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DRÔLES DE HÉROS Pour la rentrée, toutes les chaînes annoncent l’arrivée de dessins animés inédits. Page 2 LES LIAISONS DANGEREUSES Catherine Deneuve et Rupert Everett dans une nouvelle adaptation du roman de Choderlos de Laclos. Sur TF1. Page 9 VINGT ANS, LE BEL ÂGE Une série documentaire vivifiante sur les jeunes d’aujourd’hui. Sur France 2. Page 24 Jean Minondo, l’oreille de l’image Ingénieur du son, il a travaillé avec Catherine Breillat, André S. Labarthe et José Pinheiro. Son rôle consiste à donner une intelligibilité, une cohérence, un espace, une profondeur aux voix et aux ambiances. Septième volet de notre série d’été sur les métiers de la télévision. Pages 4 et 5 RADIO TELEVISION 25 31 2003

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DRÔLES DE HÉROSPour la rentrée,

toutes les chaînesannoncentl’arrivéede dessins

animés inédits.Page 2

LES LIAISONS DANGEREUSESCatherine Deneuve et Rupert Everett

dans une nouvelleadaptationdu romande Choderlosde Laclos.Sur TF1. Page 9

VINGT ANS, LE BEL ÂGEUne sériedocumentairevivifiantesur les jeunesd’aujourd’hui.Sur France 2.Page 24

Jean Minondo, l’oreille de l’imageIngénieur du son, il a travaillé avec Catherine Breillat, André S. Labarthe et José Pinheiro.Son rôle consiste à donner une intelligibilité, une cohérence, un espace, une profondeur aux voixet aux ambiances. Septième volet de notre série d’été sur les métiers de la télévision. Pages 4 et 5

RADIO

TELEVISION 25 31 2003

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A la différence des autrespays européens, il n’existepas de diplôme d’ingénieurdu son en France, etles cursus sont très divers.Beaucoup deviennentingénieur du son(autrement appelé chefopérateur son),après quelques annéesd’expérience en tantqu’assistant du son.Parmi les diplômes quipermettent d’accéderau métier, figurent celuide la Fémis (Ecole nationalesupérieure des métiers del’image et du son), à Paris(tél. : 01-53-41-20-00), etcelui de l’Ecole nationalesupérieure Louis-Lumière,à Noisy-le-Grand (tél. :01-48-15-40-10). Il existed’autres formations, d’unaccès plus difficile, commecelles proposées par l’ENST(Ecole nationale supérieurede télécommunications),et par le Conservatoirenational supérieurde musique, toutesdeux délivrées à Paris.

Formation

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Trois films dont JeanMinondo a réalisé le son.De gauche à droiteet de haut en bas :Martin Lamotteet Dominique Lavanantdans « Sœur Thérèse.com »(TF1, 2003).Catherine Frot et DidierBourdon dans « 7 ans.de mariage », long métragede Didier Bourdon (2003).« Alain Robbe-Grillet »,de Frédéric Compain(« Un siècle d’écrivains »,France 3, 1999).

D erniers jours de juillet.Vanves, Colombes, 20e ar-rondissement de Paris.Joyce Buñuel achève letournage du quatrième té-léfilm de Sœur Thé-

rèse.com. Jusqu’à présent, TF1 n’a diffuséqu’un seul volet (réalisé en 2002 par Chris-tian Faure et plébiscité par les téléspecta-teurs) de cette comédie, dont l’idée origi-nale revient à Michel Blanc. En héros ré-currents, Juliette (Dominique Lavanant),enquêtrice entrée dans les ordres, et sonex-mari Gérard Bonnaventure (Martin La-motte), également policier, qui se retrou-vent après plusieurs années pour résou-dre des affaires criminelles.

Dans l’ancienne usine de Colombes oùles décors du commissariat ont été aména-gés, les prises se succèdent à un rythmesoutenu, scandé par une formule immua-ble : « Silence, s’il vous plaît, moteur de-mandé. Moteur ! Ça tourne. Ça tourne auson ? » Pas de son sans silence. Et à défautde silence, ni écoute, ni entendement pos-sibles. A l’écart de l’énorme machineriedédiée à l’image, Jean Minondo, ingé-nieur du son, est rivé à sa console dansune activité presque sans répit. L’aven-ture menée avec Joyce Buñuel est une af-faire de complicité, comme la plupart decelles que ce tout juste quinquagénaire aengagées depuis plus de vingt ans danstous les registres.

Une centaine de titres, parmi lesquelson trouve plusieurs longs métrages de Mi-chel Deville, Bruno Nuytten ou encore Ca-therine Breillat ; des téléfilms, comme lasérie des « Fabio Montale » et des« Franck Riva » incarnées par Alain De-lon, ou encore des documents musicaux,telle la collection « Piano du XXe siècle ».Dans ce parcours, il y a des compagnonna-ges d’exception, comme celui de ChantalAkerman, qui lui donnera son premier tra-vail en solo, en 1983, sur Un jour, Pina m’ademandé…, autour d’une tournée de PinaBausch. Celui d’André S. Labarthe, ren-contré l’année suivante, avec lequel ils’est immédiatement senti en parfaitecoïncidence et a réalisé plus de vingt-cinqfilms, sur la danse, la littérature, le ci-néma. Ou encore celui de Frédéric Com-pain, « brillantissime ».

Sur le projet de « Sœur Thérèse.com »,« il y avait une double cohérence, raconteMinondo. Je connais Joyce depuis long-temps. Elle m’avait proposé son long mé-trage et a eu un grave accident de voiturealors qu’on s’apprêtait à le tourner. Si j’ai

accepté, c’est aussi pour elle. Par ailleurs lasérie est une comédie amusante, un divertis-sement populaire honnête. Et c’est bien,dans ce flux de télé-réalité et de “trash tv”dont les écrans sont inondés ».

A suivre l’évolution d’une journée de

tournage, on comprend vite le paradoxedu rôle-clé dévolu à l’ingénieur du son, àlui seul « capteur universel avec sa petitesubjectivité ». Il est celui qui choisit l’en-droit juste où « poser ses oreilles », quidoit « aller chercher le monde ailleurs »pour compléter une ambiance sonore. Ala fois d’une omniprésence constante etle plus effacé possible. D’une totale auto-nomie et dépendant de chacun. Dans l’an-ticipation du moment à venir en mêmetemps que dans la mémoire immédiatede celui passé. « C’est un monde de négo-

ciation, où on partage l’espace, relève JeanMinondo. Une microsociété qui fonctionneen une multitude de corps de métiers, etc’est dans ce cadre-là qu’il faut faire existerle son, le mettre en mouvement dans un ré-seau complexifié de beaucoup d’éléments.Il faut être à l’écoute, dans la compréhen-sion psychologique des uns et des autres, etdans la perception du moment auquel onopère. Tous ces éléments sont très fluc-tuants, et l’on doit tout saisir pour obtenirun résultat optimal. »

Sous le casque et les mains au clavierde sa console roulante, Jean Minondo esten quelque sorte le démiurge d’un orches-tre de voix et de sons, auquel il donneune intelligibilité, une cohérence, un es-pace une profondeur. Son savoir profes-sionnel, le matériel technique qu’il utilise– perches, micros HF glissés sous les vête-ments des principaux acteurs, micros

LES MÉTIERS MÉCONNUS DE LA TÉLÉVISION

« Le son, c’est le lieud’expression de la vie »INGÉNIEUR DU SON. Mathématicien et musicien, formé à l’école Louis-Lumièreet diplômé de l’Idhec, Jean Minondo privilégie l’intuition et le hasard pour faire parler les images

4/LE MONDE TÉLÉVISION/SAMEDI 23 AOÛT 2003

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> 1953Naissanceà Mont-de-Marsan(Landes)> 1978Diplômede l’Idhec etBTS du sonde l’InstitutLouis-Lumière> 1980Création, enassociation,de Tapages,sociétéde matérieldu son> 1983Un jour,Pina m’ademandé,de ChantalAkerman> 1984CarolynCarlson solo,d’AndréS. Labarthe> 20037 ans demariage,de DidierBourdon

Nous avons déjà publié :> Michel Millecamps,décorateur, le 12 juillet.> Jean-Pierre Descombes,chauffeur de salle,le 19 juillet.> Jacques Santamaria,scénariste, le 26 juillet.> Michel Hermant,réalisateur, le 2 août.> Michelle Podroznik,productrice, le 9 août.> Lise Beaulieu, monteuse,le 16 août.

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LES MÉTIERS DE LA TÉLÉVISION

« Je demanderarementà un acteurde parler plusfort, mais justede donnerdu grain,de travaillersur le médium,de jouer unepetite partition »

Parcours

cachés, tous reliés à une console pourvuede potentiomètres, fiche du Sound Reportsur laquelle le son de chaque prise est noti-fié, assorti d’une appréciation de qualitéqui aidera au travail de montage – gardentleur mystère. Cette dimension d’étrangetélaisse à l’opérateur du son une grande li-berté de manœuvre. « Sur les tournages, laplupart des gens ignorent ce qu’est le son. Ilssavent qu’il faut le respecter, mais non com-ment le gérer. Certains réalisateurs comp-tent énormément dessus, parce que c’est lelieu d’expression de la vie, de la vibration.C’est là où l’émotion passe, là où les acteurssentent s’ils sont bons ou pas. Mais du pointde vue de la production, on a rarement uneidée de l’importance du son direct. Finale-ment, c’est avec le téléfilm, cette espèce deproduit calibré, que le son direct a reprisde la valeur, simplement pour des raisonséconomiques. C’est quand même moinscher d’avoir le son final au sortir du pla-teau. Pour un long métrage, on peut fairedes choses plus raffinées, avec des planssonores élaborés, un vrai traitement del’acoustique des lieux. Alors que le téléfilmest essentiellement basé sur la parole. Sion entend, si on comprend, ça va. Peu im-porte que l’on réalise de jolis sons addition-nels, des ambiances de qualité. Cela dit, jeprends à chaque fois beaucoup de plaisirà définir mon espace. Il y a toujours quel-que chose à faire exister, un défi à relever,même si on travaille parfois dans desconditions calamiteuses. »

Le primat est donné à l’image et à ses in-terprètes, mais le temps est aussi un fac-teur déterminant. A la télévision, il fautfaire de plus en plus vite, avec de moins enmoins de moyens. Il arrive que l’opérateuren chef ne puisse s’adjoindre le précieux

concours d’un assistant, celui qui tient et di-rige la perche sur le tournage d’une scèneet indique en off les particularités ou les dif-ficultés d’une situation. En l’occurrence,Jean Minondo opère dans une entente aucordeau avec un véritable alter ego, Lau-rent Bluwal. Ils se connaissent depuis 1995,ont réalisé une douzaine de projets et tra-vaillent systématiquement ensemble de-puis deux ans. « Il porte l’outil noble du son,commente Minondo. C’est lui qui est, à labonne place, le capteur le plus précis. Il faitle son avec ses yeux, il anticipe les réactionsphysiques de l’acteur, le moment où il va par-ler. Son approche sensitive et psychologiqueest d’une grande acuité. Ce qu’il me donneest primordial. »

Cette complicité s’exerce aussi parfois

dans un rapport direct avec les acteurs,« une complicité par l’oreille, dans l’intimitéde leur voix. Avec délicatesse, et bien sûr sansempiéter sur le travail du metteur en scène,on peut obtenir des nuances délicieuses. Je de-mande rarement à un acteur de parler plusfort, mais juste de donner du grain, de tra-vailler sur le médium, de jouer une petite par-tition du texte. Et ça les intéresse. Je suis un pe-tit peu chef d’orchestre, sur une phrase, unmot… Dans ce travail, on rejoint la musica-lité. C’est elle qui fait sens, qui constitue l’émo-tion, donne du plaisir et enrichit la matière. »

La musique est une ligne de force dans leparcours de Jean Minondo (son nommême la porte en évidence – une onde en-serrée par deux notes). Il en écouteconstamment, de tous les styles – du chantgrégorien aux rythmes du Metal adoptéspar son fils adolescent ; beaucoup de vo-cal, de jazz et de classique –, mais l’a aussi

pratiquée. « J’aurais voulu faire du piano,mais mes parents m’avaient collé un accor-déon sur les genoux. C’était l’époque desgrandes audaces musicales des groupes an-glais, Kim Crimson, Yes… Maintenant en-core, le piano me manque. Je pense quej’aurais été un bon mélodiste, un bon arran-geur. Finalement, j’exerce cette oreille musi-cale dans mon travail. Si je n’ai pas persé-véré, c’est aussi que pendant mes études àBordeaux [une licence de mathématiquesappliquées à la physique qu’il a obtenuavant d’intégrer l’école Louis-Lumière, en1975], j’avais un ami avec lequel nous discu-tions beaucoup de cinéma et de littérature. Ilm’a recommandé d’aller voir Le Jeu avec lefeu, d’Alain Robbe-Grillet. Là, j’ai découvertle travail du compositeur Michel Fano.J’étais absolument fasciné par la façon dontla narration envoyait la chronologie cul par-dessus tête. Du point de vue du son, tout deve-nait musical ; toutes les circonstances et les si-tuations de la fiction devenaient un tremplinpour la musique. Je retrouvais cet aspect ludi-que que j’avais aimé dans les maths et le la-tin. Ça a été un véritable choc. »

Près de trente ans plus tard, Jean Mi-nondo arbore la modestie d’un perpétuel ap-prenti, d’une curiosité humaine et profes-sionnelle insatiable. Il s’avoue piètre bricolo,préfère à la théorie un savoir construit surl’intuition, la porosité, les jeux d’associa-tions. Mais si la plupart sont incapablesd’analyser la subtilité de son talent, ils en res-sentent les effets. « Sa géographie sonore ex-cède celle de l’image, relève André S. Labar-the. Il est ailleurs, comme pourvu d’antennes ;aux frontières de l’univers dans lequel nousbaignons. Comme un astronome qui verraitdes étoiles que l’on ne perçoit pas à l’œil nu. »

Valérie Cadet

LE MONDE TÉLÉVISION/SAMEDI 23 AOÛT 2003/5