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Spondylarthropathies de l’enfant : présentations cliniques et diagnostics différentiels

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Page 1: Spondylarthropathies de l’enfant : présentations cliniques et diagnostics différentiels

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Table ronde

© 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.Archives de Pédiatrie 2013;20:216-217

Spondylarthropathie de l’enfant : aspects cliniques et prise en charge

Correspondant. e- mail : [email protected]

Les spondylarthropathies (SpA) juvéniles représentent 30 % des rhumatismes inflammatoires de l’enfant de moins de 16 ans et regroupent des maladies qui partagent certaines de leurs

manifestations cliniques ainsi qu’une prédisposition génétique.Les manifestations cliniques des SpA combinent de façon variable, un syndrome pelvirachidien ou axial (atteinte rachidienne et sacro- iliite), un syndrome enthésopathique, un syndrome articu-laire périphérique, un syndrome extra- articulaire oculaire, cutané ou digestif. La présence de l’antigène HLA B27 est fréquente et sa recherche est utile au diagnostic ainsi que des antécédents familiaux de SpA, uvéite, psoriasis, ou entéropathie inflammatoire.Selon les critères de classification des SpA de l’adulte définis par l’European Spondyloarthropathy Study Group (ESSG)  [1] et les critères d’Amor et al. [2], et validés dans les formes à début juvé-nile, on distingue la spondylarthrite ankylosante, le rhumatisme psoriasique, les arthrites réactionnelles, les arthrites associées aux entérocolopathies inflammatoires, et les SpA indifférenciées. Les enfants présentant une SpA sont ici le plus souvent classés comme SpA indifférenciée.Selon la classification de l’International League of Associations for Rheumatology (ILAR) [3] définissant les formes cliniques d’arth-rite juvénile idiopathique (AJI), la plupart des enfants ayant une SpA est classée comme « Arthrites et Enthésites » ou dans les formes indifférenciées d’arthrites en cas de psoriasis chez le patient ou dans sa famille.La forme « Arthrite et Enthésite » est définie par l’association d’une arthrite et enthésite, ou arthrite ou enthésite et au moins 2  des critères suivants : présence ou antécédent d’une sensibilité des sacroiliaques ou douleurs inflammatoires lombo-sacrées, présence de l’antigène HLA B27, début de l’arthrite chez un garçon de plus de 6 ans, un épisode d’uvéite antérieure aiguë symptomatique, un antécédent familial de spondylarthrite ankylosante, d’enthésite et arthrite, de sacro- iliite avec une enté-ropathie inflammatoire, une arthrite réactionnelle, une uvéite antérieure aiguë chez un parent du premier degré. Critères d’exclusion : psoriasis chez le patient ou un parent du premier degré, présence de facteurs rhumatoïdes de type IgM à au moins 2 prélèvements espacés de 3 mois, une forme systémique d’AJI.

La forme indifférenciée d’AJI est définie par une arthrite remplis-sant les critères d’aucune ou d’au moins 2 formes cliniques d’AJI.La maladie prédomine chez le garçon de 10-12 ans. Elle débute le plus souvent par une oligoarthrite asymétrique des membres inférieurs (genou, cheville, médio- pied, hanche), plus rarement une épaule. L’atteinte articulaire d’un doigt ou orteil dans son ensemble donne l’aspect caractéristique de dactylite «  en saucisse » très évocatrice. Elle correspond le plus souvent à une enthésite distale associée à une arthrite tripolaire.L’enthésite caractérise les SpA. Toutes les enthèses peuvent être atteintes. Les douleurs inflammatoires siègent préférentielle-ment aux membres inférieurs comportant des talalgies posté-rieures achilléennes ou plantaires à l’insertion de l’aponévrose, des gonalgies à l’insertion du tendon rotulien sur la rotule ou sur l’apophyse tibiale antérieure. La pression directe est douloureuse et la palpation peut retrouver une tuméfaction.L’atteinte axiale rachidienne inaugurale est moins fréquente que chez l’adulte. Elle s’exprime par des douleurs dorsolombaires de rythme inflammatoire avec réveils nocturnes et raideur matinale, inconstamment améliorées à l’effort et cédant parfois au repos. La raideur à l’enroulement du rachis est mesurable par l’indice de Schöber. Les atteintes sternoclaviculaires, sternocostales, ou manubriosternale donnent des douleurs thoraciques antérieures participant au syndrome axial.La sacro- iliite comporte des fessalgies inflammatoires uni ou bilatérales, ou encore à bascule, irradiant parfois en dessous du pli des fesses. Elle est cliniquement recherchée par la pression directe des sacro- iliaques et par la manœuvre de cisaillement.Le syndrome extra- articulaire peut précéder ou succéder aux manifestations rhumatismales. Il est recherché à l’interrogatoire et dans les antécédents du patient. Son évolution n’est générale-ment pas corrélée à l’atteinte rhumatismale.Une uvéite antérieure aiguë peut survenir dans 20  % des cas environ, uni ou bilatérale, à œil rouge douloureux, parfois pauci- symptomatique ; une atteinte oculaire postérieure peut aggra-ver le pronostic visuel avec malvoyance définitive. Une prise en charge immédiate avec surveillance régulière est nécessaire.Des signes digestifs à type de diarrhées d’allure banale ou parfois glairo- sanglantes, avec ou sans amaigrissement, et syndrome inflammatoire biologique persistant inexpliqué par l’atteinte rhumatismale, doivent faire rechercher une entéropathie spé-

Spondylarthropathies de l’enfant : présentations cliniques et diagnostics différentielsI. LemelleService de médecine infantile, CHU de Nancy, allée du Morvan, 54511 Vandœuvre- lès- Nancy cedex, France

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Spondylarthropathies de l’enfant : présentations cliniques et diagnostics différentiels

à l’effort et concerne le grand ou petit trochanter, les épines iliaques, la tubérosité tibiale, ou le calcanéum. La douleur est de caractère plus mécanique. Le repos sportif entraîne la guérison complète. Une maladie de Scheuermann est évoquée quand il s’agit du rachis.Toute pathologie de hanche peut s’exprimer par des gonalgies. Une limitation douloureuse de hanche chez l’enfant de moins de 10  ans questionne sur une ostéochondrite primitive et chez le grand enfant, une épiphysiolyse, parfois de survenue chronique en quelques mois et bilatérale, même en l’absence de surcharge pondérale, diagnostiquée sur la radiographie de profil, et dont la prise en charge est urgente. Une ostéochondrite d’un autre site est généralement visible sur la radiographie.Enfin une monoarthrite peut être une forme oligoarticulaire d’AJI avec recherche d’une uvéite asymptomatique tous les 3  mois, une dystrophie synoviale (chondromatose synoviale, synovite villo- nodulaire), une angiomatose, ou être réactionnelle (Lyme). L’interrogatoire et le bilan sanguin peuvent orienter vers une hémoglobinopathie ou une hémophilie. Exceptionnellement il peut s’agir d’un corps étranger intra- articulaire.Il est important de savoir reconnaître une SpA, dès les signes cliniques d’appel, aidé par l’imagerie et la biologie, pour proposer la prise en charge thérapeutique la plus adaptée et limiter le retentissement physique et l’absentéisme scolaire.

Rérérences[1] Dougados M, van der Linden S, Juhlin B, et al. The European

Spondyloarthropathy Study Group preliminary criteria for the classification of spondyloarthropathy. Arthritis Rheum 1991;34:1218-27.

[2] Amor B, Dougados M, Mijiyawa M. Critères de classification des spondylarthropathies. Rev Rhum Mal Osteoartic 1990;57:85-9.

[3] Petty RE, Southwood TR, Manners P, et al. International League of Associations for Rheumatology classification of juvenile idio-pathic arthritis: second revision, Edmonton, 2001. J Rheumatol 2004;31:390-2.

cifique (maladie de Crohn, rectocolite hémorragique) ou non. L’utilisation des anti- inflammatoires non stéroïdiens doit alors être prudente.Le psoriasis cutané, du cuir chevelu ou unguéal peut survenir très décalé par rapport au rhumatisme. L’atteinte des articula-tions interphalangiennes distales est fréquente. Une pustulose palmo- plantaire aseptique peut être associée aux SpA.Les arthrites réactionnelles aseptiques font suite à des infections d’origine digestive (yersinia, salmonelle, shigelle) ou pulmonaire (mycoplasme pneumoniae), plus rarement d’origine sexuelle en raison de l’âge.Les atteintes cardiaques (valvulopathies, troubles de la conduc-tion) et rénales associées à la SpA sont rares et tardives. L’évolu-tion des SpA juvéniles est variable allant d’une maladie bénigne brève à une maladie plus agressive, évolutive et handicapante en l’absence de traitement adapté. L’atteinte de hanche peut être destructrice.

Diagnostics différentiels  : devant tout processus douloureux périphérique ou axial, la fièvre, une altération de l’état général, des douleurs croissantes font rechercher vers une origine septique (arthrite, ostéomyélite, spondylodiscite…) ou tumorale (hémo-pathie, sarcome…). L’examen clinique est complet avec recherche d’adénopathies et hépato- splénomégalie, de signes neurologiques, un trouble de la statique rachidienne douloureux, une tuméfaction segmentaire douloureuse, isolée, articulaire, osseuse ou tendineuse. Le bilan biologique, radiographique, scintigraphique, scanner et IRM approchent le diagnostic étiologique  ; une ponction- biopsie est réalisée en milieu spécialisé pour établir un diagnostic formel et le traitement. Un ostéome ostéoïde para- articulaire peut simuler une arthrite et sera localisé par la scintigraphie ou le scanner.Une pathologie traumatique ou micro- traumatique répétée est à rechercher ainsi qu’une fracture de fatigue. Au niveau du rachis il peut exister une lyse isthmique, un spondylolisthésis, rarement une hernie discale.Devant un aspect d’enthésite, chez un enfant sportif, une dys-trophie ou apophysite de croissance est évoquée. Elle apparaît