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Ultimatum hiver 2015

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Page 1: Ultimatum hiver 2015

Le contexte sociopolitique en est un, on le sait, derigueur budgétaire et de déficit zéro. Face à la dette duQuébec qui ne cesse de s’alourdir et qui risque de tout

détruire, i l faut réduire les dépenses. Comment alorsdesservir des services de santé alors qu’on limite leurfinancement? C’est dans cette optique qu’i l faut comprendrechacun des projets de loi. I ls s’inspirent directement de laNouvelle Gestion Publique (NGP), une conceptionparticul ière du travail et de son organisation que l’onretrouve dans les écoles des sciences de l’administration. LaNGP défend qu’un service public et une entreprise privéesont en fait la même chose, soit qu’i ls vendent des services

Ils ont fait les manchettes et suscitent beaucoup derésistance dans le milieu de la santé : les projets deloi 10 et 20 du ministre de la Santé Gaétan Barretteont de quoi nous concerner et nous inquiéter. Maisau-delà des phrases simplistes comme  : «  Ons’occupe des structures, puis des services  », en quoiconsistent ces projets de loi? Comment sont-ils liésaux politiques d’austérité et pourquoi sont-ilsdangereux pour la population ?Nous devons faire autrement… et

nous avons les moyens de le faire !

Le ministre des Finances, CarlosLeitão, a déjà annoncé que laCommission de révision

permanente des programmes al lai t«   devoir trouver  » 3,2 mi l l iards  $ en2015-2016. Les efforts pour revenir àl ’équi l ibre budgétaire sont presqueessentiel lement concentrés sur lesdépenses publ iques du gouvernement.Or, c’est la baisse de ses revenus quiexpl ique en bonne partie la si tuationdéfici taire des finances publ iques. LaCoal i tion opposée à la tari fication et à la

privatisation des services publ icspropose un ensemble de solutionsfiscales pour al ler chercher ces revenusqui permettraient de mieux financer lesservices publ ics et les programmessociaux  : en mettant davantage àcontribution les plus riches et lesgrandes entreprises. En voici quelquesexemples.

Augmenter la contribution desentreprises

L’effort fiscal des entreprises necesse de diminuer. En moins de 15 ans,

PRIVATISATION DE LA SANTÉ

LES PROJETS DE LOI 10 ET 20SAMUEL-ÉLIE LESAGE, ÉTUDIANT À LA MAÎTRISE ENPHILOSOPHIE, CRAA

SUITE EN PAGE 2, VOIR « EN LUTTE » SUITE EN PAGE 3, VOIR « SANTÉ »

VÉRONIQUE LAFLAMME, ORGANISATRICE COMMUNAUTAIRE AU FRAPRU ETMEMBRE DU COMITÉ ACTION ET SUIVI DE LA COALITION OPPOSÉE À LATARIFICATION ET À LA PRIVATISATION DES SERVICES PUBLICS

L'AUSTÉRITÉ N'EST PAS UNE FATALITÉEN LUTTE POUR UN VRAI PARTAGE DE LA RICHESSE!

Tous les jours, la lecture des nouvelles nous montre les impacts dramatiquesdes politiques d’austérité adoptées par le gouvernement libéral de PhilippeCouillard. Pendant ce temps, des milliards de dollars canadiens dorment dansles coffres des grandes banques et dans les paradis fiscaux. À l’heure où lesprogrammes sociaux et les services publics sont plus que jamais attaqués, ilest pressant de mener une lutte pour la redistribution de la richesse. C’est ceque les mouvements sociaux ont commencé à faire avec plus d’intensité dansles derniers mois. À la Coalition opposée à la tarification et à la privatisation desservices publics, cette lutte se concrétise dans la campagne «10 milliards $ desolutions».

Jérémie Dubé-Lavigne

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2 MARS 2015

Austérité. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1

Santé. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1

Fiscalité. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4

Coupures. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 5

Éducation à l'enfance. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 8

Hydrocarbures. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9

Éducation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10

Régimes de retraites. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11

Éditorial. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 12

Dans ce numéro. . .l ’ impôt fédéral sur le revenu desentreprises est passé de 28  % à 15  %,l ’un des plus bas parmi les paysdéveloppés. Le Québec peut récupérerune partie de ces points d’ impôts et irai tchercher 1,2 mil l iards  $ par année1.Augmenter la contribution desentreprises passe aussi par une révisiondes privi lèges fiscaux dont el lesbénéficient et par un grand ménagedans les subventions et dans les créditsd’ impôt accordés par l ’État, ce quipermettrai t au Québec d'al ler chercher1,17 mil l iards  $ par année.

Revenir à une plus grandeprogressivité de l ’ impôt sur lerevenu des particul iers

L’ impôt est essentiel puisqu' i lpermet une fiscal i té progressive ; i l évi teaussi le dangereux gl issement vers le

principe d’uti l isateur-payeur (parexemple  : les frais de scolari té) . Depuis1988, le Québec est passé de 16différents pal iers d’ imposition àseulement 4. Résultat : la progressivi téde l ’ impôt n’est pratiquement plusassumée par les hauts revenus. LaCoal i tion soutient qu’une réel le équitéfiscale passe par l ’augmentation dunombre de pal iers d’ imposition. Cel le-cipermettrai t d ’al ler chercher plus de 1mil l iard   $ supplémentaire par année,sans que les gens à revenus modesteset la majeure partie de la classemoyenne ne soient pénal isé-e-s.

Revoir les dépenses fiscales nebénéficiant qu’aux plus fortuné-e-s

Au Québec, i l est possible dediminuer son revenu imposable à l ’aidede multiples mesures fiscales, al lantdes exemptions et remboursements detaxes, aux déductions, crédits et autresreports d’ impôt. Ces dépenses fiscalesqui ne profi tent, pour la plupart, qu’auxplus fortuné-e-s doivent être revues.L’exemption dont bénéficient les gainsen capital en est un bon exemple.Lorsqu’une personne fait un gain encapital (un profi t) à la vente d'une

action, d 'une obl igation, d’un terrainet/ou d’un immeuble, 50  % de ce revenun’est pas soumis à l ’ impôt. Pourtant,100  % des revenus provenant d’unemploi sont imposables. Cette mesureest donc discriminatoire. Traiter lesgains en capital de la même façon queles revenus de travai l rapporterait 739mi l l ions  $ annuel lement.

Et les banques ?La taxe sur le capital , qui visait à ce

que chaque entreprise contribueminimalement aux finances publ iques aété abol ie totalement en 2011. Legouvernement invoquait alors que lataxe pouvait nuire à l ’ investissementdes entreprises manufacturières. Cetargument ne s’appl ique en rien pour lesentreprises financières, alors pourquoileur faire bénéficier de cet avantage ?Cette année, les bénéfices nets des sixplus grandes banques sont encore une

fois en hausse et s’élèvent à plus de 34mi l l iards  $. Réintroduire la taxe sur lecapital et ce, pour toutes les entreprisesfinancières, permettrai t d ’al ler chercherannuel lement au moins 600 mil l ions  $.

10 mil l iards $ à al ler chercherEn plus des mesures fiscales à

proprement parler, le gouvernementpeut économiser des sommesimportantes ai l leurs que dans lesservices publ ics et les programmessociaux, par exemple, en contrôlant lecoût des médicaments qui gruge unepart grandissante du budget de la santé,en cessant de recourir aux agencesprivées de placement dans lesinsti tutions publ iques de santé, ouencore, en uti l isant les logiciels l ibresdans l ’ensemble de l ’apparei lgouvernemental . M ises ensemble, cesmesures de contrôle des dépenses etces solutions fiscales total iseraient, àterme, 10 mil l iards  $ par année!

Le néol ibéral isme : un désastreEn 1996, on nous a parlé de défici t

zéro, en 2003, de réingénierie, en 2012,de révolution culturel le, en 2014, de

SUITE DE LA PAGE 1: « 10 MILIARDS »

1 Pour plus de détails sur les solutions fiscales mentionnées dans l'article:

Coalition opposée à la tarification et à la privatisation des services publics. Document surles solutions fiscales: 10 milliards  $ de solutions, février 2015

«  En 1996, on nous a parlé de déficitzéro, en 2003, de réingénierie, en 2012,de révolution culturelle, en 2014, derigueur. Les résultats sont désastreux.L’accroissement des inégalités socialess’avère être le seul résultat concret de

l’application de ces politiquesnéolibérales au Québec  »

rigueur. Les résultats sont désastreux. L’accroissementdes inégal i tés sociales s’avère être le seul résultat concretde l ’appl ication de ces pol i tiques néol ibérales au Québec.Avant même que les dernières mesures d’austéri té nesoient annoncées, des mi l l iers de personnes au Québecvivaient sous le seui l de la pauvreté, dans des conditionsde vie où leur digni té étai t menacée. Non seulementl ’austéri té n’est pas une fatal i té, mais nous avons lesmoyens de nous doter de mei l leurs programmes sociauxet de mieux financer les services publ ics pour qu’ i ls soientréel lement accessibles et de qual i té… si on demandeenfin aux plus riches et aux corporations de faire leur justepart. Augmentons la pression, le temps presse pour forcerles ministres Coui l lard, Leitão et Coiteux à al ler chercherl ’argent où i ls ne veulent pas… dans les poches de leurspeti t-e-s ami-e-s provenant du 1%.

Pour plus d’ information :

www.nonauxhausses.org/10-mi l l iards

www. facebook.com/nonauxhausses

Participez à la campagne sur Twitter : #10mi l l iards

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3VOL. 13, NO. 1

à des clients et des clientes qui veulent êtresatisfaits et satisfaites.

I l faut donc gérer les services publics commes'i l s'agissait d'entreprises privées  : chaque dollarinvesti doit en valoir la peine, les ressourceshumaines doivent travail ler au maximum de leurscapacités et la sous-traitance privée est de misepour dynamiser les services. La NGP promet dedonner des services plus efficaces pour moinscher, mais en fait, aucune étude économiquesérieuse ne permet de démontrer cela. En fait,c’est bien l’ inverse qui se produit : les conditionsde travail des employé-e-s se détériorent et l 'onn’arrive pas à contrôler l ’augmentation desdépenses. En d’autres mots, la NGP mènedirectement à la privatisation des servicespublics1.

Appliquée au domaine de la santé, le but dela NGP est de réformer les services de santé surle modèle de l’entreprise privée afin que cesderniers soient plus performants et coûtent moinscher. C’est ce qu’on appelle la privatisation dusystème de santé. En réduisant son financement,on le fait fonctionner comme une compagnieprivée. Ça entraine davantage de coûts et unebaisse d’accessibi l ité, tout cela ayant pour but defaire plaisir au secteur privé de la santé qui rêvede faire du profit sur nos maux.

Le projet de loi 10Le projet de loi 10, Loi modifiant

l’organisation et la gouvernance du réseau de lasanté et des services sociaux notamment parl’abolition des agences régionales, adopté sousle bâil lon le 9 février, promet des économies deprès de 220M$ en fusionnant les 128 Centres deSanté et de Services Sociaux (CSSS) en 33méga Centres Intégrés de Santé et de ServicesSociaux (CISSS). De plus, cette loi abolit lesagences régionales dont la responsabil ité était degérer les différents établissements de chaquerégion administrative du Québec pour confier cesresponsabil ités aux CISSS. Finalement, leministre de la Santé obtiendra de très importantspouvoirs pour s’ingérer directement dansl’administration quotidienne du système de santé,notamment en nommant les responsables desCISSS.

Ce n’est pas la première fois que l’onfusionne en espérant réduire les coûts : en 2004,Phil ippe Couil lard, alors ministre de la santé,fusionna divers établissements pour créer lesCSSS. Tout le réseau de la santé dénonça cesfusions, qui ont engendré beaucoup de confusionet d’augmentation des dépenses, sans pourautant améliorer l ’accès ou la qualité des soins.Fusionner, c’est la même rengaine libérale qui serépète. Cependant, le projet de loi 10 estbeaucoup plus insidieux.

Barrette ne s’en cache pas, le projet de loi 10et la création des CISSS sont inspirés dufonctionnement de la compagnie privéeaméricaine de santé Kaiser Permanente2. Lacompagnie fonctionne avec la méthode Lean,c’est-à-dire que chaque action professionnelledes employé-e-s de la santé est chronométrée àla seconde. Ce régime est extrêmementdéshumanisant et augmente considérablementles risques d’accidents au travail   : le ministreBarrette a l’ intention de l’appliquer à l’entièretédes CISSS.

Aussi, le projet de loi 10 encourage la sous-traitance des services secondaires, comme lacuisine, la buanderie ou l’ informatisation. Cen’est pas pour rien que la Fédération deschambres du commerce du Québec a salué leprojet et a promis la contribution du privé aux

réformes de Barrette. En effet, en créant desmégastructures, on change tout lefonctionnement des anciens CSSS, et au lieud’investir pour créer une nouvelle expertisepublique, on préfère se fier au privé en espérantque ça coûte moins cher. Pourtant, c’estexactement l ’ inverse qui se produit, commel’histoire de la création des CSSS en 2004 ledémontre : cela provoque une augmentation descoûts et une perte d’autonomie des pouvoirspublics.

Le projet de loi 10 met la hache dans lasanté publique4: des réductions drastiques dansla recherche (moins de 2% du budget de la Santéfinance la santé publique, et ce chiffre risqueencore de baisser, alors que l’OrganisationMondiale de la Santé recommande au moins5%5). Or, sur le moyen terme, c’est la capacité dusystème de santé à répondre à des crises et àinformer la population qui baisse. En d’autresmots, les problèmes de santé augmenteront et lapopulation devra fréquenter davantage lescentres hospital iers, ce qui va susciter encoreplus de dépenses.

Finalement, en créant ces mégastructures,on réduit l ’accessibi l ité aux soins, surtout dansles régions. Quant aux pouvoirs accrus duministre, ceux-ci sont démesurés et empêchentla population de participer démocratiquement auxdécisions institutionnelles. La récente crise duCHUM en est un exemple : en uti l isant lechantage et l ’ intimidation, et en s’ingérant dans lagouvernance indépendante de l’ institution, leministre Barrette veut éliminer tous les obstaclesqui se dressent devant lui6.

Le projet de loi 20Selon Barrette, les médecins de famil le ne

travail leraient pas assez. Selon une étuderéalisée par la Fédération des médecinsspécialistes du Québec il y a quelques années,les médecins de famil le (omnipraticiens etomnipraticiennes), travail leraient moins,beaucoup moins, que ce que l'on attend d’eux etelles. L’idée du projet de loi 20, la Loi édictant laLoi favorisant l’accès aux services de médecinede famille et de médecine spécialisée etmodifiant diverses dispositions législatives enmatière de procréation assistée, est simple :imposer des quotas aux médecins de famil le ets’i ls et el les ne les respectent pas, leur salairesera réduit. Barrette ayant avoué que l’étudeavait été falsifiée alors qu’i l était le président dela Fédération, on peut se demander comment i lpeut encore défendre son projet…

De nombreux acteurs et de nombreusesactrices de la santé sont d’accord pour dire qu’i lexiste un problème d’accessibi l ité aux médecinsde famil le au Québec. La solution de Barretteconsiste tout simplement à forcer les médecinsde famil le à travail ler plus. Or, selon elles et eux,les dispositions de la loi 20 les forceraient àn’accorder que 10 minutes par rendez-vous, etles obligeraient à suivre un immense nombre dedossiers en même temps… C'est plutôt lamauvaise distribution des médecins sur leterritoire et le viei l l issement de la population quiexpliqueraient la baisse de productivité desmédecins de famil le.

Non seulement la loi 20 nuit à la qualité dessoins, mais rien ne laisse présager que leuraccessibi l ité sera augmentée. En effet, desmédecins pourraient être davantage tenté-e-s derejoindre le privé et des étudiants et desétudiantes en médecine pourraient décider de sespécialiser plutôt que de travail ler dans desconditions de travail aussi diffici les.

Finalement, la logique de Barrette estparticul ièrement perverse. I l traite les médecinsde famil le de fainéant-e-s et de bébés gâtés etentretient la désolidarisation à leur égard. De lamême manière que cela a été fait aux étudianteset aux étudiants en 2012, i l leur demande leurjuste part.

C’est se payer notre tête : un mouvementcontre l’austérité et la privatisation des servicespublics doit s’organiser coûte que coûte contreles réformes mortifères des libéraux. Nonseulement leur projet est mensonger et voué àl’échec, mais i l s’agit de notre bien-être qui est enjeu. La réduction de l’accessibi l ité et de la qualitédes soins a des effets directs sur les femmes, lesmoins nanti-e-s, les autochtones, les retraité-e-s,les enfants, et alourdit les dépenses en santé.Des solidarités doivent être entretenues avec lemil ieu de la santé pour renverser l ’état actuel deschoses et mettre en place un système de santépublic et véritablement démocratique.

SUITE DE LA PAGE 1: « SANTÉ »

1 Sur la Nouvelle Gestion Publique et ses liensavec la privatisation des services publics :

Merrien, François-Xavier. « La Nouvelle GestionPublique : un concept mythique », Lien social etPolitiques, n. 41, 1999, p. 95-103

ASSÉ. « Chapitre 6 - Les fondements del’austérité budgétaire », À qui profite l ’austéritébudgétaire ?, Argumentaire 2013-2014,http: //www.austerite.org/assets/pdf/fr/argumentaire.pdf, p. 29 à 31

2 Bélair-Cirino, Marco. « Le spectre d’unsuperministre effraie », Le Devoir, 26 septembre2014,http: //www. ledevoir.com/politique/quebec/419566/sante-le-spectre-d-un-super-ministre-effraie

3 Sur la méthode LEAN, voir la recherche del’ASSÉ sur le baccalauréat obligatoire en soinsinfirmiers :

ASSÉ. « Le baccalauréat obligatoire en soinsinfirmiers : un projet nuisible », avri l 2014http: //www.asse-solidarite.qc.ca/wp-content/uploads/2014/05/craa-asse-bacc-obligatoire-en-soins-infirmiers.pdf

ASSÉ. « Évolution des services publics auQuébec, enjeux et perspectives », Argumentaire2014-2015, http: //www.asse-solidarite.qc.ca/wp-content/uploads/2014/09/argumentaire-2014-2015-v1p0.pdf.

4 La santé publique consiste en la recherche ensanté, en sa promotion, ainsi que la préventionet la préparation à d’éventuelles crisessanitaires.

5 Organisme Mondial de la Santé (OMS), « HowMuch Should Countries Spend on Health? »,No. 2, 2003, p. 9-11,http: //www.who. int/health_financing/en/how_much_should_dp_03_2.pdf

Potvin, Louise. « La santé publique canadienneen état de siège », Revue canadienne de santépublique, vol. 105, no. 6, novembre/décembre2014,http: //journal.cpha.ca/index.php/cjph/article/viewFile/4960/2995

6 Bélair-Cirino, Marco. « Guerre ouverte auCHUM » Le Devoir, 7 mars 2015,http: //www. ledevoir.com/societe/sante/433828/guerre-ouverte-au-chum

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L’analyse de la dette publ ique québécoiseque Coui l lard propose ici se situe toutefoisexclusivement du côté des dépenses

étatiques et ne prend pas en compte lesrevenus, qui constituent pourtant unecomposante essentiel le de cette problématique.L’étude des revenus publ ics lui permettrait eneffet de constater une baisse significative del ’argent dont dispose l ’État pour ses différentspostes budgétaires depuis quelques décennies,baisse due principalement à l ’évasion fiscale(3,5 mil l iards échapperaient annuel lement à

Revenu Québec) et aux nombreusesexemptions de taxes et d’ impôts auxquels onteu droit les entreprises et les personnes nantiesau cours des dernières années (réduction dunombre de pal iers d’ imposition, abol i tion de lataxe sur le capital des entreprises, etc. ) . Commel’a indiqué éloquemment Louis Gi l l :«  L’ importante croissance de l ’endettementpubl ic dans tous les pays développés estgénéralement attribuée par les nantis de cemonde à un excès de dépenses publ iques dontles coûts seraient supérieurs aux revenusgouvernementaux d’une société vivant au-dessus de ses moyens. El le est plutôt laconséquence de l ’ instauration de régimesfiscaux qui , au nom de la stimulation de l ’offrede travai l , de l ’épargne et de l ’ investissement,ont consenti d’ importantes réductions d’ impôtsaux entreprises et aux revenus élevés, réduisantainsi les revenus de l ’État et l ’obl igeant àrecourir à l ’emprunt  »3.

Ces différentes réal i tés correspondent auxtrois mécanismes définissant pour FrançoisChesnais, professeur et économiste français,une dette publ ique i l légitime : «  l ’ i l légitimitétrouve sa source dans trois mécanismes : desdépenses élevées ayant le caractère decadeaux faits au capital ; un niveau bas de lafiscal i té directe (impôts sur le revenu, le capitalet le profit des entreprises) et sa très faibleprogressivité ; une évasion fiscale importante  »4.I l suffi t, par exemple, de considérer les créditsd’ impôt al loués à des entreprises rentables(mesure par laquel le cinq mil l iardséchapperaient annuel lement à la fiscal i tégouvernementale5) pour se convaincre que,dans le domaine des finances publ iques et desressources disponibles pour l ’État, i l estdavantage question de distribution asymétriquedes richesses que de pénurie à proprementparler.

La Fédération des travai l leurs ettravai l leuses du Québec (FTQ), à la suite de laCentrale des syndicats du Québec (CSQ), a

récemment invité le gouvernement Coui l lard àreporter d’un an ou deux l ’équi l ibre budgétaire,afin d’éviter notamment que les coupures dansles services publ ics aient des répercussions tropimportantes6. I l nous faut garder à l ’esprit quecette mesure ne résout pas la question de ladette et plus particul ièrement lesproblématiques entourant son remboursement :Comment effectuer ce dernier ? Chez quelsgroupes percevrons-nous les revenussupplémentaires (ou les dépenses en moins) ?Comment ces décisions se répercuteront-el lesau sein de la société  ?

En somme, la fiscal i té, qu’el le soit directe(impôts) ou indirecte (taxes), est bien loin d’êtreune donnée neutre  : elle constitue toujours unindicateur politique. En admettant ce caractèrepol i tique des mesures fiscales propres à unesociété donnée, nous devons alors nous posercertaines questions : opterons-nous pour unefiscal i té progressive, par laquel le les entrepriseset les revenus plus élevés sont appelés àcontribuer davantage au financement de l ’Étatque les citoyens et citoyennes aux revenus plusmodestes, ou adopterons-nous des mesuresrégressives qui contribuent pour leur part àl ’accroissement des inégal ités  ? La réponse auxquestions posées ci-haut, bien loin de se réduireà de simples considérations comptables, doitimpérativement être appréhendée comme l’objetd’une lutte. Nous devons donc nous refuser àl ’emploi de la dette comme levier pour lespol i tiques d’austérité, en nous interrogeant surles conditions actuel les de son accroissement eten luttant contre le chantage néol ibéral duremboursement par le saccage du secteurpubl ic. Gageons que nous serons nombreux etnombreuses à mener ce combat.

Dans une entrevue accordée à L’actualité, Philippe Couillard se présente comme un Premier ministre déterminé à s’attaquer au «  fardeau  »de la dette québécoise par un «  assainissement  » des finances publiques, exercice qu’il compte mettre en œuvre avec un programmed’austérité. Comme il l’avance lui-même : «  On a pris la mauvaise habitude au Québec depuis quelques années de dépenser plus que nosrevenus ne le permettent, et de se rabattre sur l’endettement et la fiscalité pour s’en sortir. On est au maximum. Si nous étions en Europe,ce serait peut-être différent, mais en Amérique du Nord, une dette qui atteint 54 % du PIB, c’est beaucoup  »1.

FISCALITÉ

LA DETTE QUÉBÉCOISE ET SA DIMENSION POLITIQUEEMANUEL GUAY, ÉTUDIANT EN SOCIOLOGIE

«  la fiscalité, qu’elle soit directe (impôts) ou indirecte(taxes), est bien loin d’être une donnée neutre : elle

constitue toujours un indicateur politique.   »

1 Castonguay, Alec. « Entrevue avec Phil ippe Couil lard: “I l faut l ibérer la prochaine génération”».L’actualité, 22 octobre 2014, http: //www. lactualite.com/actualites/politique/entrevue-avec-phil ippe-couil lard-i l-faut-l iberer-la-prochaine-generation

2 La Presse canadienne. « Évasion fiscale: 3,5 mil l iards échappent à Québec », Le Devoir, 6 mars 2015,http: //www. ledevoir.com/politique/quebec/344409/evasion-fiscale-3-5-mil l iards-echappent-a-quebec

3 Gil l , Louis. La crise financière et monétaire mondiale. Endettement, spéculation, austérité, M Éditeur,Québec, 2012, p. 152.

4 Chesnais, François. Les dettes il légitimes. Quand les banques font main basse sur les politiquespubliques, Éditions Raisons d’Agir, Paris, 2011, p. 109.

5 Martin, Éric et Maxime Ouellet. Université Inc. , Lux Éditeur, Montréal, 2011, p. 142.

6 Martineau, Alain. « 2015: la FTQ se mobil ise et exige que l'on repousse l'équil ibre budgétaire »,Huffington Post, 4 janvier 2015, http: //quebec.huffingtonpost.ca/2015/01/04/2015-la-ftq-exige-que-lon-repousse-lequil ibre-budgetaire_n_6413180.html

Page 5: Ultimatum hiver 2015

5VOL. 13, NO. 1, AVRIL 2015

Moins de services publics = plus depauvreté

Au risque de répéter une évidence, lesservices publics représentent un desmoyens dont la société québécoise s’est

dotée pour combattre les inégalités sociales ets’assurer d’un accès à la santé, à l’éducation et àdes services sociaux pour tous et toutes. Lescompressions et les nouvelles réorganisations ensanté et dans les services sociaux, qui pavent lechemin vers l’ instauration du principe d’uti l isateur-payeur et vers la privatisation, constituent uneattaque directe à l’accessibi l ité des services etcontribuent à creuser les inégalités sociales.

Pour le moment, ce sont les services qui sontcoupés (quoi qu’en dise le premier ministre). Queferont les personnes aux prises avec une maladieou vivant en situation de handicap qui subissentactuellement des coupures dans l’aide à domicileou dans le transport adapté? Les personnesaffectées devront soit payer pour compenser cescoupures ou s’en passer, au détriment de leursanté et de leur sécurité.

Pour leur part, les groupes communautairesqui viennent en aide à ces personnes et ceux quifont de la défense collective des droits doiventtoujours faire plus avec très peu de financement.Pour certains, les compressions dans lesministères se traduisent par des coupes directes.

Tarification = inégalitésPendant que le gouvernement Couil lard

coupe un peu partout, la «  révolution tarifaire  »,initiée par le gouvernement Charest en 2010, s’estpoursuivie. Les gouvernements successifs ontchoisi de hausser les tarifs, en invoquant lasupposée urgence d’atteindre l’équil ibrebudgétaire. À la hausse du tarif patrimoniald’Hydro-Québec, à l’ instauration et au maintiend’une taxe santé, à la hausse des frais descolarité et aux augmentations de la Taxe devente du Québec (TVQ), s’ajouteront sous peu denouvelles hausses aux tarifs des Centres de lapetite enfance et des services de garde. En plusd’appauvrir la classe moyenne, toutes cesmesures de fiscalité régressives ont un poidsdémesuré sur le budget des personnes à revenumodeste.

Le pire est à venir pour les programmessociaux

En octobre dernier, le ministre de l’Emploi etde la Solidarité sociale a annoncé des coupesadministratives à l’aide sociale. Le gouvernementCouil lard a annoncé des coupures s’attaquant auxplus pauvres, qui doivent déjà vivre dans uneintenable situation de survie. I l a choisi de ne pasrenouveler les contrats d’intégration au travailpour les personnes handicapées, de geler lessuppléments pour le retour au travail et de couperle Programme d’aide et d’accompagnement socialAction (PAAS) , qui s’adressait aux personneséloignées du marché du travail , vivant avecdifférents problèmes de santé physique etmentale.

Début janvier, les médias ont annoncé qu’unenouvelle vague de coupures dans l’aide socialeétait imminente. Parmi les mesures envisagées,des articles mentionnent la réintroduction de

coupures pour partage de logement. Pourtant,devant les coûts exorbitants des loyers et avecdes prestations si maigres d’aide sociale (616  $pour une personne seule), la cohabitation estsouvent le seul choix pour éviter la rue. Pendantque les vrais profiteurs du système, lesBombardier de ce monde, continuent à détournerdes mil l ions  $ des coffres de l’État, legouvernement choisit encore une fois des’attaquer à ceux et celles qui se serrent déjà laceinture.

Comme le répète le président du Conseil dutrésor, «  tout est sur la table  » dans l’actuelprocessus de révision des programmes. Lestravaux de la Commission permanente de révisiondes programmes influenceront grandement lasuite des choses. Malheureusement, lesannonces des dernières semaines ne sont qu’unavant-goût de ce qui les attend. C’est dans lesprochains budgets que nous aurons une meil leure

idée de l’ampleur des coupes.

Le logement social aussi menacéLe budget 2014-2015 prévoyait des

investissements de 250 mil l ions  $ pour laréalisation de 3000 logements sociaux dans lecadre du programme AccèsLogis Québec.Beaucoup trop peu pour répondre aux besoinscriants des 227  835 ménages locataires duQuébec qui paient plus de 50% de leur revenupour se loger. L’habitation n’a pas été pour autantépargnée par les mesures d’austérité.

Ainsi, les sommes consacrées à «  l ’aide àl’amélioration de l’habitat  » ont été réduites de 28mil l ions  $. Les effets concrets de cette annonce : i ln’y a eu aucun financement 2014-2015 pour lesprogrammes RénoVillage et Réparationsd’urgence qui s’adressent tous deux à despropriétaires à très faible revenu demeurant enmil ieu rural. I l en est de même de RénovationQuébec, qui subventionne les rénovationsmajeures faites par des propriétaires delogements locatifs en mil ieu urbain. Certainesvil les, dont Montréal, uti l isaient jusqu’ici une partieimportante de ces sommes pour bonifier leurcontribution à la réalisation de logements sociaux.Enfin, le programme Logements adaptés pouraînés autonomes, déjà suspendu en 2013-2014,reste sur la glace pour au moins une autre année.

En janvier 2015, la Société d’habitation duQuébec a annoncé sans crier gare la fin d'unesérie de mesures d'aide financière qui servaientau développement des projets de logementssociaux, dans le cadre du programme AccèsLogis.Cela risque de compromettre le développementde projets qui étaient déjà en cours et pourlesquels des personnes mal-logées attendentimpatiemment. Les régions dites éloignées,bénéficiant d’une enveloppe spécifique pour tenircompte des coûts plus importants pour ydévelopper des logements sociaux, sontparticul ièrement touchées par ces modifications.

Tout cela pourrait cependant n’être qu’unavant-goût de ce qui attend l’habitation dans leprochain budget. Si on se fie aux rumeurspersistantes, les pires hypothèses peuvent êtreenvisagées, dont l ’arrêt, la suspension ou laréduction du financement de nouveaux logementssociaux avec AccèsLogis. À terme, le gouvernementCouil lard pourrait même être tenté de le remplacerpar des formules passant par le marché privé quisont loin d’être aussi complètes et permanentesque le logement social.

Non seulement les budgets alloués auxlogements sociaux, à l’adaptation des logementset à l’aide sociale ne doivent-i ls pas être coupés,mais i ls méritent au contraire d’être sérieusementaugmentés pour répondre plus adéquatement auxbesoins et se conformer aux exigences du Pacteinternational des droits sociaux, économiques etculturels auquel le Québec a accepté d’adhérer en1976. L’une de ces exigences est justement d’agir

«  au maximum des ressources disponibles  » pour«  assurer progressivement le plein exercice desdroits reconnus dans le Pacte  ». Dans cetteoptique, notre regroupement se battrait pour unmeil leur financement des programmes sociaux etune meil leure redistribution de la richesse.

Vers une lutte historique pour laredistribution de la richesse?

Les attaques sans précédent contre lesprogrammes sociaux et les services publics sonten train d’engendrer une mobil isation qui pourraitêtre historique contre les politiques néolibérales.Les nombreuses mobil isations de l’automne n’ontpas suffi à ébranler le gouvernement Couil lard. Lalutte devra se poursuivre et s’intensifierrapidement, cet hiver et ce printemps. En janvier,les membres du FRAPRU ont tenu des visitescollectives visant les membres du Conseil desministres pour dénoncer toute coupe éventuelledans AccèsLogis. En février, i ls et el les ontparticipé aux actions de la Coalition opposée à latarification et à la privatisation des servicespublics, notamment à la semaine d’actionsdérangeantes du 23 au 27 février 2015. LeFRAPRU a appelé à une action sur ses propresbases, à Montréal, le 25 février. De plus, i l a déjàvoté de se joindre au mouvement de grève socialedu 1er mai et invite les autres groupes à faire demême. Enfin, le 21 mai, une large manifestationnationale donnera le coup d’envoi d’un camp dedurée indéterminée pour le droit au logement, aucentre-vi l le de Montréal. C’est à suivre, mais nousnous verrons assurément dans la rue!

Infos :

www.frapru.qc.ca

www.facebook.com/frapru. logement

#logementundroit

COUPURES

LES DROITS SOCIAUX ENCORE ATTAQUÉSVÉRONIQUE LAFLAMME ET FRANÇOIS SAILLANT, FRAPRU

Les politiques d’austérité touchent l’ensemble de la population. Cependant, les personnesles plus pauvres, majoritairement des femmes, sont doublement, voire triplement affectées,et ce de diverses manières.

«  Les attaques sans précédent contre les programmessociaux et les services publics sont en train d’engendrerune mobilisation qui pourrait être historique contre les

politiques néolibérales.   »

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Le premier ministre du Québec, Phil ippe Couil lard, et sa ministre de lafamil le, Francine Charbonneau, annonçaient en novembre passé qu'àcompter du 1er avri l 2015 sera aboli le tarif unique de frais de garde, fixé à7  $ par jour. S’ajoutera alors à ce tarif de base - qui augmente lui-mêmepour atteindre 7,30  $ - un montant pouvant atteindre jusqu’à 20  $ par jour.Ainsi, une famil le gagnant de 75 000  $ à 100 000  $ brut devra débourser12  $ par jour, par enfant. Le montant sera gonflé à 15  $ par jour pour unefamil le gagnant 122 000  $ et atteindra jusqu’à 20  $ pour une famil le dont lerevenu annuel est supérieur à 157 000  $.

Hypocrisie libéralePrésentée par le gouvernement l ibéral comme étant une mesure

équitable et progressiste, cette modulation tarifaire ne peut avoir d’autreeffet que d’aggraver les disparités économiques entre les vrais riches, quecette politique budgétaire n’affecte que très peu, et le reste de la population- c’est-à-dire l ’ immense majorité - qui, el le souffrira assurément de cettehausse de tarif. L’argument pré-fait de pseudo-gauche, qui justifie cettemodulation de par son caractère «  équitable  », témoigne d’une hypocrisiemonstre de la part des institutions dominantes. Statistique Canada annonceque le revenu médian net des famil les biparentales québécoises estd’environ 76  000  $1. La famil le typique biparentale de 2 enfants sera alors,d’ici avri l 2015, contrainte de débourser 6000  $ par année en frais degarderie - si on considère qu’un enfant fréquente la garderie en moyenne250 jours par an - contre 10 000  $ pour la famil le dont le revenu annuel estde 500 000  $. La dépense relative étant beaucoup plus importante dans lapremière famil le que dans la deuxième - 7,9  % pour la famil le 1 contre 2  %pour la famil le 2 -, l ’argument d’une modulation juste pour toutes et toustombe à l’eau. Effectivement, cette mesure, plutôt que d’être juste, fait porterun poids fiscal encore plus gros aux famil les à modeste revenu, cesdernières devant maintenant débourser plus sous le prétexte fallacieuxd’une hausse généralisée et équitable. Suivant une logique demarchandisation de l’éducation, ces coupes en mil ieu préscolaires sont unfardeau de plus pour cette classe moyenne qui tend à disparaître.

La condition des femmes une fois de plus compromiseEn fragil isant sa politique famil iale, le gouvernement l ibéral provoque de

facto un retour en arrière incontestable en ce qui a trait à la condition desfemmes. Considérant d’abord qu’une femme, à travail égal, ne gagnetoujours que 76  % du salaire d’un homme aujourd’hui au Québec, i l estmalheureusement bien évident que cette dernière sera plus durementtouchée par une augmentation des tarifs en garderie. Ce genre de réformeforce généralement plusieurs femmes à consacrer plus d’heures au travailafin de compenser la hausse de tarif. À cette augmentation des heures de

travail s’ajoute une surcharge de travail domestique, tâchesmalheureusement encore trop souvent portées par les femmes. Parconséquent, ces dernières sont confrontées à une contrainte de temps quien amène certaines à abandonner leur place sur le marché du travail .Effectivement, on observe un déclin de la participation des femmes sur lemarché du travail dans les États où la contribution famil iale au service degarde est rehaussée2. Une augmentation de cette contribution a alors pourimpact direct de rendre encore plus diffici le la concil iation travail-famil le. Cetimpact est encore plus prononcé lorsqu’i l s’agit de femmes monoparentales,car ces dernières doivent consacrer plus de temps à assumer seules lestâches famil iales et bénéficient souvent d’un compte en banque plusvulnérable.

À l’heure des compressions budgétaires et des coupes dans lesservices publics, l ’argument d’une hausse équil ibrée et juste ne passe pas.Les Québécois et les Québécoises en ont assez de se faire mentir au nomd’un néolibéralisme patriarcal, et i l est aujourd’hui temps de le faire ressentir.Le mépris n’aura qu’un temps.

Suivant la tradition néolibérale de politiques austères et de coupes aveugles, le Parti Libéral duQuébec (PLQ) annonce aujourd’hui la modulation des frais de garderie en fonction du revenufamilial, abolissant de ce fait l’universalité des garderies à 7$. Fidèle à ses habitudes, le PLQprofite une fois de plus du mensonge de la dette pour saigner davantage la collectivité et ce, auprofit d’intérêts particuliers.

1. Statistique Canada, Enquête nationale des ménages 2011, Revenu médian après impôt pour une famil le comptant uncouple avec enfants à la maison

2. Conseil du Statut de la Femme, Impact d’une modulation de la contribution parentale aux services de gardesubventionnés sur la participation des femmes au marché du travail , https: //www.csf.gouv.qc.ca/wp-content/uploads/avis-impact-dune-modulation-de-la-contribution-parentale-aux-services-de-garde-subventionnes.pdf, p.20

ÉDUCATION À L'ENFANCE

LA PESTE LIBÉRALE : LES CENTRES DE LA PETITEENFANCE AFFECTÉSRAPHAELLE DIONNE-LUTFY, ÉTUDIANTE EN QUESTIONS INTERNATIONALES

«  cette mesure,plutôt que d’être juste, faitporter un poids fiscal encore plus gros auxfamilles à modeste revenu, ces dernièresdevant maintenant débourser plus sous le

prétexte fallacieux d’une haussegénéralisée et équitable.   »

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Le modèle d'investissement des mines et du pétrole tente toujours deminimiser les coûts et de retarder l 'entretien au maximum parce que,de toute façon, ces ressources sont non renouvelables : à terme, les

projets sont toujours destinés à fermer. Rappelons que les deux derniersdéversements majeurs survenus aux États-Unis, May Flower en Arkansas etKalamazou au Michigan, ont été découverts par des citoyens et descitoyennes et non par les entreprises, qui se vantent pourtant chaque fois depouvoir déceler une fuite dès la première goutte. Ces deux déversementsreprésentent ensemble 42 minutes d'uti l isation du pipeline d'Énergie Est etont coûté 5 mil l iards en décontamination sur une période de 5 ans. En cas dedéversement, l 'ampleur du projet proposé ne pourra se solder que par unecatastrophe environnementale. Accepter Énergie Est, c'est participer àl'écocide en cours dans l'Ouest canadien et sur la planète. Sans compterqu'un tel projet scarifie le territoire, coupe inconsidérément au travers desécosystèmes et perpétue le vol des terres autochtones qui sont hôtes dessables bitumineux et de plusieurs territoires que prévoit traverser le projet.

La stratégie générale des magnats pétroliers vise à exporter vers lesdeux océans ainsi qu'aux États-Unis. Un grain de sable s'est cependantglissé dans l'engrenage. Le Président Obama a opposé un veto au projetKeystone XL et plusieurs communautés amérindiennes, dont les Haisla, lesGitga’at et les Gitxaala, bloquent depuis des années deux projets depipelines : Northern Gateway et Kinder Morgan Trans Mountain2. Reste l 'Est,où s’affairent de nombreux lobbys, soupant avec nos politiciens et nospoliticiennes pour les convaincre des avantages du projet. D'ai l leurs, nousavons eu droit cet automne à une fuite de leur plan de communicationpublique qui avait fait tol lé par son menu : corruption, désinformation,tentative d'acheter l 'avis biaisé de scientifiques et de personnalités influenteset salissage de la réputation des groupes environnementaux3. Au mêmemoment, le gouvernement l ibéral fait la sourde oreil le aux revendicationscitoyennes, préférant une fois de plus se graisser la patte en défendant lesintérêts des corporations à l'encontre du bien commun4. Quant à l'opposition,le Parti Québécois est de mèche, tandis que la Coalition Avenir Québec s'estdepuis longtemps donné « Legault » dans les développements pétroliers.

Rappelons que ces entreprises pétrolières pratiquent l ’évasion fiscale enprofitant de législations complaisantes5, spolient nos territoires, détruisent laTerre et bénéficient pourtant de 2,8 mil l iards en subventionsgouvernementales annuelles6. I l est donc surprenant d'entendre les mêmesrengaines au sujet de la dette et du manque d'argent dans les coffres de

l’État pour justifier un autre cycle de coupes austères dans les servicespublics. Le projet vise un accroissement i l l imité de la consommation. Et audiable l 'environnement qui, de toute façon, n'entre généralement dans leséquations économiques que sous la forme d'une opportunité de profits, unecontrainte légale ou un modèle d'affaires particul ier. Pourtant, la journaliste etauteure Naomi Klein a bien synthétisé l’enjeu : en suivant ses règlesactuelles, le capital isme est en voie de détruire les civi l isations etpossiblement l 'humanité7. À nous d'en prendre soin, de forcer la main par descamps, des marches, des mobil isations citoyennes, jusqu'à s'attaquer auxinfrastructures, comme l'ont fait quatre manifestantes à Montréal le 7 octobre20148.

Énergie Est représente un projet majeur de développement de l'exportation du pétroledes sables bitumineux qui vise à accroître de 40% son exploitation. L'idée est derecycler un gazoduc quarantenaire vétuste entre l’Alberta et l’Ontario, pour ensuitel'allonger jusqu'aux maritimes. Complété, il devra charrier 1,1 million de barils depétrole par jour. Pour donner une idée du volume que cela représente, le naufraged’Exxon Valdez en 1989 a déversé environ la moitié de cette quantité et a pollué 2100km de côtes1, soit le double de la longueur du Saint-Laurent.

HYDROCARBURES

HALTE LÀ! ÉNERGIE ESTPIERRE-ÉLIE HUPÉ, ÉTUDIANT EN SOCIOLOGIE

1 Curl, HC, Barton L et al. (1992). Oil spill case histories, 1967-1991 summaries of significant U.S. and international spills. NOAA, Hazadous Materials Responseand Assessment Division, http: //response.restoration.noaa.gov/sites/default/fi les/Oil_Spil l_Case_Histories.pdf, p.82-86.

2 Pour l 'opposition au Northern Gateway, se référer entre autre à:

Cryderman, Kelly. « First Nations leaders prepared to fight Northern Gateway pipeline », The Globe and Mail, 17 juin 2014,http: //www.theglobeandmail.com/news/politics/first-nations-leaders-prepared-to-fight-northern-gateway-pipeline/article19214050/

En ce qui concerne le Kinder Morgan Trans Mountain : Meissner, Dirk. « Kinder Morgan's Trans Mountain expansion opposed by island First Nation », CBC News, 25novembre 2014, http: //www.cbc.ca/news/canada/british-columbia/kinder-morgan-s-trans-mountain-expansion-opposed-by-island-first-nation-1.2848863

3 Gerbet, Thomas. « Fuite majeure de la stratégie de TransCanada », Radio-Canada, 18 novembre 2014, http: //ici . radio-canada.ca/nouvelles/national/2014/11/18/001-fuite-strategie-communication-transcanada-pipeline.shtml

4 On pourra me reprocher le peu d'évidence qui supporte cette interprétation de la situation. Cependant, la commission Charbonneau a démontré exemplairementla propensions des élu-es à appuyer des projets proposés par leur ami-es contribuant aux caisses électorales. De l'autre côté, TransCanada est si famil ière avecces pratiques frauduleuses que l'entreprise les a inclus dans sa stratégie.

5 Réseau pour la justice fiscale au nom du Collectif Échec aux paradis fiscaux. « Les paradis fiscaux : un enjeu incontournable », Mémoire soumis à la Commissiond’examen sur la fiscalité créée par le Gouvernement du Québec, http: //www.echecparadisfiscaux.ca/wp-content/uploads/2014/10/M%C3%A9moire-CommissionFiscalit%C3%A9-FINAL.pdf

6 Radio-Canada. « Des subvention de 2,8 mil l iards de dollars par année », Radio-Canada, 3 novembre 2010, http: //www.radio-canada.ca/nouvelles/Economie/2010/11/03/015-subventions-petrol ieres-canada.shtml

7 Nixon, Rob. « Naomi Klein’s “This Changes Everything” », The NewYork Times, 6 novembre 2014, http: //www.nytimes.com/2014/11/09/books/review/naomi-klein-this-changes-everything-review.html?_r=0

8 Radio-Canada. « Enbridge: coup d’éclat à la raffinerie de Suncor à Montréal-Est », Radio-Canada, 7 octobre 2014, http: //ici . radio-canada.ca/regions/montreal/2014/10/07/002-suncor-manifestation-raffinerie-montreal-est.shtml

«  un tel projet scarifie le territoire, coupeinconsidérément au travers des

écosystèmes et perpétue le vol des terresautochtones  »

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Depuis juin, le gouvernement a imposé des coupures aux universitéstotalisant 203,6 M$1. Dans les cégeps, nous sommes rendus à 40M$ de coupures, portant celles-ci au montant total de 109 M$ depuis

2011. À défaut de pouvoir augmenter les frais de scolarité, les directions descégeps augmentent les frais pour les activités sportives et culturelles,abolissent les projets en développement durable et en entrepreneuriat,congédient des employé-e-s précaires et sont même rendues à congédierdes employé-e-s permanents2. Bref, on ne sait plus où couper. À défaut depouvoir couper dans le gras, on se saigne!

On se retrouve donc avec une situation où une vaste majorité desétablissements d'enseignement supérieur sont en situation de déficitbudgétaire. Or, la loi interdit aux cégeps et aux universités de faire un déficit.Plutôt que de leur permettre de déroger à cette loi, le gouvernementCouil lard imposera aux établissements incapables de joindre les deux boutsl 'obligation de fournir un plan de restructuration visant à rétablir l 'équil ibrebudgétaire. I ls seront si nombreux à devoir le faire que, en coulisse, onprévoit un véritable cauchemar administratif3.

La question qu'i l faut se poser est la suivante : quelles mesures n'ayantpas déjà été envisagées par les directions collégiales et universitaires serontcontenues dans ces fameux plans de restructuration? Voici quelques pistesde réflexion.

1) Dégel des frais afférentsÀ défaut d'augmenter les droits de scolarité, les établissements

pourraient revendiquer de pouvoir percevoir plus de frais chez les étudiantset les étudiantes. Depuis 2007, les universités sont soumises à un règlementgouvernemental qui l imite l 'augmentation des frais afférents. Ce règlementpourrait bien tomber si les recteurs et les rectrices haussent suffisamment leton. De même, la «  gratuité  » prévue dans la loi sur les cégeps4 pourrait êtremaintenue en théorie alors que les frais de diverses natures pourraientaugmenter à 200$, 300$, voire 500$ par session, là où ils sont actuellementl imités à environs 120$.

2) Fermeture de programmes, de départements et de facultésVous étudiez en arts, en littérature, en sciences sociales, en musique ou

en philosophie? I l y a de fortes chances que votre programme ne soit pasrentable pour votre établissement. C'est le cas notamment de la faculté dethéologie de l'Université de Sherbrooke, qui fermera ses portes le 1er mai20155. Avec ce plan de redressement, i l y a fort à parier que la mission desuniversités et des cégeps, qui est de transmettre la culture et le savoir auxgénérations montantes, en prenne pour son rhume.

3) Négociation de coupures dans d'autres secteurs que l'éducationpostsecondaire

En novembre dernier, le président de la Fédération des cégeps aaccusé «  le Premier Ministre Phil ippe Couil lard de renier sa promesseélectorale d'épargner l 'éducation dans la lutte contre le déficit zéro6  ». Est-cea dire qu'i l serait prêt à négocier pour que M. Couil lard tienne sa promesseen gérant les coupures dans les autres services publics? I l semble que celan'ai l le pas contre sa mentalité puisqu'i l affirme comprendre Phil ippe Couil lardet être conscient «  qu'i l faut redresser les finances publiques du Québec7  ».En voilà un qui aurait besoin d'une bonne leçon de solidarité et d'un petitcours d'économie.

En 2012, les directions des cégeps et des universités étaient contre nous :lockout, recours à la police sur les campus, courriels dissuasifs, non-reconnaissance des votes de grèves. Désormais, au nom de la survie de nosinstitutions et donc de l'équilibre budgétaire, ces mêmes directions chercheront ànous imposer des mesures qui feront de nos établissements des centrescommerciaux, où les étudiants et étudiantes les plus riches seront les mieux servi-e-s et où seules les formations rentables seront offertes. Nous ne sommes pas dupes.Gare à vous!

1 Chouinard, Tommy. «  Nouvelles coupes de 30 millions dans les universités  », LaPresse, 13 novembre 2014,http://www.lapresse.ca/actualites/education/201411/13/01-4818463-nouvelles-coupes-de-30-millions-dans-les-universites.php

2 Chouinard, Tommy. «  Cégeps : des coupes supplémentaires de 19 millions  », LaPresse, 13 novembre 2014,http://www.lapresse.ca/actualites/education/201411/13/01-4818595-cegeps-des-coupes-supplementaires-de-19-millions.php

3 Chouinard, Tommy. «  Nouvelles coupes de 30 millions dans les universités  », LaPresse, 13 novembre 2014,http://www.lapresse.ca/actualites/education/201411/13/01-4818463-nouvelles-coupes-de-30-millions-dans-les-universites.php

4 Québec. Loi sur les collèges d’enseignement général et professionnel, L.R.Q.chapitre C-29, Éditeur officiel du Québec,http://www2.publicationsduquebec.gouv.qc.ca/dynamicSearch/telecharge.php?type=2&file=/C_29/C29.html

Voir en particulier les paragraphes 24 à 26.

5 Dauphinais-Pelletier, Camille. «  La faculté de théologie de l'UdeS fermera sesportes  », La Presse, 22 décembre 2014 http://www.lapresse.ca/la-tribune/sherbrooke/201412/22/01-4830272-la-faculte-de-theologie-de-ludes-fermera-ses-portes.php

6 Chouinard, Tommy. «  Nouvelles coupes de 30 millions dans les universités  », LaPresse, 13 novembre 2014,http://www.lapresse.ca/actualites/education/201411/13/01-4818463-nouvelles-coupes-de-30-millions-dans-les-universites.php

7 Chouinard, Tommy. «  Nouvelles coupes de 30 millions dans les universités  », LaPresse, 13 novembre 2014,http://www.lapresse.ca/actualites/education/201411/13/01-4818463-nouvelles-coupes-de-30-millions-dans-les-universites.php.

ÉDUCATION

HAUSSE DES FRAIS DE SCOLARITÉ: PRISE 2PIER-YVES CHAMPAGNE. ÉTUDIANT À LA MAÎTRISE EN PHILOSOPHIE

La grève étudiante de 2012 n'aura pas été menée en vain si nous prenons acte de l'exigence de solidaritéqui s'impose à nous pour la lutte à venir. L'ennemi a appris de ses erreurs : il ne nous affronte plus deface. Au lieu de s'en prendre directement aux étudiants et aux étudiantes, le gouvernement est en train deresserrer l'étau sur les directions des cégeps et des universités afin d'obliger celles-ci auxcompromissions les plus basses. Nos directions d'établissement nous diront qu'elles n'ont pas d'autreschoix afin de sauver nos institutions. Ceci dit, il serait bien d'être au fait de la stratégie de notreadversaire pour arriver à la contrer. La voici donc.

«  À défaut d'augmenter les droits descolarité, les établissements pourraientrevendiquer de pouvoir percevoir plus defrais chez les étudiants et les étudiantes.   »

Jérémie Dubé-Lavigne

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11VOL. 13, NO. 1, AVRIL 2015

L’Ultimatum est produit par le comité journal de l’ASSÉ, ses collaboratrices et ses collaborateurs. Il est monté avec le logiciel libre Scribus etimprimé par les travailleuses syndiqué-e-s de Payette & Simms.

Rédaction : Sophie Cardin, Pier-Yves Champagne, Raphaelle Dionne-Lutfy, Emanuel Guay, Pierre-Élie Hupé, Véronique Laflamme, Samuel-ÉlieLesage et François Sail lant.

Révision : Olivia Bédard-Wien, Gabriel le Bellemare, Marie-Ève Desroches, Gabriel Dumas, Camil le Gagné, Émil ie Gagné, Céline Hequet, OlivierRousseau, Félix Thibaud et Claudia Cachay-Osorio

Graphisme : Marie-Ève Desroches, Herman Goulet-Ouellet et Pascal Shepard Rheault

Photos : CatDancing, Jérémie Dubé-Lavigne, John Greenwood, Liz McCarty, Wikipedia

Tirage : 20 000 exemplaires

Dépôt légal à la Bibl iothèque Nationale du Québec : ISSN 61999

Pour nous joindre: [email protected]

Les causes de ce clivage économique sontdirectement issues des inégalités systémiques dontsont victimes les femmes tout au long de leur vie

professionnelle. Comme l’explique Mme Naud, elles ontgénéralement un salaire moins élevé à la base que celuides hommes. Les raisons sont multiples. D’abord, malgréles efforts pour atteindre une pleine équité salariale, laségrégation professionnelle persiste et les femmesoccupent des emplois moins bien rémunérés. En plus, lesemplois dits atypiques, c’est-à-dire qui ne sont pasaccompagnés de protection sociale, sont tenusmajoritairement par des femmes.

En plus d’avoir un salaire moindre, les femmes sontparfois désavantagées par leur responsabil ités famil iales,que ce soit sur le plan maternel ou lorsqu’el les jouent unrôle d’aidante naturelle auprès d’un proche en besoin. Eneffet, i l est fréquent qu’el les ne reçoivent aucunecompensation de la part de leur employeur-e durant cettepériode ou encore que ces moments «  d’inactivité  » nesoient pas pris en compte dans le calcul du montant deleurs pensions, pour les femmes qui adhèrent auxrégimes complémentaires de retraite. I l est impératif derappeler que l’espérance de vie des femmes est plusélevée que celle des hommes. Cela signifie qu’el lesdoivent vivre plus longtemps avec beaucoup moinsd’argent.

Pour assurer l ’égalité entre les sexes chez les retraité-e-s, i l serait nécessaire d’assister à plusieurs réformes.D’abord, assurer un meil leur salaire aux emploistypiquement féminins et réduire le nombre d’emploisatypiques. I l faudrait aussi donner de la valeur au travailnon-rémunéré mais socialement nécessaire que ce soit enle rémunérant ou en le valorisant aussi chez les hommes. Finalement, i l faudrait que l’État augmente sa contribution dans les pensions versées auxretraité-e-s, les montants actuels étant loin d’être suffisants pour assurer une bonne qualité de vie à nos aîné-e-s.

En conclusion, pour se prémunir d’une précarité à la retraite, il est plus que nécessaire que nos assurions une solidarité entre les générations. Malheureusement,l’épargne individuelle nous est actuellement présentée par notre gouvernement comme étant la seule issue possible. Au contraire, c’est en faisant un trait surl’individualisme et le sexisme qu’il sera possible d’assurer une certaine égalité entre les sexes à la retraite.

En raison de la période de crise actuelle concernant les régimes de retraite, il setrouve plus que pertinent de partager les propos tenus par Marie-Josée Naud lors de ladernière édition de l’Université féministe d’été de l’Université Laval. Madame Naud estconseillère au service de l’éducation pour la FTQ et membre du conseild’administration de la Régie des Rentes du Québec. Lors de sa conférence, ellesouleva la disparité entre les revenus des femmes et des hommes au moment de laretraite. Il suffit de jeter un petit coup d’œil aux chiffres pour s’en apercevoir. En effet,après la retraite, le revenu moyen des hommes s’élève à 42 103$ alors que celui desfemmes n’est que de 24 064$.

RÉGIMES DE RETRAITE

QUÊTE D’UNE RETRAITE PLUS JUSTESOPHIE CARDIN, ÉTUDIANTE EN ANTHROPOLOGIE

«  En effet, après la retraite, le revenu moyen deshommes s’élève à 42  103  $ alors que celui des

femmes n’est que de 24  064  $  »

Page 12: Ultimatum hiver 2015

Depuis les derniers mois, le Parti libéral est une véritable bénédiction pour les caricaturistes du Québec.En effet, il enfile scandales et bourdes diplomatiques à un rythme plutôt décoiffant. Que l’on pense àl’affirmation à propos des écoles secondaires de l’ancien Ministre de l’éducation, Yves Bolduc, selonlaquelle «  [i]l est permis de faire des fouilles à nu, à une seule condition, il faut que ça soit trèsrespectueux1  » ou encore aux tweets délicats du bon Dr Barrette adressés aux omnipraticiens etomnipraticiennes : «  Si vous n’êtes pas heureux en CLSC, allez ailleurs et libérez-vous2.   » On ne sait plussi on doit en rire ou en pleurer.

ÉDITORIAL

NOS AQUIS VALENT PLUS QUE LEURS PROFITSCOMITÉ JOURNAL

On comprend donc que l’équipe libérale se formalise peu dela grogne populaire face à son plan de «  rigueur  »budgétaire (pour ne surtout pas dire «  austérité  »). Depuis

l ’automne et l ’hiver derniers, les mouvements communautaires,syndicaux et étudiants ont entamé une escalade des moyens depression. Le 31 octobre, nous étions des dizaines de mil l iers dansles rues, alors que 82 000 étudiants et étudiantes étaient en grèvepour l ’occasion3. Le 9  novembre, des rassemblements ont eu lieudans plusieurs vil les du Québec pour protester contre la haussedes frais de services de garde. Le 17, plusieurs centrescommunautaires étaient «  fermés pour cause d’austérité  »4. Le 29,une deuxième manifestation monstre avait l ieu, rassemblant plusde 125  000 personnes, à Montréal et à Québec.

Cette année, le 9 février, plus d’une quinzaine de bureaux dedéputés étaient occupés par quelques 500 mil itants et mil itantesde la CSN pour protester contre l’adoption sous bâil lon du projetde loi 10, visant une restructuration sauvage du réseau de lasanté. Lors de la semaine d’actions de perturbation organisée parla Coalition opposée à la tarification et à la privatisation desservices publics, qui s’est déroulée du 22 au 27  février, unecentaine d’actions ont eu lieu un peu partout à travers le Québec5

(voir page centrale). De plus, la plupart des apparitions publiquesdes libéraux sont désormais perturbées, que soit celle d’YvesBolduc à la chambre de commerce du Montréal métropolitain oucelle de Phil ippe Couil lard à l’Institut maritime du Québec àRimouski.

Le gouvernement continue cependant de faire la sourdeoreil le, trop occupé qu'i l l 'est à massacrer les services publics à latronçonneuse. Nous nous devons d’intensifier la pression. Aumoment de mettre sous presse, quelques 50  000 étudiants etétudiantes sont en grève générale. Du côté du personnelenseignant, certains syndicats votent en faveur de la grève socialedu 1er  mai (au moment de mettre sous presse, celui du Cégep deSherbooke s’était doté d’un tel mandat et 7 autres syndicatss’apprêtaient à voter sur cette question), tandis que d’autres visentà obtenir un droit de grève légale à l’automne 2015, tel que celui deMarie-Victorin. Certaines associations étudiantes collégiales ont égalementadopté des mandats de solidarité afin d’entamer une grève simultanément àcelle des syndicats de leur établissement.

Le mil ieu de la santé, quant à celui-ci, est des plus mobil isés. Les CSSSde Laval, d’Ahunstic-Montréal-Nord, de Bordeau-Cartiervi l le-St-Laurent et duSud-Ouest, de même que l'hôpital Ste-Justine, sont en train de tester lalégalité de grèves inversées. Les CSSS de Sept-Îles, de Minganie et deManicouagan détiennent des mandats de grève légale pour la négociationde leurs conventions collectives de même que des mandats de grèvesociale contre l’austérité.

Les fronts se font communs. Dans les prochaines semaines, plusieursoccasions seront essentiel les à l’essor du mouvement. Le 2  avri l aura lieu lamanifestation nationale de l’ASSÉ «  Nos acquis valent plus que leursprofits  ». Au moment de mettre sous presse, plus de 80  000 étudiantes etétudiants prévoient être en grève pour la journée. Le 11  avri l , à Québec, sedéroulera la Marche Action Climat à l’occasion de la rencontre du Conseil dela Fédération, celui-ci regroupant les premiers ministres des provinces etterritoires du Canada, au sujet des changements climatiques. Le 1er mai, unappel à la grève sociale a été lancé, et les étudiants et les étudiantes serontrejoint-e-s par les travail leurs et les travail leuses dans les rues. Ceprintemps est un ultimatum. Aux mesures d’austérité imposées par legouvernement Couil lard, nous ripostons, et riposterons. Nous n’avons pasfroid aux yeux. Ceci est bel et bien une menace, si notre gouvernements’entête à faire la sourde oreil le, nous irons des rues à la grève généralei l l imitée.

«  On comprend donc que l’équipe libérale seformalise peu de la grogne populaire face à sonplan de "rigueur" budgétaire (pour ne surtout pasdire austérité). Depuis l’automne et l’hiver derniers,les mouvements communautaires, syndicaux et

étudiants ont entamé une escalade des moyens depression.   »

Qu’est-ce qu’une grève inversée?Ce type de grève repose sur la loi des services essentiels. Les

services publics doivent maintenir un minimum de 90% de leurseffectifs sur le plancher en cas de grève. Or, ce 90% semblerarement respecté à l’heure actuelle. Cela implique que, lorsqu’unegrève est déclenchée, le gouvernement est contraint de fournir deseffectifs supplémentaires afin de respecter sa propre loi.

1 Gervais, Lisa-Marie. « Bolduc défend les fouil les à nu d’élèves », Le Devoir,18 février 2015, http: //www. ledevoir.com/societe/education/432137/bolduc-dit-oui-a-une-fouil le-a-nu-a-l-ecole-mais-i l-faut-que-ce-soit-tres-respectueux

2 Daoust-Boisvert, Amélie. « Ras-le-bol des médecins contre Barrette », LeDevoir, 27 janvier 2015, http: //www. ledevoir.com/societe/sante/429997/ras-le-bol

3 Theuri l lat-Cloutier, Arnaud. « La plus grande mobil isation sociale depuis le «printemps érable », Ricochet, 3 novembre 2014

4 Bourgault-Coté, Guil laume. « Les organismes d’aide appellent à l’aide », LeDevoir, 17 novembre 2014,http: //www. ledevoir.com/politique/quebec/424101/austerite-les-organismes-d-aide-appellent-a-l-aide

5 La Presse canadienne. « Semaine d'actions dérangeantes: un succès selonles organisateurs », La Presse, 1er mars 2015,http: //www. lapresse.ca/actualites/201503/01/01-4848434-semaine-dactions-derangeantes-un-succes-selon-les-organisateurs.php

Jérémie Dubé-Lavigne