12
SOCIETE DES NATIONS. Communiqué au Conseil C.163, M. 96.1939.VI. et aux Membres de la Société. Genève, le 24 mai 1939. MNP AT S PALESTINE. Lettre du Gouvernement du Royaume-Uni au Secrétaire général en date du 20 mai 1939, communiquant la Déclaration de politique sur la Palestine publiée par le Gouvernement du Royaume-Uni le 17 mai 1939. (Document Cmd.6019). (Traduction) J’ai 1'honneur, d'ordre du Vicomte Halifax, de vous adresser, sous pli séparé, 400 exemplaires de la Déclaration de politique sur la Palestine qui a été publiée par le Gouvernement de Sa Majesté dans le Royaume-thi, le 17 mai, à la suite des conférences récemment tenues à Londres avec des représentants des Arabes de Palestine, de certains pays voisins et de l'Agence Juive, pour discuter la situation en ce qui concerne la Pales- tine. 2. Je suis chargé de vous prier de bien vouloir fai- re traduire cette Déclaration en français et la communiquer dans les deux langues aux Etats Membres de la Société des Na- tions, à la Commission permanente des Mandats et aux autres destinataires réguliers des documents de la Société des Nations. 3, D'ores et déjà, des exemplaires du texte anglais de la Déclaration ont été adressés aux membres de la Commission Permanente des Mandats„ (signé) C„W. Baxter. o o o

SOCIETE DES NATIONS. Communiqué au Conseil C.163, M. 96 ... · Au cours des récentes discussions, les délégations arabes ont fait valoir à nouveau le point de vue suivant le

  • Upload
    others

  • View
    1

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: SOCIETE DES NATIONS. Communiqué au Conseil C.163, M. 96 ... · Au cours des récentes discussions, les délégations arabes ont fait valoir à nouveau le point de vue suivant le

SOCIETE DES NATIONS.

Communiqué au Conseil C .163, M. 96.1939.V I .et aux Membres de la

Société. Genève, le 24 mai 1939.

M N P AT S

PALESTINE.

Lettre du Gouvernement du Royaume-Uni au Secrétaire

général en date du 20 mai 1939, communiquant la Déclaration de

politique sur la Palestine publiée par le Gouvernement du

Royaume-Uni le 17 mai 1939. (Document Cmd.6019).

(Traduction)

J ’ai 1 'honneur, d'ordre du Vicomte Halifax, de vous

adresser, sous pli séparé, 400 exemplaires de la Déclaration de

politique sur la Palestine qui a été publiée par le Gouvernement

de Sa Majesté dans le Royaume-thi, le 17 mai, à la suite des

conférences récemment tenues à Londres avec des représentants

des Arabes de Palestine, de certains pays voisins et de l'Agence

Juive, pour discuter la situation en ce qui concerne la Pales­

tine.

2. Je suis chargé de vous prier de bien vouloir fai­

re traduire cette Déclaration en français et la communiquer

dans les deux langues aux Etats Membres de la Société des Na­

tions, à la Commission permanente des Mandats et aux autres

destinataires réguliers des documents de la Société des

Nations.

3, D'ores et déjà, des exemplaires du texte anglais

de la Déclaration ont été adressés aux membres de la Commission

Permanente des Mandats„

(signé) C„W. Baxter.

oo o

Page 2: SOCIETE DES NATIONS. Communiqué au Conseil C.163, M. 96 ... · Au cours des récentes discussions, les délégations arabes ont fait valoir à nouveau le point de vue suivant le

- 2 -

Déclaration du Gouvernement du Royaume-Uni au su.iet de sa politique en Palestine

(doc. Cmd.o019)

(Traduction)

Dans la déclaration concernant la Palestine, publiée le 9 novembre 1938 (Cmd. 5893)> le Gouvernement de Sa Majesté annonçait son intention d'inviter des représentants des Arabes de Palestine, de certains Etats voisins et de l'Agence juive, à conférer avec lui, à Londres, au sujet de la politique future. Il espérait sincèrement qu'une discussion complète, libre et franche, permettrait d'arriver à une entente. Des conférences ont récemment eu lieu avec les délégations arabe et juive; elles ont duré plusieurs semaines et elles ont permis un complet échange de vues entre les Ministres britanniques et les repré­sentants des Arabes et des Juifs.

A la lumière de ces discussions, jalnsi que de la situation en Palestine et des Rapports de la Commission royale (Cmd. 5479) (■*•) et de la Commission de Partage (Cmd. 5854) (2), certaines propositions ont été formulées par le Gouvernement de Sa Majesté et ont été soumises aux délégations arabe et juive, comme base d'un règlement concerté. Ni la délégation arabe ni la délégation ...juive n'ont cru pouvoir accepter ces propositions et les conférences n'ont donc pas abouti à un accord. En consé­quence, le Gouvernement de Sa Majesté est libre de formuler sa propre politique et, après un examen approfondi, il a décidé de s 1 en tenir, d'une façon générale, aux dernières propositions qui avaient été soumises aux délégations arabe et juive et discutées avec elles.

2. Le Mandat pour la Palestine, dont les termes ont été confirmés par le Conseil de la Société des Nations en 1922, a régi, pendant près de vingt ans, la politique des Gouvernementsj britanniques successifs. La Déclaration Balfour y est Incorporée et le Mandat impose à la Puissance mandataire quatre obligations principales. Ces obligations sont énoncées aux articles 2, 6 et 13 du Mandat. Il n'y a pas de contestation au sujet de 1 'inter­prétation de l'une de ces obligations, celle qui a trait à la protection des Lieux Saints, des édifices et des sites religieux» ainsi qu'à l'accès auxdlts Lieux Saints, édifices et sites.

Les trois autres obligations principales sont, d'une manière générale, les suivantes :

(i) instituer dans le pays un état de choses p o l i t iq u e , administratif et économique, d e nature à assurer 1 'établissementil en Palestine, d'un foyer national pour l e peuple juif, faciliter 1 1 immigration juive dans des conditions convenables et e n c o u r a ­ger, de concert avec l'Agence juive, 1 1 établissement intensif des Juifs sur les terres du pays;

(1) Doc. G.495-M.336.1937-VI.-VI-A.5.

( 2 ) Doc. C.492.M.334.1938.VI

Page 3: SOCIETE DES NATIONS. Communiqué au Conseil C.163, M. 96 ... · Au cours des récentes discussions, les délégations arabes ont fait valoir à nouveau le point de vue suivant le

- 3 -

(il) sauvegarder les droits civils et religieux de tous les habitants de la Palestine, à quelque race ou religion qu'ils appartiennent, et, tout en facilitant l ’immigration et 1 1 établis­sement des Juifs, veiller à ce qu'il» ne soit pas porté atteinte aux droits et à la situation des autres parties de la population;

(ili) instituer dans le pays un état de choses politique, administratif et économique, de nature .à assurer le développement d'institutions de libre gouvernement.

3• La Commission royale et les Commissions d ’enquête antérieures ont souligné 1 'ambiguité de certaines expressions contenues dans le Mandat, notamment la suivante-"un foyer natio­nal pour le peuple juif" - et elles ont vu, dans cette ambiguité et dans 1 ’incertitude qui en résulte quant aux objectifs de la politique à suivre, l ’une des causes fondamentales de 1 1 agitation et de 1 1 hostilité entre Arabes et Juifs. Le Gouvernement de Sa Majesté est convaincu que, dans 1 ’intérêt de la paix et du bien- être de 1 ’ensemble de la population de la Palestine, une claire définition de sa politique et de ses buts est indispensable. La proposition de partage recommandée par la Commission royale aurait apporté cette clarté nécessaire, mais 1'établissement, en Palestine, d'Etats arabe et juif indépendants et se suffisant à eux-mêmes a été jugé irréalisable. Le Gouvernement de Sa Majesté s'est donc vu dans 1 1 obligation d 1 élaborer une autre solution qui, tout en tenant compte des obligations qu’il a assumées à l'égard des Arabes et des Juifs, réponde aux besoins de la situation en Palestine. Ses vues et ses propositions sont énoncées ci-après sous les trois rubriques : I. Constitution, II. Immigration et III. Terres.

I. CONSTITUTION.

4. On a fait valoir que l ’expression "un foyer national pour le peuple juif" laissait entrevoir que la Palestine pourrait, en temps voulu, devenir un Etat ou un Commonwealth juif. Le Gou­vernement de Sa Majesté ne désire pas contester 1'opinion exprimée par la Commission royale, que les chefs sionistes, au moment de la publication de la Déclaration Balfour, reconnaissaient que, aux termes de cette Déclaration, un Etat juif n ’était pas définitive­ment exclu. Mais, de même quo la Commission royale, le Gouvernement de Sa Majesté estime que les auteurs du Mandat auquel a été incor­porée la Déclaration Balfour ne sauraient avoir eu 1 ’intention de voir transformer la Palestine en un Etat juif contre la volonté de la population arabe du pays. Le fait que la Palestine ne devait pas être transformée en un Etat juif pourrait être considéré comme impliqué dans le passage du "command Paper" de 1922 (Cmd. 1700) qui est ainsi conçu :

"Des déclarations non autorisées ont été faites selon lesquelles le but poursuivi est de créer une Palestine entiè­rement juive. Des phrases du genre de celle-ci - "La Palestine doit devenir aussi juive que 1 'Angleterre est anglaise" ont été employées. Le Gouvernement de Sa Majesté considère de tels espoirs comme irréalisables et n 'envisage aucunement un but de ce genre. Il n ’a jamais non plus envisagé ..........

Page 4: SOCIETE DES NATIONS. Communiqué au Conseil C.163, M. 96 ... · Au cours des récentes discussions, les délégations arabes ont fait valoir à nouveau le point de vue suivant le

- 4 -

la disparition ou la subordination do la population, de la langue ou de la culture arabes en Palestine. Il tient à souligner que la Déclaration en question (Déclaration Balfour) prévoit, non pas que la Palestine tout entière doit être transformée en Foyer national juif, mais qu'un Foyer de ce genre doit être fondé en Palestine."

Toutefois, cette déclaration n'a pas fait disparaî­tre les doutes. Aussi le Gouvernement de Sa Majesté déclare- t-il maintenant sans équivoque que sa politique ne vise nulle­ment à que la Palestine devienne un Etat juif. En fait, il considérerait comme contraire à ses obligations envers les Arabes selon le Mandat, et aux assurances données dans le passé au peuple arabe, que les Arabes de Palestine deviennent* contre leur gré, sujets d'un Etat juif.

5. La nature du Foyer national juif en Palestine aété précisée comme suit dans le "Command Paper" de 1922 :

"Au cours des deux ou trois dernières générations,les Juifs ont créé à nouveau en Palestine une communautéqui compte aujourd'hui 80,000 âmes et dont un quar1'; environ se compose de fermiers ou de travailleurs agricoles. Cette communauté possède ses propres organes politiques : une as­semblée élue, pour la direction de sos affaires intérieures; des conseils élus dans les villes; enfin, une organisation pour la surveillance de ses écoles. Elle a un grand rabbinat et un conseil rabbinique élus pour la direction de ses affai­res religieuses. Elle a adopté l'hébreu comme langue natio­nale et elle dispose d ’une presse en langue hébraïque. Elle a une vie intellectuelle qui lui est propre et déploie une activité économique considérable. Cette communauté, avec sa population urbaine et rurale, ses organisations politiques, religieuses et sociales, sa langue, ses coutumes, sa vie pro­pre, présente donc des caractères "nationaux". A ceux qui demandent ce qu'il faut entendre par le développement du Foyer national juif en Palestine, on peut répondre qu'il ne s'agit pas d'imposer la nationalité juive à tous les habitants de la Palestine, mais d'assurer le développement futur de la communauté juive existante, avec le concours des Juifs des autres parties du monde, afin qu'elle devienne un centre que le peuple juif tout entier puisse, pour des raisonj de reli­gion et de race, considérer comme un objet d'intérêt et de lé­gitime fierté. Mais, pour que cette communauté ait devant elle les perspectives les plus favorables de libre développe­ment et pour qu'elle fournisse au peuple juif l ’occasion d'exercer librement ses aptitudes, il est indispensable qu'elle sache que, si elle se trouve en Palestine, c'est en vertu

d'un droit et non par tolérance. Telle est la raison pour laquelle il est nécessaire que l ’existence d ’un Foyer natio­nal Juif en Palestine soit placée sous une garantie interna­tionale et qu'elle soit formellement reconnue comme se jus­tifiant par des traditions historiques anciennes.’’

Page 5: SOCIETE DES NATIONS. Communiqué au Conseil C.163, M. 96 ... · Au cours des récentes discussions, les délégations arabes ont fait valoir à nouveau le point de vue suivant le

- 5 -

6. Le Gouvernement de Sa Majesté s'en tient à cette interprétation de la Déclaration de 1917 et la considère comme une vue d 'ensemble faisant autorité, du caractère que revêt le Foyer national juif en Palestine. Cette Déclaration envisageait le développement futur de la communauté juive existante avec le concours des Juifs des autres parties du monde. La preuve que le Gouvernement de Sa Majesté s'est acquitté de 1 1 obligation qui lui incombait à cet égard ressort des faits suivants : depuis la publication de la déclaration de 1922, plus de 300.000 Juifs ont immigré en Palestine etla population du Foyer national s ’est élevée à environ 450.000 personnes, soit près du tiers de la population totale du pays.La collectivité juive n'a pas manqué, de son côté de prendre pleinement avantage des occasions qui lui étaient offertes.Le développement du Foyer national juif et ses réalisations dans de nombreux domaines constituent un remarquable effort constructif qui mérite 1 'admiration du monde et qui doit être, en particulier, une source de fierté pour le peuple juif.

7. Au cours des récentes discussions, les délégations arabes ont fait valoir à nouveau le point de vue suivant le­quel la Palestine était comprise dans la région où. Sir Henry McMahon, au nom du Gouvernement britannique.ûs'était engagé,en octobre 1915» à, reconnaître et à appuyer 1 1 indépendance arabe. La validité de cette revendication, qui se fonde sur les termes de la correspondance échangée entre Sir Henry McMahon et le Chérif de La Mecque a fait l'objet, de la part des re­présentants britanniques et arabes, d'une étude approfondie et minutieuse durant les récentes conférences de Londres.Leur rapport, qui a été publié (cmd.5974), déclare que les représentants arabes, aussi bien que les représentants bri­tanniques, se sont efforcés de comprendre le point de vue de l'autre partie, mais qu'ils n'ont pu aboutir à un accord sur 1 ' interprétation de cette correspondance Il n'est pas besoin de résumer ici les arguments qui ont été présentés des deux côtés. Le Gouvernement de Sa Majesté regrette les malentendus qui sont survenus au sujet de certaines des ex­pressions employées. En ce qui le concerne, il ne peut que s'en tenir, pour les raisons données par ses représentants dans le Rapport, à 1'opinion que la totalité de la Palestine, à l'ouest du Jourdain, était exclue de 1 rengagement pris

par Sir Henry McMahon, et il ne saurait donc reconnaître que la correspondance McMahon constitue une base justifiant la revendication qui tend à faire de la Palestine un Etat arabe.

8. Le Gouvernement de Sa Majesté est chargé, en tant qu'autorité mandataire, d 1"assurer le développement d 1institu- _ tions de libre gouvernement" en Palestine. En dehors de cette

Page 6: SOCIETE DES NATIONS. Communiqué au Conseil C.163, M. 96 ... · Au cours des récentes discussions, les délégations arabes ont fait valoir à nouveau le point de vue suivant le

- 6 -

obligation expresse, il considérerait comme contraire à l'es­prit du système du Mandat tout entier que la population de la Palestine demeurât pour toujours sous la tutelle mandataire.Il convient que la population du pays jouisse, aussitôt que possible, des droits de libre gouvernement qui sont pratiqués par la population de pays voisins. Le Gouvernement de Sa Majesté n'est pas actuellement en mesure de prévoir les formes constitutionnelles exactes que revêtira, en définitive, le Gouvernement de la Palestine, mais son but est le libre gou­vernement et il désire voir s'établir, en fin de compte, un Etat de Palestine indépendant. Ce devrait être un Etat dans lequel les deux peuples de Palestine, Arabes et Juifs, se partageraient l'autorité gouvernementale de telle façon que les intérêts essentiels de chacun soient sauvegardés.

9. L'établissement d'un Etat indépendant et l'aban­don complet du contrôle mandataire en Palestine exigeraient qu'il existât, entre les Arabes et les Juifs, des relations rendant possible un bon gouvernement. En outre, le développe­ment des institutions de libre gouvernement en Palestine, comme dans les autres pays, doit avoir le caractère d'une évolution. Une période de transition sera nécessaire avant que l'indépen­dance puisse être réalisée et, pendant toute cette période,la responsabilité finale, pour ce qui est du gouvernement du pays, continuera à incomber au Gouvernement de Sa Majesté en sa qualité d'autorité m.ndataire, tandis que la population du pays prendra une part croissante au gouvernement et que se développeront l'entente et la coopération mutuelles. L'effort constant du Gouvernement de Sa Majesté visera à développer de bonnes relations entre les Arabes et les Juifs.

10. A la lumière des considérations qui précèdent, le Gouvernement de Sa Majesté fait la déclaration suivante quant à ses intentions au sujet du gouvernement futur de la Palestine.

(1) Le but du Gouvernement de Sa Majesté est l'éta­blissement, dans les dix ans, d'un Etat palestinien indépen­dant, ayant avec le Royaume-Uni des relations contractuelles qui répondront de façon satisfaisante aux besoins c o m m e r c i a u x

et stratégiques des deux pays dans l'avenir. Cette p r o p o s i t i o n

visant l'établissement de l'Etat indépendant impliquerait une consultation avec le Conseil de la Société des Nations en vue de mettre fin au Mandat.

(2) L'Etat indépendant devra être un Etat dans lequel les Arabes et les Juifs participeront au Gouvernement de manière à assurer la protection des intér3ts essentiels de chaque communauté.

(3) L'établissement de l ?Etat indépendant sera p r é c é d é

d'une période de transition pendant toute la durée de laquel le Gouvernement de Sa Majesté continuera à être r e s p o n s a b l e

du gouvernement du pays. Durant cette période de transition,

Page 7: SOCIETE DES NATIONS. Communiqué au Conseil C.163, M. 96 ... · Au cours des récentes discussions, les délégations arabes ont fait valoir à nouveau le point de vue suivant le

- 7 -

la population palestinienne recevra une part croissante dans le gouvernement de son pays. Les deux éléments de la population auront 1 1 occasion de participer au fonctionnement du gouvernement et ce processus sera appliqué, que ces deux éléments décident ou non d'y participer.

(4) Dès que la paix et l'ordre auront été suffisam­ment rétablis en Palestine, des mesures seront prises en vue de donner effet à la politique visant à conférer à la popu­lation palestinienne une part croissante dans le gouvernement de son pays, le but étant de confier à des Palestiniens tous les Départements du Gouvernement, avec le concours de conseil­lers britanniques et sous le contrôle du Haut Commissaire.A cette fin, le Gouvernement de Sa Majesté sera disposé à prendre immédiatement des arrangements pour que des Palesti­niens soient nommés à la tête de certains Départements, avec des conseillers britanniques. Les chefs palestiniens de Départements siégeront au Conseil exécutif, qui donne des avis au Haut Commissaire. Des représentants des Arabes et des Juifs seront invités à remplir les fonctions de chefs de Départements dans une proportion correspondant approxi­mativement à 1'importance numérique des deux populations.Le nombre des Palestiniens chargés de diriger des Départe­ments augmentera progressivement, selon les circonstances, jusqu'au moment où tous les chefs de Départements seront des Palestiniens, exerçant les fonctions administratives et consultatives qui sont actuellement remplies par des fonc­tionnaires britanniques. Une fois ce stade atteint, on examinera la question de la transformation du Conseil exé­cutif en un Conseil des Ministres, avec les modifications concomitantes en ce qui concerne le statut et les fonctions des chefs palestiniens de Départements.

(5) Le Gouvernement de Sa Majesté ne fait pas, pour le moment de propositions visant la création d'un pouvoir législatif élu. Néanmoins, il verrait dans cette création une heureuse évolution constitutionnelle et si, par la suite,1 'opinion publique de la Palestine s'y montrait favorable, il serait disposé, pour autant que les conditions locales le permettent, à mettre sur pied 1 1 organisation nécessaire.

(6) A la fin d'une période de cinq ans à compter du rétablissement de la paix et de l'ordre, il sera institué un organisme approprié représentant la population de la Palestine et le Gouvernement de Sa Majesté, organisme qui, d'une part, passera en revue le fonctionnement des dispositions cons­titutionnelles prises pendant la période de transition et, d'autre part, étudiera et formulera des recommandationsvisant la constitution de l'Etat indépendant de Palestine.

(7) Le Gouvernement de Sa Majesté devra avoir acquis la conviction que, dans le traité envisagé à l'alinéa 1 ou dans la Constitution envisagée à l'alinéa 6, des dispositions suffisantes auront été prévues pour :

a) assurer la sécurité des Lieux-Saints et la liberté d'accès à ces lieux, ainsi que la protection des intérêts et biens des diverses institutions religieuses;

Page 8: SOCIETE DES NATIONS. Communiqué au Conseil C.163, M. 96 ... · Au cours des récentes discussions, les délégations arabes ont fait valoir à nouveau le point de vue suivant le

- 8 -

b) assurer la protection des différentes communau­tés de Palestine, conformément aux obligations assu­mées par le Gouvernement de Sa Majesté tant à 1 1 égard des Arabes qu’à l'égard des Juifs, et tenir compte de la situation spéciale en Palestine du Foyer National Juif;

c) faire face aux exigences de la situation stra­tégique qui pourraient être considérées comme néces­saires par le Gouvernement de Sa Majesté en fonction des circonstances du moment.

Le Gouvernement de Sa Majesté devra également être assuré que les Intérêts de certains pays étrangers en Palestine dont la protection lui incombe actuellement, sont convenablement sauvegardés.

(8) Le Gouvernement de Sa Majesté fera tout ce qui est en son pouvoir pour créer des conditions qui permettront à l ’Etat indépendant de Palestine de s •établir au cours d'une période de dix années. Si, à la fin de cette période de dix années, le Gouvernement de Sa Majesté constate que ses espoirs ont été déçus et que les circonstances exigent l ’ajournement de la création de l'Etat indépendant, il entre­ra en consultation avec les représentants de la population de Palestine, le Conseil de la Société des Nations et les Etats arabes voisins avant de prendre une décision au sujet de cet ajournement. Si le Gouvernement de Sa Majesté arrive à la conclusion que l'ajournement est inévitable, il demandera la collaboration des parties susmentionnées en vue d'établir, pour l'avenir, des plans permettant d'atteindre aussitôt que possible l'objectif désiré.

11. Au cours de la période de transition, des mesures seront prises pour étendre les pouvoirs et les responsabilités des municipalités et conseils locaux.

IMMIGRATION.

12. Aux termes de 1 1 article 6 du Mandat, l'Adminis­tration de la Palestine "tout en veillant à ce qu'il ne soit pas porté atteinte aux droits et à la situation des autres parties de la population'1 est tenue "de faciliter 1 'immigra­tion juive dans des conditions convenables". En dehors de cette disposition, la mesure dans laquelle 1'immigration juive en Palestine doit être autorisée n'est définie nulle part dans le mandat, mais, dans le Command Paper de 1922, il a été stipulé que, pour la réalisation de la politique d'.é- tablissement d'un Foyer Natinnal Juif :

"il est nécessaire que la communauté juive de Palestine puisse accroître ses effectifs par 1'immigration.

Page 9: SOCIETE DES NATIONS. Communiqué au Conseil C.163, M. 96 ... · Au cours des récentes discussions, les délégations arabes ont fait valoir à nouveau le point de vue suivant le

- 9 -

Le volume de cette Immigration ne saurait être tel qu’il dépasse la capacité économique du pays, quelle qu’elle puisse être, d'absorber de nouveaux arrivants^ Il est indispensable de veiller à ce que les immigrants ne cons­tituent pas une charge pour la population de la Palestine dans son ensemble et ne privent de son travail aucun élément de la population actuelle."

Dans la pratique, depuis cette date jusqu’à ces derniers temps, la capacité d'absorption économique du pays a été considérée comme le seul facteur de limitation et, dans la lettre que M. Ramsay MacDonald, en sa qualité de premier Ministre, a adressée au Dr Weizmann, en février 1931 1), il était posé comme principe que la capacité d'absorption économique était l’unique critère. Cette interprétation a été confirmée par diverses résolutions de la Commission permanente des Mandats, Mais aux yeux du Gouvernement de Sa Majesté ni la Déclaration de 1922, ni la lettre de 1931 ne signifient que le mandat l ’oblige, en tout temps et en toutes circonstances, à faciliter l'immigration des Juifs en Palestine sous la seule réserve de la capacité d ’absorption économique du pays.D'autre part, le Gouvernement de Sa Majesté ne voit rien, ni dans le mandat, ni dans les déclarations ultérieures de poli­tique, qui corrobore la thèse selon laquelle l’établissement d'un Foyer National Juif en Palestine ne saurait être réalisé que si on laisse 1 ’immigration se poursuivre indéfiniment.Si l’immigration est préjudiciable à la situation économique du pays, il est clair qu’elle doit faire l’objet de restric­tions; de même, si elle a des conséquences vraiment fâcheuses pour l'état politique du pays, c'est un élément dont il est impossible de ne pas tenir compte. Bien qu’il ne soit pas difficile de soutenir que les nombreux immigrants Juifs admis jusqu’ici dans le pays ont été, au point de vue économique, absorbés, la crainte des Arabes de voir cet afflux se pour­suivre indéfiniment de telle sorte que le jour viendra où la population juive sera en mesure de les dominer, a entraîné des conséquences qui sont extrêmement graves aussi bien pour les Juifs que pour les Arabes, ainsi que pour la paix et la prospérité de la Palestine. Les troubles déplorables qui se sont produits au cours des trois dernières années ne consti­tuent que la dernière en date et la plus prolongée des manifes­tations de cette vive appréhension arabe. Les méthodes employées Par les terroristes arabes, aussi bien contre leurs compa­triotes arabes que contre les Juifs doivent, certes être condam­nes sans réserve. Mais on ne saurait nier que la crainte d ’une immigration juive indéfinie ne soit générale parmi la population arabe et que c'est cette crainte qui a rendu possibles les trou­bles dont les conséquences ont été d'entraver sérieusement les progrès économiques, d'appauvrir le Trésor palestinien, de créer un état d'insécurité, tant au point de vue de la vie ’lue des biens, et de faire naître entre les populations arabe et juive des sentiments d ’amertume, déplorables entre citoyens du même pays.

(1) (Hansard, débats parlementaires, volume 248, 13/2/1931# colonnes 751-7 )•

Page 10: SOCIETE DES NATIONS. Communiqué au Conseil C.163, M. 96 ... · Au cours des récentes discussions, les délégations arabes ont fait valoir à nouveau le point de vue suivant le

- 10 -

Si, dans ces conditions, 1 1 immigrât ion se poursuit jusqu'à concurrence de la capacité d 1 absorption économique du pays, indépendamment de toute autre considération, une hostilité fatale se perpétuera entre les deux populations et la situa­tion en Palestine pourra devenir une source permanente de froissements entre toutes les populations du Proche et du Moyen-Orient. Le Gouvernement de Sa Majesté ne saurait ad­mettre que, soit les obligations que lui impose le mandat, soit des considérations de sens commun et de justice, exi­gent qu'il ignore ces conditions dans 1'élaboration d'une politique d 1 immigration.

13. De l ’avis de la Commission royale, 1'associa­tion de la politique de la Déclaration Balfour et du système du Mandat présupposait que l 'hostilité arabe à 1'égard de la Déclaration Balfour serait tôt ou tard surmontée. Les Gou­vernements britanniques, depuis la publication de cette dé­claration, ont espéré, qu’avec le temps la population arabe, reconnaissant les avantages qu'elle peut retirer de 1'établis­sement des Juifs en Palestine et du développement de cette co­lonisation, finirait par accepter la continuation du dévelop­pement du Foyer national juif. Cet espoir ne s'est pas réa­lisé. L ’alternative qui s'offre au Gouvernement de Sa Majes­té est donc i) soit de chercher à développer indéfiniment le foyer national juif par 1'immigration, contre la volonté fer­mement exprimée de la population arabe du pays, soit ii) de ne permettre la continuation de 1'expansion du Foyer national juif par 1'immigration que si les Arabes sont disposés à y consentir. La première politique signifie le règne de la force. En dehors de toutes autres considérations, une politique de c e genre, de l'avis du Gouvernement de Sa Majesté, serait contraire à l'esprit même de 1'article 22 du Pacte de la Société des Nations, ainsi qu'aux obligations spécifiques qui lui incombent à l'égard des Arabes, d'après les termes du Mandat sur la Pa­lestine. En outre, les rapports entre Arabes et Juifs en Pa­lestine doivent, tôt ou tard, avoir pour base un esprit de to­lérance mutuelle et de bonne volonté; la paix, la sécurité et le progrès du Foyer national juif lui-même 1'exigent. En con­séquence , le Gouvernement de Sa Majesté, après avoir procédéà un examen approfondi et avoir tenu compte de la mesure dans laquelle la création du Foyer national juif a été facilitée pendant les vingt dernières années, a décidé que le moment était venu d 'adopter en principe la seconde des solutions men­tionnées ci-dessus.

14. On a demandé instamment l'arrêt immédiat de tou­te nouvelle immigration juive en Palestine. Le Gouvernement de Sa. Majesté ne saurait accepter une telle proposition qui, en portant atteinte à 1'ensemble de la structure économique et fi­nancière de la Palestine serait préjudiciable aux intérêts tant des Arabes , que des Juifs. En outre, de l'avis du Gou­vernement de Sa Majesté, l’arrêt soudain de toute nouvelle im­migration constituerait une injustice à l'égard du Foyer na­tional juif. Mais, par dessus tout, le Gouvernement de Sa Ma­jesté est conscient du sort malheureux actuellement fait à ungrand nombre de Juifs qui cherchent un refuge hors de cer­

tains pays européens, et il est persuadé que la Palestine peut et doit apporter une nouvelle contribution à la solution de

Page 11: SOCIETE DES NATIONS. Communiqué au Conseil C.163, M. 96 ... · Au cours des récentes discussions, les délégations arabes ont fait valoir à nouveau le point de vue suivant le

- 11 -

cot urgent problème mondial„ Cmmpte tenu de toutes ces consi­dérations, le Gouvernement de Sa Majesté croit agir d'une manière conforme à ses obligations de Puissance mandataire tant à 1'égard des Arabes qu'à l'égard des Juifs et de la fa­çon la plus propre à sauvegarder les intérêts de l'ensemble de la population palestinienne en adoptant au sujet de 1'im­migration les propositions suivantes :

1) Au cours des cinq prochaines années, l'immigra­tion juive s'effectuera à une cadence qui, si la capa­cité d'absorption économique le permet, portera la popu­lation juive à environ un tiers de la population totale du pays. Compte tenu de l'accroissement naturel escomp­té des populations arabe et juive et du nombre des immi- grants juifs entrés illicitement qui se trouvent aujour­d'hui dans le paya, il sera ainsi possible d'admettre,à partir du début d :avril de cette ànnée, environ 75.000 immigrants pendant les cinq premières années. Ces immi­grants seront, sous réserve du critère de la capacité d'absorption économique, admis comme suit :

a) Pour chacune des cinq prochaines années, un contingent de 10.000 immigrants juifs sera autori­sé, étant entendu que toute fraction de ce contin­gent non utilisée au cours d'une année quelconque pourra être ajoutée aux contingents des années ul­térieures, dans les limites de la période de cinq ans, si la capacité d'absorption le permet.

b) En outre, à titre de contribution à la solu­tion du problème des réfugiés juifs, 85,000 réfu- . giés seront admis dès que le Haut Commissaire aura constaté que des dispositions approrpiées aurant été prises pour subvenir à leurs besoins; on prendra spécialement sn considération les enfants et les parents de réfugiés.

2) L'organisation actuellement chargée de déterminer la capacité d'absorption économique sera maintenue et c'est au Haut Commissaire qu'il appartiendra, en dernier ressort, de fixer les limites de la capacité d'absorption économique. Avant chaque décision périodique, des repré­sentants des Juifs et des Arabes seront consultés.

3) Après la période de cinq ans, aucune nouvelle im­migration juive ne sera autorisée, à moins que les Arabes de Palestine ne soient disposés à y consentir.

4) Le Gouvernement de Sa Majesté est résolu à mettre un frein à l'immigration illicite, et de nouvelles mesures préventives sont, en cours d ?'adoption. Le nombre des immi­grants juifs qui, en dépit de ces mesures, réussiraient à pénétrer illicitement dans le pavs et ne pourraient être expulsés, sera ’éduit des contingents annuels,

15. Le Gouvernement de Sa Majetté estime que, lorsque le plan quinquennal d'immigration actuellement envisagé aura été réalisé, il ne sera ni fondé, ni obligé à faciliter le dévelop­pement ultérieur du Foyer national juif par l'immigration sans tenir compte des voeux de la population arabe*

Page 12: SOCIETE DES NATIONS. Communiqué au Conseil C.163, M. 96 ... · Au cours des récentes discussions, les délégations arabes ont fait valoir à nouveau le point de vue suivant le

- 12 -

TERRES «

16. L'Administration de la Palestine est tenue, en vertu de 1 1 article 6 du Mandat, "tout en veillant à ce qu’il ne soit pas porté atteinte aux droits et à la situation des autres parties de la population", d 'encourager ”1 1 établisse­ment intensif des Juifs sur la terre" et jusqu'ici aucune restriction n'a été imposée aux cessions de terres par les Arabes aux Juifs. Les rapports de plusieurs commissionsd'experts ont signalé que, par suite de 1 'accroissement natu­rel de la population arabe et des ventes continues, au cours des dernières années, de terres arabes aux Juifs, il n'est plus possible aujourd'hui, dans certaines régions, de procé­der à de nouvelles cessions de terres arabes, tandis que, dans certaines autres, ces cessions de terres doivent faire l'objet de restrictions si l'on veut conserver aux cultivateurs arabes leur niveau de vie actuel et éviter de voir se créer à bref délai une nombreuse population d'Arabes sans terre„ Dans ces conditions, le Haut Commissaire recevra des pouvoirs gé­néraux 1'autorisant à interdire et à réglementer les cessions de terres. Ces pouvoirs dateront de la publication de la pré­sente déclaration de politique, et le Haut Commissaire les conservera pendant toute la période de transition,

17. La politique du Gouvernement aura pour objet la mise en valeur des terres et 1'amélioration, partout où c'est possible, des méthodes de culture. A la lumière de cet­te évolution, il appartiendra au Haut Commissaire, s’il est convaincu que les "droits et la situation" de la population arabe seront dûment sauvegardés, de réviser et de modifier toute ordonnance antérieure relative à 1 ’interdict ion ou à la limitation des cessions de terres.

18. En élaborant ces propositions, le Gouvernement de Sa Majesté s ’est sincèrement efforcé d'agir en stricte con­formité avec les obligations que le Mandat lui impose, tant à l'égard des Arabes que des Juifs, L 'imprécision des formules employées dans certains cas pour énoncer ces obligations a sus­cité des controverses et en a rendu 1'interprétation malaisée.Le Gouvernement de Sa Majesté ne saurait espérer donner satis­faction aux partisans de l'une et l'autre thèses dans la contro­verse à laquelle le Mandat a donné lieu, Son but, c'est d 'être équitable pour les deux populations de la Palestine dont les destinées dans ce pays ont subi le contre-coup des grands événe­ments de ces dernières années et qui, puisqu'elles vivent côte à côte, doivent apprendre à pratiquer la tolérance, la bonne volonté et la collaboration mutuelle. Lorsqu'il regarde vers l'avenir, le Gouvernement de Sa Majesté est pleinement cons­cient du fait qu'en raison de certains événements passés il s e r a difficile de créer de telles relations. Mais il sait, d'autre part, que souvent et en maints endroits de Palestine, au cours des dernières années, les habitants arabes et juifs ont vécu en bons termes, et il y trouve un encouragement. Chacune des com­munautés a un grand rôle à jouer dans la prospérité de la pa­trie commune, et chacune d ’elles doit désirer profondément la paix, qui aidera à accroître le bien'-être de 1'ensemble de la population du pays. La responsabilité qui leur incombe, au même titre qu’au Gouvernement de Sa Majesté, de coopérer en vue d ’assurer la paix à un caractère d ’autant plus solennel que leur pays est révéré par des millions de Musulmans, de Juifs et de Chrétiens qui, dans le monde entier, prient pour la paix de la Palestine et pour le bonheur de sa population.