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Le ‘ûd Omar Metioui I H ISTOIRE DE DEUX PEUPLES La musique arabo-andalouse est le résultat d'un métissage e musique arabe venue de l'Orient, la musique afro-berbère du Maghreb et la la Péninsule Ibérique avant l'année 7, date ! laquelle "# détroit pour &onquérir l' ndalousie( )n effet, &ette région, terre de brassage ent plusieurs &ivilisations, donne lieu ! une é&losion sans pré &onna*t un développement fulgurant pendant plus de huit siè ndalousie qu'au Maghreb( près le dé&ret d'e+pulsion des Morisques, en ., Maghreb, &et art perdure gr#&e ! l'intér/t que lui portent naissan&e notamment au flamen&o( Il laisse par ailleurs des dans différents fol0lores et dans l'imaginaire populaire es ! lui, devient l'unique défenseur et &ontinuateur de &ette présent( II H ISTOIRE D UN INSTRUMENT QUI A RÉUNI PLUSIEURS PEUPLES Le 'ûd , roi des instruments, &ontinue d'o&&uper une pla&e de tradition musi&ale arabo-andalouse( Instrument de base de l &ommen&e ! fra%er son &hemin dans les genres populaires( )n Orient, une évolution importante dans le 1eu du 2 ûd est initiée par Muh%i d- 4a%dar, ma*tre ‘udiste qui forme en Iraque des élèves qui &onna*tron internationale &omme Mun*r 5a&hir, son frère 6amil, surpris .77, et alman 8hou0r( ve& Mounir 5a&hir le 'ûd sera élevé au rang d'instr soliste gr#&e au ré&ital qu'il donne dans le musée d'ethnom invitation du musi&ologue imon 6arg%( L'enregistrement de )urope, va avoir un impa&t dé&isif sur le devenir de &et in Iraque &:est ;assir hamma qui prend la relève en te&hniques en "unisie et en )g%pte( 8on&ernant &ette é&ole, qui a gagné une grande partie de la former un &ertain nombre d:observations( "out d:abord du ‘ûd a beau&oup souffert de part les modifi&ations apportées dans ans rentrer dans les détails, la résultante de &es altérat ‘ûd ! &elui de la guitare( )n outre, le développement d:un 1 les tier&es et l:o&tave, le 1eu simultanée des &ord &lassiques o&&identales, éloigne le musi&ien spé&ialiste de

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(Texte Omar Metioui)

Le dOmar MetiouiI Histoire de deux peuples

La musique arabo-andalouse est le rsultat d'un mtissage entre la musique arabe venue de l'Orient, la musique afro-berbre du Maghreb et la musique pratique dans la Pninsule Ibrique avant l'anne 711, date laquelle Triq Ibn Ziyd traverse le dtroit pour conqurir l'Andalousie. En effet, cette rgion, terre de brassage entre plusieurs civilisations, donne lieu une closion sans prcdent d'un art musical qui connat un dveloppement fulgurant pendant plus de huit sicles aussi bien en Andalousie qu'au Maghreb.

Aprs le dcret d'expulsion des Morisques, en 1609, et leur exode massif au Maghreb, cet art perdure grce l'intrt que lui portent les autochtones et donne naissance notamment au flamenco. Il laisse par ailleurs des empreintes indlbiles dans diffrents folklores et dans l'imaginaire populaire espagnol. Le Maghreb, quant lui, devient l'unique dfenseur et continuateur de cette tradition musicale jusqu' prsent.

II Histoire dun instrument qui a runi plusieurs peuples

Le 'd, roi des instruments, continue d'occuper une place de prdilection dans la tradition musicale arabo-andalouse. Instrument de base de la musique savante, il commence frayer son chemin dans les genres populaires.

En Orient, une volution importante dans le jeu du d est initie par Muhyi d-Dn Haydar, matre udiste qui forme en Iraque des lves qui connatront une renomme internationale comme Munr Bachir, son frre Jamil, surpris par une mort prcoce en 1977, et Salman Choukr. Avec Mounir Bachir le 'd sera lev au rang d'instrument soliste grce au rcital qu'il donne dans le muse d'ethnomusicologie de Genve sur invitation du musicologue Simon Jargy. L'enregistrement de ce concert, diffus en Europe, va avoir un impact dcisif sur le devenir de cet instrument. Aujourdhui en Iraque cest Nassir Shamma qui prend la relve en enseignant ces nouvelles techniques en Tunisie et en Egypte.

Concernant cette cole, qui a gagn une grande partie de la tendance actuelle, on peut former un certain nombre dobservations. Tout dabord, la sonorit du d a beaucoup souffert de part les modifications apportes dans la facture de linstrument. Sans rentrer dans les dtails, la rsultante de ces altrations rapproche le timbre du d celui de la guitare. En outre, le dveloppement dun jeu vertical qui insiste sur les tierces et loctave, le jeu simultane des cordes et ladoption des uvres classiques occidentales, loigne le musicien spcialiste de lart de la modalit pour le verser dans le monde de la tonalit. La technique du plectre dans lattaque des cordes (zand) est devenue molle et rend le discours musical moins ponctu, inintelligible et sans force expressive.

En Turquie, pendant des sicles le 'd est dlaiss au profil du tanbr (instrument cordes pinces et mtalliques avec un long manche). Au dbut du XXme sicle, apparaissent de trs grands virtuoses du 'd qui rvolutionneront la technique de jeu comme Yorgo Bakanos, Cinucen Tonikorur et Ud Hrant. En Iran, quelques formations commencent intgrer timidement le d.

En Egypte, des interprtes-compositeurs du XXme sicle comme Mohamed Kasabji, Mohamed Abdelouahab, Riad Senbati et Farid al-Atrache vont avoir une grande influence sur les masses populaires arabes et simposeront en matres absolus du 'd qui feront cole. Farid Al-Atrache faisait arracher des hurlements (Allah, Y Ll, Y 'n...) de la poitrine de centaines de spectateurs au moment magique de ses improvisations (taqsm) foudroyantes et innovatrices sur le 'd.

Dans le style de jeu oriental du 'd, au Maroc sera distingu le compositeur et virtuose des annes soixante du sicle pass, Ahmed Al-Baydaoui.

Par ailleurs, le Maghreb possde la particularit d'avoir sauvegard, grce au processus de la transmission orale, un corpus classique de musique traditionnelle savante qui tire ses origines de l'poque de l'islamisation du Nord de l'Afrique et de lAndalousie (VIIme s.). Cet difice musical connatra une volution diffrente de la musique orientale qui subira linfluence des autres civilisations, notamment, la persane et la turque. On peut rsumer brivement les spcificits de l'cole arabo-andalouse par le dveloppement d'une approche mystique travers le concept du tab'(mode), par la prdominance du systme diatonique, par le chant selon la nba et par la prminence de la rythmique musicale sur la mtrique potique.

A vrai dire, dans le Maghreb actuel on assiste la coexistence de deux tendances divergentes. Dune part, nous avons les adeptes de lart traditionnel qui bataillent pour sa prservation et sa divulgation. Dautre part, nous avons les modernistes qui prirent pour modle lcole gyptienne en essayant toutefois dintgrer dans leurs compositions modernes des lments du langage musical propres leurs rgions.

Dans le rpertoire classique, les traditionalistes continuent de pratiquer le 'd arabo-andalou comme la kwtra Alger et Tlemcen, le d 'arb Constantine et en Tunisie paralllement au d sharq (oriental). Quant au d ramal marocain, il est tomb en dsutude vers la moiti du sicle pass. Alors que dans le rpertoire de la chanson moderne ou pro-gyptienne, on emploie uniquement le d prdominant ou d sharq. Le nom de virtuoses traditionnel comme Khamis Tarnan (Tunisie) ou la famille Fergani (Constantine) en ce qui concerne le d arb/tuns, mallem Bahhar (Alger) pour la Kwitra, matres Ahmed Shfi et Mohamed Ben l-Arbi Temsamani pour le d sharq jou avec un style andalou-maghrbin passent inaperus. Donc, dans nos pays du Maghreb, nous avons un problme urgent. Il faut redonner lart traditionnel la place quil mrite dans nos socits en qute de modernisme. Lautre problmatique consiste changer lattitude des orientaux qui sont impermables la culture qui leur arrive de lOccident musulman.

Aujourd'hui, travers le monde plusieurs instrumentistes arabes, turques et occidentaux tentent d'amplifier les possibilits de l'instrument aussi bien dans le domaine de l'excution que celui de la facture. Paralllement, plusieurs cellules de rflexion et recherche scientifique commencent natre aussi bien en Occident que dans les pays arabo-musulmans. Nous ne pouvons que nous rjouir de cette ouverture. Notre espoir est de voir chaque nation arabo-musulmane donner au d une personnalit originale, dautant plus que la richesse se cherche dans la diversit.

III Lart de limprovisation

Limprovisation, mon sens, est pour la musique lquivalent de la posie pour la prose. Cest une forme condense dexprimer les ides. Il faut viter le discours rbarbatif et crer constamment un effet de surprise. Limprovisation consiste donner une nouvelle vie une uvre sans la dtruire. Cette technique sacquiert grce aux mthodes traditionnelles dapprentissage. En effet, ds les premiers contacts avec la musique, lapprenti doit simprgner du chant, du rythme et de la technique instrumentale pour pouvoir dvelopper une mmoire multidirectionelle. Il ne faut surtout pas procder une parcellisation de la matire musicale linstar des mthodes classiques occidentales. Cependant, il ne faut pas perdre de vue lassujettissement de lart de limprovisation aux schmas et rgles imposs par les caractristiques du tab elles-mmes lies lchelle modale, avec ses intervalles propres, et linfluence psychophysiologique quil a sur ltre humain. Lquation quil faut rsoudre consiste, partir des lments prcits, pouvoir crer cette atmosphre spcifique du tab/ maqm tout en respectant les rgles rigoristes de lesthtique tablis par la tradition. Cette tendance permet de diffrencier entre un travail qui tire sa lgitimit de la tradition et entre les multiples tentatives, la mode, qui veulent chapper toute rgle, pour faire lconomie du dur apprentissage, en donnant libre cours leur propre fantaisie. Dans ce dernier cas, limprovisation devient lquivalent de lanarchie. La musique est un art noble, srieux et sublime. Plutt que de semer le dsordre, elle doit nous aider retrouver lquilibre et lever notre me et notre spiritualit. Sinon, elle devient de la perversion.

Glossaire :

al-la (lit. instrument) : rpertoire des onze nba marocaines.

Mzn (lit. mesure ou balance) : Ce terme dsigne le rythme, chacune des cinq parties ou phases rythmiques d'une nba et l'instrument de percussion tr (tambour de basque).

Muwashshah (lit. ornement) : c'est une posie strophique qui rompt avec la mtrique classique arabe. Structure rythmique et multirime, le muwashshah est constitu de stances et d'un nombre variable d'hmistiches.

Muwwl : improvisation libre de la voix sur un mode dfini qui cre un dialogue voix-instrument trs pris par les connaisseurs.

Nba : composition musicale constitue de cinq phases rythmiques (mzn). Elle comporte une srie de pices vocales et instrumentales qui se succdent selon une rythmique et un ordre tablis.

Sam' (lit. audition) : concert spirituel, dsigne le rpertoire des confrries religieuses qui est bas essentiellement sur le chant vocal.

Sana(uvre dart): pice vocale avec une structure bien dfinie. Elle constitue llment principal dans ldifice du mzn.

Tab' (plur. tub') : mode, dsigne l'chelle modale, ses caractristiques ainsi que la raction psychophysiologique qu'elles peuvent dclencher.

Twshya: Pice instrumentale rythme. Elle se place souvent comme deuxime partie du mzn, juste aprs la bugya. Parfois, elle peut intgrer le coprs de la sana.

Zajal (lit. mouvoir) : sorte de muwashshah qui utilise la langue dialectale.

Zwya (lit. angle) : sige d'une confrrie religieuse et lieu de culte.