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Douleurs Évaluation - Diagnostic - Traitement (2010) 11, 280—287 VOTRE PRATIQUE Traitement des douleurs réfractaires de la face par la stimulation magnétique transcrânienne répétitive (SMTr): étude ouverte sur une année Treatment of refractory facial pain by the repetitive transcranial magnetic stimulation (rTMS): Open study for 1 year Hasan Hodaj a,, Jean-Pierre Alibeu a , Caroline Maindet Dominici a , David Szekely b , Claude Jacquot a a Centre de la douleur, pôle anesthésie-réanimation, CHU de Grenoble, BP 217, 38043 Grenoble, France b Pôle psychiatrie-neurologie, CHU de Grenoble, BP 217, 38043 Grenoble, France Disponible sur Internet le 18 novembre 2010 MOTS CLÉS Douleurs faciales réfractaires ; Stimulation magnétique transcrânienne ; Stimulation du cortex moteur Résumé Nous rapportons notre expérience de l’utilisation de la stimulation magnétique trans- crânienne répétitive (SMTr) dans le traitement des douleurs faciales rebelles chroniques et réfractaires. Notre objectif est d’évaluer l’efficacité de la SMTr dans cette indication et de déterminer les modalités du suivi et du traitement à long terme. Treize patients souffrant de douleurs faciales réfractaires ont été inclus (sept névralgies trigéminales, quatre algies vas- culaires de la face, deux douleurs post-zostériennes) avec une douleur de fond moyenne de 5,9 sur 10 et de crise de 9,2 sur 10. La cure de SMTr a permis une diminution de la douleur de fond évaluée à j90 à 2,5 sur 10 (disparition des douleurs chez quatre patients). Parmi les patients, 53,1 % ne présentaient plus de crises et 23,1 % des crises moins intenses. Pour 38,5 % des patients, l’espacement des séances entraîne un soulagement moindre des douleurs. Chez les patients répondeurs, cette technique paraît un outil intéressant permettant d’obtenir un effet antalgique cumulatif par la répétition prolongée des séances. © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (H. Hodaj). 1624-5687/$ — see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.douler.2010.09.001

Traitement des douleurs réfractaires de la face par la stimulation magnétique transcrânienne répétitive (SMTr) : étude ouverte sur une année

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OTRE PRATIQUE

raitement des douleurs réfractaires de la face par latimulation magnétique transcrânienne répétitiveSMTr) : étude ouverte sur une année

reatment of refractory facial pain by the repetitive transcranial magnetictimulation (rTMS): Open study for 1 year

Hasan Hodaja,∗, Jean-Pierre Alibeua, CarolineMaindet Dominici a, David Szekelyb, Claude Jacquota

a Centre de la douleur, pôle anesthésie-réanimation, CHU de Grenoble, BP 217, 38043Grenoble, Franceb Pôle psychiatrie-neurologie, CHU de Grenoble, BP 217, 38043 Grenoble, France

Disponible sur Internet le 18 novembre 2010

MOTS CLÉSDouleurs facialesréfractaires ;Stimulationmagnétiquetranscrânienne ;Stimulation du cortexmoteur

Résumé Nous rapportons notre expérience de l’utilisation de la stimulation magnétique trans-crânienne répétitive (SMTr) dans le traitement des douleurs faciales rebelles chroniques etréfractaires. Notre objectif est d’évaluer l’efficacité de la SMTr dans cette indication et dedéterminer les modalités du suivi et du traitement à long terme. Treize patients souffrant dedouleurs faciales réfractaires ont été inclus (sept névralgies trigéminales, quatre algies vas-culaires de la face, deux douleurs post-zostériennes) avec une douleur de fond moyenne de5,9 sur 10 et de crise de 9,2 sur 10. La cure de SMTr a permis une diminution de la douleurde fond évaluée à j90 à 2,5 sur 10 (disparition des douleurs chez quatre patients). Parmi lespatients, 53,1 % ne présentaient plus de crises et 23,1 % des crises moins intenses. Pour 38,5 % des

patients, l’espacement des séances entraîne un soulagement moindre des douleurs. Chez lespatients répondeurs, cette technique paraît un outil intéressant permettant d’obtenir un effet

répétition prolongée des séances.

antalgique cumulatif par la © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (H. Hodaj).

624-5687/$ — see front matter © 2010 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.oi:10.1016/j.douler.2010.09.001

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Traitement des douleurs réfractaires de la face par SMTr 281

KEYWORDSRefractory facialpain;Transcranial magneticstimulation;Motor cortexstimulation

Summary We report our experience of the use of repetitive transcranial magnetic stimulation(rTMS) treatment of severe and refractory chronic facial pain. The aim of this study is to eva-luate the efficiency of rTMS in this indication and also to determine the modalities of follow-upand long-term treatment. Thirteen patients suffering from refractory facial pain were included(seven trigeminal neuralgias, four cluster headaches and two chronic post-shingles pain): theVAS of permanent pain was evaluated on average at 5.9/10 and during crises at 9.2/10. Thecourse of rTMS treatment resulted in a decrease of permanent pain, evaluated at day 90 at2.5/10 (disappearance of facial pain in four patients); disappearance of the crises in 53.1%and net decrease in 23.1% of the patients. For 38.5% of the patients, the spacing out of ses-sions results in a lesser relief of pain. In responsive patients, this technique appears to be aninteresting tool offering a cumulative analgesic effect by the repetition of sessions.© 2010 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

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Introduction

Nous rapportons notre expérience de l’utilisation de la sti-mulation magnétique transcrânienne répétitive (SMTr) dansle traitement des douleurs faciales rebelles chroniques etréfractaires aux thérapeutiques conventionnelles.

Le principe de cette technique repose sur la relationentre l’électricité et le magnétisme : un courant électriquealternatif passant dans une bobine de fil conducteur, génèreun champ magnétique.

Si la bobine est posée sur le scalp, le champ magné-tique induit un courant électrique secondaire et focal, à uneprofondeur de 2 à 3 cm.

La SMTr est utilisée pour stimuler une zone cible du cor-tex cérébral afin de modifier durablement l’excitabilité descircuits corticaux.

La SMTr agit par l’excitation des fibres nerveuses etson action s’exerce principalement sur les circuits sous-corticaux.

Le site de stimulation du cortex est variable selon lespathologies et les protocoles établis. Dans la douleur chro-nique, la plupart des protocoles proposent la stimulation ducortex moteur [1].

Cette technique récente retrouve ses champsd’applications principalement dans la recherche cliniquemais aussi dans le traitement de plusieurs pathologies :dépression, douleurs chroniques, maladie de Parkinson,mouvements anormaux, sclérose en plaque, acouphènes[2].

L’effet antalgique se produit par lerecrutement des structures nerveuses profondes

situées à distance de la zone de stimulation,mais connectées au cortex moteur.

La stimulation corticale pourrait réduire l’hyperactivitéde certains relais thalamiques impliqués dans la trans-

mission des stimuli douloureux. D’autres hypothèses sontévoquées pour expliquer son mécanisme d’action commel’activation des contrôles descendants des voies cortico-thalamiques ou la restauration dans le cortex moteur desparamètres d’inhibition corticale [3].

L’intérêt principal de cette technique est la persis-ance de ses effets au-delà de la période de stimulation4]. Mais les effets antalgiques d’une seule séance de sti-ulation sont de courte durée, nécessitant de pratiquerlusieurs séances pour obtenir un effet cumulatif. Notretude concerne l’utilisation de cette technique dans le trai-ement des douleurs faciales rebelles et réfractaires auxraitements conventionnels.

Dans le cas des douleurs faciales, cette résistance théra-eutique concerne principalement les médicaments, maisussi les infiltrations, l’électrocoagulation ou autre gestenterventionnel. Au fils des années, parfois ces douleursnciennes évoluent par crises de plus en plus rapprochéesers des formes chroniques, avec l’installation d’un fondouloureux permanent [5].

Notre objectif est l’évaluation de l’efficacité de la SMTrans cette indication et de déterminer les modalités de suivit du traitement à long terme.

atients et méthodes

ous avons inclus dans cette étude ouverte 13 patientsraités par SMTr pour des douleurs faciales chroniqueséfractaires pendant une année.

Les pathologies concernées étaient les névralgies trigé-inales (NT), les algies vasculaires de la face (AVF) et lesouleurs post-zostériennes (DPZ).

Nous avons étudié l’effet antalgique de la SMTr danses douleurs faciales, indépendamment de leurs méca-ismes physiopathologiques. L’incidence faible des douleurshroniques faciales réfractaires, ainsi que leur nombre deecrutement ne nous permettent pas d’obtenir un échan-illon représentatif par pathologie.

Les critères communs d’inclusion sont :l’âge supérieur à 18 ans ;le patient présentant des douleurs faciales rebelleschroniques qui ne répondent pas aux traitements conven-

tionnels bien conduits ou les sujets qui arrêtent lestraitements à cause d’une mauvaise tolérance et/ou quisouhaitent une thérapeutique non médicamenteuse ;le patient ne présentant pas une contre-indication à laSMTr (ATCD d’épilepsie, pacemaker. . .).
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igure 1. Appareil MAGPRO X30.

Les critères d’inclusion selon la pathologie sont :les DPZ : patient douloureux depuis au moins six mois, nonrépondeur à la gabapentine ;les AVF : patient répondant aux critères d’AVF chroniqueselon la classification d’IHS ;les NT : patient douloureux depuis au moins deux ans, nonrépondeur à la carbamazepine.

Un consentement signé par le patient était obtenu.L’indication est validée par la réunion de concertation

luridisciplinaire du centre de la douleur.Pour la SMTr, nous utilisons l’appareil MAGPRO X30 avec

ne bobine en forme de huit, équipée d’un système deefroidissement par fluide dynamique (Fig. 1).

Paramètres de stimulation : chaque séanceconsiste à appliquer 40 trains de cinq secondesavec un intervalle inter-train de 25 secondes et

une fréquence à 10 Hz ; soit au total2000 impulsions pendant 20 minutes.

L’intensité de stimulation est délivrée à 80 % du seuiloteur. La détermination du seuil moteur a été réalisée

elon la technique de Rossini et al. [6] par la mesure desotentiels évoqués moteurs (PEM) à l’aide du moniteur PEMaccordé à l’appareil de SMTr. La zone stimulée est située auiveau de l’aire motrice de la face controlatérale à la zonelgique.

Rythme des séances : cinq séances quotidiennes consé-

utives pendant la première et seconde semaine (S1, S2)t ensuite des séances d’entretien : deux séances (S3), uneéance (S4), une séance (S6), une séance (S10).

L’évaluation de la douleur a été effectuée systématique-ent avant chaque séance et à j90 par l’échelle de l’Eva.

nades

H. Hodaj et al.

L’impression clinique globale (CGI) a été évaluée à j90.Nous avons également étudié la fréquence des crises, la

onsommation des antalgiques et la tolérance de la tech-ique SMTr.

ésultats

reize patients souffrant de douleurs faciales chroniqueséfractaires et très invalidantes ont bénéficié de séances deMTr au Centre de la douleur (un patient en 2008, 12 patientsn 2009). Il s’agit de sept hommes et six femmes. Leur âgeoyen est de 67,4 ans.Tous ces patients présentaient des douleurs chroniques

ermanentes, ainsi que des accès douloureux fréquentst réfractaires aux différents traitements conventionnelsTableau 1). Les pathologies à l’origine de ces douleurs sont :ept NT (dont trois formes vieillies), quatre AVF, deux DPZ.

L’ancienneté moyenne de leurs douleurs est de,46 années (médiane : 3,2 ; min : 0,6 ; max : 40 ans).

Évaluation avant les séances de SMTr : l’Eva de la douleurermanente a été évaluée en moyenne à 5,9 sur 10. Pendantes crises, l’Eva a été évaluée en moyenne à 9,2 sur 10.

Évaluation durant le traitement par la SMTr : en se réfé-ant aux résultats figurant dans le Tableau 2, nous constatonsue l’amélioration des symptômes commence entre j3 à6 avec l’obtention du meilleur résultat moyen à j15 : l’Evae la douleur permanente est évaluée en moyenne à 2,3 sur0.

Globalement, le traitement a été bien toléré par tous lesatients.

Évaluation de la douleur à j90 (Tableau 2) : l’Eva de laouleur permanente est évaluée en moyenne à 2,5 sur 10.uatre patients présentent une disparition totale des dou-

eurs faciales, cinq patients une amélioration nette (≥ 50 %),eux patients une amélioration modérée (≥ 30 %), et deuxatients une amélioration très faibles (≤ 10 %). Parmi lesatients, 53,1 % ne présentent plus de crises intenses et3,1 % des patients constataient une diminution de leur fré-uence et de leur intensité.

Le traitement médicamenteux a été arrêté chez 23,1 %es patients a été réduit chez 46,2 % des patientsTableau 1).

Les douleurs étaient moins bien soulagées par’espacement mensuel des séances chez 38,5 % desatients.

Le ressenti de l’amélioration par le patient a été évaluéelon l’échelle de l’CGI en moyenne à « fortement amélioré »Tableau 3).

iscussion

lusieurs études ont démontré l’effet antalgique de la SMTrans les douleurs chroniques.

Dans une étude chez 24 patients souffrant de NT chro-

iques, la pratique de cinq séances quotidiennes de SMTrctive versus placebo a apporté un soulagement significatife la douleur chez les patients du groupe SMTr actif. Cesffets ont persisté pendant deux semaines après la dernièreéance [7].
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Traitement des douleurs réfractaires de la face par SMTr 283

Tableau 1 Traitement médicamenteux à j0 et j90.

N Sexe Âge Pathologie Ancienneté(années)

Échec des traitementsantérieur à citer

Traitement en coursavant rTMS

Traitement j90

1 M 61 AVF 10 Lithium Sumatriptan 2,5 fois/j,Prednisolone, O2,Verapamil

Sumatriptan < 1 fois/jMilnacipran,Pregabaline, O2

2 M 46 AVF 3,2 Verapamil O2, Sumatriptan,Pregabaline,Amitrptiline, Tramadol

Amitrptiline,Tramadol

3 M 70 AVF 40 Sumatriptan Frovatriptan, Lamaline —4 M 67 AVF 11 — Pregabaline,

Sumatriptan,Tramadol

Tramadol

5 F 77 NT 2 Bloc du ganglion deGasser,carbamazepine

Pregabaline 600 mg/j,Paracétamol

Paracétamol

6 F 84 NT 8 Électrocoagulation,Bloc du ganglion deGasser

Pregabaline,ClomipraminePropofan

Clomipramine,Propofan

7 F 47 NT 2,5 — Tramadol, Pregabaline Tramadol8 M 81 NT 5 Carbamazepine,

électrocoagulationClomipramine,gabapentine,

9 F 56 NT 10,5 Carbamazepine Clonazepam,Clomipramine,Tramadol

Clonazepam,Duloxetine

10 F 75 NT 3 Oxabarzepine Topiramate,Paroxetine,Tramadol

Clonazepam,Pregabaline,duloxetine

11 M 75 NT 2,5 — Carbamazepine,Tramadol,Clomipramine

12 F 70 DPZ 0,6 Infiltration,N. susorbitaire

Lidocaine emplatre 5 %,gabapentine,Tramadol, Fluoxetine

Tramadol,Clomipramine

13 M 69 DPZ 0,7 — Lidocaine emplatre 5 %,gabapentine 2700 mg/j,Tramadol, Milnacipran,Clonazepam

Tramadol,gabapentine600 mg/j

face ;

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NT : les névralgies trigéminales ; AVF : les algies vasculaires de la

Dans une autre étude randomisée en double insu chez30 patients fibromyalgiques, la pratique de cinq séancesquotidiennes de SMTr par semaine pendant deux semaines,a induit une amélioration significative dans le groupe rece-vant des stimulations jusqu’à deux semaines après la fin dutraitement [8].

La plupart des études sont d’une durée courte, en géné-rale pendant une ou deux semaines [9]. L’effet antalgiqueest peu durable, ce qui pose plusieurs difficultés pourl’application de ces protocoles dans la pratique clinique.

Il y a peu d’études qui ont testé l’utilisation et l’efficacité

de la SMTr à long terme dans la douleur chronique.

Lefaucheur a déjà rapporté le cas d’une patiente soufrantd’une douleur chronique par lésion du plexus brachial sou-lagée par des séances mensuelles de SMTr pendant 16 mois,

doÉn

DPZ : les douleurs post-zostériennes.

usqu’à ce qu’une amélioration durable ait été obtenue par’implantation d’un stimulateur cortical [10].

Zaghi et al. ont décrit l’utilisation de la SMTr pendantne année chez un patient soufrant d’une NT réfractaire11].

Par ailleurs, quelques études concernant l’utilisation dea SMTr dans le traitement de la dépression à longue termear des séances de maintien tous les 15 jours ou une à deuxois par semaines pendant plusieurs mois ont confirmé unemélioration durable et aussi l’effet stabilisateur de SMTr12]. L’indication de la SMTr en monothérapie après échec

’un traitement antidépresseur a d’ailleurs été validée enctobre 2008 par la Food and Drug Administration (FDA) auxtats-Unis. Ces études nous ont inspiré l’utilisation de cetteouvelle thérapeutique dans le traitement des douleurs neu-
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al.

Tableau 2 Évaluation de la douleur à j0, j15, j90.

Évaluation à j0 Évaluation à j15 Évaluation à j90

Sexe Âge Pathologie Evadouleur defond

Nombrede crisesou d’accèsparoxys-tiques/j

Evacrise

Débutd’amélioration

Evadouleur defond

Nombrede crisesou d’accèsparoxys-tiques/j

Evacrise

Evadouleurde fond

Nombrede crisesou d’accèsparoxys-tiques/j

Evacrise

M 61 AVF 7 6 10 j4 3 2 6 4 3 6,5M 46 AVF 8 4 9 j3 3 0 — 3,5 1 4,5M 70 AVF 4 5 10 j3 0 0 — 0 0 —M 67 AVF 5 1 9,5 j4 1,5 0 — 0Occasionnelles 3F 77 NT 8 3 10 j4 3 0 3 0 —F 84 NT 5,5 10 8 j4 2,5 1 4 3 3 5F 47 NT 5 4 7 j5 2 0 — 2,5 0M 81 NT 6 État de mal 10 j3 0 0 — 0 0 —F 56 NT 5,5 ≥ 10 9 j5 4,5 ≥ 10 9 4,5 ≥ 10 9F 75 NT 4,5 5 9,5 j6 3 1 6 4 3 8M 75 NT 4 État de mal 10 j4 0 0 — 0 0 —F 70 DPZ 6 ≥ 10 9 j4 3 0 — 3 0 —M 69 DPZ 7,5 ≥ 10 9 j6 4,5 0 — 4,5 0 —

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Traitement des douleurs réfractaires de la face par SMTr 285

Tableau 3 Impression clinique globale (CGI).

Pathologies Nombre depatients

Très fortementamélioré

Fortementamélioré

Légèrementamélioré

Névralgies trigéminales 7 2 3 22—

scà

mt

tt

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décrit une aggravation des douleurs à leur arrêt ;

Algies vasculaires de la face 4Douleurs post-zostériennes 2

ropathiques chroniques rebelles et notamment, dans lesalgies faciales réfractaires.

Dans notre étude, nous avons obtenus des résultats trèsencourageants. Globalement, la réponse thérapeutique estsatisfaisante autant sur la diminution de l’intensité, dunombre et de la durée des crises, que sur la douleur per-manente. Par ailleurs, l’amélioration globale se reflète parle score moyen du CGI (fortement amélioré) et par la dimi-nution de consommation des antalgiques.

En se référant à l’évaluation à j90, on constate que l’effetantalgique obtenu par les séances quotidiennes, a pu êtremaintenu par les séances d’entretien. La technique a ététrès bien tolérée et les patients n’ont pas rapporté d’effetsindésirables.

Parmi les patients traités dans notre centre, la réponsethérapeutique à la SMTr est meilleure chez les patients sou-frant d’une algie faciale que d’autres douleurs chroniquesrebelles (membre fantôme, lésion de plexus brachial, SDRC,douleurs centrales post-AVC) [13]. Cette constatation a étédéjà évoquée dans une autre étude [14], mais la tailleréduite de l’échantillon limite l’interprétation de ces résul-tats.

Chez les patients répondeurs, la SMTr pourrait sou-lager les douleurs très intenses et obtenir parfois unerémission complète. Nous pouvons citer deux exemplesde patients âgés de 76 et 81 ans qui soufraient desNT chroniques : ils présentaient des véritables étatsde mal avec des difficultés à parler et à se nourrir(l’ouverture de la bouche provoquait des crises insup-portables). Ils ont été tous les deux soulagés par lesséances de SMTr et à j90, ils étaient asymptomatiques.Nous avons obtenu le même résultat chez un patient âgéde 70 ans présentant des crises d’AVF chroniques depuis40 ans.

La plupart des auteurs soulignent les difficultés del’utilisation de SMTr comme traitement à long terme. Eneffet, en pratique clinique, son utilisation limitée pendantles crises intenses réfractaires pourrait s’avérer utile chezles répondeurs. Dans les situations d’impasse thérapeutique,particulièrement chez les patients âgés, une améliorationmême transitoire est très intéressante.

Cela permettrait à certains patients épuisés par des dou-leurs atroces et réfractaires à tout traitement, de passer uncap difficile.

Dans notre groupe de patients, la consommation desmédicaments a été diminuée sensiblement chez les patientsrépondeurs et globalement le coût de cette technique paraîtmoindre que la polymédication. Mais des études médicoéco-

nomiques sur le coût-efficacité de la SMTr sont nécessairespour confirmer cette impression.

L’application du protocole cité pourra nous servir commeun travail préliminaire pour une étude future plus construite

p

1 11 1

ur le plan méthodologique avec des stimulations placebo, yompris la pratique des séances de rappel et une évaluationdouze mois.

Actuellement, dans la pratique clinique, laSMTr est utilisée surtout pour sélectionner les

patients répondeurs à une stimulation corticale :une bonne réponse à la SMTr est associée à des

bons résultats de l’implantation corticale.

Dans ce cadre, il paraît logique de leur proposer la sti-ulation corticale comme un traitement à long terme, mais

ous les patients ne sont pas prêts à en bénéficier.Donc, il est important d’adapter la stratégie thérapeu-

ique cas par cas, selon le tableau clinique, la réponse auraitement, l’âge et le choix du patient.

En se référant à notre expérience modeste, on pourraitroposer les modalités thérapeutiques suivantes :chez les patients soufrant d’algies faciales post-zostériennes réfractaires, on pourrait instaurer précoce-ment ce traitement dans les trois mois après le débutdes symptômes. Cela permettrait chez les répondeurs desoulager les douleurs, diminuer ou arrêter le traitementmédicamenteux et aussi éviter la mémorisation de la dou-leur ;chez les patients présentant des douleurs intenses etréfractaires, la SMTr pourrait trouver sa place pour letraitement des crises ;chez les patients qui sont en attente d’une interventionneurochirurgicale, la SMTr peut s’avérer une thérapeu-tique efficace pour soulager temporairement les douleurssévères ;en cas de récidive des douleurs chez les répondeurs enrémission et en bonne santé, on proposera en premièreintention la stimulation corticale ou un autre geste inter-ventionnel. En revanche, chez les personnes âgées oupoly-pathologiques, la pratique d’une nouvelle série deséances SMTr paraît plus raisonnable ;chez les patients présentant une amélioration stable etrefusant la stimulation corticale, la poursuite des séancesbimensuelles ou mensuelles pourraient s’avérer intéres-sante. Dans cette optique, nous utilisons ce schémathérapeutique pour quelques patients. Mais à moyenterme se posera le problème du moment où l’on doit arrê-ter ces séances et quelle stratégie adopter si le patient

chez les patients qui ont une réponse modérée à faible,la poursuite des séances de maintien n’est pas justifiée.

Par ailleurs, il y a plusieurs problèmes à résoudre sur lelan méthodologique.

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Les études dans la littérature sont trèshétérogènes et les protocoles de stimulationstrès variés (la fréquence, l’intensité, la durée

des trains et inter-trains, le nombre desimpulsions par séance).

Dans cette série, nous avons stimulé l’aire de la face danse cortex moteur. Lefaucheur a décrit un effet antalgiquelus important pour les algies faciales lorsque la stimulationst appliquée sur l’aire adjacente corticale de la main [14].

Par ailleurs, d’autres sites de stimulation sont utilisésans les recherches cliniques. Dans une étude récente chezes volontaires sains, les auteurs ont trouvé une diminutionlus prononcée de la sensibilité à la douleur thermique dea face en stimulant le cortex sensitif [15].

Concernant le rythme des séances, afin de faire perdurert maintenir l’effet antalgique des séances quotidiennes,ous avons pratiqué des séances de maintien dégressives.ais nous avons observé que, chez 38,7 % des patients,

’effet antalgique était moindre quand l’intervalle entre leseux séances de maintien était espacé à un mois. À cetgard, la pratique de séances bimensuelles pourrait s’avérerlus efficace.

La SMTr présente plusieurs avantages : pas d’effetsecondaires, technique non invasive, diminution de la poly-édication.Parmi les inconvénients, on peut citer le temps médical

on négligeable et les contraints liés à la pratique de séancesréquentes.

La seule complication majeure de la technique est larise d’épilepsie. Son incidence est faible, un cas pour milleatients. Pour éviter cet événement, il faut prendre enompte les facteurs de risque et respecter les recomman-ations des experts pour la sécurité des patients [16].

onclusion

otre étude montre que la SMTr peut présenter une alter-ative thérapeutique dans la prise en charge des douleursaciales chroniques réfractaires aux traitements convention-els. Chez les patients répondeurs, cette technique paraîtn outil intéressant permettant d’obtenir un effet antal-ique cumulatif par la répétition des séances, évitant laolymédication et ses effets secondaires.

L’obtention d’une rémission complète ou d’une améliora-ion nette est fréquente. Après le traitement initial curatif,es séances d’entretien sont souvent nécessaire pour main-enir l’efficacité dans le temps, mais leur rythme et leurombre reste à évaluer, de même que la durée de prise enharge.

Les séances bimensuelles d’entretien paraissent plusdaptées pour maintenir l’effet antalgique dans le tempsue des séances mensuelles.

Le coût de cette technique reste à évaluer, mais il paraîtoindre qu’une polymédication.Des études multicentriques sont indispensables pour

onfirmer l’efficacité de SMTr, préciser les paramètres detimulation [17] et les indications.

[

H. Hodaj et al.

onflit d’intérêt

ucun.

éférences

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