10
L’apport de Darwin dans la classification du vivant > PAR FRANÇOISE PERRACHON, MÉDIATRICE CULTURELLE EN SCIENCES ET TECHNOLOGIES SCIENCES EXPÉRIMENTALES ET TECHNOLOGIE CYCLE 3 Place dans les programmes SCIENCES EXPÉRIMENTALES ET TECHNOLOGIE L’unité et la diversité du vivant Présentation de l’unité du vivant : comprendre son unité et sa diversité. Recherche des points communs entre espèces vivantes.Trier, organiser et classer des organismes en fonction de leur squelette, des diffé- rentes parties de leur corps. Situer dans un groupe l’espèce qui partage un caractère avec une autre espèce. Objectifs et démarche Un voyage, des questionnements, une théorie Pendant longtemps les naturalistes ont pensé que les espèces étaient invariables. Ils classaient par similitude, mais également selon une hiérarchie où l’homme était au sommet de l’échelle. Les savants mettaient en avant l’idée d’un monde fixe, créé il y a 6000 ans. Georges Buffon (1707-1788), le premier à rejeter l’idée d’une intervention divine, formula l’hypothèse que la Terre était bien plus âgée : « Le grand ouvrier de la Nature est le Temps.» Selon sa théorie, les espèces ont tout le temps de se modifier. Jean-Baptiste Lamarck (1744-1829), naturaliste français, spécialiste des invertébrés et inventeur du terme « biologie », proposa alors la notion de transformisme. Mais l’idée que les espèces puissent se transformer fut fortement remise en cause par l’idéologie de l’époque marquée par le fixisme de Georges Cuvier (1769-1832). Charles Darwin connaissait l’œuvre de Lamarck. Au cours de son voyage autour du monde, à bord du Beagle, il lit les Principes de géologie de Charles Lyell (1797-1875) qui exposent une théorie prônant la lente évolution des transformations physiques de la Terre, contraire à la théorie des grandes catas- trophes de Cuvier. Le 2 octobre 1836, de retour de voyage, Darwin, en possession de quantité d’informations, rédige alors son premier « Carnet sur la transmutation des espèces », travaille à la publication de son journal Voyage d’un natura- liste sur le HMS Beagle, et coordonne les spécialistes à qui il a confié les spécimens rapportés de son tour du monde. Darwin s’intéresse à la sélection artificielle des horticul- teurs et des éleveurs, qui tirent parti des variations utiles. Il est, dès lors, persuadé que la sélection naturelle fonctionne sur le même principe, mais de façon plus lente. En 1838, la lecture de Thomas Robert Malthus induit une réflexion sur l’in- fluence de la lutte pour l’existence dans la sélection naturelle. Il fonde sa théorie sur l’aptitude de chaque organisme à présenter des variantes qui sont plus ou moins favorables à sa survie. Les ressemblances entre différentes espèces, fossiles et vivantes, le conduisent à envisager un lien de parenté, une évolution avec modifications. En 1855, Alfred Wallace (1823-1913) publie l’article Sur la loi qui a régi l’introduction de nouvelles espèces. Darwin craint d’être dépossédé de son travail. Lyell organise une lecture publique de leurs travaux. Le 24 novembre 1859, les 1250 exemplaires de la première édition de L’Origine des espèces sont vendus en une journée. Il s’agit d’une véritable révolu- tion. Avec le transformisme de Lamarck, l’essence divine de l’espèce n’était pas remise en cause, l’environnement contrai- gnant l’organisme à faire des efforts pour s’adapter. Avec Darwin, les modifications par variations successives sont le facteur premier qui génère des aptitudes dans un milieu donné. Les variantes qui présentent des avantages en termes de survie donnent naissance à une descendance plus importance. La sélection naturelle vient du succès reproductif. Les change- ments transmis n’altèrent pas l’organisation générale primi- tive. Les attributs acquis se maintiennent: un squelette interne, des poumons, des membres pairs munis de doigts. Le corpus documentaire Les DOCS et présen- tent des tétrapodes (vertébrés munis de quatre membres) et abordent l’homologie, qui témoigne de l’interdépendance et du lien de parenté continu entre les espèces. Le DOC montre les organes rudimentaires, qui sont les traces d’une utilité chez un ancêtre. Il s’agit d’un argument supplémentaire expliquant la parenté et la modification des espèces. Les innovations biologiques sont nombreuses à travers les temps géologiques. Les DOCS et abordent les modifica- tions qui ont permis la sortie des eaux. Le DOC , complété par le schéma de l’embryon dans les Activités, p. 39, porte sur une innovation qui sert aux espèces à protéger leur descen- dance, à s’émanciper de l’eau et ainsi à conquérir de nouveaux territoires. Enfin, le DOC appréhende l’histoire du vivant, les notions de lien de parenté et d’évolution à travers une classi- fication qui met en avant le partage des caractères communs à plusieurs espèces. G F E D C B A DARWIN ET LE DARWINISME TDC ÉCOLE N° 43 30 SÉQUENCE PÉDAGOGIQUE 1 TDC « L’évolution des espèces », n o 946, 15 décembre 2007 SAVOIR

SCIENCES EXPÉRIMENTALES ET TECHNOLOGIE CYCLE 3 …

  • Upload
    others

  • View
    5

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

L’apport de Darwin dans la classification du vivant > PAR FRANÇOISE PERRACHON, MÉDIATRICE CULTURELLE EN SCIENCES ET TECHNOLOGIES

SCIENCES EXPÉRIMENTALES ET TECHNOLOGIE CYCLE 3

Place dans les programmesSCIENCES EXPÉRIMENTALES ET TECHNOLOGIEL’unité et la diversité du vivant l Présentation de l’unitédu vivant: comprendre son unité et sa diversité. Recherche despoints communs entre espèces vivantes. Trier, organiser etclasser des organismes en fonction de leur squelette, des diffé-rentes parties de leur corps. Situer dans un groupe l’espècequi partage un caractère avec une autre espèce.

Objectifs et démarcheUn voyage, des questionnements, une théorie l Pendant

longtemps les naturalistes ont pensé que les espèces étaientinvariables. Ils classaient par similitude, mais également selonune hiérarchie où l’homme était au sommet de l’échelle. Lessavants mettaient en avant l’idée d’un monde fixe, créé il y a6 000 ans. Georges Buffon (1707-1788), le premier à rejeterl’idée d’une intervention divine, formula l’hypothèse que laTerre était bien plus âgée : «Le grand ouvrier de la Nature estle Temps.» Selon sa théorie, les espèces ont tout le temps dese modifier.

Jean-Baptiste Lamarck (1744-1829), naturaliste français,spécialiste des invertébrés et inventeur du terme «biologie»,proposa alors la notion de transformisme. Mais l’idée que lesespèces puissent se transformer fut fortement remise en causepar l’idéologie de l’époque marquée par le fixisme de GeorgesCuvier (1769-1832).

Charles Darwin connaissait l’œuvre de Lamarck. Au coursde son voyage autour du monde, à bord du Beagle, il lit lesPrincipes de géologie de Charles Lyell (1797-1875) qui exposentune théorie prônant la lente évolution des transformationsphysiques de la Terre, contraire à la théorie des grandes catas-trophes de Cuvier. Le 2 octobre 1836, de retour de voyage,Darwin, en possession de quantité d’informations, rédige alorsson premier « Carnet sur la transmutation des espèces »,travaille à la publication de son journal Voyage d’un natura-liste sur le HMS Beagle, et coordonne les spécialistes à qui il aconfié les spécimens rapportés de son tour du monde.

Darwin s’intéresse à la sélection artificielle des horticul-teurs et des éleveurs, qui tirent parti des variations utiles. Ilest, dès lors, persuadé que la sélection naturelle fonctionnesur le même principe, mais de façon plus lente. En 1838, la

lecture de Thomas Robert Malthus induit une réflexion sur l’in-fluence de la lutte pour l’existence dans la sélection naturelle.

Il fonde sa théorie sur l’aptitude de chaque organisme àprésenter des variantes qui sont plus ou moins favorables à sasurvie. Les ressemblances entre différentes espèces, fossileset vivantes, le conduisent à envisager un lien de parenté, uneévolution avec modifications.

En 1855, Alfred Wallace (1823-1913) publie l’article Sur laloi qui a régi l’introduction de nouvelles espèces. Darwin craintd’être dépossédé de son travail. Lyell organise une lecturepublique de leurs travaux. Le 24 novembre 1859, les 1 250exemplaires de la première édition de L’Origine des espècessont vendus en une journée. Il s’agit d’une véritable révolu-tion. Avec le transformisme de Lamarck, l’essence divine del’espèce n’était pas remise en cause, l’environnement contrai-gnant l’organisme à faire des efforts pour s’adapter. AvecDarwin, les modifications par variations successives sont lefacteur premier qui génère des aptitudes dans un milieu donné.Les variantes qui présentent des avantages en termes de surviedonnent naissance à une descendance plus importance. Lasélection naturelle vient du succès reproductif. Les change-ments transmis n’altèrent pas l’organisation générale primi-tive. Les attributs acquis se maintiennent: un squelette interne,des poumons, des membres pairs munis de doigts.

Le corpus documentaire l Les DOCS et présen-tent des tétrapodes (vertébrés munis de quatre membres) etabordent l’homologie, qui témoigne de l’interdépendance et dulien de parenté continu entre les espèces. Le DOC montreles organes rudimentaires, qui sont les traces d’une utilité chezun ancêtre. Il s’agit d’un argument supplémentaire expliquantla parenté et la modification des espèces.

Les innovations biologiques sont nombreuses à travers lestemps géologiques. Les DOCS et abordent les modifica-tions qui ont permis la sortie des eaux. Le DOC , complété parle schéma de l’embryon dans les Activités, p. 39, porte surune innovation qui sert aux espèces à protéger leur descen-dance, à s’émanciper de l’eau et ainsi à conquérir de nouveauxterritoires. Enfin, le DOC appréhende l’histoire du vivant, lesnotions de lien de parenté et d’évolution à travers une classi-fication qui met en avant le partage des caractères communsà plusieurs espèces.

G

FED

C

BA

DARW

INET

LEDA

RWIN

ISM

E•

TDC

ÉCOL

EN°

43

30

SÉQ

UEN

CEPÉ

DAGO

GIQ

UE1

l TDC « L’évolution des espèces », no 946, 15 décembre 2007

SAVOIR

Des liens de parentél Pigeon biset l Grenouille

A

TDCÉCOLE

N°43•

DARWIN

ETLE

DARWIN

ISME

31

DOCUMENTS>>

©C

YR

ILR

UO

SO/B

IOSP

HO

TO

©G

ILLE

SM

AR

TIN

/BIO

SPH

OTO

©M

IKE

LIN

E/B

IOSP

HO

TO

©G

UN

THER

MIC

HEL

/BIO

SPH

OTO

l Lézard l Gorille

©PA

SCA

LG

OET

GH

ELU

CK

/BIO

SPH

OTO

©Y

VES

LEFÈ

VR

E/B

IOSP

HO

TO

l Chauve-souris l Baleine

DARW

INET

LEDA

RWIN

ISM

E•

TDC

ÉCOL

EN°

43

32

Quels points communs ont-ils?Ces croquis présentent le squelette des membres antérieurs de six espèces de tétrapodes (vetébrés munis de

quatre membres) parmi lesquels l’homme. Leur squelette est constitué des mêmes os placés de la même manière.

B

SÉQ

UEN

CEPÉ

DAGO

GIQ

UE1

Des traces du passél Squelette de la baleine.

Certains animaux portent en eux des organes qui n’ont pas de fonction précise. Déformés, réduits, ils sont la traced’une utilité chez un ancêtre lointain. Ils témoignent d’un lien de parenté et des modifications de la descendance.

l Évolution des équidés: vers un doigt unique.

C

SÉQ

UEN

CEPÉ

DAGO

GIQ

UE1

HU: humérusCU: cubitusRA: radiusCA: carpe (les os du poignet)

©G

ÉRA

RD

MO

UR

ET©

GÉR

AR

DM

OU

RET

©G

ÉRA

RD

MO

UR

ET

Hyracotherium Hipparion Equus

Phalanges

Doigt no 3

Vestige dudoigt no 4

Éocè

ne

MIo

cèn

e

Qu

ater

nai

re

Jambe de cheval

Les membres ne sont pas dessinés à la même échelle.

TDCÉCOLE

N°43•

DARWIN

ETLE

DARWIN

ISME

33

Quatre pieds sur la terre fermel L’eusthenopteron mesurait environ 1 m.

E

©G

ÉRA

RD

MO

UR

ET©

GÉR

AR

DM

OU

RET

Nageoire pectorale

Nageoire pectorale

Rayons dermiques

Doigts

RadiusCubitus

Humérus

La sortie des eauxl Reconstitution de l’ichthyostéga, le premier tétrapode à s’aventurer sur la terre ferme. Il vivait au Groenland dans leslagunes de bord de mer, il y a 360 millions d’années, et se nourrissait de poissons.

D

©M

NH

N/P

ALÉ

ON

TOLO

GIE

/REC

ON

STIT

UTI

ON

MA

RC

BO

ULA

Y

Patte antérieure Patte antérieure

Doigts

Radius

Cubitus

Humérus

l L’ichthyostéga mesurait environ 1 m 20.

DARW

INET

LEDA

RWIN

ISM

E•

TDC

ÉCOL

EN°

43

34

SÉQ

UEN

CEPÉ

DAGO

GIQ

UE1

Pondus dans l’eau ou sur la terre ? l Cycles de reproduction de la grenouille et du lézard.

F

Un ancêtre commun et une descendance modifiéel Arbre phylogénétique.

Ce schéma est un arbre de classification des espèces. Il retrace l’histoire des modifications survenues chez des espèces à squelette interne à travers le temps. Avant chaque ramification figure un attribut propre au nouveau groupe (en lettres capitales). Ce nouvel attribut est une innovation. Ici, la première innovation est l’acquisition d’une bouche à mâchoires. L’attribut «squelette osseux» est partagé par tous les ostéichthyens qui vont acquérir de nouveaux attributs.Toutes les innovations ne figurent pas sur cet arbre.

G

©G

ÉRA

RD

MO

UR

ET

Fenêtre mandibulaire, gésier - ARCHOSAURES

Deux fosses temporales en arrière de l’orbite - DIAPSIDES

Vertèbres cervicales munies d’une quille ventrale - SAUROPSIDÉS

Développement de l’embryon dans un fluide - AMNIOTES

Membres pairs locomoteurs munis de doigts - TÉTRAPODES

Membres pairs avec humérus et fémur - SARCOPTÉRYGIENS

Squelette osseux - OSTÉICHTHYENS

Bouche à mâchoires - GNATHOSTOMES

VERTÉBRÉS = Squelette interne

Poumons fonctionnels munis d’alvéoles - RHIPIDISTIENS

Squelettes cartilagineux - CHONDRICHTHYENS

©G

ÉRA

RD

MO

UR

ET

et La grande famille du vivantDans L’Origine des espèces, Charles Darwin défend la

théorie de l’évolution en argumentant sur la parenté desespèces et leur modification par sélection naturelle. Aucours des périodes géologiques, les espèces se transfor-ment par modifications légères et successives. Les indi-vidus bénéficiant des plus avantageuses pour la survieprospèrent. Les variations nuisibles disparaissent avecceux qui en sont porteurs. Les modifications utiles sonttransmises avec la descendance dans un milieu complexeoù le climat, l’accès à la nourriture, la relation avec d’autres espèces sont des facteurs de maintien ou d’extinction. Les changements transmis n’altèrent pas l’organisation générale primitive.

Nous observons dans le DOC que les membres anté-rieurs des tétrapodes sont constitués des mêmes osagencés de la même manière. Leur structure est homo-logue car ils entretiennent les mêmes connexions. Cetteunité de type ne veut pas dire que les os ont la mêmeforme ni la même fonction. Les attributs sont déclinés demanière différente. Ces os peuvent se raccourcir et s’aplatircomme l’humérus de la baleine, les doigts peuvent s’al-longer pour former une palette natatoire ou une aile chezla chauve-souris. L’homologie (squelette constitué desmêmes os construits et placés de la même manière dansl’organisme) est un des arguments retenus par Darwin pourtémoigner de ce que chaque espèce n’a pas été crééeindépendamment des autres, qu’elles ont toutes un liende parenté. l Proposer l’Activité , p. 37.

Des organes vestigiauxLes organes rudimentaires ou organes « vestigiaux »

font partie des arguments de Darwin pour expliquer laparenté et la modification des espèces par sélection natu-relle. Ce sont des organes qui n’ont pas de fonction etpourtant se maintiennent sous forme de rudiments chezles insectes, les oiseaux, les squamates, les mammifères.Par mesure de protection, pour se défendre du vent,certains coléoptères semblent ne plus avoir d’ailes posté-rieures, alors qu’elles existent sous forme atrophiée, recou-vertes par des élytres soudés. Parce que certainesvariations leur ont donné des capacités plus avantageusespour leur survie, des oiseaux ont perdu la capacité devoler. L’autruche, performante à la course, a changé demode de locomotion : ses ailes se sont réduites, lesmuscles servant au vol se sont atrophiés. Les ailes du kiwi,réduites à leur plus simple expression, sont devenues invi-sibles. Mais cet oiseau a développé des pattes vigoureuses.Le boa constrictor, qui pratique la reptation, possède desvestiges de pattes postérieures. La baleine et d’autrescétacés ont également un bassin et des membres posté-

C

1

A

BArieurs vestigiaux non reliés à la colonne vertébrale etenchâssés dans le corps. « Quoi de plus curieux que laprésence de dents chez les fœtus de la baleine qui,adultes, n’ont pas trace de ces organes?» Si les cétacés,mammifères placentaires, sont apparus à l’ère tertiaire,au Miocène, il y a vingt-cinq millions d’années, leurs ancê-tres apparaissent à l’Éocène inférieur. Ils avaient des dentset comptaient parmi les grands prédateurs. Par ailleurs,les vestiges de membres inférieurs s’expliquent par le liende parenté entre la baleine et les artiodactyles, parmilesquels le chameau, le sanglier, le cerf et l’hippopotame.Les cétacés ont abandonné la terre pour un retour à lavie aquatique.

Les chevaux possèdent également des caractères vesti-giaux. Les premiers équidés possédaient quatre doigts àleurs membres antérieurs et trois aux membres posté-rieurs. Aujourd’hui, chaque pied est muni d’un sabot quitermine son doigt unique, le majeur. De chaque côté, desbaguettes osseuses sont des vestiges des deuxième etquatrième doigts qui servaient à l’ancêtre du cheval.L’homme garde aussi en lui l’empreinte de ses ancêtres.Notre coccyx est un rudiment de la queue des mammi-fères, et notre appendice dont la fonction est impréciseest un vestige qui servait, chez nos ancêtres herbivores,à digérer la cellulose. Tous ces organes vestigiaux sontdes traces du passé qui s’expliquent en termes d’évolution.L’organe qui a toute son utilité à une période, dans unmilieu donné, peut devenir un handicap lorsque les condi-tions de vie changent. Aussi l’organisme s’adapte-t-il pourse maintenir en vie. La sélection naturelle repousse ce quipeut être nuisible et sélectionne ce qui est le plus adaptéau maintien de la vie. l Proposer l’Activité , p. 38.

à De nouvelles évolutionsVivre sur la terre ferme, s’éloigner du milieu aquatique

pour assurer sa descendance a nécessité des innovations.Il a fallu transformer ses nageoires en pattes. Plus tard,d’autres mutations ont permis de porter le poids du corps,de respirer l’air et de capter des sons aériens pour repérerles prédateurs. L’ichthyostéga (DOCS et ), le premiertétrapode amphibien, avait un corps allongé et prolongépar une queue, un large crâne arrondi, des membres trapus issus des nageoires d’un ancêtre «poisson», l’eus-thenopteron (DOC ). Dans l’eau, ce dernier ne rencontrepas le problème de la pesanteur. Chez l’ichthyostéga, lesarticulations de l’épaule, du coude et du poignet, les osdes membres se sont développés pour permettre lesoutien du corps. Il possède sept doigts. Les doigts surnu-méraires sont constatés chez d’autres tétrapodes de cettepériode. La ceinture pelvienne est beaucoup plus grande,et elle a fusionné avec la colonne vertébrale, ce qui n’estpas encore le cas chez l’eusthenopteron. Mais les premierstétrapodes aux membres trapus se déplacent lentement.L’ichthyostéga était apte à la respiration pulmonaire. La

E

ED

FD

2

ANALYSES ET PISTES D’EXPLOITATION>>

TDCÉCOLE

N°43•

DARWIN

ETLE

DARWIN

ISME

35

DARW

INET

LEDA

RWIN

ISM

E•

TDC

ÉCOL

EN°

43

36

SÉQ

UEN

CEPÉ

DAGO

GIQ

UE1

menace de dessiccation et la nécessité de pondre sesœufs dans l’eau lui imposent de rester près des rivages.

Si le frai des amphibiens (DOC ) pondu dans l’eau ousur le sol est victime de prédateurs, la descendance desamniotes (qui possèdent un sac amniotique, autour del’embryon puis du fœtus) est plus protégée, la sélectionnaturelle opérant avec le succès reproductif. Les saurop-sidés (tortues, lézards, serpents, crocodiles, oiseaux) et lesmammifères ont exploré de nouveaux territoires. C’est auCarbonifère supérieur (315 Ma) que l’œuf amniotiquepermet la transformation des amphibiens en une nouvelleclasse de vertébrés. Une membrane protège l’embryonqui puise sa nourriture dans une poche, le sac vitellin,et stocke ses déchets dans un autre sac, l’allantoïde.L’ensemble est enveloppé d’une seconde membrane,le chorion, et protégé par une coquille calcaire semi-perméable qui permet la respiration. l Proposer les Acti-vités et , pp. 38-39.

Une origine communeLe DOC est un arbre phylogénétique qui illustre l’idée

d’une ascendance commune et d’une descendance avecmodifications que Darwin développe dans L’Origine desespèces. Son observation lui permet de pointer le poly-morphisme des organismes au sein d’une espèce (noussommes tous différents, même si nous appartenons à unemême espèce) et de baser sa théorie sur l’aptitude dechaque individu à présenter des variantes qui seront plusou moins favorables à sa survie.

Contrairement à la théorie du transformisme de Jean-Baptiste Lamarck, le caractère acquis et transmis aux géné-rations futures n’est pas la conséquence d’un besoind’adaptation à l’environnement comme dans l’histoire dela girafe dont le cou s’allonge pour accéder à la nourri-ture. Darwin observe que les individus sont tous différents

G

G

43

F

et que certaines variations présentent un avantage pourl’accès à la nourriture ou pour se défendre des préda-teurs. Les variétés en question se développent et donnentnaissance à une descendance plus importante. « Lesespèces numériquement faibles courent des chancesd’être exterminées.» La sélection naturelle vient du succèsreproductif. Toutefois, la variabilité persiste et maintientune diversité qui est un atout dont une population pourrase servir face à de nouveaux changements.

Dans le DOC , chaque ramification est précédée d’uneou plusieurs innovations évolutives. Toutes les espècesreprésentées appartiennent à l’embranchement des verté-brés apparus à l’Ordovicien (entre – 500 et – 435 Ma) etpossèdent une colonne vertébrale.

Parmi les espèces qui ont maintenu une vie aqua-tique, la lamproie n’a pas de mâchoire, elle fait partie desagnathes. Toutes les autres espèces en possèdent, ce sontdes gnathostomes. Les raies et les requins sont des verté-brés cartilagineux, des chondrichthyens. Le thon, le saint-pierre, la sole, etc. ont un squelette osseux et des nageoiresrayonnées. Le cœlacanthe et le dipneuste ont desnageoires charnues : ce sont des sarcoptérygiens. Lesdipneustes possèdent des poumons fonctionnels, maisvivent dans l’eau. Les premiers tétrapodes s’aventurentsur la terre ferme grâce à la transformation de leursnageoires en pattes articulées à la ceinture pectorale et àla ceinture pelvienne. Mais l’amphibien est toujours dépen-dant de l’eau pour sa reproduction. L’œuf amniotique,évolution du Carbonifère, donne naissance à des descen-dants parmi lesquels les mammifères, les lépidosauriens(lézards, serpents), les chéloniens (tortues), les archosaures(oiseaux, crocodiles).

Dans L’Origine des espèces, Darwin étaye son argu-ment sur le principe de divergence en expliquant que plusune espèce comporte de représentants et plus elle offrede possibilités de variations ; plus elle acquiert de carac-tères avantageux, plus elle offre prise à la sélection natu-relle en donnant une descendance importante. Plus ladivergence est importance, plus son extension géogra-phique est favorisée. l Proposer l’Activité , p. 39.5

G

>> CORRIGÉ DES ACTIVITÉS PP. 37-39a. Tous ces animaux ont un squelette interne et quatre membres munis de doigts, d’où leur nom de tétrapodes. b. La baleine, la chauve-

souris et le gorille ont des mamelles : ils appartiennent au groupe des mammifères. La grenouille, le lézard et le pigeon sont dans un autre sous-groupe. La grenouille a la peau lisse. Le lézard a des écailles soudées, le pigeon biset les a gardées sur ses pattes : ils appartiennent au groupe des sauropsidés. c. Ce sont donc des tétrapodes. Ils sont tous organisés sur le même plan, tous les os n’ont pas la même forme. Ilsont quatre membres munis de doigts.

a. Ces petits os devant la nageoire caudale sont les «os du bassin» (pelvis) et le fémur. Chez les autres tétrapodes terrestres, l’os du bassinrelie la colonne vertébrale aux membres postérieurs. L’ancêtre de la baleine était un tétrapode mammifère qui vivait sur la terre ferme.Les cétacés sont retournés à la vie aquatique. Les os rudimentaires expliquent la parenté. b. Le cheval actuel n’a plus qu’un doigt à son pied :le majeur. Il a plusieurs phalanges. La dernière se nomme «sabot». De chaque côté du doigt unique, il y a des vestiges d’autres doigts.c. Les premiers équidés avaient quatre doigts aux membres antérieurs et trois aux membres postérieurs. Au Pliocène (-5 Ma) les pieds du chevalprennent la forme actuelle : un doigt unique muni d’un sabot. Cette mutation permet de courir plus vite et d’échapper aux prédateurs.

a. Seules les pattes le distinguent visuellement d’un « poisson ». b. L’eusthenopteron évoluait dans l’eau au Silurien, l’ichthyostéga est sorti de l’eau au Dévonien. Ils ont en commun un humérus, un radius et un cubitus. La formation de quatre membres munis de doigts est uneinnovation qui permet à l’ichthyostéga de marcher sur la terre ferme, tout en restant proche de l’eau.

a. Les œufs pondus dans l’eau passent par un stade larvaire (têtards) avant de prendre la forme de tétrapodes à quatre pattes munies de doigts. L’œuf enveloppe l’embryon du lézard, ce qui le protège des prédateurs. Les poissons pondent des œufs sans coquille ; tous lessauropsidés (reptiles et oiseaux) pondent des œufs protégés par une coquille. b. L’amnios est la première enveloppe qui protège l’embryon.Celui-ci respire à travers une coquille semi-perméable. Il se nourrit grâce au vitellius et stocke ses déchets dans l’allantoïde.

Tous les animaux ont en commun un squelette interne. La lamproie n’a pas de bouche à mâchoire. La vie aquatique est antérieure à la vieterrestre. Les animaux qui partagent l’attribut « squelette osseux » se développent et se diversifient en différents groupes qui ont des attributsdérivés propres : www.futuroscope.com/ressources/education/fr/cahier-activites-dinosaures.pdf

5

4

3

2

1

TDCÉCOLE

N°43•

DARWIN

ETLE

DARWIN

ISME

37

Un ancêtre commun l docs et Extraire des informations d’un dessin, décrire, comparer.

a.Observe le DOC .– Chaque animal a-t-il quatre membres munis de doigts?– À l’aide de flèches, associe dans la liste ci-dessous les attributs aux animaux.

b.Réalise un sous-groupeavec les animaux à mamelles, puis un second avec tous les autres. Quel estl’animal qui a la peau lisse? Celui qui a des écailles? Celui qui a des plumes?

c.Observe le squelette des membres des tétrapodes (qui ont quatre membres munis de doigts) dans leDOC .– Cite leur nom.– Colorie d’une même couleur les différents os des membres en commençant par le bras humain.– Compte les os et nomme-les.– Réponds aux questions suivantes:

• Tous ont un carpe (os du poignet), un cubitus, un humérus et un radius Vrai c Faux c• Tous les os ont la même forme Vrai c Faux c• Tous ont la même organisation Vrai c Faux c

d.Relie le nom des membres antérieurs aux organismes (animaux).

e.Les membres postérieurs de la baleine ont régressés et sont enfouis dans son corps. Les oiseaux ontdeux ailes et deux pattes. Pour quelle raison tous ces organismes (animaux) ont-ils deux paires de membres?

• Ils appartiennent à la classe des mammifères Vrai c Faux c• Ils appartiennent à l’ordre des squamates (lézards, serpents) Vrai c Faux c• Ils font partie du groupe des tétrapodes Vrai c Faux c

B

A

BA1

ACTIVITÉS>>

Ailes Bras Nageoires Pattes

©C

ND

P

Baleine Chauve-souris Gorille Grenouille Lézard Pigeon biset

ÉcaillesMamellesMembres munis de doigtsPeau lissePlumesPoilsSquelette interne

Des organes sans fonction l doc Extraire des informations d’un dessin, décrire, comparer. Repérer des indices temporels.

a.Observe le DOC .– Légende les os de la baleine à l’aide des mots suivants: carpe, colonne vertébrale, côtes, cubitus,doigts, humérus, mandibule, maxillaire, phalanges, radius.– Comment se nomment les petits os des membres postérieurs? À quel membre sont-ils rattachéschez d’autres animaux?– Essaie de trouver la raison de leur présence chez la baleine.

b.Le cheval fait partie de la famille des équidés. Observe son pied sur le DOC , puis complète cettephrase à l’aide de ces mots: doigt(s), majeur, phalange, sabot.

Le cheval actuel n’a plus qu’un ................... à son pied. C’est le .................... Il comprend plusieurs .................... La dernière senomme un .................... De chaque côté du ................... unique, on peut voir des vestiges d’autres ....................

c.Observe les évolutions des membres des premiers équidés jusqu’au cheval actuel sur le DOC .– Retrouve les périodes concernées sur l’échelle du temps ci-dessous.– Combien de doigts les premiers équidés avaient-ils à leurs membres antérieurs et postérieurs ?– Pourquoi le cheval n’a-t-il plus qu’un doigt à chaque pied ?

• Parce qu’il a été créé ainsi c • Parce qu’il a évolué c

– Pour quelle raison ?• Parce que c’est plus élégant c • Pour courir plus vite c

La conquête de la terre ferme l docs et Faire une description anatomique. Comparer, analyser une évolution.

a.Observe le DOC .– Quel est cet animal ? Existe-t-il encore aujourd’hui ?– Parmi les attributs suivants, entoure celui qui le distingue d’un « poisson » : le corps, la nageoirecaudale, les pattes, la tête.

b.Observe le DOC . Lis les légendes des deux dessins et situe l’eusthenopteron et l’ichthyostégasur l’échelle des temps géologiques ci-dessus.

c.Décris l’eusthenopteron et l’ichthyostéga en répondant aux questions :• L’eusthenopteron n’a pas de colonne vertébrale Vrai c Faux c• L’eusthenopteron possède un humérus, un radius et un cubitus Vrai c Faux c• L’ichthyostéga a une cage thoracique Vrai c Faux c• L’ichthyostéga a quatre pattes munies de doigts Vrai c Faux c• La ceinture pectorale (os de l’épaule) de l’ichthyostéga est attachée à la tête Vrai c Faux c

E

D

ED3

C

C

C

C2

DARW

INET

LEDA

RWIN

ISM

E•

TDC

ÉCOL

EN°

43

38

SÉQ

UEN

CEPÉ

DAGO

GIQ

UE1

Cam

brie

n

Ord

ovic

ien

Silu

rien

Dév

onie

n

Car

boni

fère

Perm

ien

Tria

s

Jura

ssiq

ue

Cré

tacé Pa

léoc

ène

Éocè

ne

Olig

ocèn

e

Mio

cène

Plio

cène

Qua

tern

aire

Ère primaire Ère secondaire Ères tertiaire et quaternaire

- 5 42 Ma

- 4 48 Ma

- 4 45 Ma

- 4 15 Ma

- 3 60 Ma

- 3 00 Ma

- 2 50 Ma

- 2 00 Ma

- 1 45 Ma

- 6 5Ma

- 5 3Ma

- 3 3Ma

- 2 3Ma

- 5 Ma

- 1 , 8Ma

©C

ND

P

Échelle des temps géologiques

©G

ÉRA

RD

MO

UR

ET

©C

ND

P

TDCÉCOLE

N°43•

DARWIN

ETLE

DARWIN

ISME

39

Vers un embryon protégé l doc Faire une description anatomique. Comprendre que l’évolution de l’œuf assure la descendance.

a.Observe le DOC puis réponds aux questions suivantes :– Où la grenouille pond-elle ses œufs ? et le lézard ?– Quels sont les stades du cycle de développement des amphibiens ?– Quel est l’élément qui enveloppe l’embryon du lézard ?– Quelle est l’espèce qui protège le mieux sa descendance ? Pourquoi ?– Recherche le nom d’autres espèces qui pondent des œufs sans coquille et avec coquille.

b.Observe le schéma ci-dessous, puis réponds aux questions suivantes :– Quel est le nom de la première enveloppe qui protège l’embryon ?– Comment l’embryon qui se trouve dans l’œuf arrive-t-il à respirer ?– Comment se nourrit-il ? Comment stocke-t-il ses déchets ?

Un arbre d’innovations l docApprendre à lire un arbre phylogénétique.

Observe le DOC puis réponds aux questions suivantes:– Regarde le premier embranchement à la racine de l’arbre. Quel est l’attribut que tous les animauxont en commun ?– Quel animal n’a pas de bouche à mâchoires ?– Sur l’arbre phylogénétique, la vie aquatique est représentée par les embranchements de couleurbleue. Est-elle antérieure ou postérieure à la vie terrestre ?– Quel est l’animal qui a un squelette cartilagineux? Quels sont ceux qui ont un squelette osseux ?– Quel est l’embranchement le plus important et le plus diversifié?

G

G5

F

F4

Embryon

Amnios

Cavité amniotique

Vitellus

Allantoïde

Coquille mi-perméable

Aliments

Oxygène

Rejet gaz carbornique

Déchets

L’embryon dans son œuf