12
Une nouvelle méthode de détermination du flux de chaleur convective à partir de mesures de température et de vitesse du -vent à deux niveaux Son application à la mesure de l’évaporation et sa mise en oeuvre en Tunisie 1. - Bases théoriques et mise en oeuvre Ch. RIOU Directeur de Recherches à I’ORSTOM II. - Mesure du flux de chaleur sensible à. partir de la température de surface du sol nu dans le sud Tunisien Ch. RIOU * et R. CHARTIER ** * Directeur de Recherches 2 I’ORSTOM ** Technicien Hydrologue 2 I’ORSTOY RÉSUMÉ Dans la première partie sont rappelées les bases théoriques du calcul du flux de chaleur conoectiue. L¶au.teur propose ensuite une méthode de calcul basée sur la mesure des écarts de température et de vitesse du vent entre deux niveaux seulement, qu’on peut rapprocher du calcul simplijé proposé par B. ITIER (1980). La comparaison avec le calcul complet par les intégrales de PATJLSON est tout à fait satisfaisante. Dans la dewxième partie, cette approche est utilisée en. introduisant la température de la swrface du. sol, dans le sua tunisi.en. En l’absence d’étraporation, il est possible de comparer ce calcul à la détermination directe du jlux de chaleur convec- tioe à partir du ray0nnemen.t net et du j’u~ de chaleur clans le sol ; l’accord entre les deux évaluations est satisfaisant. ABSTRACT : A new method of determkation of the atmospheric sensible heatiflux from the measurements at two Zevels of temperature and zuind-speed. Its application to the evaporati.on. measurement and i,ts i,mplementation In Twnisia. I. Basic assumptions and implementation. II. Measurement of the atmospheric sensible heat-flux from the surface temperature of a bare soi1 in the south- tunisian. In the jirst part, basic assumptions of atmospheric sensible heat-flux calculations are era.mined. Then, a simple calculation is use& with temperature a.nd wind measurem.ents at two levels only ; this mgthod cari be compared with ITIER's formulation (1980). Results are in a. good agreement zoith PAULSON'S integrated jlux fu.nctions. In a. second part, this approach, is used for a south-tunisian bare soil, but surface temperature is introducecl here. Energ balance (for a dry soil) is in a good agreement zvith this approach. Cah. O.R.S.T.O.M., sér. Hylrol., ml. XVIII, no 1, 1981 3

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Une nouvelle méthode de détermination du flux de chaleur convective à partir de mesures de température et de vitesse du -vent à deux niveaux

Son application à la mesure de l’évaporation et sa mise en œuvre en Tunisie

1. - Bases théoriques et mise en œuvre Ch. RIOU

Directeur de Recherches à I’ORSTOM

II. - Mesure du flux de chaleur sensible à. partir de la température de surface du sol nu dans le sud Tunisien

Ch. RIOU * et R. CHARTIER **

* Directeur de Recherches 2 I’ORSTOM ** Technicien Hydrologue 2 I’ORSTOY

RÉSUMÉ

Dans la première partie sont rappelées les bases théoriques du calcul du flux de chaleur conoectiue. L¶au.teur propose ensuite une méthode de calcul basée sur la mesure des écarts de température et de vitesse du vent

entre deux niveaux seulement, qu’on peut rapprocher du calcul simplijé proposé par B. ITIER (1980). La comparaison avec le calcul complet par les intégrales de PATJLSON est tout à fait satisfaisante. Dans la dewxième partie, cette approche est utilisée en. introduisant la température de la swrface du. sol, dans le

sua tunisi.en. En l’absence d’étraporation, il est possible de comparer ce calcul à la détermination directe du jlux de chaleur convec-

tioe à partir du ray0nnemen.t net et du j’u~ de chaleur clans le sol ; l’accord entre les deux évaluations est satisfaisant.

ABSTRACT : A new method of determkation of the atmospheric sensible heatiflux from the measurements at two Zevels of temperature and zuind-speed. Its application to the evaporati.on. measurement and i,ts i,mplementation In Twnisia.

I. Basic assumptions and implementation. II. Measurement of the atmospheric sensible heat-flux from the surface temperature of a bare soi1 in the south-

tunisian. In the jirst part, basic assumptions of atmospheric sensible heat-flux calculations are era.mined. Then, a simple calculation is use& with temperature a.nd wind measurem.ents at two levels only ; this mgthod cari

be compared with ITIER's formulation (1980). Results are in a. good agreement zoith PAULSON'S integrated jlux fu.nctions. In a. second part, this approach, is used for a south-tunisian bare soil, but surface temperature is introducecl here. Energ balance (for a dry soil) is in a good agreement zvith this approach.

Cah. O.R.S.T.O.M., sér. Hylrol., ml. XVIII, no 1, 1981 3

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(Ch.) Riou

0

Ri g U

z

7

L

0-b L k

CP H

HO zf

Q S E

ZO

SYMBOLES UTILISES

Température potentielle Nombre de Richardson Accélération de la pesanteur Vitesse du vent Coordonnée verticale Contrainte de cisaillement Masse spécifique de l’air Vitesse de friction - échelle de vitesse Echelle de température Longueur de Monin et Obukhov - échelle de longueur Constante de Karman Chaleur spécifique de l’air à pression constante Flux de chaleur convective Formulation du flux H à la neutralité Valeur moyenne de z sur l’intervalle zi, ze = (z1z2)1/a Rayonnement net Chaleur conductive échangée entre le sol et l’atmosphère Evaporation Parametre de rugosit i

1. - Bases théoriques et mise en œuvre

1.1. INTRODUCTION

On peut distinguer les différentes méthodes expérimentales utilisées pour obtenir l’évaporation suivant qu’elles utilisent le bilan hydrique du sol (ou d’une ret.enue d’eau) et son évolution au cours du temps., le bilan d’énergie combiné avec la mesure du rapport de BOWEN (chaleur sensible 1 chaleur latente dans l’atmosphère) ou la déter- mination directe des flux ; cette dernière méthode a longtemps rebuté les utilisateurs éventuels, à la fois par ses fondements théoriques souvent remis en cause, et par un dispositif expérimental et un traitement des données assez lourds. Pendant la dernière décennie, grâce à quelques expérimentateurs obstinés, cette dernière voie d’appro- che s’est révélée tout à fait opérationnelle. Dans un souci de simplification, tout récemment B. ITIER (1980) et. Ch. Rrou (1981) ont proposé un dispositif expérimental simple, et ont montré que l’évaluation du flux de chaleur ainsi obtenue restait suffisamment précise pour répondre aux exigences des utilisateurs.

Dans la première partie de cet article, nous rappellerons les bases théoriques sur lesquelles se fondent Ies calculs, puis nous justifierons le dispositif expérimental préconisé ; dans une deuxième partie, nous donnerons

, un exemple d’application de la méthode proposée, situé dans le Sud tunisien, qui introduit en même temps une variante, par l’utilisation de la température de la surface du sol.

1.2. RAPPELS DE RÉSULTATS ANTÉRIEURS

Une des grandes difficultés dans l’étude des transferts d’énergie dans l’atmosphère réside dans le fait qu’à côté de la turbulence qui assure la diffusion des tourbillons, des forces de pesanteurs (dues à la stratification ther- mique) interviennent qui peuvent favoriser les échanges verticaux (cas de l’instabilit6, où l’air chauffé par la sur- face du sol tend à s*élever, tandis que I-air plus froid situé au-dessus s’abaisse) ou les contrarir (stabilité de Pair due à l’inversion nocturne de la température près du sol).

4 Cah. O.R.S.T.O.M., SE~. Hyhrol., vol. XV-III, na 1, 1981

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Une nouvelle merhode de détermination du jluw de chaleur comective

Si l’on admet que la CC particule 0 est un petit volume d’air thermiquement isolé, elle peut se trouver lors d’un déplacement vers le haut, adiabat’que par définition, so.it plus dense que l’air ambiant et tend à redescendre, soit moins dense et tend à continuer son mouvement, ce qui caractérise la stabilité ou l’instabilité. Quand la particule conserve la même densité que l’air ambiant, l’atmosphère est dite (t neutre )) et dans ce c.as son gradient thermique correspond évidemment à celui d’un mouvement vertical adiabatique.

1.2.1. Tempdruture potentielle

On définit la température CC potentielle )) 0, comme celle de l’air sec amené adiabatiquement à une pression de référence, (en général 1 000 mb) ; s’il n’y a pas de condensation, ceci reste valahle pour de l’air humide et la c particule u conserve donc une température potentielle invariable. Dans les équations de diffusion, c’est donc en toute rigueur la température potentielle qui doit intervenir, puisque la turbulence tend à établir dans l’air une température décroissant suivant le gradient adiabatique, et non à l’uniformiser.

1.2.2. Nombre de Richardson

En 1920, RICHARDSON compare les puissances fournies par les forces de viscosit; et les forces de pesanteur, introduisant avec leur rapport un nombre sans dimension Ri, qui joue ainsi le rôle d’un critêre de stabilité et de turbulence.

Ri = (g/W (WW / @/iW (1) Quand Ri est positif les forces de pesanteur atténuent la turbulence. Ri = o correspond à la neutralité.

1.2.3. Théorie de MONIN et OBUKHOV

Après d’autres approches plus ou moins empiriques du problème de la turbulence d’un fluide thermiquement stratifié, MONIN et OBUKHOV (1954) p osent les bases d’une théorie qui est depuis très utilisée.

LTtilisant l’analyse dimensionnelle les auteurs définissent des (C échelles )) de vitesse, température et longueur :

u+ = (T/P)‘/2 (2) e+ = - (‘/h) WP 4 (3) L = - UtW (gP) (H/'P 4 (4)

A partir de ces trois paramètres et de z, une seule variable indépendante sans dimension peut être définie, z/L. Toute caractéristique de la turbulence doit dépendre alors de z/L.

On a par exemple, pour l’équation (2)

(WW / (U+N4 = F (z/L) et après multiplication de chaque membre de l’équation par z/L

(kz/u+) @u/W = @m (z/L) De même :

(z/%) (ao@) = @h (Z/L) On en tire :

ae -ZZZ 8Z

- H @h/Pcp k z u+

Ri = (z(L) (@h( @m2)

L’objectif de nombreux expérimentateurs a été ensuite de préciser la forme des fonctions @, et ah.

(5)

(6)

(7)

(8)

1.2.4. DiLgérentes expressions de CI& et @h

Un examen des différentes formes proposées pour cl&, et @h a été réalisé en 1974 par A. J. DYER : il en ressort que celles qui semblent les meilleures à l’auteur sont (DYER et HIC~, 1970) :

Pour l’instabilité z/L < 0 CD, = (1 - 16 z/L)-1/4 (9) @h = (1 - ‘6 z/L)-I~~ ('0)

Cah. O.R.S.T.O.kf., sér. H~drol., ml. XVIII, no 1, 1981 5

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(Ch.) Riou

Pour la stabilité z/L > 0 Qrn = @ù. = 1 + 5 z/L

La forme @ ma = @h, pour l’instabilité implique, pour z/L < 0 : Ri = z/L

Ceci a été vérifié par la plupart des expérimentateurs.

(1’)

(‘2)

1.2.5. Calcu.ls des jlux à partir des projls - Intégrales de PAULSON

Les équations précédentes permettent d’obtenir les flux de chaleur, quantité de mouvement {et vapeur d’eau, en introduisant une échelle d’humidité) à partir d’un dispositif expérimental assez lourd, puisqu’il exige pour la détermination des gradients un ensemble de capteurs échelonnés à différentes hauteurs au-dessus de la surface étudiée.

PAULSON (1970) a calculé dans le cas de l’instabilité et à partir de (9) et (IO), les fonctions :

1, = @,dz -

Z et Ih =

s

(Q,dz - Z

fonctions qui permettent d’évaluer H et, u+ à partir de mesures de u(z) et 0(z) :

1, = Log z - qrn

Ih = Log z - $Jh

x = (1 - 16 z/L)r/”

$,=2Log~+Log’*--2hrctgx+%

gJa ZZZ 2 Log v

On a alors : U(z) = (u+/q I?mlz~

ecz) - eo = e+ [I&: et

H = pcI, k u+ e+ (‘8)

Un autre procédé de calcul introduit une valeur initiale de L i, ce qui permet de calculer H puis L i + 1 à partir de (4), et par itération de déterminer L final.

Le dispositif expérimental et les calculs peuvent cependant rebuter nombre d’observateurs. d’où la recherche de méthodes plus simples à mettre en ceuvre, et à résoudre numériquement.

1.2.6. Cas de la, neutralitb

z/L=O,~oitx=ldans(l5),I,,=I~=Lg o a, et l’on retrouve l’équation bien connue de THORNTHWAITE- HOLZMAN (1939).

H, = - pcDk2 A0 . AU/[Log (z,/z,)]” (‘9)

On a également comme expression de Ri, que nous noterons R

R = (zr zz)r/e (g/‘B) AO Log (z2/zl)jAU- (20)

1.2.7. Hypothèse de PRIESTLEY (1960)

A partir des équations (5) et (‘ï), on peut écrire :

H = - p~pk2 z2 (de/&) (supZ)j~, %, (21)

6 Cah. O.R.S.T.O.M., se?. Hydrol.. ïol. XVIII, no 1, 1981

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Une nouvelle mbthode de dbtermination du AU.~: de chaleur conwctiuc

et en combinant avec (8) H = pcpk2 z2 pepzp (g/e)w jz/q-1/3 (~~-313

PRIESTLEY introduit le nombre sans dimension :

(22)

H+ = k2 I+I-V Qh-3/3 (23)

De résultats expérimentaux, il conclut que pour - z/L > 0,025, H+ est constant, et qu’on peut alors intégrer facilement l’equation (22) soit :

pcD lA013/e (g/e)“” H+ H = 33/” (q-1/3 - Q-1/3 313 ) (24)

Dans cette expression, le vent a disparu, et l’on a pratiquement :

H = cte IAR]eP

L’auteur distingue donc deux régimes : - la convection forcée pour - z/L < 0,025, - la convection libre pour - z/L > 0,025, où l’expression (24) peut être utilisée, ce qu’a fait A. J. DPER

(19644) avec des résultats satisfaisants, en prenant H * = 1.3, bien que PRIESTLEY proposait 0,9. L’équation (24) est une importante simplification ; l’indépendance de H avec le vent avait d’ailleurs été prévue

pour les fortes instabilités par PRANDTL (1932) puis OBUKHOV lui-même (1946). Cependant, les expérimentteurs divergent sur la valeur de H+ ; d’autre part, DYER (1965) et BUSINGER (1966)

ont établi expérimentalement pour @h, dans le cas des fortes instabilités, une forme en 1 z/L I-r/“, plutôt qu’en 1 z/L l-r/3, cette dernière impliquée par H+ = cte ; c’est ce résultat d’ailleurs qui justifie l’expression de Q, dans (10).

Il n’en reste pas moins que si l’on explicite dans H+ la fonction @rl par (IO), on trouve :

H” = ks 1 z/L I-r/2 (1 - 16 z/L)3/*

et l’on constate que pour - z/L compris entre 0,025 et 1, H+ varie peu (1 à 1,3).

1.3. UNE MÉTHODE DE CALCUL DE HA PARTIR DE MESURES I DEUX NIVEAUX

En 1980, B. ITIER calcule à partir des intégrales de PAUL~• N H/H, statistique propose une expression de la forme :

et R en fonction de z/L; et par ajustement

H/H,, = 1 + b 1 R 1”

b et n sont des constantes diff&entes suivant le régime d’instabilité.

En 1981, Ch. RIOU montre, par voie analytique, qu’on a une très bonne estimation de H en écrivant, quand ze/zr n’est pas trop grand, et dans le cas de l’instabilité :

pop (g/e)v 1 ae 13/2 Ht H = 33/” (zl-1/3 _ z3-1/3)3/2

H+ = kl ] z+/L l-1/2 (1 - ‘6 z+/L)3!4

(25)

H+ représente donc la valeur moyenne de H+ sur l’intervalle 1 zr/L, ze/L 1 : ainsi peuvent s’expliquer des r&ultats expérimentaux divergeant sur la valeur de H+, puisque celle-ci dépend du domaine d’instabilité pendant les expé- riences. L’auteur met l’équation (25) sous une forme équivalente :

H = H, (1 - 16 z*/L)V’

dont la formule proposée par B. ITIER constitue une valeur approchée. (26)

Comme par ailleurs z+/L peut être confondu avec R, tant que z2/zl n’est pas trés grand, l’expression (26) prend la forme :

avec H = k, A0 . AU (1 - k, Ae/AU”)W (27)

k, = - pcp k2/[Log (z2/z#

k, = 16 Z+ (de) Log (za/zr)

Cnh. O.R.S.T.O.M.,s&. Heydrol., vol. XVIII, no 1, 1981 7

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Une fois les niveaux x1 et zs fixés, k, et lis sont pratiquement des constantes. Sous cette forme, H devient aisément calculable à partir de A0 et AU, nécessitant uniquement deux niveaux de mesure.

B. ITIER reprenant ses premiers calculs, propose alors une autre forme approchée de (27).

H = k, AO . AU + k, 1 Af!I ]11/6 1 AU I-a/3 (28)

Les expressions (27) et (28) conduisent à des valeurs numériques très proches, et toutes deux fournissent des valeurs de H très peu différentes de celles que donnerait le calcul complet à partir des intégrales de PAULSON (précision supérieure à 4so’,o) ; le dispositif expérimental devient simple : des thermocouples en série placés dans de petits abris adéquats fournissant AO, deux anémomètres aux mêmes niveaux donnant AU.

1.3.1. Mise en œuvre de la méthode

Le choix des deux niveaux de mesure est déterminé par quelques contraintes : 1) Le rapport za/zr ne peut être trop élevé, ce qui est exigé par la méthode de c.alcul. 2) zs/zr ne doit pas être trop faible, les écarts A0 et AU devant être obtenus avec une précision acceptable. 3) za ne peut être trop élevé, si l’on veut définir la nature de la surface d’échange. Des valeurs de zs/zr allant jusqu’à 8 sont acceptables. Actuellement sur la station expérimentale de Tunis-Mornag les hauteurs adoptées sont x1 = 25 cm, zg = 100 cm,

soit zs/z, = 4. H est alors calculé par :

H en cal cm-s mm-r

AU en m/s.

H = - 0,144 A0 . AU (1 - 0,375 A0/AU2)3/4

0 est supposé constante (290 ok) ainsi que p (1,2 x 10~~ gcm-“).

1.3.2. Simplijïcations possibles

1.3.2.1. Près de la neutralité

Quand z/L tend vers 0, on peut employer une valeur approchée de (26) :

H #Ho(1 -12z+/L) (29)

Cette même approximation peut être effectuée sur @~>m et ah :

%a#1+4z/l

ah #1 + 841 Ce qui conduit a :

H # Ho [l - 12 Az/L . Log (z,/zr)] (30)

AZ = z2 - z1

Quand zs/zl n’est pas grand (< 8), les expressions (29) et (30) sont équivalentes; on a ainsi une expression de la forme :

H = k, AI3 . AU (1 - k, AO/AUn) avec

OU

k, = 12 z+ (g/B) Log (zs/zr)

k, = 12 AZ (g/O)

Dans l’exemple numérique cité, nous aurions avec les unités considérées :

k, = 0,28 OU

k, = 0,30

8 Cah. O.R.S.T.O.M., sér. Hydrol., vol. XVIII, no 1, 1981

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Une nouaelle méthode de dt%ermination du jlm de chnIeur convcctitre

1.3.2.2. Dans un intervalle réduit d’instabilité

L’équation (25) peut se mettre sous la forme :

%+ peut être considéré comme une constante, si à l’intérieur de Iïntervalle 0,025 à 1, -z+/L ne varie pas notablement : dans le cas contraire le choix d’une valeur moyenne (H-t = 1,2) peut encore se justifier.

Avec zr = 25 cm, z2 = 100 cm, nous aurions :

H = 0,136 .i?+ 1 A0 ]sP

avec H+ = IV2 : H = 0,16 1 AR [sP cal cm-e mn-r

1.3.3. Meswre de I’évaporation

L’équation du bilau d’énergie : Q=H+E+S

nous indique qu’il est possible de déterminer E, à partir de Q, H, S.

- Q peut être mesuré sans difficultg avec un pyrradiomètre différentiel, actuellement d’uu prix modéré. - S peut être obtenu à l’aide de profils thermiques, méthode que nous préférons à l’emploi de fluxmètres peu

fiables: la détermination de la chaleur spécifique des différentes couches du sol s’est souvent ramenée dans nos expériences à celle d’une valeur moyenne C pour l’ensemble du profi ; le choix de nuits où le vent est faible ou nul nous permet en effet d’écrire Q = S, ce qui détermine C.

Les profondeurs des capteurs sont actuellement sur la station du Mornag en cm : -1, -3, -6, -11, -187 -30, -50, et la soudure de référence est placée à 1 m. Il faut noter que sous une végétation active les flux de chaleur dans le sol sont relativement réduits.

1.3.4. Avantages de cette méthode

Comparée à la méthode du bilan d’énergie / rapport de BOWEN, celle qui est proposée ici présente deux avantages :

1) Elle évite la mise en ceuvre de capteurs de température ((humidifiés )) avec aspiration. L’expérience a montré la nécessité de contrôles périodiques nombreux, ce qui est une contrainte ; 1’ d’autre part le dispositif.

aspiration nécessaire alourdit

2) L’équation utilisée dans la méthode du bilan d’énergie / rapport de BOWEN est de la forme :

E = (Q - 9 / (1 + a)

Ce qui implique de combiner des valeurs instantanées Q, S et p : le flux de chaleur instantané est difficile à évaluer avec précision, et ces termes présentent parfois une variabilité assez forte. Ici, H, S et Q peuvent être totalisés séparément. En.particulier le bilan peut être fait pendant le jour, ce qui réduit la mesure de S à deux profils thermiques seulement, ou même sur 24 h, en négligeant S et en calculant H de nuit par une équation valable en conditions de stabilité.

Dans la deuxième partie de cet article, nous indiquerons une variante de la méthode décrite ici avec intro- duction de la température de la surface vérification expérimentale.

J les résultats obtenus dans le Sud tunisien constitueront également une

Cah. O.R.S.T.O.M., sér. Hydrol.,twl. XVIII, no 1, 1981 9

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(Ch.) Riou et (R.) Chartier

II. - Mesure du flux de chaleur sensible à partir de la température de surface du sol nu dans le sud Tunisien

2.1. DISPOSITIF EXPÉRIMENTAL

Le dispositif installé dans le Sud tunisien près de Gabes ‘ï sur un sol sableux a faible taux de couverture végétale permettait d’obtenir les données suivantes :

- rayonnement net Q (pyrradiometre différentiel), - flux de chaleur dans le sol, S, à partir de profils thermiques, - température de surface 0s : mesure directe par thermocouples et thermometrie infra-rouge, - vitesses du vent aux niveaux 22, 33, 56, 100, 200 et 4400 cm, - écart des températures entre les niveaux 7 et 181 cm : t)ï-0181, - température de l’air à 7 cm : l$. Ce dispositif a été décrit dans deux publications antérieures (voir reférences 7 et 15).

(1) Dispositif de mesure du flux de chaleur :

- 2 anbmomètres a,25 et 1 m - 5 thermocouples en sbrie (204 microvolts par de&) avec sou-

dures placées dans des micro-abris à 0,25 et 1 m

* ATP CNRS no 651-2337.

10

(2) Détail d’un micro-abri

- Station du BIornag (Tunisie).

Photo R. Chartier

Cnh. O.R.S.T.O.M., sér. Hydrol., zwl. XVIII, no 1, 1981

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Une nouvelle méthode de détermination du jlux de chaleur conurctive

Les conditions expérimentales étaient en fait déterminées en fonction d’une approche différente de celle qui est décrite dans la première partie. L’utilisation de la température de surface présente cependant un grand intérêt dans la mesure où les méthodes de la télédétection permettent d’obtenir cet élément.

Nous allons montrer d’abord comment ces données peuvent permettre d’utiliser la méthode décrite précédem- ment, puis nous comparerons les résultats obtenus à la mesure du flux de chaleur convective obtenue par I’équa- tion du bilan d’énergie, en l’absence d’évaporation.

2.2. COMPARAISON ENTRE f$-f& ET 6s-e7

Des valeurs moyennes de BS, 0, et H,,, ont été calculés sur des périodes d’une demi-heure, en mai, juin et juillet.

Une relation linéaire apparait entre B,-RI,, et 0s-1& de la forme : --

6$-e,,, = 0,194 (es-e,) + 0,21

r = 0,964,

Sans imprécision notable on peut écrire plus simplement :

fs&, = 0,21 @s-ë,) OU

- Ae = 0,21 40s

La figure (1) met en évidence cette relation.

2.3. EVALUATION DE LJI,,-U,

De nombreux profils do vent ont été effectués, et très souvent dans des conditions très voisines de la neutralité, ce qui a permis de calculer la hauteur de rugosité zo.

Dans ce cas, on a en effet : u+ = 0,070 u300

soit

z. = 0,66 cm

La figure (2) indique la relation entre LJ+ et Ueoo ; U+ est obtenu à partir de la vitesse moyenne du vent à 6 niveaux sur des périodes d’une demi-heure cn mars: avril, mai, juin et juillet : l’équation de régression :

u, = (U+/k) (Log 2 - Log zo)

est déterminée par la méthode des moindres carrés. Pour les faibles instabilités, on a vu qu’on pouvait écrire :

Uz = (U+/k) [Log Wo) + 4 (z - 4/Ll soit

U,,, - U, = (U,/k) [Log (181/7) + 696/L]

U 200 = W/k) Pg W'%3) + 8O'Fl On admettra alors, L étant grand devant 800 :

U,,, - U, # U,oo,Log (181/7)/% W+o)

AU # 0,57 U~OO

2.4. CALCUL DE H

Les niveaux des mesures de référence sont ici 181 et 7 cm, soit z3/z1 = 26. Le calcul de Ri à partir des inté- grales de PAULSON montre qu’on peut encore confondre Ri et R? qui devient ici

avec AU en m/s.

R = 0,127 Af3/AUa

R = - 0,025 Atls/Usoo”

Cah. O.R.S.T.O.M., ser. Hydrol., vol. XVIII, no 1, 1981 11

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(Ch.) Riou et (R.) Chartier

Fig. 1. - Comparaison entre 8, - 0, et 8, - 8,,,

Fig. 2. - U* = F (U& au voisinage de la neutralité

12 Cah. O.R.S.T.O.M., sér. Hydrol., ml. XVIII, no 1, 1981

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Une nouaelle me’thode de d&rmination du jIuz de chaleur convective

1.5. CAS DES FAIBLES INSTABILITÉS

La presque totalite des mesures effectuées en mai, juin et juillet ont été réalisées dans des conditions de faible instabilité avec -z+/L nettement inférieur à 0?025 ; on applique alors la formule approchée :

H = H, [l - 12 AZ (g/fI) A0/AU2] qui devient ici :

H en cal cm-* mn-r U ZOO en m/s.

H = 0,313 A@, U200 (1 + 0,446 Af$$J,,,")

2.6. CAS DES INSTABILITÉS PLUS FORTES

Quelques mesures le 9 mai, correspondent à instabilité plus forte (- R atteignant 0,2). L’hypothèse permet- tant le calcul de AU à partir de Uzoo n’est, plus valable? mais il est possible alors d’adopter l’équation (25) ou la vitesse du vent disparaît. La valeur choisie pour H+ soit alors avec les unités précédentes :

a été de 1,2 (valeur moyenne sur l’intervalle d’instabilité),

H = 0,35 x 10-z (A0@/2 ’

2.7. COMPARAISON DE H CALCULÉ AVEC Q-S

Les journées pendant lesquelles les calculs ont été effectués sont situées en période sèche et chaude : mai, juin et juillet. Pendant cette période l’évaporation est très faible, les dernières pluies ont été de 5 mm le 6 mai ct 3 mm le 1 er mars. On peut ainsi comparer H et Q-S, ce qui constitue, les deux estimations étant indépendantes, une vérification de la démarche suivie.

Les journées retenues ont été les 9 mai, 28,29,30 juin et le 3 juillet, journées qui présentaient les caractéristiques suivantes :

Jour Température maaimum Vent maximum Vent 7ninimu.m

Sol 1 cm (moyennes sur u.ne demi-heurs) (4s)

9 niai 48,2 27,6 $6 1,6 28 juin 47,9 21,3 0 3,3 29 juin 46,l 28,l 8.3 4.2 30 juin 4,5,6 28,3 779 4,5 3 juillet 283 46,9 6,4. Al

Les calculs de H et de Q-S ont porté sur des périodes succ.essives d’une demi-heure. Les résultats sont indiqués sur la figure (3).

Sans coïncider exactement, les points figuratifs des deux estimations sont proches : H calculé est en gén&al un peu supérieur en milieu de journée, alors que c’est le contraire au début et à la fin de la journée.

Il nous paraît illusoire de vouloir interpréter ces écarts qui peuvent provenir de la mesure de S. du calcul effectué avec des moyennes de AB, et U2eo, des erreurs expérimentales ou de la méthode utilisée.

Les totaux journaliers sont :

Jour Q-S H calculé Ecart cal cm-~ cal cm-”

9 mai 169 157 12 28 juin 202 191 11 29 ;uin 21 3 201 12 30 juin 192 187 5

3 juillet 206 195 11

La eomparaison peut etre considérée comme satisfaisante.

Cuh. O.R.S.T.O.M., sér. Hxdrol., vol. XVIII, no 1, 1981 13

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(Ch.) Riou et (R.) Chartier

2.8. CONCLUSION

Dans la première partie de cet article, nous avons exposé les bases théoriques d’une formulation du flux de chaleur convective qui conduit à une double simplification à la fois dans le dispositif expérimental et dans la pra- tique des calculs.

Cette simplification devrait tenter de nombreux utilisateurs, car l’expérience montre que les mesures sont faciles à mettre en œuvre, se réduisant pour le flux de chaleur à enregistrer les écarts de la température et de la yitesse du vent entre deux niveaux au-dessus de la surface d’échange étudiée.

Dans une deuxième partie, nous avons utilisé cette approche dans un cas particulier avec comme seuls éléments la vitesse du vent à 2 m, la température de l’air à un niveau de référence, ici de 181 cm, et la température de la surface. Ces trois éléments peuvent être réunis quand on dispose de données en thermographie infra-rouge et qu’on les couple avec des mesures traditionnelles au sol.

Une vérification expérimentale du calcul du flux de chaleur a été rendue possible par l’absence d’évaporation notable pendant les mesures, et le résultat est positif.

Actuellement la méthode sous la forme décrite dans la première partie est utilisée systématiquement sur la station de Tunis-Mornag.

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14 Cah. O.R.S.T.O.M., ~3. Hydrol., rd. XVIII, no 1, f981