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N. 42 - Edition franaise

Anno XII - Semestre II n. 3 - Sped. abb. post. - (50 % - TO) - Tassa Riscossa, Taxe perue - Torino CMP

Octobre - Novembre 1996

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Sodalitium Priodique - Bulletin Officiel de l'Institut Mater Boni Consilii - Loc. Carbignano, 36 - 10020 VERRUA SAVOIA (TO) - Italie - Tlphone de l'Italie 0161-839.335; Fax 0161- 839.334 - Tlphone de France 00..39.161.839.335 - C/CP 24681108 - Directeur de la publication: M. l'abb Francesco Ricossa - Aut. Trib. n. 116 du 24-2-84 - Imprim en Italie par l'Institut Mater Boni Consilii.

Sommaire

Editorial Le Sionisme: un rve magnifique ou un terrible fiasco? Le Pape du Concile (XIXme partie) La Batitude Encore sur lOpus Dei Entre sotrisme et dvotion. Les relations dangereuses continuent RECENSIONS: La destruction du Temple chez Vittorio Messori Vie de lInstitut

p. 2 p. 4 p. 33 p. 48 p. 58 p. 62 p. 70 p. 73

Editorial

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oil dj un certain temps, depuis la lointaine anne 1991, que Sodalitium ddie de nombreux articles la question juive, et sans doute le sujet est-il considr comme lassant par les uns et dangereux par les autres. Pourtant ce numro ne fera pas exception. Et nous allons vous expliquer pourquoi. Plusieurs fois nous avons dnonc le rve fou dun grand nombre de juifs (et de tant de proslytes, maons ou non-maons) de reconstruire le Temple, et ce, pas seulement de faon symbolique, mais rellement. Reconstruire le Temple, qui serait le troisime, aprs celui de Salomon et celui dHrode dont le Seigneur prdit la destruction, destruction qui survint ponctuellement en lan 70. Encore rcemment, loccasion de laffaire Priebke, le rabbin Mordechai Friedman, prsident de lAmerican Board of Rabbins, a dclar: Le monde a-t-il donc oubli comment, en lan 70 de Notre-Seigneur, lEmpire romain rasa la Jude ralisant ce qui peut tre considr comme le premier mini-holocauste de lhistoire? Nous demandons aux italiens descendants de ces criminels de nous restituer les objets sacrs pris par leurs anctres lors-

quils pillrent le Temple sacr de Jrusalem. Objets qui sont encore gards dans les caves du Vatican (cf. Corriere della Sera, 8 aot 1996). Mises part les erreurs grossires du Rabbin Friedman, ces paroles dmontrent que la blessure ouverte il y a deux mille ans nest pas encore cicatrise. Et elle ne peut pas ltre. Pas seulement et pas tant pour des motifs nationalistes; ce qui est en jeu cest la vridicit ou la fausset de la religion juive actuelle, autrement dit la vridicit ou la fausset du christianisme. Jsus pse comme un pav, alors il faut dmontrer quIl sest tromp. La destruction du Temple et du sacerdoce de la loi ancienne avec la cessation de ses sacrifices, annonce par les prophtes et par les Evangiles, a concid en effet avec la venue du Messie qui a rendue vaine, strile, morte et mortifre lantique religion. Reconstruire un Temple postiche, inventer un nouveau (faux) sacerdoce, offrir de nouveau les sacrifices bibliques...: tout ceci serait une tentative dsespre, et de toutes faons bien tardive, de nier la ralit, de nier que Jsus est le Christ. Pire encore: tout ceci ne peut dboucher que dans la prparation de la venue dun autre Messie ou Christ qui ne peut tre que lantchrist. Car il slvera de faux Christs (Mt 24, 24) parce que qui ne croit pas que Jsus est le fils de Dieu, celui-l est lantchrist (cf. 1 Jo 2, 18). La

Sur la couverture: LEglise Catholique, toile du peintre contemporain Mazzonis, expose dans notre Oratoire de Turin (cf. Vie de lInstitut, p. 78).

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construction du Temple, rve par Julien lApostat et par Voltaire pour dmentir le christianisme, serait un pas suivant sur cette route. La cration (et la reconnaissance de la part de JeanPaul II) de lEtat dIsral, les dclarations conciliaires et post-conciliaires sur la responsabilit de la passion du Christ (attribue aux seuls romains ou carrment aux... chrtiens, accusant ainsi les Evangiles dtre faux) ont t les pas prliminaires, visant faire croire quIsral vit et que lEglise est morte: Tu na pas vaincu, galilen!. Jsus doit de nouveau passer pour un imposteur (Mt 27, 63), et la Croix passer pour folie et scandale (1 Cor 1, 23). La crise que traverse lEglise semble donner raison aux ennemis: les modernistes ont contredit le magistre infaillible de lEglise, faisant croire que ces contradictions viennent de lEglise et du Pape. De nombreux traditionalistes leur donnent involontairement raison, disant que le Pape et lEglise se trompent. Pour les uns lEglise se trompait avant le Concile, pour les autres cest maintenant quelle se trompe (et pour labb Marcille, intervenu au Congrs thologique de Si si no no, on se trompe dj depuis Lon XIII au moins! Cf. article paratre dans le prochain numro) mais les uns et les autres sont daccord pour dire que le Pape et lEglise se trompent... Voil justement ce que voulait dmontrer lEnnemi: lEglise catholique est fausse (puisquelle sest contredite), et son Messie est faux galement. Reste dmontrer que la Synagogue ressuscite, et avec elle le Temple de Jrusalem qui accueillera le vrai Messie (lantchrist). Vagues lucubrations de maniaques, me direz-vous? Eh bien, les chroniques rcentes de cette fin de septembre ont rvl tous ce que nous disions depuis dj un certain temps. Le tunnel touristique creus sous les fondations du Temple de Jrusalem sur ordre du gouvernement isralien, qui prvoyait bien pourtant quelle serait limmanquable raction des palestiniens rprime ensuite dans le sang, ce tunnel, disais-je, nest, dans les intentions de ses constructeurs, que le premier pas vers la rdification du Temple. Giuseppe Zaccaria, journaliste La Stampa (qui nest pas le moins du monde un quotidien hostile Isral, bien au contraire), rapporte les propos quil a entendu dans le tunnel de Jrusalem: Que feriezvous - disait un isralien aux journalistes franais - si les arabes plantaient une mosque sur la Cathdrale Notre-Dame? Nous dtruirons cette p. de mosque (construite sur les ruines du Temple). Et un juif hareddin, juif orthodoxe, lui explique limportance rien moins que

touristique du tunnel: la tradition veut que derrire ce mur il y ait la Pierre Angulaire sur laquelle fut difi le Temple, celle sur laquelle Abraham se prparait sacrifier Isaac, la pierre sur laquelle furent poses les Tables de la Loi... (30 septembre 1996, p. 7). Quel aveuglement! Ils sobstinent chercher une pierre angulaire dun Temple que Dieu a dtruit, au risque de provoquer un carnage, et ils ne veulent pas admettre que le vrai Temple de Dieu (Jo 2, 19-21), la vritable Pierre Angulaire est Jsus-Christ (Eph. 2, 20), pierre dhonneur pour ceux qui croient en Lui, mais pierre dachoppement et de scandale pour les btisseurs qui lont rejete (1 Pt 2, 7 et 8). Jsus leur disait dj: Navez-vous jamais lu dans les Ecritures: La pierre quont rejete ceux qui btissaient est devenue un sommet dangle. Cest par le Seigneur que cela a t fait, et cest admirable nos yeux? (Ps 117, 22-23). Cest pourquoi je vous dis que le Royaume de Dieu vous sera t, et quil sera donn un peuple qui en produira les fruits. Celui qui tombera sur cette pierre se brisera; et celui sur qui elle tombera, elle lcrasera (Mt 21, 42-44). Il ny aura pas de paix en Palestine et dans le monde tant que ne sera pas reconnue par tous cette Pierre qui est le Christ, lequel est notre paix, lui qui des deux choses [paens et juifs] en a fait une seule, dtruisant dans sa chair le mur de sparation, leurs inimitis... (Eph. 2, 14). Dieu veuille, comme labb Nitoglia en met le souhait dans un article de ldition italienne de ce mme numro de Sodalitium, que les juifs abandonnent finalement leurs traditions humaines, les pierres mortes du Temple dtruit, larche et les tables de la loi perdues, cessant enfin de perscuter le Corps mystique de Jsus (cf. Act. 9, 5) qui est lEglise, et que reniant lattente dun faux messie, ils reconnaissent Celui quils ont transperc (Jo 19, 37) et Lui disent: Bni soit Celui qui vient au nom du Seigneur (Mt 23, 39). Alors, seulement alors il y aura la paix...

Lentre du Tunnel sous lesplanade du Temple Jrusalem

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La question juive

LE SIONISME: UN REVE MAGNIFIQUE OU UN TERRIBLE FIASCO ?Par M. labb Curzio Nitoglia

A

vec le prsent article, travers lanalyse de la pense et des conqutes du Sionisme, on entend montrer comment la formation de lactuel Etat dIsral ne rpond pas aux promesses divines. A lanalyse de lvolution de lide sioniste suivra ltude du mouvement sioniste et de ses rapports avec les Superpuissances et avec les diffrents Etats europens, y compris les nazis et les fascistes, pour arriver la question thologique et doctrinale et au rapport avec lEglise. INTRODUCTION

Vers la seconde moiti du XIXme sicle se dveloppa le flux migratoire des Juifs vers la Palestine, qui ntait cependant pas un phnomne spontan, mais le produit du SIONISME (1), avec le concours de deux cents dlgus juifs runis Ble et ladhsion de plus de cinquante mille Juifs, et dans le but de travailler au rachat de la Palestine, pour y crer un Etat isralite (2). Mais le Sionisme ne commence pas au XIXme sicle, mais est lexpression moderne du vieux rve de mille neuf cents ans, de reconstruire Isral, aprs que Rome avait mis fin lindpendance juive en terre dIsral (3). DIFFERENTES ETAPES DE LIDEE SIONISTE a) Premire priode: de la chute de Jrusalem la mort de Julien lApostat (70-363). Sous le rgne de Trajan ( 117) un faux Messie, nomm Andr, excita le fanatisme des Juifs au point que, parmi les Grecs et les Romains, deux cent mille hommes prissent par lpe et par la fureur des Juifs (4). Marcius Turbo attaqua les rebelles et leur fit payer de leur sang un jour de triomphe. Sous le rgne dAdrien (130-135) eut lieu une seconde tentative, quand un certain Bar-

Cozbad se fit passer pour le Messie et les Romains furent chasss de Jrusalem, qui cependant retomba trs vite entre leurs mains; mais tandis que Titus avait laiss encore cette maison entire, avec Adrien la ville fut rase au sol et sa place fut construite Aelia Capitolana, qui ne reprit le nom de Jrusalem que plus tard. La troisime tentative de rvolte, advenue sous le rgne dAntonin (138-161), ainsi que la quatrime sous Marc Aurle (174175) neurent de succs et furent rprimes. Une autre fois - la cinquime - les Juifs, anims par lesprance de restaurer politiquement le Royaume dIsral, au temps de Septime Svre (193-211), conspirrent en Syrie avec les Samaritains contre la domination romaine, mais obtinrent seulement dappesantir le joug auquel ils taient soumis. La sixime tentative dinsurrection se vrifia sous Constantin (321-327), mais fut elle aussi touffe et St Jean Chrysostome dans le Second discours contre les Juifs, nous raconte que Constantin, convaincu que les Juifs navaient pas renonc leur esprit de rvolte, leur fit couper une partie de loreille, afin que, disperss dans lEmpire, ils portassent partout avec eux le signe de leur rbellion (5). Sous Constance il y eut une septime rvolte, mais Gallus passa en Jude, o il battit les insurgs et rasa Diocsare, sige de linsurrection: les Juifs furent tus par milliers et de nombreuses villes, parmi lesquelles Tibriade, furent brles. Lultime tentative de cette premire priode est lune des plus clbres et a comme cooprateur Julien lApostat, qui non seulement permit aux Juifs de reconstruire le Temple, mais les aida par tous les moyens: sur lissue finale voir ce prsent numro (6). Si un rle important dans toutes ces tentatives de rvolte est attribuer la tnacit juive, le facteur principal est d, selon le juif converti Augustin Lmann, une interprtation dun certain groupe de prophties bibliques (7); mme cest en se fondant sur ces prophties que les Juifs ont toujours espr quils reviendraient Jrusalem, quils y restaureraient le Temple (8), pour y jouir avec le Messie dune pleine et inaltrable prosprit (9). b) Seconde priode: de la mort de Julien lApostat la Rvolution franaise (363-1789). Cette longue priode fut marque par la rsignation, mme si se maintint toujours une certaine esprance endormie, comme laffirme galement labb Lmann: avec la

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mort de Julien lApostat et le triomphe dfinitif du Christianisme jusqu la Rvolution franaise, cest pour les Juifs la priode de rsignation mais toujours desprance ( 10). Durant cette priode laptitude financire et commerciale des Juifs se dveloppe et stend toutes les nations dune manire extraordinaire [ils] deviennent les financiers des rois. Mais, au milieu des proccupations de leurs trafics et des calculs de leur ngoce, ils ne laissent pas que de penser Jrusalem (11). Vers le XVIme et le XVIIme sicle les Juifs amis de la Terre Sainte se dplacrent vers Safed, quelques kilomtres de Bethsade; au XVIIme sicle on dnombrait Jrusalem environ cent familles juives et, partir de cette poque, les plerinages la Ville sainte commencrent devenir toujours plus nombreux. c) Troisime priode Avec le philosophisme allemand du XVIIIme sicle et avec la Rvolution franaise on assiste lABANDON de lide du retour Jrusalem et du dogme du Messie personnel. Quelles furent les causes de ce changement? La premire est justement le philosophisme imprgn de ce scepticisme du dix-huitime sicle, qui a t lagent corrosif de toutes les religions, y compris de la religion talmudique, dabord avec Spinoza et ensuite avec Mendelssohn, qui peut tre considr comme le fondateur dune sorte de noJudasme, masqu de disme. Commence ainsi se rpandre dans les ghettos lide que le Messie pourrait tre un concept, un royaume, un peuple, mais non une personne, et surgit aussi le problme de la disposition physique et gographique de ce royaume. Cest la Rvolution franaise qui concrtise ce mythe. LEMANCIPATION aux Juifs franais fut accorde en 1791; ils virent le Messie dans les Droits de lhomme proclams par la Rvolution. De la fin du XVIIme sicle 1848 le mythe du Messie impersonnel a eu deux coles principales, dont la premire fleurit en Allemagne sous lgide du philosophisme. En 1843 Francfort-sur-le-Main sorganisa un comit juif rformiste, auquel suivirent trois synodes, un la mme anne Brunswick, un encore Francfort en 1845 et un troisime Breslau en 1846, dans lesquels on affirmait que lunique Messie attendu tait la libert

dtre admis parmi les Nations; par cela le parti talmudiste allemand fut bless mort. La seconde cole se forma en France, sous lgide de lmancipation, qui marque aussi llment diversifiant des deux coles. En effet en Allemagne, du moment que le juif ntait pas encore mancip civilement, sa pense devait tre considre comme hardie et prmature: la libert civile, non encore conquise, tait la perle pour laquelle on tait prt sacrifier toute chose, mme le Messie personnel. En France, au contraire, les juifs depuis 1791 jouissaient de la libert civile et taient donc plus modrs dans lvolution de la foi propos du Messie. Dans le Grand Sionisme de 1807 Napolon avait t honor et dcor des titres rservs exclusivement au Messie, mme si le parti talmudiste tait encore assez fort pour contrebalancer. Ce fut seulement partir de 1848 que toute rpression de la part de la Synagogue talmudique devint inefficace mme en France. En effet durant le rgne de LouisPhilippe le rationalisme allemand avait exerc une influence notable sur le Judasme franais. En 1846, durant lintronisation du grand rabbin de Paris, le colonel Cerf-Beer, dans un discours de circonstance lui fit comprendre quil tait dsormais temps de commencer avec les rformes (laggiornamento) galement en Allemagne: le parti talmudiste neut plus la force de ragir comme par le pass. Dsormais mme le monde juif franais affirmait que La Rvolution tait le vrai Messie pour les opprims (12). La Jrusalem nouvelle serait la Jrusalem de largent avec un banquier pour Messie, la cote des fonds publics au lieu du Sefer Thora, la Bourse au lieu du Temple (13). Presque tous les pays de lEurope occidentale et des USA dans lesquels les juifs connurent lmancipation civile, accueillirent ces ides sur le Messie impersonnel, avec labandon conscutif du dogme du Messie personnel et du retour Jrusalem. BREVE HISTOIRE DU MOUVEMENT SIONISTE Le Canal de Suez et la Grande-Bretagne. Le projet douvrir le canal de Suez suscita, vers la moiti du XIXme, un vif intrt en Europe, parce que la Mditerrane aurait regagn une notable importance. Cest surtout la France, lEmpire habsbourgeois et lItalie qui taient intresss au projet.

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LAngleterre au contraire aurait t lse. Celui qui assuma la charge conomique des travaux fut, en trs grande partie, le pacha dEgypte Sad, mais les finances gyptiennes furent bouleverses par lnorme quantit des dbours. En 1863 lui succda son neveu Ismal, qui vinrent en aide les banques juives Oppeneim et Rothschild, lesquelles, ayant bloqu tout accs au crdit, treignirent en fin de compte le souverain dans un embrassement mortel Le contrle conjoint anglo-franais est impos aux Egyptiens sur leurs finances; cest lantichambre de loccupation coloniale La banqueroute gyptienne et les difficults politiques quelle gnre concident avec le rveil de lintrt britannique pour le canal (14). La Grande-Bretagne commena ainsi changer de politique dans ses rapports avec lEmpire Ottoman, et aprs lavoir dfendu jalousement, du point de vue antirusse et antifranais, dcida de ne pas sopposer son dclin. En 1878 elle occupe Chypre et prit possession des douanes turques. La situation au fil des ans dgnre en violents dsordres et les anglais dcident dintervenir manu militari, cest pourquoi le 10 juillet 1882 les navires anglais ouvrirent le feu sur Alexandrie dEgypte. Avec la grande guerre (1914-1918) lAngleterre saisit loccasion pour assener le coup de grce lEmpire Ottoman, en prenant le contrle de la pninsule arabe et de la Syrie, sassurant ainsi la cl daccs de la Mditerrane vers la Msopotamie et le Golfe Persique. La Palestine aurait mis en scurit les communications avec lInde au moyen du Canal de Suez. Le 18 dcembre 1814 la Grande-Bretagne occupe lentier trajet du canal. Les Anglais, pour tre plus asRunion de militants du Btar en uniforme Lyck (Empire allemand) en 1935. Sur le mur, au fond, on aperoit un portrait de Zeev Jabotinsky

surs davoir vaincu dfinitivement lEmpire Ottoman, menrent une politique apte dtriorer les rapports entre les Turcs et les populations de lex-Empire Ottoman, excitrent la rvolte contre Constantinople les populations arabes auxquelles ils promirent, la guerre termine, la sparation de lEmpire et la pleine indpendance politique (15). Ils contactrent en outre le cheikh de la Mecque, Hussein, descendant de la fille de Mahomet Fatima et pour cette raison charg dun grand prestige spirituel dans le monde islamique. Comme contrepartie pour la rbellion aux Turcs, les Anglais garantirent Hussein leur appui lambitieux projet de donner vie un grand Etat Arabe (16). Ainsi se rompit la solidarit du front musulman. Aprs trois ans de lutte la partie contre les Turcs est vaincue par les Arabes. Les Anglais occupent Jrusalem et Hussein Damas. Le 11 novembre 1918 un communiqu anglo-franais rassure les Arabes en leur promettant aprs la longue oppression turque, linstallation de gouvernements et dadministrations arabes. Cependant les Arabes durent changer davis et constater que la Grande-Bretagne navait absolument pas en vue la libration des peuples Arabes par loppresseur turc, mais plutt dsirait imposer sa propre volont aux pays du Moyen-Orient. Cest surtout lAngleterre et la France qui tirrent avantage de la dissolution de lEmpire Ottoman; le trait de Svres (10 aot 1920) signe la fin dfinitive de lEmpire Ottoman, la ratification anglaise de Chypre et des pouvoirs sur le Canal de Suez. Les Turcs limins, le destin de lArabie passe aux mains anglo-franaises. Les Arabes ne voulurent pas renoncer lindpendance, mais le 24 juillet 1920 les Syriens sont crass par les Franais et Damas est occupe. La Palestine est prive de la libert et du droit mme la vie: non seulement lindpendance lui sera dnie, mais elle sortira des mains anglaises transforme en une entit ethnique et culturelle absolument mconnaissable (17). Pendant ce temps la naissance du Sionisme, loin de rsoudre lternelle question juive, la compliquera, en la transportant, dans une optique conflictuelle, dans les pays arabes, allumera une nouvelle haine entre Islam et Judasme, qui dabord, thologiquement, nexistait pas et qui saffirme par des motifs nationalistes et dindpendance territoriales. Le Judasme international mobilise

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ses propres coreligionnaires anglais pour obtenir lintervention dans la premire guerre mondiale des USA. La Grande-Bretagne concda aux chefs sionistes qui staient engags a faire entrer en guerre lAmrique, des privilges exceptionnels. Les accords prvoient pour le Sionisme, le don dun National Home, en Palestine, base de dpart du futur Etat hbreu (18). Le 2 novembre 1917 le ministre des Affaires Etrangres britannique Lord Balfour adressa au prsident de la fdration sioniste britannique Lord Rothschild une lettre qui affirme: Sa Majest voit avec bienveillance linstitution en Palestine dun National Home pour le peuple juif. Ce foyer juif est un mot polismantique, derrire lequel se cache le concept dETAT JUIF. Ce projet cotera cher surtout aux palestiniens, mme si limplantation juive ne dormira jamais sur ses deux oreilles dans ce qui se rvlera en Orient, comme cela lavait dj t en Occident, une aventure prive de certitude depuis le jour o les chefs du peuple dirent Sanguis eius super nos et super filios nostros, assumant une terrible responsabilit pour les fils dIsral tant quils ne se convertiront pas et ne rentreront pas dans lEglise de Dieu. La Palestine: un pays isol. Rompre lunit de la Grande Syrie et dgager delle la Palestine est le premier pas pour assurer le succs du projet sioniste cest une politique qui engendre chez les palestiniens une grande dsorientation. Ils se trouvent tout coup dans un pays occup militairement et coup lextrieur de toute liaison administrative et politique antrieure. La nouvelle entit territoriale qui avait toujours fait partie des organisations tatiques plus vastes et navait jamais manifest daspirations autonomistes, est cre, depuis le dbut, avec lobjectif de la dgradation ethnique. La population arabe dorigine est destine tre submerge et remplace (19). La raction arabe contre limmigration et loccupation juive (que les Anglais euxmmes autorisaient) offrira lEmpire britannique de vastes possibilits dingrence. Derrire lalibi du maintien de la paix, lAngleterre aurait pu cacher facilement sa volont de prsence militaire en Palestine sine die. Seul le processus de dcolonisation commenc la fin de la seconde guerre mondiale poussera les Anglais laisser la Palestine. Alors au colonialisme anglais succdera le colonialisme sioniste.

Le Livre Blanc. Le 17 mai 1939 lAngleterre annona sa volont dabandonner lide de la disparition de la Palestine et le Foreign Office avec un Livre Blanc, sengagera accorder aux Palestiniens lindpendance; la passation effective des pouvoirs, toutefois, nadviendrait que dix ans aprs. Les Arabes pensaient entrevoir la fin de leurs souffrances, mais la proposition anglaise est conditionne par lissue de la seconde guerre mondiale. En effet le Livre Blanc suit de quelques jours les garanties antigermaniques laisses par lAngleterre la Pologne, la Grce et la Roumanie, cest pourquoi il reprsente seulement une diversion ou un acte expdient pour saccaparer, dans un moment aussi difficile, la sympathie et la neutralit du monde arabe, dont la position est dune extrme importance stratgique. LAngleterre en substance avec le Livre Blanc a voulu seulement tergiverser et congeler la question palestinienne et renvoyer toute dcision la fin du conflit. Les Juifs de Palestine se voient accorder ainsi une trve providentielle de plusieurs annes, une prorogation lventuelle expulsion et peuvent continuer accueillir de nouveaux immigrs. En mai 1942 New York, lHtel Biltmore, se runit une confrence sioniste qui rclama la constitution de lEtat hbreu et prtexta lannulation de toute limite limmigration, et rclama enfin de confier la supervision sur limmigration la Jewish Agency. En Palestine pendant ce temps, lHaganah, lorganisation militaire officielle des sionistes qui de 1929 1939 stait arme avec la connivence de la puissance mandataire (la Grande-Bretagne), renfora ses units et se prpara la lutte contre les Anglais pour le cas o ceux-ci insistent mettre en pratique ce Livre Blanc de 1939 par lequel ils avaient promis aux Palestiniens lindpendance. LIrgun et la Bande Stern dchanrent une campagne terroriste qui se proposa de plier dfinitivement les Anglais au vouloir du Sionisme. La premire victime illustre de la Bande Stern est le ministre britannique pour le Moyen-Orient, Lord Moyne, qui fut assassin en novembre 1944 (20). Avec la fin de la seconde guerre mondiale nous assistons la concidence de facto des aspirations du Sionisme avec celles des deux superpuissances, (USA et URSS). Russes et Amricains ont compris quun Etat hbreu en Palestine est un lment valable dstabilisant dans une des

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zones gopolitiques les plus importantes du monde, qui leur permettra dintervenir dans les affaires intrieures de tous les pays du Moyen-Orient et dy amorcer un grave conflit entre lEurope et le monde arabe. La tche de loccupant britannique est dsormais accomplie, elle succdrent sionistes, USA et URSS. Le 29 novembre 1947 lAssemble Gnrale de lONU, par la rsolution 181, approuve le plan qui prvoit la partition de la Palestine en deux Etats: un Etat arabe et un Etat juif. La dcision est prise au sige et par des sujets tromps. LONU, qui ne possde aucun droit de souverainet sur la Palestine, ne peut sarroger la comptence den disposer; elle ne peut la diviser ( 21). Le 14 mai 1948 le Conseil National Juif proclama lEtat dIsral, en mettant le monde devant le fait accompli. La logique de Yalta vainquit donc aussi en Palestine. Amrique et Russie ont rserv au pays le mme traitement inique dj arriv lEurope (22). Alors que USA et URSS derrire lcran de la guerre froide collaborent en secret la partition de lEurope et du Moyen-Orient, la presse philojuive prsente Isral comme le bastion contre le communisme alors quen ralit ctait un tat laque et socialiste n avec le consentement sovitique - mais en taisant que le communisme tait hors la loi dans tous les pays arabes, et en crant le consensus de la pense modre et librale-conservatrice. Avec la guerre de 1967 toute la Palestine appartient Isral, y compris Jrusalem, qui daprs la rsolution 181 aurait d tre place sous administration internationale (23). Les Juifs ne respectent pas la dcision de lONU, dont les rsolutions imposrent le retrait de larme isralienne et qui restent cependant lettre morte. Le 10 novembre 1975 lONU, pour ne pas perdre la face, est contrainte dapprouver une rsolution qui assimile Sionisme et racisme, mais Isral ne sarrte pas, confiante dans lindcision de lONU, qui quelques temps de l supprime la rsolution. Mais la victoire du Sionisme manque son objectif principal, qui est celui de donner vie un Etat national pacifi et uni mme ethniquement, comme la aussi rvl le journaliste juif Paolo Guzzanti dans un rcent article sur La Stampa de Turin: Ces jeunes [de Tel-Aviv] aussi euro-amricains, aussi laques, nont pas du tout lair de cultiver le patriotisme nostalgique de leurs pres et de leurs aeux Cette ville est en train de

perdre la mmoire Tel-Aviv construit toujours plus dans ses murs comme une minuscule symbolique New York la ville entire pullule de lieux pour gays, pour lesbiennes, pour transsexuels Les passions dchanes de ladolescence de nombreux jeunes de Tel-Aviv pour Che Guevara de Hamas sont lgendaires Passions en gnral vcues par de jeunes Palestiniens avec un esprit prdateur sens unique: on a pas dchos des malheureux carts des jeunes Palestiniennes pour les jeunes soldats israliens et les mariages dans les deux sens suivent la mme loi: mari palestinien et femme isralienne, oui. Mari isralien et femme palestinienne, non. ()Un homme qui a combattu toute les guerres me dit: La paix nest pas la fin du cauchemar Les ennemis qui un temps taient incapables de combattre contre ceux dentre nous quils pouvaient battre en un instant AUJOURDHUI SONT BRAVES COMME ET MEME PLUS QUE NOS SOLDATS; ils savent pourquoi ils combattent, sont bien arms et entrans. Par nous le patriotisme cde le pas au sens de la faute. Les Arabes nous hassent, mais parlent parfaitement lhbreu. Nous ne parlons pas un mot darabe et voudrions tre aims par eux (24). LE SIONISME: NAISSANCE ET DVELOPPEMENT DU MOUVEMENT SIONISTE a) Le premier Congrs de Ble (aot 1897) Les origines du Sionisme actuel sont recherches dans louvrage du journaliste viennois Theodor Herzl qui, avec le parisien Max Nordan, organisa trois congrs Ble. Dans le premier fut dfini le programme du Sionisme, cest--dire crer au peuple juif un domicile garanti par le droit publique en Palestine. Les ractions furent trs fortes et vives, presque une leve en masse du rabbinat contre un pareil projet (25), au point que lon parle de DIVORCE ENTRE SYNAGOGUE ET SIONISME. La premire, satisfaite de lmancipation, ne veut plus tre autre chose quune religion. Le second, rveill par lexplosion mystrieuse de lantismitisme, proclame hautement: Nous sommes un peuple, et nous voulons reconstituer notre nationalit La premire na plus la foi intgrale de Mose et des prophtes. LE SIONISME NE CONSIDERE LES JUIFS QUE COMME UN PEUPLE, AU LIEU

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DE RECONNAITRE QUIL EST LE PEUPLE, LE PEUPLE DE DIEU (26). En effet cest uniquement dans un BUT POLITIQUE ET SANS SE RATTACHER AU PASSE RELIGIEUX DISRAEL que le Sionisme voudrait rentrer en possession de Jrusalem et y ressusciter la nationalit juive (27). Dautre part le rabbinat occidental, mme en ayant pour la plupart abandonn lesprance dun Messie personnel, refuse de sassocier au Sionisme et de sacheminer vers Jrusalem. Cest le cur du problme sioniste et le principe de sa solution la lumire de la foi chrtienne, comme nous le verrons ensuite. Le grand rabbin de France Zadoc-Fahn explique admirablement que Le Sionisme remonte la destruction du Temple de Jrusalem par Titus Mais il y a une norme diffrence entre le Sionisme actuel et celui dil y a dix-huit sicles. POUR LES FIDELES DES TEMPS ANTIQUES CETAIT LE MESSIE ENVOYE PAR DIEU QUI DEVAIT MIRACULEUSEMENT RECONSTRUIRE SION PERSONNE NAURAIT JAMAIS NI MEME LOINTAINEMENT PENSE A ARRIVER A CE BUT AU MOYEN DES VOIES NATURELLES. Cet esprit ne pouvait pas rsister linfluence de la Rvolution franaise Lide messianique se transforma Le Messie devint le symbole du progrs, de la fraternit humaine, enfin ralise par le triomphe des grandes vrits morales et religieuses que le Judasme a rpandues partout (28). Si le rabbinat occidental, dsormais bien intgr en Europe, refusait aussi le PSEUDO SIONISME LAIC de Herzl, il y avait encore une frange juive qui attendait un Messie fils de David, mais ne saurait accepter lide dun retour Jrusalem, tant que ce Messie naurait point paru (29). RETABLIR UN ETAT DISRAEL AVEC DES MOYENS HUMAINS - comme il est arriv - NETAIT PAS ACCEPTABLE POUR LES JUIFS TALMUDISTES. Les Archives Isralites crivaient ce propos: Si par Sionisme on entend ceux qui poursuivent actuellement avant le temps promis la reconstruction de la nationalit juive nous pouvons affirmer que les sionistes de cette espce sont rari nantes in gurgite vasto ( 30 ). Et encore: Reconstruire le Royaume de Juda? Nous juifs orthodoxes, fidles lide messianique, croyons la venue du Messie fondateur

dun empire universel. Mais quel rapport y-at-il entre cet idal religieux et le projet du docteur Herzl et de ses amis? (31). b) Le second Congrs de Ble (aot 1898) Durant le second Congrs apparut encore plus clairement le nud du problme et la contradiction immanente avec le Sionisme moderne, pour lequel le Judasme doit tre une nation et non une religion, alors que pour le rabbinat il tait une religion plutt quune nation. Cest pourquoi le rabbinat occidental mancip, bien que libral ne voulait pas avoir de rapports avec le Sionisme, puisque ce dernier tait seulement un nationalisme rationaliste laciste et naturaliste qui navait aucune racine dans son pass religieux: Nous ne nous imaginons pas facilement un tat hbreu lac, dont la Thora ne soit pas la carte ncessaire ne russit pas comprendre lexistence dune socit isralite qui nait pas la foi pour son fondement. Ce nationalisme purement rationaliste serait la ngation de lhistoire et des prophties bibliques! (32). En rsum, le second Congrs marque labandon de Jrusalem de la part des rabbins et labandon de la religion, et donc du pass dIsral, de la part du Sionisme. c) Le troisime Congrs de Ble (aot 1899) Lhostilit du rabbinat explosa pour la troisime fois et la majeure partie des Juifs dOccident se montra fermement oppose aux projets des sionistes. Cependant les Juifs orientaux, pas encore mancips civilement et donc non assimils, restent fidles, pour la majeure partie, lide du Messie personnel et du retour miraculeux Jrusalem (33). LA PERIODE DE RESIGNATION CONFIANTE SUBSISTE TOUJOURS DANS LE JUDAISME ORIENTAL Des milliers et des milliers de Juifs dAutriche, de Roumanie, de Pologne, de Russie, dAsie et dAfrique restent fidles au Talmudisme, cest--dire restent trangers linfluence du philosophisme, des ides modernes et nont pas connu la rvolution mancipatrice; cest pourquoi ils gardent une foi aveugle en un Messie belliqueux et conqurant qui les ramnera Jrusalem. Ils sont plus nombreux que les Juifs occidentaux. Sur sept huit millions de Juifs, qui existent, en effet, aujourdhui

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[1901] comme lpoque de Jsus-Christ, le plus grand nombre rside en dehors des Etats occidentaux de lEurope (34). Lappel adress aux tudiants juifs de luniversit de Prague par le Conseil lu du Corps des tudiants de la nation juive est significatif: Compagnons Isralites, les Juifs ne sont ni allemands, ni slaves, ils sont UN PEUPLE A PART. Les Juifs ont t et restent un peuple autonome par unit de race, dhistoire, de sentiments! Assez dhumiliations! Juif, ne sois pas un esclave! (35). LE SIONISME ET LE BNAI BRITH Si le but du prsent article est daffronter le discours sur le Sionisme la lumire des prophties de lAncien et du Nouveau Testament qui lui est inhrente, il faut cependant faire une rfrence constante au processus historique de la ralisation du Sionisme en Palestine de la fin du XIXme sicle nos jours, en renvoyant le lecteur pour les thmes plus spcifiques la bibliographie indique la fin. Emmanuel Ratier a prsent rcemment une tude trs intressante et riche de documents indits sur le Bna Brith (36), dans laquelle se trouve un chapitre entier consacr au Sionisme, dont la documentation servira maintenant pour analyser quelle influence la puissante loge des Fils de lAlliance aurait eue dans la naissance de lEtat dIsral. Depuis son origine le Bna Brith est dinspiration sioniste, ds lors que deux reprsentants du Bna Brith roumain participrent en 1898 au second congrs sioniste de Ble. Toutefois les loges amricaines, la diffrence des loges europennes, toutes philosionistes, campaient sur des positions beaucoup plus modres; mais lvolution vers une attitude favorable au Sionisme fut rapide et dj en 1917 le journal officiel du Bna Brith amricain affirmait que la dclaration de Balfour tait un vnement aussi important que ldit de Cyrus (37). Aussi les loges londoniennes exercrent-elles une influence capitale sur le dveloppement du Sionisme, comme en tmoigne aussi Paul Goodman dans lhistoire de la premire loge du Bna Brith dAngleterre: En Palestine le Bna Brith a eu un ROLE UNIQUE, avant que le Sionisme nen ft la base du Foyer national juif, ce fut la Loge Yerushalaim et dans dautres loges que, pour la premire fois, se rencontrrent sfarades

et ashknazes ( 38 ). Le district dAllemagne, initialement hostile au Sionisme se rapprocha aussi ensuite des positions londoniennes philosionistes. En 1897 dans une dclaration du 27 juin, le Comit gnral du Bna Brith allemand, se dclara totalement oppos au Sionisme, mais par la suite dans une seconde rsolution du Comit gnral du 22 mai 1921 se rallia des positions absolument favorables la cration dun Etat hbreu en Palestine. Le Bna Brith en Palestine Lhistoire du Bna Brith se confond avec celle de Eretz Israel (39). Depuis des centaines dannes le Judasme dOrient vivait dans un tat presque lthargique sous le rgime ottoman: ce qui fut le plus utile [ son renouveau] ce fut la pntration du Bna Brith dans les communauts, au moyen des loges, en particulier la loge Yerushalaim (40). En 1865, vingt-trois ans avant la naissance du Mouvement sioniste de Herzl, le Bna Brith organisa une grande campagne daide aux victimes juives du cholra en Palestine et depuis lors na jamais cess de financer des initiatives prives en Isral. Ds que les circonstances politiques le permirent, lordre simplanta au Moyen-Orient; deux loges furent cres en Egypte en 1887 et lanne suivante fut fonde la premire loge de Palestine, dont le premier secrtaire fut Elieser BenYehouda, le pre de lhbreu moderne, alors considr comme une langue morte, dans laquelle il traduisit la constitution et le rituel secret du Bna Brith. Les linguistes reconnaissent dailleurs aujourdhui que cest grce aux Loges du Bna Brith que lhbreu est aujourdhui la langue officielle dIsral (41). En avril 1925 lOrdre inaugura la premire Universit hbraque. La grande Loge de Palestine Le Bna Brith avait toujours craint que la cration dun district de Palestine alerte le rgime turc, cest pourquoi le sige du district dOrient avait t plac Constantinople. Le mandat anglais et la dclaration Balfour autorisrent la cration du XIVme district dont le premier grand Prsident fut David Yellin. En 1948 le Bna Brith comptait en Isral quarante-huit loges, en 1968 cent-trente-huit, alors quaujourdhui leur nombre dpasse les deux cent. Durant le rgime turc, entre 1873 et 1917, six loges maonniques avaient dj t fondes en Palestine... dont la premire, d-

nomme Loge du roi Salomon, Jrusalem en mai 1873; durant le mandat britannique (1921-1947) la Maonnerie connut un trs rapide dveloppement. La loge anglaise du Bna Brith et la Palestine Le premier prsident du Bna Brith Herbert Bentwich avait t lun des premiers partager les thses de Theodor Herzl sur le Sionisme et en 1897 avait organis un plerinage des Juifs en Palestine par lintermdiaire de lOrdre des anciens Maccabes, au nom duquel il y avait acquis un terrain, Gezer, donnant en outre la First Lodge une orientation typiquement sioniste. Au dbut de la premire guerre mondiale fut cr un Comit juif durgence, compos exclusivement de membres du Bna Brith, dans le but de faire pression sur les futurs ngociateurs de paix, pour obtenir dans laprsguerre un Foyer national juif en Palestine (42). Henry Monsky En Amrique lOrdre fut le principal lieu de rencontre et de fusion entre les Juifs dorigine allemande (bourgeois et rformistes) et les Juifs provenant de lEurope de lEst (plus pauvres, orthodoxes et philosocialistes), qui sopposaient lide de fusion des Juifs avec le peuple amricain. Laccs au pouvoir dHitler en 1933 relana lintrt pour le Foyer national juif en Palestine. Le vieil antisioniste est devenu - crit Alfred Cohen, prsident du Bna Brith amricain tout au plus un non-sioniste. Il regarde sans hostilit lopration Palestine Mais il fait toujours front au Sionisme politique qui ne parat pas pour le moment tre une cause pour laquelle on peut senflammer. Les brlantes discussions entre sionistes et oposants se sont refroidies (43). Henry Monsky, lu prsident du Bna Brith en 1938, profita de la seconde guerre mondiale pour relancer lEretz Israel et ds 1941 resta en contact troit avec les principaux dirigeants sionistes. Le Bna Brith en 1942 approuva le programme de Baltimore. Le 29 aot 1943 se tint une runion historique de lHbrasme amricain, voulue par Monsky, laquelle taient prsents soixantequatre organisations nationales juives, avec cinq cent quatre dlgus - dont au moins deux cents frres du Bna Brith - reprsentant un million et demi de Juifs. La runion fut cependant boycotte par deux des principales organisations juives antisionistes, le Comit juif amricain et le Comit du travail juif.

Truman et Staline prs du berceau du nouveau-n quest lEtat dIsral

Monsky fut corapporteur de la rsolution en faveur du programme de Baltimore, approuve presqu lunanimit (408 votes contre 3), et devint le prsident de la nouvelle structure juive unitaire, la Confrence juive amricaine, qui prit fin en 1949, mais qui fut remise sur pied en 1955 par un organisme plus modeste, la Confrence des prsidents des grandes organisations juives, suite la reconnaissance de lEtat dIsral. Samuel Happerin a crit: Mme en ayant jamais officiellement fait sienne lidologie sioniste les actions effectives du Bna Brith ont compens toutes les hsitations. Pour valuer laccroissement du pouvoir du Sionisme amricain il faut tenir compte de manire prminente de la direction, du nombre des membres et de lassistance financire du Bna Brith ( 44). Le Bna Brith navait en effet pas pris officiellement position en faveur du Sionisme jusquen 1947, voulant viter toute division au sein du Judasme amricain lintrieur duquel demeurait une minorit antisioniste. LE BNAI BRITH FAIT RECONNAITRE ISRAEL Cest le Bna Brith qui a provoqu la reconnaissance (de facto) de lEtat dIsral par le prsident amricain Harry Truman, qui tait hostile une reconnaissance rapide dIsral, et qui cause de son retardisme tait accus par les dirigeants sionistes

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dtre un tratre. Aucun des leaders sionistes ntait reu, en loccurrence, la Maison Blanche. Tous, sauf Frank Goldman, prsident du Bna Brith, qui ne russit toutefois pas convaincre le Prsident. Alors Goldman tlphona lavocat Granoff, conseiller de Jacobson, ami personnel du prsident Truman. Jacobson, un Bna Brith, bien que ntant pas sioniste, crivit cependant un tlgramme son ami Truman, lui demandant de recevoir Weizmann (prsident du Congrs Sioniste mondial). Le tlgramme resta sans rponse, alors Jacobson demanda un rendez-vous personnel la Maison Blanche. Truman lavisa quil aurait t heureux de le revoir, condition quil ne lui parlt pas de la Palestine. Jacobson promit et partit. Arriv la Maison Blanche, ainsi que lcrit Truman lui-mme dans ses Mmoires: De grandes larmes coulaient de ses yeux... alors il dit: Eddie, tu es un malheureux, tu mavais promis de ne pas parler de ce qui arrive au Moyen-Orient. Jacobson me rpondit: Monsieur le Prsident, je nai pas dit un seul mot, mais toutes les fois que je pense aux Juifs sans patrie (...) je me mets pleurer () Alors je lui dis: Eddie, a suffit. Et parlons dautre chose, mais de temps en temps une grosse larme coulait de ses yeux (...) Puis il sen alla (13). Eh bien, peu de temps aprs, Truman reut Weizmann en secret et changea radicalement dopinion, en dcidant de reconnatre immdiatement lEtat dIsral. Ainsi le 15 mai 1948 Truman demanda au reprsentant des Etats-Unis de reconnatre de facto le nouvel Etat. Et quand le Prsident signa les documents de reconnaissance officielle dIsral, le 13 janvier 1949, les seuls observateurs nappartenant pas au gouvernement des Etats-Unis taient trois dirigeants du Bna Brith: Eddie Jacobson, Maurice Bisyger et Frank Goldman. Cest en outre au Bna Brith que revient le changement de la politique amricaine concernant la question palestinienne: en effet si dans les annes cinquante elle avait t globalement favorable aux Arabes, elle changea rapidement suite aux continuelles pressions de lOrdre sur le gouvernement amricain pour obtenir dnormes secours conomiques et de guerre en faveur de lEtat dIsral. Avec la guerre des six jours on assiste enfin la sionisation dfinitive de facto et de jure du Bna Brith et de lA.D.L.: Cette

victoire miracle va permettre une identification desJuifs Isral, tout fait diffrente de celle qui existait dj lorigine du nouvel Etat. Cest ce moment que lA.D.L. et le Bna Brith font une vritable pierre de touche lassertion selon laquelle lantisionisme quivaut lantismitisme (45). LE LAICISME SIONISTE Lide sioniste de Theodor Herzl est absolument laque et sinspirant du principe de la sparation entre le pouvoir religieux et le pouvoir politique (46), comme en tmoignent ses paroles: Nous ne permettrons absolument pas que les vellits thoriques de certains de nos rabbins prennent pied: nous saurons bien les tenir ferms dans leurs temples Dans lEtat ils nont pas intervenir (47). De leur ct les groupes religieux attaquaient le mouvement [sioniste] en se basant sur la tradition qui runissait le retour des Juifs en Isral avec lavnement de lre messianique (48). Mais lide sioniste tait trs forte, au point de frler chez de nombreux fondateurs dIsral lindiffrence lgard du gnocide, comme le dnonce lhistorien isralien Tom Segev dans son livre Le septime million (49), et comme lcrit Barbara Spinelli sur La Stampa: Les sionistes qui vivaient en Palestine, mais aussi les Juifs amricains soccupaient en ce temps-l seulement de lEtat indpendant, et sauver les Juifs dEurope tait pour eux secondaire ( 50). De mme Fiamma Nirestein quelques jours avant avait rappel, sur le mme quotidien, que Ben Gourion avait fait couler un navire charg de jeunes militants de lIrgum, parce quils taient un obstacle la reconnaissance de lEtat dIsral. Vaine avait t aussi lesprance de Theodor Herzl dobtenir une reconnaissance de la part du Saint-Sige, nonobstant la rencontre avec Saint Pie X le 25 janvier 1904, prcde par celle avec le cardinal Merry Del Val le 22. Le Saint-Sige nentendait favoriser ni le mouvement sioniste ni limplantation juive Jrusalem Selon le Pontife la situation aurait pu changer seulement avec une conversion en masse des Juifs (51). LA CONQUETE DE LA TERRE SAINTE Ce plan - crit Lmann - semble devoir tre adopt par les promoteurs du

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Sionisme... Cest ainsi que linfiltration lente et dissimule prparerait coup sr les lments constitutifs du rtablissement de lEtat juif en Palestine, jusquau jour o un vnement heureux et soudain [la seconde guerre mondiale, n.d.r.], permettrait au Sionisme, soit par une tentative hardie, soit par une diplomatie habile, de mettre dfinitivement la main sur le sol convoit de toute la Jude (52). Avec la dissolution de lEmpire ottoman (durant la premire guerre mondiale) le monde catholique commena esprer que la Palestine retournerait aux mains chrtiennes: Les cloches de toute la ville de Rome sonnrent pour saluer lentre des troupes britanniques, le 9 dcembre 1917, Jrusalem et la libration de la ville de la domination musulmane ( 53 ). Et Pasquale Baldi, lun des chercheurs les plus connus de la question des Lieux Saints, crivait ceci: Aujourdhui par un prodigieux concours de circonstances, que nous considrons providentiel, lItalie, la France, lAngleterre, trois nations qui eurent une si grande part dans les guerres saintes, tiennent Jrusalem sous leur domination. Aujourdhui avec raison donc les catholiques du monde entier peuvent sattendre que sonne finalement lheure de la justice; que pour les Sanctuaires de la Palestine se renouvellent les splendeurs de lre constantinienne, les splendeurs du premier sicle des croisades! (54). Ce qui frappa le plus lattention de lopinion publique europenne relativement la question des Lieux Saints fut leur libration de la domination musulmane et ensuite les controverses des diffrentes confessions chrtiennes propos de leur possession. Le Saint-Sige agit diplomatiquement en vue de ces deux objectifs principaux, situer la Palestine dans la sphre de contrle des puissances catholiques, et remdier aux usurpations accomplies par les Grecs orthodoxes en 1757 (55). Quand les Etats de lEntente, dsormais sur le point de gagner le conflit, manifestrent une orientation favorable lINTERNATIONALISATION de la Terre Sainte, le monde catholique pensa que le premier objectif tait presque atteint. Lide de confier la Terre Sainte un gouvernement international ntait pas nouvelle, mais ce fut seulement au cours de la premire guerre mondiale que ces propositions prirent un caractre dactualit. Avec la chute du rgime tsariste cessa aussi toute possibilit dintervention russo-orthodoxe au Moyen-Orient.

Ce qui signifiait que linternationalisation de la Palestine aurait t exploite par des puissances bien plus attentives la parole du Pontife qu celles du patriarche de Constantinople ou de Moscou (56). Le Vatican cependant ne pensait pas que la solution de confier le gouvernement de la Terre Sainte un gouvernement international ft la meilleure; le cardinal Gasparri luimme fit le point que au Saint-Sige semblait plus correct de parler de caractre de nationalit entendant souligner que les Lieux Saints, bien quils soient soumis au gouvernement de plusieurs nations, auraient d tre soustraits au contrle de cet organisme politique et confis des institutions religieuses comme la Custodie de Terre Sainte. Dans ce contexte pourrait trouver lexplication des bruits - mais non confirms - relatifs a lventualit dun gouvernement pontifical en Palestine. Cependant la conscience de limpossibilit de traduire en pratique ce projet en avait empch une laboration concrte et avait conduit le Saint-Sige se rabattre sur lhypothse dun rgime international (57). Aprs la premire guerre mondiale les efforts du Saint-Sige staient dirigs dans le sens de raliser un projet de raffirmation du Catholicisme inspir par la proposition de procder une christianisation non seulement des individus, mais de la socit et des Etats accomplir par tous les moyens (58). La codification canonique de 1917, domine par limage de lEglise comme societas juridice perfecta, et la politique concordataire des annes vingt et trente, qui voulait restituer lEglise ces fonctions publiques qui lui avaient t soustraites lpoque librale, constiturent les manifestations saillantes de cette intention, laquelle tait soumise une ecclsiologie qui visait instaurer visiblement le rgne du Christ dans chaque sphre de la vie humaine, y compris la politique (59). Cependant les esprances du Saint-Sige furent de courte dure, puisquentre 1917 et 1918 le cadre politique subit des changements radicaux qui conduisirent mettre de ct le projet dinternationalisation. Il y eut donc la fameuse dclaration Balfour, qui engageait la Grande-Bretagne favoriser la cration dun Foyer national juif en Palestine. Elle introduisait un lment nouveau et proccupant pour le Saint-Sige, do prit corps la crainte que la Palestine, depuis peu enleve aux Musulmans, ft sur le point de tomber aux mains des Juifs (60).

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Le cardinal Gasparri, en dcembre 1917, avait dit au reprsentant diplomatique de Belgique que le danger qui nous pouvantait le plus est la constitution dun Etat juif en Palestine, ajoutant aussi: Nous ne verrions aucun mal si les Juifs entraient dans leur pays pour y fonder des colonies agricoles; mais leur concder le gouvernement des Lieux Saints est inadmissible pour les Chrtiens ( 61). Le Pape Benot XV luimme intervint publiquement et affirma quil dsapprouvait lventualit dun projet destin enlever au Christianisme la position quil y a toujours occupe jusquici, pour y substituer les Juifs (62). Le Pape craignait surtout que les Isralites arrivent se trouver en Palestine dans une position de prpondrance et de statut privilgi (63). Le Conseil suprme Alli runi Sanremo en avril 1920 mit dfinitivement fin lesprance dune internationalisation de la Palestine en confiant le contrle la Grande-Bretagne, justement ce pays, cest-dire, dont le Saint-Sige se mfiait particulirement, non seulement du fait du soutien promis la cause sioniste, mais aussi du fait de linfluence que lglise anglicane aurait pu exercer en Terre Sainte (64). LE SAINT-SIEGE ET LA THEOLOGIE DU SIONISME Le Saint-Sige voyait dans la dclaration Balfour pour la cration dun sige national juif en Palestine la confirmation de la crainte dj exprime par Benot XV, cest--dire que lon entendait concder aux Juifs une position de prpondrance et de statut privilgi en Palestine. Le cardinal Gasparri de son ct, ajoutait dans une lettre aux craintes purement religieuses exprimes par le Pontife, une nouvelle motivation, la dfense des populations indignes et des nationalits menaces par les aspirations sionistes (65). Ctait la mme objection avance dans ces mmes mois au gouvernement britannique par la dlgation arabe palestinienne (66). LOsservatore Romano soccupa abondamment des problmes de la Terre Sainte et du Sionisme, en ne sous-valuant pas lnorme importance et la porte eschatologique de la question sioniste. En Europe - crivait son correspondant de Jrusalem - on regarde trop facilement, avec une superficialit qui irrite, le nouveau phnomne smitique pales-

tinien avec un air sceptique de compassion. Mais la ralit est seulement celle-ci: les Juifs travaillent avec un srieux hroque de projets Lventualit dune barrire de la part des Arabes na aucune consistance. Leur opposition dusage narrtera pas mme dun pas lavance du Sionisme (67). De cette observation naissaient deux lignes interprtatives, lune privilgiait une lecture du point de vue religieux du Sionisme, jug un point de passage vers la conversion des Juifs au Christianisme (68); lautre, au contraire, insistait plutt sur les dangers qui rsultaient de la prsence chrtienne en Terre Sainte, par le renforcement du Sionisme. La Civilt Cattolica se signala pour avoir donn une vision thologique du problme sioniste, en dfinissant comme chimrique le projet poursuivi par le Sionisme: La ralisation INTEGRALE du Sionisme apparat matriellement et moralement impossible ( 69 ), outre quinjuste, parce que les Sionistes envahissent avec arrogance le pays, qui est la maison des Arabes, pour y implanter leur home, en expulsant les anciens et pacifiques habitants ( 70 ). Le Sionisme en outre, pour les Jsuites de la Civilt Cattolica, se montre incapable dapporter une rponse convaincante au problme juif: Le Sionisme nest pas ralisable, ou du moins ni rapidement, ni facilement, et en tout cas napparat comme une solution ni sre ni entire la question juive (71). Surtout il constituait un mouvement antichrtien et anticatholique (72). Le remde propos pour ramenerla paix en Palestine ne sera que le dpart des Juifs, ou au moins la cessation de leurs progrs et de leur immigration, en un mot, le total abandon de lide dun Etat juif en Palestine (73). En 1943 Mgr Tardini, Secrtaire pour les affaires extraordinaires du Saint-Sige, confirma cette vision thologique sur le Sionisme, en affirmant que Le SaintSige na jamais approuv le projet de faire de la Palestine un home juif (74). La condamnation de lantismitisme raciste et biologique exprime par Pie XI en 1928 nimpliquait en aucune manire ladoption dorientations plus favorables au Sionisme. Elle naissait en effet de la raction proccupe du Saint-Sige par linvasion en Europe de mouvements et doctrines inspirs par les principes dun racisme et dun nationalisme exacerb, mais ne supposait aucune

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rvision de la conception traditionnelle catholique qui dniait au peuple juif, aprs la venue du Christ, un quelconque rle dans lhistoire du salut, sinon celui de tmoigner, par ses souffrances, la vrit de la Rvlation chrtienne. Aprs la mort du Christ, Isral fut licenci du service de la Rvlation, dit en 1933 larchevque de Munich, le cardinal Faulhaber (75). En 1938 La Civilt Cattolica confirma dune manire plus dtaille sa position: Toute la valeur du Judasme tait dans sa seule raison dtre la prparation de lAvnement du Messie Une fois le Messie venu, en la personne de Jsus-Christ, cesse ncessairement et automatiquement la valeur du Judasme tout ensemble, et ce peuple lu et cette religion (76). Sans une profonde rvision de la thologie de lHbrasme il tait impossible que les efforts pour restituer au peuple juif une patrie en Terre Sainte ne fussent pas considrs comme un arrogant prtexte contraire au vouloir de Dieu (77) (78). Comme lavait crit LOsservatore Romano le Sacrifice du Christ, voulu par un peuple qui sen proclama responsable pour lui et pour ses fils, pour tous les sicles, devant le juge humain comme devant le juge divin, constituait face lhistoire et la civilisation mondiale un telle prescription de ce droit sur la terre promise de ne pas avoir besoin dinvoquer vingt sicles maintenant passs son service pour tre ratifi par un quelconque tribunal politique (79). Sur ces bases de nature thologique se fixaient ensuite des raisons prcises dordre politique, qui confirmaient laversion au mouvement sioniste du Saint-Sige, dont lobjectif prioritaire tait celui de maintenir aux mains chrtiennes le contrle de la Palestine tout entire et pour laquelle le mandat britannique apparaissait comme le moindre mal face la constitution de deux tats non chrtiens en Terre Sainte: de toute faon, si la fin du mandat avait rendu invitable le choix entre un Etat arabe et un Etat hbreu, de nombreux indices montrent que les prfrences du Saint-Sige seraient alles au premier (80). LE VATICAN ET LA QUESTION PALESTINIENNE Le Saint-Sige continua confirmer sa ferme opposition la constitution dun home juif en Terre Sainte. Dans une lettre au dl-

Vladimir Jabotinsky

gu apostolique Washington le Secrtaire dEtat du Vatican le 25 mai 1943 soutenait explicitement que les Catholiques du monde entier ne pourraient pas ne pas se voir blesss dans leur sentiment religieux au cas o la Palestine serait donne et confie, en prpondrance, aux Juifs (81). Mgr Tardini crivait aussi: Le Saint-Sige sest toujours oppos la domination juive sur la Palestine. Benot XV sest employ avec succs pour viter que la Palestine devienne un Etat juif. En effet du point de vue religieux (le plus important) la Palestine est une terre sacre, non seulement pour les Juifs, mais plus encore pour tous les Chrtiens et spcialement pour les Catholiques. La donner aux Juifs signifierait offenser tous les Chrtiens et violer leurs droits (82). Laversion la constitution dun home juif en Palestine ne signifiait cependant pas que le Saint-Sige ft favorable une domination arabe sur la Terre Sainte, mme si cette ventualit tait considre comme un moindre mal par rapport lhypothse dun Etat juif (83). Toute la politique vaticane concernant la Palestine tait inspire par la crainte que soit une domination arabe soit une domination juive se rvlent prjudiciables pour les intrts catholiques en Terre Sainte (84). Mais la rsolution approuve par lAssemble des Nations Unies le 29 novembre 1947 introduisit un fait nouveau dans le dcor du Moyen-Orient: la cration dun Etat juif indpendant, prvu pour octobre 1948. La perspective de la constitution dun Etat hbreu en Palestine eut un chos profond dans tout le monde chrtien. La proclamation de lindpendance dIsral fut accueillie au Vatican avec beaucoup de rserve. LOsservatore Romano affirma que Le Sionisme nest pas lIsral de la Bible

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[mais] celui de la dclaration de Balfour, de lEtat moderne, de lEtat philosophiquement et politiquement lac (85). LES RAPPORTS ENTRE SIONISME ET NATIONAL-SOCIALISME En 1922 Vladimir Jabotinsky se retira de lexcutif de lOrganisation sioniste et fonda en 1924 le Parti Rvisionniste. Le Nouveau bloc combattait la politique de lExcutif sioniste trop disponible au compromis avec les Anglais et avec les Arabes et dans le domaine social manifestait une certaine sympathie pour le corporatisme thoris en Italie par le fascisme (86). A ce propos Blondet est plus explicite et riche dinformations: Vladimir Z. Jabotinsky (1880-1940) dfendit un Etat arm et raciste et voulait quIsral se constitut comme Etat autoritaire et corporatiste. Il finit par adhrer au fascisme et sympathisa ouvertement avec le Troisime Reich (87). Jabotinsky semble avoir subi linfluence dAhad Haam, grand admirateur - comme Herzl - de Nietzsche, qui il emprunta lide du surhomme, lassociant lide de NATION SUPERIEURE (88). Il connut ensuite un ex-officier tsariste, mutil, un certain Joseph Trumpeldor et imagina avec lui lorganisation dune lgion juive lintrieur de nimporte quelle arme allie. Prcisment Trumpeldor a donn son nom la principale organisation de jeunesse sioniste rvisionniste, le BTAR ou BRITH TRUMPELDOR (Alliance de Trumpeldor). Btar est aussi le nom de la forteresse do Bar Kochba conduisit la rvolte contre les lgions de Rome au deuxime sicle. Durant le douzime Congrs sioniste de septembre 1921 Karlovy Vary, Jabotinsky, sans informer les dirigeants sionistes, signa un accord avec Maxime Slavinsky, reprsentant du leader du gouvernement ukrainien en exil, Simon Petlioura (accus aujourdhui dantismitisme). Cet accord avec un rgime qui favorisait les pogroms, fut justifi par Jabotinsky avec laffirmation que si lArme Rouge lui avait fait la mme proposition, il laurait galement accepte (89). Lalliance avec lUkraine contraignit Jabotinsky se dmettre de lExcutif sioniste et de lOrganisation sioniste. En 1923 il publia une srie darticles dans laquelle il visait entreprendre une sorte de REVISION du

Sionisme, en affirmant quil sagissait dun retour aux thses dorigine de Herzl. Il soutint ainsi des positions dun NATIONALISME ENFLAMME, dont lunique fin tait de transfrer des millions de Juifs en Isral faisant de cette manire de la Palestine un Etat hbreu de fait. Les Arabes, pour Jabotinsky navaient aucun droit sur la Palestine. Ils devaient en tre expulss. Aujourdhui encore, pour ses continuateurs... il ny a pas de territoires occups en Isral (90) (91). Jabotinsky est convaincu que ltat a la primaut sur lindividu, cest pourquoi il nest absolument pas ncessaire de se rfrer lthique biblique mais il faut puiser ses propres forces aux thories du NATIONALISME INTEGRAL; ce qui le fera passer, aux yeux de nombreux dirigeants juifs, pour un fasciste juif (92). Jabotinsky est absolument oppos la diaspora et POUR EMPECHER LASSIMILATION des Juifs, IL SERA MEME PRET A ACCUEILLIR favorablement LES IDEES ANTISEMITES, qui auraient pouss les Juifs retourner dans leur terre et retrouver lidentit quils avaient perdue. Pour Jabotinsky toute assimilation aux goyim est non seulement nfaste, mais impossible La source du sentiment national se trouve dans le SANG de lhomme dans son TYPE PHYSICO-RACIAL Il est inconcevable quun Juif puisse sadapter la vision spirituelle dun Allemand ou dun Franais (93). En outre il limine lide dun Dieu transcendant et la remplace par celle de nation, minant la base le fondement mme du Judasme orthodoxe. A tout cela il unit une haine viscrale pour le socialo-communisme, alors quil voit, en consquence, la force principale du Sionisme dans le supercapitalisme. a) Le Btar (94) En 1923 Jabotinsky fonda le bras arm du Rvisionnisme sioniste le Btar Brith Trumpeldor, dont les membres portent la chemise brune, et seront dnoncs comme fascistes par leurs adversaires (95). De 1934 1937 une cole navale du Btar fonctionnera en Italie, Civitavecchia, avec 153 cadets diplms. Pour Marius Schattner toute la philosophie du Btar tient dans ce mouvement: de la fosse la lumire, du ghetto au pays dIsral. Elle entretient le mythe dune race spirituelle juive Sautant par-dessus dix-neuf sicles de diaspora, le Btar annonce le retour du type hbreu antique (96). Le Btar est une organisation rigide, avec un rituel strict et s-

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vre: tout btarim doit semployer consacrer les deux premires annes de son tablissement en Palestine lactivit militante temps complet dans le Btar, lequel se fonde substantiellement sur le mythe de la force, sur la puissance du crmonial, sur une structure paramilitaire. Dans les annes 1931-32 Jabotinsky vcut Paris, o il semble avoir t initi la Loge Etoile du Nord du Grand Orient de France (97). En 1935 il fonda Vienne, durant un congrs, la Nouvelle Organisation Sioniste (N.O.S.), qui inaugurait une politique trs discute avec tous les gouvernements (mme antismites) A CONDITION QUILS AIENT LINTENTION DE REGLER LA QUESTION JUIVE DANS LE SENS SIONISTE, cest--dire en consentant lmigration juive en Palestine. Cela nempchera pas dailleurs Jabotinsky de se prononcer, dans les annes de guerre, en faveur de la cration dune arme juive destine combattre lAllemagne hitlrienne. b) Menahem Begin Jusqu la victoire de Begin en 1977 la tte du Likud, formation politique hritire du Btar de Jabotinsky, la majeure partie des historiens du Sionisme avaient relgu le Rvisionnisme dans le ghetto spirituel des fanatiques ou carrment des lunatiques exalts. Mais en 1977 le fasciste Begin accda au pouvoir en Isral et, ds son premier discours, se rfra explicitement aux ides de Jabotinsky, mme sil avait fait partie de laile la plus radicale du Rvisionnisme, la plus proche du fascisme et associe au Britj Ha Biryonim (le groupe des bruts), dbordant droite Jabotinsky lui-mme! Aprs la seconde guerre mondiale Begin comme leader du parti Hrout (Libert) fera travailler au quotidien du parti son ami Abba Ahimert, idologue extrmiste rvisionniste, qui avait crit: Oui, NOUS LES REVISIONNISTES NOUS AVONS UNE GRANDE ADMIRATION POUR HITLER. Hitler a sauv lAllemagne ET SIL ABANDONNE SON ANTISEMITISME, NOUS POURRONS FAIRE UN BOUT DE CHEMIN AVEC LUI (98). Quand Begin se rendit pour la premire fois aux USA en 1948, certains intellectuels juifs, parmi lesquels Einstein, Hannah Arendt et Sydney Hook, crivirent une lettre ouverte au New York Times (4 dcembre 1948) dans laquelle ils affirmaient que le

parti de Begin tait un parti politique trs proche, quant son organisation, ses mthodes, sa philosophie politique et sa doctrine sociale, des partis nazi et fasciste. Begin ne reniera en rien ses vieilles ides extrmistes: aprs lui deviendra premier ministre dIsral son ami (et terroriste) Yitzhak Shamir, pour qui Eretz Israel appartient au seul peuple dIsral et lui seul (99). c) Rvisionnisme et nazisme Au printemps 1936 un couple de juifs, les Tuchler, envoys par la Fdration Sioniste dAllemagne, et un couple de nazis, les von Mildenstein, envoys par le N.S.D.A.P. et par la S.S., se retrouvrent la gare de Berlin do ils prirent le train pour Trieste et sembarqurent sur la Martha Washington pour la Palestine. Le but du voyage tait de faire une enqute la plus complte et la plus documente possible sur les POSSIBILITES DIMPLANTATION DES JUIFS ALLEMANDS EN PALESTINE. Malgr ses dclarations de principe et diverses mesures spcifiques (boycott des Juifs allemands partir du 1er avril 1933), tous les historiens saccordent pour admettre quHitler neut aucune politique densemble prcise sur la question juive jusqu la Nuit de cristal du 910 novembre 1938. Cela laissa le champ libre au Bureau des Affaires juives de la S.S., pour explorer les politiques diverses envisageables. Le voyage du baron von Mildenstein en fut une. A ce moment, Mildenstein tait officier suprieur de la S.S. il stait intress depuis longtemps la question juive Fervent sioniste, il passait au sein de la S.S. pour lun des rares spcialistes du Judasme. Cest lui qui vit en premier lintrt quon pouvait tirer des organisations sionistes, en particulier rvisionnistes Il devait crire une srie de douze longs articles trs documents dans le quotidien berlinois Der Angriff de Goebbels, sous le titre Un nazi voyage en Palestine. Il y exprimait son admiration pour le Sionisme et concluait que le foyer national juif en Palestine indique un moyen de gurir une blessure vieille de plusieurs sicles: la question juive. Une mdaille fut frappe, la demande de Goebbels pour commmorer cette visite. Elle tait orne dune face de la svastika et de lautre de ltoile de David La S.S. tait devenue la composante la plus sioniste du parti nazi (100). Suite ce voyage le journal de la S.S. Das schwarze Korps proclama offi-

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ciellement son appui au Sionisme (101). Le 26 novembre le mme quotidien renouvelait son appui au Sionisme: La reconnaissance de la communaut juive comme COMMUNAUT RACIALE FONDEE SUR LE SANG et non pas sur la religion conduit le gouvernement allemand garantir sans rserve lintgrit raciale de cette communaut (102). Encore, en mai 1935 Heyndrich dans un article distinguait les Juifs en deux catgories dmontrant une forte prdilection pour ceux qui professaient une conception strictement raciale et Alfred Rosemberg crivait que le Sionisme devait tre vigoureusement soutenu (103). Avec lavnement au pouvoir de Hitler le Btar fut la seule organisation continuer parader en uniforme dans les rues de Berlin. Le 13 avril 1935 la police de Bavire (fief de Himmler et de Heyndrich) admettait exceptionnellement que les adhrents au Btar puissent endosser leur uniforme. Ceux-ci essayaient ainsi de pousser les Juifs dAllemagne CESSER DE SIDENTIFIER COMME ALLEMANDS et les sduire par leur nouvelle identit nationale isralienne ( 104 ). La Gestapo fit tout son possible pour favoriser lmigration vers la Palestine; en septembre 1939 elle autorisa encore une dlgation de sionistes allemands participer au 21 Congrs sioniste de Genve. Jabotinsky au contraire stait prononc pour le boycott de lAllemagne, alors que Kareski, membre du mouvement rvisionniste, poursuivait une politique de collaboration avec lAllemagne en vue de pouvoir constituer le Heretz Israel. En 1942 restait encore en activit en Allemagne un Kibbutz Nevendorf pour exercer de potentiels migrants vers la Palestine. Le Mossad disposa dun rseau dune quarantaine de camps et de centres agricoles, o les futurs colons se prparrent en vue de leur dpart en Palestine (105). d) Un pacte secret entre la bande Stern et le troisime Reich Les dirigeants juifs du gang Stern - incroyable mais vrai - firent aux nazis une proposition dalliance en 1941 pour lutter contre les Anglais: la chose qui frappe le plus est que lun deux tait Yitzhak Shamir, futur premier ministre dIsral. Le faible quipage militaire de lItalie, tant en Libye quen Grce, convainquit Stern que lItalie navait pas les moyens pour conduire terme sa politique, alors que lAllemagne en 1940, remportait

victoire sur victoire. Ces succs impressionnrent Stern, qui se lana dans une aventure folle et sans issue: former une alliance avec lAllemagne hitlrienne. Stern travaille jusquen fvrier 1941 (quand il fut tu par les Anglais) concrtiser cet objectif, se fondant sur une analyse insolite de la situation du Judasme. Pour lui lAngleterre est le vrai ennemi, tandis que lAllemagne est seulement un OPPRESSEUR qui appartient la ligne des PERSECUTEURS que le peuple juif a rencontr durant son histoire. Ceci est lerreur le plus grande de Stern: il voit dans le Nazisme un mouvement anim par un antismitisme raisonnable ( 106). Au dbut de 1941 Lubentchik, agent secret de la bande Stern, proposa un pacte militaire entre lOrganisation militaire sioniste Irgun (un scission de la mme bande) et lAllemagne, proposition connue sous le nom de texte dAnkara (107), transmis Berlin le 11 janvier 1941 et retrouv il y a quelques temps dans les archives de lambassade allemande en Turquie. On y lit: Les principaux hommes dEtat de lAllemagne nationale-socialiste ont souvent insist sur le fait quun ordre nouveau en Europe requiert comme condition pralable une solution radicale de la question juive, au moyen par lvacuation. Lvacuation des masses juives dEurope est la premire tape de la solution de la question juive. Toutefois, le seul moyen datteindre cet objectif est dinstaller ces masses dans la patrie du peuple juif, la Palestine, et par ltablissement dun Etat juif dans ses frontires historiques (108). LEtat-major allemand, cependant, dcida de sappuyer dans la lutte sur la Grande-Bretagne, sur les Arabes qui taient des millions, plutt que sur les Juifs, qui ntaient quune poigne dhommes (109). La vridicit de ce document a t mise en doute, mais Isral Eldadsnab, lun des chefs historiques du groupe Stern, a confirm la vrit des faits (110) et lhebdomadaire Hotam affirma que ce document avait t remis personnellement par Shamir et Stern. Quand le 10 octobre Shamir devint premier ministre de lEtat dIsral aprs le ministre Begin, lAssociation Isralienne des combattants antifascistes et des victimes du Nazisme manifesta son indignation par un tlgramme au prsident Herzog de voir le poste de premier ministre occup par lun de ceux qui essayrent darriver une alliance avec des reprsentants officiels de lAllemagne nazie (111). Si la bande Stern fut lunique groupe sioniste r-

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visionniste ngocier avec le Troisime Reich en pleine guerre, les organisations sionistes modres navaient pas hsit le faire avant la guerre, en grand secret. Les cercles nationalistes juifs sont trs satisfaits de la politique de lAllemagne, puisque la population juive en Palestine sera par cette ligne politique tellement accrue que dans un futur trs proche les Juifs pourront compter sur une supriorit numrique face aux Arabes (112). LES RAPPORTS ENTRE SIONISME ET FASCISME a) Lcole navale du Btar dans lItalie fasciste Dj dans les annes prcdant la premire guerre mondiale Jabotinsky avait dvelopp une thorie sur les FONDEMENTS RACIAUX DES NATIONS (Race et nationalit), dont les postulats concidrent avec la Doctrine de lEtat de Mussolini ( 113 ). Dpourvu danimosit lgard des Juifs, Benito Mussolini considrait les organisations sionistes rvisionnistes comme dauthentiques mouvements fascistes. Cest ainsi quil fit entraner partir de novembre 1934, suite la demande de Jabotinsky, un escadron complet du Btar la Scuola Maritima de Civitavecchia, dirige par des chemises noires. Lors de linauguration du quartier gnral des escadrons italiens du Btar, en mars 1936, un triple chant ordonn par lofficier commandant lescadron rsonna; Viva lItalia, Viva il Re, Viva il Duce! suivi de la bndiction que le rabbin Aldo Lattes invoqua, en italien et en hbreu, pour Dieu, le Roi et pour le Duce Giovinezza (lhymne du parti fasciste) fut entonn par les btarim avec beaucoup denthousiasme. Mussolini devait en outre recevoir officiellement les promotions de btarim en 1936 ( 114). Mussolini fut aussi le premier Chef dEtat proposer la division de la Palestine et la cration dun Etat juif (115). Jabotinsky toutefois, au contraire de ses lieutenants, ne se proclama jamais fasciste ou nazi, mme sil prit la dfense de Mussolini dans une srie darticles crits aux USA en 1935 (116), alors quil tait considr comme tel par de nombreux chefs israliens, au point que Ben Gourion lappelait Vladimir Hitler. En 1935 Mussolini confia David Prato, futur grand rabbin de Rome que le Sionisme pour russir a besoin dun tat juif, dun drapeau juif et dune langue juive. Un qui la vraiment compris cest votre fasciste Jabotinsky (117).

Les dirigeants sionistes non rvisionnistes de 1922 avaient pris contact avec Mussolini; il reut les premiers sionistes peu de temps aprs sa marche sur Rome, le 20 dcembre 1922, en assurant le grand rabbin de Rome quil ne tolrerait aucune manuvre antismite (118). Hahimeir, principal leader du mouvement rvisionniste palestinien dans les annes trente, raffirma en mars 1962: Ce ntait ni Kerensky ni Weimar qui pouvaient combattre le bolchevisme, mais le fascisme italien au dbut de sa route (119). b) Mussolini et le Sionisme Il faut cependant prciser avec De Felice que les avances des sionistes-rvisionnistes cessrent immdiatement ds quil fut clair que Mussolini avait dcid de prendre galement en matire dantismitisme la route de ladaptation absolue lalli nazi (120). Par ailleurs Aprs les sanctions votes par la Socit des Nations contre lItalie, Mussolini coupa les rapports quil avait entretenus jusqualors avec les dirigeants sionistes et se rapprocha des Arabes, dans la tentative de faire sauter les positions britanniques et franaises au Moyen-Orient (121). Pour mieux comprendre lattitude de Mussolini envers le Sionisme il est bon de lire lintressante Storia degli ebrei italiani sotto il fascismo de De Felice, dans laquelle on voit comment la position de Mussolini a t fluctuante, selon quil sagissait du Sionisme en Palestine ou de la participation de citoyens italiens au mouvement sioniste (122). Envers le SIONISME ITALIEN Mussolini nourrissait tous les prjugs et les mfiances rpandues entre nationalistes et fascistes La conviction que les sionistes auraient eu deux patries qui ntaient mme pas sur le mme plan entre elles, que donc la dominante aurait t la palestinienne, heurtait profondment son concept monolithique et exclusif de la patrie et lui rendait automatiquement antipathiques et suspects les sionistes Envers le SIONISME INTERNATIONAL Mussolini nourrissait au contraire, sinon de la sympathie du moins une certaine bienveillance il voyait dans le Sionisme (en particulier dans ses groupes de droite plus enflamms et anti-anglais) un prcieux moyen pour intgrer lItalie dans les vnements mditerrano-orientaux et surtout un moyen pour crer des difficults dans ce secteur lAngleterre La carte Sionisme, partir dun certain moment puis celle des

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Arabes tait pour Mussolini surtout un lment de son jeu mditerranen... Que les sionistes, de leur ct, ne refusrent pas le rapport avec lItalie fasciste est vident. Avant que Mussolini tombe sous linfluence de Hitler, lItalie tait lun des pays europens les plus libraux envers les Juifs (123). ANTISEMITISME PAIEN ET SIONISME Hannah Arendt, philosophe juif allemand (1906-1975) a crit des considrations dun grand intrt sur la nature du Sionisme: En ce qui concerne lorganisation sioniste qui dcida de traiter avec Hitler elle rencontra peu dopposition dans la patrie nationale juive (124). Et encore: Ce consentement laccord nazi-sioniste nest que lun des exemples parmi les nombreux prouvant la faiblesse politique de laristocratie des Juifs en Palestine (125). Arendt critique la dfinition mme du Sionisme donne par Herzl, selon lequel une nation est un groupe de personnes tenues ensemble par un ennemi commun et affirme que la conclusion laquelle arrivrent ces sionistes fut que SANS LANTISEMITISME LE PEUPLE JUIF NAURAIT PAS SURVECU raison pour laquelle ILS SOPPOSERENT A UNE QUELCONQUE TENTATIVE DE LIQUIDER LANTISEMITISME A UNE LARGE ECHELLE. Au contraire, ils dclarrent que NOS ENNEMIS, LES ANTISEMITES, AURAIENT ETE NOS AMIS LES PLUS SURS ET LES PAYS ANTISEMITES NOS ALLIES Lantismitisme tait une force irrsistible et les Juifs AURAIENT DU LUTILISER ou en auraient t dvors (Lantismitisme) tait la force motrice responsable de toutes les souffrances des Juifs, et aurait continu causer de la souffrance TANT QUE LES JUIFS NE SE SERAIENT PAS PREPARES A LUTILISER A LEUR AVANTAGE. ENTRE DES MAINS EXPERTES CETTE FORCE MOTRICE SE SERAIT DEMONTREE LE FACTEUR LE PLUS SALUTAIRE DE LA VIE JUIVE Tout ce quil fallait faire tait dutiliser la FORCE MOTRICE de lantismitisme qui comme londe du futur aurait port les Juifs dans la terre promise (126). LES RAPPORTS ENTRE SIONISME USA ET URSS La priode de la guerre [1939-1945]

transforma la communaut juive de Palestine en un organisme plus fort, conscient, tendu vers laffirmation concrte de ses idaux Les annes de guerre avaient rendu lopinion publique amricaine extrmement sensible au drame de lHbrasme europen et avaient transform notablement la communaut juive qui stait faite plus homogne, influente et ouverte au Sionisme. En quelques annes lintrt pour ce mouvement dun sentiment purement philanthropique se transforma en une forme de participation concrte (127). Paul Johnson a affirm rcemment que Lholocauste et la nouvelle Sion sont organiquement associs La fondation dIsral fut comme la consquence des souffrances des Juifs (128). Aprs la guerre le jeu dcisif tait aux mains des grandes superpuissances (USA et URSS). LAmrique prsentait lEtat dIsral comme rempart du monde occidental au Moyen-Orient. La politique myope des libraux-conservateurs voyait (et continue voir) comme UNIQUE danger le danger communiste (qui est certainement norme et ne doit pas tre sous-valu mme aujourdhui), mais ne russissait pas voir la porte apocalyptique et thologique de la fondation de lEtat dIsral, et peut-tre ignorait que: Dans limmdiat aprs-guerre Staline se prsenta plusieurs fois comme le dfenseur des peuples frapps par la domination nazie, en se montrant enclin considrer les instances des Juifs qui avec six millions de victimes revendiquaient leurs droits. Le reprsentant sovitique aux Nations Unies, Andre Gromyko, soutint que lon neEscadron du Btar en uniforme dans les rues de Civitavecchia, dans les annes 30

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pouvait pas dnier au peuple juif le droit davoir un Etat Il approuva donc le plan UNSCOP la surprise gnrale (129). Selon Johnson si complot il y eut pour fonder Isral, CE FUT LUNION SOVIETIQUE A EN ETRE MEMBRE INFLUENT. Durant la guerre, pour des raisons tactiques, Staline avait suspendu sa politique antismite, en crant mme un Comit juif antifasciste. Ds 1944, pour une courte priode, il avait adopt une attitude philosioniste en politique trangreen mai 1947, Andre Gromyko surprit tout le monde en annonant que son gouvernement tait favorable la cration dun Etat juif (130). Ceux qui au contraire comprirent trs bien la porte de la fondation de lEtat dIsral furent justement les Juifs: Dans cette circonstance [la rsolution de 1948, n.d.r.] les Juifs de Rome, qui traditionnellement staient imposs de ne plus passer sous lArc de Titus, tmoin de leur asservissement, lors dune crmonie solennelle rompirent cette dfense symbolique, en traversant lArc de Titus dans le sens oppos celui du triomphe de lempereur romain ( 131 ). Jusqu la moiti des annes cinquante puis - la presse occidentale de gauche prsenta Isral comme la ralisation concrte des principes socialistes et dmocratiques en opposition la reculade du monde arabe (132). Cependant avec 1949 les rapports entre URSS et Isral commencent se gter. Andrew et Leslie Cockburn, dans un livre rcent et bien document, jettent une lumire nouvelle sur les rapports entre USA, URSS et Sionisme: Aprs plusieurs dcennies et une guerre froide, Andre Gromyko, levant une main aurait dclar: Avec cette main jai cr lEtat dIsral Lloquence de Gromyko se manifesta sur lordre de Joseph Staline, qui, en ce qui concerne la fondation de lEtat dIsral, ne stait certainement pas fait influencer par des sentiments Les Russes avaient de trs bonnes raisons pour soutenir tant la rsistance arme juive contre la domination britannique en Palestine, que la cration de lEtat sioniste, du moment que lEtat arabe tait alors rsolument dans la sphre dinfluence de lOccident. () Le soutien diplomatique ne fut pas lunique forme dencouragement que Staline donna la lutte dIsral pour se construire et survivre comme Etat (133). LEtat dIsral en outre, reut des aides de guerre du rgime com-

muniste qui prit le pouvoir en Tchcoslovaquie en fvrier 1948, gouvernement sous lil attentif et vigilant de Staline. Dans les mois qui prcdrent la dclaration dindpendance dIsral (mai 1948), les services secrets militaires des Etats Unis dcouvrirent lexistence dun pont arien rgulier pour le transport des armes entre Prague et le Moyen-Orient (134). () A lautomne de 1948 pas moins de cinquante mille militaires israliens furent entrans dans les diffrentes bases tchcoslovaques et quand ils partirent pour Isral, leur unit prit le nom de Klement Gottwald, le dirigeant communiste tchque (135). Isral rendit en outre service la Tchcoslovaquie, en lui fournissant de prcieuses informations sur les plus modernes armes amricaines, vritables joyaux dun secteur de technologie de guerre hautement avance, dans laquelle les Sovitiques taient encore trs arrirs. En 1948, la faveur dau moins deux occasions, les Israliens confirent aux Tchcoslovaques des exemplaires darmes modernes amricaines Quand et comment les Israliens eurent obtenu ces produits de la technologie occidentale, puis confis aux Sovitiques, on a jamais pu le savoir, mais videmment pour lEtat hbreu il sagissait dune opration quil valait la peine daccomplir (136). Cependant le rapport privilgi avec lEst sovitique ne devait pas tre exclusif puisquil ntait pas seul suffisant fournir au Sionisme le troisime lment essentiel dont avait besoin Isral: largent Lunique endroit o trouver ces moyens financiers taient justement les Etats Unis dAmrique, la tte desquels se trouvait le prsident Truman qui initialement ne se montra pas enthousiaste soutenir la cration dun tat juif en Palestine (137). Ce fut seulement au cours de son second mandat que Truman reconnut formellement lEtat hbreu: Pousser le prsident amricain dans le camp philo-isralien avait t une initiative importante, mais cela ne comporta pas pour Isral la rupture de ses liens avec les pays de lEst et son passage dans le bloc occidental [en tant que] Isral voulait tant les capitaux amricains que les deux millions de Juifs de lUnion sovitique, mais il ne semblait pas possible de les obtenir ensemble en mme temps. Et dautre part largent servait tout de suite. La communaut juive amricaine avait contribu de sa poche, et avec des sommes considrables,

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des oprations comme lacquisition darmes tchcoslovaques (138). Si lUnion Sovitique se contentait de la neutralit dIsral, au cours de la guerre froide les Etats Unis ntaient pas du tout satisfaits de cette position. Cependant les Israliens de crainte de saliner compltement les Sovitiques, tentrent de maintenir quand mme un profil bas et une certaine neutralit Isral se trouvait dans une impasse: dune part il nosait pas sengager trop ouvertement avec les Amricains par crainte de couper tous les liens avec lEst dautre part, il se trouvait face au problme de comment continuer traire la vache amricaine sans tre dispos ni capable de donner quoi que ce soit en change (139). En ralit il y avait quelque chose quIsral pouvait donner la vache amricaine, mais cela devait rester secret (140). Sil tait trs difficile pour les USA et la C.I.A. de contacter directement les habitants de lEst et den avoir de prcieuses informations, il ne restait rien dautre qu trouver un endroit o il y eut beaucoup de gens qui eussent vcu rcemment dans un territoire contrl par les Sovitiques. Puis tant mieux si ce pays (Isral) avait aussi une exprience consolide du travail clandestin dans cette partie du monde et une organisation de services secrets hautement efficace et impatiente de collaborer avec les USA (141). Cette thse trouve confirmation galement dans le livre de Ostrovsky, qui soutient que le Mossad dpend totalement des Juifs qui vivent hors dIsral, ceux quon appelle les Sayanim, et ne pourrait pas fonctionner sans eux (142). LE SIONISME ET LANCIEN TESTAMENT Mais quel est le plan de Dieu? Jrusalem est-elle destine par le Seigneur redevenir la capitale dun Etat hbreu? La faon dont sest ralise la formation de lEtat dIsral correspond-elle ce que doit tre le royaume de Juda daprs les prophties? Ceci est la cl de la question sioniste: est-ce une chimre ou est-ce une ralit? Ltude thologique du plan de Dieu donnera une rponse. La rponse se trouve dans les prophties bibliques, mais qui doivent tre bien interprtes, au sens spirituel (et non temporel); en effet elles ne prdisent pas le rtablissement du royaume temporel dIsral, mais annoncent la fondation de lEglise romaine, royaume sur-

tout et principalement spirituel et cleste. Dj aux temps de la venue du Christ les docteurs, les scribes et les pharisiens, en interprtant la lettre les prophties, se faisaient une ide tout fait terrestre et matrielle du royaume du Messie, et cest pour cela quils condamnrent mort Jsus, qui prchait un royaume principalement spirituel (lEglise sur terre et le Ciel dans laudel) pour tous les hommes. Les sionistes dalors ne furent pas contents et liminrent le vrai Messie. Et cest encore avec cette fausse interprtation des prophties messianiques que les Juifs, depuis la destruction de Jrusalem (70) et jusqu nos jours, continurent esprer dans la reconstitution du royaume dIsral. La cause de ces fausses interprtations est, pour la thologie catholique, la mconnaissance du double objet de ces prophties: lun temporel, concernant la restauration de Jrusalem et de lEtat hbreu aprs la captivit de Babylone (586 avant J.-C.) et non aprs la mort du Messie et la destruction de Titus (70); lautre spirituel et concernant la fondation de lEglise, lIsral spirituel qui doit conduire les hommes de tous les peuples au Ciel (la Jrusalem cleste). Linsigne thologien et exgte Mgr Lmann crit ce propos: Cest aprs avoir mconnu le double objet des prophties messianiques, lun temporel, relatif lancienne Jrusalem terrestre, et lautre spirituel, relatif la Jrusalem des mes, uvre du Messie, que le peuple juif sest tromp et se trompe encore. () Malheureusement le peuple juif sest attach et sattache encore aux IMAGES qui revtent la VERITE des prophties Et cest une seconde et nouvelle rdification de Jrusalem et du Royaume de Juda que beaucoup parmi eux persistent vouloir. CHIMERE! Le double objet des prophties stant avr, il y a vingt-cinq sicles, grce la rdification matrielle de Jrusalem aprs lexil babylonien, sous Esdras et Nhmie; lautre, il y a dix-neuf sicles, grce la fondation de lEglise: Jrusalem spirituelle Chercher reconstruire une Jrusalem terrestre est la mme chose que vouloir difier lombre de la ralit. Or depuis dix-neuf sicles et pour toujours la ralit, qui est lEglise, a dissip lombre. Umbram fugat veritas! (143). Dj St Alphonse Marie de Liguori avait dcouvert ces erreurs: Deux furent les erreurs des Juifs au sujet du Rdempteur quils atten-

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daient: la premire fut que quant ce que prdirent les prophtes des biens spirituels et ternels, avec lesquelles le Messie devait enrichir son peuple, ils voulurent lentendre des biens terrestres et temporels: Et erit fides in temporibus tuis, divitiae salutis, sapientia et scientia, timor Domini, ipse est thesaurus eius (Is. XXXIII, 6). Voil les biens promis par le Rdempteur, la foi, la science des vertus, la sainte crainte: telles furent les richesses salutaires promises. En outre Il promit quIl aurait apport le remde aux pnitents, le pardon aux pcheurs et la libert aux captifs du dmon: Ad annuntiandum mansuetis misit me, ut mederer contritis corde et praedicarem captivis indulgentiam et