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Article original Traitement arthroscopique de l’épicondylite latérale : étude prospective à propos de 14 cas Arthroscopic treatment of lateral epicondylitis: A prospective study on 14 cases A. Sauvage * , G. Nedellec, C. Brulard, G. Gaumet, P. Mesnil, C. Fontaine, G. Wavreille Service de chirurgie du membre supérieur, clinique d’orthopédie, hôpital Roger-Salengro, CHRU de Lille, rue Émile-Laine, 59037 Lille cedex, France Reçu le 29 août 2012 ; reçu sous la forme révisée le 4 février 2013 ; accepté le 11 février 2013 Disponible sur Internet le 6 mars 2013 Résumé L’épicondylite latérale du coude est une pathologie fréquente qui toucherait 1 à 3 % de la population générale. L’absence de consensus sur les techniques chirurgicales traduit la difficulté de comprendre et de traiter cette pathologie. Notre étude prospective rapporte les résultats de son traitement arthroscopique à propos de 14 patients opérés entre 2009 et 2012. Le recul moyen était de 7,15 mois. Tous les patients avaient bénéficié d’un traitement médical bien conduit pendant 32,5 mois en moyenne. L’intervention se déroulait sous anesthésie locorégionale et en ambulatoire. La technique comprenait un temps d’exploration articulaire, puis une capsulotomie et une section transversale de la lame tendineuse pathologique du court extenseur radial du carpe (CERC) et de l’extenseur commun des doigts (ECD). La valeur sur l’échelle visuelle analogique (EVA) passait de 2,85 à 0,43 au repos, et de 7,71 à 2,43 à l’effort, puis restait stable dans le temps. La reprise de l’activité professionnelle survenait en moyenne à 9,1 semaines. Aucune complication per- et postopératoire n’a été relevée. Aucune laxité n’a été observée. Les scores de la Mayo Clinique et le DASH score étaient nettement améliorés, passant respectivement de 52,14 à 92,5 et de 54,11 à 9,7, soit 11 très bons résultats et trois bons. Notre série prospective, présentant peu de patients et un recul limité, donne des résultats similaires à, voire meilleurs que ceux de la littérature sur la douleur et la récupération fonctionnelle. En revanche, le délai moyen de reprise d’activité professionnelle était plus long. L’arthroscopie de coude, moins invasive que les techniques à ciel ouvert et permettant un complément d’exploration articulaire, semble donc une excellente technique alternative de première intention dans cette indication. # 2013 Publié par Elsevier Masson SAS. Mots clés : Épicondylite latérale ; Traitement chirurgical ; Arthroscopie ; Coude Abstract Lateral epicondylitis of the elbow is a relatively common pathology and would involve 1-3% of the overall population. Lack of consensus on surgical techniques reflects the difficulty of understanding and treating this disease. Our prospective study reports the results of its arthroscopic treatment on 14 patients operated on between 2009 and 2012. The mean follow-up was 7.15 months. All patients underwent a well conducted medical treatment for an average of 32.5 months. The operation was carried out under regional anesthesia in an outpatient. The technique included a time of joint exploration, joint capsulotomy and a transverse division of the pathological tendon of extensor carpi radialis brevis (ECRB) and extensor digitorum communis (EDC). The value on the visual analogic scale (VAS) at rest and during exercise increased from 2.85 to 0.43 and from 7.71 to 2.43, respectively, then remained stable over time. Professional activity was resumed on average at 9.1 weeks. Neither intraoperative nor postoperative complications were found. No laxity was observed. The Mayo Clinic and DASH scores were significantly improved from 52.14 to 92.5 and from 54.11 to 9.7, respectively. Overall, we observed 11 very good and three good results. Although our prospective series has a few patients and limited follow-up, our results are better or similar than those reported in the literature on pain relief and functional recovery. In contrast, the average recovery of professional activity was longer. Elbow arthroscopy, less invasive than open procedures, and allowing further joint exploration, seems an excellent alternative technique in this indication. # 2013 Published by Elsevier Masson SAS. Keywords: Lateral epicondylitis; Surgical treatment; Arthroscopy; Elbow Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Chirurgie de la main 32 (2013) 8084 * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (A. Sauvage). 1297-3203/$ see front matter # 2013 Publié par Elsevier Masson SAS. http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2013.02.014

Traitement arthroscopique de l’épicondylite latérale : étude prospective à propos de 14 cas

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Article original

Traitement arthroscopique de l’épicondylite latérale :étude prospective à propos de 14 cas

Arthroscopic treatment of lateral epicondylitis: A prospective study on 14 cases

A. Sauvage *, G. Nedellec, C. Brulard, G. Gaumet, P. Mesnil, C. Fontaine, G. WavreilleService de chirurgie du membre supérieur, clinique d’orthopédie, hôpital Roger-Salengro, CHRU de Lille, rue Émile-Laine, 59037 Lille cedex, France

Reçu le 29 août 2012 ; reçu sous la forme révisée le 4 février 2013 ; accepté le 11 février 2013Disponible sur Internet le 6 mars 2013

Résumé

L’épicondylite latérale du coude est une pathologie fréquente qui toucherait 1 à 3 % de la population générale. L’absence de consensus sur lestechniques chirurgicales traduit la difficulté de comprendre et de traiter cette pathologie. Notre étude prospective rapporte les résultats de sontraitement arthroscopique à propos de 14 patients opérés entre 2009 et 2012. Le recul moyen était de 7,15 mois. Tous les patients avaient bénéficiéd’un traitement médical bien conduit pendant 32,5 mois en moyenne. L’intervention se déroulait sous anesthésie locorégionale et en ambulatoire.La technique comprenait un temps d’exploration articulaire, puis une capsulotomie et une section transversale de la lame tendineuse pathologiquedu court extenseur radial du carpe (CERC) et de l’extenseur commun des doigts (ECD). La valeur sur l’échelle visuelle analogique (EVA) passaitde 2,85 à 0,43 au repos, et de 7,71 à 2,43 à l’effort, puis restait stable dans le temps. La reprise de l’activité professionnelle survenait en moyenne à9,1 semaines. Aucune complication per- et postopératoire n’a été relevée. Aucune laxité n’a été observée. Les scores de la Mayo Clinique et leDASH score étaient nettement améliorés, passant respectivement de 52,14 à 92,5 et de 54,11 à 9,7, soit 11 très bons résultats et trois bons. Notresérie prospective, présentant peu de patients et un recul limité, donne des résultats similaires à, voire meilleurs que ceux de la littérature sur ladouleur et la récupération fonctionnelle. En revanche, le délai moyen de reprise d’activité professionnelle était plus long. L’arthroscopie de coude,moins invasive que les techniques à ciel ouvert et permettant un complément d’exploration articulaire, semble donc une excellente techniquealternative de première intention dans cette indication.# 2013 Publié par Elsevier Masson SAS.

Mots clés : Épicondylite latérale ; Traitement chirurgical ; Arthroscopie ; Coude

Abstract

Lateral epicondylitis of the elbow is a relatively common pathology and would involve 1-3% of the overall population. Lack of consensus onsurgical techniques reflects the difficulty of understanding and treating this disease. Our prospective study reports the results of its arthroscopictreatment on 14 patients operated on between 2009 and 2012. The mean follow-up was 7.15 months. All patients underwent a well conducted medicaltreatment for an average of 32.5 months. The operation was carried out under regional anesthesia in an outpatient. The technique included a time ofjoint exploration, joint capsulotomy and a transverse division of the pathological tendon of extensor carpi radialis brevis (ECRB) and extensordigitorum communis (EDC). The value on the visual analogic scale (VAS) at rest and during exercise increased from 2.85 to 0.43 and from 7.71 to 2.43,respectively, then remained stable over time. Professional activity was resumed on average at 9.1 weeks. Neither intraoperative nor postoperativecomplications were found. No laxity was observed. The Mayo Clinic and DASH scores were significantly improved from 52.14 to 92.5 and from 54.11to 9.7, respectively. Overall, we observed 11 very good and three good results. Although our prospective series has a few patients and limited follow-up,our results are better or similar than those reported in the literature on pain relief and functional recovery. In contrast, the average recovery ofprofessional activity was longer. Elbow arthroscopy, less invasive than open procedures, and allowing further joint exploration, seems an excellentalternative technique in this indication.# 2013 Published by Elsevier Masson SAS.

Keywords: Lateral epicondylitis; Surgical treatment; Arthroscopy; Elbow

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

Chirurgie de la main 32 (2013) 80–84

* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (A. Sauvage).

1297-3203/$ – see front matter # 2013 Publié par Elsevier Masson SAS.http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2013.02.014

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Fig. 1. Vue intra-articulaire du compartiment latéral.

1. Introduction

L’épicondylite latérale du coude est une pathologierelativement fréquente, mais pour laquelle beaucoup d’inter-rogations et d’incertitudes persistent. Elle toucherait 1 à 3 % dela population générale et représenterait, selon un recensementde 2003, 20,5 % des maladies professionnelles [1].

Sa description médicale remonte à près d’un siècle et demi[2] et, pourtant, l’absence de consensus sur les techniqueschirurgicales traduit la difficulté de comprendre et de traitercette pathologie. Grifka et al. en 1995 décrivent les premiers lapossibilité de faire la ténotomie des muscles épicondylienslatéraux sous arthroscopie. Cette idée a été reprise et amélioréeà partir de 2001 par de nombreux auteurs : Owens et al., Smithet al., Jerosch et al., Baker et al., Kulko et al. [3–8]. Lalittérature reste pauvre, ce qui explique probablement que cettetechnique soit peu pratiquée.

Depuis 2009, nous avons modifié notre prise en charge decette atteinte avec l’utilisation des ondes de choc (également encours d’évaluation). En cas d’échec de cette dernière technique,associée à un traitement médical bien conduit, nous réalisons untraitement arthroscopique de la tendinopathie.

Notre objectif était de rapporter les résultats du traitementarthroscopique des épicondylalgies latérales de coude d’originetendineuse, à propos de 14 coudes opérés de 2009 à 2012.

2. Patients et méthode

2.1. Échantillon

Notre série prospective incluait 14 patients, six femmes ethuit hommes, opérés entre 2009 et 2012. L’âge moyen étaitde 39,8 � 6,01 ans (allant de 28 à 46 ans). Le côté dominantétait atteint dans dix cas (71 %). Parmi eux, neuf patientsavaient une activité manuelle soutenue avec travail de forceou mouvements répétitifs (plaquiste, maçon, routier, manu-tentionnaire, boulangère). Un patient a été exclu de la série,car il avait déjà bénéficié d’un traitement chirurgical à cielouvert.

Tous les patients avaient bénéficié d’un traitement médicalbien conduit pendant 32,5 mois en moyenne (allant de six moisà 49 mois) comprenant antalgiques, anti-inflammatoires etphysiothérapie. Devant l’insuffisance du traitement, desinfiltrations avaient été réalisées chez dix patients, associéesà 15 jours d’immobilisation brachio-antébrachio-palmaire pourcinq d’entre eux. Huit patients avaient bénéficié d’un traitementpar ondes de choc, initié dans notre service depuis 2010, etactuellement en cours d’évaluation.

Les patients ont tous été revus cliniquement et aucun perdude vue n’a été relevé. Le recul moyen était de 7,15 mois (allantde trois à 13 mois).

Les critères d’exclusions étaient : les antécédents dechirurgie du coude, l’absence d’un traitement médical initialbien conduit. Le diagnostic d’épicondylalgie supposaitévidemment que les autres causes de douleurs latérales ducoude (lésions dégénératives, tumorales, nerveuses, etc.) aientété éliminées.

2.2. Technique chirurgicale

L’intervention se déroulait le plus souvent sous anesthésielocorégionale. Le patient était installé en décubitus latéral. Lemembre supérieur concerné était positionné sur un appuie-bras,coude fléchi à 908, avant-bras pendant. Cette installationpermettait une mobilisation complète du coude et de l’avant-bras. Un garrot à la racine du membre était systématiquementutilisé.

Après infiltration de l’articulation au sérum physiologique,on réalisait la première voie d’abord antéro-médiale proximale,située à deux travers de doigt en amont et en avant del’épicondyle médial. On effectuait ensuite une discision destissus mous et une capsulotomie à l’aide d’une pince d’Halsteadavant l’introduction du trocart et de l’arthroscope de diamètre4 mm, une optique à 308 dans l’articulation. Le premier tempsconsistait en une exploration articulaire, cherchant d’éventuelscorps étrangers intra-articulaires, un repli synovial dans lecompartiment latéral, ou des lésions chondrales qui pourraientnécessiter un geste complémentaire dans le même tempsopératoire (Fig. 1). La voie d’abord antéro-latérale était ensuiteréalisée, deux travers de doigt au-dessus et en avant del’épicondyle latéral et après repérage endoarticulaire grâce àune aiguille intramusculaire. On réalisait une section trans-versale de cette lame tendineuse pathologique. On réalisait lacapsulotomie latérale transversale au bord latéral de l’épicon-dyle à l’aide d’une sonde de radiofréquence (VAPR1), enrestant en avant du plan du ligament collatéral latéral. Ledébridement ne devait en aucun cas s’étendre en arrière de laligne divisant la tête radiale en deux moitiés, antérieure etpostérieure, sous peine de léser les structures ligamentaires etde générer une instabilité postéro-latérale du coude [8]. Laréalisation de cette capsulotomie était facilitée en modifiant laforme de la sonde de radiofréquence, en lui appliquant uneforme courbe, arrondie dans sa partie centrale, permettant unaccès et un travail plus aisés dans le compartiment latéral. Unefois la capsulotomie réalisée, on pouvait observer la faceprofonde de la lame tendineuse des muscles épicondylienslatéraux et, plus précisément, du court extenseur radial du carpeet de l’extenseur commun des doigts. La libération était stoppéeune fois visualisé le corps charnu des muscles épicondyliens,permettant un allongement de 1 à 2 cm. Le débridement et lenettoyage étaient complétés à l’aide du shaver (Fig. 2 et 3).Nous ne réalisions pas d’autres gestes complémentaires etnotamment pas d’abrasion de l’épicondyle latéral.

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Fig. 2. Vue latérale du coude. Schéma explicatif. La section transversale de lalame tendineuse du CERC et ECD par la sonde de radiofréquence doit se trouveren avant de la ligne séparant la tête radiale en deux.

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La chirurgie était réalisée en conditions ambulatoires, sansdrainage. Le patient quittait le service avec une simpleimmobilisation souple coude au corps pendant sept à dix jours.

2.3. Méthodes

Pour cette étude prospective, les patients ont fait l’objet d’unsuivi et d’une évaluation régulière, aussi bien en préopératoirequ’en postopératoire. Les patients étaient revus à un mois, troismois, puis six mois, en l’absence de complications.

Les données cliniques initiales concernant l’âge, le sexe, lecôté atteint, le contexte socioprofessionnel, les symptômes etles résultats des traitements médicaux ont été relevés.

Le bilan paraclinique réalisé comprenait au minimum : uneradiographie standard du coude et une IRM. D’autres examenscomplémentaires pouvaient être prescrits en fonction del’examen clinique initial.

Fig. 3. Vue intra-articulaire. Section transversale de la lame tendineuse destendons CERC et ECD.

Lors de la prise en charge chirurgicale, un bilan intra-articulaire cherchait une éventuelle synovite, des corpsétrangers, des lésions chondrales et un repli synovial dans lecompartiment latéral.

L’évolution postopératoire a permis de recueillir l’évolutiondes symptômes, d’éventuelles complications, et d’apprécier ledélai de la reprise professionnelle et le retentissement surl’activité extraprofessionnelle.

Les résultats ont également été évalués de manièresubjective et objective à l’aide de deux scores : le score dela Mayo Clinic concernant le coude et un DASH score [9].

3. Résultats

Le symptôme douleur domine dans cette pathologie. Nousavons vu l’EVA moyen au repos passer de 2,85 en préopératoireà 0,43 à trois mois. À l’effort, l’EVA moyen évoluait égalementfavorablement, passant de 7,71 à 2,43, puis restait stable dansle temps.

La reprise de l’activité professionnelle survenait enmoyenne à 9,1 � 3,6 semaines (allant de moins de trois à12 semaines). Seul un patient, considéré en maladieprofessionnelle, n’avait pas repris son activité à quatre moisde recul et présentait en plus une atteinte de l’autre coude encours de traitement.

Dans la période postopératoire, les patients ont bénéficiéd’une immobilisation durant 9,14 jours en moyenne par unecontention souple, coude au corps. Une rééducation précoce aété initiée vers trois semaines postopératoires et nécessitait enmoyenne 18,5 � 8,54 séances.

Aucune complication per- et postopératoire n’a été relevée.Aucune laxité n’a été observée. Seule une patiente gardait unflessum d’une trentaine de degrés à trois semaines, spontanémentrésolutif en six mois. Un patient présentait un kyste arthrosy-novial situé en regard de la lésion. L’intervention a permis sadisparition immédiate sans récidive à 11 mois de recul.

Avant l’opération, le score de la Mayo Clinique et le DASHscore étaient respectivement de 52,14 � 9,5 et 54,11 � 12,4.Avec un recul moyen de 7,15 mois, les scores avaient nettementprogressé ; ils étaient en moyenne respectivement de 92,5 �8,66 et 9,7 � 6,73. Cela représentait 11 très bons et trois bonsrésultats (Tableau 1).

Tous les patients étaient satisfaits (3) ou très satisfaits (11) etauraient voulu la même prise en charge opératoire.

4. Discussion

Même si notre série prospective présente peu de patients etun recul limité, nos résultats sont concordants avec ceux de la

Tableau 1Comparatif de la situation préopératoire et du résultat postopératoire de notresérie au recul de 7,15 mois.

EVA repos EVA effort DASH Mayo Clinic

Préopératoire 2,85 7,71 54,11 52,14Postopératoire 0,43 2,43 9,7 92,5

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littérature. L’efficacité sur la symptomatologie douloureuse etla récupération fonctionnelle est similaire, voire meilleure, quedans certaines séries, comme celle de Baker et al. [7] quirapportent, malgré un nombre élevé de patients perdus de vue,95 % de bons résultats et 62 % de patients non algiques. Owenset al. [4] obtenaient 83 % de bons résultats. En revanche, ledélai moyen de reprise d’activité professionnelle était bien pluslong dans notre série (9,1 semaines) que dans les deux sériesprécédentes avec respectivement en moyenne 2,2 semainespour Baker et al. [7] et dès le sixième jour pour la série d’Owenet al. Les séries de Dumontier et al., Beauthier et al. [10,11]rapportaient, avec un recul bien plus important, 81 % de bonsrésultats et un délai de reprise d’activité professionnelled’environ dix mois, superposable au délai de notre série.

Nos résultats sont probablement influencés par la relationprivilégiée que nous entretenons avec les patients. Pour laplupart, ils bénéficient chacun de nombreuses consultations dèsl’instauration du traitement initial par une série de cinq séancesd’ondes de choc. Ce temps consacré au patient permet de mieuxle connaître, d’évaluer le retentissement psychologique etfonctionnel de sa plainte et d’instaurer un climat de confianceet en quelque sorte une « pseudo-psychothérapie ».

Quelques séries, comme celles de Cohen et al. [12], Peartet al. [13] ou encore Rubenthaler et al. [14] ont comparé letraitement arthroscopique et la chirurgie à ciel ouvert. Laplupart obtenaient les mêmes résultats, avec cependant un délaide reprise d’activité professionnelle plus court dans le groupearthroscopique.

Un travail réalisé en 2007 dans notre service par Mouliade[15], à propos des résultats du traitement à ciel ouvert desépicondylites latérales sur 70 coudes, trouvait au recul de4,5 ans une EVA passant de 8,25 en préopératoire à 3,5 enpostopératoire ; le DASH score évoluait favorablement de39,2 à 16,5. Le délai de reprise professionnelle était de13 semaines en moyenne. Au total, 70 % des patients étaientsatisfaits de la prise en charge et se considéraient comme bon ettrès bon résultats. Ces résultats, dans une population similaire àla nôtre, sont sensiblement moins bons que ceux retrouvés dansnotre série, même si le recul et l’échantillon restent bien moinsimportants.

De nombreuses autres techniques ont également étéproposées. Elles ont toutes en commun la désinsertion duCERC et parfois y associent des gestes complémentaires(dénervation de l’épicondyle, neurolyse du nerf radial plus

Tableau 2Comparatif des résultats postopératoire des séries de la littérature.

Baker Murphy Owens

Année 2000 2000 2001

N cas 12 11 16

Recul (année) 2 2,8 2,1

EVA repos 0,58

EVA effort 1,9 3,25

Mayo Clinic/12 11,1

Reprise activité (semaines) 2,2 2,2 0,9

Bons et excellents résultats (%) 95 95 100

ou moins systématique, plastie musculaire, etc.) [16,17].Aucune de ces techniques n’a montré sa supériorité sur laténotomie isolée.

À résultat égal, il nous semble donc préférable d’utiliser latechnique arthroscopique qui donne une rançon cicatriciellequasi nulle, une prise en charge en ambulatoire plus aisée, etdonc un coût de santé publique moindre. Les suites immédiatesnous semblent plus confortables qu’à ciel ouvert, avec moinsde douleur et de raideur postopératoires. L’absence de gestevis-à-vis de l’épicondyle à type de fraisage, limitant laprobable hémarthrose, doit participer à ces résultats. Dans lalittérature, on trouve un taux de raideur postopératoired’environ 25 %, et 10 à 15 % de syndrome douloureuxrégional complexe de type 1 [18]. Dans notre étude, seul unpatient a présenté un déficit d’extension transitoire de 308,résolutif en trois à six mois.

L’arthroscopie présente également d’autres avantages avecune exploration articulaire des compartiments antéro-médial etantéro-latéral à la recherche de lésions dégénératives, de corpsétrangers intra-articulaires, et donnent la possibilité de réaliserdes gestes complémentaires. Szabo et al. [19] ont trouvé 44 %de pathologies intra-articulaires associées. Nous n’avons pastrouvé d’autres lésions associées dans notre série. De plus, laprise en charge en chirurgie arthroscopique n’empêche pas uneéventuelle reprise chirurgicale à ciel ouvert en cas d’échec ourechute.

En revanche, le risque de lésions nerveuses est plusimportant, entre 0,1 et 14 % selon les séries [20,21]. Certainsgestes de décompression du rameau postérieur du nerf radial(réalisé par certains auteurs de manière quasi systématique,comme Bigorre et al. [16], Leppilahti et al. [17]) nécessitent unabord complémentaire limitant l’intérêt de la techniquearthroscopique. Le diagnostic et surtout l’élimination desautres causes (compression du rameau postérieur du nerf radial,certaines instabilités, douleurs neurogènes par névralgiecervicobrachiale, fibromyalgie, etc.) par un bon examenclinique, si nécessaire complété par quelques examenscomplémentaires, reste donc primordiaux.

Il existe probablement une courbe d’apprentissage avec unediminution du risque de complications et une diminution de ladurée d’intervention. Dans notre série, les patients ont été prisen charge par quatre opérateurs différents et les résultats nesemblent pas montrer de différences avec les autres séries de lalittérature (Tableau 2).

Peart Jerosch Dumontier Baker Équipe lilloise

2004 2005 2008 2008 201229 20 26 30 14

1,8 4 10,8 0,70,5 0,38 0 0,431,2 4,11 1,9 2,43

10,9 11 11,7 11,147 3,2 10 9,1

72 85 85 97 100

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5. Conclusion

Actuellement, l’arthroscopie de coude, moins invasive etpermettant un complément d’exploration articulaire, sembledonc une technique alternative de choix en première intentiondans cette indication [22]. Elle apporte une disparition quasicomplète de la symptomatologie douloureuse et permet unereprise d’activité professionnelle plus précoce, dans un délai dedeux mois environ. Elle n’empêche pas une éventuelle reprisechirurgicale à ciel ouvert en cas d’échec ou rechute.

Déclaration d’intérêts

Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enrelation avec cet article.

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