matière à brevet  », les dirigeants des tribus amérindiennes des Etats-Unis mirent aussitôt leur veto. Certains anthropologues, quant à eux, reprochèrent au projet d’utiliser les outils modernes pour faire renaître la biologie raciste du XIXème siècle.

L’histoire du concept de race

Dans son livre Race to the finish. Identity and Governance in an Age of Genomics (Princeton University Press, 2005, non traduit en français), Jenny Reardon dépasse ces clivages pour replacer la controverse dans l’histoire du concept de race. Elle en situe l’origine dans des questions irrésolues entre les généticiens et le reste de la population, au sujet des critères à prendre en compte pour étudier la diversité des êtres humains. «  Quand on regarde cent ans en arrière, il apparaît que la science de l’époque était influencée par des représentations raciales, ancrées dans la société et aboutissant à la hiérarchisation des groupes humains.

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Bien qu’ils s’en défendent, le travail des généticiens reste encore biaisé par le contexte à l’intérieur duquel ils travaillent, commente l’anthropologue Gisli Palsson, de l’université d’Islande à Reykjavik. Jenny fait partie de ceux qui sont allés au cœur du problème. Son livre reste la meilleure analyse sur le sujet.  »

Le projet de Science et justice s’appuie sur cette analyse. Promouvant une slow science, son objectif est d’associer l’ensemble des acteurs de la société à la réflexion sur les avancées scientifiques et technologiques. Et ainsi les amener à penser leurs implications en amont, avant qu’elles ne définissent des choix de société. Outre des rencontres pluridisciplinaires, il propose un diplôme universitaire aux étudiants venus de champs aussi éloignés que la sociologie et la physique, pour les faire plancher ensemble sur des sujets sensibles, comme la commercialisation de tests génétiques par la société 23andMe ou l’utilisation de drones dans le domaine militaire. «  Nous essayons d’amener ces étudiants à prendre en considération leurs manières respectives d’aborder un problème pour qu’ils puissent penser d’une façon qui ne soit pas polarisée, explique Jenny Reardon. Nous sommes dans un moment où la science exerce un pouvoir incroyable sur la manière dont les hommes sont gouvernés. En même temps, les questions liées à l’équité sont devenues très aiguës. Science et justice cherche des réponses à cette question  : de quelle science avons-nous besoin dans ce monde-là  ?  »

Fin de vie : une nomination crée la polémique Le Figaro du 13 janvier 2016 par Agnès Leclair

Médecin favorable à l'euthanasie, Véronique Fournier devrait prendre la tête du nouveau Centre national des soins palliatifs.

Est-ce un signal envoyé aux partisans du suicide assisté ? La perspective de l'arrivée du docteur Véronique Fournier, connue pour ses positions en faveur de l'euthanasie, à la tête du nouveau Centre national des soins palliatifs et de la fin de vie met en émoi le milieu des soins palliatifs.

Fortement pressentie pour prendre la tête de ce nouvel organisme créé par décret le 6 janvier dernier, cette cardiologue, qui dirige le centre d'éthique clinique de l'hôpital Cochin à Paris, estime qu'il est temps que la médecine « assume l'intention de mort ». Elle défend une « euthanasie palliative » - non une injection soudaine mais une aide à mourir progressive -pour les malades en fin de vie. Pour l'instant, le ministère des Affaires sociales ne confirme ni ne dément ce choix. Il faut dire que l'ambiance est tendue alors que députés et sénateurs doivent s'accorder le 19 janvier sur les contours de la nouvelle loi sur la fin de vie. Cette proposition, qui vise à instaurer un droit « à dormir avant de mourir » pour les malades au terme de leur existence, a été soutenue par l'Élysée comme un texte de « consensus » et défendue par la Société française d'accompagnement et de soins palliatifs. La proposition de loi a cependant été jugée ambiguë voire dangereuse par les sénateurs qui l'avaient vidée de sa substance. La ministre de la Santé, Marisol Touraine, favorable à titre personnel à la légalisation d'une aide active à mourir, avait pour sa part décrit ce texte comme une « étape » dans la législation sur la fin de vie.

Dans ce contexte, l'arrivée d'un médecin « pro-euthanasie » aux manettes du nouvel organisme ne manque pas d'irriter, voire d'inquiéter, les professionnels de santé, convaincus qu'il ne faut pas franchir la ligne rouge de l'interdit de tuer. « C'est un mauvais signal, un geste dans le sens d'un mouvement politique en faveur de la dépénalisation de l'euthanasie, alerte le président de la Société française d'accompagnement et de soins palliatifs (SFAP), le docteur Charles Jousselin. Véronique Fournier pourrait avoir sa place dans ce centre mais pas comme présidente. Elle n'a pas d'expérience de terrain dans un service en soins palliatifs.

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Elle a une vision réductrice et utilitariste de la fin de vie. Le pire qui puisse arriver à un être humain, c'est le sentiment d'abandon. Or l'euthanasie est un abandon. À l'inverse des soins palliatifs, c'est négliger la rencontre de l'autre. » Et la SFAP de s'interroger sur la capacité d'une personnalité en faveur d'une aide active à mourir à conduire la grande campagne de communication sur les soins palliatifs à destination des Français qui devra être menée d'ici un an par le nouveau centre… Bien que la nomination de Véronique Fournier ne soit pas officielle, le collectif Soulager mais pas tuer, mobilisé depuis plusieurs mois pour pointer les « ambiguïtés » de la proposition de loi sur la fin de vie, a également fait part de ses « vives inquiétudes ».

« Nous tirons la sonnette d'alarme car le plus grand danger dans le débat actuel est la confusion entre soins palliatifs et euthanasie. Or Véronique Fournier participe à ce flou quand elle évoque l'euthanasie comme l'ultime étape des soins palliatifs, considère Tugdual Derville, un des porte-parole du collectif et délégué général d'Alliance Vita. Sa nomination serait un camouflet pour ceux qui ont cru que la proposition de loi sur la fin de vie était un texte d'équilibre. »